Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles
Fascicule 24 - Témoignages du 26 octobre 2005
OTTAWA, le mercredi 26 octobre 2005
Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, à qui a été renvoyé le projet de loi S-39, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale, le Code criminel, la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels et la Loi sur le casier judiciaire, se réunit aujourd'hui à 16 h 10 pour en examiner la teneur.
Le sénateur Lise Bacon (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente : Honorables sénateurs, la séance est ouverte. Notre témoin est aujourd'hui M. Trudell. Je sais que votre vol est à 18 heures.
William Trudell, président, Conseil canadien des avocats de la défense : Merci, et au nom du Conseil, j'espère être en mesure de vous aider dans l'examen de ce projet de loi.
On m'a avisé aujourd'hui que vous entendrez à nouveau d'autres témoins demain, ou des personnes qui comparaîtront devant le comité pour la première fois. À dire vrai, le projet de loi nous cause des inquiétudes sur lesquelles j'aimerais attirer votre attention.
La première chose qui nous préoccupe est de savoir pourquoi le projet de loi a été déposé au Sénat et non pas à la Chambre. Je sais que la question a déjà été discutée. Si vous considérez ce projet de loi simplement comme un projet de loi technique visant à régler des détails inexpliqués et à harmoniser la Loi sur la défense nationale avec le Code criminel, c'est une chose. Or, nous prétendons en tout respect que ce projet de loi renferme des enjeux de fond qui sont préoccupants. Peut-être qu'en temps normal, ces questions auraient été examinées par un comité de la Chambre.
Je ne sais pas pourquoi il en est ainsi — les honorables sénateurs le savent peut-être — et ce n'est peut-être pas là un problème non plus. Je remarque également que le projet de loi prévoit un autre examen dans deux ans et qu'il reste un an avant l'échéance. Quoi qu'il en soit, le projet de loi fera l'objet d'un examen dans un an.
À notre avis, il ne s'agit pas simplement d'un projet de loi technique parce qu'il renferme quelques dispositions qui suscitent des inquiétudes. En tant qu'avocat de la défense, et au nom du Conseil canadien des avocats de la défense, je soumets respectueusement qu'il faut être prudent lorsqu'il n'existe aucun mécanisme efficace de surveillance civile — et il n'y en a vraiment aucun — en ce qui a trait aux forces armées.
Deuxièmement, les juges qui entendent ce genre de causes ont un mandat de cinq ans et retournent au sein des forces armées, d'après ce que je comprends, si le mandat n'est pas renouvelé. C'est un système particulier qui est assujetti à des règles particulières. Par conséquent, des protections particulières ou, à tout le moins, une interrogation consciencieuse peuvent s'avérer nécessaires.
Aussi, nous soutenons respectueusement que le projet de loi renferme des dispositions tout à fait nouvelles. Je ne sais pas si vous l'avez sous les yeux, mais pour les fins du compte rendu, il s'agit de l'article 490.0311 qu'il est proposé d'adopter.
La présidente : À quelle page?
M. Trudell : C'est à la page 33. Il s'agit d'une nouvelle infraction qu'il est proposé d'ajouter au Code criminel, et je cite :
490.0311 Quiconque fait sciemment une déclaration fausse ou trompeuse dans le cadre des paragraphes 5(1) ou 6(1) de la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels est coupable d'une infraction et encourt [...]
Comme on le voit, il semble s'agir d'une nouvelle infraction. Il ne s'agit pas d'une correction technique, mais d'une nouvelle infraction criminelle qui est ici proposée. C'est là un des problèmes que cause le registre des délinquants sexuels. Ce n'est pas comme la banque d'ADN. Un échantillon d'ADN est fiable et il en est question ici. Je pense qu'il faut faire attention de ne pas utiliser à outrance le registre des délinquants sexuels car quelqu'un pourrait donner des renseignements trompeurs. Je suppose que c'est la raison pour laquelle cette disposition a été proposée ici.
À la page 3 du projet de loi, Section 7.1, on définit les infractions désignées. Je cite une partie de l'article 203 qui est proposé :
c) infraction visée à :
(i) l'alinéa 77f) (atteinte aux biens ou à la personne d'un habitant ou résident d'un pays),
(ii) l'article 84 (violence envers un supérieur),
(iii) l'article 93 (cruauté ou conduite déshonorante),
(iv) l'article 95 (mauvais traitements à un subalterne) [...]
Ces infractions ne concernent précisément que les militaires. Nous craignons ici que l'audience ne soit détournée. Autrement dit, une personne ne commet pas une infraction en particulier si elle fait preuve de cruauté ou affiche une conduite déshonorante dans le cadre d'une infraction sexuelle ou si elle fait preuve de violence à l'égard d'un supérieur, toujours dans le cadre d'une infraction sexuelle. Ce sont deux choses distinctes. Il y a alors audience au sujet de cette question mais en réalité, il s'agit d'une audience visant à déterminer la peine lorsque le procureur doit prouver au-delà de tout doute raisonnable que l'infraction a été commise à des fins sexuelles. Cela crée de véritables problèmes dans le monde du droit criminel et on se demande ce qu'il faut faire. Est-ce qu'il faut demander des preuves sur la première infraction et attendre pour ce qui est de la seconde? Je soumets respectueusement — et si c'est là une question qui vous préoccupe, peut-être pourriez-vous en parler aux personnes intéressées qui viendront témoigner demain — que cela exerce beaucoup de pressions sur la personne qui est membre des forces armées et qui comparaît devant le tribunal au sujet de ces infractions. D'après ce que je comprends, l'avis doit être donné au moment de la détermination de la peine.
Si l'avis est donné dès le départ, on sait à quoi s'attendre. En définitive, cela devient un outil de négociation très puissant pour le procureur, si vous voyez ce que je veux dire. Il s'agit d'une procédure détournée. Les infractions énumérées à l'alinéa c) concernent toutes les militaires en particulier.
Le registre des délinquants sexuels est nouveau, mais nous avons déjà une cause, l'affaire Have, qui est une décision de la Cour de justice de l'Ontario rendue par le juge Duncan. Le juge Duncan s'est penché sur le critère nettement démesuré que doit respecter quelqu'un qui doit signer le registre. Dans sa décision, il a indiqué que dans le cas de possession de pornographie juvénile, parce que cela n'était pas conforme à l'esprit, si je peux utiliser le terme, des infractions sexuelles plus tangibles, le critère était selon lui respecté.
Je vous proposerais peut-être de discuter de cette question avec des personnes qui connaissent mieux les militaires. Plus particulièrement en ce qui concerne les infractions énumérées à l'alinéa c), une fois que les personnes ont quitté les forces armées, il est fort peu probable qu'elles aient une conduite déshonorante ou qu'elles fassent preuve de violence à l'égard d'un supérieur à des fins sexuelles. Ce sont là des actes d'insubordination, mais il appartient à l'officier, l'accusé dans le monde civil, de faire la preuve que cette conduite était nettement exagérée.
Je crois que tout est déjà là, plus particulièrement en ce qui concerne quelqu'un qui commet une infraction qui touche particulièrement les militaires. Il est fort peu probable que la police souhaite avoir le nom de cette personne dans la banque de données pour fins d'enquête ultérieure. Je soumets respectueusement qu'il faut faire bien attention de protéger l'officier ou le personnel militaire en pareil cas.
