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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Finances nationales

Fascicule 7 - Témoignages


OTTAWA, le mardi 8 février 2005

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui à 9 h 30 pour étudier le Budget principal des dépenses déposé au Parlement pour l'exercice se terminant le 31 mars 2005.

Le sénateur Donald H. Oliver (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Je rappelle aux honorables sénateurs que notre comité examine les questions de la reddition de comptes, de la transparence et des dépenses publiques, soit directement en examinant le budget, ou indirectement, en étudiant des projets de loi.

[Français]

Le mercredi 20 octobre 2004, notre comité a été autorisé à étudier afin d'en faire rapport, les dépenses projetées dans le Budget principal des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2005.

[Traduction]

Cette semaine, nous entendons plusieurs hauts fonctionnaires du Parlement. Nous avons déjà entendu la vérificatrice générale. Nous savons que certains de ces hauts fonctionnaires comparaissent régulièrement devant d'autres comités du Sénat ou pour faire rapport de l'exécution de leur mandat et de leurs programmes. Cependant, notre comité s'intéresse aux questions d'argent. Nous sommes ici pour étudier le Budget principal des dépenses et l'affectation des fonds.

Nous avons le plaisir ce matin de recevoir M. Kingsley, le directeur général des élections.

[Français]

M. Kingsley a été nommé directeur général d'Élections Canada en février 1990. Il a assumé la responsabilité de l'administration électorale pour les scrutins fédéraux, le référendum de 1992, les élections générales de 1993, 1997 et 2000, ainsi que de nombreuses élections partielles.

[Traduction]

À titre de directeur général des élections, M. Kingsley a présidé à l'établissement du Registre national des électeurs — la liste permanente des électeurs — et à l'introduction de l'informatique dans tous les secteurs de l'administration électorale, de la géocartographie numérique à la gestion des bureaux locaux et aux communications avec ceux-ci.

Honorables sénateurs, nous voudrons sans doute interroger M. Kingsley au sujet des dépenses, des coûts, des prévisions budgétaires et de la façon dont l'argent des contribuables est dépensé.

Monsieur Kingsley, à vous la parole.

M. Jean-Pierre Kingsley, directeur général des élections, Élections Canada : Honorables sénateurs, merci de me donner l'occasion de donner à votre comité tous les renseignements qu'il souhaite dans son examen de l'utilisation optimale de l'argent des contribuables.

Je suis heureux de comparaître devant vous pour discuter du Budget des dépenses 2004-2005 de mon Bureau. Je suis accompagné de Mme Diane Davidson, sous-directrice générale des élections et première conseillère juridique, et de Mme Janice Vézina, directrice principale du Financement des élections et des Services intégrés.

Je vais d'abord présenter mon Bureau et les bases de son financement. En second lieu, je tracerai les grandes lignes de notre Budget des dépenses 2004-2005 — en particulier le coût du Registre national des électeurs et le coût de la 38e élection générale. En dernier lieu, j'aimerais informer le comité des vérifications des activités de mon Bureau menées par le Bureau du vérificateur général du Canada, sujet qui vous intéresse particulièrement.

Comme le président l'a mentionné, le directeur général des élections est nommé par résolution de la Chambre des communes et ne peut être révoqué que pour un motif grave, sur adresse conjointe du Sénat et de la Chambre des communes, fait important. Soit dit en passant, cette résolution a été adoptée à l'unanimité pour les cinq personnes, y compris moi-même, qui jusqu'à maintenant ont occupé ce poste.

Contrairement aux autres hauts fonctionnaires du Parlement, le directeur général des élections exerce ses fonctions jusqu'à l'âge de 65 ans, sauf s'il est révoqué, ce qui ne s'est pas produit jusqu'à maintenant.

Le directeur général des élections dirige et supervise la conduite des élections, et assume les fonctions nécessaires à l'administration de la Loi électorale du Canada. Ce mandat se traduit par les trois résultats stratégiques décrits dans notre Rapport sur les plans et les priorités 2004-2005. Premièrement, conduire des élections générales, des élections partielles et des référendums fédéraux et administrer les dispositions sur le financement politique — ce qui n'est pas une mince tâche. Deuxièmement, atteindre et maintenir un état de préparation aux scrutins — ce qui est complexe. Troisièmement, offrir des programmes d'éducation et d'informations publics de qualité et en temps opportun, en particulier à ceux qui sont le plus susceptibles d'éprouver des difficultés à exercer leurs droits démocratiques. Cette dernière phrase est presque tirée textuellement de la loi.

Les tâches du directeur général des élections sont devenues plus nombreuses et complexes avec le temps. Le titulaire administre la Loi électorale du Canada, la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales et la Loi référendaire. Deux comités différents de la Chambre des communes ont étudié les fonctions que nous confère la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales, au cours du dernier exercice.

Élections Canada est responsable de tous les aspects de la conduite des scrutins. En plus des trois résultats stratégiques que j'ai mentionnés précédemment, mon Bureau a également la grande responsabilité suivante. Premièrement, il doit veiller à l'inscription sur la liste électorale des citoyens canadiens habilités à voter, par la mise à jour continue du Registre national des électeurs et la révision des listes en période électorale. Deuxièmement, le Bureau doit surveiller l'application des règles sur le financement des entités politiques.

Mon Bureau a toujours maintenu et ne cesse d'améliorer son professionnalisme dans tous ces domaines.

Par ailleurs, le directeur général des élections nomme l'arbitre en matière de radiodiffusion, qui répartit le temps d'antenne gratuit et payant entre les partis. C'est une fonction capitale en ce qui concerne la Loi référendaire, comme dans le cas des autres lois, mais on a tendance à oublier la Loi référendaire.

Le commissaire aux élections fédérales fait enquête sur les allégations d'infraction à la loi et engage des poursuites, au besoin. Il s'agit là d'une caractéristique qui n'existe dans aucun autre pays du monde : le commissaire, nommé par le directeur général des élections, intente des poursuites devant les tribunaux.

Deux autorisations budgétaires financent les activités du Bureau du directeur général des élections. C'est une disposition singulière qui s'applique au directeur général des élections. La première est un crédit administratif annuel, appelé crédit 25, affecté aux salaires des employés permanents. C'est le Conseil du Trésor qui détermine le niveau de financement du crédit 25. Nous avons bien pesé nos mots : cet argent est affecté aux salaires des employés permanents.

Le crédit 25 se chiffre à 13,2 millions de dollars pour environ 210 employés à temps plein. Pour couvrir le salaire de 120 employés permanents de plus, mon Bureau a obtenu une augmentation de 5,6 millions de dollars dans le Budget supplémentaire des dépenses (A) 2004-2005. Ces fonds additionnels servent à améliorer continuellement nos services entre les scrutins et à mettre en œuvre les changements apportés par le projet de loi C-24 sur le financement politique. Il s'agit de changements majeurs.

La deuxième autorisation budgétaire est prévue par la loi et prélevée directement sur le Trésor. Le montant varie d'un exercice à l'autre, selon les activités que mon Bureau doit exécuter en application de la loi, notamment les élections partielles, les référendums et le redécoupage des circonscriptions électorales tous les 10 ans. Ce montant couvre également deux autres éléments prévus par la loi. Le premier, très peu important, est le salaire du directeur général des élections et le deuxième, les régimes d'avantages sociaux des employés.

Aucun autre haut fonctionnaire du Parlement ne possède cette autorisation législative, qui a été établie en grande partie parce que la date de l'élection n'est pas connue d'avance et qu'on ne peut pas facilement prévoir les crédits annuels requis. En outre, pour que le processus électoral soit efficace, équitable et impartial, il est essentiel que le contrôle des ressources financières soit à l'abri du pouvoir exécutif, d'où la nécessité de cette autorisation. L'autorisation législative permet donc à Élections Canada d'engager des dépenses sans devoir s'adresser au Parlement, bien que le Conseil du Trésor présente nos prévisions budgétaires et fasse rapport de nos dépenses réelles au Parlement. Je comparais chaque année à ce sujet devant le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Je serai heureux de comparaître devant vous au moment où votre comité le jugera bon, à ce sujet ou au sujet de toute autre question.

Notre budget 2004-2005 au titre de toutes les autorisations législatives est estimé à 37 millions de dollars, pour un budget total d'un peu plus de 50 millions de dollars.

[Français]

Les principaux postes de notre Budget des dépenses 2004-2005, selon le crédit 25 et les autorisations législatives, comprennent : 9,1 millions de dollars pour les programmes de technologies de l'information; 3,9 millions de dollars pour les activités de préparation aux scrutins; 2,8 millions pour les programmes d'avantages sociaux; 2,4 millions de dollars pour les programmes de géographie électorale; 2,3 millions de dollars pour les programmes continus d'éducation et d'information du public, dont je parlais tantôt; 7,5 millions de dollars pour d'autres frais permanents, principalement les salaires, la formation, les déplacements et la location d'équipement et de locaux — ce sont les salaires des personnes qui ne sont pas à temps plein; et 6 millions de dollars pour l'allocation aux partis politiques admissibles. Cette allocation trimestrielle, nouvellement introduite dans la loi, a été payée en janvier 2004 en un seul versement pour faciliter la transition vers les partis politiques. En dernier lieu, 6,2 millions de dollars pour le Registre national des électeurs.

On estime que le registre contenait 95 p. 100 des électeurs qui étaient inscrits sur les listes préliminaires, donc au début de l'élection, à la 38e élection générale. Le 25 février dernier, j'ai présenté au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles les économies réalisées grâce au Registre national des électeurs. Présentement, les économies sont estimées à 31 millions de dollars aux échelons provincial et municipal, l'utilisation de la liste fédérale, en plus de 60 millions de dollars nets à l'échelon fédéral. Si l'on ajoute à ces économies celle de 11 millions de dollars prévus en Colombie-Britannique pour le prochain scrutin, les sommes économisées grâce au Registre national des électeurs dépasse à ce jour les 100 millions de dollars. À chaque élection, il y a une augmentation de 30 millions de dollars nets à rajouter à ces économies, grâce à l'utilisation du Registre national des électeurs.

Nos budgets des dépenses visent à ce que nous restions toujours prêts à tenir un scrutin, mais on ne peut prédire la date de déclenchement. Lorsque nous avons préparé notre Budget des dépenses 2004-2005, nous ne savions pas qu'une élection serait déclenchée le 23 mai 2004. Par conséquent, ce document ne comprend pas les coûts de la 38e élection générale.

Le coût de cette élection est estimé à 221 millions de dollars, auxquels doit s'ajouter une somme de 58 millions de dollars versés aux partis enregistrés et aux candidats en remboursement de leurs dépenses électorales, un remboursement de 13 millions de dollars supérieur à nos prévisions.

Nos estimations initiales tenaient compte des changements apportés par le projet de loi C-24, mais il n'était pas possible de prédire avec exactitude l'impact de tous ces changements sur les dépenses liées à l'élection générale de 2004.

Enfin, je tiens à signaler que la vérificatrice générale du Canada a récemment terminé une vérification des opérations des états financiers de mon bureau au 31 mars 2004. Vous avez trouvé j'espère, en annexe de mes notes d'allocution, un exemplaire de son rapport qui a été soumis au Président de la Chambre des communes. À mon invitation, la vérificatrice générale réalise actuellement une vérification de rendement de mon bureau relativement au processus électoral fédéral. Les résultats feront partie du rapport de novembre 2005 de la vérificatrice générale.

Merci encore une fois de nous avoir invités à comparaître devant vous. Nous sommes maintenant prêts à répondre à vos questions au meilleur de notre connaissance.

[Traduction]

Le président : Ma question porte sur les économies engendrées par le registre. Vous dites qu'il a permis de faire des économies de 31 millions de dollars à l'échelle provinciale et municipale et de 60 millions de dollars à l'échelle fédérale. Comment avez-vous évalué l'efficacité de cette mesure? Comment êtes-vous arrivé à ces chiffres? Avez-vous confié cette tâche à des comptables de l'extérieur du gouvernement? Quelles méthodes ont été utilisées?

