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Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule 8 - Témoignages du 2 novembre 2006


OTTAWA, le jeudi 2 novembre 2006

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui à 8 h 37 pour procéder à l'examen de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999, ch. 33) conformément à l'article 343(1) de ladite loi.

Le sénateur Ethel M. Cochrane (vice-présidente) occupe le fauteuil.

La vice-présidente : J'aimerais d'abord m'excuser au nom du président, qui ne peut être ici ce matin en raison d'une réunion imprévue. Je suis la vice-présidente et je remplace le président ce matin.

J'aimerais remercier de leur présence les sénateurs et tout particulièrement deux témoins, M. James Riordan et M. Steve Clarkson.

Les deux témoins n'en sont pas à leur première présence parmi nous et nous avons dû quitter la pièce parce qu'un autre comité l'avait réservée. M. Riordan et M. Clarkson, nous vous remercions d'être revenus. Je sais que votre visite sera bénéfique.

Vous nous avez fait une présentation la dernière fois, mais vous avez peut-être des éléments à ajouter.

James Riordan, directeur exécutif, Bureau national de la prévention de la pollution, Environnement Canada : Comme vous l'avez dit, nous sommes venus ici il y a environ une semaine pour faire une brève présentation de la diminution des émissions de mercure depuis les années 1970 et des travaux continus que nous menons au sujet des principales sources de ces émissions. Nous avons remis une présentation soulignant les aspects pour lesquels une réglementation existe en vertu d'une loi du Parlement, y compris la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, et nous avons répondu à quelques questions à ce sujet. Lors des discussions, il est devenu évident que les ministères pourraient fournir davantage de renseignements au sujet des outils et instruments utilisés.

Ce matin, nous avons remis au greffier un document concernant le Registre environnemental de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, qui définit notamment les termes règlement, standard pancanadien et entente sur la performance environnementale, ou initiative volontaire. Le greffier a accepté de le mettre à la disposition des sénateurs après la réunion. Il s'agit de renseignements utiles sur le fonctionnement des différents outils et instruments de contrôle du mercure et d'autres substances.

La vice-présidente : Il s'agit de renseignements complémentaires. Ils ne sont pas nécessaires pour l'instant mais pourront être obtenus ultérieurement.

M. Riordan : C'est exact. Je sais que depuis la dernière fois, vous avez reçu le témoignage de la part de personnes issues de différents secteurs de la société, et nous sommes prêts à répondre aux questions que les sénateurs ou vous- même souhaitez poser.

La vice-présidente : Nous avons rencontré deux groupes mardi; des représentants du Sierra Legal Defence Fund et de Pollution Watch. À la page 2 de votre compte rendu précédent, vous indiquez la réduction des émissions de mercure observée au Canada depuis les années 1970. Je fais référence à ce graphique.

Au cours des témoignages qu'ils ont rendus au comité mardi, les témoins ont mentionné que ces réductions ne sont pas le résultat de l'entrée en vigueur de la LCPE ni d'une mesure prise spécifiquement par le Canada en lien avec les émissions de mercure. Je cite :

Les réductions que vous voyez, à partir des années 1970, découlent de la fermeture de fabriques de chlore et de règlements pris à cette époque, bien avant la LCPE. Les réductions supplémentaires qui ont marqué les années 1990 découlent d'efforts pour réduire les émissions d'anhydride sulfureux et de dioxyde d'azote, substances responsables des pluies acides; cela a occasionné une réduction parallèle des émissions de mercure, mais ce n'est pas imputable à des mesures propres au mercure.

Êtes-vous d'accord avec ces affirmations?

M. Riordan : J'ai écouté la session en diffusion simultanée de mon bureau, et j'ai entendu cela.

Après ce témoignage, le président a montré cela et affirmé que c'est ce que le gouvernement a présenté. Qui a raison et qui a tort? Selon moi il tapait dans le mille et le témoin avait dit que nous avions tous deux raisons.

En tant que fonctionnaires, nous sommes soumis à un code de pratique selon lequel nous devons présenter des faits, et non des opinions. Voici un fait. Voici la mesure dans laquelle les émissions de mercure dans l'environnement ont diminué au Canada au cours des 30 dernières années, voire plus. Ces diminutions sont en bonne partie attribuables aux règles régissant les fabriques de chlore, qui ont été adoptées avant la Loi canadienne sur la protection de l'environnement et qui ont été intégrées à la Loi. D'autres instruments utilisés en vertu de la LCPE ont également eu une incidence à ce chapitre.

Est-ce si important de savoir si c'est un résultat de la LCPE ou non? Cela découle en partie de la LCPE et en partie d'autres facteurs, mais ce qui importe, c'est que les émissions ont diminué de plus de 90 p. 100 ces 30 dernières années.

La Loi canadienne sur la protection de l'environnement est un filet de sécurité. Si d'autres lois du Parlement, comme la Loi sur les produits dangereux, administrée par le ministère de la Santé, ou la Loi sur les pêches, ont également contribué à réduire les émissions de mercure, c'est que cela faisait partie du programme législatif du gouvernement. Ainsi, lorsqu'un membre d'un organisme non gouvernemental dit que les deux parties ont raison, nous présentons des faits. Les émissions ont diminué à la suite de l'application de différentes lois du gouvernement fédéral et d'autres ordres de gouvernement, et c'est en partie attribuable à la LCPE.

En ce qui concerne le graphique que j'ai présenté la semaine dernière, il n'indique en aucun cas que les réductions sont attribuables à la LCPE, mais qu'il s'agit du résultat d'efforts menés au cours des 30 dernières années. Je termine en disant que les réductions sont en partie attribuables à la LCPE et en partie attribuables à d'autres facteurs, mais que ce qui importe de noter, c'est la vaste réduction des émissions de mercure au Canada.

La vice-présidente : Pouvez-vous nous dire s'il existe des données ou d'autres renseignements qui permettraient de dire que la diminution des émissions de mercure se poursuivra? Avez-vous des données à nous présenter?

M. Riordan : Les réductions se poursuivent, particulièrement à mesure que de nouvelles dispositions législatives et de nouvelles mesures sont prises. Il y a quelques semaines, des membres du Conseil canadien des ministres de l'Environnement, dont notre ministre fait partie, ont annoncé qu'ils avaient convenu d'un standard pancanadien pour les centrales électriques alimentées au charbon, dont l'objectif est de réduire les émissions de mercure de plus de 50 p. 100 au cours des prochaines années. Voilà qui contribuera à la baisse des émissions de mercure dans l'environnement. Il ne s'agit pas de données, mais bien d'objectifs que les gouvernements ont convenu de poursuivre.

La vice-présidente : Nos centrales alimentées au charbon seront plus propres et plus efficaces, et elles se comporteront bien, en bonnes citoyennes, n'est-ce pas?

M. Riordan : C'est ce dont les ministres ont convenu publiquement. Ils ont pris cet engagement, donc je présume que ce sera un des résultats.

