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Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule 9 - Témoignages du 28 novembre 2006


OTTAWA, le mardi 28 novembre 2006

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles, auquel a été renvoyé le projet de loi S-205, Loi modifiant la Loi sur les aliments et drogues (eau potable saine), se réunit aujourd'hui à 17 h 26 pour étudier le projet de loi.

Le sénateur Tommy Banks (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : J'ai le plaisir de vous accueillir au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Ce soir, nous allons étudier le projet de loi S-205, Loi modifiant la Loi sur les aliments et drogues (eau potable saine). Ce projet de loi cherche à modifier la Loi sur les aliments et drogues afin d'ajouter l'eau provenant, notamment, d'un réseau de distribution d'eau à la liste des aliments assujettis au règlement d'application de la loi. Le témoin qui comparaît devant nous ce soir est le sénateur Grafstein, qui est non seulement le parrain, mais aussi l'auteur de ce projet de loi.

Je m'appelle Tommy Banks. Je suis un sénateur de l'Alberta et je préside ce comité. Avant que nous ne commencions, je voudrais prendre un instant pour présenter les membres du comité.

Le sénateur Ethel Cochrane, de Terre-Neuve-et-Labrador, est la vice-présidente du comité. Elle est titulaire d'une maîtrise en éducation de l'Université St. Francis Xavier. Elle siège aussi au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie et au Comité sénatorial permanent des pêches et des océans.

Le sénateur Willie Adams, du Nunavut, a été nommé au Sénat en 1977. Il est électricien et homme d'affaires. Il a, entre autres, été propriétaire de Kudlik Electric Limited, Kudlik Construction Limited, Polar Bear Cave Investments et Nanuq Inn à Rankin Inlet. Il est également membre du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans et du Comité sénatorial permanent des transports et des communications.

Le sénateur David Angus est de Montréal. C'est un avocat qui a beaucoup participé à la vie communautaire et publique et qui est actuellement un associé principal du bureau montréalais du cabinet Stikeman Elliott. Il est également le vice-président du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce.

Le sénateur Nick Sibbeston est un avocat, membre éminent de l'Assemblée législative des Territoires du Nord-Ouest et ancien premier ministre du territoire. Le sénateur Sibbeston a consacré sa vie au service public, surtout aux besoins des peuples autochtones du Nord. Il est actuellement le vice-président du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones.

Le sénateur Claudette Tardif est reconnue depuis longtemps comme l'une des principales championnes des droits linguistiques et culturels des minorités au Canada. Elle est aussi connue pour son importante contribution à l'éducation secondaire et postsecondaire. Elle a été nommée au Sénat en 2005 et est actuellement membre du Comité sénatorial permanent des langues officielles et du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement.

Le témoin qui comparaît devant nous aujourd'hui est le sénateur Jerry Grafstein, l'auteur et le parrain du projet de loi dont nous sommes saisis, le projet de loi S-205, qui concerne l'eau potable saine. La parole est à vous, sénateur Grafstein.

L'honorable sénateur Jerahmiel Grafstein, parrain du projet de loi : Tout d'abord, je vous remercie de m'accorder le privilège et le plaisir de prendre la parole devant le comité. Comme le président s'en souviendra, c'est ma deuxième comparution. La dernière fois que j'ai comparu devant le comité sur le même sujet, le comité a soumis le projet de loi à un examen approfondi et l'a recommandé unanimement au Sénat.

Monsieur le président, je tiens à vous dire, à vous et aux membres du comité, que votre comité est en train de se tailler une excellente réputation au Canada comme ardent défenseur d'une de nos ressources les plus précieuses, l'eau, que ce soit l'eau pure de nos lacs et de nos rivières ou l'eau que nous buvons.

Je vous félicite, vous et tous les membres du comité, pour l'excellent rapport intitulé L'eau dans l'Ouest : Une source d'inquiétude, qui met l'accent sur un des aspects de l'eau potable.

Nous avons beaucoup entendu parler de la Charte et de l'égalité. Lorsqu'il s'agit de l'eau potable, la principale source de vie qui se retrouve dans le régime alimentaire quotidien de chacun, il est curieux que, même si nous réclamons l'égalité sur le plan des soins de santé et de l'accès aux soins, nous n'assurions pas, au Canada, en ce XXIe siècle, l'égalité d'accès à de l'eau potable saine d'un bout à l'autre du pays.

L'eau potable est ce dont les êtres humains ont le plus besoin. Nos médecins nous disent que nous devons boire huit verres d'eau par jour, mais pourtant, nous ne mettons pas de l'eau potable saine à la disposition de toutes les familles du pays, sur une base quotidienne.

Permettez-moi de retracer brièvement l'historique de ce projet de loi, car ce n'est pas le simple fruit de mon imagination. Cette initiative fait suite à une série d'événements survenus dans ma région, la province de l'Ontario. Ces événements ont suscité ma curiosité et j'ai commencé à constituer un dossier qui est maintenant volumineux et mesure trois ou quatre pieds d'épaisseur. Je vous en ai simplement apporté un bref résumé. Il s'avère que l'eau potable saine pose un problème non seulement dans ma province, mais dans toutes les régions du pays.

J'ai commencé cette quête solitaire il y a quelques années. Ce projet de loi a vu le jour parce qu'en mai 2000, une terrible tragédie, qui s'est produite à Walkerton, une petite ville de l'Ontario, nous a réveillés. La population de Walkerton s'est rendu compte qu'il y avait des contaminants dans son réseau de distribution d'eau potable. Cela a été le point de départ d'un grand débat au Canada sur l'eau potable. Après les événements de Walkerton, il y a eu des problèmes similaires à North Battleford, en Saskatchewan et ensuite, à Charlottetown, dans l'Île-du-Prince-Édouard. Lorsque j'ai commencé à recueillir des renseignements anecdotiques, je me suis rendu compte qu'aucune région du pays ne pouvait prétendre avoir un réseau de distribution d'eau potable qui fournit toujours de l'eau propre et pure. Cela a été un choc pour moi.

Les avis concernant la qualité de l'eau se sont multipliés au Québec, dans le nord et dans le sud. Rien que cet été, des piscines ont été fermées au coeur de Montréal à cause de l'E. coli. Le sénateur Cochrane vient de la région de Terre- Neuve-et-Labrador et aujourd'hui, dans cette province, les femmes font toujours bouillir l'eau pour que leur famille puisse consommer de l'eau saine. Nous sommes pourtant au XXIe siècle.

Le problème se pose au Manitoba, en Alberta, en Colombie-Britannique, dans les communautés autochtones, dans toutes les régions du pays, et c'est pourquoi j'ai conclu qu'il s'agissait d'un problème national et non pas régional.

Notre responsabilité, en tant que sénateurs, est très claire : lorsqu'un problème se pose dans une région, nous essayons d'y remédier de notre mieux. Nous sommes ici pour représenter nos propres régions, mais lorsqu'il s'agit d'un problème national, cela devient une préoccupation nationale. Voilà pourquoi nous sommes saisis de ce projet de loi.

La question est de savoir pourquoi ce problème frappe-t-il la conscience nationale? Si vous examinez les médias, comme je l'ai fait, les avis concernant la qualité de l'eau sont des avis locaux qui s'adressent à une collectivité donnée. Cela fera peut-être l'objet d'une mention dans un journal national, mais personne ne fait le lien entre ces rapports émanant des diverses régions du pays. Si vous étudiez l'ensemble de ces rapports, vous constatez trois faits indiscutables.

Le premier fait est que nous avons besoin d'eau potable saine tous les jours, pour tous les habitants du pays, peu importe dans quelle province ou quel territoire ils résident. C'est indiscutable. Cela ne fait aucun doute.

Voici les faits indiscutables que nous ignorons : nous ne savons pas combien la mauvaise qualité de l'eau potable coûte au système de santé. Nous savons que l'augmentation du coût des soins de santé a des effets désastreux sur les budgets fédéral et provinciaux. Nous ignorons la cause de certaines augmentations et nous ne savons certainement pas quels sont les coûts directs pour notre système de santé, mais nous avons des renseignements anecdotiques. D'autre part, nous ne savons pas à combien se chiffrent les pertes pour l'économie lorsque les travailleurs sont malades à cause de la mauvaise qualité de l'eau potable.

J'ai présenté ce projet de loi d'initiative parlementaire pour la première fois en février 2002. Il a été adopté en deuxième lecture et renvoyé à ce comité, qui l'a ensuite renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Le projet de loi est mort au Feuilleton, je l'ai présenté de nouveau, il est de nouveau mort au Feuilleton et je suis ici pour la troisième ou quatrième fois. La situation n'a pas changé. En fait, dans certaines collectivités, elle s'est aggravée à cause des attentes que les premiers ministres successifs ont suscitées en disant : N'adoptez pas ce projet de loi. Le gouvernement actuel va sans doute nous dire la même chose. N'adoptez pas ce projet de loi parce que, devinez quoi? Nous avons un meilleur plan. C'est ce que nous ont dit les gouvernements précédents. Pourtant, si vous prenez les faits, il n'y a pas de meilleur plan. Nous avons dépensé 4 milliards de dollars pour essayer d'améliorer la situation, mais nous n'en sommes pas plus loin aujourd'hui qu'il y a cinq ans et les gens tombent malades.

J'attire votre attention sur la situation à Vancouver. Un de nos collègues, le sénateur Campbell, est un ancien maire de Vancouver. Lorsque j'ai soulevé la question, il a dit que ce n'était pas un problème dans sa belle ville. Pourtant, le 22 novembre 2006, il y a une semaine, on pouvait lire dans le Globe and Mail que les eaux de ruissellement avaient contaminé le réseau de distribution d'eau dans la région métropolitaine de Vancouver.

Voilà l'histoire qui nous intéresse. Je vous cite un extrait du Globe and Mail du mercredi 22 novembre, à la page 3. « Nous savions que ce n'est pas une bonne idée de boire de l'eau turbide ». L'eau est dite « turbide » lorsqu'elle a une apparence trouble. L'article cite ensuite le commissaire à la qualité de l'eau : « Lorsque je suis entré en fonction en 1997, les médecins-conseils en santé publique disaient que la turbidité était un problème purement esthétique, que les sédiments ne posaient pas de risque pour la santé, mais qu'ils donnaient seulement une mauvaise apparence à l'eau... ».

Plus loin, dans l'article, l'auteur, Wendy Stueck, dit :

Néanmoins, un consultant qui a participé aux études de l'eau dans le district de la région métropolitaine de Vancouver, au milieu des années 90, a dit que tout le monde savait que les fortes pluies pouvaient entraîner des glissements de terrain et créer une forte turbidité, et peut-être rendre l'eau insalubre.

Le consultant a ajouté que « Même si nous ne disions pas aux gens que l'eau était insalubre, nous savions qu'il valait mieux ne pas la boire lorsqu'elle est trouble «.

Réfléchissez à cela un instant, sénateurs : nous savions que l'eau n'était pas saine et qu'il valait mieux ne pas boire de l'eau trouble, mais rien n'a été fait.

Le consultant poursuit ainsi :

Au cours de mes conversations avec des ingénieurs et des spécialistes de la qualité de l'eau, j'en suis venu à la conclusion que même si l'eau était probablement saine, elle présentait un risque. Les gens savaient, en 1996, que la présence d'une turbidité extrême compromettait la désinfection primaire de l'eau et c'est une chose que l'on savait.

