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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles

Fascicule 18 - Témoignages du 30 juin 2005


OTTAWA, le jeudi 30 juin 2005.

Le Comité permanent des affaires juridiques et constitutionnelles se réunit aujourd'hui, à 10 h 47, pour étudier le projet de loi C-2, Loi modifiant le Code criminel (protection des enfants et d'autres personnes vulnérables) et la Loi sur la preuve au Canada.

L'honorable Lise Bacon (présidente) occupe le fauteuil.

[Français]

La présidente : Nous reprenons l'étude du projet de loi C-2 à l'ordre du jour, Loi modifiant le Code criminel (protection des enfants et autres personnes vulnérables) et la Loi sur la preuve au Canada.

Nous avons ce matin, comme invitées, du Barreau du Québec, Me Nicole Dufour, qui est au Service de recherche et législation et secrétaire du Comité en droit criminel et Mme Lori-Renée Weitzman, qui est membre du Comité en droit criminel. Nous vous souhaitons la bienvenue. Je crois que vous êtes familières avec ce comité.

Nous n'avons malheureusement qu'une heure devant nous à cause d'une réunion du caucus. Je crois qu'on pourra beaucoup avancer durant cette heure.

Mme Nicole Dufour, Service de recherche et législation et secrétaire du comité en droit criminel, Barreau du Québec : Madame la présidente, ma représentation sera très courte. Je veux simplement vous informer de l'existence du Comité en droit criminel au Barreau du Québec. C'est un comité qui est formé d'avocats chevronnés tant en défense que des procureurs de la Couronne. Maître Weitzman fait partie de ce comité depuis plus de sept ans. Elle a 18 ans d'expérience comme procureur de la Couronne à Montréal. C'est elle qui vous présentera nos commentaires.

Mme Lori-Renée Weitzman, membre du comité en droit criminel, Barreau du Québec : Madame la présidente, comme on vous l'a dit, je suis substitut du procureur général du Québec à Montréal, mais je suis ici en tant que représentante du comité du Barreau du Québec.

J'ai divisé ma présentation en six thèmes. Certains ont plus de substance que d'autres. Je vais y aller simplement dans l'ordre du projet de loi.

Je vais commencer par l'article 7, paragraphe 6 du projet de loi. C'est un détail, mais nous pensons qu'il y a eu peut- être un oubli. Le paragraphe 7 mentionne les alinéas 163.1(2)a)et b), on parle des défenses mentionnées, et on parle de la défense basée sur le fait que les actes qui constitueraient l'infraction auraient un but légitime lié à l'administration de la justice, ainsi de suite.

Nous remarquons que ce paragraphe a été amendé. Au début, il était dans le projet de loi C-20 où on parlait, à ce paragraphe 7, non seulement de l'acte qui constituerait l'infraction, mais également du matériel en cause qui prévoyait deux volets de la défense, dont la possession comme telle, qui est visée ici, qui peut avoir un but légitime.

On donne l'exemple classique du policier qui possède des photographies de jeunes enfants pour les fins de son enquête. C'est la possession qui est l'acte visé. Mais le matériel comme tel, qui peut être, par exemple, l'œuvre d'art, n'est plus couvert avec les amendements qui sont passés du projet de loi C-20 au projet de loi C-2. Ce qu'on suggérait, c'est de reporter, encore une fois, dans le projet de loi C-2, le matériel en cause qui a été enlevé.

Au paragraphe 163.1(7) on parle du fait que le nœud du litige demeure une question de droit. Nous avons eu cette discussion en comité. La difficulté que nous y voyons, c'est que cette distinction enlèvera un droit fondamental d'un procès avec juge et jury, parce que le nœud du litige est de savoir si cela constitue une infraction. Est-ce que le matériel visé rencontre les critères de la loi? En disant que c'est une question de droit et non une question de fait, on l'enlève du domaine du jury.

Le sénateur Joyal : C'est le juge qui décide?

Mme Weitzman : Oui, ce serait uniquement le juge qui déciderait et si un accusé choisit l'option juge et jury, on s'imagine que ce sera un verdict dirigé puisque le juge va dire : « Je vous dis que comme question de droit, c'est une infraction. » On a enlevé tout pouvoir au jury.

Le sénateur Nolin : C'est sujet à appel, c'est une question de droit.

Mme Weitzman : Oui, c'est cela la différence. C'est exact. Lorsque la personne est condamnée, il y a toujours un droit d'appel, mais si elle est acquittée et que c'est une question de fait, la Couronne n'aurait pas droit d'appel parce que le poursuivant n'a pas de droit d'appel sur des questions de fait. C'est le quiproquo. C'est exact. Cependant, étant donné que c'est la seule question, c'est comme enlever le droit à un procès avec juge et jury dans le cas de ces infractions. C'était l'idée de notre deuxième intervention.

Notre troisième point concerne le paragraphe 486.1(6).

Le sénateur Nolin : À quel numéro?

Mme Weitzman : À la page 16 du projet de loi C-2, le paragraphe 486.1(6). On parle du fait que la personne peut être accompagnée lorsque le témoin vient témoigner et on dit au paragraphe 486.1(6) que l'ordonnance « ne peut donner lieu à une conclusion défavorable. »

Cette intervention a un peu moins de substance pour la personne elle est importante pour nous aussi. Tout simplement parce qu'on dit que l'ordonnance « ne peut donner lieu à des conclusions défavorables. » Et selon nous, le même but visé serait atteint, mais de façon plus juste, si on disait tout simplement « aucune conclusion ne peut donner lieu » qu'elle soit positive ou négative, qu'elle favorise ou non l'accusé.

J'aimerais souligner le même point à l'article 486.3(5) où on parle de l'avocat désigné pour le contre-interrogatoire par le juge lorsque l'accusé se défend seul. On parle de cette même inférence. Encore là, nous croyons qu'on devrait lire « aucune inférence, aucune conclusion. » Et laissons tomber le qualificatif « défavorable ». Cela donne déjà une certaine connotation à cette idée.

Puisque j'en suis au paragraphe 486.3(5), nous avions aussi quelques craintes entourant les difficultés inhérentes au procédé qui demande au juge d'imposer un avocat à celui qui n'en veut pas. L'idée est bonne. L'importance de limiter un contre-interrogatoire qui, bien souvent, serait abusif de la part de l'accusé lui-même sur sa victime, malheureusement, en tant que procureur, je l'ai vécu, c'est un affront et on est conscient que quelque chose devrait être fait.

Cependant, le Barreau avait suggéré de créer un comité de travail pour considérer et délimiter les paramètres pour tenter de définir le statut de l'avocat concerné. Si les avocats de notre comité, qui sont des avocats en défense, se voyaient imposer un tel devoir, ils y verraient une grande difficulté de représenter un client qui ne veut pas se faire représenter, qui veut se représenter seul et qui se retrouve dans une situation périlleuse étant donné son Code de déontologie. Il ne sera peut-être pas suffisamment informé par son client, qui n'est pas vraiment son client. Qu'elle est la nature de la relation? L'avocat est-il un amicus curiae?