M. Kingsley : Je vais demander à Mme Vézina de vous répondre.

Mme Janice Vézina, directrice principale, Financement des élections et des Services intégrés, Élections Canada : Au moment de la création du registre, nous avons préparé une analyse de rentabilité afin d'informer le Parlement des économies que le registre pourrait entraîner. Dans notre analyse, nous avons envisagé un horizon d'environ 30 ans à partir du moment où le projet de loi serait déposé, pour déterminer quelles seraient les économies potentielles. C'est sur cette base que nous avons déterminé la rentabilité du registre national des électeurs. C'est l'analyse de rentabilité initiale effectuée au moment du dépôt du projet de loi devant le Parlement.

Le sénateur Ringuette : Je suis heureuse que nous parlions du registre national, parce que je n'ai jamais entendu de commentaires favorables au sujet de cette liste électorale de la part de mes électeurs. Au cours des dernières élections tenues au mois de juin, beaucoup d'électeurs ne figuraient pas sur la liste dans ma région. On m'a parlé des habitants d'un village qui ont dû aller voter dans un village voisin parce qu'ils avaient été inscrits sur la liste dans le mauvais village. Je n'ai jamais vu autant d'électeurs mécontents du fait que leur nom ne figurait pas sur la bonne liste. Et ce n'était pas parce qu'ils avaient déménagé parce que beaucoup d'entre eux habitaient au même endroit depuis 20 ou 30 ans.

Je m'interroge sur le processus. La présence d'erreurs sur la liste permanente pourra amener des gens qui ont toujours voté par le passé à ne pas voter — des gens qui normalement se présenteraient au bureau de scrutin le jour du vote pour exercer leur droit démocratique. Je suis persuadée que le système actuel décourage certaines personnes de voter. J'en suis absolument convaincue.

Le président : Monsieur Kingsley, êtes-vous d'accord avec ces propos?

M. Kingsley : Non, pas du tout, monsieur le président. Permettez-moi d'expliquer pourquoi.

M. Kingsley : Aux dernières élections, le registre a donné de meilleurs résultats que jamais auparavant. Il y a eu sensiblement moins de plaintes d'électeurs qu'à toute autre élection passée. Nous nous sommes servis de la liste pour les élections générales de 2000 et également, en 1997. Dans ce cas, même si nous utilisions le registre pour la première fois, nous avions procédé à un recensement effectué de porte en porte. C'était effectivement la deuxième fois et nous avions beaucoup amélioré la liste; nous savons aussi que nous pouvons encore l'améliorer.

Permettez-moi d'expliquer la cause des problèmes qui se sont manifestés aux dernières élections. Les membres d'un comité de la Chambre des communes, le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, m'en ont parlé. J'ai écrit à tous les députés pour leur demander si le système avait posé des difficultés; nous avons reçu environ 35 lettres de plaintes, dont la plupart portaient sur l'emplacement des bureaux de scrutin et pas sur la liste des électeurs.

La liste a posé des difficultés surtout dans les secteurs ruraux, à cause du redécoupage électoral; lorsque les limites de circonscription traversaient des zones rurales, nous n'avions pas terminé la géolocalisation des adresses. La situation ne sera tout à fait réglée que lorsque le codage du système 911 sera terminé dans certaines provinces comme le Nouveau- Brunswick notamment. Je suppose que le problème sera réglé d'ici 10 ans partout au Canada et que nous réussirons à géolocaliser plus de 93 p. 100 des adresses, ce qui signifie que nous saurons exactement où l'adresse est située sur la carte, même si les limites des circonscriptions électorales changent.

Cela a entraîné une autre difficulté à certains endroits; à cause du redécoupage électoral, certains bureaux de vote se sont trouvés à des endroits très bizarres et les gens ont dû voter à un autre bureau. Les directeurs du scrutin se penchent actuellement sur ce problème par suite de plaintes que nous avons reçues.

Il faut savoir que lorsqu'on passe de porte en porte, on obtient un résultat de 95 p. 100. Il y a toujours 5 p. 100 des électeurs qui ne s'inscriront pas, même si on mettait le feu à leur maison. Quoi qu'on fasse, ils ne s'inscriront pas sur la liste. Nous l'avons constaté à maintes reprises au Canada. Dans 82 p. 100 des cas, les électeurs se trouvaient à la bonne adresse, ce qui revient à un écart de 13 p. 100. Il y a des gens qui avaient déménagé et qui ont été inscrits sur le registre.

Nous n'avons pu faire livrer de courrier à 100 000 adresses. Je sais que cela peut sembler beaucoup, mais il faut savoir qu'il y a 13 millions d'adresses. Même le secteur privé considère ces résultats comme excellents. Au fur et à mesure que le codage du système 911 avance dans l'ensemble du pays, le nombre d'adresses que nous rejoignons diminue.

Le président : Le problème se pose-t-il dans une région en particulier?

M. Kingsley : Il se pose dans les régions rurales.

Le président : Par région ou par province?

M. Kingsley : Nous connaissons les résultats par région et par province. Le problème existe surtout dans les régions rurales, les régions isolées parce que le Canada n'a pas fini d'établir un réseau 911 dans ces secteurs; c'est ce réseau qui permet aux ambulanciers de savoir exactement où ils doivent se rendre. Le réseau existe déjà dans les villes, qui comptent pour plus de 75 p. 100 des adresses des électeurs.

Le sénateur Ringuette : Je ne suis pas d'accord avec vous. Je suis originaire du Nouveau-Brunswick et c'est la première province où le système 911 a été établi absolument partout. Et nous avons reçu beaucoup de plaintes malgré cela. Je maintiens ce que mes électeurs m'ont dit. Quand ils se présentaient à leur bureau de vote, ils constataient qu'ils n'étaient pas sur la liste. La plupart d'entre eux votent depuis 20 ou 25 ans. Quand ils se retrouvent dans cette situation, ils sont facilement vexés. Ils se disent : « Si mon nom n'est pas sur la liste, c'est qu'on ne veut pas que je vote. Très bien, je rentre chez moi. » Ils ne font pas le tour des bureaux de vote pour savoir où ils sont inscrits, bien que certains se soient rendus dans une autre ville pour voter. Je maintiens ce que j'ai dit. Le Registre national des électeurs est un facteur de dissuasion et contribue à la faible participation des électeurs inscrits sur la liste.

Monsieur Kingsley, vous souvenez-vous du coût des élections de 1993?

M. Kingsley : Non. Je me souviens que le recensement de porte en porte a coûté environ 65 millions de dollars, mais je ne me rappelle pas du coût total.

Le sénateur Ringuette : Je veux dire le coût des élections générales.

M. Kingsley : Le coût total? Mme Vézina pourra faire les recherches pour répondre à votre question. Permettez-moi de préciser que les électeurs peuvent s'inscrire le jour même du vote au Canada. Si votre nom ne figure pas sur la liste et que vous vous présentez à un bureau de scrutin, on vous inscrira immédiatement. C'est ce qui se fait de mieux en guise de mesure de sécurité pour tout système fondé sur une liste permanente.

Par ailleurs, nous passons encore de porte en porte. Nous le faisons pour 10 p. 100 des maisons où les gens ont déménagé. En ce qui concerne toute participation, sauf erreur, environ 280 000 personnes par tranche d'un million d'électeurs se sont inscrites de cette façon. Nous avons obtenu ce taux très faible même si nous sommes allés frapper à la porte de ces gens. Si nous faisions le recensement de porte en porte dans tout le Canada et obtenions ce très faible taux, votre comité me supplierait de dresser une liste permanente des électeurs.

Le sénateur Ringuette : Pouvez-vous me dire, en gros, combien les élections de 1993 ont coûté?

Mme Vézina : Environ 200 millions de dollars. Cela tient compte d'un rajustement, car nous avions réutilisé les listes d'électeurs dressées pour le référendum dans toutes les provinces sauf le Québec. Cela a permis certaines économies. Si on tient compte du coût de ce facteur, si nous avions procédé à un recensement complet, ces coûts auraient été d'environ 200 millions de dollars.

Le sénateur Ringuette : Donc, les élections de 1993 ont coûté 200 millions de dollars. Celles de 2004 ont coûté 221 millions de dollars. En 1993, le système se fondait intégralement sur le recensement de porte en porte, tandis qu'en 2003, nous avions un système mixte — d'après ce que vous avez dit tout à l'heure — fondé sur l'utilisation de la liste permanente des électeurs et le recours dans certains cas au recensement de porte en porte. Au bout du compte, en dollars réels, il n'y a pas beaucoup de différence puisque les coûts sont passés de 200 à 221 millions de dollars.

Le président : Je voudrais demander à M. Kingsley d'expliquer. Il y a toute une différence de temps. Il y a sans doute des différences administratives. Pourriez-vous nous expliquer les différences?

Mme Vézina : Les différences tiennent surtout à l'inflation, le coût des augmentations depuis 1993. De plus, l'augmentation de la population augmente le coût des élections.

Nous avons eu une augmentation du nombre de circonscriptions électorales; il y a un nombre de coûts fixes qui s'accumulent pour chaque circonscription. En 1993, nous en avions 295; aux dernières élections, 308, soit une augmentation de 13.

De plus, nous avons eu des changements législatifs qui ont fait augmenter le coût des élections. L'autre élément est l'introduction de la technologie. Cela a été fait en partie en réponse à la vérification du vérificateur général. En 1989, une vérification complète a formulé un certain nombre de recommandations liées à l'absence d'introduction de technologie. Cela a demandé un certain nombre d'années à faire. Cela, en soi, coûte cher à entretenir.

Le sénateur Ringuette : Ce que vous dites, c'est que la différence de coût s'explique par le taux d'inflation et la population, et le fait que nous avons 13 circonscriptions fédérales de plus en 2004 qu'en 1993. Je regarde les chiffres. C'est encore à peu près 800 000 $ par circonscription électorale pour avoir des élections, qu'il y ait un registre permanent ou pas.

Je sais que mes collègues ont des questions, merci.

Le président : Monsieur Kingsley, quand vous avez fait votre exposé, vous avez dit que l'un des pouvoirs que vous avez est de nommer le commissaire aux élections fédérales qui s'occupe d'application de la loi. Le budget du commissaire émarge-t-il au vôtre? Dans l'affirmative, quel est son budget pour le dernier exercice financier et quel est le budget projeté? Pourriez-vous nous dire aussi combien de plaintes sont allées devant les tribunaux et à quel coût? Si vous n'avez pas les chiffres sous la main, vous pourrez nous les communiquer plus tard mais j'aimerais avoir une idée du budget du commissaire aux élections fédérales. Pourriez-vous nous donner une idée générale et nous faire parvenir l'information détaillée?

M. Kingsley : Certainement. Le budget est intégralement compris dans le mien. Nous pouvons essayer de déterminer les sommes reliées aux activités de son bureau. L'une d'entre vous est-elle prête à répondre ou préférez-vous parler du nombre de plaintes?

Mme Diane Davidson, sous-directrice générale des élections et première conseillère juridique, Élections Canada : Je peux répondre à la question concernant le nombre de plaintes. De façon régulière, je peux dire que nous recevons environ 600 plaintes par année concernant des infractions liées à la loi sur le financement des campagnes électorales, etc.

Pour les élections, nous avons reçu plus de 400 plaintes. Je n'ai pas le chiffre d'actions en justice, mais nous pouvons le fournir au comité.

Le président : Ce sont surtout les coûts qui m'intéressent.

Deuxièmement, monsieur Kingsley, vous avez parlé du projet de loi C-24. Dans votre exposé, vous avez dit que le C- 24 avait entraîné des changements en profondeur et des coûts majeurs. Pouvez-vous nous donner une idée de ces coûts supplémentaires pour ce qui vous concerne, occasionnés par ce texte de loi?

M. Kingsley : Je peux vous les décrire. Il faut se rappeler que c'est une loi qui a changé tous les fondements du financement et éliminé, à toutes fins utiles, ou réduit de façon considérable, les dons des entreprises et des syndicats aux partis politiques et aux candidats. Il a aussi avancé l'idée que les associations de circonscription peuvent s'inscrire auprès d'Élections Canada.

