Délibérations du comité sénatorial permanent des
Finances nationales
Fascicule 11 - Témoignages
OTTAWA, le mercredi 23 février 2005
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales, conformément à son ordre de renvoi, se réunit ce jour à 18 h 33 pour faire l'étude du projet de loi C-24, Loi modifiant la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces et d'autres lois en conséquence (paiements de péréquation aux provinces et financement des territoires).
Le sénateur Donald H. Oliver (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Honorables sénateurs, je déclare ouverte la quinzième séance du Comité sénatorial permanent des finances nationales. Je vous rappelle que le domaine d'intérêt de ce comité est celui des dépenses gouvernementales, soit directement par l'entremise du Budget principal des dépenses, soit indirectement, par l'entremise de projets de loi.
[Français]
Hier, le Sénat a renvoyé le projet de loi C-24, Loi modifiant la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces, à notre comité.
[Traduction]
Ce comité sera très occupé durant le mois de mars étant donné le dépôt du Budget supplémentaires des dépenses (B) 2004-2005 et du Budget principal des dépenses pour 2005-2006. C'est la raison pour laquelle le comité permanent a décidé d'entendre le secrétaire parlementaire et les fonctionnaires du ministère des Finances ce soir.
Le comité permanent a également donné instruction au greffier d'inviter les provinces et les territoires à venir s'exprimer concernant ce projet de loi. Afin d'entendre les représentants des provinces et des territoires désireux de comparaître, le comité a l'intention de tenir une réunion en-dehors de sa grille horaire habituelle, le lundi 7 mars, de manière à ne pas bouleverser un emploi du temps déjà chargé. Au fur et à mesure que nous recevrons les réponses des provinces et des territoires, le bureau du greffier fera circuler les avis de réunion à tous les sénateurs.
[Français]
Pour commencer notre réunion ce soir, j'aimerais souhaiter la bienvenue à l'honorable John McKay, secrétaire parlementaire du ministre des Finances. M. McKay a été élu une première fois à la Chambre des communes en 1997.
[Traduction]
M. McKay a été nommé secrétaire parlementaire du ministre des Finances en juillet 2004.
Bienvenue, monsieur McKay. Après votre déclaration préliminaire, mes collègues souhaiteraient vous poser quelques questions.
L'honorable John McKay, C.P., député, secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Bureau du ministre des Finances : Merci, monsieur le président. Afin de sauver du temps, je ne ferai pas d'exposé à proprement parler, mais je vais plutôt vous présenter quelques faits saillants.
Comme vous êtes des parlementaires expérimentés, vous savez sans aucun doute que la grande majorité des transferts aux provinces et aux territoires s'effectuent au moyen de cinq programmes principaux : le Transfert canadien en matière de santé, le Transfert canadien en matière de programmes sociaux, le Transfert visant la réforme des soins de santé, le programme de péréquation et la formule de financement des territoires. Nous nous attarderons plus particulièrement aujourd'hui à ces derniers. La plupart d'entre vous ont entendu parler du montant de 33 milliards de dollars qui sera versé au cours des dix prochaines années, et du taux de 3,5 p. 100 par année qui sera appliqué durant cette période.
Ce nouveau cadre vise à répondre directement à certaines revendications des provinces. En effet, les provinces avaient réclamé un seuil de financement et la certitude que les versements seraient faits régulièrement afin de faciliter leur planification budgétaire.
Le Premier ministre a convoqué une réunion des premiers ministres au cours de laquelle cet arrangement a été négocié. Jamais auparavant il n'y avait eu de seuil de financement rattaché aux paiements de péréquation. En effet, dans le passé, les versements fluctuaient en fonction de la capacité fiscale et de la performance économique des provinces et des territoires. Je tenais à souligner ces éléments.
Ce soir, je suis accompagné de M. Sean Keenan, M. François Delorme et Mme Clare Scullion du ministère qui m'aideront à répondre à vos questions. Je vous suis reconnaissant de m'avoir donné la possibilité de comparaître devant le comité et de reconnaître que les provinces souhaitent que l'on fasse diligence étant donné que cette entente négociée vise à remplir un engagement pris par le gouvernement du Canada et le premier ministre.
Le président : Merci, monsieur McKay. Nous vous sommes reconnaissants aussi de nous laisser beaucoup de temps pour vous poser des questions.
En plus des membres réguliers du comité, ce soir nous avons avec nous le sénateur Massicotte, qui est le parrain désigné par le gouvernement pour ce projet de loi. Hier, à la Chambre, le sénateur Massicotte a présenté un excellent exposé non seulement du projet de loi, mais aussi sur la signification de la péréquation pour le Canada, ici au pays et ailleurs dans le monde. J'invite le sénateur Massicotte à poser la première question.
Le sénateur Massicote : Je comprends très bien le projet de loi, mais j'aimerais aussi bien comprendre toute la théorie de la péréquation. Évidemment, en théorie, si toutes les provinces avaient les mêmes coûts de prestation, la péréquation aurait pour effet de mettre tout le monde sur un pied d'égalité en ce qui concerne la prestation des services publics.
Toujours en théorie, les autres grands programmes sont financés, depuis peu, en fonction du nombre d'habitants. Lorsqu'un programme est ajusté en fonction du revenu, tout le reste devrait l'être en fonction du nombre d'habitants. On pourrait faire valoir qu'une fois que l'on a apporté des rajustements en fonction du revenu, et effectué une redistribution de la richesse, il ne devrait pas être question d'accorder du financement pour d'autres programmes.
M. McKay : Les choses se compliquent un peu. Il y a 33 indices —
Le sénateur Massicote : Je comprends la théorie de la péréquation. L'objectif du programme est de permettre à chaque province d'atteindre ce seuil.
Le sénateur Murray : Sauf, qu'elles n'atteignent pas ce seuil.
Le sénateur Massicote : La théorie veut que chaque province puisse atteindre ce seuil, et le groupe d'experts va se pencher sur les programmes afin de les améliorer.
Je crois comprendre que tous les autres programmes devraient être établis en fonction du nombre d'habitants, mais ils ne le sont pas. Pourriez-vous m'expliquer quelle est la philosophie à l'origine de la décision de disposer d'un si grand nombre de subventions pour les diverses provinces alors qu'en théorie le financement est censé avoir été réparti également.
M. McKay : Les transferts pour les soins de santé sont distribués en fonction du nombre d'habitants, mais les paiements de péréquation ne le sont pas. On s'entend généralement pour dire que le gouvernement s'efforce de corriger ces inégalités de diverses manières. Parfois, on ne peut tout simplement pas distribuer les montants en faisant l'équation un habitant égale un dollar.
Par ailleurs, les provinces ont des besoins particuliers. Par exemple, toutes les provinces n'ont pas un taux de chômage élevé, mais elles reçoivent néanmoins des paiements de péréquation, et c'est la raison pour laquelle les mesures relatives à l'emploi sont ciblées dans certaines régions précises. C'est dans la nature de la Confédération que nous tentions d'aborder ces questions de façon plus équitable au moyen d'un éventail de programmes, et en particulier de la péréquation.
M. François Delorme, directeur, Division des relations fédérales-provinciales, ministère des Finances Canada : Je pense que le programme de péréquation est le seul qui figure dans la Constitution. À sa création, en 1957, il avait pour objectif principal de réduire les inégalités entre les provinces. C'est en raison de la nature même de la péréquation que le programme a été conçu de cette manière.
Le sénateur Massicote : Je n'ai aucun problème avec la péréquation. Je pense qu'elle a beaucoup de mérites. Si on voulait simplifier le gouvernement, il suffirait de recommander que la péréquation soit mise en place de manière à ce que chaque province possède le même potentiel relativement à la prestation des services publics, et ensuite de se retirer.
Le sénateur Murray : C'est le fédéralisme à l'état pur.
Le sénateur Massicote : Peut-être que l'on pourrait aussi envisager des transferts en matière de programmes sociaux, mais dès lors, on commence à se mêler de secteurs de compétence qui ne nous appartiennent pas. La politique étant ce qu'elle est, les députés souhaitent un peu de visibilité, et s'efforcent d'accomplir des choses pour leurs électeurs. C'est ce qui explique cette compétition en vue d'être reconnu comme celui qui fait bouger les choses.
M. McKay : Je ne pense pas qu'il y ait grand-chose à ajouter.
M. Sean Keenan, chef, Péréquation et élaboration des politiques, Division des relations fédérales-provinciales, ministère des Finances Canada : Les provinces fournissent un certain panier de services aux municipalités aussi, et la raison d'être du programme de péréquation est de s'assurer que ces services sont fournis sur une base comparable aux niveaux d'imposition. Il existe d'autres types de transferts, le transfert en matière de santé et le transfert en matière de programmes sociaux, dans le cadre desquels il y a un partage général, et ces transferts sont accordés en reconnaissance d'une certaine égalité entre tous les Canadiens et, par conséquent, ils sont effectués sur le principe du transfert égal par habitant.
Mais le gouvernement fédéral doit aussi tenir compte des disparités régionales, et cela vise les mesures d'aide à l'agriculture et les dépenses militaires. Le budget pour la Marine, par exemple, ne sera dépensé que dans les régions côtières. C'est un fait.
Certains programmes qui sont du ressort du gouvernement fédéral doivent être établis en fonction des besoins des régions, et c'est précisément ce que fait le gouvernement. J'ignore si vous voulez parler de ces programmes en particulier, mais il est clair qu'il est du ressort du gouvernement fédéral, dans les secteurs où il fournit des paiements de péréquation à long terme et où il y a des laissés pour compte, de procéder à des rajustements, et c'est d'ailleurs ce qu'il a fait à maintes reprises.
