Délibérations du comité sénatorial permanent des
Droits de la personne
Fascicule 4 - Témoignages
OTTAWA, le lundi 7 février 2005
Le Comité sénatorial permanent des droits de la personne se réunit à 16 heures aujourd'hui pour examiner, en vue d'en faire rapport, les obligations internationales du Canada relativement aux droits et libertés des enfants.
Le sénateur Landon Pearson (vice-présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La vice-présidente : Soyez les bienvenus à cette séance du Comité sénatorial permanent des droits de la personne. Nous examinons la Convention relative aux droits de l'enfant et d'autres instruments internationaux concernant ces droits, ainsi que leur mise en œuvre au Canada.
Nous rentrons d'un voyage très intéressant de Genève à Stockholm où nous avons pu observer le Comité des droits de l'enfant s'entretenir avec des intéressés de l'évaluation des différents pays en fonction de leurs rapports, notamment. En Suède, on s'est doté d'une stratégie concrète pour la mise en vigueur de la Convention relative aux droits de l'enfant qui relève d'un service particulier au sein du gouvernement suédois. Il y a aussi un ombudsman. Cela a été très informatif pour nous, car la Suède, dont j'ai toujours cru qu'elle était un État unitaire, a un double système de loi et la Convention relative aux droits de l'enfant et les autres conventions internationales n'y ont pas force de loi automatiquement. Elles doivent d'abord faire l'objet d'une mesure législative nationale, comme ici. De plus, les municipalités et comtés jouissent de nombreux pouvoirs et j'ai constaté, avec un certain étonnement, qu'on y a là-bas les mêmes problèmes que nous connaissons avec les provinces. Ce n'est pas ainsi que je voyais la Suède.
Nous avons eu des échanges très animés et ouverts. Il y a en Suède un comité sur les enfants, un réseau multipartite au sein du Parlement, qui se penche sur ce dossier depuis déjà plusieurs années. Nous avons rencontré les représentants des sept partis du gouvernement suédois, ce qui a été extrêmement intéressant. Cela a été une réunion très intéressante et utile. Elle nous a permis de formuler certaines des questions que nous vous poserons, madame Covell, du Collège universitaire du Cap Breton, Centre du droit des enfants.
Nous écouterons vos remarques liminaires puis il y aura une période de questions.
Mme Katherine Covell, professeure, Collège universitaire du Cap Breton, Centre du droit des enfants : Merci de m'avoir invitée et merci de vous intéresser à cet important sujet. J'aurais bien aimé vous accompagner en Suède.
On m'a demandé de limiter mes remarques à 10 minutes. Je lirai donc mes notes. Étant professeur à l'université, j'ai l'habitude de prendre la parole pendant 50 minutes.
J'ai choisi d'aborder certaines questions aujourd'hui en fonction de mon expérience de professeure, chercheure et éducatrice. Les recherches que je fais et les cours que je donne à l'université s'inscrivent dans le contexte de la Convention relative aux droits de l'enfant.
Deux choses deviennent de plus en plus claires à mes yeux depuis deux ans. Premièrement, dans l'ensemble, le Canada a un assez bon bilan en matière de respect des droits de ses enfants. Ne l'oublions pas. Deuxièmement — et c'est ce sur quoi j'insisterai aujourd'hui — 15 ans après la ratification de la convention, on en sait encore très peu à l'échelle du pays sur l'existence de la convention et ce qu'elle signifie. Il n'y a pas non plus de contrôle de sa mise en œuvre. Comme chercheure, je m'inquiète particulièrement de l'absence de critères pour décrire la vie des enfants canadiens. Manifestement, ces lacunes sont, à mon avis, interdépendantes. Si nous réalisons des progrès au premier chapitre, nous en réaliserons inévitablement dans les autres. J'aborderai brièvement chacune de ces trois questions.
En ce qui concerne la sensibilisation, l'article 42 de la Convention exige du Canada qu'il fasse connaître la teneur de la convention aux adultes et aux enfants. On a donné de nombreuses séances de formation, on a publié des brochures, on a créé des sites Web et lancé des initiatives dans le cadre de la Journée nationale de l'enfant, mais les enquêtes nationales ont toutes démontré un manque de connaissance des dispositions de la convention même chez les personnes qui travaillent avec les enfants ou auprès des enfants. Ce qui est pire, à mon sens, c'est que les mythes sur les droits des enfants sont généralisés. Comme les gens ne comprennent pas la convention, ils affirment que les enfants ont trop de droits. Ils croient qu'informer les enfants de leurs droits mènerait au chaos ou estiment tout simplement que les droits des enfants canadiens sont peu importants.
Je ne parle pas seulement du grand public, mais bien des enseignants, des avocats, des policiers, de certains des députés et, malheureusement, de certains juges.
Les propos qu'a tenus la juge en chef McLachlin pendant les délibérations de la Cour suprême sur la constitutionnalité de l'article 3 du Code criminel témoignent bien du peu d'importance qu'on accorde à l'engagement du Canada à l'égard des droits des enfants. Elle a non seulement fait fi des recommandations répétées du Comité des droits de l'enfant de l'ONU, mais a aussi déclaré que l'intérêt supérieur de l'enfant n'est « ni promordial ni fondamental dans la notion de justice de notre société ».
Du point de vue juridique, elle a probablement raison et son affirmation est probablement justifiable, mais étant donné que l'intérêt supérieur de l'enfant est le principe qui sous-tend toute la convention, le fait pour le Canada de ratifier la convention l'oblige à présumer que l'intérêt supérieur de l'enfant est primordial et fondamental dans nos convictions en matière de justice sociale. Le comité des droits de l'enfant des Nations Unies a à maintes reprises réclamé l'inclusion du droit de l'enfant à l'instruction dans les programmes scolaires et de formation professionnelle. Je sais que cela soulève des difficultés de compétence, mais nous savons que des accords sont possibles. Le cadre multilatéral sur la garde d'enfants en est un excellent exemple. La question du droit de l'enfant à l'instruction est beaucoup trop importante pour qu'on l'exclue.
Nous faisons des progrès. Je suis ravie de vous apprendre que la Nouvelle-Écosse enseigne les droits de l'enfant au niveau élémentaire et, hier, j'ai appris que ça figure dans le programme du premier cycle du secondaire aussi. De plus en plus d'universités incluent aussi les droits de l'enfant dans leurs cours, mais elles restent l'exception.
Comme les enfants ne connaissent pas leurs droits, il leur est difficile de savoir quand ces droits sont violés. Du coup, il est d'autant plus difficile pour eux d'obtenir réparation. Ceux qui travaillent pour les enfants ou auprès des enfants et qui ne connaissent pas les droits des enfants n'ont pas le cadre cohérent qu'il leur faut pour les décisions et la planification et ne disposent pas de critères uniformes pour évaluer le succès de leurs programmes.
Soit dit en passant, il importe de noter que les études qui ont été faites ont toutes démontré les avantages de la sensibilisation à la convention. Les enfants et les adultes qui connaissent la convention respectent beaucoup plus les droits qui y figurent.
Je traiterai brièvement maintenant du contrôle. Nous savons sans doute tous que le comité des droits de la personne de l'ONU a recommandé la création d'un mécanisme de contrôle permanent, ce qui est très important pour deux raisons fondamentales. Premièrement, un tel mécanisme permet de rédiger les rapports exigés par le comité de l'ONU. Il est très difficile pour les provinces et les territoires de rédiger des rapports exhaustifs sur la situation des enfants au Canada sans contrôle continu et sans personnel qui se consacre entièrement à ce contrôle. Deuxièmement, un contrôle systématique permettrait non seulement de recenser les violations, mais aussi les politiques, les programmes et les pratiques respectueux des droits des enfants. Ces informations pourraient être communiquées à toutes les administrations et nous indiqueraient où des mesures sont nécessaires pour réduire les disparités régionales.
En tant que chercheure, je me préoccupe beaucoup de la mesure des résultats. Il y a quelques années, j'ai rédigé le rapport des ONG à l'intention du Comité des droits de l'enfant de l'ONU, et encore plus maintenant que je fais des recherches en vue de rédiger le rapport sur l'Amérique du Nord dans le cadre de l'étude onusienne sur la violence à l'endroit des enfants, j'ai été frappée par l'absence de deux choses au Canada : Nous n'avons pas de données nationales non regroupées sur les enfants et nous n'avons pas non plus d'évaluation des programmes.
Encore une fois, des programmes ont été réalisés au cours des dernières années. Nous avons certains documents statistiques. Nous avons le profil instantané d'une journée des Autochtones au sein du système de justice pénale, qui est très utile, l'étude de 2004 sur la violence familiale, qui est très utile aussi et l'étude canadienne sur l'incidence des signalements de cas de violence et de négligence envers les enfants. Toutefois, nous n'avons pas de données nationales exhaustives et non regroupées et nous avons très peu d'évaluations de programme.
Trois choses m'inquiètent à cet égard. Tout d'abord, il n'y a pas de normes nationales concernant les données qui doivent être consignées et les rapports. Ce manque se fait particulièrement sentir quand nous tentons de trouver des informations sur les blessures que subissent les enfants qui travaillent, par exemple, sur les sévices infligés aux enfants, sur les décès d'enfants découlant de sévices ou sur les enquêtes portant sur la mort d'un enfant.
De plus, et c'est associé à cela, il n'y a pas de définition normalisée pour tout le pays, de définition de déficience ou de négligences psychologique, par exemple. Les statistiques sur la déficience incluent parfois les troubles de comportement, mais pas toujours. La définition de négligence psychologique influe parfois l'exposition à la violence conjugale, mais pas toujours. Il est donc difficile de faire des comparaisons entre provinces et territoires ou de comprendre le sens de ces données.
Je vous donne un autre exemple : Les statistiques sur l'incidence ne tiennent pas toujours compte du nombre d'enfants. Quand on parle du nombre de cas prouvés de sévices contre les enfants, par exemple, on ne peut pas toujours préciser le nombre d'enfants qui ont été victimes de ces sévices, car on sait que certains enfants font l'objet de signalements répétés aux sociétés d'aide à l'enfance. D'ailleurs, le comité d'examen des décès d'enfants de l'Ontario a récemment signalé que dans 54 p. 100 des cas sur lesquels il enquêtait, il y avait eu au moins un signalement à la Société d'aide à l'enfance avant le décès de l'enfant.
Cela a une incidence sur les politiques et les interventions. Toujours en matière de violence à l'égard des enfants, nos interventions varieront selon que 100 enfants sont victimes chacun une fois de sévices ou que 10 enfants sont victimes 10 fois de violence. Il nous faut ces informations.
Il est aussi très préoccupant que nous n'ayons pas de données non regroupées; cela signifie qu'il nous manque énormément d'information, surtout sur les enfants les plus vulnérables. Pensons aux enfants de la rue, par exemple. Nous avons beaucoup de données estimatives provenant surtout des grands centres urbains, mais nous n'avons pas de statistiques sur l'âge, le sexe ou l'origine ethnoculturelle. Nous ne savons pas non plus combien d'enfants de la rue sont handicapés ou avec quel handicap ils vivent. Nous ignorons combien sont autochtones. Nous ne savons pratiquement rien des enfants de la rue qui sont des lesbiennes, des homosexuels ou transgenres. Nous en savons très peu sur ceux qui sont dans le commerce du sexe ou qui sont exploités sexuellement. Nous ignorons combien d'enfants de la rue sont séropositifs et qui ils sont. Je pourrais poursuivre ainsi pendant une demi-heure.
Pensons aussi aux enfants qui travaillent. Combien sont-ils? Quel genre d'emploi ont-ils? Quel genre de travail font- ils officiellement et officieusement? Combien d'entre eux sont blessés ou meurent au travail? Nous n'avons aucune de ces données.
Et qu'en est-il des enfants handicapés? Bien des rapports nous disent qu'ils sont davantage victimes de sévices que les autres enfants, mais nous ne savons rien de la prévalence ou de la nature de ces sévices. Nous ignorons ce qui se passe dans les familles ou les établissements qui dispensent des soins aux enfants handicapés.