Cela prendrait une étude pour définir des paramètres, parce que le statut de cet avocat est précaire et périlleux compte tenu d'un devoir qui ne cadre pas vraiment avec les responsabilités déontologiques qui s'imposent de façon ordinaire lorsqu'il représente son propre client et qu'il se fait le porte-parole des intérêts de son client. La dynamique ici est tout à fait autre.

Notre cinquième point concerne la Loi sur la preuve. Les changements quant à la façon de définir qui est témoin et comment assermenter ou ne pas assermenter les témoins.

La lecture même du paragraphe 16.1(1), page 26 du projet de loi C-2, semble poser pour nous des difficultés, des craintes. Il y a un certain illogisme de voir que notre Code criminel affirme que « toute personne âgée de moins de 14 ans est présumée habile à témoigner. » Sortons du cadre de juriste et demandons-nous ce que signifie « toute personne de moins de 14 ans ». J'imagine que toute personne est habile à témoigner. Ceux âgés de moins de 14 ans ont-ils plus d'habilité à témoigner que ceux de plus de 14 ans. Cela semble illogique. En ce qui a trait à tous les articles suivants, la situation soumise n'est pas souhaitable dans le sens que nous commençons avec une présomption d'une habilité à témoigner peu importe l'âge. Nous prenons l'enfant de trois ans, habile à témoigner. La personne ne sera pas assermentée ni ne fera d'affirmation solennelle. Tout ce qu'on a à faire, c'est de présenter ce témoin comme étant un témoin capable de comprendre les questions et de pouvoir y répondre. La personne promettra de dire la vérité. Aucune enquête n'est possible sur ce que veux dire « dire la vérité » pour cette personne.

Encore une fois, nous sommes conscients des difficultés qu'engendrent cette discussion prétémoignage, à savoir ce que veut dire « dire la vérité ». Que veut dire pour vous « jurer de dire la vérité »? Il est certain que c'est un processus lourd. On a vu déjà des difficultés avec ce genre d'enquête, mais on est loin d'être convaincu que la solution est d'enlever carrément toute enquête. Un enfant de trois ou quatre ans peut témoigner. Je n'exagère pas. Les enfants de cet âge peuvent comprendre une question et y répondre. Ils satisfont nettement les critères du code.

Tout ce qu'ils auront à faire, c'est témoigner et dire : « Je promets de dire la vérité. » Personne n'aura le droit de demander ce que veut dire la « vérité ». Qu'est-ce que c'est pour vous « dire la vérité »? Est-ce important pour vous que nous soyons dans une salle de cour? On enlève toute cette enquête et nous avons des craintes là-dessus.

Il nous semble aussi que le fait de mettre la charge de la preuve — au paragraphe 4 — sur la partie qui met en question la capacité de la personne à témoigner est malvenu. Nous croyons que c'est la partie qui présente le témoin qui est en meilleure position pour faire cette preuve et pour indiquer au tribunal l'historique, la capacité du jeune et son niveau de compréhension. La partie adverse — bien souvent l'avocat de la défense — n'a aucune idée à qui il a affaire et il est en position difficile de mettre en doute et de savoir comment questionner cette personne sur ses capacités car il n'a jamais rencontré ce témoin. La Couronne, bien sûr, avant de présenter un témoin à la cour, va l'avoir rencontré. Bien souvent, la police, la DPJ et la Couronne rencontrent ce témoin et ils sont en mesure d'expliquer au juge que c'est un témoin qui est apte — malgré son jeune âge — à pouvoir témoigner.

Il nous semble que le régime est fortement axé sur une absence complète de vérification. Nous pensons que c'est peut-être dangereux. La dernière chose qu'on voudrait faire c'est présenter un témoin alors qu'on n'a aucune façon de vérifier s'il sait ce que signifie « dire la vérité ». Évidemment, la corroboration n'est pas requise dans ce genre de dossier. C'est beaucoup de reposer une condamnation sur un enfant en bas âge sur qui on n'a jamais pu tester ou vérifier le niveau de compréhension et de capacité.

J'en viens à notre dernier point qui est tout à fait nouveau. Nous ne l'avons pas présenté devant le Comité de la Chambre des communes parce que nous venons de savoir qu'il y a maintenant, dans ce nouveau projet de loi à l'étape de la deuxième lecture, des peines minimales. Cela n'a pas fait l'objet de nos discussions en comité lorsque nous avons examiné le projet de loi parce que ces amendements n'y étaient pas encore. Cependant, ce sont des sujets que nous avions déjà discuté en comité, à savoir l'imposition de peines minimales. Généralement, notre comité n'est pas d'accord. Je rejoins ici ma position en tant que substitut. Je vous expliquerai pourquoi.

Règle générale, l'idée d'enlever carrément la discrétion du juge en matière de sentence est quelque chose qui ne se conforme pas avec notre système judiciaire. On a travaillé fort pour légiférer et pour insister sur la discrétion du juge et les critères qu'il devait appliquer en matière d'imposition de la peine. Enlever cette discrétion par l'imposition d'une peine minimale est quelque chose qui est tout à fait contraire à la philosophie de notre droit criminel. C'est contraire aux enseignements de la Cour suprême, que ce soit dans l'affaire Sharpe ou dans l'affaire Wust plus récemment. Les infractions spécifiques dont on parle ici, comme les contacts sexuels ou les crimes d'offense sexuelle contre des jeunes, sont, dans la majorité des cas, des crimes que l'on retrouve dans des situations intrafamiliales ou dans des cas où il y a une personne en situation d'autorité. D'ailleurs, certaines infractions visent spécifiquement la personne en situation d'autorité.

Nous craignons qu'avec une peine minimale imposée, qu'il y aura une diminution du taux de divulgation à la police. Des enfants craignent déjà de divulguer ce qui se passe à l'intérieur de leur propre maison, non seulement à cause de la relation, mais à cause des conséquences familiales. En plus, l'odieux qu'ils vont supporter de savoir que cette personne ira en prison — peu importe leur choix et leur volonté — et l'idée de venir devant le juge. Tout cela pourrait diminuer le désir de divulguer.

On risque de voir aussi une réticence de la Direction de la protection de la jeunesse qui a une relation parfois difficile avec le substitut du procureur général. Nous représentons les mêmes intérêts, mais nous arrivons au problème de deux endroits différents et encore là, n'y aura-t-il pas une réticence chez eux de divulguer, de coopérer lorsqu'ils savent que peu importe leur position dans le dossier, une peine minimale sera imposée? Nous craignons également une diminution des plaidoyers de culpabilité, parce que dès le début, nous ne parlons que de prison, alors nous enlevons toute discrétion à ce niveau au procureur de la Couronne qui aurait pu négocier, compte tenu de tous les facteurs, une sentence appropriée.

Finalement, il semble illogique que pour des crimes qui apparaissent manifestement moins graves — contacts sexuels, incitation à des contacts sexuels —, il y aurait une peine minimale alors que pour l'agression sexuelle, il n'y a aucune peine minimale. Encore une fois, il y a une différence qui s'explique mal dans le Code criminel. Enfin, l'idée de gérer ces courtes peines et d'instaurer de façon automatique 14 jours et 45 jours qui sont, à notre avis, peut-être pas la meilleure façon de mettre les valeurs et les critères de l'article 718 en matière de sentence. Est-ce qu'une peine de 14 jours rencontrera les critères? À mon avis, très rarement. De façon plus importante, l'idée d'enlever toute discrétion au juge, particulièrement pour ces crimes, nous semble malvenue.

