Délibérations du comité sénatorial permanent des
Pêches et des océans
Fascicule 9 - Témoignages du 20 octobre 2005
OTTAWA, le jeudi 20 octobre 2005
Le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans se réunit aujourd'hui à 10 h 50 pour examiner, pour en faire rapport, les questions relatives au nouveau cadre stratégique en évolution du gouvernement fédéral pour la gestion des pêches et des océans du Canada.
Le sénateur Gerald J. Comeau (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Nous accueillons ce matin M. Paul Sprout de Pêches et Océans Canada. M. Sprout est le directeur général régional de la région du Pacifique et il est accompagné aujourd'hui de M. Kevin Stringer, directeur général, gestion des ressources. Ces messieurs nous feront un exposé avant notre voyage sur la côte Ouest de la semaine prochaine.
J'ai plusieurs observations à faire avant de commencer la séance. Comme vous le savez, le comité s'intéresse à l'impact des propositions sur les collectivités des côtes Est et Ouest du Canada et surtout sur les collectivités qui ont toujours dépendues des ressources halieutiques.
La question que nous posons est de savoir si le gouvernement a ou non la responsabilité de considérer l'effet des décisions et si nous devrions considérer ou non ces collectivités comme des intervenants ou si les ressources halieutiques devraient être réservées aux titulaires de permis.
Voici quelques-unes des questions que nous posons : la privatisation est-elle devenue l'objectif? A-t-on envisagé d'autres systèmes de répartition des quotas tels que ceux établis en fonction des besoins des localités? Un modèle a-t-il été proposé? A-t-on essayé d'évaluer les répercussions sociales, de la répartition et sur l'environnement des QIT et des QI des pêches au Pacifique — et aussi les effets sur l'emploi, les collectivités, les valeurs de la propriété, et cetera? Les effets sur les équipages et les travailleurs riverains nous préoccupent également. La concentration sur la côte Ouest ressemblera-t-elle à celle de la côte Est où les limites des quotas ne sont pas appliquées?
Dans une déclaration faite la semaine dernière, Clearwater a décidé de transformer nos ressources canadiennes en Chine où les coûts de la main d'œuvre sont bas. Cela est un problème de la côte Est, mais nous voulons savoir si le ministère des Pêches et des Océans considère que cette décision posera un problème à l'avenir. Allons-nous expédier nos ressources dans des pays qui pourraient ne pas respecter nos lois relatives au travail et à l'environnement? Cette procédure deviendra-t-elle une norme à l'avenir?
La distribution des ressources naturelles est une importante décision politique et pas une décision de gestion et c'est la raison pour laquelle les parlementaires veulent participer au débat.
Il nous paraît important que nous posions les questions et que nous examinions les décisions quelles qu'elles soient.
Paul Sprout, directeur général régional, région du Pacifique, Pêches et Océans Canada : Merci, sénateur. Je crois comprendre que le comité visitera différentes collectivités et rencontrera des organisations et des particuliers en Colombie-Britannique. En le préparant aujourd'hui, j'ai décidé d'axer mon mémoire sur quelques-unes des questions qui pourraient être soulevées au cours de votre visite. Je vais aussi vous présenter un aperçu de l'initiative de réforme des pêches du Pacifique.
Je vais parcourir très rapidement le dossier car je crois comprendre qu'il y aura peut-être des questions. Je ferai un résumé simple de la plupart des pages. Dans deux ou trois cas, je signalerai très rapidement ce qui est important et passerai aux questions et réponses qui, à ce qu'il me semble, constituent l'essentiel de notre discussion ce matin.
La page 2 de mon exposé présente le contexte des trois réformes des pêches du Pacifique. La première réforme concerne les vives préoccupations soulevées par la conservation des stocks du saumon du Pacifique et particulièrement le saumon des zones côtières du Sud.
À notre avis, cette question est liée aux conditions marines de l'environnement, notamment le réchauffement des océans, à des températures de rivière exceptionnellement élevées et à un faible débit de rivière. Ces conditions affectent la survie du saumon dans certains cours d'eau et systèmes et ont affecté et caractérisé les événements de cette année.
Le deuxième point, c'est qu'il y a 198 collectivités des Premières nations en Colombie-Britannique; c'est-à-dire que près d'un tiers de toutes les collectivités des Premières nations au Canada se trouve dans notre province. La plupart de ces collectivités se situent près des rivières ou des zones côtières où le saumon fraie. L'accès à la pêche alimentaire, sociale, cérémoniale et commerciale du saumon un sujet dont elles se préoccupent beaucoup. Par conséquent, les problèmes et les aspirations des Premières nations font partie de la situation particulière à la Colombie-Britannique.
Le troisième point, c'est que la pêche commerciale du saumon traverse une période difficile et a un rendement économique très faible. Beaucoup de pêcheurs ont même du mal à faire face aux coûts de la pêche. C'est une considération importante à retenir pour le reste de mon exposé.
Il y a d'importants conflits au sujet de l'allocation entre les secteurs de la pêche commerciale et de la pêche sportive et entre la pêche commerciale et la pêche des Premières nations. Ce sont les contextes que je voulais souligner au début de mon exposé.
Je souhaiterais maintenant parler un peu des réformes des pêches pour situer le contexte. Je parlerai ensuite de certaines questions dont vous entendrez parler, à mon avis, durant votre visite en Colombie-Britannique.
Premièrement, je veux parler de deux rapports présentés au gouvernement de la Colombie-Britannique et au gouvernement du Canada au début de 2004 : l'un est le rapport du Groupe de travail conjoint sur les pêches après la conclusion des traités. Ce rapport est plus connu sous le nom du rapport Pearce-McRae et intitulé Traités et transition : vers une pêche durable sur la côte du Pacifique du Canada. L'autre rapport est celui du panel des Premières nations intitulé Notre place à la table : les Premières nations dans la pêche de Colombie-Britannique. Ces deux rapports demandaient aux auteurs de considérer le rendement économique de la pêche commerciale et de donner des conseils pour une période postérieure à la conclusion des traités en termes de gestion future des pêches.
Les rapports ont présenté une série de recommandations qui forment le fondement de la déclaration ou de la réponse du ministre, sur laquelle je reviendrai dans un instant.
La diapositive no 4 fait état du point de vue des Premières nations et des intervenants.
Les consultations sur les recommandations de ces rapports ont été tenues en automne 2004. Encore une fois, les rapports ont présenté leurs recommandations au printemps 2004, puis nous avons tenu une série de consultations avec les divers intervenants — organisations de pêche récréative et commerciale, ONG et le grand public pour déterminer le consensus autour des recommandations contenues dans les deux rapports.
Je signale que les deux rapports se rejoignent dans plusieurs domaines. Par exemple, ils proposent tous deux un accès accru des Premières nations aux ressources, une plus grande cogestion et un meilleur partage du processus de décisions entre les intervenants et les gouvernements. Cependant, ils divergeaient sur certains points. Par exemple, le rapport Pearse-McRae appuie fermement la tendance vers une gestion du quota individuel (QI). Le rapport des Premières nations ne rejette pas nécessairement cette notion de quota, mais préfère aborder ou réconcilier leurs intérêts en commençant par l'accès aux ressources avant de faire des changements concernant la tendance vers les QI ou la gestion des quotas.
La diapositive 5 montre la réponse du MPO. Après avoir examiné les consultations tenues en automne et fondées sur les recommandations des deux rapports, le ministre a annoncé, en avril, un avant-projet de réforme des pêches en Colombie-Britannique. C'est un engagement visant à instaurer une réforme de toutes les pêches, pas seulement celle du saumon. Je dois signaler que la pêche du saumon en Colombie-Britannique est celle qui rencontre de vraies difficultés, particulièrement la pêche commerciale en termes de rendement économique.
Si vous consultez la liste des questions et des commentaires adressés au ministère, vous constaterez que près de 95 p. 100 sont liés au saumon. Bien que nous gérions plus de 100 autres pêches — flétan, goberge, poissons de fond, mollusques et crustacés, et cetera — la plupart des commentaires en Colombie-Britannique ne concernent qu'un poisson, le saumon, ou une pêche, celle du saumon.
En 2005, le ministre a annoncé un plan de réforme de toutes les pêches en se concentrant sur le saumon. Il présente dans ce plan une vision, une série de principes et de stratégies que nous appelons « l'avant-projet. » Ces stratégies ont quatre objectifs importants. Le premier est la conservation. Le ministre a indiqué l'importance de l'élaboration et de l'adoption d'une politique concernant le saumon sauvage. Deuxièmement, nous devons accroître l'accès des Premières nations aux ressources. Troisièmement, les programmes du MPO doivent être élargis. Quatrièmement, nous devons améliorer le rendement économique de la pêche commerciale.
Je vais donner brièvement quelques explications de cette vision. Je ne reviendrai pas sur chaque point de la vision à la diapositive 6, mais elle propose une pêche autonome, capable de s'ajuster et réaliser son plein potentiel économique et social des ressources. Une pêche qui offrirait aux participants plus de stabilité, de garantie et la confiance de la population dans la durabilité des pêches.