Je m'inquiète aussi du peu de données dont nous disposons découlant d'évaluation de programme au Canada. Les programmes de prévention et d'intervention qui existent — il y en a beaucoup et il y en a de très bons — sont-ils efficaces? Quelles familles, enfants ou collectivités aident-ils? Quels aspects du développement de l'enfant servent-ils à améliorer? Ces programmes sont-ils à court terme ou à long terme? Les ressources qui y ont été affectées ont-elles été bien dépensées? Ces programmes ont-ils suffisamment ou trop de ressources? Nous ne pouvons répondre à aucune de ces questions sans donner d'évaluation.
Ainsi, les augmentations des prestations fiscales pour enfants semblent formidables, mais ont-elles véritablement contribué à réduire la pauvreté chez les enfants comme on l'escomptait? Le programme d'aide préscolaire aux Autochtones semble très bon et devait avoir un effet positif sur la santé, l'éducation et le fonctionnement des familles autochtones, mais est-ce que cela a vraiment été le cas? Nous l'ignorons. Les centres de ressources familiales aident-ils les parents et les enfants? Nous ne le savons pas.
Nous croyons que le trouble du spectre de l'alcoolisation fœtale représente un énorme problème. Nous avons acquis beaucoup de connaissances sur le TSAF, mais nous n'avons aucune information sur la présence d'enfants souffrant de TSAF au sein du système de justice juvénile. Quels genres de peine leur inflige-t-on? Quelles sont les meilleures pratiques de réadaptation et de réinsertion sociales?
Tout cela pour dire que sans statistiques nationales ou de données mesurables sur les résultats des politiques et programmes, sans données découlant d'évaluations, nous n'avons qu'un tableau approximatif de la situation des enfants. Ces lacunes dans nos connaissances constituent le principal obstacle au respect des droits des enfants et nous empêchent d'adopter des lois, des politiques et des pratiques qui soient conformes aux normes prévues par la convention.
Les déficiences dans le contrôle et l'évaluation limitent aussi notre capacité à informer les autres pays sur nos réussites auprès des enfants. Nous pouvons bien donner des anecdotes, mais comme l'a dit un chercheur très sage, beaucoup d'anecdotes ne font pas des données. Je m'arrête ici, merci.
La vice-présidente : Merci beaucoup, madame Covell. Vous nous avez donné matière à réflexion et, j'en suis certaine, suscité bien des questions. Le sénateur Losier-Cool a la parole.
[Français]
Le sénateur Losier-Cool : Je suis tout à fait d'accord avec ce que vous venez de soulever sur le manque d'information et de sensibilisation. Les droits des enfants sont comme les droits d'une minorité. Les minorités, pour avancer et se faire reconnaître, doivent faire l'objet d'une législation.
La Charte des droits et libertés, vous l'avez dit, comme la juge Mclaughlin, ne suffit pas pour défendre les droits des enfants.
Si un organisme ou un commissaire aux droits des enfants recevait cette information, d'après vous, de quelle façon le gouvernement fédéral pourrait-il s'y prendre pour s'assurer de recevoir toutes ces données?
[Traduction]
Je recommence, en anglais cette fois-ci. Je disais que les droits de l'enfant sont un peu comme les droits des minorités. Pour les minorités linguistiques, nous avons adopté une loi qui dit qu'il y a deux langues officielles au Canada.
Est-ce qu'un mécanisme tel que la Loi sur les langues officielles, qui crée le Commissariat aux langues officielles, ne pourrait pas servir à créer un bureau de défense des droits de l'enfant? Quel genre de structure fédérale serait la meilleure?
Mme Covell : Tout d'abord, je dois vous dire que l'idée de considérer les droits de l'enfant comme les droits d'une minorité ne me plaît pas, si je vous ai bien comprise. Les droits de l'enfant s'appliquent à tous les enfants et bon nombre sont des droits positifs. Ils ne touchent pas que les enfants minoritaires.
Cela dit, il nous faut une espèce de commissaire fédéral aux enfants ou un ombudsman pour les enfants, comme il en existe dans bien des pays européens, et qui pourrait travailler en collaboration avec les défenseurs des droits de l'enfant dans les provinces et territoires. C'est probablement là le genre de structure qu'il nous faut.
La vice-présidente : Si je puis me permettre, la question du sénateur Losier-Cool est intéressante. C'est la première fois que j'envisage la possibilité d'adopter une loi sur les droits de l'enfant comme la Loi sur les langues officielles, qui a mené à la création du Commissariat aux langues officielles. Je n'y avais jamais pensé.
Le sénateur Losier-Cool : C'est la Loi sur les langues officielles qui a permis la création du Commissariat aux langues officielles. C'est dans ce contexte que j'ai employé le mot « minorité ». « Minoritaire » renvoie aux Canadiens qui vivent en situation minoritaire. La loi reconnaît que les francophones et les anglophones sont égaux. La loi a permis la création du commissariat.
Dans votre réponse, vous mentionnez d'autres pays. Quelle sorte de structure a-t-on dans ces pays?
Mme Covell : Dans certains pays, la convention a force de loi dès qu'elle est ratifiée, ce qui n'est pas le cas ici. D'autres pays ont un protecteur des enfants à qui les enfants peuvent s'adresser directement dans certains cas.
Si la convention donnait lieu à une loi nationale, comme vous le décrivez, ou tout simplement comme dans la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, dans le préambule, on pourrait faire appliquer les exigences concernant l'évaluation de l'incidence sur les enfants et avoir une définition de l'intérêt supérieur de l'enfant, ce qui serait la meilleure approche. Je ne connais pas assez bien la situation de la minorité linguistique ni les questions juridiques l'entourant pour répondre plus en détail.
[Français]
Le sénateur Losier-Cool : Est-ce qu'il y a eu des demandes auprès des autorités ou du gouvernement sur la création d'un tel organisme, d'un tel commissaire? Dans l'affirmative, quelle a été la réponse? Comment un gouvernement réagirait-il à une demande de créer un commissariat aux droits des enfants?
[Traduction]
Mme Covell : Le sénateur Pearson pourrait probablement répondre à cette question. Beaucoup d'organisations non gouvernementales au pays appuient l'idée d'un commissaire aux droits de l'enfant et font des pressions en ce sens. Pourquoi cela n'a pas encore porté fruit, je l'ignore, mais je sais qu'on a déployé de grands efforts en ce sens.
Le sénateur Oliver : Merci de votre exposé, qui était excellent. On voit que vous êtes une chercheuse, car les questions que vous avez soulevées vont droit au cœur des enjeux que nous avons examinés pendant notre voyage.
Le sénateur Pearson a, en trois minutes, très bien résumé ce que nous avons appris à Genève et en Suède, là où il y a un double système de lois et délégation de pouvoirs aux municipalités.
Nous avons rencontré les membres du comité de l'ONU après qu'ils aient entendu un rapport du Nigeria. Nous leur avons ensuite parlé du rapport qu'ils venaient de présenter en Suède. La Suède, comme vous le savez, a beaucoup d'avance en matière de procédures, règles, contrôle et mesure des droits de l'enfant prévus par la convention.
En revanche, le comité de l'ONU nous a dit que le Canada devrait faire mieux au chapitre du rapport et de l'évaluation. Les membres du comité nous ont dit que, par exemple, ils ignoraient combien il y avait d'enfants séropositifs au Canada et ils ont ensuite donné une liste de lacunes dans les données très semblables à celles que vous nous avez données aujourd'hui. C'était l'une des principales critiques figurant dans le rapport suédois. Comme l'a fait remarquer le sénateur Pearson, le protecteur des enfants n'a accès aux informations qu'en s'adressant aux municipalités, qui ont leurs propres règles et leurs propres droits. Cela ressemble beaucoup au problème que nous connaissons au Canada.
Dans ce contexte, nous avons un problème de plus au Canada, à savoir le droit à la vie privée et le droit à l'auto- identification. Si vous voulez savoir combien d'enfants sont des minorités visibles, vous ne pouvez obtenir des données précises à ce sujet que si les enfants acceptent de s'auto-identifier. L'auto-identification est subjective, pas objective, et il faudrait prévoir une norme objective pour cela.
N'y a-t-il pas aussi des questions liées à la protection de la vie privée? Comment, dans l'affirmative, pourrions-nous contourner ces exigences?
Mme Covell : Je ne veux pas tenter de répondre à la question de savoir comment on devrait contourner les lois sur la vie privée. Pour ce qui est de savoir comment on pourrait obtenir les données, on pourrait ajouter des questions au recensement. Statistique Canada pourrait ajouter des sous-groupes.
Et bien que j'hésite à le dire, nous pourrions voir ce que font les Américains.
Le sénateur Oliver : Mais nous avons la Charte des droits et libertés qui nous empêche de poser certaines questions. Les lois protégeant la vie privée nous empêchent de poser certaines questions, même dans le cadre du recensement.
Mme Covell : Même s'il y a auto-identification?
Le sénateur Oliver : Mais si certains refusent de s'auto-identifier?
Mme Covell : Nous aurions quand même plus de données qu'à l'heure actuelle.
Le sénateur Oliver : Peut-être, mais elles ne seraient pas très précises. Il est difficile de trouver le genre de normes de mesure objectives que vous recherchez.
Mme Covell : Comme chercheuse, quand je veux faire publier un rapport d'étude, je dois notamment donner de nombreux détails sur les caractéristiques ethnoculturelles de mon échantillon. Je vis dans un monde un peu différent. Quand je fais des recherches, on s'attend à ce que je pose ces questions et ceux que j'interroge peuvent refuser de répondre, mais ils répondent toujours.
Le sénateur Oliver : Vous avez de la chance. C'est très bien. J'aimerais maintenant donner suite à l'excellente question du sénateur Losier-Cool. Si nous adoptions une norme nationale et créions un protecteur national qui coordonnerait ces initiatives avec les ombudsmans des régions, territoires et provinces, comment le gouvernement fédéral pourrait-il amener les provinces et territoires à accepter les normes et les mesures que vous souhaitez, que vous avez décrites? Comment pourrait-on mettre cela sur pied?
Mme Covell : Quelle sorte de structure faudrait-il?
Le sénateur Oliver : Oui.
Mme Covell : J'irais d'abord voir comment le cadre multilatéral sur les garderies a été réalisé, autrement dit, quel niveau de coopération a été nécessaire pour le réaliser. Bien sûr, il faudrait pouvoir compter sur la collaboration de tous les paliers. S'il existe déjà des protecteurs des enfants ou une fonction équivalente dans la plupart des régions du pays, il faudrait leur confier à tous le même mandat, un mandat qui devrait être beaucoup plus large que ce qu'il est actuellement. Le gouvernement fédéral pourrait notamment financer cela. Pour leur part, les agences provinciales auraient pour tâche de fournir des informations au gouvernement fédéral.
Le sénateur Oliver : Il s'agirait cependant de financement national, ce qui signifie des normes nationales qui s'appliqueraient à toutes les provinces et à tous les territoires. L'argent s'accompagne d'obligation.
Mme Covell : Oui, comme dans les autres régimes de partage fédéral-provincial.
Le sénateur Oliver : Incluriez-vous d'autres éléments à ce système? Croyez-vous que nous devrions, au Canada, créer un bureau de type ombudsman?
Mme Covell : Cela va au-delà de mes compétences. J'hésite à répondre oui ou non. Cela me semble toutefois la voie logique. J'ignore s'il y a une meilleure solution. J'en reviens à ce que je disais sur la sensibilisation. Tant qu'on ne connaît pas la teneur de la convention ni l'importance suprême du respect des droits de l'enfant pour le développement d'une société saine, il y aura des obstacles au partage de la responsabilité. Si tous, à tous les paliers de gouvernement, avaient davantage d'information sur l'importance du respect des droits de l'enfant pour la santé des collectivités, des municipalités, des provinces, il serait plus facile d'obtenir le genre de collaboration qu'il faut pour mettre sur pied les structures nécessaires.