C'était les six points qu'on voulait aborder avec vous. Nous sommes maintenant prêts à recevoir vos questions.

La présidente : Merci beaucoup, Me Weitzman. Hier, nous avons entendu des représentants des écrivains qui nous ont fait part de leurs craintes à propos de ce projet de loi. Ils craignent l'élargissement de la définition de pornographie juvénile et de l'utilisation de l'expression « dans un but sexuel » qui leur apparaît trop floue. Le cœur de leur argumentation reposait sur la peur d'être accusés et de voir leur réputation entachée par l'accusation. Ce n'est pas tellement le fait d'être trouvés coupables. Je pense qu'ils peuvent être accusés sans être coupables, mais c'est plutôt la facilité accrue de porter des accusations dommageables.

J'aimerais avoir votre point de vue à ce sujet parce que ce projet de loi vise à trouver un certain équilibre. Il semble qu'on ait voulu faire le pari entre la protection des enfants et la possibilité qu'un artiste soit poursuivi. Il faut quand même opter pour la protection des enfants.

Mme Weitzman : C'est un peu ce qu'on avait discuté lorsque nous avons témoigné devant le Comité de la justice à la Chambre des Communes. Ce n'est pas un sujet qui a été discuté au sein de notre comité en droit criminel. Il y a des endroits dans le Code criminel où ce genre de définition est laissée ouverte. Dans les offenses sexuelles à des fins d'ordre sexuel, c'est quelque chose qu'on retrouve dans le Code criminel et à ce que je sache, cela n'a pas fait, jusqu'à maintenant, l'objet de problèmes « overly vague » ou difficile d'interprétation ou de définition.

Ceux qui représentaient les arts étaient avec nous la dernière fois. Ils n'étaient pas tout à fait d'accord avec ma position en tant que procureure de la Couronne. J'ai répondu qu'il fallait faire confiance aux procureurs de la Couronne, qui doivent porter les accusations et les vérifier. Ce ne sera pas pour nous un outil utilisé à tort et à travers pour accuser tous ceux que nous voyons passer pour essayer de mettre cela dans un cadre sexuel. Nous comprenons le but visé de cette législation. Nous comprenons l'importance du danger auquel nous pouvons exposer les enfants. Soyons quand même conséquents. Nous avons donné une large mesure de discrétion et de pouvoir aux procureurs de la Couronne. Si nous voulons être conséquents avec cette position, soyons logiques et donnons-leur la possibilité de l'exercer correctement, comme nous le faisons, par exemple, pour la correction des enfants.

Pourrait-on accuser un parent de donner une tape sur les fesses de son enfant selon le libellé strictement parlant du code? Oui. Il faut quand même être sage dans l'application de la loi. Je pense que je rejoins ce que vous avez dit tout à l'heure. Ce n'est pas uniquement la condamnation qui est importante. Le fait d'accuser est suffisant pour avoir un grand impact sur les droits des individus. Nous en sommes conscients et je parle en tant que substitut du procureur général.

Nous avons un devoir et un Code de déontologie. Nous devons faire notre travail et nous avons aussi une responsabilité professionnelle et personnelle. Nous devons faire attention avant d'accuser un grand écrivain tel M. Nabokov pour avoir écrit son livre Lolita.

J'espère que cela répond à votre question.

La présidente : Votre position sur les peines minimales est similaire à la position du ministre de la Justice qui était devant nous et qui en a discuté aussi.

Mme Weitzman : Je suis contente de l'entendre.

La présidente : Il semble qu'un compromis a été nécessaire pour aller de l'avant avec le projet de loi C-2. Une étude de 2002, commandée par le ministère de la Justice, plaide contre les peines minimales. Aviez-vous été consulté lors de la préparation de cette étude?

Mme Weitzman : Notre comité, vous voulez dire?

La présidente : Oui.

Mme Weitzman : Je l'ignore. À ma connaissance, non. Cela est facile à vérifier et je vous donnerai la réponse par écrit.

La présidente : Oui, j'aimerais bien que vous nous transmettiez la réponse, s'il vous plaît.

Mme Weitzman : Nous le ferons.

[Traduction]

Le sénateur Pearson : Pour ce qui est de la Loi sur la preuve au Canada, vous êtes les premiers témoins à mentionner la question des enfants qui témoignent.

C'est un changement qui me plaît tout particulièrement. J'aimerais savoir pourquoi ce changement semble vous déplaire.

L'article 16(1) proposé exige que les enfants qui témoignent doivent avoir la capacité de comprendre les questions et d'y répondre. C'est très important. Manifestement, si l'enfant ne peut pas comprendre une question, il est inutile de la lui poser. Cependant, on suppose que les enfants peuvent témoigner.

Mme Weitzman : Oui.

Le sénateur Pearson : Je crois que la présomption est fondée sur le fait que, dans bien des cas, il est utile d'entendre le témoignage de l'enfant. Ça pourrait ne rien changer, mais cela pourrait être utile. Selon moi, beaucoup de ces changements ont été apportés pour faciliter la capacité des enfants à témoigner sans que cela les rendent nerveux ou aggrave la situation dans leur cas, ou encore sans que cela empire les choses pour eux, et sans qu'ils ne soient revictimisés.

La disposition permet à la partie qui conteste cette capacité, de soulever la question. Ensuite, le juge peut mener une enquête. Plus tôt, vous avez parlé du fait que les juges ont moins de pouvoir discrétionnaire; dans ce cas-ci on leur donne ce pouvoir.

Devrions-nous nous craindre que des enfants qui témoignent sans avoir la capacité voulue pour le faire? Je ne crois pas que le juge instruira le procès s'il y a contestation et que le juge a décidé que l'enfant ne peut pas témoigner. Pour moi, ce n'est pas un véritable sujet de préoccupation.

C'est au juge des faits d'évaluer la crédibilité et le poids du témoignage. Ce n'est pas que cette preuve l'emportera sur autre chose.

Ce qui est important pour moi c'est que grâce à ce changement, des enfants, et surtout les jeunes enfants pourront dire « Je promets » même s'ils ne seraient jamais capables d'expliquer ce que cela veut dire. J'ai passé beaucoup de temps avec des enfants de trois ans. Je sais pertinemment qu'ils peuvent promettre de dire la vérité. Quand on a commencé à parler de l'exploitation sexuelle des enfants, il y avait une simple règle selon laquelle la question posée à un enfant devrait contenir autant de mots que l'âge de l'enfant. C'est-à-dire que si l'enfant a trois ans, la question ne devrait comprendre que trois mots, bien que dans ce cas-ci nous parlons de promettre de dire la vérité, ce qui comprend plus de trois mots. Quoi qu'il en soit, pouvez-vous préciser le sujet de vos préoccupations?

Mme Weitzman : Je comprends vos préoccupations.

