Délibérations du comité sénatorial permanent des
Droits de la personne
Fascicule 15 - Témoignages
OTTAWA, le lundi 6 juin 2005
Le Comité sénatorial permanent des droits de la personne s'est réuni ce jour à 16 heures, pour examiner, en vue d'en faire rapport, les obligations internationales du Canada relativement aux droits et libertés des enfants.
Le sénateur A. Raynell Andreychuk (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente : Honorables sénateurs, je dois tout d'abord vous demandez de pardonner mon manque de voix. Je viens juste de rentrer et je n'ai pas encore retrouvé tous mes moyens. Je ne serai pas agréable à entendre mais on peut espérer que c'est le ministre qui va parler.
Le ministre Dosanjh, ministre de Santé Canada, est notre témoin et il est accompagné de ses collaborateurs du ministère qu'il nous présentera certainement en temps voulu. Nous sommes là pour examiner en vue d'un futur rapport les obligations internationales du Canada en ce qui concerne les droits et libertés des enfants, et notamment la Convention des Nations Unies relativement aux droits de l'enfant.
L'honorable Ujjal Dosanjh, C.P., député, ministre de Santé Canada : Je suis accompagné de Claude Rocan, directeur général, Centre de développement de la santé humaine, Direction générale de la santé de la population et de la santé publique, Santé Canada, Kelly Stone, directrice de la Division de l'enfance et de l'adolescence de l'Agence de santé publique du Canada, et Dawn Walker, conseillère invitée à la Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits de Santé Canada.
M. Dosanjh : Je vous remercie, sénateurs, de me donner l'occasion de réitérer la volonté du gouvernement du Canada de promouvoir la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant (CNUDE). C'est une priorité et un secteur d'intervention depuis que le Canada s'est joint à la communauté internationale dans le cadre du Sommet mondial pour les enfants où les gouvernements se sont engagés à offrir à tous les enfants de la Terre la possibilité d'un meilleur avenir.
Notre réponse à la Convention des Nations Unies est le programme Un Canada digne des enfants. Les investissements fédéraux successifs — avant et après l'adoption du rapport Un Canada digne des enfants en 2004 — font en sorte que nos plus jeunes citoyens peuvent compter sur un bon départ dans la vie et que leurs familles disposent des outils nécessaires pour prendre soin d'eux et favoriser leur épanouissement.
Grâce à ces investissements, le gouvernement du Canada facilite l'accès à des soins de santé de qualité et favorise l'activité physique et le sport pour vivre sainement. Ces investissements bonifient l'aide financière destinée aux enfants de familles pauvres afin de mettre fin au cycle de la pauvreté. Nous appuyons les collectivités autochtones pour que leurs enfants profitent pleinement des possibilités qu'offre le Canada. Nous renforçons notre capacité de protéger les enfants contre la violence et l'exploitation sous toutes leurs formes. Nous accordons un soutien particulier aux familles qui s'occupent d'enfants gravement handicapés et nous offrons à toutes les familles canadiennes des occasions d'apprentissage ainsi que l'accès à des soins de qualité pour les enfants, point de départ du chemin qui mène vers l'épanouissement.
La responsabilité du gouvernement fédéral quant à la mise en œuvre de la Convention incombe conjointement à la Section du droit de la famille de Justice Canada et à la Division de l'enfance et de l'adolescence (DEA) de l'Agence de santé publique du Canada qui est sous ma responsabilité, à titre de ministre de la Santé. Les deux groupes coordonnent la rédaction de rapports périodiques à l'intention des Nations Unies sur la mise en œuvre et la surveillance de la Convention relative aux droits de l'enfant. Nous devrions faire notre prochain rapport aux Nations Unies en 2009. J'aimerais donner un aperçu de quelques-unes des activités dont fera état ce rapport et qui concerne en particulier nos initiatives visant à assurer la santé et le développement des enfants au Canada.
Comme l'expliquait la Dre Carolyn Bennett, ministre d'État à la Santé publique, dans son allocution devant ce comité, le Programme d'action communautaire pour les enfants, le Programme canadien de nutrition prénatale et le Programme d'aide préscolaire aux Autochtones dans les collectivités urbaines et nordiques font partie d'une série de programmes nationaux destinés aux enfants. Ces programmes communautaires appuient les familles et renforcent les communautés, font la promotion de styles de vie propices à la santé, protègent les enfants contre les méfaits et favorisent l'éducation et l'apprentissage.
L'Agence de santé publique du Canada favorise en outre les programmes d'aide parentale, comme Y'a personne de parfait, et le Programme d'aide postnatale aux parents, ainsi que des initiatives liées aux troubles du spectre de l'alcoolisation fœtale. Nos centres d'excellence pour le bien-être des enfants participent à la recherche dans ces domaines et ce nouveau savoir pourra se concrétiser en résultats favorables pour les enfants du Canada.
Tous nos programmes visent les enfants canadiens les plus vulnérables, en particulier les enfants autochtones, un des principaux secteurs de responsabilité de mon ministère. La Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits de Santé Canada joue un rôle à l'échelle nationale dans la prestation de services de santé publique, notamment la vaccination des enfants des Premières nations qui vivent dans les réserves et la prestation de soins de santé primaires aux enfants des Premières nations de communautés éloignées et isolées.
La direction met en œuvre des programmes communautaires qui se dévouent pour servir les enfants et les familles des réserves des Premières nations et des communautés inuites, comme le Programme d'aide préscolaire aux Autochtones des réserves et les volets sur les Premières nations et les Inuits du Programme canadien de nutrition prénatale et du Programme sur les troubles du spectre de l'alcoolisation fœtale. Outre ces initiatives, notre programme Grandir ensemble aide les collectivités inuites et des Premières nations à mettre au point des programmes adaptés aux différentes cultures dans les domaines de la santé mentale communautaire, du développement de l'enfant, de la prévention des blessures, des compétences parentales et de la santé infantile.
Le budget 2005 prévoit l'affectation de fonds pour la santé des mères et des enfants et le développement des jeunes enfants, deux investissements en amont très importants. Bien qu'il soit difficile d'établir un lien causal, nous espérons que la chute spectaculaire du taux de mortalité infantile dans les Premières nations, qui est passé de 27,6 pour 1 000 en 1979 à 6,4 pour 1 000 en 2000, est due en partie au travail des gouvernements successifs pour réduire les disparités entre les Autochtones et le reste de la population en matière de santé.
Nous pouvons citer des résultats très concrets qui démontrent des progrès mesurables. Notre bonification du budget du Programme d'aide préscolaire aux Autochtones dans les réserves, par exemple, a permis de lancer 47 nouveaux projets qui ont permis de rejoindre 2 000 enfants de plus au cours des trois dernières années. Les résultats mesurables et le financement accru que nous constatons vont de pair avec la conviction du gouvernement du Canada que nous devons faire davantage pour offrir aux enfants autochtones au pays le meilleur départ possible dans la vie et une qualité de vie constante.
La réussite de nos efforts pour créer Un Canada digne des enfants, nous en partageons le mérite avec nos partenaires. Nous travaillons de concert avec les autorités sanitaires provinciales et régionales, les professionnels de la santé et des services sociaux, le secteur bénévole, les collectivités autochtones et les familles canadiennes pour faire en sorte que nos enfants puissent grandir dans des milieux sécuritaires et propices à leur épanouissement.
Des partenariats productifs avec les provinces et les territoires sont essentiels pour que nous puissions respecter les engagements du Canada, en vertu de la Convention relative aux droits de l'enfant. Nous collaborons afin que nos activités soient complémentaires et se renforcent mutuellement, de manière à ce qu'aucun enfant ne soit oublié.
Le programme de développement de la petite enfance est un bon exemple de ce type de partenariat. Nous avons fait des progrès remarquables au cours des dernières semaines pour assurer la mise en oeuvre de ce programme. Le premier ministre Martin et le ministre du Développement social, Ken Dryden, ont conclu des accords de principe avec cinq provinces dans le domaine de l'apprentissage et de la garde des jeunes enfants. Ces provinces tireront profit de l'engagement de 5 milliards de dollars en cinq ans, prévu au budget de 2005, en vue d'établir un système d'apprentissage et de garde des jeunes enfants dans chaque province et territoire au pays.
Des 5 milliards de dollars alloués, 100 millions sont destinés aux Premières nations vivant dans les réserves afin de poursuivre le partenariat avec ces communautés, pour trouver des solutions pratiques pour répondre aux besoins d'apprentissage et de garde des jeunes enfants dans les réserves. L'injection de ces nouveaux fonds fédéraux favorisera énormément l'accès à des services de garde de qualité pour nos enfants, ce qui est essentiel pour favoriser leur épanouissement.
Le plan décennal de consolidation des soins de santé au Canada, entente que les premiers ministres ont conclu en septembre dernier, confirme également notre volonté de miser sur le partenariat au bénéfice des enfants du Canada. Tous les gouvernements ont convenu d'accélérer le renouveau des soins de santé primaires, afin que 50 p. 100 de la population, et notamment des enfants, aient accès à des services complets de santé primaire 24 heures sur 24 et 7 jours par semaine d'ici à 2011.
Un des nombreux résultats positifs du plan décennal est le processus d'objectifs en santé publique. La Dre Bennett a indiqué que dans toutes les provinces qu'elle a visitées à ce jour, pourvoir aux besoins des enfants du Canada est le thème principal parmi les six thèmes couverts par le processus d'objectifs en santé. Ceci me confirme la détermination des Canadiens à offrir un monde meilleur à nos enfants. Nous savons que notre plus belle réalisation sera de bâtir un pays rempli d'enfants heureux, choyés, aimés et en santé qui bâtiront la société et l'économie de demain.
Pourtant, il faut bien l'admettre, tous les enfants ne partent pas égaux. Pour nous aider à mieux comprendre et satisfaire les besoins de ces enfants, l'Étude canadienne sur l'incidence des signalements de cas de violence et de négligence envers les enfants dresse un portrait plus précis de l'ampleur des obstacles que doivent surmonter les enfants les plus vulnérables du pays.
Les données issues de l'étude aide le public et les professionnels à prendre conscience des types de violence et de négligence dont sont victimes les enfants et de leur gravité. Elles constituent en outre un fondement scientifique solide pour orienter les politiques et les programmes axés sur la prévention des mauvais traitements infligés aux enfants — une priorité de la Convention relative aux droits de l'enfant.
Nous avons recueilli les données du deuxième cycle de l'étude sur l'incidence au cours de 2003, qui couvrait quelque 10 000 enquêtes sur des mauvais traitements infligés aux enfants dans 63 sites au pays, dont huit communautés des Premières nations. Ces données serviront à approfondir nos connaissances au sujet des mauvais traitements infligés aux enfants autochtones, un des principaux aspects soulevés par les Nations Unies. Nous procédons à l'analyse des données et prévoyons diffuser un rapport final plus tard cette année.
La fréquence des cas de violence et de négligence à l'égard des enfants confirme tout le travail qu'il reste à faire pour assurer à tous les enfants du Canada la possibilité de grandir en santé, dans des milieux sécuritaires et propices à leur épanouissement.
