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Délibérations du comité sénatorial spécial sur la
Loi antiterroriste

Fascicule 6 - Témoignages


OTTAWA, le lundi 4 juin 2007

Le Comité sénatorial spécial sur la Loi antiterroriste, auquel a été renvoyé le projet de loi C-12, Loi concernant la gestion des urgences et modifiant et abrogeant certaines lois, se réunit aujourd'hui à 13 h 5 pour étudier le projet de loi.

Le sénateur David P. Smith (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Honorables sénateurs, la séance est ouverte. Nous allons commencer par entendre Rennie Marcoux, du Bureau du Conseil privé, et Scott Broughton, de Sécurité publique Canada.

Nous devions recevoir des représentants du Conseil canadien des organisations de mesures d'urgence, qui regroupe toutes les organisations provinciales et territoriales, mais ceux-ci ont choisi de ne pas comparaître parce qu'aucun d'entre eux n'estimait pouvoir parler au nom de l'ensemble des organisations. En même temps, c'est un peu comme le dialogue avec Serge Ménard quand la mesure a été étudiée au comité de l'autre endroit. J'ai l'impression qu'ils sont certainement au courant. Aucun d'entre eux n'a comparu devant nous, et pourtant, ils étaient explicitement invités à comparaître. Leur président est Andrew Lathem, qui est le responsable en Nouvelle-Écosse. Nous avons fait ce que nous pouvions faire en les invitant. Ils ont choisi de ne pas comparaître et c'est leur décision. Nous entendrons donc les deux témoins que nous avons aujourd'hui.

Nous entendrons ensuite une brève explication au sujet de l'échange que nous avons eu avec la FCM sur la question de savoir si nous devrions avoir un préambule. Je pense qu'il est assez clair que nous n'en aurons pas. Nous allons en préciser clairement la raison. Ensuite, nous pourrons faire l'étude article par article du projet de loi.

Nous venons de recevoir une lettre du ministre Stockwell Day, qui tient beaucoup à ce que nous accélérions nos travaux pour en finir avec cette affaire avant l'ajournement. Je pense qu'il y a de bonnes chances que nous puissions le faire aujourd'hui.

Je souhaite la bienvenue aux témoins. Merci d'être venus aujourd'hui. Vous avez la parole.

Rennie Marcoux, secrétaire adjointe du Cabinet, Sécurité et renseignement, Bureau du Conseil privé : Bonjour et merci de m'avoir invité à prendre la parole devant vous aujourd'hui. Je suis le secrétaire adjoint du Cabinet au Bureau du Conseil privé. J'ai été nommé à ce poste il y a six mois.

Je suis accompagné de M. Scott Broughton, qui est sous-ministre adjoint principal de Sécurité publique Canada. Nous travaillons ensemble à un certain nombre de dossiers, notamment la gestion des urgences. J'ai donc pensé que sa présence ici aujourd'hui serait utile pour nos discussions.

[Français]

Je crois comprendre que des représentants de la sécurité publique vous ont parlé du projet de loi C-12, la Loi concernant la gestion des urgences, et que vous souhaitez maintenant comprendre la rôle du Bureau du Conseil privé en gestion des urgences, et le lien existant entre le Bureau du Conseil privé et ce projet de loi.

J'espère que je saurai vous éclairer sur ces questions et peut-être répondre à d'autres questions si vous en avez. Premièrement, je vais vous expliquer brièvement le contexte du Secrétariat de la sécurité et du renseignement.

[Traduction]

En temps ordinaire et en situation de crise, le rôle clé du Secrétariat de la sécurité et du renseignement est de donner soutien et avis au conseiller à la sécurité nationale, de qui je relève, au greffier du Conseil privé, au premier ministre et au Cabinet ou aux comités du Cabinet, le cas échéant.

À l'appui de ces rôles, le secrétariat a affecté du personnel possédant des compétences opérationnelles et stratégiques et leur a confié la responsabilité des dossiers pertinents, notamment le terrorisme, la police, le renseignement, la sécurité des transports et la gestion des urgences. En cas de crise, ce personnel serait également chargé de fournir des services de liaison sur place entre le Bureau du Conseil privé et le Centre des opérations du gouvernement.

Dans ce contexte, le BCP est engagé de trois manières dans le système de gestion des urgences du Canada : premièrement, la fonction de base d'analyse critique à la grandeur du BCP; deuxièmement, la participation du Bureau du Conseil privé à la fonction d'information et de décision de la gestion des urgences; et troisièmement, le rôle du Bureau du conseil privé à l'appui de la mise en œuvre du projet de loi C-12.

Un rôle fondamental que jouent tous les secrétariats du Conseil privé consiste à fournir la fonction d'analyse critique non partisane des diverses propositions de politique élaborées par les ministères et agences sous l'égide de l'orientation générale établie par le gouvernement du Canada.

La fonction d'analyse critique du BCP comporte de nombreux objectifs, par exemple s'assurer que la proposition de politique est conforme aux objectifs du gouvernement; qu'elle est symétrique par rapport à d'autres propositions et initiatives du gouvernement; qu'elle tient compte des programmes existants et s'y intègre bien; que l'on a tenu compte des tendances internationales; et, de concert avec les deux autres agences centrales, le ministère des Finances et le Conseil du Trésor, on doit s'assurer que la proposition est financièrement responsable.

[Français]

Deuxièmement, il faut noter que c'est notamment par sa participation au Comité et sous-comité exécutif de la Sécurité nationale et de la gestion des urgences que le Bureau du conseil privé peut jouer un rôle actif dans la prestation d'informations et la prise de décisions sur la gestion des urgences.

Par exemple, la conseillère en matière de sécurité nationale auprès du premier ministre se réunit régulièrement avec divers sous-ministres et présidents d'organismes pour discuter d'une large gamme d'enjeux liés à la sécurité nationale et aux urgences. Dans cette démarche, elle est appuyée par le sous-ministre de la Sécurité publique. Dans l'éventualité d'une crise de sécurité ou d'une urgence nationale, ce groupe de sous-ministres se réunirait et conseillerait le premier ministre et le Cabinet.

[Traduction]

Du point de vue opérationnel et stratégique, le Bureau du Conseil privé participe aussi au comité de gestion des urgences du sous-ministre adjoint et à ses divers sous-comités. En fait, je copréside avec M. Broughton le comité de gestion des urgences du SMA.

Ce comité réunit des sous-ministres adjoints de l'ensemble du gouvernement pour offrir une direction au niveau des cadres supérieurs en ce qui a trait à la gestion des urgences, au nom du gouvernement du Canada.

Ce comité se réunit mensuellement quand il n'y a pas d'urgence pour examiner les processus de gestion et l'état de préparation du gouvernement du Canada en cas d'urgence. Durant les situations d'urgence, le comité ou ses sous- comités se réunissent aussi souvent qu'il est nécessaire afin de fournir appui, coordination et conseils aux principaux ministères et agences qui sont chargés de la gestion de l'urgence.

À titre de coprésidents de ce comité, M. Broughton et moi-même reconnaissons que, dans le contexte de la gestion des urgences, une coordination efficace est obtenue autant par la coopération que par les règles établies. Le partage des renseignements et des relations de confiance sont les fondations de la coopération. Autrement dit, il est crucial que les relations entre les divers intervenants chargés de la gestion des urgences soient bien établies avant qu'un événement ne survienne et que l'on ne tente pas de les établir à la hâte pendant l'événement.

Ce sont les éléments clés qui façonnent le rôle et l'intention de ce comité. Des représentants du Bureau du Conseil privé participent aussi aux sous-comités créés en réponse à des situations émergentes ou en cours. Ces comités sont un outil clé pour la participation du Bureau du Conseil privé au système de gestion des urgences.

Bien sûr, l'arrière-plan du système de gestion des urgences de tout pays est la solidité du cadre législatif. Au Canada, comme vous le savez tous, le gouvernement s'efforce actuellement de renforcer ce cadre législatif en faisant adopter le projet de loi C-12, Loi sur la gestion des urgences. Les dispositions du projet de loi C-12 répondent à certaines exigences clés pour garantir l'efficacité, le leadership et la reddition de comptes au niveau fédéral dans le dossier de la gestion des urgences.