Le sénateur Carney : Nous avons eu une réunion d'urgence du caucus concernant un événement qui a fait les manchettes pendant au moins quelques jours, c'est pourquoi je n'ai pu assister à votre présentation. Je suis au Parlement depuis si longtemps que je me souviens de l'adoption de la LCPE.

Je ne sais pas si vous avez déjà répondu à cette question, car, comme je l'ai dit, je n'étais pas présent au début de la réunion. Je sais que la LCPE est très complexe, compliquée. Il est probablement plus facile pour vous que pour nous de la comprendre. Sur le plan juridique, y a-t-il quoi que ce soit qui empêche le gouvernement de prendre rapidement des mesures pour réduire les émissions d'une substance qui figure déjà à la liste des substances toxiques établies par la LCPE, comme le mercure?

M. Riordan : Nous avons abordé cette question. Rien dans la loi ne nous empêche d'intervenir. Ces dernières années, les gouvernements ont axé leurs efforts sur les principales sources des émissions, passant d'une grande source à une autre. Lors de notre présentation, nous avons indiqué que les produits contenant du mercure, comme les thermomètres, les thermostats et les commutateurs, constituaient la prochaine grande source à laquelle nous nous attaquerons.

En juin, durant la Semaine de l'environnement, la ministre de l'Environnement s'est engagée publiquement à annoncer à l'automne une mesure pour s'attaquer au problème du mercure dans les commutateurs des automobiles ainsi qu'une stratégie concernant les produits contenant du mercure; ces deux projets ont été mis en train.

Le sénateur Carney : Ils peuvent être lancés en vertu de la LCPE?

M. Riordan : Oui. L'article 93 de la LCPE donne aux ministres l'autorité de prendre des mesures concernant la présence de substances toxiques dans les produits. Selon une idée fausse très répandue, la LCPE ne vise pas la présence de substances toxiques dans les produits. C'est malheureux, parce que nous nous penchons sur ce problème et nous continuerons de le faire en vertu de la Loi.

Le sénateur Carney : Y a-t-il des motifs de s'inquiéter au sujet des produits de consommation comme les thermomètres? Y a-t-il des données qui établissent que l'utilisation d'un thermomètre à mercure est néfaste pour la santé?

M. Riordan : Lorsqu'il existe des solutions de rechange, comme dans le cas des thermomètres, pourquoi utiliser un produit qui contient du mercure alors qu'on peut utiliser un autre produit aussi efficace? Voilà comment on devrait aborder la question des produits contenant du mercure.

La dernière fois, nous avons parlé des petits commutateurs qui permettent d'allumer ou d'éteindre la lumière dans le coffre arrière des automobiles, qui contiennent du mercure. À la fin de leur vie utile, les automobiles sont compressées puis acheminées vers une aciérie, qui recyclera le métal pour en faire de l'acier. Par le fait même, du mercure est rejeté dans l'atmosphère.

Il existe depuis plusieurs années une solution de rechange bien connue des constructeurs automobiles du monde entier et qui consiste à remplacer le mercure par un roulement à bille permettant d'allumer et d'éteindre efficacement la lumière. Dans les années 1990, un certain nombre de constructeurs automobiles de l'étranger ont décidé de ne plus recourir au mercure, et vers 2003, les constructeurs nord-américains ont fait de même. Il demeure toutefois tout un stock, et le ministère s'est engagé à s'en occuper. On estime que ce processus nous permettrait de récupérer et de retirer du flux de déchets de six à dix tonnes de mercure au cours des dix prochaines années.

Steve Clarkson, directeur, Bureau d'évaluation de risque et d'impact, Santé Canada : Je travaille à Santé Canada, et je ne veux pas qu'il persiste l'idée selon laquelle l'utilisation d'un thermomètre à mercure pour prendre la température présente en soi un risque pour l'humain. Un risque se présente, bien entendu, lorsque le thermomètre se brise, que du mercure s'en échappe, et que ce mercure n'est pas adéquatement manipulé ou jeté. Je ne crois pas que vous pensiez ainsi, mais je le mentionne pour que cela soit clair.

Le sénateur Carney : J'ai un intérêt particulier pour cette question parce que l'un des secrets les plus lourds et les plus sombres du Canada est qu'une lampe à mercure orne un phare de la côte Ouest de l'île de Vancouver. Elle n'est pas utilisée, mais elle s'y trouve toujours. Je m'opposerai à toute tentative de la récupérer de la part de Santé Canada ou de qui que ce soit d'autre.

Selon une idée très répandue, tout ce qui touche au mercure est mauvais pour la santé, toxique et mauvais pour nous. Je suis heureux que vous précisiez que l'utilisation d'un thermomètre à mercure est sans danger.

J'ai une dernière question, à laquelle une réponse a peut-être déjà été fournie. Étant donné qu'il s'agit de l'examen d'une loi existante, y a-t-il des éléments qui n'ont pas été couverts et sur lesquels vous voudriez que l'on se penche?

M. Riordan : C'est également un point qui avait été soulevé à la dernière session. Il est intéressant de souligner que lorsque d'autres secteurs de la société ont été consultés par le comité, aucune lacune n'a été mentionnée. Ils ont au contraire dit en substance qu'ils ne se servaient pas de la loi autant qu'ils le pourraient. C'est une opinion qui a été embrassée par des organismes non gouvernementaux. Personne ne semble dire qu'il y a des lacunes dans la loi.

À la dernière session, notre position était qu'il s'agit d'une nouvelle loi comprenant de multiples instruments dont les ministères peuvent se servir à des fins de protection de la santé humaine et de l'environnement. Nous utilisons ces outils et ces instruments et nous le faisons de mieux en mieux. Tous semblent d'avis que la loi n'est pas lacunaire, mais qu'elle pourrait être utilisée davantage.

Le sénateur Carney : Très peu de mesures législatives peuvent résister aussi longtemps à l'épreuve du temps sans que des modifications y soient apportées, mais peut-être est-ce une obsession de la part des législateurs de toujours vouloir améliorer les lois. La loi peut-elle être simplifiée, ou y aurait-il des façons de la rendre plus utile?

M. Riordan : Je me sers de la loi chaque jour et elle m'est très utile. Je suis convaincu que des conseils émaneront du gouvernement ou d'ailleurs quant aux aspects pour lesquels la loi pourrait être plus utile, mais en tant qu'utilisateur de la Loi, je peux dire qu'on y trouve les automatismes régulateurs requis et les pouvoirs que peuvent exercer les ministres. Il y a longtemps que les ministères n'avaient pas collaboré aussi étroitement.

Le sénateur Carney : C'est tout à l'honneur des rédacteurs.

M. Riordan : C'est la loi que le Parlement nous a donnée.

La vice-présidente : Oui, en 2000.

Le sénateur Carney : Il a fallu dix ans pour obtenir la version finale.

La vice-présidente : C'est un grand ouvrage, un important document. Parfois, nous parlons littéralement d'un « ouvrage ».