Le président : Pourquoi cela vous occasionne-t-il des coûts supplémentaires?

M. Kingsley : Auparavant, nous n'enregistrions pas les associations de circonscription. Il faut dorénavant recevoir des demandes. Je vais demander à Mme Vézina de vous donner les chiffres.

Mme Vézina : Nous avions estimé les coûts majorés constants attribuables à la mise en œuvre du projet de loi C-24 à l'interne, à Élections Canada, à quelque 3 millions de dollars par année. Nous avons également subi des coûts ponctuels d'environ 1,45 million de dollars pour mettre en œuvre le projet de loi, c'est-à-dire développer des systèmes, pouvoir publier les résultats sur le site Web, etc. À cela s'ajoute l'allocation trimestrielle, qui revient à 1,75 $ le vote pour chaque parti admissible, ce qui représente habituellement 23 millions par année. Ces 23 millions figurent dorénavant à notre budget annuel. C'est un des principaux facteurs de coût.

De plus, en ce qui concerne le coût des élections, le projet de loi C-24 fait augmenter les coûts étant donné que le remboursement aux candidats est passé de 50 à 60 p. 100 des dépenses admissibles. Pour ce qui est des partis politiques, le remboursement des dépenses électorales admissibles est passé de 22,5 p. 100 à 60 p. 100 aux dernières élections. Cela baissera à 50 p. 100 lors des futures élections, mais pour les dernières, il était à 60 p. 100. Nous avons constaté une augmentation considérable des fonds qui vont aux entités politiques.

[Français]

Le sénateur Ferretti Barth : Lorsque vous avez été nommé directeur général des élections du Canada, vous avez fait des changements très profonds dans cette institution. Le but était de rejoindre les Autochtones et d'autres groupes minoritaires. Nous avons toujours pensé qu'ils ne s'intéressaient pas aux élections au pays.

Avec ces nouvelles mesures que vous avez adoptées, avez-vous noté que les Autochtones se sont davantages intéressés aux élections? Y a-t-il eu des difficultés pour les amener à voter, pour les convaincre? Percevez-vous cela comme un gaspillage de temps et d'énergie? Croyez-vous que ces gens sont difficiles à convaincre à exercer leur droit primordial de voter?

M. Kingsley : Nous avons fait des efforts concernant les minorités du pays et les jeunes également pour tenter de les rejoindre. La loi dit que je dois tenter de rejoindre les groupes qui ont une difficulté particulière à participer au processus électoral. En ce qui a trait aux jeunes, depuis la dernière élection générale, soit celle de 2000, nous avons pu nous apercevoir que c'était les jeunes qui boudaient les urnes, essentiellement. Ce n'était pas les Canadiens qui avaient l'habitude de voter qui n'allaient plus voter.

En 2004 il y en a eu peut-être un peu plus qui se sont abstenus de voter pour toute sorte de raisons. Lors de la dernière campagne électorale, on a remarqué qu'un plus grand nombre d'émissions populaires télévisées avaient tendance â mousser la présence des jeunes aux élections qu'auparavant. Cette recrudescence a d'ailleurs eu un certain retentissement auprès des jeunes. Nous avons pu suivre le taux de participation des jeunes lors des dernières élections. Environ 37 p. 100 de jeunes se sont présentés aux urnes pour une première fois. Ce taux est moindre, en théorie, de 50 p. 100 par rapport à la participation aux élections il y a une génération.

Nous n'avons donc pas terminé d'approfondir le sujet et nous devons continuer. Il est impossible qu'un directeur général des élections puisse perdre espoir de faire augmenter le taux de participation. Cela irait à l'encontre de la nature du poste et justifierait sa démission immédiate.

En ce qui concerne les Autochtones, nous avons travaillé avec les quatre principaux groupes d'Autochtones. J'ai eu l'occasion de rencontrer en particulier les jeunes Autochtones et j'ai toutes les raisons d'espérer que leur participation augmentera au sein des quatre groupes d'Autochtones. J'aimerais particulièrement souligner au comité qu'une résolution fut adoptée récemment par l'Assemblée des Premières nations, avec le chef Phil Fontaine. Cette résolution autorise l'Assemblée des Premières nations à travailler avec Élections Canada pour mettre sur pied des programmes de formation et d'information. Nous tenterons de le faire pour les prochaines élections générales. Je rencontrerai d'ailleurs le chef Fontaine à 14 h 30 cet après-midi pour continuer de donner suite â cette initiative.

On reconnaît manifestement chez plusieurs Autochtones l'importance de voir davantage d'Autochtones à la Chambre des communes pour faire valoir leurs droits. L'essence d'une démocratie est le fait que les gens puissent se retrouver à la Chambre des communes. Les citoyens voient leurs aspirations par le truchement des élus.

En ce qui concerne les groupes minoritaires, nous avons fait une campagne publicitaire majeure pour tenter de les rejoindre et j'ai l'intention de déployer des efforts plus importants pour les prochaines élections. Je pourrais vous montrer les journaux publiés dans une langue autre que le français et l'anglais s'adressant aux groupes minoritaires du pays dans lesquels nous avons fait de la publicité dans une trentaine de langues. Nos brochures sont disponibles en langues autochtones et dans les langues des minorités. Notre publicité apparaît même sur les postes qui leur sont dédiés et où ils se retrouvent. Nous avons donc déployé des efforts majeurs en ce sens qui, j'en suis convaincu, porteront fruit avec le temps.

Toute la question du taux de participation est complexe, majeure et on ne peut se permettre d'abandonner nos efforts et baisser le drapeau canadien face à ce phénomène. À mon avis, les démarches que nous avons entamées commencent à porter fruit.

Le sénateur Ferretti Barth : Je représente plus de 14 000 personnes âgées sur l'île de Montréal et dans les banlieues. On n'a remarqué personne qui ait offert aux personnes âgées de les conduire ou de les accompagner pour se rendre voter. Les groupes culturels, surtout les plus récent arrivants, deviennent citoyens canadiens parce que le ministère de Citoyenneté et de l'Immigration les encourage à le faire. Au moment des élections, aucun organisme ne s'est coordonné ou organisé pour aller assister ces personnes âgées des communautés culturelles. Je trouve épouvantable que vous dépensiez pour des choses qui vous sont prioritaires sans vous soucier de ces personnes âgées qui pourtant sont tout à fait prioritaires. Ces gens représentent une masse d'individus qui, s'ils sont bien informés et appuyés, iront voter. Je vous demande de considérer cette question des personnes âgées.

M. Kingsley : Ce sont les personnes âgées qui votent le plus au Canada. Nous établissons des bureaux de vote itinérants partout où il est possible de le faire. Une personne qui ne veut pas sortir peut appeler l'administration électorale et on fera en sorte qu'elle vote chez elle.

Le sénateur Ferretti Barth : Il faut approcher les communautés et distribuer des documents informatifs en plusieurs langues. Il y a 200 itinérants que nous desservons chaque mois. Personne ne va voter. Pourquoi? Parce que votre institution ne prend pas en main cette situation sociale et ne va pas rencontrer ces gens-là.

M. Kingsley : Je prends tout cela en considération.

Le sénateur Ferretti Barth : Plusieurs personnes sont allées en Ukraine lors des dernières élections. Est-il vrai qu'Élections Canada participe à des élections dans des pays étrangers?

M. Kingsley : Oui.

Le sénateur Ferretti Barth : Qui établit la liste des personnes qui vont faire partie de ces délégations et quels sont les coûts reliés à ces déplacements à l'étranger?

M. Kingsley : Ces décisions ne sont pas prises par Élections Canada. Ce n'est pas moi qui ai l'argent et qui le dépense. C'est l'ACDI ou un organisme qui s'appelle CANADEM. Élections Canada n'a rien à voir avec cela.

[Traduction]

Le sénateur Murray : Je ne m'étais pas attardé sur ceci jusqu'à ce que je lise votre déclaration d'aujourd'hui, mais je vois que vous occuperez votre charge jusqu'à l'âge de 65 ans. Il vous reste encore 25 ans à faire?

M. Kingsley : C'est à peu près cela. Vous êtes adorable.

Le sénateur Murray : Je vois que vous êtes allé en Jordanie récemment au sujet des élections en Irak. Vous n'êtes pas tenté de déménager dans l'un de ces pays pour accepter cette mission de façon permanente, n'est-ce pas?

M. Kingsley : Je vais résister à la tentation.

Le sénateur Murray : Très bien. Quand je produis ma déclaration de revenu chaque année, je coche la case qui autorise Revenu Canada à communiquer mon nom et mon adresse à Élections Canada. Je ne voudrais pas que vous perdiez ma trace au cas où un parti politique que je voudrais appuyer verrait le jour.

Quelle place occupent les déclarations de revenu par rapport aux autres sources d'information dont vous disposez?

M. Kingsley : Les déclarations de revenu ont un taux de réponse de 84 p. 100; autrement dit, 84 p. 100 des contribuables disent oui.

Le sénateur Murray : S'agissant de la liste totale des électeurs, quelle proportion des noms sur la liste provient des déclarations de revenu par opposition à d'autres sources provinciales et fédérales? Le savez-vous?

M. Kingsley : Je le sais, mais je n'arrive pas à m'en souvenir. Je communiquerai le chiffre exact au comité par écrit, la comparaison entre les deux.

Le sénateur Murray : Pour les besoins du compte rendu, parlez-nous des autres sources.

M. Kingsley : Les autres sources sont les services d'immatriculation automobile des provinces. Neuf y participent; le Manitoba ne le fait pas.

Le sénateur Murray : Par « faire », vous voulez dire communiquer l'information?

M. Kingsley : Communiquer l'information, oui. Les territoires le font. Il y a aussi les registres d'état civil des personnes décédées. Dans ce cas, nous avons toutes les provinces et tous les territoires, et le Manitoba y participe. Nous avons aussi le registre des déménagements du bureau de poste.

Le sénateur Murray : La Société canadienne des postes vous communique l'information?

M. Kingsley : Oui, nous la lui achetons.

Le sénateur Murray : Cette information est-elle offerte à la vente par la Société canadienne des postes à d'autres à l'extérieur du gouvernement?

M. Kingsley : Non, sauf autorisation expresse. C'est la loi qui le stipule. En ce qui concerne ce qui nous est communiqué, ceux qui achètent le service doivent dire qu'ils veulent que l'information nous soit communiquée. Il y a une case de consentement aussi pour Élections Canada.

Le sénateur Murray : D'autres sources fédérales?

M. Kingsley : Je ne me souviens pas d'autres sources fédérales. Citoyenneté et Immigration Canada nous donne de l'information sur les nouveaux citoyens. Ils doivent être d'accord et le pourcentage est supérieur à 90 p. 100.

Le sénateur Murray : Il serait intéressant de voir, pour ce qui est de la liste complète des électeurs, quelle proportion des noms provient de chaque source.

M. Kingsley : Je me ferai un plaisir de vous le dire.

Le sénateur Murray : Je n'ai pas la loi sous les yeux, mais je crois comprendre que vous avez le pouvoir de procéder dans certains cas à un recensement de porte en porte. Vous y avez fait allusion dans vos réponses aux questions du sénateur Ringuette. Que dit la disposition de la loi? En fonction de quels critères décidez-vous de le faire et où?

M. Kingsley : La disposition dont vous parlez porte sur ce que l'on appelle la révision ciblée. Ça fait partie du processus de révision. Nous repérons les zones de grande mobilité, les nouveaux lotissements, les résidences d'étudiants. Il y en a une autre que j'appellerai faute de charité les maisons de retraite où, par définition, la mobilité est grande. Nous les repérons avec les directeurs du scrutin, qui envoient ensuite des agents de révision sur-le-champ car nous savons qu'il y aura là de gros changements. S'il s'agit d'un immeuble de rapport en ville, nous savons qu'il y aura de gros changements et nous envoyons des agents de révision.

