Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires étrangères
Fascicule 21 - Témoignages du 22 novembre 2005
OTTAWA, le mardi 22 novembre 2005
Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères se réunit aujourd'hui, à 18 h 4, pour examiner le projet de loi C-25, Loi régissant l'exploitation des systèmes de télédétection spatiale, qui lui a été renvoyé.
Le sénateur Peter A. Stollery (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Honorables sénateurs, je déclare la séance ouverte. Nous sommes réunis pour examiner le projet de loi C-25, Loi régissant l'exploitation des systèmes de télédétection spatiale. Nous accueillons aujourd'hui l'honorable Dan McTeague, secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, ainsi que des représentants du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, Paul Chapin, Phillip Baines et Bruce Mann. Sans plus attendre, je vais céder la parole à l'honorable Dan McTeague.
L'honorable Dan McTeague, C.P., député, secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères : Honorables sénateurs, je tiens d'abord à vous remercier de m'avoir invité à témoigner au nom des Affaires étrangères au sujet du projet de loi C-25, Loi sur les systèmes de télédétection spatiale. Sous réserve de la volonté du Parlement, cette loi va établir un régime de réglementation pour les systèmes de télédétection spatiale, en vue de protéger les intérêts du Canada en matière de sécurité, de défense et de relations internationales, qui sont liés à l'exploitation de ces systèmes.
Le projet de loi C-25 va également contribuer au développement d'une industrie spatiale compétitive à l'échelle internationale, de sorte que le secteur spatial canadien puisse conserver sa position de leader international dans le domaine de la technologie et des services de télédétection. Le projet de loi témoigne aussi de l'engagement de longue date que le Canada a pris à l'égard de l'exploitation pacifique de l'espace.
Lorsqu'ils regardent une carte de leur pays, les Canadiens ne peuvent pas s'empêcher de remarquer tout de suite que le Canada s'étend sur toute la largeur d'un continent. Il n'y a rien de surprenant à ce que les Canadiens soient parmi les premiers au monde à avoir exploité l'espace extra-atmosphérique pour assurer des voies de communication sur notre vaste territoire qui couvre quatre fuseaux horaires et demi.
En 1962, le Canada est devenu le troisième pays présent dans l'espace grâce au lancement d'Alouette 1, un satellite scientifique voué à l'étude de l'ionosphère. Après le lancement en 1972 du satellite Anik A1, le Canada a aussi été le premier pays au monde à exploiter un système national de télécommunications par satellite en orbite géostationnaire.
La famille de satellites Anik relient entre elles les localités canadiennes dispersées d'un bout à l'autre du pays et ce, sans interruption depuis le lancement d'Anik A1, le premier de la série. Le Canada a donc acquis une renommée de chef de file mondial dans le domaine de l'exploitation de l'espace extra-atmosphérique aux fins des télécommunications.
Nous excellons et nous allons continuer d'exceller dans l'exportation de cette expertise vers des marchés étrangers. À présent, nous souhaitons connaître le même succès pour les applications de la télédétection satellitaire.
[Français]
Avec un pays comme le nôtre, dont la superficie est plus vaste que certains continents, il n'est pas étonnant que les Canadiens aient à appliquer leur savoir-faire au perfectionnement des satellites de télédétection pour mieux assurer la souveraineté du Canada et les zones économiques exclusives.
En 1995, le Canada a lancé RADARSAT-1 dans le but de surveiller nos richesses naturelles, de gérer efficacement l'occupation de nos sols et de surveiller notre environnement. RADARSAT-1 a aussi été lancé pour déceler toute activité sur notre territoire Arctique et dans nos eaux côtières. Le RADARSAT-1 dote le Canada et le monde entier d'un satellite opérationnel, capable de livrer, au moment opportun, une multitude de données.
Équipé d'un puissant radar à synthèse d'ouverture, RADARSAT-1 capte des images de la terre, le jour comme la nuit, sans égard à la couverture nuageuse, à la fumée et au brouillard qui résultent des climats et de la topographie du Canada. Cet important satellite vient tout juste de célébrer dix années d'excellence en matière de surveillance et de protection environnementale mondiale. Grâce à lui, le Canada est aujourd'hui un leader international dans le traitement des données de télédétection satellitaire.
Les Canadiens peuvent s'attendre à un avenir rempli de réalisations encore plus spectaculaires en cette période où le secteur public et le secteur privé unissent leurs efforts pour saisir les occasions qui s'offrent aujourd'hui à eux en déployant des trésors d'ingéniosité, en prenant des risques audacieux et en proposant un monde de financement innovateur.
[Traduction]
Tout comme les satellites canadiens de télécommunications, RADARSAT-1, notre premier satellite canadien de télédétection, a lui aussi d'abord été la propriété du Canada et sous son contrôle. Par la suite, la propriété et le contrôle des satellites canadiens de télécommunications ont été transférés au secteur privé. Aujourd'hui, RADARSAT-2, le satellite canadien de télédétection de deuxième génération, suit exactement le même parcours.
S'appuyant sur le succès de son prédécesseur, RADARSAT-2 devrait générer des retombées industrielles d'environ 2 milliards de dollars dans les secteurs de l'aérospatiale et de l'observation de la Terre. Le programme RADARSAT-2 devrait également créer des emplois représentant l'équivalent de près de 3 500 années-personnes, générer des ventes à l'exportation d'environ 1,2 milliard de dollars et stimuler la croissance de petites et moyennes entreprises au fur et à mesure que l'infrastructure et l'industrie canadiennes des services dans ce secteur continueront de se développer.
Le gouvernement du Canada a probablement acheté, auprès d'une entreprise privée qui a obtenu un contrat par voie d'appel d'offres ouvert, suffisamment de données radar pour combler ce besoin sur une base continue. En échange d'un investissement initial considérable et d'un engagement à exploiter le satellite pendant toute sa durée de vie de sept ans, l'entreprise privée qui participe au projet a acquis la possibilité de vendre les ressources excédentaires de RADARSAT- 2 à des clients canadiens et étrangers partout dans le monde. RADARSAT-2 aura un rendement supérieur à celui de RADARSAT-1 en raison des innovations rendues possibles grâce aux investissements privés dans les activités stratégiques de R-D.
RADARSAT-2 aura une excellente résolution spatiale de 3 mètres, offrant ainsi un pouvoir séparateur deux fois plus fin que celui de RADARSAT-1. Comme il pourra recueillir en modes de polarisation multiples quatre fois plus d'informations que son prédécesseur, RADARSAT-2 pourra mieux discerner divers objets artificiels. Les clients de RADARSAT-2 pourront en outre observer n'importe quelle région de la Terre au moins deux fois plus rapidement que ce qui est permis par RADARSAT-1. Bref, RADARSAT-2 sera doté d'importantes fonctions dont pourront bénéficier les utilisateurs tant militaires que civils.
[Français]
Étant donné que le gouvernement du Canada encourage le développement par le secteur privé des systèmes aussi perfectionnés que RADARSAT-2, l'actualisation de tels systèmes est assortie du point de vue de la sécurité, de la responsabilité de réglementer l'exploitation des systèmes de nature aussi délicate.
C'est exactement ce que vise le projet de loi C-25, c'est-à-dire un régime réglementaire pour RADARSAT-2 et tous les futurs satellites de télédétection, afin d'assurer que l'exploitation des systèmes très performants, ayant aussi des capacités de reconnaissance militaire, ne porte pas atteinte à la sécurité nationale, à la défense et aux relations internationales du Canada.