Pour nous assurer de satisfaire à ces besoins et à nos obligations internationales, nous devons continuer à collaborer avec les provinces et les territoires. La Convention relative aux droits de l'enfant reconnaît que chaque État doit déterminer la meilleure façon de respecter ses obligations, puisque chaque État possède sa propre structure et que les approches peuvent varier. Par conséquent, on ne peut satisfaire les besoins des enfants du Canada en matière de santé sans établir un partenariat solide entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux.
J'ai été heureux d'être en Inde le 7 avril 2005 pour la Journée mondiale de la santé. Le thème de cette année était la santé de la mère et de l'enfant. Le titre de l'étude était : « Donnons sa chance à chaque mère et à chaque enfant. » Pour marquer cette journée mondiale, l'Agence de santé publique du Canada a publié un rapport sur la santé des mères et des enfants au Canada. Ce rapport indique que celle-ci est en général parmi les meilleures au monde. Nous ne pouvons toutefois nous reposer sur nos lauriers. Nous devons reconnaître les nouveaux problèmes et les disparités actuelles, notamment le nombre croissant de naissances prématurées, les taux croissants d'obésité et le gouffre que représente la santé pour les nations pauvres.
Dans ce contexte, la ministre Carroll a également annoncé 90 millions de dollars pour aider à améliorer la santé des mères et des enfants dans les pays en développement.
Pour conclure, je tiens à souligner l'immense service qu'a rendu le sénateur Pearson et les membres du comité, un groupe dévoué et déterminé à favoriser le bien-être de nos plus jeunes citoyens et le respect de leurs droits. Grâce à vos efforts et aux initiatives remarquables que j'ai mentionnés brièvement dans mon allocution, je crois que nous pouvons tous être fiers de l'héritage que nous léguerons à la prochaine génération.
Le sénateur Pearson : Monsieur le ministre, nous sommes très heureux que vous soyez ici et que vous nous ayez confirmé la détermination de votre ministère et du ministère de la Justice à mettre en œuvre la convention.
Nous sommes ici pour étudier nos obligations relativement aux droits et libertés des enfants. Dans votre exposé, vous avez parlé davantage de besoins que de droits. La convention stipule que les enfants ont le droit à la meilleure santé possible et cela peut nous aider à envisager la question dans une perspective légèrement différente.
Que dites-vous de la différence entre une démarche fondée sur les droits et une qui est fondée sur les besoins? Il existe une distinction. Votre ministère a des responsabilités énormes à la fois en ce qui concerne les droits et en ce qui concerne les besoins.
En outre, à propos du rapport au comité, alors que nos troisième et quatrième rapports sont prévus pour 2009, nous regroupons neuf ans d'expérience, et du fait de votre connaissance considérable des relations fédérales-provinciales et des défis que cela présente, il est évident que ce travail devrait commencer presque immédiatement. Avez-vous lancé le processus?
Enfin, le conseil des ministres a adopté le document « Un Canada digne des enfants » sur lequel nous devons présenter un rapport. Cela a-t-il commencé? Je reconnais que je vous ai posé là une longue question. Tout cela nous intéresse beaucoup.
M. Dosanjh : Je répondrai à la première question et je demanderai aux fonctionnaires d'ajouter éventuellement quelque chose.
Ce rapport est sorti en avril 2004. Je n'étais pas encore député à l'époque. Les fonctionnaires m'ont dit ce matin que je devais le lire de la première à la dernière page. Je n'ai pas encore eu le temps de le faire mais je le ferai.
Ils pourront vous dire ce qu'ils font à ce sujet. Je conviens qu'il y a une distinction entre une démarche fondée sur les besoins et une démarche fondée sur les droits. À mon avis, ce genre de droits n'est jamais abstrait. Il faut déterminer à quel niveau les besoins doivent être satisfaits et cela devient, par définition, des droits, si c'est ainsi que l'on perçoit les choses.
Je reconnais que si l'on envisage d'abord les droits, cela peut aboutir à des moyens plus costauds. Je comprends ce que vous voulez dire mais je crois que nous devons nous préoccuper des besoins, sans oublier que les gens, et les enfants en particulier, ont des droits. Nous devons penser en termes de ces droits. Si nous pensons qu'une partie de la société a certains droits, cela nous obligera à respecter ces droits.
Je comprends la distinction que vous faites. Je demanderais à l'un des fonctionnaires de répondre à la question touchant les rapports.
Mme Kelly Stone, directrice, Division de l'enfance et l'adolescence, Santé Canada : La Division de l'enfance et de l'adolescence du ministère de la Justice coordonne le travail entourant ces rapports. C'est une tâche très lourde car aucun d'entre nous n'a une fonction spéciale ni un secteur entièrement consacré à cette question ou à la préparation de ce rapport, si bien que nous devons collaborer. Nous avons un comité interministériel avec lequel nous travaillons depuis quelques années. Cela nous a aidés à nous préparer pour le dernier rapport et pour la comparution de la délégation du Canada devant le Comité des Nations Unies sur les droits de l'enfant à Genève en 2003. Nous avons maintenu ce groupe et poursuivi cette collaboration. Nous nous réunissons de temps à autre pour comparer nos notes sur tout un éventail d'initiatives dans nos ministères respectifs et, dans le cas du ministère de la Justice, sur les initiatives législatives. Patrimoine canadien a un comité fédéral-provincial-territorial qui nous permet de nous pencher sur les aspects plus mécaniques de cette dynamique.
Comme vous pouvez l'imaginer, considérer ce que font toutes les provinces et les territoires face à ce que fait le gouvernement fédéral est une tâche énorme. Si nous attendons à la fin pour le faire, ce sera trop difficile. Nous nous réunissons périodiquement, surtout par téléconférence, afin de nous tenir informés pour la préparation de ce rapport.
Je suis assez certaine que le ministère de la Justice et Santé Canada seront les principaux responsables du prochain rapport. Nous ferons tout ce que nous pouvons pour suivre l'évolution des choses sur les initiatives clés avant de commencer à rédiger le rapport.
Le sénateur Pearson : Le temps file vite. Il n'y a que trois ans.
Mme Stone : Je sais et cela prend au moins deux ans pour préparer un tel rapport.
Le sénateur Pearson : Nous avons eu un excellent exposé du commissaire à l'enfance de la Nouvelle-Zélande, Mme Cynthia Cairo. Une loi l'oblige à écouter les enfants. Alors que vous préparez ce rapport, nous tenons à vous rappeler que la loi vous oblige vous aussi à veiller à ce que les enfants aient l'occasion d'y prendre part.
Mme Dawn Walker, conseillère spéciale, Politiques, planification et analyse stratégiques, Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits, Santé Canada : Je pourrais ajouter quelque chose à la discussion sur les droits et les besoins, dans le contexte de la direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits. Nous partons du principe qu'un enfant a le droit de parvenir à son plein développement, doit recevoir des soins de santé et tous les autres droits stipulés dans Un Canada digne des enfants et dans la convention précédente, de même que le droit de vivre avec sa famille. Nous travaillons à la réalisation de ces droits malgré les problèmes Nord-Sud et malgré les problèmes historiques dont a certainement parlé Cindy Blackstock à propos des pensionnats et de l'héritage du colonialisme et de ce genre de chose.
Le sénateur Oliver : Oui, elle l'a fait.
Mme Walker : Les programmes de développement reconnaissent qu'un enfant qui se développe a ces droits-là. Nous cherchons le meilleur moyen d'offrir appui et services afin que les enfants puissent se développer au mieux, car c'est leur droit.
Le sénateur Carstairs : Les questions que je vais vous poser touchent un domaine tout à fait différent. Tout d'abord, il faut dire que l'article 43 du Code criminel nous empêche de respecter nos obligations en vertu de la Convention relative aux droits de l'enfant. Nous permettons encore le châtiment corporel des enfants. Le ministre de la Justice a affirmé qu'il n'avait pas l'intention d'abroger cet article.
Que fait-on, éventuellement, pour changer les attitudes? Nous savons que les parents qui sont renseignés sur les mesures disciplinaires différentes ont tendance à ne pas avoir recours au châtiment corporel à l'endroit de leurs enfants.
M. Dosanjh : Le débat dure depuis un certain temps. Je n'y ai pas participé. Cette question que vous me posez soulève un sujet tout à fait nouveau pour moi. Je propose de recueillir votre point de vue et de parler au ministre de la Justice afin de déterminer où nous en sommes à cet égard.
Mme Stone : Nos programmes nationaux à l'intention des enfants nous offrent des occasions remarquables. J'en ai parlé quand je suis venue témoigner ici avec la ministre Bennett. Nous offrons 1 000 projets dans 7 000 collectivités à l'échelle du pays et cela constitue un réseau qui nous permet de rejoindre les parents et les familles à risque, surtout en ce qui a trait à la maltraitance, qui est le sujet de l'article 43.
Grâce à ce vaste réseau, nous avons travaillé ardemment pour mettre en œuvre le programme « Personne n'est parfait », qui comporte une série de dépliants et de manuels de formation n'exigeant que le niveau de lecture d'une quatrième année. C'est publié en plusieurs langues, y compris les langues autochtones. Cette documentation est utilisée d'un bout à l'autre du pays, en Amérique du Sud et au Japon. Le ministère de la Justice a participé au financement du programme « Personne n'est parfait » et à la mise à jour faite il y a quelques années en partenariat avec le portefeuille de la santé. Notre réseau nous permet de mettre ce programme en œuvre et de travailler avec d'autres ministères comme Citoyenneté et Immigration pour garantir que les parents et les familles à risque reçoivent des conseils pour exercer leurs responsabilités parentales de façon positive.
En Colombie-Britannique, « Personne n'est parfait » n'est pas utilisé uniquement avec les familles à risque. Nous essayons de transmettre le message, à savoir qu'il n'est jamais admissible de frapper un enfant, et ce message est diffusé grâce à des programmes comme celui-là et par l'intermédiaire du réseau que nous avons constitué.
Le sénateur Carstairs : Ma question maintenant porte sur la communauté autochtone. Il est difficile pour un enfant d'atteindre son plein potentiel s'il se suicide et nous savons que le taux de suicide chez les jeunes Autochtones est plus élevé que dans tout autre groupe au Canada. Que faisons-nous pour rejoindre ces enfants, pour leur donner le sentiment que leur vie a de la valeur afin qu'ils ne se suicident pas.
M. Dosanjh : Je vais vous répondre de façon générale et ensuite les fonctionnaires vous donneront des détails précis.
Vous savez que nous avons réservé 700 millions de dollars pour la santé des communautés autochtones. Une grande part de ces fonds servira à investir en amont pour prévenir le suicide.
Nous sommes en train de préparer le modèle. Dans quelques jours, nous aurons une réunion au cours de laquelle nous discuterons certains de ces enjeux et il y aura peut-être une conférence des premiers ministres à l'automne pour mettre la dernière main à ces dossiers, notamment à celui de la santé.