Le sénateur Massicote : Je suis très satisfait de ce projet de loi, et c'est la raison pour laquelle je le parraine. Mais, la bonne nouvelle, en ce qui me concerne, c'est que je parraine celui-ci, et pas les autres.
Le sénateur Murray : Il y a des partisans du fédéralisme pur et dur, et il y en a certainement quelques-uns dans votre province. J'ai lu l'autre jour que l'un des ministres a déclaré que l'on préférerait un programme de péréquation considérablement plus généreux en remplacement des programmes fédéraux-provinciaux à frais partagés afin de laisser les provinces s'acquitter de leurs responsabilités, mais ce n'est pas ainsi que l'on procède dans ce pays, depuis belle lurette. Mais je prends bonne note de votre remarque.
Avez-vous une idée du moment où entrera en vigueur la loi relative aux accords sur les ressources extracôtières de Terre-Neuve-et-Labrador et de la Nouvelle-Écosse?
M. McKay : Je ne peux pas vous donner une date précise. Mais je pense que « bientôt » serait une réponse valable, étant donné que ce projet de loi n'a pas encore été déposé devant la Chambre.
Le sénateur Murray : Y a-t-il un échéancier de prévu?
M. Keenan : On s'est engagé à ce que cette loi soit adoptée dans les meilleurs délais.
Le sénateur Murray : Ce n'est pas comme pour le présent projet de loi dont nous devons faire l'étude avant la fin de l'exercice financier?
M. McKay : Il n'y a pas d'échéancier.
Le sénateur Murray : Je ne peux résister à l'envie de vous poser une question au sujet de l'Accord sur les ressources extracôtières. Le document d'information publié par le Ministère affirme que l'entente signée avec la Nouvelle-Écosse prévoit une extension de huit ans dans la mesure où la province continuera de recevoir des paiements de péréquation en 2010-2011 ou 2011-2012 et où sa dette nette par habitant ne sera pas inférieure à celle d'au moins quatre autres provinces. Dans le cas de Terre-Neuve-et-Labrador, on a prévu une disposition semblable, c'est-à-dire que les frais du service de la dette par habitant ne doivent pas être inférieurs à ceux d'au moins quatre autres provinces.
Quelle est l'incitation à la prudence fiscale dans cette disposition? Avez-vous une idée de la raison pour laquelle on a inclus cette disposition?
M. McKay : Je ne connais pas la réponse à cette question.
Le sénateur Murray : Il semble y avoir une incitation à maintenir la dette par habitant assez élevée, ne trouvez-vous pas?
M. Delorme : C'est l'une des deux conditions, continuer à bénéficier des paiements de péréquation et se trouver dans une situation fiscale qui soit pire qu'ailleurs, du moins relativement.
Le sénateur Murray : Mais il s'agit d'un encouragement à ce que la situation demeure pire qu'ailleurs.
M. Delorme : Je comprends cela. Ces conditions ont été négociées, et c'est la raison pour laquelle il y a deux conditions différentes — les frais d'endettement pour Terre-Neuve et le niveau de la dette pour la Nouvelle-Écosse. Si, en dépit de leurs efforts, elles se trouvent toujours dans de telles situations, elles se qualifieraient pour la seconde période de huit ans.
Le sénateur Murray : La pertinence du projet de loi que nous sommes en train d'étudier tient au fait qu'il existe un certain risque pour ces deux provinces dans le sens que personne ne sait à quoi pourrait bien ressembler le programme de péréquation après le dépôt du rapport du Groupe d'experts. N'y a-t-il pas là un certain risque? Ne pourrait-il pas arriver que l'une ou l'autre, ou même les deux provinces, en vertu de quelque nouveau programme, ne soit plus admissible à la péréquation?
Par exemple, l'une des choses que le Groupe d'experts est censé examiner ce sont les variables macro-économiques. À supposer que l'une de ces variables macro-économiques soit la croissance du PIB. Terre-Neuve-et-Labrador a connu une croissance assez rapide du PIB ces dernières années. Supposons que les deux provinces ne soient plus admissibles à la péréquation en raison d'un gros changement dans le programme de péréquation. Ne sont-elles pas exposées à un risque?
M. McKay : Vous signalez des mesures incitatives perverses. Il existe des tas de programmes gouvernementaux comportant des mesures incitatives perverses. Il suffit de penser aux critères d'admissibilité à l'assurance-emploi — qui est admissible et qui ne l'est pas — ce ne sont pas les exemples qui manquent pour argumenter autour des mesures incitatives perverses. Je suis sûr, sénateur, que vous connaissez ces arguments mieux que moi. Je vous suggère respectueusement, toutefois, que vos spéculations et vos hypothèses sont très éloignées de ce que nous devons examiner ce soir.
Le sénateur Murray : Le ministre des Finances de Terre-Neuve a écrit à M. Goodale. Je n'ai pas vu la lettre, mais en revanche, j'ai pu lire la réponse de M. Goodale. Il reconnaît que la préoccupation est justifiée, et il ajoute que dans l'éventualité d'une contestation, il aura recours à un médiateur et tiendra compte de ses recommandations.
M. Keenan : Les conditions de cet accord suggèrent que nous devrons préciser le montant du paiement de péréquation que la province reçoit et celui qu'elle recevrait si l'on soustrayait les revenus des ressources extracôtières du programme. Aujourd'hui, c'est très simple parce que les calculs se font sur des bases séparées. On peut remettre la base à zéro, et refaire le calcul.
Étant donné l'incertitude qui plane sur les conclusions du Groupe d'experts concernant l'utilisation de la formule, elles ont tenté d'obtenir l'assurance qu'elles pourraient s'adresser ailleurs dans l'éventualité où elles ne seraient pas satisfaites des méthodes de calcul.
Le sénateur Murray : Je suis sûr que ces provinces vont aiguiser leurs crayons et scruter de près toutes les recommandations du Groupe d'experts afin de s'assurer qu'elles ne causeront aucun préjudice à leur situation en vertu de l'accord sur les ressources extracôtières. Toutefois, il se peut que M. McKay ait raison, et que mes inquiétudes se révèlent injustifiées.
J'aimerais connaître les chiffres concernant la Saskatchewan et la Colombie-Britannique. Dans le budget déposé en mars 2004, la Saskatchewan était admissible à des paiements de 462 millions de dollars et la Colombie-Britannique à des paiements de 824 millions de dollars, y compris leur part respective du montant supplémentaire de 150 millions de dollars qui a été ajouté dans le budget du 23 mars. Le montant total des paiements de péréquation se chiffrait alors à 9,6 milliards de dollars.
En octobre 2004, il semble que l'assiette totale ait diminué à 8,8 milliards de dollars, d'après certains documents que vous avez rendus publics. Par la suite, le gouvernement a fixé le seuil à 10 milliards de dollars pour 2004-2005, et par ailleurs il a déclaré qu'aucune province n'obtiendrait moins en 2004-2005 que ce qui avait été prévu dans les documents du budget.
Les deux provinces qui bénéficiaient de cette dernière disposition étaient la Colombie-Britannique et la Saskatchewan, et le montant en question était de 774 millions de dollars. Je trouve les tableaux très difficiles à consulter parce que, à un moment donné, ils ne mentionnent que les augmentations, et je n'ai pas les chiffres de départ.
En octobre, avant que l'on ne décide d'adopter ces seuils de financement, quels étaient les montants au titre des paiements de péréquation auxquels la Saskatchewan et la Colombie-Britannique étaient admissibles? Lorsque le montant a été fixé à 8,8 milliards de dollars, quel était le montant attribué à la Saskatchewan et à la Colombie- Britannique?
M. Delorme : Il était de 62 millions de dollars pour la Saskatchewan et de 434 millions de dollars pour la Colombie- Britannique.
Le sénateur Murray : Les chiffres du budget du 23 mars 2004 étaient de 462 millions de dollars pour la Saskatchewan et de 824 millions $ pour la Colombie-Britannique, donc je suppose qu'il s'agit des seuils pour ces provinces et que c'est ce qu'elles vont recevoir en 2004-2005.
M. Delorme : Le montant du paiement auquel avait droit la Saskatchewan dans le budget du mois d'octobre, comme vous venez de le signaler, était de 62 millions de dollars. Avec les mesures de protection que nous avons prévues, le montant total du paiement accordé à la Saskatchewan, avec le montant attribué en vertu de la disposition « plancher » et la protection nette, serait de 590 millions de dollars.
Le sénateur Murray : Comment en arrivez-vous à ce chiffre? C'est la somme de 62 millions de dollars plus quoi?
M. Delorme : C'est la manière dont le calcul est effectué. C'est compliqué.
Le sénateur Murray : Ah vraiment?
M. Keenan : Un certain nombre d'années restent ouvertes. Comme vous le savez peut-être, nous ne finalisons pas les calculs des paiements de péréquation avant que 30 mois se soient écoulés après la fin de l'exercice, donc il y a toujours une période ouverte de quatre ans.
Lorsque nous amorçons un nouvel exercice financier, nous avons essentiellement payé tous les montants exigibles jusqu'à la fin du dernier exercice, et avec les estimations du mois de février, nous disposons d'une première estimation pour chaque province, le montant pour la Saskatchewan se situant à 462 millions de dollars.
Le sénateur Murray : C'était en mars 2004.