[Traduction]
Le projet de loi C-25 protège ce type d'intérêts fédéraux en instaurant un régime de licences d'exploitation. Toutes les licences seront assujetties à deux restrictions extraordinaires, soit le droit de regard et l'accès prioritaire, qui pourraient être invoquées en cas de crises majeures menaçant la sécurité. Le projet de loi C-25 n'est pas différent des autres régimes de licences prévus par la loi au Canada, y compris ceux qui se rapportent à la radio et aux télécommunications. Dans le même ordre d'idées, le projet de loi C-25 prévoit un seul décideur pour toutes les mesures ayant trait à l'attribution des licences. Il vise le droit de représentation, garanti par la justice naturelle, pour les décisions prises par le ministre compétent de son propre chef, ainsi que la possibilité de demander le contrôle judiciaire des décisions du ministre pour en assurer une application équitable.
En adoptant le projet de loi C-25, le Canada remplira également ses obligations internationales et bilatérales quant à la réglementation des activités de télédétection spatiale menées par ses ressortissants, tel que le Canada est tenu de le faire en vertu du Traité sur l'espace extra-atmosphérique de 1967 et de l'Accord intergouvernemental canado- américain de 2000 sur l'exploitation des systèmes commerciaux de télédétection par satellites. Le projet de loi C-25 prévoit en outre que le ministre compétent devra demander que soit mené de temps à autre un examen indépendant des dispositions et de l'application de la loi de manière à évaluer, en particulier, son incidence sur le développement technique et la mise en œuvre d'ententes internationales. Les rapports de ces examens devront être déposés devant chaque Chambre du Parlement dans les cinq ans qui suivront l'entrée en vigueur de la loi, et tous les cinq ans par la suite.
[Français]
Le lancement du satellite canadien RADARSAT-2 est maintenant prévu pour décembre 2006, soit dans un peu plus d'un an. Le satellite canadien RADARSAT-1 fonctionne encore malgré le fait que sa durée de vie initiale ait plus que doublé. Nous espérons qu'il continuera de servir les Canadiens jusqu'à la mise en service de RADARSAT-2, qui le remplacera.
[Traduction]
Les représentants du gouvernement ont encore beaucoup de travail à abattre avant la promulgation de la loi. Les règlements doivent être rédigés et mis en vigueur. Ils doivent aussi ériger la structure administrative de la loi à même les budgets actuels d'Affaires étrangères Canada, de la Défense nationale, de Sécurité publique et Protection civile Canada et de l'Agence spatiale canadienne. RADARSAT-2 devra ensuite obtenir une licence d'exploitation en vertu de la loi.
[Français]
Monsieur le président, je vous remercie. Je suis à votre disposition pour répondre à vos questions.
Le président : Merci beaucoup, monsieur McTeague.
[Traduction]
Le sénateur Carney : J'aimerais d'abord vous dire que cette question me tient particulièrement à cœur. Bien avant de faire de la politique, j'ai été au nombre des 26 premiers gestionnaires à participer aux expériences innovatrices sur le satellite technologique de télécommunication, le STT, aussi appelé Hermes, le tout premier satellite géostationnaire de communication interactive dans le monde, qui a été l'ancêtre des formidables voies de satellites que nous avons aujourd'hui.
Quand j'étais ministre de l'Énergie, des Mines et des Ressources, sous un gouvernement conservateur, RADARSAT a germé dans l'esprit d'un groupe de scientifiques très avant-gardistes du ministère. J'ai suivi l'évolution de RADARSAT et de ses prédécesseurs pendant de nombreuses années, de sorte que l'étude du projet de loi C-25 m'intéresse.
Comme RADARSAT-1 était de conception canadienne, on l'a d'abord jugé anodin. On se préoccupait alors de la reconnaissance des glaces, de la surveillance des cultures et des incendies de forêt ainsi que des patrouilles pour assurer la souveraineté dans l'Arctique. On n'aurait jamais pensé que notre nouveau petit satellite météorologique de télédétection nous obligerait à établir un régime de réglementation pour des fins de sécurité publique ou de défense nationale. Je suis contente que le projet de loi prévoie un examen de la loi tous les cinq ans parce qu'on ne sait pas à quoi le système va servir dans cinq ans.
J'ai certaines inquiétudes. D'abord, ce qui figure dans certaines parties du projet de loi et des notes d'information est assez draconien. Par exemple, les systèmes vont être exploités par l'entreprise privée MacDonald, Dettwiler et Associates Ltd., qui a beaucoup d'expérience dans le domaine, mais vous avez expliqué que le gouvernement a investi de l'argent au départ pour lancer le projet. Les notes d'information et le projet de loi semblent indiquer que le gouvernement peut limiter ou interrompre le service de RADARSAT-2 sans indemniser le secteur privé. C'est plutôt contraire aux règles de la propriété. J'en ai discuté avec des fonctionnaires avant la séance de ce soir. Monsieur McTeague, pourriez-vous nous fournir des précisions là-dessus? L'accès prioritaire du gouvernement qui lui permet de limiter l'utilisation du satellite sans indemnisation correspond à une expropriation. Comment expliquez-vous cela?
M. McTeague : Sénateur Carney, je vais demander l'aide d'un de mes collaborateurs qui va pouvoir vous répondre de façon plus précise que je ne pourrais le faire moi-même.
Bruce Mann, avocat-conseil, Direction des services juridiques — Justice, Affaires étrangères et du Commerce international : Madame le sénateur, vous faites référence à l'article 22 du projet de loi.
Le sénateur Carney : Je fais aussi référence à l'article 15.
M. Mann : Les articles 13, 14 et 15 confèrent à plusieurs ministres le pouvoir d'invoquer le droit de regard ou l'accès prioritaire pour exiger que l'exploitant prenne certaines dispositions dans des situations d'urgence. L'article 22, sur l'immunité, prévoit, non pas que le gouvernement ne peut pas indemniser les exploitants pour les pertes qu'ils pourraient subir, mais qu'il ne peut être tenu d'indemniser qui que ce soit. Cette disposition d'immunité n'est pas inusitée pour les gouvernements dans le cas des questions concernant la sécurité nationale et la défense nationale ou quand le gouvernement doit intervenir dans les activités du secteur privé pour protéger des intérêts liés à l'environnement.
Toutes les dispositions citées dans l'article 22 sur l'immunité, c'est-à-dire les articles 9, 10, 11, 12, 13, 14 et 15 confèrent au gouvernement ou au ministre des pouvoirs pour des raisons de sécurité nationale, de défense nationale, de relations internationales, de protection de l'environnement et de sécurité publique.
Normalement, ce sont des interventions pour lesquelles les gouvernements ne sont pas tenus responsables devant un tribunal. Cela dit, une politique du Conseil du Trésor prévoit des paiements à titre gracieux. Il est énoncé dans cette politique que celui qui subit une perte qu'il estime être causée par le gouvernement peut demander une indemnisation à titre gracieux au Conseil du Trésor. Le gouvernement peut donc verser une indemnité pour ces pertes à titre facultatif. Cette possibilité n'est pas exclue par l'article 22 sur l'immunité.
Le deuxième paragraphe de l'article 22 prévoit qu'en cas de prise d'un ordre au titre de l'article 15, sur l'accès prioritaire, le ministre peut verser au titulaire de la licence la somme déterminée conformément aux règlements. Cette disposition vise à établir une distinction entre les cas où l'intervention du gouvernement peut avoir causer une perte financière à l'exploitant ou au client d'un satellite et les cas où le gouvernement a exigé de fournir un service au moyen du satellite, ce qui exige un paiement.
Le paragraphe 22(2) stipule que le ministre peut verser une somme déterminée pour les services fournis conformément à un ordre d'accès prioritaire. Le gouvernement a certes l'intention de payer pour les services ainsi obtenus. D'ailleurs, à l'alinéa 20(1)j), le gouvernement peut, par règlement, régir la fixation des sommes pouvant être versées à ce titre.