Le sénateur Losier-Cool : À ce sujet, s'il ne s'agit pas d'un ombudsman, quel ministère se chargerait de cette fonction?
Y avez-vous réfléchi?
Mme Covell : Si vous m'offrez l'emploi, j'y réfléchirai.
Le sénateur Losier-Cool : Il vous faudra d'abord être élue.
Mme Covell : J'hésite à répondre sans d'abord réfléchir à une question si importante. À titre de chercheuse, je commencerais par voir ce qui se fait dans le reste du monde, ce qui a donné de bons résultats, ce qui a été moins efficace et quelle leçon nous pouvons tirer des pays qui ont soit un ministre, un ministère ou un ombudsman. Rien ne sert de réinventer la roue et de refaire les erreurs des autres. Je suis certaine que nous pourriez en apprendre beaucoup, comme votre comité l'a fait, en parlant aux experts à l'étranger. Regardons ce qui se fait ailleurs pour voir ce qui marche.
[Français]
Le sénateur Chaput : Vous nous dites que le Canada n'arrive pas à respecter ses obligations dans trois domaines : l'éducation, le suivi ainsi que de la mesure des résultats. D'après moi, et dites-moi si je me trompe, ce n'est pas possible d'assurer des suivis et une bonne mesure de résultat lorsque nous n'avons pas les données nécessaires? Si c'est le cas, les provinces ont-elles en main suffisamment de données pour aider le gouvernement fédéral à faire des suivis et une certaine mesure des résultats? Ces données sont-elles déjà en place dans les provinces?
[Traduction]
Mme Covell : Non, je ne crois pas que ces données existent. Vous avez raison de dire qu'on ne peut faire de contrôle sans donner, mais nous pourrions certainement évaluer l'incidence sur les enfants des nouvelles lois, des modifications législatives, des nouvelles politiques et des nouveaux programmes. Quand le gouvernement finance des initiatives, il pourrait notamment exiger une évaluation de l'incidence sur les enfants ou une autre forme d'évaluation. Il pourrait faire la promotion de la recherche à l'échelle du pays. Si les lois sur la vie privée nuisent à l'obtention de certains types de données, nous pourrions, je crois, en obtenir quand même suffisamment pour en arriver à des approximations, grâce à la statistique déductive, qui se rapprocheraient davantage de la réalité qu'actuellement.
[Français]
Le sénateur Chaput : Vous dites que la Nouvelle-Écosse est la seule province qui a accédé à la demande d'intégrer la sensibilisation au droit de l'enfant au programme scolaire. Pourriez-vous nous expliquer comment cela s'est fait dans les écoles en Nouvelle-Écosse?
[Traduction]
Mme Covell : Merci beaucoup — voilà enfin une question à laquelle je peux répondre.
Oui, le centre où je travaille a conçu du matériel scolaire sur les droits des enfants qui a fait l'objet d'un projet pilote. Nous l'avons mis à l'essai dans le district scolaire local. Nous avons évalué l'incidence sur les enfants, et le district scolaire a aussi fait des évaluations indépendantes. Ça, c'était la première étape. Les données découlant de l'évaluation ont été très positives; le district était très satisfait. Puis, nous nous sommes adressé au ministère provincial de l'Éducation pour lui demander s'il voulait que la Nouvelle-Écosse soit la première province du Canada à remplir les obligations prévues par la convention. Nous avons montré les données et conçu le matériel de façon à ce qu'il soit conforme aux lignes directrices, au style, aux cadres sur les résultats d'apprentissage de la province, et ainsi de suite, et cela a progressé de là.
Soit dit en passant, ce qui est bien dans tout cela, c'est que nous avons fait des émules et que des données découlant d'évaluations faites dans d'autres provinces et territoires commencent à nous arriver. Le plus important, c'est que ce matériel vise à modifier le climat de l'école et c'est pourquoi j'aimerais qu'on s'en serve beaucoup plus. Ailleurs où l'on en a fait un usage plus répandu, on a modifié de façon mesurable le climat dans les écoles. C'est bien, parce que jusqu'à présent, nos interventions contre le harcèlement et l'intimidation dans les écoles étaient surtout centrées sur un enfant en particulier. Or, la recherche nous indique que la structure et le climat de l'école ont une plus grande valeur prédictive des problèmes qui pourraient surgir que le comportement de chaque enfant.
Informer les enfants de leurs droits peut véritablement servir à améliorer le climat dans les écoles.
[Français]
Le sénateur Chaput : Est-ce que ce modèle pourrait être utilisé dans d'autres provinces s'il y avait un intérêt? Est-ce qu'il est transférable?
[Traduction]
Mme Covell : Merci de cette excellente question. Oui, en fait, il a été adapté par chaque district scolaire. Ce matériel a suscité beaucoup d'intérêt. C'est en Angleterre qu'on a su l'adapter le mieux et qu'il constitue le meilleur exemple de ce qu'on peut en faire. Défense des enfants internationale recommande aussi son usage à l'échelle mondiale. On peut très facilement l'adapter. On peut aussi actualiser les activités, et ainsi de suite. Je serai heureuse de vous donner toutes les informations que vous souhaitez.
La vice-présidente : Peut-être pourriez-vous nous expliquer le fait que le programme ne constitue pas un module distinct.
Mme Covell : C'est exact. Quand on veut mettre en place un nouveau programme, surtout sur les droits des enfants, un sujet qui suscite une certaine méfiance, il est important de le faire de la façon la plus discrète possible. Plutôt que d'enseigner un cours distinct sur les droits des enfants, pour lequel les enseignants devraient trouver du temps, les droits des enfants sont inclus dans les études sociales et la santé, ce qu'on appelle, en Nouvelle-Écosse, le cours de relation et de croissance personnelle du premier cycle du secondaire. En douzième année, ce sujet s'insère dans l'éducation civique.
Le sénateur Chaput : Était-ce une initiative provinciale?
Mme Covell : Cela l'est maintenant.
Le sénateur Chaput : Était-ce à l'origine l'initiative d'une seule personne?
Mme Covell : Oui.
La vice-présidente : Je crois que cela a été l'initiative de Mme Covell. Le sénateur Oliver, qui est de la Nouvelle- Écosse pourrait s'informer.
Le sénateur Losier-Cool : Quand vous avez élaboré ce programme, avez-vous abordé le sujet du châtiment corporel? Les programmes scolaires traitent-ils du châtiment corporel comme mesure disciplinaire?
Mme Covell : Les châtiments corporels ne peuvent servir de mesures disciplinaires dans les écoles au Canada. Je tente par ailleurs de me rappeler si nous en avons discuté. Le programme traite des sévices physiques, mais je ne me souviens pas si nous avons parlé de châtiment corporel.
La vice-présidente : Cela m'amène à poser ma question, avant de commencer la deuxième série de questions. Mme Covell a très bien su faire participer les jeunes à ses travaux de recherche. Récemment, son équipe a fait de l'excellent travail auprès des jeunes enfants et d'enfants d'âges différents dans le cadre d'une étude sur la violence à l'égard des enfants. Nous avons eu des informations à ce sujet à Genève. J'aimerais savoir si vous pourriez nous faire des recommandations sur ce que notre comité pourrait faire pour avoir le point de vue des enfants et adolescents sur le sujet dont nous sommes saisis.
Mme Covell : Je me demandais si vous aviez posé la question aux jeunes, ce qui serait fantastique. Ce qui serait merveilleux, c'est que vous invitiez ici même les jeunes, autant ceux qui connaissent leurs droits que ceux qui ne savent pas qu'ils en ont, surtout s'ils viennent d'un peu partout au Canada. Je ne cesse d'être surprise par la sagesse dont ces jeunes font preuve. Les groupes de discussion dont parlait le sénateur Pearson ont donné des résultats incroyables. J'ai consacré huit mois à parcourir les données recueillies lors de recherches effectuées en Amérique du Nord, et j'ai colligé 40 pages de choses que m'ont dites les enfants. En bref, ils ont tout dit.
Le sénateur Oliver : J'ai deux questions, dont la première se rapporte à ce que vous demandait le sénateur Person au sujet de la participation des enfants. Vous savez que dans le système judiciaire, lorsque les juges veulent déterminer si un enfant peut témoigner ou pas, ils les soumettent à un petit questionnaire pour déterminer quel est leur âge intellectuel. C'est pour déterminer s'ils sont en mesure de comprendre suffisamment la question pour pouvoir y répondre. Dans votre recherche à vous, comment avez-vous établi l'âge intellectuel?
Mme Covell : Il est très important de définir les sujets en fonction de l'âge et de choisir les mots qui conviennent à l'âge. Cela n'a pas posé de graves problèmes dans le cadre de cette étude-là, même si les plus jeunes enfants avaient huit ou neuf ans. Cette difficulté ne s'est pas posée. Il y a une énorme différence, d'ailleurs, entre les questions que l'on pose dans un tribunal aux enfants et celles qu'on leur pose dans le cadre d'une recherche. Dans un tribunal, on pose aux enfants des questions de façon à leur faire croire qu'ils ont répondu de travers. Lorsqu'on ne cesse de répéter la même question aux enfants, ou de la leur poser d'une façon qui les met mal à l'aise — parce qu'ils savent que, dans la plupart des cas, on s'attend d'eux qu'ils donnent la bonne réponse — cela les déstabilise rapidement et les pousse à changer leurs réponses. On présuppose donc à tort qu'ils ne savent pas ce dont ils parlent, ou qu'ils mentent, ou alors qu'ils ne comprennent pas la question. Toutefois, la vérité c'est qu'ils essaient, la plupart du temps, de plaire à la personne qui pose la question. Par conséquent, si vous posez une question qui convient à l'âge de l'enfant d'une façon qui convient aussi à son âge, vous pouvez interroger des enfants dès l'âge de trois ans sans que cela pose problème.
Le sénateur Oliver : Il faudrait peut-être enseigner aux juges comment poser des questions aux enfants qui conviennent à leur âge.
Mme Covell : Sans doute, et aussi aux avocats. Comme j'ai certaines notions sur le développement des enfants, si on me demande dès quel âge les enfants peuvent prendre part aux recherches, je réponds qu'ils le peuvent dès la naissance, car dès les premiers jours l'enfant décide par lui-même combien de temps il veut se nourrir au sein maternel et à quel moment. Dès les premiers jours, ils prennent leur propre vie en main, et cela se confirme par après : ils peuvent prendre part à nos recherches à tout âge. Il suffit toutefois de trouver la façon qui convienne à leur âge.
Le sénateur Oliver : Vous avez mentionné dans votre déclaration l'article 43 du Code criminel et vous avez cité les commentaires de la juge en chef Mme McLachlin. La juge en chef a affirmé que le Comité des Nations Unies sur les droits de l'enfant n'avait pas exigé du Canada qu'il interdise tout recours par les parents aux punitions corporelles. D'après l'interprétation de la juge en chef, quelles sortes de punitions corporelles restent permises, à votre avis?
Mme Covell : Le juge de la Cour suprême imposait des limites aux recours par les parents aux punitions corporelles, mais ne les interdisait pas. Toutefois, à la lumière de mes connaissances en psychologie du développement, les limites qui sont imposées sont assez inquiétantes, car elles vont complètement à l'encontre de toutes les notions que nous avons développées sur les droits des enfants et à l'encontre de toutes les notions que nous pourrions avoir sur ce que constituent les intérêts supérieurs de l'enfant. Le comité onusien a recommandé au Canada de bannir complètement toute forme de punition corporelle. Il n'a pas laissé entendre que dès qu'un enfant a deux ans, il est permis de le frapper, car ce n'était pas ce qui était prévu. Toutefois, cela semble être la façon dont beaucoup de parents interprètent ce jugement. Voilà un secteur vers lequel nous devons orienter nos efforts de recherche au plus vite, à savoir la façon dont les gens interprètent les limites qui ont été imposées.