M. Keenan : Oui, c'était en mars. Avec le budget du mois d'octobre, non seulement nous avons recalculé les paiements pour 2004-2005, mais aussi, nous avons refait les calculs des paiements pour 2001-2002, 2002-2003 et 2003- 2004. Dans le cas de la Saskatchewan, ces rajustements tournaient autour de 200 millions $ de moins, aussi la province nous aurait dû des sommes pour les années antérieures.
Le sénateur Murray : Pourriez-vous vous en tenir à 2004-2005, néanmoins?
M. Keenan : La politique stipulait que les provinces ne devaient pas recevoir moins que ce qu'on leur avait promis en février 2004.
Le sénateur Murray : Il s'agissait de 462 millions de dollars et on s'est retrouvé avec un montant de 62 millions de dollars en octobre.
M. Keenan : Oui, ce qui représente une baisse de 400 millions. Étant donné la baisse au cours des autres années, nous avons dit que ces montants auront une incidence sur vos revenus de cette année, et que nous ferons le rattrapage au cours de l'exercice 2004-2005, aussi, comme nous ne les récupérons pas, nous avons dû leur verser un montant supplémentaire. Voici comment nous avons procédé : nous avons fait le rattrapage, puis nous avons versé un montant supplémentaire
Le sénateur Murray : C'est ainsi que la province a reçu 590 millions de dollars.
M. Keenan : Exactement.
Le sénateur Murray : Et que s'est-il passé avec la Colombie-Britannique?
M. Keenan : La situation est assez semblable. Il y avait une période ouverte de quelques années, certaines avec un solde positif, et d'autres avec un solde négatif.
Le sénateur Murray : Le montant de départ était de 824 millions de dollars en mars 2004 et en octobre, ce montant n'était plus que de 434 millions de dollars. À combien se chiffre-t-il maintenant?
M. Keenan : La province va recevoir un paiement de 248 millions de dollars.
Le sénateur Murray : Comment peut-elle recevoir un paiement de 248 millions de dollars alors qu'elle bénéficie d'une mesure de protection? Ne devrait-elle pas recevoir plutôt 824 millions de dollars?
M. Keenan : Cela s'explique par le fait que certaines années antérieures ont un solde positif, et d'autres un solde négatif.
Le sénateur Murray : Je vois. Donc, pour 2004-2005, vous n'accordez pas le montant de 824 millions de dollars. D'après le seuil de financement, la province n'était pas censée obtenir moins que ce qui avait été prévu dans le budget de mars, soit 824 millions de dollars, alors combien la province recevra-t-elle?
M. Keenan : Pour l'exercice 2004-2005, elle recevra 682 millions de dollars plus quelques rajustements positifs pour les années antérieures, ce qui la ramènera au niveau de 824 millions $.
Le sénateur Murray : Je vois. Donc, les rajustements positifs sont des rajustements négatifs que vous avez transformés en rajustements positifs. Vous avez renoncé aux rajustements négatifs.
M. McKay : C'est exact. En réalité, la province nous devait de l'argent.
Le sénateur Murray : Maintenant que je possède toute cette information, que vais-je en faire?
S'il n'y avait pas eu ces rajustements négatifs transformés en rajustements positifs, le seuil de financement et ainsi de suite, en se basant sur la formule qui existait jusqu'à maintenant, ni la Saskatchewan ni la Colombie-Britannique ne seraient admissibles en 2005-2006.
M. McKay : Aux paiements de péréquation?
Le sénateur Murray : Oui. Elles ne bénéficieraient pas de paiements de péréquation, n'est-ce pas?
M. Keenan : C'est difficile à dire parce que nous n'avons pas encore les données pour 2005-2006, mais il est certain que les chiffres pour octobre se sont révélés de beaucoup inférieurs à ceux de février.
Le président : À quel moment se termine la période de 30 mois pour l'exercice 2005-2006? Quand prend fin cette période de 30 mois?
M. Keenan : Elle devrait normalement se terminer au milieu de 2008-2009.
Le sénateur Murray : Toutefois, cela n'a plus d'importance.
M. Keenan : Le projet de loi C-24 prévoit des montants fixes pour chaque province en 2005-2006. Ces montants sont fixés depuis le début de l'exercice, il n'est donc plus nécessaire de faire des calculs.
Le sénateur Murray : En octobre 2004, si ce n'avait été de votre politique de renoncement aux recouvrements, à laquelle s'ajoutent les seuils de financement que vous avez introduits, la Saskatchewan et la Colombie-Britannique ne seraient pas visées par le programme de péréquation. Je soutiens que ni l'une ni l'autre de ces provinces n'auraient bénéficié de paiements en 2005-2006.
M. Keenan : Nous n'avons pas de chiffres pour la période qui va au-delà du mois d'octobre. Nous avons les chiffres en date d'aujourd'hui. Le gouvernement de la Colombie-Britannique prévoyait des paiements nuls au titre de la péréquation. Le gouvernement de la Saskatchewan a laissé entendre qu'il ne bénéficierait d'aucun paiement au titre de la péréquation si ce n'était des dispositions du présent projet de loi. Mais nous n'avons pas les chiffres officiels pour la période qui va au-delà du mois d'octobre.
M. Delorme : Comme vous le savez, chaque année du programme de péréquation est influencée par plusieurs autres années. Nous devons procéder à des révisions par rapport aux années antérieures en plus de celles qui visent l'année en cours.
Le sénateur Murray : Est-ce que ces rajustements figurent dans le plan budgétaire de 2004? Est-ce que le montant de 1,1 milliard $ pour le Nouveau-Brunswick comprend les rajustements pour les années antérieures? Le Tableau A6.1 dans le plan budgétaire de 2004 s'intitule « Droits à péréquation ». Est-ce que le montant des droits à péréquation indiqué pour le Nouveau-Brunswick inclut les rajustements pour les années antérieures et tout le reste?
M. Keenan : Au début de l'exercice financier, lorsque nous avons produit les premières estimations, en l'occurrence celles-ci, nous avons payé tous les rajustements en suspens pour toutes les années antérieures. Au début d'un exercice financier, nous commençons avec un montant résultant des premières estimations qui est fondamentalement net, c'est- à-dire qu'aucun rajustement n'y est intégré.
Au fil de l'exercice financier, avec l'arrivée des nouvelles données, nous procédons à de nouvelles estimations en octobre, et de nouveau en février, suivant un cycle normal, et ces estimations peuvent déboucher sur des rajustements visant à refléter les surestimations ou les sous-estimations.
Le sénateur Murray : Et ces rajustements conduisent à des additions ou à des soustractions?
M. Keenan : C'est exact.
Le sénateur Ringuette : On ne nous a pas parlé du programme de renoncement au recouvrement des paiements de péréquation en trop l'année dernière, lorsque nous avons étudié l'autre projet de loi sur la péréquation. Je me souviens qu'à l'époque, il y avait eu un paiement en trop du gouvernement du Canada au gouvernement du Québec que le gouvernement du Québec devait rembourser, et qu'il y avait eu un paiement en moins du gouvernement du Canada au gouvernement de la Saskatchewan qui devait être fait à la Saskatchewan suivant la formule et la révision de deux ans.
Qu'est-ce qui s'est passé? Êtes-vous en train de nous dire que vous avez renoncé au recouvrement des paiements en trop et au remboursement des paiements en moins?
M. McKay : Oui, le renoncement au recouvrement est une caractéristique particulière de ce projet de loi. Vous n'en avez jamais entendu parler dans un autre projet de loi parce que cette caractéristique s'applique uniquement à celui-ci.
Le sénateur Ringuette : S'agit-il d'une situation unique en son genre?
M. McKay : C'est exact.
Le sénateur Ringuette : Pourriez-vous nous dire à quoi le gouvernement a renoncé et pour qui? Envoyez-nous une liste. C'est très important. Si certaines provinces ont pu bénéficier d'un renoncement au remboursement d'un paiement en trop et que d'autres n'ont pas reçu de compensation pour un paiement en moins, cela entraîne une distorsion complète du processus de péréquation de l'année précédente en ce qui concerne les plafonds.
M. McKay : Cette liste existe déjà. Toutefois, vous voudrez probablement que l'on vous explique les hauts et les bas du renoncement.
Le sénateur Ringuette : Je sais comment les hauts et les bas fonctionnent par rapport à l'évaluation des années précédentes, et ainsi de suite. Ce qui m'intéresse, c'est que le renoncement ponctuel du gouvernement porte non seulement sur une seule année, mais aussi sur les trois précédentes dans un programme qui comportait un plafond, ce qui a une incidence sur toutes les autres provinces qui reçoivent des paiements de péréquation. Cela influe sur la répartition de l'assiette.
M. Keenan : Pour dire les choses clairement, dans le passé, nous avons connu des situations où de nouvelles données nous étaient parvenues par l'entremise du recensement et de l'impôt sur le revenu.
Le sénateur Ringuette : Nous comprenons ce processus.
M. Keenan : Il y a eu d'importantes diminutions dans les paiements de péréquation l'année dernière et, pour des raisons administratives, le gouvernement a décidé que les recouvrements que nous étions tenus de faire en vertu de la loi bénéficieraient d'une exonération d'intérêts pour une période de cinq ans. C'est maintenant du passé.
Le paiement de 120 millions de dollars qui a été fait à la Saskatchewan dans le dernier budget visait à corriger une erreur effectuée dans l'évaluation de sa capacité fiscale en ce qui a trait aux concessions publiques.