Mme Walker : Je vais vous donner quelques précisions. On envisage une approche à trois volets orientée vers la prévention du suicide. Il y aura des soins primaires, une prévention secondaire et des soins tertiaires, avec l'appui de professionnels comme des psychologues et des psychiatres. L'ITK du Canada et l'Assemblée des Premières nations y travaillent en très étroit partenariat afin que cela corresponde aux besoins de la collectivité.
Nos cadres de programmes sont presque terminés en vue des négociations finales. Il s'agit d'une bonne approche à plusieurs volets pour prévenir le suicide mais en outre, nous continuons de discuter d'un cadre plus général pour la santé mentale.
Cet investissement en amont comporte en outre 120 millions de dollars pour la santé maternelle. Nous cherchons à améliorer les soins prénataux et l'appui donné aux familles dès le départ, car cela a une incidence aussi sur la santé mentale et la prévention du suicide.
Le sénateur LeBreton : En 2004, Un Canada digne des enfants a publié un rapport intitulé Un million de trop. Il fait état de la pauvreté des enfants au Canada et signale qu'un enfant sur six, c'est-à-dire plus d'un million d'enfants canadiens, vit dans la pauvreté. Cela représente une augmentation de 15,6 p. 100 par rapport à 1989 quand l'ex-premier ministre Brian Mulroney et Landon Pearson, qui n'était pas encore sénateur, ont participé aux travaux de la Convention relative aux droits de l'enfant aux Nations Unies.
Il y a plus d'enfants qui vivent dans la pauvreté au Canada aujourd'hui qu'à n'importe quel moment au cours des 15 dernières années. L'année 2003 a été une année record pour les banques d'aliments, 317 242 enfants s'y étant adressés. Pendant ce que l'on a appelé les années de prospérité économique, de 1996-2001, 2,1 millions d'enfants, c'est-à-dire un tiers de tous les enfants, ont connu la pauvreté.
Monsieur le ministre Dosanjh, je vous remercie des remarques que vous avez faites ici aujourd'hui mais comment peut-on accepter de tels chiffres, quand les paroles ne se traduisent pas en actions?
Je voudrais savoir quels sont les programmes que votre ministère et d'autres mettent en œuvre pour s'attaquer à ce problème manifestement épouvantable de la pauvreté des enfants au Canada.
M. Dosanjh : Sénateur LeBreton, malgré mes propos, je confirme vos statistiques. Je pense qu'elles sont justes et cela prouve qu'il faut faire bien davantage que maintenant.
On a offert la prestation nationale pour enfants il y aquelques années quand j'étais encore au gouvernement en Colombie-Britannique. Cela a été d'une grande utilité car en Colombie-Britannique, elle a été bonifiée pour venir en aide aux familles de travailleurs pauvres.
Je ne pense pas que le gouvernement fédéral a lui seul pourra cerner cette question. Il nous faut trouver une solution à ces problèmes avec la participation de tous les gouvernements.
Il n'y a pas trop longtemps que je suis en politique fédérale mais je peux vous dire que les politiciens, vous le savez, doivent s'occuper de dossiers qui se font concurrence. Il y en a qui veulent s'occuper de la pauvreté des enfants et j'en suis. Je suis content que vous ayez soulevé cette question car elle me tient beaucoup à cœur. Toutefois, il y aura d'autres gens qui demanderont sans cesse des réductions d'impôt et cela au nom de notre compétitivité à l'échelle mondiale. En l'occurrence, il s'agit de justice dans notre société nationale. Les enjeux sont difficiles. Je n'essaie pas d'éluder la question en disant qu'il n'y a pas de réponse facile mais effectivement, la situation est très très difficile.
Je trouve inquiétant, comme Canadien et comme politicien, que cette question ne soit pas dans le collimateur. Je suis ravi que nous puissions compter sur le Programme de développement de la petite enfance, c'est-à-dire les 5 milliards de dollars que nous avons réservés pour les cinq prochaines années, mais c'est un bien petit pas en avant dans un domaine où il faut faire bien davantage.
Si vous voulez commencer un mouvement dans ce sens,dites-le-moi. Je vous emboîterai volontiers le pas.
Le sénateur LeBreton : Vous avez parlé des réductions d'impôt. Je ne peux pas m'empêcher de répliquer que si tout l'argent que nous avons dépensé pour le registre des armes à feu et tous ces autres programmes avait servi à contrer la pauvreté des enfants, nous aurions peut-être pu en fait infléchir la situation. Vous avez parlé des réductions d'impôt et je vous répondrai qu'il y a bien des familles à revenu moyen qui frisent la pauvreté et une réduction d'impôt pourrait sans doute les aider grandement.
M. Dosanjh : Je n'ai pas dit que j'étais contre les réductions d'impôt. Je dis que pour attirer des investissements étrangers, il faut un environnement compétitif.
Le sénateur LeBreton : Je suis heureuse de vous l'entendre dire.
Le sénateur Oliver : Vous aviez prévu ces réductions dans votre premier budget mais vous avez fait marche arrière.
Le sénateur LeBreton : Je conviens avec vous qu'il y a des éléments qui font concurrence au dossier de la pauvreté des enfants mais quels sont les plans ou les initiatives que vous avez précisément prévus avec les territoires et les provinces pour le régler? Avez-vous un plan précis? Y aura-t-il des rencontres à un moment précis sous peu pour traiter de ce dossier?
M. Dosanjh : Il y aura une rencontre des premiers ministres sur toute une gamme de questions qui touchent exclusivement les Autochtones, l'éducation, la santé, le développement économique, et d'autres dossiers, et elle aura lieu à l'automne de cette année. Nous sommes tous en train de la préparer.
Santé Canada, en consultation avec les collectivités autochtones, est en train d'élaborer un plan détaillé en matière de santé des Autochtones pour leur garantir des soins de qualité.
Nous allons également traiter du développement économique et du logement. À cette réunion des premiers ministres, il y aura toute une gamme de dossiers qui seront traités car effectivement, nous reconnaissons que les Autochtones ont du retard, qu'il s'agisse des enfants, du logement ou du développement économique. Cela ne remonte pas à hier et nous devons renverser la vapeur pour que les Autochtones emboîtent le pas à tous les Canadiens.
[Français]
Le sénateur Losier-Cool : Ma question se rapporte à des témoignages que nous avons eus déjà ici, suite à une recommandation du Comité des droits de l'enfant de 2003 qui préconisait un organisme pour faire de la coordination. Il semble — et plusieurs témoins nous l'ont dit — qu'il y ait des lacunes entre ce qu'un ministère fait, ce qu'un autre ministère fait, le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial. Croyez-vous qu'il existe un organisme qui joue ce rôle de coordination? Le sénateur Pearson nous a parlé de la commissaire aux enfants en Nouvelle Zélande. Au Canada, nous avons un commissaire à l'éthique, un commissaire aux langues officielles et autres. Pourrait-on avoir un commissaire aux enfants ou un organisme du genre? Vos officiels sont des personnes qui mettent des choses en place, peut-être ont-ils entendu parler de ces lacunes ou de ce manque de coordination?
[Traduction]
M. Dosanjh : Étant donné qu'auparavant j'étais au gouvernement provincial, je peux vous dire que le manque de coordination nuit aux pouvoirs publics à tous les échelons et que cela demeure une question grave.
Un commissaire à l'enfance ou un défenseur des enfants et des jeunes rehausserait le profil de ce dossier qu'il pourrait défendre, et je pense que c'est une chose que vous envisagez de recommander assurément. Je suis impatient de lire votre rapport et les suggestions que vous ferez.
Le ministre Dryden s'occupe de la coordination en même temps que du développement de la petite enfance. Il nous faut une meilleure coordination pas seulement en ce qui concerne les enfants mais à d'autres égards, et j'ai certainement compris cela.
Je suis impatient de lire votre rapport qui offrira des conseils sur la façon de procéder, notamment la possibilité de nommer un commissaire à l'enfance.
[Français]
Le sénateur Losier-Cool : Sans créer un autre organisme,y a-t-il actuellement un organisme qui pourrait assumer ce rôle?
[Traduction]
Mme Walker : Tout dépend de ce que l'on entend par « assumer ce rôle ». Il existe des organisations non gouvernementales, par exemple, la Coalition canadienne pour les droits des enfants qui a rédigé la première réponse à l'intention des Nations Unies. Cette coalition coordonne le travail des ONG et collabore avec elles. Ce groupe et d'autres ne peuvent pas compter sur la même coordination au sein du gouvernement.
Dans les ministères, il n'y a pas de structure qui coordonne toutes les activités des divers ministères à l'intention des enfants. À un moment donné, on a envisagé de créer un bureau des enfants, et il y a eu ensuite un bureau des enfants à Santé Canada qui avec le temps a évolué. Toutefois, il n'y a pas d'organisation qui s'occupe spécifiquement de coordonner les activités ou de réunir l'information concernant les activités au sein du gouvernement comme à l'externe.
Le sénateur Losier-Cool : Notre comité étudie la Convention relative aux droits de l'enfant et d'après les témoins que nous avons entendus, les Canadiens ne connaissent pas bien cette convention.
Mme Walker : Vous avez tout à fait raison.
Le sénateur Losier-Cool : Nous pourrions peut-être commencer avec un programme ou un groupe de coordination qui au moins sensibiliserait les Canadiens à la Convention relative aux droits de l'enfant.
Mme Walker : C'est la mission essentielle de la Coalition canadienne pour les droits des enfants. La coalition canadienne est constituée d'organisations non gouvernementales des quatre coins du pays. C'est une coalition, et non pas une entité en tant que telle, ou une organisation autonome, et elle a pour objectif de sensibiliser la population à la convention. Il y a échange de renseignements entre les universités. Je pense que Katherine Covell vous a déjà parlé de ce que la coalition fait pour élaborer des programmes d'enseignement. Elle diffuse des renseignements sur ce qui existe en matière de promotion. La coalition a reçu une petite somme de RHDSC pour organiser des ateliers à l'échelle du pays afin que les collectivités prennent connaissance des mesures législatives qui les concernent et qui concernent les enfants et leurs droits.
Cela a eu une incidence sur le transport et la sécurité des enfants, les terrains de jeu et les écoles. Par le truchement d'une gamme d'organisations, le YM-YWCA ou une école normale, la coalition a pu mobiliser une grande quantité d'énergie à propos de la Convention relative aux droits de l'enfant. Toutefois, le financement accordé est ponctuel, suivant chaque projet, et peu abondant. C'était l'objectif lors de la conception et de la création de la coalition et le sénateur Pearson en a été la première présidente. Elle sera présidente honoraire à tout jamais.
Je ne fais plus partie du conseil d'administration mais j'y ai siégé pendant bien des années, de sorte que j'ai un peu un parti pris.
