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Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule 7 - Témoignages du 24 octobre 2006


OTTAWA, le mardi 24 octobre 2006

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui, à 17 h 5, afin d'étudier la Loi sur la protection de l'environnement (1999, chap. 33), conformément au paragraphe 343(1) de ladite loi.

Le sénateur Tommy Banks (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Nous poursuivons notre enquête sur des questions qui ont trait à l'efficacité de la Loi sur la protection de l'environnement, et nous nous intéressons plus particulièrement aujourd'hui à la manière dont la loi prend position ou ne prend pas position, selon le cas, sur les questions relatives au mercure dans l'environnement.

Nous avons avec nous Justyna Laurie-Lean, de l'Association minière du Canada; Victoria Christie, de l'Association canadienne de l'électricité; George White, de Sherrit International, pour le compte de l'Association charbonnière du Canada — une compagnie qui me tient à cœur, en raison de l'importante place qu'elle occupe à Edmonton; David C. Adams, de l'Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada, et Mark Nantais, de l'Association canadienne des constructeurs de véhicules.

Mesdames et messieurs, j'aimerais en premier lieu vous souhaiter la bienvenue au nom du comité. Nous sommes ravis que vous ayez pris le temps de vous joindre à nous ce soir. J'imagine que vous avez tiré au sort pour déterminer qui parlera en premier. Nous aimerions que chacun de vous s'exprime brièvement, afin qu'il nous reste du temps pour une période de questions. Je vais utiliser un couteau assez bien aiguisé — je suis certain que le greffier vous a renseigné à ce sujet. À vous la parole.

Mark Nantais, président, Association canadienne des constructeurs de véhicules : Au nom de l'Association canadienne des constructeurs de véhicules, je vous remercie de me donner l'occasion de m'exprimer. Il me fait plaisir de vous transmettre l'avis des sociétés membres de l'Association canadienne des constructeurs de véhicules au sujet de l'efficacité de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. J'espère que vous avez reçu notre exposé en anglais et en français. Je vais utiliser cette série de diapositives qui orientera nos discussions.

D'abord, voici une série de diapositives qui illustrent bien le leadership environnemental dont nous faisons preuve dans la fabrication de nos produits et dans nos installations manufacturières. Nous avons réduit les émissions de composés organiques volatils (COV) de nos usines d'assemblage de 50 p. 100 en moyenne par véhicule. Nous avons été les premiers au Canada à intégrer pleinement le système de gestion environnementale d'après la norme ISO 14001 et le Projet de prévention de la pollution chez les fabricants de pièces d'automobile. À mon avis — et je pense qu'on peut difficilement dire le contraire — ce programme de prévention de la pollution est parmi les plus accomplis, puisqu'il a permis l'élimination ou la réduction de 430 000 tonnes de produits toxiques et autres contaminants environnementaux de nos usines d'assemblage depuis 1992. Grâce aux investissements que nous faisons dans les technologies depuis de nombreuses années et grâce à nos équipements et à nos processus manufacturiers éconergétiques, nous consommons très peu d'énergie pour l'assemblage de nos véhicules.

À propos de nos produits vous avez peut-être lu ou appris récemment que l'Association canadienne des constructeurs de véhicules (ACCV) a signé un accord volontaire de réduction des émissions de gaz à effet de serre de l'ordre de 5,3 millions de tonnes d'ici 2010, et nous avons la ferme intention d'atteindre cet objectif. Ce programme renferme de nombreux objectifs qui vont bien au-delà de toute réglementation.

On estime souvent que les moyens de transport contribuent dans une proportion de 30 p. 100 aux émissions de gaz à effet de serre, mais en réalité leur contribution est d'environ 12,5 p. 100. Et les nouvelles voitures ne contribuent que dans une proportion de un pour cent. Même en ce qui concerne le smog, elles ne contribuent que dans une proportion de un dixième de un pour cent, grâce à l'application des normes rigoureuses de niveau 2. Nous en reparlerons lorsqu'il sera question de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (LCPE).

Les sociétés membres de l'ACCV sont également sur le point de lancer au pays un programme très intéressant de collecte des interrupteurs contenant du mercure. Ce programme s'inspire d'un programme similaire actuellement mis en œuvre aux États-Unis et qui donne de bons résultats. Par ailleurs, bien que cette mesure ait été adoptée depuis un certain temps déjà, j'aimerais souligner que nous avons été les premiers à retirer les chlorofluorocarbones (CFC) des systèmes de réfrigération mobile, afin de protéger l'ozone stratosphérique.

Combien de temps est-il alloué pour chaque intervenant?

Le président : Je ne veux pas vous imposer un temps de parole bien défini, mais si chacun prend dix minutes, par exemple, nous en aurons pour une heure. Cela nous laisserait un peu moins d'une heure, dans les meilleures circonstances, pour une période de questions. Nous préférerions à l'inverse consacrer un peu plus de temps à la période de questions. Votre suggestion, monsieur Nantais, d'utiliser les diapositives pour orienter les discussions, plutôt que de nous en faire la lecture, est excellente.

M. Nantais : La LPCE touche la question des émissions des véhicules automobiles en deux ou trois points fondamentaux. Non seulement réglemente-t-elle les émissions des véhicules à l'origine du smog, mais elle prend également position en matière de réglementation des carburants. Ce qui rend cette position si importante, c'est qu'elle nous amène à une approche dite globale des systèmes de technologie de pointe qui sont conçus pour lutter contre les émissions nocives et que ces systèmes sont soutenus par la vente sur les marchés de carburants de bonne qualité. Sans cela, nous ne pourrions réduire les émissions au rythme que ces systèmes sont en mesure d'atteindre. Cette prise de position aux termes de la LCPE adoptée en 1999 est très importante.

Il y a également le programme visant les émissions de COV des véhicules et les dispositions concernant les véhicules routiers qui contribuent largement à réduire l'ensemble des émissions nocives qui ne sont pas assujetties à la LCPE.

Le président : Je m'excuse de vous interrompre, mais nous avons convenu d'aborder ces questions en profondeur. Je vais l'expliquer à nos invités. Nous avons le mandant d'examiner la LCPE sous tous ses angles. Nous n'avons pas des années pour le faire, et le temps que nous avons décidé d'y consacrer ne nous permet pas de faire cela.

C'est pourquoi nous avons retenu trois aspects qui posent problème et nous les examinerons en profondeur. Ces trois aspects sont d'abord, le mercure, et les dispositions de la LCPE à cet égard; ensuite, nous examinerons les composés perfluorés (les PFC) et l'approche de la LCPE à leur égard, du fait que le mercure est un élément, tandis que nous fabriquons les PFC et qu'ils n'existeraient pas autrement; enfin, nous aborderons séparément le smog et les émissions similaires, comme les particules, et cetera.

Nous aimerions parler de tous les sujets abordés dans la LCPE avec chacun de vous, mais par maintenant. Aujourd'hui, nous nous concentrerons sur le mercure, et seulement sur le mercure, plutôt que sur l'ensemble des émissions, ainsi que nous avons commencé à le faire. Corrigez-moi si je fais erreur.

M. Nantais : Vous avez tout à fait raison. Passons à la diapositive no 6, qui a trait au mercure plus précisément.

Notre industrie a eu une approche proactive des problèmes liés au mercure. Le mercure a été utilisé, comme vous le savez, dans de nombreuses applications industrielles, en raison de sa conductivité. Encore aujourd'hui, le mercure est vendu en toute légalité dans le monde entier. Nous sommes maintenant entrés dans une phase d'élimination graduelle des interrupteurs au mercure. Nous élargirons le programme pour y inclure les modules et les systèmes de freins antiblocage (ABS). Ces modules renferment également de petits interrupteurs au mercure. Nous espérons mettre le programme en place d'ici la fin de l'année. Nous devons porter notre attention sur les anciens véhicules, puisque nous avons retiré les interrupteurs au mercure du marché ou nous en avons interrompu la conception depuis janvier 2003. Ce sont les anciens véhicules que nous ciblons.

Nous avons également discuté avec Environnement Canada de sa récente décision visant à inscrire le mercure sur la liste des polluants. À notre avis, le document de travail préliminaire ne tient pas compte de l'ensemble de la chaîne de valeur. En d'autres mots, ce qui est nécessaire à la chaîne de valeur pour assurer une collecte efficace des interrupteurs au mercure, c'est de demander aux intervenants clés — les recycleurs de véhicules, les industries qui récupèrent les carcasses, et cetera — de récupérer le mercure, afin qu'il n'aille pas s'accumuler dans les cours des fonderies.

Voilà essentiellement ce que nous faisons avec le mercure. Nous tâchons de l'éliminer progressivement de tous nos produits. Bien que nous ne puissions l'éliminer complètement dès maintenant — le mercure peut nous être très utile, dans la mesure où il est bien géré — nous nous approchons pour ainsi dire du rejet zéro dans cette catégorie de produits.

Monsieur le président, je m'arrête ici, compte tenu du temps qui nous est alloué.

Le président : Merci beaucoup, monsieur Nantais. Nous aurons bien des occasions, j'espère, de discuter à nouveau de ces questions avec vous.

Justyna Laurie-Lean, vice-présidente, Environnement et Santé, Association minière du Canada : Je vous ai remis une copie des diapositives un peu à l'avance, mais je pense qu'elles n'ont pas été traduites. Je ne vous parlerai pas de notre association, de nos membres et de nos activités en général, afin de gagner du temps. Toutefois, j'ai apporté une copie de notre Rapport sur les progrès du développement minier durable, afin que vous puissiez y jeter un coup d'œil. On y trouve une multitude de renseignements détaillés sur bien des sujets.

J'ai préparé mon exposé en fonction des questions que le greffier nous a soumises. La première portait sur les conséquences qu'a la LCPE sur nous. Certains aspects génériques de la LCPE touchent notre industrie, comme l'Inventaire national des rejets de polluants et les dispositions relatives aux mouvements transfrontières des déchets et des matériaux recyclables. Certains de nos membres utilisent des matériaux de récupération en guise de matière de base, comme des déchets de l'industrie de l'électronique et de l'automobile.

Plus précisément, les fonderies qui sont membres de notre association sont assujetties à un avis relatif au plan de prévention de la pollution qui a été publié dans la Gazette du Canada en avril 2006 et qui touche toute une gamme de produits polluants. Notre principal objectif et nos calendriers d'exécution sont axés sur les matières particulaires et le dioxyde de soufre, mais le mercure en fait également partie. Pour le moment, les installations sont à finaliser leurs plans et à préparer leurs déclarations.

Comment collaborons-nous avec le gouvernement à la prévention de la pollution par le mercure? Je me permets une brève digression pour décrire le mercure, dans le contexte de notre industrie. Ce n'est pas par plaisir que nous exploitons les mines de mercure. Ce contaminant est présent dans la matière que nous exploitons et que nous transformons. Mère nature étant imprévisible, la concentration de mercure et d'autres éléments dans la matière que nous exploitons et le processus utilisé pour l'extraire dépendent de l'endroit où les travaux sont effectués. Cette combinaison de facteurs fait en sorte qu'il est difficile de comparer les installations ou d'en parler en termes généraux. La concentration de mercure varie selon les conditions locales.

La quantité de mercure ou de tout autre élément libéré dépend du processus utilisé pour extraire les métaux. Nous n'avons donc pas de programmes ou d'activités applicables à un processus particulier; nos programmes s'appliquent à l'ensemble de nos installations.

Nous avons néanmoins participé à l'élaboration des standards pancanadiens du Conseil canadien des ministres de l'Environnement (CCME). Nous avons participé au programme d'Accélération de la réduction-élimination des toxiques (ARET) qui est appliqué sur une base volontaire et qui vise avant tout le mercure. Nous contribuons également avec de nombreux autres intervenants à des programmes de recherche sur les mines, notamment, et à d'autres qui ont une plus large portée, sur le mouvement, les sources, les trajectoires et l'exposition des métaux à l'environnement. Je pourrais vous en parler pendant des heures, mais je m'arrête ici. Dans notre rapport, vous trouverez un lien à notre site Web où vous pourrez obtenir de plus amples renseignements, ainsi que des informations sur le suivi des rejets au fil du temps.

Des sénateurs nous ont demandé si le gouvernement fédéral en faisait assez. Je ne crois pas que nous ayons à porter un jugement là-dessus. Nous pensons toutefois depuis longtemps — et l'examen de la LCPE nous le confirme — qu'il est important de surveiller et de faire rapport de l'état de l'environnement canadien, tant sur le plan de la qualité que sur le plan des facteurs de stress exercés sur celui-ci. Nous avons fait l'erreur au cours des cinq ou dix dernières années de réduire la surveillance et plus particulièrement des rapports, avec l'abandon du rapport sur l'État de l'environnement . Et c'est ce qui fait qu'il est beaucoup plus difficile maintenant de répondre à ce genre de questions.

Qu'avons-nous fait pour réduire les émissions de mercure? J'ai ici une copie de la grille des émissions de mercure de nos sociétés membres qui illustre bien mon propos. Au dos du rapport, vous avez une ventilation par société. Et si vous consultez notre site Web, vous y trouverez des données détaillées sur chaque installation. La plupart des gens ne sont cependant pas intéressés par tant de chiffres.

Le président : Le graphique au bas de la page 2 représente l'ensemble de l'industrie minière au Canada?