Le sénateur Ringuette : Nous comprenons tout cela.
M. Keenan : Ce projet de loi comporte deux seuils individuels. Il stipule que le programme ne versera pas moins que le montant de 10 milliards de dollars prévu pour l'exercice financier en cours et qu'aucune province ne recevra moins que ce qu'on lui avait annoncé en février.
Étant donné que des rajustements aux années antérieures risqueraient d'avoir une incidence négative sur les paiements à verser à la Saskatchewan cette année, nous récupérerons ces montants à même les années antérieures, mais nous les rembourserons sous la forme d'un montant additionnel cette année de sorte que le montant total reçu ne sera pas inférieur au montant prévu en février.
La situation est la même pour le gouvernement de la Colombie-Britannique.
Le sénateur Ringuette : Parlez-moi donc de la situation du Québec, où il n'est pas question d'un paiement en moins, mais plutôt d'un paiement en trop.
M. Keenan : Par suite de l'augmentation de l'enveloppe totale qui est passée de 8,9 milliards de dollars à 10 milliards de dollars, le Québec recevra un paiement de 477 millions de dollars en vertu de ce projet de loi.
Le gouvernement avait suggéré que le remboursement de ces sommes s'effectue sur une période de cinq ans. En vertu de ce projet de loi, et aussi de la politique du gouvernement lors de la RPM, ce remboursement sera étalé sur une période de 10 ans et exonéré d'intérêts, et les remboursements ne commenceront pas le 1er avril de cette année, mais plutôt le 1er avril de l'an prochain.
Le sénateur Ringuette : Autrement dit, il n'est pas vraiment question d'une politique de renoncement. Il s'agit plutôt d'une redistribution des paiements, qu'il s'agisse de paiements en trop ou de paiements en moins. Donc, un nouveau mécanisme de redistribution adapté à ces situations.
M. Keenan : Oui. Nous augmentons le montant des paiements de péréquation pour toutes les provinces et aucune province ne recevra moins que ce qu'on lui avait promis en février. Cela signifie que nous payons à la Colombie- Britannique et à la Saskatchewan un peu plus que prévu afin de nous assurer que, sur le plan budgétaire, elles ne se retrouvent pas en plus mauvaise posture qu'elles ne l'auraient été au titre des paiements de péréquation prévus dans le budget du mois de mars.
Le sénateur Murray : Les paiements de péréquation ont donc été séparés de l'évaluation de la capacité fiscale relative pour l'avenir, n'est-ce pas?
M. Delorme : Ils le seront avec ce projet de loi.
Le sénateur Murray : Par conséquent, pour 2005-2006, on n'utilise aucune formule. Vous vous contentez tout simplement de partir du chiffre de 10,9 milliards de dollars, qui est la valeur totale de l'assiette —
M. McKay : Pour les deux premières années de ce plan, nous allons utiliser la même formule de calcul. C'est seulement la valeur de l'assiette qui est fixée.
Le sénateur Murray : Ce n'est pas tout à fait cela.
M. McKay : Lorsque le comité aura produit son rapport, il y aura probablement des changements apportés à la méthode de mesure de la capacité fiscale.
Le sénateur Murray : Si c'est ce que l'on a l'intention d'utiliser à titre de norme.
Pour 2005-2006, vous avez pris le montant de 10,9 milliards, et puis vous avez examiné la manière de le distribuer. Dans le document, on explique que l'on avait décidé que les paiements pour 2005-2006 seraient établis en fonction d'un compromis entre une moyenne des capacités fiscales pour les trois années précédentes, et une moyenne des parts respectives pour les trois années précédentes, ce qui n'est pas tout à fait la même formule, monsieur McKay.
M. McKay : Vous avez raison. Nous ne changeons pas les bases de calcul et nous n'avons pas l'intention d'introduire une nouvelle méthode de mesure ou quoi que ce soit du même genre.
Le sénateur Murray : Les paiements devraient être établis en fonction d'un compromis entre une moyenne des capacités fiscales pour les trois années précédentes, et une moyenne des parts respectives — et si je comprends bien, vous voulez parler des parts de l'assiette totale — pour les trois années précédentes.
M. Delorme : Je le répète, cette décision a été prise en consultation avec les provinces. Certaines provinces souhaitaient que la nouvelle assiette soit divisée en fonction des parts, et d'autres voulaient qu'elle soit divisée en fonction du nombre d'habitants, aussi nous en sommes venus à un compromis.
Le sénateur Murray : Le projet de loi stipule :
Pour l'application des alinéas (1)b) et c), les paiements de péréquation
et c'est précisément ce dont il est question —
... sont répartis entre les provinces suivant leur part respective du paiement visé à l'alinéa (1)a) au titre du paragraphe (2).
Cela signifie que pour les années qui suivent l'exercice 2005-2006, vous allez distribuer le montant de 10,9 milliards de dollars plus 3,5 p. 100 suivant la même répartition entre ces provinces. Cela semble vouloir dire que la Saskatchewan et la Colombie-Britannique continueront de recevoir des paiements de péréquation peu importe ce qui pourrait survenir.
Mme Clare Scullion, avocate générale principale, Direction juridique, ministère des Finances Canada : Cette disposition n'entre en vigueur qu'à une date à déterminer par le gouverneur en conseil. Nous l'avons incluse parce que, si le groupe d'experts tarde un peu à remettre ses conclusions, nous ne voulons pas retarder les paiements aux provinces, mais en même temps, nous ne voulions d'aucune manière interférer avec les recommandations du Groupe d'experts.
Le président : Pouvez-nous nous donner les noms des membres du Groupe d'experts?
Le sénateur Murray : Lors du discours du budget, j'ai entendu le nom d'un certain Al O'Brien.
M. Delorme : Il en est le président.
Le président : Qui fait partie du Groupe d'experts?
M. Delorme : La composition du groupe n'a pas encore été annoncée. Le seul nom rendu public pour le moment est celui du président, M. O'Brien.
Le sénateur Murray : Est-il un ancien fonctionnaire de l'administration fédérale ou provinciale?
M. Delorme : Il est un ancien sous-ministre des finances dans le gouvernement de l'Alberta.
Le sénateur Murray : J'aimerais attirer votre attention sur une réunion sur la péréquation à laquelle avaient assisté M. Delorme et M. Keenan ici même, le 27 novembre 2001. La réunion avait eu lieu à huis clos, mais il en était ressorti notamment, et nous l'avions mentionné dans notre rapport, que votre Ministère étudiait la possibilité d'adopter une formule basée sur des variables macro-économiques. Étant donné que les travaux du Ministère n'étaient pas achevés, il n'était pas prêt à faire de commentaires sur les mérites et les faiblesses de ce concept.
Trois ans et quelques mois plus tard, je suppose que votre étude est achevée et que vous pouvez nous faire part de vos conclusions concernant les mérites et les faiblesses de ce concept.
M. Delorme : Malheureusement, durant le précédent exercice de renouvellement que nous avons conclu l'année dernière, nous avions tellement à faire pour corriger ou améliorer un certain nombre d'assiettes fiscales importantes que nous avons décidé, en raison des ressources limitées dont nous disposions, de remettre à plus tard le travail sur l'approche des variables macro-économiques. Et c'est effectivement ce qui s'est produit, parce que nous avions trop à faire avec les autres assiettes fiscales.
Le sénateur Murray : Donc, le Groupe d'experts va partir de zéro, n'est-ce pas?
M. Delorme : Oui.
Le président : Monsieur McKay, j'ai été un peu désappointé lorsque, pour répondre à la question de l'un de mes collègues, vous avez dit que l'on n'avait fixé aucune date encore pour le dépôt de la loi sur les ressources extracôtières. Pourriez-vous nous dire si les chèques peuvent être émis avant que la loi ne soit adoptée, et si Terre-Neuve et la Nouvelle-Écosse peuvent s'attendre à recevoir des montants dans le cadre de l'accord qui est intervenu et qu'elles ont signé?
M. McKay : Je pense que les chèques peuvent être émis, mais je ne pense pas qu'ils puissent être envoyés.
Voici une réponse très compliquée à une question très simple, parce que tout dépend si l'argent proviendra des surplus de l'exercice 2004-2005 ou s'il sera réparti sur toute la durée de l'accord.
Si j'ai bien compris, les sommes ont été réservées à un certain niveau, mais elles ne sont comptabilisées qu'au moment où elles deviennent exigibles pendant la durée de l'accord. C'est une formule compliquée, mais M. Devries pourrait sans doute vous expliquer comment ce mécanisme fonctionne, en mettant de côté les aspects liés au vérificateur général.
M. Delorme : Le projet de loi doit d'abord être adopté pour que l'on soit autorisé à faire le paiement.
Le président : Même s'il s'agit d'un paiement forfaitaire unique?
M. Delorme : Le paiement forfaitaire fait partie de l'entente, et l'entente sera prescrite lorsque le projet de loi aura été adopté.
Le sénateur Day : Il s'agit seulement de 1,3 milliard de dollars.
Mme Scullion : La Loi constitutionnelle stipule que l'on ne peut verser un montant à même le Trésor sans l'autorisation du Parlement.
Le sénateur Harb : Merci, monsieur McKay, pour l'excellent travail que vous faites, pour ce projet de loi en particulier et tous les autres.
Si j'ai bien compris, le gouvernement propose une démarche en trois volets : se doter d'un nouveau cadre qui établira les règles du jeu; créer un Groupe d'experts indépendant; verser des paiements de péréquation minimaux chaque année aux provinces admissibles.
