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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles

Fascicule 24 - Témoignages du 27 octobre 2005


OTTAWA, le jeudi 27 octobre 2005

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, à qui a été renvoyé le projet de loi S-39, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale, le Code criminel, la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels et la Loi sur le casier judiciaire, se réunit aujourd'hui à 10 h 54 pour examiner le projet de loi.

Le sénateur Lise Bacon (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Honorables sénateurs, ce matin nous examinons à nouveau le projet de loi S-39, projet de loi modifiant la Loi sur la défense nationale, le Code criminel, la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels et la Loi sur les casiers judiciaires.

Nos témoins sont les suivants : du ministère de la Défense nationale, le colonel Dominic McAlea et M. Louis- Philippe Côté; de Sécurité publique et Protection civile Canada, Mme Mary Campbell; et de la Section de la politique en matière de droit pénal du ministère de la Justice Canada, Doug Hoover. Soyez les bienvenus au comité.

Vous êtes de retour parce que nos membres se posent de nombreuses questions et ont peut-être besoin de plus de temps pour discuter de ce projet de loi dont nous sommes saisis. Je sais que beaucoup de nos membres ont bien des questions, et ce projet de loi me préoccupe aussi.

Le sénateur Joyal : Nous avons un témoin du ministère de la Justice. Comme le projet de loi contient une importante section de modifications au Code criminel, à partir de la page 21, aurons-nous un exposé de Justice Canada pour que les hauts fonctionnaires nous expliquent dans leurs propres mots le fond de la question et les divers éléments qui ont trait au Code criminel, comme tels, ou est-ce que nous examinons l'ensemble de tout cela ce matin?

La présidente : Je pensais qu'ils feraient un exposé au comité. Monsieur Hoover, avez-vous un exposé à faire ce matin?

Doug Hoover, avocat, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice Canada : Honorables sénateurs, je ne me suis pas préparé pour faire un exposé. Toutefois, je présenterai le contexte des modifications au Code criminel, dont la majorité découle de modifications apportées à la Loi sur la défense nationale.

La présidente : Nous allons d'abord entendre le colonel McAlea. Vous avez la parole.

[Français]

Colonel Dominic McAlea, juge-avocat général adjoint pour Justice militaire et droit administratif, Défense nationale : Honorables sénateurs, je vous remercie de me permettre de comparaître devant votre comité à propos de cet important projet de loi visant à modifier la Loi sur la Défense nationale, le Code criminel, la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels ainsi que la Loi sur le casier judiciaire.

Le projet de loi S-39 fait suite à un engagement pris par la vice-première ministre McLellan, le 11 mars 2004, devant le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. La ministre McLellan avait alors déclaré que le gouvernement du Canada reviendrait avec une proposition législative qui comprendrait l'enregistrement des délinquants sexuels reconnus coupables au titre du système juridique militaire.

[Traduction]

Le projet de loi S-39 respecte cet engagement et fait en sorte que le système de justice militaire canadien demeure conforme aux normes juridiques canadiennes, de façon générale. D'autres modifications mineures ont été apportées à la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels et au Code criminel pour améliorer l'administration et l'observation de la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels actuellement en vigueur.

[Français]

Les modifications à la Loi sur la défense nationale inscrites dans le projet de loi S-39 sont conformes à l'orientation initiale de la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels. Le projet de loi S-39 contient également des modifications qui traduisent la réalité pratique de la discipline militaire, des opérations de la sécurité nationale et des relations internationales.

Le projet de loi ajoute cinq infractions militaires à la liste des infractions désignées qui peuvent faire en sorte que les délinquants soient tenus de s'enregistrer. Ces infractions, comprenant la violence envers les supérieurs, les mauvais traitements à un subalterne, la cruauté ou la conduite déshonorante, pour n'en nommer que trois, sont propres au Code de discipline militaire en vertu de la Loi sur la Défense nationale.

[Traduction]

Pour ce qui est de la réalité opérationnelle des Forces canadiennes — et j'espère que vous aurez des questions à poser à ce sujet —, nous proposons de donner au chef d'état-major le pouvoir en vertu de ce projet de loi de suspendre les délais d'expiration de certains droits de délinquants reconnus coupables pour contester l'obligation de comparution de même que certains aspects du processus de comparution aux termes de la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels.

Il est également proposé que le chef d'état-major puisse décider que de l'information concernant un délinquant sexuel reconnu coupable qui a déjà été enregistré, et qui pourrait mettre en péril la sécurité nationale, les relations internationales et des renseignements sur la sécurité, ne soit pas fournie dans certaines circonstances.

Quoique les incidents de délinquants sexuels mettant en cause des membres des Forces canadiennes soient relativement peu nombreux, ces amendements sont nécessaires pour s'assurer que le système de justice militaire n'accuse aucun retard sur les mesures progressistes prises par le système de justice civil canadien le 15 décembre 2004.

Le système de justice militaire vise à assurer sa conformité avec les droits et obligations de tous les Canadiens. Le projet de loi C-25 en est un bon exemple, la Loi sur la défense nationale ayant été modifiée pour faire en sorte que les cours martiales soient équitables, transparentes et respectent les normes de la Charte des droits.

On avait alors amendé la loi en y incluant la disposition permettant de juger une personne accusée d'agression sexuelle au Canada.

[Français]

Cet important pouvoir juridique est maintenant déphasé par rapport au système civil parce que les conséquences administratives, la condamnation pour une infraction sexuelle par une cour martiale, ne comprennent pas l'enregistrement en vertu de la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels. Le projet de loi S-39 supprime cette divergence et fait concorder le système juridique militaire avec les normes canadiennes.

[Traduction]

Pour conclure, ce projet de loi est nécessaire pour faire en sorte que le système de justice militaire évolue au même rythme que le système de justice pénale civil comme l'honorable Anne McLellan s'y est engagée l'année dernière. Il veille à ce que les délinquants sexuels jugés par la cour martiale fassent l'objet d'un enregistrement au besoin et que le contexte militaire soit pris en compte dans l'application de la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels. Nous nous ferons un plaisir d'expliquer tous les aspects du projet de loi S-39 au sujet desquels vous pourriez avoir des questions.

Mary Campbell, directrice générale, Affaires correctionnelles, Sécurité publique et Protection civile Canada : Je sais que les sénateurs sont préoccupés par certains des amendements contenus dans la projet de loi qui pourraient être considérés comme des amendements d'ordre administratif, et je me ferai un plaisir de répondre aux questions que les membres du comité voudront poser.

Au cours d'une de mes dernières comparutions au sujet du projet de loi et de la première formule d'enregistrement des délinquants sexuels, le président d'alors avait félicité les hauts fonctionnaires de leur franchise dans leurs explications de ce que contenait le projet de loi et je compte bien être tout aussi franche aujourd'hui.

Des fonctionnaires fédéraux et provinciaux ont eu de nombreux entretiens sur ce que pourrait contenir ce projet de loi. Il était clair que le gouvernement voulait déposer un projet de loi qui ne ferait pas de différence entre les militaires et les civils en ce qui a trait à l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels. Bien sûr, de nombreux hauts fonctionnaires avaient d'autres idées quant à ce qu'ils souhaitaient voir dans le projet de loi. Je crois avoir suscité la colère d'un nombre non négligeable de hauts fonctionnaires fédéraux et provinciaux pour avoir personnellement insisté afin que le projet de loi traite principalement de la Défense nationale et pour que nous présentions un projet de loi qui en somme ne comporterait que des amendements d'ordre administratif concernant le système d'enregistrement actuellement en vigueur.

Je tiens à rassurer le comité que, à mon avis, je pense sincèrement pouvoir dire que tous ces changements sont d'ordre administratif. Cependant, je comprends que les sénateurs veuillent en obtenir l'assurance. C'est avec plaisir que j'examinerai les amendements de nature assez technique qui suscitent des questions.

M. Hoover : À nouveau, je m'en remets aux sénateurs quant à la façon dont ils voudraient que je leur explique certains aspects du Code criminel. Je crois que la plupart des changements, quand on les examine, sont effectivement nécessaires pour tenir compte des changements à la Loi sur la défense nationale. Il y a certains autres changements. Hier, un témoin en a mentionné un qui n'est pas mineur en ce sens qu'il existe maintenant une nouvelle infraction au Code criminel à l'article 490.0311. Cependant, la présidente a souligné à juste titre que cette disposition n'était pas vraiment nouvelle. Elle est nouvelle du fait qu'il s'agissait auparavant d'une infraction aux termes, je crois, du paragraphe 17(2) de l'ancien projet de loi C-16, Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels, et qu'elle se trouve maintenant dans la Code criminel. C'était à l'origine à la demande expresse des autorités fédérales et provinciales. On estimait à l'unanimité qu'il n'était pas justifié de faire figurer cette infraction particulière dans la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels plutôt que dans le Code criminel, étant donné qu'il y avait une telle infraction dans la Code criminel. Le ministère de la Justice du Canada, en consultation avec Sécurité publique et Protection civile du Canada, SPPCC, et le ministère de la Défense nationale ont examiné cette demande. Nous ne trouvions rien à opposer aux provinces et aux territoires sur cette question, pas plus que nous n'avons trouvé la moindre raison de ne pas acquiescer à cette demande pour des motifs relatifs à la Charte ou à la protection des renseignements personnels. C'est pourquoi on l'a déplacée.

D'une certaine façon, il est bien clair que cela a un certain effet sur le délinquant. Bien que le chef d'accusation soit semblable, les conséquences d'une condamnation en vertu du Code criminel plutôt que de la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels peuvent différer si l'on songe, par exemple, à la possibilité de poursuites futures et d'une nouvelle détermination de la peine. Il pourrait en résulter des circonstances aggravantes, mais je ne pense pas qu'il y aurait une grande différence entre les deux.

Peut-être qu'il y en a quelques autres — appelons-les amendements techniques. Je reconnais avec Mme Campbell que nous les considérerions comme des amendements d'ordre administratif en ce qui a trait au Code criminel. Nous avons trouvé, par exemple, différents cas au sujet du Code criminel où des provinces nous ont fait savoir qu'elles avaient des difficultés à administrer le régime qui avait cours entre les tribunaux : comment l'information passe des tribunaux au registre et inversement. D'abord, parce que c'est une barque bien étanche, rares sont les renseignements qu'on laisse filtrer, à moins que ce soit explicitement prévu dans la loi. Toute divulgation qui n'est pas autorisée dans la loi constitue en fait une infraction aux termes de la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels.

Ainsi, quand nous avons examiné la loi en consultation avec Sécurité publique et Protection civile Canada, le ministère de la Défense nationale et tous nos autres partenaires provinciaux et territoriaux en matière de justice, nous ne pouvions qu'être d'accord pour reconnaître qu'il semblait exister différents barreaux animés de bonnes intentions mais peut-être un peu trop stricts. Par exemple, on se plaignait notamment qu'il était difficile pour les administrateurs des tribunaux eux-mêmes de faire en sorte que l'information circule strictement de manière conforme aux dispositions de la loi; il y a donc eu quelques légers changements au libellé.

Je pourrais vous les signaler si vous voulez que je le fasse article par article. Il serait peut-être mieux quand même d'attendre l'étude article par article et nous pourrions les signaler à ce moment-là. Cela pourrait faire gagner du temps au comité. Il vous appartient de décider de la façon de procéder.

[Français]

La présidente : J'ai une seule question à poser et je donnerai ensuite la parole à mes collègues. Je reviens encore à la page 3, au paragraphe 203c), qui me semble, encore une fois, assez inhabituel parce qu'il se réfère à des infractions désignées qui n'ont vraiment pas de connotation sexuelle. On revient toujours là-dessus, mais j'aimerais que ce soit clair.

