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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Droits de la personne

Fascicule 21 - Témoignages


OTTAWA, le lundi 21 novembre 2005

Le Comité sénatorial permanent des droits de la personne, qui est autorisé à inviter de temps à autre le président du Conseil du Trésor et la présidente de la Commission de la fonction publique, dans le but d'examiner des cas de discrimination présumée dans les pratiques d'embauche et de promotion de la fonction publique fédérale, se réunit aujourd'hui à 16 h 10.

Le sénateur A. Raynell Andreychuk (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Honorables sénateurs, avant d'examiner nos travaux futurs à huis clos, nous avons le devoir d'élire un nouveau vice-président, compte tenu du départ à la retraite du sénateur Pearson.

Je suis prête à recevoir des candidatures.

Le sénateur Losier-Cool : Je propose le sénateur Carstairs.

Le sénateur LeBreton : Je seconde cette candidature.

La présidente : Comme aucun autre nom n'est proposé, pouvons-nous adopter à l'unanimité une résolution pour nommer le sénateur Carstairs vice-présidente du comité?

Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

La présidente : Bien que ce ne soit pas complètement inattendu, le sénateur Carstairs et les autorités constituées, si je peux le dire ainsi, se sont consultées. Par conséquent, je propose l'ajout du sénateur Baker au comité de direction.

Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

La présidente : Nous allons maintenant poursuivre à huis clos.

Le comité poursuit ses travaux à huis clos.

Le comité poursuit ses travaux en public.

La présidente : Honorables sénateurs, nous sommes ici cet après-midi afin de recevoir une mise à jour et un rapport de la Commission de la fonction publique. Nous sommes autorisés, par ordre de renvoi, à inviter de temps à autre le président du Conseil du Trésor et la présidente de la Commission de la fonction publique, leur personnel ainsi que d'autres témoins à comparaître devant le comité dans le but d'examiner des cas de discrimination présumée dans les pratiques d'embauche et de promotion de la fonction publique fédérale et d'étudier dans quelle mesure les objectifs d'équité en matière d'emploi sont respectés pour les groupes minoritaires.

Nous avons le plaisir de recevoir Maria Barrados, présidente de la Commission de la fonction publique. Comme je l'ai dit, votre rapport annuel vient de sortir et nous aimerions de temps à autre que vous veniez nous mettre à jour sur votre rapport et d'autres questions pertinentes dans le cadre de notre étude sur la fonction publique et son développement.

La parole est à vous.

Maria Barrados, présidente, Commission de la fonction publique : Honorables sénateurs, je vous remercie de m'avoir invitée encore cette année à faire le point sur notre travail.

[Français]

La Commission de la fonction publique du Canada est un organisme indépendant qui relève du Parlement. Elle est responsable de protéger l'intégrité du système de dotation dans la fonction publique fédérale et l'impartialité des fonctionnaires sur le plan politique. Il lui incombe également de recruter des Canadiens et des Canadiennes de talent qui proviennent de partout au pays.

En vertu de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, la Commission de la fonction publique a la responsabilité de la détermination et de la suppression des obstacles à la carrière des membres des groupes désignés découlant de ses systèmes, règles et usages en ce qui concerne le recrutement et la dotation. La loi exige également que la Commission de la fonction publique instaure des « mesures positives » qui vont au-delà de la suppression des obstacles pour promouvoir activement l'avènement d'une fonction publique plus représentative et hâter les progrès en éliminant les lacunes sur le plan de la représentation des groupes désignés.

Nous avons une direction qui se consacre uniquement à l'équité en matière d'emploi. Les responsables de cette direction élaborent des lignes directrices et exécutent notre mandat de surveillance afin de parvenir à se doter d'une fonction publique fédérale représentative.

[Traduction]

Nous fournissons également un soutien financier de 300 000 $ sur trois ans au Conseil national des minorités visibles. Nous ne recevons plus de financement externe du Fonds de soutien Faire place au changement.

À l'occasion de l'établissement de notre dernier rapport annuel, nous nous sommes rendu compte que la composition de l'effectif de la fonction publique correspond à la disponibilité sur le marché du travail de trois des quatre groupes désignés aux fins de l'équité en matière d'emploi : les femmes, les personnes handicapées et les Autochtones. Cependant, l'écart entre la représentation des personnes qui font partie des minorités visibles dans la fonction publique et leur disponibilité sur le marché du travail continue d'exister. Le recrutement ne progresse pas au même rythme que la proportion croissante des minorités visibles dans la population.

Nous sommes également préoccupés par le manque de progrès en ce qui concerne la nomination au groupe de la direction de personnes qui font partie des minorités visibles. L'année dernière, nous avions demandé à 18 ministères et organismes de nous présenter leurs plans de dotation des postes de cadre. Onze d'entre eux nous ont soumis leurs plans. Ces plans faisaient état de plus de 280 postes vacants potentiels, dont huit s'adressaient aux membres des minorités visibles. Les 18 organisations ont fait, au total, 254 nominations au cours de l'exercice. Six de ces nominations concernaient des membres des minorités visibles. Nous avons trouvé ces résultats décevants.

Après notre analyse des plans de dotation, nous avons informé les administrateurs généraux et les administratrices générales de chacune des sept organisations qui n'avaient pas présenté de plan ainsi que l'administrateur général de l'organisation dont le plan ne comportait pas de poste à l'intention des membres des minorités visibles que nous allions contester toutes leurs demandes de dotation de postes de cadre.