Est-ce exact?
M. McKay : C'est exact.
Le sénateur Harb : Pour ce qui est du Groupe d'experts, le mandat a été décidé et les provinces, le gouvernement canadien ainsi que le secteur privé nommeront les membres qui les représenteront. Étant donné que les provinces contribueront de très près au Groupe d'experts, pourquoi leurs recommandations seront-elles considérées à titre consultatif seulement? Pourquoi ces recommandations n'auront-elles pas toute la portée qui leur revient de plein droit? Si on leur reconnaissait leur portée légitime, le gouvernement devrait adopter les recommandations que le Groupe d'experts aura rendues après avoir débattu des questions litigieuses. Vu la complexité du domaine, ce serait le mieux à faire, non?
M. McKay : Première chose, le Groupe d'experts ne comptera aucun représentant du privé. Deuxièmement, le gouvernement canadien continue d'assumer la responsabilité constitutionnelle sur la question et le Groupe d'experts jouera un rôle consultatif. Le ne sera pas automatiquement lié par ses recommandations.
Le sénateur Harb : Ma deuxième question concerne l'entente conclue par le fédéral avec Terre-Neuve-et-Labrador et l'incidence de cette entente sur les paiements de péréquation aux autres provinces. La province d'Ontario a publiquement manifesté son désaccord avec tout le processus. Elle demande sa part du gâteau. La même chose pour la Saskatchewan. Un de mes collègues nous a rappelé que la Saskatchewan est aussi une province riche en ressources naturelles.
Le gouvernement ne s'est-il pas engagé sur un terrain glissant? Devons-nous nous attendre à une marée d'ententes du genre avec d'autres provinces, qui pourraient invoquer les mêmes arguments que Terre-Neuve-et-Labrador, ou faut-il considérer que c'est un cas isolé?
M. McKay : Cette question est essentiellement politique. Tout d'abord, les ententes signées avec Terre-Neuve-et- Labrador et la Nouvelle-Écosse sont extérieures au régime de la péréquation. Ce sont des ententes distinctes. Il n'est pas nécessaire de fouiller bien loin pour trouver d'autres exemples d'ententes distinctes signées entre le gouvernement canadien et une province en reconnaissance de circonstances uniques. À savoir si les dernières ententes créeront un précédent, demandez-le aux premiers ministres.
J'aimerais vous rappeler, honorables sénateurs, que ces ententes — autant l'accord sur la santé que l'entente sur la péréquation — ont été négociées entre le premier ministre du Canada et les premiers ministres des provinces en septembre et en octobre. Au terme des négociations, M. Martin a dit aux premiers ministres : « Je m'apprête à conclure une entente avec Terre-Neuve-et-Labrador et la Nouvelle-Écosse pour remplir ma promesse électorale. Y a-t-il des objections? » Aucune main ne s'est levée. Certains des premiers ministres les plus mécontents se sont même dits relativement satisfaits de l'entente sur la péréquation conclue avec leurs pairs à ce moment.
Je ne peux prédire si nous aurons droit à un autre vent de mécontentement. Nous parlons de 75 milliards de dollars sur 10 ans. Nous avons discuté de la plupart des points les plus litigieux avec les premiers ministres, et tous se sont déclarés satisfaits des ententes. Mais peu de temps après, de nouveau la ronde des litanies. C'est du déjà vu.
Le sénateur Harb : Ma dernière question porte sur le cadre proposé par le gouvernement, à savoir un montant plancher fixe pour les paiements de péréquation, à compter de 2004-2005 je crois. A-t-on prévu des dispositions en cas de ralentissement économique, de récession ou d'une quelconque catastrophe économique? Qu'arrivera-t-il si le gouvernement n'a plus les moyens de verser les paiements de transfert prévus? Nous en avons déjà parlé, depuis des années que nous en parlons, mais rien ne bouge.
M. McKay : Le gouvernement a fait un rajustement à la hausse à 10 milliards de dollars, puis finalement à 10,9 milliards de dollars. Si les choses se mettent à mal aller, le gouvernement canadien aura des problèmes. C'est un transfert à risque. Le gouvernement canadien absorbe le risque pour les provinces.
Le sénateur Downe : Monsieur McKay, ma question fera suite à celle du sénateur Harb. Je sais que le premier ministre Martin a rencontré tous les premiers ministres des provinces et qu'ils se sont entendus. Tout semblait baigner dans l'huile. Cependant, quand les premiers ministres ont connu le détail de l'Accord atlantique, ils ont eu une pointe de jalousie. Ils semblent avoir été frappés par le syndrome du « moi aussi ».
Je ne défends pas cette position, mais j'aimerais connaître votre opinion. Le premier ministre de l'Île-du-Prince- Édouard a déclaré publiquement que sa province n'ayant pas de ressources naturelles comme le pétrole ou la potasse, elle devrait recevoir une compensation pour les industries agricole et touristique, qu'il faudrait pondérer les recettes au titre du régime de péréquation. Bien entendu, si une telle demande était reçue, toutes les autres provinces demanderaient le même traitement.
En avez-vous entendu parler? Si oui, qu'en pensez-vous? Comment envisagez-vous la possibilité de considérer les secteurs non traditionnels comme ressources?
M. McKay : Non, je n'en ai pas entendu parler, de sorte que je n'ai pas de commentaire précis. D'un point de vue général cependant, je constate que toutes les provinces ont leurs récriminations. Le Québec prétend que les ressources renouvelables devraient être exclues du calcul. Pourtant, les Québécois ne semblent pas très chauds à l'idée de renégocier l'entente avec Terre-Neuve-et-Labrador concernant l'hydroélectricité. La Saskatchewan aussi a ses propres griefs.
L'Île-du-Prince-Édouard est plutôt choyée depuis qu'elle fait partie de la Confédération. Si je me souviens bien, ce sont 2 400 $ par habitant qui sont transférés à la province. C'est beaucoup d'argent. C'est moins que ce que les territoires reçoivent, mais c'est plus que toutes les autres provinces.
La meilleure réponse, et ce sera ma réponse finale, est que si le premier ministre veut que le tourisme et l'agriculture soient exclus du calcul de la péréquation, ou que l'on revoit la formule de pondération, il devra débattre son point devant le Groupe d'experts.
Le sénateur Downe : Monsieur McKay a raison. Sur une base par personne, l'Île-du-Prince-Édouard est assez choyée, je crois la plus choyée au Canada à cause de tout un train de mesures. Ce n'est pas l'opinion locale, mais c'est le message que certains d'entre nous tentons régulièrement de faire passer.
Pour ma part, c'est la question de la prestation des programmes qui m'inquiète le plus. L'Île-du-Prince-Édouard compte probablement la plus forte proportion de personnes âgées au Canada. Je me souviens d'avoir lu un discours prononcé il y a un an ou un an et demi par l'actuel ambassadeur du Canada aux États-Unis, Frank McKenna, dans lequel il affirmait que plus de la moitié des frais médicaux d'une personne sont concentrés dans les six derniers mois de sa vie. C'est tout à fait plausible puisque la plupart des gens meurent de maladie. Les coûts de la prestation des programmes sont donc plus élevés à l'Île-du-Prince-Édouard en raison de sa population âgée. Est-ce qu'on tient compte de la démographie dans le calcul des droits à péréquation, comme c'est le cas dans d'autres pays?
M. McKay : Je n'ai jamais entendu parler de cela. Après l'annonce du dernier budget, la population de l'Île-du- Prince-Édouard devrait être au septième ciel. En matière de budget favorable aux aînés, c'est certainement le meilleur jamais vu : les augmentations du SRG échelonnées sur les deux prochaines années représentent une somme assez gigantesque. Au terme des 2 années de la mise en oeuvre progressive, une personne vivant seule qui est admissible touchera un SRG de 400 $ et les couples auront droit à 700 $.
Les habitants de cette province devraient également être très contents de l'accord sur la santé, nettement avantageux pour les personnes âgées. À vrai dire, le régime de santé est plus avantageux pour les aînés que pour les jeunes sénateurs réunis ici.
Vous avez raison de dire qu'une grande partie des coûts de santé surviennent dans les dernières années de la vie. À savoir si le critère de la démographie sera appliqué pour le calcul de la péréquation, je vous invite à le demander au Groupe d'experts, mais je ne crois pas que ce sera possible à court terme. Je ne vois pas comment ce critère peut aider à mesurer la capacité fiscale.
Le sénateur Massicotte : Pour les territoires seulement. Pour les territoires, on tient déjà compte des coûts de la prestation des services.
M. McKay : Oui, pour des raisons de géographie.
Le sénateur Murray : Le Groupe d'experts examinera les besoins en matière de dépenses.
M. McKay : Ce n'est pas formulé tel quel dans le mandat, mais votre commentaire est juste.
Le sénateur Ringuette : Allez-vous produire la liste des paiements en trop et des paiements insuffisants, ainsi que des éléments de solution proposés dans le projet de loi?
M. Delorme : Oui, nous allons fournir cette liste.
Le sénateur Ringuette : Merci.
Pour poursuivre sur la même lancée que les sénateurs Harb et Downe, je souligne que la péréquation est fondée sur la capacité d'imposition, alors que dans le cas de l'accord sur la santé et d'une multitude d'ententes entre le fédéral et les provinces, y compris la petite dernière sur le financement des villes, les montants sont calculés par habitant.
