Délibérations du comité sénatorial permanent des
affaires étrangères
Fascicule 5 - Témoignages du 9 février 2005
OTTAWA, le mercredi 9 février 2005
Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères se réunit aujourd'hui à 15 h 51 pour étudier les défis en matière de développement et de sécurité auxquels fait face l'Afrique; la réponse de la communauté internationale en vue de promouvoir le développement et la stabilité politique de ce continent; et la politique étrangère du Canada envers l'Afrique.
Le sénateur Peter A. Stollery (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Mesdames et messieurs les sénateurs, la séance est ouverte. J'aimerais vous souhaiter à tous la bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères. Nous poursuivons notre étude spéciale portant sur l'Afrique conformément au mandat qui nous a été conféré par le Sénat le 8 décembre dernier.
[Français]
Nous avons le plaisir d'accueillir aujourd'hui de représentants de trois ministères qui nous entretiendrons de l'Afrique.
Tout d'abord, du la Direction générale de l'Afrique des Affaires étrangères Canada, Mme Anne-Marie Bourcier, directrice générale, accompagnée de Mme Chantal Chastenay, directrice à la Direction du Maghreb et de la péninsule arabique, ainsi que Mme Ulla Kourany, conseillère principale en politiques à la Direction du NEPAD, plan d'action du G8 pour l'Afrique et institutions panafricaines.
[Traduction]
Nous entendrons ensuite deux nouveaux témoins de la Direction générale de l'Afrique et du Moyen-Orient de l'ACDI. Il s'agit de Nadia Kostiuk, directrice générale, Politiques, planification stratégique et services techniques, et d'Ellen Wright, directrice, Gouvernance, sécurité et communications, Secrétariat du Fonds canadien pour l'Afrique.
Notre dernier témoin d'aujourd'hui sera le colonel Denis Thompson, directeur de la Politique du maintien de la paix.
Nos témoins de la semaine dernière nous ont brossé un tableau de l'histoire de l'Afrique et nous avons étudié hier les défis auxquels ce continent est confronté. Aujourd'hui, nous discuterons de la façon dont la communauté internationale, y compris l'Afrique elle-même, s'efforce de relever ces défis. Nous voudrions en particulier que nos témoins d'aujourd'hui nous expliquent et expliquent aussi au public canadien quelle est la perspective du gouvernement canadien à cet égard.
Nous poursuivrons l'étude de ce sujet mardi prochain lorsque nous accueillerons des représentants de Commerce international Canada et du ministère des Finances.
Pour vous donner un aperçu de nos travaux futurs, la séance du 16 février sera consacrée à l'examen des politiques du gouvernement canadien touchant l'Afrique ainsi que des programmes qu'il met en oeuvre dans cette région. Bref, nous nous pencherons sur la façon dont notre gouvernement cherche à relever les défis qui se posent à l'égard de l'Afrique.
Comme je l'ai dit hier, nous aurons le plaisir d'accueillir lundi le lieutenant-général Roméo Dallaire qui nous présentera ses vues sur l'Afrique. Nous accueillerons mardi prochain un autre témoin important, soit M. K.Y. Amoako, secrétaire exécutif de la Commission économique des Nations Unies pour l'Afrique.
[Français]
Madame Bourcier, vous pouvez commencer.
Mme Anne-Marie Bourcier, directrice générale, Direction générale de l'Afrique, Affaires étrangères Canada : Monsieur le président, je vais vous entretenir aujourd'hui des efforts qui sont déployés par la communauté internationale pour relever les défis du développement et de la sécurité en Afrique. Nous avons commencé à aborder ce thème dans notre dialogue hier soir. Il me fait un grand honneur de poursuivre cette discussion aujourd'hui.
Le défaut de la communauté internationale et des Africains, dans les années 90, dans leur incapacité de relever les défis du maintien de la paix et de la sécurité a été, en grande partie, responsable de l'effroyable décennie d'actes de violence et de violations des droits de la personne qu'a connus l'Afrique. Des milliers d'Africains ordinaires, des hommes, des enfants, des femmes en ont payé le prix. La simple mention du nom de quelqu'un des pays en cause suffit à nous rappeler les événements accablants du Rwanda, du Sierra Leone, du Soudan, de l'Angola et du Congo.
Nous nous devons de relever ce défi essentiel en renforçant et en resserrant l'interaction et la collaboration entre les pays africains et les pays donateurs et les institutions internationales.
Je me propose aujourd'hui d'attirer votre attention sur les moyens que nous prenons pour nous attaquer à certains des principaux problèmes à résoudre et je vais vous brosser un tableau de la situation qui ne sera certes pas complet, mais qui vous donnera une bonne idée des difficultés qu'il nous faut surmonter.
Le Congo, la RDC, et la région des Grands Lacs : l'instabilité et la guerre qu'ont connues le Congo et la région des Grands Lacs entre 1996 et 2002, ont engendré la pire crise humanitaire de l'histoire récente ayant causé directement et indirectement plus de trois millions de morts et d'abominables atteintes aux droits de la personne, particulièrement envers les femmes et les enfants.
Le Canada, de concert avec d'autres pays animés des mêmes sentiments, a joué un rôle de premier plan dans la démarche longue, difficile et risquée pour tenter de régler les dommages catastrophiques causés par la guerre au Congo et dans la région des Grands Lacs. La consolidation des progrès accomplis récemment nécessitera, évidemment, le déploiement d'efforts à long terme.
Passons en l'Afrique de l'Ouest où on parlera de conflits et d'armes de petit calibre. L'Afrique de l'Ouest a connu une décennie de conflits haineux qui ont donné lieu à de grossières violations des droits de la personne et qui perdurent dans le cas de certains pays comme le Sierra Leone, le Liberia et la Guinée. Bien que par suite de l'intervention concertée de la communauté internationale, la situation se soit améliorée dans des pays comme le Sierra Leone et le Liberia, ces avancés demeurent très précaires. De graves conflits intérieurs non résolus en Côte d'Ivoire risquent d'entraîner le pays dans une position d'État non viable et de compromettre la relative stabilité de toute la région. Sans le soutien continu de la communauté internationale, y compris celui du Canada, aucun progrès n'aurait pu être réalisé.
La prolifération des armes de petit calibre a été l'un des problèmes les plus pernicieux qu'aient connus l'Afrique de l'Ouest, d'ailleurs dans tout le continent africain, et constitue une sérieuse menace pour la sécurité humaine. La fourniture non contrôlée et illicite d'armes légères et de petit calibre a alimenté les conflits et a été à la source de maintes atteintes aux droits de la personne. Elle a compromis la stabilité des États et sapé les efforts de développement, sans compter le nombre terriblement élevé de victimes qu'elle a fait dans la population.
Sans une intervention de la communauté internationale, il serait vain d'espérer s'attaquer efficacement à ce commerce illicite et à une dynamique de conflits qui se joue des frontières nationales.
Le programme canadien de lutte contre le commerce illicite d'armes légères et de petit calibre permettra de tenter de retirer de la circulation les armes prohibées dans certaines collectivités désignées de quatre pays de l'Afrique de l'Ouest.
Parlons maintenant du soutien à l'Union africaine. Dans l'exécution de son mandat de maintien de paix et de renforcement de la sécurité, l'Union africaine a démontré que les Africains ont développé la volonté politique et la capacité voulues pour intervenir ultimement dans des conflits, et je citerai seulement ceux du Darfour, de la Côte d'Ivoire et du Burundi.
La communauté internationale se doit maintenant de soutenir leurs efforts en ce sens en leur fournissant les outils dont ils ont besoin pour assumer pleinement ce rôle. Le Canada participe également aux efforts de renforcement de la capacité de l'Union africaine en matière de maintien de paix. Le Canada a contribué pour trois millions de dollars canadiens au financement d'un mécanisme d'intervention rapide visant à permettre à l'Union africaine de réagir promptement aux situations de crises naissantes ou appréhendées, et 500 000 $ pour la création d'un poste d'une représentante spéciale à l'Union africaine chargée de la protection des civils dans les conflits armées.
La situation au Soudan offre aussi un bon exemple des défis et des possibilités devant lesquelles est placée la communauté internationale lorsqu'elle doit s'attaquer à une tragique situation de conflits et de crises humanitaires. Le mois dernier nous a apporté à la fois des raisons d'être optimistes par la conclusion d'accords de paix qui a mis fin à la guerre civile entre le nord et le sud du pays, qui était un motif de grandes inquiétudes mais il n'en demeure pas moins que la poursuite du conflit au Darfour et les violations qui y sont entraînées, par toutes les parties au conflit, a un impact sur les droits de la personne et le droit international en matière humanitaire.
Madame le sénateur Jaffer, qui est l'envoyée spéciale du Canada, continue de jouer un rôle essentiel et entend se rendre de nouveau dans la région au cours des prochaines semaines.
Sur le terrain au Darfour, le Canada a fourni 20 millions de dollars pour cette mission de surveillance de l'Union africaine, notamment pour financer la fourniture d'hélicoptères dont le pays a besoin, dont l'Union africaine a absolument besoin. Le Canada intervient également dans la planification des opérations et dans un certain support de matériel militaire.
Le Canada s'est réjoui du rapport récent de la Commission internationale d'enquête des Nations Unies sur le Darfour, qui a été déposé la semaine dernière. Le Canada appuie sans réserve la recommandation de la commission voulant que le conseil de sécurité renvoie immédiatement la question à la Cour pénale internationale, qui est l'instrument juridique approprié pour donner suite aux conclusions de ce rapport et pour traduire en justice les auteurs de ces crimes.