Les membres du comité, qui compte à la fois des procureurs de la Couronne et des avocats de la défense chevronnés, comme l'a dit Mme Dufour, ne voyaient pas d'inconvénients à l'article 16(1) de la Loi sur la preuve au Canada tel qu'il existe, et ne trouvent pas non plus qu'il faille le modifier. Vous parlez de l'importance de permettre à des enfants de témoigner; l'article 16(1) le permet déjà. Quand c'est possible, nous essayons de faire témoigner l'enfant, parce que c'est la seule personne à avoir des connaissances de première main. Nous faisons tout notre possible pour faire témoigner la victime du crime, et les paramètres de l'article 16(1) actuel nous le permettent.

En général, sauf si cela leur cause un traumatisme excessif ou s'ils sont incapables de communiquer, les enfants témoignent. L'article 16(1) permet à l'heure actuelle de faire une mini-enquête. Vous avez raison; sous l'angle des principes, il est impossible à un enfant d'expliquer ce qu'est la vérité. Dans l'ancien temps, quand ils devaient prêter serment sur la Bible, on leur demandair ce qu'était la Bible, ce qu'était Dieu? C'était injuste et menait à des discussions insensées.

Cependant, cela permet au juge des faits d'évaluer l'aptitude d'un enfant à témoigner; et par la suite, le poids à donner à ce témoignage. La mini-enquête est utile quand on parle à des enfants de trois, quatre ou cinq ans et qu'on leur demande s'ils peuvent promettre de dire la vérité, ce que la vérité veut dire pour eux, s'il est différent de dire la vérité aujourd'hui en salle d'audience plutôt qu'avec leurs copains dans la cour d'école. Est-ce que ce qui se fait ici a une importance toute particulière pour eux?

Cela a fait ressortir la nature solennelle de l'audience et a fait comprendre à chacun que les enfants peuvent non seulement répondre à des questions de trois mots et ainsi communiquer, mais ils sont aussi conscients de l'importance de ce qu'ils ont à dire. Cela nous préoccupe parce que, malheureusement, tout est une épée à double tranchant dans ces affaires. À mon avis, les crimes sont les plus répréhensibles de tous ceux qui sont dans le Code criminel. Rien n'est pire que l'agression sexuelle de jeunes enfants.

Le revers de cela c'est la facilité avec laquelle les choses peuvent être manipulées. Malheureusement, à notre grand dépit, cela peut être utilisé dans les affaires familiales devant le tribunal de la famille, dans les cas de divorce et là les enfants deviennent des pions. Il y a des cas où un jeune de quatre ans répond aux questions et le juge ne sait pas si l'enfant sait qu'il est important de dire la vérité, ce qui se produit lorsque l'on ment à la cour ou si on ne fait que répéter ce que quelqu'un vous a dit de dire, même si vous ne savez pas si c'est ainsi que les choses se sont produites. Nous craignons ce risque en l'absence de corroboration.

Ni la Couronne ni la défense ne souhaitent, croyez-moi, une fausse condamnation. Nous voulons tous avoir les outils nécessaires pour condamner ceux qui le méritent mais nous ne voulons pas prendre de raccourcis qui nous feraient craindre d'avoir commis une erreur. Ça c'est le pire scénario imaginable.

Le sénateur Pearson : Toutefois, dans ce cas, il est possible de contester la capacité.

Mme Weitzman : Oui; nous disons tout simplement que nous sommes satisfaits du libellé du paragraphe 16(1). Nous ne comprenions pas pourquoi certains voulaient le modifier. Nous ne sommes pas convaincus que les changements soient utiles. Nous croyons que les enfants devraient continuer de témoigner sous le régime actuel.

[Français]

Le sénateur Nolin : J'aimerais revenir sur la question de la Loi sur la preuve. Le paragraphe 1 établit, de toute évidence, une présomption légale. La Loi sur la preuve ne mentionne pas de présomption légale pour le moment.

Mme Weitzman : Non.

Le sénateur Nolin : Quelle est la nécessité d'avoir une telle présomption? En quoi cela peut aider la recherche de l'objectif? On partage vos préoccupations. On veut aussi un outil efficace, mais un outil qui demeure juste dans son application. Personne ne veut d'erreurs judiciaires. Pourquoi donc cette présomption légale existe-elle, selon vous?

Mme Weitzman : Vous parlez du projet de loi C-2?

Le sénateur Nolin : Oui.

Mme Weitzman : C'est peut-être en réaction au paragraphe 16(1), qui existe présentement qui demande une enquête automatique et qui dit :

Avant de permettre le témoignage d'une personne âgée d'au moins quatorze ans dont la capacité mentale est mise en question, le tribunal procède à une enquête [...]

Certaines filles de 13 ans sont capables, mieux que n'importe quel adulte, de venir communiquer, de jurer sur la Bible, de prêter serment. On n'a pas besoin de faire une enquête dans tous les cas. Je pense que la réaction est de dire que nous ne procéderons pas ainsi. Ce sera le contraire. La présomption sera en faveur du témoignage et ce sera à vous de le contester.

Il me semble que nous devons être logiques avec notre code. S'il faut le changer et réagir à ce qui existe dans le paragraphe 16(1), pourquoi ne pas tout simplement dire : « pas de présomption mais tout témoin dont la capacité mentale est mise en cause, voilà la façon de faire enquête ». Au législateur de décider s'il demandera une enquête concernant la promesse de dire la vérité ou non. On n'a pas besoin de commencer avec une présomption trop large ou trop étroite.

Le sénateur Nolin : Si on maintenait la nouvelle présomption, vous voudriez que l'on ajoute au texte du paragraphe 3?

Mme Weitzman : Oui. Autrement dit, peut-être que nous visons des enfants en très bas âge. C'est plutôt le paragraphe 3 jumelé au paragraphe 7, qui dit que le juge n'a pas le droit. On donne au juge le droit de faire une petite enquête. Si la défense conteste, elle a le fardeau de la preuve, elle doit convaincre le juge et le juge fait enquête.

Si j'étais juge, avant de condamner quelqu'un pour un crime aussi grave qu'une agression sexuelle, j'aimerais au moins avoir l'assurance que le témoin principal des actes sait ce qu'il veut dire lorsqu'il me promet de dire la vérité. J'aimerais pouvoir enquêter là-dessus. Le code m'enlève ce droit.

Le sénateur Nolin : Je veux revenir sur cette étude du ministère de la Justice. Il est important de préciser que vous êtes substitut du procureur général provincial.

Mme Weitzman : Oui.

Le sénateur Nolin : La question de la présidente concerne cette étude qui a été produite en 2002 par le ministère de la Justice.

Mme Weitzman : C'est pour cette raison que nous ne sommes pas intervenus.

Le sénateur Nolin : On pourra vous fournir une copie de cette étude afin de s'assurer que nous nous comprenons bien.

Je veux revenir sur cette question de droit. Votre deuxième argument porte sur le paragraphe 163.1(7), la question de droit. J'aimerais revenir à votre préoccupation. Il semble y avoir un équilibre, selon nous, du fait que la Couronne peut porter appel. Vous ajoutez, et c'est un élément très valable, que cette question n'est pas de la juridiction de 12 jurés. Pourriez-vous revenir sur cet argument et essayez de nous convaincre que ce n'est pas correct, parce que cette nouvelle position nous paraît valable.