On a dit que cela viserait à permettre au procureur de poursuivre pour une infraction comme la violence envers un supérieur, mais ici le paragraphe 203.01(2) énonce que la poursuite établit hors de tout doute raisonnable que l'infraction envers le supérieur a été commise avec l'intention de commettre une infraction sexuelle.

Vous ne trouvez pas cela inusité que la poursuite ait à elle seule la faculté de transformer la nature d'une infraction — la violence envers un supérieur — pour en faire une infraction qui recèle une intention sexuelle? La loi doit être claire, il me semble. C'est un des principes fondamentaux du droit. Est-on clair ici? Je veux être certaine qu'on règle cela ce matin.

[Traduction]

Col McAlea : Je crois savoir qu'hier un témoin s'inquiétait de l'inattendu. On peut se présenter au tribunal et s'attendre à assurer la défense de quelqu'un relativement à un chef d'accusation. Puis après la déclaration de culpabilité, la poursuite dit, ah oui, nous avons autre chose. Si je faisais face à cette situation inattendue, je m'en inquiéterais moi aussi parce que je suis assujetti au système tout comme mes collègues qui m'accompagnent.

À titre d'ancien avocat de la défense et procureur — j'ai fait les deux — je dirais qu'en réalité cela ne devrait jamais se produire, tout au moins par cet aspect de surprise. Selon l'arrêt Stinchcomb, en tant que procureur je dois communiquer à l'avocat de la défense tous les éléments de preuve que j'ai l'intention d'utiliser au cours du procès. En cas de condamnation et de détermination de la peine, si j'ai l'intention de présenter une demande, une ordonnance en vertu de cette loi, je le dirai avant le procès et je ferai connaître mon intention à l'avocat de la défense. Il ne devrait donc y avoir aucune surprise.

J'invite ma collègue à se prononcer sur cette pratique en droit civil.

Mme Campbell : Cette disposition du projet de loi S-39 reflète ce qui se trouvait dans le projet de loi C-16, le projet de loi initial portant création du registre de renseignements sur les délinquants sexuels. Dans mon travail des 15 dernières années tout au moins, j'ai eu connaissance qu'on s'inquiète du fait que souvent des infractions commises semblent n'avoir en apparence aucune connotation sexuelle mais qu'en réalité elles en ont une. À ce propos, on mentionne souvent le nom d'un réputé tueur en série parce qu'il aurait prétendument commencé sa carrière criminelle par des introductions par effraction, mais ces infractions étaient manifestement commises pour un motif d'ordre sexuel.

Ce dont des procureurs de l'ensemble du pays nous disent s'inquiéter depuis de nombreuses années, c'est qu'une liste d'infractions sexuelles à première vue ne correspond pas comme il se doit aux types d'agressions sexuelles qui sont commises. Cette préoccupation a été soulevée pour la première fois il y a une quinzaine d'années, au moment de la rédaction de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, qui contenait une liste d'infractions à caractère violent et qui avaient une certaine incidence sur la façon dont les détenus étaient traités.

En rédigeant la première Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels, nous avons tenu compte de cette réflexion qui se poursuivait depuis un certain temps. L'intention était donc de veiller à ce que les modifications à la Loi sur la défense nationale corresponde vraiment à ce qui se trouvait dans la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels de l'année dernière et de trouver ces infractions aux termes de la Loi sur la défense nationale qui y correspondaient.

Voilà la réflexion qui a sous-tendu ce travail et, comme l'a dit le colonel McAlea, c'est qu'il y avait eu des antécédents. On s'attend à ce que les délinquants et leur avocat ne soient pas pris au dépourvu et soient informés des renseignements dont dispose la poursuite.

La présidente : Ce serait clair alors.

Mme Campbell : Oui.

Le sénateur Bryden : Monsieur Hoover, que signifie la LERDS?

M. Hoover : C'est l'acronyme de Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels.

Le sénateur Bryden : Des avocats de la campagne comme moi ont encore besoin qu'on appelle clairement les choses par leur nom.

Lorsque vous dites que vous essayez de copier, de reproduire ou d'égaler, du mieux que vous le pouvez, le système qui s'applique à la population en général pour les forces armées, donnez-moi s'il vous plaît un exemple qui, dans le système civil, se compare directement au sous-alinéa 103c)(ii), « Violence envers un supérieur », qui imposerait alors l'obligation de l'enregistrer comme une infraction à caractère sexuel.

Col McAlea : Les cinq nouvelles infractions proposées n'ont manifestement pas de caractère sexuel de prime abord puisqu'elles sont ce que nous appelons des « infractions de type B » au titre de l'alinéa 490.011(1)b) du Code criminel. Elles ne comportent donc pas nécessairement un caractère sexuel.

Si nous cherchons un parallèle dans le système civil, nous ne le trouvons pas toujours nécessairement. Si j'ai bien compris votre question, vous voulez savoir s'il y a, dans la liste du Code criminel, quoi que ce soit qui ressemble à une infraction de type violence envers un supérieur. Je pourrais passer en revue toute la liste et trouver les infractions qui sont perpétrées avec violence, mais le cas d'un acte de violence envers un supérieur intéresse exclusivement le milieu des forces armées, et il m'est donc impossible de trouver un parallèle exact.

Mais ce n'est pas nécessaire s'il y a une intention à caractère sexuel. Ces cinq infractions ont été choisies parce qu'elles peuvent être associées à une infraction à caractère sexuel.

Le sénateur Bryden : N'est-il pas vrai qu'un acte de violence envers un supérieur — c'est une hypothèse — est le plus souvent commis sans qu'il y ait une intention à caractère sexuel? Le plus souvent, n'est-ce pas simplement parce que la personne qui commet l'infraction en a juste plein les bottes?

Col McAlea : Je n'ai pas de chiffres à ce sujet, mais je sais d'expérience qu'effectivement, il y a de cela.

Le sénateur Bryden : Je peux comprendre pourquoi vous pouvez affirmer que, dans la pratique et en raison de la Loi, nous pouvons faire en sorte que, s'il y a voie de fait à l'encontre d'un officier, la défense ne sera pas prise au dépourvu parce que nous pourrons lui dire que cette agression a peut-être été commise avec des intentions à caractère sexuel.

Mais c'est précisément de l'inverse dont je veux parler aujourd'hui, en l'occurrence lorsque le ministère public dira à l'avocat de la défense qu'il y a peut-être des connotations sexuelles.

Dans les forces armées, est-il possible de négocier un plaidoyer?

Col McAlea : Effectivement, c'est possible, tout comme d'ailleurs dans le système civil.

Le sénateur Bryden : À ce moment-là, l'avocat de la défense pourrait dire à son client : « Comprenez bien que si nous suivons cette route, nous risquons d'avoir à entendre le ministère public essayer de faire la preuve, hors de tout doute raisonnable, que vous avez fait cela en ayant des intentions à caractère sexuel ou à des fins sexuelles ». À ce moment-là, ce serait plus commode de plaider coupable à une infraction d'agression. Peut-être ne le ferait-il pas.

Il est également possible que l'avocat de la défense dise à ce moment-là que le ministère public n'a pas vraiment de motif valable, qui pourrait prouver hors de tout doute raisonnable, qui puisse se tenir.

Ce que je crains davantage, c'est qu'on viole les droits de l'accusé, même dans les forces armées, et je crains cela beaucoup plus que la possibilité que quelqu'un ne soit pas inscrit dans une banque de données parce que nous n'aurions pas vérifié chacune des possibilités qu'il y ait pu avoir une intention à caractère sexuel d'un genre ou d'un autre.

Si vous essayez de reproduire ce qui existe hors des forces armées, il m'est difficile de comprendre pourquoi, dans ces dispositions, nous ne pourrions pas dire ici — que la loi en question a pour seul but d'enregistrer, c'est un « outil d'enquête » — au lieu d'intégrer indirectement ce qui existe dans vos dispositions, de dire donc de façon plus précise : « violence envers un supérieur dans un but ou avec une intention à caractère sexuel ». En disant cela, je ne veux pas faire de la rédaction législative.

Il est certain qu'à ce moment-là cela ne produit pas un traitement particulier pour les gens qui sont inculpés en vertu du droit militaire ou qui sont en violation du Code criminel en général.

Col McAlea : Vous évoquez ici plusieurs choses qui font intervenir, par exemple, la déontologie de la part du ministère public et de l'avocat de la défense, et parfois une disparité dans les positions de négociation respectives.

Ayant été moi-même à la fois procureur et avocat de la défense, si j'étais avocat de la défense, il serait déontologiquement parlant de mon devoir de défendre mon client. Cette obligation déontologique signifie que si l'avocat de la Couronne n'a pas fait la preuve, je dirais alors à mon client de ne pas opter pour cette piste.

Par exemple, si quelqu'un est condamné pour l'une de ces cinq infractions ou pour l'une des nombreuses infractions inscrites au Code criminel, par exemple une intrusion de nuit, de prime abord cela ne sous-tend aucun caractère sexuel. Je vais demander à Mme Campbell de dire un mot de ce qui, parfois, n'a pas de caractère ouvertement sexuel mais qui en a un en réalité.

Le corps des officiers n'est pas du tout le même de ce qu'il était il y a des années de cela. Jadis, il était surtout composé d'hommes, ce qui n'est plus le cas maintenant. Il y des hommes et des femmes qui sont officiers. Toute la dynamique sexuelle a changé. C'est l'une des raisons pour lesquelles je vous dis ici qu'il s'agit d'une infraction pour laquelle le procureur devrait avoir la possibilité d'envisager la chose.

Je vais dans quelques instants répondre à la question que vous me posiez, en l'occurrence celle de savoir si nous ne faisons pas de cela une infraction hybride.

Lorsqu'il s'agit de poursuivre, si je suis procureur, je divulgue l'information sur laquelle je vais me baser. Si je suis avocat de la défense, je dirais que cette information a intérêt à contenir une preuve permettant de justifier la conclusion que, hors de tout doute raisonnable, l'infraction a été commise à des fins sexuelles. Dans la négative, c'est une perte de temps pour le tribunal.

Pour revenir à votre autre question, si j'ai bien compris, il faudrait revoir la définition de ces infractions afin de dire très clairement, dans le cas que vous avez cité : « violence envers un supérieur dans un but sexuel ou avec l'intention de commettre une infraction », n'est-ce pas? Je n'y avais pas pensé.

Si vous prenez la disposition actuelle, on parle de l'intention de commettre une infraction selon la description donnée à l'alinéa 490.011(1)a), ce qui comporte 20 infractions différentes. Il y a aura probablement quelques problèmes de rédaction dans ce cas-là. J'ignore quelle est la réponse et j'ignore aussi pourquoi nous ne pourrions par procéder de cette façon. J'inviterais d'ailleurs mon amie à en dire un mot. Mais auparavant, ai-je bien répondu autant que je le pouvais à votre question?

Vous le savez beaucoup mieux que moi, c'est sûr. Actuellement, il n'y a aucun registre pour les condamnations pour acte de violence envers un supérieur, n'est-ce pas?

Col McAlea : Exact.

Le sénateur Bryden : Sur le plan civil, y a-t-il un registre des condamnations pour voies de fait?

Col McAlea : Si j'ai bien compris, il est possible que quelqu'un puisse être condamné pour toutes sortes d'infractions : homicide, harcèlement criminel, enlèvement, rapt et introduction par effraction. Ces infractions, crimes et délits, qui n'ont pas de prime abord de caractère sexuel, pourraient se traduire par une condamnation, une peine et, au bout du compte, une ordonnance exigeant l'inscription au registre, si les infractions en question ont été perpétrées dans l'intention de commettre une infraction à caractère sexuel.

Le sénateur Bryden : À quel moment fait-on valoir devant le tribunal que l'infraction en question a une connotation sexuelle et que le ministère public va donc demander l'inscription au registre?