Le sénateur Oliver : Le préambule de la Convention relative aux droits de l'enfant, qui est à l'étude au comité, évoque l'importance du rôle de la famille sur le plan des soins et de la protection accordés aux enfants, et affirme que la famille doit avoir l'aide et la protection nécessaires pour pouvoir assumer pleinement ses responsabilités au sein de la collectivité. On souhaite que la famille soit solide, capable d'apporter soutien aux enfants, pour qu'ils ne tombent pas dans la pauvreté, et on dit qu'elle doit leur fournir l'aide et la protection dont ils ont besoin.
Il y a quelques années, le gouvernement du Canada a décrété que quatre groupes devaient faire l'objet de mesures spéciales : les Autochtones, les personnes handicapées, les femmes et les minorités visibles. Dans tout ce que vous avez dit aujourd'hui, vous n'avez pas parlé de mesures spéciales à l'intention des enfants noirs ou des enfants pauvres appartenant à d'autres minorités visibles qui s'enlisent dans le cycle de la pauvreté, des piètres soins de santé, surtout s'ils habitent dans les régions rurales.
Je ne comprends pas pourquoi ce gouvernement fait si peu pour les Noirs et les minorités visibles en l'occurrence.
Dites-moi pourquoi vous citez les trois autres groupes cibles et non pas le quatrième.
M. Dosanjh : Sénateur Oliver, il existe deux ou trois programmes à cet effet. Je pense que je les ai évoqués.
Le sénateur Oliver : Vous avez parlé des programmes à l'intention des Autochtones et des personnes handicapées.
M. Dosanjh : Il y a des programmes nationaux à l'intention des enfants, par exemple, le Programme canadien de nutrition prénatale.
Le sénateur Oliver : Qu'est-ce que cela apporte aux enfants noirs?
M. Dosanjh : Dans les régions rurales, je ne sais pas. Quand on va dans les grands centres urbains, on constate qu'un grand nombre de familles et d'enfants sont laissés pour compte. Cela est vrai d'un bout à l'autre du pays dans les grands centres urbains. Je connais moins bien la situation en régions rurales mais je suis au courant du problème.
Je pense que les enfants que nous aidons sont de toutes les origines. Dans la région de Toronto, il y a beaucoup de Noirs. Dans les provinces de l'Atlantique, il y en a également. Ces programmes nationaux visent tous les enfants. J'en conviens. Que je sache, il n'y a pas de programmes précisément à l'intention des enfants noirs.
Le sénateur Oliver : Je suis sûr qu'il n'y en a pas et je vous demande pourquoi. Étant donné qu'ils ont besoin de telles mesures spéciales. Beaucoup d'entre eux sont pauvres, ils s'enlisent dans la pauvreté, et ils ont besoin d'aide.
M. Dosanjh : Nous dispensons des soins de santé aux enfants autochtones et cela pourrait expliquer pourquoi le gouvernement fédéral leur offre plus de programmes. Nous sommes la Couronne et nous avons une relation fiduciaire avec les peuples autochtones. Il nous incombe au premier chef de nous occuper des dossiers autochtones, alors que les provinces sont responsables d'autres domaines.
Ce n'est pas une excuse mais cela explique peut-être pourquoi les programmes fédéraux visent notre premier secteur de responsabilité alors que les programmes locaux, régionaux et provinciaux seraient responsables des programmes que vous évoquez.
Je prends note de votre inquiétude et je vais me renseigner et analyser la situation. Cette question manifestement vous tient à coeur et manifestement il y a de bonnes raisons à cela.
Le sénateur Oliver : J'aurais cru que l'élaboration d'une bonne politique d'intérêt public tiendrait compte de tous les groupes qui ont besoin de mesures spéciales ou d'attention spéciale, pas seulement certains d'entre eux. C'est ça qui m'inquiète.
Mme Stone : Monsieur le sénateur, nous offrons dans les centres urbains notre Plan d'action communautaire pour les enfants et notre programme de nutrition prénatale. Des organismes parrains gèrent ces centres en notre nom et ils sont généralement établis dans les collectivités où certaines clientèles ont des besoins particuliers. S'il s'agit d'une collectivité à prédominance noire en Nouvelle-Écosse ou d'une collectivité somalienne à Toronto, on adapte le Programme de nutrition prénatale ou le Programme d'action communautaire pour les enfants à leurs besoins particuliers.
Nous tâchons d'adapter ces programmes le plus possible à la culture de la collectivité en question. Ces centres deviennent des plaques tournantes auxquelles la province ou le territoire — dans ce cas, la province — ou encore les municipalités peuvent rattacher leurs programmes qui sont destinés à la même collectivité. Ces programmes s'adressent aux enfants et aux familles qui vivent dans des conditions difficiles.
Le Programme d'action communautaire pour les enfants, ou PACE, réussit à rejoindre, d'après les données du recensement, quelque 60 p. 100 des femmes et enfants à faible revenu au Canada. Nous savons que nous rejoignons 40 p. 100 des adolescentes enceintes dans les centres urbains, où l'on trouve vraisemblablement la plupart des enfants noirs dans le besoin. Nous ne recensons pas les enfants en fonction de leur race parce que le programme s'adresse à tous les Canadiens dans le besoin. Je suis convaincue que dans les grandes villes, un grand nombre de familles noires bénéficient de ces programmes. Je sais que l'organisme parrain essaie d'adapter ces programmes aux besoins de cette clientèle dans le quartier où elle se concentre.
Le sénateur Oliver : Merci de votre réponse. Si j'ai soulevé cette question, c'est parce que le ministre a dit que le gouvernement du Canada investit davantage dans l'aide financière destinée aux enfants de familles pauvres pour mettre fin au cycle de la pauvreté. Voilà la raison de ma question.
M. Dosanjh : Sénateur Oliver, je sais très bien, et je suis sûr que vous le savez aussi, que nous n'en faisons pas assez. Nous perdons du terrain en ce qui concerne les besoins de l'ensemble des enfants et, en particulier, ceux des enfants pauvres. Je le reconnais volontiers.
Si certaines populations d'enfants sont laissées pour compte, je vous inviterais à me le signaler et à me suggérer des moyens de mieux répondre à leurs besoins.
La présidente : Monsieur le ministre, nous discutons de la Convention relative aux droits de l'enfant que le Canada a signée et ratifiée et dont on peut donc présumer qu'il a l'intention de l'intégrer à sa législation nationale. Le respect des droits garantis par la Convention n'est donc pas facultatif, mais obligatoire.
Vous-même et vos fonctionnaires, considérez-vous la Convention comme un document exécutoire?
M. Dosanjh : Sénateur Andreychuk, quand des payssignent des conventions internationales comportant des obligations, on peut présumer, et je le présume effectivement, qu'ils se sentiront liés par ces obligations. Nous venons de signer la Convention-cadre de lutte contre le tabagisme et je présume qu'au moment où j'ai persuadé mes collègues du Cabinet d'y adhérer, j'avais l'intention de respecter toutes les dispositions de ce traité. Il arrive cependant que nous ne soyons pas en mesure de remplir toutes les obligations que nous avons assumées en signant de tels documents. Vous le savez sans doute mieux que moi. J'accepte tout à fait vos réprimandes si nous n'avons pas rempli nos obligations, mais je comprends le sens de votre question.
La présidente : J'aimerais avoir le temps d'approfondir davantage cette question, mais je pense que vous comprenez en gros nos préoccupations.
Votre ministère et le ministère de la Justice présentent ces rapports au nom de la population canadienne, par l'entremise de ses représentants provinciaux ou fédéraux. Il n'y a qu'un seul rapport adressé à l'instance de surveillance de la Convention relative aux droits de l'enfant.
Nous avons beaucoup de mal à comprendre comment ce comité travaille avec les provinces et comment ce rapport est préparé. Les ONG doivent essayer de connaître la position du gouvernement. De temps à autre, elles donnent leur avis, mais c'est tout.
Croyez-vous qu'il faudrait trouver une façon plus ouverte et transparente de recueillir l'information et d'obtenir des Canadiens leur avis sur la façon dont le Canada remplit ses obligations en vertu de la Convention?
M. Dosanjh : Permettez-moi d'aborder votre question sous un autre angle. Proposez-vous que nous recueillions les avis de la population au moment de préparer le rapport?
La présidente : Je propose que l'on recueille l'avis de la population et des parlementaires au moment de rédiger le rapport. Une fois que le rapport nous revient du comité, il est impossible de le déposer au Parlement. Il n'y a pas de mécanisme qui permet d'en examiner les résultats pour voir si le Canada s'adapte ou donne suite aux observations formulées dans le rapport. Pour respecter un document de cette nature, il est tout aussi important de contribuer au rapport que d'y donner suite.
M. Dosanjh : Je suis d'accord avec vous. À mon avis, on peut déposer un rapport devant le Parlement sans être tenu légalement de le faire. On peut le faire en vertu des traditions, ce qui ne pose pas vraiment de difficulté. Cependant, la préparation du rapport, la collecte d'information et la diffusion des résultats de ce rapport à la population de manière à la tenir informée, tout cela incite les gens et les politiciens à redoubler d'effort. J'imagine que c'est ce à quoi vous pensez et je suis d'accord avec vous. Je suppose que vous ferez des recommandations à cet égard.
La présidente : Certains témoins nous ont dit que le problème tient en partie au fait que les enfants n'ont pas droit de vote et que, par conséquent, leurs problèmes ne retiennent pas toujours l'attention des politiciens. Notre comité se penche sur cette question.
Le sénateur Stratton : Je m'excuse, madame la présidente, d'être arrivé en retard.
Le sénateur Andreychuk a posé la question qui m'intéresse au sujet de la Convention de l'ONU relative aux droits de l'enfant. Quand on lit le rapport, on est troublé par ce qu'il contient mais aussi par le fait que la pauvreté, loin d'avoir régressé, a augmenté chez les enfants, ce qui va à l'encontre d'un droit fondamental de la personne. J'espère que vous allez charger quelqu'un, ou un comité, par exemple le nôtre, de trouver des solutions à ces deux problèmes. Je le dis parce que notre comité est sans doute tout à fait disposé à le faire pour vous ou en votre nom.
M. Dosanjh : Merci.
La présidente : Nous avions prévu un deuxième tour de questions, monsieur le ministre, mais je pense que nous allons vous laisser partir à temps, comme convenu.
Je vous remercie de nous avoir donné l'occasion de vous faire part de certaines de nos inquiétudes au sujet de la Convention. Ainsi, quand nous présenterons notre rapport, vous pourrez en prendre connaissance et donner suite à nos recommandations.
M. Dosanjh : Merci.
La présidente : Nous allons suspendre nos délibérations pendant quelques minutes en attendant l'arrivée de l'autre ministre que nous entendrons aujourd'hui.
Le troisième ministre que nous devions entendre est souffrant et ne sera pas des nôtres aujourd'hui. Le ministre Volpe sera donc le seul à comparaître et il devrait arriver sous peu.
Mesdames et messieurs les sénateurs, veuillez prendre place à la table parce que nous reprenons nos travaux. Nous examinons, en vue d'en faire rapport, les obligations internationales du Canada relativement aux droits et libertés des enfants et, en particulier, la Convention relative aux droits de l'enfant.