[Traduction]
Contrer les menaces à la sécurité humaine en Afrique demeure l'un des plus grands défis auxquels doit s'attaquer la communauté internationale. L'Afrique a compté dans sa population civile plus de morts et de blessés par suite de conflits que n'importe quelle autre région du monde. Le Canada place la protection des civils au nombre de ses plus hautes priorités en matière de politique étrangère. Le programme de la sécurité humaine du ministère des Affaires étrangères investit stratégiquement 10 millions de dollars par an dans des initiatives propres à renforcer la capacité de la communauté internationale de répondre aux menaces à la sécurité humaine et à soutenir l'établissement de modèles de gouvernance pacifique. Ce programme dont le budget de 15 millions de dollars sera bientôt échu porte principalement sur le renforcement de la capacité du Canada en la matière, sur l'exercice d'influences et de pressions diplomatiques en appui à cette cause, ainsi que sur la création de mécanismes multilatéraux et la mise en oeuvre de mesures particulières par pays dans le but de protéger les gens contre les menaces d'atteinte à leur vie, à leur sécurité et à leurs droits. Le volet le plus ambitieux du programme de protection a trait aux mesures à prendre dans le cas d'une guerre intérieure, un type de conflit qui, souvent, met en opposition directe les principes fondamentaux de souveraineté et de non-intervention et les devoirs humanitaires de la communauté internationale.
Le rapport de la Commission internationale de l'intervention et de la souveraineté des États aborde de front cette question. Il avance l'idée que la souveraineté confère non seulement des droits, mais également la responsabilité d'assurer le respect de principes humanitaires. Il soutient que si ce sont les États qui sont les premiers responsables de la protection de leur population, il demeure qu'en cas d'incapacité ou d'absence de volonté de leur part d'assurer cette protection, c'est à la communauté internationale qu'il incombe d'assumer cette responsabilité.
Il ajoute que, dans des cas extrêmes — comme un génocide ou d'autres atrocités généralisées —, une intervention militaire peut parfois être justifiée. Nous avons néanmoins bon espoir que la dynamique nouvelle entourant le projet de réforme de l'ONU, alimentée par le récent rapport du groupe de travail de haut niveau, contribuera à faire avancer cette cause. Le Canada prend une part très active aux efforts qui sont déployés pour qu'un suivi soit donné au rapport du groupe de travail. Pour l'immédiat, nous faisons porter notre action principalement sur la recherche d'un consensus à propos des recommandations du groupe de travail.
Le Canada est déterminé à travailler de concert avec les Africains et ses partenaires internationaux dans le but de relever les défis que pose la sécurité en Afrique. Comme le montre à l'évidence ce bref tour d'horizon, l'ampleur, la profondeur et la complexité de ces défis immenses sont considérables. Pour y faire face, il nous faudra pourvoir compter sur l'engagement soutenu et à long terme des gouvernements des pays africains, des pays donateurs et des institutions internationales. Nous nous devons de tabler sur les progrès encourageants accomplis récemment et poursuivre sur cette lancée. Ne nous faisons toutefois pas d'illusion : des problèmes qui perdurent depuis des décennies ne se régleront pas du jour au lendemain. Il nous faudra faire preuve de persévérance face aux difficultés et aux inévitables écueils que nous rencontreront en chemin, car l'autre option — un retour au chao des années passées — nous apparaît trop effroyable pour être acceptable.
Comme nous l'avons fait remarquer hier, monsieur le président, nous proposons une approche qui met l'accent sur les relations diplomatiques, le développement et la défense. Mes collègues et moi-même serons heureux de poursuivre ce dialogue avec vous.
Mme Nadia Kostiuk, directrice générale, Politiques, planification stratégique et services techniques, Direction générale de l'Afrique et du Moyen-Orient, Agence canadienne de développement international : Je vous remercie beaucoup. Je suis heureuse d'être parmi vous. J'ai écouté avec grand intérêt la discussion portant sur des sujets très vastes que vous avez eue aujourd'hui et je me réjouis de poursuivre ce dialogue avec vous aujourd'hui.
Mme Bourcier vous donné un aperçu très complet de la façon dont la communauté internationale relève le défi de la sécurité. J'ai pensé que nous pourrions discuter aujourd'hui de la façon dont la communauté internationale aborde la question du développement.
Je voudrais situer les choses dans leur contexte et vous parler des intervenants, des mesures qui sont prises et des moyens qui sont déployés. Je commencerai par vous expliquer ce qu'on entend par communauté internationale. Je vous parlerai ensuite des mesures que nous prenons. Enfin, nous nous demanderons si la réaction de la communauté internationale change.
La communauté internationale comprend l'Afrique elle-même. Comme on vous l'a dit hier, le continent africain compte 53 pays. Ces pays sont membres d'organisations régionales ainsi que de la communauté mondiale et de ses institutions.
Il y a aussi une communauté de pays donateurs qui compte 22 pays membres de l'OCDE, mais cette communauté compte de plus en plus des intervenants qui n'appartiennent pas à l'OCDE comme la Chine et l'Inde qui mettent en œuvre des programmes en Afrique.
Au sein des pays donateurs, divers intervenants gouvernementaux contribuent à la réalisation des objectifs de développement. Au Canada, par exemple, outre les ministères qui sont ici représentés, Santé Canada, Environnement Canada, la GRC, Revenu Canada et l'Agence canadienne des services frontaliers font partie des organismes qui mettent en œuvre les activités canadiennes à l'étranger.
Il ne faut pas non plus oublier le système multilatéral au sein duquel les institutions financières internationales jouent un rôle clé. Ces institutions comprennent la banque mondiale, le fonds monétaire international et, en particulier, la Banque africaine de développement qui, je l'espère, joue un rôle de plus en plus important sur le continent africain.
La plupart des gens connaissent les principaux intervenants appartenant au système onusien. Il s'agit de l'UNICEF, du Programme des Nations Unies pour le développement, du Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, du Programme alimentaire mondial, de l'Organisation mondiale de la santé et de ONUSIDA. La liste de ces organismes est très longue. Comme vous le savez, certains d'entre eux mènent des actions à court terne dans le domaine du développement et d'autres, des actions à long terme.
Je me dois aussi de souligner le rôle dans le domaine du développement des organismes à but non lucratif tant nationaux qu'internationaux comme les ONG, les établissements d'enseignement et les groupes de réflexion. Le secteur privé joue aussi un rôle de plus en plus important dans le développement de l'Afrique, et comme nous en avons parlé brièvement hier, le secteur privé africain, en particulier, doit suivre ce mouvement.
[Français]
Deuxièmement, la réaction de la communauté internationale est en train de changer aussi. On s'affaire à réaligner et à revitaliser le monde du développement. L'Afrique renforce son leadership et la prise en charge de son développement. On adapte les approches des donateurs et les partenariats pour mieux réagir. Et le Canada améliore progressivement l'efficacité de son aide.
[Traduction]
Comme vous pouvez le voir à la page 3, la communauté internationale s'est beaucoup demandée à la fin des années 90 comment elle pourrait le mieux aplanir les obstacles au développement de l'Afrique, à première vue insurmontables. De grands progrès ont été réalisés dans le domaine de l'allègement de la dette des pays africains et le Canada a beaucoup contribué à ces efforts. Les progrès dans le domaine du développement durable n'ont cependant pas été suffisants. Il est apparu clairement que le manque de coordination des interventions dans le domaine du développement compromettait la capacité des pays en développement à faire des progrès et à établir eux-mêmes leurs priorités.
Les participants au Sommet du millénaire tenu en septembre 2000 se sont demandés ce que la communauté internationale faisait pour atteindre les objectifs de développement du millénaire, des objectifs quantifiés. La réduction de la pauvreté a alors été choisie comme objectif prioritaire des programmes d'aide au développement Pour résumer les choses, nous travaillons tous à la réalisation des mêmes objectifs fondamentaux, à savoir la réduction de la pauvreté et l'atteinte des objectifs de développement du millénaire. Les divers pays composant la communauté internationale se sont à cette fin fixé des mandats et des priorités qui leur sont propres.
Certaines de ces questions ont déjà été abordées hier. Ma collègue, Mme Ellen Wright, est ici pour répondre à vos questions portant sur le NEPAD, l'Union africaine en général et les dossiers de sécurité sur lesquels travaille l'ACDI. Comme le président l'a indiqué, Mme Wright travaille au sein du secrétariat du Fonds canadien pour l'Afrique.
Vous verrez à la page 6 que nous avons commencé à nous demander comment accroître l'efficacité de notre aide, ce qui a amené la communauté internationale à modifier considérablement la façon dont elle travaille de façon collective. Hier, en écoutant vos délibérations, je me suis dit que si les présentations avaient été moins rapprochées, nous aurions pu modifier certains aspects de celle-ci. Il est difficile de convaincre les gens que les processus importent, mais dans ce cas, c'est très évident. Si les processus peuvent nous sembler arides, ils ont un rôle fondamental à jouer pour ce qui est de la réalisation de certains objectifs. Les objectifs ont été précisés pour qu'ils soient plus faciles à comprendre. Nous pourrions parler du VIH-SIDA, de la pauvreté et de l'éducation primaire. Il peut paraître moins intéressant de discuter de la façon dont les fonctionnaires cherchent à trouver des moyens d'améliorer l'efficacité des interventions, mais j'insiste sur l'importance de ce genre de processus. Permettez-moi maintenant de vous donner quelques précisions à cet égard.