Nous avons produit un règlement à ce sujet. Le projet de règlement se trouve dans le dossier de synthèse, à l'onglet 10, aux pages 7 à 9. Il s'agit des articles 12 et 14 du projet de règlement. Ces articles énoncent une formule en vertu de laquelle le montant que le gouvernement va ou peut payer pour des services d'accès prioritaire ne peut excéder toute somme convenue ou...
Le sénateur Carney : Il y a beaucoup d'aspects à explorer dans ce projet de loi. Je tiens à signaler au président que nous pouvons vouloir faire remarquer que l'article 22 dit :
Sa Majesté du Chef du Canada ne peut être tenue d'indemniser quiconque pour les pertes financières subies par suite de la prise — faite de bonne foi...
Pour moi, cette mesure est draconienne. Je ne pense pas que faire référence au règlement, à la politique du Conseil du Trésor ou à d'autres mesures constitue une garantie suffisante étant donné que cette disposition demande à l'exploitant privé de fournir un accès prioritaire pour lequel il ne sera pas indemnisé. Cela m'inquiète.
Ensuite, monsieur le secrétaire parlementaire, j'aimerais que vous me donniez des précisions au sujet du fait que, selon l'Accord canado-américain dont il est question ici, les parties s'engagent à s'assurer que les systèmes commerciaux de télédétection par satellite visés seront contrôlés par chaque partie d'une manière comparable, afin de protéger et de promouvoir leurs intérêts nationaux communs en matière de sécurité nationale et de politique étrangère.
Cela semble indiquer que les États-Unis auraient leur mot à dire même à propos de nos activités liées à la reconnaissance des glaces, à la surveillance des incendies de forêt et aux usages commerciaux, que les États-Unis auraient leur mot à dire dans l'exploitation du satellite.
Y a-t-il réciprocité avec les États-Unis? Ils ont beaucoup plus de satellites reliés à notre système que le Canada en a. Y a-t-il réciprocité pour ce qui est de l'exploitation des satellites? Avons-nous les mêmes droits d'accès qu'eux pour ce qui est des satellites dont il est question dans le projet de loi?
M. McTeague : Je vais demander à M. Baines de vous répondre, mais j'aimerais d'abord revenir à la première question du sénateur Carney. Je me rends compte que M. Mann a abordé bien des sujets. Ce qu'il importe de retenir cependant, c'est que, s'il y a urgence nationale ou que les obligations internationales du Canada sont en jeu, il est facile de comprendre pourquoi il est nécessaire d'avoir un droit de regard ou un accès prioritaire sans lesquels il n'y aurait pas d'indemnisation, même comme M. Mann l'a indiqué, sauf dans les circonstances prévues par le Conseil du Trésor.
Pour ce qui est de votre deuxième question, à moins que l'armée ou le gouvernement américain ne soit un client de RADARSAT, je ne vois pas la nécessité d'une réciprocité ou comment les États-Unis auraient accès à nos informations à moins d'être des clients. M. Baines peut peut-être vous donner des explications plus précises.
Phillip Baines, conseiller principal en matière de politiques, Science et technologie, Direction de la non-prolifération et du désarmement chimique, biologique et conventionnel, Affaires étrangères et du Commerce international : Honorables sénateurs, cet accord conclu entre le Canada et les États-Unis vise principalement à ce que les deux pays s'entendent pour contrôler l'exploitation des systèmes par le secteur privé sur une base comparable. Cet accord est nécessaire pour que les intérêts liés à la sécurité nationale et aux affaires étrangères du Canada et des États-Unis ne soient pas mis en péril par des satellites très performants, capables d'une résolution bien supérieure à celle de RADARSAT-1.
L'accord prévoit que nous voulons promouvoir la commercialisation de ces systèmes. L'accord permet au Canada de commander commercialement des images provenant de satellites américains licenciés aux États-Unis. Tout comme les États-Unis peuvent commander commercialement des images provenant des satellites canadiens licenciés au Canada.
Le sénateur Carney : D'autres sénateurs voudront peut-être revenir là-dessus. Pour ma part, j'aimerais revenir à l'article 4. Les comités sénatoriaux, comme vous le savez, n'aiment pas les projets de loi vagues qui prévoient des exemptions illimitées ou des règlements déficients.
On peut se demander pourquoi l'application de la loi prévue à l'article 4 a une portée aussi large. L'article dit :
Le ministre peut, par arrêté, soustraire toute personne ou tout système de télédétection spatiale — ou toute catégorie de personnes, de systèmes ou de données — à l'application de tout ou partie de la présente loi ou des règlements, l'exemption pouvant être de portée limitée ou assortie de conditions.
Ensuite, on indique les conditions à remplir. Pourquoi est-il nécessaire, dans un projet de loi complexe qui accorde des licences et énonce des conditions, d'avoir une exemption de portée aussi large qui permettrait au gouverneur en conseil de soustraire de gens à l'application du projet de loi dans certaines conditions?
M. Baines : Vous me demandez plus précisément, au sujet du paragraphe 4(3), pourquoi le ministre peut soustraire toute personne ou tout système de télédétection spatiale, toute catégorie de personnes, de systèmes ou de données à l'application du projet de loi? Conformément à nos obligations en vertu du Traité sur l'espace extra-atmosphérique de 1967, notre pays doit pouvoir réglementer les activités menées dans l'espace par nos ressortissants, peu importe où ils habitent, qu'ils vivent et mènent ces activités au Canada ou dans un autre pays.
Disons que des Canadiens exploitent un satellite dans un autre pays. Ce pays a ses propres lois pour régir l'exploitation des satellites de télédétection sur son territoire.
Le pouvoir ainsi conféré au ministre lui permettrait d'examiner notre loi et celle de l'autre compétence et d'accepter, à condition que les critères dont il doit tenir compte sont respectés. Le ministre peut décider qu'effectivement, l'autre compétence peut réglementer l'activité parce qu'elle se déroule sur son territoire, que nous ne sommes pas obligés de le faire aux termes du Traité de l'espace et du fait que le propriétaire est canadien.
Le sénateur Carney : Le satellite nous appartient.
M. Baines : Il s'agit d'un satellite exploité par des Canadiens au-dessus d'un autre territoire. Le projet de loi nous confère le pouvoir d'émettre des licences à ces Canadiens pour l'exploitation dans une autre juridiction, à moins que le ministre ne soit convaincu que cette juridiction peut le faire tout aussi bien que nous.
Le sénateur Downe : Quelle serait l'utilité d'un pareil satellite pour la Gendarmerie royale du Canada, le Service canadien du renseignement de sécurité et la Défense nationale?
M. McTeague : Il serait fort utile. Ainsi, plusieurs utilisations viennent à l'esprit dans le cas de la Gendarmerie royale du Canada ou de la Défense nationale, par exemple à l'égard des conditions de déploiement de nos troupes en Afghanistan ou à Haïti. Nous aurions alors une meilleure idée de ce qui les attend. Messieurs, si vous souhaitez commenter, vous êtes libres de le faire
Le sénateur Stollery : Lequel d'entre vous aimerait faire des observations en réponse à cette question?
M. Baines : En ce qui concerne la GRC ou le SCRS, le projet de loi parle essentiellement d'événements affectant la sécurité nationale. La GRC ne pourrait s'en servir pour faire respecter le Code criminel, sauf dans les circonstances exceptionnelles prévues dans le projet de loi, c'est-à-dire pour assurer la sécurité nationale.
Un scénario possible qui nous inquiète serait l'utilisation d'armes de destruction massive en territoire canadien. La GRC aurait alors besoin de connaître l'étendue de la zone affectée pour boucler la région. Elle pourrait donc avoir recours à l'accès prioritaire pour obtenir des images de la région avant de commencer ses opérations.