La diapositive 7 et les diapositives qui suivent montrent quelques-unes des étapes que nous avons faites depuis l'annonce de l'avant-projet par le ministre en avril 2005. À cette époque, le MPO a adopté une politique concernant le saumon sauvage. Je tiens à souligner que, depuis 2000, nous essayons d'établir un cadre de conservation des stocks de saumon. Nous avons finalement obtenu une politique que nous avons mise en oeuvre en juin 2005 après d'importantes consultations avec le public, le gouvernement et les Premières nations.
Cette politique fournit au ministère un cadre de travail qui guide sa réflexion et ses prises de décisions concernant le développement des plans de pêche du saumon. En annonçant son avant-projet au mois d'avril, le ministre il a indiqué que nous lancerons des « projets pilotes ». Ces pêches étaient conçues pour examiner les possibilités d'amélioration du rendement économique de façon à ce que les flottes se réunissent et fassent des recommandations sur des gestions différentes.
Par exemple, cela pourrait inclure une étude de la gestion des QI quand la flotte peut remplir ces quotas; une étude des pêches concurrentielles; des pêches collectives ou de toute autre variation. Une telle étude nous permettrait d'évaluer de nouvelles méthodes visant à améliorer le rendement économique des pêches. Cela s'appliquait aussi à toutes les pêches, notamment celles des Premières nations.
Nous avons aussi examiné des exemples de projets pilotes ou de pêches pilotes pour la pêche des Premières nations afin de déterminer si nous pourrions changer notre gestion traditionnelle pour améliorer l'efficacité économique de la pêche et trouver de meilleures solutions aux problèmes que les pêcheurs et les organisations de pêche portaient à notre attention.
La diapositive 8 présente brièvement le renforcement des programmes du MPO. J'ai mentionné, tout à l'heure, que l'un des plus importants objectifs mentionnés dans l'annonce de l'avant-projet par le ministre était que le MPO devait accroître le nombre de ses programmes. Cela était, en partie, lié aux critiques lancées contre le ministère l'année dernière après un examen de la saison de pêche du saumon en 2004 au sujet de laquelle l'ancien juge Williams a déclaré que le ministère avait échoué dans certains secteurs, notamment l'application de la loi, le contrôle des prises et certains aspects de l'évaluation des stocks.
En 2005, le ministre a annoncé que les ressources fournies à la Région du Pacifique pour l'application de la loi, le contrôle des prises et l'évaluation des stocks étaient augmentés. En 2005, nous avons augmenté nos effectifs pour l'application de la loi, notre surveillance, nos programmes de contrôle de prises et des programmes particuliers à l'évaluation des stocks afin de remédier aux carences signalées par l'ancien juge Williams et son comité. C'était la deuxième stratégie mentionnée par le ministre dans son avant-projet et nous l'avons mise en oeuvre en 2005.
Je parlerai brièvement d'une question avant de passer à la prochaine diapositive. Quand les sénateurs visiteront en Colombie-Britannique, ils entendront forcément : « C'est ce qui est arrivé aux populations de saumon rouge en Colombie-Britannique. » En 2005, du Nord de l'État de Washington à la frontière de l'Alaska, le nombre de saumons rouges qu'on attendait de voir remonter vers la Colombie-Britannique et l'État de Washington avait diminué de 50 p. 100 et dans certains cas de 75 à 80 p. 100. Dans tous les cas, il y avait moins de saumons que prévu.
Nos scientifiques croient que cette remonte, inférieure aux prévisions, est principalement due au réchauffement de l'océan qui a provoqué des taux de mortalité très élevés chez les jeunes poissons et des faibles remontes des poissons adultes en 2005. Je le mentionne car les remontes inférieures en 2005 signifient que nous devons ajuster toutes nos pêches pour essayer d'atteindre nos objectifs de conservation.
J'ai parlé des lignes directrices de la politique concernant le saumon sauvage. Ces lignes ont posé beaucoup de problèmes à notre ministère et à l'industrie cette année particulièrement pour ce qui est de la pêche très limitée des saumons rouges. Pour d'autres espèces de saumon, la question est complexe; il y a eu de fortes remontes de saumons roses et de saumons cohos dans différentes régions de la Colombie-Britannique. Les conditions marines ne semblent pas être les mêmes partout, car elles affectent certaines espèces et certains endroits. Les pêcheurs de la région sud sont particulièrement touchés par nos exigences de 2005 visant à conserver les stocks de saumon rouge menacés par les conditions marines.
La diapositive 9 montre le contexte actuel des échappées de saumons géniteurs. Nous serons incessamment prêts à faire le compte de saumons dans les lieux de frayage. Nous avons, dans certains cas, fini le compte des stocks précoces, mais les autres espèces, par exemple le saumon kéta, continuent à arriver dans les eaux douces pour frayer.
Durant votre visite de la Colombie-Britannique, nous ferons des études sur les cours d'eau pour compter le saumon kéta et d'autres espèces. Nous n'avons pas encore fait de prévision du frayage pour 2005. Faisons le point : nous avons, à ce jour, pu satisfaire à nos exigences en matière d'échappée pour la plupart des saumons rouges, surtout les plus productifs. Ce que nous appelons nos stocks « faibles » ou les « moins productifs » sont mélangés à ces poissons. Ces populations peuvent représenter quelques centaines ou quelques milliers de poissons par rapport aux poissons les plus productifs, qui pourraient s'élever à des centaines de milliers de poissons. En Colombie-Britannique, comme dans la plupart des pêches du saumon, ces poissons se mélangent. Quand ils reviennent dans les cours d'eau pour frayer et qu'on essaie de les pêcher, ils sont tous mélangés. Il est très difficile de les séparer, en fait, il est impossible de les séparer.
Le problème est de savoir comment protéger ces petites populations faibles qui sont importantes au point de vue génétique, mais qui ne contribuent pas beaucoup en termes de production. Nous devons trouver une solution à ce problème car leur contribution pourrait être plus importante à l'avenir en raison des conditions de réchauffement, et cetera
Nous faisons du bon travail avec les populations principales en ce qui concerne les échappées de saumons rouges géniteurs, mais les petites populations continuent à nous causer des problèmes. Nous devons continuer à porter attention à ces petites populations si nous voulons atteindre les objectifs d'une diversité génétique.
La diapositive 10 traite brièvement des progrès réalisés au niveau de l'accès des Premières nations à la pêche commerciale. Comme je l'ai mentionné, l'une des stratégies, dans la déclaration de l'avant-projet faite par le ministre, visait à accroître l'accès des Premières nations à la pêche. Cette décision découle des recommandations des deux rapports que j'ai mentionnés tout à l'heure — le rapport Perse-McRae et le rapport du panel des Premières nations — proposant que nous augmentions l'accès des Premières nations aux ressources par le retrait volontaire des permis et par le transfert de ces permis aux Premières nations.
En vue de cette option, le ministère des Pêches et des Océans collabore avec le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien pour présenter au cabinet, un protocole d'entente sur un accès plus élargi conforme à ce que j'ai décrit.
Ce protocole est dans le système et nous attendons de voir comment il sera accueilli avec les autres protocoles. Je suis optimiste quant aux résultats. Nous pourrions aussi faire des démarches dans ce sens.
J'ai mentionné que nous avons tenu des consultations avec le public et divers intervenants. En réponse à ces rapports, le ministre a quatre objectifs stratégiques et veut, en même temps, réaliser ces projets pilotes.
Nous allons bientôt rencontrer tous les intervenants pour leur dire ce que nous avons fait en 2005, leur donner les raisons, leur communiquer les résultats et la possibilité d'avancer dans le cadre de changements à long terme. Nous avons préparé un document de travail qui décrit nos objectifs et ouvre la voie aux discussions avec toutes les parties concernées.
Nous allons rencontrer les représentants de diverses collectivités pour discuter des problèmes et leur parler de l'avant-projet et de ses objectifs et nous prendrons note des idées et points de vue des participants. Bien que le ministre ait proposé une vision et établit des principes, il sait que nous avons besoin d'une plus grande participation avant de finaliser les stratégies de réformes de nos pêches et c'est la raison pour laquelle nous tenons ces consultations.
La diapositive 11 énonce brièvement les prochaines étapes dont j'ai parlé. Notre document de travail est la source de discussions publiques. Je crois que les honorables sénateurs trouveront ce document utile, je vous en donnerai une copie après cet exposé.
La diapositive 12 est une diapositive technique sur laquelle je ne m'étendrai pas, sauf si vous voulez une mise à jour technique. Cette diapositive montre que nous avons huit zones de pêche : deux à la senne, trois au filet maillant et trois à la traîne. Nous sommes sur le point de décider s'il faut renouveler ces zones. Je m'arrête là pour cette diapositive technique.
La diapositive 13 porte sur notre politique concernant le saumon sauvage. Elle donne un peu plus de détails sur les éléments de la politique et, si vous ne voyez pas d'inconvénients, je n'en dirai pas plus.
Le sénateur Watt : Pourrions-nous y revenir tout à l'heure?
M. Sprout : Bien sûr, sur ce que vous voudrez.
Je vais m'attarder un instant sur la diapositive 14 car vous en entendrez probablement parler quand vous serez en Colombie-Britannique. Je me souviens que vous avez discuté du programme de mise en valeur des salmonidés dans d'autres réunions. Ce programme a été mis sur pied en Colombie-Britannique afin que le ministère des Pêches et des Océans puisse accroître la production au moyen de processus d'écloserie utilisant des sélections naturelles et semi- naturelles. Ce programme très important en Colombie-Britannique est devenu un symbole et dépasse le cadre qui lui a été limité. Nous faisons notre possible pour assurer la continuité de ce programme. Il est mis en œuvre. Nous continuons à essayer de stabiliser son financement, mais je le mentionne parce que vous en entendrez probablement parler durant votre visite en Colombie-Britannique.
