Délibérations du comité sénatorial permanent des
Transports et des communications
Fascicule 13 - Témoignages du 13 avril 2005
OTTAWA, le mercredi 13 avril 2005
Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunit aujourd'hui à 18 h 20 pour étudier l'état actuel des industries de médias canadiennes; les tendances et les développements émergeants au sein de ces industries; le rôle, les droits et les obligations des médias dans la société canadienne; et les politiques actuelles et futures appropriées par rapport à ces industries.
Le sénateur Joan Fraser (présidente) occupe le fauteuil.
[Français]
La présidente : Honorables sénateurs, bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial des transports et des communications. Nous poursuivons notre étude des médias canadiens d'information et du rôle que l'État devrait jouer pour les aider à demeurer vigoureux, indépendants et diversifiés dans le contexte des bouleversements qui ont touché ce domaine au cours des dernières années — notamment la mondialisation, les changements technologiques, la convergence et la concentration de la propriété.
J'aimerais accueillir très chaleureusement nos témoins.
[Traduction]
Ce soir, nous avons le plaisir d'accueillir des représentants de CanWest Global, l'une des entreprises du secteur des médias les plus importante du pays, si ce n'est la plus importante. Sont présents parmi nous, ce soir, M. Rick Camilleri, président de CanWest MediaWorks; M. Steve Wyatt, vice-président et rédacteur en chef de Global Television News; M. Gerry Nott, rédacteur en chef du bureau canadien des informations de CanWest News Service et CanWest MediaWorks Publications; M. Scott Anderson, rédacteur en chef du journal Ottawa Citizen et vice-président et rédacteur en chef de CanWest MediaWorks Publications; M. Geoff Elliot, vice-président, Affaires corporatives de l'entreprise de CanWest Global; et Mme Charlotte Bell, vice-présidente des affaires réglementaires de CanWest pour la télévision et la radio.
Merci infiniment à toutes ces personnes pour leur présence. Vous connaissez le déroulement habituel de nos travaux. Nous vous demandons de faire une déclaration préliminaire et nous vous posons ensuite des questions. Je vous laisse la parole.
M. Richard C. Camilleri, président, CanWest MediaWorks, CanWest Global Communications Corporation : Sénateurs, bonsoir. Pour me situer brièvement au sein de l'entreprise, je suis le président de CanWest MediaWorks et, de ce fait, je suis responsable de toutes les activités de CanWest dans le secteur des médias au Canada, ce qui comprend les journaux, la télévision, la radio, nos exploitations interactives sur le web et nos autres activités commerciales. Je vous suis très reconnaissant de nous avoir consacré toute une soirée. Je suis persuadé que vous aurez beaucoup de questions à nous poser. Avant de commencer, nous avons préparé quelques remarques d'introduction brefs, notamment les témoignages succincts de trois journalistes professionnels d'expérience de mon équipe, que je vous présenterai également. Le résumé écrit comporte davantage de renseignements sur le rôle joué par chacun d'entre eux dans l'entreprise.
Steve Wyatt est notre vice-président principal des actualités et de l'information à Global Television. Gerry Nott est notre rédacteur en chef du service de partage contenu de CanWest, service établi à Winnipeg et désigné comme le Canadian News Desk.
Je dois préciser, pour être exact, que M. Nott est également chargé, à l'heure actuelle, de notre bureau des actualités d'Ottawa. Vous connaissez déjà Scott Anderson comme le rédacteur en chef du journal Ottawa Citizen. Il est également le vice-président et rédacteur en chef de CanWest Publications.
En outre, pour nous aider à répondre aux questions, nous sommes accompagnés par Charlotte Bell, vice-présidente des affaires réglementaires de CanWest pour la télévision et la radio, ainsi que par Geoffrey Elliot, vice-président des Affaires corporatives.
Nous savons que CanWest ait été dépeint par plusieurs de vos témoins précédents comme une tête d'affiche des maux, perçus par certains, dont souffrent les médias canadiens. Je souhaite préciser tout de suite qu'une très grande partie de ce que vous avez entendu dire sur CanWest est manifestement faux ou considérablement exagéré.
Nous n'avons aucune excuse à présenter sur nous-mêmes, sur ce que nous sommes ou sur notre manière de travailler. Ceci dit, notre objectif d'aujourd'hui est de vous raconter l'histoire de CanWest, qui est en effet une histoire très belle et dont nous sommes éminemment fiers.
Nous avons l'impression qu'une grande partie des débats antérieurs au sein du comité reflétait une nostalgie du passé, un désir romantique de ramener l'industrie des médias du Canada à ce qu'elle était par le passé. L'un des thèmes récurrents est que la propriété des médias canadiens est devenue trop concentrée, que la diversité des nouvelles, de l'information et des opinions présentées aux Canadiens, d'une certaine façon, a diminué et que des politiques gouvernementales correctrices sont nécessaires pour faire en sorte que l'industrie canadienne des médias revienne à la situation utopique du passé.
Les témoignages des témoins précédents qui partagent cette opinion faisaient systématiquement preuve d'un manque d'analyse quantitative ou empirique. Leurs arguments dépassaient rarement le niveau des observations anecdotiques élaborées spécifiquement pour soutenir les mesures qu'ils proposent eux-mêmes. L'absence d'analyse à l'appui n'a cependant pas empêché les débats sur plusieurs propositions étranges. Selon l'une d'entre elles, le gouvernement devrait s'impliquer commercialement dans le des journaux et lancer un journal public à but non lucratif parallèlement à la société Radio-Canada.
D'autres témoins ont invité le gouvernement, les organismes de réglementation des médias de diffusion ou le Bureau de la concurrence à intervenir dans l'industrie des médias pour exiger une séparation de propriété entre les médias de radiodiffusion et de télédiffusion et les journaux. D'autres encore ont suggéré le besoin, pour le gouvernement, de récompenser certaines salles de presse prétendument indépendantes qui, vraisemblablement, publieraient des nouvelles et des renseignements jugés convenables par le gouvernement.
Heureusement, plusieurs témoins, dont nombre d'universitaires respectés et autres personnes directement impliquées dans le journalisme, ont réfuté avec éloquence de telles affirmations, en soulignant le non-sens absolu que constituent de telles intrusions du gouvernement dans les médias.
En entreprenant les travaux, en 2002, le comité lui-même n'a présenté aucune analyse personnelle pour étayer ses préoccupations apparentes sur le fait que la propriété des médias était devenue trop concentrée, que la diversité des opinions avait diminué d'une certaine façon ou que la convergence ou la mondialisation et le changement technologique avaient endommagé, d'une façon ou d'une autre, la qualité, la quantité ou la diversité des nouvelles, de l'information et des opinions présentées aux Canadiens.
Il est fascinant de voir qu'en réclamant la fin des participations croisées dans les médias, et ce tout particulièrement pour les journaux et la télévision, pas un seul témoin n'a affirmé avoir constaté un déclin de la qualité du compte rendu des informations à la télévision canadienne. Une chose est certaine : aucun élément de preuve n'a été présenté au comité pour démontrer un déclin dans la qualité ou la diversité des informations télévisées. De même, aucun élément de preuve n'a été présenté au comité sur une diminution de la qualité ou de la quantité des reportages, des analyses et des opinions publiés dans les journaux canadiens par rapport aux années passées.
Au contraire, plus d'un témoin a comparé favorablement la qualité des journaux nationaux et des grandes villes canadiennes à celle des journaux publiés dans les villes de taille comparable aux États-Unis, évaluant les journaux canadiens d'aujourd'hui comme étant parmi les meilleurs au monde vis-à-vis des journaux de même taille et de même tirage.
Naturellement, il y aura toujours des individus ou des groupes, en particulier ceux qui représentent des intérêts spécifiques, qui seront en désaccord ou qui s'offenseront des opinions exprimées dans les éditoriaux et les chroniques ou de la description d'événements, dans les journaux et à la télévision, qui contredit leur point de vue particulier.
Les journaux de CanWest ont reçu leur part de telles critiques, comme d'autres médias canadiens. De plus, si personne n'était offensé par ce qui peut être vu ou lu dans les médias, cela serait, en soi, indiquerait que les médias ne remplissent pas leur fonction. Le point de départ de chaque appel au changement est une affirmation selon laquelle la propriété des journaux au Canada est devenue trop concentrée.
Un simple examen rudimentaire des données statistiques démontre le contraire. Les cris d'alarme sur la concentration croissante de la propriété des médias, qui semblent être à l'origine de l'examen mis en place par le comité, ne sont tout simplement pas fondés sur des faits réels. Au contraire, l'enjeu le plus important auquel tous les médias du Canada font face, grands ou petits, y compris la télévision et les journaux, c'est précisément la fragmentation des médias.
Pris en tant qu'ensemble, la disponibilité d'un plus grand nombre de médias (notamment un plus grand nombre de chaînes de télévision dans les foyers canadiens, une plus grande disponibilité des journaux de portée locale ou de portée étendue par le biais d'abonnements, de kiosques à journaux ou de l'Internet, ainsi que l'apparition de journaux gratuits dans les grandes villes canadiennes, comme Metro Ottawa, lancé dans cette ville il y a tout juste deux semaines) a considérablement augmenté la concurrence à laquelle sont sujets les journaux et la télévision, comparativement aux autres médias.
Une réalité moins évident à percevoir pour les personnes qui ne sont pas impliquées dans le commerce des médias, c'est que la fragmentation dilue non seulement les téléspectateurs et les lecteurs en les répartissant autour de plates- formes médiatiques plus nombreuses, mais également, et ce d'abord et avant tout, les revenus nécessaires pour soutenir les entreprises de médias.
Du fait que les consommateurs partagent leur fidélité en fonction d'un choix plus important, les annonceurs partagent aussi leurs dépenses à travers une plus grande sélection de médias. La plus grande disponibilité des médias fournit aux annonceurs une plus grande flexibilité pour calibrer et cibler leurs annonces et atteindre le public qui possède certaines caractéristiques démographiques recherchées. Par exemple, la chaîne Golf est probablement une manière très rentable de diffuser des annonces sur les clubs et les balles du gouvernement.
La fragmentation des revenus représente un enjeu réel pour le maintien de la qualité et pour la durabilité économique des médias canadiens, car les propriétaires sont forcés de chercher des manières plus efficaces et plus rentables de fournir un produit de meilleure qualité à un nombre décroissant d'abonnés.
Les consolidations qui se sont produites et continueront à se produire parmi les entreprises canadiennes des médias, y compris les consolidations croisées, sont une réponse commerciale normale et stratégique car les entreprises individuelles cherchent à maintenir et à protéger une part tronquée des recettes publicitaires totales de l'industrie.
Ainsi, l'accentuation de la concentration de la propriété dans les médias est un mythe. La réduction de la diversité des opinions aux nouvelles et à l'information n'est tout bonnement pas vraie. Les appels demandant au gouvernement de fragmenter des entreprises canadiennes de médias pour les rendre plus petites et moins concurrentielles sans fondement et profondément irréalistes.
Nous avons inclus dans notre dossier écrit des diagrammes qui démontrent sous une forme graphique ce qui s'est véritablement produit dans l'industrie canadienne des journaux et de la télévision. Le message important à retenir de ces diagrammes est que, indépendamment de la façon dont les chiffres sont comptés, la propriété des médias au Canada est de plus en plus diverse, et non pas de plus en plus concentrée. Les Canadiens ont accès à davantage d'information et à d'avantage d'opinions de diverses sources qu'auparavant et cette diversité se développe quotidiennement.
La concentration ultime de la propriété dans la télévision a existé lors du lancement de la télévision canadienne avec la CBC, en 1952, quand les Canadiens n'avaient accès qu'à une seule chaîne du pays. Dans les années 1960, le câble est arrivé et les foyers canadiens des grandes villes ont bientôt eu un accès de qualité aux réseaux de télévision américains et canadiens principaux, en plus des chaînes locales indépendantes.
Au début des années 1980, les chaînes spécialisées sont arrivées au Canada. Ces chaînes spécialisées n'ont pas de tours de transmission et ne sont distribuées dans les foyers canadiens que par l'intermédiaire des services de distribution par câble, satellite et téléphone. Néanmoins, elles présentent les caractéristiques d'une télévision nationale grâce à leur réseau de distribution sur l'ensemble du pays. Depuis 1980, le CRTC a octroyé de nombreuses licences de télédiffusion à des chaînes conventionnelles et spécialisées. Les chaînes spécialisées numériques ont fait leur apparition en 2001, créant un univers de 200 chaînes de télévision par câble et de 300 chaînes pour les abonnés de la diffusion par satellite.
Il est important de se rendre compte que les chaînes spécialisées présentent certains avantages uniques. Elles reçoivent une part des abonnements payés par les consommateurs des services de câble et de satellite en plus des revenus publicitaires dérivés de leur concurrence directe avec la télévision conventionnelle. Les chaînes de télévision classiques, qui figurent dans les services de base du câble et des satellites, ne reçoivent pas une part des revenus substantiels payée mensuellement par des consommateurs pour accéder à ces services.
De plus, le CRTC permet à de nombreuses chaînes du câble en provenance des États-Unis, chaînes qui comptent parmi les plus populaires, tels que Arts and Entertainment, A&E, Spike, CNN, CNN Headline News, et, bientôt, Fox News, d'être retransmises par les systèmes canadiens de distribution par câble et par satellite. Collectivement, ces chaînes des États-Unis reçoivent des consommateurs canadiens environ 250 millions de dollars de revenus d'abonnement par an, alors qu'elles n'apportent aucune contribution aux objectifs d'ordre public de la Loi sur la radiodiffusion. Ces chaînes étrangères sont également dispensées de payer des droits de licence au CRTC.
Il est tout de même extraordinaire que les chaînes américaines par câble reçoivent une rémunération substantielle pour l'usage de leur diffusion au Canada, alors que les chaînes canadiennes de télévision conventionnelle, dont Radio- Canada, n'en reçoivent aucune. Le résultat net de tout ceci est évident. La télévision canadienne conventionnelle, qui reste la seule composante de l'industrie à fournir des nouvelles et des services d'information locaux et des nouvelles nationales et internationales originales, a connu un déclin important de sa part de marché et une dilution substantielle de ses revenus de base. La télévision spécialisée s'approprie l'ensemble de la croissance des parts de revenu depuis plusieurs années.
Ce qui devrait être d'un intérêt certain dans le cadre de cet examen est que la télévision canadienne spécialisée ne fournit aucun service d'information original, mis à part CBC Newsworld et CTV Newsnet, deux chaînes qui préparent leur propre couverture d'information nationale et internationale grâce aux programmes et aux journalistes des chaînes conventionnels parentes. D'autres chaînes canadiennes de télévision spécialisée ne fournissent aucun service d'information, quel qu'il soit.
En termes de concentration des téléspectateurs, aucun radiodiffuseur canadien ne domine le marché de la télévision canadienne. Le schéma 1 de notre dossier indique que CTV, ainsi que les chaînes spécialisées de CTV telles que The Sports Network (TSN), ont la plus grande part de marché des téléspectateurs, avec 19 p. 100. CanWest possède une part de marché de 14 p. 100 des téléspectateurs. CHUM représente une part de marché de 9 p. 100 et Radio-Canada suit avec 8 p. 100. D'autres services canadiens spécialisés et payants obtiennent 13 p. 100 des téléspectateurs et d'autres chaînes conventionnelles canadiennes constituent environ 5 p. 100 du marché. Le reste, environ 33 p. 100 des téléspectateurs canadiens, soit un tiers de l'audience globale, se tourne vers les chaînes conventionnelles et câblodistribuées des États-Unis.
Ainsi, un enjeu important pour la télévision canadienne est de maintenir la capacité des réseaux conventionnels du secteur privé à investir dans des programmes d'information de qualité, et ce tant au niveau local qu'au niveau national, car les cotes d'écoute et les revenus se déplacent constamment vers la télévision spécialisée. Malgré tous ces enjeux économiques réels, chez CanWest, nous avons choisi d'investir dans des programmes d'information. Nous avons offert aux Canadiens un choix supplémentaire pour leurs rendez-vous quotidiens avec l'information télévisée nationale suite au lancement de l'émission Global National with Kevin Newman. Steve Wyatt, dans quelques moments, vous en dira davantage sur cette émission.
La propriété des journaux canadiens a également évolué au cours de la dernière décennie. Si l'on examine la propriété des journaux quotidiens du Canada qui sont suivis par l'Association canadienne des journaux, tel qu'indiqué au schéma 2 de notre dossier, la concentration de la propriété des journaux a atteint une crête il y a six ans, en 1999, lorsque le groupe Hollinger possédait 59 des 106 quotidiens canadiens. Avançons rapidement jusqu'à aujourd'hui, en 2005 : le groupe Hollinger n'est plus un intervenant important au Canada, ses titres ayant chutés de 59 à 10 quotidiens, dont aucun n'est le quotidien d'une grande ville. De nouveaux propriétaires ont fait leur apparition au Canada : non seulement CanWest, mais aussi Osprey et GTC, tandis que Quebecor a sensiblement augmenté ses avoirs dans les journaux, comparativement à la situation qui avait cours il y a 10 ans.
L'autre développement nouveau est celui des journaux gratuits, disponibles maintenant à Montréal, Ottawa, Toronto et Vancouver, ainsi que dans d'autres villes ultérieurement. La distribution de Metro Toronto, publié par une coentreprise entre TorStar et Metro International SA, et 24 Hours Toronto, publié par Quebecor, dépasse les 400 000 copies quotidiennes dans chacun des cas. C'est plus ou moins le même tirage que le Toronto Star et sensiblement plus que le Globe and Mail ou le National Post.
CanWest possède son propre magazine gratuit appelé Dose, lancé le 4 avril dernier dans cinq villes canadiennes. Toutefois, Dose diffère des journaux gratuits. Le magazine vise le marché démographique des jeunes et des jeunes adultes, marché qui, malheureusement, est moins habitué à lire les journaux traditionnels. Pour attirer ce lectorat, qui est essentiel pour l'avenir de notre industrie, nous avons combiné des services Web et des services sans fil avec le magazine pour développer Dose comme une marque nationale et une plate-forme multimédia qui cible la jeunesse.
Lors des dernières semaines, nous avons vu le lancement des journaux Metro Vancouver et Metro Ottawa, dans lesquels CanWest possède une participation d'un tiers, et l'annonce de 24 Hours Vancouver, une coentreprise entre Quebecor et le groupe Pattison.