Beaucoup de réunions ont eu lieu sur un certain nombre d'années. Elles nous permis de nous pencher sur des questions de politique. La Banque mondiale a effectué une étude importante qui portait sur une nouvelle conception de l'aide. Comme l'un des auteurs de cette étude s'appelle Dollar, l'étude elle-même est appelée « l'étude Dollar », mais elle ne porte pas en fait sur des questions financières. La déclaration de Doha ainsi que les négociations commerciales ont été importantes. Il y a aussi eu le consensus de Monterrey qui mettait l'accent sur le volume et la déclaration de Rome sur l'harmonisation. L'harmonisation des interventions est très importante et n'est pas aisée. Il s'agit d'harmoniser les politiques et les pratiques des pays donateurs avec le mode de fonctionnement des pays en développement.
Qu'est-ce que tout cela signifie en termes pratiques? Cette harmonisation suppose de la part des donateurs des modifications qui touchent tant au contenu de leurs interventions qu'aux moyens déployés dans le cadre de celle-ci. Elle suppose aussi de mettre l'aide au développement au service des priorités que s'est fixé le pays en développement en question par opposition à l'imposition à ce pays de nos propres priorités. Or, les organismes donateurs ont bien par le passé imposé leurs propres priorités aux pays en développement. Les pays donateurs mettent de plus en plus en commun leurs ressources pour favoriser la mise en œuvre d'une stratégie dans un secteur donné comme celui de la santé ou de l'éducation. Il nous est possible de cette façon d'accomplir davantage. Il est aussi ainsi plus facile aux pays en développement de gérer les fonds qui leur sont accordés au titre de l'aide au développement et de rendre des comptes quant à l'affectation de ces fonds.
Chaque étape d'un programme vise évidemment à atteindre un certain nombre de résultats. Les importantes mesures de surveillance auxquelles on peut s'attendre sont mises en place pour contribuer à la réalisation de ces résultats. Les pays en développement souhaitent que l'aide au développement soit plus prévisible parce qu'ils comptent sur ces fonds pour assurer le fonctionnement de certains systèmes, pour acheter des manuels et pour d'autres activités. S'ils ne savent pas combien d'argent leur sera donné et quand il le sera, il leur est difficile d'établir des plans.
Certaines questions d'ordre pratique se posent également. Si 16 pays donateurs donnent des fonds à un pays en développement, celui-ci peut être tenu de soumettre 16 types de rapports financiers. Les pays en développement n'ont pas nécessairement les capacités voulues pour se conformer à une multitude d'exigences en matière de rapports. Il convient aussi de mieux coordonner les missions techniques. Certaines études montrent combien de temps les fonctionnaires dans les pays en développement doivent consacrer aux réunions avec des personnes comme moi qui veulent leur poser des questions et obtenir des renseignements de leur part. Si les pays donateurs coordonnaient mieux leurs interventions, ces fonctionnaires n'auraient pas à répondre 16 fois aux mêmes questions, avec les économies de temps et d'effort que cela suppose. Cela améliorerait grandement les choses.
Comme vous le verrez à la page 7, un important organisme, le Comité d'aide au développement de l'OCDE, assure une application rigoureuse des politiques d'aide au développement. Il s'agit d'une tribune réunissant des donateurs bilatéraux ainsi que des donateurs multilatéraux dont l'objectif est de veiller à ce que les donateurs s'entendent sur les objectifs ainsi que sur les conditions dans lesquelles se déroulent leurs interventions. Ce comité chiffre aussi l'aide au développement qui est accordée aux différents pays en développement. Le rapport que publie le comité retient l'attention de tous parce qu'il attribue à chaque pays un ratio de l'aide publique au développement par rapport au PIB.
Il existe aussi un important réseau de praticiens appelé le Partenariat stratégique avec l'Afrique. Son objectif est de motiver les pays donateurs à progresser vers l'harmonisation de leurs politiques avec les priorités des pays en développement. Il s'agit d'un mécanisme par lequel des pressions sont exercées par les pairs. J'ai participé à la réunion de ce réseau à Johannesburg le mois dernier, réunion au cours de laquelle les donateurs se sont demandés comment ils pouvaient améliorer l'efficacité de leur aide au développement. Le partenariat a conclu après avoir recueilli des statistiques sur le sujet que certains pays donateurs soit avaient trop de missions, soit avaient du mal à harmoniser leurs priorités avec celles des pays en développement.
Vous trouverez à la page 8 un petit graphique indiquant quelle a été l'aide au développement accordée en Afrique en 2003 par les 22 pays membres de l'OCDE. Le Canada a contribué 41,5 millions de dollars en aide publique au développement à l'Afrique en 2003. Nous n'avons pas pour l'instant de statistiques plus à jour à vous fournir parce qu'elles n'existent pas encore, ou du moins ne proviendraient pas d'une source qui nous fournirait autant de renseignements sur les contributions d'autres pays donateurs. Le Canada vient tout juste derrière le Royaume-Uni pour sa contribution et nous prenons tous les moyens possibles pour nous assurer que ces fonds sont bien dépensés.
J'aimerais maintenant vous dire quelques mots seulement sur l'approche que compte adopter le Canada pour réaliser les objectifs fixés en matière de développement, mais je serai brève parce que je sais que vous discuterez de nouveau de cette question au cours des prochaines séances. Un important énoncé de politique intitulé « Aide internationale plus efficace » a été rendu public en 2002. Le Canada s'engageait dans cet énoncé à accroître ses investissements dans quelques secteurs prioritaires et de consentir ces investissements dans un nombre moins élevé de pays les plus pauvres ayant démontré qu'ils étaient déterminés à utiliser l'aide au développement de façon efficace. Le graphique montre clairement que le Japon, l'Australie et la Nouvelle-Zélande mettent en oeuvre un programme d'aide qui s'adresse à certaines régions seulement. L'Afrique n'est pas une priorité pour ces pays. Ils accordent surtout leur aide publique à des pays d'Asie. Quelques pays qui n'ont pas de liens historiques très étroits avec l'Afrique ont pris la décision de concentrer leur aide au développement dans ce continent. Je songe à l'Irlande et à la Belgique. Il est cependant vrai que la Belgique a déjà été présente en Afrique. Ces pays ciblent leur aide. Le Canada est membre du Commonwealth et de la Francophonie ainsi que de l'OEA et de l'APEC. Nous avons eu jusqu'ici une politique étrangère de portée très vaste, ce qui a signifié que notre aide au développement a été largement répartie. Nous essayons actuellement de mieux cibler cette aide, mais ce n'est pas facile.
Comme quelqu'un l'a mentionné hier, nous concentrons maintenant nos ressources dans six pays africains. Le Canada, de concert avec d'autres principaux donateurs comme le Royaume-Uni, les Pays-Bas et les pays nordiques, cherche à mettre en oeuvre ces nouvelles approches.
Je n'ai pas travaillé au sein de l'ACDI pendant quatre ans. Mon retour à l'agence date de l'automne. J'admire les changements qui ont été apportés à l'agence. Je n'essaie pas de me gagner l'estime des collègues qui sont demeurés sur place pendant tout ce temps en disant que la communauté des pays donateurs sait maintenant où elle s'en va. Nous avons encore beaucoup de travail sur la planche, mais nous travaillons d'arrache-pied à améliorer l'efficacité de notre aide au développement parce que les pays africains ont clairement indiqué qu'ils voulaient faire des progrès et améliorer la vie de leurs habitants. Nous pouvons nous réjouir du fait que nous poursuivons tous le même objectif. Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.
Le président : L'Irlande et l'Église catholique irlandaise ont joué pendant longtemps un rôle important en Afrique, en particulier au sein du système scolaire nigérien.
Le sénateur Corbin : Pouvez-vous clarifier quelque chose pour moi?
[Français]
Le tableau à la page 8 exprime des pourcentages. Vous avez une colonne à gauche.
Mme Kostiuk : Oui.
Le sénateur Corbin : Quel est le montant engagé pour chaque pays, parce que 84 p. 100 de 50 millions et 41,5 p. 100 de 150 millions, ces pourcentages ne sont pas la même chose.
Mme Kostiuk : Vous avez raison. C'est difficile de faire une comparaison absolue. Je n'ai pas tous les chiffres mais nous pouvons les trouver. Les programmes d'aide varient beaucoup. Le programme des États-Unis est énorme en volume, mais le pourcentage du PNB n'est pas énorme. Les Britanniques dépensent beaucoup plus que nous. Je vais essayer de trouver des chiffres spécifiques.
Le sénateur Corbin : Cela reflète simplement la performance vis-à-vis les engagements, mais pas la contribution réelle.
Mme Kostiuk : Non.
[Traduction]
Le colonel Denis Thompson, directeur , Politique du maintien de la paix, Défense nationale : Honorables sénateurs, je vais insister sur l'équipe 3D — un sujet abordé lors de nos séances d'information de cet après-midi.
Vu le long récapitulatif déjà donné par mes collègues, je vais vous donner un bref aperçu des missions internationales actuelles et de la contribution que les Forces canadiennes y apportent.
[Français]
Aujourd'hui, les Force canadiennes participent à des missions dans la République démocratique du Congo, au Sierra Leone et au Soudan. Le MDN dispense également de la formation à des Africains au Canada et en Afrique. Dans le cadre de son programme d'aide à l'instruction militaire, ou MTAP, military assistance training program, le directeur de MTAP, M. Andrew Rasilius, vous rendra visite le 16 février 2005, et pourra à cette occasion vous renseigner davantage sur ce programme et répondre à vos questions.