Le sénateur Oliver : Dans votre recherche, quelles sont les autres façons dont on interprète l'arrêt de la juge en chef et qui leur ferait croire qu'ils n'ont pas à se priver comme parents de punitions corporelles? Quels sont les autres châtiments dont on vous aurait parlé?
Mme Covell : Simplement dans ce contexte. C'est tout ce que j'en sais.
Le sénateur Losier-Cool : Je vais poser une question dont je devrais connaître la réponse. Selon la convention, quel âge ont les enfants?
Mme Covell : De la naissance jusqu'à 18 ans.
Le sénateur Losier-Cool : J'ai été enseignante pendant plus de 30 ans. Il me semble qu'en ce qui concerne les enfants, il y a le groupe d'âge des trois et quatre ans; après l'âge de trois ans, ces petits enfants peuvent parler. Existe-t-il une différence importante dans votre recherche en ce qui concerne les bébés, la violence et les maltraitements dont ils font l'objet? Lorsqu'ils sont plus grands, est-ce qu'ils sont moins vulnérables parce qu'ils peuvent parler?
Existe-t-il un groupe de zéro à 18 ans qui est plus ciblé, plus vulnérable?
Mme Covell : Plus vulnérable à la violence?
Le sénateur Losier-Cool : Vulnérable au mauvais traitement de toutes sortes.
Mme Covell : Les statistiques indiquent que si un bébé survit à son premier anniversaire, sa situation est assez bonne, car c'est l'âge auquel un enfant est le plus vulnérable pour ce qui est des homicides ou des infanticides. L'étude sur la violence familiale faite par Statistique Canada indique que chez les enfants, il y a un pourcentage disproportionné des cas de violence physique et sexuelle de toutes sortes. Le syndrome du bébé secoué, par définition, ne se produit qu'au cours des deux premières années de vie et c'est l'un des problèmes pour lesquels nous n'avons aucun chiffre au Canada.
Une enquête récente effectuée aux États-Unis, et je ne crois pas que la situation sera différente ici, indique des taux élevés de parents qui déclarent qu'ils ont l'habitude de secouer leurs bébés pour les discipliner. Cela ne se produit pas lorsque l'enfant est plus vieux.
Les châtiments corporels infligés aux enfants ont tendance à être plus fréquents lorsque l'enfant atteint l'âge de quatre ans. Certains parents continuent d'infliger des châtiments corporels jusqu'à ce que leurs enfants soient adolescents et à ce moment-là, souvent, les enfants frappent leurs parents en retour et soit la situation s'intensifie au point où le système de justice pénale doit intervenir, soit le recours à la violence cesse.
À l'heure actuelle, je suis en train de faire une enquête à la sortie auprès de jeunes plus âgés et de jeunes adultes de 15 à 18 ans, à propos de leurs expériences des châtiments corporels. Leurs réponses fendent le cœur. Je n'avais aucune idée du nombre d'enfants qui sont frappés avec autant d'objets pour des raisons aussi bizarres.
Le sénateur Losier-Cool : Je vous remercie de votre réponse. C'est l'impression que j'avais, et votre étude l'a confirmé.
La vice-présidente : J'aimerais être un peu plus positive et indiquer que la Dre Susan Bennett du CHEO est en train de faire une étude sur le syndrome du bébé secoué. Nous devrions bientôt avoir plus de données de la part de pédiatres et d'autres médecins.
Il s'agit d'un problème important. L'étude sur les mauvais traitements et la négligence dont font l'objet les enfants, dont Mme Covell a parlé plus tôt et qui a été faite par le ministère de la Santé, présentait des chiffres très intéressants à propos de l'incidence au début de l'adolescence de mauvais traitements graves. Nous devons examiner les liens qui existent avec les mauvais traitements subis dans l'enfance et si l'adolescent qui fait l'objet de mauvais traitements a été violemment maltraité toute sa vie. J'ignore si cette étude le prouve mais une nouvelle étude sur le point d'être publiée nous donnera des données provenant de deux périodes de temps différentes.
Mme Covell : L'étude que nous sommes en train de faire sera similaire parce que nous demandons aux différents groupes d'âge de revoir les différentes périodes de leur vie.
La vice-présidente : Ces renseignements ont été intéressants et utiles, et je demanderai aux attachés de recherche de consulter les autres travaux que vous avez faits à ce sujet et qui pourront faire partie de nos renseignements de base.
Au cours de cette partie de la séance d'aujourd'hui, nous entendrons les témoignages de deux personnes. Nous entendrons d'abord Cindy Blackstock, directrice exécutive de la Société de soutien à l'enfance et à la famille des Premières nations du Canada, puis Rita Karakas, directrice exécutive de l'organisme Aide à l'enfance Canada.
Nous avons constitué ce groupe de manière à permettre les comparaisons intéressantes. Mme Karakas s'occupe surtout de questions internationales. Mme Blackstock s'occupe principalement de questions nationales, mais comme elle est allée récemment en Nouvelle-Zélande et ailleurs, elle a eu l'occasion de travailler avec des groupes autochtones d'autres régions du monde.
Mme Cindy Blackstock, directrice exécutive, Société de soutien à l'enfance et à la famille des Premières nations du Canada : C'est un grand honneur pour moi que de m'adresser au comité. Je suis ici pour attirer l'attention du comité sur le grand risque que courent les enfants des Premières nations et leurs familles partout au pays, et sur le fait qu'il existe souvent des solutions. La société canadienne peut, collectivement, modifier le sort de cette génération d'enfants.
Au cours de mon exposé, je vais faire état du passé puis je vais passer à un exemple précis qui démontre comment nous pouvons changer du tout au tout le sort de cette génération. Après quoi je conclurai en vous faisant trois recommandations axées sur une action future.
Bon nombre d'entre vous le savez, la Commission des Nations Unies sur les droits de l'enfant a imploré à maintes reprises le Canada dans ses conclusions de réduire l'écart qu'il y a dans les chances d'épanouissement entre enfants et jeunes gens autochtones et enfants et jeunes gens non autochtones dans notre pays. De nombreuses initiatives fédérales visaient cet objectif mais, malheureusement, aujourd'hui dans la société canadienne, cet écart demeure béant.
D'après nos meilleures estimations, il y aurait entre 22 500 et 28 000 enfants autochtones dans le système d'aide à l'enfance aujourd'hui. C'est trois fois plus qu'il y en avait dans les pensionnats à l'époque où ceux-ci étaient combles dans les années 40. L'heure est critique.
Si on a permis à autant de pays de ratifier la Convention sur les droits de l'enfant, j'imagine que les auteurs de ce rapport pensaient que les pays qui étaient dans les conditions idéales allaient mettre en œuvre la Convention dans toute la mesure du possible.
Quand je parle de conditions idéales, je parle d'un État démocratique qui valorise les droits de la personne, ceux-ci étant préférablement enchâssés dans la Constitution ou une Charte des droits, comme ce que nous avons au Canada, et d'un pays qui a suffisamment de ressources, comme c'est heureusement le cas du Canada, qui vient de déclarer un excédent budgétaire.
Pendant trop longtemps, les rapports sur les enfants autochtones, même ceux de ma génération à moi, et je suis née en 1964, disaient que nous étions à risque, marginalisés et vulnérables. Il y a encore trop de rapports aujourd'hui qui emploient ces trois adjectifs pour décrire les enfants autochtones. Il existe des solutions. Le message du rapport de notre comité, « Promises to Keep : Implementing Canada's Human Rights Obligations », consiste non seulement à attirer l'attention du pays sur le vécu de ces enfants mais aussi à dire que ce ne sont pas des problèmes sans solutions.
Beaucoup disent que les problèmes qui attendent les enfants autochtones sont trop complexes. Quand on voit l'ampleur du problème, on est presque paralysé. Je crois pour ma part que les questions complexes exigent souvent les réponses les plus simples. Par exemple, lorsque nous avons étudié le nombre de ressources accessibles aux enfants des Premières nations, nous voulions en finir avec ce stéréotype de la société canadienne selon lequel les enfants des Premières nations sur les réserves ont accès à davantage de ressources que les autres enfants. Notre recherche a constaté que 90 milliards en revenu annuel que touche le secteur bénévole pour fournir une pléthore de services sociaux, seul un montant négligeable parvient aux enfants des Premières nations et à leurs familles sur les réserves.
Bon nombre d'entre vous savez que souvent, les gouvernements provinciaux ne fournissent pas de services sur les réserves et qu'il n'y a pas d'équivalents municipaux pour elles. Les honorables sénateurs qui se sont rendus dans certaines de nos communautés des Premières nations savent qu'on y trouve rarement des terrains de jeux sécuritaires pour les enfants ou des bibliothèques municipales, soit le genre de choses que l'on tient pour acquises dans les centres urbains.
Selon le gouvernement du Canada, le revenu moyen sur les réserves se situe entre 8 500 $ et 9 500 $ par année. C'est moins que ce que reçoive la plupart de nos étudiants universitaires, et c'est avec cet argent-là que des familles doivent combler leurs besoins essentiels. Pour ce qui est des services fédéraux, on sait que l'aide à l'enfance des Premières nations est financée sur une base per capita. Une étude menée par le ministère des Affaires indiennes et du Développement du Nord et une Première nation a constaté que, de manière générale, les Premières nations reçoivent 22 p. cent de moins par enfant en financement de l'aide sociale que la province moyenne, si on se base sur les données de 2000.
Quand j'additionne tout cela et que je me demande pourquoi nous avons 9 000 enfants des Premières nations sur les réserves sous les soins de l'aide à l'enfance, si j'annonçais aux Canadiens aujourd'hui que j'allais supprimer tous les services provinciaux et municipaux s'adressant aux enfants, et la plupart des services aux enfants provenant du secteur du bénévolat et que j'obligerais tous les adultes à vivre avec un revenu annuel de 9 500 dollars, je me demande comment l'enfant canadien moyen s'en sortirait. Pas besoin d'être bien savant pour comprendre cela. La plupart d'entre nous imaginent la difficulté qu'il y aurait à vivre une telle situation. En fait, si les enfants des Premières nations se débrouillent aussi bien que c'est le cas en ce moment, c'est attribuable à la force de caractère des enfants, des familles et des communautés des Premières nations.
Quels sont les mécanismes en place? Comment se fait-il qu'on n'ait pas porté cela à l'attention du gouvernement fédéral dans des termes qui en feraient une crise nationale? J'ai songé à cette question en me mettant à la place d'une personne qui vivrait sur une réserve avec son enfant. Le fait est que je pourrais m'adresser aux tribunaux et demander réparation, mais avec un revenu aussi limité, vous pensez bien que je serais probablement plus encline à utiliser mes ressources pour nourrir ma famille plutôt qu'à traduire le gouvernement fédéral devant les tribunaux.
Je pourrais aussi m'adresser au protecteur provincial de l'enfance ou au bureau du commissaire, mais leur autorité se limite à la province et ils ne peuvent nullement contraindre les ministères fédéraux. Je pourrais m'adresser à la Commission canadienne des droits de la personne, sauf qu'elle exempte tout ce qui relève de la Loi sur les Indiens. Ainsi, si je suis un enfant ou une jeune personne d'une Premières nations vivant sur une réserve, je ne peux pas faire entendre ma voix et je ne peux pas résoudre la crise avec laquelle nous sommes aux prises, pourtant, le fait est qu'il existe une solution.
Le Canada peut changer les choses. Voici mon exemple : il s'agit de ces enfants des Premières nations, ces 9 000 enfants qui sont sous les soins de l'aide à l'enfance en ce moment. L'un des principaux facteurs qui explique la surreprésentation de ces enfants à l'aide à l'enfance tient au fait que les Premières nations sont sous-financées. Comme l'a appris le ministère des Affaires indiennes et du développement du nord en 2000, elles sont gravement sous-financées dans toute une série de services qu'on appelle les mesures les moins perturbatrices. C'est un terme légal que l'on retrouve dans la plupart des lois provinciales sur la protection de l'enfance. Si l'on constate qu'un enfant risque d'être maltraité ou négligé, ce sont les services qu'un gouvernement ou une agence d'aide à l'enfance d'une Première nation doit fournir pour que l'enfant puisse rester chez lui en toute sécurité. Ces services ne sont pas financés dans le cadre de la formule de financement actuelle pour les enfants des Premières nations sur les réserves. Ce qui veut dire qu'il y a trop d'enfants qui finissent par aboutir dans des foyers nourriciers alors qu'ils pourraient rester chez eux.