Mme Weitzman : Je ne sais pas comment clarifier davantage la position que je ne l'ai fait tout à l'heure. Ce qui nous accroche n'est pas le fait d'enlever certaines questions aux juges des faits. Cela arrive souvent au criminel. C'est plutôt en raison des éléments qui sont des questions juridiques demandant des connaissances juridiques approfondies, hors de la portée des jurés, et qui sont des questions de définitions juridiques appartenant uniquement au domaine du juge du droit.

Ici, à la lecture de ce texte, on se rend compte que c'est vraiment la question fondamentale. Lorsqu'on accuse quelqu'un de l'infraction mentionnée à l'article 163.1, la question est : est-ce que cette activité préconise, conseille une activité sexuelle avec une personne de moins de 18 ans, oui ou non? C'est la question.

Il peut y avoir une question d'identification ou de crédibilité, il peut y avoir des questions périphériques, mais le nœud de la question reste : est-ce que l'accusé avait l'intention de tuer lorsqu'il était accusé de meurtre? Si on disait que la question intentionnelle était une question de droit, on enlève ce crime au domaine du juré. Parce que ce qu'ils auront à décider des questions périphériques. Pour le nœud de la question à savoir si l'acte reproché constitue un crime, on n'a plus besoin de juges des faits, le juge du droit l'aura décidé. C'est compte tenu de l'ampleur de la question qu'on est venu à s'accrocher sur cela pour dire que ce n'est pas très utile lorsque l'accusé, de son droit, veut un procès où il sera jugé par ses pairs. On s'imagine que, dans la plupart des cas, ce sera la question fondamentale.

Le sénateur Nolin : Avez-vous soulevé cette question au ministère de la Justice?

Mme Weitzman : Oui.

Le sénateur Nolin : Vous avez eu le même genre de discussions?

Mme Weitzman : On ne nous a pas posé de questions à ce sujet. On a posé beaucoup de questions mais pas sur la question de droit. Peut-être qu'ils n'étaient tout simplement pas d'accord avec nous. On ne nous a pas demandé d'aller plus loin là-dessus.

Le sénateur Rivest : J'aimerais revenir à la préoccupation du milieu artistique. Dans l'ancienne version, qui ne constituait pas une infraction, on avait simplement « valeur artistique ». On modifie substantiellement cette notion. C'est la préoccupation des artistes qui sont obligés de prouver deux éléments. Le premier, à l'alinéa 163.1(7)a), « qui ont agi dans un but légitime », et à l'alinéa 163.1(7)b), « qui ne posent pas un risque indu aux personnes âgées de moins de 18 ans ».

D'après votre expérience, est-ce qu'il était vraiment nécessaire, compte tenu de l'interprétation de « valeur artistique » donnée par la cour, de modifier cette disposition? Les artistes qui ont témoigné devant nous hier pouvaient très bien vivre avec l'ancienne définition. Mais là, ils alléguaient qu'on leur imposait, théoriquement, dans l'hypothèse où un artiste était accusé, en particulier un écrivain, de faire la démonstration de deux éléments extrêmement importants.

Le sénateur Joyal a également posé la question à savoir quel type de preuve l'artiste va-t-il faire pour bénéficier des deux éléments qui le disculperaient d'une éventuelle condamnation.

Mme Weitzman : Je ne pense pas que la défense qui serait présentée pour l'artiste qui veut défendre son œuvre d'art ou son récit serait différente. Ce qu'on essaie de définir ici c'est la valeur artistique. Lorsqu'on parle d'un but légitime lié aux arts, qu'est-ce que c'est? C'est que cela a une valeur artistique. C'est de cela qu'on parle.

Ils n'ont pas aimé la façon dont c'est libellé. Cependant, je crois qu'on parle de la même chose. Je ne pense pas qu'on sorte vraiment du cadre. Lorsqu'on parle de risque, on parle de « risque indu ». C'est quand même un fardeau pour la Couronne. Le problème — je l'ai vu en personne lorsqu'on a témoigné en même temps que ceux qui représentaient les artistes —, c'est qu'on décortique. Ce que nous visons, ce n'est pas l'écrivain qui a écrit quelque chose, où un épisode sexuel est décrit. Non. Nous savons de quoi nous parlons lorsqu'il est question de pornographie juvénile. C'est un fléau; nous voulons l'attaquer.

Les artistes ne se contentent pas qu'on leur dise : « Fiez-vous à nous, nous savons de quoi nous parlons. » Je comprends leurs inquiétudes. Le but légitime que l'on associe aux arts constitue leur protection et donc une défense au même titre que le libellé qui affirmerait une valeur artistique. Encore une fois, lorsqu'il est question de valeur artistique, il faut s'assurer que l'œuvre ne cause aucun risque indu. L'œuvre peut avoir une certaine valeur artistique tout en comportant certains risques pour les enfants.

Le sénateur Rivest : Un écrit pourrait donc faire l'objet d'une accusation si son intention a un but sexuel. Par contre, un écrivain peut décrire une scène sexuelle dans le cadre d'un roman. Dans ce cas, sa préoccupation principale est, de toute évidence, comme le sens commun l'indique, de produire une œuvre artistique. On ne pourrait pas dire que l'œuvre est rédigée dans un but sexuel. Voilà un autre élément de la problématique.

Le sénateur Nolin : À la page 7 du projet de loi C-2, dans la nouvelle version de l'article 163.1(1)c), on se réfère à l'infraction principale.

Le sénateur Rivest : Il est inscrit :

c) de tout écrit dont la caractéristique dominante [...] dans un but sexuel.

Mme Weitzman : Je pense que la lecture même l'explique exactement. Je ne veux pas dire qu'il y a panique. Je crois qu'ils s'inquiètent car ils veulent s'assurer de ne pas être accusés alors qu'ils n'ont aucune intention malveillante ou criminelle. La législation est façonnée pour viser les personnes que l'on désire viser et non les artistes.

Le sénateur Rivest : Compte tenu de l'interprétation jurisprudentielle donnée au principe du mérite artistique, cela ne change pas les éléments du jugement dont un procureur de la Couronne pourra se servir pour porter ou non une accusation?

Mme Weitzman : Je ne pense pas. C'est dans ce contexte, nécessairement, que nous devons analyser le dossier. Lorsqu'on parle de cette discrétion du procureur de la Couronne, dans une centaine de dossiers visant la pornographie juvénile, il y a différents degrés. Dans les cas extrêmes, certains ne s'accrocheront à aucune défense possible. Il y a, bien sûr, les cas ordinaires, mais aussi les cas extrêmes qui, d'un autre côté, seront les cas limite où on verra clairement, à leur face même, qu'il s'agit plus d'une œuvre d'art. Dans ces cas, on prendra tout le temps nécessaire pour évaluer, vérifier et s'attarder aux éléments pour s'assurer qu'on ne porte pas une accusation de pornographie juvénile, de possession ou de crimes répréhensibles contre une personne qui ne fait qu'écrire, comme de multiples écrivains le font depuis que le monde est monde.

Le sénateur Rivest : En tant que procureur de la Couronne, vous semblez avoir une grande confiance dans le jugement des procureurs de la Couronne.