Col McAlea : La loi dit que la demande doit être introduite après le prononcé de la sentence, c'est-à-dire après le verdict de culpabilité et le prononcé d'une peine. En réalité, certains aspects de la chose transparaîtraient pendant le procès lui-même.

En va-t-il exactement de même du côté civil?

Mme Campbell : En un mot oui, sénateur. Le processus prévu dans le système civil est une longue liste d'infractions qui, de prime abord, n'ont pas de caractère ouvertement sexuel. Mais le critère demeure le même. Le tribunal doit être convaincu hors de tout doute raisonnable qu'il y avait effectivement une intention à caractère sexuel.

D'après ce que je sais et d'après mon expérience, au moins 80 p. 100 des inculpations au pénal se règlent au Canada par la négociation d'un plaidoyer. Tout cela est discuté d'avance. Dans le cadre normal des représentations au moment de la sentence, le ministère public dira qu'il demande telle ou telle peine. Bien sûr, il y a toute une palette d'autres ordonnances qui peuvent désormais être demandées. Il peut s'agir d'un prélèvement d'ADN, d'une interdiction de posséder une arme, ou encore de l'inscription dans le registre des délinquants sexuels. Mais tout cela est invoqué à ce moment-là pendant le processus.

Le sénateur Bryden : Mais dans le cours normal des choses, à quel moment règle-t-on cela au procès? Cela fait-il partie de la preuve qui est présentée avant le prononcé de la peine? Je veux dire par là qu'on commence par une introduction par effraction, un vol, et c'est uniquement de cela qu'on fait la preuve. Une fois que l'inculpé a été condamné pour introduction par effraction et vol, il y a une nouvelle audience pendant laquelle on essaie de prouver qu'il a fait cela en réalité à des fins sexuelles.

Mme Campbell : Pour l'essentiel, vous avez raison. À ce moment-là, le ministère public signalera qu'il va demander une ordonnance d'inscription au registre des délinquants sexuels. Étant donné que l'infraction en question figure sur ce que l'on appelle la « liste B », le ministère public doit prouver que l'inscription au registre est une mesure appropriée. Dans le cadre de cela, il va devoir faire la preuve hors de tout doute raisonnable qu'il y avait effectivement une intention à caractère sexuel. Oui, je pense qu'on peut effectivement dire qu'à ce moment-là, il y aura une seconde audience. Cela, c'est pour le système civil.

Le sénateur Bryden : L'article 84 du Code de discipline militaire dit ceci :

Quiconque frappe ou tente de frapper un supérieur, ou sort ou brandit une arme contre lui, ou use ou tente d'user de violence à son égard, physiquement ou verbalement, commet une infraction et, sur déclaration de culpabilité, encourt comme peine maximale l'emprisonnement à perpétuité.

L'article 95 dit ceci :

Quiconque frappe ou de quelque autre façon maltraite un subordonné — par le grade ou l'emploi — commet une effraction et...

Je suppose que cela vaut pour les deux sexes...

sur déclaration de culpabilité, encourt comme peine maximale d'un emprisonnement de moins de deux ans.

Pourquoi la peine est-elle beaucoup plus lourde pour quelqu'un qui frappe un supérieur que pour quelqu'un qui frappe un subalterne?

Col McAlea : Je ne peux pas vraiment vous expliquer en vertu de quelle politique le Parlement a légiféré de cette façon. Lorsqu'il s'agit de la relation entre les deux, d'un point de vue disciplinaire, il est beaucoup plus grave qu'un subordonné s'en prenne à un supérieur, même si l'inverse est un acte tout aussi haineux.

Mais cela dit, il est évident qu'il y a ici une dichotomie au niveau des peines maximales. J'ignore ce que le Parlement avait en tête lorsqu'il a légiféré ainsi, mais je pourrais essayer de me renseigner à ce sujet.

Le sénateur Bryden : Dans un certain sens, cela m'importe peu que vous y parveniez ou non. J'aimerais plutôt que vous ou quelqu'un d'autre remédiez au problème. Je peux comprendre qu'on procède ainsi lorsqu'il s'agit de quelqu'un qui sort une arme, mais il n'y a aucune raison pour que cela figure dans la même disposition que celle qui concerne un acte de violence commis par un officier à l'endroit d'un citoyen canadien.

Dans un sens, quiconque agit ainsi risque la perpétuité. Dans l'autre sens, la peine maximum est inférieure à deux ans. Cela est quand même un peu étrange. Je sors sans doute du sujet, mais lorsque j'ai lu les dispositions en question, cela m'a littéralement sauté au visage.

Le sénateur Andreychuk : Je voudrais demander ceci à Mme Campbell. Ces infractions qui ne donnent pas l'impression d'avoir un caractère sexuel ont été intégrées, si j'ai bien compris ce que vous nous avez dit, suite à toute une série d'analyses, de travaux de recherche, et travaux de documentation et d'études de preuve fournies par les procureurs et, du moins il faut l'espérer, les avocats de la défense. Les informations ainsi obtenues auprès de ces sources ont révélé que les catégories que nous avons choisies commençaient à afficher des connotations sexuelles préjudiciables pour la société.

Le colonel McAlea, je l'ai entendu, vient de nous dire que celles qui ont été choisies pour le volet militaire n'ont pas nécessairement été identifiées de la même façon pour leur connotation sexuelle. Ce sont certes des crimes graves, mais qui sont propres aux forces armées. Personne n'a fait une adéquation permettant de dire que ces infractions-là sont celles qui sont caractéristiques de l'activité sexuelle des prédateurs.

Col McAlea : Je vais parler le premier puis laisser ma collègue compléter ma réponse. Ce qu'on a pensé, c'est que ces infractions appartenaient à la même catégorie que celle des infractions de type B dont parle le Code criminel et comme l'a dit Mme Campbell. Par exemple, si vous songez au « mauvais traitement dans les cantonnements », il s'agirait de l'article 203.

Le sénateur Andreychuk : Je vais vous arrêter ici. Je sais que vous êtes parti du principe que c'était le même genre. Vous avez dit que les deux pouvaient être les mêmes. Mais dans la société, les infractions en question reposent sur une preuve quelconque qu'il y a eu une quelconque activité sexuelle grave et préjudiciable. Mme Campbell a d'ailleurs évoqué un cas d'espèce.

Les cas en question sont peut-être comparables, mais y a-t-il une analyse et une preuve comparables selon lesquelles le comportement sexuel était à l'origine d'un grand nombre de cas en question qui présentaient un caractère prédateur grave et une nature répétitive?

Col McAlea : Vous voulez dire y a-t-il des données scientifiques à cet égard?

Le sénateur Andreychuk : Y a-t-il une analyse quelconque, une jurisprudence quelconque dont vous vous êtes inspirés? Ou au contraire affirmez-vous simplement qu'il est nécessaire d'avoir certains cas qui équivalent à cela?

Col McAlea : Non, nous avons examiné les dispositions du Code de discipline militaire, qui font partie de la Loi sur la défense nationale, et nous avons défini les infractions qui étaient susceptibles d'avoir une connotation sexuelle. Ce sont celles-là que nous avons identifiées.

Certaines sont plus faciles à identifier que d'autres, par exemple, dans le cas du cantonnement. Il y a cantonnement lorsqu'un soldat habite dans une famille civile. À ce moment-là, il est proche de certaines personnes qui non seulement sont de l'autre sexe, mais qui peuvent également être jeunes et donc exploitables. Cette proximité est un des éléments qui nous préoccupait, et nous voulions donc rigoureusement contrôler cela. Il s'agit d'une situation domestique, et nous voulions donc qu'il n'y ait pas non plus de connotation sexuelle.

Le sénateur Andreychuk : Voici ce que je voudrais savoir : Avez-vous la preuve que ces infractions que vous avez choisies ont eu un élément sexuel? Avez-vous la preuve que les soldats ainsi cantonnés ont commis des actes de maltraitance assimilables à des agressions sexuelles? Avez-vous ce genre de preuve, ce genre de données?

Col McAlea : Pas ici, non.

Le sénateur Joyal : Dans la même veine que le sénateur Andreychuk, j'ai parcouru la liste qui donne le détail des condamnations pour infraction à caractère sexuel prononcées en cour martiale entre janvier 2000 et décembre 2004, liste qui nous a été remise ce matin. Je n'ai pas fait l'analyse complète faute de temps. J'écoutais le sénateur Bryden, mais cette liste dit ceci :

[Français]

... alors qu'il était en situation d'autorité ou de confiance.

[Traduction]

J'ai ici la première page, la seconde concerne le 4 avril 2000.

[Français]

... alors qu'il était en situation d'autorité ou de confiance.

[Traduction]

Le 24 mai.

[Français]

... alors qu'il était en situation d'autorité ou de confiance.

[Traduction]

Le sénateur Joyal : Le 20 octobre 2001.

[Français]

... alors qu'il était en situation d'autorité ou de confiance.

[Traduction]

Il semble bien qu'il s'agisse là de scénarios répétitifs dans le cas d'infractions à caractère sexuel, ce dont parlait le sénateur Andreychuk dans ses questions. Qu'en est-il de l'abus d'autorité? En d'autres termes, la personne est en position d'autorité et se sert de cette position ou du contexte dans lequel elle s'y trouve pour perpétrer une infraction à caractère sexuel.

Nous n'avons ni explications, ni détails pour chacun des cas signalés par le rapport, mais le rapport parle de choses qui se répètent. En d'autres termes, il est davantage possible pour quelqu'un qui est en situation d'autorité d'abuser de quelqu'un qui est son subordonné que dans la situation inverse. C'est toujours possible, on ne sait jamais, mais dans ce cas-ci, il s'agit d'un abus de la part de quelqu'un qui est en position d'autorité.

Si nous ajoutons l'alinéa c) de l'article 203 à la page 3 du projet de loi, à ce moment-là il faut qu'il y ait une connotation sexuelle. Je ne vois pas comment nous pourrions prouver qu'il y a eu simplement pour infraction un « mauvais traitement à un subalterne ». J'ignore combien de fois les archives militaires font état d'infractions de ce genre.

Nous ne pouvons pas accepter qu'il doive obligatoirement avoir un lien, comme le disait hier le sénateur Milne, avec une intention à caractère sexuel parce qu'un abus d'autorité peut survenir dans toutes sortes de contextes différents. Lorsqu'il y a abus d'autorité dans l'intention de commettre une infraction à caractère sexuel, bien sûr nous voyons très bien qu'il y a un lien direct. Mais il nous est difficile d'accepter l'alinéa c) de l'article 203 sous sa forme actuelle s'il n'y a aucune relation avec une intention sexuelle ou une intention de commettre une infraction à caractère sexuel ou qui s'accompagne d'une infraction à caractère sexuel.

Col McAlea : Notre organisation est hiérarchique. Dès lors qu'il y a une hiérarchie, l'exploitation de la différence au niveau du pouvoir ou de l'autorité est toujours possible, et l'exploitation sexuelle est du nombre. Comme l'a signalé ma collègue, la disposition du Code criminel qui est citée ici concerne la nature de l'exploitation par rapport à cette autorité. Ma collègue, Mme Campbell, aimerait d'ailleurs dire aussi un mot à ce sujet.

Mme Campbell : Ici aussi, si l'on prend le contexte civil, un problème qui nous interpelle depuis de nombreuses années est le volet correctionnel du système de justice pénale. Nous nous trouvons souvent avec un délinquant qui est un délinquant sexuel ou qui manifeste un comportement délictuel à caractère sexuel dont nous ignorions tout, ce qui fait que cet élément est passé inaperçu et n'a par conséquent pas été traité.