Je veux aussi parler du Conseil de gestion des ressources aquatiques de la côte ouest de l'île de Vancouver, à la diapositive 15. Il me semble que vous avez rencontré certains membres de ce conseil et j'explique brièvement ce qu'il représente et ses objectifs.
Le conseil a été mis sur pied il y a quatre ans dans le cadre d'un projet pilote. Il est formé de multiples intervenants de la côte ouest de l'île de Vancouver et collabore avec le ministère et des gouvernements provinciaux pour donner des conseils et des points de vue sur des activités diverses. Il a commencé à titre de projet pilote sur trois ans, nous l'avons prolongé d'une année. À sa quatrième année, nous avons réexaminé le mandat très vaste du conseil des gestions des ressources aquatiques. En fait, le conseil ne relève du ministère de Pêches et des Océans que dans certains cas. Le conseil intervient dans des dossiers qui concernent la population de toute la Colombie-Britannique et pas seulement la population des environs.
Nous essayons de rationaliser le mandat et de trouver un financement à long terme. Le conseil a un mandat de trois ans. Nous n'avons pas les moyens financiers pour assurer sa continuité. Sa fonction principale est le lancement de projets pilotes et l'étude de certains concepts. Nous cherchons un mécanisme différent qui assurerait le maintien à long terme du conseil. Nous allons rencontrer les membres du conseil pour discuter du mandat et des stratégies de financement en vue de maintenir les éléments positifs de ce groupe.
J'arrive finalement au Plan d'action pour les océans. Les sénateurs savent que le ministère a reçu de nouveaux fonds pour la mise en œuvre de la phase un du Plan d'action pour les océans. Pour la Colombie-Britannique, cette phase comporte plusieurs éléments, notamment une vaste zone de gestion de l'océan. Le Bassin de l'île de la Reine Charlotte a été choisi, c'est-à-dire la côte au Centre et au Nord. Toute la région au Nord de l'île de Vancouver fait partie de cette vaste zone de gestion de l'océan et nous mettrons à l'essai certains concepts de gouvernance, la gestion intégrée et la collaboration avec des intervenants en parallèle avec le développement de certains éléments et principes identifiés dans le Plan.
Je conclus en faisant trois brèves observations. Vous constaterez un certain nombre de questions essentielles durant votre visite en Colombie-Britannique. Votre visite coïncidera avec la fin de la saison de la pêche du saumon, époque à laquelle tout le monde se préoccupe principalement de la conservation. L'année 2005 a été difficile pour la pêche si je me fonde sur ce que j'ai remarqué. Les conditions marines influant sur la survie du saumon rouge en particulier ont poussé le ministère à limiter la pêche commerciale, ce qui diminue les possibilités de pêche du saumon rouge. La situation est moins claire en ce qui concerne les autres espèces.
Les petites populations de saumon rouge, mélangées aux fortes populations, continuent à nous préoccuper vivement. Le problème est de savoir comment les séparer tout en ayant accès aux plus grandes populations et pouvoir protéger la diversité génétique de la population. C'est un très difficile problème de gestion des ressources.
J'ai parlé de la réforme du MPO qui sert de toile de fond au ministère des Pêches et des Océans. Nous devons faire des réformes dans le domaine de la pêche. Nous devons trouver une solution au problème de la conservation. Nous devons accroître le rendement économique de la pêche commerciale en particulier. Nous devons aborder les questions de stabilité, de prévisibilité, et cetera J'ai relaté une partie de l'historique de la situation pour aider votre réflexion sur les questions et les points de vue qui vous seront présentés quand vous visiterez les différentes collectivités en Colombie-Britannique.
Finalement, le processus de consultation que nous avons mis sur pied nous permettra de rencontrer de nouveau les groupes avec lesquels nous avons déjà discuté avant que le ministre fasse sa déclaration concernant ce qui s'est passé en 2005; nous nous préparons pour 2006 et les années qui suivent.
Le président : Vous avez simplifié un sujet très complexe et très difficile. Votre exposé était bien préparé.
Le sénateur Hubley : Merci beaucoup, monsieur Sprout, pour la mise à jour de votre ministère. Elle nous sera utile dans le cadre de notre visite de l'industrie de la pêche de la côte Ouest.
Vous avez mentionné beaucoup d'intervenants aujourd'hui : la pêche commerciale, la pêche sportive et la pêche des Premières nations. Avez-vous établi un ordre de priorité des pêcheurs? Qui devrait avoir accès à cette pêche et qui ne devrait pas y avoir accès?
Y a-t-il une sympathie à l'égard des collectivités qui pêchent et qui ont toujours pêché?
Tenez-vous compte des intérêts de la collectivité dans votre approche concernant la conservation?
M. Sprout : C'est peut-être une réponse que nous nous renvoyons, M. Stringer et moi, selon que vous voulez une réponse à l'échelon national ou à l'échelon local?
Comme les sénateurs le savent, nous avons toujours en affaire seulement avec les titulaires de permis qui ont un accès direct aux ressources. Je qualifierais cette approche de traditionnelle. Si vous considérez les approches et les interactions du ministère, vous constaterez qu'il y a de plus en plus d'interaction avec les titulaires de permis, les titulaires de quote-part et les groupes concernés et touchés par la pêche.
Il est difficile de définir exactement le terme « collectivité ». Ça peut être un village, une ville, une organisation, un groupe public, une ONG, et cetera Le fait est que nos consultations sont tenues en public. J'ai parlé des nos consultations sur la côte Ouest. Nous avons aussi des consultations avec le secteur; par exemple, il y a cinq ans, nous aurions eu des consultations avec le secteur, c'est-à-dire essentiellement les titulaires de permis, mais pas avec d'autres parties. Ce n'est plus le cas en 2005.
Nos consultations sont plus élargies à la base, car nous voulons savoir quel est l'effet sur la population. Nous reconnaissons en fin de compte que les ressources sont des ressources canadiennes qui appartiennent à tous les citoyens canadiens et pas seulement à ceux qui en ont accès grâce à un permis. Nos répondons que nous devons participer au processus et nous comprenons les implications des plans de pêche à mesure que vous envisageons de nouveaux plans.
Si vous souhaitez qu'il y ait une reddition de comptes, vous devez la relier à ceux qui ont accès aux ressources. Vous devez être en mesure d'influer sur la façon de déterminer cet accès et les plans de pêche autour de cet accès. Il est important de relier l'accès aux ressources pour déterminer le comportement des individus, des organisations et des collectivités.
Les quotas à l'échelle de la collectivité, qui sont techniquement possibles, ont fait l'objet de débats au sein de la population. D'autres collectivités ont réussi, par l'entremise des quotas à l'échelle de la collectivité, à établir un système de partage qui résulte sur une reddition de comptes de la part de cette entité. Ce système garantit la reddition de comptes pour la gestion des ressources et assure que l'entité respectera certaines règles. Ce mécanisme vise à corriger une situation qui ne serait pas conforme à l'utilisation durable, à la conservation et à d'autres objectifs. Nous étudions la participation de la collectivité à nos processus dans le cadre d'une participation du public et nous changeons en fonction de nos objectifs et de nos plans de pêche.
Le sénateur Hubley : Je cherche des garanties. Je connais mieux la Côte Est que la Côte Ouest et j'aimerais profiter des délibérations du comité pour en apprendre plus sur la Côte Ouest.
Je me demande si les groupes communautaires liés à la pêche ont une voix, et dans l'affirmative, si les mécanismes de cette vision globale concernant nos pêches tiennent compte de leurs aspirations. Sommes-nous au fait de leurs besoins économiques et sociaux? Ces groupes sont-ils inclus dans la perspective d'ensemble?
La pêche sportive et la pêche en général sont bien représentées, est-ce le cas pour les petites collectivités qui ont toujours dépendu de la pêche? Leur a-t-on accordé une priorité ou doivent-elles la gagner? Ont-elles le droit d'avoir cette pêche.
Dans de nombreux cas, si le contexte général met en péril leurs moyens de subsistance, il faut réexaminer leur situation et leur garantir l'accès à la pêche.
M. Stringer : Notre ministère est responsable de la gestion des pêches et nous n'oublions pas que nos décisions touchent les collectivités avoisinantes. Nous devons tenir compte du fait que la pêche est l'élément vital de ces collectivités, surtout au Canada atlantique.
Notre approche à l'égard du renouvellement de la gestion des pêches et d'une plus grande stabilité garantira à ces collectivités un accès de longue durée à la pêche. La gestion des pêches représente pour elles un véritable intérêt. C'est un moyen de leur assurer une stabilité qui entraînera de meilleurs résultats au niveau de la conservation et une importance accrue à la valeur. Si les gens réalisent que l'accès à la pêche est à long terme, ils auront confiance en leur avenir et obtiendront de meilleurs résultats. Nous pourrons ainsi collaborer avec ces collectivités en termes de cogestion et d'intendance partagée.