Par contre, si vous lisez la décision Have et que vous examinez le critère nettement démesuré, je ne crois pas qu'un juge ordonne que le nom d'une personne impliquée dans une infraction touchant les militaires comme celles qui sont énumérées à l'alinéa c) soit inscrit au registre. Est-ce différent parce que la cause est entendue par un juge militaire? Je ne dis pas que les forces armées n'ont pas un système de justice extraordinaire, je ne dis pas non plus que nous n'avons pas besoin d'un système distinct. Cependant, je crois que l'alinéa c) comporte de véritables problèmes.
J'ai lu la transcription de vos délibérations lorsque le ministre est venu témoigner devant vous, et je sais que la question a été abordée. Le libellé du projet de loi n'est pas clair, mais pourquoi y a-t-on inclus ces infractions? En tant qu'homme, si je frappe un officier supérieur qui est une femme et que je le fais à des fins sexuelles, alors qu'on le dise clairement au départ : il s'agit d'une agression sexuelle.
Je vois les problèmes que peut provoquer l'alinéa 203c). Les rédacteurs du projet de loi qui avaient la situation des militaires en tête l'ont inséré pour une raison. Le Conseil canadien des avocats de la défense se demande si on a bien réfléchi à la question — je ne devrais pas dire cela. Bien sûr, la question a été mûrement réfléchie — mais je ne sais pas s'ils ont examiné les enjeux plus importants. Le registre des délinquants sexuels — je ne prétendrai pas ici qu'il s'agit d'une punition, même si j'aimerais le faire, et cela brime certainement la liberté — constitue un outil d'enquête. Si une personne est accusée d'agression sexuelle en Afghanistan dans le cadre d'une situation précise, en quoi cela constitue-t- il un outil d'enquête pertinent pour la police ultérieurement?
On voit que le juge Duncan dans la décision Have s'est penché sur cette infraction en particulier. On a également examiné d'autres infractions commises antérieurement. Rien ne s'est produit depuis de nombreuses années, c'est donc nettement démesuré. Au nom des membres des forces armées, je soutiens que les infractions énumérées aux alinéas b) et c) sont des infractions qui touchent particulièrement les militaires. Il est peu pertinent que ces personnes doivent être inscrites au registre.
L'autre problème est le suivant : il semble raisonnable, pour protéger les officiers, que le projet de loi renferme une disposition permettant l'inscription au registre — je n'utilise pas le bon terme — la suspension si la personne est affectée aux opérations. Cependant, on ne sait pas en quoi consistent les opérations. Elles feront l'objet de règlements. Nous ne savons absolument pas ce que sont ces opérations. N'est-ce pas là une chose que l'on voudrait voir précisée? Dans la mesure où ce projet de loi protège les membres des forces armées, je crois alors que cela est important. Si son objectif est de protéger la sécurité nationale, cela est également important. Cependant, nous ne parlons pas de la Seconde Guerre mondiale. On peut renvoyer quelqu'un chez lui très rapidement. Je suis sûr que ces dispositions sont justifiées, et si vous êtes convaincu qu'elles ont été étoffées, je le comprends. Bien honnêtement, en ce qui concerne l'alinéa c), je dirais que l'on n'a pas besoin du registre. Non seulement je propose qu'on n'en fasse pas usage jusqu'à ce que les opérations soient terminées, mais je crois respectueusement qu'il ne devrait pas être utilisé aussi souvent.
Comment une personne des forces armées peut-elle mesurer ce qui est nettement démesuré lorsqu'elle revient dans la société civile? Il se peut que sa liberté soit sérieusement compromise lorsqu'elle sera à la maison avec sa famille et non plus en mission. Il y a ici des aspects particuliers et uniques du service militaire qui sont en jeu. Je les soulève pour que vous en teniez compte.
Les avocats de la défense vont souvent parler d'audience biaisée. Vous en avez peut-être déjà entendu parler ici même. Il s'agit d'un outil de négociation puissant pour le procureur, particulièrement en vertu de l'aliéna c), ou d'autres dispositions. « Vous savez quoi? Si vous ne plaidez pas coupable à cette accusation, nous allons invoquer l'alinéa b) et vous comprendrez alors que c'est nettement démesuré. » C'est un outil puissant, je vous le dis respectueusement, c'est aussi un aspect complexe qui nécessite beaucoup de temps. À mon avis, le fait d'avoir son nom au registre des délinquants sexuels entraîne de graves répercussions. On ne fait pas qu'inscrire votre nom et la police peut s'y reporter de temps en temps lorsqu'elle fait enquête auprès de délinquants sexuels. La personne a une étiquette de délinquant sexuel, on ne dit pas qu'elle a commis un acte d'insubordination et l'alinéa c) porte sur l'insubordination, je vous le rappelle en tout respect.
J'aimerais vous faire part de quelques autres questions pratiques qui pourraient ou non être abordées. Supposons que je suis maintenant sorti des forces armées, que j'ai fait mon service, que mon nom figure sur le registre des délinquants sexuels et que je veux présenter une demande de cessation de service. Est-ce que j'aurai de la difficulté à obtenir l'information que détenaient les militaires devant la Cour martiale? Y aura-t-il des problèmes concernant la sécurité? Nous savons que les forces de sécurité et la GRC tiennent à préserver le caractère confidentiel de certains renseignements.
Nous en avons été témoins dans l'enquête du juge O'connor dans l'affaire Arar. Par exemple, si, cinq ou dix ans après avoir vu mon nom inscrit sur le registre, je quitte les forces armées et je veux que mon nom en soit radié, existe-t-il un mécanisme quelconque permettant de régler le problème de l'absence de divulgation pour fins de sécurité? Nous avons discuté hier de ce problème pratique, mais je ne sais pas si on a trouvé une solution ou non. Si, au moment de quitter les forces armées, on ne peut pas obtenir l'information qui a été présentée au tribunal militaire, cela justifierait alors le dépôt d'une demande et une contestation de la Charte.
Lorsque j'ai dit que le règlement était important, je faisais particulièrement référence à la page 19 où l'on dit ceci :
203.2 Le gouverneur en conseil peut, par règlement :
b) désigner des catégories d'opérations à l'égard desquelles une décision peut être prise en vertu du paragraphe 203.16(1);
Je suppose qu'il ne s'agit pas ici de formuler des règlements; cependant, c'est une situation particulière. Quelqu'un d'autre décidera quelles opérations pourraient justifier la suspension du fonctionnement normal du registre. Je suis certain que des personnes beaucoup plus intelligentes que nous, qui font partie des forces armées, aborderont le problème des dispositions du projet de loi S-39 portant sur la divulgation. En ce qui concerne la divulgation de renseignements en vertu de l'article 203.18, il est difficile de comprendre le libellé, mais peut-être devrions-nous être vigilants.
À la page 13 du projet de loi, on dit que si un membre est toujours assujetti au code de la discipline, la demande d'extinction de l'obligation peut être présentée ici. Voici ce que stipule le paragraphe 203.12(6) :
Elle est présentée au tribunal compétent en vertu de l'article 490.026 du Code Criminel dans les autres cas.
Ce n'est pas ce que je perçois, mais j'ai peut-être mal vu — sans doute — mais est-ce que le requérant aura accès à l'ensemble du dossier et au dossier criminel présenté à la Cour martiale pour ensuite le soumettre à un tribunal criminel? Cela n'est peut-être pas un problème, mais cela relève des pouvoirs de divulgation qui sont énoncés dans le projet de loi.
Sous la rubrique « Exception », à la page 5, on dit ceci :
203.01(5) La cour martiale n'est toutefois pas tenue de rendre l'ordonnance [...]