Une autre façon d'examiner la propriété des journaux au Canada consiste à regarder leur tirage. Au schéma 3 de notre dossier, on peut voir que les journaux de CanWest, pris dans leur ensemble, représentent le plus grand tirage par rapport aux autres propriétaires de journaux. Toutefois, CanWest constitue moins de 30 p. 100 de du tirage total des principaux quotidiens traditionnels. Lorsque les quotidiens sont classés par tirage en jours de la semaine, tel qu'indiqué au schéma 4 de notre dossier, le journal de CanWest dont le tirage est le plus élevé, le National Post, se classe quatrième parmi les quotidiens canadiens. En fait, comme l'indique le schéma 4, deux des nouveaux journaux gratuits se rangeraient dans les dix premiers s'ils étaient inclus. Metro Toronto et 24 Hours Toronto seraient respectivement cinquième et sixième. Le lancement prévu de 24 Hours Vancouver par Quebecor donnera sans doute lieu à un volume de distribution initial identique à celui du Metro Vancouver, plaçant ces deux journaux a même rang, la onzième place, en ce qui concerne le nombre quotidien d'exemplaires distribués.
Ainsi, on peut voir que l'idée d'une concentration excessive et croissante, de même que l'incidence prétendue, sur la diversité des opinions, de la concentration de la propriété et des participations croisées dans les médias, sont tout simplement fictives. Le développement positif le plus notoire du journalisme canadien, ces dernières années, a probablement été le lancement, il y a six ans, du National Post. La concurrence entre le Globe and Mail et le National Post a certainement amélioré la qualité des deux journaux, ce dont les journalistes et les consommateurs ont bénéficié. Il est peu probable que le National Post aurait survécu en tant que journal autonome, étant donné les pertes importantes et continues encourues par le journal à son lancement, dans un marché torontois caractérisé par une concurrence féroce. La capacité qu'a CanWest de fournir certains services centralisés au National Post, en tant que composante d'un grand groupe de médias, a nettement contribué à assurer la viabilité de ce journal et à renforcer la volonté de l'entreprise de continuer à supporter les pertes financières importantes du Post.
En résumé, la fragmentation, et non pas la concentration, est l'enjeu auquel les médias canadiens font face. En effet, l'enjeu commercial des médias est de maintenir la qualité des reportages d'information face à des audiences et à des revenus qui se dispersent dans toutes les directions, de façon à tirer profit des informations diffusées via la télévision, l'Internet, les nouveaux journaux gratuits, les navigateurs Internet, les appareils sans fil tels que les BlackBerries et, bientôt, la télévision diffusée sur les téléphones cellulaires.
Dans cet environnement commercial difficile, les consolidations des entreprises médiatiques doivent être perçues comme une réaction normale des stratégies commerciales face aux circonstances. Malgré ceci, les consolidations ne seront pas suffisantes pour réduire la tendance vers une fragmentation et une diversité accrues des médias, car les nouvelles sources naissantes contribuent à une désintégration que les consolidations réalisées n'arrivent pas à contrer.
Dans ces circonstances, le comité doit se montrer prudent lors de son examen des changements possibles aux politiques en matière de médias. Il ne fait aucun doute que certains syndicats, organismes de presse et universitaires perçoivent ces questions par le prise des ajustements que les entreprises médiatiques on dû réaliser en s'adaptant à un environnement de marché nouveau, plus exigeant et profondément différent. Il est indiscutable que les entreprises médiatiques doivent constamment innover en lançant de nouveaux produits et services pour devenir plus efficaces et plus rentables. Que ceci exige, de la part des entreprises médiatiques, de se réinventer constamment et de trouver des moyens nouveaux et meilleurs de présenter les actualités aux Canadiens, voilà un fait concret de notre vie actuelle. La nostalgie du passé et le désir de protéger le statu quo ne sont pas des solutions viables dans une industrie qui fait face à des changements et à des enjeux de transformation tels qu'ils existent dans les médias aujourd'hui.
Suite à ces appels à la prudence, je me tourne maintenant vers mes collègues pour une présentation de certains aspects fascinants de notre travail pour la défense du journalisme canadien chez CanWest.
M. Steve Wyatt, vice-président et rédacteur en chef, Global Television News : Il me semble approprié de vous parler de l'heure magique des actualités télévisées. La période entre six heures et sept heures a été, pendant des décennies, le rendez-vous que se donnaient les familles canadiennes pour syntoniser leur chaîne de télévision locale préférée et regarder le résumé des actualités de leur région, du pays et du monde entier. Le monde a bien changé.
Les codes d'écoute des informations télévisées ne sont plus ce qu'elles étaient et le journal de six heures n'est plus son unique destination. La diffusion des actualités et de l'information à la télévision est continue et il n'y a jamais eu un choix si vaste sur les chaînes traditionnelles et les chaînes spécialisées offertes par satellite. Notre plus grand défi, en 2005, est d'assurer la fidélité du public dans un univers de plus en plus fragmenté.
À cet effet, CanWest a fortement investi dans le service d'information depuis l'acquisition des chaînes qui appartenaient à Western International Communications (WIC) en 2000. Ces services sont au nombre de trois en Colombie-Britannique, de quatre en Alberta et de un en Ontario. Grâce à cet achat, Global fut en mesure de pouvoir faire concurrence à CTV et Radio-Canada à l'échelle nationale et offre aujourd'hui une troisième voix de poids sur l'information locale et nationale.
CanWest a identifié l'information télévisée comme le pilier central de sa stratégie de production d'émissions propres, réduisant de ce fait notre dépendance vis-à-vis de l'achat de programmes étrangers. De manière significative, le programme Global National News with Kevin Newman a été lancé en septembre 2001. Peu de temps après son début sur les ondes, et en utilisant non seulement nos propres ressources, mais également celles de nos chaînes apparentées et de nos partenaires du domaine de la presse, l'émission fait maintenant figure de voix nouvelle issue du Canada de l'Ouest.
Global a réussi à s'imposer face aux bulletins des chaînes traditionnelles à une heure non traditionnelle pour les actualités nationales, celle du dîner. Il y a maintenant trois voix concurrentes dans les bulletins d'informations nationaux de ce pays. Pendant l'année 2004, selon les données fournies par BBM, l'audimètre avait les résultats suivants : CTV National News, avec une cote d'écoute moyenne de 956 300 téléspectateurs dans le secteur de population 2+, CBC National, avec une cote d'écoute moyenne de 776 000 téléspectateurs sur le réseau principal, et Global National, avec 712 000 téléspectateurs.
Nous avons réussi à devenir un intervenant important en tout juste trois années. Ceci prend une signification d'autant plus grande si l'on considère que l'émission Global National n'est diffusée que sur neuf chaînes de télévision. Ceci doit être comparé à 22 chaînes pour CTV et à 25 pour CBC. Un trait encore plus notoire à une heure où la cote d'écoute globale des téléspectateurs est bien inférieure à celle des grilles de 22 heures et 23 heures, employées par les chaînes rivales. Pour mettre en pratique notre engagement d'attirer plus de spectateurs vers Global National, nous sommes récemment passés à une diffusion sept jours par semaine, avec Tara Nelson pour le journal de la fin de semaine.
Le succès très rapide de Global National est le résultat du travail d'une équipe très indépendante de rédacteurs, de producteurs et de journalistes basés à Vancouver et soutenue par des équipes en poste dans chaque région du pays : des bureaux à Ottawa et à Washington D.C., ainsi que des journalistes indépendants basés à Londres et à Tel-Aviv, viennent s'ajouter aux ressources de Global National. Je suis heureux de vous annoncer que notre voix nouvelle et unique a été récompensée par la Radio-Television News Directors Association (RTNDA) et par la remise du prestigieux prix Edward R. Murrow pour notre couverture des dernières élections fédérales. Nous avons installé toute l'équipe dans un autobus pour voyager dans tout le pays et diffuser Global National en direct depuis différentes collectivités pendant toute la durée de la campagne.
L'équipe nationale est elle-même soutenue par les bureaux d'information locaux de nos chaînes dans tout le pays. Là encore, Global a réalisé un investissement de poids au niveau local pour accroître notre présence aux actualités. Par exemple, en Alberta, l'année dernière, nous avons augmenté nos services information locale à Calgary et à Edmonton, avec 30 minutes de plus au journal télévisé de 17 heures. Ces marchés suivent maintenant le modèle de notre bureau d'information de Colombie-Britannique, où nous présentons 45 heures d'actualités locales chaque semaine, sans compter le journal national, ce qui, à mon avis, constitue davantage que n'importe quel autre bureau d'information locale de langue anglaise au Canada.
En Ontario, nous avons ajouté une émission d'information de trois heures les matins du lundi au vendredi et une émission nationale d'actualités, Global Sunday, produit à Calgary, qui a réussi en très peu de temps à devenir l'un des émissions d'actualités les plus regardées dans le pays. Il est intéressant de noter les remarques faites récemment par Patrimoine canadien dans une réponse détaillée au rapport Lincoln, qui a présenté plus de 90 recommandations sur la manière d'améliorer le système de radiodiffusion canadien. Dans sa réponse du 4 avril, le gouvernement a indiqué qu'il prévoit avoir recours à son pouvoir comme présenté au chapitre 7 de la loi sur la radiodiffusion pour demander au CRTC de s'assurer que les Canadiens des communautés de toutes tailles ont accès à un niveau approprié de nouvelles locales et régionales et à des programmes sur des questions d'intérêt public provenant de sources variées.
Je souhaiterais préciser à ce comité qu'il existe déjà sur plusieurs marchés canadiens des émissions qui sont produites à l'échelle locale mais qui ne sont pas regardées par les consommateurs canadiens. Ceci est dû au fait qu'il n'est pas obligatoire pour les diffuseurs par satellite, selon les règlements du CRTC, de transmettre toutes les diffusions canadiennes locales. L'utilisation de services par satellite DTH (« direct-to-home ») concerne 25 à 40 p. 100 des foyers canadiens, selon la région du pays. Dans certains cas, les communautés n'ont pas accès à leur chaîne locale de télévision. C'est le cas pour Kelowna, en Colombie-Britannique, où les émissions d'information produites par le bureau de CHBC d'Okanagan lui-même ne sont pas transmises par les diffuseurs par satellite. Il y a deux ans, cette petite chaîne de télévision communautaire a consacré plus de 12 heures de couverture ininterrompue aux feux de forêt dévastateurs qui ont ravagé les terres intérieures du Sud de la Colombie-Britannique. La couverture de cette chaîne a été plus tard transformée en un documentaire d'une heure qui a remporté le premier prix national de la RTNDA en tant que le meilleur documentaire, et ce face à une concurrence très importance. Il est ironique que, malgré le fait que le satellite rejoignait, dans cette région, tout au plus 20 p. 100 des gens, les téléspectateurs n'ont pas pu voir la couverture locale de cette crise.
Un autre aspect central de notre stratégie d'augmentation de nos activités d'information et d'actualités est notre partenariat avec les journaux métropolitains. Nous avons réalisé un investissement remarquable en installant des caméras télécommandées dans chaque journal Metro du pays, caméras que les rédacteurs en chef du service information de nos chaînes de télévision peuvent utiliser. Nos téléspectateurs ont beaucoup bénéficié de cette nouveauté car ils ont ainsi accès, par une autre voie, aux journalistes qu'ils lisent tous les jours. Le partenariat entre presse et télévision a été particulièrement efficace dans notre couverture des grands événements nationaux et internationaux, de la guerre en Afghanistan, où les journalistes vidéo ont collaboré avec des journalistes de CNS, à la guerre en Irak, où Matthew Fisher, incorporé à des troupes des États-Unis, a pu faire des reportages en direct au journal télévisé Global National with Kevin Newman. Plus récemment, notre couverture primée de la campagne des élections fédérales reposait sur les ressources de notre site Web pour tous les bureaux locaux d'information de nos chaînes, jusqu'aux meilleurs chroniqueurs du National Post. Nos journalistes de la télévision et de la presse travaillent ensemble pour fournir une couverture unique et complète aux niveaux local et national.
Même si nous utilisons nos ressources variées pour servir nos propres spectateurs dans un esprit de décisions éditoriales indépendantes, ces décisions conservent une valeur suprême. Nous encourageons une démarche originale de reportage à chaque niveau sur la base d'une bonne appréciation de chaque marché individuel. En m'excusant auprès de mes amis de la presse ici présents, je dois dire que les titres des journaux du matin ne guident pas les prises de décision à la télévision. Nous nous mesurons davantage selon la façon dont notre contenu original de la soirée se retrouve dans les unes des journaux du lendemain matin.
Le partenariat est une partie importante de notre stratégie promotionnelle. En tant que radiodiffuseurs du secteur privé, nous dépendons de la publicité pour générer des revenus afin de pouvoir continuer à investir dans notre expansion de l'information à la télévision. Nous pouvons promouvoir des journaux durant le temps d'antenne et, en échange, nous obtenons de l'espace publicitaire dans la presse pour promouvoir nos programmes d'information. Ceci est particulièrement vrai pour nos chaînes de télévision les plus petites, qui, autrement, n'auraient pas les moyens de s'offrir une publicité réalisée par des tiers pour promouvoir leurs émissions canadiennes originales. Ensemble, tous ces éléments permettent de cimenter l'avenir de Global News en tant qu'une voix vive et distincte du journalisme canadien dans un univers multi-chaînes. Alors que nous nous engageons de plus en plus profondément dans le domaine numérique, nos ressources combinées permettront une concurrence plus efficace dans un espace international non réglementé, tandis que nous élaborerons de nouvelles manières de présenter un contenu canadien via les technologies à haut débit et les technologies sans fil.
En ce qui concerne la télévision, l'adjectif grand est pour nous une bonne chose. Ceci nous a aidé à appuyer et à accroître nos services d'information au niveau local et à présenter avec succès une troisième voix sur le plan des actualités nationales. Nous continuerons à appuyer une prise de décision indépendante au niveau local et à exploiter nos actifs pour garantir notre avenir à l'échelle mondiale.
M. Gerry Nott, rédacteur en chef, Canadian News Desk, CanWest News Service, CanWest MediaWorks Publications : Je me réjouis d'avoir la possibilité de m'adresser à vous pour expliquer ce qu'est le Canadian News Desk (CND), la façon dont il s'intègre au groupe de journaux CanWest et le rôle qu'il a joué dans l'amélioration de la qualité de nos programmes d'information, dans la presse et à la télévision, depuis son lancement il y a de cela deux ans. En tant que rédacteur en chef adjoint du Calgary Herald, j'ai été invité en juillet 2002 par Murdock Davis, alors vice-président de la rédaction de CanWest, à assister à une réunion avec Patricia Graham, directrice de la rédaction du Vancouver Sun, et Don Butler, directeur exécutif de l'Ottawa Citizen. M. Davis nous a mis au défi de créer un plan de création d'un bureau éditorial national desservant tous nos centres éditoriaux, nos journaux, notre télévision et nos services en ligne. Il devait pouvoir remplir plusieurs fonctions. En s'appuyant sur la vaste expertise de plus de 1 000 journalistes de nos journaux et de nos chaînes de télévision, nous avons été invités à trouver un moyen de partager le meilleur de leur travail dans tout le pays pour nos journaux en établissant et en créant un système Web fonctionnel qui regroupe l'ensemble de CanWest.
Nous avons été invités à trouver des moyens permettant d'éviter la duplication des tâches, libérant de ce fait des ressources locales, pour qu'elles puissent se concentrer sur leur mission locale. Nous avons été invités à déterminer, grâce à la portée de nos journaux, une façon de coordonner et de répartir les projets spéciaux de manière à assurer un niveau élevé et unique de qualité et à garantir la substance de nos journaux. Jouant un rôle de coordination, nous avons été invités à trouver une méthode pour améliorer la couverture des grands événements afin que nos rédacteurs, travaillant de concert, puissent fournir un ensemble d'articles diversifié et riche pour nos journaux et chaînes de télévision. En recrutant prudemment et à un niveau très élevé, nous avons mis en place une équipe nationale de rédacteurs principaux dont le travail, en vertu de son caractère unique et de sa qualité, serait en concurrence quotidienne à la une dans nos journaux. Nous avons été invités à trouver une manière de tirer profit du grand talent de nos journalistes et de le partager, à trouver une façon d'assurer, une fois pour toutes, les fonctions et les tâches en doubles et de d'établir et stimuler chez CanWest une plateforme d'excellence en journalisme.
Comment avons-nous fait et comment le CND fonctionne-t-il? Nous avons, à la rédaction du bureau de Winnipeg, 19 personnes travaillant comme dans une salle de presse traditionnelle, avec des rédacteurs chargés des actualités, du sport, du monde des affaires et de celui des arts. Tous les jours, chaque rédacteur discute avec ses propres collègues de nos 11 journaux. Ils organisent également des conférences téléphoniques hebdomadaires avec tous les rédacteurs de chaque secteur. Nous apprenons ainsi comment nos journaux attribuent les tâches, comment le personnel est déployé et, chose plus importante encore, les enquêtes auxquelles ils se consacrent pour déterminer celles qui pourraient avoir une portée nationale. Ces tâches sont inscrites sur notre site web appelé News Sked et, à partir de là, le CND identifie les articles d'intérêt national et produit un budget d'information qui met en valeur ce que les meilleurs rédacteurs de CanWest écrivent tous les jours dans chaque service. Nous mettons à jour notre budget d'information tout au long de la journée, de sorte que nous avons, en fin de journée, approximativement 80 articles disponibles à mettre en commun et à partager parmi nos journaux. Nos rédacteurs travaillent toute la journée pour extraire ces articles à partir de nos journaux, les remanient dans une perspective nationale et les envoient à nos journaux et à clients commerciaux. Cette banque d'articles a grandement contribué à rendre nos journaux uniques dans chacun des marchés qu'ils desservent.
En plus de notre rôle quotidien, nous nous consacrons également à l'extraction d'articles de nos journaux dans des secteurs spécifiques tels que la mode, l'alimentation, l'habitation, les finances personnelles, l'automobile et la santé; nous les remanions pour un public national et nous les faisons circuler vers nos journaux pour qu'ils y soient utilisés dans des sections spécialisées. Nous faisons la même chose pour les chroniques principales qui apparaissent dans nos journaux de fin de semaine et offrons, de ce fait, un contenu régulier de haute qualité produit au Canada.
Il est également intéressant de mentionner l'apport de nos rédacteurs de groupe sur nos journaux. Nous avons sept rédacteurs spécialisés dont le travail illustre régulièrement les premières pages de nos journaux. Parmi ces rédacteurs, nous comptons Randy Boswell, le seul journaliste du pays qui se consacre à l'histoire canadienne et à celle des Canadiens à l'étranger, Misty Harris, dont les reportages de pointe sur la culture pop sont les meilleurs du secteur, et Sharon Kirkey, qui écrit sur la santé et dont l'excellent travail a récemment été honoré par une nomination nationale à un prix pour les journaux. Leurs chroniques, à elles seules, sont parues plus de 3 000 fois au cours des 12 derniers mois dans les journaux qui utilisent notre service d'information.