Depuis plus de 20 ans, je m'emploie entre autres choses à faire en sorte que tous les professionnels qui interviennent dans le système s'attaquent au véritable problème et s'en prennent aux délinquants sexuels. Le mal que causent ces délinquants est précisément un des problèmes les plus difficiles à résoudre. Nous avons essayé d'intervenir sur différents fronts pour être bien sûrs d'avoir le moyen d'identifier précisément les cas où le caractère sexuel d'une infraction n'est pas nécessairement visible de prime abord.

En tant qu'experts, nous regardons toutes ces infractions et nous voyons quels sont les conseils que nous pouvons offrir en tablant sur ce que nous savons de ce genre de comportement ou ce que nous avons pu voir pendant les poursuites. Au fil de toutes ces années, nous avons fini par établir une liste. Sur la liste des civils, je peux vous signaler un grand nombre de ces infractions et vous donner des noms de dossiers dans lesquels il y avait très clairement un élément à caractère sexuel.

Nous devons aussi tenir compte de la négociation d'un plaidoyer, un élément qui fait partie de notre système pour toutes sortes d'excellentes raisons. Je ne veux pas me laisser distraire et commencer à discuter du pour et du contre de la chose, mais il n'empêche que la négociation de plaidoyer est une réalité. Il peut y avoir des gens qui voudront plutôt plaider une simple infraction d'introduction par effraction plutôt qu'une introduction par effraction dans l'intention de commettre une agression sexuelle.

L'idée d'avoir cette autre liste, comme je vous le disais, était d'essayer d'identifier les gens qui risquent de commettre ce genre d'infraction. Comme toujours, nous essayons d'être bien sûrs qu'il y ait les freins et contrepoids nécessaires. Ainsi, si un procureur demande une ordonnance d'inscription au registre des délinquants sexuels en s'inspirant de la liste, c'est à lui à faire la preuve de ce qu'il avance. Le critère de la preuve est le plus rigoureux qui soit dans le contexte pénal, en l'occurrence une preuve hors de tout doute raisonnable. Et bien entendu, l'inculpé est informé du fait que cette ordonnance sera évoquée pendant les procédures conduisant au prononcé de la peine.

Pour revenir à la question du texte, pourquoi dire cela ici au lieu d'établir un lien avec les infractions? Je ne fais pas partie de l'équipe des rédacteurs législatifs de Justice Canada, mais je pense pouvoir dire qu'il s'agit d'un problème de rédaction. On a décidé d'avoir une liste d'infractions et, dans le régime qui s'appliquait à l'origine aux délinquants sexuels, la liste en question est plus longue que celle qu'on trouve dans la Loi sur la défense nationale.

On a donc décidé qu'il serait plus logique d'établir la liste des infractions et ensuite, lorsqu'on décrit le processus, de décrire tous les éléments du processus dont il faut faire la preuve au moment de l'application. Si on avait décidé d'intégrer à la liste des infractions l'un ou l'autre des éléments du processus en question, il aurait fallu faire en sorte de ne créer ni confusion, ni contradiction. À mon avis, honorables sénateurs, il s'agissait de composer le texte le plus logique possible.

Le sénateur Andreychuk : Je voudrais revenir à la question que j'ai posée un peu plus tôt parce qu'elle n'est pas la même que celle qui a été posée par le sénateur Joyal. Ce que j'ai dit, c'est que vous aviez effectué une analyse dans le système civil et que vous aviez conclu qu'il y avait des problèmes invisibles — peut-être dans le cas d'une introduction par effraction et vol — mais que toutes les analyses jurisprudentielles vous permettaient d'affirmer que ces cas étaient susceptibles d'être ceux qui pouvaient conduire à une infraction à caractère sexuel.

Si ce n'était pas le cas, vous prendriez le Code criminel en entier et diriez que tout acte criminel peut conduire à l'inscription du délinquant dans le registre des délinquants sexuels. Si vous avez choisi de ne pas le faire, c'est sans doute parce qu'il y en aurait trop. Vous avez fait une sélection en fonction de certains critères. Dans les forces armées, vous les avez choisies en fonction de certains critères. J'aimerais savoir lesquels. S'agit-il d'affaires qui sont déjà survenues? De situations que vous redoutez?

Vous avez parlé de « mauvais traitement dans les cantonnements ». Avez-vous fait des recherches? Pouvez-vous nous expliquer pourquoi cette infraction a été retenue? Si ce n'est pas le cas, je suis porté à croire que vous avez sélectionné les infractions graves particulières aux forces armées, comme l'abus ou le défi d'autorité, qui n'ont peut-être aucune dimension sexuelle.

Col McAlea : Vous avez bien décrit les infractions. Il s'agit effectivement de défi ou d'abus d'autorité. Je n'ai pas de chiffres à vous donner. Ce que nous savons et ce que notre analyse a montré, c'est que ces infractions sont assimilables à celles de l'alinéa 490.011(1)b).

Par exemple, dans la catégorie B, vous trouverez des infractions commises à l'intérieur du foyer et d'autres reliées à l'exploitation des enfants. Ici, se trouvent celles reliées à l'exploitation de la situation d'autorité, qui tient à la nature de notre hiérarchie.

La question qui se pose est la suivante : Pourquoi avons-nous procédé ainsi? Nous estimons que ces infractions sont de même nature que celles qui figurent dans la liste B, comme Mme Campbell l'a décrit.

Le sénateur Andreychuk : Mais vous n'avez pas de chiffres à l'appui.

Col McAlea : Nous n'avons pas fait d'analyses statistiques telles que vous les avez décrites.

Le sénateur Andreychuk : Avez-vous des chiffres sur les situations où surviennent le harcèlement ou l'abus sexuel dans les forces? On a parfois vent de cas où une personne en situation d'autorité a agressé une femme dans l'armée. Dernièrement, nous avons eu écho de cas aux États-Unis mais pas ici, heureusement pour nous.

Qu'auriez-vous fait pour lutter contre ce problème, car il est question d'admettre des femmes dans les forces, à bord de navires et même de sous-marins? De temps à autre, on entend parler de cas où il y a eu des problèmes et j'aimerais savoir s'ils sont reliés aux infractions énumérées ici ou à d'autres,

Col McAlea : En ce qui concerne les chiffres, le sénateur Joyal a mentionné le tableau qui vous a été fourni et qui fait état de 17 condamnations depuis 2000. Le harcèlement sexuel dont vous parlez n'est pas toujours aussi grave qu'une infraction au criminel. Cela ne figurera pas ici. Nous pouvons aller aux renseignements et vous obtenir les chiffres sur le harcèlement sexuel, si vous le voulez.

Le sénateur Andreychuk : Là où je veux en venir c'est que d'après ce que je sais des infractions que vous avez énumérées et qui reviennent à un comportement sexuel inapproprié, criminel ou autre, dans les forces, il s'agit d'un haut gradé qui se sert de son autorité pour intimider, obtenir des faveurs sexuelles ou autres ou refuser une promotion. Ce sont les cas dont j'ai entendu parler. Mais ce ne sont pas des infractions au Code criminel, comme vous l'avez dit. Ce sont des infractions qui surviennent en milieu de travail. Elles pourraient être des infractions au Code criminel, mais s'agit-il vraiment de violence envers un supérieur par opposition à de l'intimidation?

Col McAlea : S'il y a une disparité de grade qui a été exploitée à des fins sexuelles et s'il est établi qu'une partie a consenti, on se pose la question de savoir s'il y avait véritablement consentement ou si celui-ci a été vicié par la grande disparité entre l'autorité de chacun? S'il a été vicié, je dirais que l'infraction relève bien du domaine criminel.

Le sénateur Andreychuk : De laquelle des infractions énumérées s'agirait-il?

Col McAlea : Parlez-vous des infractions énoncées à l'alinéa 203c)?

Le sénateur Andreychuk : Je parle des infractions que vous faites figurer au registre des délinquants sexuels.

Col McAlea : Il s'agit de cruauté ou de conduite déshonorante. Il peut s'agir de mauvais traitements à un subalterne. Ce pourrait aussi être violence envers un supérieur. Les trois infractions pourraient avoir été commises dans le cadre d'une infraction de nature sexuelle.

Le sénateur Andreychuk : Vous ne pouvez pas me donner les chiffres. Peut-être les avons-nous.

Col McAlea : Nous ne les avons pas ici. Je voudrais bien comprendre : Vous aimeriez avoir des chiffres au sujet du harcèlement sexuel?

Le sénateur Andreychuk : Voici où je veux en venir. Nous sommes ici à cause du registre de délinquants sexuels et non à cause de comportement inapproprié ou criminel dans les forces armées. Nous sommes ici parce que certaines infractions ont une dimension sexuelle qui pourrait conduire à l'inscription dans le registre des délinquants sexuels.

Col McAlea : C'est juste.

Le sénateur Andreychuk : Voici ce que je voudrais savoir. Est-ce que les infractions où il y a eu activité sexuelle conduiront à l'inscription dans le registre? J'aimerais savoir où cela survient et s'il s'agit ici de harcèlement en milieu de travail. S'agit-il d'un acte criminel? Il faut que nous sachions pourquoi nous éliminons ces infractions.

Col McAlea : Je ne sais trop comment vous communiquer les chiffres. Nous pouvons compiler les condamnations pour chacune de ces cinq infractions pour établir les circonstances. Cela vous donnerait-il ce que vous cherchez?

Le sénateur Andreychuk : Je m'adresse maintenant au militaire. Dans vos discussions avec le ministère de la Justice, vous avez sûrement fait des recommandations et expliqué pourquoi ces infractions étaient incluses, à part le fait qu'elles avaient leur pendant.

La présidente : Mme Campbell peut peut-être vous répondre.

Mme Campbell : Quel que soit le but recherché, établir une liste d'infractions est une des choses les plus difficiles à faire et l'une des plus débattues. C'est toujours difficile quand on considère les infractions comme des catégories sans tenir compte de leurs particularités.

Vous êtes des experts et vous savez, par exemple, que l'homicide involontaire peut englober quantité de comportements. C'est une des questions qui fait le plus souvent l'objet d'examens et de discussions. Quand nous avons établi la liste pour les civils, nous misions sur des années d'expérience et une foule d'avis venant de spécialistes.

Dans nos travaux, nous consultons des procureurs de tout le pays. Je copréside un groupe de travail de fonctionnaires qui connaissent bien ce qui se passe dans les tribunaux du pays : les catégories d'infractions qui comportent une certaine dimension sexuelle ou qui, même rares, ont de fortes chances d'en comporter?

Vous avez raison, sénateur. Le vol, par exemple, ne figurera pas sur une liste comme celle-ci. Nous essayons de faire une sélection rationnelle. À un moment donné, il faut tirer un trait et dire : « Nous savons d'expérience que ces infractions ont une dimension sexuelle ou risquent tellement d'en avoir une qu'il serait irresponsable de ne pas les mettre sur la liste; nous devons nous en remettre à la charge de la preuve et au degré de force probante pour garantir la justesse de notre choix. »

Voilà le genre de consultations et d'analyses spécialisées qui entrent dans la préparation d'une liste de ce genre. « Voici la liste d'affaires à dimension sexuelle ou qui risquent tellement d'en avoir une que les infractions doivent figurer sur la liste. » Voilà comment nous procédons.

Je n'appartiens pas au ministère de la Défense nationale et le ministère examinera sa liste en réponse à votre question et voilà le genre d'analyse à laquelle nous procédons. Entre autres choses, on demande au procureur de consulter ceux qui travaillent dans les tribunaux, avocats de la défense y compris, comme vous l'avez dit. C'est une somme de connaissances amassées au sujet de ces infractions. C'est une des questions les plus débattues, je le répète.

Le sénateur Andreychuk : C'est aussi important. Si nous essayons de protéger la société, il faut faire les bons choix et aussi protéger ceux qui risquent de se retrouver inscrits dans le registre. Il faut qu'il y ait une bonne raison pour qu'ils y figurent, pas seulement parce qu'il existe une liste commode.