Nos efforts ont porté fruit : dix de ces dix-huit organisations travaillent maintenant avec la CFP à mettre sur pied un processus de sélection générique au niveau des cadres de direction visant les membres des minorités visibles. Les entrevues avec 201 candidats et candidates en vue de doter 18 postes sont en marche depuis le 19 septembre.

Nous avons constaté qu'au cours des dernières années, environ 25 p. 100 des candidatures aux concours publics, à tous les niveaux, provenaient des personnes qui font partie des minorités visibles. Cependant, seulement 10 p. 100 de ces concours ont donné lieu à des nominations de candidats ou des candidates provenant de ce groupe de personnes. Nous avons lancé une étude pour examiner cette question en détail. Cela nous permettra d'élaborer une approche axée davantage sur le problème. Nous nous attendons à ce que l'étude soit achevée l'année prochaine.

[Français]

La nouvelle Loi sur l'emploi de la fonction publique, qui doit entrer en vigueur d'ici la fin de cette année, favorise la délégation des pouvoirs de nomination aux administrateurs généraux et des administratrices générales en ce qui concerne le recrutement externe et le ressourcement des cadres. Elle leur procurera une nouvelle marge de manœuvre pour atteindre les objectifs du gouvernement en ce qui a trait à l'équité en matière d'emploi.

À titre d'exemple, la loi non seulement leur permet de conserver la capacité d'élargir les zones de sélection aux membres des groupes désignés, mais elle leur facilite la tâche en leur fournissant le pouvoir de restreindre la zone de sélection aux membres de ces groupes. Les administrateurs généraux et les administratrices générales peuvent également décréter que les objectifs d'équité en matière d'emploi sont un besoin de l'organisation, soit l'un des critères de mérite pouvant être utilisés pour faire une nomination.

[Traduction]

J'aimerais déposer devant le comité aujourd'hui les lignes directrices sur l'équité en matière d'emploi dans le processus de nomination. Ces lignes directrices aideront les ministères et les organismes à intégrer l'équité en matière d'emploi dans la conception de leur système de nomination, de sorte qu'ils puissent tirer tout le profit possible de la nouvelle souplesse qui s'offre à eux.

À cette nouvelle souplesse vient se greffer une responsabilisation accrue. Au moyen de nos activités de surveillance, nous rendrons les administrateurs généraux et les administratrices générales responsables du respect des valeurs qui sous-tendent la dotation dans la fonction publique. La représentativité est une valeur fondamentale et une partie intégrante de notre cadre de nomination et des ententes de responsabilisation que nous avons avec les administrateurs généraux et les administratrices générales.

Honorables sénateurs, votre comité pourrait être intéressé à en connaître davantage sur certaines de nos initiatives et sur l'incidence des changements apportés à la LEFP sur la diversification en matière de recrutement. Je me ferai un plaisir de répondre à toutes les questions que voudront me poser les membres du comité.

Le sénateur Carstairs : D'abord, je vais vous donner l'occasion de nous expliquer un peu la controverse qui entoure votre ministère depuis quelques jours concernant les pratiques de recrutement.

Mme Barrados : Sénateur, parlez-vous de l'article qui a été publié dans le journal concernant Travaux publics et Services gouvernementaux Canada?

Le sénateur Carstairs : Exactement.

Mme Barrados : J'ai été surprise lorsque j'ai vu cet article dans le journal. J'ai parlé au sous-ministre. Comme je le lui ai dit, à la Commission, nous appuyons beaucoup les efforts visant à augmenter la représentation des groupes visés par l'équité en matière d'emploi. Nous continuons d'appuyer ces initiatives. Cependant, j'avais quelques questions techniques sur ce qu'il essayait de faire. Je ne suis pas certaine que l'article que j'ai lu dans le journal tienne compte de tous les faits.

Le sous-ministre m'a dit qu'il avait de très bonnes intentions dans ses efforts. Ils n'essaient pas d'exclure qui que ce soit. En fait, il a redivisé la politique et travaillera avec d'autres acteurs du système pour faire les choses comme il faut, à ce qu'il m'a dit.

Le sénateur Carstairs : Merci de cette précision. Cela signifie que beaucoup de questions ont probablement trouvé réponse.

Dans votre déclaration d'ouverture, vous dites qu'onze des dix-huit organisations vous ont soumis leurs plans. Quelles explications les autres organisations vous ont-elles données pour ne pas vous soumettre les leurs?

Mme Barrados : Je vais demander à M. Boulet si nous n'avons jamais reçu de bonnes explications.

Je n'ai jamais été satisfaite de ces explications. Dans une organisation, lorsque le chef a pris conscience qu'il n'y avait pas de réponse, il n'a pas manqué de corriger ses façons de faire parce qu'il s'est rendu compte qu'elles n'étaient pas prises au sérieux.

Monsieur Boulet, avez-vous une meilleure explication?

Gerry Boulet, directeur général, Ressourcement des cadres, Commission de la fonction publique : Honorables sénateurs, ces organisations ont donné des explications plutôt vagues. Dans beaucoup de ministères, l'un des grands problèmes est le manque de planification des ressources humaines, un problème que la Commission a déjà mentionné dans d'autres rapports. Certains fonctionnaires n'ont même pas réussi à nous dire quels seraient leurs postes vacants potentiels à doter et pour quels postes ils pourraient se donner une cible. Franchement, il y avait un manque d'information.

Le fait que notre présidente leur a récrit pour leur dire qu'elle en ferait mention dans un rapport a peut-être provoqué plus de réactions. Au départ, nous n'avons pas obtenu ce que nous voulions.