Le sénateur Adams : Monsieur Clarkson, vous travaillez à Santé Canada. Les témoins du Sierra Legal Defence Fund ont affirmé que les Inuits de l'Arctique ont un taux de mercure dans leur sang pouvant aller jusqu'à 6 à 8 p. 100. On dit maintenant qu'il est inférieur de 5 ou 10 p. 100 dans le reste du Canada. Je sais que vous n'êtes pas un scientifique, vous travaillez à Santé Canada. Plus de personnes sont touchées par le mercure dans l'Arctique parce que le mercure descend quand la température baisse. Pourquoi croyez-vous que les taux de mercure sont si élevés dans le Nord?

M. Clarkson : Sénateur, il y a un dépôt de mercure dans le Nord en raison du climat. Comme je l'ai dit la dernière fois que je suis venu ici, il y a le Programme de lutte contre les contaminants dans le Nord. C'est un programme auquel participent différents ministères, y compris celui de M. Riordan, mais aussi Affaires indiennes et du Nord Canada, qui a déployé des efforts pour mesurer l'incidence des dépôts de différents contaminants, dont le mercure.

Les quantités de mercure ingérées par un certain segment de la population du Nord sont source d'inquiétudes. Ces personnes que nous avons mentionnées sont principalement des personnes qui consomment les aliments de leur région, les mammifères du Nord; pas vraiment le poisson parce qu'il existe apparemment des espèces de poisson qui présentent de faibles taux de mercure, comme l'omble chevalier, mais les bélugas et les phoques présentent des taux de mercure beaucoup plus élevés en raison du phénomène de bioaccumulation observé chez ces espèces.

À la lumière de nos études, les taux de mercure dans le sang semblent plus élevés que les seuils établis dans certains segments de la population. Certaines personnes ingèrent plus de mercure que la dose journalière admissible que nous avons définie. Des tentatives ont été faites pour que les personnes les plus sensibles — par exemple, les enfants et les femmes enceintes — puissent bénéficier d'un programme qui a été mis sur pied pour faire la promotion des aliments qui contiennent peu de mercure; pendant la grossesse, par exemple.

Le sénateur Adams : Les mammifères sont touchés parce que le mercure s'accumule dans l'eau et sur la terre. Qu'est- ce qui se passe? Les mammifères, comme les bélugas, sont automatiquement contaminés par le mercure en raison de la quantité de toxines qui les entoure. Les mammifères doivent se nourrir, eux aussi, et leur nourriture contient du mercure. Ainsi, les aliments du pays que nous mangeons contiennent du mercure provenant de différentes sources. Comme vous l'avez dit, les ombles chevaliers n'affichent pas des taux de mercure aussi élevés, peut-être parce qu'ils s'alimentent dans la mer l'été seulement. Quoi qu'il en soit, les ombles chevaliers sont aussi touchés par le mercure.

M. Clarkson : Je ne suis pas certain d'avoir bien compris votre question.

Le sénateur Adams : Tous les aliments de la région, tous les mammifères que nous consommons contiennent du mercure. Lorsque nous les mangeons, nous ingérons du mercure. Comme certains témoins l'ont mentionné, le mercure flotte sur l'eau jusqu'à la terre ferme, et les caribous et d'autres mammifères mangent les végétaux des marais. Voilà comment nous sommes touchés. Plus de 60 p. 100 du mercure se trouve dans l'Arctique. Nous voulons en savoir plus. Les témoins affirment que cela n'affecte pas notre organisme outre mesure. Il semble que les personnes auront du mercure dans leur sang peu importe l'endroit où elles vivent.

M. Clarkson : Personne ne veut avoir du mercure dans son sang. C'est malheureusement une conséquence de vivre dans un pays industrialisé, mais ce qui est inquiétant, c'est que certains taux sont trop élevés. Il y a des risques d'effets neurotoxiques pouvant affecter l'apprentissage et le développement, particulièrement chez les enfants. Le dépôt présent dans le Nord provient principalement de sources qui ne sont pas propres à cette région.

La dernière fois, nous avons parlé des efforts entrepris pour réduire les émissions de mercure au Canada, et des discussions bilatérales menées avec d'autres pays pour tenter de réduire les émissions de mercure provenant de l'étranger. M. Riordan a mentionné des discussions avec la Chine. Il existe un protocole international établi par la Commission économique des Nations Unies pour l'Europe concernant le transport à grande distance des polluants atmosphériques. Un certain nombre de sous-protocoles existent, dont un qui concerne les métaux. Trois métaux sont ciblés en particulier, soit le plomb, le mercure et le cadmium.

Je ne suis pas certain de répondre à votre question, mais il y a apparemment de faibles taux de mercure dans le caribou et, comme je l'ai mentionné plus tôt, dans l'omble chevalier. Les fortes concentrations observées sont causées par la forte consommation de certains aliments, comme la viande de béluga et de phoque, par une partie de la population.

M. Riordan : La dernière fois où nous étions ici, certains de vos collègues ont soulevé des questions au sujet du diagramme de la page 7, qui indique la provenance, en pourcentage, du mercure se trouvant au Canada. Un de vos collègues a demandé quelles étaient les implications des données du diagramme pour le Nord, sachant que 17 p. 100 du mercure provient du Canada, et ainsi de suite. Nous nous sommes penchés sur les résultats et leur lien avec le Nord. Je peux remettre les informations au greffier.

Nous ne nous sommes pas seulement penchés sur le Nord du Canada, mais sur l'ensemble de l'Arctique. Dans l'Arctique, 49 p. 100 du mercure provient de l'Asie, 40 p. 100 provient de l'Europe, seulement 3 p. 100 provient du Canada, et 8 p. 100 provient des États-Unis. Voilà qui indique que nous devons poursuivre nos efforts au Canada pour réduire nos émissions de mercure dans l'environnement, mais que nous devons aussi agir auprès des autres pays, comme M. Clarkson l'a mentionné. Les Nations Unies sont un véhicule pour le faire; des accords bilatéraux pourraient aussi être conclus. Un travail concerté avec la Chine et l'Union européenne pour contrôler les émissions de mercure provenant des différentes sources serait bénéfique pour l'Arctique.

Nous avons promis que nous fournirions ces informations. J'espère qu'elles vous seront utiles.

C'est en dehors du champ d'application de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Il s'agit d'autres moyens à la disposition des gouvernements. La LCPE s'applique à l'intérieur des frontières canadiennes. D'autres instruments ont été utilisés pour traiter avec la Chine et l'Europe au sujet des émissions de mercure.

Le sénateur Adams : Lorsque nous travaillions à l'élaboration de la LCPE, j'ai dit à Allan Rock et à David Anderson que tous les ans ou tous les deux ans, des tests de laboratoire devraient être effectués sur les mammifères faisant partie de l'alimentation dans le Nord. Dans le Sud, l'Agence canadienne d'inspection des aliments effectue des tests sur le bœuf, le porc et le poisson. Nous voulons la même chose. Nous nous rendons dans la nature presque toutes les fins de semaine. Nous n'avons pas de supermarchés comme vous avez dans le Sud; nous allons nous-mêmes chercher notre nourriture.