Les missions militaires en Afrique dans la République démocratique du Congo, la mission de l'ONU appelée MONUC a été mise sur pied en 1999, et a pris régulièrement de l'ampleur pour compter aujourd'hui plus de 13 000 soldats qui s'efforcent de mettre fin au conflit le plus sanglant en Afrique. Le Canada a affecté huit officiers d'état-major au quartier général de la MONUC, notamment le chef d'état-major adjoint aux opérations.
Les Forces canadiennes ont déployé deux avions Hercules et six militaires pendant une courte période, à l'été de 2003, dans le but de contribuer à un déploiement de l'Union européenne dans l'Est du Congo pendant la crise de Bunia.
[Traduction]
La Sierra Leone a fait d'immenses progrès sur la voie de devenir un État pleinement fonctionnel depuis la fin de la guerre civile dans ce pays. Le Canada contribue à la mission de maintien de la paix de l'ONU en Sierra Leone, la MINUSIL, avec trois observateurs militaires. Son effectif autorisé au début était de 6 000 hommes, en 1999, et a été multiplié par deux en l'an 2001. On est en train de la réduire lentement et elle se terminera en juillet de cette année. On a jugé que les forces de sécurité de la Sierra Leone sont prêtes à remplir le vide laissé par la mission de l'ONU lorsqu'elle se retirera.
Pour contribuer à la création d'une armée professionnelle en république de Sierra Leone, le Canada fournit huit soldats, officiers et sous-officiers qui opèrent au sein d'une équipe consultative militaire internationale dirigée par le Royaume-Uni, qui donne directement une formation à l'armée de la Sierra Leone.
Plus tôt cette année, le Sierra Leone a été réadmise au PAIM, dont j'ai parlé tout à l'heure, après en avoir été exclue en raison de la guerre civile.
Au Soudan, le conflit que l'on appelle souvent le conflit nord-sud est en perte de vitesse, le gouvernement du Soudan et les rebelles du Sud ayant conclu un accord global de paix début janvier. Par suite de cette entente, le conseil de sécurité a discuté en détail du mandat qui, en vertu du chapitre 6, sera confié à une mission d'observation dans le Sud du Soudan appelée UNNISUD, la mission des Nations Unies au Soudan. L'intérêt pour le Canada, c'est que la mission compte déployer le QG de la brigade multinationale d'intervention rapide des Forces en attente des Nations Unies, la BIRFA, dont le Canada est membre, qui constituera le noyau du QG du reste de la force.
Le Canada contribue quinze officiers d'état-major à ce QG, dont le commandant adjoint de la Force pour cette mission, le brigadier général Greg Mitchell. Une fois que le mandat de la mission aura été approuvé, on s'attend à ce que cette force de maintien de la paix soit déployée prochainement.
Nous sommes tous au courant de l'autre conflit au Soudan, dans la région du Darfour, que suit actuellement les Forces de l'Union africaine. Toutefois, l'UA — et c'est ce que nous ont dit aussi bien les experts en développement que les experts en affaires étrangères — ne dispose pas des moyens d'entreprendre une opération militaire aussi vaste. C'est pourquoi le Canada et d'autres pays occidentaux ont répondu à la demande d'assistance de l'UA. Pour notre part, deux officiers des forces canadiennes sont en poste à Addis-Abeba depuis le 22 septembre et servent d'experts en préparation des plans pour l'UA de concert avec des représentants des États-Unis et de nombreux pays de l'Union européenne.
De plus, de l'aide matérielle a été fournie par l'Ouest. On estime le coût de cette mission à environ 250 millions de dollars US pour un an. La contribution du Canada a été de louer quinze hélicoptères au nom de l'UA et de fournir 2 600 casques et tenues de protection aux soldats de l'Union africaine.
[Français]
Au cours de la dernière année, grâce à notre programme d'aide à l'instruction militaire, nous avons dispensé de la formation linguistique ainsi que des cours d'état-major et de maintien de la paix à des étudiants de divers pays d'Afrique ici même au pays et en Afrique. Nous continuerons d'offrir ces possibilités de formation au cours la prochaine année.
[Traduction]
À l'heure actuelle, les Forces canadiennes ne sont pas en mesure d'augmenter de beaucoup leur contribution au déploiement en Afrique puisque nous sommes, comme on en a beaucoup parlé, en pleine pause opérationnelle suite au regain d'activités occasionné par la campagne contre le terrorisme. Toutefois, même un petit nombre de soldats canadiens peuvent faire une grande différence en Afrique. Cela tient en grande partie au fait que les soldats et officiers des Forces canadiennes sont bien formés pour évoluer en milieu africain et sont souvent affectés à des postes critiques pour cette raison. De plus, le Canada n'a pas de passé colonial et donc pas de boulet à traîner. Ses soldats sont respectés comme arbitres impartiaux sur le continent.
Beaucoup d'officiers africains ont reçu une forme quelconque d'instruction dans un établissement des FC, grâce au programme PAIM dont j'ai parlé tout à l'heure, et ils voient le Canada d'un bon oeil.
[Français]
Aussi un bon nombre de nos soldats et officiers parlent couramment les deux langues les plus utilisées en Afrique sud-saharienne, le français et l'anglais, et peuvent donc s'adresser directement à leurs interlocuteurs.
[Traduction]
On s'attend à ce que l'on continue de faire appel aux Forces canadiennes dans les opérations de maintien de la paix en Afrique et c'est pourquoi les Forces et les ministères surveillent activement les initiatives existantes et en recherchent des nouvelles qui seraient susceptibles de renforcer la capacité de maintien de la paix chez nos collègues africains, comme je l'ai déjà dit hier.
Voilà qui met fin à ma déclaration et je serais heureux de répondre à vos questions.
Le sénateur Di Nino : Merci, monsieur le président. Quand j'écoute notre premier groupe de témoins, puis vous-même, et certains d'entre vous qui étaient ici hier aussi, j'entends un message contradictoire. Vous avez sans doute un travail encore plus frustrant que certains d'entre nous au Parlement quand nous essayons de faire adopter une loi. On dirait que les cas de réussite sont rares et que les frustrations sont nombreuses.
Chaque fois qu'un témoin est venu jusqu'à présent — bien sûr, j'admets que nous en sommes au début de notre étude — on nous parle de nouvelles études à faire et de nouveaux comités à créer.
De l'avis des témoins qui sont devant nous, monsieur le président, faisons-nous des progrès ou est-ce un travail long et fastidieux pour essayer de cerner les problèmes et de régler certains d'entre eux?
D'après vous, où faisons-nous du bon travail et où le sape-t-on? Où devrions-nous lutter contre les problèmes afin de faire progresser un tant soit peu les choses?
Mme Ellen Wright, directrice, Gouvernance, sécurité et communications, Secrétariat du Fonds canadien pour l'Afrique, Direction générale de l'Afrique et du Moyen-Orient, Agence canadienne de développement international : Nous tous à cette table, je crois, trouvons que nous ne travaillons pas dans le désespoir absolu et qu'il y a en fait des progrès. Un des problèmes, c'est que les médias signalent peu les progrès en Afrique. On entend plus de récits de situations désastreuses en Afrique que des succès accomplis.
Toutefois, si vous voulez un exemple, depuis 1990, il y a eu des élections multipartites dans 42 des 49 pays de l'Afrique sub-saharienne. La Tanzanie dépasse son objectif de fréquentation des écoles primaires pour les enfants et a bâti 16 000 nouvelles salles de classe et plus de 2 000 habitations pour les enseignants. En Uganda et au Sénégal, les infections au VIH-sida ont régressé et le taux est passé de 14 à moins de 8 p. 100. Le Mozambique et l'Angola ont tous les deux mis fin à de longues guerres civiles et nous commençons à voir des progrès, surtout au Mozambique. Oui, cela s'améliore. Nous ne travaillons pas dans le désespoir absolu.
Je suis certain que Mme Bourcier peut allonger ma courte liste; il y a d'autres cas de réussites.
Mme Bourcier : Merci, sénateur Di Nino, de votre excellente question.
Comme ma collègue l'a dit, les médias parlent davantage des conflits et des difficultés que des progrès.
Comme je le disais hier et aujourd'hui, il faut admettre qu'il y a eu des progrès en Angola, au Mozambique, dans la République démocratique du Congo et en Sierra Leone. Au Sénégal, un accord a été signé entre la Casamance et le reste du pays. Au Soudan, l'avenir est rempli de défis; néanmoins, on a mis un terme à 20 ans de guerre civile.
Au même moment, des pays dont le développement allait bon train voient leur gouvernance ébranlée et sont actuellement aux prises avec un conflit : c'est le cas de la Côte d'Ivoire. Cela fait partie du développement. Ce qui importe, pour ces pays, on souscrit à des modèles de développement différents des modèles imposés ou légués par l'ex-colonisateur. Les modèles mis en oeuvre sont mieux ancrés dans la perspective de développement du pays et plus proches de leur réalité.
Cela se passe à un moment où ils sont pris à partie par d'autres pays. Hier, on parlait de l'examen par les pairs. C'est précisément ce que fait le Canada au Comité d'aide au développement de l'OCDE. Cela peut porter sur l'intégration régionale. Plusieurs comités de l'OCDE où nous siégeons sont contestés — et cela ne nous plaît pas particulièrement comme pays d'être critiqué par d'autres — alors vous pouvez vous imaginer qu'il en va de même pour les pays africains. Mais ils s'y sont pliés et donnent même des leçons d'humilité aux donateurs étrangers.