Le ministère étudie cette politique et vous entendrez probablement parler du processus pendant votre visite de la côte Ouest. M. Sprout a parlé d'une visite à six collectivités et à un certain nombre de petites collectivités. C'est un événement unique qui peut devenir une norme pour l'avenir. Des séances de deux jours sont organisées, y participeront des pêcheurs locaux, des groupes des Premières nations locales, des représentants de groupes environnementaux et des dirigeants de la collectivité. À Prince Rupert, les intervenants et les collectivités, participant à titre de parties intéressées, se rencontreront pendant deux jours pour débattre des questions relatives à la pêche dans cette région, et cela peut établir une norme pour l'avenir et que nous devons garder à l'esprit à mesure que nous allons de l'avant.
Le sénateur Adams : Monsieur Sprout, nous avons réglé une revendication territoriale en 1993 et mis en œuvre une politique concernant la pêche il y a quatre ou cinq ans au Nunavut. Nous avons eu quelques difficultés avec le ministre, surtout au niveau des quotas du turbot et de la crevette dans l'Arctique. Nous sommes là depuis des milliers d'années. Nous savons qu'une zone allant jusqu'à 200 milles de la côte appartient aux Canadiens. Ils réglementent jusqu'à 12 milles; nous ne savons même pas ce qui se trouve dans les 12 milles et entre les 12 milles et la côte. Des recherches ont été faites sur les espèces et la quantité de poissons que peut pêcher la collectivité.
Nous avons, aujourd'hui, les zones OA et OB dans l'Arctique; la zone OA a 4 000 tonnes. D'après certaines organisations, il nous faut des bateaux allant jusqu'à 200 pieds. La seule raison d'aller là-bas est pour pêcher. Tous les ans, entre cette date et février, le ministre fixe les quotas. Deux zones ont 4 000 tonnes; OB a 1 500 tonnes. OB a 2 500 tonnes de plus pour la crevette nordique. Aujourd'hui, le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut, CGRFN, demande les quotas au ministre ici à Ottawa. L'Association de pêche, Baffin Coalition, a 11 directeurs inuits de la collectivité de Baffin. À l'exception de trois collectivités, Broughton Island, Clyde River et Pond Inlet, les quotas de certains poissons pêchés ne reviennent pas aux collectivités. Cela a pris fin cette année.
Environ 330 tonnes sont revenues à l'île de Baffin. Ils ne savent pas si on leur accordera les mêmes quotas. La pêche se pratique là-bas depuis quatre ou cinq ans. Pourtant, ils n'ont pas l'équipement, mais ils ont un contrat de 330 tonnes avec Clearwater. Le montant qu'ils ont reçu du contrat est d'environ 110 000 $ par an. C'est le seul revenu dont dispose la collectivité. C'est merveilleux de refaire cela cette année. Cependant, aujourd'hui, nous n'y avons plus accès à cause des quotas imposés pour les zones OA et OB.
Comment fonctionne le système? Ces organisations devront œuvrer pour l'appliquer avec l'aide des étrangers. Ces poissons ne sont même pas canadiens. Nous avons réglé une revendication territoriale. Nous voulons contrôler l'économie de la collectivité, mais aujourd'hui nous ne pouvons même pas le faire. Certaines initiatives politiques doivent changer. Selon la disposition de la revendication territoriale, il revient au ministre et au gouvernement du Nunavut de décider la façon de contrôler le système. Il ne fonctionne pas à l'heure actuelle et j'en suis préoccupé.
Il y a trois ans que j'étudie ce dossier. Il y a finalement un comité qui a commencé sur ce dossier et, aujourd'hui, nous ne pouvons même pas obtenir les quotas que le ministre étant censé nous accorder.
M. Stringer : Quand vous dites que la collectivité dépend de la pêche et qu'elle n'a pas beaucoup d'autres choses qui lui assurerait une viabilité économique, Nunavut en est évidemment un bon exemple.
Je comprends vos trois questions. Une question porte sur la revendication territoriale et l'accès accordé à Nunavut par rapport à d'autres intérêts. Le deuxième porte sur le caractère unique du Nunavut et de la capacité du gouvernement à reconnaître ce caractère séparément de la revendication territoriale. La troisième porte sur le rôle du CGRFN, du NTI, de la BFC, et qui profite des bénéfices tirés de la pêche.
En ce qui concerne la question de l'accès à l'ensemble des intérêts du Nunavut, la revendication territoriale a été ratifiée au début des années 90. Une attention toute particulière devra être portée aux intérêts du Nunavut dans les zones extracôtières, en tenant compte de la proximité et de l'indépendance économique. La revendication territoriale stipule ensuite que cela devra être équilibré avec d'autres intérêts canadiens.
Depuis 1991, le Nunavut a environ 8,8 p. 100 de la pêche de la crevette. Avec les augmentations qui ont eu lieu, le Nunavut a reçu la majorité des prises des augmentations au taux de 31,4 p. 100 où elles sont fixées dans les zones adjacentes au Nunavut. Les intérêts du Nunavut nous indiquent que ce pourcentage est loin d'être suffisant. D'autres intérêts du Sud, avec lesquels nous sommes censés trouver un équilibre, indiquent que le pourcentage est trop élevé. Nous estimons avoir respecté l'esprit et les objectifs de la revendication territoriale.
En ce qui concerne le flétan, il est aujourd'hui à 60 p. 100 dans les zones OA et OB. Il s'agit maintenant de déterminer qui en profitera. Si cela revient aux intérêts du Nunavut, quels sont les intérêts du Nunavut et qui reçoit ce bénéfice?
Le sénateur Adams : Je croyais qu'il était de 65 p. 100.
M. Stringer : Je crois comprendre qu'il était de 60 p. 100. C'est aujourd'hui la majorité des prises et c'est très élevé. On attend des augmentations, surtout dans la zone OA et nous devons nous en occuper cette année.
Le deuxième point concerne le caractère unique du Nunavut et de la pêche. Je me trouvais au Nunavut il y a trois semaines pour rencontrer le NTI, le CGRFN, le gouvernement et d'autres personnes. Nous avons parlé du caractère unique du développement de la pêche au Nunavut. Les programmes du ministère sont conçus pour régler certaines des autres questions soulevées aujourd'hui, c'est-à-dire une pêche en développement. Nous n'avons plus de programmes de formation. Nous ne construisons plus de ports pour petits bateaux; nous avons largement renoncé à ce programme.
En ce qui concerne la pêche, un certain nombre de collectivités développaient vraiment une pêche efficace. Malheureusement, notre ministère n'est pas créé pour considérer ce type de situation comme étant naturelle. Nous trouvons, de toute façon, les moyens d'étudier ces situations. Nous avons fait une étude sur les ports pour petits bateaux et nos actions en termes d'accès. Nous reconnaissons que le Nunavut fait face à des problèmes uniques et pour lesquels il faut des solutions uniques.
Pour ce qui est du rôle du CGRFN et de la BFC, c'est une question qui pose un défi depuis un certain nombre d'années. En particulier, en ce qui concerne notre approche en matière d'intendance partagée et de cogestion, nous voyons cet organisme comme un partenaire de réglementation et nous voyons le CGRFN comme un groupe avec lequel nous voulons travailler. Je crois savoir qu'il procède à l'heure actuelle à une étude sur toute la question de la pêche hauturière par rapport à la pêche côtière. Nous allons continuer de travailler avec le CGRFN ainsi qu'avec la société NTI et le gouvernement du Nunavut sur ces questions.
Le sénateur Adams : Je crois savoir que c'est très difficile; cependant, certaines personnes de la collectivité quittent la BFC. L'organisation du Nunavut et la BFC ont été créées en 2002. Une action a été donnée à chacune des OCT dans la collectivité. Certaines personnes avaient déjà les quotas, mais elles n'avaient pas d'actions avec droit de vote. Qu'est-ce qu'une personne peut faire avec une action? Si elle n'aimait pas ce que la BFC faisait à la collectivité, elle n'obtenait pas une action avec droit de vote. Le système fixait les actions et ceux qui n'aimaient pas la façon dont le conseil travaillait devaient lui écrire.
Je ne sais pas comment l'organisation travaille avec ce système. J'ai eu une réunion hier avec les directeurs à l'usine de transformation du poisson de Pangnirtung. Je leur ai demandé : « Que faites-vous ici? Vous n'avez pas la moindre idée de ce qui se passe. » Ce sont les gens qui nous dirigent. Il est très difficile pour les gens d'aller en affaires. J'étudie cette question. Je n'aimerais pas que mes propres gens disent : « Vous ne comprenez pas. »
Nous vivons là-bas depuis 1 000 ans. La seule chose, c'est qu'il n'est pas facile d'aller en affaires. Vous parlez de millions de dollars d'équipement. Nous ne savons même pas si ces collectivités pourront demander les quotas dans les zones OB et OA dans l'avenir. On pourrait les donner à quelqu'un d'autre, ce qui est très typique.
M. Stringer : J'aimerais signaler que le ministre était Pangnirtung en avril et que durant cette visite, il a entendu un grand nombre de ces points de vue. Au cours de sa visite, il a également rencontré le CGRFN et le gouvernement du Nunavut.
Le sénateur Adams : Je le sais.
M. Stringer : Il est bien au courant de ces problèmes.
Nous voyons le CGRFN comme un partenaire. Nous comprenons et appuyons le travail qui est en cours concernant l'étude, qui commencera cet automne. Il ne fait aucun doute qu'il y a un potentiel énorme dans la pêcherie du Nunavut et que les gens qui vivent là-bas en seront les bénéficiaires à long terme.