On ne dit pas « ne doit pas », mais « n'est pas tenue ». La disposition se poursuit ainsi :
[...] si elle est convaincue que l'intéressé a établi que celle-ci aurait à son égard, notamment sur sa vie privée ou sur sa liberté, un effet nettement démesuré par rapport à l'intérêt que présente, pour la protection de la société au moyen d'enquêtes efficaces sur les crimes de nature sexuelle, l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels prévu par la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels.
Les sénateurs se sont dits particulièrement préoccupés, et l'ont rappelé aux gens qui ont témoigné antérieurement, qu'il ne s'agit là que d'un outil d'enquête. Si tel est le cas, une protection particulière doit alors être accordée aux membres de nos forces armées. Je me pose des questions au sujet de l'énoncé suivant : « La cour martiale n'est toutefois pas tenue de rendre l'ordonnance. » Ne devrait-on pas plutôt dire : « La cour martiale ne doit pas rendre une ordonnance »? Si le fardeau est transféré au requérant qui a établi qu'il s'agit là d'un critère nettement démesuré, cela crée-t-il un problème lorsqu'il n'y a pas de mécanisme civil de surveillance du juge militaire à qui on accorde un mandat?
Le préambule du projet de loi stipule ceci :
Aussi, il [le texte] érige en infraction à la Loi sur la défense nationale le défaut de se conformer à une ordonnance ou à une obligation de fournir des renseignements au bureau d'inscription désigné.
À la page 2, on dit ceci :
119.1(2) Il est entendu que l'ordre légitime ayant pour effet d'empêcher la personne de se conformer à une ordonnance ou à une obligation constitue une excuse raisonnable.
Dans le préambule, on dit qu'il s'agit d'une nouvelle infraction, mais il n'est pas fait mention de l'article 490. Je ne sais pas ce que cela veut dire parce que je ne suis pas dans les forces armées. Je suppose que si un commandement légitime empêche une personne de se conformer à l'ordonnance, cela constitue une excuse raisonnable, mais qu'est-ce que cela veut dire? Si la personne est dans les forces armées et que le juge doit décider s'il s'agit là d'un critère nettement démesuré, alors on s'arrête là? Cependant, si le juge doit décider que la personne devrait, mais sursoit au jugement, est- ce qu'il s'agirait là d'un « commandement légitime »? Ou est-ce que ce serait un élément particulier au registre? Par exemple, si la personne devait aller s'inscrire au registre, on pourrait lui dire de ne pas y aller — de ne pas quitter la base.
Si vous êtes d'accord, le Conseil vous exhorte à faire la lumière sur le sens de certaines de ces dispositions et à veiller à ce que le personnel militaire ait tous les droits et protections, qu'il ne subisse pas de pressions ou ne soit pas assujetti à des interprétations qui n'ont pas cours dans le monde civil.
Je vous recommande d'examiner la décision Have. Vous savez que le registre des délinquants sexuels de l'Ontario, la loi Christopher, a été aboli parce qu'il n'incluait pas certaines des dispositions du Registre national des délinquants sexuels — la demande d'une personne de prouver qu'il s'agit d'un critère nettement démesuré.
Alors, pourquoi se précipiter pour adopter ce projet de loi? Certes, la décision vous appartient en tous points, je m'excuse même de vous le demander. Toutes ces dispositions feront l'objet d'un autre examen dans un an. Je soumets respectueusement que, à moins que vous ne soyez convaincus que le projet de loi renferme bien toutes les dispositions, l'on attende pour l'examiner en décembre 2006.
C'est ce que nous pensons. J'ai remarqué qu'un membre du sous-comité a demandé pourquoi les forces armées avaient choisi de procéder ainsi. Le ministre a dit que l'on essayait simplement d'harmoniser les lois. Ce n'est pas ce que j'ai lu, c'est exceptionnel. La jurisprudence fluctue continuellement en ce qui concerne le registre des délinquants sexuels. Nous connaissons tous le bien-fondé de ce registre, et c'est probablement une bonne chose. Cependant, c'est plus qu'un outil d'enquête, à mon humble avis.
La présidente : Beaucoup se posent les mêmes questions.
C'est pourquoi nous avons demandé aux représentants du ministère de la Défense nationale de revenir témoigner de sorte que nous puissions leur poser d'autres questions.
Certaines des dispositions qui ont été insérées dans le projet de loi sont reprises du Code criminel, avec le même libellé. Nous allons entendre les représentants du ministère de la Défense nationale demain matin, nous pourrons alors leur poser nos questions et les vôtres.
Le sénateur Milne : M. Trudell est venu renforcer certaines des préoccupations que nous avons soulevées autour de cette table la semaine dernière. L'avantage de déposer le projet de loi au Sénat est que nous pouvons le modifier ici sans véritablement en retarder l'adoption éventuelle, parce qu'il sera renvoyé à la Chambre des communes et qu'il y sera sûrement adopté. S'il est déposé à la Chambre, il y est toujours renvoyé de toute façon. Si nous le modifions ici, il sera renvoyé à la Chambre mais nettement amélioré.
Je suis contente de vous avoir entendu dire que l'article 29 proposé à la page 33 crée une nouvelle infraction. J'aimerais que vous donniez quelques détails à ce sujet.
M. Trudell : En essayant d'harmoniser le Code criminel avec le présent projet de loi, nous n'avons vu aucune disposition dans la Loi sur le registre des délinquants sexuels, le projet de loi C-16, je crois, qui indiquait qu'il y avait infraction si une personne fournissait des renseignements erronés ou trompeurs. Je suis désolé si nous avons mal compris, mais l'article 490.311 est une modification au Code criminel et ne fait pas spécifiquement référence à la Loi sur la défense nationale telle qu'on la lit. Je m'excuse si je suis dans l'erreur. À notre avis, il s'agit d'une nouvelle infraction. Cela empêche de faire en sorte qu'un registre de délinquants sexuels qui est surutilisé et contient des renseignements soit tout simplement un outil terrible. Il sera incroyablement difficile à utiliser, de toute façon. Il sera surutilisé jusqu'à ce qu'on constate qu'il n'a pas besoin de l'être parce que l'étiquette de délinquant sexuel cause de graves préoccupations dans la société, certaines réelles, certaines fictives, mais nous devons y faire face.
D'après la lecture que nous avons faite du projet de loi, il semble que nous soyons incapables de trouver une disposition dans le projet de loi original qui a été adopté faisant en sorte qu'il s'agisse d'une infraction que de s'inscrire au registre des délinquants sexuels et de dir7e : « Mon nom est John Smith », alors que je suis en réalité Bill Trudell. Cela ne concerne pas seulement les officiers, je pense — je pense bien.
La présidente : Pour ce qui est de la page 33, monsieur Trudell, je ne suis pas d'accord. Cela n'est pas nouveau. L'article 17 de la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels renferme la même disposition sous la rubrique des infractions.
M. Trudell : Merci. Je m'excuse. Nous pensions que c'était une nouvelle infraction.
La présidente : C'est très bien. C'est nouveau dans le Code criminel, mais pas ici. Cela se trouve déjà dans la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels.