Là où des problèmes restent, je recommande la patience. Il faut du temps.
[Français]
Il faut laisser au temps le temps d'agir. De demander à un pays de changer ses pratiques de gouvernance en l'espace de trois mois n'est pas réaliste. De demander à un pays de le faire sur un horizon de cinq ans, de dix ans, de faire des progrès continus, de passer de cette étape de multipartisme à des partis qui sont véritablement engagés dans la gouvernance, ce sont des étapes très importantes à laquelle vous pouvez contribuer de façon positive. À cet effet, l'association des parlementaires canadiens qui travaillent avec l'Afrique reçoit un accueil très favorable de la part de leurs collègues africains. L'Afrique est à l'écoute des modèles canadiens. On le voit au Soudan. Il est intéressé par notre modèle de fédération ou nos modèles parlementaires. Ce sont des niches dans lesquelles on peut s'investir comme Canadiens pour continuer à contribuer mais qu'on ne peut le faire qu'avec d'autres.
[Traduction]
Le président : J'invite les témoins à être concis dans leurs réponses parce que d'autres personnes veulent poser des questions. Je sais aussi que Mme Kostiuk voudrait intervenir.
Mme Kostiuk : Le Mozambique a connu une guerre civile terrible financée par l'extérieur tout au long des années 80 et jusque dans les années 90. Les destructions ont été terribles. Cinquante p. 100 des écoles ont disparu et des milliers de personnes ont été déplacées.
L'économie du Mozambique a progressé de 9 p. 100 chaque année de 1997 à 2002. L'indice numérique de la pauvreté absolue est passé de 69 à 54 p. 100. C'est encore le sixième pays le plus pauvre au monde, mais le gouvernement s'est engagé en faveur de l'éducation. Au moment de l'indépendance en 1975, l'alphabétisation était de 7 p. 100. En 1980, elle était de 25 p. 100 et en 2004, de 46,5 p. 100. Le nombre de personnes qui fréquentent l'école jusqu'à la cinquième année est passé de 22 p. 100 en 1991 à 40 p. 100 en 2003.
Un million d'enfants ne va toujours pas à l'école, mais c'est un véritable progrès d'avoir une telle augmentation quand on sait ce que cela fait pour un pays d'avoir plus de gens capables de lire et d'écrire et de mieux travailler dans leur propre milieu. Ce n'est pas facile et ce sera dur à soutenir économiquement, mais nous y travaillons et faisons d'énormes progrès.
Le sénateur Di Nino : Je ne veux pas une réponse maintenant, mais sur quoi selon vous devrions-nous nous concentrer? Je ne veux pas vous suggérer la réponse, mais je pense aux subventions agricoles et au reste; faudrait-il délier l'aide?
Le sénateur Downe : J'aimerais obtenir une clarification d'un des témoins. Sur les 48 pays de l'Afrique subsaharienne, combien ont un gouvernement démocratique?
Mme Kostiuk : Quarante-trois sur 48.
Le sénateur Downe : Quarante-trois sur 48 tiennent des élections démocratiques?
Le président : Je ne pense pas que c'est ce qui a été dit. Ils ont des élections. Ce n'est pas la même chose que d'avoir des gouvernements démocratiques.
Le sénateur Downe : Je reformule la question. Combien des 48 sont dotés d'une démocratie électorale?
Mme Kostiuk : D'après quelle définition? C'est une question difficile. Il y a des organisations qui étudient la chose et elles ne s'entendent pas sur la réponse. Transparency International a son idée que d'autres ne partagent pas forcément. Par exemple, le Zimbabwe a tenu des élections et d'autres sont prévues pour la fin mars. Il n'y a pas beaucoup de gens au monde, par contre, qui pensent que cela va en faire un pays démocratique.
Le sénateur Downe : Soyons clairs. Plus de 40 des 48 pays ont une forme ou une autre d'élections multipartites, mais le gouvernement n'est pas forcément démocratiquement élu, c'est bien ça?
Mme Kostiuk : Il y a différents degrés de réussite, mais de plus en plus, grâce à l'observation des élections, nous avons une meilleure idée de la façon dont le scrutin se fait. La bonne nouvelle, c'est que les sociétés civiles de ces pays font de grands progrès et exercent de plus en plus de pression sur leur gouvernement pour améliorer la transparence et le déroulement des élections. Cela se fait même au Zimbabwe.
Le sénateur Downe : Certains pays sont de toute évidence plus avancés en matière de gouvernance, de transparence et d'élections démocratiques. Concentrons-nous sur la majorité des moyens et des dépenses sur ces pays ou les répartissons-nous dans plusieurs pays? Autrement dit, récompensons-nous ce que nous estimons être une bonne conduite?
Mme Kostiuk : De plus en plus, nous essayons de récompenser la bonne conduite, et c'est l'attitude que prend la communauté des donateurs. C'est la prémisse fondamentale de NEPAD. Le nouveau contrat entre l'Afrique et la communauté des donateurs, c'est que les pays essayeront de renforcer leur gouvernance et d'améliorer la façon dont ils font les choses; en retour, nous les aiderons à faire de plus grands progrès.
Le sénateur Downe : Notre financement a donc changé ces deux ou trois dernières années; y aura t-il d'autres changements dans l'avenir?
Mme Kostiuk : Les fonds vont dorénavant à ces pays. On s'attend par exemple à ce que les neuf principaux programmes bilatéraux de l'ACDI en Afrique recevront 68 p. 100 des décaissements prévus d'ici à la fin du prochain exercice financier. À l'intérieur de ces programmes, l'agence consacre environ 20 p. 100 de ses fonds à la gouvernance, mais dans certains pays, le pourcentage est plus élevé. En Tanzanie, par exemple, 40 p. 100 de notre programme bilatéral porte sur la gouvernance et le développement démocratique.
Le sénateur Downe : Dans son exposé hier soir, le représentant des Affaires étrangères a parlé d'un bureau ou de fonds pour l'ambassadeur Fowler. S'occupe t-il toujours de l'Afrique?
Mme Bourcier : Oui.
Le sénateur Downe : Quel est son rôle?
Mme Bourcier : L'ambassadeur Robert Fowler est le représentant personnel du premier ministre en Afrique. Il est actif dans le contexte du G8. Il a été très actif dans les préparatifs de Kananaskis et a conservé son rôle. Il continue d'être actif et de nous représenter et de nous accompagner dans les dossiers de politiques, et de programmation. Il est très actif auprès des dirigeants africains qui sont membres du secrétariat exécutif du NEPAD.
Puis-je profiter de l'occasion pour inviter mon collègue à compléter l'information que je vous donnais sur notre façon de travailler avec les pays partenaires?
Le sénateur Downe : J'aimerais poser d'abord une question supplémentaire.
Je crois que l'ambassadeur Fowler a été invité par l'actuel premier ministre à rester en poste jusqu'au prochain G8. C'est bien ça?
Mme Bourcier : Il a été invité à rester en poste au moins jusqu'au G8, tant que le gouvernement est au pouvoir et tant qu'il sera actif professionnellement. Il réside à Rome.
Le sénateur Downe : Monsieur le président, la prochaine fois que l'ambassadeur Fowler sera à Ottawa, peut-être pourrait-il comparaître devant le comité.
Le président : Cela peut se faire très facilement, car comme vous le savez, l'ambassadeur Fowler est un bon ami à moi.
Le sénateur Downe : Si ce n'est pas possible, on pourra tous aller à Rome.
Mme Ulla Kourany, conseillère principale en politiques, NEPAD, plan d'action du G8 pour l'Afrique et institutions panafricaines, Affaires étrangères Canada : Je voulais ajouter quelque chose à propos du rôle de l'ambassadeur Fowler au sommet de Gleneagles du G8 au Royaume-Uni. Les représentants personnels des dirigeants du G8 ont reçu pour mission de présenter un rapport d'étape sur la façon dont le G8 dans son ensemble a réussi à remplir les engagements qu'il a pris dans son plan d'action depuis le dernier examen de la situation au sommet du G8 d'Evion. L'ambassadeur Fowler et son équipe ici à Ottawa préparent la réponse du Canada à ce rapport.
J'aimerais aussi ajouter des renseignements au sujet de votre question concernant la gouvernance. Comme vous le savez, on a abordé la question du mécanisme africain d'examen par les pairs, le MAEP. À ce jour, 24 des 53 pays membres de l'union africaine y ont adhéré. On passera en revue la gouvernance politique, la gouvernance économique, la gouvernance des entreprises ainsi que le développement socio-économique.
Dans le plan d'action sur l'Afrique, les pays du G8 ont exigé d'être informé du résultat du mécanisme africain d'examen par les pairs afin de se fonder des résultats obtenus. Déjà, quatre pays ont entrepris l'examen et quatre autres sont censés le faire cette année. Les pays du G8 seront informés des résultats du MAEP dans le but de renforcer les partenariats avec les pays africains qui ont manifesté leur engagement en faveur de la réforme et de la gouvernance.
[Français]
Le sénateur Corbin : J'ai un document qu'on peut extraire de Internet qui s'intitule Crisis Watch, qui est publié par le International Crisis Group. Pouvez-vous me dire si c'est un document fiable qui donne des données barométriques sur la situation dans chaque pays, à savoir si elle s'améliore, se stabilise ou se détériore? Quelle crédibilité donnez-vous à ce document? Je constate que plusieurs Canadiens font partie du bureau de la direction de ce groupe, y compris Barbara McDougall, et l'ex-ministre, Allen MacEachen, a déjà fait partie de ce groupe. Est-ce un bon document, une bonne source d'information?