Quant au ministère de la Défense nationale, nous avons ici des représentants du ministère qui pourrait vous parler des avantages du droit de regard et de l'accès prioritaire aux fins de défense.
Le sénateur Stollery : Ces messieurs de la Défense nationale peuvent-ils s'avancer à la table et se présenter avant de répondre à cette partie de la question du sénateur Downe? Identifiez-vous pour que nous sachions qui vous êtes.
Lieutenant-colonel Scott Johnson, Direction du développement de l'espace, Défense nationale : En réponse à votre question, je puis vous donner comme exemples les fins auxquelles nous utilisons ces images actuellement et ce que nous projetons comme éventuelle utilisation. Prenons comme exemple RADARSAT-1. Quand la rivière Rouge a débordé de son lit au milieu des années 1990, nous avons dû recourir aux images de RADARSAT-1 et, bien que l'article actuellement projeté n'existait pas, nous avons invoqué l'accès prioritaire de manière à pouvoir cartographier les zones inondées. Cette information était destinée aux troupes déployées au Manitoba.
Pour ce qui est de RADARSAT-2, nous avions prévu de nous en servir pour élargir la zone de surveillance des approches du continent nord-américain. Il importe que nous soyons capables de détecter très tôt les navires, alors qu'ils sont loin dans la mer, à 1 000 kilomètres de la côte. RADARSAT-2 est idéal à cette fin. Nous projetons également de nous en servir pour surveiller la région arctique. Le satellite survole les îles de l'Arctique toutes les 90 minutes. Il se prête particulièrement bien à la surveillance des activités dans cette région.
Durant cette surveillance, si nous repérons un navire suspect ou quelqu'un en train de faire quelque chose qu'il ne devrait pas faire et que son activité semble suspecte — si l'activité est suffisamment grave et qu'il n'existe pas d'autre moyen d'obtenir l'information —, nous pourrions alors invoquer l'accès prioritaire pour suivre le navire. À nouveau, je précise qu'il s'agirait de circonstances extraordinaires parce que nous disposons d'autres moyens. Toutefois, si les images de satellite étaient le meilleur moyen, nous nous en servirions.
Pour ce qui est du droit de regard, si les Forces canadiennes étaient déployées sur un théâtre de guerre quelque part et que nos services de renseignements apprenaient qu'un ennemi se servait d'une carte de crédit sur l'Internet pour accéder à des images satellitaires en vue de cibler nos troupes, nous pourrions alors invoquer le droit de regard. Le projet de loi à l'étude ne concerne pas que RADARSAT-2, mais bien tout capteur au sujet duquel nous pourrions émettre une licence ultérieurement. À nouveau, je précise que nous ne le ferions que dans des circonstances exceptionnelles. Il faudrait que nos troupes soient menacées. Ce serait là un exemple.
Le sénateur Downe : Voilà qui est instructif. Le secrétaire parlementaire est-il préoccupé par ce droit de regard? À l'article 15 du projet de loi, il est question de ce que peuvent faire les différents ministres — celui de la Défense nationale et le solliciteur général du Canada, entre autres. À l'article 21, une grande partie de ce pouvoir est déléguée. Ainsi, le solliciteur général du Canada pourrait déléguer son pouvoir aux personnes qui s'intéressent le plus à obtenir l'information, mais sans avoir à exercer de la surveillance. Cela vous préoccupe-t-il, monsieur le secrétaire parlementaire?
M. Mann : La loi comporte douze dispositions qui confèrent des pouvoirs au ministre des Affaires étrangères et à d'autres. Sans exception, le mécanisme de surveillance prévu est une révision judiciaire de la Cour fédérale. Or, l'article 18 de la Loi sur la Cour fédérale confère l'important pouvoir, à quiconque est matériellement touché par une décision du ministre, de demander une révision judiciaire et d'exiger d'être informé en vertu de quelle autorité le ministre a agi. Il pourrait alléguer que le ministre a pris une décision sans en avoir l'autorité et ainsi de suite. Cette forme de surveillance est présente partout dans la loi.
Quant au point que vous faites valoir au sujet de la délégation des pouvoirs du ministre, tous les pouvoirs conférés dans les douze dispositions de la loi dont j'ai parlé peuvent être délégués, sauf deux : le droit de regard, que le ministre ne peut pas du tout déléguer, et l'accès prioritaire, qu'un ministre peut déléguer, mais seulement à quelqu'un occupant un poste du niveau de sous-ministre.
M. McTeague : Il ne faudrait pas oublier, non plus, la surveillance exercée par le Parlement. Le ministre a des comptes à rendre au Parlement, à la Chambre des communes.
Le sénateur Downe : Cette histoire de délégation me préoccupe. Pour ne nommer qu'un des ministres en cause, le poste de solliciteur général du Canada est, comme nous le savons tous, un poste important.
On peut lire, au paragraphe 15(3) :
Le solliciteur général du Canada peut ordonner au titulaire de licence de fournir tout service au moyen du système agréé :
a) à la Gendarmerie royale du Canada, s'il a des motifs raisonnables de croire que l'obtention du service est souhaitable pour l'exercice par les membres de celle-ci des fonctions visées au paragraphe 6(1) de la Loi sur les infractions en matière de sécurité;
À l'article 21, le solliciteur général peut déléguer cette autorité et ce pouvoir au commissaire de la GRC. À son entrée en fonction, si le solliciteur général signe des lettres de délégation au commissaire de la GRC, au directeur du SCRS et au sous-solliciteur général, qui peuvent exercer tous les pouvoirs prévus à l'alinéa 15(3)c), il n'y a alors plus de surveillance. Je suis sûr que la plupart des solliciteurs généraux ne le feraient pas, mais le fait que la possibilité existe me préoccupe. À partir de ce moment-là, ce sont le commissaire de la GRC, le directeur du SCS et le sous-solliciteur général qui prennent ces décisions. Est-ce bien l'esprit de la loi?
M. Mann : Oui. Les décisions prises par les délégués de pouvoir — soit, à l'article 15, ceux qui sont du niveau de sous-minsitre — ne sont pas des décisions prises sans surveillance. Comme je l'ai déjà mentionné, la Cour fédérale a des pouvoirs de révision judiciaire à cet égard.
Le sénateur Downe : La surveillance s'exerce après coup. Il faudrait que le gouvernement cherche à le faire tout de suite plutôt qu'après le fait. Dans ce cas-ci, bien que cela puisse ne jamais se produire, la loi permet la délégation de ces pouvoirs, ce qui à mon avis ne devrait pas être.
Le sénateur Stollery : Je vous rappelle qu'il y a une disposition imposant un examen quinquennal.
Le sénateur Andreychuk : Vous persistez à parler de révision judiciaire, mais nous allons faire un examen pour juger si le ministre ou le délégué de pouvoir respecte les règles ou pas. Il ne s'agit pas d'un appel, ni d'un examen du pour et du contre. L'examen ne portera que sur la conformité aux règles administratives.
J'ai raison?
M. Mann : Oui.
Le sénateur Andreychuk : Quand on parle de révision « judiciaire », ce n'est pas la révision judiciaire complète normalement prévue.
Aux termes de la Loi sur la sécurité publique, le ministre pourrait déléguer des pouvoirs à un sous-ministre. Au moment de l'adoption de cette loi, on nous avait dit que la délégation était inhabituelle, qu'elle se faisait pour des raisons de sécurité nationale et qu'elle serait rarement utilisée, si elle l'était. La raison pour laquelle le pouvoir pouvait être délégué à un sous-ministre était qu'en l'absence du ministre, un autre ministre pourrait ne pas maîtriser aussi bien le dossier qu'un sous-ministre. Je n'ai pas été dupe de cette explication, contrairement à la majorité.