Le sénateur Eyton : J'avoue, ici en tout cas, et je suis un peu gêné de le faire, que je suis avocat. J'ai beaucoup de difficulté à comprendre l'interaction entre le code militaire et notre Code criminel. Mais je suis réconforté de voir que vous, un membre supérieur du Barreau criminel, qui représente le Barreau ici aujourd'hui, avez la même difficulté. Cela m'amène à réfléchir et à m'inquiéter encore plus qu'une loi déjà compliquée, soit complexifiée davantage en raison des interactions avec le Code criminel, mais vous n'avez rien dit à ce sujet.
Ma première question est une question générale. J'ai eu de la difficulté à comprendre pourquoi, dans toutes les circonstances en question, les forces armées ont besoin d'un code et de tribunaux différents. Je comprends parfaitement lorsqu'il s'agit du théâtre des hostilités ou de militaires en affectation à l'étranger ou des cas semblables. Cependant, je comprends que le code criminel militaire, le projet de loi que nous examinons actuellement, couvre en réalité quiconque fait partie des forces armées et les personnes à l'extérieur de ce groupe. Les gens sont peut-être à contrat ou assujettis à un autre régime de travail.
Pouvez-vous nous dire si oui ou non la portée du projet de loi que nous étudions actuellement est trop vaste?
M. Trudell : En sommes-nous rendus au point où ce que je dis ne sera pas consigné au compte rendu?
On parle depuis quelques années de procédures distinctes, de problèmes de sécurité, de secret, en examinant et réexaminant le projet de loi C-36. En tant qu'avocat de la défense, je sais qu'il y a certains avocats de la défense extraordinaires qui font pas mal de travail de ce genre. Cependant, je me sens compétent pour dire si oui ou non un système de justice différent pour les membres des forces armées qui ne travaillent pas spécifiquement à un théâtre d'opérations est nécessaire — sauf pour les infractions de type d'insubordination. Je crois aussi que l'ancien juge en chef Lamer a fait une étude exhaustive de la question. Je crois que dans l'une de ses anciennes décisions, la décision Généreux, l'armée s'est emparée de la cause et a trouvé un passage lui permettant d'aller de l'avant et de dire : « Il nous faut un système distinct. »
Lorsqu'il a quitté ses fonctions au bureau de l'ombudsman, l'honorable André Marin a exigé une surveillance civile. Je ne crois pas qu'on en ait une encore. On peut voir que l'on traite nos soldats et ceux qui sont assujettis à la discipline militaire de façon différente. Je suis avocat de la défense depuis plus de 30 ans. Mon expertise n'est pas dans ce domaine, si bien qu'en préparation pour notre comparution d'aujourd'hui, nous nous sommes entretenus avec certaines personnes pour nous assurer de ne rien oublier.
En réponse à votre question, je crois que l'on en n'a pas fini avec le rapport du juge en chef Lamer. Je ne sais pas si le rapport de M. Marin sur la surveillance militaire a été examiné.
C'est la remarque que je voulais faire. Nous ne sommes pas à l'époque de la Seconde Guerre mondiale. Un soldat peut être renvoyé chez lui du jour au lendemain, et je pense que cela se produit souvent. Cependant, l'armée a besoin d'un code distinct pour la discipline, tout comme les services de police. Les agents de police ont leur propre code de discipline. Est-ce que je crois que la portée du projet de loi est trop vaste? Je n'ai pas suffisamment d'expérience pour dire oui, mais suffisamment pour dire que nous devons être prudents et faire la lumière sur la question pour nous assurer que la mesure législative est justifiée par les personnes qui l'estiment nécessaire.
Je ne sais pas si ma réponse vous aide. Elle est plutôt faible.
Le sénateur Eyton : Vous avez entendu tout à l'heure les réserves du sénateur Milne au sujet du projet de loi. J'ai l'impression que la portée de ce projet de loi est plus vaste que nécessaire. Je suis aussi convaincu qu'il est plus compliqué qu'il ne le devrait. Je suis rassuré quand j'entends que vous, compte tenu de votre expérience et de vos antécédents, dites d'une façon ou d'une autre la même chose.
Vous nous avez donné beaucoup de matière à réflexion. Vous nous avez également proposé certaines mesures à adopter, mais si j'interprète bien vos propos, cela revient à dire allez-y lentement, faites attention, ne précipitez rien, prenez un an, peut-être plus, et cela vous aidera. Est-ce que ce serait là la conclusion de vos commentaires?
M. Trudell : Je ne sais pas ce qui en est de l'examen des forces armées et du rapport du juge en chef Lamer, mais je pense que l'on ne peut étudier la question sans tenir compte de ces documents.
Je suis très préoccupé — peut-être ne devrais-je pas l'être — au sujet de l'alinéa 203c) concernant les actes d'insubordination. Et on pourrait ajouter « à des fins sexuelles ». Je ne voudrais pas défendre une de ces causes. Cela serait très compliqué.
On n'a pas besoin de cette disposition pour harmoniser la Loi sur la défense nationale avec les lois sur le harcèlement et l'inconduite sexuelle. Il faut préciser les choses au début afin de savoir de quoi il retourne. Les glisser par la porte arrière, c'est un problème pour moi, en tant qu'avocat de la défense, dans le monde non militaire, mais quelqu'un qui est un officier ou un militaire reste au sein des forces armées. La caque sentira toujours le hareng. Je pense qu'il doit y avoir d'énormes pressions qui doivent s'exercer pour que les règles soient respectées. Les forces armées sont une organisation disciplinée. Je vais trop loin.
Quand je lis ceci, j'ai beaucoup de difficulté à déchiffrer les choses. Je ne suis pas très bon dans le déchiffrage, mais lorsque je vois certaines dispositions proposées ici qui soulèvent des difficultés, voilà je dis ceci : Je pense que les gens qui vont comparaître devant vous demain devraient probablement être cuisinés de façon délicate pour savoir ce que cela veut dire.
On confie toutes sortes de missions à nos forces armées. On leur demande constamment de participer à des missions de paix ou d'être présentes sur certains théâtres d'opérations. Je pense que ce que je dis n'a pas de sens.
Le sénateur Eyton : Nous allons tenter de reproduire votre style, monsieur Trudell.
Le sénateur Andreychuk : Je voulais avoir une précision. Vous avez évoqué l'aspect de l'agression sexuelle. Dans le projet de loi sur la lutte au terrorisme, nous avons commencé à aborder les activités ayant un aspect religieux ou politique, pour passer ensuite aux motifs. Comment peut-on dire qu'une agression au sein des forces armées est peut- être quelque peu différente d'une infraction ailleurs?
M. Trudell : Lorsque nous avons réexaminé le projet de loi C-36, nous avons discuté de l'aspect religieux et un jeune homme très brillant est venu vous en parler.
Qu'est-ce qu'un acte cruel ou une conduite déshonorante? Si je veux dire qu'une infraction est cruelle et constitue une conduite sexuelle déshonorante ou pour une fin sexuelle, je devrais le préciser. C'est là le problème.
Qu'est-ce qu'un comportement abusif à l'égard de subordonnés? Qu'est-ce que l'on entend par harcèlement sexuel? Il faut le dire. Un mauvais traitement dans les cantonnements? Est-ce que ça veut dire à une fin sexuelle? Il faut le préciser. On parle d'acte d'insubordination, et par la suite, on ajoute la composante sexuelle. Il faut savoir ce que l'on entend par cela dès le début. Il faut appeler les choses par leur nom.
Ne prenez pas ceci pour une vérité de foi, mais si j'étais dans les forces armées, d'importantes pressions s'exerceraient sur moi pour que je ne joue pas les trouble-fête. Je ne dis pas que les procureurs sont injustes, mais si je sais que plus tard il sera question d'allégation sexuelle, je vais m'en défaire au début. Est-ce la bonne façon de procéder? Je n'en sais rien.