Le sénateur Carstairs : Lorsque vous avez lu votre exposé, vous avez mentionné qu'après analyse, vous avez informé les administrateurs généraux, et cetera. J'ai écrit à côté de ces mots « bravo ». La seule façon d'inciter les gens de certains ministères à réagir c'est de leur faire sentir qu'ils sont dans l'eau chaude. La seule façon d'y arriver est de les embarrasser publiquement, si c'est ce qu'il faut.

Vous avez exprimé votre profonde déception devant le faible recrutement de personnes du groupe des minorités visibles. Vous avez dit que du nombre des candidats à postuler, 25 p. 100 provenaient du groupe des minorités visibles, mais que seulement 10 p. 100 réussissaient à décrocher un emploi. Quelles sont les barrières systémiques? Quel est le problème? Avez-vous réussi à mettre le doigt sur le bobo?

Mme Barrados : D'abord, sénateur, j'aimerais ajouter quelque chose à votre observation. En plus de préparer le rapport annuel et d'écrire des lettres, j'ai aussi écrit au greffier et j'ai ajouté ce critère au processus d'évaluation des sous-ministres par le greffier. Je l'ai fait parce que le greffier est très déterminé à augmenter la représentativité dans la fonction publique.

Concernant ce que nous appelons les laissés-pour-compte, c'est-à-dire le grand bassin et le petit nombre de personnes, la Commission travaille depuis quelques années à trouver des solutions au problème. D'entrée de jeu, il y a des choses qui s'expliquent facilement, comme le fait que les gens ne se rendent pas compte que nous accordons la préférence aux citoyens canadiens, par exemple. De nombreuses personnes qui n'ont pas la citoyenneté postulent, et il y a une préférence pour les citoyens. Cela exclut certaines personnes.

Certains candidats ne comprennent pas ce qu'il faut faire lorsqu'ils postulent un emploi. Les concours sont assez techniques. Il y a une liste de choses qu'on cherche. On s'attend à des réponses pour chaque élément de la liste. Si un candidat ne répond pas bien, il sera évincé.

Nous sentons qu'il nous faut plus de renseignements sur ce qui se passe véritablement. Ce qui m'inquiète, bien sûr, c'est que les gens embauchent des gens qui leur ressemblent. Lorsque nous étudions comment se fait la dotation, nous sommes très préoccupés de ce que j'appelle l'embauche indirecte. Il y a une tendance dans la fonction publique à utiliser la voie des emplois occasionnels et à temps partiel pour maintenir des personnes en poste de façon permanente. Cependant, quand on embauche sur une base temporaire, les exigences sont bien inférieures à celles de la dotation, parce que ces cas débordent de notre procédure normale. Lorsqu'on envisage d'embaucher quelqu'un à temps partiel, on ne fait pas le même type de recherche, on ne cherche pas la plus grande diversité de personnes possible. On met tout de suite la représentativité en péril. Cela fait partie de la donne.

C'est un domaine qui continue de nous préoccuper. Nous voulons des processus de sélection élargis, ouverts à tous les Canadiens.

La présidente : Les employés occasionnels en viennent à mieux connaître le système. Même si le système est juste, ils auront l'avantage parce qu'ils auront la chance de travailler avec le service et de savoir comment faire leur demande. Si tel est le cas, ne pourrions-nous pas utiliser le statut occasionnel pour cibler les groupes des minorités visibles ou les autres minorités? C'est ce que nous faisons lorsque nous voulons favoriser le recrutement de jeunes.

La reconnaissance des titres de compétences étrangers pose-t-elle problème? Autrement dit, on ne connaît pas nécessairement bien les titres de compétences du candidat. Vous dites que les gens sont portés à embaucher des gens qui leur ressemblent. Si une personne est diplômée de l'Université de Toronto, nous savons de quoi il en retourne. Cependant, si elle a obtenu un diplôme ailleurs, ce n'est peut-être pas la même chose. Est-ce aussi un problème de reconnaissance des titres de compétences?

Mme Barrados : Le recrutement d'employés occasionnels a pour but de répondre à des besoins à court terme. Vous avez raison, madame le sénateur, de dire que c'est avantageux d'avoir de l'expérience de travail au sein du gouvernement. Nous sommes réticents à assortir ces embauches de trop d'exigences, parce que l'idée derrière cet outil est de permettre aux gens de répondre à leurs besoins à court terme sans trop perdre de temps.

Pour ce qui est des postes à temps partiel ou à durée déterminée, nous nous attendons à une plus grande représentativité aussi, bien que les concours ne semblent pas aussi exigeants pour ces postes que pour les emplois permanents.

Au sujet de la reconnaissance des titres de compétences étrangers, c'est effectivement un problème. Il s'exprime sous diverses formes. Évidemment, il y a lieu de se demander si certains groupes professionnels reconnaîtront des équivalences. À la fonction publique, nous travaillons à un document de travail sur ce que nous appelons la norme de direction ou la norme des EX. Nous prévoyons dans ces exigences un diplôme d'éducation postsecondaire, mais acceptons une équivalence. Ce serait donc une occasion d'essayer de déterminer l'équivalence.

Le sénateur Poy : Madame Barrados, vous avez mentionné que seuls onze des dix-huit ministères vous ont remis un rapport. N'y sont-ils pas tenus? Je ne comprends pas pourquoi certains ministères peuvent y échapper. Pouvez-vous nous l'expliquer?