Le sénateur Murray : Je me souviens avoir employé l'argument — que je vous avais sans doute emprunté — que la liste permanente était importante parce qu'il est très difficile de trouver des recenseurs et, une fois qu'on en a trouvé, de leur faire visiter ces immenses immeubles de rapport urbains. C'était une des raisons pour abandonner le recensement de porte en porte, si je me souviens bien.

M. Kingsley : Le problème existe toujours. Dans certains endroits, même si nous faisons de la révision ciblée, ce n'est pas toujours facile de le faire.

Le sénateur Murray : Quelqu'un a dit que cela soulève peut-être un problème en vertu de la Charte. Les électeurs qui n'ont pas fait l'objet d'une révision ciblée pourraient affirmer que leurs droits de figurer sur la liste sont violés par votre sélection et que la disposition contrevient à la Charte. Comprenez-vous ce que je dis?

M. Kingsley : Je comprends et je vais m'autoriser à dire ce que le sénateur Ringuette a dit il y a quelques instants; je ne suis pas de cet avis.

Le sénateur Murray : Dans votre déclaration, vous dites que vous avez obtenu un budget supplémentaire de 5,6 millions en 2004-2005. Cette augmentation couvre les traitements de 120 employés permanents. Au début, vous dites que le crédit 25 était de 13,2 millions pour les traitements d'environ 210 employés à temps plein. Puis vous avez un budget supplémentaire destiné à couvrir les traitements de 120 employés permanents. Vous en avez ajouté 120 à votre effectif, n'est-ce pas?

M. Kingsley : Oui.

Le sénateur Murray : « Ces fonds additionnels servent à améliorer continuellement nos services entre les scrutins », dites-vous, « et à mettre en œuvre les changements apportés par le projet de loi C-24 sur le financement politique ». Les changements au financement des partis politiques expliquent sans doute l'augmentation de l'effectif.

Mme Vézina : Le projet de loi C-24 explique 35 nouveaux postes. Les autres représentent surtout des employés nommés pour une période déterminée à Élections Canada, qui travaillaient à divers projets. Le Conseil du Trésor a modifié sa politique sur les employés à longue période déterminée; après un certain nombre d'années, l'employé obtient un poste à durée indéterminée. Les 85 autres sont dans cette catégorie.

Le sénateur Murray : Dans les rapports que vous publiez de temps à autre, vous mentionnez d'autres secteurs qui, selon vous, devraient être réglementés ou administrés par Élections Canada. Je pense en particulier à la nomination des directeurs du scrutin, qui se fait actuellement par décret du conseil. Vous avez critiqué la qualité de certaines de ces nominations et exprimé l'avis que les choses seraient mieux faites si cela relevait de vous.

Rafraîchissez-moi la mémoire parce que je n'ai pas votre rapport ici. Y a-t-il d'autres secteurs que vous n'avez pas actuellement le pouvoir de réglementer ou d'administrer dont vous voulez vous occuper?

M. Kingsley : Je suis en train de préparer un rapport que je vais déposer au Parlement, aux Communes et au Sénat, qui comportera une série de recommandations sur les améliorations à apporter aux lois pour faciliter leur administration. Je ne dirais pas nécessairement qu'il s'agit de secteurs dont le directeur général des élections ne s'occupe pas et dont il voudrait s'occuper. Il s'agit d'améliorations au processus.

Le sénateur Murray : Dans nos notes d'information, il est question de vos responsabilités et de la loi, puis de l'enregistrement des partis politiques et des tierces parties qui font de la publicité électorale ainsi que des associations électorales de circonscription. Cela désigne tous les partis politiques qui ont une association de circonscription et des candidats à la direction, des candidats à l'investiture des partis enregistrés. C'est une énorme charge pour vous. Je me demande comment ça va et comment vous suivez tout cela. Comment pouvez-vous être sûr de pouvoir assurer une surveillance aussi rigoureuse que vous le devez? Dans une autre vie, il y a vingt-cinq ans, lorsque le sénateur Oliver et moi étions dans le même parti, j'étais président national de la campagne et le sénateur Oliver était mon premier conseiller juridique. Il a non seulement su nous éviter la prison mais tous les deux par la suite avons été appelés au Sénat. Mon impression à moi — il vous le confirmera sans doute — c'est qu'il aurait fallu un conseiller juridique pour chacun des candidats de notre parti dans les 300 circonscriptions. La plupart de ces gens-là étaient, et sont sans doute toujours, des bénévoles. Ils travaillent pro bono. Même si le sénateur Oliver et ses homologues dans les autres partis politiques au niveau national essayaient de dire à ces gens ce qui était attendu d'eux et ce que la loi exigeait, notre impression, c'est que dans une grande mesure ces gens-là gardaient la loi dans le tiroir de leur bureau et la consultait si un problème se posait pour essayer de le résoudre. C'est une description fidèle de vos confrères du barreau, je crois, sénateur. Parle-t-on ici d'une armée de bénévoles dans une multitude de partis politiques? Comment peuvent-ils respecter tous les règlements et exigences relatifs aux courses à la direction et aux courses à l'investiture de leur propre parti dans la circonscription? Réalistement, comment est-ce possible à moins d'embaucher une armée d'inspecteurs si l'on veut que la supervision soit rigoureuse? Qu'en pensez-vous?

M. Kingsley : L'armée, ce sont les 35 personnes dont je parlais et elle fait un travail incroyable. Lors de la dernière réunion du Comité consultatif des partis politiques, nous avons présenté un rapport sur nos réalisations sous le régime du projet de loi C-24 et tous les partis ont convenu qu'il s'agissait d'une mise en œuvre éminemment réussie d'une nouvelle loi de grande envergure. Ils ont enregistré sans difficulté 1 058 associations de circonscription. Il n'y a eu qu'une seule course à la direction jusqu'à présent en vertu des nouvelles règles — pour ce que nous considérons être un grand parti à l'heure actuelle — mais la mise en œuvre s'est faite le plus harmonieusement qui soit. Cela tient en partie au fait que nous mettons à disposition les outils de manière électronique. Dans tous les cas, vous pouvez produire vos documents par voie électronique. Les règles sont aussi apparentes pour tous. Nous avons produit des brochures concernant tout ce qui est exigé. Des programmes de formation ont été organisés et le sont encore. Nous avons même élargi notre programme de formation de sorte que lorsque désormais un parti politique tient un congrès, un programme de formation à proximité sera offert à ceux qui désirent le suivre. Nous avons connu un grand succès.

Le président : Je dois vous demander de mettre fin ici à votre réponse. Il nous reste moins de cinq minutes et deux autres sénateurs veulent vous poser des questions. Notre prochain témoin est déjà arrivé.

Le sénateur Day : Au Sénat, nous percevons autrement le rôle du Sénat par rapport à votre bureau. J'aimerais connaître votre avis. Pensez-vous que nous devrions avoir un rôle à jouer ou non? Je peux vous donner deux exemples pour illustrer mon propos. L'un d'eux a trait à une affaire survenue récemment au Nouveau-Brunswick dans une circonscription ayant fait l'objet d'un redécoupage. La commission créée au Nouveau-Brunswick pour déterminer les limites de la nouvelle circonscription se composait d'un ancien juge en chef du Canada, un avocat très réputé de la province, et d'un autre avocat connu bien au fait des affaires municipales. Ils ont pris une décision en tenant compte de tous les facteurs et je suis sûr qu'ils ont tenu compte de la communauté d'intérêts. Cependant, l'affaire a été portée devant la Cour fédérale et un juge de cette cour siégeant ici même à Ottawa a statué que la commission n'avait pas tenu compte de la communauté d'intérêts.

Le projet de loi déposé pour donner suite au jugement est actuellement à l'étude au Parlement. Il a franchi l'étape de la Chambre des communes et est rendu au Sénat. En tant que sénateurs, avons-nous un rôle particulier dans l'examen de ce projet de loi? Avez-vous réfléchi à la façon de trouver le juste équilibre entre les différents intérêts en cause et de déterminer si on a tenu compte de la communauté d'intérêts? La Chambre des communes s'intéresse particulièrement aux limites des circonscriptions électorales parce que ses membres doivent se faire élire régulièrement. Devraient-ils se soucier davantage de ce facteur? Étant donné que la Chambre a adopté le projet de loi, devrions-nous simplement veiller à ce que ce projet de loi soit conforme aux règles établies ou au contraire nous prononcer sur le bien-fondé de l'affaire?

M. Kingsley : Au Canada, nous avons un système bicaméral. Tant qu'il en sera ainsi, le Sénat a tout autant le droit que la Chambre des communes d'examiner les projets de loi de façon détaillée. L'inverse est également vrai, même si un projet de loi émane du Sénat.

Le sénateur Day : En vertu de la Loi électorale, présentez-vous votre rapport au Sénat comme vous le faites à la Chambre des communes?

M. Kingsley : Je présente mon rapport au Parlement, monsieur.

Le sénateur Day : Comme vous l'avez dit tout à l'heure, vous présentez votre rapport aux Présidents des deux chambres.

M. Kingsley : Oui, je le présente directement aux deux Présidents.

Le sénateur Day : Quand vous avez comparu devant le comité de la Chambre des communes, vous avez eu un échange avec Michel Guimond, l'un des vice-présidents du comité permanent.

Je ne sais pas si vous étiez sarcastique ou si vous parliez sérieusement quand vous avez suggéré que lorsqu'une loi sera déposée, et que viendra le temps de déterminer si vous devez continuer à exercer vos fonctions pour être révoqué, le Sénat ne devrait pas avoir de rôle. J'ai la citation devant moi si vous voulez que je vous rafraîchisse la mémoire.

M. Kingsley : Je la connais par cœur, monsieur.

Le président : Voulez-vous lire la citation, s'il vous plaît?

Le sénateur Day : M. Kingsley s'adressait à Michel Guimond.

Monsieur le président, permettez-moi de vous faire une suggestion. Quand vous adopterez un projet de loi pour permettre au directeur général des élections de nommer et de révoquer les directeurs du scrutin, vous pourriez également modifier la loi pour permettre au directeur général des élections d'être révoqué par un vote de la Chambre des communes seulement. Pourquoi ne pas le faire, si c'est nécessaire pour assurer l'uniformité?

Quelle était votre intention en disant cela?

M. Kingsley : Je voulais rappeler un principe fondamental de notre système de droit. Celui ou celle qui a le pouvoir de nommer doit avoir également le pouvoir de révoquer, de congédier.

Le président : Le Parlement du Canada.

M. Kingsley : Exact.

Je disais au comité que le directeur général des élections devrait avoir le pouvoir de nommer les directeurs du scrutin et également de les congédier.

Le sénateur Day : C'est de cela que parlait mon ami, le sénateur Murray.

M. Kingsley : Oui.

À ce moment-là, le président du comité et, je crois, M. Guimond ont dit, dans ce cas, par souci d'uniformité, et comme vous êtes nommé uniquement par la Chambre des communes, vous devriez ne pouvoir être révoqué que par la Chambre des communes. J'ai répondu que s'il fallait procéder ainsi pour que les directeurs du scrutin relèvent du directeur général des élections, j'étais d'accord, tout en sachant que si la Chambre des communes décidait de procéder de cette façon, la loi devrait être adoptée par le Sénat.

Depuis, j'ai écrit au sénateur Joyal. Je ne sais pas ce qu'il entend faire de ma lettre, mais je ne crois pas qu'elle soit de nature privée. Je lui ai indiqué qu'il faudrait revoir le processus de nomination du directeur général des élections. Le Sénat pourrait peut-être prendre part à cette nomination, qui ne serait plus l'apanage de la Chambre des communes. L'uniformité serait complète.

Le sénateur Day : C'est l'autre façon de garantir l'uniformité.

M. Kingsley : Effectivement, c'est exactement ce que je lui ai dit. Je vous rappelle que lorsque je suis convoqué devant un comité, je ne suis pas informé à l'avance des questions qu'on me posera.