Il existe une solution. Il y a quatre ans et demi de cela, l'assemblée des Premières nations et le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien ont produit conjointement un rapport contenant 17 recommandations où l'on proposait des améliorations qui mettraient fin à cette injustice. Le ministère a participé à cet effort et a fait des recherches depuis ce temps. Cependant, le fait est qu'on n'a pas débloqué de nouveaux crédits pour remédier à cette injustice. Voyez le budget du ministère, vous allez constater qu'il y a augmentation du financement de l'aide à l'enfance mais cela tient seulement au fait qu'il y a eu augmentation du nombre d'enfants envoyés à l'aide à l'enfance. En fait, le nombre d'enfants avec le statut d'indien qui ont été envoyés à l'aide à l'enfance de 1995 à 2001 a augmenté de 71,5 p. 100. La bonne nouvelle ici, c'est que le gouvernement fédéral est le seul responsable. Comme l'a remarqué la Commission sur les droits de l'enfance, lorsque le gouvernement fédéral est seul maître à bord, il peut changer les choses. Bien sûr, il existe aussi cet excédent budgétaire. Si l'on en croit ce qui a été dit à la séance spéciale des Nations Unies dont le thème était « un monde digne des enfants », les enfants du Canada devraient être les premiers à bénéficier des ressources d'un pays riche.
Ne rien faire a des conséquences visibles pour tous. On en est témoin tous les jours dans la vie de ces enfants et de leurs familles des Premières nations. Nous n'avons pas de données pour les années 2002 et 2003 sur le nombre d'enfants des Premières nations qui ont été placés sous les soins de l'aide à l'enfance, et pendant ce temps, nous sommes restés autour de la table à nous demander comment nous allions mettre en œuvre les recommandations. Si vous étiez l'un de ces enfants ou l'un de ces parents, vous pouvez vous imaginer à quel point vous aimeriez qu'on en finisse avec ce genre d'injustice.
J'ai quelques recommandations. Premièrement, il faut qu'il y ait quelqu'un au niveau fédéral qui se penche sur les violations des droits des enfants autochtones dans les divers domaines afin que nous sachions en quoi elles consistent. Nous comprenons que les enfants autochtones ne sont pas à risque, marginalisés et vulnérables seulement parce qu'ils veulent l'être ou parce que leurs parents les ont élevés de cette façon. Ils sont à risque, vulnérables et marginalisés parce que leurs droits sont constamment violés. Le commissaire aux enfants de la Nouvelle-Zélande, la Dre Cynthia Kiro, offre un excellent exemple de ce que le Canada devrait étudier.
Deuxièmement, le Canada doit agir immédiatement pour assurer un financement équitable à l'aide à l'enfance pour les enfants des Premières nations. Il ne s'agit pas seulement d'enfants et il ne s'agit pas seulement d'enfants autochtones. Ce sont des enfants autochtones qui sont négligés et maltraités. De tous les enfants du Canada, ce sont sûrement ceux qui méritent de se tourner vers nous et qui méritent qu'on leur fournisse à tout le moins une chance équitable de parvenir à la sécurité et au bien-être.
Ma troisième recommandation tient au développement et au financement de stratégies communautaires qui fait du bien-être des enfants autochtones une priorité. Notre organisation nationale peut fournir des ressources aux communautés. Nous savons que les solutions résident au niveau communautaire. Les programmes de transfert nationaux présentent des aspects positifs, mais ils sont inadaptés à la grande diversité des communautés des Premières nations et à leurs besoins partout au pays.
Quatrièmement, il faut entendre les jeunes Autochtones eux-mêmes. L'Assemblée des Premières nations, l'Inuit Tapiriit Kanatami, le Ralliement national des Métis et l'Association nationale des centres d'amitié ont des conseils de jeunes qui peuvent parler des politiques gouvernementales. Ils sont plus en mesure que moi de venir ici donner au comité plus qu'un résumé de leur vécu et de vous inculquer un espoir par leur intelligence.
J'espère que le Canada comprend que vous pouvez changer le sort de cette génération d'enfants, et que dans 30 ans, on n'emploiera plus les mots « à risque », « marginalisés » et « vulnérables » pour décrire nos jeunes Autochtones. En agissant d'une manière coordonnée et empressée, nous utiliserons un jour des adjectifs comme « distincts », « respectés », « valorisés » et « dignes », pour décrire non seulement cette génération-ci d'enfants autochtones, mais toutes les générations qui suivront.
La vice-présidente : Merci, madame Blackstock. Madame Karakas, nous vous écoutons.
Mme Rita Karakas, directrice exécutive, Aide à l'enfance Canada : C'est un grand plaisir pour moi que d'être ici cet après-midi.
J'ai l'honneur d'être assise à côté de Cindy Blackstock. Merci de nous avoir invitées ensemble. Il y avait longtemps que je voulais la rencontrer.
Ayant travaillé dans 72 pays différents et ayant été à une certaine époque conseillère de la commission du tourisme du gouvernement australien chargée des communautés autochtones, j'ai souvent été frappée par les équivalents au Canada de nos communautés autochtones que notre société néglige absolument et totalement, et dont tous les droits sont violés. Alors que nous devrions avoir honte de notre comportement, à de nombreux égards, au Canada, nous tolérons, approuvons et maintenons des situations pour lesquelles l'ACDI verse de l'argent à mon agence afin que je puisse éliminer ces mêmes situations à l'étranger. Les indicateurs canadiens, qu'il s'agisse de la santé, du revenu, de la participation au système éducatif, de la justice sociale, des systèmes d'incarcération ou de détention, révèlent tous une véritable honte. Nous n'avons pas encore démontré que nous avons tiré des leçons de notre passé dans nos rapports avec les communautés autochtones. Votre exposé m'enchante et me rend humble.
Nous, à Aide à l'enfance Canada, nous saisissons cette occasion, puisque nous nous considérons comme responsables en vertu de la Convention des Nations Unies sur les droits de la personne. Je vous ferai d'abord part de nos recommandations, puis reviendrai ensuite à notre exposé. J'ai d'ailleurs lu les témoignages de M. Jeffery Wilson, du professeur Nicholas Bala et de Mme Covell, et nous sommes tous sur la même longueur d'ondes. Nos recommandations vont dans le même sens.
Aide à l'enfance Canada demande au Canada d'assumer ses responsabilités à titre de défenseur, de protecteur et de promoteur des droits des enfants, puisqu'il est signataire de la convention de l'ONU. Nous sommes une société riche de principes démocratiques qui valorise les droits de la personne et qui a de grands moyens économiques. Les Nations Unies nous considèrent depuis plusieurs années parmi les cinq grands pays du monde pour ce qui est de nos moyens économiques qui restent stables et de notre cote par rapport à l'indice du développement humain. Nous considérons que notre gouvernement a réussi au cours des dernières années à respecter ses budgets et à gérer ses recettes comme il faut et qu'il a donc les reins suffisamment solides pour mener plus loin ses devoirs et ses responsabilités à l'égard des enfants du Canada.
Nous exhortons le comité à recommander au gouvernement canadien et aux divers paliers gouvernementaux du Canada — fédéral, provinciaux et municipaux — d'opter pour une approche intégrée et interministérielle afin de faire appliquer la Convention des Nations Unies sur les droits des enfants par tous les paliers de gouvernement au Canada et par toutes ses instances de réglementation, comme des divers appareils judiciaires et des services de douanes, c'est-à- dire dans tous les aspects du fonctionnement du gouvernement fédéral.
Nous demandons un système de suivi avec un examen périodique de la mise en oeuvre de la convention. Nous signalons d'ailleurs qu'il y a une différence entre suivi et vérification. Nous demandons aussi au gouvernement fédéral qu'il honore ses responsabilités en matière de vérification.
Aide à l'enfance Canada communique actuellement avec le Sénat américain au sujet de la vérification des enfants travailleurs dans les fermes de production de cacao d'Afrique de l'Ouest, afin que la culture des fèves de cacao donne lieu à un milieu sûr et sain pour les enfants. Nous n'avons pas la capacité voulue pour conseiller de la même façon le gouvernement canadien matière de travail des enfants au Canada.
Nous demandons aux divers paliers de gouvernement au Canada d'aider à la mise en oeuvre d'une loi cohérente et intégrée destinée à protéger tous les enfants, y compris les victimes de trafic d'enfants et de toute forme d'exploitation, c'est-à-dire de préparer une loi qui pourrait s'appliquer d'une administration à l'autre et de façon cohérente.
Nous demandons que l'on forme de toute urgence et de façon appropriée les professionnels qui s'intéressent aux droits des enfants, y compris les juges de la Cour suprême, les magistrats, avocats, enseignants et autres responsables, de même que les fonctionnaires influents du gouvernement fédéral et ceux qui, dans les provinces, administrent les programmes de bien-être destinés aux enfants. Autrement dit, nous vous demandons de communiquer avec les bureaux de bien-être social.
Nous demandons l'inclusion des droits des enfants dans les programmes gouvernementaux et dans ceux de la société civile, et je songe notamment à la charte.
Nous demandons la promotion d'une pleine et active participation des enfants à la vie socio-économique du Canada.
Voilà pour ce qui est de nos recommandations. Nos recommandations toucheront les enfants du Canada dans leur quotidien et permettront aux Canadiens de mieux comprendre leurs droits.
En l'honneur de la Journée nationale des enfants de cette année, nous avons commandé une enquête Ipsos-Reid auprès d'un millier de Canadiens adultes pour déterminer ce qu'ils savaient des droits des enfants au Canada et leur demander de coter le gouvernement fédéral et les autres gouvernements sur la façon dont ils exécutaient leurs obligations en matière de droits des enfants. Malheureusement, les répondants nous ont montré qu'ils connaissaient peu les droits des enfants; de plus, ces mêmes répondants donnaient également une mauvaise note à ceux qui devaient remplir leurs obligations, c'est-à-dire qu'à leur avis, le gouvernement fédéral ne remplissait pas ses obligations à l'égard des droits des enfants.
Mme Covell demandait que l'on fasse connaître des faits. Les Canadiens ne savent pas combien de jeunes enfants de leur pays vivent avec le VIH/sida, ne connaissent pas bien les cas de violence faite aux enfants ni combien d'enfants sont forcés de travailler, ni même quels sont les pires cas de travail chez les enfants. Cela se comprend aisément, puisque ni Mme Covell ni nous, à Aide à l'enfance Canada, ne le savons, pas plus que le gouvernement fédéral ni les provinces ne le savent. Et pourtant, lorsque nous savons, nous n'agissons toujours pas. Nous sommes bien au fait de la façon dont vivent les enfants autochtones, et pourtant nous ne faisons rien.
Nous partons du fait que ceux qui s'occupent des droits des enfants et qui sont en mesure de faire une différence dans la vie de l'enfant en travaillant en fonction des droits de l'enfant ne connaissent pas leur travail et ne peuvent donc pas faire fonction de personne responsable. Nous affirmons que le gouvernement du Canada est négligent en ce qui concerne cet élément-là de la convention.