Pas besoin d'un doctorat en sciences de l'administration pour savoir que les coûts de la prestation des services dans les régions rurales de Terre-Neuve, de l'Île-du-Prince-Édouard, du Nouveau-Brunswick et de la Saskatchewan dépassent de loin ceux des centres à forte densité de population comme Toronto et Montréal. Les coûts par habitant et la composition démographique sont des facteurs prépondérants. On trouve plus de personnes âgées dans les régions rurales que dans les centres-villes.
Il faut trouver l'équilibre. Or, je me demande si la répartition par habitant au titre des ententes entre le fédéral et les provinces n'avantage pas l'Ontario au détriment des provinces plus rurales. Les coûts par habitant de la prestation des programmes sont moins élevés dans les régions à forte densité de population que dans les milieux ruraux, et ces ententes entre le fédéral et les provinces établissent un cadre législatif qui assure un certain équilibre.
M. McKay : Ces considérations ne sont pas vraiment liées au projet de loi C-24. Pour les villes et les collectivités, il semble que le gouvernement adoptera la formule de la FCM, soit 75 p. 100 de la répartition calculée par habitant et 25 p. 100 selon une pondération favorable aux collectivités éloignées. Cette méthode de calcul tient donc compte des disparités.
Pour ce qui est de la répartition par habitant des allocations pour la santé, je viens de Toronto, et je peux vous affirmer que la construction d'un hôpital ou d'une clinique dans cette ville coûte beaucoup plus cher qu'à l'Île-du- Prince-Édouard.
Le sénateur Ringuette : Mais ce sont des dépenses ponctuelles en immobilisations.
M. McKay : Tous les coûts sont à l'avenant. Les salaires à Toronto sont de loin supérieurs à ceux de l'Île-du-Prince- Édouard. Je ne tiens pas à prolonger le débat, mais j'aimerais tout de même rappeler quelques faits. On ne peut pas se contenter d'affirmer que les coûts de la prestation sont plus élevés dans les régions rurales sans faire de nuances. Si on examine de près les coûts des services dans des endroits comme Toronto, on s'aperçoit très rapidement qu'ils sont assez faramineux par les temps qui courent.
Le sénateur Stollery : Tout le pays vient à Toronto pour recevoir des services, et nous devons payer pour les autres.
Le sénateur Ringuette : J'ai très hâte que nous ayons un débat digne de ce nom au sujet de l'accord sur la santé. Je réitère mon opinion dissidente de la vôtre. Peut-être est-ce dû au fait que j'ai été députée au Nouveau-Brunswick et que je sais ce qu'il en coûte pour fournir des services dans une province peu peuplée qui s'étend sur un vaste territoire. Pour desservir 20 000 personnes, 1 seul hôpital ne suffit pas. Il en faut trois, à cause des distances et de la configuration géographique.
M. McKay : J'entends bien le point de vue de la sénatrice Ringuette, mais nous devons convenir de notre désaccord.
[Français]
Le sénateur Ferretti Barth : Mes questions s'adressent à M. McKay. La péréquation est pour moi, en quelque sorte, un jeu de hasard. Il s'agit d'un mécanisme compliqué dont le fonctionnement m'échappe un peu. Pourtant, lorsque j'écoute les propos du sénateur Ringuette, le principe semble si simple. La politique créé parfois des choses simples et d'autres compliquées.
Le projet de loi C-24 prévoit la mise sur pied d'un comité consultatif d'experts indépendants pour formuler des recommandations sur l'allocation des paiements de péréquation. Cette recommandation ne date pas d'hier. Nous la retrouvons également dans un autre rapport du comité qui fut déposé dans le passé. Je suis heureuse que cette recommandation fasse à nouveau surface.
Mon prochain commentaire concerne le Québec. Un article paru aujourd'hui dans le quotidien La Presse indique que, selon le nouveau ministre des Finances du Québec, Ottawa a conçu un système de péréquation sans queue ni tête. Il vient de mettre sur pied des ententes avec Terre-Neuve-et-Labrador qui tendent à déformer ou dénaturer les régimes de péréquation. Le ministre déclare que si Terre-Neuve a le droit de conserver 100 p. 100 de ses redevances pétrolières pour une période de huit ans sans voir ses paiements de péréquation diminuer, pourquoi n'exclurait-on pas du calcul de la péréquation les revenus d'Hydro-Québec. Pouvez-vous commenter la déclaration du ministre des Finances du Québec?
[Traduction]
M. McKay : C'est toute la beauté de la Confédération. Depuis que nous formons une nation, les premiers ministres provinciaux et les ministres des finances se plaignent de la façon injuste dont Ottawa les traite. Le Québec semble toujours vouloir le beurre et l'argent du beurre — je vais vous donner un exemple de ce que j'avance qui concerne l'établissement des immigrants. Le Québec reçoit 3 200 $ par immigrant, alors que l'Ontario reçoit quelque chose comme 800 $. Je n'ai jamais entendu un ministre des finances québécois se plaindre des montants qu'il reçoit pour l'établissement des immigrants. Par ailleurs, j'en ai déjà parlé, une partie de l'hydroélectricité produite par Terre- Neuve-et-Labrador transite par le Québec, qui en tire des revenus colossaux. Là non plus, je n'ai jamais entendu un ministre des finances s'en plaindre.
Je ne sais pas quoi penser. Le Québec ne veut aucune ingérence de notre part dans les mécanismes d'évaluation de la valeur des biens. Mais il se plaint au sujet de la Colombie-Britannique à cet égard. Selon moi, en tout respect, je crois que le ministre québécois des finances est de mauvaise foi.
[Français]
Le sénateur Ferretti Barth : Qu'est-ce qui protège les ententes bilatérales? Est-ce la Constitution, une loi fédérale, ou est-ce simplement une entente administrative qu'un nouveau gouvernement pourra annuler? Les ententes existent tant que le gouvernement est au pouvoir. Elles ne sont pas des lois constitutionnelles, ni des lois fédérales mais simplement des ententes. Lorsque le gouvernement changera, qui protégera cette entente avec les provinces?
[Traduction]
M. McKay : Vous me corrigerez si j'ai tort, mais je crois que la plupart des ententes bilatérales sont des contrats signés entre gouvernements, à moins d'être enchâssées dans une loi par la suite. Si l'entente est purement administrative, rien ne garantit qu'elle survivra s'il y a changement de gouvernement.
Je souscris à votre comparaison avec les jeux de hasard. Dans les deux ou trois dernières années particulièrement, le traitement de la péréquation a été assez hasardeux. L'indignation des provinces qui reçoivent des paiements de péréquation est due en partie à la chute de la capacité fiscale de l'Ontario. Ce déclin a fait en sorte que les autres provinces se sont rapprochées de la norme ontarienne, et que les 2 milliards de dollars sur lesquels elles comptaient ont soudainement disparu. Le projet de loi C-24 propose une solution. Le gouvernement canadien, au fond, a toujours assumé le risque d'une mauvaise année pour l'Ontario.
Le sénateur Massicotte : Je veux m'assurer de bien comprendre. Le projet de loi C-24 propose-t-il une entente bilatérale?
M. McKay : Il a force législative.
Le sénateur Massicotte : Si le gouvernement veut le modifier dans trois ans d'ici, il le pourra. Les provinces n'ont aucune obligation contractuelle outre celles que leur confère la déclaration constitutionnelle signée en 1982.
M. McKay : Si le projet de loi C-24 est adopté, j'imagine que tout nouveau gouvernement pourrait modifier la loi.
Le président : Qui plus est, le Groupe d'experts fera sans doute des recommandations après avoir examiné la formule, à la suite desquelles le gouvernement apportera certainement des changements qui transformeront en profondeur le régime canadien de la péréquation.
M. McKay : Vous avez raison pour ce qui est des mécanismes de répartition du gâteau, si vous voulez, mais le gâteau, lui, reste toujours le même.
Le sénateur Day : Je ne trouve rien concernant le Groupe d'experts dans le projet de loi.
Le sénateur Murray : Je ne crois pas que le projet de loi en parle.
Le sénateur Day : Est-ce qu'on en parle dans le projet de loi?
M. Keenan : Non.
Le sénateur Day : J'imagine qu'une entente quelconque a été signée avec les provinces à l'égard de la composition de ce Groupe d'experts?
Le président : Le dossier préparatoire que nous avons reçu contient plusieurs sections concernant le mandat et d'autres aspects.
Le sénateur Day : Si les ressources pétrolières de Terre-Neuve-et-Labrador s'étaient trouvées dans la zone intracôtière plutôt que dans la zone extracôtière fédérale, les recettes d'exploitation auraient-elles été prises en compte dans le calcul de la capacité fiscale?
M. McKay : Si les ressources avaient été dans la zone intracôtière, elles auraient été traitées de la même façon que les ressources non renouvelables de la Saskatchewan et de l'Alberta.
Le sénateur Day : Parce qu'elles se trouvent dans la zone extracôtière, Terre-Neuve n'a cessé de demander sa part des recettes. M. Mulroney avait consenti 30 p. 100 des recettes et cette année, M. Martin a rouvert les négociations et il a accordé à Terre-Neuve 100 p. 100 des recettes du fédéral pour les ressources extracôtières. Aux termes de l'entente, elles ne sont plus considérées comme une source de revenu.
Est-ce qu'on considère que Terre-Neuve reçoit un montant forfaitaire, ou les recettes sont-elles entièrement exclues?
M. Keenan : Selon les ententes conclues dans les années 80, la totalité des redevances reviennent à Terre-Neuve et à la Nouvelle-Écosse pour ce qui était des ressources pétrolières extracôtières. Elles gardent tout l'argent.