Si ma conduite illégale est justifiée par un motif sexuel, et que j'en suis reconnu coupable, il ne fait aucun doute que mon nom devrait figurer sur le registre des délinquants sexuels. Je peux ne pas être d'accord, mais c'est la loi. La police peut faire enquête dans la collectivité, mais c'est tout à fait différent si je suis dans les forces armées, ma conduite est un acte d'insubordination, après quoi quelqu'un décide que c'était à des fins sexuelles.
Le sénateur Andreychuk : Ce que je voulais savoir, c'est comment changer les balises. Lorsque vous dites : « Si je commets une infraction pour un motif sexuel », d'après mes anciennes lois criminelles, j'avais l'intention de commettre et j'ai commis une infraction sexuelle. Par conséquent, la description de l'infraction doit être là. Mon motif n'est pas très pertinent à ce moment-là. C'est mon intention qui compte. Qu'est-ce que j'ai fait? Est-ce que j'ai respecté la disposition? Est-ce que j'ai mis les mains quelque part? Est-ce que j'ai dit quelque chose? Est-ce que j'ai harcelé quelqu'un? Cela ne devrait pas être mon motif.
M. Trudell : Ce que je comprends de cela, cependant, c'est qu'une fois que vous avez été reconnu coupable d'une infraction par le tribunal qui impose la détermination de la peine, la Couronne avise que cette infraction a été commise dans un but sexuel. Il m'appartient alors de faire la preuve que tel n'était pas le cas. L'intention et le motif sont alors abordés par la bande.
À mon avis, c'est là une avenue dangereuse à emprunter. Je vous garantis que nous aurons de longues audiences. Cet outil sera surutilisé dès le départ parce que tout le monde est sensible à la pornographie juvénile et a peur des délinquants sexuels dans notre pays. Nous allons y revenir dans un an ou deux, et nous allons aplanir les choses. Ce mécanisme pourrait être utilisé à outrance au sein des forces armées, et si tel est le cas en vertu de l'alinéa c), je serai très inquiet.
La présidente : J'aimerais vous renvoyer à la page 4, monsieur Trudell, au paragraphe 203.01(2), ou l'on dit ceci :
La cour martiale doit, sur demande du procureur de la poursuite, dès que possible après le prononcé de la peine [...]
Et à la fin on dit :
[...] dès lors que le procureur de la poursuite établit hors de tout doute raisonnable que celle-ci a commis une infraction avec l'intention de commettre une infraction visée aux aliénas a) ou d) de cette définition.
M. Trudell : C'est exact. Il incombe au procureur de la poursuite après l'infraction et au moment de la détermination de la peine de faire inscrire le nom de la personne dans le registre. Ensuite, c'est à moi de faire la preuve qu'il s'agit là d'une action supposément démesurée.
La présidente : Le procureur établit au-delà de tout doute raisonnable que la personne a commis l'infraction après que la peine a été imposée.
M. Trudell : C'est exact. Le fait de voir son nom inscrit au registre des délinquants sexuels n'est en principe pas une punition. La personne est reconnue coupable, après quoi le procureur doit faire la preuve de sa cause.
La présidente : Êtes-vous d'accord au sujet du libellé de cet alinéa?
M. Trudell : Je ne le comprends pas.
La présidente : Nous devrions demander au ministère de la Défense nationale pourquoi cet alinéa a été inséré.
M. Trudell : En tant qu'avocats, nous devrions être capables de dire voici : A, B, C, D, E; certains liront peut-être cela et diront que c'est très clair. La disposition devrait être très claire pour une personne des forces armées qui subit un procès. Ce sera peut-être le cas, mais j'ai de la difficulté à comprendre.
La présidente : Ce n'est pas clair pour moi.
Le sénateur Joyal : J'aimerais revenir à l'article 39 qui est proposé en haut de la page 33.
D'après ce que j'en comprends, cette disposition proposée concerne le Code criminel et non la Loi sur la défense nationale. Si vous revenez à la page 21, on fait référence au Code criminel, ensuite on trouve toute une série de dispositions du projet de loi qui concernent le Code criminel. À moins que je me trompe, et on peut toujours me corriger, à la page 33, l'article 39 ajoute une infraction à l'article 490.031 du Code criminel. L'article 490.031 stipule ceci : « Quiconque, sans excuse raisonnable, omet de se conformer à l'ordonnance rendue en application de l'article 490.012 [...] » — c'est-à-dire une ordonnance exigeant de rendre compte de ses déplacements. La nouvelle infraction établie à l'article 490.0311 précise ceci : « Quiconque fait sciemment une déclaration fausse ou trompeuse [...] » Dans le premier alinéa, on dit « quiconque omet de se conformer » alors que dans l'autre, il est question de donner de l'information fausse ou trompeuse. C'est de toute évidence une nouvelle infraction qui est rajoutée au Code criminel.
M. Trudell : J'ai demandé à des gens passablement versés dans la question de m'aider à cet égard. Ils m'ont dit, et madame la présidente m'a corrigé, qu'il s'agit là d'une nouvelle infraction au Code criminel. Non pas que je veuille revenir à quelque chose que je n'ai pas voulu aborder, mais j'ai compris qu'il s'agissait d'une nouvelle infraction du Code criminel inscrite dans ce projet de loi.
Le sénateur Joyal : C'est aussi ce que j'ai compris, d'après le libellé de l'article 490.013.
La présidente : Il s'agit d'une nouvelle infraction au Code criminel.
M. Trudell : C'était ce qui m'inquiétait au départ. Je le dis parce qu'il m'a semblé que c'était presque intervenir après le coup dans les cas où l'on a toutes sortes de personnes qui vont donner un faux nom qui sera inscrit au registre des délinquants sexuels. À notre avis, c'est quelque chose de nouveau. Si c'est le cas, ce n'est pas une question de détail administratif.
Le sénateur Joyal : Bien sûr. Je tiens à ce que mes propos soient consignés au compte rendu et je vais continuer pour dire ceci : Les représentants du ministère de la Justice viennent témoigner devant notre comité, le Code criminel est leur responsabilité. Ils nous disent ceci : « Oh, c'est simplement un détail administratif. Nous sommes simplement en train de moderniser un projet de loi. Ne vous inquiétez pas, ne vous inquiétez pas. » Dès qu'on les entend, on se dit qu'ils mentent. Eh bien, pas « nous ». Je pense qu'ils mentent. Je prends sur moi de le dire. Ce n'est pas la première fois que notre comité est témoin d'une pareille scène. Ç'a été la même chose avec le projet de loi sur la cruauté à l'endroit des animaux. Pour les citer au sujet d'un projet de loi récent que vous connaissez, on nous a dit : « Il s'agit simplement de mettre à jour le Code criminel, d'anciennes dispositions qui remontent à 1892; nous ne faisons que moderniser les choses. » Nous avons examiné le projet de loi, et il s'agissait d'une réforme complète du système. Si les représentants du ministère de la Justice viennent présenter ce genre d'argument, je regrette, mais nous allons prendre le temps de l'examiner et de décider de la mesure qui s'impose. C'est véritablement un ajout. Pourquoi ne viennent-ils pas nous dire : « Écoutez, dans une partie, il s'agit de modernisation, et dans l'autre, il y a des nouvelles infractions ». Nous sommes majeurs et vaccinés. Nous pouvons examiner les choses et prendre une décision. Je regrette, mais le seul fait de nous dire que c'est simplement de la modernisation, ça ne colle plus avec nous. Je veux que mes propos soient consignés au compte rendu, et j'espère qu'on en enverra la transcription au sous-ministre de la Justice de sorte qu'il sache au moment d'envoyer des gens ici, qu'ils ne doivent plus nous présenter cet argument lorsque nous savons que ce n'est pas juste.