D'après ce que je sais, dans le civil, le registre est encore relativement récent. Quand l'avocat de la défense rencontre le procureur, il veut savoir à quoi s'attendre et quelles sont les conséquences possibles. Le procureur pourra révéler qu'il voudra l'inscription au registre. Il pourra la requérir à la fin du procès seulement s'il apparaît au cours de l'instance des éléments nouveaux ou imprévus. Sur le plan technique, il est dit dans la loi que vous achevez le procès et que vous entamez ensuite cette procédure qui n'est pas un procès. C'est une phase différente; ce n'est pas censé être dans la même catégorie. Vous repartez de zéro, n'est-ce pas? Est-ce ainsi que ça se fait?

Mme Campbell : C'est ce que je prévois. Cela nous ramène à ce que nous savons au sujet de la façon dont les inculpations se règlent au Canada. Quelque 80 p. 100 ou plus se règlent par négociation de plaidoyer. Ces discussions ont donc lieu constamment.

Je ne peux pas vous donner ma garantie personnelle que c'est ainsi que l'on procède aujourd'hui. Je ne le sais pas, tout simplement. Je peux vous dire que j'ai une réunion des fonctionnaires fédéraux, provinciaux et territoriaux prévue pour le début décembre et qu'un des points de l'ordre du jour est l'examen des problèmes passés de mise en œuvre. Il existe un processus d'évaluation grâce auquel nous rassemblons des données non seulement sur le nombre d'ordonnances et la jurisprudence, mais aussi pour examiner le fonctionnement du processus. À un moment donné, je m'attends à ce que nous puissions donner au Parlement plus de renseignements de cet ordre.

Vu ce que je sais et mon expérience, je m'attends à ce que toutes les questions soient sur la table assez tôt. Je ne peux toutefois pas vous donner de garantie personnelle à ce stade-ci.

[Français]

Le sénateur Rivest : Je remercie les autorités de l'armée de leur présence ici. J'ai regardé rapidement leurs documents. C'est précis et extrêmement intéressant. Je suppose qu'il y aura d'autres dispositions prises après les procès afin de s'occuper des conséquences psychologiques que subiront les victimes.

J'invite mes collègues à prendre connaissance des documents qui nous ont été transmis sur la préoccupation des forces armées de s'occuper également des victimes dans ce dossier. Ces documents sont très éloquents.

D'une façon générale, j'ai toujours un peu de difficulté à comprendre la nécessité des dispositions particulières en ce qui concerne les militaires, dans le cas des offenses sexuelles, par rapport à ce que prévoit déjà le Code criminel. Il me semble que toutes ces notions dont on discute, par exemple les agressions qui peuvent comporter une dimension sexuelle, sont déjà incluses dans le Code criminel ou dans la pratique du Code criminel, lorsqu'il y a une enquête sur des voies de fait et que l'on découvre qu'il y a une dimension sexuelle. On transforme normalement l'accusation selon les faits dont on prend connaissance.

Deuxièmement, la notion de « supérieur » aussi peut être inhérente à la structure et la nature même des forces armées, qui est différente que celle de la société civile. Comme on le mentionnait, cette préoccupation de s'intéresser au respect de l'autorité, jusque dans les cas d'agressions ou de pratiques sexuelles, on voit très bien qu'en réalité — comme le sénateur Joyal l'a signalé — les actes sexuels qui sont commis sont peut-être faits à l'inverse.

On devrait se préoccuper des subalternes, en particulier des femmes. Je suppose que dans la réalité statistique, ce qui se passe, c'est l'abus d'autorité.

Mais dans le Code criminel, même cette notion qu'une personne soit en autorité ou en état de subordination par rapport à une autre, lorsqu'il y a une offense criminelle, est un facteur extrêmement présent et considéré par le droit criminel, tel qu'il s'applique à tout le monde.

Je reste assez sceptique sur la nécessité, comme le projet de loi ici le prévoit, d'avoir des dispositions particulières pour les forces armées sur l'ensemble de ces questions. Il me semble que le Code criminel y pourvoit.

Ce projet de loi reste nécessaire. Qu'il y ait des infractions criminelles qui soient pour les forces armées, étant donné que ce sont des tribunaux, des cours martiales, et que l'on dise qu'il y aura un registre comme il y en a pour la société civile, je serais satisfait de ce projet de loi. On le verra quand on examinera le projet de loi article par article, et le comité fera l'effort d'apporter des corrections, selon les interventions de nos collègues sur chacun des aspects.

Mais fondamentalement, je suis toujours resté un peu sceptique sur l'utilité de se lancer dans pareil exercice. Pourquoi ne pas prendre le Code criminel et l'appliquer aux forces armées? Par contre, il faut un projet de loi pour qu'il y ait un registre particulier, étant donné que c'est une cour martiale. Et le droit criminel, sur l'ensemble des notions, s'applique autant aux militaires qu'à l'ensemble des Canadiens.

C'est un commentaire général, mais c'est mon sentiment à ce moment des débats.

[Traduction]

Le sénateur Pearson : Je veux poser une question de base parce que nous avons ici l'occasion de comprendre le lien entre le système de la cour martiale et le système des Forces canadiennes, et le système en général.

Le détail sur cette liste que vous nous avez donnée est quelque chose d'intéressant. Vous parlez de la procédure administrative que l'on appelle « libéré ».

Après la condamnation de l'accusé en cour martiale, quand vous dites que l'accusé est libéré, vous voulez dire seulement que l'accusé a purgé l'autre peine aussi; l'accusé a été libéré, expulsé ou je ne sais pas quel est le terme de l'armée, c'est bien ça?

Col McAlea : Oui.

Le sénateur Pearson : Une condamnation en cour martiale a les mêmes conséquences qu'une condamnation en vertu du Code criminel pour un civil.

Col McAlea : Entendons-nous bien : il y a deux filières. Une cour martiale a le pouvoir de renvoyer quelqu'un de l'armée. Sur la liste que je vous ai donnée, aucune cour martiale n'a décidé de le faire. Elle aurait pu.

Après une condamnation, les Forces canadiennes doivent déterminer si les intéressés peuvent être gardés à l'effectif. Le bureau du lieutenant-colonel, qui est assis derrière moi ce matin, passe en revue une liste de critères.

Si l'intéressé peut être gardé, et de nombreux facteurs sont considérés, il le sera. Dans le cas contraire, il sera libéré.

Le sénateur Pearson : Vous ne répétez pas le procès une fois qu'il entre dans la filière civile?

Col McAlea : C'est juste.

Le sénateur Pearson : Je pense que votre liste est importante. Je trouve souvent que la loi a en partie comme mission d'instruire. Il y a dans les Forces canadiennes des situations où intervient l'autorité et où les risques d'abus n'ont pas d'équivalent dans la société civile. Je pense en particulier au cantonnement. C'est une situation dangereuse. Vous essayez de faire comprendre à celui qui est cantonné chez un civil qu'il doit se conduire comme il faut. Ceci ne me donne pas les mêmes inquiétudes que mes collègues. Vous devez faire comprendre aux soldats et à l'administration des Forces canadiennes qu'il y a des risques supplémentaires parce qu'ils évoluent dans une culture différente.

Col McAlea : Exactement. Le cantonnement est une situation domestique. Cela peut prendre de nombreuses formes. Dans certains cas de cantonnement, nous sommes les bienvenus. Dans d'autres cas, les habitants d'un pays peuvent ne pas être tellement contents de notre présence. Nous devons envoyer un message ferme, comme vous le dites.

Le sénateur Pearson : Le message est que l'on ne permet pas ce genre de choses. Cela met en cause beaucoup de questions que nous étudions en ce qui a trait à l'exploitation sexuelle des enfants par des forces armées qui ont été déployées ailleurs. Je ne parle pas des Forces canadiennes, Dieu merci, mais d'autres forces comme celle de l'ONU, et cetera. Votre message doit être le plus ferme possible.

Col McAlea : Comme Mme Campbell l'a dit, ces infractions ne sont pas sexuelles en soi, mais elles peuvent donner lieu à des situations qui le sont.

Le sénateur Joyal : Au sujet des observations du sénateur Rivest sur la politique énoncée à l'appendice 4, Protocole d'agression sexuelle — guide pour comprendre la victime adulte, je voudrais consigner au compte rendu une lettre qui a été distribuée ce matin et qui est signée par le président du Centre canadien de ressources pour les victimes de crimes, Steve Sullivan. Cette lettre est datée du 26 octobre. J'ignore si les témoins ont eu copie de la lettre. Nous devrions donner au témoin l'occasion de la lire et nous reviendrons sur la question plus tard.

Le président du Centre canadien de ressources pour les victimes de crime signale des éléments qui manquent dans cette politique et dont nous devrions tenir compte dans notre étude du projet de loi, surtout en ce qui a trait à l'indemnisation qui n'existe pas et qui ne fait pas partie de la politique militaire relativement aux victimes. Nous devrions obtenir une réponse officielle à cette lettre.

Je voudrais par ailleurs soulever une question qui découle du rapport du juge Antonio Lamer. Nous l'avons soulevée quand le ministre a témoigné la semaine dernière. Je m'intéresse à la recommandation du juge Lamer au sujet de la surveillance civile des décisions militaires. Dans ce projet de loi, on accorde aux autorités militaires des pouvoirs sans aucune surveillance, surtout le pouvoir de retarder l'inscription au registre d'une personne qui est trouvée coupable et dont le nom devrait figurer au registre, et les diverses raisons ou contextes dans lesquels ce retard peut être accordé : le contexte des opérations militaires et le risque pour la sécurité nationale.

Je veux me convaincre que le pouvoir qu'on a accordé au chef des militaires respecte le critère établi par le juge Lamer. C'est à bon droit que nous posons cette question. D'autres autour de la table ont déjà mentionné le rapport. Il est important pour nous de nous assurer que si nous adoptons le projet de loi tel quel, nous n'entrons pas en contradiction avec l'esprit de la recommandation du juge Lamer en matière de surveillance civile lorsque nous accordons un pouvoir spécial, surtout celui qui est envisagé ici.

Si cette affaire était traitée dans l'univers civil, si une telle demande était faite, elle le serait dans le cadre d'un arbitrage qui offrirait la capacité de mettre dans la balance les arguments pour et contre avant de rendre une décision. Je ne suis pas certain que la manière dont les pouvoirs sont accordés aux militaires permet d'établir l'équilibre que nous retrouverions dans le contexte civil. Autant je comprends le principe ou les raisons, je veux quand même être convaincu que le système respecte le critère établi et que tout se fait dans les normes.

Col McAlea : Votre question est double. Je ne prétends pas parler au nom de l'ex-juge en chef Lamer, mais son bon travail portait surtout, à mon avis, sur le système de justice militaire, sur cette partie du Code criminel. Il a aussi abordé la question des griefs, ainsi que le processus de plaintes contre la police militaire.

En ce qui a trait aux tribunaux — je veux dire par là les cours martiales —, leur administration de ces dispositions sera supervisée par deux organismes : la Cour d'appel de la cour martiale et la Cour suprême du Canada. Les appels mettant en cause les exemptions ou les ordonnances de cessation peuvent aboutir devant ces instances. J'espère que vous comprenez que les décisions des cours martiales peuvent donner lieu à une surveillance civile.

Pour ce qui est des décisions qui peuvent être prises par le chef d'état-major de la Défense, vous avez raison, ce n'est pas aussi clair. Si vous le permettez, je vais vous donner quelques exemples pour vous aider à comprendre comment tout cela fonctionne. Je vous invite à examiner l'article proposé 203.15, qui traite de la suspension de délais par le chef d'état-major de la Défense. L'article comprend quatre alinéas numérotés de a) à d). Les trois premiers traitent du pouvoir de suspendre les délais applicables aux droits de la personne reconnue coupable. Aux termes de l'alinéa a), disons que j'ai été reconnu coupable d'une infraction et que je suis encore sous le coup de la peine lorsque ce projet de loi entre en vigueur. J'ai le droit de demander une dispense. Si je suis en Afghanistan, je ne peux pas exercer ce droit.