Par exemple, le projet de loi C-12 reflète l'environnement nouveau et changeant en matière de menace et de risque; il garantit que l'on saura qui est chargé de la coordination fédérale en cas d'urgence, nommément le ministre de la Sécurité publique; il donne au ministre de la Sécurité publique les pouvoirs voulus pour créer des normes pour l'état de préparation aux urgences applicables à tous les ministères gouvernementaux; et il établit un régime plus solide de reddition de comptes quant à la manière dont une urgence est traitée.

[Français]

Si le projet de loi C-12 était adopté et recevait la sanction royale, le Bureau du Conseil privé aurait pour tâche de veiller à ce que le ministre de la Sécurité publique et son ministère puissent assumer les responsabilités que leur confère la loi, et à ce que les ministres coopèrent pour respecter leurs engagements aux termes du projet de loi.

Ainsi, parce que le Bureau du Conseil privé participe de plusieurs façons et à plusieurs niveaux à la gestion des urgences, il est bien placé pour juger dans quelle mesure les dispositions du projet de loi C-12 sont adoptées.

J'espère que ma brève description du rôle du Bureau du Conseil privé dans la gestion des urgences au Canada, de sa fonction de remise en question en la matière et de sa participation à la direction et à la coordination des comités exécutifs, vous ont permis d'obtenir les réponses que vous cherchiez.

[Traduction]

Scott Broughton, sous-ministre adjoint principal par intérim, Secteur de la gestion des mesures d'urgence et de la sécurité nationale, Sécurité publique Canada : Je n'ai pas prévu de faire de déclaration. Nous sommes tous les deux disposés à répondre aux questions.

Le président : Je vais lancer le bal en posant une question sur des subtilités constitutionnelles.

Quand cette affaire était à l'étude à la Chambre des communes, il y a eu un échange mettant en cause Serge Ménard, député du Bloc. Il ne voulait pas que les représentants des municipalités soient dans la salle, il voulait traiter uniquement avec les provinces parce que les municipalités sont constitutionnellement des entités créées par les provinces.

Quand les représentants de la Fédération canadienne des municipalités ont comparu devant nous, l'un de leurs arguments était qu'ils voulaient qu'on reconnaisse davantage le rôle que jouent les municipalités en situation d'urgence. Bien sûr, l'article 4 du projet de loi stipule :

Dans le cadre de la mission que lui confère l'article 3, le ministre est chargé :

f) de coordonner les activités des institutions fédérales en matière de gestion des urgences avec celles des provinces et, par leur intermédiaire, avec celles des autorités locales, et d'appuyer les activités des provinces et, par leur intermédiaire, celles des autorités locales.

On utilise l'expression « autorités locales », qui englobe certainement les municipalités.

Certains représentants du monde municipal préféraient cette expression; c'est peut-être une question d'ego. Je soupçonne que s'il y avait une inondation majeure à Winnipeg et que le gouvernement fédéral voulait s'entretenir avec le maire de Winnipeg et lui faire un gros chèque, il n'y aurait aucun problème. Qui sait? Habituellement, les gens sont heureux d'accepter un chèque.

Sur le plan des subtilités constitutionnelles, ce n'est pas une question de fond, mais les municipalités estiment qu'elles doivent être présentes plus souvent lors des entretiens et qu'on doit reconnaître leur présence.

Dans le cas des grandes villes comme Toronto, Montréal et Vancouver, qui sont plus populeuses que certaines provinces, dites-moi comment vous gérez ces subtilités constitutionnelles avec finesse, de manière à faire le travail efficacement, en espérant que tous les intervenants soient à l'aise.

M. Broughton : M. Latham, dont vous avez parlé tout à l'heure, et moi-même coprésidons un comité de hauts fonctionnaires chargé de la gestion des urgences au nom du groupe fédéral-provincial-territorial. La plus grande partie de nos efforts sont déployés dans un cadre fédéral-provincial-territorial : l'élaboration des politiques, le travail préparatoire que nous faisons à la grandeur du gouvernement, tout cela se fait dans ce cadre. Le gouvernement fédéral met en œuvre un bon nombre de programmes, par l'entremise de Sécurité publique Canada et d'autres intervenants, et par l'intermédiaire de ces programmes, nous fournissons une aide financière directe aux premiers intervenants au niveau des municipalités.

Pour gérer tout cela « avec finesse », pour reprendre votre expression, sénateur, nous veillons à ce que tout se fasse en consultation avec nos collègues provinciaux et territoriaux. Même si nous avons des programmes dans le cadre desquels nous travaillons directement avec les municipalités, nous faisons beaucoup de formation à notre collège situé sur le chemin Heron et ces exercices réunissent des premiers intervenants, des chefs de police, des chefs de pompiers, des ambulanciers paramédicaux. Tout le monde, aux niveaux provincial et territorial, est au courant de cette situation et des programmes d'aide financière que nous avons. En général, nous essayons d'élaborer ces programmes en consultation avec les provinces et les territoires pour que leurs représentants sachent ce qui se passe et en fassent partie.

Pour ce qui est de l'aide financière, la plus grande partie de l'argent que le gouvernement fédéral fournit, que ce soit à l'avance ou après le fait, est habituellement versée par l'intermédiaire des autorités provinciales et territoriales, parce que celles-ci sont responsables de la gestion des finances de la province. Même lorsqu'il y a des arrangements en vue d'événements locaux ou régionaux mettant en cause des municipalités ou des villes, les programmes d'aide financière importants comme les accords d'aide financière en cas de catastrophe sont généralement mis en œuvre par l'entremise des provinces et territoires.

À l'occasion, nous avons des discussions et des débats. Cependant, la plupart du temps, nos collègues provinciaux et territoriaux connaissent bien les politiques et programmes fédéraux et nous aident à les façonner et à les faire évoluer.

Le président : Estimez-vous que ces subtilités constitutionnelles — je choisis cette expression parce qu'elle décrit bien la situation — sont gérées d'une manière qui fonctionne plus ou moins bien?

M. Broughton : À mon avis, tout fonctionne bien, oui. Nous travaillons avec les municipalités. Nous travaillons aussi avec beaucoup d'organismes bénévoles auxquels s'intéressent les provinces et territoires. Collectivement, quand nous sommes tous présents à la table, à ma connaissance, il n'y a aucun problème de fond à cet égard. Tout semble bien fonctionner.

Le président : Les municipalités ont-elles des représentants à la table ou sont-elles représentées par les provinces?

M. Broughton : La plupart du travail que nous faisons est accompli par l'intermédiaire des provinces et territoires, mais il y a une foule de réunions, de discussions et de consultations qui mettent directement en cause les municipalités. La formation que nous faisons à notre Collège de la protection civile, sur le chemin Heron, regroupe des premiers intervenants des villes, des petites localités et des régions; en ce sens, ils sont donc présents.

Le président : Personnellement, cela ne me tracasse pas, mais je sais que certains ont quelques réserves à ce sujet.

Le sénateur Day : Je ne sais pas ce qui se passera au sein de l'appareil gouvernemental, advenant l'adoption de ce projet de loi. Ce n'est pas clair dans mon esprit. Une partie du secrétariat du Bureau du Conseil privé passera-t-elle à Sécurité publique Canada? Prévoyez-vous un mouvement de personnel? Madame Marcoux, va-t-on transférer certaines responsabilités du secrétariat à Sécurité publique Canada?

Mme Marcoux : Non, pas du tout. En fait, le rôle du secrétariat demeurera inchangé. Le secrétariat aide le premier ministre et le Cabinet à s'acquitter de leurs rôles et responsabilités.

Si le projet de loi C-12 est adopté, il n'y aura aucun changement en ce sens au sein de l'appareil gouvernemental, aucun changement structurel.

Le sénateur Day : Monsieur Broughton, prévoyez-vous un accroissement du personnel de votre ministère avec l'arrivée de ce nouveau secteur de responsabilité?

M. Broughton : Je ne pense pas pouvoir dire que cela résultera directement de la mesure. Le gouvernement se servira du processus budgétaire pour adopter les politiques et les programmes qui nous permettront d'intervenir dans le domaine de la gestion des urgences. À ma connaissance, l'adoption du projet de loi n'entraînera pas directement la création de nouvelles structures substantielles.