Nous recevons l'honorable Joe Vople, ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration. Il est accompagné d'une autre personne que M. Volpe voudra sans doute nous présenter.
L'honorable Joe Volpe, C.P., député, ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration : Merci beaucoup. Je suis accompagné par mon adjoint ministériel fort compétent, M. Grant.
M. Brian Grant, directeur général, Politique stratégique et partenariats, Citoyenneté et Immigration Canada : Je m'appelle Brian Grant, je suis le directeur général de la Politique stratégique et les partenariats à Citoyenneté et Immigration Canada.
M. Volpe : Daniel Jean assistait avec moi à une réunion d'un autre comité, à l'étage. J'ai dû m'absenter après avoir présenté une brève déclaration. Je vous demande pardon pour mon retard, mais je devais assister à une partie de cette réunion.
M. Jean est resté là-bas pour seconder mon secrétaire parlementaire, qui a fort habilement pris le témoin, comme on dit dans les courses de relais. M. Grant est ici pour seconder son ministre, au cas où celui-ci serait incapable de répondre aux questions des sénateurs.
Dans ces conditions, je me demande si je ne ferais pas mieux de me taire et de le laisser répondre à toutes vos questions.
Sénateurs, je suis quelque peu flatté que vous m'ayez invité à parler de ce sujet. On ne considère généralement pas qu'il relève tout à fait de mon portefeuille, mais je suis ravi d'être des vôtres aujourd'hui.
Il me tardait de vous rencontrer car c'est une des nombreuses premières agréables qui se sont succédé depuis que j'ai assumé ce portefeuille. Certains des sénateurs ici présents savent que nous venons de fêter - et je dis bien « fêter » - mon quatrième mois à la tête de ce portefeuille. J'ai donc une longue expérience à ce ministère. Ce n'est pas tout à fait une blague, car le roulement dans ce portefeuille est impressionnant. Un de mes collègues provinciaux m'a dit : « N'est-ce pas là un portefeuille où l'espérance de vie des ministres est très courte? ». On dirait bien que oui.
Quatre mois après ma nomination, je suis toujours heureux de dire que le premier ministre m'a fait honneur en me confiant ce portefeuille. Par ailleurs, je suis bien au fait de votre intérêt de longue date pour l'engagement de mon ministère à l'égard des droits de la personne et des droits à l'égalité enchâssés il y a 20 ans dans l'article 15 de la Charte des droits et libertés.
Je vous remercie encore une fois de m'avoir invité pour discuter des droits humains du point de vue du travail effectué quotidiennement par les employés de Citoyenneté et Immigration Canada.
[Français]
Aujourd'hui, nous allons échanger nos points de vu concernant les membres les plus jeunes de notre société qui sont souvent les plus vulnérables. Les travaux de votre comité se concentrent sur les droits que nous devons accorder à tous les enfants.
C'est une obligation que les Canadiens prennent au sérieux. Et nous le faisons en partie parce que c'est notre devoir selon la loi internationale et notre propre Charte. Aussi, j'aimerais ajouter que c'est notre obligation morale, comme homme et femmes, parents et grands-parents.
En effet, à titre de signataire de la Convention relative aux droits de l'enfant des Nations Unies, le Canada a l'obligation de protéger des milliers d'immigrants et de réfugiés qui se trouvent déjà au Canada ou qui demandent le statut de réfugié.
[Traduction]
Permettez-moi maintenant de vous présenter Daniel Jean, qui est maintenant avec moi, la réunion à laquelle il assistait ayant sans doute pris fin.
Nous nous efforçons de protéger les enfants car c'est une des choses qui nous tient à cœur en tant que Canadiens. C'est une des valeurs intrinsèques de la citoyenneté canadienne qui s'inspire de l'esprit de communauté, pas seulement de la loi. À cet égard, j'aimerais partager avec vous des faits récents concernant quatre questions fondamentales, qui sont toutes d'intérêt commun et reliées entre elles.
Elles font partie intégrante d'une grande variété de programmes pour lesquels mon ministère est responsable. Par la suite, j'aurai l'occasion d'aborder toute question que vous aimeriez approfondir.
Premièrement, en ce qui concerne l'intérêt supérieur de l'enfant, l'un des principes fondamentaux qui régissent les activités de CIC est justement le concept de l'intérêt supérieur de l'enfant. Ce concept constitue la pierre angulaire de la Convention relative aux droits de l'enfant et se trouve au cœur même de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. La loi prévoit que l'on tienne compte de l'intérêt supérieur de l'enfant dans un bon nombre de cas d'immigrants ou de réfugiés qui concernent des personnes mineures.
On pense entre autres aux cas comportant des considérations d'ordre humanitaire et aux cas relatifs à l'adoption, aux enfants séparés de leurs parents biologiques, au rétablissement et à la désignation de tuteurs légaux.
[Français]
À la suite de l'entrée en vigueur de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, le 28 juin 2002, CIC a procédé à la mise à jour de ses directives à l'intention des agents chargés de rendre des décisions fondées sur des considérations humanitaires lorsque l'approbation ou le rejet d'une demande d'immigration ou d'asile est susceptible d'avoir des répercussions sur des enfants.
Les directives à jour ont été publiées en mai 2005 dans le Guide sur les programmes et politiques ministériels utilisés par les agents d'immigration pour traiter les cas délicats et dont les répercussions sont aussi importantes.
En mai 2005, nous avons également mis un module de formation novateur à la disposition de tous les agents qui traitent des cas de considération humanitaire. Le programme de formation permet aux agents d'acquérir une meilleure compréhension du principe de l'intérêt supérieur de l'enfant et de son importance dans notre travail.
[Traduction]
CIC ne travaille pas en vase clos et peut compter sur l'appui d'autres instances fédérales et provinciales. Un cadre législatif efficace a été mis en place et permet à toutes les organisations partenaires de collaborer dans les dossiers d'adoption internationale. Notre objectif commun est de veiller à ce que l'intérêt supérieur des enfants soit maintenu lorsque ceux-ci sont parrainés pour venir au Canada dans le cadre d'une adoption internationale. Nous veillons aussi à la sécurité des enfants séparés de leurs parents et nous faisons en sorte de réduire tout risque d'exploitation ou d'abus.
J'ai déjà précisé que l'intérêt supérieur de l'enfant constituait une considération de tout premier ordre dans notre travail, mais cette considération ne l'emporte pas sur toutes les autres. Nous devons, bien évidemment, tenir compte d'autres éléments lors du traitement d'un cas. Disons que l'intérêt supérieur de l'enfant est l'un des nombreux facteurs pris en compte par les agents, au moment de l'évaluation des cas.
La réunion des familles est donc l'un de ces sujets importants.
[Français]
La réunion des membres de la famille immédiate est depuis longtemps une composante fondamentale de la politique canadienne sur l'immigration. Cet élément clef de la stabilité sociale et de l'intégration réussie est également l'un des principaux objectifs de la Convention relative aux droits de l'enfant.
Depuis l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions réglementaires sur la protection des réfugiés, en juin 2002, CIC a simplifié la procédure visant le traitement des demandes présentées à l'étranger par des conjoints et les enfants de réfugiés se trouvant déjà au Canada.
Le membre de la famille séjournant dans notre pays est considéré comme une personne protégée et le statut d'immigrant admis peut lui être accordé avant même que la demande des autres membres de sa famille à l'étranger n'ait été évaluée. Ainsi, nous accélérons le processus tant d'un côté que de l'autre.
[Traduction]
Pour l'année 2004, Citoyenneté et Immigration avait d'abord prévu être en mesure de traiter 4 000 demandes présentées à l'étranger par les conjoints et enfants de réfugiés au sens de la Convention se trouvant déjà au Canada. Je suis très fier de vous annoncer que l'année dernière, le ministère a surpassé son objectif de 50 p. 100. En tout, 6 000 demandes ont été traitées.
En ce qui concerne les enfants, ceux qui ont été séparés de leur famille réfugiée, qui vivent dans une zone de guerre ou qui ne jouissent pas de la présence de leurs parents, sont considérés comme « à risque ».
Plus que jamais, nos agents à l'étranger accordent une importance primordiale à la nécessité d'assurer la sécurité des enfants qui sont dans cette situation. Ils étudient les cas de ceux qui ne possèdent aucune pièce d'identité avec plus d'ouverture que par le passé, en gardant à l'esprit les difficultés qui sont légion dans certaines régions pour ce qui est de l'obtention de preuves d'identité. Dans le même esprit, tout changement qui pourrait être apporté au système d'octroi de l'asile tiendra davantage compte des motifs d'ordre humanitaire pour les enfants et leur famille.
Je m'en voudrais de ne pas mentionner à ce point-ci une de nos organisations soeurs, un de ces héros méconnus qui travaillent pour le droit de l'enfant, le rapatriement et la réunification des familles. Il s'agit de l'organisme International Social Service Canada, basé à Ottawa. Depuis plus de 50 ans, ayant changé de nom à maintes reprises, ISS Canada s'est avéré pour le gouvernement un partenaire discret mais très engagé qui vient en aide aux Canadiens en détresse partout dans le monde. Cette petite agence dispose d'une subvention fédérale modeste. Cependant, avec l'aide de ses nombreux bénévoles et organismes affiliés dans plus de 120 pays à travers le monde, ISS Canada vient en aide à des centaines d'enfants canadiens victimes d'abus, abandonnés, kidnappés, séparés de leur famille ou victimes de trafic aux frontières. Je sais que le sénateur Pearson est présidente d'honneur d'ISS Canada depuis quelque temps déjà. Les honorables sénateurs sont bien au courant du dévouement sans relâche de sa directrice exécutive, Agnes Casselman. J'aimerais bien pouvoir un jour la remercier en personne.
Le troisième sujet que j'aimerais aborder est l'adoption. Nous passons maintenant de la réunification des familles à un autre domaine qui devient évident si — malheureusement — la réunification ne peut avoir lieu. Lorsque les parents meurent en temps de guerre, pendant un conflit ou à la suite d'une catastrophe naturelle, ou lorsqu'il est impossible de les retracer pendant une longue période, des mesures doivent être prises pour offrir aux enfants un milieu de vie stable. L'adoption internationale est un choix qui suscite de plus en plus d'intérêt au Canada.
Nous ne manquons pas de couples sans enfant ou de familles qui souhaitent ouvrir leur foyer à un enfant qui a besoin d'espoir.
[Français]
Je suis le premier à reconnaître que les cas d'adoption internationale sont complexes et peuvent prendre plusieurs mois, voire plusieurs années, CIC n'ayant aucun rôle à jouer dans l'adoption comme telle ni aucun contrôle sur la longueur du processus.
Les programmes d'adoption relèvent des provinces et des territoires. À l'heure actuelle, ces agences gouvernementales transigent avec plus de 70 pays desquels les Canadiens adoptent les enfants. Ces organismes doivent composer avec 70 ensembles différents de prescriptions juridiques et de cadres administratifs. Plusieurs de ces nations ont également paraphé la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale.