Mme Laurie-Lean : Ce sont nos sociétés membres. Vous voyez dans ce graphique une combinaison de fonctions en gradin et certaines variations. Les principales réductions proviennent de changements majeurs apportés aux processus. Ensuite, les niveaux de production varient avec le temps ou encore parce que la machinerie s'est détérioré ou que des problèmes sont survenus. Par ailleurs, la gestion interne s'est améliorée, alors, vous voyez, il y a des hauts et des bas. Ici, une importante amélioration a été apportée et les émissions ont à nouveau été réduites. C'est ce que nous voyons avec le temps.

Quant à nos plans et à ce que nous pourrions faire de plus, les entreprises mettent actuellement la touche finale aux plans de prévention de la pollution exigés aux termes de la LCPE, alors, je ne voudrais pas y aller de spéculations, mais la réponse viendra sous peu.

Nous avons participé à l'élaboration des standards pancanadiens. Il est difficile d'appliquer une norme pour l'ensemble des installations de nos clients, et c'est pourquoi il vaut mieux émettre des permis provinciaux et de tenir compte de la situation particulière de chacune des installations.

Quant aux instruments économiques, comme nous avons un petit nombre de sources uniques, nous ne pouvons voir en quoi il serait utile d'adopter d'autres instruments économiques que les outils réglementaires et quasi réglementaires, aux termes de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Comme l'avis relatif au plan de prévention de la pollution renferme une intention de réglementation, nous pensons que celle-ci couvrira toutes les émissions de nos installations. Quant à la pertinence de réglementer d'autres industries ou d'autres sources, encore une fois, nous préférons ne pas nous prononcer sur cette question.

Comment nous comparons-nous par rapport aux autres pays en matière de lutte contre le mercure ou au chapitre des normes applicables au mercure? Les comparaisons entre les gouvernements à cet égard sont difficiles à établir. Le nombre de fonderies dans le monde n'est pas particulièrement élevé, et comme un grand nombre d'entre elles se trouvent dans des pays en développement, il est difficile de comparer les normes. Une étude comparative des fonderies canadiennes et américaines commandée par Environnement Canada il y a environ trois ans a fait ressortir qu'en raison des différences et des caractéristiques de chacune, il était très difficile d'établir si l'une était meilleure que l'autre.

Quant à savoir si nous sommes favorables ou défavorables à ce que la LCPE soit utilisée comme outil pour résoudre les problèmes de pollution de l'air au Canada, nous préférons ne pas nous prononcer là-dessus. Pour ce qui est des gaz à effet de serre, ce sont les particularités qui importent, et non le choix d'un instrument législatif en particulier. À propos des gaz à effet de serre, nous avons de la difficulté à faire comprendre ce que nous pouvons faire et ce qui a déjà été fait.

Enfin, pour ce qui est des changements à apporter à la LCPE, c'est difficile à dire. Nous n'avons pas une longue expertise en matière de planification de la prévention de la pollution. À ce que je sache, c'est la première fois qu'un avis est envoyé à tout un secteur responsable de polluants multiples et le processus n'est pas terminé. Il est difficile de dire si cet avis est une réussite ou un échec ou de savoir ce qu'il a donné comme résultat. Le processus est en cours, tout comme le sont de nombreux aspects de la LCPE qui n'ont pas encore été mises en œuvre ou ne l'ont pas encore été suffisamment longtemps pour que nous puissions nous prononcer sur leur fonctionnement.

Le président : Avant d'aller plus loin, considérez-vous que les membres de votre association ont été touchés, dans l'ensemble, par la LCPE et ses applications en ce qui a trait au mercure ou à toute autre application, depuis 1999?

Mme Laurie-Lean : Ils sont touchés par l'avis relatif au plan de prévention de la pollution.

Le président : Je veux dire avant avril 2006.

Mme Laurie-Lean : Pour ce qui est de l'élaboration de l'avis relatif au plan de prévention de la pollution, des consultations ont été tenues pendant des années, alors les parties intéressées étaient au courant, mais il a davantage été question de SO2 et des matières particulaires. Comme le mercure est une matière particulaire, il en faisait partie. Le programme d'ARET est celui qui a eu le plus d'impact. Il a cristallisé l'attention en partie parce que c'était une mesure volontaire. Il a fallu que les parties intéressées pensent à ce qu'elles pouvaient faire, plutôt que de devoir se justifier à propos de ce qu'elles ne pouvaient pas faire.

Le président : Pourriez-vous, pour les besoins du compte-rendu, nous épeler le nom du programme?

Mme Laurie-Lean : A-R-E-T est l'acronyme d' « Accélération de la réduction-élimination des toxiques », mais en réalité, personne ne le dis jamais au long. On parle du programme ARET, qui évoque en français le mot « arrêter ».

Le président : Exactement. Merci beaucoup.

Monsieur White, je présume que c'est maintenant votre tour.

George White, consultant et conseiller principal, Sherritt International, Association charbonnière du Canada : Merci de m'avoir invité à comparaître devant votre comité. Je dois vous dire que je porte le no 13. J'espère que ce ne sera pas de mauvais augure ni pour mon exposé, ni pour la période de questions qui suivra. Je représente l'Association charbonnière du Canada et, plus particulièrement, Sherritt International. Nous sommes les plus importants producteurs de charbon au Canada. Le Canada utilise 56 millions de tonnes de charbon thermique par année, principalement pour produire de l'électricité. Presque tut le charbon du pays est utilisé pour la production d'électricité. Notre société produit 37 millions de tonnes de ce charbon pour répondre à la demande en électricité de l'Ontario, de la Saskatchewan et de l'Alberta.

Nous avons décidé de confier le brûlage du charbon au secteur des services publics et d'autres personnes autour de cette table pourront parler de la teneur en mercure dans le charbon, lorsqu'il est brûlé dans les centrales thermiques. Nous aimerions vous parler des nouvelles technologies de conversion du charbon, qui deviennent plus courantes et qui nous donneront la chance d'atténuer quelques problèmes liés non seulement au mercure, mais également à de nombreuses autres substances nocives.

Je travaille dans l'industrie du charbon depuis près de 30 ans maintenant et, dès le début, j'ai remarqué que lorsque des règlements sévères étaient adoptés pour d'autres substances, comme le dioxyde de soufre, par exemple, le secteur de la production de l'énergie à charbon était en mesure de s'y conformer. Nous voyons que la technologie a bien changé avec les années et elle changera encore. Or, je pense que votre comité devrait prendre cela en considération. Ces règlements sont adoptés pour longtemps, mais la technologie évolue, et c'est ce dont j'aimerais vous parler.

J'aimerais plus précisément vous parler de la technologie de gazéification du charbon. C'est un processus qui nous permet de convertir le charbon en gaz de synthèse. Ce n'est pas un gaz naturel, mais une forme de gaz tout de même. La valeur énergétique du gaz de synthèse n'a que le tiers de la valeur énergétique du gaz naturel, mais ce dernier peut être remplacé le gaz naturel dans presque toutes ses applications. En fait, le gaz synthétique et utilisé aujourd'hui dans les usines d'acier et comme sous-produit dans tous les processus industriels. On fait du gaz synthétique dans les entreprises de cokéfaction et les usines d'acier.

S'il y a un marché pour le gaz synthétique au Canada, ce n'est pas parce pour répondre à la demande des entreprises productrice d'électricité. C'est pour répondre à la demande du secteur du pétrole lourd. Actuellement, nous utilisons d'énormes quantités de gaz naturel pour produire la chaleur nécessaire à l'extraction du pétrole enfoui sous terre et nous l'utilisons également beaucoup pour produire l'hydrogène dont nous nous servons dans la valorisation du bitume, avant qu'il ne soit expédié dans les raffineries de pétrole brut classique d'Amérique du Nord. Nous ne retrouvons nulle part ailleurs dans le monde autant de charbon et autant de possibilité de le convertir en énergie primaire qui servira dans différents processus comme la transformation du pétrole brut.

Dans le processus de gazéification du charbon, nous prenons de gros blocs de charbon dur et noir et nous le convertissons en trois substances gazeuses : le CO2, qui renferme la presque totalité du carbone contenu dans le charbon et aucune valeur énergétique; le monoxyde de carbone, qui peut être converti en hydrogène; et enfin, l'hydrogène, qui contient toute l'énergie présente dans le charbon et qui ne contient pas de carbone.

Si nous séparer ces trois substances, nous pouvons traiter certains problèmes liés aux émissions de charbon — et de mercure — dans l'atmosphère.

Vous trouverez la plupart de ces informations dans le matériel que je vous ai remis. La technologie de la gazéification est commercialisée depuis bien des années et dans de nombreux pays du monde. Elle a été utilisée en Allemagne, par exemple, au cours de la Seconde Guerre mondiale, dans la fabrication du carburant diesel qui alimentait les chars de l'Armée. Les usines de gazéification en Afrique du sud utilisent aujourd'hui cette technologie.

Il existe au moins quatre usines de gazéification dans les entreprises commerciales d'Amérique du Nord. Certaines ont servi au départ de projets de démonstration financées par le département américain de l'Énergie. Eastman Kodak, une société publique des États-Unis, gazéifie le charbon au Tennessee depuis le début des années 70. Cette usine produit du gaz synthétique qui sert de matière de base dans la fabrication de produits d'acétate. L'une des exigences du processus est d'éliminer le mercure présent dans le gaz. Pour ce faire, la société a recours à une technologie qui utilise des agents sorbants comme le charbon activé pour récupérer et éliminer le mercure présent dans le charbon qu'elle utilise dans le processus de gazéification.

Non seulement notre société a-t-elle l'intention de faire de même, mais nous sommes en mesure de produire du charbon activé dans l'une de nos mines de charbon située en Saskatchewan et ce charbon pourra éventuellement servir à l'extraction du mercure présent dans les gaz obtenus par le processus de gazéification.

D'autres usines de gazéification produisent de l'électricité et des produits chimiques aux États-Unis, après avoir nettoyé le gaz synthétique et éliminé le mercure. Nous ne devons pas considérer le processus de gazéification comme un raffinement des processus actuels de combustion pour produire de l'électricité. La gazéification peut également être utilisée dans un processus de production d'énergie électrique.

Nous pensons que le marché du pétrole lourd est un marché incontournable, parce qu'il nous faut nous pencher que sur le processus de gazéification. Nous n'avons pas besoin de nous préoccuper du processus de production d'électricité qui est complexe. Il serait plus simple d'utiliser le processus de gazéificatioin pour produire de l'hydrogène au départ, et de perfectionner ce système au Canada. Ensuite, nous pourrions passer au processus de gazéification pour produire de l'électricité.

Il faudrait considérer la gazéification comme un processus chimique et de raffinage au cours duquel la combustion du charbon est convertie en diverses formes d'énergie. L'hydrogène a une multitude d'applications industrielles, l'oxyde de carbone (CO) est un combustible qui peut servir dans différentes applications de chauffage industriel, et le dioxyde de carbone peut être enfoui dans le sol. Des travaux ont cours en Alberta pour la construction d'un pipeline de séquestration de CO2. Une fois ces processus réalisés, le sous-produit du mercure peut être éliminé à l'aide de technologies qui cadrent bien avec les autres.

D'après nos prévisions, le potentiel commercial du marché du charbon, si nous nous fions à la croissance de l'industrie du pétrole lourd — pour mettre ces chiffres en perspective, l'an dernier, l'Alberta a utilisé 25 millions de tonnes de charbon pour faire de l'électricité — serait de 50 à 80 millions de tonnes par année, soit deux ou trois fois plus que la quantité utilisée par l'Alberta l'an passé. Si nous trouvons le moyen d'éliminer le mercure, le processus de gazéification nous permettra de faire cela.

Nous entrevoyons de nouveaux débouchés pour ces technologies qui s'implantent au Canada et nulle part ailleurs dans le monde. Nous voyons des fournisseurs de charbon thermique au Canada, comme Sherrit, qui développe des processus de reconditionnement du charbon en des matières recherchées par les industries. Nous pensons que la politique gouvernementale qui appuie le processus de gazéification portera fruit. Nous pensons qu'elle favorisera le meilleur usage du charbon, une plus grande disponibilité et à meilleur coût. Nous pouvons utiliser des gaz synthétiques au lieu du gaz naturel pour répondre aux besoins de l'industrie du pétrole lourd en énergie primaire. Nous préserverons le gaz naturel pour répondre à des besoins cruciaux et à des besoins internes essentiels.

Certaines stratégies visant à réduire les effets sur l'environnement dépassent les exigences actuelles, y compris l'élimination du mercure dans le processus de production du charbon. Si les processus de gazéification actuels pouvaient être utilisés dans l'industrie du pétrole lourd, une bonne partie des risques inhérents à ce secteur d'activité seraient éliminés. Nous entendons parler de gens qui pourraient construire des centrales de charbon propres, mais personne n'en construit. L'une des raisons est qu'il y a des risques sur le plan technologique associés à ces centrales. J'imagine que les industries qui offrent de l'énergie sur les marchés n'aiment pas prendre de risques, et c'est pourquoi les conseils d'administration hésitent à approuver la construction de ces centrales. Si nous pouvions trouver un moyen de réduire ces risques, des centrales verraient le jour en peu de temps. Cela réglerait en partie les problèmes liés aux rejets de mercure dans la production énergétique, et dans l'exploitation du charbon en général.