Le CND a-t-il amélioré nos journaux? Quelle que soit la mesure appliquée, la réponse est un « oui » retentissant. Jusqu'au lancement du Canadian News Desk, il y avait peu de chance que le meilleur travail — par exemple celui de la personne qui fait office de grand-père des rédacteurs du domaine du hockey de la NHL, Red Fisher — ne paraisse dans nos journaux en dehors du marché de Montréal. Notre prédécesseur, le Southam Network, était peu organisé, peu vendu et peu utilisé. Il n'y avait pratiquement aucune chance que le travail remarquable de Kim Bolan, du Vancouver Sun — de loin le principal journaliste du pays pour la couverture de la tragédie d'Air India — puisse atteindre nos journaux du Canada de l'Est, comme ce fut le cas lors de l'acquittement récent de cette affaire dramatique. Il aurait été impossible de coordonner la couverture de la fusillade de Mayerthorpe, qui a vu des journalistes et des photographes du Calgary Herald, de l'Edmonton Journal et de Global Television travailler ensemble pour produire la couverture nationale la plus digne de foi et la plus détaillée de cet incident. Enfin, en vertu d'un partenariat que nous avons conclu avec le Winnipeg Free Press, les reporters de ce journal ont envoyé à notre bureau une perspective purement canadienne sur la fusillade récente de Red Lake au Minnesota. Sans ce système, nos journaux, comme la grande majorité des autres journaux au Canada, auraient eu à utiliser les dossiers d'Associated Press.
Nous avons réussi à établir une culture de coopération entre les salles de presse, une culture où toutes les personnes impliquées comprennent que leurs journaux sont meilleurs lorsqu'elles travaillent ensemble et s'appuient sur les forces de notre presse. Nous avons réalisé ceci en créant une culture de service, et non d'obligation et de contrôle, où les rédacteurs peuvent mesurer une incidence réelle et qualitative dans le fonctionnement de leurs journaux. En fin de compte, ce sont nos lecteurs qui sont gagnants. Ils sont gagnants car ils ont accès aux meilleurs écrits et reportages photographiques réalisés par les journaux de CanWest. Ils sont gagnants car ils peuvent lire des travaux de qualité écrits par des spécialistes considérés comme faisant parti des meilleurs de leurs domaines à l'échelle du pays. Ils sont gagnants car ils ont accès à des opinions-phares dans chacun des journaux dont les perspectives sont aussi diverses que peu l'être le temps qu'il fait.
Je souhaite parler un moment de la façon dont CND s'intègre à nos collègues de la télédiffusion. Global Television a accès à notre banque d'information en temps réel. Certes, tous les articles que nous traitons ne se traduisent pas facilement en clips pour la télévision, mais nous pouvons citer beaucoup d'exemples où l'expertise de notre personnel a permis d'améliorer le bulletin d'information grâce au partage des renseignements et, de temps en temps, grâce à des participations d'invités. D'une façon primordiale, grâce à la coopération mutuelle au sein de Global, nous avons pu accroître la portée, dans les reportages internationaux, en assortissant fréquemment l'un de nos journalistes de presse à une équipe vidéo afin d'obtenir des points de vue canadiens sur les événements importants. La plupart des exemples récents pourraient inclure la couverture de la dévastation provoquée par le tsunami en Asie, où les rédacteurs de CanWest et les caméras de Global se sont associés pour fournir des reportages convaincants à la télévision, qui, à elle seule, manquait de ressources pour couvrir cet événement de la façon dont nous avons pu le faire. Le mois dernier, CanWest a envoyé des rédacteurs principaux à Genève et au Vietnam pour effectuer un reportage détaillé sur les inquiétants aspects futurs de la manifestation de la grippe aviaire. Un caméraman de Global était avec eux. Suite à ceci, Global National a diffusé deux reportages spéciaux. Global Sunday, l'émission de débat nationale hebdomadaire, a diffusé une discussion sur la question en se basant sur l'expertise de nos rédacteurs dans ce domaine. En outre, la main exceptionnelle du caméraman de Global a fourni plusieurs photos qui ont été publiées dans nos journaux.
La convergence, comme nous l'avons prudemment gérée, a augmenté la couverture du reportage de Global Television, élargi la portée de nos journaux par l'accès aux bureaux d'endroits où nous ne sommes pas présents et aidé à réaliser des projets commun mieux que nous n'aurions pu le faire isolément.
En conclusion, le Canadian News Desk s'est créé une place permanente dans le paysage du journalisme au Canada — en fait, il s'en est mérité le droit. Nous sommes fiers des projets que nous avons réalisés. Nous sommes fiers d'avoir fait une différence et notre espoir est de continuer à fournir un service utile, unique non seulement dans notre pays, mais aussi dans le monde entier.
Le président : Le sénateur Carney a des engagements pressants ailleurs et je sais qu'elle a des questions à vous poser. Avant de me tourner vers M. Anderson, je souhaiterais donner au sénateur Carney une chance de poser ses questions.
Le sénateur Carney : Si les témoins y consentent.
Le président : Je serais à vous sous peu. Je vous le promets.
Le sénateur Carney : M. Anderson parlait-il de questions de politiques publiques?
M. Scott Anderson, rédacteur en chef, Ottawa Citizen, et vice-président et rédacteur en chef, CanWest MediaWorks Publications : Un peu, oui.
Le sénateur Carney : De quoi alliez-vous parler?
M. Anderson : Je vais parler d'une certaine politique du gouvernement qui, à mon avis, empiète sur la liberté de la presse.
Le sénateur Carney : Votre dossier est extrêmement intéressant. Il contient beaucoup de renseignements utiles. Il y a beaucoup pour nous à assimiler suite à votre présentation très rapide, excepté peut-être pour le sénateur Munson.
Je désire m'enquérir spécifiquement de la politique de concurrence et de certaines des politiques du gouvernement. Si la concentration de la propriété, la convergence et le fonctionnement de CanWest, comme vous les avez bien décrits en détail — si la concentration est un mythe ou une fausse idée ou si l'incidence négative de la concentration sont tout juste un mythe ou une fausse idée, pourquoi y a-t-il tellement d'inquiétudes dans l'air, comme celles qui nous ont été exprimées sur la concentration et la dominance de CanWest sur le marché des médias du Canada? L'inquiétude est réelle.
M. Camilleri : Je ne le nie pas. Nous avons entendu cette inquiétude. Dans notre déclaration, ici, aujourd'hui, nous avons essayé de montrer que, en réalité, c'est un mythe de dire qu'une entreprise est aussi dominante que l'affirment nos critiques. Il est difficile de parler uniquement en termes généraux. Je pense néanmoins que beaucoup d'entre eux sont motivés par des intentions et des intérêts particuliers. Il est facile d'affirmer que quelqu'un est trop grand. Mais regardons les faits. Le fait est que les consommateurs, les téléspectateurs et les lecteurs canadiens ont plus de choix à leur disposition qu'à n'importe quel moment de notre histoire. Vous pouvez être assis dans votre salle de séjour et lire n'importe quel journal de n'importe quel endroit du monde, partout dans le monde. Vous pouvez regarder 200 à 300 chaînes de télévision. Vous pouvez consommer et écouter la station de radio de votre choix à partir de n'importe quel endroit du monde. Dire qu'une entité quelconque peut dominer les médias est un mythe. Ce n'est pas confirmé par la manière dont la technologie a changé notre industrie.
Je dirai avec respect à toutes ces personnes que, comme je l'ai dit dans ma déclaration d'ouverture, leurs affirmations, que nous avons lues dans les dossiers, ne sont pas appuyées par une analyse quantitative, mais plutôt par des anecdotes. Je les mets au défi de réfuter ceci. Aujourd'hui, en raison de l'Internet et de l'évolution des technologies, vous pouvez recevoir des médias situés pratiquement n'importe où dans le monde, quand vous voulez, où vous voulez et avec l'appareil que vous voulez.
Le sénateur Carney : Je pense que nous avons entendu beaucoup de témoignages et je suis d'accord sur leur contenu. Mais il y a quelques marchés où CanWest, en dépit ou en raison du fonctionnement, je suppose, du Canadian News Desk, où le même matériel est répété dans tous les médias. Je pense au marché de Vancouver où CanWest a une position dominante.
En termes simplistes, la politique sur la concurrence se penche sur la question de la puissance monopolistique du marché. Je pense avoir bien résumé la situation. Sur le marché de Vancouver, qui a le National Post, le Province de Vancouver, le Vancouver Sun, la plupart des hebdomadaires du secteur, les North Shore News, Global, le Vancouver Courier, etcetera, dans le passé, il y a eu des inquiétudes concernant la position dominante de CanWest sur ce marché. Est-ce qu'un organisme gouvernemental a déjà soulevé cette question avec vous? Je précise que cette concentration existe de longue date sur le marché de Vancouver.
M. Camilleri : Je souhaiterais en parler; je demanderai ensuite à Mme Bell de présenter une page d'histoire.
Le sénateur Carney : Il y a un souci concernant l'absence de journalistes législatifs à la capitale pour Victoria, un journaliste qui puisse effectuer des reportages sur l'activité législative pour CanWest. En outre, je peux prendre quatre des journaux du secteur, le Province, le Sun, le National Post et le Times-Colonist de Victoria, qui couvre une grande partie du même domaine, et le même article est répété mot pour mot dans chacun des quatre journaux, ce qui n'est pas vraiment de la diversité. Tenez-vous compte des situations des marchés où vous êtes très dominants?
M. Camilleri : Pour parler spécifiquement de Vancouver, je souhaiterais traiter de cette question en plusieurs parties. Laissez-moi parler de la question de la dominance. Mme Bell parlera de l'histoire en termes d'examen par le gouvernement, parce que nos actifs sont le résultat d'une acquisition. Je demanderai à M. Wyatt, M. Nott et M. Anderson de parler de certains des exemples spécifiques que vous citez.
En termes de dominance à Vancouver, ou de prétendue dominance en Colombie-Britannique ou à Vancouver, vous devez garder à l'esprit ce qui suit. À la radio, nous avons une part de marché de zéro p. 100. À la télévision, CHUM vient d'apparaître en tant que nouvel intervenant sur le marché. CTV a continué son expansion. Tous les chaînes spécialisées atteignent la Colombie-Britannique. En termes de journaux, avec la présence des tous nos concurrents, avec l'apparition de Metro, du groupe Pattison, et maintenant avec le 24 Hours de Quebecor, ces deux journaux se rangent à eux seuls aux 10e et 11e places dans la liste de tirage nationale.
Le sénateur Carney : Ils visent un marché spécifique.
M. Camilleri : Dose, notre journal, vise le marché de la jeunesse. Metro est en grande concurrence avec les quotidiens métropolitains traditionnels. Ceci a été confirmé avec l'histoire de son lancement à Toronto et l'impact qu'il a eu sur le groupe Sun et le Toronto Sun, voire même le Toronto Star. C'est un journal de type tout à fait métropolitain.
Encore en termes de prétendue dominance, et respectueusement, ceci n'est pas confirmé par les faits quand vous regardez l'impact sur les cotes d'écoute et la pléthore de choix du marché.
Le sénateur Carney : Parlons spécifiquement du marché de Vancouver, des deux journaux quotidiens et des autres. Metro est un nouvel intervenant. D'autres journaux sont apparus et disparus sur ce marché. Je ne veux pas déformer l'histoire ou les questions en parlant de Metro. Je pose une question concernant la situation où la part dominante du marché est détenue par CanWest, bonne ou mauvaise chose, je ne discute pas de ce point. Mon propos n'est pas de juger de la qualité des journaux lors d'auditions au Sénat. Ceci ne concerne que l'intimité de mon propre foyer. Comment traitez-vous de ces questions spécifiques concernant Vancouver? M. Wyatt, qui est un vieil ami à moi, est encore basé là-bas.
Comment traitez-vous de façon spécifique ces grands secteurs du marché où vous êtes la figure dominante? De même dans les communautés — et ne me dites pas, s'il vous plaît, que la diversité existe parce que des journaux sont publiés en chinois.
M. Camilleri : Ceci est arrivé avant moi, mais quand nous avons acheté les chaînes de WIC, le CRTC a passé en revue l'acquisition puis l'a approuvée comme une opération ne créant pas de déséquilibre sur le marché, ni de position dominante. Quand nous avons acquis ces journaux, le Bureau de la concurrence a passé en revue l'acquisition et a déterminé qu'elle ne créerait pas de position dominante sur le marché. Ces deux cas de figure ont été examinés par les organismes gouvernementaux appropriés et il a été déterminé qu'aucun abus de position dominante n'était créé.
Le sénateur Carney : Personne ne l'a fait récemment, en termes de journaux?
Mme Charlotte Bell, vice-présidente, Affaires réglementaires, CanWest MediaWorks Television and Radio : Non, mais le CRTC a examiné les rapports entre la presse et la télévision et nous avons un code de conduite qui nous gouverne dans tous les marchés.
Le sénateur Carney : Nous sommes intéressés par ce code de conduite. Voulez-vous nous en parler?
Mme Bell : Souhaitez-vous que nous l'ajoutions au dossier?
Le sénateur Carney : Oui.
Mme Bell : Nous pouvons l'ajouter au dossier. Je dois également préciser que quand nous avons acquis les chaînes de télévision de WIC en 2000, CHUM n'était pas du tout présente sur le marché. Leur chaîne de Victoria avait une autorisation plus poussée, puis ils ont acquis notre chaîne, CKVU, de Vancouver. Le CRTC a également autorisé deux autres services dans ce marché, Trinity Broadcasting et Multivan. Il y a quatre chaînes supplémentaires de télévision. Ceci en une courte période. Même à l'époque où ces chaînes n'existaient pas, le Conseil avait déterminé qu'il n'y avait pas de position dominante anormale.
Le sénateur Carney : La réponse qui nous est fournie est que la politique de concurrence du gouvernement est appliquée — et que vous avez réussi le test à cet égard.
Mme Bell : Soit cela, soit les voix supplémentaires.
Le sénateur Carney : Je devrais préciser à mes collègues sénateurs que CanWest a fait quelque chose de très utile pour nous. Ils ont identifié dans leur dossier des questions touchant les politiques publiques. Ils ont indiqué des domaines hors limites qu'ils considèrent que nous ne devrions pas toucher. C'est une remarque très intéressante, si quelque chose interfère avec CanWest, c'est hors limites; c'est acceptable. Ils nous ont vraiment aidés en identifiant certains aspects des politiques où des recommandations seraient utiles et je veux les en remercier parce que beaucoup de nos témoins n'ont pas agit comme cela. Un domaine que je voudrais aborder est l'opinion de CanWest sur la propriété étrangère, ou les limites croissantes des parts d'entreprises de communications détenues par des étrangers?
M. Camilleri : Historiquement, nous avons adopté une position plus libérale sur la propriété étrangère que celle de nos concurrents, de nos collègues dans l'industrie. Ceci vient du fait que nous avons foi en la mondialisation du marché des médias qui a lieu en ce moment, ainsi que du fait que nous avons des actifs dans d'autres parties du monde — en Australie, en Irlande et en Nouvelle-Zélande — et que nous avons besoin d'une expansion globale pour réussir et pour maintenir notre position.
Le sénateur Carney : Je parle de la propriété au Canada —
M. Camilleri : Nous sommes également préoccupés par ce fait et par les interdépendances entre les diffuseurs, les entreprises du câble et les entreprises de communications. Si la règle du jeu est modifiée au profit de un ou deux de ces composantes, mais pas pour les radiodiffuseurs, nous pensons que ceci pourrait créer un avantage injuste. Nous avons donc des inquiétudes à ce sujet.
Le sénateur Carney : Vous avez des inquiétudes mais, en général, avez-vous une opinion sur l'idée que les entreprises canadiennes de communications qui forment des conglomérats, dont vous êtes certainement un représentant, devraient avoir ou non la possibilité de lever des capitaux sur les marchés étrangers par la vente de leurs actions à des intérêts non canadiens? J'ai certaines réserves parce que je pense que certaines entreprises utilisent ce système comme une manière d'échapper à leurs dettes; vendre des actions de l'entreprise afin d'alléger la charge de la dette. Êtes-vous généralement en faveur des restrictions actuelles qui pèsent sur les entreprises canadiennes de communications?
M. Camilleri : Nous croyons que la règle du jeu devrait être la même pour les entreprises de communications, les radiodiffuseurs et les entreprises du câble.
Le sénateur Carney : Une dernière question sur la convergence : nous avons entendu parler de la convergence des médias et vous nous avez décrit des caractéristiques d'efficacité dans ce secteur; mais d'où tirez-vous vos bénéfices, de vos prises de participation croisée?
M. Camilleri : D'où nous les tirons?
Le sénateur Carney : Laissez-moi reformuler la question. La convergence vous a-t-elle été profitable?
M. Camilleri : Je suis dans l'entreprise depuis moins de trois ans. La convergence nous a permis de faire des choses comme de soutenir et développer le National Post et de lancer une nouvelle plateforme multimédia et une nouvelle voix pour les jeunes Canadiens grâce à Dose. Elle nous a permis de lancer, de faire grandir et de développer Global National. Elle nous a permis de lancer une division de livres, qui offre maintenant aux journalistes un moyen de voir leurs travaux publiés, travaux qui, jusqu'ici, ne pouvaient pas forcément l'être.
Je pense que nous ne sommes qu'au début de l'utilisation de cette ressource mais j'en suis un fervent défenseur parce qu'elle nous a permis, et nous a fourni les moyens, de réaliser un certain nombre de projets dont nous n'aurions autrement pas pu tirer profit.
Le sénateur Carney : Merci, ceci nous aura été utile.
Le sénateur Munson : Les règlements actuels sur la propriété étrangère doivent-ils être changés? Doivent-ils être supprimés?
M. Geoff Elliot, vice-président, Affaires corporatives, CanWest Global : CanWest a pris la position suivante : nous ne cherchons pas nécessairement un changement du statu quo. Nous avons présenté des dossiers écrits au Comité du patrimoine national de la Chambre des communes et également au Comité spécial du commerce et de l'industrie sur cette question. À l'origine, nous avons proposé de nous mettre d'accords sur une relaxation mesurée des règles, sur une base de réciprocité. En d'autres termes, le gouvernement du Canada devrait rechercher une relaxation de ces mêmes règles dans d'autres pays, et cela nous devrions être disposés à étendre nos règles sur une base réciproque. Puis, nous avons déterminé qu'il n'était pas probable que ceci se produise dans le secteur de la radiodiffusion. Notre préoccupation devint donc un souci de concurrence par rapport à d'autres composantes de l'industrie dans laquelle nous sommes en concurrence.