Mme Bourcier : Oui, c'est un organisme qui a une résonance et une capacité d'analyse intéressante, qui produit des documents avec lesquels tout le monde n'est pas toujours d'accord et c'est correct. Mais dans l'ensemble, c'est un groupe très sérieux.
Le sénateur Corbin : J'aimerais concentrer mes quelques questions sur les propos de Mme Kostiuk selon lesquels, cela a été une de mes préoccupation depuis le temps que je m'intéresse à ces questions depuis 40 ans au Parlement, vous avez décidé de concentrer vos efforts sur des pays ciblés.
Mme Kostiuk : Oui.
Le sénateur Corbin : Vous avez identifié six pays; au lieu d'éparpiller votre aide dans de petits projets temporaires, vous avez décidé de faire des efforts concentrés. Pouvez-vous nous expliquer, pas pourquoi parce que cela a beaucoup de sens, mais comment avez procédé-vous pour en arriver où vous êtes aujourd'hui avec cette nouvelle façon de faire?
Mme Kostiuk : Il faut dire que c'est une question liée plus au programme du Canada plutôt qu'aux communautés internationales. Nous serons en mesure de vous en parler plus dans les prochaines semaines. Il y a une liste des pays bien connus par la communauté internationale comme étant des « good performers ».
Le sénateur Corbin : Pouvez-vous les nommer?
Mme Kostiuk : Le Ghana, la Tanzanie, le Mozambique, le Sénégal, le Mali.
Le sénateur Corbin : Ceux qui ont une bonne performance sur le plan démocratique et la responsabilité.
Mme Kostiuk : Oui, ils se sont inscrits dans le processus NEPAD et EPRM. Ils ont des stratégies pour la réduction de la pauvreté dans leur pays qui ont été préparées en consultation avec les pays donateurs et la Banque mondiale. Ils ont des approches qui sont bien fondées. Mais le développement est une partie d'une politique étrangère. Nous attendons tous la nouvelle politique étrangère. La politique peut nous donner aussi de nouvelles directions. Je ne sais pas. Je suis fonctionnaire comme vous le savez.
Mais il est clair qu'il y a de bonnes précisions du côté du développement pour faire un focus sur certains pays. Nous avons aussi d'autres raisons pour avoir des liens avec des pays en voie de développement et de l'Afrique. L'approche régionale est importante. Et peut-être que dans l'avenir, nous ne serons pas dans les mêmes pays que dans le passé. Les programmes régionaux peuvent être importants pour l'avenir de l'Afrique. Il faut aider la formation des liens entre les pays et le continent en entier. Il y a plusieurs façons de fonctionner, mais nous essayons de mettre l'accent sur certains pays.
Le sénateur Corbin : Est-ce que je pourrais utiliser l'expression politique canadienne que vous concentrez essentiellement là où il y a des conditions gagnantes et que vous ne tenterez pas cet exercice dans un pays comme le Togo, où nous n'avons pas de relations diplomatiques formelles.
Mme Kostiuk : Nous avons des relations diplomatiques.
Le sénateur Corbin : Vous n'avez pas d'ambassadeurs au Togo?
Mme Kostiuk : Non, c'est une question pour Mme Bourcier. Toutefois, s'il y a des crises, nous pouvons répondre aux crises même si ce n'est pas un programme de concentration. Il y a des programmes régionaux plus profonds. Cela dépend des pays et des priorités des pays donateurs.
Mme Bourcier : En ce qui a trait au Togo, nous n'avons pas d'ambassadeur résident, mais nous avons des relations diplomatique avec ce pays qui nous ont permis d'exprimer notre grande désolation et notre grande préoccupation quant aux événements des derniers jours.
Le sénateur Corbin : Je n'étais pas renseigné sur le fait que ces témoins vont comparaître à nouveau devant le comité et nous aurons l'occasion de traiter ces questions en détail.
Le président : On poursuit avec le même sujet la semaine prochaine.
Le sénateur Corbin : Étant donné la vastitude du sujet, on ne sait pas à qui et comment poser nos questions. Alors pardonnez-nous si on anticipe. Il y a une autre question qui me préoccupe.
Est-ce que le Canada s'intéresse à l'exploitation des pêches au large de l'Afrique? Quand je dis l'exploitation, je dis la pêche par des nations étrangères qui sont en train de voler littéralement l'Afrique de ses ressources halieutiques. Cela dure depuis des années. Est-ce que les pays africains se sont dotés de zones de protection comme le Canada l'a annoncé en 1972 à la Conférence de Stockholm? Est-ce qu'il y a des efforts dans ce sens? On vole déjà beaucoup de leurs ressources mais dans ce domaine spécifique, se fait-il quelque chose?
Mme Kostiuk : Mon idée superficielle est qu'il n'y a pas de programmation directe dans ce domaine, mais il y a des programmes multilatéraux soutenus par le Canada qui s'occupent de telles choses. Je pourrai vous donner de l'information plus précise.
Le sénateur Corbin : Il ne faut pas attendre qu'il se produise des situations comme celles du golfe du St-Laurent et qu'il n'y ait plus de poissons avant d'agir. Le Canada a beaucoup d'expérience dans ce domaine. J'espère qu'il y a des Canadiens impliqués dans la recherche de solutions immédiates.
Mme Kostiuk : Je vais faire le suivi.
[Traduction]
Le président : Nous avons tous lu des reportages au sujet du viol de la côte ouest de l'Afrique des bateaux battant pavillon Union européenne, probablement à partir de Vigo.
J'ai une brève question à poser, madame Kostiuk. La Convention de Lomé est-elle toujours en vigueur?
Mme Kostiuk : C'est une bonne question, monsieur le président. Je connais l'historique de la convention, mais je ne sais pas qu'elle en a été l'évolution depuis la création de l'Union européenne.
[Français]
Mme Bourcier : Les accords de la Convention de Lomé demeurent dans leur principe et application. Ils demeurent dans le contexte des négociations des ententes avec l'Union européenne. Entre autres, l'Union européenne a consenti, au Sommet de l'Union africaine en 2003 au Mozambique, après discussions avec les partenaires de l'ACP qui émergent de cet accord de Lomé, d'accorder une part des crédits qui sont normalement destinés au développement, aux questions de réponses au défi de sécurité et aux conflits. Donc 200 millions d'euros ont été mis de côté pour appuyer l'effort de l'Union africaine. C'est une dimension importante surtout dans le contexte de la discussion que l'on a aujourd'hui. Dans la mesure où les échanges continuent à se faire et les crédits de développement de l'Union africaine ne sont engagés qu'en autant qu'il y ait accord à la fois de la part des membres de l'Union européenne, qui sont élargis à 25, et des membres de l'ACP.
[Traduction]
Le président : Pour la gouverne de ceux qui ne le sauraient pas, la Convention de Lomé garantit aux anciennes colonies européennes des marchés en Europe, marchés dont elles devaient être exclues. Je présume que le principe des droits acquis a dû s'appliquer au moment de la création de l'Union européenne. Le Traité de Rome a été signé en 1957, il s'agit d'un élément important de l'aide au développement depuis ce temps. Voilà pourquoi j'ai posé la question.
Le sénateur Poy : J'essaie de comprendre comment l'ACDI détermine les fonds à accorder à un pays en développement. Si je vous ai bien compris, madame Kostiuk, c'est en partie en fonction du comportement de leurs gouvernements, n'est-ce pas?
Lorsque l'ACDI détermine les fonds qui seront accordés à l'Afrique subsaharienne, comment répartit-elle ensuite ces fonds entre les pays de la région? Est-ce également en fonction des demandes qui lui sont faites?
Mm Kostiuk : Je vous remercie, monsieur le président. Le comportement du pays bénéficiaire de l'aide est certainement un élément qui est pris en compte par les pays donateurs, élément auquel ils attachent d'ailleurs de plus en plus d'importance. La capacité du pays à recevoir cette aide est aussi un facteur important. Il existe des pays qui ont des besoins pressants, mais ils doivent pour être admissibles à notre aide pouvoir prouver qu'ils sont en mesure d'utiliser ces fonds de façon efficace et de rendre des comptes à cet égard.
Plusieurs facteurs sont pris en compte au moment d'établir la répartition des fonds. Ces facteurs comprennent nos politiques, le contexte politique ainsi que nos priorités en matière de développement. Le processus est véritablement interactif.
Le sénateur Poy : L'ACDI collabore-t-elle avec les ONG qui sont présentes dans ces pays ou compte-t-elle des employés sur place qui sont chargés d'évaluer la situation? Qu'en est-il à ce sujet?
Mme Kostiuk : L'ACDI compte des personnes sur place dans les pays où nous mettons en œuvre d'importants programmes d'aide. Il est important que nous évaluions nous-mêmes la situation.
Le sénateur Poy : S'agit-il d'organismes internationaux?
Mme Kostiuk : Je disais que l'ACDI compte des employés dans les pays où nous mettons en œuvre d'importants programmes d'aide. Ces employés collaborent avec les gouvernements africains ainsi qu'avec d'autres organismes donateurs. Ils travaillent aussi avec les institutions locales, lesquelles peuvent comprendre des ONG, d'autres types d'organismes et des programmes régionaux. L'ACDI et d'autres organismes donateurs prévoient souvent des fonds pour leur permettre d'établir des liens avec des programmes analogues dans les pays en développement. Je vous expliquerai volontiers comment cela fonctionne en Afrique.