Le mercure se trouve en certaine quantité dans les aliments provenant du Canada et a une incidence néfaste sur ces aliments. Dans l'avenir, c'est nous qui en souffrirons. Qu'est-ce que cela nous fait?

M. Clarkson : Je ne sais pas, je peux dire que des parties du ministère, où je ne travaille pas, se soucient de la question. Au sein du gouvernement, nous travaillons à trouver des solutions afin que l'on puisse un jour consommer des aliments provenant du pays sans avoir à se soucier du mercure. Malheureusement, un grand nombre d'années séparent les actions des résultats.

Le sénateur Adams : Autrefois, nous les habitants de l'Arctique disions que notre air est pur. Aujourd'hui, nous constatons que l'air du Nord est affecté par les personnes du Sud.

M. Clarkson : M. Riordan m'a mentionné que les taux de consommation avaient été étudiés et nous croyons, à l'instar des gouvernements des territoires, que nous n'essayons pas de dissuader les personnes de consommer les produits de la terre. Nous essayons de les informer du fait que certains de ces produits affichent des taux de mercure élevés et qu'ils devraient peut-être diversifier leur alimentation, manger plus de viande de caribou et moins de viande de phoque, par exemple. Les femmes enceintes devraient faire particulièrement attention. Je crois que vous vouliez nous faire apprécier certains points. Ces aliments sont importants sur les plans socioéconomique, spirituel et traditionnel. Personne n'a tenté de dissuader complètement la population de consommer ces aliments, mais il faut connaître les risques. Le mercure n'est pas le seul contaminant. Il y en a d'autres, malheureusement. L'idée est de sensibiliser la population. Différentes parties du ministère font la surveillance des aliments du pays pour que nous puissions fournir des données à ce sujet.

Le sénateur Carney : Je voulais apporter des précisions en réponse aux questions du sénateur Adams.

Selon le document de travail que nous avons, le mercure présent dans l'atmosphère au Canada provient de sources étrangères de façon écrasante; 47 p. 100 provient d'Asie.

Je reviens tout juste du Sud de la Chine, où la pollution de l'air et de l'eau est dramatique. Il est difficile de respirer dans cette région, et les Chinois affirment que d'importants efforts seront déployés dans le cadre de leur programme quinquennal afin de nettoyer les zones des deltas. Pourriez-vous nous donner des renseignements supplémentaires au sujet des initiatives dans le cadre desquelles le gouvernement du Canada collabore avec d'autres pays pour réduire les émissions de sources non visées par la LCPE? Nous aimerions obtenir des renseignements clairs et précis concernant les pays participants, les questions abordées et les instruments utilisés pour établir les relations bilatérales en matière d'environnement. Par ailleurs, pourriez-vous nous dire quelles sont exactement les voies de l'ONU et les autres initiatives qui permettraient de réduire les émissions dans le monde et quels sont les pays participants, de sorte que nous puissions faire un suivi auprès d'eux?

M. Riordan : Nous le pouvons. Je ne tenterai pas de tous les nommer, mais les Nations Unies font partie des entités. Cette question ne concerne pas seulement le Canada, mais la terre entière.

Le sénateur Carney : Les choses avancent très lentement. Si vous dites que le Canada participe à différentes initiatives, nous aimerions savoir quelles sont les avenues exactes qui s'offrent à nous pour collaborer avec des pays asiatiques comme la Chine pour réduire la présence de mercure et d'autres polluants dans l'atmosphère, sans que cela prennent autant d'années qu'il en faudrait si nous passions par les Nations Unies.

M. Riordan : Nous pouvons donner une réponse par écrit, car il y aurait des renseignements détaillés.

La vice-présidente : Oui, et remettez-la au greffier, avec le premier document que vous avez mentionné.

M. Riordan : Il y a des voies officielles et des voies non officielles. Je rencontre cet après-midi 40 représentants de la Chine au sujet de différentes questions, dont celle du mercure. Ils souhaitent réellement comprendre le fonctionnement des mesures législatives comme la LCPE. Nous l'avons fait dans différents ministères du gouvernement. Personnellement, j'ai l'impression de rencontrer toute la population chinoise, 20 personnes à la fois.

Le sénateur Carney : C'est bien.

M. Riordan : C'est bien. L'agence chinoise en matière d'environnement a même traduit certaines parties de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement en vue de les intégrer aux lois chinoises. Il y a les longs processus entrepris dans le cadre des Nations Unies, les processus bilatéraux officiels, et puis il y a des processus informels, qui sont continus.

Ces personnes sont venues ici pour rencontrer des représentants de l'Université d'Ottawa, et elles ont demandé à passer du temps avec nous. Nous disons toujours oui, parce qu'elles représentent la force motrice de l'économie mondiale et qu'elles peuvent tirer des leçons de notre expérience.

Le sénateur Carney : Voilà qui est très encourageant. L'Agence canadienne de développement international, l'ACDI, travaille également sur la question. Je ne sais pas s'il est de votre ressort de nous renseigner au sujet des initiatives de l'ACDI, mais la partie la plus importante de notre relation avec la Chine est probablement justement ce genre d'échange sur les plans législatif et technologique, en dehors des voies officielles. Je suis très heureux de savoir que c'est ce que vous faites.

La vice-présidente : Nous le sommes aussi. C'est pourquoi encore aujourd'hui votre présence est importante. Elle est importante parce les représentants de Pollution Watch étaient également préoccupés par la question. Ils ont dit que la Chine s'intéressait à nos façons de faire, peut-être peut-elle faire la même chose. C'est important pour les affaires mondiales.

Le sénateur Tardif : Certaines personnes du groupe nous ont dit qu'en ce qui concerne la LCPE, le problème découle en bonne partie du fait qu'elle repose grandement sur des ententes volontaires plutôt que sur des ententes prescrites par règlement.

Elles avaient l'impression que la LCPE serait beaucoup plus efficace si on recourait davantage à la réglementation, particulièrement une réglementation souple. Qu'en pensez-vous?

M. Riordan : Au cours de l'examen de la LCPE effectué par le Parlement à la fin des années 1990, des discussions ont eu lieu devant le comité parlementaire alors dirigé par Charles Caccia, député. Il était inflexible dans sa conviction que les initiatives volontaires ne devaient pas faire l'objet de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. C'est ce qui en a résulté. La Loi ne vise pas les initiatives volontaires et n'y fait pas référence. Certains malentendus circulent quant aux actions permises. La Loi mentionne les règlements, les plans d'urgence environnementale, les plans de prévention de la pollution et les codes de pratique, entre autres, mais ne fait pas spécifiquement référence aux initiatives volontaires. On ne trouve pas ces mots dans la Loi canadienne sur la protection de l'environnement.