Victoria S. Christie, conseillère principale, Affaires environnementales, Association canadienne de l'électricité : J'aimerais vous donner un bref aperçu de notre approche de la gestion du mercure dans le secteur des centrales thermiques alimentées au charbon. J'aimerais également vous donner un aperçu des enjeux liés à la gestion des émissions de mercure dans notre secteur et de ce que font nos sociétés pour réduire les niveaux d'incertitude entourant ces émissions. Je vais ensuite vous parler de la voie que nous entendons prendre et du rôle de la LCPE en matière de gestion de la pollution atmosphérique en général.

Comme vous le savez, on se penche beaucoup sur les problèmes de gestion des rejets de mercure étant donné les inquiétudes qu'il suscite pour la santé humaine. Notre secteur s'est engagé à s'attaquer à ces émissions. Nous avons travaillé fort au cours des dix dernières années, surtout. Le mercure fait partie de la liste des produits toxiques aux termes de la LPCE, mais nous n'avons pas fait grand chose dans notre secteur pour gérer les émissions de mercure aux termes de cette loi. La plupart des initiatives, dans notre secteur comme dans les autres, ont plutôt été prises dans le cadre des standards pancanadiens. C'est standards ont été établis à l'échelle du pays par le Conseil canadien des ministres de l'Environnement, dans le cadre d'un processus fédéral-provincial. Certaines autres sources de mercure ont été traitées dans le cadre de ces standards et les standards pancanadiens pour notre secteur ont été annoncés le 11 octobre 2006.

Notre secteur est diversifié. Nous avons différents types de charbon au pays et une grande variété d'approches en matière de gestion. Certains de nos membres sont encore des sociétés d'État. D'autres sont privées et font le commerce de l'énergie sur le marché libre. Et nos besoins diffèrent d'une région à l'autre du pays. Le processus rattachés aux standards pancanadiens nous convenait bien parce qu'il permettait aux organismes provinciaux généralement responsables de la réglementation de s'engager dans le processus. Cela a bien fonctionné pour nous.

Pour ce qui est du rôle de la LCPE dans notre secteur en ce qui a trait à la gestion du mercure, nous ne voyons pas vraiment la nécessité de travailler à ce niveau, mais il y aurait beaucoup à faire au palier fédéral, dans le cadre des standards pancanadiens, et peut-être au niveau de la gestion globale des émissions de mercure.

Les standards pancanadiens ont été approuvés le 11 octobre de cette année. Ces standards établissent des plafonds provinciaux qui permettront un taux de captage des émissions de mercure provenant du charbon d'environ 60 p. 100 d'ici 2010, et on prévoit atteindre un taux de 80 p. 100 d'ici 2018. Si tout va bien, de nouvelles sources de production d'énergie seront assujetties à ces objectifs de rendement à compter de 2006.

L'objectif visé pour 2010 est de taille. Les États-Unis ont récemment adopté un règlement qui n'est pas aussi strict que lea normes canadiennes en ce qui a trait à la réduction des émissions de mercure. Il ne faut pas perdre cela de vue. Certaines de nos sociétés devront faire plus que les sociétés américaines.

Vous avez posé une question sur la façon dont fonctionnent les standards canadiens du CCME. Ce processus fonctionne bien; c'est une bonne solution en fin de compte. Il faudrait toutefois une supervision stratégique. Les gens qui se sont engagés dans ce processus étaient plutôt des techniciens et ils n'ont pas été supervisés, d'où la lenteur de sa mise en œuvre. Ce processus existe depuis longtemps dans notre secteur, mais l'incertitude des scientifiques en matière de gestion du mercure a également contribué à son ralentissement. Certains ont dit que ce n'était pas une bonne approche, qu'elle prenait trop de temps. Quoi qu'il en soit, ces deux problèmes ont contribué au ralentissement. Pour ce qui est du premier problème, nous pourrions améliorer les choses dès maintenant si nous continuons d'appliquer les standards pancanadiens, Quant au deuxième problème, nous nous y penchons actuellement. Notre secteur procède au brûlage de trois types de charbons au pays; du charbon bitumineux à moyenne et forte teneur en soufre, du charbon subbitumineux à faible teneur en soufre et du charbon de lignite. Leurs profils d'émission diffèrent et ils doivent être gérés différemment. On retrouve ces différents types de charbon partout au pays, et leur teneur en mercure à l'intérieur d'un même filon diffère également.

Les deux derniers types de charbon, le charbon subbitumineux à faible teneur en soufre et le charbon de lignite, qui est généralement brûlé dans l'Ouest du pays, ont des émissions de mercure élémentaire plus élevées et ce type de mercure est plus difficile à extraire. Nous avons un véritable problème là. Ce sont ces deux types de charbons que nous brûlons le plus couramment au pays pour produire de l'électricité.

Encore une fois, il y a encore des incertitudes quant aux méthodes de gestion du mercure dans notre secteur, et les standards pancanadiens n'ont pas réglé le problème. C'est la transformation du mercure et ce qu'il advient dans l'environnement qui pose problème. Nous ne savons pas exactement ce qu'il advient du mercure et où il va. Toute la transformation du mercure dans le réseau hydrographique est encore un point d'interrogation. La variabilité du mercure dans le charbon et son comportement lors de la combustion ne sont pas encore élucidés et des travaux doivent être effectués, afin d'améliorer l'efficacité des techniques de contrôle de ces émissions. Ces incertitudes nous empêchent d'aller de l'avant et nous souhaitons que le gouvernement nous aide à les résoudre.

Nous consacrons actuellement d'importantes ressources afin de réduire les incertitudes et de réduire nos émissions. Nous contrôlons actuellement nos émissions en bonne partie par le biais de techniques de contrôle appliquées à d'autres émissions de substances nocives. Il n'existe actuellement aucune technologie qui permette d'éliminer le mercure des centrales alimentées au charbon sans présenter de risque ou qui soit pleinement garantie par les manufacturiers.

Nous avons également effectué quelques travaux en vue de réduire le bassin mondial de mercure. Nous avons travaillé avec le secteur de fabrication automobile ou le secteur de l'acier, afin de réduire le mercure présent dans les interrupteurs des véhicules. Nous pensons que le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle à ce chapitre, car le Canada reçoit plus de mercure qu'il n'en émet. Il faudrait que nous réduisions la quantité de mercure que nous recevons, et il serait bien que nous puissions intervenir à l'étranger.

Nous faisons des efforts pour améliorer notre capacité de mesurer le mercure. Nous cherchons différents moyens de mesurer le mercure rejeté dans l'atmosphère et nous essayons de mieux comprendre ce qui se passe lorsque le mercure pénètre dans l'environnement.

Dans la même veine, nous continuerons de travailler avec les provinces à la mise en œuvre des standards pancanadiens et à travailler à l'élaboration des nouvelles technologies, afin d'assurer une meilleure gestion de nos émissions. À long terme, nous nous pencherons sur des stratégies intégrées et des technologies entièrement différentes, ainsi que l'a mentionné plus tôt M. White.

Au chapitre de la supervision fédérale et provinciale, nous espérons voir se poursuivre le processus d'élaboration des standards pancanadiens. Nous croyons que c'est bien parti et qu'ils ont donné de bons résultats jusqu'à présent. Le gouvernement fédéral a un rôle à jouer à ce chapitre, de même qu'au niveau du soutien de la R-D dans notre secteur.

Pour obtenir des informations générales sur les activités de nos membres et de leur rendement sur le plan environnemental, nous avons le Programme d'engagement et de responsabilité en environnement que vous pouvez consulter sur le site Web de l'Association canadienne de l'électricité.

Je passe à la dernière diapositive portant sur le rôle de la LCPE et sur la gestion des émissions. Je conviens avec ma collègue que le choix du moyen utilisé pour gérer les émissions au pays ne nous importe guère, mais nous nous préoccupons de la manière dont ces émissions sont gérées. Pour le moment, nous ne sommes pas certains de ce que donnera la Loi sur la qualité de l'air qui a été annoncée la semaine dernière, mais nous savons que c'est toujours dans les détails que surviennent les difficultés. Nous demandons que les principes de compétitivité et que les différences régionales soient pris en compte. C'est le genre de chose qu'il ne faut pas oublier si nous voulons assurer la gestion des polluants atmosphériques par le biais de la LCPE.

Il faut apporter des changements aux dispositions de la LCPE en matière d'équivalence. Certains changements ont été mentionnés dans la nouvelle Loi sur la qualité de l'air, mais je ne sais pas si cette loi facilitera les interventions dans lesquelles les provinces se sont engagées. Par ailleurs, la création d'un nouveau volet à la LCPE pour y inclure des polluants, ainsi qu'on l'a fait avec la Loi sur la qualité de l'air, est importante pour éliminer les stigmates des substances dont nous ne pouvons pas garantir l'innocuité.

David C. Adams, président, Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada : Je vous remercie de me donner l'occasion de comparaître devant votre comité. Je suis le président de l'AFIAC. Je ne vous ferai pas languir, je vais tout de suite vous donner la signification de notre acronyme, l'Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada. Pour vous donner une idée du contexte, nous avons treize sociétés membres représentant trois cultures : la culture japonaise, la culture coréenne et la culture allemande.

Le président : Pour notre information et par curiosité, quelle différence y a-t-il entre l'Association canadienne des constructeurs de véhicules et la vôtre?

M. Adams : M. Nantais répondrait peut-être autrement, mais je pense qu'essentiellement, les fabricants nord américains d'automobiles sont traditionnellement membres de l'Association canadienne des constructeurs de véhicules (ACCV), et tous les autres sont membres de l'association que je représente.

Pour vous donner un peu de perspective, à la fin des années 1970, nos membres représentaient environ 10 p. 100 des parts du marché. L'an dernier, nous avions 43 p. 100 des parts du marché au Canada, alors notre présence au Canada a pris de l'ampleur au chapitre des ventes. De plus, trois de nos membres fabriquent des automobiles au Canada — Toyota, Honda et Suzuki — avec la participation de General Motors. Ils ont connu des productions record l'an passé, avec un peu plus de 880 000 unités, ce qui a contribué de façon significative à la balance commerciale du Canada.

L'environnement a toujours été un élément clé pour nos membres et nous avons une réputation en tant que chefs de file en matière de technologies environnementales, et plus précisément pour ce qui est du développement des voitures hybrides et des moteurs diesel de pointe. En fait, en 2005, les sociétés membres de l'AFIAC ont vendu 80 p. 100 des véhicules hybrides offerts sur le marché canadien.

M. Nantais a parlé de tous les efforts que l'industrie a déployés pour lutter contre les gaz à effet de serre et atténuer les problèmes liés au smog. Pour en témoigner — et je vous demanderais de retenir ce qui suit, parce que j'en reparlerai plus tard — il faut 37 modèles de véhicules de l'année 2006 pour émettre la quantité d'émissions d'un véhicule de l'année 1987. Cela vous donne une idée des efforts qui ont été déployés par l'industrie sur le plan technologique pour réduire à ce point les émissions nocives des véhicules. Une bonne partie de cette réduction a été rendue possible grâce à la réglementation sur les émissions nocives adoptée aux termes de la LCPE, et qui a été harmonisée à celle des États- Unis.

En tant que chefs de file en matière de production automobile et de conception d'automobiles écologiques, nos membres se sont toujours vivement intéressés au mercure qui semble être le point central de la séance d'aujourd'hui. Le mercure, nous le savons, est une neurotoxine virulente qui peut causer de graves problèmes de santé chez les humains et de graves problèmes environnementaux s'il est rejeté dans l'environnement, et il figure actuellement au huitième rang sur la liste des substances toxiques de la LCPE.

Dans ce contexte, il importe de noter que la plupart de nos membres n'utilisent pas d'interrupteurs au mercure — nous les retrouvons généralement dans le coffre arrière et sous le capot des voitures — que ce soit à des fins d'éclairage ou pour les systèmes de frein antiblocage. Cette information prend tout son sens, lorsqu'on sait que les interrupteurs au mercure utilisés pour les systèmes de frein antiblocage et les systèmes d'éclairage représentent 99 p. 100 du mercure utilisé dans les applications automobiles. Même si certains modèles de voitures en version limitée ont pu bénéficier d'exceptions, nos membres n'ont pas produit un seul véhicule sur le marché canadien équipé de ces interrupteurs au mercure depuis 1996.

Dans un contexte plus large, sur les 2,59 millions de modèles de véhicules des années 1994, 1995 et 1996 qui étaient encore sur les routes au Canada en juillet 2005, les rares modèles vendus par nos sociétés membres au cours de ces trois années représentent moins de 1 p. 100 des véhicules enregistrés. Ces chiffres nous distinguent largement de nos concurrents.

Le mercure est utilisé dans d'autres applications et, dans bien des cas, il n'y a aucune solution de rechange efficace. On le retrouve notamment dans les phares à décharge à haute intensité aux tons bleuâtres que l'on voit sur de nombreux véhicules modernes. Ces phares contiennent en général de 0,55 milligramme à un milligramme de mercure. On les utilise parce qu'ils offrent une meilleure visibilité, ils durent plus longtemps et ils consomment moins d'énergie.

Les écrans plats sont également utilisés dans les véhicules, comme équipement optionnel de navigation. Ils contiennent normalement de 2,5 à 5 milligrammes de mercure et ils sont généralement utilisés dans les espaces restreints.