Le président : Je suis heureux que vous ayez pu expliquer cette déclaration ici aujourd'hui parce qu'elle a suscité beaucoup de controverses au Sénat. Elle a vexé plusieurs d'entre nous et je suis heureux que vous ayez eu l'occasion de vous expliquer.

M. Kingsley : Je vous remercie de m'en avoir donné l'occasion.

Le président : Merci, sénateur Day, d'avoir soulevé la question.

Le sénateur Day : Pour terminer, si votre lettre au sénateur Joyal devient publique, pourrions-nous en remettre un exemplaire à M. Guimond pour lui montrer que vous avez un point de vue différent?

M. Kingsley : Je dois rencontrer le sénateur Joyal très bientôt et je lui demanderai si je peux diffuser cette lettre. Je peux même la transmettre au Hill Times.

Le sénateur Harb : Comme nous avons peu de temps, je vais combiner mes deux questions. Premièrement, je veux vous remercier, monsieur Kingsley, du travail considérable que vous faites non seulement ici au Canada, mais également dans d'autres pays, avec votre équipe.

Mon collègue, le sénateur Murray, a posé quelques questions sur le sujet qui m'intéresse, dont la liste des électeurs. Comment notre façon de recueillir l'information se compare-t-elle à celle de d'autres démocraties comme l'Australie? Deuxièmement, vous servez-vous des annuaires téléphoniques, par exemple celui de Bell Canada ou les répertoires des villes, pour obtenir le nom, l'adresse et le numéro de téléphone des électeurs. Par ailleurs, quelles sont les modalités de radiation d'un nom de la liste? Si vous obteniez le nom d'une personne mais que celle-ci voulait qu'on raye son nom de la liste parce qu'elle est anarchiste et ne veut pas participer au processus, existe-t-il un mécanisme pour le faire? Enfin, vous avez dit à ma collègue, le sénateur Ferretti Barth, que les personnes âgées ont le plus fort taux de participation aux élections. Que pouvez-vous nous dire au sujet de la catégorie d'électeurs qui a la plus faible participation, les jeunes de moins de 25 ans. D'après les statistiques, 75 p. 100 des jeunes ne votent pas. Cela équivaut à près de trois jeunes sur quatre. Je sais que la Chambre des communes étudie, ou a déjà probablement adopté, un projet de loi qui abaisserait de 18 à 16 ans l'âge de voter. Or, si on voulait être cynique, on pourrait se demander à quoi bon le faire? À quoi bon abaisser de 18 à 16 ans l'âge requis pour voter si, de toute façon, 75 p. 100 des jeunes ne voteront pas.

J'aimerais connaître votre avis sur l'ensemble de ces questions et également sur ces questions précises.

M. Kingsley : En ce qui concerne la participation des jeunes, j'ai dit tout à l'heure qu'après les dernières élections nous avons examiné le contenu des urnes pour savoir qui avait voté, au lieu de faire un sondage. Chez les jeunes de l'âge que vous avez indiqué, et jusqu'à l'âge de 21 ans et demi, la participation était de 37 p. 100 pour les jeunes qui votaient pour la première fois. La proportion reste la même si l'on inclut tous les jeunes âgés de 25 ans ou moins. Soit dit en passant, la proportion diminue légèrement si on inclut ces jeunes un peu plus vieux, ce qui est un phénomène intéressant; cela signifie qu'il s'agissait peut-être d'un effet de génération.

Qu'étaient les 75 avant? C'était un sondage. Vous ne pouvez pas comparer les deux parce que les méthodologies étaient très différentes. Ils avaient des choses différentes à faire.

Quant à se faire radier de la liste, vous écrivez à Élections Canada et vous dites : « Radiez-moi de la liste. » Nous vous envoyons une lettre et nous vous disons que vous n'êtes plus sur la liste et que l'on vous a mis sur la liste des personnes radiées de la liste. Vous pouvez quand même voter quand vous voudrez et si vous vous faites réinscrire sur la liste, nous vous supprimerons automatiquement de cette liste-là, si bien que vous n'êtes jamais dans nos livres sur la liste des électeurs. Vous figurez dans nos livres comme ne figurant pas sur la liste des électeurs.

En ce qui concerne l'Australie, il faut que je sois prudent ici. Les Australiens nous ont rendu visite pour voir comment nous faisons notre liste. Nous sommes reconnus pour avoir l'un des meilleurs systèmes au monde. Les gens viennent nous voir pour savoir comment nous procédons. Évidemment, nous apprenons aussi des choses lorsqu'ils viennent. Il y a des choses que je vais proposer, comme je l'ai dit tout à l'heure en réponse au sénateur Murray. Il y a des choses que nous pouvons faire pour améliorer cette liste. Il y a des choses à propos des cases à cocher. Par exemple, si vous avez suivi les témoignages devant l'autre comité, si cette case était divisée en deux, si la question pour la citoyenneté canadienne était distincte de la question de savoir si vous voulez être inscrit ou non, nous inscririons une quantité de jeunes qui nous échappent actuellement. C'est cela l'objectif dont nous parlons. J'ai rencontré de la résistance à l'Agence du revenu sur ce point. Elle avait conclu une entente avec moi mais est revenue sur sa parole à la dernière minute. Le problème aurait été réglé si cela avait été fait.

Je suis en train de renégocier le tout, une autre fois. J'espère que ça marchera. Il y a aussi d'autres choses que nous allons faire. J'ai l'intention de rencontrer le statisticien en chef pour voir ce qu'il est possible de faire. Il y a une enquête nationale. Il y en a deux. Il y en a une tous les cinq ans qui s'applique désormais à tout le monde. Il y a peut-être des choses que nous pouvons faire ici qui augmenteront davantage la valeur et l'exactitude de la liste.

Le président : Monsieur Kingsley, madame Vézina et madame Davidson, je vous remercie d'être venus aujourd'hui. Je note en particulier que vous comparaîtrez avec plaisir devant le comité chaque fois qu'il le souhaitera. Peut-être allons-nous vous prendre au mot; attendez-vous à ce que nous communiquions avec vous au fur et à mesure que notre examen des prévisions budgétaires et des dépenses continuera.

M. Kingsley : Le plaisir a été pour moi et je dois dire que j'ai toujours beaucoup prisé les possibilités pour moi de comparaître devant les comités du Sénat. J'ai comparu devant beaucoup d'entre eux. Si votre comité est nouveau et que vous souhaitez que je comparaisse, je serai très heureux de le faire à intervalles réguliers, comme il vous conviendra. J'ai beaucoup apprécié la rencontre d'aujourd'hui.

Le président : Sénateurs, si l'un ou l'autre d'entre vous a son BlackBerry allumé pendant l'audience, sachez que cela cause de l'interférence avec la transmission. Il faut les éteindre.

Mesdames et messieurs les sénateurs, nous entendrons maintenant notre prochain témoin, la commissaire aux langues officielles, Mme Dyane Adam. Avant sa nomination au poste de commissaire en 1999, Mme Adam a été professeure de psychologie dans plusieurs établissements, notamment à l'Université d'Ottawa et à l'Université Laurentienne de Sudbury.

Le comité a déjà entendu la vérificatrice générale. Nous croyons savoir que d'autres comités du Sénat examinent votre mandat et vos programmes. Le comité s'intéresse aux finances et souhaite obtenir des renseignements sur la répartition des fonds dans le Budget principal des dépenses. Mme Adam est aussi présidente de l'Association des ombudsmen du Canada. C'est avec plaisir que nous allons vous écouter.

Mme Dyane Adam, commissaire, Commissariat aux langues officielles : Mesdames et messieurs les sénateurs, c'est un plaisir pour moi de comparaître aujourd'hui devant le Comité sénatorial permanent des finances nationales.

Je suis accompagnée aujourd'hui de Mme Louise Guertin, directrice générale des Services généraux du Commissariat aux langues officielles. Ma déclaration portera sur trois aspects : notre mandat, nos axes stratégiques et nos réalisations et la façon dont nous rendons compte de nos activités.

[Français]

Pour le mandat, je suis un agent du Parlement nommé pour sept ans, et dans mon cas, le législateur m'a donné le mandat de prendre toutes les mesures nécessaires visant à assurer la reconnaissance du statut et l'usage des deux langues officielles et à faire respecter l'esprit de la Loi sur les langues officielles.

Dès le début de mon mandat, je me suis donné comme mission d'agir comme agent de changement. Je remplis cette mission au moyen de six rôles distincts : celui d'ombudsman, de vérification, de liaison, de vigie, de promotion et l'éducation, et enfin les interventions devant les tribunaux. Vous allez trouver une explication un peu plus poussée de chacun de ces rôles dans le document distribué avec le texte de la comparution.

[Traduction]

D'abord, nos axes stratégiques et nos réalisations. Le Commissariat travaille activement avec les institutions fédérales afin qu'elles comprennent mieux l'importance de la dualité linguistique et qu'elles améliorent leur rendement à cet égard. Nos activités en 2004-2005 répondent aux axes stratégiques suivants : assurer l'égalité du français et de l'anglais au sein du Parlement, du gouvernement du Canada et des institutions assujetties à la loi; deuxièmement, veiller à ce que les institutions fédérales contribuent plus activement au développement et à l'épanouissement des communautés de langues officielles en situation minoritaire et, enfin, promouvoir l'égalité du français et de l'anglais comme valeur fondamentale dans une société de plus en plus diverse. Nos représentants régionaux, les antennes du Commissariat, contribuent activement sur le terrain dans toutes les régions canadiennes à la réalisation de notre mission et de notre vision. Prenant le pouls des communautés linguistiques, ils fournissent des conseils et des renseignements sur les droits linguistiques et travaillent comme agents de changement auprès des institutions fédérales et des communautés dans chaque région.

[Français]

Parmi les activités réalisées cette année, j'aimerais signaler les suivantes : dans le cadre de mon rôle d'ombudsman, nous traitons environ 1 200 plaintes par année; nous en avons reçu 850 durant la présente année financière. Nous avons également effectué, cette année, une série de vérifications, d'études et de suivis qui ont porté notamment sur la dualité linguistique dans les relations internationales, la langue de travail au sein de la Fonction publique fédérale de la région de la capitale nationale, le service au public dans les comptoirs postaux bilingues, l'évolution de la communauté d'expression anglaise du Québec, l'utilisation de la presse minoritaire par les institutions fédérales, et les sites Internet des missions diplomatiques et des ambassades étrangères au Canada.

Cela vous donne déjà un éventail des dossiers. On dit toujours que la question des langues officielles est un enjeu horizontal. Effectivement, on brosse l'ensemble des institutions et on touche à peu près à toutes les activités ou à tout le rayonnement du fédéral.

Nous préparons présentement des bulletins de rendement en matière de langues officielles concernant 29 institutions, et les résultats seront publiés dans le prochain rapport annuel. En termes d'activités de promotion, nous avons assuré le suivi d'un important symposium tenu en mars 2004 qui s'intitulait « Visions et défis au XXIe siècle ». Il s'agit de relever le défi de doubler le nombre de jeunes bilingues d'ici l'an 2013. Par ailleurs, nous comptons sur les médias pour diffuser nos messages Chaque année, j'accorde environ 200 entrevues et je prononce une trentaine d'allocutions.

Pour ce qui est de mon rôle d'intervenant devant les tribunaux, au cours de la dernière année, je suis intervenue dans cinq recours judiciaires portant sur la mise en œuvre de la loi. Nous surveillons de près la mise en œuvre du plan d'action du gouvernement sur les langues officielles, notamment dans les secteurs de l'éducation, de l'immigration, de la santé, du développement économique, de la justice et de la jeunesse. Nous suivons également la mise en œuvre des 11 recommandations que nous avons formulées dans notre dernier rapport annuel.

En particulier, je tiens à dire que j'ai recommandé au gouvernement de clarifier, par voie législative ou réglementaire, la portée juridique de la partie VII de la loi qui traite de la promotion du français et de l'anglais dans la société canadienne et du développement des minorités.

D'ailleurs, le projet de loi S-3 — qui a été adopté à l'unanimité, je crois, par le Sénat et qui vise spécifiquement cela — est présentement à l'étude devant la Chambre des communes.