Je voudrais vous citer le cas d'une enfant du nom de Zheng, une petite Chinoise, pas une Canadienne, un enfant de 14 ans qui est venue au Canada pour se réclamer de la protection accordée par la loi canadienne. Elle est arrivée au Canada en 2002, étant alors mineure puisque âgée de 14 ans et, en compagnie d'une vingtaine d'autres mineurs, elle a été arrêtée par les fonctionnaires de l'immigration alors qu'elle entrait illégalement au Canada en provenance de Chine. Elle a demandé le statut de réfugié en prétendant avoir été la victime d'un trafic entre la Chine et les États-Unis en passant par le Canada. Elle disait craindre d'être persécutée si elle était renvoyée en Chine. On lui a refusé le statut de réfugiée, elle a interjeté appel et cet appel, ainsi que ceux d'autres demandeurs, furent rejetés. Pendant les procédures d'appel, la Convention sur les droits de l'enfant a été citée comme motif de rejet, l'allégation étant qu'elle était capable de donner son consentement.
Nous pensons qu'elle a été considérée comme une migrante volontaire ayant quitté la Chine pour améliorer son statut économique et celui de sa famille. Le raisonnement de cette décision a été centré sur l'utilisation de la position de la convention, à savoir que la maturité est un processus évolutif. Dans cette affaire, cette position a été étirée pour soutenir qu'à mesure que l'enfant vieillit, son consentement peut se voir attribuer davantage de poids et, éventuellement, avoir une force juridique avant même qu'il n'atteigne l'âge adulte.
Le droit de l'enfant à la protection contre la violence, les abus et l'exploitation n'est aucunement limité ou circonscrit du fait de son âge. La capacité limitée des enfants à se protéger signifie toujours que la prise en compte de l'âge et de la capacité ne peut qu'inciter les droits des enfants à la protection, mais jamais à les affaiblir. À tout le moins cela exige qu'un fonctionnaire canadien qui porte ce genre de jugement connaisse intimement la vie de l'enfant, sa condition sociale et aussi ce que signifie un consentement en connaissance de cause. C'est d'ailleurs le genre d'argument qu'on rencontre dans certaines régions de l'Afrique où les hommes utilisent des jeunes femmes pour avoir des relations sexuelles afin de se protéger contre le VIH et le sida. C'est cela le consentement en connaissance de cause. Mais dans certaines régions du monde, on appelle cela de la coercition sociale. C'est effectivement le débat qu'on entend lorsqu'on parle d'enfants qu'on force à devenir soldats, des enfants de la guerre et des enfants contraints à devenir des criminels dès 14 ans. Est-ce cela un consentement en connaissance de cause? Le Canada a pris position et cette enfant a été déportée. Et nous nous sommes servis de la convention pour le faire.
Nous soutenons que le Canada doit veiller à ce qu'il existe des lois adéquates pour protéger les enfants, en particulier les enfants victimes de trafic. Cela nous préoccupe tellement que nous vous citons cet exemple. À nos yeux, cela fait intervenir une foule de responsabilités que la convention impose au Canada, le droit d'avoir des professionnels informés et formés qui travaillent au sein des appareils gouvernementaux. Notre crainte est d'autant plus forte depuis le 11 septembre que nous nous inquiétons beaucoup pour nos frontières et que nous voulons les protéger.
Nous pensons également que le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux permettent parfois à l'État, au Canada, de se soustraire à ses obligations aux termes de la convention.
Les exemples de lois asymétriques abondent, surtout dans le domaine de la santé. Il y a actuellement de nombreux exemples qui prouvent l'existence d'une volonté de réparer la dégradation ou la déformation de plus en plus marquée de notre système de santé qui se voulait universel. Il suffit de vouloir pour pouvoir le faire. Au Canada, il semble y avoir une absence de volonté dans le cas des droits des enfants.
Sénateur, vous avez dit que les enfants étaient une minorité. Pour nous, les enfants sont toujours considérés au Canada comme appartenant aux adultes. Nous pensons être extrêmement prudents en faisant preuve de rectitude politique au sujet des sensibilités culturelles concernant les enfants, et pourtant nous croyons également que les droits humains ne sauraient exister sans que les droits des enfants n'y soient enchâssés. Les droits humains commencent par les droits des enfants.
L'Agence canadienne de développement international souscrit à cette opinion et nous-mêmes, c'est-à-dire Aide à l'enfance Canada, sommes financés pour offrir une formation au gouvernement du Kenya, pour offrir une formation au gouvernement éthiopien et à ses fonctionnaires, et aussi pour travailler partout dans le monde pour favoriser la participation des enfants et défendre leurs droits. Nous avons sans cesse répété notre offre aux différents ministères fédéraux du Canada, mais en vain. Nous l'avons encore fait la semaine passée. Nous nous félicitons de pouvoir former le fonctionnaires canadiens pour leur apprendre quels sont leurs devoirs et quelles sont leurs responsabilités en ce qui concerne les droits des enfants, les lois qui tiennent compte des intérêts des enfants et les écoles conçues en fonction des enfants. C'est nous qui avons aidé le gouvernement péruvien à changer la structure de ses programmes scolaires pour les enfants autochtones et à rendre l'instruction publique mieux adaptée aux besoins des enfants. Et nous serions ravis de pouvoir faire la même chose ici.
Les champs de compétence, la structure de la fédération, la Constitution et la Charte ne sont pas des obstacles aux responsables des droits des enfants. Il y a des solutions et elles existent déjà. Il y a bien d'autres États ayant une structure fédérale qui ont réussi à trouver une solution à la question des droits des enfants. Nous pourrions vous citer la Norvège, la Suède, la Nouvelle-Zélande et aussi l'Écosse, qui, dans la structure du Royaume-Uni, a un Parlement des jeunes et invite les jeunes gens à réclamer leurs droits.
En deux mots, nous croyons que notre société a les capacités nécessaires, mais non les motivations. Nous avons eu un leadership. Notre organisme, Aide à l'enfance Canada, tient à ce que ce leadership se poursuive encore pendant une génération. Nous sommes très reconnaissants aux dirigeants que nous avons eux.
En revanche, nous ne somme pas vraiment résolus à comprendre l'impact qu'ont les lois sur la vie des enfants, et notre société fait preuve d'une complaisance incroyable quant au bien-être de tous nos enfants, et en particulier de ceux qui sont marginalisés dans notre société.
Le sénateur Oliver : Je voudrais commencer par vous remercier pour ces deux excellents exposés et peut-être poser une question à Mme Blackstock.
Nous sommes à la recherche d'un modèle qui permettrait de suivre et de mettre en œuvre la Convention. Personne n'en a encore proposé un. Madame Blackstock, vous avez dit dans votre exposé que vous aimez bien le modèle de la commission néo-zélandaise. Vous pourriez peut-être nous en dire un peu plus à ce sujet et nous expliquer si et comment le Canada pourrait s'en inspirer.
Mme Blackstock : Comme vous le savez, la Nouvelle-Zélande n'est pas un État fédéral de sorte qu'elle a un seul commissaire qui est compétent pour tout le pays. Ce commissaire a été nommé pour entendre les plaintes des enfants et de leurs familles, mais également les plaintes à caractère systémique.
Le commissaire actuel est la professeure Cynthia Kiro, une femme maorie, cela étant dit en passant, et cette ascendance la rend particulièrement sensible à la question du bien-être de tous les enfants en Nouvelle-Zélande. Son personnel est composé de professionnels de toutes les disciplines. Je me suis rendue dans ses bureaux et j'ai été très impressionnée, pas uniquement par le dévouement du personnel, mais également par le juste milieu qu'elle avait réussi à établir entre les besoins des enfants et de leurs familles qui faisaient valoir ainsi leurs préoccupations, et les plaintes à caractère systémique qui ont souvent des incidences très larges pour un très grand nombre d'enfants.
Le sénateur Oliver : Voilà qui est tout à fait fascinant parce que, en Suède, le protecteur du citoyen n'a pas le droit d'intercéder pour le compte de plaignants. Pouvez-vous nous dire combien de gens travaillaient pour la commissaire néo-zélandaise lorsque vous y étiez?
Mme Blackstock : Je ne peux pas le dire avec certitude, mais dans le groupe que j'ai rencontré, il y avait environ 12 ou 14 employés.
Le sénateur Oliver : Et qui représentaient quelle discipline?
Mme Blackstock : Les sciences sociales, le droit, les droits des enfants, plus Mme Kiro elle-même qui a travaillé dans le domaine de la santé.
Le sénateur Oliver : D'après ce que vous avez pu voir, diriez-vous que la majorité de leurs problèmes étaient davantage systémiques ou y avait-il plutôt une foule de dossiers individuels issus de plaintes ou de préoccupations émanant de particuliers?
Mme Blackstock : Comme je vous l'ai dit, j'ai eu l'impression qu'il y avait un ensemble assez équilibré. Le bureau examinait certes des grands dossiers à caractère systémique, il faisait des enquêtes et formulait des recommandations utiles à caractère pragmatique et réaliste. La commission veillait aussi tout particulièrement à ce que les enfants aient le sentiment d'avoir voix au chapitre et d'être entendus à la commission.
Le sénateur Oliver : Quel âge avaient ces enfants qui venaient témoigner devant la commission? Sept, huit ou neuf ans, ou étaient-ils plus âgés?
Mme Blackstock : Si je ne me trompe pas, la commission est compétente pour tous les enfants néo-zélandais jusqu'à l'âge de 18 ans.
Le sénateur Losier-Cool : Je dois reconnaître d'emblée que lorsqu'il s'agit d'enfants, je suis un peu comme ce que disait le sénateur LaPierre, je deviens un peu gaga. Hier soir, j'ai pleuré en regardant une émission sur la Convention relative aux droits des enfants.
Je voudrais faire un commentaire d'ordre général, après quoi je poserai une question de détail à ce sujet.
Lorsque vous avez parlé de leadership, cela m'a fait penser à Roméo Dallaire à l'une de ses nombreuses conférences. Il a dit : « Nous avons créé le leadership. Maintenant, nous devons diriger. » C'était tellement vrai. Puis, il y a Bono qui a chanté à Toronto : « Le monde a besoin de plus de pays comme le Canada ». Il faut que le Canada montre l'exemple quelque part. Avons-nous besoin d'une ACDI pour le Canada?
[Français]
Quelle incidence l'application de la Convention des droits des enfants aurait sur les enfants autochtones?
Mme Karakas : Je pense que les Canadiens — et j'ai voyagé dans le monde en tant que Canadienne — sont très fiers de l'être. Surtout que je suis immigrante et que mes parents ont choisi d'immigrer à Montréal; je jouis des droits que j'ai en tant que femme et en tant qu'immigrante. Mais parfois on se trompe. Comme Canadiens, nous ne sommes pas vraiment à la hauteur de toutes nos promesses.
[Traduction]
Nous ne donnons pas toujours suite. Notre aide au développement diminue et celle des Américains augmente, je parle ici de l'aide nette. Nous avons fait des promesses qui, philosophiquement parlant, nous mettent du bon côté, mais une fois revenus à la maison, si on regarde la façon dont nous faisons la mise en œuvre, eh bien nous ne le faisons pas avec cohérence.
Il arrive souvent que nos politiques nationales fassent obstacle, or il nous faut ici même, au Canada, un outil pour le développement durable. Cela est inacceptable pour un pays aussi riche que le Canada, un pays qui prend autant de visibilité sur le plan international dans tant de domaines, un pays qui offre tant de leadership. Sans faire de bruit, par les bons offices de M. Axworthy, nous sommes en train de négocier un plan d'aide alimentaire pour l'Éthiopie. Je pourrais vous citer de nombreux exemples du même genre, mais il n'en reste pas moins que nous acceptons chez nous, dans notre propre pays, des injustices sociales dont nous ne parlons pas non plus.
Je pense donc qu'il nous faut un organe permettant à la fois le contrôle et l'exécution. Vous avez parlé d'un ministère des enfants et un des familles. Moi, j'aurais parlé d'un ministère des enfants et des familles parce qu'il arrive qu'un ministère de la famille ait une connotation politique que certaines de nous qui appartenons au mouvement pour les droits des femmes trouveraient un peu préoccupantes. Un ministère est une créature du gouvernement. Moi je préférerais quelqu'un qui soit responsable devant le Parlement. Je pense qu'il y a une différence entre les deux. Mme Blackstock parlait de cela, je crois, en évoquant le protecteur du citoyen. Les lignes de responsabilité sont différentes. Nous pouvons nous permettre d'avoir un vérificateur général et je dirais que cela est important. Mais laissez-moi vous dire également que nos enfants sont encore plus importants.