Mme Barrados : C'est une question intéressante. La Commission de la fonction publique est une organisation unique. Nous avons plus de pouvoirs que d'autres organismes faisant rapport directement au Parlement, comme le Bureau du vérificateur général, où je travaillais auparavant.

Le pouvoir de faire des nominations relève de la Commission de la fonction publique. Nous pouvons assortir ce pouvoir de conditions et lever des conditions. Nous pouvons également ordonner des mesures correctives particulières. Nous avons beaucoup de pouvoir.

La meilleure façon de faire, toutefois, est d'utiliser la méthode douce et de multiplier les pressions. Nous ne déployons pas l'artillerie lourde de nos pouvoirs avant d'avoir vraiment tout tenté. Nous constatons une bonne collaboration des ministères au processus que nous dirigeons, par lequel nous essayons de doter certains postes de direction par des membres des minorités visibles. À notre avis, si l'on obtient d'assez bons chiffres, les problèmes se résoudront d'eux-mêmes. Si nous avions une fonction publique représentative, nous n'aurions pas à nous en faire autant.

Le sénateur Poy : Étant donné que le premier ministre met l'accent depuis quelque temps sur le commerce avec l'Asie, et particulièrement avec les économies en voie d'expansion comme celles de l'Inde et de la Chine, la fonction publique n'a-t-elle pas tendance à tirer avantage des connaissances linguistiques et culturelles de la population canadienne d'origine chinoise ou sud-asiatique? Prévoit-on des programmes de recrutement spéciaux pour les ministères des Affaires étrangères et du Commerce international? Je sais d'expérience que les bureaucrates manquent de connaissances linguistiques, ils me le disent souvent. Il y a beaucoup d'immigrants de seconde ou de troisième génération qui connaissent ces langues étrangères. Les ministères des Affaires étrangères et du Commerce international les recrutent-ils?

Mme Barrados : Je ne suis pas certaine de pouvoir vous donner beaucoup de détails. J'aimerais ajouter deux éléments à prendre à considération. D'abord, en général, notre volonté de favoriser une fonction publique représentative demeure bien ferme, mais il s'agit d'une fonction publique bilingue, anglophone et francophone, et apte à fournir des services au public dans les deux langues ainsi qu'à assurer une supervision dans les deux langues, conformément à la Loi sur les langues officielles. C'est une question que certains groupes d'immigrants me posent fréquemment, celle sur l'exigence d'apprendre une autre langue. Nous constatons que les personnes qui sont au service de la fonction publique relèvent le défi et que nous n'avons pas de difficulté à trouver des personnes qui ont appris les deux langues.

Pour répondre à votre question sur les exigences linguistiques spéciales, celles-ci sont établies par les gens des ministères et elles dépendent de leur travail. Évidemment, il y a les Affaires étrangères, mais il y a aussi les domaines de la sécurité et du renseignement où l'on cherche des compétences en langues étrangères. Cela dépend beaucoup de l'emploi.

Le sénateur LeBreton : Ma première question s'inscrit dans la foulée de celles du sénateur Carstairs, puis j'ai une autre question de mon cru. Vous avez parlé de l'embauche indirecte et du fait que les gens embauchent des gens qui leur ressemblent. Vous avez aussi parlé des emplois occasionnels et à temps partiel pour combler des postes permanents. De combien de personnes s'agit-il pour l'ensemble du gouvernement?

Mme Barrados : Nous parlons d'un très grand nombre de personnes. Cependant, je ne lancerai pas de chiffre de mémoire, parce que j'ai tendance à me tromper lorsque je le fais. Par exemple, nous publions dans notre rapport annuel des tableaux sur le type d'embauche qu'il y a eu. En 2004-2005, nous avons fait entrer 34 844 personnes dans la fonction publique. De ce nombre, environ 10 p. 100 ont obtenu un poste permanent; 24 p. 100 sont là pour une période précise, soit pour un an moins de trois ans; 38 p. 100 sont des employés occasionnels et 28 p. 100 des étudiants. Il y a beaucoup d'activités de recrutement, mais seule une petite partie d'entre elles vise des postes permanents.

Lorsque nous avons examiné le nombre d'embauches permanentes, nous avons constaté que peu d'entre elles venaient du grand public. Environ 26 p. 100 des candidats venaient du grand public. Le reste venait du bassin des employés à durée déterminée, des étudiants, des employés occasionnels et des employés d'autres organismes fédéraux.

Le sénateur LeBreton : Autrement dit, vous dites que les personnes qui entrent par la voie indirecte ont un avantage et que ce sont elles qui finissent par obtenir le plus grand nombre d'emplois permanents.

Mme Barrados : C'est juste.

Le sénateur LeBreton : Vous devrez probablement vous attaquer au problème.

Mme Barrados : En effet. La nouvelle loi met davantage l'accent sur la planification, comme M. Boulet l'a dit. L'idée consiste à décrire clairement ses exigences, puis à mettre en place les initiatives nécessaires pour les satisfaire. Nous espérons amener les gens à voir le mode de dotation différemment; en d'autres termes, on ne devrait pas recourir à ces méthodes pour combler un poste parce qu'on a vraiment besoin de quelqu'un pour ensuite essayer de le faire passer d'employé à temps partiel ou à durée déterminée à employé permanent, il faudrait plutôt utiliser un mécanisme inclusif pour remplir des postes permanents, élargir le processus afin d'établir un bassin de candidats pour remplir les postes vacants.