Il existe de nombreux exemples de cas où des initiatives volontaires poursuivent des objectifs allant dans le sens des mesures prises en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Au fil des ans, nous avons eu recours à des protocoles d'entente que nous appelions parfois « ententes sur la performance environnementale ». Il était considéré que ces ententes pouvaient — je dis bien pouvaient — donner des résultats plus rapidement et à moindre coût par rapport aux mesures de réglementation officielles.

En 1999, le commissaire à l'environnement et au développement durable, qui relève du vérificateur général, a procédé à un examen de nos programmes concernant les substances toxiques et a dit en substance que nous avions recours aux initiatives volontaires, mais qu'il ne semblait pas y avoir de critères définis à ce sujet. Il s'est demandé comment le public pouvait-il savoir s'il existait des règles de fonctionnement pour ces initiatives volontaires? Le gouvernement a été contraint de définir ces règles.

Je présente une politique-cadre relative aux ententes sur la performance environnementale qui définit les critères et principes établissant quand le ministre de l'Environnement devrait ou ne devrait pas conclure une entente volontaire. Elle concerne l'établissement d'objectifs clairs, la participation du public et l'examen des résultats, entre autres, conformément aux recommandations du commissaire à l'environnement et au développement durable. Nous avons des directives et des critères à suivre lorsque nous concluons des ententes volontaires. Voilà quelle serait ma première réponse au sujet des ententes volontaires.

Nous utilisons différents instruments et outils d'application de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. C'est la raison pour laquelle le document que j'ai mentionné plus tôt, que j'ai remis au greffier, est important pour vous; vous pouvez ainsi savoir quels outils sont prévus par la LCPE et quels outils ne le sont pas, comme les standards pancanadiens. Quelques témoins en ont parlé.

Les standards pancanadiens sont intéressants, parce qu'il s'agit d'ententes consensuelles entre les ministères de l'Environnement du pays. Par exemple, l'électricité est de compétence à la fois fédérale et provinciale. Nous devons composer avec des installations appartenant aux gouvernements des provinces. Le gouvernement a décidé qu'il serait plus efficace que tous les ministres de l'Environnement conviennent des mesures de protection de l'environnement à adopter en ce qui concerne les centrales au charbon. Il existe de nombreux autres standards pancanadiens. On s'attend à ce qu'il soit plus efficace de procéder ainsi que d'avoir une réglementation fédérale pour chacune des installations du pays, mais cela n'empêche en rien le ministre d'adopter un règlement dans l'avenir. De fait, les centrales au charbon figurent actuellement au plan de réglementation du ministère.

Souvent, lorsqu'une initiative volontaire est adoptée, la réglementation fournit aussi un filet de sécurité. Dans le cadre d'une initiative volontaire, on dira par exemple qu'on veut, ou que l'industrie veut prendre telle ou telle mesure, et que le gouvernement a l'intention d'adopter un règlement en la matière ultérieurement. Nous y avons eu recours récemment concernant les véhicules hors route, pour lesquels le gouvernement a clairement fait connaître ses intentions. Le gouvernement, nous voulions adopter un certain standard en vigueur aux États-Unis. Comme nous savions qu'il faudrait trois ans environ pour qu'un règlement soit adopté, nous avons conclu une entente avec les fabricants des véhicules hors route en vue de l'adoption du standard américain, tout en sachant qu'il faudrait quelques années pour y parvenir. La solution ne consiste pas à ne rien faire et à attendre qu'un règlement soit adopté. Dans ce cas, l'industrie a officiellement accepté d'aller de l'avant et d'adopter le standard pendant que nous élaborions le règlement.

Je ne crois pas que le gouvernement veut ou peut tout réglementer, ni qu'il doit le faire. Cependant, je crois que le gouvernement doit dire clairement ce qu'il veut faire : il veut protéger l'environnement contre les émissions de mercure, et vous pouvez constater que c'est ce qui se produit dans les faits. Lorsqu'il y a lieu d'avoir recours à la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, nous y avons recours et nous continuerons d'y avoir recours. Sinon, lorsque d'autres lois du Parlement s'appliquent, qu'il s'agisse de lois relevant de Santé Canada ou de la Loi sur les pêches, alors la LCPE agit comme filet de sécurité. Toutefois, quand ces lois ne s'appliquent pas, la LCPE peut entrer en jeu.

Tomber dans les extrêmes n'est pas toujours la stratégie la plus efficace. Dans un monde idéal, nous pourrions tout réglementer, n'est-ce pas? Ce serait idéal pour certains. Nous aurions à appliquer tous les règlements et faire rapport sur chacun d'eux. Si nous pouvons obtenir les mêmes résultats au moyen d'un code de pratique, d'un standard pancanadien ou d'une initiative volontaire qui fonctionne, qui fait l'objet d'une surveillance et de rapports publics, c'est une solution que les gouvernements peuvent explorer et adopter. Lorsque, au terme d'un examen, le commissaire à l'environnement et au développement durable dit en substance « voici ce que vous faites; peut-être est-ce une bonne idée, mais peut-être devriez-vous adopter des critères et des directives pour mettre en œuvre ces mesures », le gouvernement répond « voici les directives et le code de pratique que nous suivons lorsque nous menons ce genre d'initiatives non prescrites par règlement ».

Le sénateur Tardif : Merci pour cette réponse détaillée. Vous dites « si nous pouvons obtenir les mêmes résultats ». La question est la suivante : dans les faits, obtenons-nous les résultats souhaités? De nombreux groupes qui se sont présentés nous ont dit que du progrès avait été fait, mais que les résultats ne sont pas satisfaisants.

M. Riordan : Je peux vous donner un exemple. Nous avons conclu un accord volontaire avec les fabricants de bois imprégné sous pression. Soixante-cinq entreprises de partout au Canada produisent du bois imprégné sous pression. Notre but était de rendre les méthodes de manutention plus sûres et la gestion, plus sécuritaire, et de réduire les émissions. Soixante des 65 entreprises se conformaient volontairement au code de pratique, et cinq ne s'y pliaient pas. En conséquence, nous avons eu recours à une mesure législative pour amener ces cinq entreprises à observer le code. Nous signifions ainsi à l'industrie que si ses membres sont disposés à réaliser un objectif de leur plein gré, tant mieux; sinon, nous devons passer à l'étape suivante, c'est-à-dire entreprendre une démarche législative en vertu de la LCPE.

L'autre solution consiste à créer un règlement, ce qui se trouve à pénaliser l'ensemble des 65 entreprises, car l'application d'un règlement ne peut pas être limitée à seulement cinq d'entre elles — c'est tout le secteur qui se trouve visé. Dans ce cas-ci, nous avons réussi à amener le secteur à établir un standard et avons agi sur les retardataires au moyen d'un instrument législatif élaboré en vertu de la LCPE. Les solutions dépendent à la fois de la substance et du secteur. Une mesure efficace peut porter fruit. Si elle ne donne pas les résultats escomptés, la réglementation s'avère une meilleure option.