Mme Blackstock : Vous m'avez demandé si la mise en œuvre de la convention changerait le sort des enfants autochtones et ma réponse très sincère est oui.
Si nous mettions en œuvre uniquement la disposition interdisant la discrimination, si nous offrions aux collectivités le même accès aux ressources dont disposent déjà les autres enfants, je suis convaincue qu'il y aurait une amélioration notable du bien-être des enfants autochtones.
Laissez-moi vous donner un exemple de travail de recherche concernant le suicide chez les jeunes gens. Tous ici, nous avons entendu parler du nombre effarant de jeunes Autochtones qui s'enlèvent la vie chaque année. En Colombie-Britannique, Christopher Lalonde et Michael Chandler ont effectué à ce sujet une étude chez les enfants des Premières nations de la province.
Comme certains d'entre vous le savent probablement, 197 des 633 Premières nations sont en Colombie-Britannique. Au total, ce sont elles qui affichent l'un des taux de suicide les plus élevés au monde. Les professeurs Chandler et Lalonde ont commencé à dialoguer avec des membres des Premières nations, dont certains leur ont dit que c'était peut- être vrai, certes, mais que chez eux, il n'y avait eu aucun cas de suicide chez les jeunes gens depuis 13 ans. Comment cela se peut-il?
Ils ont fouillé un peu plus loin et ont découvert que 90 p. 100 des suicides survenaient dans 10 p. 100 des bandes. Dans certaines collectivités, le taux de suicide est de 0 p. 100. Imaginez un peu ce que ces collectivités pourraient apprendre au reste du Canada pour assurer la sécurité des enfants.
Quelle est donc la différence entre ces collectivités? Ce que ces chercheurs ont découvert était fort logique. Les collectivités qui comptaient un taux de suicide nul étaient celles où les décisions étaient le plus fréquemment faites au niveau de la collectivité, par exemple en matière d'éducation, de santé, de lutte contre les incendies et de services policiers, de participation des femmes dans l'administration publique et de bien-être des enfants. En revanche, les collectivités qui ne contrôlaient que très peu leurs propres décisions étaient celles qui affichaient les taux de suicide les plus élevés.
Cela est logique. Dans nos vies à nous, lorsque nous avons le sentiment de pouvoir prendre nos décisions ou encore que ce sont des gens que nous aimons et que nous apprécions qui prennent des décisions pour nous, nous nous sentons davantage maîtres de nos destinées et nous voyons plus facilement un avenir en ce qui nous concerne.
Le sénateur Losier-Cool : Le sentiment d'être du nombre.
Le sénateur Chaput : Je n'aime pas beaucoup ce que je viens d'entendre parce que ce n'est pas ainsi que les choses devraient se passer au Canada.
Cela étant dit, je voudrais poser une question concernant les Premières nations. La société que vous représentez aujourd'hui représente-t-elle les membres des Premières nations qui vivent dans les réserves mais également à l'extérieur de celles-ci? Savez-vous s'il y a une différence entre la condition des enfants dans les réserves et celles des enfants vivant en dehors des réserves? Avez-vous des chiffres ou des données à ce sujet?
Mme Blackstock : Notre société ne représente aucun groupe en particulier. Nous offrons nos services aux collectivités, aux organismes qui s'occupent du bien-être des enfants des Premières nations et qui s'occupent des enfants à la fois dans les réserves et à l'extérieur de celles-ci.
L'exemple que je vous ai donné au sujet du financement ne concerne que les réserves. Par contre, le nombre proportionnellement plus élevé d'enfants autochtones qui bénéficient du système d'aide à l'enfance est le même dans les réserves et à l'extérieur de celles-ci.
Les provinces ont chacun leur propre façon de réunir des données concernant les enfants et le bien-être des enfants. Malheureusement, tout ce que je pourrais vous donner, c'est une estimation aussi bonne qu'elle peut l'être du nombre d'enfants autochtones qui ont été recueillis, et qui s'établit entre 22 500 et 28 000. Environ 50 p. 100 d'entre eux seraient des enfants vivant hors des réserves, et donc qui sont du ressort des provinces ou, dans certains cas, des organismes d'aide à l'enfance autochtone.
Nous commençons également à obtenir des données dans le cadre de l'étude des cohortes qui commencera, c'est ce que nous espérons avec cette série-ci d'enquêtes, à étudier les différences entre enfants autochtones vivant dans les réserves et enfants autochtones vivant en dehors des réserves. Ce sera la première fois que nous aurons des données sous cet angle-là. Nous insistons pour qu'on continue à investir dans cette étude parce que ce sera le premier point de repère comparatif.
Dans le cas des séries de donnés de 1998, lorsque nous nous étions demandés pourquoi les enfants autochtones étaient ainsi recueillis. Nous avons constaté quelque chose d'étonnant, même pour les collectivités en question. Ces enfants ne sont pas portés à l'attention du système d'aide à l'enfance pour cause de sévices sexuels ou physiques, mais plutôt pour cause de négligence, et cela à la fois dans les réserves et à l'extérieur de celles-ci.
La négligence, cela peut être bien des choses. Nous voulions en découvrir davantage à ce sujet et nous avons un peu étudié ce qu'il en était du point de vue de la pauvreté, de l'insalubrité des logements et de la toxicomanie. Si nous avions fait tout cela, le système d'aide à l'enfance ne compterait pas un nombre aussi disproportionné d'enfants autochtones. C'est donc un constat important.
Lorsque je travaillais dans le domaine de la protection de l'enfance, j'allais chez les gens pour voir s'il n'y avait pas de cas de négligence, mais toujours en partant du principe que les parents étaient capables de changer les facteurs de risque. Bien sûr, s'ils sont pauvres ou s'ils vivent dans une maison délabrée, ils ne peuvent pas faire grand-chose parce qu'il y a un lien de cause à effet.
On pourrait dire, dans le cas de la toxicomanie, que c'est à la personne de faire ce qu'il faut pour combattre cela, mais encore faut-il qu'elle puisse avoir accès aux ressources nécessaires. Les travaux de recherche révèlent que, dans le cas des Autochtones, cet accès est assez difficile, et nous avons fait le même constat pendant nos recherches à la fois dans les réserves et à l'extérieur de celles-ci.
[Français]
Le sénateur Ferretti Barth : La convention a été signée il y a 15 ans?
Mme Blackstock : Oui.
Le sénateur Ferretti Barth : Vous soulevez plusieurs problèmes. Depuis les 15 dernières années quelles ont été les obstacles? Pourquoi votre institution n'a-t-elle pas fait de recommandations ou n'a-t-elle pas exposé les lacunes? En tant que sénateur du Québec et immigrante, j'ai l'impression qu'il n'y a pas d'intervention immédiate. On discute des questions, on les étudie, on fait des recommandations, puis on les mets de côté.
Pourquoi ne pas créer un organe qui fasse bouger les choses? Lorsqu'on se fixe des objectifs, il ne faut pas attendre; il faut se les ancrer dans l'âme et dans la tête pour les mener à exécution. Je ne comprends pas que nous soyons encore pris, après 15 ans, avec ces problèmes abominables. Est-ce l'appareil gouvernemental qui ne fonctionne pas bien, ou est-ce votre institution et les gens qui y travaillent qui ne prennent pas à cœur leur mandat? Qu'est-ce qui empêche les choses d'avancer? Qu'attendez-vous de nous? Il faut nous le dire. Nous sommes là pour vous aider.
[Traduction]
M. Blackstock : Pour répondre à votre question, je vous dirais que nous sommes en fait le seul organisme national sans but lucratif qui travaille expressément pour les familles et les enfants autochtones au Canada. Nous n'avons été créé qu'il y a deux ans.
Depuis lors, nous avons travaillé d'arrache-pied pour étudier la convention, pour sensibiliser nos collectivités à l'importance de celle-ci et pour leur apprendre comment ils pourraient se servir des recommandations qu'elle contient. Par ailleurs, nous avons participé à la journée du forum autochtone à Genève. Depuis lors, nous travaillons avec Anna Pinto, qui vient des Indes, afin d'arriver à constituer un sous-groupe indigène qui pourrait servir de groupe consultatif auprès du Comité sur les droits de l'enfant.
Nous avons été actifs depuis, nous avons fait tout en notre pouvoir pour attirer l'attention de nos communautés là- dessus et aussi pour faire en sorte que la Convention nous permette de faire ressortir certaines préoccupations des communautés autochtones et certains atouts magnifiques dont elles disposent. Chose encore plus importante, nous tenons à affirmer qu'il y a des solutions à ces problèmes. Ce qu'il faut, vraiment, c'est s'engager à en faire une priorité nationale et à investir dans l'égalité. Ce sont les messages que nous véhiculons chez nous. Nous voulons faire partie de la solution.
Bon nombre des membres de nos conseils d'administration ont siégé à des comités nationaux parce qu'il ne suffit pas d'identifier simplement les problèmes. Nous devons travailler de concert à l'élaboration de solutions et contrôler ce qui est fait. Il y a une génération d'enfants qui attendent que nous comblions leurs besoins maintenant.
[Français]
Mme Karakas : Je pense que, dans le domaine des communautés autochtones, la responsabilité demeure à Ottawa. Ce n'est pas une question de ping-pong entre les juridictions. Donc, je souhaite qu'une de vos recommandations soit de prioriser cela.
Deuxièmement, il y a beaucoup d'enfants au Canada qui souffrent de la pauvreté, à l'intérieur de familles où la mère est la seule adulte au travail. Ils souffrent d'une pauvreté économique qui dépend énormément des relations intergouvernementales. Je pense que c'est une longue lutte. On croit au Canada que nous allons créer des juridictions de protection de la jeunesse et que le problème sera réglé. On refuse quand même au Canada d'aborder la problématique, malheureusement.
Nous préférons notre confort plutôt que d'aborder les problèmes systématiquement. Je pense que le déficit dans le budget a remplacé un langage positif d'action sociale, de justice sociale. Les deux ne vont pas ensemble. On peut avoir une responsabilité fiscale et importante pour l'avenir de nos enfants, et en même temps avoir des politiques progressistes, justes et sociales.
On permet au Canada l'exclusion de toute une génération d'enfants autochtones. C'est dramatique. Et on vous dit que c'est tout à fait inacceptable.
Le sénateur Ferretti Barth : Je pense, avec beaucoup d'humilité, qu'il y a, au Québec, trop d'institutions, trop d'agences qui s'occupent des enfants. Tout le monde veut faire quelque chose. Il n'y a pas de coordination. La seule coordination qu'il y a c'est de dire que c'est le territoire, c'est le milieu qu'il faut attaquer tout de suite. Les énergies sont dispersées.
Mme Karakas : Avant de me présenter ici, j'étais préoccupée par les réponses qui venaient des problèmes après le tsunami, en Indochine, en Indonésie et au Sri Lanka, parce que nous avons des bureaux à ces endroits. Une des premières choses qu'on fait, c'est de coordonner qui va faire quoi et où. Je crois qu'il y a une coordination auprès des ONG, auprès des organisations communautaires. Là où on manque de coordination, d'alignement, c'est dans les juridictions et les régimes régulatoires.
Mais il y a aussi autre chose. J'ai déjà travaillé dans le secteur de la protection des enfants à Montréal, et quand on voit que de plus en plus souvent, on demande moins d'expérience aux gens qui travaillent en première ligne, les salaires sont moindres, on demande un niveau de scolarité très bas et on donne une charge incroyable, je m'interroge de savoir où on met notre priorité. Il est possible qu'il y ait des centres de services sociaux ici et là. On peut engager des responsables qui détiennent des diplômes collégiaux, et les placer dans des circonstances très graves. Je me dis qu'on ne prend pas ce problème assez au sérieux au Canada.