Je crois que certains de nos homologues politiques du Canada aimeraient qu'il y ait une normalisation accrue entre ces pays, mais il faut être prudent lorsqu'il est question de la souveraineté des pays signataires. Certains pays consacrent plus de temps que d'autres à évaluer les antécédents des familles adoptives, à mener des enquêtes de sécurité ou à respecter les dispositions contre l'exploitation et le trafic d'enfants.
[Traduction]
Pour notre part, nous ne sommes habilités à participer qu'en phase finale, lorsque l'enfant a été légalement adopté et qu'il est prêt à se rendre au Canada. La dernière étape du processus d'adoption, qui est de notre ressort, nécessite de moins en moins de temps depuis quelques années. Actuellement, nous tentons de parachever les cas d'adoption dans les six mois, et nous y parvenons la plupart du temps. Nous calculons le temps, évidemment, à compter du moment de la réception de la demande.
L'année dernière, les employés de CIC ont traité environ 2 000 cas d'adoption internationale. La moitié de ces cas — 1 000 enfants — étaient originaires de la Chine et les cas ont été traités en un mois, pas six. Environ la moitié des autres cas — 500 enfants en provenance des autres pays — ont été parachevés en cinq mois, le délai étant calculé entre la réception des formulaires et la délivrance d'un visa d'entrée.
J'hésiterais à demander que ce délai de six mois soit davantage raccourci puisque nous devons, nous aussi, nous assurer que les questions de sécurité et de santé, notamment, font l'objet d'une enquête canadienne approfondie. Une fois de plus, il en va de l'intérêt supérieur de l'enfant — ainsi que de la famille adoptive — qui doit être pris en considération au même titre que les intérêts de la nation dans son ensemble.
Je crois que nous avons trouvé un juste équilibre et je suis satisfait des efforts que nos employés ont fournis à cet égard. Je ne dis pas cela parce que j'ai un parti pris en faveur de mon ministère, mais parce que c'est le fruit du travail d'hommes et de femmes dévoués qui veillent à la fois aux intérêts des enfants et à l'intérêt de leurs concitoyens du Canada.
Le quatrième grand principe est l'intégration dans les écoles et la société.
[Français]
Avant de terminer, j'aimerais aborder un point très à propos qui a déjà été soulevé lors des audiences du Sénat. Il s'agit de l'intégration des enfants immigrants dans nos écoles et dans la vie communautaire en général. Cette question m'intéresse particulièrement car je suis un ancien professeur et directeur d'école et j'ai moi aussi été un nouveau Canadien et je le suis encore.
CIC a mis en place une série d'activités visant à aider les enfants à participer pleinement à leur milieu scolaire et communautaire, grâce à notre programme d'accueil. Les jeunes qui sont déjà au Canada nouent des amitiés avec de nouveaux arrivants et souvent, ces amitiés se cultivent pendant bien des années après la période d'ajustement.
Ensemble, ces jeunes participent aux événements organisés dans leur quartier, explorent différentes façons de devenir des citoyens actifs et, qu'ils le sachent ou non, contribuent à la diversité culturelle qui unit les Canadiens et les Canadiennes de partout au pays.
[Traduction]
Nous parrainons également le programme Travailleurs de l'établissement dans les écoles, qui constitue un partenariat entre CIC, les commissions scolaires et les organismes d'établissement pour fournir des services d'établissement aux étudiants qui viennent d'arriver au pays et leurs familles. Nous jetons ainsi des ponts entre les écoles, les parents et les enfants, et cette initiative nous a permis de prouver qu'il y a un lien entre la réussite de l'établissement et la réussite scolaire.
Je me souviens très bien de l'époque où j'étais professeur à Toronto, où j'ai constaté que les cercles d'amis et l'acceptation des camarades ont fait toute la différence pour des centaines de nouveaux jeunes Canadiens qui fréquentaient mon école.
Mon ministère regroupe toutes les activités de la sorte sous l'égide des services d'établissement de base. Vous vous rappelez sûrement que le récent budget fédéral a accordé une importante aide financière de 298 millions de dollars pour la prestation de ces services au cours des cinq prochaines années. Ce soutien financier représente un investissement pour former les dirigeants communautaires de demain, un investissement qui sera des plus rentables pour notre société.
Honorables sénateurs, ceci conclut mon résumé des récentes initiatives entreprises par les personnes dévouées qui travaillent au ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration. Je suis fier de les représenter en tant que ministre.
Je tiens aussi à vous remercier, mesdames et messieurs les sénateurs, pour votre engagement à l'égard des droits des enfants.
Dans cet esprit, je citerai un passage de la récente circulaire du sénateur Pearson intitulée Children & the Hill. Elle y exprimait un souhait de préretraite en écrivant ce qui suit :
[...] Je ne suis pas la seule au Sénat à me préoccuper...et j'espère que mes collègues continueront de veiller sur l'intérêt des enfants.
Pour ma part, je le ferai, sénateur. Et même si vous quitterez vos fonctions en novembre, je suis persuadé que vous continuerez d'œuvrer pour le bien des enfants du monde entier durant les années à venir.
[Français]
Madame la présidente, il me tarde de collaborer avec vous dans vos efforts en vue de former les dirigeants communautaires de demain. Je vais maintenant répondre à vos questions.
[Traduction]
La présidente : Merci, monsieur le ministre. Vous avez parlé d'un dossier que je suis et qui a été évoqué devant notre comité, celui des enfants demandeurs d'asile qui sont placés dans les centres de détention, où dans bien des cas ils ne reçoivent pas les services d'aide et de counselling dont ils ont besoin à cause de toutes les difficultés qu'ils ont éprouvées dans leur pays d'origine.
On m'a dit qu'on allait remédier à la situation. L'a-t-on fait, que vous sachiez?
M. Volpe : Madame la présidente, parlez-vous des centres de détention au Canada ou à l'étranger?
La présidente : Parlons tout d'abord de ceux qui sont au Canada.
M. Volpe : Quand quelqu'un demande l'asile politique, nous avons l'obligation de vérifier certains éléments d'information fondamentaux qui ont trait aux documents et aux pièces d'identité, comme je l'ai dit dans mon exposé. Si les enfants sont détenus sans la présence de leurs tuteurs, de toute leur famille ou de tuteurs nommés par l'État, c'est en dernier recours seulement. Pour vous donner une réponse succincte, je dirais que de tels cas surviennent uniquement dans des circonstances exceptionnelles et extrêmement rares.
La présidente : Si vos fonctionnaires voulaient bien nous faire savoir combien il y a eu de cas de ce genre, dans une période donnée, cela nous serait utile. Les cas les plus récents seraient naturellement les plus pertinents. Et nous aimerions savoir combien de temps ces enfants ont été détenus.
M. Volpe : Je vous ferai parvenir ces renseignements volontiers. Comme les membres du comité le savent sans doute, certaines responsabilités qui relevaient par le passé du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration ont été transférées à d'autres portefeuilles. Les fonctionnaires obtiendront ces renseignements du ministère de mon collègue et les transmettrons à la greffière de votre comité.
Le sénateur Pearson : Monsieur Volpe, votre déclaration était claire et bien sentie. Votre approche respecte la Convention relative aux droits de l'enfant et nous sera utile pour la rédaction de nos recommandations.
Je vous remercie aussi de vos propos au sujet d'ISS. Je suis persuadée qu'Aggie Casselman sera ravie de faire votre connaissance et de vous remercier. Ensemble, nous devons faire en sorte que cet organisme important, qui n'est pas reconnu à sa juste valeur, puisse poursuivre l'excellent travail qu'il fait depuis de si nombreuses années. S'il n'existait pas, il faudrait l'inventer. Je vous remercie donc de vos aimables propos, au nom deMme Casselman.
Je suis de près le dossier du trafic des femmes et des enfants à des fins sexuelles. J'ai été ravie d'apprendre vendredi que les Américains évaluent que le Canada est un partenaire de premier plan pour combattre ce fléau. Cela a semé la consternation chez certaines personnes des Affaires étrangères que je connais. Cela témoigne du fait que nous nous attaquons à ce problème.
J'ai trois questions précises. Comment obtenez-vous les statistiques sur le trafic d'enfants au Canada? La GRC devait commencer à les tenir il y a quelque temps et j'aimerais savoir où l'on en est à présent. Qui transmet à votre ministère des renseignements sur le trafic de personnes, étant donné qu'il s'agit par définition d'une activité tout à fait clandestine? Quels mécanismes vous permettent de communiquer l'information à d'autres ministères et aux corps policiers, au Canada et dans d'autres pays?
M. Volpe : Comme je l'ai indiqué, nous travaillons avec un grand nombre de ministères et d'administrations, non seulement au Canada mais aussi ailleurs dans le monde. Nous faisons partie d'un groupe de travail fédéral interministériel sur le trafic de personnes qui est coprésidé par le ministère de la Justice et le ministère des Affaires étrangères. Ce groupe travaille à élaborer une stratégie efficace pour contrer le trafic des personnes et des enfants à long terme.
Nous sommes un élément important de ce groupe interministériel, tout comme la GRC. Nous travaillons avec elle à identifier des enfants disparus dans toutes les régions du monde. Nous collaborons étroitement aussi avec d'autres corps policiers dans différents pays, surtout ceux où ce regrettable phénomène est plus fréquent.
Dans certains cas, les statistiques reposent sur des estimations. Dans d'autres, malheureusement, il est beaucoup plus facile de déterminer le nombre de cas. Grâce à cette collaboration, nous avons pu obtenir des données empiriques beaucoup plus solides qui nous permettent de savoir l'ampleur de cette regrettable pratique et ses conséquences pour l'approche que doit adopter le gouvernement du Canada dans ce domaine.
Mes fonctionnaires vous transmettront toute l'information que nous pourrons obtenir par l'entremise de nos collègues.
Le sénateur Pearson : Je sais que le Canada s'est attaqué sérieusement à ce problème en adoptant une loi contre le trafic des personnes qui comporte des sanctions extrêmement lourdes. Je me demande toujours comment nous faisons pour sonder l'ampleur du problème. Parfois, nous nous privons à tort des services de personnes qui ayant elles-mêmes participé au processus sont en mesure de nous aider. Je vous invite à songer sérieusement à recruter des gens qui ont été victimes de ce trafic. Ils savent comment découvrir combien de personnes en font l'objet. Ceux qui n'en ont pas été victimes ont beaucoup de mal à obtenir ces renseignements.
M. Volpe : Nous nous fions à des gens qui sont des experts dans ce domaine, c'est-à-dire la GRC. Ils n'indiquent pas toujours combien il y a d'enfants parmi les personnes disparues; ils nous donnent alors des chiffres estimatifs.
Je prends bonne note du fait que, comme vous l'indiquez, il faut savoir ce qui arrive à ces enfants avant que ces gens entrent au Canada. Pour connaître la situation, nous nous en remettons essentiellement à nos contacts et à notre réseau, par l'entremise de l'Agence canadienne de développement international et des organisations non gouvernementales. Ces organisations travaillent sur le terrain et voient ce qui arrive aux familles; elles voient aussi ce que nombre des survivants de ces familles finissent par faire. Ces organisations sont par ailleurs les premières à percevoir les grands courants démographiques dans le monde. Celles qui existent dans le tiers monde collaborent toutes avec le Service canadien du renseignement de sécurité et la GRC en observant les déplacements associés à des activités illégales.