Le sénateur LeBreton : Ma prochaine question est très d'actualité. Quelle est la politique de la Commission de la fonction publique concernant le recrutement du personnel politique exonéré des ministres? Quelle est la procédure qui permet au personnel ministériel exonéré d'un certain niveau d'avoir accès à la Commission de la fonction publique? Quelle est la procédure suivie exactement pour que toutes les règles voulues soient respectées et que les membres du grand public ou les employés de la fonction publique ne subissent absolument aucune discrimination lorsque ces personnes sont embauchées?

Mme Barrados : Cette question vient à point. Le personnel exonéré ne fait pas partie de la fonction publique. Ces personnes ont les mêmes droits et privilèges que les gens du grand public, à une exception importante près. Cette exception importante est ce qu'on appelle le « droit de priorité » qui s'applique au personnel ministériel. Il faut avoir occupé un poste élevé au sein d'un cabinet de ministre pendant trois ans ou avoir déjà travaillé comme fonctionnaire pour pouvoir en bénéficier. Ces personnes ont ce qu'on appelle un statut de bénéficiaire de priorité, ce qui signifie qu'elles doivent présenter leur candidature à la Commission de la fonction publique, qui détermine ensuite si elles ont effectivement ce droit. Lorsqu'une personne a ce privilège, elle a le droit d'obtenir tout emploi pour lequel elle se qualifie avant la plupart des autres, dans les concours internes comme les concours externes.

Le sénateur LeBreton : Nous voulons une fonction publique non partisane. Dans ce cas-ci, le parti politique au pouvoir est là depuis longtemps. S'il devait perdre le pouvoir, il risquerait d'y avoir un grand nombre de personnes dans la fonction publique qui devraient se conduire de façon non partisane — une tâche très difficile compte tenu de la nature même de l'emploi qu'elles occupaient — dans l'intérêt de tous les Canadiens, mais sans égard à leur allégeance politique. C'est la façon dont les règles fonctionnent actuellement, n'est-ce pas?

Mme Barrados : De notre côté, nous sommes inquiets. Nous avons deux grandes responsabilités dans notre loi. La première est de protéger le mérite et la seconde, de protéger l'impartialité politique dans la fonction publique. Clairement, nous avons le devoir de veiller à ce que ces personnes soient qualifiées et qu'elles acceptent d'agir comme fonctionnaires.

Les chiffres ne sont pas élevés. L'an dernier, nous avons eu 35 nominations de ce type. Deux d'entre elles étaient dans la catégorie de la direction. Il ne faut pas oublier que nous parlons ici de gros chiffres, puisque nous employons des milliers de personnes en tout temps. Le nombre de bénéficiaires de priorité tournait autour de 30 en 2003-2004; en 2004-2005, il y en a eu 68. Ce ne sont pas tous les employés des cabinets de ministres qui veulent se joindre à la fonction publique.

Cette disposition est très critiquée. On en a débattu la dernière fois que notre loi a fait l'objet d'une révision, en novembre 2003, mais elle a été maintenue.

Notre philosophie est qu'en vertu de la nouvelle Loi sur l'emploi dans la fonction publique, nous déléguons la plupart des activités de recrutement et de dotation, à l'exception des nominations d'employés ministériels exonérés à des postes de direction, puisque c'est là où les risques sont les plus grands parce que le personnel ministériel a tendance à entretenir des relations avec des personnes de l'organisation.

La présidente : Depuis combien de temps cette règle existe-t-elle dans notre fonction publique? Y a-t-il un principe de droit semblable qui existe dans les pays auxquels nous nous comparons souvent?

Mme Barrados : Corrigez-moi si je me trompe, mais je crois que notre principe de droit est unique. Nous sommes les seuls à avoir une telle disposition. J'ai demandé à mon groupe de juristes de vérifier depuis combien de temps elle existe, et ils ont trouvé un concept semblable dans la législation de 1920.

La présidente : Madame Gobeil, avez-vous quelque chose à ajouter?

Linda Gobeil, vice-présidente principale, Direction générale des politiques, Commission de la fonction publique : Pas vraiment, sauf que nous poursuivons nos recherches à ce sujet. Il semble que c'était une priorité telle qu'elle a été enchâssée dans la loi dès l'époque de la Loi sur le service civil. Elle semble faire partie de l'histoire.

La présidente : Je ne comprends pas comment elle fonctionne. Si un employé de la Commission de la fonction publique postule un emploi, qu'un employé ministériel postule le même emploi et qu'il est prouvé que les deux ont les compétences recherchées, est-ce l'employé du ministre qui aura la priorité? Est-ce la façon dont cela fonctionne? Qu'en dit le syndicat?

Mme Barrados : Les chiffres ne sont pas grands, il ne faut pas l'oublier. Cette façon de faire existe depuis très longtemps. Tout dépend de la décision sur leur admissibilité.

Même si une personne est qualifiée, elle passe après quiconque est en congé autorisé. Il y a d'autres priorités dans le système. Quiconque est en congé autorisé passe devant un employé ministériel bénéficiaire de priorité. Si aucun employé en congé autorisé n'a les compétences requises pour l'emploi, par contre, l'employé ministériel obtiendra le poste avant qu'un concours ne soit tenu.

La présidente : J'ai entendu dire le contraire de ce que vous venez de décrire.

Si l'on fait partie de la fonction publique, peut-on partir en congé pour aller dans un cabinet de ministre et revenir à la Commission de la fonction publique?