Voilà que, dans le projet de loi à l'étude, le ministre peut déléguer son pouvoir lorsqu'il le juge souhaitable pour la conduite des relations internationales du Canada ou l'exécution par le Canada de ses obligations internationales. Il n'y est pas question d'enjeux graves, névralgiques et immédiats. Nous conférons au ministre le pouvoir de déléguer à quelqu'un qui n'a pas de responsabilité ministérielle et n'a pas de comptes à rendre au Parlement. Cette délégation lui donnerait l'immense pouvoir d'intervenir, en l'absence de toute définition des expressions « conduite des relations internationales » et « exécution de ses obligations internationales », quand le ministre a des motifs raisonnables de croire que c'est souhaitable.
Si le ministre en est vraiment convaincu, il peut le faire. Il délègue le pouvoir au sous-ministre, qui peut agir s'il l'estime vraiment nécessaire. Cette raison n'est pas utile à ceux qui pourraient en être affectés.
Existe-t-il une tendance à déléguer des pouvoirs ministériels aux sous-ministres? Ce serait contraire à notre Constitution et à notre régime de reddition de comptes.
Le sénateur Stollery : Sénateur Andreychuk, avant que quelqu'un ne fasse une réponse plus complète, je vous rappelle que les paragraphes 45.1(1) et 45.1(2) disposent que : « Le ministre fait procéder, à l'occasion, à un examen indépendant des dispositions [...] » et « [...] le ministre fait déposer devant chacune des chambres du Parlement le rapport de l'examen auquel il a fait procéder [...] » dans les cinq ans qui suivent l'entrée en vigueur de la loi.
Le sénateur Andreychuk : Je n'en doute pas, mais ma question se greffe au point que faisait valoir le sénateur Downe. L'examen a lieu après coup. Les ministres commandent un examen de leur propre ministère et d'eux-mêmes. On nous a affirmé que la Loi sur la sécurité publique était inhabituelle, et voilà qu'on en élargit la portée à la conduite des relations internationales du Canada et au respect de ses obligations internationales qui ne sont pas, naturellement, définies.
M. Baines : L'accès prioritaire, tout comme le droit de regard, sera un événement rare. Il faut que le pouvoir relatif à l'accès prioritaire, cependant, puisse être exercé à un niveau plus bas, pour la raison que vous avez mentionnée. Il est question d'une situation d'urgence. Si nous avions une obligation internationale, il faudrait invoquer l'accès prioritaire. Dans le domaine des relations internationales, nul n'aime pas voir un allié lésé par ses propres actes ou sa propre inaction, et c'est pourquoi nous pourrions vouloir agir de manière plutôt pressante.
Vous avez parlé de l'absence d'un ministre, qui ne pourrait alors pas invoquer ces pouvoirs alors que chaque minute compte. Ces dispositions sont tout aussi efficaces pour protéger nos troupes déployées à l'étranger, dans des fuseaux horaires différents et ainsi de suite. Le point essentiel est le caractère pressant du besoin.
Par ailleurs, on prévoit que ces dispositions seront rarement invoquées parce que l'accès prioritaire ne fait que faire passer en premier nos ordres, dans la queue d'attente. Quoi qu'il en soit, la priorité suivante est que l'exploitant commercial exécute les ordres donnés d'urgence, ce qu'il fera de son propre chef parce que c'est un bon marché.
À l'égard de tous ces ordres, qu'ils viennent de la GRC, du SCRS, des Affaires étrangères ou de la Défense nationale, la voie normale à suivre est d'acheter les images sur une base commerciale. Le pouvoir est prévu au cas où il y aurait un conflit entre les commandes commerciales et celles qui sont d'une grande importance pour le pays.
Le sénateur Stollery : Je sais que le projet de loi à l'étude a suscité un certain intérêt. Quelle est la zone de couverture de RADARSAT-2?
M. Baines : Tout d'abord, précisons que RADARSAT-2 est un satellite qui tourne en orbite basse autour de la Terre. Il se déplace constamment par rapport à la planète. Il n'est pas stationnaire au-dessus d'un point d'où il peut observer le tiers de la planète. Nous pouvons choisir différents modes de faisceau pour illuminer certaines régions de la Terre aussi petites qu'une bande de 20 kilomètres de largeur.
Le sénateur Stollery : De quelles latitudes parle-t-on?
M. Baines : Les latitudes vont de 0 o, c'est-à-dire de l'équateur, jusqu'aux deux pôles, presque.
Le sénateur Stollery : Je vous remercie.
Le sénateur Di Nino : Le projet de loi à l'étude m'a rappelé à quel point nous nous rapprochons de la dictature orwellienne prédite il y a si longtemps. Nous voici à l'ère du « Big Brother », version haute technologie. Mes collègues ont exprimé de graves réserves à l'égard de la surveillance de ces pouvoirs et des effets de ce genre de systèmes. Ils m'inquiètent, moi aussi, particulièrement les pouvoirs ministériels absolus qui sont conférés dans ce projet de loi et ce qui semble être un manque de contrôles dans le régime de reddition de comptes.
Il est curieusement troublant de voir que tout se trouve entre les mains de l'entreprise privée. Nous allons acheter ces services de l'entreprise privée. Il est question d'« activités spatiales de télédétection », un bel euphémisme pour de l'éventuel espionnage dont l'exécution est confiée à l'entreprise privée. Cela provoque un certain malaise chez moi.
Monsieur McTeague, aimeriez-vous commenter cette question?
M. McTeague : Sénateur Di Nino, je vous remercie d'en avoir parlé. La question a été soumise à la commissaire à la protection de la vie privée qui n'y a pas vu de problème. Il est clair que la Charte canadienne des droits et des libertés et les lois qui touchent à la protection de la vie privée s'appliquent à cette mesure législative et à ce genre particulier de technologie.
J'aimerais souligner un point au sujet de la délégation. Lorsqu'il est question de la délégation de pouvoir d'un ministre à un sous-ministre, il ne faut pas s'en tenir qu'au projet de loi à l'étude. Cette délégation est prévue dans la plupart de nos lois.
L'ironie, dans ce cas-ci, c'est que cette loi particulière cerne la délégation de pouvoir ou y injecte une certaine discipline, en ce sens qu'elle précise à qui le pouvoir peut être délégué. Les questions soulevées par la tradition et les usages dans d'autres domaines — il faudrait peut-être examiner de plus près d'autres lois si c'est l'approche orwellienne qui vous inquiète — sont des enjeux relatifs à la protection de la vie privée. La question a également été soulevée dans l'autre endroit, qui l'a réglée. À mon avis, il y a suffisamment de dispositions pour protéger la vie privée. Parallèlement, le projet de loi représente une importante fusion entre le public et le privé, le rassemblement de la technologie et des synergies requises pour permettre au Canada de conserver son leadership dans les années à venir.
Je ne souhaite pas revenir sur les questions soulevées par les autres genres de satellite qui pourraient être vus comme étant plus intrusifs. Ce n'est pas le cas de ce satellite. Il prend des images et peut le faire malgré du brouillard et d'autres genres d'obstacles. Il peut servir à évaluer, par exemple, la qualité des sols ou leur érosion, comme l'a laissé entendre tout à l'heure le sénateur Downe, ou à détecter des changements sur la plateforme continentale de l'Arctique. Ses grandes possibilités nous ouvriront des portes nombreuses et essentielles plus tard.
Paul Chapin, directeur général, Secteur de la sécurité internationale, Affaires étrangères et du Commerce international : Avec votre permission, j'aimerais renchérir sur ce que vient de dire l'honorable Dan McTeague. Sénateur, il s'agit d'un outil puissant. Cela ne fait aucun doute. C'est pourquoi, à certains égards, nous ne faisons que commencer à l'encadrer, sur le plan législatif et réglementaire. À mesure qu'évolue la technologie, qu'elle passe du public au privé, l'intérêt national commande qu'on fasse en sorte qu'il est utilisé à des fins légitimes. Il peut tout aussi bien servir à faire le bien qu'à faire le mal.