Dans ce contexte, comme l'a dit M. Camilleri il y a quelques instants, notre position est la suivante : si vous relâchez les règles pour les entreprises de télécommunications, dont certaines possèdent des radiodiffuseurs, et si vous relâchez les règles pour les entreprises du câble, dont certaines possèdent des chaînes de télévision, alors vous devez examiner la situation pour les entreprises qui ne font que de la radiodiffusion.
Le président : C'est une manière peu commune de tenir une audience mais je pense vous avoir déjà expliqué pourquoi j'ai voulu donner la parole au sénateur Carney. Reprenons.
Le sénateur Carney : Je suis en train de manquer les belles idées sur les politiques publiques.
Le président : Nous reviendrons à vous.
M. Anderson : Merci beaucoup. Je vais donc essayer de reprendre mon élan. Je serai bref. Je vais vous expliquer ce que je fais chez CanWest, en tant que rédacteur et vice-président national, parce que mon rôle est peut-être peu commun.
Je souhaiterais ajouter quelque chose à ce qu'a dit M. Nott et expliquer comment les journaux de CanWest coopèrent pour améliorer la chaîne et l'industrie dans un environnement à l'indépendance féroce. Je voudrais finir par un aperçu de certaines des choses que ce comité, à mon avis, pourrait faire pour aborder les vraies questions de la liberté de presse.
Je veux ici vous faire savoir que j'ai le meilleur poste de notre industrie en tant que rédacteur en chef du journal Ottawa Citizen. C'est un fauteuil de premier rang pour le plus grand spectacle du pays. J'aime mon métier. Je dis ceci parce que je pense qu'il y a eu de la désinformation, qui a pu faire son chemin devant ce comité, quant à vie d'un rédacteur de CanWest, et je me sens obligé de faire la lumière.
Comme pour tous les rédacteurs de CanWest, je suis responsable vis-à-vis de mon éditeur pour le contenu éditorial de mon journal. Aucune éminence grise d'un bureau du groupe ne m'indique de que je dois faire. Personne ne m'indique les articles que je dois publier, la première page que je dois publier ou les projets que les journalistes du Citizen peuvent entreprendre. Personne chez CanWest ne me donne de directives pour corser un article ou le laisser tomber. Je prends les décisions aujourd'hui comme je le faisais quand je suis devenu rédacteur sous Hollinger.
Il suffit de regarder la teneur éditoriale d'un ensemble de journaux de CanWest à n'importe quel jour pour s'apercevoir que c'est le cas dans tout le pays. Chaque journal est une marque établie sur son marché et chacun a sa propre personnalité et son propre rapport avec ses lecteurs. Chaque salle de presse a sa propre culture bien établie.
Les rédacteurs des actualités à Montréal savent presque instinctivement ce qui est un article pour la Gazette, tout comme les rédacteurs du Citizen savent ce qui fonctionnera pour ce marché. Personne n'a essayé de changer ceci. Les rédacteurs de CanWest portent leur propre jugement sur les renseignements et, d'ailleurs, ne sont pas toujours d'accords entre eux. Ne serait-ce que la semaine passée, un éditorial dans la Province de Vancouver a qualifié le Citizen de « pleurnichard ». Nous préparons notre vengeance!
Mon collègue Gerry Nott a expliqué la manière dont le Canadian News Desk fonctionne et comment il facilite la mise en commun des meilleurs articles entre les journaux. Avec le CND, CanWest a finalement réalisé ce qui avait été un objectif de longue date pour cette chaîne sous Southam et Hollinger. Cependant, ne succombez pas à l'impression que les journaux de CanWest ne font que partager des articles. La plupart des articles de l'Ottawa Citizen, par exemple, sont produits bien ici, à Ottawa. Les pourcentages sont très similaires dans tout le pays. Ceci signifie que nos journaux restent très locaux.
Après avoir ajouté la contribution du service d'information du CND dans l'ensemble, un total de 75 à 78 p. 100 de nos articles sont produits au sein de CanWest. Ceci, et je suis fier de le dire, fournit à nos lecteurs un dossier qu'ils ne peuvent pas trouver ailleurs.
En tant que rédacteur, je suis également libre d'établir la position éditoriale quotidienne du journal dans la direction générale et le positionnement de notre politique éditoriale, établie en consultation avec l'éditeur, comme pour la plupart des journaux. Là encore, j'ai une liberté considérable dont tout rédacteur de journal s'attend à jouir. Encore une fois, ceci peut mener à des désaccords.
Il y a deux semaines, David Asper m'a fait savoir qu'il était en désaccord profond avec une position éditoriale prise par le Citizen. Nous avons discuté âprement de l'interdiction de publication lors de l'enquête Gomery. L'opinion de M. Asper était que la justice normale exige que le témoignage du témoin soit supprimé parce que chacun faisait face à un procès avec jury pour des actes criminels présumés. En tant que bureau de rédaction, nous rejetons d'emblée les interdictions de publication, ce que nous ferons toujours. J'ai invité M. Asper à partager son point de vue dans un article ouvert qui parut le jour suivant. J'ai avec moi des copies de cet article ouvert et de l'éditorial pour vos archives.
Ce qui est important dans ce cas particulier, c'est que les choses ont fonctionné comme elles le devaient. Le bureau de rédaction est arrivé à une conclusion raisonnée et bien argumentée et David Asper a répondu avec une réponse raisonnée, bien argumentée et, selon moi, fausse. Certains personnes étrangères à CanWest sont contrariées et veulent vous faire croire que les choses fonctionnent différemment. Elles ont tort.
Je porte également un chapeau de responsable au niveau du groupe. En tant que vice-président et rédacteur en chef des publications de CanWest MediaWorks, qui est à mon avis le plus long titre de poste de journalisme, je suis responsable des normes éditoriales, des questions juridiques nationales, de la planification des successions et de la coordination des projets éditoriaux nationaux. Dans cette capacité, je ne dis pas aux rédacteurs quoi faire. Plutôt, j'essaie de faciliter la discussion pour établir des normes journalistiques et des meilleures pratiques autour de questions clés. Nous avons récemment établi, comme on le sait, une norme commune pour l'usage du mot « terroriste ». Nous travaillons actuellement sur une définition commune du plagiat et sur une politique quant à l'utilisation de sources anonymes. Le but est de relevez le niveau pour tout le monde.
Nous avons également travaillé en commun au niveau des rédacteurs pour comprendre comment nos salles de presse touchent la communauté dans son ensemble en termes d'appartenance ethnique, d'âge et de sexe. Nous discutons des manières de coordonner nos programmes bien réussis d'internat pour donner un poste aux meilleurs jeunes journalistes.
Je vous ai donné un aperçu de ce que je fais et je voudrais me tourner maintenant vers les mesures que je souhaiterais voir prendre par le comité.
Je vois les plus grands enjeux, pour les salles de presse canadiennes, non pas dans les salles de presse mais dans les bureaux du gouvernement. Les vraies menaces à la liberté de la presse se rencontrent dans les mauvaises lois et dans les instructions erronées fournies aux bureaucrates. Je traiterai seulement de deux questions ici, pour être bref, et je vous renvoie aux dernières pages de notre dossier dans leur intégralité pour éclairer d'autres questions. Je vous remercie de votre patience pendant que je fais l'orateur.
Tout d'abord, le premier élément de ma liste de soucis est le manque d'accès uniforme à l'information. Même s'ils manifestaient un intérêt, pour la forme, à l'ouverture, plusieurs gouvernements successifs, et ce pour toutes les administrations du pays, n'ont pas rempli leurs promesses d'accroître la transparence et d'ouvrir l'accès aux renseignements décisifs que le public est en droit de connaître. Les journalistes et, on le suppose, les Canadiens ordinaires sont continuellement rembarrés et retardés dans leurs tentatives d'accéder à l'information. L'attitude régnante est celle d'une conformité réticente, au mieux, et, au pire, celle d'une subversion pure et simple des lois. Souvent, les renseignements sont vendus à prix fort en raison des coûts excessifs de traitement et de photocopie. Les responsables de l'accès en sont venus à croire que leur travail est d'épuiser les journalistes plutôt que de leur fournir les renseignements dont ils ont besoin pour signaler la vérité aux Canadiens.
Je suis sûr que chacun, dans cette chambre croit en une presse libre et ouverte, autorisée à étudier et à contrôler le fonctionnement du gouvernement. C'est une clef de voûte de notre démocratie et je crois que votre rapport est une bonne façon d'envoyer un message clair et succinct au gouvernement. Il est temps de donner des dents aux lois sur l'accès. Je suis sûr vous savez que l'Association canadienne des journaux a fait un travail remarquable en menant le combat sur ce front et je vous invite à vous pencher leurs recommandations avec soin.
Je voudrais soulever le spectre de l'intimidation des journalistes canadiens par le gouvernement, un sujet qui, franchement, ne devrait jamais devoir être abordé devant les parlementaires canadiens, mais nous en sommes là. Vous vous rappelez tous le jour sombre de janvier, il y a un an, où le Canada s'est réveillé en apprenant que des douzaines d'officiers de la GRC avaient pillé les bureaux de l'Ottawa Citizen et la maison de la journaliste Juliet O'Neill. Il est aujourd'hui clair que ce raid n'a pas été motivé par le désir de rechercher des documents secrets, mais bien par le souhait d'empêcher le gouvernement et la GRC d'être à nouveau embarrassés quant à leur traitement du cas de Maher Arar.
Cette action ne fut rien moins qu'un assaut digne du tiers-monde sur la liberté canadienne, une tactique conçue et exécutée pour intimider les journalistes qui creusaient le cas bizarre et tragique d'un citoyen canadien kidnappé et envoyé au loin pour être torturé avec, peut-être, la complicité entière du gouvernement canadien. Le cas de M. Arar fait maintenant l'objet d'une enquête et c'est une bonne chose.
En revanche, l'affaire défendue par CanWest, au nom de Juliet O'Neill et du Citizen, traîne en justice. Nous avons jusqu'ici dépensé plus d'un demi-million de dollars dans la défense de cette affaire et dans la lutte pour nos droits; nous dépenserons au moins la même somme avant qu'elle ne soit terminée. Ce n'est pas une chose qu'un citoyen ordinaire, ou même une petite entreprise de médias, pourrait se permettre.
Le raid contre Juliet O'Neill et le Citizen a été rendu possible par les dispositions de la Loi sur la protection de l'information, un texte législatif préparé à la hâte dans les jours qui ont suivi les événements du 11 septembre. Je crois que cette loi et d'autres lois similaires permettent aux politiciens trop de flexibilité pour contrer la liberté de presse au nom de la sécurité nationale. Je crois que l'exemple que je viens de donner démontre cette idée et j'invite le comité à signifier au Parlement par un message très clair que ce n'est pas une manière de faire les choses. Nous n'avons pas besoin de lèche-bottes au Canada.
Le président : Puis-je faire observer qu'il y a une distinction à faire entre le gouvernement et le Parlement, d'une part, et la police de l'autre? Nous mettons cette distinction en avant.
M. Anderson : Avec tout mon respect, je pense que, dans ce cas-ci, les limites sont brouillées et, en ce qui concerne la loi sur la protection de l'information, c'est du ressort du procureur général.
Le président : Je prends note de la remarque sur la loi. C'est certainement un domaine approprié que nous pouvons contempler mais nous ne disons pas quoi faire à la police. Ceci ne signifie pas que nous n'avons pas pris très au sérieux le cas que vous avez présenté. Il a été mentionné dans nos discussions privées et, je pense, dans certaines de nos audiences. Je ne conteste pas l'importance du cas que vous présentez. Je nous défends en disant que nous ne disons pas aux gendarmes ce qu'ils ont à faire.
M. Anderson : Nous verrons.
Le président : Nous pouvons leur donner des conseils, mais nous ne leur disons pas quoi faire.
Merci beaucoup. Il y a deux remarques rapides que je voudrais faire avant de repasser la main aux questions. La première est que la copie de votre dossier, que j'ai reçue, est entièrement noire et blanche, et vos beaux graphiques sont complètement noirs. Je ne sais pas si vous avez des versions en couleur du dossier ou si vous les avez imprimés en teintes de gris. Ceci a été télécopié. C'est arrivé par télécopie.
M. Elliot : Les originaux fournis au greffier étaient en couleur.
Le président : C'est un point de clarification à votre attention. Dans le dossier, vous observez d'une humeur âpre que ce comité, quand il a commencé son travail, n'a pas apporté d'études ou d'analyses pour démontrer le besoin de tenir une telle enquête. En fait, dans la manière dont les règles du Sénat fonctionnent, vous devez obtenir le mandat du sénat avant de pouvoir effectuer des études et des analyses. Il n'est pas permis à un comité d'entreprendre des études de cette nature jusqu'à ce qu'il en ait le mandat. Ceci est pour votre information personnelle. Personne en dehors du sénat n'est supposé connaître ces règles.
Le sénateur Johnson : Il était bon que vous ayez mentionné la nostalgie parce que je me rappelle le début de l'empire des Aspers quand j'étais un enfant. Je pense que c'est l'une des plus grandes histoires de réussite canadiennes. Je vous félicite donc pour ce que vous faites.
Je pense également qu'il est très bien que ceci soit centralisé à Winnipeg. Je m'en félicite car, naturellement, je suis de Winnipeg. Quand on grandit dans l'Ouest, il est bon d'avoir un certain équilibre du centre du Canada jusqu'aux Prairies.
Comme ma collègue, le sénateur Carney, je pense que c'est un excellent document. Je n'ai pas eu le temps de l'absorber complètement. Parfois je me sens complètement réactionnaire face à cette étude parce que nous avons tellement à apprendre et à passer en revue dans notre rapport. C'est une industrie qui bouge rapidement, ce qui nous a poussés jusqu'à nos limites. Vous dites que la fragmentation, en fait, et non la concentration, est la question principale. Notre étude indique la concentration. Où ceci nous mènera-t-il? Je me demande où est la zone floue maintenant?
M. Camilleri : C'est très simple. Ce qui s'est produit est qu'on a retiré aux entreprises médiatiques leur intermédiaire dans leur rapport avec leur audience. L'équilibre des forces s'est déplacé.
Dans la période dorée où nous avons grandi, les entreprises médiatiques pouvaient décider ce que vous regardiez, ce qui vous lisiez, le moment où vous le lisiez et le moment où vous le regardiez. Une émission télévisée était diffusée un jeudi à 20 heures et si vous la manquiez, vous l'aviez manquée — à moins que le réseau ne se décide à la rediffuser.
Maintenant, en raison d'innovations technologiques, les lecteurs, les consommateurs et les téléspectateurs sont les rois. Ils ont la puissance des décideurs. La manière dont ceci se termine est que les consommateurs auront un choix pratiquement infini et qu'ils pourront consommer ce qu'ils veulent, où ils veulent, quand ils veulent et comme ils le veulent.
Je vais vous citer deux anecdotes succinctes qui touchent les journaux et la télévision.
Aujourd'hui, à l'âge des caméras vidéo personnelles, qui ne sont rien d'autre que des magnétoscopes à cassette dopées, vous pouvez enregistrer des émissions de télévision, en éliminer les publicités et les regarder quand vous voulez. Vous pouvez même enregistrer ces émissions à partir de signaux éloignés dans des endroits lointains. Je peux enregistrer une émission télévisée de la Colombie-Britannique de ma maison à Toronto. Je n'ai pas à regarder ce que le diffuseur local a programmé.
La deuxième chose est la suivante : pensez aux journaux. Je me rappelle de l'époque où j'étais adolescent et où je courrais, le matin, à la porte d'en avant pour obtenir les résultats des sports. Je n'ai plus besoin des journaux pour savoir ça. J'obtiens les résultats sportifs en temps réel sur ESPN.com ou TSN ou par une autre voie. Ceci a fondamentalement changé ce que nous faisons. Où cela s'arrêtera-t-il? Voilà où nous en sommes aujourd'hui. Le consommateur est roi et le consommateur pilote l'ordre du jour des médias. Le consommateur, le lecteur et le téléspectateur nous disent ce qu'ils veulent, où ils le veulent et comment ils le veulent.
Le sénateur Johnson : Est-ce que ceci se produit dans vos centres d'opération en dehors du Canada? Pourriez-vous nous présenter l'état de la concurrence, en Australie, en Irlande et en Nouvelle Zélande, ou l'efficacité de la réglementation des médias? Qu'avez-vous appris de vos exploitations étrangères en termes de ce qui se passe au Canada?
M. Elliot : La chose la plus saisissante quant à nos opérations en Australie, en Nouvelle Zélande et en Irlande est qu'aucun de ces marchés n'est aussi mûr que le marché canadien par rapport aux choix que les consommateurs ont à leur disposition. L'une des raisons est qu'aucun de ces endroits n'a les États-Unis à sa porte; dans aucun de ces endroits les consommateurs n'ont la possibilité d'utiliser les médias des États-Unis aussi facilement qu'ils peuvent syntoniser une chaîne canadienne ou leurs propres médias.
Ceci a une incidence, non seulement en termes d'absence de fragmentation des audiences, mais aussi en termes de fragmentation des annonceurs. En fin de compte, nos activités à l'extérieur du Canada tendent à être plus rentables que nos activités médiatiques au Canada.
Le sénateur Johnson : Je suis très intéressé par vos hebdomadaires. Que faites-vous en ce qui concerne les journalistes qui y travaillent et du contenu, en particulier en termes de l'aspect culturel de la vie dans ces collectivités? Est-ce que ceci est rapporté dans les hebdomadaires, en particulier en Colombie-Britannique? Je ne connais rien aux hebdomadaires de Colombie-Britannique. Je ne les ai jamais lus. Je n'ai lu que l'Interlake Spectator.
M. Camilleri : Nous défendons passionnément la couverture locale de l'information dans tous les médias que nous possédons. Qu'il s'agisse de la télévision ou des journaux, nous croyons que la plus belle occasion et la mission de nos centres locaux est de signaler ce qui se passe dans les collectivités locales aux personnes de la localité concernée. Nous défendons ceci avec passion et c'est une clé de voûte de notre stratégie. Ceci se reflète dans la manière dont nous prenons des décisions sur l'attribution de ressources qui ne sont pas illimitées.
M. Nott : La question n'est-elle pas plutôt : comment les journaux hebdomadaires couvrent-ils la culture dans les villes où ils sont situés?
Le sénateur Johnson : Oui, cela fait partie de la question. L'autre partie de la question est le nombre de personnes que vous avez dans les communautés pour couvrir les événements, grands et petits. Je suis très intéressé par les nouvelles de la communauté, et de ce qui reflète la vie des gens.