[Traduction]
Le sénateur Oliver : Ma question s'adresse à Mme Karakas. Un comité comme le nôtre entend des témoins au cours de ses travaux, après quoi il faut des recommandations. Je veux parler de l'une de vos recommandations. Vous dites que nous devons donner la formation voulue aux professionnels des droits de l'enfance, dont les juges, les enfants, les enseignants et autres responsables. Ce genre de formation est-il disponible au Canada?
Mme Karakas : Oui, et nous l'assurons.
Le sénateur Oliver : Est-elle efficace?
Mme Karakas :On ne s'en sert pas. Nous n'avons pas les ressources voulues, mais abstraction faite de cela, nous devrions pouvoir participer et collaborer. Le problème ne tient pas toujours au financement. Nous avons une expertise en matière de droits de l'enfance, et nous formons de gens de l'ACDI et des autres gouvernements.
Le sénateur Oliver : Les juges des cours supérieurs du Canada de toutes les provinces sont-ils formés?
Mme Karakas : Non, ils n'ont aucune obligation de formation. Il n'y a aucune obligation, mais nous serions heureux de leur assurer cette formation. Ce n'est pas seulement une question d'argent.
Le sénateur Oliver : Qu'en est-il des barreaux provinciaux?
Mme Karakas : On forme les avocats aux lois provinciales et fédérales qui touchent les enfants, et cela est différent des droits de l'enfance et de la Convention.
Le sénateur Oliver : S'il existe une formation en ce moment, que devrait recommander le comité?
Mme Karakas : Vous devriez recommander que l'on assure une formation non seulement à titre de minimum pour comprendre la Convention, ses liens aux règlements ou à l'application des lois au Canada dans les juridictions où ces lois sont mises en œuvre, mais aussi la rééducation parce que la Convention est un document organique, vivant. Il existe de nombreux instituts — l'un en Colombie-Britannique et l'autre sur la côte Est. Notre institut n'est pas le seul. La capacité existe. On nous engage pour former les gens d'autres gouvernements et on ne nous invite même pas à former des fonctionnaires canadiens. Nous avons offert cette formation la semaine dernière au ministère du Développement social qui relève du ministre Ken Dryden.
Le sénateur Oliver : Plutôt que d'avoir toute une série de modules de formation, devrions-nous avoir un seul module normalisé?
Mme Karakas : Il s'agit de normes universelles. La Convention est la Convention, et on ne peut pas en dévier. Nous serions heureux que quelqu'un assure la mise en place de toute la formation, la conservation des documents et la formation pertinente à la jurisprudence. Cela est également essentiel. Cependant, notre recommandation relative à la formation s'adresse aussi aux décideurs de première ligne, par exemple, les commissions qui entendent les réfugiés et les fonctionnaires des douanes. Nous avions un programme qu'on appelait « Right Way », que nous n'avons plus les moyens de financer, et que les défenseurs de l'enfance partout au pays ont suivi. Nous procédons en ce moment à une évaluation qui nous permettra d'améliorer le programme et de le pousser plus loin. Cependant, il s'agit ici de former des enfants détenus à la connaissance de leurs droits. Nous serions heureux de former des gardiens aussi. Vous n'en reviendriez pas de voir des conditions de la garde préventive dans lesquelles certains enfants se retrouvent au Canada. Je me demande qui protège qui?
Le sénateur Oliver : Si nous devions examiner un autre modèle, comme celui du commissaire de la Nouvelle-Zélande ou de l'ombudsman suédois, croyez-vous que c'est à ce niveau qu'il faudrait centraliser la formation, ou préféreriez- vous qu'elle soit décentralisée et confiée aux territoires, régions et provinces?
Mme Karakas : Plus elle est proche de l'usager, meilleure est la formation. Il faut cloisonner les responsabilités, la reddition de comptes, les contrôles, la vérification et la certification. Nous cherchons en ce moment un design qui nous permettrait de certifier les plantations de cacao où les enfants travailleraient en toute sécurité. Nous n'avons pas parlé du travail, mais il se pose aussi des problèmes importants concernant le travail des enfants dans notre pays. Nous avons recommandé la création d'une instance qui rendrait des comptes au Parlement, qui n'aurait aucun lien politique, si vous voulez, avec les défenseurs des droits de l'enfance. La notion d'ombudsman est différente de la notion de défenseur, et les deux doivent être bien mûris et combinés. Un défenseur est proactif tandis qu'un ombudsman fait œuvre de médiateur.
Comme dans le cas du commissaire aux langues officielles, il faut qu'il y ait une loi habilitante de telle sorte que le commissaire ait des moyens aussi, tout comme le vérificateur général dispose de moyens. Il faut qu'il ait la capacité d'agir, d'intervenir. Ce peut être n'importe quel genre de combinaison, et il existe un grand nombre de modèles. Ça n'a pas besoin de coûter une fortune. Cependant, nous devons départager la juridiction des provinces, des territoires et du gouvernement fédéral. Dans ce cadre, les enfants vivent dans des communautés. Ils ne vivent pas dans des provinces. Ils vivent dans des villages, des petites villes, des hameaux et des municipalités. Il faut tenir compte de tout cela. Les maires sont essentiels ici. L'itinérance est très souvent un problème propre aux grands centres urbains.
Mme Blackstock : Je crois que ces initiatives de formation sont essentielles, mais nous devons comprendre et aller plus loin que simplement fournir des informations, c'est-à-dire qu'il faut avoir le courage de se demander pourquoi il y a eu des cas où on a attenté aux droits des enfants et n'avons rien fait. Comment se fait-il que les choses se soient tellement normalisées dans notre société que parfois nous ne voyons même pas qu'il y a eu violation de droits?
Je vais vous donner l'exemple de la Loi sur les Indiens. Quand un enfant autochtone naît au Canada aujourd'hui, le gouvernement du Canada détermine par des règles du sang s'il peut avoir le statut d'Indien inscrit. S'il est Indien inscrit conformément aux règles du sang, on lui émet un certificat de statut d'Indien ou une carte d'enregistrement. Cela confère certains droits à cet enfant, mais cela fait aussi de cet enfant, légalement, un pupille du gouvernement du Canada. Si je devais vous décrire ce scénario, vous penseriez que c'est le genre de choses que nous avons tous combattues courageusement dans notre pays à l'époque du régime d'apartheid en Afrique du Sud, et pourtant, cet état de chose est normalisé au sein de notre société canadienne. Nous avons créé un système avec des enfants avec statut et sans statut. Pour moi, il ne saurait y avoir d'enfants sans statut. Tous les enfants ont un statut. En ce qui me concerne, tous les enfants ont un statut. Nous devons prendre conscience du fait que nous nous sommes habitués à ces choses et que dans certains cas, elles sont invisibles. Nous devons en faire une partie de notre devoir de vigilance. Dans tout programme de formation, cela fait partie des choses que fait un pays courageux qui croit vraiment aux droits de la personne.
[Français]
Le sénateur Ferretti Barth : Je vous félicite pour votre courage au sein de l'organisme Save the Children Canada. Votre mandat est d'améliorer immédiatement la vie des enfants en faisant connaître leurs droits. J'espère que vous allez réussir à le faire. Ce sera un peu difficile, mais avec une très bonne volonté et votre enthousiasme, vous allez sans doute arriver à faire respecter les droits des enfants, quel que soit leur statut.
Madame Karakas, j'ai lu sur le site Web que vous avez recueilli 2,3 millions de dollars pour aider les enfants victimes du tsunami en Asie du Sud-Est. Est-ce une donnée à jour?
Mme Karakas : C'est plus que cela maintenant.
Le sénateur Ferretti Barth : Combien d'enfants avez-vous pu rejoindre jusqu'à maintenant?
Mme Karakas : Nous en avons rejoint 775 000. Nous prenons soin de 310 000 enfants au Soudan. Nous sommes responsables de la protection des enfants à Benda Aceh et au Sri Lanka. Au Sri Lanka, nous sommes entièrement responsables des besoins de 110 familles. En Inde, nous commençons notre travail. Malheureusement, nous avons décidé de ne pas aller en Somalie parce que les besoins ne sont pas aussi nécessaires. Nous venons d'obtenir un mandat pour étudier d'autres régions touchées par le tsunami. Nous travaillons très fort. Nous travaillons aussi en Afrique avec les enfants atteints du VIH/sida.
Cependant, nous ne travaillons pas assez au Canada. Nous ne pouvons pas être fiers de notre travail au Sri Lanka si nous ne sommes pas aussi fiers de notre travail ici.
Le sénateur Ferretti Barth : Mais tout cela, ce n'est pas directement pour chaque enfant?
Mme Karakas : Nous sommes directement responsables de la nourriture, de la santé, de la sécurité et de la scolarisation.
Le sénateur Ferretti Barth : Individuellement?
Mme Karakas : Oui, nous sommes opérationnels. Nous fournissons les services. Au Canada, nous ne sommes pas opérationnels, nous travaillons avec d'autres groupes et ceux-ci nous aident à améliorer notre travail afin que nous puissions continuer.
[Traduction]
Nous fournissons des services opérationnels directs partout dans le monde.
[Français]
Le sénateur Ferretti Barth : Êtes-vous responsables de l'enfant jusqu'à ce qu'il soit autonome?
Mme Karakas : Jusqu'à ce qu'il ait atteint l'âge de 18 ans.
[Traduction]
La vice-présidente : Qu'est-ce que notre comité apprendrait de plus s'il entendait des jeunes?
Mme Blackstock : C'est qu'il s'agit d'eux. Ils sont la raison d'être de la Convention. On parle seulement de participation des jeunes, mais je crois que ceux qui sont les mieux placés pour parler de leurs droits et de la perception qu'ils ont du respect de leurs droits, ce sont les enfants et les jeunes gens eux-mêmes. Je recommande fortement au comité de tendre la main à l'Assemblée des Premières nations, à l'Inuit Tapiriit Kanatami, aux centres d'amitié et au Ralliement national des Métis. Invitez leurs jeunes à venir s'adresser à vous directement. Je crois que vous allez également voir une lueur d'espoir de ce côté. Ils sont absolument brillants. En dépit de tous les obstacles, ces jeunes gens talentueux veulent changer des choses, pas seulement pour les Autochtones mais pour tous les Canadiens. J'espère vivement que le comité aura l'occasion de rencontrer ces jeunes gens.
Mme Karakas : Je suis d'accord. La liberté d'expression et l'autodétermination sont des droits fondamentaux. À notre avis, les jeunes ont besoin d'une intervention appropriée et non de gestes symboliques. Je sais que ce comité, sous votre direction, ferait en sorte que ce ne soit pas symbolique. Il faut écouter les jeunes : ils ont des choses importantes à dire. Il me ferait grand plaisir de vous offrir nos services, si vous en avez besoin, pour organiser ces rencontres. La participation des enfants doit être un pilier des droits des enfants dans l'évolution de notre société. On a tendance à dire que les enfants devraient être vus mais pas entendus, et pour cette raison ils n'ont pas de droits. Il faut encourager les enfants à participer afin d'avoir un impact. Votre comité en profiterait beaucoup.
La vice-présidente : Merci pour ces mots rassurants. Comme vous le savez, je suis d'accord avec vous, mais je crois qu'il serait bon que nous convenions tous de l'importance d'entendre des enfants.
Merci à vous deux. Votre participation nous a beaucoup aidé dans la définition de nos thèmes. J'espère que vous allez surveiller nos travaux sur CPAC. La semaine prochaine, nous entendrons des témoins représentant les organismes extraordinaires qui travaillent dans ce milieu.
Mme Karakas : Tout cela est très encourageant pour nous. Nous allons non seulement suivre vos travaux, mais comme nous n'avons pas eu beaucoup de temps pour élaborer notre présentation, il nous fera plaisir de vous fournir d'autres renseignements, si vous en avez besoin.
La séance est levée.