Le sénateur Day : Tout l'argent qui aurait dû revenir au fédéral?
M. Keenan : Le gouvernement fédéral prélève l'impôt sur le revenu des sociétés. Le fédéral prélève les redevances et les retourne intégralement aux provinces. La question était de savoir quelle partie devait être prise en compte au titre du régime de la péréquation.
Le sénateur Day : Les provinces touchaient déjà les recettes, mais il s'agissait de déterminer quelle partie devait être prise en compte dans la formule?
M. Keenan : Au même titre que les recettes des autres provinces, la totalité était prise en compte au titre de la péréquation. Puis, après la signature des ententes, elles ont été partiellement calculées et, après l'adoption de la solution générique, seulement 70 p. 100 des recettes étaient prises en compte pour la péréquation. En application de la nouvelle entente, nous calculerons combien les provinces auraient reçu de plus en droits de péréquation, et nous leur enverrons un chèque distinct.
Le sénateur Day : Est-ce un recul ou un progrès?
M. Keenan : C'est un progrès.
M. McKay : Mais cela n'a rien à voir avec le projet de loi.
Le sénateur Day : Les derniers paragraphes du projet de loi énoncent des modifications consécutives à la Loi de crédit et à la Loi d'exécution du budget qui visent uniquement la Nouvelle-Écosse.
Pouvez-vous nous expliquer les conséquences de ces modifications? Pourquoi des modifications concernant la Nouvelle-Écosse et aucune concernant Terre-Neuve? Ont-elles un lien avec les ressources extracôtières ou pas du tout?
M. Keenan : La Loi d'exécution du budget de 2004 instaurait un règlement sur les paiements de péréquation compensatoires, qui remplaçait l'accord sur les recettes extracôtières de la Nouvelle-Écosse. La Loi nous autorisait à faire 2 paiements, de 21 millions de dollars plus 20 p. 100 des recettes pétrolières extracôtières, et un autre équivalant à 10 p. 100 de ces recettes. La définition des recettes d'exploitation extracôtière figure dans la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces.
Le projet de loi C-24 abroge les anciennes définitions législatives parce que le régime de péréquation est modifié. Il devenait donc nécessaire de formuler une modification consécutive à la Loi d'exécution du budget pour établir que, malgré l'abrogation des anciennes définitions, elles continuent de s'appliquer pour la mise en oeuvre des politiques du dernier budget.
Le sénateur Day : L'entente intervenue avec la Nouvelle-Écosse était exclusive avant la dernière série de discussions, mais cette exclusivité avait été établie après l'entente conclue dix années auparavant avec M. Mulroney?
M. Keenan : C'est exact.
Le sénateur Day : On en a certainement tenu compte lors des plus récentes négociations avec M. Martin, qui leur consent la totalité des recettes d'exploitation extracôtière?
M. Keenan : Oui.
Le sénateur Day : Finalement, j'aimerais vous demander quelques précisions. Nous avons discuté du fait que les taux de répartition ont été fixés dans les dispositions 4.1(1), (2) et (3) du projet de loi pour les 3 prochaines années. Nous avons ensuite vu qu'à la page 9 du projet de loi, le paragraphe 1(2) et la disposition 4.1(3) qui porte sur les 2 années subséquentes. Pour l'année prochaine, les parts sont établies, mais ensuite, un taux d'augmentation s'appliquera — la répartition proportionnelle sera calculée selon un taux d'augmentation fixé pour les deux années suivant le prochain exercice, qui commence le mois prochain.
Au bas de la page 9 du projet de loi, au paragraphe 1(2), nous pouvons lire que les dispositions à l'égard de la répartition proportionnelle au cours des prochaines années « entrent en vigueur à la date ou aux dates fixées par décret », ce que vous nous avez souligné par ailleurs.
Je ne suis pas certain de comprendre tous les tenants et les aboutissants. Est-il proposé de mettre la loi à exécution sauf cette partie, qui entrera en vigueur à une autre date? Si tel est le cas, quels seront les mécanismes de mise en application de ces dispositions précises?
Le président : Les témoins nous ont déjà expliqué que c'était à cause du délai prévu pour le dépôt du rapport du Groupe d'experts.
Mme Scullion : La loi entrera en vigueur quand elle recevra la sanction royale, hormis ces deux dispositions. Dans le projet de loi, le paragraphe 4.1(3) porte sur les paiements de l'exercice débutant au 1er avril 2006 et des exercices suivants, pas seulement sur les deux prochains exercices. Les parts seront les mêmes seulement si un décret ordonne l'entrée en vigueur des dispositions.
Nous voulions nous assurer de pouvoir verser les paiements aux provinces même si le rapport du Groupe d'experts est en retard. S'il recommande une formule différente d'allocation des paiements de péréquation, la loi sera modifiée en conséquence.
Le sénateur Murray : Si le gouvernement endosse la recommandation.
Mme Scullion : Je ne peux faire de prédiction à cet égard, Dieu m'en garde!
Le sénateur Murray : Je n'ai pas non plus ce pouvoir.
Le sénateur Day : Voilà qui nous ramène encore au Groupe d'experts. Nous aimerions pouvoir lui faire confiance. Si j'en juge par la réponse donnée tantôt, il ne sera pas indépendant — il s'agira plutôt d'un groupe interne. Ai-je bien compris?
M. McKay : Il est indépendant dans la mesure où les provinces nommeront leurs représentants et le fédéral les siens. Le président est déjà désigné.
Le président : Vous avez dit qu'il n'y aurait aucun représentant du privé.
M. McKay : En effet, le privé ne sera pas représenté.
Le sénateur Murray : Est-ce qu'il y aura trois membres du fédéral et deux des provinces?
Mme Delorme : Quatre pour deux.
Le sénateur Murray : Le président a-t-il été désigné par le fédéral?
Mme Delorme : Oui.
Le sénateur Murray : Fait-il partie des quatre représentants désignés par le fédéral?
Le président : Il vient cependant du provincial.
Le sénateur Murray : Du gouvernement provincial albertain.
Le sénateur Day : Le Parlement aura-t-il un droit de regard sur ce Groupe d'experts? Il sera constitué de fonctionnaires, ne l'oublions pas.
M. McKay : Pas nécessairement.
Le sénateur Day : Pas nécessairement, mais c'est fort probable.
M. McKay : J'imagine que le Parlement aura un pouvoir de surveillance sur tous les travaux du groupe. En théorie, si le groupe formule des recommandations de nature législative, elles se retrouveront forcément ici.
Le sénateur Day : Pas forcément. Il n'y aura pas forcément acte de législation. Le gouvernement a décidé de créer un groupe consultatif sur lequel il n'a aucun droit de regard. Nous fonctionnerons un peu à l'aveuglette. Même si une disposition est adoptée, il appartiendra au gouverneur en conseil d'en ordonner la mise en vigueur s'il reçoit une recommandation à cet effet d'un groupe d'experts sur lequel nous n'avons aucun droit de regard. Il y a un grand risque de biaiser la formule de répartition.
M. McKay : Je pensais que la formule de répartition restait telle quelle tant que le gouvernement ne recommande pas de changement. Elle est simplement reportée.
Le sénateur Day : Ce n'est pas tout à fait le cas. Apparemment, l'article 4.1 du projet de loi propose une formule de répartition proportionnelle des 10,9 milliards de dollars pour le prochain exercice, et ensuite une augmentation et une formule de répartition selon les mêmes proportions si la disposition est mise en vigueur.
Le sénateur Murray : Jusqu'à ce qu'il y ait modification.
Le sénateur Day : La modification devra nous être soumise.
M. McKay : Oui, elle devra vous être soumise. Mais si rien ne bouge, nous reportons la formule que nous avions reportée.
Le président : Le gouvernement pourrait également formuler ses propres recommandations sur les ajustements et les modifications à apporter, sans consulter le Groupe d'experts. Comme le témoin nous l'a confirmé, le gouvernement n'est nullement tenu d'accepter une recommandation ou la totalité des recommandations du Groupe d'experts.
Le sénateur Murray : Il pourrait s'en tenir à l'application de notre rapport.
M. Delorme : La raison d'être de cette disposition est que, étant donné la complexité du dossier, il se peut fort bien que le Groupe d'experts n'arrive pas à déposer son rapport avant le 31 décembre. Les provinces seront en pleine planification budgétaire et nous ne voulons pas retarder ce processus. Il ne serait pas juste d'imposer un tel retard aux provinces. C'est pourquoi nous avons voulu assurer nos arrières. Cette option de repli nous permettra de verser les paiements et de ne pas mettre en péril le processus budgétaire.
Le sénateur Massicotte : Je pensais que ce paragraphe portait sur la capacité de payer moyenne sur trois ans, et non sur le programme actuel comprenant 33 mécanismes financiers. Je pensais que M. McKay nous parlait de ces 33 mécanismes, mais je comprends maintenant que le paragraphe prévoit l'application du mécanisme provisoire adopté pour 2005-2006 et le gel de la formule.
M. Keenan : C'est exact. Les parts ont été déterminées selon la formule actuelle, mais elles ne seront pas révisées.
Le sénateur Massicotte : Autrement dit, elles sont gelées?
M. Delorme : Les parts sont gelées pour 2005-2006. Et la même formule pourrait également être appliquée en 2006- 2007.
Le sénateur Day : D'autres dispositions stipulent des rajustements mineurs, sans égard à la répartition. Les rajustements sont dus aux paiements en trop ou insuffisants, n'est-ce pas?