En 1996, un cabinet d'ingénieurs a préparé un rapport pour le Greater Vancouver Water District. Le Globe and Mail a trouvé ce rapport qui dit que : « ... une forte turbidité compromet la capacité du chlore de désinfecter l'eau. » L'eau n'est ni saine ni salubre.

On peut lire ensuite dans cet article : « ... la principale inquiétude concernant l'utilisation du chlore est que même à plus fortes doses, il ne suffit pas à inactiver le gardia pendant les période de forte turbidité ».

Plus loin, dans l'article, l'auteur déclare :

On comprend maintenant que la turbidité compromet la capacité du chlore de tuer les micro-organismes comme le gardia et le cryptospridium, ce qui peut poser un risque sanitaire.

Le GVRD a pris un tournant décisif en 2000, lorsqu'une étude de Santé Canada a fait le lien entre la turbidité de l'eau potable et des maladies gastro-intestinales observées dans le sud de la province.

Je vais mettre un exemplaire de cet article de journal à la disposition de tous les membres du comité.

J'ai demandé ce rapport et les rapports ultérieurs, mais je n'ai pas pu les obtenir. Pourquoi? Pourquoi ces renseignements ne sont-ils pas mis à la disposition des citoyens de ces communautés? Je trouve que c'est injuste et irresponsable. Le gouvernement est pour la responsabilisation et c'est une chose que nous respectons. Il est pour un gouvernement responsable et c'est une chose que nous respectons. Néanmoins, il est irresponsable et il est impardonnable qu'à notre époque les citoyens ne puissent pas avoir accès aux rapports sanitaires afin de pouvoir prendre les moyens voulus pour protéger la santé de leurs familles et de leurs enfants.

Je peux vous citer un grand nombre de cas. Je les ai déjà mentionnés et vous pouvez les trouver dans le hansard. Tous ces discours sont à votre disposition, mais laissez-moi vous dire ce que fait ce projet de loi. Le projet de loi S-205 n'est pas compliqué en ce sens qu'il ajoute simplement l'eau potable saine dans la Loi sur les aliments et drogues. Cette loi fait autorité d'un bout à l'autre du pays. Ce projet de loi permettra d'imposer une surveillance et des pénalités si les normes sanitaires ne sont pas respectées. Au lieu que les provinces suivent des lignes directrices facultatives, il y aurait des lignes directrices obligatoires. L'Agence exercerait ses pouvoirs en matière pénale conformément à ces lignes directrices.

Certains membres du gouvernement ont dit que c'était anticonstitutionnel, mais ce n'est pas le cas étant donné que nous comprenons parfaitement le cadre législatif de la réglementation et de la politique à l'égard de l'eau au Canada. Le juriste éminent, l'honorable Dennis R. O'Connor, est l'auteur d'un rapport intitulé Rapport de la Commission d'enquête sur Walkerton : les événements de mai 2000 et les questions connexes. On est parvenu aux mêmes conclusions en Saskatchewan lorsqu'il y a eu des problèmes concernant l'eau dans la province.

J'offre au comité cet extrait de la partie I du rapport de M. O'Connor :

Or, la compétence provinciale à l'égard de l'eau n'est pas exclusive. La Loi constitutionnelle de 1867 confère au gouvernement fédéral des pouvoirs qui lui permettent de réglementer divers aspects de la gestion des ressources hydriques.

M. O'Connor précise bien qu'il peut se servir de ses pouvoirs en matière pénale. Au Québec, ni les pouvoirs en matière pénale ni les pouvoirs en matière d'aliments et drogues n'ont jamais été contestés, si bien que les Québécois ne peuvent pas dire qu'ils sont différents des citoyens des autres provinces et qu'ils s'occuperont eux-mêmes de leurs problèmes. D'ailleurs ils ne l'ont pas fait.

Le sénateur Angus est un grand expert de ces questions, mais je ne me souviens pas que les pouvoirs du gouvernement fédéral en matière pénale ou à l'égard des aliments et drogues aient jamais été contestés au Québec. Vous ne pouvez pas invoquer le Québec pour justifier le fait que le gouvernement fédéral n'a pas exercé ses compétences en la matière.

M. O'Connor déclare aussi, à la page 445,

Le gouvernement fédéral a également réglementé la pollution de l'eau pour la « paix, l'ordre et le bon gouvernement » du Canada et pour protéger la santé et la sécurité des Canadiens. Il s'est servi de ses pouvoirs en matière de droit pénal pour appuyer la réglementation concernant le rejet de substances toxiques dans l'eau. De plus, en vertu de l'article 36 de la Loi constitutionnelle de 1982, les gouvernements fédéral et provinciaux doivent « fournir à tous les Canadiens, à un niveau de qualité acceptable, les services publics essentiels «.

L'analyse que M. le juge O'Connor a faite de la loi contient une note plutôt curieuse et humoristique. Il déclare qu'en vertu de la Loi sur les pêches, nous avons l'obligation de veiller à ce que le poisson nage dans des eaux propres et non polluées. Pensez-y, sénateurs. Nous avons une réglementation fédérale claire et nette et un pouvoir de réglementation que le Québec ou personne d'autre n'a contesté pour faire en sorte que notre poisson nage dans des eaux non polluées. Nous avons une réglementation pour le poisson, mais nous n'avons pas de réglementation pour protéger notre eau potable.

Il y a une autre anomalie. En ce qui concerne les communautés autochtones, le gouvernement fédéral ne peut absolument pas dire qu'elles ne font pas directement partie de son champ de compétence. Nous avons le témoignage à cet effet que le gouvernement fédéral a donné dans les Débats du Sénat, du 20 juin 2006. Avant de le lire, je voudrais féliciter le sénateur Adams et le sénateur Watt. Lorsque je me suis lancé dans cette aventure, il y a cinq ans et demi, le sénateur Adams et le sénateur Watt m'ont encouragé à demander aux personnes qui examinent ce projet de loi de le faire en se plaçant du point de vue des Autochtones. C'est ce que nous avons fait. Il y a deux ans, nous avons eu une tribune au cours de l'été et j'ai alors découvert des choses que je ne croyais pas possibles au Canada, au XXIe siècle. Une femme de Grassy Narrows, une communauté autochtone, est venue témoigner. Elle a dit que si elle voulait avoir un bébé en bonne santé, il faudrait qu'elle quitte sa réserve pendant trois ans pour nettoyer son utérus et débarrasser son corps des eaux toxiques qui pourraient le contaminer et malformer son enfant.

Pensez-y. Si une femme de cette communauté autochtone veut avoir un corps sain, elle doit quitter sa communauté pendant trois ans pour nettoyer son utérus afin de ne pas donner naissance à un enfant malformé. C'est sidérant. Est-ce seulement un problème local? Il n'en est rien. Je vais vous citer les Débats du Sénat du 20 juin 2006. Lorsqu'on l'a interrogé au sujet d'un autre projet de loi qui va mesurer la ligne de partage des eaux, qui complète ce projet de loi, mais qui ne lui est pas essentiel, un fidèle représentant du gouvernement a déclaré :

Dans les communautés des Premières nations du Canada, pratiquement 500 systèmes d'adduction d'eau potable sont en péril en dépit du fait que pratiquement 2 milliards de dollars ont été dépensés pour leur amélioration.

Je le répète : 500 systèmes d'adduction d'eau potable. Je pensais que le chiffre se situerait entre 150 et 200. C'est ce que le sénateur Adams et le sénateur Watt m'ont dit lorsque j'ai examiné la question. C'est ce que le sénateur Janis Johnson a déclaré, dans le hansard du 20 juin 2006, à propos du projet de loi S-208. Ce sont les paroles du gouvernement. Je vais les lire une nouvelle fois :

Dans les communautés des Premières nations du Canada, pratiquement 500 systèmes d'adduction d'eau potable sont en péril en dépit du fait que pratiquement 2 milliards de dollars ont été dépensés pour leur amélioration.

C'est un scandale, mais le mot « scandale » n'est pas suffisamment fort. Qu'est-ce qui a changé depuis la crise de Walkerton? Pas grand-chose. Nous avons eu des problèmes à Vancouver, en Saskatchewan, en Alberta ainsi qu'à Terre-Neuve-et-Labrador. J'aime beaucoup Terre-Neuve-et-Labrador. Lorsque je parle de cette province, je pense à certains des promoteurs de ce projet de loi qui en sont originaires. Il y a à l'heure actuelle, dans plusieurs villages de Terre-Neuve-et-Labrador, un certain nombre de familles qui font bouillir leur eau pour pouvoir boire une eau saine.

Allons un peu plus loin, monsieur le président, et je ne m'attarderai pas sur cette question. Que s'est-il passé? Qu'est- ce que le gouvernement nous dit d'autre, d'après ce que nous pouvons établir? Il nous dit que l'Agence canadienne d'inspection des aliments est chargée de faire appliquer les normes. Lorsque la vérificatrice générale a comparu devant le comité de l'énergie, nous avons découvert que ces lignes directrices facultatives ont à peu près 10 années de retard. Non seulement elles sont facultatives, mais elles ne sont pas mises à jour régulièrement. Même si elles étaient mises à jour, elles seraient quand même désuètes. C'est ce que la vérificatrice générale a déclaré au comité de l'énergie. Ce n'est pas moi qui le dit.

Le gouvernement fédéral a pourtant annoncé une nouvelle stratégie — je crois que c'est la deuxième ou la troisième depuis le dépôt de ce projet de loi — pour sauver et assainir l'eau potable. C'est ce qu'a dit le ministre, M. Prentice. Je l'en félicite, tout comme j'ai félicité le gouvernement de M. Martin lorsqu'il a dit la même chose, de même que le gouvernement de M. Chrétien, et cetera. Néanmoins, il ne s'est rien passé. J'ai parlé à mes collèges, le sénateur Adams et le sénateur Watt, et ils m'ont dit qu'il y avait eu très peu de progrès.

Selon Statistique Canada, en 1990-2000, des cas de giardiase, des troubles stomacaux causés par de l'eau potable contaminée, ont été déclarés chez plus de 2 100 enfants sur 100 000. En 2002, le Manitoba a adopté sa loi sur l'eau potable. Depuis, des concentrations de carcinogène ont été trouvées dans le réseau de distribution de Winnipeg. « Carcinogène » signifie qui cause le cancer. Dans les régions rurales du Nouveau-Brunswick et du Québec, l'été dernier, certaines municipalités ont émis des avis recommandant de faire bouillir l'eau, semaine après semaine. Il faut fouiller un peu pour trouver la trace de tous ces incidents, car ils ne sont pas regroupés au même endroit.

Nous détestons les Américains à cause de leur impérialisme, mais même si nous n'aimons pas ce qu'ils font à l'étranger, voyons ce qu'ils font dans leur économie nationale. Les États-Unis ont le même genre de problèmes que le Canada à cause du partage des compétences entre les États et le gouvernement fédéral. En 1972, il y a eu tellement de problèmes que le gouvernement des États-Unis a adopté la Clean Water Act.

Cette loi permet de faire la même chose que mon projet de loi. Il s'agit tout simplement de permettre une supervision fédérale, de confier au gouvernement fédéral la responsabilité non pas de construire les réseaux de distribution de l'eau, mais de les superviser, de jouer le rôle de soupape de sûreté lorsque les autorités ne font pas leur travail.