Nous essayons de faire trois choses. Tout d'abord, nous voulons nous assurer que le satellite est à notre disposition, à la disposition du gouvernement et des Canadiens, pour la protection de nos troupes à l'étranger : nous voulons être en mesure de surveiller les activités dans les régions difficiles à atteindre, pour le compte de nos alliés, de l'OTAN ou de l'ONU — l'ONU pourrait nous demander de l'aider à comprendre ce qui se passe dans certaines régions du monde. Voilà le premier objectif.
Deuxièmement, nous voulons éviter que d'autres l'utilisent à mauvais escient, d'où le droit de regard. Comme M. Baines l'a dit, il est important d'avoir ce pouvoir, mais selon nous, il ne sera pas utilisé souvent. Par exemple, les États- Unis ont une loi semblable depuis 1992 et n'ont jamais invoqué le droit de regard. Je ne sais pas ce qu'est l'expérience du Royaume-Uni. Les Britanniques ont un projet semblable en marche et je doute qu'ils aient eu à invoquer ce pouvoir souvent, ou même une seule fois.
Troisièmement, nous avons l'obligation internationale de contrôler cette activité. Nous faisons donc en sorte de respecter le Traité sur l'espace extra-atmosphérique, qui nous oblige à contrôler les activités des Canadiens dans ce secteur, ainsi que nos relations bilatérales avec les États-Unis. Nous essayons de trouver un équilibre et d'instaurer un mécanisme pour protéger les intérêts nationaux sans toutefois compromettre les énormes avantages commerciaux que cette technologie émergente représente pour le Canada et les Canadiens. Voilà l'intention de la loi et la voie que nous espérons pouvoir emprunter.
Le sénateur Di Nino : Vous dites vouloir trouver un équilibre, et c'est précisément là ma question. Vous dites que le droit de regard serait rarement invoqué. On pourrait très bien s'en servir après une tragédie. Vous dites également qu'on pourrait l'utiliser à bon ou à mauvais escient. Je comprends et j'en vois les avantages. C'est ce que j'ai affirmé devant le Sénat lorsque le sujet a été abordé.
Je ne suis toujours pas convaincu que les réponses données soient rassurantes — du moins, pour moi. Il ne fait aucun doute qu'il n'y a aucune intention malicieuse et que nous allons tous essayer de faire de notre mieux. Je redoute encore profondément les abus et les mauvais usages, en particulier par une entreprise privée qui pourrait être plus motivée par le profit qu'une entité publique. Par conséquent, monsieur McTeague, je ne suis pas satisfait des réponses.
Voyons s'il est possible d'aborder la question sous un angle légèrement différent. On prévoit un examen occasionnel, mais on dit que le Parlement recevra un rapport seulement aux cinq ans. Pourquoi ne pas lui donner un rapport à chaque examen occasionnel pour qu'il puisse avoir un aperçu de l'impact de cette nouvelle technologie en temps opportun?
Je vais poser ces deux questions ensemble. Puisqu'il s'agit d'une loi-cadre — une mesure que nous devrions éviter le plus possible, mais qui est utilisée de plus en plus —, est-ce que vous, ou le ministre, allez nous donner la garantie écrite que le règlement sera soumis à l'examen du Parlement avant d'être édicté, et non après?
M. McTeague : Monsieur le sénateur, êtes-vous en train de dire que l'examen par le Parlement devrait avoir lieu plus souvent qu'aux cinq ans, comme il est proposé, et qu'il devrait être plus périodique?
Le sénateur Di Nino : Je crois que ce serait un pas dans la bonne direction.
M. McTeague : En principe, je n'y vois aucun problème. Cela semble être la norme pour beaucoup d'autres lois, mais je comprends que ce cas-ci est particulier. Je sais que la situation est un peu plus stable ici qu'elle ne l'est à la Chambre des communes ces jours-ci.
Le sénateur Di Nino : N'en soyez pas si sûr.
M. McTeague : Compte tenu du volume de travail, par exemple, de notre comité des affaires étrangères et de la Chambre, qui vient avec les nombreuses motions et les divers enjeux partout dans le monde, il est souvent difficile pour les parlementaires de réexaminer un dossier dans un intervalle plus court que cinq ans. Cela pourrait créer certaines difficultés. M. Chapin a peut-être d'autres commentaires à faire à ce sujet.
M. Chapin : Permettez-moi d'ajouter une chose. Le cycle annuel de reddition de comptes du gouvernement du Canada exige que les ministères et les organismes gouvernementaux soumettent au Parlement des rapports annuels sur leurs plans et leurs priorités pour l'année qui vient ainsi que des rapports annuels sur le rendement. Selon la diligence que l'on met à élaborer ces documents, le Parlement a habituellement une bonne idée de ce qui se passe dans chaque ministère et organisme, presque en tout temps. Je ne vois pas pourquoi, lorsqu'on leur soumet les budgets ministériels, etc., les sénateurs et les députés ne pourraient pas examiner plus en profondeur les parties de ces rapports qui touchent à ce type d'activité.
Le sénateur Di Nino : Monsieur le président, permettez-moi de traiter de cette question précise. J'ai parlé du projet de loi où il est dit qu'un examen sera fait « à l'occasion » — je crois que c'est l'expression qui est utilisée. On dit ensuite qu'un rapport sera déposé tous les cinq ans.
Si cet examen est fait, si ce rapport est préparé, pourquoi devrais-je fouiller et perdre du temps et de l'énergie à chercher une aiguille dans une botte de foin? Si le rapport existe, pourquoi ne pas le présenter au Parlement, puisqu'il s'agit d'une question aussi critique que le développement de cette technologie?
Le président : Je sais que le sénateur Carney veut apporter une précision.
Le sénateur Di Nino : Puis-je avoir une réponse?
Le président : Certainement. Sénateur Corbin, puis sénateur Carney.
Le sénateur Carney : Ce serait plus rapide si j'étais la suivante.
Le président : Le sénateur Corbin est le prochain sur ma liste, madame le sénateur. J'ai été très raisonnable avec vous au début.
M. Chapin : Quand on parle d'un examen périodique, d'un examen tous les cinq ans, cela implique, je crois, une étude complète de ce qui s'est passé au cours des quatre années et demie qui viennent de s'écouler, pour que le rapport soit prêt au bout de cinq ans. Cet exercice suppose habituellement des audiences, la comparution de témoins, etc. M. McTeague disait, je crois, que cela pouvait être intimidant si l'examen était fait plus souvent qu'aux cinq ans. Quoi qu'il en soit, l'examen par les parlementaires est possible en tout temps. Je ne crois pas qu'on s'attende à ce que les sénateurs ou les députés examinent personnellement ces choses. Les fonctionnaires ont l'obligation de répondre aux questions lorsqu'on les interroge.
Le président : Ils ont l'obligation de répondre aux questions lorsque le budget de leur ministère est soumis aux comités.
Le sénateur Corbin : J'ai quelques questions que vous pourriez qualifier de techniques. Quelle est la résolution ou la définition d'un satellite aujourd'hui? Quel est le plus petit objet pouvant être identifié?
M. Baines : RADARSAT-2 aura une résolution de trois mètres. C'est sa performance de base. Mis à part les satellites radars commerciaux, les États-Unis délivrent des licences pour des satellites qui ont une résolution aussi fine que 50 ou 60 centimètres. En général, les satellites qui sont en orbite actuellement ont une résolution d'un mètre. Avec pareille définition, les gens sur le vert d'un terrain de golf paraissent comme une ombre : ils ne paraissent pas comme des individus. Si des personnes paraissent dans l'image, ce sont des foules. Une telle résolution vous permet de détecter des foules, mais non pas des individus.