Nous ne pouvons pas être présents partout, mais il est important de renforcer les capacités à l'échelle régionale et dans les sous-régions de l'Afrique, ce à quoi le Canada et d'autres pays attachent beaucoup d'importance.
Mme Wright : J'aimerais ajouter que le Canada n'offre pas toujours une aide bilatérale, mais une aide par l'entremise de l'Union africaine, à laquelle le Canada veut donner son appui, ainsi que par l'intermédiaire de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest, la CEDEAO. Nous appuyons un remboursement des capacités des institutions de ces régions pour qu'elles puissent réagir aux crises qui surviennent en Afrique et qui sont liées à la paix et à la sécurité ainsi qu'au développement politique et économique.
L'ACDI s'efforce d'appuyer les institutions régionales africaines qui mènent une action efficace comme l'Université africaine virtuelle et un certain nombre d'autres institutions semblables. Toute l'aide que nous accordons n'est pas une aide de pays à pays.
Sénateur, je présume que vous avez demandez comment nous nous assurons que l'argent que nous accordons à un pays est bien utilisé aux fins prévues. La surveillance qui est exercée est élevée et le pays bénéficiaire doit soumettre beaucoup de rapports. Nous devons être soigneux de ne pas créer pour ces institutions un fardeau trop lourd et nous devons coordonner nos exigences en matière de rapport à celles d'autres pays donateurs. Nous sommes cependant conscients de l'importance des rapports et de la surveillance. Cette surveillance est continue et elle est prévue dans les accords que nous avons conclus avec les organismes des pays bénéficiaires.
Le sénateur Poy : Vous avez mentionné l'Union africaine. Tous les pays d'Afrique sont-ils membres de l'Union?
Mme Wright : Cinquante-trois pays sont membres de l'Union Africaine. Seul le Maroc n'est pas membre de l'Union.
Le président : Pourquoi ne l'est-il pas?
[Français]
Mme Chantal Chastenay, directrice, Direction du Maghreb et de la péninsule arabique, Affaires étrangères Canada : Quand l'Union africaine a admis les Sahraouis, les représentants du Sahara occidental au sein de l'Union africaine, le Maroc s'est retiré, parce que le Maroc considère que ces territoires font partie du territoire national marocain.
[Traduction]
Le sénateur Poy : Madame Kostiuk, vous avez dit que les pays donateurs mettaient en commun leurs ressources. S'agit-il des 22 pays donateurs?
Mme Kostiuk : Cette mise en commun des ressources est faite de façon sélective dans le cas des pays que nous savons être en mesure d'utiliser les fonds de façon efficace et dans lesquels il y a des partenaires envers qui nous avons confiance. À titre d'exemple, pour ce qui est des programmes d'éducation mis en œuvre au Mozambique, nous mettons en commun nos ressources avec celles de la Grande-Bretagne, des Pays-Bas et de certains pays scandinaves. Tous ces pays s'attendent à certains résultats et veillent à une utilisation efficace de l'argent de leurs contribuables. Il n'y a donc pas mise en commun des ressources dans tous les cas, mais lorsqu'elle est possible, c'est un outil important qui accorde au gouvernement bénéficiaire beaucoup plus de souplesse et de certitude; c'est un outil qui lui permet de faire davantage dans un secteur en particulier.
Le sénateur Poy : Est-ce les gouvernements bénéficiaires qui gèrent les fonds qui leur sont accordés?
Mme Kostiuk : Oui, mais ils doivent respecter des conditions et des accords très rigoureux. Il faut parfois consacrer beaucoup de temps à la création et à la gestion de ces mécanismes. Diverses méthodes sont utilisées pour transférer les fonds aux pays bénéficiaires. Ces méthodes diffèrent d'un pays à l'autre.
Le sénateur Poy : Vous nous avez dit que l'ambassadeur Robert Fowler vit à Rome. Il représente l'Afrique. Pourquoi réside-t-il donc à Rome?
Le président : Il est l'ambassadeur du Canada en Italie.
Le sénateur Poy : En Italie? Il s'occupe donc aussi de l'Afrique, n'est-ce pas?
Mme Bourcier : L'ambassadeur Fowler réside à Rome parce qu'il est l'ambassadeur du Canada en Italie. Il est aussi le représentant du Canada auprès de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture — la FAO — qui est une institution internationale dont le siège social est à Rome. Il est aussi le représentant du Canada auprès du Fonds international de développement agricole — le FIDA — dont le siège social est également en Italie. Il s'agit évidemment de programmes importants pour les institutions qui œuvrent en Afrique.
L'ambassadeur Fowler va souvent en Afrique, mais il vient aussi souvent à Ottawa. Il pourrait être utile au comité de rencontrer quelqu'un comme lui qui connaît à fond l'Afrique et dont sa connaissance remonte à l'époque où il enseignait au Rwanda.
Mme Wright : L'ambassadeur Fowler représente également le ministre Goodale. Le ministre Goodale n'a pas pu participer à la réunion de la Commission pour l'Afrique qui a eu lieu en Éthiopie en octobre. L'ambassadeur Fowler l'a remplacé à cette occasion.
[Français]
Le sénateur Robichaud : Monsieur le président, plus j'écoute les témoins, plus je réalise que tout l'effort de l'aide qui est dirigé vers l'Afrique, en fait la livraison de cette aide, est très bien organisé. Vous avez dit que le temps doit faire son temps. Laissez-nous faire et envoyez nous de l'argent. Je ne dis pas cela d'une façon négative. C'est certainement après beaucoup d'efforts dans certains cas, infructueux, que vous avez trouvé une façon de coordonner l'aider et d'amener les différents joueurs ensemble. Cela me réconforte parce que j'avais l'impression que l'aide qui s'en allait dans cette direction souvent ne se rendait pas où elle devait se rendre notamment vers la population qui en a besoin. Ai-je raison?
Mme Kostiuk : Je vais tenter de vous donner une réponse. Ce n'est pas facile. Si c'était facile, je pense que le travail serait fait et je travaillerais aux finances publiques ou aux travaux publics. C'est évident qu'après 50 ans de développement les réussites sont là mais le progrès n'est pas aussi important qu'on anticipait. Il y a toutes sortes de raisons pour cela. Le message clef du côté canadien est que le programme d'aide essaie d'accomplir des résultats pour bénéficier aux pays et aux populations africaines et aussi pour bénéficier au Canada. La sécurité et la stabilité sont importantes pour le Canada. Ce sont des démarches en cours. Ce n'est pas comme si on avait toutes les réponses et que tout allait bien, mais en travaillant ensemble, nous allons accomplir des résultats dans les années à venir. Le focus est sur la réduction de la pauvreté et le défi du millénaire, c'est difficile à rencontrer ces objectifs. C'est comme les mauvaises nouvelles en ce qui a trait à la sécurité en Afrique. C'est la même chose en ce qui concerne le développement. Quand tout va bien ce n'est pas très intéressant. On se penche sur le problème quand on a des difficultés de livraisons, et ainsi de suite. En général les réussites existent.
Le sénateur Robichaud : Je ne voulais pas insinuer que la tâche était facile. Malgré tout ce que nous voyons aux bulletins de nouvelles on s'aperçoit qu'il y a encore beaucoup de travail à faire. Cela me réconforte lorsque vous dites qu'il y a beaucoup de coopération entre les pays donateurs et les différentes organisations sur le terrain et que les pays qui reçoivent l'aide sont prêts à coopérer dans cet effort.
Mme Kostiuk : C'est le cas des pays dans lesquels l'effort est investi en général. Il ne faut pas oublier qu'il y a plusieurs pays qui sont fragiles où il n'est pas possible d'avoir des résultats en développement durable. Et la communauté internationale devra examiner comment on fonctionne pour les pays fragiles et en faillite.
Le sénateur Robichaud : Lorsque vous dites fragiles et déjà en faillite, est-ce que vous pouvez nous donner des indications des pays en cause?
Mme Kostiuk : Il y a des listes et des commentateurs qui disent que le Zimbabwe est fragile. C'est difficile à dire. Quand on regarde les problèmes en Côte d'Ivoire, la communauté internationale préfèrerait que la situation soit plus favorable. Il y a un côté de politique étrangère qu'il faut ajouter.
Mme Bourcier : J'ajouterais, quand on regarde une carte de l'Afrique on s'aperçoit qu'il y a trois pays qui constituent des éléments déstabilisateurs, soit l'Angola, la République démocratique du Congo et le Soudan à cause de leur richesse et de la multiplicité des voisins qui sont autour. La non stabilité dans ces pays a un impact sur les autres pays. Un pays comme la Côte d'Ivoire a un impact sur toute l'Afrique de l'Ouest et sur des pays où l'ACDI investi ses efforts en matière de concentration de ses programmes du côté du Mali, du Sénégal et du Ghana, trois pays très proches de la Côte d'Ivoire. Si la Côte d'Ivoire n'arrive pas à retrouver ses points d'équilibre cela peut être problématique pour ces trois pays et pour toute la région.