M. Nott : Nous reflétons la démographie que nous visons en recrutant avec soin. Nous avons fait des recherches dans tout le Canada pour recruter des personnes qui nous semblaient parfaitement correspondre à la cible démographique de l'audience. Je ne pas qu'il y ait des employés de plus de 27 ans à Dose. Il suffit de voir leur salle de presse pour réaliser que ce n'est pas l'Ottawa Citizen, je dis ceci respectueusement.
Nous avons des journalistes dans chacune des villes que nous couvrons. À Vancouver, nous avons deux journalistes qui se consacrent à couvrir la scène locale des arts et de la culture. Si vous n'avez pas vu ce journal, le format de ces articles est très court. C'est un groupe qui veut ses nouvelles à la hâte et des nouvelles dont il peut se servir.
Le sénateur Johnson : Est-il orienté jeunesse, de 18 à 34 ans?
M. Nott : Il est orienté jeunesse et conçu pour les aider à prendre des décisions sur la façon dont ils passent leur temps. Dans chaque ville où nous sommes, nous avons des journalistes qui couvrent cet aspect de leur vie.
Le sénateur Johnson : Je connais l'Ottawa Citizen. M. Anderson, avez-vous des commentaires à faire?
M. Anderson : Je ne connais pas suffisamment les hebdomadaires pour présenter des observations à leur sujet.
Le sénateur Johnson : Une autre question sur les hebdomadaires. Vos chiffres augmentent-ils en termes de tirage?
M. Camilleri : Dans l'industrie de la presse dans le monde, qui est plus conforme aux tendances, il y a un déclin systémique à long terme dans le tirage des journaux. L'enjeu de l'industrie est d'arrêter ce déclin.
Le sénateur Johnson : Est-ce que c'est susceptible de se produire?
M. Camilleri : Je vous ai cité une anecdote au sujet des résultats sportifs. Nos lecteurs se tournent vers le journal pour lire quelque chose de différent de ce qu'ils y lisaient il y a 15 ou 20 ans.
L'enjeu, pour l'industrie, est de trouver le nouvel ensemble de contenu qui arrêtera ce déclin et se mettra au diapason, si tout va bien, d'un lectorat de journaux croissant. Personne au monde n'a encore vraiment trouvé la recette.
Le sénateur Johnson : M. Anderson, votre lectorat n'augmente-t-il pas au Ottawa Citizen?
M. Anderson : Le lectorat a augmenté dans la dernière banque d'annonces. Il suit des hauts et des bas, selon l'année et la mesure. Au mieux, le lectorat est stable.
M. Camilleri : Si vous tracez une courbe sur une période de 20 ans, il peut y avoir des itérations dans n'importe quelle période spécifique, mais elle va de haut en bas.
Le président : Aux États-Unis, il y a eu des révélations fascinantes sur la façon dont certains journaux, qui se sont évidemment sentis sous pression grave, gonflaient artificiellement leur chiffre de tirage. Ces pressions existent-elles au Canada?
M. Camilleri : Absolument pas. Nous l'avons dit aux analystes, actionnaires, et autres. Nous faisons tout à fait confiance à l'intégrité de nos chiffres et à la manière dont ils sont rapportés.
Le président : Je vous ai interrompu. Désolé.
Le sénateur Johnson : Pas de mal. Je voudrais dire aussi que je suis totalement d'accord avec la liberté de la presse et qu'il est donc véritablement important de conserver les lecteurs. Je sais que les jeunes ne lisent pas les journaux, j'espère donc que ceci donnera des résultats avec ces personnes et avec Metro. Les chiffres augmentent, mais le consommateur est aussi le roi dans le monde de la presse écrite.
M. Camilleri : Absolument.
Le sénateur Johnson : Cependant, la tradition de lire son journal le matin n'est pas présente dans la société d'aujourd'hui.
M. Camilleri : Si vous examinez toutes les études de l'industrie, il y a plusieurs raisons à ceci. Une quantité infinie de choix est offerte pour obtenir des renseignements par d'autres voies et l'un des arguments courants est le manque de temps. C'est le cas depuis déjà longtemps.
Le président : C'est vrai.
M. Anderson : Ce qui est saisissant, c'est que nous sommes dans l'âge d'or de l'imprimerie. Il n'y a jamais eu plus de mots imprimés qu'en ce moment. Il n'y a jamais eu plus de journalistes en activité. Même pour la tribune de la presse parlementaire, le problème n'est pas un manque de membres; elle éclate aux coutures. La croissance est dans les publications, les revues, les journaux, les sites Internet et les carnets web des marchés à créneaux qui répondent aux besoins très spécifiques des lecteurs. À l'Ottawa Citizen, nous avons fait une étude il y a quelques années sur les travailleurs spécialisés en hautes technologies, qui nous semblaient ne pas suffisamment lire notre journal. Après une série de groupes de consultation et d'études de marché, le résultat fut quelque peu décourageant parce que nous avons découvert qu'ils voudraient bien nous lire si nous mettions à leur disposition un journal spécifiquement adapté à leurs besoins, le Moi quotidien; le Sénateur Fraser quotidien; tout que vous pouvez sélectionner. La technologie nous aidera à faire cela en temps venu, mais c'est également une pierre d'achoppement pour le quotidien à grand format traditionnel.
Le sénateur Johnson : Ce serait terrible. Merci beaucoup.
Le sénateur Munson : Vous avez parlé des résultats sportifs. Je n'ai pas attendu TSN ou ESPN, particulièrement pour le tournoi du championnat de golf, j'étais sur le net pour un compte-rendu trou par trou. C'est là où se rendent un bon nombre de gens, en particulier ceux d'une nouvelle génération.
Vous avez parlé de votre fierté vis-à-vis de la couverture locale. Global existe depuis 25 ans. Que dire de la couverture à l'étranger? Je sais que vous envoyez des personnes, et vous l'avez dit dans votre dossier, dans différents endroits et que votre couverture est bonne. Cependant, un jour viendra, dans une période de l'évolution de l'entreprise, où vous devrez avoir — du moins selon moi — des correspondants étrangers au moins sur chaque continent afin de couvrir les actualités ou de donner une perspective canadienne au reportage. Avez-vous réfléchi à des investissements ou à l'installation de journalistes canadiens à l'étranger, ainsi qu'à la couverture de ces actualités, contrairement à ce que nous avons vu récemment même chez CBS et dans d'autres chaînes? Elles parlent de collecteurs de renseignements qui ont accès à toute cette technologie et qui peuvent emballer ou empaqueter — comme vous voudrez appeler ça — à New York ou à Atlanta. Je ne pense pas que ceci soit un service rendu au public canadien.
M. Camilleri : Évidemment, traiter la fragmentation, c'est en premier lieu nous attaquer à notre réalité économique. Nous croyons passionnément que l'une des manières de nous démarquer et de fournir un service unique à nos téléspectateurs et à nos lecteurs est d'être particulièrement disposés à couvrir les actualités et les nouvelles locales du Canada. Ceci ne veut pas dire que nous ne sommes pas conscients de nos responsabilités et des possibilités présentes dans l'arène internationale. Ce que nous avons décidé de faire est que lorsqu'il y a un événement d'importance internationale, comme la guerre en Irak, nous assemblerons l'équivalent d'un groupe de forces spéciales, SWAT, tigre ou autre, et nous le déploierons. Nous déployons alors des ressources importantes.
Le sénateur Munson : Ne dites pas DART pour équipe d'intervention en cas de catastrophe.
M. Camilleri : Nous déployons des ressources importantes dans ces points chauds internationaux pour obtenir une perspective locale. La réalité est qu'en ce moment, des événements sont en train de se produire quotidiennement dans le monde. Les gens en entendent parler en temps réel. Si vous avez un seul journaliste dans une juridiction locale alors qu'il y a Internet et des chaînes d'information 24 heures sur 24, les gens peuvent consommer en temps réel. Nous avons constaté que nous obtenons du succès lorsqu'un événement important se produit et que nous déployons des ressources importantes pour apporter une perspective unique sur cet événement.
M. Wyatt : C'est une bonne question. Elle consiste à donner la priorité aux ressources que vous avez sous la main pour élaborer l'organisation de l'information. En termes de chaînes individuelles, Global News existe depuis longtemps mais en termes de réseau national et de l'élaboration d'un programme national, la chaîne est encore dans son enfance. Nous avons clairement pris la décision que notre mandat, en ce moment, est de fournir une voix canadienne claire et d'augmenter peu à peu nos ressources sur le marché canadien, tout en maintenant simultanément un bureau à Washington D.C. et en utilisant des journalistes indépendants dans le monde entier. Si vous regardez les événements des trois dernières années, depuis que Global National, par exemple, diffuse un bulletin d'information nationale, nous avons utilisé les ressources de notre associé de presse et avons utilisé les propres ressources de la chaîne pour envoyer des équipes d'intervention partout dans le monde. Pour le dernier événement principal, par exemple, en Indonésie avec le tsunami, nous avons pu avoir accès à cette région assez rapidement, indépendamment de qui que ce soit qui aurait eu un bureau plus proche, et nous avons présenté des reportages et des renseignements de qualité sur la région et avec une perception de la situation aussi bonne que n'importe qui. Nous décidons où nous allons mettre nos ressources en commun pour fournir la couverture la plus efficace possible. Je pense que nous pouvons faire de la sorte. Est-ce que je souhaiterais être la BBC et avoir des journalistes dans chaque ville du globe? Bien sûr, mais je pense que l'on peut développer et faire grandir un service d'information nationale, au moins dans une perspective de télévision, en consacrant des ressources et des fonds, en ciblant votre couverture et en développant les équipes d'intervention mentionnées par M. Camilleri.
M. Nott : Nous avons essayé d'avoir une précision chirurgicale là où nous allons. Je fais référence à notre voyage au Vietnam. Il n'y avait aucune autre équipe canadienne sur ce reportage quand nous l'avons fait. Nous avons également essayé d'établir, du côté de la presse, un réseau de reporters locaux canadiens dans ces endroits. Au moins nous pouvons filtrer certains de ces reportages vers l'audience canadienne.
M. Anderson : Je pense que nous sommes devenus plus sophistiqués. Je pense que nous sommes tous entichés de l'idée romantique d'avoir un bureau dans chaque ville étrangère principale. Nous savons également que de payer un journaliste à se reposer dans une ville étrangère et suivre l'événement du jour n'offre pas nécessairement la meilleure valeur. Il vaut mieux développer l'expertise des journalistes puis les laisser voyager. C'est ce que nous faisons. La vérité est que la facilité et la souplesse des voyages fait qu'il est maintenant très facile pour un journaliste tel que Dan Gardner de l'Ottawa Citizen de développer une expertise sur la politique et les informations ans le monde, prendre l'avion puis rentrer chez soi pour offrir à nos lecteurs une perspective canadienne.
Le sénateur Munson : Je dois me faire vieux. J'ai eu plaisir à être correspondant étranger pendant dix ans et je suis sûr que les personnes de votre organisation voudraient bien avoir cette carotte se balancer devant elles. Il me semble qu'il y a 10 ans, votre entreprise a amorcé la mort de Presse Canadienne. Il n'y a pas eu beaucoup de débat public à la perte de la seule agence de presse canadienne bilingue, nationale et multimédia. Y a-t-il un débat chez CanWest de nos jours sur Presse Canadienne?
M. Camilleri : Je ne suis pas certain de savoir qui dit ceci. Dans toute notre organisation, si les coûts d'un service excèdent l'avantage qu'il procure, alors nous devons évaluer ce service. En ce moment, nous sommes membres de Presse Canadienne, sauf le National Post. Il n'y a aucun engagement à court terme à nous retirer; nous continuons à évaluer cette question de manière continuelle et nous continuons à avoir avec eux un dialogue continu. Notre perspective est que si le coût excède l'avantage qui en est retiré, alors nous devons sérieusement évaluer la situation.
Le sénateur Munson : Êtes-vous disposé à continuer de soutenir la PC et le National Post à s'y affilier?
M. Camilleri : Pour le National Post, c'était une question de remettre le journal sur pied et d'essayer de le rendre rentable. Le National Post est un cas unique où nous devons prendre des décisions en termes de soutien de cette voix au Canada. Je sais qu'un bon nombre de personnes nous critiquent pour le National Post mais je pense que nous méritons une certaine reconnaissance pour l'avoir maintenu en vie. Il aurait été facile, il y a cinq ans, de prendre la décision de s'en débarrasser. Au National Post, en raison de sa situation unique, nous prenons des choix difficiles, mais qui visent et s'engagent tous à rendre ce journal rentable et fonctionnel. Il ne va pas nous quitter.
Le sénateur Munson : CanWest essayerait-elle de remplir ce vide si la PC arrêtait ses activités? Si vous le faisiez, je serais curieux de savoir comment les bureaux d'information francophones obtiendraient leurs nouvelles du Québec et comment les bureaux anglophones obtiendraient leurs nouvelles du Québec?
M. Nott : En toute franchise, nous sommes loin d'avoir même considéré cette question. Sur le point de la valeur de Presse Canadienne, M. Anderson gère un journal et la remarque que je ferai est que la PC a fait un travail remarquable en stabilisant ses évaluations pour les journaux pendant environ dix ans, et ce à une époque qui était difficile pour elle. En même temps, en raison du lancement du CND, nos journaux utilisent nettement moins d'articles en provenance de la PC. Ceci a un poids dans l'équation de valeur que les rédacteurs envisagent à la phase du budget.
M. Anderson : Avec de plus en plus d'informations facilement accessibles, sur l'Internet, par exemple, et à travers le Canada et dans le monde, la PC devient de moins en moins pertinente à mesure que le temps passe. Nous devons tenir compte de cela quand nous considérons le montant que nous devons lui payer et le service que nous en tirons.
Le sénateur Munson : Si vous vous penchez sur les journaux des villes de petite taille dans l'ensemble du pays, en dehors des journaux de CanWest, et même en incluant les journaux de CanWest, si vous parlez du Gardian de Charlottetown ou d'autres journaux similaires, la PC est leur gagne-pain. Qui serait la voix nationale, par exemple, des journalistes, parmi lesquels je compte beaucoup d'amis, qui s'assoient à Ottawa et écrivent ce qui se passe à Ottawa pour le reste du pays? Qui pourrait relater ces événements si Presse Canadienne n'était pas là? Presse Canadienne peut aussi écrire sur l'Internet.
M. Anderson : Je pense que c'est une question destinée à ceux qui gèrent le Gardian de Charlottetown.
Le sénateur Munson : Ils ne peuvent pas se permettre d'avoir un journaliste ici, car à Ottawa, après les 25 années que j'ai passées ici, il y a de moins en moins de journalistes.
M. Anderson : Je me permets de ne pas être d'accord. Quand j'étais au Telegraph-Journal au Nouveau Brunswick, qui est un journal de taille comparable au Gardian de Charlottetown, j'étais rédacteur gérant lorsque nous avons laissé tomber la PC. Nous avons laissé tomber Presse Canadienne et avons embauché huit journalistes, y compris un journaliste local à Ottawa, avec l'argent que nous avons économisé de Presse Canadienne; nous nous en sommes très bien portés, merci. L'Associated Press est une part énorme de l'ensemble fourni par la PC et c'est très valable. Il est difficile d'obtenir des actualités américaines sans la PC, ce qui est ironique. Je ne suis pas ici pour plaider au profit des petits journaux de la Presse Canadienne mais je dois présenter le point de vue de quelqu'un qui en a fait l'expérience et qui sait que ce n'est pas un obstacle insurmontable. En fait, je pourrais faire valoir que le Telegraph-Journal a connu ses années de gloire quand il n'utilisait plus Presse Canadienne et qu'il a alors remporté plusieurs récompenses nationales.
Le sénateur Munson : J'ai le sentiment qu'il n'y a pas de soutien pour un service d'informations national, à moins que vous n'en soyez responsables.
M. Nott : Je ne suis pas sûr que ce soit le cas, à moins que nous nous en occupions. Nous avons mis le Canadian News Desk en place pour nous servir de l'expertise de nos journalistes. L'avantage certain pour le lecteur et les personnes qui vendent les journaux dans ces villes est d'avoir un produit unique pour contrer la concurrence. Le sénateur Carney a fait référence aux similitudes du contenu entre les journaux de Vancouver, qui utilisent le fond de CanWest. Ce qui m'a frappé c'est qu'avant le CND, si nous n'existions pas, ces articles auraient été remplis du même contenu provenant de Presse Canadienne, ce qui apparemment n'est pas un problème, mais lorsque le contenu est d'origine CanWest, cela le devient.
M. Camilleri : Je ne veux pas rentrer en conflit sur ce point, mais je me raidis à la suggestion que nous ne soutiendrions pas un service d'information à moins que nous le possédions. Nous n'avons jamais dit cela, et ce n'est pas ce en quoi nous croyons. Je sais qu'il y a les gens qui affirment cela. Je me raidis lorsque j'entends cela et je prends grand soin d'exprimer mon désaccord à ce sujet, parce que n'est pas ce que nous disons. Ce n'est pas ce que nous avons pu dire. Nous avons soutenu la PC.
Une fois encore, dans une ère de fragmentation où le tirage baisse et le nombre de téléspectateurs de nos chaînes traditionnelles baisse, la publicité de base est fragmentée. Nous sommes une société cotée. Vous pouvez voir les tendances des revenus dans notre groupe de télévision classique. Nous traitons de questions fondamentales et profondes, et notre monde change. Nous avons à prendre des décisions difficiles. Cela n'a rien à voir avec le fait de posséder ou pas la Presse Canadienne. On en revient au coût; si les coûts sont supérieurs aux bénéfices retirés, en tant qu'homme d'affaires, je ne suis pas sûr de pouvoir justifier de rester membre. Aujourd'hui, nous n'avons pas pris la décision de partir, autre que le National Post, qui est une situation unique.
M. Anderson : Une remarque utile au nom de l'exactitude, nous possédons bel et bien Presse Canadienne. C'est une coopérative. Elle est possédée par tous les journaux, y compris CanWest.
Le sénateur Munson : Comme vous le savez, je suis un ancien journaliste. J'ai exercé cette profession pendant près de 32 années et je suis heureux de voir que vous vous êtes raidis. Je recherchais en fait une bonne déclaration et vous m'en avez donné une au sens où vous vous êtes bien expliqués, d'une manière tout à fait particulière, ce que j'apprécie.
Le sénateur Tkachuk : Bienvenue. C'est bien de voir une entreprise de médias du Canada de l'Ouest. Nous n'en voyons aucune ici. Elles sont toutes à Toronto. J'ai toujours cru que les politiques que nous avons dans ce pays expliquent qu'elles ont toutes fini au même endroit, à Toronto.