Nous essayons de savoir combien de personnes sont victimes de ce fléau, ce qui est important pour nous. Par exemple, certaines agences provinciales d'adoption ont développé une expertise dans la compréhension du mouvement des personnes, du mouvement des enfants, de la fréquence des demandes d'adoption et des mécanismes servant à vérifier si ces demandes sont légitimes.
Par exemple, il arrive qu'à la suite d'une catastrophe regrettable, comme le tsunami, nous voulons réagir rapidement à ce que nous percevons comme une crise humanitaire. Comment aider les nombreux enfants qui sont devenus orphelins à la suite de ce désastre?
Nous oublions parfois que les agences et les autorités locales sont elles aussi préoccupées par le sort de ces enfants. Elles aussi tenaient à ce qu'on respecte l'intérêt supérieur des enfants. Quand nous leur avons offert notre aide par l'entremise du processus d'adoption, certaines nous ont demandé d'attendre; elles voulaient s'assurer auparavant qu'il n'était pas possible de confier ces enfants à des tuteurs parent avec eux.
Nous travaillons en tandem avec beaucoup de pays où il n'y a pas nécessairement des personnes déplacées à la suite de catastrophes naturelles. Nous avons toujours œuvré et continuons à le faire dans le cadre d'une relation en évolution qui nous permet de recueillir de l'information plus sûre sur les circonstances et les personnes en cause.
La présidente : J'ai une autre question sur les statistiques. D'après les études parues sur le sujet et les témoins que nous avons entendus, les personnes les plus vulnérables au trafic sont des femmes de moins de 18 ans qui sont considérées comme des enfants aux termes de la Convention. Nous les traitons souvent comme des adultes quand elles ont 16 ou 17 ans alors qu'en fait, nous sommes tenus de les considérer comme des enfants. Elles semblent être les personnes les plus vulnérables et nous devons leur accorder une attention toute particulière. Si vous avez des statistiques à cet égard, il serait important de nous les faire parvenir.
Le sénateur Oliver : Monsieur Volpe, j'ai une question sur le quatrième sujet que vous avez abordé, c'est-à-dire l'intégration des enfants dans les écoles. Dans votre déclaration, vous avez décrit votre programme d'accueil et, plus loin, votre programme d'aide à l'établissement mis en œuvre par des gens de la base.
Vous n'ignorez pas, monsieur le ministre, que le Comité des Nations Unies sur les droits de l'enfant a réprimander le Canada dans ses observations finales en 2003. Citoyenneté et Immigration Canada devrait s'inspirer de ce rapport qui pourrait lui servir de guide pour mieux protéger les intérêts de l'enfant; un bon nombre des recommandations n'ont pas été suivies par le ministère.
Le Comité des Nations Unies a déploré le fait que les enfants d'immigrants soient exclus du système scolaire. Il a statué que cette politique était en fait discriminatoire contre certaines catégories d'enfants. J'aimerais savoir ce que vous en pensez, monsieur le ministre.
Le comité a demandé au Canada de ratifier la Convention de 1959 sur le statut des apatrides. Dans les pays qui n'ont pas ratifié cette convention, les enfants apatrides n'ont pas facilement accès à leurs certificats de naissance et aux demandes de citoyenneté. Pourriez-vous vous occuper de cette question pour notre comité?
M. Volpe : Permettez-moi de répondre d'abord à votre deuxième question, pour laquelle je me sens plus préparé.
Le sénateur Oliver : De toute évidence, le Programme d'accueil que vous avez mentionné dans votre déclaration ne règle pas les problèmes qui vous ont valu cette condamnation sans équivoque de la part du Comité de l'ONU. Il doit y avoir d'autres mesures outre celle-là.
M. Volpe : Monsieur le sénateur, vous et moi avons tous deux intérêt à faire en sorte que les efforts du Canada soient reconnus lorsque c'est mérité. Je ne parle pas seulement du gouvernement fédéral, mais de tous les gouvernements du Canada qui s'efforcent d'intégrer les enfants venus d'autres pays. Pour ma part, quand j'ai lu le rapport, j'ai tenu compte du contexte dans lequel il s'inscrivait.
Premièrement, la nouvelle Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés a changé les règles et permet désormais aux enfants de personnes dont le statut n'est pas régularisé de fréquenter l'école. Voilà ce que nous avons fait à l'échelle nationale.
D'après ce que je sais, sénateur Oliver, et surtout si je pense à l'époque où je gagnais ma vie à servir le public à un autre titre, il se passe que toutes les commissions scolaires partout au pays sont responsables en vue de lois sur l'éducation provinciales. Dans ma province de l'Ontario, les commissions scolaires sont responsables de l'éducation des enfants de moins de 16 ans. Certaines se défendent en disant que ces enfants ne sont pas résidents; ainsi, qu'elles n'en ont pas la responsabilité.
D'autres considèrent les choses de façon plus large, ce que nous avons essayé d'encourager partout au pays. À savoir que nous sommes responsables de l'éducation des enfants, un point c'est tout. C'est notre responsabilité. Le statut de l'enfant importe peu dans l'exercice de cette responsabilité.
Je parlerai plus précisément de ma province puisque c'est celle que je connais le mieux. Nous avons constaté que certaines commissions scolaires voulaient donner une éducation à tous les enfants alors que d'autres demandaient l'aide d'autres instances pour répondre aux besoins des enfants dont le statut était irrégulier.
Je crois que nous avons beaucoup progressé en nous assurant que c'est cette valeur que l'on défend partout au pays. Les enfants qui réussissent à aller à l'école seront instruits et, en général, les commissions scolaires font bien leur travail.
Nous finançons le processus d'intégration par le programme d'accueil qui demande que des gens apportent une expérience et une culture différentes. Ce programme veille à ce que les différences d'enfants qui viennent d'ailleurs n'empêchent pas les enfants de s'intégrer et de s'établir complètement.
Il s'agit parfois de différences linguistiques, de différences sociales et quelquefois culturelles mais, dans tous les cas, le programme permet aux gens qui ont quelques compétences d'aider les enfants à se sentir à l'aise dans leur nouvel environnement. Ce n'est pas un processus facile.
Le sénateur Oliver : Vous avez dit que les enfants n'avaient pas un statut régulier. Aujourd'hui, au Canada, en 2005, les enfants d'âge scolaire sans statut régulier peuvent-ils aller à l'école tout comme les enfants canadiens? Existe-t-il encore une discrimination de facto, comme l'appelle les Nations Unies, contre un certain groupe d'élèves?
M. Volpe : Je peux répéter ce que j'ai dit tout à l'heure mais de façon encore plus ferme. Je répondrai à votre question.
Le sénateur Oliver : J'aimerais connaître la situation d'aujourd'hui.
M. Volpe : Nous n'exigeons pas que les enfants qui n'ont pas de papier en aient avant d'entrer à l'école. Nous avons un système qui nous permet d'encourager les provinces à veiller à ce que tous les enfants aillent à l'école.
Le sénateur Oliver : Qu'en est-il du statut des personnes apatrides de 1954?
M. Volpe : Nous allons dans un sens qui nous permettra d'offrir refuge à tous ceux qui en ont besoin. Peut-être que certaines institutions sont insatisfaites du fait que nous n'ayons pas encore signé mais la question la plus importante est de savoir ce que nous faisons des gens qui viennent ici, si nous reconnaissons une obligation légale implicite ou si nous faisons les choses par une convention explicite.
Nous essayons d'intégrer tous ces enfants dans nos milieux sociaux et scolaires. Que nous ayons signé ou non est secondaire. Nous nous préparons à signer dans tous les cas.
Le sénateur Oliver : Est-ce quelque chose à quoi l'on réfléchit activement?
M. Volpe : Oui.
Le sénateur LeBreton : Ces dernières semaines, comme vous le savez certainement, l'Association du Barreau canadien a déclaré qu'elle s'inquiétait du gros retard qu'il y avait dans le traitement des demandes de parrainage de parents présentées à l'étranger. L'Association prétend que cela peut prendre plus de cinq ans.
Est-ce qu'il y a des cas d'enfants et, le cas échéant, le ministre sait-il combien de ces cas en souffrance touchent des enfants de moins de 18 ans qui attendent qu'un de leurs parents entre au Canada?
M. Volpe : Je ne suis pas sûr que nous ayons toute la ventilation. Vous faites probablement allusion à un rapport d'un membre de l'Association du Barreau. J'ai eu le plaisir d'annoncer il n'y a pas si longtemps que nous voulions éliminer l'arriéré pour les parents et les grands-parents. C'est en partie parce que nous avons reconnu l'importance des parents et des grands-parents dans la cohésion sociale nécessaire pour s'adapter à un nouvel environnement.
Il y a environ 110 000 personnes qui sont touchées par cet arriéré. Il est vrai que le traitement de ces dossiers pourrait prendre énormément de temps, dans certains cas plus longtemps que dans d'autres. Nous avons bougé sur deux fronts, sénateur. Nous avons dit que pour les gens qui seraient acceptés d'un contexte du plan parlementaire pour cette année et l'année à venir, nous exercerions nos pouvoirs pour traiter les dossiers de 12 000 parents et grands-parents de plus. Que nous augmenterions ainsi le nombre de quelque 200 p. 100. Nous devions avoir 300 p. 100 de ce que nous avions l'année précédente. Nous sommes passés de 6 000 à 18 000 cette année, et de 6 000 à 18 000 pour l'année prochaine, pour un total de 36 000 sur les 110 000 en deux ans. Au cours de cette période, nous nous dotons d'un plan parlementaire à présenter à la Chambre des communes au sujet des chiffres à retenir pour l'immigration et de la répartition entre les différentes catégories.
La troisième chose que nous ayons faite, parce que nous croyons que nous devons réunir les familles au mieux et dans les plus brefs délais, fut d'offrir à tous ces parents et grands-parents parrainés la possibilité de venir ici avec des visas pour séjour multiple pendant cinq ans pendant le traitement de leur demande, ce qui élimine effectivement l'arriéré de 110 000. Évidemment, si l'on pouvait en claquant des doigts obtenir que tout le monde fasse le nécessaire, on pourrait le faire du jour au lendemain, mais du point de vue législatif, ou réglementaire, nous avons accepté que nous réunirions ces parents et grands-parents à leur famille immédiatement.
Le quatrième point relatif à cette initiative particulière a consisté à inclure dans ce groupe tous les enfants à charge des parents figurant dans une catégorie parrainée si bien que nous éliminerions encore le risque de séparer des enfants de leur famille immédiate, et dans ce cas de leurs parents.