Le sénateur Day : Les activités de gestion des urgences vont-elles se poursuivre?

M. Broughton : Je le crois, mais le mérite du projet de loi, c'est manifestement qu'il précise le rôle du ministre de la Sécurité publique et des autres ministres. Cela encourage les gens à s'assurer qu'ils comprennent leurs rôles et responsabilités. Pour ce qui est de la plupart des mécanismes existants, ils ont été mis en place, et ils continuent et continueront de l'être.

Le sénateur Day : Vous dites que le projet de loi précise le rôle du ministre. Toutefois, ce dernier l'exerce déjà. C'est une fonction qui a déjà cours. Le projet de loi vise-t-il à préciser et à inscrire dans la loi une activité qui a cours de toute façon?

M. Broughton : Récemment, je pense que c'est le cas, oui.

Mme Marcoux : Je veux ajouter une chose. D'une certaine façon, le nouveau projet de loi complète la panoplie des responsabilités qu'assume déjà le ministre de la Sécurité publique en vertu de la Loi sur la sécurité publique, qui est le principal instrument en matière de sécurité publique au Canada. La mesure vient compléter l'éventail de ses responsabilités.

Le sénateur Day : J'essaie de comprendre pourquoi nous avons besoin d'une mesure comme celle-là. L'un de vous peut-il me dire pourquoi il est souhaitable de modifier le nom de la loi et de parler de « gestion des urgences » au lieu de « protection civile »?

M. Broughton : Essentiellement, tous les éléments sont déjà en place : les mécanismes, le ministre et la plupart des activités que nous souhaitons mener. Le projet de loi est une actualisation de la situation qui a cours au sein du gouvernement et il énonce clairement les rôles et les responsabilités de notre ministre et de ses collègues dans le système fédéral.

En l'absence du projet de loi, nous ne serions pas tenus d'interrompre ce qui se fait déjà, mais je pense qu'il a le mérite de préciser très clairement pour la gouverne de toutes les personnes concernées ce qu'on attend exactement de notre ministre et de ses collègues dans l'ensemble du système fédéral.

Le sénateur Day : Voulez-vous ajouter quelque chose, madame Marcoux?

Mme Marcoux : C'est précisément ce que j'allais dire.

Le sénateur Day : Le fait que vous soyez coprésidents de ce comité montre que le ministère de la Sécurité publique, dirigé par M. Stockwell Day, et le Bureau du Conseil privé jouent des rôles d'une importance égale dans le domaine de la gestion des urgences et de la protection civile.

M. Broughton : Dire que leur rôle est d'égale importance est la bonne façon de décrire ce qu'il en est. En raison de la nature de son travail, la Sécurité publique joue un rôle davantage axé sur les opérations et sur l'existence des centres des opérations du gouvernement. Il lui incombe aussi d'assurer la liaison avec les autorités provinciales et territoriales, avec les autres ministères et leurs centres de secours d'urgence et avec les intervenants qui doivent passer à l'action en cas d'urgence. Notre rôle est de nature opérationnelle. C'est à nous qu'il incombe d'organiser et d'orchestrer les choses et de s'assurer que les gens ont l'information dont ils ont besoin.

Quant au Bureau du Conseil privé, son rôle est davantage axé sur la prise de décisions. Du point de vue d'un haut fonctionnaire, le BCP intervient lorsque nous pensons qu'il est nécessaire que le gouvernement soit mis au courant de ce qui se passe et, chose plus importante, qu'il prenne les décisions qui s'imposent en matière de politiques ou d'utilisation des ressources. Voilà le rôle que jouerait le BCP. Il se charge de l'interface avec le Cabinet et le premier ministre.

Quant à nous, nous jouons un rôle opérationnel. Nous communiquons au BCP et à d'autres instances la nature du problème et s'il est nécessaire que le gouvernement du Canada prenne une décision, c'est le Bureau du Conseil privé qui assume cette fonction.

Le sénateur Day : En dehors des périodes d'urgence, Sécurité publique Canada doit, de façon permanente, s'assurer que tous les ministères et organismes respectent les normes qui sont établies périodiquement et les plans qui sont en vigueur.

M. Broughton : Tout à fait.

Le sénateur Day : Je comprends ce volet. Je veux parler d'un cas d'urgence. Si j'ai bien compris la mesure, Sécurité publique Canada prend l'initiative et s'assure que le ministère qui devrait maîtriser la situation le fasse. Est-ce exact?

M. Broughton : Oui.

Le sénateur Day : Au cours de cette période où l'on détermine quel ministère doit prendre l'initiative, vous allez évidemment continuer de veiller à la sécurité publique. Que fait le Bureau du Conseil privé pendant ce temps?

Mme Marcoux : Nous sommes là pour appuyer Sécurité publique Canada, pour veiller à ce que les décisions nécessaires soient prises, par exemple s'il faut décider quel est le ministre compétent. Advenant que des décisions doivent être prises au niveau des sous-ministres ou même d'un certain groupe de ministres, nous veillerions à ce que cela soit fait.

Je prodiguerais des conseils. Ainsi, je recommanderais au conseiller à la sécurité nationale et/ou au greffier du Conseil privé ou même au premier ministre d'organiser une rencontre ministérielle pour informer les ministres au sujet d'une situation donnée ou pour prendre certaines décisions. Si le gouvernement doit faire une déclaration publique, nous la rédigeons et nous identifions un ministre responsable.

Le sénateur Day : Si le BCP fait tout cela, pourquoi confier une partie de ses responsabilités à Sécurité publique? Pourquoi le Bureau du Conseil privé n'assume-t-il pas la totalité des activités de coordination? Le commandement et le contrôle ultimes reviennent au ministre ou au ministère responsable. En l'occurrence, c'est tout le travail préliminaire qui est en cause. Vous nous dites que vous veillerez à la plupart des activités et que vous assurerez la coordination. Pourquoi est-il nécessaire de diviser ces tâches? Pourquoi le Secrétariat du Bureau du Conseil privé qui s'est toujours occupé de ces questions ne continuerait-il pas à le faire?

Mme Marcoux : Dans la plupart des cas, il faut qu'un ministre compétent assume la responsabilité d'un dossier. Je n'ai qu'une quarantaine d'employés sous mes ordres. Par conséquent, nous ne serions pas en mesure d'assumer cette fonction. Notre rôle principal consiste à conseiller le premier ministre et le Cabinet en nous appuyant sur le leadership d'un ministre ou de plusieurs ministres compétents, selon le cas.

Le sénateur Day : Je parle de l'action initiale, lorsque l'urgence vient de survenir, avant qu'un ministère responsable soit désigné. Selon le projet de loi, Sécurité publique Canada assume initialement le contrôle de la situation, mais le ministère travaille de concert avec le Bureau du Conseil privé. C'est ce que vous venez de me dire.

M. Broughton : Le rôle du BCP est le même, que l'on soit confronté à une situation d'urgence ou non. Le Bureau du Conseil privé est l'instance bureaucratique qui appuie le premier ministre et le Cabinet. Peu importe qu'à un moment ou un autre le gouvernement vive une situation d'urgence ou de routine. Dans un sens opérationnel, Sécurité publique Canada joue un rôle plus large que n'importe quel autre organisme gouvernemental, en ce sens qu'il doit s'assurer que chacun est là où il doit être avant, pendant et après une crise. Il n'y a ni double emploi ni partage de responsabilités. Même dans une situation d'urgence, le rôle du BCP demeure inchangé. Il fait ce qu'il ferait dans n'importe quel dossier où il est appelé à appuyer le cabinet et le premier ministre.

Le sénateur Fairbairn : J'ai la mémoire longue et je me souviens de la naissance de cette organisation au Bureau du Conseil privé dans les années 1970. Elle a beaucoup évolué depuis.

Permettez-moi de vous lire l'article 5, à la page 4 du projet de loi :

En consultation avec le ministre des Affaires étrangères, le ministre peut élaborer, avec les autorités compétentes des États-Unis, des plans conjoints de gestion des urgences et, conformément à ceux-ci, coordonner l'intervention du Canada en cas d'urgence survenant aux États-Unis et fournir son aide à cet égard.