Nous sommes ici pour parler des informations, et nous sommes réunis en tant que comité pour discuter de l'intérêt public. Nous ne sommes pas intéressés à savoir si vous avez de bonnes ou de mauvaises nouvelles, mais nous voulons connaître la façon dont nous pouvons introduire de la concurrence et fournir une diversité des opinions et un climat économique sain pour que les services d'information puissent prospérer au Canada.
Je voudrais vous féliciter du fait que vos actualités nationales, à la télévision, sont produites à Vancouver. Je pense que c'est une bonne chose. Nous avons entendu des témoins à Vancouver nous dire que vous n'aviez pas de journalistes présents à l'assemblée législative provinciale de Victoria. Est-ce vrai?
M. Wyatt : Non, ce n'est pas vrai. Keith Baldry est notre chef de bureau à Victoria.
Le sénateur Tkachuk : Pourquoi est-ce que des gens se rendraient à notre comité pour nous dire cela?
M. Camilleri : J'ai lu, dans les retranscriptions, beaucoup de choses qui me font rouler les yeux parce qu'elles sont fausses.
Le sénateur Tkachuk : Ne nous emportons pas.
M. Nott : Le Times-Colonist de Victoria dessert le bureau législatif au nom des journaux de Vancouver. Les journaux de Vancouver se différencient sur leur marché par leurs chroniqueurs; les journaux y ont pris la décision, selon ce qu'ils connaissent de leurs lecteurs, de déployer leurs journalistes à tel ou tel endroit. Ce sont des décisions locales. Les rédacteurs du Sun et de la Province doivent avoir décidé, en fonction d'un raisonnement, qu'ils n'avaient pas besoin d'employer une ressource locale pour couvrir Victoria.
Le sénateur Tkachuk : Est-ce une question de mauvaise interprétation du fait que le journaliste du Times-Colonist de Victoria a fait un reportage au nom des journaux de CanWest Global à Vancouver? Est-ce la manière selon laquelle cela se passe?
M. Wyatt : J'habite et je travaille à Vancouver. Dans une perspective de télévision, pour la chaîne de télévision Global, nous avons un chef de bureau à Victoria et une équipe là-bas; dans une perspective de lecteur de journal, Vaughn Palmer, par exemple, y est en poste et représente la voix de l'éditorial de Victoria.
Le président : En tant que chroniqueur?
M. Wyatt : Oui.
Le sénateur Tkachuk : Nous n'avons pas eu beaucoup de réactions des journalistes du groupe CanWest invités à se présenter devant nous et parler de certaines questions de politiques publiques.
Est-ce le résultat de la politique officielle de CanWest Global ou n'y avait-il simplement pas d'intérêt?
M. Camilleri : Les journalistes ont pris une décision individuelle de comparaître ou pas.
Le sénateur Tkachuk : Il semble quelque peu étrange qu'avec tous les journalistes que vous avez, nous n'en ayons entendu si peu.
M. Elliot : Peut-être pourrais-je répondre à ceci? De mon bureau du groupe, je savais qu'un certain nombre de journalistes du pays avaient été invités à comparaître. Nous leur avons dit que c'était leur décision de comparaître ou pas. Toutefois, s'ils devaient comparaître, ils comparaîtraient en leur capacité personnelle et non au nom de l'entreprise, parce que cette dernière aurait, tôt ou tard, à comparaître devant le comité en tant qu'entreprise. De ce que je sais, au moins un ou deux de nos journalistes ont comparu, mais ils ont pris cette décision individuellement.
Le sénateur Tkachuk : J'ai quelques questions concernant la télévision. Doit-il être plus facile pour une personne d'obtenir la propriété d'une chaîne de télévision ou d'en lancer une nouvelle dans le cadre des règlements actuels? Cela est-il trop onéreux, doit-il être moins onéreux, ou cela convient-il?
M. Camilleri : Pour lancer une nouvelle chaîne?
Le sénateur Tkachuk : Oui. Si une personne a de l'argent et veut commencer une chaîne à Vancouver, Toronto ou Mississauga — comme nous l'avons découvert, il n'y en a pas à Mississauga, ce qui m'a étonné : qu'une ville de 100 000 personnes n'ait pas sa propre chaîne de télévision — pourquoi quelqu'un n'ouvrirait pas une chaîne de télévision là- bas? Qu'est-ce qui pourrait l'en empêcher?
M. Camilleri : J'habite Mississauga.
Le sénateur Tkachuk : Pourquoi n'avez-vous pas lancé une chaîne de télévision là-bas?
M. Camilleri : Je peux m'asseoir dans ma salle de séjour et regarder 300 chaînes grâce aux services existants. Si j'extrapole en tenant compte des signaux distants sur le satellite, c'est même plusieurs fois ce chiffre. Si vous voulez vraiment être extraverti, dans ma rue il y a beaucoup d'antennes paraboliques noires et grises de DirectTV qui captent 500 chaînes des États-Unis.
Le sénateur Tkachuk : Vous dites que ce n'est pas la difficulté d'obtenir une licence, ou que c'est le fait que vous ne pouvez pas en tirer de bénéfices, ce qui est la raison pour laquelle tout le monde veut acheter une télévision et des stations de radio alors qu'il y a, depuis très longtemps, une concurrence qui s'accroît, des satellites, du câble et de tout le reste?
M. Camilleri : J'imagine que c'est une question d'économie. Vous avez raison, Mississauga possède 800 000 habitants. Si vous lancez une chaîne de télévision à Mississauga, vous aurez 200 ou 300 autres chaînes concurrentes. C'est la réalité.
Le sénateur Tkachuk : Il semble que nous ayons besoin de plus de concurrence jusqu'à ce que vous obteniez une licence, mais, une fois celle-ci en poche, que vous ayez besoin de moins de concurrence. Laissez-moi poser à nouveau cette question. Cela doit-il être plus facile? Doit-il y avoir moins de règlement pour lancer des chaînes de télévision au Canada? Nous avons seulement CBC Newsworld en tant que service d'information phare et nous amenons Fox, MSNBC et CNN. Quand Global n'a pas sa propre chaîne d'information, est-ce que tout ceci n'est pas ridicule? Qu'est- ce qui vous retient? Quel est le problème? Je ne vois pas le problème, parce que c'est une activité rentable et personne ne peut me dire que cela n'est pas la cas.
Mme Bell : C'est rentable, mais dans la mesure où les grandes entreprises ont réussi, par des économies d'échelle, à pouvoir rester rentables. Si vous êtes un petit intervenant indépendant et si vous parlez à certains des plus petits groupes de diffusion, ils vous diront qu'ils ont des enjeux très spécifiques. La fragmentation les tue.
En fait, nous avons des chaînes de petite taille et de taille moyenne qui ne font aucun profit. Si nous ne possédions pas Toronto, Vancouver, et Alberta, nous ne pourrions pas les subventionner. Je pense que huit ou neuf de nos chaînes traditionnelles ne sont pas lucratives.
Le sénateur Tkachuk : Elles perdent de l'argent?
Mme Bell : Absolument, de façon constante chaque année.
M. Camilleri : Par exemple, avec le National Post, nous pouvons le soutenir en raison de l'existence du groupe. Toronto One est une nouvelle chaîne sur un grand marché.
Le sénateur Tkachuk : Si le National Post perd de l'argent et que huit chaînes de télévision perdent de l'argent, d'où tirez-vous vos revenus?
Mme Bell : Toronto, Vancouver et l'Alberta.
Le sénateur Tkachuk : Revenons sur ce point. Si, en tant que comité, nous examinons les politiques publiques, devons-nous diminuer les méandres des règlements pour l'octroi d'une licence de télévision? En d'autres termes, lorsque vous avez l'argent et que vous souhaitez ouvrir une chaîne de TV, devez-vous avoir le droit de le faire? Lorsque vous avez l'argent et souhaitez avoir concurrencer Newsworld ou Newsnet, devez-vous avoir le droit de le faire? Lorsque vous avez l'argent, devez-vous pouvoir lancer une station de radio? Si vous pouviez vous permettre d'acheter les ondes, ou peut-être même n'est-ce pas nécessaire de nos jours, dans un garage, devriez vous avoir le droit de le faire? Est-ce que ce serait une bonne chose pour le Canada? Est-ce que cela serait bon pour le secteur de la radiodiffusion?
Mme Bell : sénateur, le processus de licence est assez complexe. Si vous examinez l'aspect conventionnel de la télévision, par exemple, quand la commission reçoit une demande de nouveau service de télévision, elle établit un appel d'offre et invite les intéressés de la licence à en faire la demande et entrer en concurrence pour cette fréquence. Techniquement, vous ne pouvez pas acheter une fréquence. Vous pourriez monter votre dossier, comparaître à une audience et présenter votre cas. La commission décidera en fonction d'un certain nombre de critères, dont le fait de savoir s'il y a de la place sur le marché.
Le sénateur Tkachuk : Le marché ne devrait-il pas décider lui-même?
Mme Bell : Le marché le fait, dans une certaine mesure.
Le sénateur Tkachuk : Pourquoi la commission devrait-elle le décider? Les membres du CRTC devraient être les dernières personnes à le décider. Nous nous attaquerons à cette question et aurons des débats là-dessus, ainsi j'ai besoin de votre aide en la matière.
M. Camilleri : La remarque que je faisais plus tôt est que le marché détermine; le consommateur décide aujourd'hui parce que le consommateur est roi. À l'heure actuelle, il possède des choix sans fin pour consommer des médias. Il décide, parce que si vous regardez les 20, 30, 40, ou 50 années de tendances systémiques du déclin de la circulation des journaux, si vous vous penchez sur les audiences et parts de marché des dix dernières années dans le réseau traditionnel de diffusion, la portée de l'écoute est moitié moindre. Le consommateur décide.
Le sénateur Tkachuk : Si c'est ainsi, pourquoi est-ce que si je veux souscrire à un chaîne d'information qui ne ressemble pas aux autres le — à savoir Fox — n'y a-t-il pas une chaîne canadienne?
M. Camilleri : Il n'y a pas de chaîne Fox News canadienne?
Le sénateur Tkachuk : Il n'y a pas d'équivalent canadien. Il n'y a aucune chaîne privée d'information dans ce pays sauf les premières pages de l'information possédées par CTV, et personne d'autre. Est-ce que cela ne vous frappe pas ou n'y-a-t-il que moi pour trouver cela plutôt étrange? Pourquoi cela ne s'est-il pas produit?
Mme Bell : Une partie des critères pour autoriser de nouveaux services est de regarder ce qui existe déjà sur le marché et établir s'il y a de la place pour des services concurrentiels supplémentaires. Le Canada fait un dixième de la taille des États-Unis. En fait, nous avons une quantité incroyable de choix pour un pays de cette taille. Il est clair que nous ne pouvons pas soutenir la même concurrence que vous auriez dans un pays de la taille des États-Unis.
Nous avons deux services d'information nationaux. Vous avez également CHUM Television qui possède un service d'information régional à partir de Toronto, qui est un service d'information 24 heures sur 24. Puis, vous avez toutes les chaînes traditionnelles de télévision qui fournissent de grandes quantités de nouvelles locales, nationales et internationales.
M. Camilleri : On ne peut pas nier l'impact que CNN, CNN Headline News et Fox News auront en fin de compte dans ce pays en termes d'émasculation des services d'information domestiques. Que cela nous plaise ou pas, les Canadiens aiment consommer le contenu culturel du sud de la frontière.
Mme Bell : Il y a un montant fini de dollars qui rentre dans le système. La télévision doit être subventionnée par quelque chose. Les consommateurs sont également disposés à payer des services spécialisées dans une certaine mesure. Là encore, plus que vous ajoutez de services, plus cela coûte d'argent pour recevoir les signaux, ou plus vous soutirer d'argent à la part générée par la publicité.
On arrive à un point de saturation. Nous en sommes à un point où il y a une fragmentation extrême dans l'industrie de la télévision. Combien de signaux pouvez-vous encore ajouter?
Le sénateur Tkachuk : Je souscris au câble, et je paye des chaînes de télévision que je ne regarde pas et dont je n'ai pas besoin. En tant qu'élément de cette souscription, ne pourrait-il pas y avoir une chaîne spécialisées dans l'information qui pourrait concurrencer CBC Newsworld que certains captent même s'ils ne la regardent pas et n'en veulent pas? Pourquoi cela ne s'est-il pas produit?
M. Camilleri : Je ne peux pas répondre pour d'autres, mais dans notre cas nous examinerions cela en termes d'économie et ferions une évaluation du plan d'activités pour savoir combien d'argent nous perdrions si nous entrions dans ce système. Nous avons regardé cela historiquement et déterminé que nous perdrions beaucoup d'argent si nous faisions cela parce que nous concurrencerions les organismes en place tels CBC Newsworld, CTV Newsnet et les diffuseurs américains des programmes d'information.
Le président : D'après ce que je comprends, selon des articles de presse et non sur la foi de documents, il y a deux jours le CRTC a accordé à Newsnet le droit d'élargir la portée de sa couverture.
Le sénateur Tkachuk : C'est gentil de leur part. Devons-nous remercier le gouvernement de nous permettre de regarder autre chaîne de télévision au Canada?
Le président : Ce n'est qu'un simple point d'information. Nous vous fournirons la décision.
Le sénateur Phalen : Je lis dans un rapport fait par Leonard Asper lors de l'assemblée générale ordinaire des actionnaires en janvier 2005. Il dit :
L'environnement de la réglementation du Canada n'a pas suivi les changements. La télévision traditionnelle est de plus en plus mise à mal par les contraintes des règlements et par les pratiques de normalisation discriminatoires qui favorisent une composante de l'industrie par rapport à une autre.
Pour cette raison, l'Entreprise continuera de travailler avec d'autres dans l'industrie pour défier les règlements périmés, et chercher une solution là où nous estimons que nos actifs dans les médias sont désavantagés.
Pourriez-vous nous dire quels sont les règlements périmés qui sont un désavantage pour vos actifs?
M. Camilleri : Je vous citerai deux ou trois mots magiques pour nous. Nous croyons qu'il y a un grand déséquilibre en ce moment entre les radiodiffuseurs traditionnels et les chaînes spécialisées dans le sens où ces derniers ont deux sources de revenus — la recette publicitaire et les abonnements — tandis que les radiodiffuseurs traditionnels n'ont qu'une seule source de revenus — la publicité.
Dans la perspective du consommateur, si vous regardez Global sur la 3e chaîne, CTV sur la 8e chaîne ou Home and Garden Television sur la 47e chaîne, vous ne savez pas que l'une est une chaîne de radiodiffusion traditionnelle, que l'une est une de catégorie 1, celle-ci, et l'autre de catégorie 2, celle-là. Ce sont juste des chaînes. Nous pensons qu'il y a ici un déséquilibre important.
Nous pensons également qu'il y a injustice dans le fait que les gens peuvent exploiter nos signaux sans compensation pour nous, ainsi que dans la programmation décalée. La programmation décalée est un service fabuleux pour les consommateurs. Ils peuvent se trouver à Ottawa et regarder les signaux de télévision de Global en Colombie britannique. Nous ne pouvons pas monétiser cette audience, et nous ne recevons aucune compensation pour ce service, alors que les groupes de distribution d'émissions, par satellite ou par câble, eux le monétisent. En fait, ils vendent des services de programmation décalée. Ils annoncent le fait que vous pouvez regarder Survivor huit fois par nuit sur divers canaux éloignés, et nous n'obtenons aucune compensation pour cela. Nous pensons qu'il est injuste que les gens monétisent nos signaux et fassent l'argent grâce à eux tandis que nous n'obtenons rien du tout. En fait, cela nous fait du mal parce que nous perdons de la publicité parce que nous ne pouvons pas monétiser cette audience.
Nous pensons que les règlements sont périmés lorsqu'ils imposent des restrictions publicitaires, en particulier dans le secteur de la pharmacie sur ordonnance. Nous pensons que ces règlements devraient être revus.
Telles sont les trois questions principales pour nous; déréglementation de la publicité, compensation pour l'usage de nos signaux et compensation pour le transport de nos signaux.
Le sénateur Phalen : Philip Lind de Rogers Communications, dans un témoignage devant ce comité, a déclaré que plusieurs avantages de la convergence entre presse et télévision ne se sont pas matérialisés. En tant qu'entreprise avec une participation dans la presse et la télévision, pouvez-vous nous faire part de votre expérience de convergence?
M. Camilleri : Mon expérience ne remonte, évidemment, qu'au trois dernières années. Je pense que les gens ont confondu la consolidation avec la convergence. Au début, quand nous avons acheté le groupe de journaux, comme ce qui se produirait si deux banques fusionnaient ou deux entreprises pétrolières fusionnaient, nous avons pu fournir un service plus rentable dans les domaines tels la technologie de finances et la technologie de l'information, ainsi nous avons pu rationaliser ces secteurs et éviter la duplication, ce qui, à son tour, nous a permis de réinvestir dans ce que j'appellerais les véritables possibilités de la convergence, qui est de lancer de nouvelles plateformes et services médias qui ont pour effet de tirer vers le haut et d'attirer de nouvelles audiences.
Tels sont le lancement et l'expansion qui a suivi de Global National, le plus grand investissement en informations locales, le lancement de notre nouvelle plateforme Dose, la création du bureau d'information et la création de notre division livres.
Dans notre entreprise, nous sommes encore dans les premiers jours mais nous croyons toujours qu'il y a des possibilités de créer de nouveaux services et nouveaux produits, et de créer des voix nouvelles et variées. Nous pensons que Dose apporte une nouvelle voix saine sur le marché canadien, en particulier pour les jeunes, et une variété de plateformes médias pour que les jeunes s'expriment et puissent échanger des idées les uns avec les autres.
Nous en sommes toujours au début. Le processus n'a pas répondu au battage d'il y a cinq ou six ans, mais je pense que parfois ce dernier a été mal défini et qu'il y a eu un malentendu entre consolidation et convergence. Je pense que les gens mélangent les deux.
[Français]
Le sénateur Chaput : CanWest est le plus important éditeur de journaux au Canada. D'après votre documentation, j'ai lu que vous avez chez vous au-delà de 1 000 journalistes, ce qui comprend les journaux et la télévision. Avec un nombre aussi considérable et des gens qui travaillent continuellement dans un monde de changement, comme vous l'avez dit, j'aimerais connaître votre philosophie par rapport à la formation continue de ces journalistes. Avez-vous une politique qui gère la formation continue? Comment se fait-elle? Est-ce qu'ils ont de l'aide? Avez-vous des bourses à offrir? Ont-ils accès à des congés sabbatiques? Comment faites-vous pour assurer qu'il y ait pour tous ces gens de la formation?