Le sénateur Cowan : Parlez-moi un peu du cycle vital du saumon de la Colombie-Britannique. Je viens de la côte Est et je sais quelque chose du cycle vital du saumon de la côte Est. La raison pour laquelle je pose cette question, c'est que vous parlez de retours faibles. Êtes-vous en mesure de juger les choses sur une année ou vous faut-il trois ou quatre ans pour pouvoir obtenir une appréciation juste des effets à long terme sur le stock?
M. Sprout : Il y a une différence entre le saumon de l'Atlantique et le saumon du Pacifique. Nous gérons principalement cinq espèces sur la côte Ouest : le saumon rouge, le saumon rose, le saumon kéta, le saumon coho et le saumon quinnat. Le saumon rouge est l'espèce qui intéresse le plus la pêche commerciale et les Premières nations. Il s'agit probablement de l'espèce la plus précieuse du groupe. La pêche récréative s'intéresse davantage au saumon quinnat et au saumon coho.
Le saumon du Pacifique fraie en eau douce et meurt, contrairement au saumon de l'Atlantique, chez qui une proportion élevée peut survivre pour frayer plusieurs fois. Le saumon du Pacifique est incubé dans l'eau douce et émerge ensuite comme un jeune poisson. Selon l'espèce, soit qu'il quitte l'eau douce immédiatement après l'éclosion et se rende dans l'océan pour revenir un à trois ans plus tard, soit qu'il reste en eau douce pendant deux ou trois ans, qu'il migre ensuite dans l'océan où il peut vivre pendant deux ans ou plus avant de revenir. C'est le cycle vital général.
Le point à retenir, c'est que les saumons meurent après le frai. Ils séjournent pendant des périodes variables en eau douce. Cela varie d'une espèce à l'autre. Ils passent également diverses périodes de temps dans l'environnement marin et c'est dans cet environnement que nous avons remarqué des changements considérables. Il appert que ce que nous prenions pour un environnement stable n'est pas stable.
Le sénateur Cowan : Voulez-vous dire du point de vue de la température?
M. Sprout : Oui. Du point de vue de la température et des conditions auxquelles les saumons sont exposés, la capacité de s'alimenter, la salinité, toute une série d'éléments que nous supposions relativement constants sont loin d'être aussi constants qu'on le pensait. En fait, les conditions changent. Pour certaines des espèces, cela crée des conditions plus difficiles.
Le nombre de poissons qui reviennent de l'océan est à la baisse. Les retours sont inégaux comparativement aux années antérieures. Il est difficile de dire si c'est le cas pour toutes les espèces, mais en 2005, les retours de saumon rouge étaient beaucoup plus faibles que les autres années.
Le sénateur Cowan : La deuxième question porte sur le braconnage ou la pêche illégale, qui est un problème sur la côte Est. Vous n'avez pas parlé de cette question lorsque vous parliez des problèmes dont nous pourrions entendre parler sur la côte Ouest. Est-ce un problème, que ce soit du point de vue du MPO ou de celui des pêcheurs ayant un permis.
M. Sprout : Le braconnage est un problème. Le ministre a demandé au juge William d'examiner la situation dans le cas du fleuve Fraser. Ce dernier a conclu qu'une partie du problème était liée à la pêche illégale et au braconnage. La réponse du ministère en 2005 a été d'accroître ses ressources pour augmenter le nombre d'agents des pêches dans le but de tenter de régler le problème constaté par le juge Williams.
Oui, comme c'est le cas sur la côte Est, le braconnage ou la pêche illégale est un problème. C'est un problème plus sérieux dans certaines régions que dans d'autres et qui touche certaines espèces à certains moments. Ce n'est pas quelque chose qui est nécessairement constant dans toutes les pêcheries. En fait, vous allez en entendre parler lorsque vous visiterez la Colombie-Britannique. Des gens vous diront que tous les problèmes du saumon du Pacifique viennent du fait que les gens les capturent illégalement. Vous entendrez ce point de vue de certaines personnes.
La réalité, c'est qu'il y a effectivement une certaine pêche illégale; c'est exact. Le ministère a réagi. J'en ai parlé un peu en parlant de l'augmentation de nos ressources cette année et je confirme que c'est une des doléances dont vous allez entendre parler lorsque vous vous rendrez en Colombie-Britannique.
Le sénateur Cowan : Le troisième point dont je veux vous parler concerne l'aquaculture et ses répercussions sur ces pêcheries.
M. Sprout : C'est un autre problème. L'aquaculture est une forme de pêche très importante en Colombie- Britannique. Alors qu'elle n'avait qu'une contribution très modeste auparavant, on peut maintenant dire qu'elle a une contribution très importante. Nous exploitons un grand nombre de poissons issus de l'aquaculture et ils contribuent de manière importante à l'emploi dans les collectivités que vous allez visiter, c'est-à-dire les collectivités éloignées, isolées. Dans de nombreux cas, ces collectivités ne peuvent dépendre de l'industrie forestière ni des autres industries d'exploitation des ressources naturelles qui sont en déclin ou qui ne manifestent pas de croissance. Par conséquent, l'aquaculture est une source d'emplois très importante.
Ceci dit, c'est une question très controversée. Nous avons des groupes qui croient que l'aquaculture fournit un produit et des emplois précieux et qu'elle peut se pratiquer de manière durable. Nous en avons d'autres qui prétendent que cela crée une source de maladie et d'autres problèmes pour le saumon sauvage.
Le ministère croit que l'aquaculture est une utilisation légitime de la ressource, mais elle doit respecter certaines normes pour être une industrie durable. Nous devons nous assurer que ces normes sont respectées. Si elles sont respectées, alors nous croyons qu'il s'agit d'une utilisation légitime qui peut contribuer à l'emploi et qui peut se faire en harmonie avec l'utilisation des poissons sauvages et des pêches sauvages.
Le sénateur Watt : En écoutant votre exposé, je suis encouragé d'entendre qu'il y a de l'ouverture d'esprit et une volonté d'explorer de nouvelles façons de traiter des questions de conservation et de gestion.
Pourquoi n'avez-vous pas parlé de la question du saumon sauvage dans votre exposé? Pourquoi acceptez-vous d'en parler uniquement à l'étape des questions?
M. Sprout : C'est uniquement à cause du temps, sénateur.
Le sénateur Watt : Je comprends.
Vous devez faire attention à la survie du saumon sauvage. Il y a une possibilité que l'on néglige le saumon sauvage ou qu'on ne le considère plus comme une priorité ou comme étant important à cause de l'élevage et de l'aquaculture. Le grand public canadien et le gouvernement considèrent cela comme la voie de l'avenir parce qu'elle procure la stabilité, en un sens.
En même temps, nous savons que les mêmes espèces que nous élevons utiliseront les mêmes eaux. On les libérera et on s'attendra à ce qu'elles reviennent. Cela se produit actuellement en Colombie-Britannique. Parfois, des nombres suffisants de saumons reviennent et parfois, les nombres ne correspondent pas aux attentes.
Nous parlons en termes généraux. J'aimerais traiter de questions précises fondées sur ma propre expérience. Il y a trois rivières à saumons au Nunavut. Je pratique une pêche de subsistance. Lorsque j'étais pêcheur commercial, j'étais conscient du fait que les stocks dans ces rivières n'étaient pas durables. Nous avons toujours essayé de nous assurer que la conservation prime sur tout le reste.
Ceci dit, nous avons des instruments de recherche scientifique à notre disposition dans la collectivité de Kuujjuaq. Au cours des années, nous nous sommes préoccupés du bien-être du poisson dans cette rivière. Cela se fait dans le cadre de la Convention de la Baie James et du Nord québécois. Depuis cette époque, nous avons constaté que le saumon de l'Atlantique est en train de disparaître et pendant une saison complète, vous êtes chanceux si vous récoltez un ou deux saumons atlantiques.
Dans la rivière Kuujjuaq, le saumon ne migre pas de la même manière que le saumon atlantique. Il y a un mouvement de va-et-vient entre la rivière et les eaux côtières. À une époque, on avait l'habitude de les appeler les saumons courts. Aujourd'hui, ces saumons courts sont énormes.
Au cours des cinq dernières années, j'ai constaté d'importants changements. Le saumon court semble s'imposer dans ce système de rivière. Je ne peux pas en être certain, parce que je n'ai pas l'information scientifique nécessaire pour savoir ce qui arrive dans la rivière Kangiqsualujjuaq, mais je suis certain de ce qui arrive à Kuujjuaq. Si le saumon atlantique est en train de disparaître, nous devons savoir pourquoi.
Le poisson que nous avions l'habitude d'appeler le saumon court peut croître pour atteindre un poids de 45 livres. Qu'est-ce qui fait qu'il devient aussi gros en si peu de temps? Est-ce l'eau chaude? Ont-ils plus d'aliments à consommer? Je l'ignore. Nous avons besoin de données scientifiques pour trouver les réponses à ces questions.