Mme Weitzman : Il le faut, sinon je changerais de métier. Cela fait partie du système.

Le sénateur Ringuette : J'aimerais tout d'abord vous remercier de votre témoignage. Je poursuivrai un peu dans la même ligne de questions que le sénateur Rivest. À la lumière des témoignages que nous avons entendus hier, les craintes exprimées par les artistes semblent se diriger vers les procureurs. À maintes reprises, on nous a dit que certaines personnes vont porter plaintes, même si ces plaintes ne mènent pas à une accusation. On doit alors considérer toute la période de réflexion de la part des procureurs qui doivent juger du bien-fondé d'une plainte.

Nous avons également entendu, la semaine dernière, des témoignages de l'Association des policiers de l'Ontario. Ces témoins nous ont révélés qu'environ 50 p. 100 des accusations menaient à une sentence. Selon votre expérience, les statistiques au Québec sont-elles à peu près les mêmes?

Mme Weitzman : Elles ne sont pas du tout les mêmes et je vais vous en exposer la raison. Un groupe de travail s'est formé en concertation avec plusieurs provinces pour tenter de répondre à cette situation insensée. Une personne peut être accusée et trouvée non coupable. Toutefois, elle aura dû encourir des frais d'avocat et sa réputation aura été entachée. Cette situation ne se présente pas au Québec, car nous avons un système assuré où les procureurs de la Couronne autorisent les dossiers. Dans toutes les autres provinces, sauf une seule exception, les autorisations viennent directement des policiers qui sont chargés non seulement d'effectuer les arrestations mais qui vont directement les déposer au juge de paix. Il se produit donc des problèmes de surfacturation mais également des problèmes techniques et juridiques pour lesquels les policiers ne sont pas formés afin de déterminer exactement la nature du crime. Le tout résulte souvent par des accusations qui tomberont.

Au Québec, nous avons l'enquête préliminaire. Le policier amène un dossier et suggère des accusations. Toutefois, il reviendra uniquement au procureur de la Couronne de signer la demande d'autorisation qui sera amenée devant le juge de paix pour la dénonciation. À mon avis, c'est ce qui fait en sorte que nos statistiques sont bien différentes.

Le sénateur Ringuette : Quelles sont vos statistiques, selon le processus que vous venez d'identifier?

Mme Weitzman : J'aurais bien aimé vous le dire, mais je l'ignore.

Le sénateur Ringuette : Le groupe de travail dont vous faites mention, est-ce une initiative interprovinciale pour standardiser le processus dans le domaine?

Mme Weitzman : Je ne fais pas partie de ce comité. Toutefois, selon ma compréhension, il s'agit d'un échange de renseignements et d'une vérification du système pour savoir si l'on doit penser à une nouvelle façon de faire. Je parle d'accusations qui sont retirées.

Il y aura également des acquittements. Certaines accusations non exagérées comportent une défense. Parce qu'une personne est acquittée, cela ne signifie pas qu'il y a eu erreur dès le début. De multiples raisons peuvent justifier un acquittement. Je ne connais pas les statistiques sur le nombre d'accusations qui mènent à des condamnations. J'ignore, en fait, si on tient ce genre de statistique.

Le sénateur Ringuette : Je ne suis pas experte dans le domaine juridique. Toutefois, je me demande si le processus au Québec est différent à cause de son régime juridique qui diffère de celui des autres provinces canadiennes?

Mme Weitzman : Je ne crois pas. Nous partageons, à travers le Canada, le Code criminel. Ces pouvoirs sont divisés ainsi depuis longtemps. Les autres provinces pourraient procéder comme au Québec s'ils le jugeaient opportun.

Le sénateur Ringuette : Je peux comprendre que dans le cas d'une infraction au code de la route le policier puisse procéder ainsi.

Mme Weitzman : Les policiers le font directement dans les cas de constats d'infractions, même au Québec.

Le sénateur Ringuette : Toutefois, au niveau criminel, il en est tout autre.

Mme Weitzman : Nous aimons avoir la possibilité de demander des compléments d'enquête et de vérifier si les témoins vont confirmer les faits. Souvent, nous contacterons le policier pour indiquer que nous ne donnons pas l'autorisation immédiatement car il manque certaines données. Parfois, les faits ne répondent pas aux critères de négligence criminelle, car ces cas sont difficiles à prouver. Parfois, il ne sert à rien de porter des accusations à la fois d'agression sexuelle, de séquestration, d'utilisation d'une arme à feu. Il n'est pas nécessaire de porter 15 chefs d'accusation alors que trois suffiraient.

Ce qui pourrait rétablir votre réticence à une peine minimale et à la frustration des autorités policières dans d'autres provinces, qui constatent que 50 p. 100 des accusations sont rejetées et résultent à aucune peine. Ne devrait-on pas inclure le processus des accusations, tel que vous l'avez chez vous, pour s'assurer que s'il y a une accusation de portée et, avant de porter cette accusation, s'assurer que les procureurs aient le temps de faire une enquête préliminaire?

D'une part, on ne veut pas d'accusation frivole contre des individus qui vivent dans une communauté et, d'autre part, on veut s'assurer que lorsqu'on porte des accusations, les personnes ayant subi certaines infractions vont obtenir justice. C'est cet effet de balancier qui est absent dans le projet de loi C-2.

Mme Weitzman : L'équilibre dont vous parlez, c'est l'équilibre général de tous les crimes, que ce soit dans ce projet de loi ou autre. C'est toujours ce qu'on vise. On veut accuser ceux qui le méritent et ne pas accuser ceux qui ne le méritent pas.

Pour ceux qui méritent d'être accusés, on espère avoir une condamnation en bonne et due forme selon la Charte des droits et libertés. C'est l'équilibre et les valeurs essentielles que nous recherchons. Nous travaillons au quotidien pour faire en sorte que la minutie de la législation soit respectée.

Le sénateur Ringuette : Le comité interprovincial que vous avez mis en place vise essentiellement à renforcer le système d'accusation que vous avez déjà.

Mme Weitzman : Je ne veux pas trop m'avancer parce que je ne siège pas à ce comité, mais certains membres de notre comité au Barreau en font partie. Il s'agit d'un groupe de travail qui essaie de faire un échange comparatif entre les provinces pour voir ce qu'il est possible de faire pour limiter des accusations qui sont abandonnées et retirées, et qui n'auraient pas dû être portées. Nous tentons de savoir s'il y a un problème quant à cela et à quel niveau. C'est notre préoccupation. Malheureusement, je ne peux pas vous en dire davantage.

Le sénateur Joyal : Vous avez mentionné qu'un juge ne peut pas contre-interroger des enfants de moins de 12 ans pour vérifier la crédibilité de l'assertion du témoin. Cela ne vous préoccupe-t-il pas davantage dans un contexte où on remarque depuis quelque temps des enfants accusés, à tort, des adultes, des professeurs, des groupes autour d'eux, d'actes criminels ayant pour effet de nuire énormément à la réputation de ces personnes? Comme vous l'avez dit, lorsqu'on accuse une personne d'assaut, d'agression, de pornographie ou de tentative d'agression sexuelle, la société réagit immédiatement et directement. Je crois qu'on devrait, compte tenu que de tels cas existent, prévoir dans le projet de loi C-2 une manière de tester, d'une certaine façon, la capacité de compréhension et d'obligation de dire la vérité.