Harry Truman a dit un jour qu'en tant que président des États-Unis, il avait pour rôle de veiller à ce que les gens fassent le travail qu'ils étaient censés faire. Je vais vous donner un exemple frappant montrant qu'une supervision aurait pu nous éviter des crises sanitaires. C'est ce que les États-Unis ont fait en 1972. Les Américains peuvent maintenant consulter le site Web du gouvernement fédéral pour savoir ce qui se passe dans leur région. Si votre code régional est le 905 ou le 613, vous pouvez savoir quels sont les avis concernant la qualité de l'eau pour la journée ou pour la semaine. Cela permet aux citoyens de savoir quelle est la qualité de l'eau dans leur région. Ce n'est pas difficile ou coûteux à faire, mais cela situe les responsabilités où elles doivent être, c'est-à-dire au niveau des autorités publiques.

Pour conclure, je vais revenir au rapport sidérant de M. le juge Dennis O'Connor. À la page 7 de ce rapport, il déclare :

Du 8 au 12 mai, Walkerton a connu de fortes précipitations : 134 mm de pluie sont tombés durant ces cinq jours. La plus abondante chute de pluie (70 mm) est survenue le vendredi 12 mai.

Entre le 9 et le 15 mai, le puits 5 a été la principale source de l'eau pompée dans le réseau de distribution. Pendant cette période, le puits 6 a alimenté le réseau de façon périodique, tandis que le puits 7 n'était pas en service.

Le samedi 13 mai, Frank Koebel a, comme tous les jours, effectué la vérification des puits en service. Le but des vérifications quotidiennes était de consigner les données sur les débits de pompage et l'utilisation de chlore, mais, avant tout, de mesurer le chlore résiduel présent dans l'eau traitée. Toutefois, depuis plus de 20 ans, les employés de la CSP avaient pris une habitude : la plupart du temps, ils ne mesuraient pas le chlore résiduel et consignaient des données fictives à ce sujet sur les feuilles de fonctionnement quotidiennes. Stan Koebel a souvent suivi cette pratique.

Cette pratique consistait à ne pas suivre la procédure. Cela a eu pour résultat de causer une terrible tragédie, des perturbations économiques qui ont coûté des millions de dollars, sans oublier les centaines de milliers et même les millions de dollars qui ont été dépensés pour la santé. Le résultat est que, comme le dit le rapport :

Si M. Koebel avait procédé à la mesure, il aurait quasi certainement remarqué le manque de chlore résiduel — ce qui aurait dû éveiller ses soupçons et le pousser à prendre les mesures indiquées pour protéger le réseau et la collectivité.

Je ne demande pas de retirer tout cela des mains de la province de l'Ontario, de la province du Québec ou de l'administration fédérale des Autochtones ou des Premières nations. Tout ce que nous demandons c'est qu'on fasse des vérifications au hasard et qu'on applique des lignes directrices obligatoires pour que la population de tout le pays puisse être convaincue que son gouvernement fédéral croit dans la signification de ces trois mots : paix, ordre et bon gouvernement.

Le sénateur Cochrane : Je crois que ce projet de loi, ou sa version précédente, a déjà été renvoyé à nos collègues du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Pouvez-vous nous dire ce que le comité en question a fait de ce projet de loi? A-t-on émis des objections ou des préoccupations à ce moment-là? Que pensez-vous de l'accueil que ce comité a réservé au projet de loi?

Le sénateur Grafstein : Les délibérations de ce comité sont très éloquentes. Vous pouvez les lire. Je ne reviendrai pas sur le rapport de ce comité. À mon avis, le gouvernement s'est simplement contenté d'une tactique dilatoire parce qu'il ne voulait pas donner suite à cette mesure à ce moment-là.

Je suis prêt à me fier à l'opinion du juge O'Connor, qui est un document public.

Le sénateur Cochrane : Pourriez-vous m'indiquer la date de cette réunion?

Le sénateur Grafstein : La date de ce rapport?

Le sénateur Cochrane : Non, de la réunion du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.

Le sénateur Grafstein : Je ne l'ai pas.

Le sénateur Angus : J'invoque le Règlement, monsieur le président. Ce témoin refuse-t-il de répondre à la question du sénateur Cochrane? C'était une question très claire. Pourquoi n'y répondez-vous pas, sénateur?

Le sénateur Grafstein : Je ne me souviens pas exactement de ce qu'a dit le comité. Je vais obtenir son rapport et je vous le transmettrai.

J'ai examiné les opinions qui ont été formulées avant et après, et elles sont très claires. Le pouvoir du gouvernement fédéral à l'égard des aliments et drogues n'a jamais été contesté. Permettez-moi de vous dire ce qui est réglementé en vertu de la Loi sur les aliments et drogues.

Le gouvernement fédéral réglemente l'eau dans les avions, les bateaux, l'eau dans les parcs, l'eau embouteillée, les boissons gazeuses et la glace, mais il ne réglemente pas l'eau potable. Il n'est ni rationnel ni logique de dire qu'on ne peut pas réglementer l'eau potable alors qu'on peut réglementer l'eau embouteillée et l'eau dans les avions et les bateaux.

Le président : Si vous le permettez, sénateur Grafstein, permettez-moi de vous poser deux questions concernant la question du sénateur Cochrane.

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a-t-il émis un rapport au sujet du projet de loi?

Le sénateur Grafstein : Je ne crois pas qu'il l'ait fait, mais il faut que je vérifie et je dirai ce qu'il en est au comité.

Le président : Si je me souviens bien, il n'a pas publié de rapport. Je pense qu'il n'a pas produit de rapport et que le projet de loi est alors mort au Feuilleton.

Le sénateur Grafstein : Il est mort au Feuilleton. Je pense que vous avez raison. Je ne crois pas que le comité ait tiré des conclusions, mais je lui ai présenté les mêmes arguments que devant votre comité.

Le président : En ce qui concerne le rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, pourriez-vous vérifier si ce rapport existe?

Le sénateur Grafstein : Je vais le faire la semaine prochaine.

Le sénateur Angus : Ou ce soir.

Le sénateur Grafstein : Je vais essayer de le faire ce soir.

Le sénateur Angus : Vous pourriez demander à M. Dion ce qu'il en pense et pourquoi il n'a rien fait.

Le sénateur Cochrane : Il est important que nous ayons ce document. Si le sénateur Milne était là, il se peut qu'elle ait présidé ce comité à l'époque et qu'elle puisse nous informer de ce qui a été dit, de ce qui a été fait, et cetera. Voilà ce que j'en pense. Comme je ne siégeais pas à ce comité, je ne suis pas certaine de ce qui s'est passé.

Vous avez déjà comparu devant nous et nous avons maintenant des nouveaux membres au sein de notre comité. Je voudrais que vous nous disiez quelles étaient les objections juridiques et constitutionnelles que votre proposition a suscitées lorsque vous nous l'avez présenté la première fois.

Le sénateur Grafstein : Si je me souviens bien, et cela figure dans la transcription de vos délibérations, certains fonctionnaires ont soulevé des objections, mais le comité a conclu que ce projet de loi ne soulevait pas d'objections constitutionnelles. Tel a été le rapport du comité. Le comité a produit un rapport unanime et tous ses membres étaient d'accord. Ils ont estimé que le projet de loi devait être renvoyé sans amendement ou changement. J'en conclus qu'ils ne voyaient pas de problème sur le plan constitutionnel.

Le sénateur Angus : Vous ne connaissez pas l'histoire de ce comité.

Le sénateur Grafstein : Je dis cela seulement parce que peu importe que ce soit votre comité ou mon comité, sénateur Angus. Si nous faisons rapport d'un projet de loi, c'est parce que nous considérons qu'il ne soulève pas de problème constitutionnel.

Le sénateur Angus : Il y a des exceptions à cette règle dans notre comité.

Le sénateur Grafstein : C'est une condition préalable pour tout projet de loi.

Le sénateur Cochrane : Ne disait-on pas dans le rapport que l'eau potable saine était sous la responsabilité des provinces?

Le sénateur Grafstein : Non, cela ne figurait pas dans le rapport du comité. Cet avis a été émis par la suite. C'était l'opinion de certains membres qui voyaient des objections à cet égard, mais selon moi, c'était une simple question d'opinion.

Sénateur, nous avons l'opinion claire et nette du juge O'Connor à ce sujet. Elle est énoncée ici. Je vous ai cité des extraits du rapport en indiquant la page, et tous les membres du comité peuvent avoir accès à ce document.

Le sénateur Cochrane : Avez-vous eu, depuis, des discussions avec les fonctionnaires du ministère?

Le sénateur Grafstein : Non.

Le sénateur Cochrane : Aucune?

Le sénateur Grafstein : Non.

Le sénateur Cochrane : Les choses ne sont pas allées plus loin après votre dernière comparution devant notre comité et maintenant, vous revenez nous voir avec le même projet de loi, n'est-ce pas?

Le sénateur Grafstein : Le projet de loi est mort au Feuilleton après que le comité l'a approuvé à l'unanimité, sans amendement. Je l'ai ensuite déposé de nouveau et depuis, j'ai réitéré tous mes arguments et j'ai essayé de mettre mes dossiers à jour de mon mieux. Le projet de loi a été adopté en deuxième lecture. Comme vous vous en souviendrez, en deuxième lecture, le sénateur Keon a soulevé certaines questions et il a été convaincu que le projet de loi devait être renvoyé au comité. Le Sénat l'a approuvé à l'unanimité en deuxième lecture. J'ai supposé que s'il suscitait des objections, elles seraient soulevées en deuxième lecture. Je pense avoir répondu à toutes les objections émises au Sénat en deuxième lecture et je n'ai eu aucune nouvelle des fonctionnaires depuis lors.

Le sénateur Cochrane : Je veux quand même vous rappeler que nous avons de nouveaux membres à notre comité.

Le sénateur Grafstein : Je sais que nous avons de nouveaux membres.

Le sénateur Cochrane : Pourriez-vous être le plus explicite possible pour nos nouveaux membres.

Le sénateur Grafstein : J'en suis conscient. Voilà pourquoi j'ai pris un peu plus de temps pour retracer l'historique de ce projet de loi, afin de mettre les nouveaux membres au courant.

Le sénateur Angus : Bienvenue à vous, sénateur Grafstein. On vous voit souvent devant les comités, ces jours-ci. Je vous ai vu à la télévision l'autre jour, à un comité de la Chambre des communes qui étudiait un projet de loi sur le terrorisme, le projet de loi C-25.

Le sénateur Grafstein : Oui, sénateur, j'étais là au nom de votre comité et de mon comité, le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce.

Le sénateur Angus : Vous accomplissez un merveilleux travail avec ces projets de loi d'initiative parlementaire. Je sais combien de travail cela représente et que vous le faites dans l'intérêt public plutôt que pour défendre un intérêt privé quelconque ou un intérêt partisan, et je vous en félicite.

Toutefois, je n'ai pas eu le plaisir jusqu'ici — et je sais combien vous êtes méticuleux — de prendre connaissance de tous les détails de ce projet de loi et du contexte. Sachant combien vous avez le sens du détail et connaissant votre mémoire photographique, je m'étonne que vous ne puissiez pas vous souvenir de ce que le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a dit à propos de ce projet de loi. C'est la première fois que je vous entends avouer ne pas vous souvenir de quelque chose.