L'été dernier, j'ai communiqué avec notre service de recherche après avoir commencé à capturer ces énormes saumons. Je leur ai dit que je voulais qu'ils viennent prendre des échantillons. C'est leur responsabilité que de mesurer la taille des saumons, d'examiner les écailles et de déterminer leur âge. Ils ne font plus cela aujourd'hui et je ne suis pas certain pourquoi. Pêches et Océans a une responsabilité collective de surveiller ce qui se passe dans nos rivières.
C'est un domaine important que nous ne devrions pas négliger.
J'aimerais parler de deux autres points liés aux questions du sénateur Hubley concernant les droits axés sur la collectivité.
Je vais relier les droits axés sur la collectivité aux QI. Le quota individuel n'est pas nécessairement axé sur la collectivité. Il peut s'agir d'une personne qui a beaucoup d'argent et beaucoup d'influence dans la collectivité. Le bien- être de la collectivité dépend de ces ressources, qui ont des répercussions directes et indirectes sur le fait d'avoir des installations suffisantes, par exemple dans le domaine de la santé et de l'éducation. Un grand nombre de ces collectivités côtières ont vu le jour à cause du saumon et rien d'autre.
Comment pouvez-vous donner l'assurance à une collectivité qu'une personne qui détient le quota, un intervenant, ne changera pas d'idée et ne déménagera pas l'usine ailleurs, lorsqu'il jugera utile de le faire? Ce n'est pas sain économiquement pour lui, mais cela pourrait être sain économiquement pour la collectivité. Que faites-vous pour faire face à cette question?
M. Sprout : Mon collègue pourrait vouloir traiter de certaines de vos observations concernant le saumon atlantique.
Premièrement, pour ce qui est de l'approche face au saumon sauvage et de la politique que nous avons adoptée en avril de cette année, votre point de vue explique exactement pourquoi nous avons estimé qu'une politique sur le saumon sauvage était nécessaire. Le public de la Colombie-Britannique exigeait une politique sur le saumon sauvage. C'est l'idée que nous devons préserver la diversité génétique du saumon du Pacifique pour que l'on puisse avoir du saumon sauvage dans l'avenir.
La politique elle-même se traduit par des stratégies, des objectifs et une série d'activités scientifiques. Elle prévoit également une base d'évaluation pour déterminer dans quelle mesure nous réalisons les objectifs de la politique.
En bout de ligne, cette politique concerne la conservation du saumon du Pacifique parce qu'en Colombie- Britannique, le saumon a valeur d'icône et que c'est la ressource naturelle qui compte le plus. Les gens s'inquiètent du saumon même s'ils ne l'utilisent pas à des fins commerciales ou ne le consomment pas; ils veulent tout simplement qu'il soit là.
Comme je l'ai dit, lorsque vous allez vous rendre en Colombie-Britannique, vous allez entendre beaucoup parler du saumon.
Pour ce qui est de la question des collectivités, nous croyons que l'apport de la collectivité est important et nous avons entrepris une discussion publique et un dialogue qui influeront sur la façon dont nous allons structurer et gérer la pêche.
C'est là un changement. De mon point de vue, étant donné ma carrière au ministère, je viens d'une époque où nous ne faisions pas cela. Nous le faisons aujourd'hui et je prévois que nous continuerons à progresser avec le temps. Ce n'est pas quelque chose qui est fixe; cela continuera d'évoluer. C'est un nouveau processus pour nous et nous nous sommes engagés à tenir compte du dialogue dans nos politiques.
Il y a un problème quant à la façon de lier la collectivité à l'accès et aux licences. Il s'agit d'une question distincte à discuter. Elle est liée à la question des quotas collectifs, qui est un autre domaine fertile pour la discussion, sinon le débat. Cela pourrait être une façon de régler certains des points que vous avez soulevés vers la fin de vos observations.
Si vous suivez l'évolution du ministère au chapitre de ses mécanismes de consultation, il ne fait aucun doute que nous sommes passés d'une période où nous avions une possibilité limitée d'entendre les points de vue des autres à un processus public plus ouvert, et c'est un processus qui se poursuit toujours et qui évolue.
M. Stringer : M. Sprout a parlé de la politique sur le saumon du Pacifique sauvage que nous avons rendue publique en juillet. C'est la première fois que notre ministère présente une telle politique.
Comme l'a signalé M. Sprout, le saumon du Pacifique sauvage est une question extrêmement complexe et importante. La politique tente de réunir la gestion des ressources, la science, la gestion de l'habitat et la conservation et la protection. Elle indique comment nous coordonnons les priorités et traitons des habitats essentiels et de la science, ce genre de choses.
Au cours des dernières années, les gens ont remarqué des problèmes semblables chez les saumons des deux côtes. Nous avons mis fin à la pêche commerciale. Nous avons pris un certain nombre de mesures. Nous faisons autant de conservation que nous pouvons le faire. Nous faisons de la recherche sur ce qui arrive en mer et ce qui se passe avec la mortalité en mer; nous étudions les questions liées aux pluies acides et ce qui arrive au Groenland.
Nous commençons maintenant à travailler sur une politique portant sur le saumon atlantique sauvage. Par certains aspects, c'est plus complexe, parce que nous devons traiter avec cinq provinces et un territoire.
La pierre angulaire de la politique est l'annonce faite par le ministre en février de la création d'un Fonds de dotation pour le saumon atlantique, qui porte sur des questions comme le fait de travailler avec des « streamkeepers », des groupes communautaires et de conservation sur les habitats essentiels et d'autres projets. Nous essayons de prendre des mesures pour préserver et, effectivement, ramener le saumon sauvage sur la côte Est.
La question devient plus complexe à cause des questions entourant la pêche à des fins alimentaires, sociales et rituelles qui sont apparues au cours des dernières années. Il s'agit d'une question complexe, mais nous y travaillons, et plus spécifiquement, nous travaillons à élaborer, dans la politique sur le saumon de l'Atlantique sauvage, une solution semblable à celle qui a été élaborée dans le processus du Pacifique.
Le sénateur Watt : Que se passe-t-il sur le terrain? Est-ce que nous ne faisons que parler ou ferons-nous quelque chose? Pêches et Océans Canada est certainement absent de la région. Je n'ai vu personne de ce ministère dans les régions que je représente.
M. Stringer : Je peux tenter de savoir ce qui se passe, si vous le désirez, mais je ne peux pas parler des rivières précises que vous avez mentionnées.
Le sénateur Watt : Je vous encouragerais également à entrer en contact avec le service de recherche de la Société Makivik. Ce sont eux qui traitent de cette question. J'imagine que lorsqu'ils ont dit qu'ils ne faisaient plus d'études scientifiques sur cette question, c'est probablement parce qu'ils ne reçoivent plus d'argent. Je ne sais pas si c'est la raison qui explique cela. Je n'ai pas posé la question. J'aimerais avoir certaines réponses à ces questions plus tard.
Avez-vous un modèle pour les droits axés sur la collectivité? Avez-vous travaillé sur un modèle? Vous avez dit que le travail était en cours et au stade de développement. Avez-vous d'autres modèles que nous pourrions examiner ou préféreriez-vous recevoir cette information comme une proposition provenant d'ailleurs, que ce soit des intervenants ou du comité?
M. Stringer : Je dirais qu'il n'y a probablement pas de solution universelle. C'est certainement quelque chose que nous constatons si l'on compare la côte Ouest à la côte Est. Il y a des approches différentes sur la côte Ouest et sur la côte Est. Effectivement, le processus dont M. Sprout parlait a lieu en ce moment même sur la côte Ouest, et non sur la côte Est. Je ne sais pas s'il y a une solution universelle. Nous avons, et nous pourrions partager cette information avec vous, une idée de l'orientation que prendra la gestion des pêches en termes de stabilité, en termes de cogestion, en termes de participation des gens qui participent actuellement à la pêche et leur donner le sentiment qu'ils pourront pratiquer la pêche à long terme, et il s'agit là d'un modèle global.
Pour ce qui est de faire participer les collectivités à la pêche, M. Sprout a raison. C'est quelque chose qui est en voie d'élaboration et nous sommes certainement ouverts aux modèles que l'on pourrait proposer sur cette question.
Le sénateur Watt : Pensez-vous que le comité pourrait être utile dans ce domaine, si nous commencions à concentrer nos efforts pour avoir un certain dialogue direct avec les collectivités?
M. Sprout : De notre point de vue, je pense que nous serions intéressés à savoir ce que vous pensez de la façon dont nous pourrions interagir de manière efficace avec les divers groupes, les divers intérêts et les Premières nations. C'est un défi pour le ministère.
Le sénateur Watt : Je ne parle pas uniquement des Premières nations.
M. Sprout : Je comprends et j'ajouterais les ONG et ainsi de suite. C'est un défi pour nous que de répartir des ressources limitées entre un grand nombre de réunions et d'interactions différentes avec différents groupes. Les réflexions sur cette question nous seraient utiles dans notre cheminement vers cette série de mesures. Comme je l'ai dit, la façon dont nous faisons les consultations aujourd'hui sera probablement différente dans cinq ans et dans 10 ans, les consultations seront différentes de celles qu'il y avait cinq ans auparavant. C'est un processus en évolution. À l'heure actuelle, je suis en train d'établir, dans le Pacifique, au moins, la façon dont nous entendons aborder cette question pour faire face aux points que vous avez soulevés.
Il est très probable que cela sera transformé de nouveau au cours des cinq prochaines années et ainsi de suite, alors, toute information à cet égard serait utile.