Pouvez-vous nous donner des explications? La raison pour laquelle j'ai été frappée par cet article, c'est toute l'agitation qu'ont connue les États-Unis il y a quelques jours au sujet de la possibilité d'un attentat à l'aéroport JFK.

Au cours d'un tel incident, êtes-vous au coeur de l'action, prêts à apporter votre aide en matière de coordination? En tant qu'allié, partenaire privilégié et voisin qui souhaiterait être informé de ce genre de situation, le Canada est-il averti rapidement? En un sens, peu importe qu'une urgence se produise ou non. Ce qu'il faut savoir, c'est si nous sommes vigilants et prêts à intervenir dans la mesure de nos moyens advenant une situation d'urgence.

Mme Marcoux : Voulez-vous savoir, spécifiquement, si les autorités américaines ont communiqué avec nous pour nous avertir au préalable de l'éventualité d'un tel incident?

Le sénateur Fairbairn : Maintenant que vous le mentionnez, je vais aussi poser cette question. Je voudrais savoir si nous avons été mis au courant de cette menace, qu'elle soit sérieuse ou non. Il y aurait sans doute bien des intermédiaires, mais votre secrétariat est-il au coeur d'événements comme celui-là, qu'il s'agisse d'un canular ou non? Si un événement devait se produire — comme à New York —, êtes-vous averti rapidement? La liaison nécessaire se fait-elle entre les deux pays?

Mme Marcoux : C'est précisément le genre de questions que nous poserions nous-mêmes. Lorsque j'ai entendu la nouvelle samedi ou dimanche, j'ai appelé mes collègues du SCRS et de Transports Canada pour leur poser ces questions spécifiques et obtenir toute autre information qu'ils auraient pu avoir. Comme cette affaire est relativement récente, je n'ai pas énormément de détails pour l'instant. C'est ce que j'ai fait en l'occurrence.

Le sénateur Fairbairn : Heureusement, la menace ne s'est pas concrétisée, mais lorsqu'elle a été connue initialement, je suppose qu'il y a eu des contacts avec des spécialistes dans d'autres ministères, comme les Affaires étrangères et la Défense nationale, qui ont sans doute des relations avec leurs homologues compétents aux États-Unis.

Mme Marcoux : Oui, notre personnel communique régulièrement avec eux.

Le sénateur Fairbairn : À un moment donné, la communication serait établie avec vous, n'est-ce pas?

Mme Marcoux : Oui. Par exemple, je pourrais convoquer une réunion avec mes collègues sous-ministres adjoints. Si la situation s'aggrave, nous avons les mécanismes permettant au gouvernement de fournir la réponse qui s'impose et, le cas échéant, d'informer d'autres intervenants.

Le sénateur Fairbairn : Les Américains sont tellement près de nous que ce serait stupéfiant de ne pas avoir cette liaison, mais qu'en est-il de vos autres collègues? Notre comité s'est rendu à Londres, il y a environ deux ans. C'était à l'automne; quelques mois à peine après la terrible explosion dans le métro londonien. L'une des parties les plus intéressantes de notre voyage — et la sénateur Andreychuk sera sans doute d'accord avec moi — a été la visite du quartier général de la police de Londres, qui était au coeur même de la crise. Les Britanniques ont un réseau extraordinaire qui déclenche instantanément l'alerte en cas d'attentat terroriste. Lorsque nous avons quitté l'immeuble, nous étions tous ébranlés, car si ce réseau n'avait pas existé, un nombre beaucoup plus considérable de personnes auraient été tuées.

Lorsque des situations d'urgence surviennent dans un autre pays qui n'est pas aussi près de nous que les États-Unis, sommes-nous tout de même avertis rapidement en dépit du fait qu'un océan nous sépare? On ne sait jamais où les terroristes peuvent avoir d'autres contacts. Cela aurait pu facilement être quelque part au Canada.

Mme Marcoux : D'après mon expérience au Service canadien du renseignement de sécurité, dans certains cas le SCRS serait averti à l'avance de certains incidents, qu'ils surviennent au Royaume-Uni ou dans d'autres pays. Dans certains cas, il n'est pas avisé parce que des arrestations sont imminentes et qu'il ne serait pas judicieux de transmettre des renseignements aussi délicats sur la situation. Les relations entre les organismes canadiens de sécurité publique et d'exécution de la loi avec leurs homologues britanniques et américains et d'autres encore sont très bonnes. Il y a un dialogue quotidien, à la fois avec nos agents de liaison à l'étranger ou leurs agents de liaison ici ou encore d'un quartier général à l'autre. Je pense pouvoir dire sans risque de me tromper que nous serions normalement avertis à l'avance.

Le sénateur Fairbairn : Merci beaucoup. C'est important que les gens comprennent qu'avec la technologie d'aujourd'hui, nous pouvons obtenir ces renseignements rapidement. Il y a toujours une crainte que des événements qui se produisent à l'étranger puissent être liés à quelque chose qui se passe chez nous. C'est très utile d'obtenir ces renseignements.

Mme Marcoux : Bien sûr, c'est l'une des premières choses que nous voulons savoir, si des événements qui se produisent à l'étranger ont un lien quelconque avec le Canada, et nous faisons donc automatiquement le nécessaire pour pouvoir répondre à cette question aux cadres supérieurs ou bien aux ministres ou à quiconque en fait la demande.

[Français]

Le sénateur Nolin : Je suis sûr que si nous avions posé les mêmes questions à vos confrères américains il y a quelques années, ils nous auraient répondu la même chose que vous aujourd'hui, c'est-à-dire que législativement parlant des petites modifications doivent être faites, mais que dans l'ensemble vous veillez sur nous.

L'ouragan Katrina s'est depuis lors présenté, et nous nous sommes aperçus que les belles paroles, les belles préventions et les belles politiques publiques avaient disparu. À un point tel qu'aujourd'hui les Américains anticipent la nouvelle saison des ouragans et prévoient déjà qu'il y aura cinq ouragans majeurs qui les frapperont. Également, ils prévoient et anticipent déjà les mesures d'urgence à mettre en place.

Mme Marcoux : Vous avez absolument raison.

Le sénateur Nolin : Malgré toutes les mesures législatives que vous nous demandez d'approuver et tous les pouvoirs que nous consentons à accorder au ministre, et en dépit des réserves que j'ai émises à plusieurs reprises sur l'efficacité d'un système avec des ministres responsables de leur ministère et un ministre qui a cette responsabilité, comment pouvez-vous nous rassurer?

Comment pouvez-vous nous rassurer qu'un fiasco comme celui de l'ouragan Katrina ne pourrait pas se produire au Canada? Quelles sont les leçons que nous avons tirées de ce fiasco américain?

Mme Marcoux : Ce serait très imprudent de ma part de vous dire que nous sommes prêts à toute éventualité, à toute crise ou à toute urgence.

Si je me fie à l'expérience de la sous-ministre, qui est la conseillère en matière de sécurité nationale, elle dit toujours que nous ne pouvons jamais garantir que nous sommes prêts à toute éventualité, mais que nous devons toujours se poser la question et que nous devons toujours remettre en perspective la réponse à cette question.

Il faut toujours revoir les mesures d'urgence, les préparatifs des mesures d'urgence, les plans; s'assurer de savoir où notre personnel se situe, comment rejoindre les personnes clés; s'assurer que toutes les initiatives en matière d'urgence sont revues de façon régulière et continue, et ainsi en identifier les vulnérabilités.

Le sénateur Nolin : Il est évident que le projet de loi contient un volet de prévention des urgences et tout ce que le projet de loi nous demande d'approuver en termes de pouvoir afin de permettre au ministre de la Sécurité publique d'effectuer la mise sur pied d'une série de mesures pour que lorsqu'une urgence se présente nous soyons capable de gérer la situation. Ce sera la responsabilité du ministre; je pense que le projet de loi est suffisamment précis à ce sujet et j'espère que vous avez tenté de tout prévoir.

À l'alinéa 4(1)m) du projet de loi, il est indiqué que :

Le ministre aura la responsabilité d'établir des principes et programmes concernant la gestion des urgences.

Est-ce à dire que le ministre aura le pouvoir d'établir ces fameux principes qui seront applicables à d'autres, donc à l'extérieur des institutions fédérales?