[Traduction]
M. Camilleri : C'est une très bonne question. Dans le rapport de philanthropie qui figure dans notre soumission vous noterez que nous contribuons des millions de dollars pour les établissements scolaires qui soutiennent des programmes d'études et de formation pour les journalistes, etcetera. Nous continuons à augmenter notre propre budget interne de formation et de développement pour former non seulement des journalistes mais l'ensemble de nos employés, parce que nous avons constamment à revoir nos qualifications en raison de la manière dont le monde change.
Nous forgeons maintenant des alliances stratégiques avec beaucoup d'établissements scolaires dans chaque ville du pays où nous avons une activité commerciale — petite, moyenne et grande — qui consiste à notre création de programmes de coopération, d'académies d'été, et de location de diplômés, mais aussi à envoyer de nouveau nos employés à l'école pour recevoir une formation. De plus, nos employés vont réellement de nouveau à l'école pour y parler et y enseigner parce que nous pensons qu'ils ont quelque chose à partager.
Oui, nous dépensons beaucoup de millions de dollars pour former nos journalistes et la main d'œuvre de notre entreprise, comme doit le faire toute entreprise. C'est une priorité essentielle pour nous en termes d'amélioration constante des ensembles de compétence et de la base de compétence de nos employés.
[Français]
Le sénateur Chaput : J'ai une autre question relativement aux contrats entretenus avec les pigistes. Certains témoins ont critiqué le genre de contrats que la compagnie CanWest entretient avec les auteurs pigistes. Certains disent que ce type de contrat est exclusif et qu'il parle de droits exclusifs perpétuels des textes, pour l'univers.
Pourriez-vous nous expliquer un peu plus la nature des contrats que vous entretenez avec vos auteurs pigistes? Qu'est-ce que cela veut dire pour eux? Y a-t-il des contraintes qui leur sont imposées?
[Traduction]
M. Camilleri : Tout d'abord, le contrat de pigiste existe depuis un grand nombre d'années, bien avant nous, et a fait l'objet de négociations. Nous n'avons pas de contrat standard à travers le pays. Je passerai la parole à M. Anderson et à M. Nott pour en parler de manière assez détaillée, mais je veux dire avant cela que les dispositions dont certaines personnes qui ont comparues devant que ce comité ont exprimé des inquiétudes les concernant, dans l'industrie du divertissement et de la technologie sont en fait assez standards, et la concession de droits actuels et futurs, les technologies, les marchés, les plateformes, etcetera, sont des points communs et des pratiques très courantes dans l'industrie du divertissement. Ces dispositions n'ont rien d'unique dans l'industrie de la presse. L'industrie de la presse ne fait rien qui soit sans précédent ou n'existe pas dans beaucoup d'autres industries.
Ceci dit, en tant que sujet de négociation, nous avons changé nos contrats là où nous n'avons pu conclure d'accord avec les personnes que nous contractons, et nous sommes en désaccord avec la disposition. Je laisse à M. Nott et M. Anderson le soin d'en parler.
M. Anderson : Pour être clair, il s'agissait d'un contrat spécifique qui nous a occasionné quelques difficultés, et qui s'est principalement confiné aux travailleurs à la pige contractés pour écrire des tests automobiles pour nos sections sur le monde automobile. C'était un contrat élaboré par des avocats, et présenté sans difficulté à plusieurs pigistes. Nous avons reçu quelques plaintes. Nous avons alors passé en revue le contrat et avons changé, en réponse à ces plaintes, une partie de la formulation employée. Je pense que l'une des choses que nous devons souligner ici est le besoin en contrats à l'ère d'Internet. Les journaux ont souffert pendant des années de difficultés avec les pigistes et les procès concernant les documents archivés et les titulaires des droits de revente de ce matériel. La clarté est essentielle. Nous avons essayé d'apporter une vraie clarté à nos contrats et une uniformité de sorte qu'un employé qui travaille pour différentes plateformes ou unités de CanWest n'ait pas 15 contrats à gérer. Je pense M. Nott parlera de la manière dont les gens sont payés, mais je pense qu'ils sont plus satisfaits de la manière selon laquelle ils reçoivent leur argent aujourd'hui qu'ils ne l'étaient auparavant.
Un petit contrat spécifique nous a occasionné des difficultés. Nous avons des milliers, sinon des dizaines de milliers, de personnes qui ont un contrat de pigiste à travers le pays. La tentative d'apporter de la clarté à cette situation est un objectif ferme. Le projet suit son cours.
M. Nott : Sans essayer de ramener l'explication en ses composantes minimum, j'expliquerai rapidement comment les choses fonctionnaient avant la mise en oeuvre du contrat.
Quand un pigiste était contracté par le Ottawa Citizen et recevait des honoraires pour un travail ponctuel, disons $200, il signait un contrat qui donnait des droits à d'autres journaux de CanWest à utiliser ce matériel sur une base de paiement au pourcentage. Par exemple, le travail payé 200 $ apparaissant dans le journal d'Edmonton, le Calgary Herald, et le Vancouver Sun, permettait au journaliste d'obtenir 10 p. 100 des 200 $ de pige, soit 20 $. Il appartenait aux pigistes de réclamer leur dû et les rédacteurs qui avaient utilisé cet article suivaient système sur l'honneur consistant à découper l'article paru dans le journal, et à l'envoyer avec une facture de $20 au service comptable qui expédiait alors le chèque de 20 $ au journaliste qui pouvait savoir ou pas dans quels journaux son article était parus. Parfois dans tous, et parfois aucun.
Nous avons apporté un certain ordre en signant et en établissant un contrat qui nous donne des droits de publication de tous ces articles, qu'ils aient été employés ou pas, et nous avons augmenté le paiement offert à l'origine. Par exemple, au lieu de payer $200, nous payons $250. Parfois le pigiste en bénéficie car son article n'aurait été utilisé nulle part ailleurs. Parfois cela avait l'effet inverse, mais nous avons simplifié le système pour le rendre plus facile pour tout le monde. Nous avons reconnu qu'en rajoutant des droits pour nous, nous ajoutions également au paiement requis.
M. Anderson : En tant que rédacteur en chef, me reposer sur un rédacteur fatigué par une nuit de travail pour comptabiliser les piges et s'assurer des paiements n'étaient pas un système efficace, et dans l'ancien système, j'ai passé beaucoup de mon temps à traiter avec les pigistes qui étaient fâchés parce qu'ils n'avaient pas été payés ou qu'ils ne pouvaient pas obtenir un chèque d'un journal apparenté quelque part; le nouveau système a facilité la vie de tous.
Le président : Vous avez des dizaines de milliers de pigistes?
M. Anderson : Sur l'ensemble des années, je suis sûr qu'il y a eu des dizaines de milliers.
Le président : Et maintenant?
M. Anderson : Nous en avons certainement des milliers. Nous arriverions probablement à des dizaines de milliers de contrats dans divers endroits pour l'ensemble de la chaîne. Je ne les ai pas comptés, évidemment, mais j'estime que dans le temps ce genre de chose s'accumule. À l'Ottawa Citizen, nous employons beaucoup de pigistes, certains sur une base ponctuelle et d'autres sur une base continuelle. Je ne serais pas étonné si ce chiffre était correct.
M. Camilleri : Nos archives ont 226 ans, ainsi si vous remontiez dans les archives pour employer des documents, vous devriez dépister tous les droits. Il y en aurait des dizaines de milliers.
Le président : Vous avez dit que vous avez plus de mille journalistes. Je me demande si vous pourriez nous fournir des chiffres plus précis et une comparaison avec le nombre de journalistes qui étaient employés il y a cinq ans dans les mêmes bureaux, en comparant des pommes avec et des pommes, si possible, s'il vous plait — si vous avez acquis une chaîne de télévision entre temps ou vendu une chaîne, peu importe — parce que nous essayons de trouver un sens à ce qui s'est produit en termes de nombre de journalistes.
Pourquoi avez-vous fermé Southam News?
M. Anderson : Southam News est devenue CanWest News Service.
Le président : Il y a eu beaucoup de journalistes qui sont venus un jour et ont été licenciés. Vous avez fermé une division, si vous préférez. Pourquoi avez-vous fait cela?
M. Anderson : Je pense que la meilleure manière de décrire cela est la rationalisation du bureau du National Post avec celui de CanWest News Service.
M. Camilleri : Je crois que vous vous référez au bureau du National Post ici à Ottawa?
Le président : Dans ce que je comprends, le bureau du National Post et de l'Ottawa Citizen subsistent, en grande partie.
M. Anderson : CanWest News Service et l'Ottawa Citizen sont environ la moitié de ce bureau, comme cela l'a toujours été. Il y avait un bureau National Post séparé, mais qui ne s'est franchement pas avéré très efficace.
Le président : Dans ce bureau, vous aviez certains des meilleurs journalistes du pays. Vous avez juste décidé que vous pouviez vous passer d'eux?
M. Anderson : Cela fut une décision du National Post. Ce ne fut pas ma décision. Le National Post a ses propres intérêts ici. Certes, les salles de rédaction ont augmenté et diminué, selon des secteurs variés. Le déclin le plus dramatique du nombre de salles de presse que j'aie jamais vu s'est produit au Kingston Whig-Standard quand il a été racheté par Southam; la salle de rédaction fait aujourd'hui moins de la moitié de ce qu'elle était alors. Je me rappelle d'une lettre du rédacteur en chef d'alors qui disait à l'éditeur que nous ne pouvions pas fonctionner à moins de 69 journalistes. Je crois qu'ils sont aujourd'hui moins de 30.
M. Camilleri : Sur le concept du bureau du National Post, parce que c'est à cela que vous faites référence, je ferai deux commentaires. Le premier est que, là encore le National Post était une situation unique. Il ne pouvait pas continuer à perdre les sommes d'argent très significatives qu'il perdait. La sagesse populaire et conventionnelle aurait été la décision facile alors de le fermer. Nous avons voulu le préserver. Nous croyons au journal, nous sommes engagés dans le journal, et nous croyons qu'il fournit une perspective unique et différente du Globe and Mail et d'autres journaux du pays. Nous avons dû le stabiliser, ainsi nous avons dû prendre quelques décisions difficiles au niveau économique.
En ce qui concerne les détails, savoir qui reste et qui s'en va, ceci est une décision de gestion. L'éditeur et le rédacteur en chef du Post ont pris les décisions concernant le personnel à ce moment-là. Les lecteurs auraient été les mieux placés pour évaluer les ressources journalistiques à leur disposition, mais il s'agissait alors de maintenir le National Post.
Le président : Je comprends. Ce n'est pas le rôle de ce comité de préjuger des différentes décisions de salle de rédaction, qu'elles traitent du personnel, des décisions éditoriales, de l'appréciation des informations ou quoi que ce soit d'autre. Nous essayons de comprendre le contexte dans lequel les choses se produisent.
M. Camilleri : Bien sûr.
Le président : D'où nos questions.
M. Anderson : Si vous vous penchez dans le temps — vous devez adopter une optique sur le long terme pour cela — les salles de rédaction telles que vous les connaissez, ont-elles augmenté ou diminué au cours des années.
Le président : Diminué pour la plupart.
M. Anderson : L'année dernière à l'Ottawa Citizen, j'ai recruté trois nouvelles personnes. Cette année j'ai 5,5 employés en équivalent temps plein, ETP, dans mon budget. Ce sont de nouvelles ressources pour faire de nouvelles choses.
Le président : Cela vous amène un total de?
M. Anderson : Il me faudrait vérifier nos chiffres; probablement autour de 165 ou 170 au total. Je n'ai pas ces chiffres en tête.
Le président : Vous avez expliqué votre vue sur les bureaux à l'étranger, mais je me demande pourquoi la plupart des journaux de CanWest, ceux qui sont bénéficiaires, n'ont plus leurs propres correspondants à Ottawa. La dernière fois que j'ai vérifié, la seule exception était la Gazette de Montréal. Il peut y en avoir un autre, je ne sais pas, mais dans un but d'argumentation, comment pouvez vous être si sûr qu'un bureau d'information centralisé peut fournir une perspective sur ce qui se produit dans la capitale nationale et qui va affecter les différentes communautés que vous servez?
M. Nott : D'abord, juste pour clarifier, le bureau d'information centralisé est un centre d'édition. Il n'attribue pas les tâches au bureau d'Ottawa. Le bureau d'Ottawa est géré par le chef de bureau d'Ottawa. La teneur et la production de l'équipe chargée de l'information au bureau voit son travail édité par des réviseurs, puis par un rédacteur politique ou deux du Canadian News Desk. Le bureau se trouve à la fin du processus, pas à sa mise en route.
Le président : Ma question fondamentale demeure. Pourquoi, en termes de mercatique, en termes de service aux lecteurs, pourquoi ne souhaitez-vous pas fournir cette valeur ajoutée qui dit que nous d'Edmonton, ou nous de Halifax, peu importe, avons notre propre personnalité qui, en plus du personnel national nous apportera la meilleure couverture au monde, nous donnera également une opinion vue de l'Alberta, de la Nouvelle-Écosse?
M. Nott : Le Vancouver Sun a son propre journaliste au bureau d'Ottawa. La Gazette de Montréal a son propre journaliste au bureau d'Ottawa. Le Calgary Herald partage un chroniqueur avec le National Post au bureau d'Ottawa. Le National Post a son propre journaliste au bureau d'Ottawa. Le journal de M. Anderson est la seule exception avec cinq ou six personnes au bureau. Et la seule exception parmi nos métros importants est le Edmonton Journal.
Le président : Vous avez répondu à la question. En fait, vous voyez bien une valeur à faire cela?
M. Anderson : Il appartient aux différents journaux de décider s'ils veulent poster quelqu'un au bureau. Cela ne fonctionne pas beaucoup différemment par rapport à l'ancien service de Southam News que vous pouviez connaître. Certains journaux ont un correspondant présent et d'autres pas.
Le président : Ce n'est pas ce que nous avons entendu. Des témoins se sont présentés devant ce comité et on raconter une histoire différente, ainsi il est important pour nous de comprendre ce point.
M. Nott : Il est également à noter que nous sommes en contact, en particulier avec le Edmonton Journal, de façon très régulière. Nous sommes conscients que la majeure partie de la circulation de notre groupe de journaux est dans l'ouest et il est important que le Edmonton Journal réponde à leurs besoin. Quand ils requièrent un article particulier, que ce soit sur le traitement par le gouvernement fédéral de l'encéphalopathie spongiforme bovine, l'ESB, ou le programme de Kyoto, nous nous transformons en bureau de service pour nos journaux et nous impliquons les rédacteurs politiques de ces salles de rédaction pour nous aider à nous dire ce dont ils ont besoin. Nous ne voulons pas produire des articles qu'ils n'utiliseront pas.
M. Anderson : Au sujet du recrutement et du nombre de journalistes que nous avons, je me suis référé plus tôt au succès de nos programmes d'internat à travers le pays. Nous avons six internes a l'Ottawa Citizen. Je devrais également dire que les ETP que j'ai dans mon budget, ce budget est proposé et je souhaite inclure deux internes supplémentaires. L'une des choses que nous tâchons de faire en tant que rédacteurs en chef dans la chaîne, c'est de trouver une façon de conserver les meilleurs parmi ces jeunes dans la chaîne, une fois leur année d'internat terminée, et d'amener à maturité une nouvelle génération des journalistes qui ont non seulement une expérience dans plusieurs journaux mais sont aussi formés à faire d'autres choses. Le sénateur Munson a parlé de lui en tant qu'ancien journaliste. Lorsque j'aurai son âge et que je siègerai dans cette chambre, j'espère pouvoir dire de moi que je suis un ancien fournisseur de contenu multiplate-formes pleinement convergé.
Le président : Vous n'avez pas à être âgé pour siéger ici, vous le savez bien.
M. Anderson : Très bien, comptez-moi des vôtre.
Le président : Avec le Canadian News Desk, une série de questions : Laissez-moi poser ces questions dans leur ensemble afin de voir là où je veux en venir. Les journaux sont-ils libres de choisir s'ils utilisent l'article ou pas? Les journaux sont-ils libres d'assigner leur propre personnel pour couvrir le même article? Un des exemples célèbres qui est régulièrement cité est celui des revues de film qui sont centralisées au bureau d'information. J'essaie de découvrir comment ceci fonctionne en termes de service rendus aux lecteurs locaux.
M. Nott : Laissez-moi voir si j'ai bien compris les questions. Les journaux sont-ils libres d'affecter leurs propres journalistes?
Le président : Pour couvrir le même événement.
M. Nott : Tout dépend de l'événement. Dans l'exemple le plus récent, le décès du pape, nous avions plusieurs reporters à Rome. Nous avons estimé que l'événement était assez important pour qu'il y ait plusieurs angles et manières de le couvrir. Ils ne nous appellent pas pour nous demandez si nous leur accordons la permission d'aller à Rome. En général, nous découvrons suite à un appel téléphonique qu'ils sont à Rome, lorsqu'ils nous demandent comment ils peuvent s'intégrer au dossier.
Le président : Ils sont libres?
M. Nott : Absolument, ils sont libres de le faire.
M. Anderson : Un autre exemple récent est l'enquête Gomery. La Gazette de Montréal couvrait cette affaire, mais le Ottawa Citizen, à ses propres frais et à de sa propre volonté, a envoyé Kathryn May couvrir l'événement. Nous croyons qu'il est important pour nous dans notre marché au sens le plus large que Melle. May puisse être là-bas, pour comprendre tout ce qui se dit et est écrit à ce sujet pour notre lectorat, lequel s'attend à ce genre de journalisme de sa part.
Pour un événement banal, il n'y aura pas beaucoup de différence qui que ce soit qui assure la couverture, encore que l'on pourrait suggérer la présence d'un journaliste pour couvrir l'information, et d'autres journalistes pour ajouter plus de valeur pour les lecteurs. Nous avons une totale liberté de dire non, comme je l'ai fait pour l'enquête Gomery.
Je ne veux pas dépendre de la Gazette. Je veux avoir mon propre journaliste là-bas, et j'ai besoin du point de vue de ce journaliste.
Le président : Ceci s'applique aux reportages. Que dire des critiques de film, de livre, de musique, de nourriture et autres éléments annexes?