M. McKay : Peut-être y aura-t-il d'autres ententes. Qui sait?
Le président : Monsieur McKay, tout semble reposer maintenant entre les mains du Groupe d'experts. Il a la possibilité d'examiner la pertinence d'être constitué en un organisme indépendant permanent, toujours disponible si on a besoin de conseils. Le ministère a-t-il envisagé cette possibilité? Dans l'affirmative, que pensez-vous de cette idée de créer un groupe consultatif permanent, chargé de conseiller le gouvernement sur les modifications à apporter à la formule?
M. McKay : À l'évidence, le ministère et le ministre y ont longuement réfléchi puisqu'il en est question dans le mandat. Je ne peux toutefois prévoir les conclusions du Groupe d'experts sur cette partie de son mandat.
Le dossier de la péréquation est très complexe, et il n'est pas exclu que le gouvernement cherche un moyen de se soustraire au pénible exercice de déterminer qui a droit à quoi et à quel moment. Il pourrait même créer une commission. Il existe toutes sortes de commissions chargées d'établir des taux en mesurant toutes sortes de facteurs. Il est clair que le ministre a déjà envisagé une telle possibilité.
Le président : Nous entendons souvent parler de groupes composés de gens très influents à qui on demande des conseils.
Monsieur Keenan ou monsieur Delorme, pouvez-vous nous dire où en est la réflexion au sein du ministère au sujet de la pertinence d'une telle proposition?
M. Delorme : Le Groupe a été créé justement parce que nous voulions apprendre de l'expérience des autres. En Australie, on fait une distinction entre le calcul du montant global et de l'allocation, et nous avons demandé au Groupe d'experts d'examiner ce modèle afin d'en déterminer la faisabilité au Canada. Nous lui avons également demandé de voir ce qui se passe dans d'autres pays.
Le sénateur Massicotte : Je lis dans le dossier que 3,5 p. 100 du montant est déterminé selon les données historiques — la croissance du PIB nominal moins 2 p. 100. Donc, il y a bel et bien péréquation. Nous nivelons. Cela signifie également que même si les paiements nominaux de péréquation augmentent, en réalité ils diminuent par rapport au PIB. Est-ce que j'ai bien compris?
M. McKay : Ils diminuent par rapport au PIB nominal, mais pas en fonction du PIB réel.
Le sénateur Massicotte : Ils devraient pourtant.
M. McKay : À 3,5 p. 100.
Le sénateur Massicotte : Il s'agit donc d'une hausse nominale de 3,5 p. 100, alors que la croissance du PIB a été en moyenne de 3 à 3,5 p. 100.
M. McKay : Le ministre vient tout juste d'annoncer qu'elle se situait à 2,9 p. 100.
Le sénateur Massicotte : La hausse est de 3 à 3,5 p. 100 avant inflation. Le PIB nominal doit approcher les 5,5 p. 100.
M. McKay : Voulez-vous insinuer que nous aurions dû tenir compte de l'inflation?
Le sénateur Massicotte : Non. Je voulais simplement faire valoir que l'histoire nous a prouvé que les augmentations des paiements de péréquation ont suivi en gros celle du PIB nominal moins 2 p. 100. Si tel est le cas, alors deux constats s'imposent. Tout d'abord, la péréquation est effective et nous arrivons tous au même niveau. Ensuite, les paiements devraient diminuer par rapport au PIB.
M. McKay : Je ne vois pas pourquoi ils devraient diminuer.
Le sénateur Massicotte : C'est une question de mathématiques pures.
M. Keenan : Il est exact que, selon une vision globale de l'économie, les paiements de péréquation ont fléchi et, comme les disparités ont été aplanies, nous pouvons probablement penser que la part de la population des provinces bénéficiaires a diminué avec le temps.
Le sénateur Massicotte : Les écarts se sont rétrécis. C'est évident.
M. Keenan : La part des recettes provinciales dans le PIB a aussi diminué.
M. Delorme : Nous tirons la même conclusion pour ce qui est du revenu relatif et des écarts entre les provinces au chapitre des taux de chômage. La plupart des mesures à notre disposition pointent vers le rétrécissement des écarts fiscaux au cours des 20 dernières années.
Le sénateur Massicotte : Bonne nouvelle. D'ici 30 ou 40 ans, les paiements seront symboliques.
M. Delorme : En effet, on peut affirmer que toute baisse des paiements de péréquation est de bon augure.
Le président : Vous disposez certainement de graphiques illustrant cette tendance à long terme.
M. Delorme : Oui, nous en avons.
Le sénateur Downe : Cette soi-disant diminution de l'écart est due en partie au dépeuplement du Canada rural. Cet exode n'a pas aplani les différences. Les gens quittent en masse pour les grands centres, à la recherche d'un avenir meilleur.
Le sénateur Massicotte : Ils partent pour trouver du travail.
Le sénateur Downe : Cela ne redresse pas les écarts.
Le sénateur Massicotte : Oui, l'écart est corrigé. C'est un processus très normal.
Le sénateur Murray : Le régime de péréquation vise à combler les écarts dans la capacité fiscale. Si on prend une moyenne nationale, aucune des provinces bénéficiaires n'atteint l'égalité. Toutes se situent dans les 90 p. 100.
Certains d'entre nous avons visité l'Australie il y a quelques années, où nous avons notamment étudié ce qu'ils appellent là-bas le gouvernement du Commonwealth et les gouvernements d'État. Dans ces derniers, on nous a dit qu'une commission était chargée d'évaluer non seulement les besoins financiers de chaque État, mais également leurs besoins en matière de dépenses. Dans l'un de ces États, un politicien nous a même raconté que la commission est amenée partout, sur les pires routes, afin de bien lui faire voir le piètre état de ses installations et la réalité de ses immenses besoins. Il serait intéressant d'en faire autant chez nous.
M. McKay : Je présume que vous ne seriez pas candidat pour siéger à cette commission?
Le sénateur Murray : Non, monsieur, et je ne pense pas que quiconque a toute sa tête s'y risquerait.
J'ai suivi le débat à la Chambre des communes, monsieur McKay. Vous étiez chargé de la présentation du projet de loi, et vous avez eu une longue discussion avec l'opposition, que avait beaucoup à dire et beaucoup de questions. Il reste un aspect, que j'ai soulevé au Sénat hier, sur lequel je n'ai pas entendu votre réponse. C'est Mme Ambrose, la critique officielle de l'opposition, qui a posé la question. Le nouveau montant plancher — je présume qu'elle entend par là les 10,9 milliards de dollars plus 3,5 p. 100 — apparaît assez imprudent sur le plan financier. Selon ce que j'en ai compris, elle craint que si les choses se mettent à mal aller, l'allocation de péréquation des provinces bénéficiaires risquerait de grimper au-dessus de la moyenne nationale. Comme je l'ai mentionné, cela ne s'est jamais produit, mais ce n'est pas inconcevable.
Je ne sais pas à quel point ses craintes sont fondées. Le gouvernement a-t-il réfléchi à une telle éventualité? Vous l'avez vous-même affirmé, il s'agit d'un transfert à risque. Vous avez déjà un programme de stabilisation, au titre duquel l'Ontario, sur une période de 4 ans, a touché 1 milliard de dollars et l'Alberta, 500 millions de dollars environ parce que l'économie était au ralenti et que leurs recettes accusaient une baisse.
Que rétorquez-vous à la députée quand elle déclare que l'ancien montant plancher était suffisant et que le nouveau plancher est imprudent sur le plan financier?
M. McKay : Elle m'en a touché un mot en privé également. Le gouvernement canadien a fait des calculs et il a décidé d'assumer le risque. Personne ne sait ce qui se passera dans les cinq prochaines années. Nous avons eu une édifiante réunion avec le Comité des finances hier, avec des spécialistes des prévisions financières. Il est très intéressant de constater les écarts dans les prévisions : 7 milliards de dollars au cours du prochain exercice, un peu moins de 7 milliards de dollars pour l'exercice suivant. Ils figuraient à la colonne des « excédents ».
Malgré les nombreuses inconnues, nous avons décidé de prendre le risque. Au terme des cinq années, il faudra refaire les calculs. Je présume qu'on pourrait conclure à ce moment que le gouvernement fédéral a fait fausse route.
Le sénateur Murray : Avez-vous refusé de répondre à sa question parce que vous pensiez que son inquiétude était justifiée?
M. McKay : Je me rappelle qu'elle a posé des questions en Chambre, mais pas cette question précise. Je sais qu'elle me l'a posée en privé, mais pas publiquement.
Le sénateur Murray : Elle en a fait mention dans son discours. L'expérience démontre que son inquiétude n'est pas fondée.
M. McKay : L'expérience récente. N'oublions pas que les huit derniers budgets du gouvernement étaient équilibrés et excédentaires.
Le sénateur Murray : Pour le fédéral, le régime de la péréquation, d'un point de vue relatif, n'a jamais été le fardeau fiscal effrayant que vous vous acharnez à décrier.
M. McKay : Sur le plan relatif, il équivaut au programme de la Prestation fiscale canadienne pour enfants.
Le président : Monsieur McKay, au nom du comité, je vous remercie, ainsi que vos collaborateurs du ministère, d'avoir gracieusement accepté de répondre à nos questions ce soir à l'égard de ce texte législatif obscur. Il est éminemment complexe, mais vous avez répondu très dignement et de façon très limpide.
La séance est levée.