Le sénateur Grafstein : La réponse à cela est que le comité n'a rien fait et qu'il n'y avait donc rien dont je puisse me souvenir.

Le sénateur Angus : Si c'est vrai, très bien. Ce n'est pas ce que vous avez dit.

Le sénateur Grafstein : Si le comité avait dit quelque chose, je suis certain que je m'en souviendrais. Le sénateur Banks m'a rafraîchi la mémoire et c'est peut-être un effet de mon grand âge.

Le sénateur Angus : De votre expertise dans de nombreux domaines, vous êtes également un expert des questions juridiques. Cela me rassure, car vous respectez la loi, vous êtes un juriste et vous n'iriez pas essayer de glisser dans le système parlementaire quelque chose qui ne peut pas passer. Je le dis très sérieusement. On m'a dit que pour essayer de résoudre les problèmes constitutionnels très légitimes qui peuvent se poser si le gouvernement fédéral réglemente l'eau potable, vous avez dû vous arranger, si je puis dire, pour déclarer l'eau comme un aliment afin qu'elle relève de la Loi sur les aliments et drogues. Je sais que je simplifie les choses à l'excès, mais c'est ainsi que vous avez contourné le problème.

Le sénateur Grafstein : Je n'essaie pas de le contourner. Si vous voulez vraiment comprendre pourquoi j'ai eu recours à la Loi sur les aliments et drogues, vous et moi, sénateur, respectons l'argent des contribuables. Je ne voudrais surtout pas qu'un projet de loi d'initiative parlementaire augmente le fardeau des contribuables en créant une nouvelle agence, une nouvelle série de responsabilités. Lorsque je me suis penché sur ce problème, à la demande du sénateur Watt et du sénateur Adams, je me suis demandé quelle était la façon la plus rentable d'y remédier. La réponse évidente était de regarder du côté de la Loi sur les aliments et drogues. En fait, la première question que je me suis posée était celle de savoir si l'eau est un aliment. Comme vous vous en souviendrez peut-être, le sénateur Morin, un ancien sénateur, a dit que ce n'était pas un aliment.

Le sénateur Angus : Vous l'avez fait taire.

Le sénateur Grafstein : Non, j'ai trouvé très étonnant qu'un médecin jouissant d'une telle réputation puisse dire cela. C'était un sénateur. J'ai alors consulté immédiatement des médecins de Toronto ainsi que le Dr Keon. Tous les médecins m'ont dit la même chose. L'eau est certainement un aliment. Pourquoi? C'est un aliment parce qu'il contient des éléments nutritifs et c'est la présence d'éléments nutritifs bénéfiques pour le corps humain qui constitue le critère déterminant.

Avec tout le respect que je dois au sénateur Morin, lorsqu'il a démissionné du Sénat, il m'a dit — et j'espère ne pas le citer hors contexte — qu'un de ses regrets était de s'être opposé à mon projet de loi. Il aurait pu être bénéfique pour la santé publique.

Le sénateur Angus : J'ai lu vos observations et j'ai écouté votre discours en deuxième lecture.

Le sénateur Grafstein : Sénateur Angus, je n'ai pas essayé de finasser, mais lorsque vous avez un problème qui n'a pas été résolu, il s'agit de voir comment l'insérer dans la structure fédérale d'une façon constitutionnelle et rentable. C'était l'endroit qui convenait parfaitement. D'autres personnes, des experts, m'ont dit en privé que c'était une excellente solution pour résoudre un problème très complexe. Cela n'oblige pas à constituer un tout nouveau régime de réglementation. Le régime est déjà là et fait exactement la même chose. Il était déjà une relation fédérale-provinciale, des lignes directrices facultatives et c'est là le critère. C'est donc déjà là. Mais au lieu que ce soit facultatif, cela devient obligatoire.

Le sénateur Angus : Je suis d'accord avec vous. À première vue, en conférant au Parlement la compétence voulue en la matière, vous avez peut-être trouvé une bonne solution.

Néanmoins, cela ne règle pas l'autre question, celle de la rentabilité. Vous l'avez mentionnée. Vous reconnaissez, je crois, que les provinces sont compétentes pour réglementer l'eau et assurer un approvisionnement en eau potable saine. Vous reconnaissez aussi, je crois, que chaque province a déjà un régime sous une forme ou sous une autre.

Le sénateur Grafstein : Je le reconnais.

Le sénateur Angus : Lorsque vous avez présenté ce projet de loi pour la première fois, le Nunavut n'était pas encore le territoire qu'il est aujourd'hui.

Le sénateur Grafstein : Il y avait déjà un régime là-bas.

Le sénateur Angus : Il y avait un.

Le sénateur Grafstein : Bien entendu.

Le sénateur Angus : Je dois d'abord vous demander si vous le faites parce que vous pensez que les provinces ne font pas bien leur travail?

Le sénateur Grafstein : Je le fais parce que nous avons largement la preuve que les provinces ne s'acquittent pas du mandat que leur confère la Constitution, qui est de fournir une eau potable saine à chacun de leurs citoyens. C'est évident.

Le sénateur Angus : Nous nous sommes penchés ici, vous et moi, pendant des années, de façon bipartisane, sur des dossiers pour lesquels nous étions sidérés par l'inaction des gouvernements successifs, qu'ils soient conservateurs ou libéraux. Dans votre déclaration préliminaire, vous nous avez laissé entendre, je crois, de façon assez succincte, que les gouvernements qui se sont succédés, sur la scène fédérale, ont également échoué. Quelle en est la raison, selon vous?

Le sénateur Grafstein : Permettez-moi de vous faire part de quelques réflexions à ce sujet, car c'est une question qui me laisse perplexe. J'ai suffisamment l'expérience du Sénat, où je siège depuis 22 ans, pour savoir pourquoi les gouvernements font ou ne font pas certaines choses et une des principales raisons qu'on m'a données, raison qui est, je pense, une simple rationalisation, et que cela reviendrait à en assumer la responsabilité. Par conséquent, si nous exerçons une surveillance dans le cadre d'une réglementation, cette surveillance aura bien lieu, mais le gouvernement fédéral se verra forcé d'assumer cette responsabilité et de la financer. Voilà l'argument invoqué.

Le sénateur Angus : On peut effectivement se poser la question.

Le sénateur Grafstein : Permettez-moi de vous exposer l'autre aspect du problème. Le gouvernement fédéral connaît la réponse à cette question. Lorsque la question m'a été posée, j'ai répondu qu'il fallait voir cela du point de vue du contribuable. Qu'est-ce que cela coûte au public sur le plan de la santé, des pertes économiques et des conséquences de l'insalubrité de l'eau potable sur la santé publique?

Comme vous vous en souviendrez, David Schindler a travaillé avec moi à l'élaboration d'un logarithme pour évaluer cet impact étant donné que le gouvernement fédéral ne recueille pas ces données. Est-ce parce que le gouvernement ne veut pas assumer cette responsabilité ou s'acquitter de son mandat? Lorsque la question constitutionnelle est soulevée, sénateur Angus, comprenez bien que le gouvernement assume la responsabilité ultime de la santé publique au Canada.

En vertu de la Loi sur la santé, le ministre de la Santé est responsable de la santé publique. Si le ministre est informé d'un problème, mais ne fait rien pour y remédier, il pourrait avoir à en assumer personnellement la responsabilité. Peut-être peut-on renier cette responsabilité de façon plausible et il se peut que le gouvernement préfère que cette question reste entre les mains des provinces. Nous savons toutefois que telle est la situation et qu'elle pose un problème économique en augmentant nos coûts de santé. Le Dr Schindler m'a fourni une estimation des coûts directs annuels qui se chiffrent entre 2 et 4 milliards de dollars. Qu'en est-il des coûts indirects? Des milliards de dollars sont gaspillés parce que les différents niveaux de gouvernement ne prennent pas leurs responsabilités au sérieux.

Effectivement, le gouvernement pourrait susciter des attentes au sujet des coûts d'infrastructure. J'ai examiné le problème du point de vue de la ville de Toronto. Nous avons une excellente eau potable à Toronto. Nous puisons notre eau dans le lac Ontario et nous avons eu très peu de problèmes d'eau, mais nous avons la chance d'être sur le réseau des Grands Lacs. Nous avons maintenant des problèmes d'infrastructure. J'ai participé de près à la campagne pour l'élection à la mairie et je sais qu'il faudrait dépenser entre 500 millions de dollars et un milliard de dollars pour réparer et moderniser le réseau de distribution d'eau potable à Toronto. On pense qu'il est trop ancien et désuet.

Si quelqu'un calculait les coûts pour l'ensemble du pays, ils se chiffreraient en milliards de dollars. Supposons que ce soit plusieurs milliards de dollars. Cela nous rattrapera tôt ou tard. Ma mère m'a enseigné qu'il valait mieux prévenir que guérir. Si nous pouvons prévenir les problèmes futurs, nous économiserons sur les coûts de santé et les coûts économiques. Il faut en tenir compte. Lorsque le gouvernement m'a répondu que cela reviendrait à assumer cette responsabilité, j'ai dit qu'il avait déjà cette responsabilité, mais qu'il ne l'avait pas assumée, ce qui est irresponsable.

Le sénateur Angus : Je comprends votre position et je cherche seulement à l'approfondir. Je reconnais qu'il peut paraître justifié que le gouvernement fédéral intervienne. Vous savez combien c'est difficile. Nous avons participé, vous et moi, à un débat sur un autre sujet soit la réglementation des opérations garanties dans la province et nous pensons qu'il faudrait un organisme de réglementation fédéral, mais cela n'est pas possible pour des raisons que nous connaissons tous. Il y a également d'autres domaines qui sont de la compétence des provinces bien qu'il y ait des éléments concurrents. L'un d'entre eux est bien connu du comité. Nous sommes en train d'étudier deux dossiers qui sont en rapport avec votre projet de loi. Premièrement, nous avons fait une étude de l'eau en général.

Le sénateur Grafstein : Je dois dire, en passant, que c'est un travail exceptionnel.

Le sénateur Angus : Nous avons été assez sidérés, je l'avoue, par l'inertie de tous les pouvoirs publics et de voir à quel point nous sommes peu avancés sur le plan de la cartographie des aquifères du pays, des sources et de la protection des terres vulnérables, qui étaient des aquifères et qu'on laisse maintenant sécher. Les changements climatiques vont peut- être causer des sécheresses dans l'Ouest, le retrait des glaciers, et cetera. Nous sommes très au courant du problème étant donné que nous avons entendu le témoignage de David Schindler et d'autres experts au sujet de l'eau. Toutefois, on nous incite constamment à mettre la pédale douce pour une question de coûts. En fait, je vous dirais simplement que je ne suis pas pour le dédoublement lorsque c'est inutile.

Dans ma province, le Québec, par exemple, le gouvernement provincial a adopté, en juin 2001, le règlement concernant la qualité de l'eau potable qui établit des normes et des contrôles qui sont parmi les plus rigoureux d'Amérique du Nord. Cette nouvelle réglementation fait du Québec un des chefs de file mondiaux de la gestion de l'eau.

Je ne suis pas Québécois, mais je suis un citoyen du Québec, ce qui n'est pas la même chose. Je fais partie de l'un des autres peuples fondateurs. Je constate également que l'eau potable que nous buvons au Québec est excellente. Je verrais là des objections parce que nous avons besoin de l'argent du gouvernement fédéral pour les soins de santé, qui constituent un besoin plus pressant que l'eau étant donné que notre réseau fonctionne déjà bien.