Mme Marcoux : Je vais demander à M. Broughton de répondre. J'ai l'impression que cela s'applique seulement au niveau fédéral, mais je ne voudrais pas vous induire en erreur.

[Traduction]

M. Broughton : La teneur du projet de loi vise le gouvernement fédéral. La plupart de nos responsabilités qui y sont énoncées reposent sur nos collègues dans l'ensemble du système fédéral. Il est clair que d'autres dispositions nous demandent aussi de travailler avec les provinces et territoires. Les politiques et programmes dont il est fait mention mettent surtout en cause le gouvernement fédéral. Notre ministère a énormément de responsabilités pour ce qui est de travailler avec les provinces et les territoires et quant à la manière de réagir et de travailler avec les autres autorités. Les dispositions en question s'appliquent explicitement au gouvernement fédéral, d'après mon interprétation.

Le sénateur Nolin : C'est ce qu'il m'avait semblé aussi en lisant l'alinéa 4(1)a). Cette disposition vise clairement les institutions et agences fédérales. Cependant, à la lecture de l'alinéa 4(1)m), il y a assurément redondance, ou bien vous voulez faire plus que simplement donner au ministre le pouvoir de structurer ces principes, d'organiser ces programmes et d'établir des principes qui auraient une portée plus vaste que les institutions fédérales. C'est pourquoi je pose la question.

Quel est l'objet de l'alinéa 4(1)m)?

M. Broughton : Nous travaillons non seulement avec les provinces et territoires, mais aussi avec le secteur privé. La responsabilité du ministre, au nom du gouvernement fédéral, est de s'assurer, en application de cette disposition et d'autres, que les politiques et programmes en matière de gestion des urgences ont été mûrement réfléchis et sont en place. Cela se fait surtout de manière collégiale, mais le ministre de la Sécurité publique assure le leadership pour ce qui est des dispositions prévues à l'alinéa 4(1)m). Les autorités fédérales assument la responsabilité principale. Nous avons clairement un rôle de leadership auprès des provinces, des territoires et aussi du secteur privé.

[Français]

Le sénateur Nolin : Je présume que Mme Bloodworth doit être familière avec ce dossier puisque cela a été soulevé autour de la table avec les représentants permanents des pays de l'OTAN.

Concernant l'événement qui s'est produit en Estonie récemment : l'attaque cybernétique; quel mécanisme est en place au Canada pour qu'une telle situation ne se reproduise pas?

Également, la fin de semaine dernière, mes collègues et moi avons reçu plus de 1 000 courriels de deux personnes. Sans discuter de l'importance de leurs préoccupations, il n'en reste pas moins que deux personnes nous ont envoyé à mes collègues et à moi 1 000 courriels. C'est pour vous dire que nous sommes à la merci de ce genre de choses.

Je respecte le fait que les gens aient des opinions et veuillent les défendre. Ceci étant dit, ce qui s'est produit en Estonie est une invasion qui a mis en danger, outre les nerfs des parlementaires estoniens, le système bancaire et les services de distribution des guichets automatiques des banques. Avons-nous mis en place au Canada des mécanismes afin de prévoir ce genre de situations?

Mme Marcoux : Je vais laisser M. Broughton renchérir à ce sujet, mais je crois savoir qu'une politique est en élaboration concernant la protection des cyberinfrastructures. Au sein du centre des opérations du gouvernement, il y a même un organisme responsable d'identifier et de gérer les attaques contre les cyberinfrastructures.

[Traduction]

M. Broughton : Au Centre des opérations du gouvernement, nous avons une unité où des gens sont chargés de surveiller ce qui se passe dans ce domaine. Il y a un secrétariat de la cybernétique à Sécurité publique Canada. Notre sous-ministre a des entretiens avec 10 ou 15 acteurs importants du secteur privé pour discuter des approches que nous pouvons adopter en matière de sécurité cybernétique. Premièrement, nous y travaillons sur deux fronts, à l'intérieur de l'appareil gouvernemental, à l'unité qui fait partie du Centre des opérations du gouvernement. Nos organismes de renseignement s'efforcent également d'avoir cela à l'oeil. Deuxièmement, nous travaillons de plus près avec le secteur privé pour voir comment nous pouvons renforcer la sécurité du système.

Le sénateur Nolin : J'ai toujours pensé que le secteur de l'informatique de l'Estonie était à la fine pointe de la technologie. Je me demande maintenant si les experts en question, que vous rencontrez tous les mois ou enfin régulièrement ont les outils voulus pour faire face à de telles situations d'urgence. J'espère que, tout au moins sur le plan législatif, vous avez des pouvoirs suffisamment étendus pour vous assurer que votre boîte à outils est assez bien garnie pour vous permettre d'intervenir. Nous ne voulons pas que cela se produise au Canada.

Le sénateur Andreychuk : Le BCP est censé être le point de convergence et donner l'alerte en premier au Cabinet du premier ministre, si jamais quelque chose se produisait. En quoi consistent vos activités courantes? Comment évaluez- vous les situations émergentes? Avant les attentats du 11 septembre, comme pour beaucoup d'autres attentats, le problème était en partie causé par le fait que l'on a été incapable de faire le lien entre des événements disparates. La faiblesse de tous les systèmes était que chacun d'eux possédait des éléments d'information mais n'en avait pas fait part aux autres pour former un tout cohérent. Je crois comprendre que le BCP est chargé de réunir la totalité de l'information. Comment faites-vous cela au jour le jour? Comment faites-vous l'évaluation?

Mme Marcoux : Je m'attends à ce que les analystes du secrétariat communiquent quotidiennement avec les ministères faisant partie de leur portefeuille ou de leur domaine de responsabilité, afin qu'ils soient toujours au courant de ce qui se passe. Nous obtenons un certain nombre de rapports de renseignements provenant de diverses sources, y compris un briefing quotidien du Centre des opérations du gouvernement, qui nous aide à savoir ce qui se passe et à être prêts à toute éventualité. En nous fondant sur ces renseignements, nous portons un jugement et décidons si un événement donné peut potentiellement prendre une ampleur nationale, si l'intérêt public est en jeu, si nous devons nous en occuper et si les ministres doivent être mis au courant. Cela fait un peu appel à l'intuition, mais comme je l'ai expliqué tout à l'heure, c'est fondé sur la présence au secrétariat d'un certain nombre de représentants de diverses agences qui ont une bonne compréhension de ces domaines et qui peuvent porter un jugement et se tenir prêt à toute éventualité.

Le sénateur Andreychuk : Je pense que vous avez répondu à ma question, mais je veux que l'on me rassure. Nous suivons tous l'enquête sur l'affaire d'Air India, la catastrophe du milieu des années 1980. Nous avons entendu des témoignages attestant que certaines personnes possédaient certains renseignements et que d'autres personnes ont contredit des déclarations qu'elles avaient faites dans le passé. Chose certaine, à l'époque, au milieu des années 1980, nous n'étions pas équipés pour rassembler le tout et pour parler au nom du gouvernement de la manière dont, à mon avis, nous devrions pouvoir le faire aujourd'hui. Des renseignements isolés ne valent pas plus que la personne qui les interprète à ses propres fins. Un fait mineur aux yeux d'une personne peut prendre une importance énorme pour quelqu'un d'autre si la deuxième personne possède par ailleurs d'autres renseignements.

Je veux qu'on me donne des assurances. Ce projet de loi est une mesure législative habilitante. Il ne change pas tellement l'orientation de la loi. Cependant, je veux avoir la certitude que, sur le plan pratique, non pas sur le plan juridique, il y a quelqu'un qui rassemble toutes les pièces du casse-tête et qu'on ne vienne pas dire qu'un analyste a fait ceci et qu'un autre analyste a fait cela. Je veux avoir l'assurance que quelqu'un a une vue d'ensemble tous les jours et peut déclarer : « Voici la situation pour la journée et je crois qu'elle est épouvantable et que nous devons faire quelque chose », ou encore « Oui, c'est la routine et chacun semble bien faire son travail, et c'est donc le train-train quotidien ». Est-ce bien ce qui se passe au BCP? Est-ce votre travail?