Je m'excuse du ton de mon intervention, madame la présidente, mais je pense avoir dit ce que je voulais dire.
La présidente : J'accepte vos excuses.
Le sénateur Joyal : J'aimerais parler de la décision Have que vous avez citée. Je pense que vous avez eu raison de la porter à notre attention. La décision Have a été rendue cette année en 2005. Si je comprends bien la cause, c'est que la simple possession de pornographie juvénile n'est pas une infraction de nature sexuelle. Est-ce ainsi que vous avez interprété la cause?
M. Trudell : Dans cette cause?
Le sénateur Joyal : Oui.
M. Trudell : Je crois qu'il pourrait y avoir possession de pornographie juvénile dans les cas les plus graves, mais le juge Duncan dit que, en soi, cela ne correspond pas à l'esprit des dispositions que nous examinons ici. Le registre est un outil d'enquête. Je pense qu'il a fait une bonne analyse de l'infraction prévue dans la situation et a dit : « Non, ce n'est pas ce que l'on vise. »
Le sénateur Joyal : Cette décision a été rendue après les amendements que nous avons adoptés en juin dernier. Je regarde notre collègue, le sénateur Pearson, parce que c'est elle qui a parrainé le projet de loi, bien que je ne veuille pas la mettre sur la sellette parce que j'ai trop de respect pour elle. Il me semble que la façon dont le Code criminel a été modifié dans le projet de loi sur la pornographie juvénile, la simple possession de pornographie infantile, sans aucune intention d'aller plus loin et de commettre ou d'avoir l'intention de commettre une agression, était un crime en soi. Si la décision dans cette cause est bonne, cela veut dire qu'une personne ne peut être invitée à s'inscrire comme délinquante sexuelle sur la simple possession de matériel pornographique.
M. Trudell : Au paragraphe 25, l'honorable juge dit ceci :
L'infraction pour laquelle le défendeur est reconnu coupable (possession de pornographie juvénile) est la seule, parmi les infractions désignées, qui n'implique pas nécessairement un acte à caractère sexuel ou l'intention de commettre un tel acte à l'endroit d'une victime directe. À mon avis, la possession de pornographie juvénile n'est donc pas un « crime à caractère sexuel » au sens du paragraphe 3(2) de la LERDS.
Le sénateur Joyal : Nous allons examiner cet élément qui est important. Je comprends l'infraction désignée dans le contexte du registre des délinquants sexuels. La question est tellement fraîche à ma mémoire, mais je ne me souviens pas exactement du contexte dans lequel nous en avons discuté.
Le sénateur Pearson : Le projet de loi C-2 n'est pas encore entré en vigueur. Une fois que ce sera le cas, il ne s'agira pas d'un crime à caractère sexuel. Le juge Duncan doit rendre ce jugement en fonction de ce qui existe déjà.
Le sénateur Joyal : C'est ce que j'ai tendance à croire.
Le sénateur Pearson : Le projet de loi entrera en vigueur en janvier ou février.
Le sénateur Joyal : Nous pourrions peut-être aussi examiner la nature des opérations militaires. Nous en avons parlé la semaine dernière. Pourriez-vous donner plus de détails sur la bonne approche à adopter à l'égard de ce concept selon vous? Autrement dit, je n'ai personnellement rien contre la réalité des opérations militaires. Nous savons qu'elles existent. Nous savons que des soldats canadiens sont en mission à l'étranger et ainsi de suite, et qu'il existe des circonstances particulières. Nous savons que cela pourrait se produire. Notre problème, c'est de voir comment restreindre l'utilisation de cet argument. Dans le projet de loi, cela n'est pas défini. Une opération militaire peut être bien des choses tant qu'elle implique des militaires ou de l'équipement militaire.
À votre avis, quelle serait la bonne approche à utiliser pour aborder la préoccupation des militaires, mais sans ouvrir la porte aux abus.
M. Trudell : Ma suggestion est vraiment fondée sur rien. Comme le sénateur Eyton l'a dit, s'il y a véritablement un front, si la guerre fait rage, comme on le comprend, c'est peut-être une opération. Des soldats pourraient être déployés dans une opération hautement sécuritaire. Nous ne savons pas où ils sont, mais nous savons qu'ils sont quelque part. C'est un front différent, mais c'est un front assez particulier pour le monde dans lequel nous vivons. Ces deux opérations pourraient être des opérations où une philosophie différente doit être appliquée.
Un soldat qui se promène dans une rue d'Europe, qui ne fait pas partie d'un déploiement secret ou qui n'est pas engagé dans une guerre, peut être renvoyé ici assez rapidement. L'opération doit être définie pour tenir compte des raisons pour lesquelles nous avons cette mesure législative particulière. Ce sont là les seuls points qui me viennent à l'esprit. Si quelqu'un est engagé dans une bataille ou une guerre, comme je le comprends, ou si quelqu'un traite de questions de sécurité nationale, il pourrait s'agir là d'opérations qui pourraient permettre de surseoir à l'utilisation normale du registre des délinquants sexuels.
Bien honnêtement, si quelqu'un est impliqué là-dedans, je ne crois pas qu'un juge rendra de toute façon une telle ordonnance, parce qu'il lui faudra tenir compte de la situation. Je suis sûr qu'il y a toutes sortes d'opérations que les juges connaissent et que nous ignorons et dont ils ne peuvent probablement pas parler. J'en vois deux : une qui est évidente et une qui touche la sécurité nationale, la lutte au terrorisme, ou peu importe pour lesquelles, nous devons leur faire confiance.
Le sénateur Joyal : En d'autres mots, ce que vous dites au sujet du mécanisme de surveillance civile pourrait avoir des répercussions dans ce cas?
M. Trudell : Nous parlons de responsabilisation devant le comité au sujet de différents projets de loi depuis des années. La surveillance civile est suffisamment bonne pour tout le monde, y compris les avocats, donc ça devrait être suffisant pour les militaires aussi. Le public doit avoir confiance qu'il y a transparence.
Le sénateur Joyal : Merci.
Le sénateur Bryden : Je crois que vous avez déjà abordé la question. Ce qui m'inquiète au sujet des infractions prévues au paragraphe 203c), celles qui sont tirées de la Loi sur la défense nationale, vient du fait que j'ai déjà été sous- ministre de la Justice à l'échelle provinciale et que j'étais chargé de la surveillance des policiers et des procureurs.
Ce sont des tâches très difficiles et les gens ont tendance à employer tous les outils mis à leur disposition — car la plupart sont débordés de travail — pour clore les dossiers dès que possible.
Lorsque je lis que frapper un officier et faire usage de violence à son égard sont des infractions désignées, il s'agit là d'une accusation, je présume, qui serait portée par le procureur, et je suis d'accord avec vous que s'il s'agit d'un délit sexuel, on doit le dire clairement au moment de l'accusation.
Voilà pourquoi on intente des poursuites contre quelqu'un qui frappe son supérieur et qui en est reconnu coupable. Ensuite, on présente une demande au tribunal et tente de prouver au-delà de tout doute raisonnable que cet acte était un acte à caractère sexuel.