Le président : Est-ce à Montréal?

Le sénateur Angus : Au Québec en général, mais je dirais que, dans chaque province, les besoins sur le plan des soins de santé sont plus grands. Les incidents survenus jusqu'ici sont assez isolés.

Dans votre province, sénateur Grafstein, le gouvernement ontarien a également adopté la Loi sur la gestion des éléments nutritifs, la Loi de 2002 sur la salubrité de l'eau potable, et la Loi de 2002 sur la durabilité des réseaux d'eau et d'égouts pour pouvoir donner suite à un bon nombre de recommandations figurant dans la partie 1 et la partie 3 du Rapport de la Commission d'enquête sur Walkerton : les événements de mai 2000 et les questions connexes.

Je pourrais continuer à vous décrire ce qui a été fait dans les autres provinces. Cela fait tout simplement partie de notre frugalité dont le sénateurs Banks a parlé aujourd'hui au Sénat lorsque vous n'étiez pas là. Nous avons tendance à faire preuve de frugalité et à protéger nos intérêts communs. Pourquoi dédoubler tout ce bon travail? Voilà le problème que je vois. Nous allons inviter les fonctionnaires du ministère à comparaître devant le comité. C'est à eux de nous dire pourquoi ce n'est peut-être pas la meilleure façon de dépenser l'argent du gouvernement fédéral.

Le sénateur Grafstein : Je diviserai ma réponse en trois parties. Je tiens à séparer les communautés autochtones du reste, simplement aux fins de la discussion, car je crois que tous les Canadiens, qu'ils soient Autochtones, Québécois, citoyens du Québec, Franco-Ontariens ou autres doivent être traités également. Je crois dans l'égalité, tout comme vous.

Le sénateur Angus : J'y crois.

Le sénateur Grafstein : Cela dit, nous savons déjà, d'après ce que votre gouvernement et votre porte-parole au Sénat nous ont dit, qu'en juin 2006, il y avait des réseaux de distribution d'eau potable qui présentaient des risques dans les communautés autochtones. Vous pouvez répondre que tous les mécanismes sont en place, mais c'est ce que votre porte- parole a déclaré au Sénat le 20 juin 2006.

Le sénateur Angus : Cela ne veut pas dire que le gouvernement fédéral devrait intervenir et adopter cette loi.

Le sénateur Grafstein : Laissez-moi présenter mes arguments.

Le sénateur Angus : J'ai mis un point d'interrogation. J'ai commencé par dire que je ne suis pas un expert.

Le sénateur Grafstein : Le fait est que malgré les 4 milliards de dollars qui ont été investis depuis cinq ans, la situation n'est pas meilleure qu'elle ne l'était il y a cinq ans. C'est plutôt probant. Parlons du Québec. Je ne conteste pas votre opinion, mais pour confirmer vos dires, combien d'avis y a-t-il eu cet été concernant la qualité de l'eau? Ont-ils été regroupés au même endroit afin qu'on puisse les additionner et se rendre compte de leur impact sur les collectivités du Québec? Je n'ai pu trouver ces données nulle part. Je sais qu'il y a eu, de temps à autre, un certain nombre d'avis concernant l'eau l'été dernier, même si vous avez l'un des meilleurs réseaux de distribution au monde, que le projet de loi a été adopté en 2002 et qu'il n'y a pas d'excuse. La situation a été la même dans ma province, et à Vancouver, il y a deux semaines.

Le sénateur Angus : Un de ces avis portait sur le lac où j'habite. Le problème était dû à l'algue bleue. En ce moment même, le comité étudie la Loi canadienne sur la protection environnementale et les 37 autres lois qui constituent le cadre législatif de la protection de l'environnement.

C'est le propre de mon ascendance écossaise. Je n'aime pas qu'on dilapide de l'argent pendant qu'on fait des économies de bouts de chandelles.

Le sénateur Grafstein : Mon ascendance juive est exactement la même. Je suis très économe et, comme vous le savez, je le suis surtout lorsqu'il s'agit de l'argent des contribuables. Nous sommes très semblables sur ce plan.

Je crois important d'être sceptique. En tant que sénateurs qui siégeons dans une Chambre de seconde réflexion, nous apprenons à être sceptiques. Lorsque le gouvernement ou les fonctionnaires disent quelque chose, ils ont peut-être raison et je leur accorde le bénéfice du doute. Mais je veux entendre ce qu'ils ont à dire et je veux savoir quels sont les faits.

Les faits sont là et ce n'est pas moi qui le dit. J'ai lu, dans un article du Globe and Mail, la semaine dernière, à Vancouver, que malgré tout cela, malgré les modifications et les lois, des milliers de gens ont été malades à cause de ce problème.

Si nous avions eu une supervision fédérale et si quelqu'un avait tiré le signal d'alarme, il y a au moins 50 p. 100 de chance que nous aurions pu économiser beaucoup d'argent. Exercer une surveillance, ce n'est pas assumer la responsabilité ultime. J'estime que le système américain fonctionne très bien. Il fonctionne de façon uniforme et efficace. Si vous pensez que les Américains ne croient pas dans les droits des États, ils y croient, tout comme nous croyons dans les droits et responsabilités du gouvernement fédéral et des provinces. Néanmoins, lorsqu'il s'agit d'un problème très grave, lorsque le réseau est défaillant, le gouvernement fédéral a des responsabilités à assumer. Voilà mon argument.

Sénateur Angus, si vous pouvez convaincre le comité et moi-même que tout marche comme sur des roulettes d'un bout à l'autre du pays, je serais le premier à déchirer ce projet de loi, mais je ne crois pas que le système fonctionne. En tout cas, je ne le crois pas après ce que le gouvernement a déclaré, en juin, au sujet des communautés autochtones. C'est scandaleux.

Le sénateur Angus : De toute façon, c'est certainement une question préoccupante. Nous nous inquiétons tous de la qualité non seulement l'eau, mais aussi de l'air.

Le sénateur Grafstein : Attendez un instant. Sénateur, si nous avons déjà une administration en place et un ministre qui promet d'agir, pourquoi vouloir confier la surveillance à une autre agence?

Le sénateur Angus : Lisez-vous mon courrier? C'est ma prochaine question.

Le sénateur Grafstein : Bien sûr, et je vais y répondre.

Le sénateur Angus : Vous nous espionnez de nouveau?

Le sénateur Grafstein : Non, je sais que vous avez un esprit logique et brillant et j'essaie parfois de vous suivre. J'ai été formé, moi aussi, par les Jésuites. En fin de compte, de quelle responsabilité s'agit-il? Il s'agit de se pencher sur une agence du gouvernement et voilà pourquoi nous avons une vérificatrice générale.

Qu'est-ce que la vérificatrice générale a dit au comité? Mesdames et messieurs, dit la vérificatrice générale, les lignes directrices facultatives qui sont censées être en place sont périmées et c'est un vrai scandale. C'est ce qu'elle a déclaré l'année dernière au comité.

Là où je veux en venir, c'est qu'il faut parfois des freins et des contrepoids. Ce serait là un moyen très efficace de s'assurer que les employés mandatés par le gouvernement fédéral, le ministre, fassent leur travail. Dans ma province, nous avons réglé le problème, mais pas à ma satisfaction. Il n'était certainement pas réglé de façon satisfaisante à Vancouver, cet été. Nous avons des preuves flagrantes du contraire.

Le sénateur Angus : Monsieur le président, je voudrais conclure sur la mention que le sénateur Grafstein a faite des conclusions dites éclairées du juge O'Connor. Ce n'est pas une opinion raisonnée, mais une simple déclaration. Par contre, comme vous le savez fort bien, selon certains avis juridiques, cela soulève des problèmes.

Si nous adoptons le projet de loi Grafstein et qu'il obtient force de loi, très bien. Toutefois, je ne voudrais pas qu'il soit déclaré inconstitutionnel ou qu'il fasse l'objet d'attaques, comme l'a dit le sénateur Cochrane. Des opinions raisonnées ont été émises à ce sujet. Je ne dis pas qu'elles soient justes, mais j'ai l'intention de m'en assurer, ainsi que le sénateur Cochrane, au cours de nos audiences sur ce projet de loi. J'estime que le rapport O'Connor ne va pas suffisamment loin.

Le sénateur Grafstein : Pourrais-je simplement vous donner une analyse des faits? J'ai étudié la Constitution depuis que je suis ici. J'ai eu pour professeur l'un des plus grands constitutionnalistes et juges du pays, le regretté Bora Laskin. Je respecte la Constitution, j'y crois et je pense que le Sénat a pour rôle de veiller à ce que les projets de loi soient constitutionnels. Néanmoins, il faut aussi tenir compte des faits. Il y a la pratique et il y a les faits. Il n'y a absolument rien dans la Loi sur les aliments et drogues qui nous empêche, du point de vue constitutionnel, d'y ajouter l'eau, qui est déjà réglementée par cette loi. L'eau est toujours de l'eau. Quelle différence cela fait-il si elle sort du robinet plutôt que d'une bouteille?

Le sénateur Angus : Sénateur, il y a une grosse différence.

Le sénateur Cochrane : Sénateur Grafstein, j'ai ici les Recommandations pour la qualité de l'eau potable au Canada, de mars 2006. Je me demande si vous les avez lues? Si vous les avez lues, sénateur, qu'en pensez-vous?

Le sénateur Grafstein : Quelle est votre question?

Le sénateur Cochrane : Je veux savoir si vous les avez lues. Je voudrais savoir ce que vous en pensez. Ce sont les recommandations de mars 2006.

Le sénateur Grafstein : Quand vous me demandez mon opinion, s'agit-il de mon opinion scientifique, de mon opinion juridique ou de mon opinion sénatoriale?

Le sénateur Angus : Pour commencer, les avez-vous lues oui ou non?

Le sénateur Grafstein : Je sais qu'elles sont là et je dois dire que je ne conteste pas ces recommandations. Il faudrait toutefois que je vérifie auprès de la vérificatrice générale pour voir si elle croit ou non que son rapport, qui critiquait les lignes directrices, a obtenu une réponse. C'est certainement quelque chose que le comité pourrait faire.

Le sénateur Cochrane : Ces recommandations datent de mars 2006.

Le sénateur Grafstein : Je le sais. J'ai entendu la date. Nous avons également entendu dire, devant le comité, l'année dernière, je crois, que les lignes directrices étaient périmées. Si elles ont été mises à jour depuis, il serait souhaitable de demander à la vérificatrice générale si elle considère ou non qu'elles sont à jour. La vérificatrice générale a déclaré, lors de sa comparution devant le comité, que les lignes directrices étaient périmées depuis des années. Si elles ont été mises à jour, je crois que la meilleure solution est de poser la question aux experts. Je ne peux pas émettre d'opinion à ce sujet.

Le sénateur Cochrane : Vous ne pouvez pas me dire si ces recommandations sont efficaces ou non.

Le sénateur Grafstein : Non.

Le président : Il y a une deuxième question à se poser à ce sujet, comme nous le savons tous. Supposons que les recommandations soient parfaites et que, si elles sont suivies, tout ira pour le mieux. La question à se poser est : sont- elles suivies?