Le mercure est utilisé dans d'autres applications, mais en faible quantité. Pour illustrer mon propos, un phare avant à décharge à haute intensité contient moins de un pour cent du mercure par rapport à un interrupteur d'éclairage d'usage courant, et les lampes fluorescentes compactes que nous sommes encouragés à utiliser dans nos maisons pour réduire la consommation énergétique en contiennent de un à 25 milligrammes. Ces informations mettent en lumière le fait que des objectifs conflictuels posent parfois des problèmes politiques, comme celui de la consommation d'énergie vis-à-vis de l'utilisation du mercure dans une lampe à fluorescent compact, par exemple.

L'AFIAC a récemment participé à une séance de consultation sur les principaux éléments qu'Environnement Canada prévoit inclure dans un avis qu'il émettra aux termes de l'article 56 de la partie 4 de la LCPE. Cet avis exigera la préparation de plans de prévention de la pollution relativement aux rejets de mercure des fours à arc électrique et aux équipements et interrupteurs de véhicules contenant du mercure qui ont été importés et distribués au pays depuis le 1er janvier 1994.

Dans ce contexte, les chiffres que je vous ai donnés plus tôt sont importants du fait que les membres de l'AFIAC ont peu de modèles utilisant les interrupteurs au mercure en 1996. Comme je l'ai mentionné plus tôt, moins de un pour cent des modèles de véhicules de 1994 à 1996 sont encore sur la route.

Il n'en demeure pas moins que les membres de l'AFIAC appuient les efforts de réduction des rejets de mercure dans l'environnement, mais je rappelle que nous avons été proactifs, soit en éliminant ou en réduisant rapidement le recours aux interrupteurs au mercure dans les véhicules vendus sur le marché. Ainsi, nous aimerions nous assurer que toute mesure réglementaire sera prise de manière équitable.

D'autres questions posées aux témoins au sujet des dispositions de la LCPE par rapport au mercure et des dispositions de la LCPE en général sont soulignées dans le document que nous vous avons fait distribuer dans les deux langues officielles. Comme nous avons peu de temps, je vais m'en tenir aux remarques que je viens de faire. Mais avant de terminer, j'aurais une suggestion que le comité voudra peut-être prendre en considération, à savoir, comment faire pour retirer de la circulation les millions de véhicules qui remontent à la période antérieure à l'année 1987? Si nous retirions ces voitures de la circulation, cela présenterait le double avantage d'un ratio d'émissions de 37 contre 1 et d'une réduction des problèmes liés au smog, puisque les anciens véhicules, plus susceptibles d'être équipés d'interrupteurs au mercure, seraient récupérés. La décision vous appartient.

Le président : Merci.

Le sénateur Adams : Je viens du Nunavut et je n'ai pas l'habitude d'être le premier à poser des questions.

Dans les années 70, nous ne parlions pas d'équipement au mercure. Aujourd'hui, nous en parlons. Autour des années 70, on nous a dit de ne pas manger de foie de phoque, parce qu'il contenait trop de mercure. C'est peut-être différent pour les fabricants de voiture, mais les gens qui étaient là avant vous utilisaient le mercure et le mercure était dans le sol.

Le corégone tire sa nourriture des fonds lacustres, où l'on retrouve du mercure. On nous a signalé que d'autres mammifères pouvaient présenter des risques, de même que la truite de lac et le corégone. J'étais électricien autrefois. J'ai beaucoup travaillé avec les interrupteurs au mercure — surtout avec les thermostats, les ampoules, et des choses du genre. Le mercure n'a une durée de vie que de quelques heures. Vous avez des règlements pour le mercure ici, mais au Nunavut, nous avons jeté des millions d'ampoules au dépotoir et personne ne se préoccupait de savoir si ces produits étaient toxiques. Nous n'avions pas de réglementation sur les objets déversés dans les dépotoirs comme vous en avez ici. Que dit la réglementation aujourd'hui?

Ma seconde question a trait au mercure contenu dans le charbon. Vous parlez surtout du mercure dans le charbon, mais nous avons une collectivité qui brûle du charbon 24 heures sur 24, 365 jours par année. Nous avons 26 collectivités et chacune a des générateurs au diesel. Le Nunavut pourrait regarder la pollution qu'il fait dans l'Arctique et regarder la pollution qui vient du sud.

Le président : Ces deux questions s'adressent-elles à M. Adams?

Le sénateur Adams : Certaines s'adressent à M. Adams et certaines s'adressent aux autres personnes.

M. Adams : Si j'ai bien compris, sénateur Adams, vous avez demandé, entre autres, quels étaient les règlements actuellement en vigueur pour les interrupteurs au mercure dans les véhicules. Je crois qu'il n'y a pas de règlement actuellement pour les interrupteurs au mercure. Des programmes appliqués sur une base volontaire ont été mis en place pour contrer l'utilisation des interrupteurs au mercure dans les véhicules. M. Nantais a parlé d'un programme que son association est à mettre sur pied pour résoudre les problèmes liés au mercure. Au début de novembre, un avis sera publié dans la partie I de la Gazette du Canada sur nos exigences réglementaires aux termes des plans de prévention de la pollution.

Le sénateur Adams : On trouve du mercure dans les ampoules et des objets du genre. Il n'est pas dans l'air. Il est lourd. La terre est polluée entre le feu de charbon et le mercure, qui est dans l'air. Je veux savoir comment ils interagissent. L'un monte et l'autre descend.

M. Adams : Nous avons deux défis à relever pour ce qui est des véhicules automobiles. L'un survient lorsqu'un véhicule arrive au terme de son cycle de vie ou lorsqu'il est mis à la ferraille. Il faut alors s'assurer que les interrupteurs au mercure sont retirés du véhicule, afin d'éviter que le mercure ne s'infiltre dans le sol ou ne soit libéré dans l'atmosphère.

L'autre défi survient lorsque ces coques de véhicules sont fondues pour l'acier. Si elles contiennent du mercure, il ira de toute évidence dans l'atmosphère également.

M. White : Lorsque nous comparons la situation il y a 30 ou 40 ans à celle d'aujourd'hui, nous utilisions plus de charbon aujourd'hui, parce que les populations augmentent. Le charbon est utilisé partout dans le monde et les pays du tiers-monde se transforment progressivement en pays du deuxième monde.

L'Agence internationale de l'énergie (AIE) prévoit une hausse spectaculaire de la consommation du charbon au cours des prochaines années. Nous en sommes d'ailleurs témoins actuellement. Lorsque nous étions jeunes, le mercure était produit à partir du charbon, mais à l'époque, nous n'en brûlions pas autant. Nous n'avions pas les énormes sources d'approvisionnement que nous avons aujourd'hui.

Il y a différents types de mercure également. Vous savez probablement que le mercure se trouve dans la terre et non seulement dans le charbon. Lorsque nous explorons le charbon et que nous le brûlons aux sources d'approvisionnement, le mercure qu'il renferme réagit selon le type que nous y trouvons. S'il s'agit de mercure élémentaire, il est sous forme de métal, et s'il est brûlé, il devient liquide et se transforme en un gaz qui monte par la cheminée. C'est difficile pour nous de l'éliminer.

Nous avons développé des techniques qui permettent d'éliminer une partie des émissions de mercure des centrales de charbon. Cette technologie consiste à activer le charbon qui peut ainsi être réhabilité. Elle sera probablement utilisée sous peu aux États-Unis afin de réduire les émissions de mercure.

Certains types de mercure se présentent sous forme bionique ou sous forme de sels de mercure. Les sels de mercure sont solubles dans l'eau. Si nous utilisons un procédé humide en fin de cycle pour éliminer d'autres composantes, comme le dioxyde de soufre, le mercure ne résiste pas et il est alors accessoirement éliminé avec d'autres composantes utilisées dans la centrale électrique. L'argent investi dans ce procédé de dépoussiérage vous rapporte ainsi d'autant plus.

Parfois, le charbon déposé dans les chaudières n'est pas brûlé totalement et des résidus finissent par s'accumuler dans les cendres. Si nous utilisons des collecteurs de poussière comme les aspirateurs munis de sacs, le charbon s'accumule dans les sacs et le mercure ainsi ensaché est absorbé par le charbon. Une bonne partie du mercure est déjà éliminée grâce à d'autres approches technologiques que nous utilisons à d'autres fins. Nous n'avons pas ajouté de technologies conçues pour éliminer les faibles quantités de mercure qui n'ont pas été éliminées collatéralement avec les autres systèmes. Cela peut être fait à l'aide de processus conventionnels.

Le secteur industriel croit qu'à long terme, dans vingt ou trente ans, les systèmes que nous utilisons aujourd'hui pour faire de l'énergie seront moins utilisés et que nous aurons davantage recours aux processus de gazéification. Ça ne sera pas facile, mais les processus seront plus sûrs et il y aura moins d'incertitude associée à l'élimination du mercure dans les différents systèmes. Il n'y aura plus de mercure dans les carburants que nous consommons. Il sera éliminé des carburants avant que nous ne les utilisions. Aujourd'hui, il y a du mercure dans le carburant au moment où il est brûlé. Nous devons le traiter après la combustion. Avec les nouveaux processus, le mercure sera retiré avant la consommation du carburant.

Le président : Là où vit le sénateur Adams, la concentration de mercure est élevée et sa présence est en grande partie liée à des circonstances naturelles comme les feux de forêt, et cetera, mais dans l'Arctique, on en trouve en quantité excessive et disproportionnée, et cette présence est attribuable à la migration ou au transport de marchandises par air ou par mer.

L'industrie sait-elle comment fonctionne cette migration? Y a-t-il des profils de migration correspondant aux déplacements naturels du vent, et cetera? Que savons-nous à ce sujet?

M. White : Je ne suis pas un spécialiste de la question, mais j'ai de l'expérience dans le domaine de la production énergétique. J'ai toujours pensé qu'une importante quantité de mercure que l'on trouve dans les poissons, plus particulièrement les poissons appartenant aux ordres les plus élevés comme l'omble chevalier, le thon et l'espadon, provient de la contamination des eaux lors des inondations provoquées par les projets hydroélectriques. Ces projets entraînent la contamination naturelle de l'eau et des niveaux de mercure élevés pendant un certain temps, si bien que les organismes se nourrissant sur le fond finissent par transmettre ces contaminants à la chaîne alimentaire et, bien sûr, aux humains en bout de ligne. Ainsi, les mères sont avisées d'éviter de consommer du poisson et de ne plus en donner à leurs nourrissons. Le poisson est très bon pour nous, mais en même temps, nous ne pouvons tolérer de grandes quantités de mercure. J'ai toujours pensé que cette contamination venait du Nord.

M. Nantais : En réponse à votre question, sénateur Adams, la modélisation atmosphérique évolue depuis un certain temps. Je pense que le véritable problème ici réside dans le transport sur de grandes distances de produits comme le mercure. J'ai participé hier, en tant que panéliste invité, à la Septième conférence annuelle mondiale sur la fiscalité environnementale, et nous avons discuté avec la Chine et l'Inde de leurs besoins en énergie. Nous avons parlé de ce que ces pays comptent faire pour atteindre un niveau de vie similaire à celui de l'Europe et de l'Amérique du Nord.

Les changements qui se produiront dans la demande énergétique, que ce soit en charbon ou en pétrole, sont stupéfiants. On estime par exemple que d'ici 2025 ou peut-être avant, la Chine consommera 99 millions de barils de pétrole par jour. C'est plus que les 84 millions de barils de pétrole par jour que nous produisons actuellement à l'échelle planétaire.

Nous devons non seulement examiner les mesures prises au Canada pour récupérer, voire réutiliser le mercure, parce qu'il y a des responsabilités rattachées à l'entreposage, mais également examiner la possibilité de conclure des ententes internationales en matière de transport sur de longues distances, ainsi que nous l'avons déjà fait dans certains cas. Puisqu'il est question de l'avenir collectif de la planète, je pense que ces ententes internationales deviendront encore plus cruciales, si nous voulons préserver la qualité de l'air et de l'environnement au Canada.

Mme Laurie-Lean : Voilà l'occasion idéale de parler de mon sujet favori. Il ne s'agit pas du mercure en tant que tel, mais du Réseau de recherche MITE (Metals in the Environment) et du Réseau de recherche MITHE (Metals in the Human Environment). Ceux-ci ont une longue expertise qui pourrait à mon avis être une source d'inspiration pour le comité. Ils ne se penchent pas exclusivement sur le mercure, mais il est au nombre des métaux étudiés. Ces réseaux regroupent des facultés universitaires qui travaillent dans ces domaines spécialisés. Il s'agit d'une organisation multidisciplinaire qui fait appel au gouvernement sur une base régulière. Je crois que dans le programme actuel, ils tiennent même compte des aliments du Nord et du pays comme voie d'exposition aux substances nocives. La responsable est la Dre Beverly Hale. Elle pourrait orienter le comité sur les experts dans ce domaine. Je parle d'expertise scientifique. Je ne pense pas que nous puissions demander à des représentants de l'industrie de parler de la science en général en toute objectivité. Ce réseau de recherche qui réunit les experts de tout le pays autour d'une même table pourrait être une bonne source d'information.

Le président : Savez-vous comment nous pourrions joindre la Dre Hale?

Mme Laurie-Lean : Elle est à l'Université de Guelph. Son site Web figure dans notre rapport.

Le président : Je vous remercie. Nous verrons à cela sous peu.