Nous avons donc ainsi progressé dans ce sens, sénateur. Je suis heureux de pouvoir dire qu'en ce moment, s'il y a encore un problème, c'est parce que nous sommes en train de faire le nécessaire pour régler rapidement cette situation. Du point de vue opérationnel, vous pouvez imaginer que mes fonctionnaires à l'étranger ont dû absorber le fait que nous avions opéré ce changement énorme dans notre politique et notre réglementation et qu'il leur fallait suivre les exigences du ministre et du ministère.
Cela va plus vite à certains endroits qu'à d'autres mais il faut comprendre que cela nécessite une période d'adaptation, en particulier parce que nous apportons maintenant, et c'est le cinquième point à cet égard, les ressources voulues pour éliminer cet arriéré.
Le sénateur LeBreton : Oui, il y a un arriéré de 110 000 cas; vous avez parlé de deux ans et de 36 000. Quels sont alors les critères? Qui passe d'abord? Est-ce premier arrivé premier servi? Quels critères utilisez-vous pour mettre en œuvre ce nouveau programme?
M. Volpe : Sénateur, pour nous, c'est aux enfants que doit aller la priorité. S'il y a donc des enfants mineurs qui sont séparés de leurs parents, ce sont ces demandes qui sont traitées en toute priorité.
J'ai dit que nous aurions des visas pour séjours multiples pour tout le monde; il n'y a là aucune question de priorité. Si l'on a déjà été parrainé, on fait partie des personnes parrainées. Si l'on est la première personne à se présenter, on obtient immédiatement un visa.
Nous avons 68 millions de dollars de ressources supplémentaires dans le dernier budget pour remédier à cet arriéré. Ce n'est pas que nous n'y consacrons pas de ressources. Sur les 110 000 dossiers, qui est le premier et qui est le dernier? Cela ne fait pas de différence. Nos ressources y sont immédiatement consacrées. Le traitement d'un dossier peut prendre du temps mais nous devons respecter le fait que certains ont présenté leur demande avant d'autres.
Le sénateur LeBreton : Contestez-vous les cinq ans dont parle l'Association du Barreau?
M. Volpe : Je mettrai de côté le bon conseil que m'a donné mon collaborateur parce qu'il a fourni une explication technique pour déterminer où iraient d'abord ces 12 000. Permettez-moi de répéter les choses.
Le représentant de l'ABC qui nous a parlé de l'arriéré n'a pas dit que ce dernier est beaucoup plus important dans certains endroits que dans d'autres, et que la moyenne est de beaucoup moins de cinq ans. Voilà pourquoi on s'est dit qu'on pourrait s'en occuper en deux ans.
L'aspect le plus important, c'est qu'il existe du financement pour régler un problème qui risque de se présenter à cause d'un manque de ressources et de l'existence d'une politique qui avait été approuvée par le Parlement et qui n'avait pas été modifiée.
Nous avons réussi à la modifier. Nous nous en occupons de différentes façons, comme je vous l'ai dit, afin de régler le problème au plus vite. Tous ces facteurs entrent en ligne de compte immédiatement.
Combien de temps faut-il attendre pour que la nouvelle politique fonctionne à 100 p. 100? Puisque les fonds sont disponibles maintenant, les programmes de formation sont en place et nous affectons déjà les fonctionnaires là où les besoins sont les plus urgents. Je ne saurais pas vous dire combien de temps il faut compter, mais l'aspect le plus important, c'est la modification de la politique, et ça c'est déjà fait.
[Français]
Le sénateur Losier-Cool : Ma question concerne les réfugiés, en particulier les enfants réfugiés. Nous avons discuté tout à l'heure des personnes les plus vulnérables et d'après moi, les réfugiés les plus vulnérables sont certainement les enfants. Nous avons au Canada des lignes directrices s'appliquant aux enfants réfugiés. Les gens qui questionnent les enfants ont-ils une formation spéciale? Possèdent-ils des connaissances spécifiques sur le développement des enfants? Connaissent-ils vraiment la question des enfants dans ces lignes directrices que le Canada a adoptées pour les réfugiés?
M. Volpe : Oui, il y a du personnel compétent dans l'analyse et la décision. Mais comme vous le savez, il y a deux types de réfugiés. Le premier type est aussi divisé en deux catégories en collaboration avec l'ONU et le Comité sur les réfugiés. Le deuxième groupe est celui qui se trouve de quelque manière à nos frontières et qui dépose une demande de réfugié. Donc, dans la première catégorie, on a du personnel ayant déjà une expertise internationale et qui a déjà tous les éléments pour prendre une décision qu'on accepte, parce qu'il y a l'expertise et la pratique sur les lieux. Ici, il faut établir une certaine expertise et la formuler, l'alimenter. Dans ce cas-ci, on a en place un système qui valorise le mérite qu'on désire chez les individus qui font ces entrevues et prennent des décisions. Pour vous donner une réponse plus précise d'un point de vue technique, j'aimerais que M. Jean poursuive.
Le sénateur Losier-Cool : Oui, j'aimerais des précisions sur la question.
M. Daniel Jean, sous-ministre adjoint intérimaire, Développement des politiques et des programmes, Citoyenneté et Immigration Canada : Suite à certaines des observations à la fois des gens qui s'occupent de la mise en place de la convention mais également de d'autres intervenants, on a mis à jour nos directives quant à la façon dont on fonctionne lorsqu'on reçoit des revendications d'enfants mineurs non accompagnés. Un programme de formation sera offert tout l'été jusqu'à l'automne sur ces nouvelles directives. Dans ces directives, on demande à nos officiels de prendre tout le soin nécessaire pour ce genre de situations. On essaie de développer des mécanismes et des protocoles avec les autorités provinciales sur le plan de la protection des enfants dans le but de s'assurer que les enfants soient bien représentés. Au Canada, l'évaluation de l'asile est faite par la Commission de l'immigration et le statut de réfugié et normalement, ils vont demander à ce qu'une personne soit nommée pour représenter les intérêts de l'enfant dans le contexte.
[Traduction]
Le sénateur Carstairs : Lorsque Mme Kelly Stone, directrice de la Division de l'enfance et de l'adolescence, a comparu devant nous avec la ministre Carolyn Bennett, Mme Stone a dit qu'elle donnerait aux responsables de la citoyenneté des exemples de la Convention sur les droits de l'enfant et du document intitulé« Y'a personne de parfait », qui traite du recours aux châtiments corporels sur les enfants et de la solution de rechange —c'est-à-dire d'autres formes de discipline. Je voulais tout simplement que vous me disiez oui, que ces documents seront disponibles à ceux qui demandent la citoyenneté canadienne.
M. Volpe : Vous voulez la réponse complète, ou vous vous contentez d'un oui?
Le sénateur Carstairs : Je me contente d'un oui.
M. Volpe : La réponse c'est oui.
Le sénateur Carstairs : Vous allez obtenir des statistiques pour le sénateur Andreychuk. Je veux savoir si les mineurs non accompagnés qui sont détenus — et je sais que cela se fait uniquement dans des circonstances exceptionnelles, comme vous avez dit — ont accès aux agences locales de services pour enfants qui, je pense, connaissent ces problèmes mieux que vos fonctionnaires.
M. Volpe : Je pense que nos fonctionnaires ont beaucoup de connaissances, mais la réponse c'est oui.
Le sénateur Carstairs : Est-ce que la formation en anglais ou en français est prévue dans ces ententes que vous concluez avec les provinces au sujet de l'établissement des immigrants? Vous savez comme moi qu'il y a des écoles dans ma ville et dans la vôtre où de plus en plus d'enfants ne parlent ni anglais ni français. Dernièrement, je constate une diminution des programmes de formation en anglais langue seconde.
M. Volpe : Oui.
Le sénateur Carstairs : Très bien.
La présidente : Cette réponse a été utile, peut-être pas par rapport à la question, mais certainement par rapport au peu de temps dont nous disposons.
Le sénateur Nancy Ruth : Je m'inquiète toujours lorsqu'on parle aux enfants sans que leurs parents et surtout leurs mères soient présents. Je veux savoir quels liens existent entre votre ministère et la Convention sur les droits de l'enfant et la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. Est-ce que vous analysez les statistiques par rapport à ces deux conventions afin d'essayer de trouver des solutions un peu plus créatives que celles qu'on voie parfois?
M. Volpe : Comme vous avez peut-être compris, il s'agit d'un défi pour tout le monde, surtout pour un gouvernement qui cherche à adopter une approche intégrée à toutes les questions.
De notre point de vue, le défi est plus local, mais les mêmes principes s'appliquent. Notre ministère fait un effort concerté pour rassembler non seulement tous les ministères et organismes, mais également toute l'information qu'ils produisent, et pour en tenir compte dans la documentation que nous fournissons à nos agents préposés aux cas, aux préposés à l'entrevue, et cetera.
Le sénateur Nancy Ruth : Cela ne me dit pas grand-chose.
M. Volpe : Oui. J'ai répondu à votre question, sénateur. Oui, nous faisons cela.
Le sénateur Nancy Ruth : Vous dites qu'il est difficile de rassembler les efforts de tous les ministères par rapport à toutes les conventions que le Canada a signées et d'en tenir compte dans vos manuels.
M. Volpe : Sénateur, vous avez peut-être raté un bout de ce que j'ai dit, car le son de mon Blackberry a dérangé tout le monde. Nous essayons d'adopter la même approche intégrée qui englobe tous les ministères, mais nous le faisons dans le cadre étroit de notre ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration. Nous rassemblons tous les renseignements produits par les différents ministères et organismes qui ont une incidence importante sur les services que nous donnons à nos clients. Nous recueillons toutes ces données afin de bien informer nos agents, surtout en ce qui concerne les femmes et les enfants.
La présidente : Monsieur le ministre, au début vous nous avez dit que vous n'étiez pas sûr de la raison pour laquelle vous étiez ici, car la Convention sur les droits de l'enfant semblait relever d'autres ministères. Je pense que vous comprenez maintenant que le comité juge que la Convention est la responsabilité de tous, y compris votre ministère.
Merci de nous avoir parlé des premiers points d'entrée et de leur responsabilité à l'égard de la Convention. Nous allonspeut-être vous demander de revenir si nous avons d'autres questions à vous poser, sinon, vous pouvez attendre la présentation de notre rapport et de nos recommandations et nous espérons que vous allez en tenir compte. La question des réfugiés et des immigrants est d'une importance capitale pour la Convention, comme le sont d'autres questions. C'est l'emphase que nous voulons mettre dans notre rapport. Je tiens à vous remercier, ainsi que vos fonctionnaires, d'avoir partagé des renseignements avec nous aujourd'hui.
M. Volpe : Dans l'un ou l'autre des cas, j'attendrai avec impatience de vos nouvelles. Il faudra sans doute que j'attende votre rapport pour prendre connaissance de vos recommandations. Cependant, si je peux vous être utile une autre fois, nous ferons l'impossible pour revenir.
Entre-temps, au nom de mes deux fonctionnaires et des autres membres du personnel qui m'accompagnent, merci de nous avoir invités et merci de votre participation à la discussion. J'espère qu'elle a été fructueuse.
La séance est levée.