Le sénateur Tardif : Je sais que les standards pancanadiens sont aussi très complexes, car ils sont issus de négociations entre le gouvernement fédéral et les provinces, et doivent tenir compte des intérêts des nombreuses provinces. Certains de ces intérêts n'ont pas nécessairement un lien avec l'environnement, mais sont plutôt de nature économique ou sociale; tous ces facteurs doivent être pris en considération.

Il se pourrait que l'élaboration de standards pancanadiens repose sur le plus petit dénominateur commun d'entente, ce qui n'est pas suffisant pour assurer la pleine protection de l'environnement.

M. Riordan : L'adoption du dénominateur commun le plus restreint est toujours préoccupante pour les gens d'Environnement Canada. Les négociations qui se sont déroulées en vue de l'établissement des standards pancanadiens avaient pour but de favoriser l'adoption des standards les plus élevés, et non les moins rigoureux. Cet objectif est effectivement énoncé dans l'accord conclu entre les gouvernements.

Il y a aussi des cas où les standards pancanadiens ne sont pas efficaces. Prenons l'exemple du mercure. Dans le cadre du processus d'établissement des standards pancanadiens, un comité était chargé d'une étude de cas sur le mercure. Un des points que les membres du comité n'ont pas réussi à régler concernait les commutateurs au mercure des véhicules. Ils ont fait savoir qu'ils ne pouvaient pas résoudre cette question. Ils ont écrit une lettre au ministre de l'Environnement d'alors pour lui dire qu'ils ne pouvaient pas remplir ce mandat et pour lui demander d'exercer son autorité dans ce dossier. C'est ce que nous avons fait. Nous avons invoqué la LCPE pour soutenir l'élaboration d'un standard pancanadien.

C'est une question à la fois simple et complexe. Diverses options s'offrent à nous, dont celle de la sélection qualitative des outils de gestion. Nous sommes une entité gouvernementale et nous avons un processus en place. Ce processus évalue chacune des options que nous présenterions aux ministres. Dans certains cas, l'approche volontaire n'est même pas envisagée. S'il s'agit de substances persistantes, bioaccumulables et toxiques pour l'homme, il n'est pas question d'une démarche volontaire, mais d'une démarche réglementaire, car il est clair que la loi nous oblige à procéder par voie de réglementation.

Dans les cas où un code de pratique ou une initiative volontaire pourrait donner de bons résultats, par exemple lorsque le secteur présente un bilan positif et a volontairement atteint les objectifs fixés dans le passé, la possibilité d'une approche volontaire serait envisagée, car elle est moins coûteuse et donne des résultats plus rapidement. Si cette solution n'est pas efficace, un règlement peut alors être mis en place.

Le sénateur Tardif : Comme le mercure est considéré comme une substance toxique, son utilisation serait réglementée.

M. Riordan : On règlemente ce qu'on peut réglementer. Selon les standards pancanadiens, les produits d'obturation dentaire ont été identifiés comme une source de mercure. Je me suis entretenu personnellement avec des représentants de l'association dentaire. Ils m'ont dit : « Écoutez, nous ne sommes pas des pollueurs. Nous ne sommes pas des aciéries. Nous sommes des dentistes. » Devrions-nous élaborer un règlement s'appliquant aux dentistes, en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, ou devrions-nous opter pour une entente volontaire comportant des activités de déclaration, de formation et ainsi de suite? Les ministres ont choisi la formule de l'accord volontaire et signé un protocole d'entente avec l'Association dentaire canadienne; la situation semble satisfaisante. Selon mon expérience, il n'est pas nécessaire de tout réglementer. Nous sommes d'avis qu'il faut réglementer si c'est nécessaire, mais qu'il ne faut pas nécessairement réglementer.

Le sénateur Tardif : Je crois comprendre, cependant, que les associations dentaires de l'Ontario et du Manitoba ont été réglementées.

M. Riordan : C'est ici que les standards pancanadiens interviennent. Je m'excuse de la longueur de ma réponse, mais c'est un point important. Les standards pancanadiens prévoient une participation volontaire, mais il arrive souvent que les provinces — vous venez d'en donner deux exemples — aillent plus loin et créent un règlement qui, même s'il ne repose pas sur la LCPE, n'en demeure pas moins un règlement. Je suppose que les dentistes ne sont pas les seuls à avoir pris de telles mesures.

L'expression utilisée est « le mieux placé ». Qui est le mieux placé pour réglementer un dentiste? Aux termes de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, c'était comme si nous utilisions un marteau, alors que l'outil appropriée aurait été un tournevis, un niveau ou quelque chose du genre.

Le sénateur Tardif : Une fraise dentaire.

M. Riordan : Une fraise, oui.

Le sénateur Milne : J'ai lu ici que vous avez l'intention de divulguer, cet automne, une stratégie définissant des plans de gestion des émissions de mercure provenant de produits qui contiennent cette substance. Est-ce que c'est chose faite?

M. Riordan : Pas encore, sénateur. La stratégie a été élaborée et la ministre décidera du moment de sa diffusion. La ministre a dit publiquement en juin dernier que c'était là son intention. Nous avons agi conformément à la direction qu'elle a donnée et avons fait notre part à cet égard.

Le sénateur Milne : En ce qui concerne le ministère, la stratégie est prête à déployer, la décision à ce sujet appartenant à la ministre?

M. Riordan : C'est exact.

Le sénateur Milne : Pour revenir à une des questions du sénateur Adams concernant l'accumulation de mercure beaucoup plus forte chez les populations du Nord, j'aimerais savoir si des études ou des tests ont été effectués, n'importe où dans le monde, pour déterminer s'il existe des méthodes pour réduire les concentrations de mercure chez les personnes présentant un taux excessivement élevé?

M. Clarkson : Pas à ma connaissance, sénateur, mais je ne prétends pas être une autorité en la matière. De telles méthodes existent peut-être, j'en ignore simplement l'existence. Il est possible que cette information m'ait été fournie dans le cadre de ma préparation, mais que je ne l'aie pas retenue, car ce sujet ne constituait pas notre premier centre d'intérêt.

Le sénateur Milne : Le cas échéant, pourriez-vous entreprendre une recherche pour nous?

M. Clarkson : Voulez-vous savoir, par exemple, s'il existe des traitements médicaux qui permettent de réduire les niveaux de plomb dans l'organisme lorsque ceux-ci sont élevés?

Le sénateur Milne : Précisément.

M. Clarkson : Il pourrait s'agir de traitements comparables pour le mercure, je ne sais pas. Je vais devoir en parler au greffier.

Le sénateur Milne : Vous vous en occupez?

M. Clarkson : Oui.

Le sénateur Milne : Merci. Le sénateur Carney a mentionné les phares. Le seul phare historique où j'ai vu un système de lentilles se trouvait en Australie. Il avait d'énormes lentilles de six pieds de diamètre. La lanterne elle-même, qui était alimentée au kérosène à l'origine, fonctionnait au gaz. Ces gigantesques lentilles, qui ont quatre, cinq et six pouces d'épaisseur, effectuent leur rotation dans une cuve de mercure de huit pieds de diamètre. Ce système est en place depuis plus de 100 ans. Savez-vous si les phares historiques du Canada fonctionnent selon le même principe?