Mme Marcoux : Non. Nous avons fait beaucoup de progrès depuis 1985 et surtout depuis le 11 septembre. Nous avons le Centre intégré d'évaluation des menaces au Service canadien du renseignement de sécurité, qui assume la responsabilité. Il compte des membres d'un certain nombre d'agences et ministères gouvernementaux qui possèdent des sources de renseignements. Leur responsabilité est de rassembler toutes les sources d'information sur un dossier donné, de faire tous les recoupements et de s'assurer que le gouvernement a une compréhension et une vision globales de la menace. Au jour le jour, les ministères gouvernementaux acheminent des renseignements au Centre des opérations du gouvernement sur des dossiers qui évoluent dans leurs domaines de compétence respectifs. Ils envoient ces renseignements pour que le système soit constamment en alerte.

Le sénateur Andreychuk : Le BCP vérifie-t-il tous les renseignements pour s'assurer que la situation que vous venez de décrire correspond effectivement à ce qui se passe sur le terrain?

Mme Marcoux : Nous faisons cela de plusieurs manières. Nous avons un certain nombre de comités ou groupes de travail interministériels qui examinent tout l'éventail des questions, activités et initiatives mettant en cause le renseignement et la sécurité nationale, par exemple, et tout cela se fait au sein de ces comités.

Le sénateur Andreychuk : Êtes-vous la personne chargée de rassembler tous les éléments en un tout cohérent? Est-ce le BCP qui s'en charge?

Mme Marcoux : Oui, M. Broughton partage cette responsabilité au portefeuille de la Sécurité publique. Dans le cas de la sécurité nationale et de la sécurité publique, c'est surtout la GRC et le SCRS.

Le sénateur Andreychuk : Quand une catastrophe survient, qu'elle soit d'origine humaine ou naturelle ou qu'il s'agisse d'une menace terroriste, la question que se pose un parlementaire est celle-ci : « Avons-nous fait ce qu'il fallait, compte tenu de la capacité de notre système? » On peut ensuite analyser le tout pour voir s'il nous faut un système renforcé ou différent. Pour avoir l'assurance que nous faisons vraiment ce que nous disons vouloir faire, il faut que quelqu'un, quelque part, assume la responsabilité ultime et je veux savoir qui est cette personne, du point de vue de la double vérification et de l'intervention en cas de crise. Tous ces éléments travaillent peut-être de manière indépendante. Je veux avoir l'assurance que le travail se fait collectivement et que quelqu'un fait une évaluation globale. Tout au long de notre étude de la Loi antiterroriste, on nous a dit que c'était le BCP qui était censé s'en charger et je veux avoir l'assurance que c'est le cas.

Mme Marcoux : C'est la raison pour laquelle je voulais coprésider le comité de gestion des urgences avec M. Broughton, pour que je puisse participer de près à ces dossiers et m'assurer que tous les éléments de l'appareil fassent exactement ce qu'ils sont censés faire.

Le sénateur Andreychuk : Pour revenir à la question du sénateur Smith, si je comprends bien, en particulier en cas de catastrophe, la question des diverses compétences a posé problème parce qu'il s'agissait de décider qui s'occupe de ceci et de cela, qui se déplace, et cetera. Ce n'était pas une question de paiement ou de présence à la table. Le problème était que chacun partait de son propre point de vue et s'efforçait d'aider ou de se rendre utile. Je pensais que nous avions surmonté cela au moyen de protocoles établissant des signaux permettant de déterminer s'il s'agit d'une question locale, provinciale, nationale ou internationale. Je pensais que nous avions réglé ce problème en mettant en place un mécanisme permettant de décider que ce n'était plus une question concernant seulement les autorités locales et qu'il fallait faire intervenir quelqu'un d'autre. Je pensais que tout cela avait été négocié et fixé dans des protocoles. Ai-je raison?

M. Broughton : C'est essentiellement le cas. La grande majorité des situations d'urgence ou de catastrophe dans notre pays ne dépassent jamais le niveau local ou municipal. Tous les premiers intervenants, la police, les services d'incendie et les ambulanciers paramédicaux s'occupent de la grande majorité des cas. Je ne connais pas le pourcentage exact. À l'occasion, certaines catastrophes ont une ampleur provinciale ou territoriale, par exemple les incendies de forêt, les inondations, et cetera. Lorsque la province estime avoir besoin d'aide, elle fait appel au gouvernement fédéral. C'est un protocole très bien établi et compris qui existe à tous les niveaux de gouvernement. Les inondations en Colombie-Britannique en sont un bon exemple, les municipalités partout dans la province se préparant à réagir à l'intérieur de leur territoire. Ce sont les autorités de la province de Colombie-Britannique qui s'occupent de la plus grande partie de la maîtrise d'œuvre et de l'état de préparation face au potentiel d'inondation en Colombie- Britannique, et nous sommes présents à la table avec les responsables — en particulier à la Sécurité publique, mais il y a aussi divers ministères et agences du gouvernement fédéral. Nous intervenons et apportons notre aide seulement à la demande du gouvernement provincial. Ce protocole, cette compréhension quant à la manière dont fonctionne la hiérarchie, est bien compris partout au Canada.

À chaque point de jonction, nous avons aussi des ententes et des protocoles établissant la différence entre une personne qui assume la responsabilité et une autre qui vient seulement apporter son aide. Dans la grande majorité des cas, le gouvernement fédéral n'assume pas le commandement. Nous sommes seulement présents pour fournir des ressources et de l'aide à nos collègues provinciaux et territoriaux.

Le sénateur Fairbairn : J'aurais dû dire, en guise de préambule à ma première question, que nous connaissons tous les antécédents du service britannique en pareille situation. Avec la question irlandaise, les Britanniques ont vécu tellement longtemps en subissant des pressions et turbulences tellement fortes qu'il était tout naturel, puisque cette situation épouvantable perdurait pendant tellement d'années, qu'ils en viennent à créer petit à petit un système qui permet non seulement de composer avec la situation présente, mais aussi d'avoir toujours une longueur d'avance face à l'étendue du problème.

Nous n'avons pas dit grand-chose; nous avons écouté. Ce fut toute une leçon pour nous que d'entendre à quel point ils ont pu rapidement, quand a surgi cette crise dans le métro londonien, mettre en place un système instantanément, faire intervenir des gens à gauche et à droite et sauver des vies.

Le comité dont nous faisons partie aujourd'hui tire son origine du milieu des années 1980. Je venais d'être nommée sénateur et le sénateur Bill Kelly de Toronto présidait un comité semblable. Nous sommes aujourd'hui dans un monde bien différent à cause du 11 septembre et des autres attentats terroristes qui se sont produits, mais à ce moment-là, nous n'en étions pas encore là.

Nos discussions tournaient autour de simples possibilités. C'est ce que le sénateur évoquait tout à l'heure. Nous posions la question : Et si quelque chose arrivait? Nous recevons grâce à la technologie des messages qui nous apprennent que cela s'en vient ou que nous sommes en plein dedans. Au fil de toutes ces années, après avoir reçu une foule de rapports et différentes suggestions, pouvons-nous dire avec confiance que nous, au Canada, sommes bien placés pour assumer la situation et aider les gens qui sont aux prises avec le problème?

Quand je pense à notre voyage à Londres, il me vient tout de suite à l'esprit une image du métro à Montréal ou à Toronto. Avons-nous des systèmes, que nous réclamons depuis des années, établissant le lien entre les divers niveaux d'organisations policières, avec toujours au centre de la toile la Gendarmerie royale du Canada?

Pouvons-nous dire avec confiance, cette année, que nous sommes prêts à affronter de tels événements, si jamais nous apprenons grâce à notre réseau de renseignement que quelque chose se passe et qu'il est probable que nous soyons touchés? Avons-nous sur le terrain le système d'intervention que nous avons essayé de mettre en place et que nous espérions obtenir et que les gouvernements se sont fait dire de créer depuis une vingtaine d'années?

M. Broughton : La réponse à cette question est oui, en ce sens que les protocoles et les systèmes sont en place. Les services de renseignement, les corps policiers et les organisations de gestion des urgences ont les systèmes, les protocoles et le savoir-faire pour amorcer une réponse, le cas échéant.

Dans une grande mesure, le succès des opérations dépend des premiers répondants. Des investissements considérables ont été consentis pour ériger notre première ligne d'intervention. Cet investissement provient des municipalités. La plupart des gens considèrent les premiers répondants comme la clé du succès et c'est pourquoi leur formation et leur état de préparation est si important.