M. Boulet : Je pense que la loi autorise la prise d'un congé autorisé. Ce congé doit être autorisé par un responsable du ministère concerné pour que la personne soit nommée au cabinet d'un ministre. Lorsque cet emploi cesse, la personne peut revenir et être placée de façon prioritaire en retour d'un congé autorisé. Comme Mme Barrados l'a dit, c'est la priorité ultime qui existe. La personne peut même avoir été là assez longtemps pour bénéficier également d'un droit de bénéficiaire de priorité ministériel.

La présidente : Vous avez deviné ma seconde question. Est-ce la façon d'avancer? On peut retirer une expérience unique d'un cabinet de ministre qu'une description de travail de l'interne ne nous offrirait pas.

Mme Barrados : Il ne fait aucun doute qu'on peut retirer une expérience très unique du travail à différents endroits, mais il y a un autre fardeau qui accompagne cette expérience. Nous travaillons fort au maintien d'une fonction publique impartiale. Certains d'entre nous sont ici depuis assez longtemps pour avoir vu des changements importants au gouvernement, et ce n'est pas nécessairement un atout d'être associé à un ministre en particulier.

La présidente : Je pense que c'est vrai. Le problème est dans la perception et non dans la réalité.

Mme Barrados : Nous sommes tout aussi préoccupés des perceptions que de la réalité. Nous devons travailler dans les deux sens.

La présidente : Prenez-vous en note le nombre de personnes qui sont en congé autorisé dans un cabinet de ministre? Vous avez d'autres statistiques. Je me demandais si vous aviez des statistiques là-dessus.

Mme Barrados : Je n'en suis pas sûre; je vais vérifier. Nous prenons note du nombre de personnes en congé autorisé. Je ne sais pas bien combien il y en a dans les cabinets des ministres. Je pense que c'est un nombre très petit, mais je vais vérifier.

[Français]

Le sénateur Losier-Cool : J'aimerais tout d'abord faire un commentaire et peut-être pourrez-vous me dire si j'ai raison de m'inquiéter. Dans la Loi sur la fonction publique, les femmes sont un groupe désigné et cela me met mal à l'aise. Pouvez-vous me dire pourquoi les femmes font partie des groupes désignés. Elles peuvent être parmi, les Autochtones, les handicapés ou autres. Je comprends bien l'historique de tout cela. On voulait plus de femmes dans la fonction publique. Maintenant, comment mesurez-vous le progrès? Est-ce dans le nombre d'Autochtones ou des minorités visibles?

Ma deuxième question porte sur la formation sur le multiculturalisme ou la diversité culturelle. Lors de la réception des demandes d'emploi, jusqu'à quel point les gestionnaires doivent-ils être au courant de la culture ou de la diversité lors de la sélection des nombreux candidats? Lors d'un discours prononcé au Musée des civilisations il y a un ou deux mois, le premier ministre avait dit qu'en 2015, notre fonction publique aurait certainement une nouvelle image, une nouvelle figure à cause de la population vieillissante et de la rencontre des objectifs de la Loi sur l'équité. Pouvez-vous commenter?

Mme Barrados : Ce sont de très bonnes questions. J'ai posé la même question à savoir pourquoi les femmes sont un groupe défini. On m'a répondu que c'était parce que les chiffres indiquent qu'il y a une représentation raisonnable, sauf dans quelques endroits. Je sais que dans le domaine de la science et de la recherche, il y a un manque de femmes. Je vais demander à ma collègue d'ajouter à ma réponse.

En ce qui a trait à votre deuxième question, je vais demander à mon collègue, l'expert en la matière, de vous donner plus d'informations sur la question du processus de la dotation.

Mme Gobeil : Historiquement, les femmes n'étaient pas représentées dans la fonction publique et sur le marché du travail de façon générale au Canada. Les statistiques actuelles démontrent que cette disproportion s'atténue grandement. Dans la fonction publique, de façon peut-être négligeable, le recrutement de la main-d'œuvre féminine se situe un peu au-delà de ce qu'on retrouve dans le reste de la population.

Il reste quand même des groupes d'occupation où les femmes ne sont pas représentées comme elles le devraient. On a parlé des groupes de scientifiques et des corps de métier où, de façon générale, la proportion des femmes est beaucoup moindre que ce qu'on s'attend à retrouver. Nous mettons plus l'accent sur ces secteurs pour pallier ces manques afin d'obtenir un meilleur équilibre entre les hommes et les femmes.

M. Boulet : Quant à la question concernant la formation sur la diversité, mon équipe, mes consultants en ressourcement sont obligés de la suivre. On a pour mandat, avec le roulement constant de personnel, d'informer régulièrement les employés à ce sujet. À l'interne, nous sommes toujours à la recherche d'un membre du jury qui pourrait apporter la perspective d'une autre communauté. Lorsque nous tenons un concours pour un poste de cadre, nous vérifions s'il y a des candidats identifiés comme faisant partie des minorités visibles. Nous ne sommes peut-être pas en mesure de le faire dans chacun des cas. À des niveaux plus élevés, la difficulté tient du fait qu'ils sont très peu nombreux et qu'ils ont autre chose à faire que de participer à des jurys de sélection. Alors dans certains cas, on n'est pas toujours en mesure de trouver quelqu'un.

Pour la grande majorité des ministères, cela fait partie de la formation de leurs gestionnaires et de leurs employés afin qu'ils soient informés sur cette question.

Le sénateur Losier-Cool : Même les nouveaux employés pourraient avoir accès à ces sessions de formation afin de faciliter les programmes d'intégration?