Le chef d'état-major de la Défense serait un peu comme un contrôleur du trafic aérien. Il tirerait une conclusion fondée sur les faits. Il dirait : « Le colonel McAlea est en Afghanistan; il est incapable de demander la dispense prévue à l'alinéa a) et je vais donc suspendre le délai pour la présentation de sa demande. » Normalement, le délai pour demander une dispense est d'environ un an.

Si je suis en Afghanistan pendant neuf mois, le chef aurait le pouvoir de suspendre le délai jusqu'à mon retour. Mon droit de demander une dispense n'est pas perdu parce que j'ai un droit préexistant au titre d'une autre loi du Parlement.

Je vous invite à voir dans ces dispositions un mécanisme permettant d'éliminer un conflit. Pour ce qui est de cet aspect particulier, nous n'enlevons aucun droit à un délinquant parce qu'il obéit à un devoir établi aux termes d'une autre loi du Parlement.

De même pour l'alinéa b), si j'ai été reconnu coupable et qu'une décision a été prise et que, dans ce contexte, j'interjette appel d'une ordonnance qui a été rendue ou d'une ordonnance de révocation, là encore, cette demande préserve mon droit d'en appeler. Le chef applique donc un processus assez mathématique. Pour me donner encore une fois en exemple, on poserait la question : quelles sont les obligations du colonel McAlea? Il doit être en Afghanistan de la date X à la date Y. Ces dates entrent-elles en conflit avec son droit d'en appeler? Dans l'affirmative, le délai sera suspendu jusqu'à son retour. À son retour, la période recommence à courir.

Les trois premiers alinéas visent à préserver les droits des personnes reconnues coupables.

Le quatrième alinéa est différent; il traite des rapports. Pour ce qui est de l'application rétroactive du projet de loi, si je n'ai pas payé la totalité d'une amende lorsque la mesure entre en vigueur, je serai sous le coup de la peine au moment de l'entrée en vigueur du projet de loi et je serai tenu de me conformer à la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels.

Si j'ai une obligation opérationnelle, par exemple, si je ne peux pas être au Canada ou si je ne peux pas venir à Ottawa, si je me trouve au Nord du 60e parallèle pendant les six prochains mois et que je ne peux pas consulter mon avocat, le Code de discipline militaire stipule alors : « Votre obligation opérationnelle est X. Les délais applicables à vos obligations aux termes de la loi sont de Y. Il y a conflit et je vais donc suspendre le délai jusqu'à ce que vous ayez accompli vos obligations. Dès votre retour, vous devrez vous conformer. »

Le chef d'état-major doit-il faire rapport de cela? Y a-t-il une exigence officielle? Aux termes de l'article 18 de la Loi sur la défense nationale, le chef d'état-major est chargé de l'administration et du contrôle des Forces canadiennes et il rend des comptes au ministre à cette fin.

Y a-t-il surveillance? Oui. C'est la surveillance traditionnelle que nous appelons la responsabilité ministérielle. Le chef d'état-major de la Défense, en l'occurrence, est responsable devant le ministre.

L'article proposé 203.16 est différent. Cette disposition traite des gens qui sont déjà inscrits au registre. Ils ont fourni tous les détails : leur nom au complet, date de naissance, adresse, caractéristiques distinctives, lieu de travail, résidence principale et secondaire. Tous ces renseignements sont consignés au registre.

Cette disposition traite des gens qui se déplacent à l'intérieur du Canada ou qui quittent le pays. En pareil cas, nous demandons : la divulgation de ce renseignement pourrait-elle causer un tort quelconque? Le tort en question serait de compromettre la sécurité internationale, les relations internationales, ou bien une troisième catégorie, une classe d'activités qui seront déterminées par règlement, lequel devrait bien sûr être promulgué par l'avocat du gouvernement.

En l'occurrence, pour des raisons pratiques, si l'affaire met en cause un membre des FC qui doit être envoyé à l'extérieur du pays, le chef dirait : « N'informez pas le registre de la date de votre départ ». En somme, c'est le chef d'état-major qui rendrait une décision en application de cette disposition. Si la personne se déplace à l'intérieur du pays, le chef pourrait dire : « Ne dites pas au registre où vous allez ni quand vous partez. » Le chef peut faire cela pour diverses raisons. Ce peut-être parce que nous accueillons une réunion du G8 dans une partie précise du pays, disons à Yellowknife, ou bien à une certaine date. Certains aspects de la réunion peuvent être secrets. Si un militaire assujetti au registre doit fournir ces renseignements, alors il pourrait être forcé de divulguer au registre des renseignements secrets. Toutes ses coordonnées sont déjà connues du registre : sa résidence habituelle, son lieu de travail, son apparence, ses noms d'emprunt, ses éventuels tatouages et cicatrices. L'article proposé 216 est assez restreint; il traite du lieu et de la date du déplacement. Dans certaines circonstances, si ces renseignements sont divulgués, cela pourrait nuire à la sécurité nationale ou aux relations internationales, ou compromettre une opération. C'est ainsi que l'on fonctionnerait en pareille circonstance.

La question suivante est de savoir s'il y a surveillance. Les faits et gestes du chef ne seraient pas surveillés par un tribunal, mais je soutiens que le ministre surveille les agissements du chef. Tous les ministres, de mémoire d'homme, ont été des civils. Si l'on remonte suffisamment loin en arrière, on trouverait des militaires qui ont occupé le poste de ministre de la Défense.

J'espère que cette description répond à vos préoccupations. Il est clair que la surveillance exercée à l'endroit des cours martiales est beaucoup plus précise qu'elle ne l'est pour l'exercice des pouvoirs conférés au chef d'état-major de la Défense. Les cours martiales sont supervisées par la Cour d'appel de la cour martiale, qui est composée de juges de nominations fédérales, et en fin de compte par la Cour suprême du Canada. Les décisions du chef d'état-major de la Défense, aux termes des articles proposés 203.15 et 203.16, sont effectivement supervisées par le ministre. Le ministre est comptable devant ses collègues du cabinet et, en dernière analyse, devant le premier ministre.

La présidente : Si une infraction est commise à Yellowknife, comme vous l'avez dit, la GRC serait-elle au courant? Le chef d'état-major de la Défense le dirait-il à la GRC?

Col. McAlea : La GRC possède la base de données. À des fins d'enquêtes, elle peut prendre connaissance de ce qui s'y trouve en tout temps.

La présidente : Mais est-ce qu'on leur dit?

Col. McAlea : Si on leur dit où se trouve le militaire?

La présidente : Non, quand l'infraction est commise?

Col. McAlea : Je ne comprends pas votre question.

La présidente : Si une infraction sexuelle est commise à Yellowknife, le chef d'état-major de la Défense le dirait-il à la GRC ou bien le chef limiterait-il l'accès à ce renseignement aux Forces canadiennes seulement?

Col. McAlea : Je ne me suis peut-être pas bien expliqué. Je donnais l'exemple de Yellowknife, de quelqu'un qui habite à cet endroit et qui figure déjà au registre et qui est obligé de déménager à cause de son devoir imposé par la Loi sur la défense nationale. Il faut alors décider si la divulgation de ce renseignement crée un conflit entre les deux lois? La meilleure manière d'envisager la fonction du chef d'état-major de la Défense dans ce contexte, c'est de le voir un peu comme un contrôleur du trafic aérien. Il est visé par deux régimes juridiques parlementaires imposant des obligations aux Canadiens.

Dans le contexte militaire, il y a possibilité que ces régimes entrent en conflit, de sorte que lorsque le chef d'état- major de la Défense exerce son autorité, c'est pour trancher entre les obligations conflictuelles.

La présidente : La police locale ne saurait pas si cette personne est inscrite au registre.

Col McAlea : Elle le saurait si elle consultait le registre.

La présidente : La police n'est pas avisée. Saurait-elle même que cette personne se trouve à Yellowknife?

Col McAlea : Peut-être, peut-être pas; vous avez raison. La police saurait que la personne en question est dans les Forces canadiennes. Par exemple, si la police fait une enquête et est à la recherche de cette personne et qu'elle veut savoir où se trouve cette personne et à quelle date, nous pourrions fournir ces détails parce que le militaire en question serait en service.

Le sénateur Ringuette : Je veux une précision au sujet de cette affaire de Yellowknife. Si je comprends bien, vous nous dites que si un militaire est trouvé coupable d'une infraction au titre du Code criminel et de la Loi sur la défense nationale et qu'il est inscrit au registre, cette personne pourrait être dispensée.

La présidente : Non, ce n'est pas une dispense.

Le sénateur Ringuette : Il y aurait un délai avant de se conformer au registre.

Col McAlea : C'est possible.

Le sénateur Ringuette : Ce délai serait-il accordé par le chef d'état-major de la Défense?

Col McAlea : Il est accordé par cette loi.

Le sénateur Ringuette : Oui, mais la personne autorisée à l'accorder aux termes de la loi serait le chef d'état-major de la Défense?

Col McAlea : Je ne décrirais pas la situation en ces termes. Je décrirais le chef, par exemple, comme un caissier.

Le sénateur Ringuette : Ce n'est pas la question que je pose et je ne fais pas cette comparaison avec un contrôleur du trafic maritime ou aérien. Ma question est la suivante : auriez-vous dans les forces armées des gens reconnus coupables d'infractions criminelles qui auraient en même temps accès à des renseignements secrets grâce à une autorisation de sécurité?

Col McAlea : Oui. Quelqu'un peut perdre son autorisation de sécurité en conséquence de l'infraction criminelle. C'est exact. Je pourrais peut-être revenir sur ce que j'ai dit tout à l'heure. Si quelqu'un est reconnu coupable d'une infraction, une cour martiale est habilitée à congédier cette personne, à l'exclure des forces armées. Si la cour martiale choisit de ne pas exercer ce pouvoir, alors les autorités administratives des FC examinent la situation.

Comme vous pouvez le voir sur la liste, 17 personnes énumérées ont été reconnues coupables d'infractions de nature sexuelle depuis 2000. Dix de ces personnes ont été congédiées des Forces canadiennes. Six font l'objet de ce qu'on appelle une « mise en garde et surveillance ». Ils ont été avertis. On leur a donné des instructions relativement à leur rendement médiocre. C'est comme la probation. Si ces personnes ont une bonne conduite tout au long de la période, elles peuvent demeurer dans les forces armées. Si elles ne se conduisent pas bien, elles en seront exclues. Les six personnes que vous voyez sur la liste peuvent être congédiées.

Le sénateur Ringuette : Ma question porte sur la liste actuelle qu'on nous a remise : les six personnes en probation ont-elles encore leur autorisation de sécurité même si elles ont été reconnues coupables?

Col McAlea : Peut-être que oui, ou peut-être que non, comme le sénateur Andreychuk le dit à juste titre. Tout dépend des circonstances et de leur poste.

Le sénateur Andreychuk : Le registre est un outil d'enquête. La personne se trouve à Yellowknife. Les militaires ont fait certains choix, mais la personne se retrouve dans la rue et commet une autre infraction sexuelle. La police n'a aucun droit : c'est discrétionnaire, elle peut consulter le registre et trouver les mêmes renseignements qu'elle trouverait au sujet d'un civil.

Deuxièmement, si cet homme est envoyé en Afghanistan et se promène dans la rue à Kaboul, comment la police là- bas sait-elle qu'il est inscrit au registre ou qu'il est assujetti à des contraintes résultant de violations antérieures? De quels outils d'enquête disposent les militaires? Je comprends ce qu'il en est dans le contexte civil.