Mme Christie : J'aimerais apporter quelques éclaircissements au sujet de la production d'énergie hydroélectrique et de ses conséquences sur le mercure et sur l'environnement. Il a été démontré que lorsque de vastes territoires sont inondés, le mercure fait surface et se répand dans les bassins hydrographiques. Les programmes que Mme Laurie-Lean a mentionnés montrent qu'après environ 50 ans, les effets ne se font plus sentir, les métaux se retirent et le problème se résorbe.

Il y a une chose que M. Nantais a mentionnée et qu'il nous faut examiner de près, c'est l'incidence des émissions de mercure à l'échelle planétaire. On a estimé que le Canada contribue dans une proportion de moins de un pour cent des émissions au bassin mondial de mercure. Mon propos n'est pas de nier la nécessité de gérer nos propres émissions au pays, mais bien des problèmes auxquels nous sommes confrontés dans l'Arctique et dans d'autres régions sont liés à l'immense problème des émissions à l'échelle internationale.

Le président : Ne pensez-vous pas que si nous voulons faire la leçon aux autres, nous devons donner l'exemple?

Mme Christie : Absolument.

Le sénateur Angus : Merci à tous de votre présence ici. À priori, j'ai pensé que nous entendrions les « gros méchants » faire valoir leurs points de vue et leurs intérêts. Je dois dire que je suis impressionné. Nous entendons vos témoignages et nous lisons vos mémoires, avec comme toile de fond des gens qui sont venus témoigner la semaine dernière et qui nous ont dit qu'au cours des dix dernières années, les émissions de mercure au Canada étaient passé de 70 p. 100 à 7 p. 100, ce qui pour moi est un résultat stupéfiant. Cela signifie que vous et vos membres avez de toute évidence fait ce que vous nous avez dit que vous feriez.

J'ai été étonné d'entendre que 47 p. 100 du mercure qui pollue notre environnement au Canada vient d'Asie, que 7 p. 100 seulement des émanations viennent du Canada et que le reste vient d'ailleurs. Cela corrobore vos chiffres, madame Christie.

Ensuite, je ne peux m'empêcher de revenir sur votre commentaire, madame Christie, à propos du Canada qui semble traiter le mercure comme un produit jetable et qui serait un importateur net de mercure. Vouliez-vous dire un importateur net involontaire ou si nous avons effectivement besoin de mercure pour combler des besoins légitimes au pays, comme dans votre secteur industriel, par exemple?

Mme Christie : Non, je parlais des émissions atmosphériques. Je ne suis pas une spécialiste des produits contenant du mercure, mais je sais qu'il y a des utilisations légitimes du mercure au pays. Mais je ne pourrais en parler plus en détail.

Le sénateur Angus : Il faudra que j'examine cela plus en profondeur, mais j'ai l'impression que nous nous en sortons bien au Canada à cet égard, bien mieux que je ne le croyais lorsque nous avons entamé nos discussions houleuses sur notre étude à trois volets. L'idée que je me faisais alors de la situation était que tous ces pauvres gens qui vivent dans cette partie du monde d'où vient le sénateur Adams, par exemple, subissaient la pollution de nos diverses industries; les centrales de charbon, les industries automobiles le long de la frontière canado-américaine, et bien sûr, les grandes industries de cette province.

J'ai changé d'idée, mais j'ai tout de même été frappé par les propos de M. Nantais, lorsqu'il a dit que le mercure a été utilisé dans de nombreuses applications industrielles dans le passé, parce qu'il constitue un excellent conducteur d'électricité. Nous ne le savions pas. Nous sommes des profanes et nous en apprenons beaucoup. Ce qui importe, c'est que nous comprenions ce que vous nous dites. Ensuite, vous avez ajouté que ces produits sont encore vendus de par le monde. Je me demande si vous avez voulu dire qu'il est encore légal de vendre du mercure aux termes des lois canadiennes, et, si c'est bien ce que vous avez voulu dire, aux termes de quelles lois?

M. Nantais : Il est certes encore légal au Canada d'utiliser le mercure dans la fabrication de divers produits et la même situation prévaut à peu près partout dans le monde. Je me trompe peut-être, mais je ne connais aucun gouvernement ou pays qui interdise l'utilisation du mercure. Il est abondamment utilisé et, dans des pays comme le Brésil, par exemple, on l'utilise dans la fabrication des bijoux ou dans l'exploitation des mines d'or, et il n'existe pour ainsi dire aucun contrôle sur la manière dont il est réintroduit dans l'environnement.

Je suis heureux de constater que vous êtes agréablement surpris du rendement de l'industrie canadienne à ce chapitre. Toutefois, il reste encore beaucoup à faire en matière de récupération de produits comme les interrupteurs au mercure et les systèmes de freins antiblocage des véhicules. Il faut en assurer une gestion adéquate et faire en sorte qu'il ne soit pas rejeté dans l'environnement. C'est vraiment là le problème.

Ce que nous voulons éviter, c'est de nous lancer dans des activités de récupération et d'expédier ensuite ces produits ailleurs dans le monde, comme au Brésil, où ils finissent automatiquement par être rejetés dans l'eau ou dans l'atmosphère. Nous jugerions ce genre de comportement inacceptable. Quoi qu'il en soit, il y a moyen de récupérer et de recycler le mercure et d'éviter ainsi — lorsque son utilisation le justifie et qu'aucun autre matériau ne peut offrir un aussi bon rendement — que les fabricants ne s'approvisionnent à partir de nouvelles sources.

Bien sûr, nous sommes confrontés à ce que j'appelle des politiques objectives conflictuelles. Par exemple, nous voulons passer à un éclairage plus éconergétique et nous trouvons sur le marché ces nouvelles lampes fluorescentes compactes, mais leur emballage a la taille du Queen Mary.

Le sénateur Angus : N'est-ce pas pour des raisons de sécurité?

M. Nantais : Par ailleurs, nous recyclons très peu au Canada. Il faudrait examiner les possibilités de recyclage du mercure et d'autres produits et gérer leur réutilisation de manière responsable, ce qui nous éviterait de faire appel à de nouvelles sources d'approvisionnement.

Le sénateur Angus : Nous constatons — et vous êtes nombreux à le confirmer — que dans bien des secteurs, le mercure n'est pas la seule avenue possible en matière de thermomètres, commutateurs et autres interrupteurs.

M. Nantais : Les thermostats également.

Le sénateur Angus : Nous étudions la LCPE et nous en ferons rapport. Sa portée sera restreinte, parce que nous devons aborder trois secteurs, mais le mercure figure parmi les produits toxiques énumérés dans les annexes de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Proposeriez-vous d'en interdire la vente ou si vous pensez que nous la situation est sous contrôle?

M. Nantais : Nous avons quelques outils efficaces à notre disposition. Il suffirait de les appliquer de manière efficace et responsable.

Le sénateur Angus : Bref, vous semblez dire qu'il était utilisé dans de nombreuses applications et qu'il est encore légal de le faire, mais vous laissez entendre qu'on ne le fait pas, ce qui est fort bien. Par ailleurs, pourquoi ne pas rendre son utilisation illégale? Ne serait-ce pas une bonne chose?

Mme Laurie-Lean : Vous nous placez dans une situation difficile. Je n'aime pas faire des commentaires sur les affaires des autres, parce que je ne m'y connais pas, mais je peux dire que nous continuerons à réduire nos émissions et que nous avons fait d'énormes progrès, même s'il reste encore beaucoup à faire.

Pour ce qui est des autres métaux, les quantités utilisées et les rejets qui en découlent peuvent être très disproportionnés. Une infime utilisation peut être à l'origine de la majorité des rejets.

Le mercure est très différent des autres métaux en ce sens qu'il a la particularité de se bioamplifier dans l'environnement. D'une certaine façon, il agit beaucoup plus comme une substance organique que le zinc ou le cuivre. C'est une réalité très différente, mais, règle générale, il faut examiner le contexte particulier de son utilisation et l'impact qu'il a sur le cycle de vie. J'ai lu, en me documentant sur les ampoules fluorescentes, par exemple, que celles-ci réduisent la consommation d'énergie et que cette économie d'énergie se traduit forcément en une diminution des rejets de mercure. Il ne suffit pas de tenir compte de la quantité utilisée. Il faut également tenir compte de la gestion responsable d'un produit au terme de son cycle de vie. La médecine traditionnelle nous expose à des produits nocifs et certains groupes ethniques utilisent des produits comme le mercure ou l'arsenic ou d'autres substances, alors qu'ils ne le devraient pas. Il faudrait absolument demander aux industries ou aux gens qui en font usage d'en discuter. Quant à moi, je ne saurais dire si la LCPE ou la Loi sur les produits dangereux sont les meilleurs moyens de résoudre le problème.

Le sénateur Angus : Ce qui m'a sidéré, entre autres choses, c'est que l'une des importantes sources de mercure provient des fours crématoires. D'après ce que m'ont dit les gens oeuvrant dans ce secteur, c'est une pratique de plus en plus répandue. Je me demande comment il se fait que nous n'ayons pas trouvé d'autres moyens d'incinérer? Ces émanations proviennent-elles des humains ou des produits utilisés dans la fabrication des cercueils?

Mme Laurie-Lean : Elles proviennent des humains, des produits d'obturation dentaire.

Le sénateur Angus : C'est intéressant.

Mme Laurie-Lean : J'ai cru comprendre que la technologie permettait de récupérer une partie de ce mercure. En Europe, plus précisément, où la crémation est plus répandue, je crois que des techniques sont utilisées pour récupérer le mercure avant qu'il ne soit rejeté dans l'environnement.

Le sénateur Angus : Le comité sénatorial cible les fours crématoires dans une évaluation préliminaire.

Mme Laurie-Lean : Pour ce qui est des mesures prises ailleurs dans le monde, nous savons, par exemple, que l'Union européenne a donné des directives visant à restreindre certaines applications de mercure.

Le président : J'aimerais élaborer un peu plus sur ce point. Par souci de clarté, il y a deux écoles de pensée à ce sujet qui ne sont pas entièrement opposées. L'une qui prône la gestion du mercure, de manière à éviter qu'il ne soit déversé dans les dépotoirs ou d'autres endroits contre-indiqués à la fin de son cycle. L'autre position consiste plutôt à en restreindre l'usage dans la mesure du possible, ce qui aurait pour effet d'atténuer le second problème.

Le sénateur Angus : Vous avez dit que vous pensez qu'aucune loi n'interdit l'utilisation du mercure, mais existe-t-il des lois qui en interdisent l'utilisation à des fins industrielles?

M. Nantais : Je ne suis pas certain de pouvoir répondre à cette question. Je ne suis pas sûr.

Le sénateur Angus : C'est pourquoi j'ai posé la question. Il faudra revenir là-dessus, monsieur le président.

Mme Laurie-Lean : Bien des applications industrielles ont été progressivement éliminées ou bannies, comme par exemple, l'utilisation de certains produits dans les processus de chlore alcali et d'autres.

Le sénateur Angus : Il est interdit dans certains pays d'utiliser du mercure dans les thermomètres.

Mme Laurie-Lean : Les producteurs industriels n'utilisent pas le mercure pour l'exploitation de l'or, mais les mineurs dans les pays en développement l'utilisent, et c'est très inquiétant. Il existe un programme de sensibilisation chapeauté par l'UNAP ou la Banque mondiale et l'industrie pour essayer à tout le moins d'enseigner les pratiques exemplaires, mais ce qui pose problème, c'est qu'une multitude de mines sont exploitées illégalement. Elles ne respectent pas la loi sur l'utilisation du mercure. Des mesures ont été prises, mais elles ne font pas l'objet de surveillance et bien des applications sont interdites ou discontinuées.

Si le mercure est traité différemment de certaines substances interdites, comme le DDT, aux termes de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, c'est que vous pourriez interdire chacune des applications du mercure à des fins précises et la situation serait encore inquiétante et il y aurait toujours contamination de l'environnement. Certaines ressources halieutiques feraient encore l'objet de mises en garde, parce que la principale source de rejets de mercure dans l'environnement provient de l'activité humaine, mais pas nécessairement de l'utilisation que l'homme en fait. Nos rejets, qui sont considérables, comme les rejets du brûlage du charbon, ne proviennent pas de l'utilisation du mercure en soi, mais du déplacement des matières naturelles.

Quant aux sources diffuses et aux pratiques agricoles, une étude effectuée en Amazonie a permis de constater que ce n'est pas l'exploitation des mines d'or, mais bien la déforestation qui est la principale source de contamination par le mercure. Les humains peuvent causer bien des dégâts à l'environnement sans même utiliser le mercure en tant que tel.

Le sénateur Angus : Leurs activités sont à l'origine des rejets de cet élément dans l'atmosphère.

Je vais conclure en posant une question d'ordre général qui s'adresse à tous les participants et qui concerne notre mandat. Dans tous vos mémoires, vous avez abordé des questions qui ont trait au mercure, en relation avec la LCPE. J'aimerais savoir si vous avez des recommandations que nous pourrions intégrer à notre rapport sur ce que la LCPE ne fait pas?

L'environnement est un sujet complexe au Canada. Non seulement y a-t-il des recoupements entre les compétences fédérales et provinciales, mais il se trouve que la LCPE s'entremêle à 37 autres lois et qu'elle recoupe trois ou quatre ministères, dont Santé Canada, Ressources naturelles et Environnement Canada. C'est comme un éléphant au milieu de la pièce. Quelle est l'utilité de nos délibérations dans un tel contexte?