[Traduction]

Enfin, nous nous intéressons activement à la préparation de projets de loi, de règlements et de politiques au Canada, et nous n'hésitons pas à comparaître au besoin devant les comités chargés de leur examen. Enfin, la façon dont nous rendons compte de nos activités. J'attache beaucoup d'importance à l'intégrité et à la transparence de nos actions et à notre devoir de rendre compte au Parlement. C'est pourquoi j'ai demandé au Bureau du vérificateur général de faire la vérification de nos états financiers pour l'exercice 2003-2004. Je note avec fierté que celui-ci a donné une opinion sans réserve, c'est-à-dire une excellente note de rendement, sur nos états financiers. Notre rapport annuel est le document phare qui résume notre action. Il identifie les dossiers clés et fait état de nos principales recommandations. Notre prochain rapport annuel marquera le 35e anniversaire de la loi et fera le bilan des langues officielles au Canada. Celui- ci, ainsi que nos études et vérifications, sont distribués aux parlementaires. D'ailleurs, puisqu'il y a deux comités qui suivent l'application de la loi, je suis doublement appuyée et imputable. Je travaille de près avec ces comités et je suis régulièrement appelée à y comparaître. Ma pratique est aussi de leur présenter notre budget et de rendre compte de nos activités sur une base annuelle.

Nous sommes bien conscients que la dualité linguistique revêt un caractère transversal. Elle recoupe presque toutes les activités de la société canadienne. Il nous faut donc veiller, tant en amont qu'en aval, à l'impact que des projets législatifs et des activités multiformes de l'administration fédérale ont sur notre écologie linguistique et culturelle. Ce qui importe, c'est la création d'une culture des langues officielles qui englobe les attitudes, les comportements et les valeurs. Cette culture doit être soutenue par un leadership fort et cohérent.

Il implique une responsabilisation de tous les niveaux et des mécanismes de reddition de comptes précis et efficaces. Comme je l'indiquais dans mon dernier rapport annuel : « L'action, c'est d'abord des résultats concrets. »

Je répondrai avec plaisir à vos questions.

Le président : Merci de votre excellent exposé. J'ai été heureux d'entendre que vous aviez obtenu de la vérificatrice générale une opinion sans réserve. Je m'en réjouis.

J'ai ici une liste de sénateurs qui souhaitent vous poser des questions. Commençons par le sénateur Comeau.

[Français]

Le sénateur Comeau : Le vérificateur général, selon la loi qui a créé son poste, est un agent de la Chambre des communes. Vous êtes un agent du Parlement également; en quoi votre rôle est-il différent car, honnêtement, je ne me souviens pas de votre mandat spécifique?

Mme Adam : Le mandat du commissaire aux langues officielles relève du Parlement, donc des deux chambres. La nomination du commissaire doit être approuvée puis votée par les deux chambres.

Le sénateur Comeau : Nous avons entamé l'étude d'un projet de loi qui consiste à examiner les fondations créées en vertu de législations ou de décisions du gouvernement. Nous avons reçu M. Phillipson la semaine dernière, un représentant de la Fondation pour l'innovation du Canada.

En premier lieu, je lui ai posé la question à savoir si la charte de sa fondation respectait l'esprit de la Loi sur les langues officielles. Deuxièmement, ce que cela signifiait pour lui de respecter l'esprit de la Loi sur les langues officielles et si nous devions nous fier sur sa bonne foi quant à l'application de la loi. Troisièmement, s'il n'était pas préférable pour lui que le commissaire aux langues officielles examine si la Loi sur les langues officielles était bien appliquée.

Je lui ai demandé s'il était intéressé à vous inviter. Selon l'impression que j'ai eue, vous recevrez probablement une invitation. Avez-vous eu cette invitation?

Mme Adam : Non, pas encore. Je suis ravie que vous suggériez aux agences, fondations et autres organismes qui servent le gouvernement du Canada de faire appel à nos services, car un de nos rôles est de faire la promotion de l'éducation. Plus de 150 institutions sont pleinement assujetties à la loi. Il y a peut-être certaines zones grises pour les autres. Beaucoup d'éducation reste à faire au sein de l'appareil fédéral pour vraiment faire comprendre les pleines responsabilités de tous et chacun. Notre Bureau est là pour cette raison.

Le sénateur Comeau : Une des priorités du Comité sénatorial permanent des finances nationales est de voir à ce que les finances publiques soient bien gérées. Une des lacunes que nous avons trouvées par rapport aux fondations était la possibilité, à cause de flous juridiques ou autres, que des placements financiers ne puissent pas être vérifiés par le vérificateur général. La même chose s'applique à votre situation ou à celle d'autres agents, tel le commissaire à la vie privée, par exemple. L'éventail des tâches qui incombent à chacune des agences ne circonscrit peut-être pas suffisamment les zones grises qui échappent à leur attention.

Ces fondations sont souvent éloignées de nous, mais puisque nous devons voter des fonds, comment savoir si ces fonds remplissent adéquatement les besoins pour lesquels les fondations ont été créées, et ce dans un esprit de transparence qu'exigent les contribuables?

Mme Adam : C'est similaire. Il y a eu plusieurs transformations gouvernementales. Au cours des années 90, mon prédécesseur, M. Goldbloom, avait fait une étude qui démontrait nettement que le recours par le gouvernement fédéral à des formes différentes pour livrer des services au public canadien, comme la privatisation ou la création de fondations, entre autres, avait eu un impact négatif énorme sur les droits linguistiques des citoyens. On peut citer en exemple les aéroports.

Quand les Communes et le Sénat modifient ou adoptent des lois pour créent de nouvelles entités qui doivent fournir des services au nom du gouvernement fédéral, notre commissariat recommande que toutes ces entités soient assujetties à la Loi sur les langues officielles et que cela soit clairement spécifié dans la loi. C'est pour cela qu'on intervient de plus en plus devant les comités parlementaires lorsqu'on crée ce genre d'organisme, que ce soit pour le sport ou autres raisons, pour dire qu'il faut que ce soit clairement spécifié dans la loi. Cela évite beaucoup de problèmes par la suite. Si l'organisme dit qu'il va respecter l'esprit de la loi mais qu'il n'y est pas assujetti, cela ne donne pas les mêmes résultats.

Pour revenir aux fondations, après étude de cette question, on ne peut pas dire que toutes les fondations sont assujetties pleinement à la loi. Il faut examiner la loi elle-même pour déterminer si les fondations sont assujetties à la loi et si elles ont des obligations linguistiques. Dans chaque cas, il faut déterminer si ce sont des institutions fédérales au sens de la Loi sur les langues officielles.

Par exemple, nous avons reçu des plaintes contre la Fondation canadienne des bourses d'études du millénaire, qui gérait plusieurs millions de dollars pour le compte du gouvernement fédéral. Après enquête nous avions déterminé, à l'époque, que cette fondation était assujettie à la loi parce qu'elle était identifiée, dans son cadre législatif, comme étant une institution fédérale. Ce n'est cependant pas toujours le cas dépendant du projet de loi qui gouverne ces fondations. C'est là que nous retrouvons des zones grises et que notre intervention peut être contestée par une fondation.

Le sénateur Comeau : Pourriez-vous nous faire part de la liste des fondations qui sont assujetties à la loi et celles qui ne le sont pas. J'ai une dernière question. Tout récemment, nous avons accueilli le ministre des Travaux publics qui nous a annoncé qu'il avait l'intention d'examiner la vente d'une série d'édifices à travers le Canada. Est-ce qu'un représentant du gouvernement ou de Travaux publics vous a demandé d'évaluer les impacts de la vente de ces édifices? Est-ce que les noms pourraient être changés et les exigences dans ces édifices prendre une différente direction? Nous avons vu dans le passé que ce genre de privatisation délestait de la responsabilité de répondre à la loi.

Mme Adam : J'irais même plus loin. C'est la responsabilité même de Travaux publics, selon la politique gouvernemental, d'évaluer l'impact de cette décision sur la politique des langues officielles. Le commissaire aux langues officielles veille à ce que les droits ne soient pas usurpés et que ces changements n'entraînent pas de recul. Suite aux problèmes que nous avons connus lors des transformations parlementaires, il y a une politique qui a été adoptée à cet effet et qui gouvernement les actions des institutions fédérales quand ils font ce genre de transformation. Je vous incite à demander au ministère de Travaux publics de vous produire cette étude de l'impact. C'est de la prévention.

Le sénateur Comeau : Le président pourrait écrire au ministre des Travaux publics pour lui demander de nous faire parvenir une copie de l'étude d'impacts.

Le sénateur Harb : L'un de vos mandats vise la vérification, la promotion et l'éducation. On pourrait dire qu'idéalement on serait satisfait si 100 p. 100 de la population canadienne parlait l'anglais et le français. Où en sommes-nous avec cet objectif idéal? Par exemple, que se passe-t-il avec la langue française dans les provinces anglophones hors Québec? Au Québec, l'anglais est la deuxième langue officielle, où en sommes-nous?

Mme Adam : Je vais d'abord répondre à votre dernière question concernant l'état du bilinguisme individuel au Canada. La loi ne touche pas cette question. En ce qui a trait à la promotion du français et de l'anglais, c'est sous cette houlette qu'on touche. Il s'agit de favoriser le bilinguisme canadien par l'entremise des provinces parce qu'on parle d'éducation. Au cours des 30 ou 35 ans, le gouvernement fédéral a versé plusieurs sommes d'argent au niveau des provinces pour encourager les Canadiens, les jeunes Canadiens, à apprendre leur deuxième langue officielle. Où en sommes nous après 35 ans? Nous allons faire le bilan cette année.

Dans l'ensemble du pays, prenons les jeunes entre 12 et 18 ans, un jeune sur quatre se déclare bilingue selon Statistique Canada. La difficulté avec une telle donnée est qu'on ne peut pas vraiment vérifier le niveau de bilinguisme. Est-ce un bilinguisme fonctionnel? On sait que cette tranche de population devient plus bilingue que les générations précédentes. Nous sommes toujours à 17 ou 18 p. 100 de bilinguisme dans l'ensemble du pays. Au Québec, il y a eu des changements vraiment spectaculaires. La jeunesse anglophone du Québec est autour de 93 p. 100 bilingue. C'est incroyable. Cela s'est fait à l'intérieur d'une décennie. Du côté de l'ensemble de la population anglophone de cette province, 67 p. 100 des gens sont bilingues. Les jeunes anglophones du Québec sont plus bilingues que les jeunes francophones du Québec. Bien sûr, il y a davantage de bilinguismes. Dans l'ensemble du pays, le bilinguisme est plus élevé au Québec, au Nouveau-Brunswick et en Ontario et dans les Maritimes et plus on va vers l'Ouest, moins le bilinguisme est présent à l'échelle du pays.

Le sénateur Harb : On parle beaucoup du vérificateur général et des valeurs d'investissement. D'après votre mandat, fait-on des comparaisons avec d'autres juridictions comme, par exemple avec la Belgique, la Suisse et d'autres pays ayant la même préoccupation?

La question du bilinguisme parmi la population canadienne est controversée. Que ce soit au Québec ou dans les autres provinces, on dépense de l'argent mais on n'obtient pas de résultat. Est-ce parce qu'on ne prend pas assez le temps de voir le résultat? Est-ce parce que le gouvernement n'en fait pas assez pour informer la population quant aux bénéfices d'avoir un pays totalement bilingue? Avez-vous fait des comparaisons avec d'autres juridictions? Si c'est possible, peut-on en obtenir copie?