Le président : Avec la permission des deux derniers membres du comité, j'aimerais poser mes questions maintenant, parce que je dois partir très bientôt. J'ai quelques questions qui ne sont pas reliées à celles-là.
Comme nous le savons, le MPO éprouve certains problèmes de perception. Des gens perçoivent un peu négativement le MPO et c'est un problème qui nécessite certainement que l'on apporte des correctifs. C'est la question du programme caché. Cela ressemble presque au Parti conservateur, avec des accusations de programme caché et tout le reste. Je vais donner un exemple.
Le fait que le ministère a recommandé que M. Pearse soit l'auteur ou le concepteur de l'étude a immédiatement envoyé le message qu'il y avait un biais de la part du ministère. Imaginez si M. Parcival Copes avait été choisi comme chercheur principal de l'étude. Pourquoi avez-vous choisi M. Pearse plutôt que quelqu'un qui a moins d'antécédents comme partisan de la privatisation?
M. Sprout : Les gouvernements provinciaux et fédéral ont parrainé le groupe de travail conjoint. Nous avons proposé la candidature de Donald McRae et leur choix s'est arrêté sur Peter Pearse, et c'est de cette façon que nous en sommes arrivés à un rapport corédigé par Pearse-McRae.
Le président : Ce choix envoyait le signal que l'étude serait partiale. Je le dis à titre de suggestion. C'était peut-être à cause du parti pris de l'un des deux chercheurs. M. Pearse est un chercheur renommé. Cependant, il a effectivement un parti pris.
M. Sprout : Ma réponse à cette observation, c'est que M. Pearse est un économiste qui a une excellente réputation. Il a fait un certain nombre de consultations dans le cadre d'un certain nombre de rapports pour le Canada touchant un nombre de ressources différentes, et non seulement le poisson. On le tient en haute estime au niveau international également. Mon point de vue personnel, c'est que peu importe qui aurait été choisi, on aurait quand même estimé que l'étude était partiale.
Ce que nous devons regarder, c'est le résultat, le produit et le processus qui a été suivi, et ensuite, déterminer quelle sera la réponse du ministère.
Le président : Je vais laisser cette question de côté pour le moment. Il se trouve que je ne suis pas d'accord avec vous. Il y a des économistes au pays qui accordent moins leur appui à un certain modèle que M. Pearse. Je ne porte pas de jugement sur son intelligence, ou sur ses capacités de recherche, ou sur la valeur de sa contribution dans le passé, mais il existe des gens qui ont parti pris moins prononcé en faveur d'un certain modèle.
Tant les États-Unis que le Royaume-Uni, et jusqu'à un certain point, la Nouvelle-Zélande, ont reconnu que si on s'orientait vers une système de QIT, il y aura des répercussions pour les collectivités qui dépendent fortement des ressources adjacentes. Ils ont indiqué publiquement comment ils utiliseraient des quotas collectifs dans certaines régions de manière à atténuer les répercussions des QIT.
Le Canada n'a pas utilisé cette approche ni même indiqué qu'il envisagerait d'utiliser cette approche. Pourquoi ne suivrions-nous pas l'exemple à la fois des États-Unis et du Royaume-Uni en indiquant que nous reconnaissons qu'il y aura des répercussions sur certaines collectivités et, par conséquent, que nous allons tenter de les atténuer?
M. Stringer : Nous n'avons pas dit que nous ne reconnaissons pas qu'il y a des répercussions sur les collectivités. Le modèle que nous décrivons pour le renouvellement de la gestion des pêches y arrive, même s'il y arrivera peut-être d'une manière légèrement différente. Il s'agit d'un modèle dans lequel nous regroupons les gens dans la pêcherie et leur fournissons les moyens de participer à la gestion de la pêcherie. De cette façon, nous amenons la collectivité à s'engager et nous lui fournissons une fondation sur laquelle elle peut bâtir.
De plus, mon collègue a parlé du processus qui a eu lieu en Colombie-Britannique pour ce qui est de faire participer les collectivités, qui est une question distincte. Pour ce qui est de la question du renouvellement de la gestion des pêches, nous pensons que la stabilité, la prévisibilité et la transparence globale seront utiles aux collectivités dans les mêmes grandes lignes. Cela est particulièrement important sur la côte Est, où nous avons des politiques qui portent sur les propriétaires-exploitants, la séparation des flottilles et ce genre de chose où vous avez des collectivités qui sont bâties autour de la pêche.
Le président : J'ai soulevé ce point dans ma déclaration d'ouverture. La semaine dernière, Clearwater a annoncé qu'elle allait déménager ses activités de transformation, ce qui entraîne la perte de 40 emplois au Cap-Breton, une région où la perte de 40 emplois a des répercussions énormes. À Grand Banks, Terre-Neuve, 26 autres emplois déménagent en Chine à cause des coûts peu élevés de la main d'œuvre et probablement parce que les lois sur l'environnement et sur le travail y sont moins strictes.
Une entreprise peut faire cela. Il s'agit d'une décision d'affaires. Elle a le droit de le faire, parce que nous avons remis une ressource qui appartient aux Canadiens à Clearwater et que cette ressource appartient maintenant à une entreprise. Clearwater est capable de prendre des décisions d'affaires qui peuvent avoir des répercussions sur les collectivités qui ont besoin de ces emplois.
Avez-vous pris en considération le fait que la mise en application d'un système de QIT pourrait permettre que la même chose arrive sur la côte Ouest. Entrevoyez-vous une façon quelconque d'éviter une répétition de ce qui arrive à Sydney et à Grand Banks?
M. Sprout : Je ne suis pas au courant que les systèmes de QI ont, en fait, encouragé ceux qui ont accès à leur ressource à transformer leur produit ailleurs que là où ils le feraient traditionnellement. En fait, je dirais plutôt que c'est le contraire. Nous avons vu plus d'accent sur l'obtention d'une meilleure valeur pour les produits dans la région, particulièrement dans les régions de Vancouver, de Nanaimo, de la côte Ouest de l'île de Vancouver et des endroits comme ceux-là.
À l'heure actuelle, je ne suis pas au courant de cette option particulière, où des gens donnent à entendre qu'ils vont déménager leur produit ailleurs.
Le président : J'ai une douzaine de copies du communiqué de presse que j'ai trouvé dans le journal. L'information n'est pas niée par Clearwater. C'est eux qui le disent. Je vais vous en donner une copie. Même si je transpose un scénario de la côte Est sur la côte Ouest, j'essaie de savoir si notre expérience, sur la côte Est, ne pourrait pas servir pour la côte Ouest.
Clearwater ne le nie pas. C'est dans le journal. Quarante emplois à North Sydney et 26 emplois à Grand Banks. Le déménagement est motivé par des coûts de main d'œuvre moins élevés.
Sur le même sujet, envisagez-vous un moyen quelconque de limiter la concentration des quotas entre les mains d'une personne ou d'une entreprise en particulier?
M. Sprout : Dans le processus de consultation dont j'ai parlé plutôt, nous posons des questions du genre : si nous nous orientons vers ce genre d'arrangement où les flottilles proposent, par exemple, une gestion des QI, y a-t-il d'autres question que les gens voudraient soulever concernant l'acceptation de cette orientation, ce qui pourrait inclure l'étude de la question de la concentration.
À l'heure actuelle, nous sommes ouverts aux réflexions et aux points de vue des gens sur cette approche, mais nous essayons d'encourager l'industrie elle-même à fournir des solutions qui respectent les principes que nous avons énoncés : utilisation durable, respecter la conservation, ne pas faire de tort aux intérêts de quelqu'un en dehors des vôtres, ce genre de choses. Ensuite, nous examinerions les propositions individuelles et ce que les gens pourraient proposer. S'il y a des questions concernant la concentration des entreprises, ce serait le mécanisme que nous utiliserions pour déterminer s'il l'on doit imposer des conditions ou des restrictions sur la transférabilité de ces QI, si c'est une préférence.
Le président : J'ai remarqué que vous avez utilisé le mot « industrie ». L'industrie voudra toute la souplesse que l'on pourra mettre dans le système, disant évidemment qu'elle a le droit de changer d'idée quand bon lui semble. L'industrie décide à quel moment elle veut s'orienter ou non vers la concentrations, sans chercher généralement à obtenir l'avis de sa collectivité locale, comme l'a indiqué, je pense, le sénateur Hubley.
La question de la concentration sera décidé par l'industrie, n'est-ce pas?
M. Sprout : Il y a deux questions distinctes ici. Premièrement, il y a la question du type d'industrie. Par exemple, si nous parlons de l'industrie du saumon en Colombie-Britannique, l'industrie est constituée de bateaux senneurs, de chalutiers et de bateaux à filets maillants. La pêche par des petits bateaux est constituée de chalutiers et de bateaux à filets maillants, qui constituent plus de la moitié de la flottille. Chacune des industries prendra ses décisions ou donnera ses points de vue sur la façon dont elle voudrait s'organiser elle-même et sur le type de pêche qu'elle voudrait pratiquer. De plus, comme je l'ai indiqué, nous avons un processus public dans le cadre duquel nous demandons au public en général, aux ONG, aux leaders des collectivités et ainsi de suite, de faire connaître leurs pensées et leurs points de vue. Enfin, nous avons des organismes comme le Conseil de gestion des ressources aquatiques et d'autres qui sont des processus multilatéraux où les gens ont également la possibilité de faire valoir leur point de vue.