M. Boulet : Oui.

[Traduction]

Le sénateur Poy : Vous avez parlé de la sous-représentation des minorités visibles dans la fonction publique. Avez- vous des statistiques sur le taux de rétention des personnes qui sont recrutées et leur avancement?

Mme Barrados : Sénateur, je n'ai pas de chiffres avec moi. Je ne suis pas certaine que nous en avons à l'administration centrale. Nous allons vérifier. Si nous en avons, nous allons les faire parvenir au comité.

Le sénateur Poy : Je pose la question parce que je reçois des courriels de groupes des minorités visibles qui affirment avoir des emplois, mais se heurter à un problème ou un autre, puis ne pas être en mesure d'avancer ou encore se retrouver dans une situation si désagréable qu'ils doivent quitter leur emploi. C'est la raison de ma question.

Mme Barrados : C'est un véritable problème. Nous devons nous pencher sur leurs relations avec les autres groupes de la fonction publique. Je reçois beaucoup de courriels, certains de personnes des minorités visibles mais certains d'autres groupes aussi. Ce problème doit être mis en perspective.

La présidente : À ce que je vois, de plus en plus de postes seront situés à Ottawa. Je pense que nous en avons parlé la dernière fois; nos minorités visibles et autres ne vivent pas nécessairement dans la région d'Ottawa, mais plutôt dans nos grands centres urbains. Avez-vous réfléchi aux incidences de l'éloignement du lieu de travail sur cette catégorie d'employés que nous voulons augmenter? Êtes-vous toujours du même avis qu'avant?

Mme Barrados : Ce n'est pas la tâche de la Commission de la fonction publique de déterminer où un ministère ou le gouvernement mène ses activités. Cependant, en ce moment, environ les deux tiers des emplois sont à l'extérieur d'Ottawa. Le tiers est à Ottawa. Là où Ottawa est surreprésenté, comparativement aux autres régions, c'est dans les emplois de haute direction, puisqu'ils sont surtout concentrés à Ottawa plutôt que dans les régions. Cependant, nous avons toujours un équilibre de deux tiers, un tiers.

Je pense que vous faites allusion au fait que la Commission de la fonction publique peut restreindre la zone d'admissibilité pour un concours par application d'une disposition de sa loi. Ainsi, on peut par exemple décider de recruter et de chercher des candidats dans la région de la capitale nationale, par exemple. Cela soulève une polémique, parce qu'on limite beaucoup le bassin de candidats aux types de personnes vivant dans cette région. Nous le faisons souvent pour gérer les volumes. La fonction publique est encore perçue comme un lieu de travail très attirant. Comment traitez-vous les grands volumes de demandes?

Nous avons annoncé un changement dans notre politique. J'ai bien entendu les préoccupations de chacun, et particulièrement celles du sénateur Ringuette au Sénat, qui a porté souvent à mon attention le fait de limiter un concours à une zone géographique. Nous procédons progressivement pour élargir la portée des concours. À partir du 1er avril 2006, nous allons exiger que tous les postes d'agent situés dans la région de la capitale nationale fassent l'objet d'une sélection nationale. En ce moment, la sélection nationale ne sert que pour les postes de direction et les deux niveaux sous la catégorie de direction. À partir du 1er avril, cette règle s'appliquera à tous les postes d'agent et elle devrait s'étendre dès l'année suivante, dès avril 2007, à tous les postes d'agent du pays. De cette façon, n'importe qui pourra poser sa candidature pour n'importe quel poste d'agent au pays.

D'ici décembre 2007, nous utiliserons la sélection nationale pour tous les emplois dans la fonction publique.

Nous procédons de façon progressive, parce que nous voulons nous assurer de ne pas compliquer la dotation ni d'alourdir le charge de travail qu'elle représente. L'idée n'est pas d'utiliser des voies de contournement mais le processus officiel pour trouver du personnel. Il doit bien fonctionner.

Nous avons deux raisons de croire que nous devons le faire maintenant. D'abord, avec la nouvelle loi et la priorité accordée à la planification, à la souplesse et l'élargissement des bassins de candidats et la prévision des besoins, on devrait être en mesure de faire l'investissement initial nécessaire — et l'on ne dote pas seulement un poste, on repère un bassin de candidats dans lequel on peut puiser pour combler les postes vacants. Après ce premier investissement, tout ira beaucoup plus vite.

Ensuite, nous avons un outil informatique que nous offrirons à tous les ministères, mais qui fonctionne déjà dans les bureaux régionaux de la Commission de la fonction publique. Il s'agit d'un outil qui aidera les gestionnaires à concevoir des affiches et à faire l'examen préalable électronique des demandes sur la base des critères qu'ils entreront pour le type de candidat qu'ils cherchent. Les essais que nous avons faits ont montré une grande efficacité pour réduire le nombre de candidats. Grâce à la souplesse prévue dans la loi et à ce nouvel outil électronique, nous croyons pouvoir avancer et élargir la zone nationale de sélection.

Nous allons suivre cela de près. Comme je l'ai dit, nous voulons atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés, c'est-à-dire un plus grand engagement de tout le monde au pays et l'utilisation de cet outil et de la souplesse accordée par la loi pour augmenter la représentation et la participation des groupes visés dans les emplois de la fonction publique.