Nous essayons de changer les choses et si vous jugez que nous devrions reformuler la LCPE d'une manière ou d'une autre, veuillez nous en faire part. À mon sens, vous faites un meilleur travail que les médias et autres dénigreurs de la communauté des environnementalistes.

Nous essayons de protéger notre environnement face aux changements climatiques et autres bouleversements et nous avons ce cadre légal que nous pouvons peut-être modifier, s'il n'est pas approprié.

Mme Christie : Deux ou trois choses sont particulièrement importantes pour notre secteur. Vous avez probablement beaucoup entendu parler des dispositions sur les équivalences. Elles ont une grande importance pour notre secteur qui est lourdement réglementé par les agences provinciales. Si nous devons être régis par la LCPE en ce qui a trait au mercure ou à tout autre polluant ou substance toxique, les dispositions sur les équivalences seront essentielles si nous voulons que les provinces continuent à faire leur travail. Elles peuvent dans certains cas faire un excellent travail étant donné que nous les côtoyons de plus près.

Un autre aspect de la LCPE sur lequel nous pourrions nous pencher est l'Inventaire national des rejets de polluants (INRP). La reddition de compte rattachée à cet inventaire est un lourd fardeau imposé à l'industrie. Il serait bon qu'on nous donne des précisions quant aux objectifs et au rôle de ces rapports.

Le sénateur Angus : Croyez-vous que nous ayons dépassé ce stade et qu'il faille repenser tout cela? Le concept semble bon.

Mme Christie : Cet inventaire a son utilité, mais nous essayons de l'adapter à toutes les réalités. Nous devrions réexaminer sa fonction première qui consiste à fournir au gouvernement les informations dont il a besoin.

M. Nantais : Je suis d'accord avec l'idée de réexaminer l'INRP et nous l'avons mentionné dans notre exposé. Ce qui nous a le plus frustré, ce sont les demandes de rapport qui font double emploi. Le problème relève peut-être en partie du provincial, mais il est certain que le ces chevauchements n'ont aucun sens. Nous devons chercher à être efficaces. Aucune industrie ne peut se permettre de produire des rapports qui font double emploi. Je reconnais qu'ils ont leur raison d'être, mais nous devons trouver le moyen d'en accroître l'efficacité. On ne peut répondre à toutes les attentes, mais il y a certainement moyen d'en améliorer l'efficacité et d'éliminer les chevauchements.

M. White : Si nous considérons le contexte canadien seulement, il y a une certaine réciprocité. Si un règlement particulier était établi, nos clients de la Saskatchewan et de l'Alberta auraient beaucoup plus de difficultés à régler le problème que les clients qui brûlent du charbon au Nouveau-Brunswick ou en Nouvelle-Écosse. L'un peut acheter un type de charbon en Nouvelle-Écosse en provenance de la Colombie, de l'Afrique du Sud ou de la Virginie et il peut être livré par transport maritime. Il est impossible de faire cela en Alberta. Si nous croyons que les gens de la Saskatchewan et de l'Alberta ont droit à des coûts équivalents en électricité, nous devons tenir compte de ces coûts. Il ne faudrait pas perdre de vue que tous ne sont pas égaux à cet égard.

Le sénateur Angus : Cela fait partie du déséquilibre fiscal, monsieur le président.

Le président : J'aimerais obtenir une précision à ce sujet. Y a-t-il quelqu'un parmi vous qui pense que le mercure doit figurer sur la liste des substances toxiques de la LCPE?

Je pense que non. Merci.

Le sénateur Tardif : Certains d'entre vous avez signalé votre préférence pour les standards pancanadiens comme outil pour résoudre les problèmes liés aux émissions de mercure. Les critiques en parlent comme d'une approche à la pièce qui se traduit par des standards incohérents qui sont parfois ramenés au niveau du plus petit dénominateur commun.

J'aimerais que vous me fassiez part de vos commentaires à ce sujet.

Mme Christie : Je ne pense pas qu'il s'agisse d'une approche fragmentée. Les standards pancanadiens ont été établis par les gouvernements fédéral et provinciaux et ils tiennent compte des différences à l'échelle du pays. Avec un produit comme le mercure, il est toutefois difficile de tenir compte des différences. La technologie utilisée dans l'Ouest pour résoudre le problème des émissions du mercure émanant des centrales de charbon n'est pas identique à celle utilisée dans l'Est. Nous devons tenir compte de ces différences lorsque nous imposons des règlements.

L'autre problème lié aux standards pancanadiens est que n'étant ni des lois ni des règlements, on a l'impression qu'ils ne suffisent pas. Pour ce qui est des standards se rapportant au mercure, plus particulièrement, les organismes provinciaux les ont intégrés dans leurs lois et ils les appliquent dans leurs propres systèmes de réglementation. Bon nombre de nos usines ont des standards intégrés à leurs permis d'opération et elles ne pourraient fonctionner si elles n'en tenaient pas compte. Ce sont là deux fausses impressions. Je ne pense pas qu'il s'agisse d'une approche fragmentée; à mon avis les standards sont efficaces.

M. White : Une bonne partie des problèmes de mercure sont liés aux émissions en provenance d'autres pays. Pour ce qui est de l'approche dite « fragmentaire », si nous faisons abstraction du contexte mondial, force est de constater que les difficultés ne sont pas les mêmes pour tous et qu'il faut une réglementation qui tienne compte de ces différences. D'autre part, si nous comparons nos émissions à celle des autres pays dans le monde, nous constatons qu'il faut faire quelque chose pour en limiter l'impact.

Ce que j'essaie de faire valoir, c'est que si nous intervenons au niveau local, nous n'obtiendrons pas l'impact escompté. Il ne s'agit pas vraiment d'une approche fragmentaire, si nous la comparons à l'approche des émissions de l'extérieur sur lesquelles nous n'avons aucun contrôle.

Le sénateur Tardif : Croyez-vous que nous devrions adopter des standards réglementaires, plutôt que des standards applicables sur une base volontaire?

M. White : Il est très difficile de répondre à cette question. L'industrie a très bien réussi à mettre en œuvre des standards sur une base volontaire. Notre société a participé à ces programmes avec d'autres entreprises. Nous avons pris des mesures, nous avons compilé des données à la fin de l'année et nous avons produit des rapports, comme on nous l'a demandé. En fait, nous utilisons les deux approches. Nous appliquons des règlements dans certains cas et nous appliquons des standards sur une base volontaire dans d'autres cas. Si nous pouvons travailler efficacement et avec prudence en appliquant ces standards, je pense que c'est la voie à suivre. Par contre, si le comité pense que les standards appliqués sur une base volontaire ne seront pas efficaces ou si l'industrie démontre qu'ils ne seront pas efficaces, alors je pense qu'il faudra agir autrement.

Le sénateur Tardif : Monsieur White, vous avez parlé d'un nouveau processus de gazéification. Avez-vous dit que nous n'avons pas la technologie nécessaire pour l'utiliser en ce moment ou que c'est une technologie risquée et que c'est la raison pour laquelle l'industrie des huiles lourdes n'y a pas recours?

M. White : Des efforts ont été déployés à l'échelle internationale pour l'introduction d'un processus de gazéification intégrée à cycle combiné (GICC). Par cette méthode, le charbon est converti en gaz qui est nettoyé ensuite et utilisé pour faire de l'électricité.

D'ici à ce que l'industrie des huiles lourdes atteigne sa pleine maturité, la seule application possible pour la technologie de la gazéification est la production d'électricité. Nous aurions pu utiliser cette technologie il y a vingt ans pour faire de l'électricité. C'est une méthode beaucoup plus coûteuse que celles utilisées aujourd'hui. Je pense que, très souvent, dans les installations réglementées, les gens qui cherchaient des clients disaient « vous n'allez pas dépenser tout cet argent dans cette technologie aujourd'hui. Il vaut mieux l'investir dans des centrales électriques conventionnelles. » À ce moment-là, il n'y avait pas d'autres possibilités pour les centrales électriques conventionnelles. Puis, le dioxyde de soufre a fait surface et l'industrie a réagi. Et vint ensuite l'oxyde d'azote, auquel l'industrie a réagi également. Maintenant, nous en sommes au dioxyde de carbone, mais il s'avère difficile de faire quoi que ce soit avec ce composé. Ce que nous tentons de faire actuellement, c'est d'améliorer l'efficacité de nos centrales conventionnelles. Nous avons augmenté l'efficacité dans une proportion de 20 p. 100 par rapport aux anciennes centrales, c'est-à-dire que nous avons réduit leur consommation de charbon de 20 p. 100, ce qui veut dire que nous avons réduit les rejets de CO2 dans une proportion de 20 p. 100 pour chaque unité d'électricité produite.

Le président : Ces résultats se rapprochent-ils du rendement obtenu avec le gaz naturel dans une même application?

M. White : Cela ne se compare pas. Une ancienne centrale produit environ une tonne de CO2 par mégawatheure. Si nous réduisons ces émissions de 20 p. 100, nous arrivons à 1 700 livres. Une centrale de gaz naturel en produit environ 800 livres. Si nous pouvons convertir le charbon en gaz, l'utiliser pour faire de l'électricité, et enfouir le CO2 sous terre, nous pouvons réduire les émissions de CO2 des centrales au charbon d'au moins 80 p. 100 et, du coup, éliminer le mercure.

Dix centrales de ce genre sont en opérations dans le monde, peut-être même moins. Elles ont toutes été acculées à la faillite et achetées par d'autres entreprises. Maintenant, ça va. Tout comme les terrains de golfe et les centres de ski. C'est le troisième acheteur qui fait de l'argent.

Il ne fait aucun doute que la technologie se développera. Ce que nous disons, c'est que le Canada a la possibilité de développer le processus de gazéification, mais non le processus de production d'électricité. Ainsi, la moitié du problème lié au développement technologique serait réglée.

Trois grandes industries dans le monde ont décidé de se lancer dans la technologie de la gazéification. Les sociétés Shell, General Electric et Siemens se sont engagées dans cette voie pour la simple raison que la plupart d'entre elles produisent des turbines à gaz. Comme le gaz naturel est dispendieux et qu'il devient rare, ces sociétés ont besoin de la gazéification du charbon pour réaliser leurs plans d'affaires dans toutes leurs autres activités. Elles ont acheté ces technologies et sont disposées à offrir des garanties. Par conséquent, nous serons bientôt prêts à nous engager dans un projet commercial. Nous pensons que nous nous approchons du but, parce que nous n'avons pas à jouer le « Grand jeu »; nous pouvons nous en tenir à la production d'hydrogène et laisser tomber la production d'électricité.

Le sénateur Cochrane : Je suis également impressionné par les percées technologiques et l'assainissement de l'environnement. Ce n'était pas mon avis à mon arrivée ici aujourd'hui. Ce que nous nous pensions, c'est que vous étiez de grands pollueurs.

Monsieur Adams, vous avez mentionné que les phares des voitures qui projettent une lumière bleue contiennent du mercure. Je sais que vous avez dit qu'on le trouve en faible quantité, mais vous avez parlé d'une plus grande quantité par la suite. Y a-t-il des efforts déployés actuellement pour éliminer le mercure de ces phares? Honda et Toyota ne sont pas les seuls à utiliser ces phares, d'autres fabricants nord-américains les utilisent également.

M. Adams : Si on utilise ces phares, c'est qu'ils durent généralement plus longtemps, qu'ils éclairent mieux, qu'ils sont plus sûrs et j'oublie l'autre raison. Cela nous ramène à l'un des points que M. Nantais a soulevé plus tôt. Il faut parfois faire des compromis entre des phares qui sont sûrs et qui ont une longue durée de vie et des phares qui contiennent des traces de mercure.

Il semble effectivement que ces phares bleus sont de plus en plus répandus.

Le sénateur Cochrane : Ils sont plus répandus?

M. Adams : Oui, dans leur application.

Le sénateur Cochrane : Fait-on des efforts pour les éliminer?

M. Adams : Tous les fabricants cherchent différents moyens de réduire leur utilisation du mercure dans toutes ses applications. S'il y avait moyen d'éliminer le mercure et de produire des phares qui ont la même intensité de lumière, nous examinerions cela de près.

M. Nantais : C'est vraiment l'élément clé; tous les efforts possibles sont déployés au niveau conceptuel pour éliminer les problèmes environnementaux potentiels liés aux véhicules.

La plupart des fabricants qui utilisent des phares au mercure à haute intensité viennent d'ailleurs. Nous essayons — comme tous les fabricants de voiture, je crois — de trouver un juste équilibre entre les problèmes de sécurité et les problèmes environnementaux. Sans être au courant de leurs plans au chapitre de la conception et de la production, j'ai l'impression que cette approche est là pour rester. Toutefois, je pense que l'objectif ultime est d'éliminer tout le matériel indésirable d'un véhicule. C'est de laisser le moins de traces possible dans l'environnement.

Le sénateur Cochrane : Madame Christie, vous dites que vous avez utilisé les standards pancanadiens, ainsi que l'a mentionné le sénateur Tardif.

La LCPE est entrée en vigueur en mars 2000. Quels ont été les impacts, s'il en est, dans les secteurs que vous représentez?

Mme Christie : La LCPE n'a pas eu d'impact sur le mercure. Nous sommes à élaborer des plans de gestion en nous fondant sur les standards pancanadiens. C'est en nous fondant sur ces standards que nous nous attaquons au problème du mercure. Une fois qu'il sera inscrit, il nous faudra faire quelque chose pour gérer le problème. Nous utilisons les standards pancanadiens comme outil de gestion du mercure dans notre secteur.