Nous pensons avoir une approche solide pour obtenir les points de vue des gens et, ensuite, comparer peut-être ces points de vue à des intérêts plus étroits, et pour ensuite, en bout de ligne, en arriver à une bonne politique publique.
Le président : Encore une fois, si j'applique l'expérience de la côte Est, j'avais posé une question il y a plusieurs années au sous-ministre de l'époque concernant la concentration des entreprises et sur la quantité de quotas accumulés dans le cas du poisson de fond. La réponse a été 3 p. 100. « Comment suivez-vous la situation? » « Nous ne la suivons pas. C'est la politique, 3 p. 100, mais nous ne la suivons pas parce que nous ne sommes pas des policiers ».
Il y avait une politique en place, mais on n'en tenait pas compte. Cela semblait bien lorsque vous posez la première question : « Quel est le degré de concentration des entreprises que vous pouvez avoir dans cette pêche? » Trois pour cent, cela semble bien; mais lorsque vous demandez si la règle régissant la concentration était appliquée, la réponse était non. Voilà une autre raison pourquoi le MPO suscite des doutes, lorsque vous essayez d'obtenir des réponses à des questions.
Ma dernière question concerne le Conseil de gestion des ressources aquatiques. Il a proposé ce qu'il appelle une fiducie aquatique, fondée sur l'expérience vécue en Alaska. Nous n'avons pas encore examiné cette question, mais apparemment, l'expérience vécue en Alaska pour ce qui est du saumon est assez positive.
Avez-vous, au ministère, examiné ce modèle de l'Alaska pour voir si cette fiducie aquatique du Conseil de gestion des ressources aquatiques pourrait être un modèle?
M. Sprout : Je ne l'ai pas fait dans cette perspective, sénateur Comeau. Nous avons considéré le système de quotas collectifs de l'Alaska comme un mécanisme potentiel à envisager en Colombie-Britannique là où il peut y avoir un intérêt à l'appliquer, mais nous n'avons pas examiné un système de fiducie.
Nous considérons le Conseil de gestion des ressources aquatiques comme un mécanisme pour fournir le point de vue d'intervenants multiples sur certaines idées et certaines politiques et stratégies. À l'heure actuelle, le but consiste à préciser davantage les attributions de sorte que nous puissions tirer le plus grand bénéfice du processus.
La réponse à votre question, c'est que nous n'avons pas examiné la question dans une perspective de fiducie. Cependant, nous avons examiné la question des quotas collectifs et sa pertinence pour la Colombie-Britannique.
Le président : Espérons que le Conseil de gestion des ressources aquatiques vivra encore pendant un certain temps. Je crois effectivement que ces gens ont beaucoup de potentiel, s'il y a une façon que le ministère puisse se rendre utile. Je pense qu'ils sont sur la bonne voie. Ils ont encore du travail à faire, mais s'il y a une façon que nous puissions continuer d'essayer de les aider, ce serait utile. Ils ont certaines bonnes idées et un bon potentiel.
M. Sprout : Le concept des intervenants multiples est une bonne idée. La question, c'est comment agencer cela à tout ce qui se passe actuellement en Colombie-Britannique tout en essayant de trouver un certain financement à long terme de sorte que les gens n'aient pas chaque année à s'inquiéter de savoir s'ils vont survivre ou non.
Le sénateur Merchant : Je viens de la Saskatchewan. C'est pour cette raison que je laisse mes collègues qui ont plus d'expérience dans le domaine des pêches poser les questions.
Lorsque vous tenez des consultations auprès des intervenants, vous entendez des points de vue variés. Pouvez-vous nous dire les problèmes clés sur lesquels vous ne pouvez pas obtenir d'accord lorsque vous entendez les différents intervenants?
M. Sprout : C'est une bonne question. Au niveau fondamental, il y a un désaccord important en Colombie- Britannique entre les Premières nations et les non-Autochtones du côté commercial. Les Premières nations ont très hâte d'avoir un accès accru à la ressource, pour toutes les espèces. Les non-Autochtones sont préoccupés au sujet de leur gagne-pain. Nous essayons de trouver une façon de donner un plus grand accès aux Premières nations, mais d'une manière qui respecte les autres parties.
C'est un problème de taille. Vous allez entendre parler de cela en Colombie-Britannique. On vous dira, par exemple, que les Premières nations ont le droit de pêcher mais pas les non-Autochtones.
Le sénateur Merchant : C'est ce qu'on entend dans les nouvelles.
M. Sprout : Cela est lié à deux choses. Premièrement, le fait que les Premières nations ont le droit de pratiquer la pêche à des fins alimentaires, sociales et rituelles et il peut y avoir constitution d'une personne morale pour les Premières nations pour avoir un accès à la pêche commerciale. Selon la nature de cet accès, elles peuvent pratiquer la pêche plus tôt que d'autres parties ou elles peuvent avoir pêché d'une manière différente que les autres parties, ou dans une région différente que les autres parties. Cela exprime la frustration d'un groupe envers l'autre.
Une autre question dont vous allez probablement entendre parler, c'est la conservation. Vous allez entendre la communauté environnementale dire que le ministère doit se montrer encore plus strict en matière de conservation qu'il l'a été, qu'il doit restreindre encore davantage les pêcheries qu'il limite déjà. Par ailleurs, lorsque vous serez à Prince Rupert et que vous visiterez une communauté qui pratique la pêche, vous entendrez le contraire. On vous dira : « Pourquoi le ministère a-t-il pris ces mesures? Pourquoi le ministère ne permet-il pas la pêche? »
Vous entendrez peut-être parler de questions liées à l'habitat. On pourra vous demander comment certains développements peuvent avoir lieu et, en même temps, comment protéger le saumon qui fraie en eau douce et qui passe une partie de sa vie en eau douce. C'est une controverse.
Les derniers points dont vous allez entendre parler concernent le changement climatique et les conditions marines dont j'ai parlé plus tôt. On vous parlera de ces questions et d'autres encore lorsque vous vous rendrez en Colombie- Britannique.
Le sénateur Merchant : Est-ce que les intervenants appuient la vision globale du ministre concernant la réforme de la pêche dans le Pacifique selon laquelle les participants sont autonomes et capables de s'ajuster, et ceux qui profitent de la récolte partagent les coûts de gestion.
M. Sprout : Cela nous amène à nos attentes qu'une pêche commerciale peut entamer des poursuites contre elle-même et être en grande partie autosuffisante. Elle n'a pas besoin de beaucoup de soutien autre que celui que nous sommes responsables d'offrir, à savoir certains types d'évaluation des stocks, l'application de la loi, et ainsi de suite.
Nous nous attendons à ce que la pêche soit rentable. Nous nous attendons à ce que les gens puissent faire de l'argent et qu'ils puissent faire leurs frais et dépasser ces coûts. C'est là où nous aimerions aller. Nous n'y sommes pas encore arrivés dans le cas du saumon. Nous avons encore du chemin à faire, mais nous pensons qu'il s'agit là d'un objectif raisonnable et qu'il s'agit d'un objectif auquel nous devrions nous mesurer.
Pour ce qui est du partage des coûts, nous reconnaissons que nous avons une obligation publique d'investir dans certaines activités dont nous sommes responsables, par exemple, les programmes fondamentaux d'évaluation des stocks, la mise en application de la loi et la surveillance. Parfois, les diverses industries ou les flottilles veulent que nous fassions des choses que nous ne considérons pas vraiment comme un investissement public. Nous considérons que cela sert leurs intérêts. Nous ne sommes pas opposés à cela, mais nous pensons qu'ils devraient payer pour ces activités si tel est le cas. Nous avons beaucoup de mal à établir cet équilibre. J'avoue que nous avons de la difficulté à le faire. Toutefois, je ne peux pas vous donner toute la clarté que j'aimerais pouvoir vous donner. Il s'agit d'un défi permanent pour nous. C'est ce que veulent dire ces principes.
Le sénateur Merchant : Examinez-vous d'autres modèles à cet égard?
M. Sprout : C'est une bonne question, sénateur. Nous nous informons sur d'autres modèles. Le sénateur Comeau a parlé du modèle de la Nouvelle-Zélande et de l'Australie. Nous connaissons bien les modèles utilisés en Europe et d'autres modèles utilisés aux États-Unis. Nous nous informons sur des modèles utilisés partout dans le monde. Ce que nous avons conçu, c'est une approche adaptée à la Colombie-Britannique à cause des traditions, des cultures, des histoires qui sont uniques à ce pays et à diverses provinces. Nous devons faire ce qui est bon pour nous. Nous nous informons effectivement sur les autres modèles.
Le vice-président : Y a-t-il d'autres questions? Je ne vois personne qui désire poser des questions. Si c'est le cas, au nom du comité, j'aimerais vous exprimer nos remerciements pour votre exposé et pour avoir répondu à nos questions parfois difficiles. Nous avons hâte de nous rendre sur la côte Ouest. Vous avez été très utiles pour nous préparer à ce voyage. Merci encore une fois.
Je demande aux membres du comité d'attendre un instant; je vais suspendre les travaux pendant quelques minutes le temps de permettre aux gens de quitter la salle. Nous aurons ensuite une courte réunion à huis clos.
La séance se poursuit à huis clos.