Le sénateur Grafstein : Cela nous ramène à mon argument de base. Quoi qu'il en soit, je vais essayer de les lire et d'obtenir l'opinion d'experts à ce sujet. Cela m'intéresse.

Le sénateur Angus : Nous en aurons la traduction à Toronto.

Le président : Je vais les lire et elles sont assez bonnes.

Le sénateur Grafstein : Elles sont alléchantes, n'est-ce pas?

Le président : En attendant, tout n'a pas été encore réglé. Avant de passer au sénateur Sibbeston, j'ai une question concernant la question que le sénateur Angus a posée au sujet des moyens que vous avez trouvés pour renforcer le contrôle sur l'eau, si je puis dire, en ajoutant les mots « l'eau provenant d'un réseau de distribution d'eau qui est destinée à la consommation humaine ». Le libellé qui précède, dans la même loi, est le suivant : « »aliment» Notamment tout article fabriqué, distribué, vendu ou présenté comme pouvant servir de nourriture ou de boisson à l'être humain ». Par conséquent, ce que nous buvons est déjà reconnu dans la loi comme un aliment. Pour que ce soit bien clair, est-ce que le jus d'orange est couvert par la réglementation fédérale?

Le sénateur Grafstein : Oui.

Le président : Peu importe l'endroit du pays où il est produit, embouteillé ou distribué?

Le sénateur Grafstein : Oui.

Le président : La Coca-Cola et le Gatorade aussi?

Le sénateur Grafstein : Oui.

Le président : L'eau d'Evian et l'eau Perrier?

Le sénateur Grafstein : Oui.

Le président : Cela ne s'applique pas à l'eau qui sort de mon robinet.

Le sénateur Angus : On fait la distinction entre une ressource naturelle et une ressource qui a été mise en bouteille et à laquelle une intervention humaine a ajouté quelque chose.

Le président : Ou qui a été purifiée.

Le sénateur Grafstein : Ce n'est pas tout à fait exact, car le gouvernement fédéral assume directement la responsabilité de l'eau qui sort des robinets dans un parc national ou encore dans un avion, un bateau ou toute installation relevant du gouvernement fédéral. Ce dernier assume déjà la responsabilité de réglementer l'eau dans ses champs de compétence, et par conséquent, dans les communautés autochtones.

Le président : Excusez-moi pour cette interruption.

Le sénateur Sibbeston : Sénateur Grafstein, je vous trouve convaincant et il me paraît évident, à en juger par les faits que vous relatez, qu'il faut faire quelque chose. Il est certain que le gouvernement fédéral doit se soucier des conséquences de son intervention. Il craint peut-être que s'il appuie votre projet de loi, les gouvernements provinciaux verront là une intrusion dans leur champ de compétence.

Pensez-vous que le changement de gouvernement va peut-être modifier la situation, que le nouveau gouvernement verra d'un autre oeil tous vos efforts et tous vos arguments logiques et qu'il répondra de façon positive à votre initiative?

Le sénateur Grafstein : Oui, dans un certain sens. Encore une fois, le sénateur Angus et moi avons tous les deux l'esprit de parti. Nous faisons partie du comité, mais vous avez bien résumé la situation. Lorsqu'il s'agit de l'intérêt national, nous ne sommes plus partisans, nous essayons de faire de notre mieux. J'ai été ravi d'apprendre que le ministre Prentice a eu, comme première priorité, de réinvestir dans le traitement des eaux dans les collectivités autochtones. J'ai vu là quelque chose de positif.

Le problème, sénateur Sibbeston, est que j'ai déjà entendu ces promesses. Je les ai déjà entendues à deux reprises et il n'y a pas eu beaucoup de changements. J'ai parlé au sénateur Adams et au sénateur Watt qui m'ont dit qu'il y avait eu très peu de changements.

Pour être juste envers le gouvernement, mais les faits sont là, le sénateur Johnson a déclaré qu'il y avait 500 réseaux de distribution d'eau potable qui étaient en péril dans les collectivités autochtones. Il est difficile d'obtenir des renseignements. Ils ne sont pas facilement accessibles et il faut donc se fier aux porte-parole des différentes communautés. Le chef Phil Fontaine a dit qu'au moins 100 réserves avaient eu des avis concernant la qualité de l'eau et que leurs habitants devaient faire régulièrement bouillir l'eau. C'était il y a deux ans.

Je ne dis pas que le témoignage du sénateur Johnson l'emporte sur tout le reste car, comme je vous l'ai dit, le chef Fontaine a parlé de 100 réserves. D'après mes propres recherches, qui sont entièrement anecdotiques, je crois qu'il y a environ 150 réserves qui ont grandement besoin d'usines d'épuration.

Sur le plan coûts-avantages, sénateur Sibbeston, une des ironies de la vie c'est que nous envoyons des systèmes d'alimentation en eau potable — et j'ai passé pas mal de temps à les étudier — au Darfour, en Iraq et en Afghanistan, mais nous n'envoyons pas ces systèmes de façon suffisamment rapide ou suffisamment complète aux collectivités autochtones du Canada. N'est-ce pas curieux?

Le sénateur Sibbeston : Je sais déjà qu'en ce qui concerne l'eau dans les communautés autochtones, cela entre sans aucun doute dans le champ de compétence fédérale en vertu de l'article 91.24 de l'Acte constitutionnel de 1867. Je sais que le gouvernement fédéral est responsable de l'eau dans les réserves indiennes; cela ne fait aucun doute.

Votre initiative vise l'ensemble du Canada, et dit que le gouvernement fédéral a certaines responsabilités à l'égard de l'eau. Pensez-vous que cet amendement forcera le gouvernement fédéral à intervenir davantage qu'il ne l'a fait jusqu'ici? Vous citez les États-Unis comme exemple d'intervention fédérale dans le domaine de l'eau depuis 1972. Cela a-t-il modifié la dynamique des relations entre le gouvernement fédéral et les États? Cela a-t-il obligé le gouvernement fédéral à dépenser beaucoup plus d'argent?

Le sénateur Grafstein : Je ne peux pas vous citer les chiffres exacts, mais lorsque je suis allé aux États-Unis, j'en ai parlé aux autorités parce qu'il y a les mêmes problèmes là-bas. Il y a eu énormément de réactions, tant au niveau fédéral qu'au niveau des États, contre cette mesure. Les États n'en voulaient pas parce que cela voulait dire qu'ils allaient devoir dépenser plus d'argent. Le gouvernement fédéral, ou ses défenseurs, ont dit que cela ne leur plaisait pas, parce qu'il faudrait dépenser plus d'argent. Tout le monde s'est renvoyé la balle. En fin de compte, les autorités américaines ont été forcées de faire le travail qu'elles étaient censées faire. Voilà l'aspect rentable de l'intervention fédérale dans la qualité de l'eau; les Américains se servent d'un site Internet. Grâce à un système Internet simple et pas compliqué, les gens peuvent voir quels ont été les avis les plus récents émis sur la qualité de l'eau dans leur région. Les Américains n'ont qu'à pousser sur un bouton pour connaître l'état de l'eau dans la région qu'ils visitent ou dans laquelle ils résident.

Nous pourrions avoir le même système et, en soi, ce système exerce des pressions sur les responsables de la surveillance de la qualité de l'eau. Le fait que le public soit au courant et puisse obtenir ces renseignements a un effet coercitif. Cela ne coûte pas très cher. Nous avons une technologie moderne et nous sommes davantage branchés sur Internet au Canada que ce n'est le cas aux États-Unis. Il existe des moyens rentables de s'assurer que les autorités ne négligeront pas leurs responsabilités, comme l'a fait Koebel.

C'est tout ce que je demande. Je ne veux pas que le gouvernement fédéral impose sa volonté aux provinces. Je veux établir une norme d'égalité d'un bout à l'autre du pays. Si vous vivez dans une communauté autochtone, je ne peux pas comprendre pourquoi un enfant autochtone devrait être traité différemment qu'un enfant de Toronto lorsqu'il s'agit de l'eau potable. Quel argument pourrait s'y opposer? C'est ce que dit notre Constitution.

Plus je lis à ce sujet, plus cela me révolte, car il est évident à mes yeux que nous pouvons le faire et que c'est rentable. Les Américains l'ont fait après beaucoup de tergiversations, mais ils ont agi tout simplement au nom de la santé de chaque citoyen, qu'il vive dans une communauté autochtone, une communauté des Premières nations, dans les nations Navaho ou ailleurs.

J'ai du mal à comprendre pourquoi nous n'avons pas pu déjà le faire. Tous les éléments sont en place. Cela n'exige pas de fonds supplémentaires importants. Il s'agit seulement de réorganiser nos enveloppes budgétaires pour rendre le tout cohérent et informer le public. La seule chose qui a arrêté cette tragédie c'est que le public a été sensibilisé et qu'il y a eu une enquête de plusieurs millions de dollars. Le public a le droit d'être informé sur le système de santé.

Le sénateur Sibbeston : J'appuie certainement cette mesure et j'applaudis le sénateur Grafstein pour l'initiative, l'énergie et les efforts qu'il consacre à ce dossier important. Vous êtes le seul à vous en être occupé avec votre projet de loi d'initiative parlementaire et je suppose que vous avez frappé à la porte du gouvernement pendant quelques années.

Je voudrais savoir si le nouveau gouvernement va vous aider. Le ministre de la Santé ou le ministre de l'Environnement de ce nouveau gouvernement va-t-il se montrer un peu plus ouvert à votre initiative que ne l'ont fait les gouvernements antérieurs? Voyez-vous la lumière au bout du tunnel?

Le sénateur Grafstein : La bonne nouvelle c'est que j'ai entendu le ministre, M. Prentice, parler de cette initiative. Elle est similaire à celle que mon gouvernement libéral a prise. C'est très bien et je n'y vois pas d'objection. Malheureusement, je ne pense pas vraiment que cela va changer l'attitude de la bureaucratie d'Ottawa. Le rapport de la vérificatrice générale était accablant. Vous avez entendu ce rapport; vous l'avez reçu. C'était un rapport accablant. Nous devons y répondre. Je n'ai rien vu qui réponde à ce rapport.

Il se peut, sénateur Cochrane, que ces nouvelles recommandations constituent une réponse, qu'elles aient été mises à jour, mais il ne suffit pas pour cela de les publier. Qu'en faites-vous une fois qu'elles sont publiées? Sont-elles appliquées? Tout ce que je veux faire — et le projet de loi est très simple — c'est rendre ces recommandations applicables afin que les autorités fédérales puissent faire des vérifications au hasard un peu partout dans le pays. Si elles font ces vérifications au hasard, le signal d'alarme va se mettre à sonner un peu partout. Si les autorités d'une province se rendent coupables d'une infraction en vertu de la Loi sur les aliments et drogues, les médias en parleront. Servez- vous des pouvoirs de l'État de façon cohérente et efficace et vous rendrez service à tous les Canadiens. La loi a un but.

Le président : Il y a de nombreuses lois fédérales touchant l'environnement qui s'appliquent à des domaines dont la compétence est partagée avec les provinces et qui sont rarement utilisées. C'est une sorte de filet de sécurité qui signale, non pas dans ce projet de loi mais ailleurs, que si l'autre niveau de gouvernement qui partage ce champ de compétence n'agit pas, le gouvernement fédéral pourrait le faire. Ce n'est toutefois pas le cas de ce projet de loi.