Mme Adam : Nous n'avons pas fait d'étude comparative au commissariat et non plus, à ma connaissance, au ministère du Patrimoine canadien, qui pourrait être le ministère responsable de cette question par rapport à d'autres pays. Parlons de défis plutôt que de problèmes particuliers au Canada. Si vous examinez d'autres pays où il y a plus d'une langue officielle, comme on n'a pas la gouvernance ou que nous ne sommes pas responsables de l'éducation au fédéral, vous pourriez véritablement amener une population à être beaucoup plus bilingue si on enseignait de façon obligatoire, dans toutes les écoles à l'échelle du pays, la deuxième langue officielle. Actuellement, il existe plusieurs provinces où l'enseignement de la langue seconde n'est pas obligatoire. C'est un peu laisser le choix à la commission scolaire et, à la limite, aux parents. C'est, je crois, un des problèmes de mise en œuvre de cette vision du pays.

Pour répondre à votre question quant à savoir si le gouvernement fédéral pourrait faire beaucoup plus et beaucoup mieux pour promouvoir la valeur ajoutée du bilinguisme et son importance fédération canadienne? La réponse est oui.

À mon avis, le gouvernement fédéral pourrait faire beaucoup plus pour promouvoir cet aspect de notre pays. On tend beaucoup à dire qu'on ne se sert pas de notre langue. On a tous probablement étudié l'algèbre ou la musique. Cela n'a toutefois pas fait de nous tous des musiciens et des gens qui utilisent la trigonométrie au quotidien. L'importance d'une langue, c'est de s'ouvrir à l'autre, à la culture de l'autre et comprendre qu'il n'y a pas juste une façon de se représenter le monde.

On a trop mis l'accent sur la fonction instrumentale du bilinguisme canadien en croyant que c'est une façon de gouverner un pays qui s'est défini au départ avec deux langues et deux cultures. Si on n'avait pas vraiment adopté cette forme de gouvernance et cet aménagement linguistique international, qui est vraiment admiré à l'échelle internationale, ce pays ne connaîtrait peut-être pas la paix, la sécurité et la stabilité sociale qu'il a et la prospérité économique qu'on connaît.

Je souhaiterais que les institutions fédérales, le gouvernement, le Parlement tienne beaucoup plus souvent ce discours sur les ondes qu'il le fait à l'heure actuelle.

Le sénateur Ringuette : Dans vos projections budgétaires, vous ne prévoyez aucune augmentation pour les prochaines années?

Mme Adam : Non. Vous ne me trouvez pas gourmande?

Le sénateur Ringuette : Y a-t-il une raison spécifique?

Mme Adam : Il faut que je mentionne que nous avons connu une augmentation de nos crédits budgétaires au cours des dernières années à la base, d'environ quatre millions de dollars qui s'explique par la réintroduction de vérification du commissariat, du renforcement de notre présence régionale et aussi du renforcement de notre capacité juridique et de la liaison parlementaire.

Lorsque j'ai comparu devant le Comité des langues officielles au cours de la dernière année, on m'avait demandé si je souhaitais ou si on devait augmenter davantage les crédits budgétaires du commissariat.

J'étais alors d'avis qu'il fallait consolider nos activités avant d'en ratisser plus large. Le Comité langues officielles nous avait fait une demande concernant la promotion du français et de l'anglais. Cette demande visait une campagne de promotion et d'éducation.

Bien sûr, si on entamait une telle initiative, le budget ne serait pas suffisant. Je n'agis pas sur cette requête pour le moment puisqu'il faut consacrer nos énergies à bien consolider les nouvelles orientations du commissariat. Je ne dis pas qu'à l'avenir on ne serait pas prêt à élargir nos activités au besoin.

Le sénateur Ringuette : Dans votre rapport annuel, vous mentionnez que 10 institutions fédérales reçoivent plus de la moitié des plaintes enregistrées. Est-ce que ces plaintes viennent du public ou des employés?

Mme Adam : Elles viennent surtout du public et je dirais que 80 p. 100 des plaintes touchent les services au public.

Le sénateur Ringuette : Et bien entendu, ce sont les francophones qui sont les moins bien servis par ces institutions?

Mme Adam : Oui, près de 80 p. 100 des plaintes proviennent des francophones.

Le sénateur Ringuette : Dans les plaintes reçues au cours de la dernière décennie, est-ce qu'on note moins de plaintes venant des Canadiens et Canadiennes francophones ou est-ce que sur le plan de l'offre active la situation est demeurée la même?

Mme Adam : Prenons les services en général. L'offre active, c'est la responsabilité qu'a une institution d'accueillir le client et l'informer qu'on est prêt à le servir dans l'une ou l'autre des deux langues officielles.

Depuis une bonne décennie, on constate une stagnation au niveau des services. Si on prend la moyenne canadienne, à peu près une fois sur cinq le service n'est pas disponible. C'est comme si on avait plafonné et ce, peu importe les recommandations qu'on peut faire.

L'offre active, quant à elle, se situe à environ 35 p. 100 à l'échelle du pays. Au Canada, une fois sur trois on vous accueillera dans les deux langues officielles.

Le sénateur Ringuette : Il faut également reconnaître que la moyenne des francophones accumulera beaucoup de frustration avant d'embarquer dans un processus de plainte. Si je me fie à mes propres expériences, quand l'offre active n'est pas disponible et que dans un contexte donné, on a besoin d'une information, on finit par s'exprimer en anglais pour avoir l'information en question.

C'est évidemment très frustrant et je crois qu'il faut vivre plusieurs expériences de ce genre pour finalement entamer le processus de plainte, avec toutes les contraintes de temps que cela exige. Je vous encourage tout de même à poursuivre, mais il faut dire qu'on n'a pas fait beaucoup de progrès en ce qui concerne l'offre active.

Mme Adam : Le niveau de l'offre active varie selon les régions. En effet, l'offre active peut tomber sous la barre des 30 p. 100. Cela peut même descendre à 10 p. 100 dans certaines régions. Quant aux services, il y a des cas où une fois sur deux vous serez servis dans votre langue dans un bureau désigné pour le faire.

Je crois que le gouvernement doit repenser sa façon de livrer les services dans certaines régions du pays. J'aimerais mentionner que si le plafonnement dure depuis dix ans, ce n'est pas en répétant la même chose qu'on va augmenter la moyenne. Il faudra sans doute penser aux guichets uniques dans des régions où la minorité est vraiment plus petite.

Au Manitoba, par exemple, la province est très intéressée à développer, en collaboration avec les secteurs fédéral, municipal et privé, des guichets de services dans les deux langues officielles où la langue de travail est le français. Les anglophones qui sont affectés ont alors la chance de préserver leur langue seconde et les francophones ne sont pas assimilés. De cette façon, les citoyens sont assurés d'être servis dans les deux langues officielles à de tels guichets. Le gouvernement fédéral doit considérer ce modèle plus sérieusement qu'il ne l'a fait jusqu'à présent.

Le sénateur Ferretti Barth : Pour moi il est facile de parler français au Québec et de continuer à comprendre l'anglais. Je parle très bien l'anglais mais je suis gênée de le faire parce que les gens m'écoutent et se disent : « Mais quelle sorte d'anglais parle-t-elle? »

Je suis originaire de la Suisse, pays où l'on parle l'italien, le français, l'anglais et le romanche. Ces quatre langues sont toutes traitées avec grand respect de la part du gouvernement. Vous prenez le train à Lugano, vous allez dans un canton français, les fonctionnaires vous demanderont vos documents en italien, en français, en allemand et en romanche. En Suisse, toutes ces langues sont respectées.

Personnellement, j'admire votre travail. J'aime beaucoup la langue française parce qu'elle se rapproche de ma langue maternelle. Je fais la promotion de la langue française au Québec pour les personnes âgées originaires d'autres communautés culturelles.

Quelle est la façon de procéder lorsque vous recevez une plainte? Lorsqu'une personne loge une plainte, comment lui donnez-vous satisfaction?

Mme Adam : On reçoit des plaintes de différentes façons : par lettre, par téléphone et par Internet. Des enquêteurs sont responsables à mon bureau de noter les détails de l'incident, à savoir si c'est survenu dans un bureau de passeport ou dans un bureau de VIA Rail, ou encore dans un avion d'Air Canada; toutes les institutions assujetties.

On doit enquêter et vérifier si, effectivement, il y avait assujettissement de l'institution. Il y a des bureaux, à l'échelle du pays, qui ne sont pas désignés pour offrir des services bilingues. Il faut déterminer si effectivement c'était un endroit qui devait servir dans les deux langues officielles et établir, à partir de là, si la plainte est fondée.

Ensuite, nous faisons un rapport à l'institution et au plaignant. On l'informe si oui ou non la plainte est fondée et nous formulons des recommandations à l'institution, dans le cas où la plainte est fondée.

Le sénateur Ferretti Barth : Je crois que c'est un processus très long.

Mme Adam : Cela varie, cela dépend de la nature de la plainte.

Le sénateur Ferretti Barth : Il y a des gens qui déposent des plaintes et qui ont besoin de réponses pour faire valoir leurs droits. Puis-je me permettre de vous suggérer, madame Adam, lors de votre prochaine étude, de raccourcir ce délai?

Mme Adam : J'aimerais en profiter pour parler du processus de plainte et des obligations qui figurent dans notre loi, touchant les procédures que le Commissariat doit suivre pour enquêter.

Je suis d'accord avec le fait qu'il y a certaines plaintes qui sont très évidentes. Par exemple, si l'affichage devait être dans les deux langues officielles et qu'il ne l'est pas, cela ne devrait pas prendre une année pour régler cela. Il y a maintenant un processus accéléré pour traiter ce genre de plaintes. Notre objectif est de les traiter dans un délai de 30 jours.

Certaines plaintes sont toutefois plus complexes, comme par exemple la désignation des postes bilingues, ou encore déterminer si une action gouvernementale d'une institution respecte la partie VII de notre loi ou autre.

Comme la Loi sur les langues officielles permet des recours judiciaires contre le gouvernement, il est bien important que le commissariat suive un processus très documenté.

Dans le passé, on a eu droit à quelques reproches de la part de certains juges dans des cas de recours judiciaires où on nous reprochait de ne pas documenter nos dossiers suffisamment et de ne peut-être pas suivre un processus assez rigoureux à des fins judiciaires.

Notre processus d'enquête est assez rigide. On essaie, dans la mesure du possible, de respecter notre loi et de répondre au souci d'être efficient et efficace pour ne pas décourager les citoyens.

Les citoyens ne sont pas tellement découragés par la longueur du processus, mais plutôt par le fait que l'institution n'a pas nécessairement fait de correction permanente. Cela a été corrigé après la plainte, mais cela n'a pas duré. C'est le problème actuellement, c'est-à-dire la conformité de l'institution sur une base durable.

[Traduction]

Le sénateur Murray : J'ai vu dans les médias récemment un compte rendu du témoignage de notre ami Jim Mitchell à un comité parlementaire ou ailleurs; je me fie ici aux comptes rendus dans la presse, mais il parlait de l'échec de la « vision bilingue ». Ce matin, nous avons entendu des interventions à la table qui dénotent à n'en pas douter de vrais problèmes et une exaspération compréhensible. Le sénateur Comeau et moi-même sommes tous deux membres du Comité des langues officielles et nous avons eu l'occasion de dialoguer avec vous à de multiples reprises. Toutefois, je ne saurais résister à la tentation de dire comme je l'ai déjà fait, qu'à mon avis le bilinguisme dans notre pays est un immense succès. Ceux qui ne sont pas de cet avis sont trop jeunes pour se souvenir de l'époque où l'administration fédérale dans sa totalité était intégralement anglaise, presque sans exception; ou sont trop jeunes pour se souvenir de l'époque où les jeunes francophones étudiaient à l'aide de manuels quasi exclusivement en anglais, même dans les écoles dites de langue française.

Je ne sais pas si vous étiez là, au comité, le soir où nous avons reçu George Arès, le président de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada. Cela faisait à peu près 16 ou 17 ans que je ne l'avais pas vu et je lui ai demandé de commenter la situation dans l'ouest du Canada. Il a fait un compte rendu qui était très encourageant. Il n'a pas prétendu, et nous non plus, qu'il n'y avait pas beaucoup de travail à faire. Il a parlé en particulier du changement d'attitude des gouvernements de l'Ouest canadien et des améliorations en ce qui concerne les installations, les services, etc., dans ces provinces. Une chose qu'il a dite que j'ai trouvé très intéressante et très encourageante, c'est que dans l'appareil gouvernemental de certaines de ces provinces de l'Ouest canadien, on trouve maintenant à des postes plutôt élevés de la bureaucratie, des gens qui ont suivi des cours d'immersion. Il a indiqué que leur attitude est très différente, plus positive, plus ouverte, plus compréhensible, de ce qui devait être fait.