Nous sommes touchés par la LCPE en ce qui a trait à d'autres substances, comme les BPC, le bois traité, et cetera. Nous avons eu une réglementation musclée et des processus optionnels stratégiques ont été mis en œuvre, aux termes de la LCPE, mais pas en ce qui concerne le mercure.

Mme Laurie-Lean : Comme je l'ai mentionné, nous nous conformons actuellement à un avis relatif au plan de prévention de la pollution qui a été émis aux termes de la LCPE. Cet avis précise que le mercure doit être pris en considération. Il y a des standards. Nous avons des échéanciers et des objectifs à respecter sur les matières particulaires dans le SO2 et cela a des incidences sur le mercure pour lequel il existe un référentiel particulier en termes d'objectifs.

Il est difficile de dire si cet outil est réglementaire ou non. Je ne peux pas me prononcer sur ses mérites et son utilité, tant que nous ne l'aurons pas essayé. Pour le moment, nous sommes tenus de respecter cet avis. Les déclarations seront remplies en novembre et nous saurons à cette étape quelles seront les mesures additionnelles prises par Environnement Canada. Par ailleurs, nous avons entendu dire qu'Environnement Canada a l'intention de réglementer.

Le président : Ces mesures seront-elles prises à la suite de la demande qui a été fait aux termes de la LCPE?

Mme Laurie-Lean : Il est difficile ce qu'aurait été votre vie si vous n'aviez pas épousé votre femme. Il est difficile de répondre à ce genre de questions, d'autant plus que nous sommes depuis longtemps au stade de la consultation.

Le processus inclut l'émission de l'avis dans lequel sont énumérées des facteurs qui doivent être pris en compte et les sociétés sont ensuite tenues de préparer un plan. Elles déclarent avoir préparé ce plan et elles fournissent des informations sur ce plan. Vous devez ensuite déclarer que ce plan a été mis en œuvre à une date précise.

Le processus renferme des aspects réglementaires obligatoires et un peu stricts et une société peut ne pas s'y être conformée, mais il est flexible; il donne des choix. On ne sait trop comment les choses fonctionneront à ce stade, tant qu'on ne l'aura pas mis en pratique. Personne n'a expérimenté quoi que ce soit d'aussi complexe auparavant.

Le président : Je fais de l'obstruction, mais les choses ne se passaient pas comme cela avant 1999. Votre industrie n'a pas pris cette orientation avant 1999, et elle a été mise sur pied bien avant cela.

Mme Laurie-Lean : Nous nous sommes dirigés dans cette voie. Il ne faut pas oublier que le SO2 posait déjà problème en raison des pluies acides.

Le président : Je parle du mercure, plus particulièrement.

Mme Laurie-Lean : Le mercure fait partie de cet engagement, alors si nous choisissons une différente technologie ou un différent processus, cette décision a des incidences sur les rejets de mercure. Si vous comparez les 20 tonnes de l'année de référence, par rapport aux deux tonnes actuelles, la différence est énorme. Cela ne s'est pas fait par magie et le mercure n'a pas soudainement disparu; il a fallu fournir beaucoup d'efforts, notamment sur le plan technologique. Le premier grand pas accompli dans cette direction est attribuable aux plafonnements imposés aux pluies acides qui ont donné lieu à de nouvelles approches technologiques, lesquelles ont entraîné la réduction du SO2 et, du coup, la réduction des rejets de mercure.

Le président : Règle générale, ces grands bonds en avant se produisent à la suite de l'adoption d'un règlement ou de l'imposition d'un ordre du gouvernement.

Mme Laurie-Lean : Oui, mais pas quand nous avons fait le second grand pas.

Le sénateur Cochrane : Ce grand pas en avant s'est-il produit dans l'industrie du charbon, monsieur White?

M. White : Oui, effectivement. Il s'agit en fait de ce que je désignerais comme une réduction collatérale. Nous avons dû procéder à l'installation de dépoussiéreurs et au brûlage de différents types de charbon pour réduire le SO2. Fondamentalement, si le profil des émissions est un panache de fumée et que des efforts sont déployés pour le réduire, les autres composantes de ce panache seront également atténuées. C'est ce qui s'est produit. Il faut comprendre que malgré les meilleurs instruments technologiques, la capacité de produire de l'électricité serait sérieusement compromise si une réglementation exigeait des niveaux de rejet si bas que l'industrie ne pourrait s'y conformer. Le temps fait parfois bien les choses dans ce genre de processus; les résultats peuvent être graduels et il importe de reconnaître que les difficultés peuvent ne pas être les mêmes pour tous.

Le président : J'aimerais, en conclusion, vous poser une question au sujet de votre industrie plus particulièrement, monsieur White en prenant un exemple hypothétique.

La ministre de l'Environnement a clairement dit qu'à son avis, la nouvelle Loi sur la qualité de l'air est nécessaire parce que les efforts sur une base volontaire ne suffisent pas, aux yeux de certains, et certainement aux yeux du gouvernement.

Si on vous demandait d'atteindre tel objectif d'ici 30 ans, plutôt que d'ici 50 ans, ne consacreriez-vous pas davantage de temps, d'efforts et d'argent au développement de cette technologie, afin d'atteindre cet objectif plus rapidement? Je reviens sur ce que vous avez dit plus tôt, à propos de la technologie qui existe déjà, d'une certaine façon. Elle n'a tout simplement pas encore fait l'objet d'applications pratiques; on en a discuté autour d'une table, ou encore, elle a été appliquée à petite échelle. Je me demande si l'imposition de plafonds ne nous amènerait pas plus rapidement à utiliser cette technologie dans des applications pratiques.

M. White : L'approche méthodologique que vous avez décrite pour le développement de nouvelles technologies sera étalée sur une période de 42 ans. Si nous construisions une nouvelle centrale électrique, il faudrait qu'elle fonctionne pendant environ 40 ans?

Le président : Effectivement, elle devra fonctionner pendant cette période minimale pour donner un rendement raisonnable sur le capital investi.

M. White : Oui, sénateur, c'est exact, mais elle devra également fonctionner pendant cette période minimale pour maintenir la productivité, le niveau de services et pour que les consommateurs en aient pour leur argent. L'industrie doit atteindre un certain taux de rentabilité, sinon elle sera acculée à la faillite. L'instauration d'un régime qui exige des déboursés peut faire beaucoup de tort à l'industrie si celle-ci est forcée d'abandonner ses centrales avant la fin de leur durée de vie utile, parce que la technologie ne peut maintenir le rythme.

Il ne s'agit pas simplement d'apporter des améliorations à la technologie existante. Nous ne pouvons atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés en nous contentant d'améliorer la technologie existante. Les centrales de charbon actuelles et même les raffineries de gaz ne sont pas très efficaces. Presque toute l'énergie utilisée pour assurer leur fonctionnement s'évapore dans l'air sous forme de chaleur. Nous devons apporter des changements fondamentaux à la technologie et nous sommes sur le point de le faire.

Ces nouvelles centrales devront être exploitées sur une longue période. Je vois une courbe décroissante illustrant le déclin des technologies conventionnelles et la progression de la technologie de la gazéification. Nous découvrirons peut-être d'autres technologies qui ne nous permettront pas d'aller plus loin.

La durée de vie de tout le processus devra s'étaler non pas sur une période de 30 ans, mais bien sur une période de 40 ans. Il ne faut pas oublier que les Chinois et les Indiens construisent des centrales de ce type toutes les semaines, des centrales de la taille des installations de Genesee, et que ce sont nos compétiteurs sur les marchés mondiaux. Leurs problèmes environnementaux sont tels qu'ils n'ont pas le choix d'utiliser la meilleure technologie disponible. Ils ne peuvent plus rien rejeter dans l'atmosphère.

Le président : Nous n'avons pas besoin d'aller si loin. Regardez aux États-Unis. N'en ont-ils pas 155 en construction actuellement?

M. White : On estime qu'entre 120 et 160 centrales sont sur les tables à dessin, mais elles ne sont pas toutes en construction. Si nous examinons les statistiques de l'AIE pour les États-Unis, nous constatons une importante diminution du nombre de centrales au gaz et une énorme augmentation des centrales au charbon.

Le président : N'est-ce pas un pas en arrière sur le plan environnemental?

M. White : Pour ce qui est du gaz naturel, certains diront que nous devrions poser la question à savoir si nous devrions utiliser le gaz naturel pour faire de l'électricité à long terme, compte tenu qu'il faut construire ces centrales. Les gens qui travaillent dans le secteur gazier pensent que non, mais ceux qui oeuvrent dans le secteur du charbon diront qu'ils peuvent dire ce que coûtera le charbon dans 20 ans.

Le président : Nous avons beaucoup plus de charbon.

Mme Christie : Dans le domaine du développement technologique, nos sociétés canadiennes déploient énormément d'efforts, plus particulièrement dans l'Ouest, pour éliminer le mercure de ces systèmes et pour trouver de nouvelles solutions et de nouvelles technologies à plus long terme. Toutefois, que ce soit au chapitre des initiatives à court ou à long terme, nous sommes un très petit regroupement de sociétés. Il peut être périlleux de vouloir devancer les États- Unis, par exemple, où d'importantes sommes d'argent sont allouées à la R-D. Le travail qui y est effectué éclipse ce qui se fait au Canada. Nous devons faire attention de ne pas les devancer outre-mesure. Nous travaillons fort au Canada et nous contribuons à de nombreux travaux en cours aux États-Unis, mais à grande échelle, le Canada ne sera pas le chef de file ni le fer de lance de la technologie en Amérique du Nord. Nous devons garder à l'esprit qu'il ne faut pas trop devancer les États-Unis.

Le président : Je sais que des gens seraient déçus de vous entendre dire cela. Si le Canada présente une technologie attrayante, rien n'empêcherait quiconque de s'y intéresser et de la mettre en pratique.

Mme Christie : Je parle de l'établissement d'objectifs. Il y a bien sûr des sociétés canadienne qui travaillent fort et qui investissent énormément d'argent dans la R et D. Ce qui m'inquiète, ce sont les objectifs et l'établissement de ces objectifs que d'aucuns se sentiront tenus d'observer. Certains pensent que si nous établissons des objectifs, la technologie emboîtera le pas. Je crains que cela ne soit le cas au Canada. Aux États-Unis, le marché est si vaste qu'il est possible d'investir beaucoup d'argent dans la technologie. Pour ce qui est du Canada, toutefois, je ne sais pas si nos collègues de l'Ouest, notamment, pourront emboîter le pas si vous optez pour cette solution.

M. White : Je ne suis pas d'accord ici. Vous avez raison pour ce qui est de l'électricité. Nous ne construisons des centrales que tous les deux ou trois ans au Canada. La dernière que nous avons construite remonte à 2005, et avant celle-ci, nous en avions construite une dans les années 90. Nous n'avons pas le volume qui nous permette de jouer le rôle de chef de file dans ce domaine. Les Américains croient qu'ils peuvent perfectionner cette technologie, régler une partie des problèmes, l'exporter partout dans le monde et ainsi sauver la planète. Je pense que c'est ce qu'ils ont fait dans certains secteurs. Ils ont été innovateurs dans les technologies du nucléaire, notamment, et cetera.

Qu'essayons-nous de faire? Je pense que le Canada peut mener à bien le processus de gazéification qui est la base de cette technologie. C'est ce que nous ferons sous peu en Alberta. Je pense que cela sera très bénéfique pour le pays qui pourra ainsi se tailler une place dans ce domaine.

La société Peabody, la plus importante société productrice de charbon dans le monde, dit qu'elle produira du gaz naturel à partir du charbon — il pourra être transporté dans un pipeline de gaz naturel — ainsi que du carburant diesel; et la société General Electric dit qu'elle produira de l'électricité à partir du charbon. C'est ce qu'elles feront, mais elles ne pourront soutenir la concurrence avec l'énergie provenant de l'électricité ou du carburant diesel ou du gaz naturel. Nous pensons pouvoir rendre cette technologie compétitive avec le gaz naturel comme source d'hydrogène. Si nous faisons cela, nous aurons alors l'élément de base pour cette technologie. Avec le temps, cette technologie pourrait devenir l'industrie canadienne de l'électricité.

Le sénateur Cochrane : Combien de temps croyez-vous qu'il faudrait pour faire cela?

M. White : Nous avons commencé il y a quelques années. Nous avons prélevé des échantillons de charbon albertain et européen il y a un an et demi et nous les avons mis dans des feux de gaz pour nous assurer que nous étions sur la bonne voie. Nous avons constaté que nous l'étions. Notre société a formé un groupe de développement technologique bien rodé et parfaitement autonome qui se consacre exclusivement à cette tâche.

Si nous commençons aujourd'hui, il faudra trois ans ou plus avant d'obtenir un permis environnemental, et encore davantage pour obtenir un permis d'exploitation de mine de charbon. Nous avons le charbon près d'Edmonton. Nous avons 500 millions de tonnes de charbon et nous avons un immense marché à Fort Saskatchewan. Si nous faisons vite et si nous sommes en mesure de le faire, nous pensons que ce projet pourrait devenir réalité entre 2010 et 2012.

Le président : Pourrions-nous avoir du charbon propre, ainsi que l'a affirmé le premier ministre Klein d'ici 2015?