M. Clarkson : Je sais qu'il y en quelques-uns, et le sénateur Carney nous a fourni un exemple. Il y en a d'autres, mais je ne sais pas s'ils utilisent un tel système. Les lentilles provenaient d'endroits différents, le fabricant n'était pas toujours le même. Ce genre de question relève plus du domaine de Transports Canada et de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada.

Le sénateur Milne : Je me demandais simplement si on utilise encore des cuves de mercure de huit pieds.

M. Clarkson : J'ai lu certains rapports indiquant qu'on trouvait encore des cuves de mercure dans certains phares. J'ignore si ceux-ci représentent 10 p. 100 de l'ensemble des phares. Bon nombre des phares ne sont plus habités, leur fonctionnement est maintenant automatisé. Je ne sais pas ce qu'il en est des plus anciens.

Le sénateur Milne : Ils fonctionnent toujours de la même façon, mais à une distance de 150 milles.

M. Riordan : La stratégie que nous avons élaborée pour les produits contenant du mercure s'applique aux lampes, aux commutateurs, aux batteries et aux piles, aux thermostats, aux instruments de mesure et aux fongicides, mais pas aux phares.

Le sénateur Milne : Oui, je sais. Je pensais que vous aviez des renseignements dont vous auriez pu nous faire part.

Le sénateur Carney : D'après ce que je sais, le seul phare dont le système de signalisation fait encore appel au mercure est en voie d'être intégré au patrimoine. À ma connaissance, il n'est plus nécessaire d'avoir recours au mercure pour les lentilles que l'on trouve dans les phares en activité de compétence fédérale. Les lentilles utilisées sont très différentes.

Le sénateur Milne : Il s'agit du même type de lentilles, mais leur méthode de rotation est différente.

Le sénateur Carney : C'est un mécanisme entièrement différent, eu égard à la santé des gardiens des phares.

Le sénateur Milne : Je suis un membre du public et j'ai, chez moi, des thermostats qui, j'en suis sûr, sont pourvus d'un commutateur au mercure. Ce sont des dispositifs très sensibles de régulation du système de chauffage électrique. En tant que membre du public, comment dois-je procéder pour m'en défaire si je désire les remplacer?

M. Riordan : Les détaillants — de détecteurs de fumée et même de tondeuses, par exemple — ont souvent des programmes selon lesquels vous pouvez leur apporter votre vieux thermostat à la fin de sa durée de vie utile et le remplacer par un nouveau thermostat. Une stratégie visant les produits contenant du mercure pourrait favoriser la mise sur pied de programmes de ce genre.

Le sénateur Milne : Est-ce qu'il y a une évolution dans ce sens? Un programme quelconque a-t-il été établi pour alerter le public à ce sujet?

M. Riordan : Un projet-pilote portant sur les thermomètres contenant du mercure a été réalisé. Les consommateurs qui remettaient leurs thermomètres au mercure à l'achat d'un nouveau thermomètre sans mercure avaient droit à une réduction de prix. Les programmes de ce genre connaissent généralement du succès auprès du public.

Le sénateur Milne : En général, les gens ne les rapportent pas. Le problème, c'est que d'ordinaire, ils les brisent. Tant qu'ils ne sont pas brisés, il n'y a pas de problème.

M. Riordan : Le thermostat que vous avez dans votre maison ne constitue pas un problème tant qu'il n'est pas brisé.

Le sénateur Milne : Tant qu'il ne cesse pas de fonctionner.

M. Clarkson : Je n'ai pas la réponse, mais les thermomètres au mercure représentent une source éventuelle d'exposition au mercure, tout comme les thermostats au mercure. Il y a d'autres sources. Je ne connais pas l'importance relative de la teneur en mercure des thermomètres, des thermostats et des commutateurs d'automobiles et autres produits. M. Riordan a indiqué qu'ils visaient les commutateurs au mercure des automobiles parce que ces produits renfermaient une quantité considérable de mercure.

Mon ministère a approuvé les appareils de mesure de la température qui ne contiennent pas de mercure de façon à favoriser d'autres options offertes, mais si nous parvenons à convaincre les gens de changer leur type de thermomètre, j'ignore de quelle façon nous pourrions les amener à se défaire de leurs thermomètres au mercure. La ville d'Ottawa a la décharge de Trail Road, où les gens peuvent se débarrasser de leurs déchets ménagers dangereux. Ces déchets sont recueillis périodiquement dans l'année, mais il importe de savoir à quel moment.

Le sénateur Milne : C'est ce que je veux dire. Nous avons besoin d'un programme d'information publique pour sensibiliser les gens aux produits dangereux qui pourraient se trouver dans leur maison. Rien ne m'indique qu'un tel programme existe. La plupart des gens qui brisent leur thermomètre le jettent et en achètent un nouveau. Ils n'en conservent pas les morceaux ou le contenu en vue d'aller porter le tout à un site d'évacuation. Ce problème se posera de plus en plus, compte tenu de la quantité croissante de personnes qui achètent des ampoules éconergétiques contenant du mercure. Quand l'ampoule est grillée, les gens n'y pensent pas deux fois et la jettent aux ordures. Il faudrait que l'emballage des ampoules comporte des instructions sur la façon appropriée de se défaire de ce produit ou qu'un programme d'information publique soit mis en œuvre à cette fin. Cette question reviendra de plus en plus souvent.

M. Riordan : Vous prenez probablement de l'avance sur nous, Monsieur le sénateur. C'est un bon conseil. Ce genre de raisonnement a contribué à l'élaboration de notre stratégie concernant les produits qui renferment du mercure. À mesure que les effets de la stratégie se feront sentir, des initiatives de ce genre seront probablement lancées.

La vice-présidente : La question des ampoules me préoccupe aussi. Mon mari est maintenant très sensibilisé aux questions environnementales. Nous avons aussi adopté les ampoules éconergétiques, mais on m'a dit que ces nouvelles ampoules contiennent du mercure. C'est bien vrai?

M. Riordan : Oui. En petites quantités, ce qui accroît leur efficacité. Plus les ampoules sont efficaces, moins elles consomment d'électricité. Et plus la consommation d'électricité diminue, plus la quantité de charbon brûlé diminue, et plus le volume d'émissions de mercure dans l'environnement régresse.

La vice-présidente : On dirait un cycle.

M. Riordan : C'est substantiel.

La vice-présidente : Qu'arrive-t-il lorsque les ampoules sont grillées? Je sais que leur durée de vie est longue, mais arrive un jour où il faut les changer. Comme elles renferment du mercure, qu'en fait-on? On les jette aux ordures? Non, ce n'est pas ce qu'il faut faire.

M. Riordan : Vous pouvez vous en défaire aux sites d'évacuation.

La vice-présidente : Nous devons nous assurer qu'il y a un site d'évacuation dans la région, ce qui constituera un problème pour les collectivités rurales. Il faut diffuser cette information. C'est un aspect sur lequel il faut travailler.