Quiconque pense que ça a été facile de faire les progrès que nous avons faits, même grâce à un cadre législatif excellent et à des commissaires aux langues officielles très travailleurs au cours des années, ne comprend pas le travail énorme abattu pour faire faire demi-tour à une machine telle que le gouvernement fédéral. Louis Robichaud est décédé récemment et l'on peut dire que cette province est un endroit totalement différent de ce qu'elle était, en grande partie à cause des politiques linguistiques et des nouvelles lois linguistiques qu'il y a fait instaurer.

Je ne veux pas empêcher les gens de se plaindre et de signaler, tout à fait judicieusement, les améliorations à apporter et les injustices qui ont pu se produire. C'est important, mais il ne faut pas se laisser aller au découragement et se dire que rien ne peut être fait. Beaucoup a été fait et le gouvernement de l'époque peut s'en glorifier. C'était il n'y a pas si longtemps. En tout cas, pas de la façon dont nous, sénateurs, mesurons le temps. Quelque 30 années, 36, 37 ans, le gouvernement de l'époque. Et je n'exclus pas les chefs de l'opposition qui ont soutenu l'initiative et qui en ont payé le prix politique et la fonction publique qui a dû faire ce travail, parfois sous l'effet d'énormes pressions et non sans mal.

Ainsi se termine mon discours.

Le sénateur Comeau et moi-même avons eu l'occasion de parler avec Mme Adam de la substance de ces questions au Comité des langues officielles. Nous nous intéressons ici aux finances. Pourquoi avez-vous dépensé 1 million de dollars entre avril et septembre de l'année dernière en sous-traitance? Quelle est la proportion de votre budget annuel qui va aux contrats de sous-traitance extérieurs et pourquoi avez-vous besoin de le faire? Est-ce parce que les règlements du Conseil du Trésor sont trop sévères? Est-il plus efficace de procéder ainsi, plutôt que de faire vos études à l'interne? À quoi servent ces personnes? Nous venons d'entendre le directeur général des élections nous expliquer qu'il a dû convertir un certain nombre de postes pour une période déterminée en postes permanents. Ce n'est pas la même chose, n'est-ce pas? À quoi utilisez-vous ces personnes?

Mme Adam : Ces gens ou ces sous-traitants?

Le sénateur Murray : La sous-traitance.

Mme Adam : Oui, peut-être que Mme Guertin peut répondre à cette question.

Mme Louise Guertin, directrice générale, Direction générale des services corporatifs, Commissariat aux langues officielles : Nous sommes en fait une petite organisation, si vous nous comparez aux grands ministères. J'ai déjà travaillé à Développement des ressources humaines Canada et je suis maintenant dans une organisation qui compte 162 employés à temps plein, des ETP. Beaucoup de contrats de ma direction générale sont octroyés, en particulier, à des services spécialisés, comme les technologies et la gestion de l'information. En technologie, nous avons sept employés en tout. C'est inimaginable de penser que nous avons tous les spécialistes là. Et c'est une façon pour nous d'être beaucoup plus efficaces. Dans le cas d'une petite organisation aussi, si vous regardez le type de contrats que nous avons, ce peut être pour une période où nous avions à produire quelque chose très rapidement. Dans ce cas, on peut embaucher un consultant qui a la spécialisation nécessaire, pour écrire un discours ou faire ce genre de choses. Est-ce suffisant?

Mme Adam : En ce qui concerne...

Le président : Un million de dollars de discours?

Mme Guertin : Non, non. On pourrait dire cela des technologies de l'information, par exemple. Nous avons des contrats, si je me souviens bien, de 65 000 $ pour réviser une partie d'une application. Nous avons aussi des contrats pour la gestion de l'information.

Mme Adam : Je vais parler de ce qui concerne la recherche. Nous faisons beaucoup d'études et nous les publions. Par exemple, nous avons récemment fait une étude sur la communauté anglophone au Québec. D'une manière générale, nous n'avons pas forcément des spécialistes sur place. Souvent il vaut mieux consulter les chercheurs eux-mêmes, ceux qui connaissent la communauté ou tel ou tel aspect de la question. Nous avons des chercheurs...

Le sénateur Murray : Est-ce que c'est comme un sondage d'opinions?

Mme Adam : Non, ce n'est pas un sondage d'opinions. C'est une recherche sur les statistiques démographiques de la communauté anglophone et elle couvre différents aspects. Nous en avons fait une autre récemment sur la langue de travail, nous l'avons sous-traitée, et elle est toujours en cours. C'est en partie un sondage de nos employés. Nous en avons fait un dans la région de la capitale, maintenant nous faisons le Québec ainsi que les sociétés d'État. Ce type de travail, ponctuel, est généralement donné à contrat.

Il y a un certain nombre de questions. Nous pouvons également embaucher des conseillers juridiques pour des interventions précises devant les tribunaux.

Le sénateur Murray : J'allais vous poser une question là-dessus. Je regardais la loi, ainsi que l'autorité qui vous a été dévolue, « A » d'aller devant les tribunaux au nom d'un plaignant si ce plaignant s'adresse à la Cour fédérale, ou d'intervenir « dans toute instance judiciaire relative au statut ou à l'usage du français ou de l'anglais ». À quelle fréquence vous servez-vous de ce pouvoir? Votre bureau est-il prompt à entamer des poursuites en justice?

Mme Adam : Nous sommes assez actifs.

Le sénateur Cools : Là où il y a de l'argent, on peut s'attendre à ce qu'il y ait de l'activité.

Mme Adam : Madame le sénateur, je ne suis pas avocate.

Le sénateur Cools : Je parle des avocats qui le font. Pour eux c'est comme une autorisation d'imprimer des billets.

Mme Adam : Ces gens-là coûtent très cher.

Le sénateur Cools : Ils coûtent très cher, parce que vous êtes prête à payer. Si vous payiez moins, ce serait différent.

Le sénateur Day : Je suis ingénieur.

Le président : Avant que chacun d'entre nous donne sa profession, nous aurons dépassé le temps alloué à ce comité et le sénateur Murray doit finir sa question.

Le sénateur Murray : J'ai posé ma dernière question.

Le président : Le sénateur Cools a une petite question.

Le sénateur Cools : Pourriez-vous nous faire part des résultats sur la communauté anglophone au Québec? S'il y a une communauté qui se sent misérable et abandonnée de son gouvernement, c'est certainement celle-là. Je suis tout à fait consciente du bon travail effectué par le Commissariat, mais j'ai vraiment peur pour l'avenir de la communauté anglophone de Montréal.

J'ai trois petites questions. Tout d'abord, puisque vous avez soulevé la question de l'anglais à Montréal, que fait-on pour les Canadiens de race noire? Les Noirs sont souvent unilingues.

Le président : Les Haïtiens?

Le sénateur Cools : Je parle de ceux qui sont originaires des Antilles; la plupart des Noirs au Canada sont unilingues. On m'a dit qu'il était difficile pour eux de progresser dans la fonction publique, à cause de leur unilinguisme. Il y en a peu ici mais de temps à autre, il y en a certains qui viennent des Antilles anglophones, et ils ont un handicap. Dans d'autres parties du Canada, cela est vrai, peut-être que les Haïtiens ont un avantage, mais je parle d'un problème qui touche beaucoup de gens. Est-ce que vous avez quelque chose à nous dire là-dessus?

Puis rapidement, en ce qui concerne les hauts fonctionnaires, avez-vous des statistiques sur le nombre de francophones unilingues ou d'anglophones unilingues? Cela m'intéresse parce que le désir d'apprendre une langue tôt dans la vie est quelque chose que nous devons encourager. Je pense qu'encourager l'apprentissage des langues, particulièrement chez les enfants ou à l'école, devrait donner une idée plus claire de ce qui se passe. Si vous pouviez nous dire quelque chose à cet égard vraiment très rapidement.

Mme Adam : Combien de minutes me donnez-vous?

Le président : Deux minutes.

Le sénateur Day : Vous pourriez peut-être nous donner la réponse par écrit.

Mme Adam : Je n'ai pas dit que c'était l'anglais à Montréal. Ce sont les collectivités anglophones dans la province de Québec, parce que la collectivité anglophone, ou plutôt les collectivités anglophones au Québec...

Le sénateur Cools : Bien entendu.

Mme Adam : Montréal a une réalité qui ne se compare pas aux autres endroits de la province. Dans cette étude, et je n'entrerai pas dans les détails, faute de temps — si vous n'en avez pas reçu d'exemplaire, je me ferai un plaisir de vous en faire parvenir un — nous constatons qu'il y a une collectivité qui est en évolution, qui est très bilingue, de plus en plus, et très diversifiée. Les gens de cette collectivité qui parlent une langue autre que le français ou l'anglais ont tendance à maintenir leur langue, ce qui n'est pas le cas ailleurs au Canada. C'est une autre possibilité que nous pourrions examiner.

Il y a des défis qui sont très précis, mais je n'irai pas plus loin, sauf pour vous dire que la semaine prochaine je participerai à une réunion sur la recherche, organisée par l'Université du Québec à Montréal, l'UQAM, sur la collectivité anglophone. Les chercheurs de l'université et d'ailleurs se réuniront pour discuter de la meilleure façon de documenter cette réalité et pour fournir de l'information sur les politiques, etc. C'est une orientation très positive.

Pour ce qui est des minorités visibles qui travaillent à la fonction publique, c'est une question sur laquelle se penchent actuellement les organismes centraux; on examine les mythes aussi pour tenter de distinguer la réalité. Je sais qu'il existe des études qui examinent les minorités visibles bilingues au Canada. Il y en a, mais où sont-elles?

Comment pouvons-nous mieux appuyer ce groupe, si ces gens-là ne sont pas bilingues? Si nous voulons respecter notre objectif, comment pouvons-nous venir davantage en aide à un groupe de fonctionnaires qui souhaitent apprendre l'autre langue officielle? Je crois que les organismes centraux se penchent sur la question. Ce qui nous préoccupe aussi est cette impression qu'il faut connaître l'autre langue pour postuler un emploi dans la fonction publique. C'est quelque chose qui nous inquiète.

Le sénateur Cools : Je crois que vous allez découvrir que cela dissuade bon nombre de personnes. Je ne sais pas comment régler un tel problème, mais il faut certainement s'y intéresser.

Mme Adam : Pour trouver une solution à un phénomène, il faut le documenter. Quelles sont les variables? Il faut cerner le problème sans se fier aux ouï-dire ou aux preuves non scientifiques, ce qui est trop souvent le cas, malheureusement, à la fonction publique.

Le sénateur Cools : Une des raisons pour lesquelles on a constaté ces perturbations dans les collectivités anglophones du Québec est, pour être franche, la migration massive. Je suis une de ces Québécoises qui sont parties parce que, comme vous le savez, il n'y avait aucun avenir pour moi. Il y a longtemps, des villes comme Québec avaient des collectivités anglophones en plein essor. Ce n'est plus le cas.

Le sénateur Murray : Elles ont été assimilées.

Le sénateur Cools : Non, elles n'ont pas été assimilées. J'aimerais savoir combien de Canadiens anglais ont quitté le Québec après 1970 parce qu'ils n'arrivaient pas à avancer. Je pourrais vous nommer plus d'une soixantaine de personnes partout au pays, des personnes que je connais personnellement, qui sont parties, et dont personne ne veut parler.

Mme Adam : Cela se trouve en partie dans notre étude.

Le président : Madame la commissaire, voilà un sujet intéressant pour votre prochaine comparution devant le comité. Je vous remercie d'être venue aujourd'hui.

Mme Adam : Merci de nous avoir invitées.

La séance est levée.


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