Au bout du compte, notre succès, face à ces événements particuliers, dépend de la capacité des intervenants de réagir en conformité des protocoles et des systèmes. Avec l'expérience et les leçons que nous avons apprises, nous savons qu'un échec est parfois attribuable au fait que des intervenants ignoraient ou ont oublié le système qu'ils devaient appliquer. Ces systèmes sont là pour être utilisés.

L'autre défi concerne la magnitude et la nature de l'événement. En tant que société, nous prenons tous les moyens pour essayer de prévoir les événements qui pourraient survenir. Et il arrive que périodiquement, on s'aperçoive que mère Nature ou diverses personnes nous assènent un coup bas.

Les systèmes et les protocoles existent et l'on sait qui devrait intervenir en premier, à quel moment et de quelle façon. J'ai toute confiance en ces systèmes. Sauf qu'ils doivent être appliqués. Leur mise en œuvre en bonne et due forme et la capacité des gens de les appliquer est le gage du succès. C'est à cela que les choses se résument.

Mme Marcoux : En l'absence d'urgences concrètes, l'une des choses les plus importantes que doivent faire les ministères gouvernementaux consiste à mener des exercices pour que nous ne soyons pas obligés d'élaborer des protocoles ou d'essayer de déterminer qui nous devrions appeler pendant le déroulement de l'événement proprement dit.

Il est mentionné explicitement dans le projet de loi C-12 que le ministère de la Sécurité publique doit élaborer des programmes ou des normes d'exercice. Nous appuyons la nécessité d'organiser des exercices. En outre, en cas d'urgence ou même de crise mineure, il est important de toujours faire un post-mortem et de s'assurer que les leçons apprises sont mises en œuvre et prises en compte dans l'élaboration et la planification en vue d'urgences futures.

Le sénateur Fairbairn : C'est encourageant. Pendant que j'écoutais les nouvelles concernant l'attentat qui n'a pas eu lieu à New York, la première chose qui m'est venue à l'esprit a été de me demander ce qui arriverait si un tel attentat était perpétré ici? Sommes-nous prêts?

Ces questions sont assujetties à des normes de sécurité optimales, de sorte que l'on ne publie pas tous les détails d'un plan. Cela dit, il est également important que les Canadiens sachent que nous ne serons pas pris par surprise, qu'il suffit de presser un bouton pour que s'enclenche un système qui nous permettra de sauver le plus de vies possible, quel que soit le défi à relever.

Je suis heureuse que vous ayez dit cela ici, aujourd'hui. Il est important que les Canadiens entendent cela.

Le sénateur Day : Veuillez vous reporter à l'article 11 du projet de loi. Comme le comité abordera sans doute l'étude article par article, je commence à m'intéresser spécifiquement au libellé par opposition aux orientations stratégiques.

Le libellé du paragraphe 4(2), qui modifie la Loi sur le ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile, est intéressant. Avez-vous l'ancien libellé en main, de façon à pouvoir nous dire pourquoi cet amendement est nécessaire?

M. Broughton : Oui.

Le sénateur Day : En quelque sorte, cette disposition soulève des questions de compétence. On y parle du niveau national. Je suis à l'article 11, à la page 7.

« À l'échelon national » est une expression intéressante, d'un point de vue constitutionnel. Vous-même, ou quelqu'un d'autre, nous demandez de remplacer le paragraphe (2) de l'article 4 de l'ancienne loi.

M. Broughton : Le hic, c'est que ces deux dispositions sont très semblables. L'ancienne version se lit ainsi : « À l'échelon national, le ministre assume un rôle de premier plan en matière de sécurité publique et de protection civile. »

Le nouveau libellé se lit comme suit :

À l'échelon national, le ministre est chargé d'assumer un rôle de premier plan en matière de sécurité publique et de protection civile.

Le sénateur Day : C'est un changement de terme intéressant. Maintenant je sais quel était le libellé antérieur.

Mme Marcoux : Je pense que le présent libellé précise de façon plus explicite le champ de responsabilité du ministre.

Le sénateur Day : À mon avis, c'est l'ancien libellé qui est encore plus explicite étant donné que, dans la version anglaise, on emploie le verbe « shall ». Dans le nouveau libellé, on dit « is ».

Mme Marcoux : Il faudrait peut-être poser la question aux rédacteurs législatifs.

Le sénateur Andreychuk : Le ministre doit exercer le leadership.

Le sénateur Day : Le terme « shall » est dans l'ancien libellé.

Le sénateur Andreychuk : « Shall [...] exercise » correspond pratiquement à un devoir personnel.

Le président : On nous a dit que, dans la majorité des cas, ce sont strictement les autorités locales qui règlent ces situations d'urgence. Certaines exigent une intervention à un échelon supérieur et sont réglées par les autorités provinciales et un plus petit nombre encore sont réglées au niveau fédéral. Si l'on emploie le verbe « shall », cela implique presque qu'il doit faire quelque chose.

L'argument du sénateur Andreychuk est le suivant : s'il est stipulé dans le libellé qu'il est « chargé de », à ce moment- là, il est responsable. S'il y a quelque chose qu'il devrait faire, à ce moment-là il doit le faire. Je comprends cette nuance, mais cela ne me dérange aucunement. Le libellé n'implique pas qu'il doive faire quelque chose simplement pour intervenir, mais il doit assumer un rôle de premier plan.

Le sénateur Day : Nous savons quelle est la teneur des deux libellés. Mon autre question porte aussi sur la formulation. Veuillez consulter l'article 2 du projet de loi, soit la définition de « plan de gestion des urgences ». Dans la version française, c'est la cinquième définition. Elle figure à la page 2, et se lit comme suit :

2. « plan de gestion des urgences » : Programme, disposition ou autre mesure à mettre en œuvre :

a) soit par la population civile pour faire face à une urgence;

b) soit [...] pour faire face à une urgence civile [...]

Dans le premier alinéa on parle d'une « urgence ». Dans le deuxième, il est question d'une « urgence civile ». Emploie-t-on ici le terme « urgence civile »? Il semble que cela soit différent d'une « urgence ». Peut-être s'agit-il d'une urgence d'un type plus restreint. L'expression « urgence civile » est-elle utilisée parce qu'elle figure dans la Loi sur la défense nationale?

M. Broughton : C'est ce que je crois, mais je pense avoir besoin des lumières des rédacteurs. On me dit que c'est le cas.

Le sénateur Day : Ce libellé m'a frappé. Je pense que cela exige une explication.

Le président : Il se peut que ce soit simplement la défense qui intervienne si, par exemple, un barrage cédait sur la Voie maritime du Saint-Laurent.

M. Broughton : Oui.

Le sénateur Day : Si vous lisez le reste de la loi, s'il s'agit d'une situation d'urgence non civile dont s'occupe le MDN, alors le ministre de la Sécurité publique du Canada est quand même mis en cause. C'est seulement pour les situations d'urgence civile traitées aux termes de la Loi sur la défense nationale qu'il serait exclu.

[Français]

Le sénateur Nolin : L'article 14 parle de l'entrée en vigueur de la loi. Quand avez-vous l'intention d'adopter, par décret, la mise en vigueur de cette loi?

Mme Marcoux : Je ne peux vous répondre. Cette décision appartient au gouvernement et aux ministres.

Le sénateur Nolin : J'en conviens. Toutefois, que devez-vous faire pour que cette loi entre en vigueur de façon efficace?

Mme Marcoux : Une fois que le Parlement en a fait l'adoption, le délai est habituellement très court. On procède par décret. Ai-je répondu à votre question?

Le sénateur Nolin : Je comprends ce que vous dites.

[Traduction]

Le président : Je pense que cela met fin aux questions. Au nom du comité, je remercie nos deux témoins d'avoir comparu. Je pense que votre aide nous a été très utile et a permis de tirer au clair certains éléments.

Nous allons passer à l'étude article par article, mais nous allons commencer par avoir une brève discussion sur la question du préambule. Il faudra trancher dans un sens ou dans l'autre. Si nous décidons d'en avoir un, nous pourrons peut-être passer à huis clos. Voyons d'abord si quelqu'un estime que le huis clos est nécessaire.