Mme Weitzman : Cela rejoint un peu ce que je disais dans mon exposé. Le sénateur Rivest a parlé d'un équilibre. Je pense qu'on parle toujours du même équilibre. Nous voulons un système qui a suffisamment de moyens de vérifications pour qu'il n'y aient pas de dérapages comme ceux dont vous parlez. On voudrait, pour l'enfant, qui n'est pas assermenté et qui ne dépose pas d'affirmation solennelle, un régime donnant au juge la responsabilité de vérifier la fiabilité de l'enfant et sa capacité de comprendre ce qui se passe en cour lorsqu'il promet de dire la vérité.

Le sénateur Joyal : À votre avis, le projet de loi actuel comporte-t-il un risque de dérapage du système?

Mme Weitzman : C'est notre crainte à ce niveau, alors que l'article auquel nous référons n'est pas aussi large.

Le sénateur Joyal : L'Association canadienne des policiers nous a donné, pour supporter les peines minimales, l'argument qu'à leur connaissance, la grande majorité des sentences sont « conditional discharge ». Les personnes accusées sont donc relâchées pour faire des travaux communautaires. Ce n'est donc pas des sentences formelles.

À votre connaissance, y a-t-il, au Québec, depuis les cinq ou huit dernières années, des relevés qui ont été faits sur les sentences accordées pour ce type de crimes dont on fait allusion dans le projet de loi C-2?

Mme Weitzman : Si ce genre de statistiques existent, je ne les ai pas en main. Ce n'est pas en calculant le nombre de libérations conditionnelles qu'on pourra dire que le Code criminel n'est pas adéquat.

Je fais confiance au procureur de la Couronne, mais aussi au système. Je fais aussi confiance aux juges parce que les juges vont appliquer l'article 718 du Code criminel.

Que l'Association canadienne des policiers le veuille ou pas, il existe des cas de contacts sexuels mineurs où une libération conditionnelle est adéquate et appropriée. Si cette libération conditionnelle n'est pas appropriée, la Cour d'appel est un recours. Si la Cour d'appel n'a pas modifié la sentence, c'est que les critères ont été bien appliqués par le juge de première instance.

Lorsqu'un policier vient me dire qu'il n'y a que des libérations conditionnelles pour ce genre de crimes, je ne tiens pas compte de ces remarques parce que je me fis à la sentence que le juge a accordée. Il faut procéder au cas par cas. Toute personne accusée d'agression sexuelle n'est pas nécessairement un violeur en série. Je donne la discrétion au juge de procéder au cas par cas.

Les statistiques référant aux libérations conditionnelles ne modifieront en rien la nécessité de modifier les sentences et d'enlever cette discrétion au juge.

Le sénateur Joyal : Au sujet du paragraphe 6 de l'article 163.1 du Code criminel, à la page 8, au bas de la page, les paragraphes 163.1(6) et (7) de la même loi sont remplacés par ce qui suit :

(6) Nul ne peut être déclaré coupable d'une infraction au présent article si les actes qui constitueraient l'infraction :

a) ont un but légitime lié à l'administration de la justice, à la science, à la médecine, à l'éducation ou aux arts;

b) ne posent pas de risque indu pour les personnes âgées de moins de 18 ans.

Il y a deux aspects conjonctifs qui s'ajoutent dans cet article. On ne dit pas « ou » mais « et ».

Mme Weitzman : En anglais, on a mis « et ». On pourrait l'ajouter aussi en français pour une meilleure clarification.

Le sénateur Joyal : Il y a deux éléments.

Mme Weitzman : Ce n'est pas suffisant d'avoir une valeur artistique ou un but légitime relié aux arts si cela pose un risque indu.

Le sénateur Joyal : On se comprend sur la structure de l'article.

Mme Weitzman : Tout à fait.

Le sénateur Joyal : Si on lit l'actuel article 6 qui est en vigueur au paragraphe 163.1.1.6 à la page 274 du Code pénal, — j'ai la version anglaise :

[Traduction]

Moyens de défense : Lorsqu'une personne est accusée d'une infraction visée aux paragraphes (2), (3) ou (4), le tribunal est tenu de déclarer cette personne non coupable si la représentation ou l'écrit qui constituerait de la pornographie juvénile a une valeur artistique ou un but éducatif, scientifique ou médical.

[Français]

Il y a donc deux défenses possibles, soit la défense de valeur artistique ou la défense d'un but éducatif, scientifique ou médical. Lorsqu'on revient à la proposition d'amendement que nous avons, on se rend compte qu'il y a une différence substantielle entre l'actuel article 6 et celui qu'on nous propose dans le projet de loi C-2.

Ce qui me préoccupe, c'est que dans le jugement Sharpe, le juge en chef, Mme McLachlin a dit ceci :

[Traduction]

Le fait de limiter la défense basée sur la valeur artistique au matériel qui ne pose aucun risque de tort aux enfants serait contraire au but visé par ce moyen de défense.

[Français]

En d'autres mots, si on ajoute l'idée du risque à l'enfant, on nie la défense de mérite artistique. On comprend que si on prouve que l'artiste a un but légitime à produire cette œuvre d'art, il serait couvert par l'article 6 actuel. Cependant, si on ajoute en plus le critère du risque indu pour une personne raisonnable de moins de 18 ans, le critère de la personne moyenne, on ajoute un autre élément à la défense qui peut en pratique nier la première. Donc la défense de mérite artistique tombe. C'est juste en pratique. Est-ce que cette œuvre constitue un risque indu pour une personne de moins de 18 ans?

On change certainement la défense qui est dans l'article 6 actuel et, surtout, il faut faire la preuve, en défense, que l'œuvre ne pose pas un risque indu à une personne de moins de 18 ans. Ce n'est pas l'enfant qui est devant nous qui est la victime, c'est l'œuvre dans sa nature objective, par rapport à tous les enfants, en pratique. À mon avis, c'est élargir considérablement l'obligation que l'accusé devra avoir ou la preuve qu'il devra faire pour pouvoir se défendre de l'accusation dont il fait l'objet.

Mme Weitzman : Ce qu'on a voulu ajouter à la défense qui existe à l'article 6, c'est le fait que même s'il y a une valeur artistique, il faudrait que ce matériel en cause ne pose aucun risque. On reprend la phrase du jugement dans l'affaire Sharpe. On met le fardeau ici sur l'accusé. Cela fait partie de sa défense dans le sens qu'il faut qu'il y ait non seulement une valeur artistique, mais également que cela ne pose pas de risque indu.

Le sénateur Joyal : Ce que vous me dites, en fait, c'est que ce qu'on a voulu faire avec cet article, c'est d'éviter qu'une décision similaire à celle de Sharpe ne se reproduise?

Mme Weitzman : Exactement. On a besoin de légiférer dans les paramètres de ce que la Cour suprême nous enseigne. Elle nous a dit que s'il n'y a aucun risque de préjudice à un enfant, aucune accusation ne devrait être portée. C'est ce que l'affaire Sharpe nous dit.