Col McAlea : Je peux répondre en partie, après quoi je vais demander à Mme Campbell de poursuivre. La police militaire des Forces canadiennes est au courant.

Le sénateur Andreychuk : Les autorités civiles afghanes sont-elles au courant?

Col McAlea : Je vais le demander à Mme Campbell. Elle peut répondre au sujet des services de police étrangers.

Mme Campbell : Il n'y a aucun moyen pour la force de police étrangère de connaître ce renseignement.

La présidente : Elle ne devrait pas l'avoir.

Le sénateur Andreychuk : Nous formons la police afghane.

Mme Campbell : Cet outil est conçu à l'intention des corps policiers canadiens. Il est censé servir aux enquêtes au pays.

La présidente : Je veux rappeler à tout le monde qu'il est 12 h 30 et que le Sénat siège à 13 h 30.

Le sénateur Joyal : Je vous remercie de votre explication. Je suis toujours préoccupé par le fait que le chef d'état- major prend une décision lourde de conséquences sans avoir à la signaler sauf, comme vous l'avez dit, en vertu de l'article 18 de la loi, que je n'ai pas sous les yeux.

Il s'agit sans doute d'une disposition de nature générale. Peut-être pourriez-vous me la citer pour les besoins du compte rendu car il s'agit à mon avis d'un facteur déterminant dans la décision que prendra le comité, si nous établissons quelle est la responsabilité générale du ministre ou ce qu'il doit communiquer au ministre d'après l'article 18 de la loi.

Je cite :

Le gouverneur en conseil peut élever au poste de chef d'état-major de la Défense un officier dont il fixe le grade. Sous l'autorité du ministre et sous réserve des règlements, cet officier assure la direction et la gestion des Forces canadiennes.

Sauf ordre contraire du gouverneur en conseil, tous les ordres et directives adressés aux Forces canadiennes pour donner effet aux décisions et instructions du gouvernement fédéral ou du ministre émanent, directement ou indirectement, du chef d'état-major de la Défense.

Autrement dit, c'est le chef d'état-major de la Défense qui assure la direction et la gestion des Forces canadiennes. C'est un mandat très vague. C'est un mandat général que nous devrions examiner de plus près. « ... dont il fixe le grade. Sous l'autorité du ministre et sous réserve des règlements... » Quel article du règlement obligerait le chef d'état-major de la Défense à en faire rapport au ministre?

Col McAlea : Aucun. Je sais que nous sommes à court de temps, mais l'article 4 de la loi énonce les fonctions du ministre. Il faut à mon avis considérer les deux dispositions ensemble.

Le chef d'état-major, c'est le mécanisme. Les articles 203.15 et 203.16 fixent les directives et les critères. Le chef d'état-major applique les uns et les autres. Il n'y a pas de conflit : le chef d'état-major ne prend pas de mesures. S'il y a conflit, il se contente d'en prendre acte. À partir de là, le mécanisme s'enclenche.

Ni dans cette loi ni dans d'autres, il n'a le pouvoir de prendre des règlements. Le chef d'état-major n'est que l'organe qui évalue les critères applicables du Parlement.

Il examine la situation d'un délinquant qui a été condamné et s'il estime qu'il y a atteinte à ses droits aux termes de l'article 203.15, il en fait la constatation. En vertu de la loi, il fixe alors la date à laquelle les droits cesseront d'être atteints et en informe le grand prévôt. Dès lors, la machine se met en marche, si vous voyez ce que je veux dire.

Le sénateur Joyal : Oui. Merci de votre explication. Peut-on obtenir le document du juge Lamer?

La présidente : Oui, nous pouvons en obtenir une copie.

Le sénateur Cools : J'aimerais souhaiter la bienvenue aux témoins et remercier les militaires de ce qu'ils font pour le pays. Bien des gens comprennent mal que l'armée est la plus ancienne entité sociale au monde qui soit distincte et mobile. Elle peut déplacer un hôpital; déménager un procès et tout un appareil judiciaire et même tout un appareil de police.

Beaucoup de ces appareils existent pour de bonnes raisons. On veut en effet éviter qu'un soldat basé à l'étranger ne relève de l'appareil judiciaire de ce pays. C'est une entreprise d'envergure difficile à gérer.

Je vais donner un exemple qui ne concerne pas l'armée canadienne. Un jour, j'étais à l'étranger et un des gigantesques porte-avions américains est entré au port. La ville a été littéralement envahie par ces jeunes. Oui, ce sont des soldats, mais pour moi ce sont des enfants.

La police militaire patrouillait les bars. Après l'heure du départ du navire, des policiers sont restés pour rassembler ceux qui n'avaient pas pu rejoindre leur bord au lieu de les laisser entre les mains de la police locale.

Il faut avoir une énorme organisation pour faire cela, me suis-je dit. Ils font de l'excellent travail et nous aussi. Si je dis cela, c'est pour bien faire comprendre le concept de la mobilité et de la transférabilité, qu'il s'agisse de monter un camp ou une ville du jour au lendemain.

Les questions sont de nature différente. Je ne suis pas convaincue que ce projet de loi était nécessaire, mais c'est une autre chose. J'en sais pas mal à propos des déviances sexuelles et aussi des délinquants sexuels. Je crains que souvent on met dans le même sac une simple inconduite sexuelle et la déviance d'un prédateur sexuel, dont il faut à bon droit avoir peur.

Un déviant sexuel psychopathe dépasse l'entendement. Pour des raisons idéologiques, on accorde plus de gravité aux infractions de nature sexuelle qu'aux autres. Dans l'esprit des gens, on a fait l'amalgame entre pincer un saint et une infraction grave.

Entre 1987 et 1997, il y a eu une multitude de condamnations injustifiées au pays. Il y a eu une épidémie de ce que j'appellerais de fausses accusations de sévices sexuels. Pendant une dizaine d'années, cela a été l'arme de prédilection. De fait, dans une autre affaire devant un autre comité, nous avons entendu des témoins de la Société de protection de l'enfance, je crois. Ils nous ont dit que dans deux cas sur trois, les accusations sont fausses ou non étayées.

J'ai deux questions. Premièrement, combien de délinquants sexuels dans l'armée sont des cas extrêmement graves? Autrement dit, les infractions sexuelles dans l'armée sont-elles plus nombreuses que dans le reste de la population ou sont-elles équivalentes?

Enfin, il y a trois questions. Deuxièmement, avez-vous une liste des accusations injustifiées portées contre des soldats ou de fausses accusations d'inconduite à caractère sexuel? Si une liste comme celle-là existe, avez-vous une idée des chiffres? Je serais portée à croire que vu la nature du métier de militaire, les soldats risquent plus d'être victimes de ces accusations.

Troisièmement, pourriez-vous me parler des femmes et des infractions sexuelles et me dire quel est le pourcentage des infractions sexuelles militaires qui sont commises par des femmes? La prémisse du débat, c'est que seuls les hommes sont des délinquants sexuels. Certains d'entre nous savent depuis longtemps que des femmes commettent des infractions sexuelles, mais on commence enfin à l'admettre dans les écrits et dans le système pénal.

Quand je travaillais dans les services sociaux, on arrivait à peine à intéresser un procureur à une infraction sexuelle commise par une femme. Par exemple, j'ai connu le cas d'un adolescent à l'école secondaire qui a eu une liaison sexuelle avec son enseignante, âgée de 23 ans. J'ai rencontré plusieurs autres cas, mettant parfois en cause des enfants.

C'était pratiquement impossible parce qu'on n'arrivait pas à croire que les femmes pouvaient agir de la sorte, l'affaire la plus célèbre étant évidemment l'affaire Bernardo-Homolka, où il y a eu toute une série de négociations de plaidoyers précisément pour cette raison.

Je comprends que vous n'ayez peut-être pas l'information mais, pour moi, les Forces canadiennes sont par définition une entité difficile à gérer. Avez-vous quelque renseignement que ce soit sur les infractions sexuelles commises par des femmes et sur des accusations frivoles ou injustifiées? Si je pose la question, c'est que j'ai eu connaissance de beaucoup de cas comme ceux-là.

Dans les années où j'ai fait beaucoup de travail sur le divorce et la garde, j'ai reçu beaucoup de lettres de jeunes soldats qui se sentaient harcelés par des poursuites de divorce. Je vous lance cela. Il y a là des questions, mais si vous n'avez pas les réponses, je comprendrais, et peut-être pourrons-nous quand même adopter ceci. Sachez que j'apprécie le travail que vous faites.

Col McAlea : Sénateur Cools, je vous remercie beaucoup de vos propos. Vous m'avez posé trois questions, si j'ai bien compris : la première au sujet de la gravité des infractions, la deuxième à propos de accusations injustifiées et la troisième au sujet des femmes et des infractions sexuelles.

Je pense pouvoir vous donner une réponse partielle à chacune d'elles. En ce qui concerne la gravité des infractions, je ne sais pas si vous avez pu consulter le tableau que nous avons publié.

Le sénateur Cools : Non, je ne l'ai pas vu.

Col McAlea : Je peux peut-être le commenter pour vous.

Le sénateur Cools : Ce serait une bonne chose de porter une partie de l'information au compte rendu, si vous ne l'avez pas déjà fait. J'aimerais savoir si vous connaissez la nature et la gravité des déviances sexuelles. Nous avons une assez bonne idée des pourcentages dans la population : un sur tant de milliers d'habitants.

Col McAlea : Je ne suis pas un spécialiste des sciences sociales et je ne prétends pas m'y connaître. J'en sais trop peu pour établir pour vous une hiérarchie de l'atrocité. Je vous invite plutôt à prendre connaissance des infractions. Dans 17 cas, un accusé a été condamné. Vous pouvez sans doute juger mieux que moi où il se situe dans votre gradation.

Je ne vois aucun crime de nature sérielle, mais on ne le verrait pas forcément. Je peux vous fournir l'information. Si vous avez d'autres questions, nous pouvons vous communiquer les réponses.

Pour ce qui est des accusations justifiées, la Loi sur la défense nationale, à l'article 96, prévoit déjà que quiconque porte une fausse accusation commet une infraction. Le Règlement sur le harcèlement sexuel prévoit la possibilité d'une fausse accusation. C'est pourquoi nous tenons tellement à ce que les voies régulières soient suivies.

Par exemple, si quelqu'un m'accuse d'avoir harcelé quelqu'un, j'ai le droit de connaître les faits. Je suis protégé en ce sens que j'ai le droit de savoir en quoi tient l'accusation et qui la fait. Évidemment, ce n'est pas une garantie, mais c'est une des façons d'éviter les fausses accusations. Pour ce qui est des chiffres, je ne les ai pas ici. Il est possible que nous puissions les trouver. Si vous le voulez, nous pouvons nous renseigner.

Pour ce qui est des femmes et des infractions sexuelles, je ne suis pas un spécialiste non plus. Pour avoir donné des cours de sensibilisation au harcèlement aux soldats, je peux vous dire que par le passé nous étions sexistes. Comme vous l'avez dit, nous postulions que le harcèlement se faisait seulement dans un sens et que c'étaient les hommes qui harcelaient les femmes.

Aujourd'hui, c'est différent. Cela ne dépend plus seulement du sexe de la personne. Cela dépend de l'orientation sexuelle. Aujourd'hui, nous disons qu'il y a quatre cas de figures : un homme qui harcèle une femme, une femme qui harcèle un homme, une femme qui harcèle une femme ou un homme qui harcèle un homme. Nous envisageons toutes les possibilités. Nous prenons la chose au sérieux parce que ces actes ont un grand pouvoir destructeur.