M. Riordan : Comme vous le savez, les programmes de recyclage ont évolué et évoluent toujours. Je demeure dans une région rurale du Québec et la collecte des produits recyclables s'y fait de porte à porte. Les projets ne sont plus limités au bac bleu, loin de là. Il est aussi question de créer un important centre de compostage dans notre coin du monde. Ces systèmes se mettent en place. Les initiatives vont au delà de la simple récupération du papier, du verre, des boîtes à conserves et de l'aluminium. Il y a même des journées prévues pour l'élimination des déchets ménagers dangereux dans ma collectivité.

Le sénateur Milne : Pour poursuivre dans cette veine, la plupart des personnes savent qu'il faut se débarrasser des tubes fluorescents de façon sécuritaire, mais je ne crois pas que les gens se rendent compte qu'il faut procéder de la même façon avec ces nouvelles ampoules éconergétiques, qu'ils vissent dans tous les appareils d'éclairage de leur maison.

M. Riordan : Beaucoup moins de gens sont au courant.

Le sénateur Milne : Oui, je sais, parce que ces ampoules sont plus petites. Elles sont plus efficaces et plus petites, mais il demeure qu'elles posent un problème. La mise sur pied d'un programme d'information publique s'impose, car un nombre croissant de personnes délaissent les ampoules traditionnelles pour ces ampoules.

La vice-présidente : Est-ce qu'une telle mesure relève de votre domaine, Monsieur Riordan?

M. Riordan : Là encore, nous avons parlé d'instruments précédemment, et ces questions ne sont pas l'affaire d'un seul ministère. Une transformation sociale nécessaire est en train de s'opérer. Les initiatives de collecte des déchets ménagers dangereux ne relèvent pas de la compétence du gouvernement fédéral, mais bien de celle des administrations municipales. La responsabilité n'incombe pas à un seul ministère.

La vice-présidente : Vous, vous représentez Environnement Canada et Santé Canada. Ce sont des ministères clés qui ont l'obligation de nous informer au sujet des dangers, n'est-ce pas?

M. Riordan : Oui.

La vice-présidente : J'estime que nous devrions tenter d'entreprendre quelque chose dans ce sens. Je dépasse peut- être les limites de mon rôle, mais je crois que c'est quelque chose que nous devons considérer et dont nous devons discuter avec divers ministères.

M. Riordan : Excusez-moi, sénateur, Environnement Canada applique un programme appelé Choix environnemental, qui a été mis en œuvre en 1988. Le logo est représenté par trois colombes formant une feuille d'érable. Il s'agit d'un programme d'étiquetage de produits de renommée mondiale. Du papier, des peintures et divers autres produits arborent le sceau du programme. Lorsqu'il a été mis sur pied vers la fin des années 1980, ce programme constituait une importante innovation. À l'heure actuelle, plusieurs milliers de produits portent le logo. Le programme est géré par une entreprise de l'extérieur, titulaire d'un permis d'utilisation du logo, propriété du gouvernement du Canada. Je serais étonné que vous n'ayez jamais vu ce logo et je suis certain que vous le verrez encore plus souvent, car un nombre croissant d'entreprises indiquent, sur l'étiquette de leurs produits, que ceux-ci ne portent pas atteinte à l'environnement.

Le sénateur Tardif : Je voulais aussi parler de l'importance de lancer une campagne d'information publique. Je crois comprendre que le mercure entre dans la fabrication de produits cosmétiques en tant qu'agent de préservation. Est-ce exact? Un nombre croissant de consommateurs, tant des hommes que des femmes, utilisent ces produits et les quantités dont on se débarrasse augmentent aussi. Le mercure est-il réellement employé comme agent de préservation dans certains produits cosmétiques?

M. Clarkson : Il est possible que ce que vous dites est juste.

Le sénateur Tardif : Cette information vient d'un document de Santé Canada. Elle doit donc être fondée.

M. Clarkson : En ce qui a trait à l'utilisation du mercure dans les produits cosmétiques, le mercure figure sur la liste spéciale établie aux fins de la réglementation concernant les produits cosmétiques, ce qui signifie que cette substance ne doit pas être utilisée ou que son utilisation doit être contrôlée. Il faudrait que je vérifie pour plus d'exactitude, mais je dirais qu'il est possible que le mercure soit employé comme agent de préservation dans la fabrication de produits cosmétiques. Les quantités utilisées seraient déterminées en fonction du but visé, en tenant compte du risque qu'elles poseraient. Les niveaux seraient limités.

Le sénateur Tardif : Qui s'occupe du suivi de cette question?

M. Clarkson : Je ne comprends pas ce que vous voulez dire.

Le sénateur Tardif : Comment pouvons-nous être certains que les fabricants de cosmétiques se conforment à ces règles?

M. Clarkson : Je suppose que mes collègues du Bureau de la sécurité des produits de consommation ont un programme d'application, mais je pourrais vérifier.

Le sénateur Tardif : Ce serait apprécié.

La vice-présidente : Vous nous tiendrez au courant?

M. Clarkson : Certainement.

Le sénateur Carney : Je propose que le président écrive à la ministre de l'Environnement, qui doit présenter un rapport sur les produits de consommation cet automne.

M. Clarkson : La ministre de l'Environnement détermine s'il y a lieu de se pencher sur la présence de mercure dans les produits.

Le sénateur Carney : Ce rapport sur les produits de consommation doit être diffusé cet automne.

M. Riordan : Cette question a une importance stratégique, et les aspects sur lesquels la ministre veut exercer un contrôle seraient précisés.

Le sénateur Carney : Je suggère que le président écrive à la ministre pour lui dire que la stratégie devrait comporter un plan de communications indiquant de quelle façon l'information sera diffusée au public. De cette façon, les apports ne viendraient pas uniquement du fédéral.

La vice-présidente : C'est une bonne idée. C'est ce que nous allons faire.

M. Riordan : Quelques précisions au sujet des ampoules — pour en revenir aux outils — les fabricants canadiens d'ampoules ont réduit de 70 p. 100 la teneur en mercure des ampoules, dans le cadre d'un accord volontaire, et s'emploient à la réduire davantage.

Certaines municipalités — celle de Niagara, par exemple — ont mis en œuvre des programmes dans le cadre desquels la municipalité se charge activement de la collecte de toutes les ampoules au mercure et de tous les autres déchets dangereux, de sorte que nous ne partons pas à zéro. On trouve plusieurs exemples d'initiatives dynamiques ayant trait aux ampoules au mercure.

La vice-présidente : Notre greffier m'a informée que nous pourrions aussi interroger la ministre à ce sujet la semaine prochaine, lorsque celle-ci se présentera devant nous mardi. Sénateur Carney, nous enverrons la lettre et nous vous remercions de cette suggestion.

Nous avons été heureux de vous accueillir de nouveau, Messieurs Riordan et Clarkson. Je suis persuadée que ce ne sera pas la dernière occasion que nous aurons de vous voir. Merci infiniment.

La séance est levée.


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