Le sénateur Corbin : C'est possible d'utiliser ces satellites pour surveiller un individu, n'est-ce pas?
M. Baines : Vous ne verrez pas une personne. Au mieux, vous verrez une tache, une ombre dans l'image, s'il s'agit d'un beau terrain de football, d'un champ d'herbe ou quelque chose de semblable. Vous pouvez voir une foule se baigner dans le Gange lors d'une importante cérémonie, par exemple, mais vous ne pouvez pas distinguer les personnes; vous ne pouvez certainement pas reconnaître les gens vus de l'espace extra-atmosphérique.
Le sénateur Corbin : M. McTeague a peut-être répondu à cette question lorsque je me suis absenté pendant quelques minutes. L'industrie peut-elle s'accommoder de ce projet de loi et de son règlement?
M. McTeague : Le comité permanent de la Chambre a entendu plusieurs témoins. L'industrie ne semble pas inquiète de cette mesure. En fait, elle s'en est réjoui et l'a encouragée. Cet encouragement s'ajoute à la décision de mettre de l'avant une initiative publique-privée découlant d'une loi qui date déjà de 1999. L'industrie est très en faveur de cette mesure et de sa mise en œuvre, pourvu qu'elle soit appliquée pour des raisons très précises.
Le sénateur Corbin : Que ferait la GRC, dans le cadre de la Loi sur les infractions en matière de sécurité, si elle obtenait des renseignements accessoires quelconques, mais plus précisément des renseignements sur le trafic de stupéfiants ou d'autres activités de cette nature?
M. McTeague : Sénateur, s'il s'agissait de contrebande en haute mer ou du mouvement de conteneurs, je dirais que ce serait là une situation où le droit de regard ou l'accès prioritaire pourrait être invoqué, si la sécurité nationale était en jeu. Je dirais que l'intention est aussi, comme l'a expliqué le lieutenant-colonel Johnson, de protéger le personnel canadien dans d'autres circonstances. Je vais laisser M. Mann ou M. Baines vous parler plus précisément de la GRC ou de la répression criminelle.
M. Mann : J'ajouterais que la GRC peut obtenir des données autrement que par des décrets de droit de regard. Elle peut acheter des données comme n'importe qui d'autre, en tout temps.
Le sénateur Carney : J'aimerais obtenir une précision à la suite de la question que le président a posée sur le fonctionnement de RADARSAT-2. Monsieur Baines, vous nous avez dit qu'une fois lancé en orbite, RADARSAT-2 couvrira simultanément le pôle Nord et le pôle Sud. C'est ce que j'ai compris de votre réponse : il sera lancé en orbite à l'équateur.
M. Baines : Permettez-moi d'apporter une précision. Les satellites d'orbite basse terrestre ont deux types de couverture. D'abord, il y a la couverture instantanée qui vient de votre faisceau. C'est une petite région. Sa largeur peut varier de 20 à 500 kilomètres, avec diverses résolutions. C'est une longue bande. À mesure que le satellite se déplace au- dessus de la Terre, il crée cette longue bande, dont la largeur varie selon le faisceau que vous choisissez. Instantanément, c'est la région que vous observez.
L'autre type de couverture à laquelle vous devez penser quand il s'agit de satellites de télédétection, c'est la région à laquelle vous pouvez accéder au-dessus du globe. Comme il s'agit d'un satellite d'orbite basse terrestre, un satellite héliosynchrone, et donc pas exactement en orbite polaire, il vous permet de voir presque tout le globe, sauf les régions qui se trouvent tout près des pôles, selon que votre capteur regarde à gauche ou à droite de sa trajectoire.
Il y a donc deux types de couverture. Il y a d'abord le faisceau, et cette couverture est petite. Il y a ensuite l'accès, la capacité de voir presque toute la planète.
Le sénateur Carney : Je voulais clarifier cet aspect, parce que j'avais cru comprendre que vous parliez des deux pôles. Compte tenu de ce que vous avez décrit, j'ai cru qu'il était nécessaire de clarifier ce que vous envisagiez.
Le sénateur Corbin : J'ai une question plus générale. Je regarde les notes du secrétaire parlementaire. Au dernier paragraphe, il dit :
[Français]
Ils doivent ériger la structure administrative de la loi à même les budgets actuels.
Dois-je comprendre qu'il n'y aura pas de fonds supplémentaires pour la mise en vigueur de cette loi et que toutes ces dispositions seront mises en application à partir de budgets déjà connus?
M. Mc Teague : Nous espérons que non, mais actuellement l'argent déjà versé servira à la construction de ce satellite. Nous prévoyons évidemment différentes mesures dans le cas de modifications et dans le cas d'investissements provenant davantage du secteur privé.
[Traduction]
Le sénateur Corbin : Par suite d'un décret du gouvernement ou d'autres mesures, vous vous attendez à ce qu'une indemnité soit versée aux propriétaires des satellites et aux autres parties qui pourraient être touchées par l'application du droit de regard ou des interventions de cette nature. Cette mesure s'appliquerait-elle aux chercheurs universitaires, aux entreprises qui effectuent des relevés topographiques, par exemple?
M. McTeague : Les renseignements de cette nature pourraient être offerts à un certain prix aux universités et à d'autres organisations. On a discuté du rôle des provinces, mais cela s'est fait par le passé. Il est clair qu'on procède selon un système de recouvrement des coûts. L'utilisation de l'accès prioritaire est limitée, tout comme le droit de regard est invoqué dans des circonstances bien précises.
Le sénateur Corbin : Vous ne prévoyez pas d'effets négatifs sur ces groupes?
M. McTeague : Je ne le crois pas, mais je m'en remets à mes collègues à ce sujet. Certaines choses peuvent peut-être leur venir à l'esprit. Je ne vois rien de la sorte.
Le sénateur Corbin : J'en prends bonne note.
Le président : Le sénateur Mahovlich a une question; puis, si le comité est d'accord, nous pourrions procéder à l'étude article par article du projet de loi.
Le sénateur Mahovlich : Je vois que nous avons conclu un accord avec les États-Unis. Avons-nous des accords avec d'autres pays?
M. McTeague : À ma connaissance, non, monsieur le sénateur.
Le sénateur Mahovlich : Nous utilisons pourtant leur espace — nous survolons la Russie, n'est-ce pas?
M. McTeague : Nous pourrions survoler de nombreuses autres régions du monde. Ce n'est pas seulement le Canada et les États-Unis. La portée d'un satellite est...
Le sénateur Mahovlich : Pour moi, l'espace est comme l'océan. Il recouvre le monde entier. Il n'existe pas d'organisation mondiale des pêches, même si je crois que pareille organisation devrait exister, mais il en faudrait une aussi pour l'espace, puisque nous allons couvrir le monde.
M. McTeague : Monsieur le sénateur, il ne s'agit pas d'un satellite stationnaire. Il est en mouvement, tout comme la Terre. Il a la capacité, selon les besoins des clients et les besoins gouvernementaux éventuels... Son fonctionnement ressemblera beaucoup à celui de RADARSAT-1.
M. Chapin : Il existe un accord général qu'on appelle le Traité sur l'espace extra-atmosphérique de 1967.
Le sénateur Mahovlich : Est-ce suédois?
M. Chapin : Le Traité sur l'espace extra-atmosphérique.
Le président : C'est un traité, sénateur.
M. Chapin : Je ne sais pas combien de membres de l'ONU l'ont signé, mais j'imagine que ce sont la plupart d'entre eux.
Le président : Merci beaucoup. Il me semble que nous avons fait le tour du sujet. Le comité est-il d'accord pour étudier le projet de loi C-25 article par article?