Le sénateur Joyal : Donc, vous dites ce que je crois être, c'est-à-dire que la défense actuelle est modifiée fondamentalement pour éviter qu'une autre décision comme celle de l'affaire Sharpe ne se produise.

Mme Weitzman : Oui, je pense qu'on a légiféré pour rendre notre code cohérent avec ce que la Cour suprême nous enseigne.

Le sénateur Joyal : Non, ce n'est pas ce que la Cour suprême nous enseigne. Pas du tout. La Cour suprême nous a dit que John Robin Sharpe ne pouvait pas être coupable de détenir les écrits qu'il avait rédigé lui-même parce que la cour a reconnu qu'ils avaient un mérite artistique. La cour dit qu'étant donné qu'ils ont un mérite artistique, elle ne se préoccupe pas du risque qu'ils peuvent représenter pour les enfants. C'est ce que le juge en chef dit.

[Traduction]

Le fait de limiter la défense basée sur la valeur artistique au seul matériel qui ne pose aucun risque de tort aux enfants serait contraire au but visé par ce moyen de défense.

[Français]

Mme Weitzman : On a pris cette partie « no risk of harm » et on a dit qu'on comprend que lorsque le matériel en cause a une valeur artistique et ne pose pas de risque, on ne peut pas accuser. C'est ce que la Cour suprême nous dit. Pour nous, pour une défense, nous disons que si le matériel en cause est artistique ou lié à la médecine et ne pose pas de risque, alors vous avez une défense. Cependant, si le matériel en cause est lié à la science et pose un risque, je regrette, on peut accuser et vous pourriez être condamné parce que votre défense ne tient pas à cause du risque indu.

Le sénateur Joyal : Oui, dans le projet de loi actuel.

Mme Weitzman : Exactement.

Le sénateur Joyal : Pas dans le contexte de l'article 6 actuel.

Mme Weitzman : Non, cela n'existe pas dans l'article 6.

Le sénateur Joyal : Cela illustre ce que je voulais dire.

[Traduction]

Le sénateur Pearson : J'avais une question au sujet de la comparution d'un enfant. Je tenais à dire pour mémoire que si je suis ravie de cette modification c'est parce qu'elle est conforme à la Convention relative aux droits de l'enfant qui stipule que tout enfant a le droit de témoigner dans toute cause qui le touche directement et qu'il n'y a pas de limite d'âge. Je suis heureuse que l'on présume qu'ils ont la capacité requise pour témoigner.

Je sais que certains ont encore des questions, mais je pense néanmoins que la cour est capable de demander s'il y a contestation. Il me semble que cela limite la possibilité de la cour de tenter de déterminer la capacité de témoigner de l'enfant. Il sera interdit de poser certains types de questions. Nous obtiendrons de plus amples éclaircissements là- dessus. Cela ne me pose pas de problème. Merci.

[Français]

Le sénateur Nolin : Je veux revenir sur cela. Je veux qu'on soit très clair. Dans la Loi sur la preuve, le paragraphe introductif du paragraphe 1, de l'article 16, ne fait que clarifier un texte qui pouvait être un peu ambigu, mais le juge continue à avoir le pouvoir de faire une enquête. Dans cette enquête, il va chercher à déterminer si, d'une part, cette personne de moins de 14 ans comprend la nature du serment ou de l'affirmation solennelle.

Mme Weitzman : Non, vous lisez l'actuel article 16.

Le sénateur Nolin : Oui, mais l'article 16 continue d'exister.

Mme Weitzman : Oui, c'est ce qu'on utilise tous les jours.

Le sénateur Nolin : Alors comment expliquez-vous le paragraphe 7, du nouvel article 16(1)? Quand on dit que « aucune question sur la compréhension de la nature de la promesse [...] »

Mme Weitzman : C'est ce qu'on veut changer.

Le sénateur Nolin : C'est cela. Je voulais que ce soit clair. On maintient le pouvoir du juge de faire enquête.

Mme Weitzman : Oui, on maintient le pouvoir du juge de faire enquête lorsque la capacité est mise en cause.

Le sénateur Nolin : Ma collègue a raison lorsqu'elle dit que ce pouvoir d'enquête continue d'exister. Le juge continue à chercher si le futur témoin comprend la nature de sa promesse. Non?

Mme Weitzman : Non. Au paragraphe 5, l'enquête du juge se limite à vérifier la capacité de comprendre les questions et d'y répondre. Il s'assure que la personne peut parler, comprendre et répondre. C'est l'étendue de l'enquête. Aujourd'hui, l'enquête peut aller plus loin.

Le sénateur Nolin : C'est cela. On n'a pas modifié les paragraphes a) et b) de l'article 16 actuel?

Mme Weitzman : Oui, on les a enlevés. D'ailleurs, il n'y a plus d'affirmation solennelle.

Le sénateur Nolin : Prenez le texte du projet de loi. L'article 26 du projet de loi dit qu'on modifie l'article 16(1) de la Loi sur la preuve et qu'on maintient le paragraphe a) après ce paragraphe introductif.

Mme Weitzman : Non.

Le sénateur Nolin : Regardez bien. Le passage du paragraphe 16(1) de la Loi sur la preuve précédant l'alinéa a) est remplacé par ce qui suit. L'alinéa a) est donc maintenu. C'est uniquement le paragraphe introductif de l'article 16(1) qui est modifié.

Mme Weitzman : Attendez une seconde.

Le sénateur Nolin : Il y a une contradiction.

Mme Weitzman : L'article 16(1), oui, effectivement.

Le sénateur Nolin : Les articles 16(1)a) et 16(1)b) actuels demeurent?

Mme Weitzman : Non.

Le sénateur Nolin : Je deviens confus.

Mme Weitzman : Excusez-moi, je ne veux pas vous mélanger. Si on regarde l'article 27...

Le sénateur Nolin : Regardez l'article 26 avant d'aller à l'article 27.

Mme Weitzman : D'accord, je vous suis.

Le sénateur Nolin : Parce que l'article 27 ajoute un nouvel article, soit l'article 16(1). Revenons à l'article 16 pour le moment.

À l'article 16, on change le paragraphe introductif du paragraphe 1.

Mme Weitzman : Oui.

Le sénateur Nolin : On maintient donc les alinéas a) et b).

Mme Weitzman : Pour un témoin d'au moins 14 ans ou de 14 ans et plus. Mes craintes visaient les témoins de moins de 14 ans. C'est 16(1) à l'article 26.

Le sénateur Nolin : C'est mon erreur.

Mme Weitzman : Vous me suivez?

Le sénateur Nolin : Ça va.

La présidente : Il n'y a rien de pire que des avocats ensemble. On vous remercie beaucoup de votre témoignage aujourd'hui et de l'éclairage que vous nous avez apporté. Je crois que cela va nous servir dans nos décisions à prendre la semaine prochaine.

[Traduction]

Nous allons ajourner jusqu'à mercredi. Je vais demander l'autorisation du Sénat pour siéger à 16 heures mercredi pour entendre les fonctionnaires du ministère. Après cela, si cela vous convient, nous passerons à l'étude article par article du projet de loi.

La séance est levée.


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