D'autre part, avant d'aborder l'étude article par article, il faudra régler un dernier point. Vous vous rappellerez peut-être que la Fédération canadienne des municipalités s'oppose au fait que le mot « municipal » n'apparaît pas dans le projet de loi. À l'alinéa 4(1)f), à la page 2, on lit « coordonner les activités [...] avec celles des provinces et, par leur intermédiaire, avec celles des autorités locales ». Je ne pense pas que ce soit d'une importance fondamentale. Si quelqu'un veut plaider en faveur d'un préambule, je suppose que nous pouvons en discuter.

Notre greffier a certains renseignements que vous trouverez peut-être utiles.

Adam Thompson, greffier du comité : Honorables sénateurs, vous vous rappellerez que la fédération a présenté cette demande, laquelle a été réitérée au moyen d'une lettre à la présidence. Après en avoir discuté avec le président, j'ai effectué des recherches sur les conséquences de l'ajout d'un préambule sur le plan de la procédure. Il est certain qu'il incombe au comité de décider de la manière dont il va procéder, mais je vais citer un passage de l'ouvrage de Marleau et Montpetit. On trouve une citation identique dans l'ouvrage de Beauchesne et dans celui de Erskine-May, à la page 657 : « Si le projet de loi ne contient pas de préambule, il n'est pas possible au comité d'en ajouter un. »

Le sénateur Andreychuk : C'est catégorique.

Le sénateur Nolin : Personne ne voulait manquer de respect envers les municipalités ou la structure des autorités locales. Comme on le sait, au Québec — je suis certain que c'est différent dans les autres provinces —, nous avons une grande diversité au niveau de ces institutions locales. C'est une catégorie immense. Je pense que le législateur veut que la loi s'applique à toutes. Au lieu de les nommer, on a décidé d'utiliser une expression qui englobe tout, nommément les « autorités locales ». Je pense que c'est approprié et qu'il faut reconnaître que les municipalités sont la principale composante de ces « autorités locales ». En fait, c'est simplement qu'on les désigne par une expression générique.

Le sénateur Andreychuk : Ayant rencontré les maires des municipalités il y a de nombreuses années, je pense pouvoir dire que ceux-ci cherchent à faire reconnaître qu'ils sont en première ligne et qu'ils assument la plus grande partie de la responsabilité. Cependant, je ne crois pas qu'un préambule à la loi soit la façon de s'y prendre. Le gouvernement fédéral a reconnu que les premiers intervenants sont toujours les autorités locales et que celles-ci assument une lourde charge. Nous le savons. C'est peut-être un argument que voudront invoquer les maires et les municipalités à l'avenir, mais je ne crois pas qu'il soit nécessaire de l'ajouter à ce projet de loi.

Le sénateur Fairbairn : Est-ce qu'on nous dit qu'il nous est impossible de faire un préambule?

Le sénateur Andreychuk : Même si nous le voulions, je dis que nous ne devrions pas le faire.

Le président : Si vous voulez qu'on le relise, on peut le faire, mais cela résume l'essentiel de la situation.

Le sénateur Day : Je n'arrive pas à croire que nous ne pouvons pas modifier les projets de loi dont nous sommes saisis de quelque manière que ce soit, selon notre bon vouloir. Quoi qu'il en soit, je n'ai pas l'intention de proposer que nous le fassions.

Le président : Si l'on met de côté la question du précédent et la question de fond, je pense qu'il y a consensus. Je n'ai pas l'impression que l'on souhaite aller plus loin dans cette affaire de préambule. Ai-je raison?

Le sénateur Day : Vous avez raison. Je pense que l'alinéa 4(1)f) englobe tout.

Le président : Puis-je proposer que l'on commence l'étude article par article?

Le sénateur Day : Monsieur le président, nous avons reçu avis de l'étude article par article. Je suis d'accord pour procéder, mais, comme cela arrive tellement souvent au Sénat ces jours-ci, nous ne tenons aucun compte de nos propres traditions. Il me semblait que nous ne faisions pas l'étude article par article le même jour que nous entendons des témoins. Habituellement, c'est ainsi que nous procédons. On fait constamment des exceptions à la règle, mais il est important de reconnaître que, normalement, nous ne devrions pas faire l'étude article par article aujourd'hui, mais les membres du comité sont d'accord et le préavis a été donné en bonne et due forme.

Le président : Je ne vois vraiment pas en quoi quelqu'un pourrait être lésé si nous allons de l'avant.

Le sénateur Day : Je suis d'accord.

Le président : On pourrait soutenir qu'il pourrait y avoir préjudice si nous ne le faisions pas et si le projet de loi n'était pas adopté avant les vacances d'été.

Le sénateur Nolin : Au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, habituellement, nous invitons divers fonctionnaires à être présents pendant l'étude article par article. C'est ainsi que j'avais compris l'invitation d'aujourd'hui.

Est-ce qu'un point quelconque soulevé durant les audiences nécessite des précisions de la part des fonctionnaires qui favorisent l'adoption de ce projet de loi? Voilà comment je percevais la situation.

Le sénateur Day a raison. Habituellement, nous terminons les audiences, après quoi il y a une journée entière réservée à l'étude article par article. L'affaire a été soulevée il y a deux ou trois semaines.

Le président : Nous ne l'avons pas abordée.

Le sénateur Nolin : Oui, et il a été accepté que nous ferions les deux aujourd'hui.

Le sénateur Day : Comme c'est l'une de nos traditions, il est important de le mentionner et je suis d'accord pour que l'on procède à l'étude article par article.

Le président : Je suis content que cela ait été mentionné. C'est juste de le faire et c'est en partie pourquoi j'avais soulevé la question à la dernière réunion. Après avoir vérifié auprès du greffier, à l'exception de la suggestion d'un préambule faite par la FCM, à laquelle nous n'avons pas l'intention de donner suite, je ne crois pas qu'aucun autre témoin n'ait proposé d'autres amendements particuliers — y compris celui qui est maintenant l'ancien commissaire à l'information.

Le sénateur Nolin : L'institution existe toujours.

Le président : M. Leadbeater était le commissaire à l'information par intérim, oui.

Le sénateur Day : Il n'aimait pas la création de ce qu'il appelait une autre exception. Cependant, c'est pourquoi la lettre de M. Stockwell Day a été distribuée. Quoi qu'il en soit, la Loi sur l'accès à l'information prévoit une exception au titre de l'intérêt public et je pense donc qu'il n'y a pas de problème de ce côté.

Le président : Sénateur Andreychuk, est-ce que vous tentiez d'attirer mon attention?

Le sénateur Andreychuk : Non, je pense que cela a déjà été dit. Si nous avions aujourd'hui un témoin qui... Ma principale réserve, quand nous avons dérogé à la règle, c'est la situation suivante : quand nous entendons des témoins qui s'opposent au projet de loi ou qui veulent y apporter un amendement, je pense que c'est notre devoir d'y réfléchir et de ne pas agir immédiatement, ce qui reviendrait à écarter cavalièrement leurs objections. En l'occurrence, ce n'est pas ce qui se passe.

Le président : Est-on d'accord, honorables sénateurs, pour que le comité procède à l'étude article par article du projet de loi C-12?

Des voix : D'accord.

Le président : Le titre est-il reporté?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 1, qui est le titre abrégé, est-il reporté?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 2 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président : L'article 3 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président : L'article 4 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président : L'article 5 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président : L'article 6 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président : L'article 7 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président : L'article 8 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président : L'article 9 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président : L'article 10 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président : L'article 11 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président : L'article 12 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président : L'article 13 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président : L'article 14 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président : L'article 1 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président : Le titre est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président : Le projet de loi est-il adopté sans amendement?

Des voix : Adopté.

Le président : Le comité souhaite-t-il annexer des observations au rapport?

Le sénateur Nolin : Seulement au sujet des réserves exprimées par les municipalités.

Le président : Dois-je faire rapport de ce projet de loi au Sénat?

Des voix : D'accord.

Le président : Est-on d'accord pour ajourner les travaux du comité jusqu'à l'appel de la présidence, ce qui sera probablement à l'automne, quand nous aurons la réponse du gouvernement à ce que la Cour suprême avait à dire en février?

Des voix : D'accord.

La séance est levée.


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