L'importance de la coordination est une dimension essentielle entre les partenaires du G8, les partenaires du Forum de partenariat sur l'Afrique. Au sein de ce forum existe le groupe d'Ulstein, les pays nordiques avec lesquels le Canada a plus d'affinité dans ces approches de coopération. On a, bien sûr, des défis à relever. Des gens probablement beaucoup plus éloquents que nous l'ont dit et le répètent continuellement. Il me vient à l'esprit le secrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan, qui rappelle qu'au niveau de l'atteinte des objectifs de développement du millénaire, l'horizon de 2015 pour l'Afrique ne sera pas atteint. Il a rappelé aux Canadiens, en mars dernier, que le Canada doit continuer à respecter les engagements qu'il a pris. Si toute la communauté internationale respectait les engagements pris d'une façon réelle plutôt que ne faire qu'annoncer des montants, mais annoncer et livrer, l'Afrique aurait de meilleures chances de se développer.
En ce qui a trait au Canada, il annonce et livre. C'est ce qu'on a fait jusqu'à maintenant.
Le sénateur Robichaud : C'était en fait ma question d'hier. Le Canada annonce et livre. Alors, les autres ne livrent pas?
Mme Bourcier : Cela dépend.
[Traduction]
Le président : Je ne peux m'empêcher de faire observer que bon nombre de ces pays ont obtenu leur indépendance il y a 40 ans. À quoi compare-t-on la situation actuelle lorsqu'on dit que la situation s'améliore? Le Ghana a obtenu son indépendance aux environs de 1957. Nous souhaiterions effectivement que les choses s'améliorent au lieu de se détériorer.
L'Afrique du Sud a eu une influence déstabilisatrice dans l'Afrique méridionale, influence qui aurait dû cesser après la fin de l'apartheid et après l'abandon des efforts pour maintenir au pouvoir les régimes en place dans l'ancienne Rhodésie et en Angola. Cette influence déstabilisatrice se constate aussi dans le Sud-ouest de l'Afrique. J'ai l'impression que tout cela à pris fin. Je ne comprends toujours pas comment cette situation s'explique.
Colonel Thompson, vous avez mentionné le Sierra Leone, un pays dont je connais un peu l'histoire. Le Sierra Leone est une très vieille colonie. Ce pays a été colonisé il y a longtemps. Que s'est-il passé? Le pays est devenu indépendant, mais il n'était pas alors particulièrement instable. Tout à coup, c'est le désastre en Sierra Leone. Quelle était la dynamique? Le monde entier a-t-il tout simplement abandonné ce pays? Comment se fait-il que cela se soit passé en Sierra Leone, un pays qui était si stable? Je crois que personne n'y a vraiment beaucoup songé. Je connais l'histoire du Liberia et Sierra Leone, les circonstances qui ont mené à leur naissance. Mais pourriez-vous éclairer ma lanterne? Pourriez-vous m'expliquer ce qui a mené à cette crise?
Le col Thompson : Tout d'abord, je ne peux éclairer votre lanterne, car que je ne suis pas historien. Je comprends la situation actuelle du Sierra Leone et je peux vous dire quelle voie ce pays compte prendre.
Je n'en sais pas assez pour vous faire un bref historique des événements récents survenus en Sierra Leone, mais je peux vous dire que le principal mouvement rebelle était celui du Front révolutionnaire uni, le FRU. Ce groupe a réussi à déstabiliser le gouvernement de l'époque probablement pour prendre le contrôle des diamants. Nous avons tous entendu parler du commerce illégal de diamants du Sierra Leone. C'est le contrôle de cette ressource qui a alimenté le conflit et, au bout du compte, les forces armées de la République du Sierra Leone n'ont pas été suffisamment robustes pour vaincre les insurgés. Pour autant que je sache, cette insurrection ne jouissait pas de l'appui de la population, car quand elle a été réprimée par la suite avec l'aide des Britanniques et, plus tard, de la Mission des Nations Unies pour l'assistance en Sierra Leone, MINUSIL, le FRU n'a pas trouvé de véritable appui politique et n'a pas réalisé de progrès dans les élections qui ont suivi.
Le président : Je pose la question parce que ces conditions — les conditions qui prévalent dans un pays indiquent habituellement si l'effondrement est imminent. C'est dans ce contexte que je m'interroge sur les conditions qui prévalaient alors. Les Britanniques ont fait preuve d'une totale indifférence et sont partis — c'est peut-être ce départ qui a tout précipité.
Le col Thompson : J'ignore si les Britanniques ont alors abandonné le Sierra Leone, mais, à l'heure actuelle, ils y sont fermement engagés.
Le Sierra Leone est un bon exemple dans le contexte actuel, car la communauté économique régionale, en l'occurrence, la CEDEAO, a tenté d'intervenir au début des années 90 mais sans succès. Puis, l'ONU s'est engagé dans la même mission, mais encore une fois en vain. Au bout du compte, le Royaume-Uni a lancé une intervention militaire qui a permis de défaire le FRU et de redonner de la vigueur à la MINUSIL qui, à son apogée, comptait presque 19 000 soldats dans ce tout petit pays.
De plus, et c'est très important, le Royaume-Uni et d'autres membres de la communauté internationale ont décidé d'aider le Sierra Leone. Ainsi, au chapitre militaire, l'équipe internationale de formation à l'aide militaire compte parmi ses 110 membres une majorité de Britanniques. Pour prouver leur détermination, les Britanniques ont construit — même si cela peut sembler secondaire — un quartier de logements familiaux à Freetown. Si vous avez en Afrique et que vous visitez Freetown, vous verrez ce quartier militaire typiquement britannique pouvant accueillir une trentaine de familles. On y loge actuellement 100 soldats qui sont tous célibataires, mais quand le pays sera jugé assez stable pour que ces soldats puissent partir et qu'il n'y aura plus que 30 officiers, dont certains seront peut-être Canadiens, ils y seront affectés de façon permanente et pourront vivre avec leur famille en Sierra Leone. Ce ne sont pas des projets de cinq ou dix ans. Ce sont des projets à très long terme, sur une vingtaine d'années.
C'est une chose que nous avons fini par apprendre avec le temps de nos collègues du monde du développement. Ce genre de chose ne se fait pas du jour au lendemain. On ne réforme pas l'armée du jour au lendemain. On ne crée pas une force de police du jour au lendemain. On n'établit pas des tribunaux et tout le reste sans effort prolongé et soutenu.
Le président : Merci beaucoup. Je ne peux m'empêcher de conclure que cela ressemble énormément à une nouvelle colonisation du Sierra Leone. On y trouvait une force policière, il y a eu une armée qui fonctionnait bien, puis ils sont partis. Ils y sont maintenant retournés, et font exactement ce qu'ils ont fait dans les années 50.
Le col Thompson : C'est remarquable. Si vous allez en Sierra Leone ou au Ghana ou dans un de ces pays et que vous observez leurs soldats — en tant que soldat canadien, un pays membre du Commonwealth, je sais que je pourrais commander une de leurs parades sans problème. Leurs exercices de manœuvre sont faits comme s'ils étaient des soldats britanniques. Ils ont certainement l'accent aussi.
Cependant, le chef d'état-major de la défense de l'armée de la République du Sierra Leone vient de ce pays et il en va de même pour son adjoint. Un des maillons de la chaîne hiérarchique est un brigadier britannique qui est chef d'état-major. Il y a également un lieutenant-colonel canadien responsable de la garnison de Freetown. Ces gens sont éparpillés un peu partout dans la filière hiérarchique et sont membres de ces forces armées. C'est ainsi qu'il faut faire les choses. Si vous n'êtes pas en contact avec les gens, si vous ne leur démontrez pas comment une armée démocratique est supposée fonctionner, les choses ne changeront pas. Vous vous retrouverez avec ce qu'on a vu dans nombre de pays européens, soit des forces armées qui n'existent que pour protéger le régime et non pas la population.
Le président : Je suis parfaitement d'accord, mais comme je l'ai signalé tout à l'heure, c'est comme si on procédait à nouveau à la colonisation du Sierra Leone.
Mme Kostiuk : Clairement, lorsque vous pouvez ramasser des diamants avec simplement une pelle, c'est une situation bien différente de ce qu'on retrouve au Canada pour l'exploitation des diamants.
Si j'étudie la liste de Mme Bourcier qui identifie les États qui sont fragiles ou ceux où la démocratie n'a pu survivre, je retrouve : l'Angola, où l'on retrouve beaucoup de ressources; la République démocratique du Congo, qui détient énormément de ressources naturelles; et le Soudan, qui a d'importantes ressources de pétrole. Dans une large mesure, ces conflits sont fondés sur l'exploitation des ressources — et nous devons avouer qu'ils sont nos partenaires. Il n'existe pas de marché pour ces diamants. Personne ne va les exploiter. Il faut placer ces choses dans un contexte général.
J'ai étudié brièvement le rapport de la séance que vous avez eu avec les universitaires. Le professeur Cooper parlait de l'État protecteur et du genre de gouvernement qu'on retrouvait dans ces pays lorsqu'ils sont devenus indépendants. Les capacités n'existaient pas. L'administration n'était souvent pas très bien établie. Ces gouvernements n'étaient pas en mesure de s'occuper du pays tout entier. Ils s'occupaient simplement d'assurer l'administration de la capitale. Ils s'occupaient de leur contact avec le reste du monde. L'absence de ce genre de choses n'avait pas frappé les gens à l'époque.
Le président : J'aurais pensé qu'en Sierra Leone les choses auraient pu être différentes, mais vous avez peut-être raison. Ce pays existe depuis déjà un bon moment — même le Kenya, et ça remonte au début du XXe siècle.
Je tiens à remercier nos témoins d'être venus participer à cette réunion fort intéressante.
Le comité poursuit ses travaux à huis clos.