Peut-être est-ce simplement ici le caractère suspicieux des avocats. Je crois qu'il s'agit d'un outil de négociation, ou que cela pourrait l'être, en disant tout bonnement : « La rumeur veut que vous n'ayez pas frappé cette personne simplement parce que vous n'aimiez pas la couleur de ses yeux, mais qu'en fait, il y a une connotation sexuelle rattachée à cette action. » C'est tout ce qui est dit.
Ensuite, quand vient le moment de procéder à la négociation de la peine, la personne dit : « Si vous plaidez coupable à cette infraction, ça s'arrêtera là. Cependant, si je dois le prouver, alors, dès que j'obtiendrai une condamnation, ce qui sera le cas, j'entreprendrai ensuite de prouver — et je pense que je peux le faire — que cet acte était un acte à caractère sexuel et que vous allez devoir faire inscrire votre nom dans le registre en vertu de la Loi sur l'enregistrement de renseignements concernant les délinquants sexuels.
Ça, pour moi, c'est très troublant. Il ne s'agit pas ici de simple spéculation. J'ai vu toutes sortes d'exemples où ce genre de leviers a été utilisé par les policiers et les procureurs, bien que peut-être pas aussi souvent qu'on pourrait le penser dans certaines situations difficiles.
J'ai mentionné cela simplement pour indiquer, et je pense que cela a été soulevé lors de notre dernière réunion, que si l'on veut soumettre ces infractions comme étant des infractions qui font en sorte que les personnes doivent être inscrites dans le registre si elles sont reconnues coupables, alors cette disposition devrait être modifiée. Au lieu d'essayer d'incorporer les infractions en faisant référence aux dispositions de leur propre code, on devrait spécifier ici pour les fins du projet de loi qu'il s'agit d'infractions désignées : « Frapper un supérieur avec intention sexuelle. » Cela n'est pas inhabituel. C'est exactement la façon dont c'est fait normalement. Vous savez à quoi vous attendre en tant qu'avocat de la défense. D'une façon beaucoup plus diplomatique que la mienne, est-ce ce que vous dites, à savoir qu'en fait cela ouvre la porte à l'abus?
M. Trudell : Je suis très préoccupé par cette question. Il est censé y avoir des restrictions concernant l'utilisation du registre des délinquants sexuels, et j'en vois beaucoup ici. Le registre doit être utilisé comme outil d'enquête. Si je veux obtenir un mandat, j'aurai accès au registre des délinquants sexuels. Je peux vous dire que si un client est assis devant mon bureau et me dit : « Je vais prendre les 30 jours ou la condamnation avec sursis, mais je ne veux pas que ma femme et mes enfants soient mêlés à cela », nous savons que l'information est diffusée malgré toute la bonne foi des personnes qui ont la charge de la garder secrète. Je ne dis pas que quelqu'un pourrait s'en servir comme d'un marteau. Cela pourrait peut-être servir d'atout. Ce sont les réalités de la vie.
Le sénateur Bryden : Merci.
Le sénateur Milne : Une question supplémentaire : comment reformuleriez-vous alors cette disposition?
M. Trudell : Laquelle? Frapper un agent supérieur ou faire preuve de violence à son égard?
Le sénateur Milne : Est-ce que l'alinéa c) pourrait être reformulé comme étant une infraction commise dans un but sexuel en ajoutant simplement quatre mots à cette première ligne?
M. Trudell : C'est une infraction désignée si elle est commise dans un but sexuel, ou quelque chose de semblable. À ce moment-là, on sait exactement de quoi on parle, il n'y a alors pas de jeux possibles. La Charte ne dit pas simplement que la sanction change entre le moment où l'infraction est commise et le moment où l'exécution devient une entorse à la Charte. La Charte nous dit également que nous avons le droit de savoir spécifiquement de quoi on est accusé. Certains soutiendront que cette disposition de la Charte sera en jeu. Quel est le problème? Dites-moi quel est le problème et je vais y voir.
La présidente : Si vous me permettez d'ajouter à cela, l'alinéa c) est déjà dans la Loi sur la défense nationale. Si nous modifions quelque chose, il nous faudra modifier le paragraphe 203.01(2). C'est déjà dans la Loi sur la défense nationale. Le libellé est le même.
Le sénateur Milne : Mais c'est tout souligné en rouge ici.
M. Trudell : Madame la présidente, puis-je simplement dire que si vous êtes reconnue coupable d'une des infractions établies à l'alinéa c) et qu'il est appliqué, vous devenez une délinquante sexuelle. C'est ce que l'on dit.
La présidente : Je vais peut-être devoir corriger le no 2.
M. Trudell : Vous voulez dire l'alinéa b)?
La présidente : Je fais ici référence au paragraphe 203.01(2).
M. Trudell : Oui.
La présidente : C'est à la page 4.
M. Trudell : Quel est le secret? Si quelqu'un est étiqueté comme étant un délinquant sexuel, alors mettez sur la table ce que la personne a fait et que vous prétendez être une inconduite sexuelle, ensuite, l'individu sera devenu un délinquant sexuel. C'est là une étiquette qui ne s'effacera jamais, que vous présentiez ou non une demande de radiation du registre.
Vous pouvez être radié du registre des délinquants sexuels, mais certainement pas des dossiers de l'aide à l'enfance — absolument pas! Vous n'aurez pas le droit d'enseigner. Vous n'aurez pas le droit d'être en présence d'enfants. Cela a des répercussions sur quelqu'un qui sort de l'armée et qui tente d'entreprendre une nouvelle vie.
Je peux concevoir un questionnaire à l'intention des futurs enseignants. Votre nom a-t-il déjà été inscrit au registre des délinquants sexuels? Avez-vous déjà été reconnu coupable d'une infraction militaire à connotation sexuelle? Oubliez cela. On est tellement conscient de cela dans la société. Il faut que ce soit équitable.
Le sénateur Bryden : La disposition que vous dites déjà exister se trouve-t-elle dans la Loi sur la défense nationale?
La présidente : Oui.
Le sénateur Bryden : L'article 84 fait mention du fait de frapper un officier supérieur ou de faire preuve de violence à son égard. Est-ce exact?
Robin Mackay, Division du droit et du gouvernement, Direction générale de la recherche parlementaire, Bibliothèque du Parlement : Il faudrait amender le projet de loi si on veut dire « dans un but sexuel ».
La présidente : Oui. Et si nous amendons cette disposition, nous allons devoir modifier la Loi sur la défense nationale.
Mr. Mackay : C'est exact.
Le sénateur Bryden : Qu'est-ce que prévoit la Loi sur la défense nationale? Quel est le libellé de l'article 84 de cette loi?
M. Mackay : Je crois que le libellé est le même, mais je n'en suis pas certain. Nous allons devoir vérifier.
La présidente : Nous allons vérifier. Nous vous donnerons les réponses demain. Nous croyons que c'est le même libellé.
Le sénateur Bryden : Le projet de loi ne porte que sur l'enregistrement de renseignements concernant les délinquants sexuels. Ce qui est dans la Loi sur la défense nationale n'a rien à voir avec une infraction sexuelle. Je dirais que puisqu'il n'y a pas d'infraction sexuelle, nous n'allons pas l'inclure dans le projet de loi. Si on ne le fait pas, madame la présidente, vous avez raison. On n'a pas besoin du paragraphe (2), cette partie qui dit que vous avez prouvé au-delà de tout doute raisonnable que l'infraction revêt un caractère sexuel.