M. Nott : De ce groupe que vous avez décrit, les seuls rédacteurs affectés sont les critiques de film — un à Vancouver et l'autre à Ottawa. CanWest a décidé d'essayer de créer un Siskel & Ebert du Canada, avec respect vis-à-vis de M. Siskel. Nous avons essayé de faire cela Catherine Monk du Vancouver Sun et Jay Stone de l'Ottawa Citizen. Nous fournissons ces critiques de film au travers du groupe. Cela ne signifie pas, et de loin, que ces voix sont les seules représentées par écrit dans les salles de rédaction. La Gazette continue de publier des critiques de film; l'Ottawa Citizen fait de temps en temps ses propres critiques de film; et le Edmonton Journal, pour des raisons dont ils pourraient parler mieux que moi, a tendance à ne pas utiliser nos critiques de film. Nous avons essayé de transformer ces personnes en étoiles montantes au travers d'apparition à Global Television. C'est le seul secteur pour lequel nous avons proposé qu'ils soient les seuls rédacteurs nationaux de ce secteur spécialisé. D'autres personnes payées y figurent tout le temps. En termes de nourriture, mode et sujets du même ordre, notre seule intervention se produit quand un magazine de mode suggère vouloir envoyer quelqu'un à Milan. Souvent nous prenons ces frais à notre charge et le journaliste travaille pour le groupe, et non le journal individuel.
Le sénateur Munson : Vous faites des expériences avec vos éditoriaux nationaux? Ceci a-t-il disparu ou est-ce toujours utilisé?
M. Camilleri : En trois années chez CanWest, je ne crois pas que nous ayons fait une seule expérience, bien que nous nous soyons réservés le droit de le faire. Si cela devait réapparaître, la question devrait être d'importance pour nos propriétaires au point où ils souhaiteraient exprimer une opinion. Si un éditorial national devait apparaître, un certain nombre de choses apparaîtraient également. Cela serait identifié clairement comme tel. Les bureaux de rédaction et les rédacteurs locaux seraient libres d'avoir une opinion divergente et d'éditer leurs propres avis.
Le sénateur Munson : Ceci est similaire à ce que nous avons entendu M. Anderson décrire.
M. Camilleri : Oui. Si nous devions le faire, c'est comme cela que nous le ferions.
Le sénateur Munson : Ce n'est pas une question piège mais j'aimerais avoir votre notion de la liberté de la presse? Appartient-elle aux propriétaires, aux éditeurs, aux rédacteurs ou, comme certains témoins l'ont dit, au public?
M. Anderson : J'aurais tendance à dire, à l'ensemble que vous venez de citer. Un journal, à tel ou tel moment, est le fruit de la passion des gens qui travaillent dans les salles de rédaction. Je n'ai jamais relégué cet aspect qu'aux seuls rédacteurs. Je crois que les rédacteurs ont des passions et qu'ils ont une influence réelle dans la voix du journal parce qu'ils apportent leurs propres intérêts, opinions, réflexions et idées pour des articles, des séries et des colonnes régulières. Je n'ai également jamais pensé que l'éditeur n'a pas le droit de jouer un rôle et de déterminer la voix du journal de par ses idées, pensées, théories et passions. Je ne refuserais certainement pas d'entendre les réflexions, les passions et les vues des propriétaires sur ce qu'ils pensent devoir être la voix d'un journal. Au bout du compte, nos lecteurs sont ceux qui nous le disent parce qu'ils nous appellent tous les jours pour nous dire si nous avons mis dans le mille. Ce sont les acheteurs des journaux ou ceux qui annulent leur abonnement qui nous appellent en masse quand nous faisons une bêtise. À de rares occasions, ils nous félicitent d'avoir fait quelque chose de brillant. La voix d'un journal est donc héritée des éléments ci-dessus, et c'est cela la liberté de la presse.
Le sénateur Munson : Les entreprises de médias sont les seules qui jouissent d'une protection spéciale dans la Charte canadienne des droits et libertés.
M. Anderson : Je ne pense pas que nous ayons plus de protection qu'un citoyen ordinaire quand il s'agit de la liberté de la parole.
Le sénateur Munson : Les entreprises de médias doivent-elles quelque chose au pays en échange de ce qui a été décrit comme un traitement spécial?
M. Anderson : Tout d'abord, je ne pense pas que nous ayons un traitement spécial mais plutôt que chaque citoyen a le droit à la liberté de parole. Toutefois, je pense que nous donnons beaucoup au pays en retour. Je ne connais pas une seule salle de rédaction qui n'est entraînée par des journalistes soucieux de faire un papier. Le résultat n'entre pas dans l'esprit du journaliste ordinaire; c'est faire le papier qui compte. Quelle satisfaction personnelle puis-je obtenir sous ma signature lorsque j'offre le meilleur papier à notre lectorat? Le rôle du rédacteur est de s'assurer que collectivement les journalistes font justement cela. Je ne crois pas que nous avons des droits spéciaux mais plutôt nous exerçons les droits de tout le monde, peut-être d'une manière unique. Je crois également que nous donnons énormément en retour.
Le sénateur Munson : Je suis d'accord avec vous. De mon temps dans un réseau national, la publicité était un phénomène lointain. On ne se réveillait jamais le matin en s'inquiétant de cela, quand bien même c'était votre gagne- pain.
M. Anderson : C'était le passé, nous sommes dans le présent.
Le président : Les seules entreprises de médias que je connais sont les journaux, ainsi je me contenterai de les citer. En particulier, je pense au Toronto Star et au Washington Post qui ont des principes, ou une profession de foi, si vous voulez. Cela fait-il l'objet d'une discussion chez CanWest? Je ne parle pas du positionnement politique mais plutôt de principes journalistiques.
M. Anderson : En fait, nous avons une profession de foi.
Le président : Pourrions-nous la voir?
M. Anderson : Mais certainement, nous vous la fournirons.
Le président : D'où vient-elle?
M. Anderson : Avec le temps, nous avons développé un certain nombre de principes et nous travaillons à en développer davantage.
Le président : J'ai noté que vous en avez fait mention.
M. Anderson : Je suis dans mes fonctions au groupe depuis juin passé et, entre autres choses, une de mes fonctions est de développer et de coordonner cette déclaration de principes au fur et à mesure des travaux. C'est une chose qui évolue. Elle est réalisée en collaboration avec les rédacteurs de tout le pays. J'espère que c'est un travail qui ne sera jamais fini. Je serais heureux de vous montrer les travaux en cours.
Le président : Je serais plus qu'intéressé de voir cela. Dans la même veine, avez-vous pensé à nommer des rédacteurs publics, qui d'habitude servaient de médiateurs jusqu'à ce que certaines femmes aient été nommées à ce poste?
M. Anderson : Ce n'est pas à l'ordre du jour, qui est assez rempli pour l'instant si l'on considère ce qui peut être fait pour rendre notre métier de journaliste meilleur. Je ne ferme pas la possibilité d'en discuter. Mon opinion est que si les rédacteurs des salles de rédaction font bien leur travail, le rôle du rédacteur public n'est pas aussi important que l'on pourrait le supposer. Une chose que les rédacteurs doivent faire dans les journaux est de répondre directement aux lecteurs. Parfois un rédacteur public peut entraver le bon déroulement de cette fonction, et commencer à déterminer la politique, les normes journalistiques et l'éthique, qui font partie du rôle du rédacteur en chef. Je ne considère pas cela comme nécessaire mais je reste ouvert à la possibilité de changer d'avis. Je ne sais pas ce qu'en pensent les autres.
M. Camilleri : Il y a des voies à suivre pour les personnes qui ont des problèmes, que ce soit à la télévision ou dans la presse, voies qu'elles peuvent poursuivre si elles se sentent lésées par quelque chose de notre fait.
M. Wyatt : Dans la perspective de la télévision, en sus de nos principes et directives, nous avons souscrit aux codes d'éthique que nous avons aidé à mettre en place.
Le président : Pouvons-nous voir vos principes et directives?
M. Wyatt : Absolument. Le code d'éthique a été développé conjointement avec la Radio-Television News Directors Association pour les actualités et l'Association canadienne des radiodiffuseurs. Il existe un organisme appelé le Conseil canadien des normes de la radiotélévision. Les téléspectateurs peuvent soulever des questions et envoyer leur plainte par écrit afin qu'elle soit examinée par un groupe d'arbitres. Nous sommes forcés de respecter leur sentence.
Le président : Nous poursuivons cette ligne d'interrogation avec les témoins parce qu'ils nous ont indiqué qu'ils attendent pour voir ce que notre rapport contient avant qu'ils ne continuent dans la même veine.
Les promotions croisées ont été plusieurs fois entendues par ce comité, pas en premier lieu en ce qui concerne CanWest au premier chef, bien que de temps en temps cela puisse concerner CanWest.
Néanmoins, il y a eu un ensemble notable d'inquiétudes, et même des affirmations, de la part de certains journalistes que les appréciations des informations peuvent énormément varier en fonction du mandat du groupe à promouvoir une promotion croisée, notamment dans les programmes de divertissement d'une chaîne de télévision et lors du journal télévisé. Avez-vous une politique pour éviter cela? Ce que nous entendons parfois au sujet de CanWest est que CTV ne peut pas obtenir la couverture de ses émissions au même niveau que Global, mais nous n'avons pas entendu d'inquiétudes graves exprimées concernant CanWest comme celles que nous avons pu entendre concernant d'autres situations. Néanmoins, on peut comprendre la raison de ces inquiétudes lorsque deux organes différents servent le même maître. Avez-vous une politique quant aux promotions croisées, jusqu'à quel point elles peuvent aller, et que devraient être leurs limites?
M. Camilleri : Nous n'avons aucune politique qui exclut ou empêche à l'un de nos médias de couvrir les médias d'une autre entreprise. Par exemple, si vous preniez Dose le mardi ou le mercredi, vous verriez que Dose a fait un très bon article sur The Amazing Race.
Le président : J'ai lu Dose cet après-midi en prévision de la réunion.
M. Camilleri : Il a été précisé que dans les ménages deux-plus, il a dépassé Survivor dans les cotes d'écoute. Survivor est une émission de Global et The Amazing Race est une émission de CTV. Ceci est un parfait exemple. Nous n'avons pas de politique qui les empêche ce couvrir ce qu'ils veulent dans nos médias. Nous les encourageons, bien évidemment, à couvrir nos médias. Lorsqu'ils couvrent nos médias, nous ne leur disons pas quoi écrire. Nous avons pris nos journaux et lu des critiques horribles sur les programmes de télévision que nous présentons sur Global. Nous avons entendu le commentaire de Global sur les articles des journaux, mais nous n'avons pas de politiques spécifiques ou d'édits à cet effet.
M. Anderson : L'Ottawa Citizen a fait écrire à un chroniqueur des colonnes sur Survivor et The Apprentice. Nous avons également écrit sur Canadian Idol, qui était un programme à grande écoute sur CTV. Je pense que certaines personnes qui ont pu se présenter devant ce comité ont oublié que les journaux sont toujours dirigés par des rédacteurs en chef qui ont une profonde éthique et des règles strictes en ce qui concerne ce qui est de l'information et ce qui n'en est pas. Même si les rédacteurs n'en avaient pas, leur salle de rédaction le leur rappellerait, parce qu'elles sont remplies de personnes qui ont cette éthique et ces normes journalistiques bien définies. Je me raidis un peu à la pensée que d'une façon ou d'une autre nous devons nous soumettre au maître des lieux lorsque nous faisons la promotion de programmes de divertissement.
Le président : Nous allons vous faire beaucoup vous raidir ce soir, n'est-ce pas?
M. Anderson : C'est un goût qui s'acquiert.
M. Nott : Quand nous voyons ces annonces passer sur nos bureaux, nous nous demandons ce que nous ferions si elles nous étaient envoyées par un autre réseau. Nous en faisons un papier si l'annonce est globale, c'est sûr.
Le président : Je n'ai seulement que deux questions de plus, tout le monde sera assurément ravi de le savoir. Quel est le niveau approprié de bénéfices pour le quotidien d'une ville d'être rentable, en êtes-vous arrivés là?
M. Camilleri : Il me faudrait réfléchir à cela. Je n'ai pas de chiffre en tête. Nous regardons ceci dans une perspective où ces entités, quelle qu'elles soient, sont dans certains cas vieilles de plus de cent ans. Les espérances de nos investisseurs qui souhaitent tirer profit de leur capital est qu'elles se développeront, nous devons ainsi assurer une croissance pour nos actionnaires ou bien ils n'investiront pas. S'ils n'investissent pas, nous n'avons pas les ressources pour lancer des projets, tels de nouvelles publications, le soutien du National Post ou la croissance de Global National. Je ne me fixe pas sur un chiffre autre que celui de la croissance.
Le président : Je n'ai pas demandé, quel est le niveau de profit approprié pour un quotidien national?
M. Camilleri : Pour un journal local ou pour un de nos bureaux, je n'ai pas de chiffre à l'esprit d qui dirait, si nous obtenons ce chiffre, c'est le bon chiffre. Nous portons les espoirs placés sur nous par les parties intéressées, qui incluent nos actionnaires. Sans leur capital et leurs investissements, il n'y aurait pas de « nous ». Ils s'attendent à ce que nous indiquions une croissance. Je considère donc dans une perspective incrémentielle si nous avons fait l'objet d'une croissance chaque année.
Le président : Où en sommes-nous aujourd'hui : 15 ou 20 p. 100 de profit sur les bénéfices? Je vous demande ceci car certaines personnes qui se sont déjà présentées ont fait des déclarations et je souhaite pouvoir me rendre compte de là où se trouve la vérité.
M. Camilleri : D'une perspective de marge, les marges diffèrent pour chaque marché. Il n'y a pas de marge stricte qui puisse être appliquée et qui conviendrait à tous les marchés. Chaque marché est unique. Si vous préférez, il a son propre ensemble d'influences sur sa performance économique. Je ne pense pas que le rôle du gouvernement soit de fixer une marge de régulation dans nos affaires. Ce que j'ai déjà entendu dire. Nous devons augmenter nos produits, nous devons améliorer nos bénéfices, et nous devons accroître nos marges. C'est ce que nous demandent de faire les actionnaires. Il n'y a donc pas de chiffre stricte où l'on puisse dire qu'il existe un chiffre pour un produit particulier.
Le président : Ne vous inquiétez pas.
M. Camilleri : Je ne cherche pas à me montrer évasif; il n'y a simplement pas de chiffre précis à fournir. C'est tout.
Le président : La dernière question est une question hypothétique, mais j'aimerais obtenir une réponse. La politique des gouvernements partout dans le monde s'adresse au degré de concentration de la propriété dans beaucoup d'industries, y compris celle des médias. Dans l'industrie des médias, en particulier, dans ces pays, cette politique traite également du degré de participation croisée. Cette participation croisée se trouve quelque part entre un univers kaléidoscopique où personne ne possède plus d'une entreprise de médias, et la situation où vous avez des centaines de propriétaires, et l'extrémité inverse, celle où vous auriez un propriétaire unique pour tout le pays, vieux modèle soviétique, sauf que je fais une hypothèse sur l'existence d'un seul propriétaire du secteur privé. Les limites doivent se trouver quelque part là dedans. À votre avis pour le Canada, où les limites devraient-elles se situer?
M. Camilleri : Il me faudrait réfléchir à cela. Je ne cherche pas à être évasif. Je n'ai pas une réponse sortant du chapeau pour donner un chiffre quelque part entre un propriétaire unique et un nombre infini de propriétaires.
Le président : La question peut sembler naïve, mais il est clair que c'est l'une des questions que ce comité doit considérer. L'opinion de CanWest Global est manifestement importante, car vous êtes un intervenant important, vous avez une influence importante, et vous êtes un élément important de la fabrique canadienne des médias. Pourriez-vous réfléchir à ce que vous considéreriez comme être le régime approprié et nous envoyer un courrier? Si vous n'avez pas de réponse ce soir, je ne vais pas vous demander d'en inventer une en 30 secondes car c'est une question importante.
Le sénateur Munson : Quelle taille souhaitez-vous atteindre?
Le président : Votre dossier parle d'agrandir l'entreprise. On se demande ce qui semble approprié, du point de vue de l'entreprise.
M. Camilleri : Nous communiquerons certainement à nouveau avec vous sur ce point. Si je devais donner une réponse sortant du chapeau, je ne pense pas que nous accepterions n'importe quel seuil. Les réalités du marché sont telles aujourd'hui que l'équilibre des forces est passé au consommateur. Ce dernier est roi. Il y a littéralement un nombre infini de choix dans les médias que le consommateur conduit au doigt et à l'œil grâce à l'innovation technologique. Cette dominance affirmée que nos critiques nous disent avoir, comme nous avons souhaité le démontrer dans notre dossier, nous croyons simplement qu'elle est un mythe.
Le président : Je pense que vous pouvez répondre à ceci par oui ou par non. Pour obtenir le plein accès à l'un de vos journaux sur Internet, je dois payer une somme qui se rapproche du prix d'abonnement que je paierais pour obtenir le journal livré chez moi. Est-ce vrai?
M. Camilleri : Oui, si vous voulez seulement obtenir la version électronique. Vous y avez déjà accès si vous êtes déjà un abonné du journal.
Le président : Je peux donc y avoir accès. Bien, merci.
Le sénateur Munson : Juste une question très courte : En raison des journaux métropolitains gratuits, êtes-vous intéressé à entrer dans ce type d'activité? Si vous diffusez les exemples des autres en termes de promotion croisée, comme avec le Star et d'autres, parce que les gens qui prennent une copie dans le métro la lisent, même si elle ne contient que peu d'information. Il y a un léger contenu et le processus éducatif commence par le fait d'avoir quelqu'un qui lit un journal dans l'autobus. Que cela soit gratuit et dépourvu d'informations, ils peuvent très bien se dire : « Lorsque je descendrai du bus, j'irai acheter un exemplaire du National Post or du Star. »
M. Camilleri : Dose est un journal gratuit que nous venons juste de lancer, et nous sommes associés à raison d'un tiers avec Metro et Torstar, au lancement du produit de Metro dans les marchés autres que Toronto et Montréal où ils existent déjà.
Le sénateur Munson : J'avais juste besoin de cet éclaircissement.
Le président : Il est évident que nous pourrions continuer à vous poser des questions pendant au moins encore huit heures. Nous n'allons pas faire cela. Nous vous remercions beaucoup de votre présence parmi nous. La soirée a été très intéressante. Vous nous écrirez sur le point des limites appropriées, des normes, des codes d'éthique, des directives, et de tous ces trucs?
Pourriez-vous également fournir quelques informations écrites quant à vos programmes pour la formation des journalistes — journalistes employés aujourd'hui? Vous nous avez donné un beau document au sujet de la façon dont vous introduisez dans les écoles de journalisme, etcetera, mais ce dont le sénateur Chaput parlait serait très utile. Ai-je oublié quelque chose? Pouvez-vous également nous fournir le nombre de journalistes aujourd'hui et il y a cinq ans de cela? Merci beaucoup à tous. Ce fut très intéressant. Sénateurs, cette réunion est ajournée. Notre prochaine réunion aura lieu lundi à St. John's, à Terre-Neuve, à 9 h 00 du matin.
La séance est levée.