Des voix : D'accord.
Le sénateur Di Nino : Avons-nous besoin de la présence des témoins, monsieur le président?
Le président : Oui, au cas où il y aurait des questions.
Le président : Le titre et l'article 1 sont-ils réservés?
Des voix : D'accord.
Le président : J'aime toujours procéder article par article parce que nous sommes certains de bien faire les choses ainsi.
Le sénateur Carney : J'attends les directives de mon chef.
Le sénateur Di Nino : Nous avons convenu de faire rapport de ce projet de loi demain.
En général, je crois que le sénateur Downe et moi-même, de même que le sénateur Carney, avons fait part de certaines préoccupations qui devraient être exprimées par quelques commentaires.
Le président : Je n'y vois aucune objection.
Des voix : D'accord.
Le sénateur Di Nino : Nous n'en aurons peut-être pas plus de pouvoirs, mais il y a une certaine valeur morale à cela.
Le président : Je n'ai aucune objection, monsieur le sénateur. Nous pouvons le faire.
Le sénateur Downe : Selon le niveau d'intérêt, nous pouvons soumettre un rapport ou proposer des amendements.
Le président : Si nous proposons des amendements, alors le projet de loi est essentiellement...
Le sénateur Downe : Il serait renvoyé à la Chambre des communes.
Le président : Qui ne sera plus là dans quelques jours.
Le sénateur Carney : Est-ce vrai? Écoutez ce qu'il nous dit; nous ne serons plus ici dans quelques jours. Merci.
Le sénateur Corbin : Et si nous convenons de faire rapport du projet de loi, mais en ajoutant des commentaires?
Le président : Je croyais que nous devions faire rapport en ajoutant des commentaires.
Le sénateur Corbin : C'est la façon la moins malicieuse de faire les choses.
Le président : Oui.
Le sénateur Downe : Je ne veux pas retarder la réunion, mais je vous ai déjà fait part de mes réserves. Par les temps qui courent, l'obligation de rendre compte et la responsabilité ministérielles devraient être à l'avant-plan. J'ai certaines réserves concernant la délégation de pouvoirs.
J'ai entendu les commentaires des témoins. Même s'il s'agissait de bons commentaires, ils ne m'ont pas fait changer d'opinion. J'estime que les ministres ou le solliciteur général, qui est aussi un ministre, sont disponibles et peuvent être joints en tout temps. Le fait de pouvoir joindre les gens rapidement — cet argument est fondé sur la présomption que les sous-ministres sont disponibles, mais que les ministres pourraient ne pas l'être. Que faire alors? Je crois que les ministres devraient continuer de détenir les pouvoirs et que ceux qui sont responsables devraient assumer leurs responsabilités.
Je pense que l'article 21 permet une trop grande délégation aux dirigeants d'organismes qui ont un intérêt direct dans la collecte de données. Je ne parle pas ici précisément du solliciteur général actuel ni du commissaire en poste de la GRC. Je veux que cela soit bien clair. Cela vaut pour toutes les personnes qui occuperont ces postes. Il se pourrait que des titulaires de ces postes recueillent cette information, mais que, dans cinq ans, ils aient quitté leurs fonctions lorsque le Parlement effectuera un examen de la présente loi. Je crois qu'il s'agit là d'une lacune que présente cette mesure législative. Le comité devrait se pencher là-dessus. Je suis prêt à proposer un amendement, si cela suscite un intérêt.
Le sénateur Carney : Je serais prête à appuyer cet amendement. Je tiens à souligner que trois ministres sont concernés. Si les trois ministres ne sont pas disponibles, je dirais que d'attendre le sous-solliciteur général, ce n'est pas acceptable. Si vous voulez proposer un amendement, je vais l'appuyer.
Le président : Comme il est 19 h 20, je propose que nous réfléchissions à cela jusqu'à la séance de demain.
Le sénateur Prud'homme : Non, un instant.
Le président : Nous pouvons faire cela.
Le sénateur Prud'homme : Je crois que le sénateur Carney a été claire. Elle a déclaré qu'elle appuierait le sénateur Downe.
Le président : Alors...
Le sénateur Prud'homme : Un instant. Je crois qu'il faut que le sénateur Downe propose l'amendement, car si nous attendons à demain — il y a là un lapsus — je suis d'avis que la Chambre sera dissoute vendredi soir, et non pas lundi soir.
Ils ont fait valoir un bon point. Le sénateur Carney a formulé un très bon commentaire. Je ne vois pas pourquoi nous ne devrions pas étudier cet amendement ce soir. Il est encore possible que ce projet de loi soit adopté, mais s'ils ne sont pas satisfaits — deux membres ont exprimé des préoccupations. J'ai aussi des doutes, et vous le savez; je ne voulais pas participer.
Je suis influencé par l'opinion du sénateur Downe. Je sais qu'il a fait du bon travail à ce sujet. Si le sénateur Downe veut faire une suggestion — vous demander ce soir de communiquer avec eux dans la mesure du possible — si nous attendons à demain, nous serons déjà jeudi. Nous pourrions vous demander ce soir de communiquer avec ces personnes qui pourraient ou devraient être ici — elles sont à Ottawa de toute façon. Peut-être que cela faciliterait votre réflexion si le sénateur Downe formulait sa suggestion, qui pourrait être appuyée par le sénateur Carney, d'une manière qui vous aiderait à expliquer la question à votre caucus demain matin. Les ministres sont ici, et nous pourrions, à court préavis, adopter ce projet de loi article par article, sans amendement.
Le sénateur Corbin : Je peux être en désaccord avec les propos qui sont tenus; c'est mon droit. Nous pourrions très bien aller de l'avant avec l'amendement du sénateur Downe, appuyé par le sénateur Carney, mais la majorité des membres du comité pourraient se prononcer contre. Cela pourrait se produire, soyons réalistes.
Les préoccupations soulevées par le sénateur Downe ne me posent aucun problème. J'ai siégé, dans le passé, à un certain nombre de comités, présidés par le sénateur Kelly, qui ont été saisis de questions de sécurité touchant la GRC, la Défense nationale, le SCRS et d'autres organismes. Ces mêmes questions ont été soulevées. Par conséquent, les dispositions du projet de loi concernant la délégation ne me posent aucun problème. Elles ne me préoccupent aucunement.
Le sénateur Carney : J'ai proposé une formulation pour l'amendement de l'article 21.
Le sénateur Corbin : D'autres membres pourraient être en désaccord.
Le sénateur Carney : J'ai une formulation à proposer; puis-je la présenter? Je propose que l'article 21 soit modifié pour restreindre la délégation des pouvoirs aux trois ministres nommés dans la loi ou à tout autre conseiller privé tel qu'énoncé dans la loi.
Le sénateur Downe : Ma seule préoccupation, c'est que les secrétaires parlementaires sont maintenant des conseillers privés. Voulez-vous dire un ministre?
Le sénateur Carney : La loi mentionne un conseiller privé et elle ne restreint pas la délégation des pouvoirs aux ministres. L'article 3 se lit comme suit :
Le gouverneur en conseil peut désigner tout membre du Conseil privé de la Reine pour le Canada à titre de ministre pour l'application de la présente loi.
Vous pourriez donc envisager un amendement qui stipule que l'article 21 soit modifié pour restreindre la délégation des pouvoirs au ministre de la Défense nationale, au ministre des Affaires étrangères et au solliciteur général, ou à tout autre conseiller tel qu'énoncé par la loi, car l'article 3 prévoit qu'un conseiller privé soit désigné par le gouverneur en conseil. Les pouvoirs seraient délégués aux personnes mentionnées dans la loi.
Le président : Honorables sénateurs, je suis en faveur de l'ajournement de la séance jusqu'à demain.
La séance est levée.