M. White : Nous pourrions avoir une bonne représentation avec une ou deux centrales qui marqueraient le coup d'envoi.

Le président : Rapidement, en tant que Canadiens et membres de ce comité, croyez-vous que des règlements seraient plus utiles, plus facilement applicables et qu'ils protégeraient mieux l'environnement que des mesures volontaires?

M. Nantais : Cela dépend de l'objectif que l'on cherche à atteindre. Je vais vous donner un exemple. Notre industrie a signé et participé à environ 14 ententes sur une base volontaire pour atteindre des objectifs qui auraient dans bien des cas pu faire l'objet de règlements. Les ententes sur une base volontaire fonctionnent bien lorsque tous les intervenants participent. Cela est absolument essentiel. Par l'entremise de mon association et celle de M. Adams, nous sommes en mesure d'obtenir la signature de tous les fabricants pour ces ententes volontaires. Si nous ne le faisons pas, le gouvernement serait parfaitement justifié de penser à d'autres solutions de rechange. Je suis contre l'idée de rejeter une entente volontaire du revers de la main simplement parce que nous pensons que cela ne marchera pas. Nous avons plusieurs exemples d'ententes qui ont donné de bons résultats. Ces ententes nous ont permis d'atteindre des objectifs sur le plan environnemental et en matière de sécurité que nous n'aurions peut-être pas été en mesure d'atteindre par voie de réglementation. Les ententes volontaires donnent parfois plus de marge de manœuvre aux industries qui peuvent s'ajuster lorsque des changements de technologie se produisent et à mesure que de nouvelles informations sont transmises sur l'environnement et sur les objectifs environnementaux que nous essayons d'atteindre. Les ententes volontaires ont encore leur place, mais il y a également place pour la réglementation. Il est parfois crucial de maintenir des règles de jeu équitables.

Le président : Vous avez mentionné des choses ont été réalisées dans le cadre d'ententes volontaires qui n'auraient pu être réalisées par voie de réglementation. Je ne veux pas que nous nous attardions outre mesure à cette question maintenant, mais pourriez-vous donner à notre greffier un bref aperçu de ce que vous avez réalisé dans le cadre de ces ententes?

M. Nantais : Je le ferai avec plaisir.

Mme Laurie-Lean : Une réglementation bien conçue peut être utile. Je ne pense pas qu'il faille faire un choix entre la réglementation et l'action volontaire, mais en même temps, une mauvaise réglementation peut ne rien donner et entraîner beaucoup de gaspillage et de dépenses, surtout s'il s'agit d'une réglementation conflictuelle, d'un dédoublement de règles ou si elle n'est pas appliquée. En revanche, nous voulons encourager l'action volontaire. Peu importe le contexte réglementaire, nous ne voulons pas créer une atmosphère de travail où l'industrie s'en tiendrait à la stricte conformité des dispositions de la loi et ne serait aucunement encouragée à dépasser ces exigences.

Je n'aimerais pas qu'on me demande de choisir entre l'une ou l'autre option.

M. White : L'avantage d'une bonne réglementation — une réglementation qui puisse être réalisée — c'est qu'elle permet à l'industrie d'aller de l'avant.

Le président : Il faut une réglementation qui inspire confiance aux investisseurs.

M. White : Oui, nous en avons été témoins. Nous avons vu l'inverse, bien sûr, en Ontario où il existe une politique anti-charbon, du moins en ce qui concerne les centrales énergétiques. Nous vous avons suggéré de nous dire ce que vous vouliez, d'élaborer les règlements que vous souhaitiez mettre en place, et l'industrie verra ce qu'elle peut faire.

Si les règlements sont stricts au point de paralyser nos processus, de nous empêcher d'agir ou de mettre fin à nos opérations sur une longue période, ils auront des effets négatifs qui auront de graves répercussions sur l'industrie. En revanche, je pense qu'une réglementation efficace et réalisable contribuerait à lui donner l'orientation que nous souhaitons qu'elle prenne. Et comme vous l'avez dit, elle inspirerait confiance aux investisseurs.

Si les gouvernements fédéral et provinciaux ne parviennent pas à s'entendre sur les chiffres et que ces mésententes occasionnent des délais d'approbation à n'en plus finir sur le plan environnemental, peu importe que nous adoptions ou non des règlements, nous aurons des problèmes d'approvisionnement qui pourraient également avoir de graves conséquences.

Mme Christie : L'un des éléments clés est de garder à l'esprit l'objectif que nous essayons d'atteindre. Il ne faut pas perdre cela de vue. Nous passons beaucoup de temps à rechercher l'outil idéal.

Si nous pouvons atteindre notre objectif, que ce soit au plan de la réduction des émissions de mercure ou quel qu'il soit, que ce soit par l'entremise d'actions volontaires ou réglementaires, je n'ai pas de préférence.

Je pense que les actions volontaires ont eu une très mauvaise publicité du fait que les gens pensent qui rien ne sera fait sur une base volontaire. Si nous examinons le bilan de certaines industries autour de cette table, notamment, nous constations que les actions volontaires ont donné de très bons résultats. Il y a cette solidarité et cette volonté de relever des défis derrière l'action volontaire qui offre de meilleures chances d'améliorer les choses pour l'industrie. L'action volontaire peut jouer un rôle vraiment important.

Les standards pancanadiens sont appliqués sur une base volontaire et je conseillerais aux membres du comité concernés de bien les examiner et de les appliquer dans leur secteur. Vous constaterez probablement dans la plupart des cas qu'ils sont devenus obligatoires aux termes des systèmes de réglementation de leurs provinces.

C'est l'élément clé à mon avis : ne pas perdre de vue cet objectif et l'atteindre à partir de l'un ou l'autre des instruments. Il y a de toute évidence place à des mesures réglementaires; cela facilite le maintien de règles de jeu équitables, ainsi qu'un membre l'a mentionné, et l'atteinte d'autres objectifs, mais il y a encore une place pour l'action volontaire. Il ne faudrait pas écarter cette possibilité.

M. Adams : Je ne veux pas répéter tout ce que M. Nantais a dis, mais j'appuis ses commentaires. Néanmoins, il faudrait peut-être accorder plus d'importance aux mécanismes volontaires en Amérique du Nord, là où les industries ont été intégrées. Les mécanismes volontaires ont permis à l'industrie canadienne de l'automobile d'atteindre des standards nationaux parmi les plus stricts au monde et ils ont été harmonisés aux standards américains. Il y aurait peut-être lieu d'accorder plus de place aux protocoles d'entente conclus sur une base volontaire et à d'autres d'approche de ce genre pour les industries intégrées.

Le président : Si nous voulions faire preuve de cynisme, nous pourrions dire que la plupart des industries respectent les standards sur une base volontaire, sous la menace d'autre chose ou parce qu'ils préfèrent telle autre entente.

Je souscris à la suggestion de Mme Christie de ramener la question au niveau des centrales. Je vais donc m'adresser à Mme Laurie-Lean.

La fonderie exploitée par Hudson Bay, à Flin Flon, est responsable du cinquième des émissions de mercure anthropiques au Canada, bien que la place qu'elle occupe dans l'ensemble de ce secteur soit modeste. Les standards canadiens n'ont guère donné de résultats dans ce cas. Cette fonderie a été ciblée, à raison ou à tort, mais il n'en demeure pas moins qu'elle remet en question la notion selon laquelle les standards pancanadiens donnent de bons résultats. Ou peut-être faut-il trancher cette part d'incurie qui entache la réputation des autres parties concernées?

Mme Laurie-Lean : Je ne suis pas certaine de ce que vous voulez dire. Cette société est assujettie à des règlements provinciaux et elle a pris énormément de mesures sur une base volontaire. J'ai lu le témoignage d'Anna Tilamn qui a signalé que la fonderie de la Baie d'Hudson est passée de 20 tonnes d'émissions à 1,5 tonne par année. Même si c'est encore beaucoup, elle a tout de même considérablement diminué ses émissions.

Je ne sais trop en ce qui a trait aux standards pancanadiens. Cette société est assujettie à l'avis relatif au plan de prévention de la pollution, aux termes de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement.

Le président : Elle est effectivement assujettie à ce plan et j'ai peut-être tort de prétende que les règlements récemment appliqués visaient plus précisément cette société. J'ai peut-être mal compris. Il me semble que ce plan visait précisément l'usine de Flin Flon. Est-ce que je me trompe?

Mme Laurie-Lean : Elles ont toutes été ciblées. En somme, c'est ainsi qu'il faut voir les choses, parce que l'avis relatif au plan de prévention de la pollution établit des objectifs précis pour chaque installation. Chacune devait réduire ses émissions de matières particulaires dans le SO2 à un niveau bien précis. C'est le facteur dont il faut tenir compte.

Pour ce qui est du mercure, je pense que les standards pancanadiens ont été considérés comme étant le facteur à prendre en considération. Il y a deux façons de voir cela. D'une part, nous ne sommes vraiment pas certains de la manière dont fonctionnent toux ces avis, ces plans et ces déclarations en matière de prévention de la pollution et, d'autre part, nous ne savons pas s'il s'agit vraiment d'un outil de réglementation ou si ce n'est que de la frime. Ils comportent un volet volontaire et un volet obligatoire.

Si les installations du Manitoba sont mentionnées, c'est en raison de l'endroit où elles se situent; elles n'ont pas de système de récupération du soufre, parce qu'elles ne génèrent pas d'acide. Certaines options visant à traiter les problèmes liés au mercure ne sont pas économiques ou sont techniquement irréalisables à cet endroit.

Les options sur le plan technique et économique pour ces deux usines du nord du Manitoba sont très différentes des autres usines canadiennes. On discute des différentes approches et de ce qu'il faut faire à cet égard. Je ne voudrais me lancer dans des affrontements personnels, mais il est évident que ces questions devront être débattues lors de la mise en œuvre de leur plan de prévention de la pollution prévue en novembre.

Le président : Par curiosité, vous avez parlé, madame Laurie-Lean et madame White, des dépoussiéreurs qui contiennent du charbon, et cetera, qui peut avoir accidentellement ou intentionnellement trempé dans le mercure. Que se passe-t-il avec le charbon, une fois qu'il a trempé dans le mercure, sachant que nous ne pouvons ni le détruire ni le créer? Que fait-on avec? L'enterre-t-on dans l'espoir qu'il ne refera pas surface?

M. White : Il existe deux processus. Nous pouvons construire une usine munie d'un dépoussiéreur humide. Si le mercure contient beaucoup de sels de mercure, le dépoussiéreur éliminera ces sels par dissolution. Il sera ensuite nettoyé et les déchets seront déversés dans un site d'enfouissement.

Le président : Comment procède-t-on? Déverse-t-on le mercure dans les sites d'enfouissement?

M. White : Effectivement, il est enfoui sous terre avec les résidus de cendres de l'usine. J'ai vu certains sites d'enfouissement précisément conçus pour éviter que ces cendres ne s'infiltrent dans le sol. Les sites ont des limites étanches entre la base du site d'enfouissement et les cendres.

Nous pourrions utiliser du charbon activé; cela ne se fait pas encore, mais des tests sont en cours. Par exemple, si les États-Unis adoptaient un règlement visant la réduction du mercure, les services d'utilité publique seraient tenus d'apporter rapidement des changements à leur système d'élimination des déchets, afin que l'industrie ait le temps de s'ajuster. Le processus d'injection de charbon activé en fin de cycle permet le captage de mercure, selon la quantité de charbon injecté. Ce processus est très coûteux et il présente des problèmes techniques. Le charbon activé est ensuite capté et déversé dans un site d'enfouissement. Le processus doit éliminer le mercure des émissions, le disposer dans quelque chose de beaucoup moins volumineux que les émissions et le stocker dans un endroit où il peut être maintenu sous contrôle sur de longues périodes.

Le président : J'espère que ce sont de très longues périodes.

M. White : Il est faux de dire que cela ne se produit pas naturellement. En fait, nous parlons de plus fortes concentrations dans un secteur particulier.

Le président : J'ai une autre question. Madame Christie, vous avez parlé de la non-fiabilité des systèmes de surveillance des émissions. Pouvons-nous envisager la mise au point de systèmes qui pourraient être utiles à votre industrie? Y a-t-il des efforts déployés en ce sens?

Mme Christie : Beaucoup de travaux sont effectués dans ce secteur aux États-Unis et au Canada. Deux ou trois sociétés ont déjà mis des unités de démonstration en place. Elles ont obtenu de bons résultats au tout début, mais il est très difficile d'en assurer la maintenance et elles finissent par ne plus être aussi fiables avec le temps. Nous espérons être en mesure d'accroître leur fiabilité, mais nous ne prévoyons pas être en mesure de le faire avant deux ou trois ans. Malgré la quantité d'efforts déployés en ce sens, nous ne savons pas si nous parviendrons aux résultats souhaités d'ici 2010. Ce ne sera peut-être pas avant 2012 que nous aurons développé des unités fiables à long terme.

Le président : Merci. Les membres du comité ont peut-être des questions additionnelles à ce sujet ou sur certains autres aspects de notre étude de la LCPE. J'espère que vous nous permettrez de vous transmettre ces questions à l'écrit. Si vous souhaitez ajouter quoi que ce soit à votre témoignage d'aujourd'hui, je vous demanderais de faire parvenir l'information au greffier du comité.

La séance est levée.


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