Le sénateur Grafstein : Je suis d'accord avec vous pour dire que ce n'est pas le cas de ce projet de loi.

Le président : Ce n'est pas ce que ferait ce projet de loi.

Le sénateur Grafstein : Ce n'est pas ce que fait la Loi sur les aliments et drogues. La fédération a bien précisé qu'elle voulait que les aliments soient soumis à des normes nationales. Par conséquent, à moins que vous ne me prouviez le contraire, personne ne s'est jamais opposé à ce que le gouvernement fédéral exerce ses pouvoirs dans le cadre de la Loi sur les aliments et drogues. C'est avant tout pour assurer la sécurité des aliments dans toutes les villes du pays.

Le président : Cela nous ramène à la question de savoir si l'eau est un aliment.

Le sénateur Grafstein : C'en est un.

Le président : C'est là la question.

Le sénateur Grafstein : Le sénateur Keon a répondu à cette question de façon satisfaisante. Vous pouvez appeler n'importe quel médecin du pays pour lui poser la question. J'ai parlé à des dizaines de médecins, et quand je leur ai dit ce qui s'était passé au Sénat où l'on a affirmé que l'eau n'était pas un aliment, cela les a fait rire. Nous avons fait rire de nous.

Le président : Peut-être que les médecins auraient dû se pencher sur la question avant nous.

Le sénateur Grafstein : Par souci de justice envers le sénateur Morin — vu qu'il n'est pas là — il m'a dit qu'il avait eu tort et qu'il ne se serait pas prononcé de cette façon s'il avait réfléchi à la question. Je peux vous dire ce qui s'est passé. Il s'est senti forcé par la politique partisane, ce qui n'est pas une bonne chose. Il faut parfois savoir rester au-dessus de la politique partisane.

Le sénateur Adams : Le sénateur Angus nous a dit que le Québec avait une bonne réglementation au sujet de l'eau. Je pense que le ministère de la Santé réglemente tous les médicaments, n'est-ce pas? Est-ce que le gouvernement réglemente et approuve tous les types de médicaments?

Le sénateur Grafstein : Absolument.

Le sénateur Adams : Ce devrait être la même chose pour l'eau.

Le sénateur Grafstein : C'est mon opinion. Si nous le faisons pour les médicaments, nous devrions certainement le faire pour l'eau.

Le sénateur Adams : Je vis dans une communauté où il y a un réseau d'eau et d'égouts, mais il n'y en a pas dans toutes les communautés de ma région. L'eau y est livrée par camion. Il y a seulement trois communautés où nous avons un réseau d'eau et d'égouts : Rankin Inlet, Iqaluit et Resolute Bay. Toutes les autres communautés doivent pomper l'eau.

Le sénateur Grafstein : Est-ce de l'eau en bouteille?

Le sénateur Adams : Non.

Le sénateur Adams : Vous avez un gros réservoir de 2 000 gallons qui livre de l'eau dans chaque maison. Chaque maison a un système sous pression. Vous avez un réservoir pour les eaux usées que vous devez faire vider chaque semaine, selon que votre famille est plus ou moins nombreuse. Si vous avez un réservoir de 200 ou 300 gallons dans la maison, vous avez un réservoir d'eaux usées de 500 gallons sous le bâtiment.

Toutes nos communautés et municipalités contrôlent la livraison de l'eau. Nous n'avons pas de techniciens qui viennent tester l'eau régulièrement. En juin dernier, à Rankin Inlet, nous avons eu de l'eau contaminée et les 2 500 habitants n'ont pas pu boire l'eau du robinet.

Le sénateur Grafstein : C'était quand et pendant combien de temps?

Le sénateur Adams : C'était pendant deux mois.

Le sénateur Grafstein : Voilà des données récentes.

Le sénateur Adams : Même maintenant, il est déconseillé de boire l'eau du robinet. J'entends des gens dire : « J'espère que quelqu'un va venir chercher mon réservoir et ira le remplir en amont de la rivière, à deux milles de Rankin Inlet, pour que j'aie de l'eau fraîche. Je voudrais de la bonne eau pour faire du thé. Je ne veux pas d'eau chlorée chez moi ». Les gens préfèrent l'eau fraîche.

On s'est rendu compte que l'eau était contaminée, à Rankin Inlet, l'été dernier. Nous avions un lac à côté, mais nous ne pouvons plus l'utiliser. En cas d'incendie, nous avons besoin de cette eau. Nous avons un réservoir d'environ 50 000 gallons pour éteindre les incendies. Ce réservoir n'a pas été testé depuis de nombreuses années.

Le sénateur Grafstein : Quel est le nombre d'habitants?

Le sénateur Adams : Environ 2 800. J'ai posé la question au secrétaire gestionnaire de la municipalité qui s'occupe de tout, y compris la cueillette des ordures et le réseau d'eau et d'égouts. Ce réservoir est fermé comme un baril de quatre à cinq gallons. Certains camions d'incendie ont commencé à se servir d'une bouche d'incendie, mais l'eau a été refoulée dans le réservoir. Le réservoir a été contaminé et c'est allé dans l'eau potable. Voilà ce qui s'est passé à Rankin Inlet l'année dernière.

Je vois que les provinces ont une meilleure réglementation, mais il faut que nous trouvions un moyen, comme l'Agence canadienne d'inspection des aliments, pour réglementer l'eau. Le gouvernement devrait réglementer tout ce que fait la municipalité. Il faudrait que nous ayons davantage de lignes directrices pour que cela ne se reproduise pas. C'est ce que vous essayez de faire avec ce projet de loi. Il ne s'agit pas de forcer le gouvernement à le faire, mais de lui permettre d'exercer une surveillance.

Le sénateur Grafstein : Je pense que vous avez compris, sénateur Adams.

Le sénateur Adams : Après Walkerton, des fonctionnaires du ministère des Affaires indiennes ont comparu devant le comité pour dire que leur réseau était satisfaisant. Ils ont dit qu'ils veilleraient à ce que l'eau de la communauté ne soit pas contaminée. C'est ce qu'ils nous ont déclaré ici, il y a deux mois environ. J'ai entendu dire qu'il y avait à peu près 33 réserves en Ontario qui ont dû faire bouillir leur eau.

Le sénateur Grafstein : C'était cet été.

Le sénateur Adams : Quand vous avez fait vos recherches, avez-vous établi si le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien a un service chargé de veiller à ce que la population du Nunavut ait de l'eau saine?

Le sénateur Grafstein : En fait, le ministère des Affaires indiennes assume directement cette responsabilité. Cela ne soulève pas de question constitutionnelle et il n'y a pas eu énormément de changement depuis que j'ai commencé ce processus. Vous vivez dans une communauté autochtone. Je ne sais pas si c'est également votre cas, sénateur Sibbeston. Je ne sais pas si vous avez remarqué un net changement ou non. Je me fie seulement aux avis qui ont été émis pendant l'été pour demander aux gens de faire bouillir l'eau et il n'y en a pas eu moins qu'il y a cinq ans, et cela partout au pays.

Si le ministère de la Santé a la preuve que le problème a été réglé, c'est à lui de le démontrer. C'est à Santé Canada et au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien qu'il revient de venir nous dire qu'ils font un bon travail et qu'ils réalisent des progrès. J'avoue honnêtement que je ne constate pas ces progrès.

Le sénateur Angus a également soulevé la question de l'eau en général. Ce n'est pas seulement l'eau potable qui est mauvaise au Canada. Nos ressources en eau douce se classent au deuxième rang mondial, mais elles sont maintenant fortement polluées. Le sénateur Angus sait que je travaille avec le Comité interparlementaire Canada-États-Unis et nos homologues américains. Les États-Unis ont adopté un magnifique projet de loi sur le rétablissement environnemental des Grands Lacs, qui vise à amener le gouvernement américain à investir dans le nettoyage des Grands Lacs. Voici ce qui s'est passé dans les Grands Lacs. Il n'y a là rien de nouveau. C'est de l'eau douce. Nous avons adopté ce projet de loi il y a 10 ans. Il y avait 36 endroits, le long des Grands Lacs, qui étaient pollués, 22 du côté américain et 14 de notre côté. Seulement deux d'entre eux ont été nettoyés au cours des 10 dernières années. Voilà pour ce qui est des mauvaises nouvelles.

Pour ce qui est des bonnes nouvelles, avec la nouvelle majorité démocrate au Congrès, un des principaux représentants démocrates a proposé ce projet de loi. L'Administration Bush l'a adopté et il s'agit maintenant de voir si le financement sera débloqué pour procéder au nettoyage, comme on l'a fait pour les Everglades. Notre comité des banques et le Comité interparlementaire Canada-États-Unis vont travailler fort avec nos collègues américains pour essayer de convaincre les États-Unis de financer ce projet de loi, dans notre intérêt à tous.

Cela va aussi nous aider à résoudre le problème de l'eau potable, car un grand nombre de villes situées le long des Grands Lacs, dans ma région, tirent leur eau potable des Grands Lacs. Il y a aussi un énorme problème de ce côté-là.

Le problème n'est pas simple. Après avoir examiné la situation et consacré beaucoup de temps au problème dans sa dimension générale et plus limitée, j'ai décidé qu'il fallait s'y attaquer de façon graduelle. Si vous cherchez à tout régler d'un coup, vous n'y arriverez jamais. Il faut procéder étape par étape. Comme le disait ma mère « mieux vaut prévenir que guérir » et je crois toujours dans les théories de ma mère.

Le problème se situe à deux niveaux, mais nous devons commencer quelque part. J'estime que cette mesure exercerait des pressions là où il faut sur les provinces, pour qu'elles fassent le travail que la Constitution les a chargées de faire.

Le sénateur Adams : À certains endroits, au début, lorsque le gouvernement est arrivé dans le Nord, c'est tout ce que nous avions. Hudson Bay était alors une petite communauté. Nous avions seulement le lac comme source d'eau potable. Dans l'ancien temps, les gens allaient simplement chercher l'eau et la ramenaient à la maison. Aujourd'hui, dans certaines communautés, il faut construire un réservoir d'eau.

Le sénateur Grafstein : Un réservoir propre?

Le sénateur Adams : Il a fallu creuser un lac pour fournir de l'eau potable à la communauté et il faut pomper cette eau.

Le sénateur Grafstein : Où est-ce?

Le sénateur Adams : Cet endroit s'appelait avant Eskimo Point. Nous l'appelons maintenant Arviat. Nancy Karetak-Lindell, la députée, habite là. Pendant l'été, il faut pomper l'eau. À environ deux milles de la communauté, on a construit un réservoir pour que la communauté ait de l'eau pendant l'hiver. C'est ainsi que les choses se passent dans certaines de ces communautés. Certains lacs ont 200 ou 300 pieds de profondeur. Certaines communautés ont dû construire un réservoir pour avoir de l'eau pendant l'été. Pendant l'hiver, elles doivent puiser leur eau dans ce réservoir et elles doivent la pomper dans les lacs pendant l'été. C'est ce qui se passe maintenant.

Le sénateur Grafstein : Je pourrais peut-être vous fournir matière à réflexion : il y a un périodique intitulé Canadian Magazine for Responsible Business, Corporate Knights with Waterlution. C'est au sujet de l'eau. Le numéro de 2006, volume 5.2 porte sur le problème de l'eau et de la pollution. C'est un numéro intéressant. Encore une fois, sénateur Cochrane, c'est toute l'ironie de la situation au Canada.