Dans notre métier, on dit à la blague que le chef d'état-major a peu de pouvoirs en ce qui concerne la solde et d'autres choses, mais qu'il peut nous envoyer à notre mort. Vu la gravité des enjeux, on ne peut pas tolérer les abus. Le harcèlement sexuel comme l'exploitation sexuelle sont des exemples de la pire catégorie d'abus qui soit, surtout dans une structure hiérarchique.

Nous avons un code de discipline militaire pas parce que ça nous plaît, mais bien parce que c'est nécessaire. Peut-on imaginer quelque chose de plus absurde que d'ordonner à quelqu'un de se lancer contre une mitrailleuse? Ce qui est plus absurde encore c'est d'obéir à cet ordre. Nous faisons un travail de socialisation de nos recrues et nous les formons de manière à ce qu'ils agissent parfois contre leur instinct de conservation. S'ils ne peuvent pas travailler contre leur propre instinct, ils ne peuvent pas accomplir le travail que le gouvernement du Canada attend d'eux.

Le Code de disciplinaire militaire — et les infractions sexuelles en sont une catégorie — est un des outils de contrôle du comportement qui sert à socialiser les soldats de manière à ce qu'ils se conduisent d'une façon qui leur permette d'accomplir les missions difficiles que nous attendons d'eux.

Le sénateur Cools : J'étais au courant à propos du harcèlement sexuel, mais j'allais un peu plus loin et je parlais de cas de fausses accusations d'agression. Naguère, on appelait ça un viol. Aujourd'hui, je ne sais trop ce qu'on entend par agression sexuelle. C'était à cela que je pensais : quelqu'un qui a pointé du doigt un gars ou une fille dans l'armée disant que lui ou elle l'avait agressé sexuellement. Après enquête, on s'aperçoit qu'il ou elle était à 20 milles de là.

Il y a quelques années, j'ai lu la décision d'un juge dans laquelle il disait qu'il y avait eu ni rapport sexuel ni agression; comment alors pouvait-il conclure à une agression sexuelle? Un autre juge a toutefois écarté la décision et conclu à une agression sexuelle.

Un jour peut-être le comité devrait-il entreprendre une étude de l'application de ces articles. Je ne cesse de le suggérer parce que quand le mot « viol » et d'autres termes de ce genre ont été éliminés en faveur d'« agression sexuelle », c'était précisément parce que les auteurs de la loi à l'époque voulaient qu'on se concentre davantage sur l'agression que sur la dimension sexuelle. Ce n'est pas ce qui s'est passé. Désormais, l'agression sexuelle va du simple pincement à des actes graves terrifiants.

En ce qui concerne la négociation de plaidoyer, j'aimerais savoir quelle est sa place ici. J'ajouterai aussi, madame la présidente, comme je l'ai déjà dit, qu'il s'agit d'un secteur de l'appareil de justice pénale qui a grand besoin d'un examen parlementaire. Il n'y a pas eu d'étude parlementaire de la négociation de plaidoyer depuis longtemps.

Jadis, l'inculpation d'homicide ne pouvait pas faire l'objet d'une négociation de plaidoyer; de nos jours, ça se fait. Il y a quantité de choses. À l'époque, certaines catégories de meurtres ne pouvaient pas être jugées non plus par un juge seul. Cela se fait aujourd'hui sans qu'on ait examiné la chose.

Je vous lance cela. La négociation de plaidoyer est quelque chose que l'on devrait examiner. Cela dit, on pourra y revenir et si vous avez autre chose, faites-nous le parvenir.

Le sénateur Ringuette : Quelle est la période la plus longue d'affectation d'un militaire à l'étranger?

Col McAlea : Voulez-vous dire dans le cas d'une opération ou d'une affectation?

Le sénateur Ringuette : Les deux.

Col McAlea : C'est différent.

Le sénateur Ringuette : Oui, une opération c'est plus court qu'une affectation.

Col McAlea : C'est juste.

Le sénateur Ringuette : Quelle est la période la plus longue d'une affectation, à votre connaissance?

Col McAlea : On vise six mois, mais elles sont souvent plus longues et peuvent durer sept ou huit mois. C'est différent de ce qui se faisait pendant la Deuxième Guerre mondiale, où on pouvait être absent pendant six ans. Pour des raisons familiales, de cheminement professionnel et de bien-être des soldats, on rallonge normalement par période de six mois. C'est la règle.

Le sénateur Ringuette : Dans la pratique, si un soldat est affecté en Afghanistan, et on prend toujours l'exemple de ce pays, pendant six mois, on ne le prend pas au Canada pour le parachuter en Afghanistan. Il y a des va-et-vient constants, des ravitaillements, n'est-ce pas?

Col McAlea : Oui.

Le sénateur Ringuette : Je dois être honnête avec vous. J'ai des problèmes à propos du délai et je ne sais pas si c'est le bon mot. J'ai des réserves à propos de l'autorité du chef d'état-major. Votre ministère et le ministre nous ont dit la semaine dernière que cette loi est censée être le pendant du Code criminel et de la Loi sur les délinquants sexuels.

Pour moi, les articles 203.15 et 203.16 ne sont pas un pendant et ne sont pas nécessaires non plus à cause d'un exemple donné tout à l'heure.

[Français]

En français, nous avons un dicton qui en dit beaucoup : le pape se remplace. Je crois qu'un officier peut se faire remplacer pour se conformer à la loi, tout comme les citoyens civils doivent s'organiser pour se conformer à la loi du Code criminel.

[Traduction]

Col McAlea : Je pense pouvoir apaiser vos inquiétudes et expliquer les autres parties. Je ne sais pas si je peux vous répondre au complet. Je vous inviterais à examiner l'article 203.2 à la page 19 du projet de loi. Il est dit que le gouverneur en conseil peut prévoir quantité de choses par règlement.

Il est notamment question des bureaux d'inscription. Par exemple, nous avons l'intention d'en désigner à l'étranger. Dans le cas de quelqu'un qui va en Afghanistan, le chef d'état-major n'a pas besoin d'exercer son pouvoir de suspendre en vertu de l'article 203.15 : Cela pourrait se faire à Kaboul ou à Kandahar.

Ce ne sera pas toujours le cas. L'intéressé devra peut-être se rendre à un endroit où il n'y a pas de bureau d'inscription, mais nous espérons réduire le nombre de cas de ce genre dans toute la mesure du possible.

[Français]

Le pape se remplace, vous avez raison. Je suis d'accord.

[Traduction]

Il y a aussi un autre aspect. Celui qui a été condamné pour une infraction sexuelle et qui a reçu l'ordre de s'inscrire voit son cas examiné par les autorités administratives pour déterminer s'il est apte au service.

Une des conditions est que le soldat doit être capable d'accomplir toute fonction légalement exigée de lui. Si nous disons vous êtes au registre, vous ne partez pas. Ça signifie que quelqu'un d'autre doit quitter sa famille et partir à sa place. La question est de savoir si le soldat est vraiment apte.

Le sénateur Ringuette : Il y a une période de 15 jours ici. Il y a déjà beaucoup de flexibilité.

Col McAlea : Peut-être. Si l'ordre entre en vigueur quand le soldat est en Afghanistan, par exemple, si quelqu'un est sous le coup d'une peine quand le projet de loi entre en vigueur, le soldat pourrait se voir demander par le grand prévôt de s'inscrire, et la période applicable peut survenir pendant qu'il est à l'étranger.

Il ne lui est pas possible de contester; il se peut qu'il ne soit même pas au pays quand l'ordre est donné ou qu'il prend effet. Par exemple, je suis sous le coup d'une peine à telle date et c'est la date à laquelle le projet de loi S-39 entre en vigueur : le grand prévôt des Forces canadiennes dispose d'un an pour m'envoyer un avis et j'ai un an pour répondre.

Si je ne réponds pas, la loi s'applique et m'oblige à me présenter et cela peut arriver pendant que je suis à l'étranger. Il se peut que je ne sois même pas au pays pour me présenter. Comme je l'ai dit, le problème pourra être évité si le gouverneur en conseil désigne des bureaux d'inscription à l'étranger.

Ce pourra être en Bosnie ou en Afghanistan. J'espère que l'on continuera de voir les choses en perspective. Actuellement, on parle de sept personnes sur 86 000 adultes. Les risques qu'ils seront à l'extérieur du pays sont faibles.

Le sénateur Ringuette : C'est à l'intérieur des forces armées. C'est peut-être aussi en ce qui concerne une cour martiale mais il peut aussi y avoir des situations où le soldat ne va pas à la cour martiale mais va dans le système civil et il est sujet au registre.

Col McAlea : Oui.

Le sénateur Ringuette : C'est pour ça que je dis que si nous avons une loi miroir, alors il faut que ce soit une loi miroir parce que vous pourriez avoir une situation où deux militaires, un en cour martiale et l'autre devant un tribunal civil, sont accusés de ma même infraction mais n'ont pas à suivre les mêmes règles.

Col McAlea : Tout ce que je peux vous dire c'est répéter ce que le sénateur Pearson et le ministre Graham m'ont dit. Nous essayons d'appliquer les mêmes règles aux Forces canadiennes tout en tenant compte des contraintes opérationnelles spéciales. Le problème actuellement est qu'aucun d'eux ne figure au registre. Il y a des gens qui commettent des infractions sexuelles et la cour martiale ne peut pas leur ordonner de s'inscrire. Ces gens-là sont invisibles pour la police à l'heure actuelle.

Une décision de principe a été prise, une bonne à mon avis, voulant qu'il soit désormais inscrit. Cela crée un conflit entre deux régimes législatifs fédéraux. Les dispositions qui ont été créées ont pour but de résoudre ce conflit. Je conviens avec vous que les obligations ne sont pas identiques. Nous estimons que cette proposition supprime le conflit entre obligations conflictuelles.

[Français]

La présidente : Je vous remercie de nous avoir accordé autant de temps. Comme vous voyez, il y a encore beaucoup de questions qui demandent des réponses. Merci de votre présence aujourd'hui.

[Traduction]

Sénateurs, nous avons demandé à l'Association du Barreau canadien de comparaître devant nous. Elle a refusé. Même chose pour le Barreau du Québec et l'Association canadienne de la police professionnelle. Ils ont dû refuser parce qu'il s'agit des Forces canadiennes.

Hier, nous avons entendu William Trudell. Nous avons une déclaration de M. Sullivan du Centre canadien des ressources pour les victimes de crimes et la Société John Howard du Canada. Nous avons invité la société, qui a refusé. Nous allons demander à l'ombudsman militaire de comparaître devant nous.

Mercredi prochain, comme vous le savez, le premier ministre de la France sera ici dans l'après-midi avec sa délégation. Le groupe a demandé à rencontrer les membres de l'Association interparlementaire Canada-France et d'autres parlementaires qui sont libres. D'autres sénateurs ne peuvent pas y être. J'ai ici une liste de cinq noms. Je pense qu'il vaut mieux ne pas procéder à l'étude article par article mercredi. Nous ne siégerons pas mercredi. Nous siégerons plutôt jeudi matin et nous allons entendre l'ombudsman s'il peut comparaître devant nous jeudi.

Nous verrons alors si nous sommes prêts à procéder à l'étude article par article. Je demande aux personnes qui ont comparu aujourd'hui de venir, si elles le peuvent, pour l'étude article par article.

Le sénateur Joyal : M. Hoover écoute attentivement. Parfois, le silence est très éloquent. Je me demande, madame la présidente, si au lieu d'attendre au moment de l'étude article par article nous ne pourrions pas demander à M. Hoover de nous aider à passer en revue la partie consacrée au Code criminel; de cette façon, si certains points doivent faire l'objet d'une discussion ou d'une réflexion plus approfondie, nous disposerions d'un peu de temps avant l'explication de M. Hoover.

La présidente : Êtes-vous libre jeudi prochain, monsieur Hoover?

M. Hoover : Je serai heureux de venir.

La présidente : Merci.

La séance est levée.


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