La présidente : Le Canada comme d'autres pays a constaté ses lacunes autour du 11 septembre, lorsque nous nous sommes rendu compte que nous avions besoin de plus de renseignements en raison des activités terroristes. La plainte récurrente, à un autre comité, c'est que nous n'avons pas les compétences nécessaires au sein de notre service de renseignement pour comprendre assez bien nos collectivités, ce qui mène parfois à de la stigmatisation sociale. De plus, nous ne sommes pas outillés pour comprendre les données que nous recevons de ces collectivités. D'une part, sommes- nous tellement en sécurité? D'autre part, marginalisons-nous une collectivité ou faisons-nous un profilage inutile?

Les gens de la Commission de la fonction publique ont-ils étudié la question? Avez-vous des politiques ou des programmes spéciaux pour nous garantir la sensibilité culturelle et les compétences linguistiques nécessaires pour effectuer le travail du renseignement comme il faut?

Mme Barrados : Le SCRS est justement exempté de l'application des dispositions de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique. L'appareil du renseignement, je ne sais plus si c'est l'expression exacte, est considéré exempt du choix de la Commission de la fonction publique prescrit par les dispositions de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique afin d'être traité de la même façon que le SCRS.

La présidente : Ce sont deux composantes. Combien y en a-t-il d'autres? Nous avons ajouté des dispositions législatives, dont la responsabilité incombe à la ministre McLellan. Il faut aussi recueillir des renseignements, les analyser et les transmettre à la ministre pour qu'elle fasse des recommandations. C'est un niveau d'interprétation nécessaire, parce que la ministre a beaucoup de pouvoirs discrétionnaires. Elle se fiera évidemment à ces opinions. Il faut aussi que l'appareil du renseignement classique communique l'information à tous les ministères. Avez-vous réfléchi à ce que nous faisons à cet égard?

Mme Barrados : Je crois que cela déborde de nos responsabilités. Nous travaillons avec les ministères à définir leurs besoins. Il s'agit de définir leurs besoins. Nous pouvons les pousser dans nos domaines de spécialité, mais nous ne sommes pas spécialistes de ces questions.

La présidente : Ce sujet a-t-il été abordé dans vos discussions?

Mme Barrados : La seule chose dont il a été question dans mes discussions, c'est que la sous-ministre actuelle veut accélérer le plus possible le processus de dotation, parce qu'elle croit qu'il y a trop de postes vacants.

Le sénateur LeBreton : C'est là où voulait en venir le sénateur Poy il y a quelque temps lorsqu'elle parlait du commerce dans la région de l'Asie du Pacifique et de la nécessité que le personnel des Affaires étrangères et du Commerce international ait des compétences en langues asiatiques. La présidente vient de parler du domaine du renseignement et de la sécurité. Madame Barrados, vous avez répondu qu'il fallait respecter les politiques de bilinguisme. Cependant, vous avez aussi dit que certains postes pourraient comporter des exigences spéciales, je pense que c'est à peu près ce que vous avez dit.

Compte tenu de la diversité du monde, de l'économie mondiale et de la réalité du changement de notre potentiel commercial, fait-on quoi que ce soit, particulièrement dans la région du Pacifique, où la langue seconde de la plupart des gens est évidemment une langue asiatique plutôt que le français ou l'italien, par exemple? Menez-vous des projets ou des études pour essayer de désigner certains postes à exigences particulières pour répondre aux besoins sans contrevenir aux politiques de bilinguisme du gouvernement?

Mme Barrados : On a changé la définition du « mérite » dans la nouvelle loi. Ainsi, on prévoit le type de situation dont vous et le sénateur Poy avez parlé et ce qu'une organisation peut ajouter à ses exigences pour la dotation. La distinction qu'on fait dans la loi quant à la façon de déterminer les compétences requises tient en deux volets. Il y a les qualités essentielles pour faire le travail, qui ont tendance à être très propres à l'emploi. L'autre ensemble de qualités peut être qualifié généralement de qualités avantageuses. Ce sont les qualités que la direction d'une organisation juge nécessaires. Elle juge avoir besoin de ce type de personne et de ce type de compétence pour faire le travail qu'elle veut dans son organisation en vue de l'avenir.

Cela pourrait rendre très réelles les inquiétudes que la présidente a exprimées sur la formation et les compétences en matière de renseignement et d'analyse du renseignement ou encore sur les questions connexes touchant les minorités visibles ou la diversité. Cela pourrait devenir des critères d'examen préalable pour le recrutement. Ce qu'il faut, cependant, c'est ce que nous avons mentionné plus tôt, c'est-à-dire un véritable effort de planification des RH pour déterminer non seulement les besoins, comme le nombre de personnes, mais aussi le type de compétences dont l'organisation estime avoir vraiment besoin. Sans cela, nous n'y arriverons pas. Nous ne serons pas en mesure de résoudre les problèmes que nous soulevons. Nous allons surveiller attentivement la façon dont ces dispositions de la loi seront utilisées.

Le sénateur LeBreton : J'allais vous demander ce que vous prévoyez faire. Merci beaucoup.

Mme Barrados : La nouvelle loi entre en vigueur le 31 décembre. Nous sommes vraiment dans un monde de transition. Nous devons laisser les ministères se familiariser avec le nouveau règlement. Nous allons suivre cela du plus près possible sans devenir une nuisance, pour essayer de les inciter à profiter de la souplesse dont ils disposent maintenant.

La présidente : Madame Barrados, je tiens à vous remercier, vous et votre équipe, d'avoir participé à notre réunion et d'être si ouverte et coopérative dans vos réponses à nos questions. L'information que vous nous avez donnée est très utile.

La séance est levée.


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