Pourquoi la disposition sur le fait de frapper un officier supérieur est-elle incluse dans ce projet de loi? Elle ne devrait pas y être.
La présidente : Oui. Peut-être que l'attaché de recherche pourrait nous donner plus de détails à ce sujet.
M. Mackay : Je pense que le problème s'explique en partie par le fait que ce genre de régime se trouve déjà dans le Code criminel. Il y a, dans le Code criminel, des infractions désignées qui, à première vue, direz-vous, n'ont aucune connotation sexuelle. Par exemple, entrer par effraction dans une maison dans le but de commettre un acte criminel. Il n'y a rien dans cette infraction qui ait quoi que ce soit à voir avec une agression sexuelle.
Le Code criminel prévoit déjà qu'un procureur peut établir que cette infraction a été commise à des fins sexuelles, tout comme on le dit pour ce qui est de frapper un officier supérieur. Si vous souhaitez amender le projet de loi C-39, pour être logiques, nous devrions modifier le Code criminel pour, peut-être, y enlever des infractions qui n'ont pas, à première vue, de connotation sexuelle.
Le sénateur Bryden : Je comprends.
M. Mackay : Le Parlement a examiné toutes ces dispositions en 2004 et les a approuvées. Aujourd'hui, je pense qu'il est clair, d'après ce que M. Trudell nous dit, qu'il y a un système étrange de procès, ensuite la détermination de la peine, après quoi, on revoit la question. Le procureur doit alors faire la preuve qu'il y a eu infraction commise dans un but sexuel. Je pense que M. Trudell nous dit que cela n'est pas clair quant à savoir comment on procède parce que ce n'est certainement pas le processus ordinaire régissant la tenue d'un procès qu'il connaît.
Le sénateur Bryden : Je pense que nous disons peut-être la même chose.
M. Mackay : C'est exact.
Le sénateur Bryden : Il peut y avoir certains ajustements.
M. Mackay : Ce serait peut-être plus clair si, au tout début, le procureur devait prouver que la personne a frappé l'officier supérieur dans un but sexuel. La personne est alors condamnée et inscrite au registre si tel est le cas. La mesure n'est pas prise à la fin, ce qui est le libellé actuel auquel le sénateur Bacon fait référence en vertu du paragraphe 203.01(2).
Le sénateur Andreychuk : Monsieur Trudell, il est vrai que nous avons déterminé que certaines lois étaient tellement sévères dans le Code criminel qu'il était laissé à la discrétion du procureur, d'après ce que j'ai compris, de déterminer l'aspect sexuel de ces infractions au Code criminel pour ensuite inscrire les gens au registre des délinquants sexuels. Ce n'est pas tout le monde qui commet une entrée par effraction et un vol qui aura son nom inscrit dans le registre des délinquants sexuels. Il doit y avoir suffisamment de faits pour justifier une telle mesure.
Ce qui me dérange dans ce projet de loi, c'est que nous avons des infractions désignées et que nous avons dit que s'il y a connotation sexuelle, on créera dans l'intérêt du public un registre qui servira d'outil d'enquête pour s'assurer que d'autres personnes ne sont pas soumises au comportement de cette personne. On les inscrit sur une liste noire, peu importe comment ça s'appelle.
J'ai compris que l'on disait aux militaires qu'aucun Canadien ni qu'aucune personne susceptible d'être inscrite au registre des délinquants sexuels ne devaient être exemptés, mais nous avons constaté que c'était le cas pour les militaires, à moins que nous n'appliquions particulièrement cette disposition à eux.
Ne serions-nous pas mieux d'avoir une loi qui dresse une liste de tous les crimes dont je peux être reconnue coupable et pour lesquels mon nom peut être inscrit dans le registre des délinquants sexuels? Quiconque participe à des opérations militaires pourrait aussi subir les mêmes conséquences, celles d'être inscrit au registre des délinquants sexuels. Ensuite, s'il y a des scénarios sexuels particuliers chez les militaires, on pourrait ajouter ces infractions particulières et justifier pourquoi elles sont nécessaires pour l'intérêt du public.
Nous aurions le régime qui était ce que nous voulions, je croyais. Nous ne voulions pas d'exemptions parce que c'est une question de protection. Nous ne voulions pas que les militaires soient exemptés du registre des délinquants sexuels. Nous voulions qu'ils soient inclus, mais nous ne voulions pas un régime parallèle, je pensais, où nous pourrions utiliser cela comme un outil pour considérer une activité sexuelle comme inappropriée.
Dans notre société, certaines activités sexuelles sont inappropriées, mais leurs auteurs ne sont pas assujettis au registre des délinquants sexuels. Ça peut être réglé à l'aide de la discipline dans le milieu de travail. Par un code si vous êtes un professionnel. Ça ne fait pas de vous un criminel. Il semble ici y avoir tolérance zéro. On a dit : « Si l'une ou l'autre de ces infractions a une connotation sexuelle, elle sera ou pourra être assujettie au registre des délinquants sexuels. » N'est-ce pas plutôt la mentalité et la philosophie qui sont en faute avant que nous ne tentions d'amender le projet de loi?
M. Trudell : Je vais revenir à ce que le sénateur Eyton a dit. Est-ce que la portée de cette disposition est trop vaste, et peut-être l'est-elle. Ici, l'alinéa c) concerne les infractions militaires. Vous avez peut-être raison.
Le sénateur Milne : J'essaie simplement de voir quelle serait la façon la plus simple d'amender ce projet de loi tout en tenant compte de nos préoccupations.
Monsieur Trudell, vous avez qualifié ces infractions prévues à l'alinéa c) d'« actes d'insubordination » Pourrait-on dire qu'il s'agit d'« actes d'insubordination à connotation sexuelle »?
J'espère que les représentants du Ministère qui sont ici écoutent et que lorsqu'ils reviendront demain, ils pourront nous faire des suggestions en fonction de ces balises.
Le sénateur Pearson : J'ai bien hâte d'entendre des explications demain. J'ai toujours des problèmes lorsqu'on nous envoie un projet de loi visant à modifier une loi et que nous n'avons pas la loi comme telle ici. Il y a peut-être une explication quant à savoir comment les deux se combinent.
Pour l'instant, je suis d'accord avec tout le monde ici parce que cela semble très bizarre, mais j'examine effectivement le genre d'infraction. Il y a certaines infractions qu'on ne voit pas dans la population civile. Qu'on pense à ce qui s'est passé à Abou Ghraib parce qu'il s'agit bien d'une situation militaire où une jeune femme a sexuellement humilié un prisonnier. Maintenant, cela ne fait même pas partie de cette liste, mais je suppose que c'est compris dans la conduite cruelle et déshonorante.
Je comprends qu'il soit nécessaire d'englober certains types d'activités qui ne relèvent pas du droit civil, mais je vais attendre d'avoir les explications demain.
La présidente : Y a-t-il d'autres questions, sénateurs? Sinon, nous vous remercions, monsieur Trudell, d'être venu témoigner aujourd'hui.
Le sénateur Andreychuk : L'article du National Post explique peut-être certains des enjeux. Il s'intitule « Some Sex Offenders Still in the Forces », et est daté du 11 octobre 2005. C'est un point de vue intéressant au sujet du projet de loi S-39.
La présidente : Nous allons tenter d'obtenir une copie de cet article pour le comité.
La séance est levée.