Dans cet article, il y a un graphique sur l'eau à risque qui indique quelles sont les entreprises canadiennes qui cherchent à aider les populations des autres pays à s'assurer d'un approvisionnement durable en eau. Il y a là une longue liste d'entreprises canadiennes qui sont toutes cotées à la Bourse de Toronto. Cela comprend Lavalin, EnCana, Barrick Gold Corporation, Alcan, Stantec, First Quantum et Golden Star. Il y a toute une liste d'entreprises qui s'occupent de fournir de l'eau dans ces pays dans le cadre de leurs activités industrielles ou autres. Il y est question de l'Afghanistan et du Tchad.

Voilà une liste, que je trouve étonnante, d'entreprises canadiennes qui investissent dans des pays d'outre-mer dont 20 p. 100 n'ont pas d'eau du tout. Elles essaient de résoudre les problèmes outre-mer grâce à leurs politiques d'investissement. Pourtant, pour une raison que j'ignore, nous ne le faisons pas ici au Canada. N'est-ce pas ironique?

Je vais laisser le comité réfléchir à cela, car il y a un autre de ces graphiques vraiment étonnant. On peut lire :

Voici la liste des entreprises faisant partie de l'indice S&P/TSX, en juin 2006, qui fournissent de l'eau dans les pays confrontés à de graves pénuries d'eau.

Réfléchissez à cela.

Le président : C'est ce que nous faisons.

Le sénateur Grafstein : Je vais laisser le comité y réfléchir, car c'est toute l'ironie de la situation.

Le sénateur Sibbeston : Il y a autre chose d'intéressant et d'ironique. Le Nord est une terre de neige et de glace. Si vous regardez le Nord, tout est blanc. Le plus gros problème technique que l'on connaît dans le Nord c'est pour apporter de l'eau fraîche dans les maisons, car pendant neuf ou dix mois de l'année, l'Arctique est gelé. Vous avez de la neige et de la glace partout, mais il est vraiment difficile d'amener l'eau dans les maisons. J'ai fait partie du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest comme ministre responsable de fournir de l'eau et cela pose un sérieux problème sur le plan technique.

Dans le Nord, il est impossible d'enfouir les réseaux d'eau et d'égouts dans le sol. Aucun des systèmes à la disposition des habitants du Sud ne peut s'appliquer au Nord. Vous ne pouvez pas enfouir dans le sol des tuyaux d'eau et d'égouts. Seulement trois communautés ont des utilidors. Tous les réseaux doivent être installés sur le sol, chauffés et fermés et il faut transporter l'eau et les eaux usées. C'est très coûteux et cela pose beaucoup de difficultés techniques. C'est donc un problème.

Le mieux qu'on ait réussi à faire jusqu'ici, lorsqu'il n'y a pas de lacs à proximité, c'est de dépenser des millions de dollars pour creuser et créer un réservoir dans lequel on pompe de l'eau en été. Pendant l'hiver, on va chercher l'eau sous la glace et on la livre par camion dans chaque maison. C'est ainsi que l'approvisionnement en eau est assuré dans le Nord. C'est très coûteux. L'eau peut être facilement contaminée. On y ajoute une quantité énorme de chlore.

Quand je rentre chez moi, je vais sur la rive pour chercher de l'eau, ou encore je prends de la neige bien propre afin d'avoir une bonne eau claire pour le thé. Je pense que tout le monde en fait autant dans le Nord. À Simpson, on nous livre de l'eau, mais elle est fortement chlorée. Je ne sais pas ce qui risque de vous tuer en premier, si c'est le chlore ou les bactéries. Cela nous pose un problème dans notre région du pays.

Le sénateur Grafstein : J'aurais deux choses à dire. Premièrement, je ne pense pas qu'au Canada, nous nous soyons suffisamment tournés vers les pratiques exemplaires pour l'approvisionnement en eau des communautés autochtones du Nord.

J'en ai parlé à mes collègues de Norvège et de Suède. Je vais en Europe quatre fois par année et je les rencontre régulièrement. Ils ont réglé leur problème. Je n'ai pas eu le temps d'étudier la question, mais le comité pourrait inviter les ambassadeurs de Norvège, de Finlande et de Suède à venir nous dire ce qu'ils ont fait dans leurs communautés septentrionales et comment il se fait qu'ils ont réglé leurs problèmes là-bas, mais pas nous nous.

Ils ont le même niveau de vie et le même régime fiscal que nous. Ils ont des gouvernements unitaires. Ce ne sont pas des gouvernements confédérés, si bien qu'ils n'ont pas d'obstacles constitutionnels. Il serait intéressant de jeter un coup d'oeil sur leurs pratiques exemplaires.

En Europe, l'approvisionnement en eau fait l'objet d'une concurrence, ce qui est une bonne chose. À une certaine époque, lorsqu'on allait en France, on ne buvait jamais l'eau du robinet, mais seulement de l'eau en bouteille. C'est ainsi que nous avons eu l'eau d'Evian et les autres eaux embouteillées. Curieusement, les gens qui venaient au Canada n'hésitaient pas à boire l'eau du robinet. Nous avons maintenant au Canada une industrie de plusieurs milliards de dollars et nous importons de l'eau de pluie de Fidji. C'est devenu une entreprise de plusieurs milliards de dollars. Il est pour le moins curieux que nous ayons la source d'eau potable la plus importante au monde, mais que nous importions de l'eau de Fidji.

Ce soir, lorsque le sénateur Angus et moi irons dîner, nous déciderons d'acheter une bouteille de vin ou une bouteille d'eau minérale de luxe et cette eau de luxe coûtera plus cher que le vin canadien. C'est une particularité bizarre de notre pays.

Le président : Cela dépend de la qualité du vin.

Le sénateur Grafstein : Oui, en effet.

Le président : Vous avez dit que cette mesure ne coûterait pas un sou. Je suis désolé, mais il n'y a aucun régime de réglementation qui ne coûte pas un sou. La question est donc de savoir si le coût de cette réglementation en vaut la peine?

Vous avez émis la crainte, à moins que ce ne soit quelqu'un d'autre, qu'en plus de l'argent à dépenser pour mettre la réglementation en place, pour les inspecteurs, les inspections et le régime nécessaire, on puisse, dans certains cas, demander au gouvernement fédéral d'intervenir et d'assumer cette responsabilité. Ce n'est pas nécessaire.

Pour ce qui est de la réglementation fédérale que prévoit la Loi sur les aliments et drogues, nous ne subventionnons pas le fabricant de flocons de maïs. Nous réglementons les tablettes de chocolat Sweet Marie, les ingrédients qui servent à les fabriquer et leur salubrité, et si la réglementation n'est pas respectée, la loi prévoit des sanctions. Nous ne subventionnons pas la fabrication de ces tablettes de chocolat. Nous réglementons la fabrication et la distribution de la bière de gingembre, mais nous ne subventionnons pas cette boisson.

Dans quelles circonstances le gouvernement fédéral devrait-il intervenir et dépenser de l'argent pour assurer l'approvisionnement en eau plutôt que pour réglementer l'eau, comme on vous en a émis la crainte?

Le sénateur Grafstein : Je crois qu'on essayait de détourner mon attention du fait qu'on ne voulait pas se retrouver avec un conflit fédéral-provincial. On ne voulait pas que certaines provinces disent au gouvernement fédéral que s'il veut apporter son aide, il doit leur faire un chèque. En fait, ce n'était pas une bonne analyse du problème.

Je ferais une prédiction. Si le comité décide d'accepter le principe des lignes directrices obligatoires...

Le président : C'est une oxymore. Ou bien ce sont des règlements ou bien ce sont des lignes directrices.

Le sénateur Grafstein : Je dis que les lignes directrices deviendraient obligatoires sous la forme d'un règlement. Cela suffirait à resserrer immédiatement le contrôle exercé par les provinces. Cette simple annonce ferait comprendre immédiatement aux autorités provinciales qu'elles ont une double responsabilité. Elles ont des responsabilités en vertu de la législation provinciale, de même qu'en vertu de la législation fédérale qui interviendrait de temps en temps pour les rappeler à l'ordre.

Le président : Parce qu'elles ne se seraient pas acquittées de leur mission?

Le sénateur Grafstein : Oui, en vertu de la Loi sur les aliments et drogues. Je ne change pas le règlement d'application de la Loi sur les aliments et drogues. Je dis simplement que si l'adoption de cette loi rend cela obligatoire, les provinces vont s'empresser de la respecter.

N'oubliez pas que les lignes directrices ne sont pas purement fédérales. On se fonde sur la coopération entre le gouvernement fédéral et les provinces pour établir des lignes directrices que les deux parties jugent satisfaisantes. Nous le faisons déjà. Il s'agit seulement de transformer de simples lignes directrices en normes obligatoires.

Le président : Un règlement.

Le sénateur Grafstein : Oui, un règlement ou une norme. Il suffira de l'annoncer pour resserrer immédiatement la surveillance de la réglementation, dans le champ de compétence fédéral, dans les communautés autochtones ainsi que dans les administrations qui assument cette responsabilité et les provinces. C'est ce qui s'est passé aux États-Unis.

Je ne cherche pas la mise en place d'un régime coûteux. Les dépenses supplémentaires seraient pour créer un site Web que le gouvernement fédéral financerait et qui devrait être mis à jour par les provinces. Ce serait, selon moi, une mesure très simple et rentable qui ne coûterait que quelques millions de dollars. Je peux vous dire que cela entraînerait immédiatement des améliorations.

Nous avons différentes options. Nous vivons dans une économie du savoir. Nous sommes branchés. Ce ne sont pas des mesures coûteuses. Je me suis mal exprimé quand j'ai dit que cela ne coûterait pas un sou. Je veux dire que ce serait une simple prime d'assurance contre des coûts de santé se chiffrant en milliards de dollars. Nous savons qu'ils se chiffrent à plusieurs milliards de dollars. Je ne parle pas ici de dépenser des milliards, mais beaucoup moins. Je ne parle pas du registre des armes à feu.

Le sénateur Angus : J'insisterais simplement sur un détail. Comme je l'ai dit tout à l'heure, je sais à quel point vous êtes méticuleux.

Vous avez mentionné les discussions que vous avez eues avec les deux anciens gouvernements fédéraux qui vous ont dit, si j'ai bien compris : « Sénateur Grafstein, s'il vous plaît, ne vous en mêlez pas, car notre gouvernement est en train de faire quelque chose ».

Avez-vous vérifié s'il y avait un plan, dans la mesure où vous avez pu l'établir, pour résoudre le problème constitutionnel comme vous le proposez?

Le sénateur Grafstein : Encore une fois, il ne s'agissait pas de discussions précises. Elles étaient seulement générales et je vous dis ce que j'en pense. J'ai eu l'impression que le gouvernement voulait s'engager, envers les communautés autochtones, à investir davantage d'argent, directement, pour résoudre ce problème.

Le sénateur Angus : Il s'agit clairement d'un domaine de la compétence du gouvernement fédéral.

Le sénateur Grafstein : Cela ne fait aucun doute.

Le sénateur Angus : Cela n'aurait pas été soumis à une surveillance au niveau national.

Le sénateur Grafstein : Non. Le gouvernement a dit qu'il réglerait ce problème. L'argument que j'ai invoqué est celui de l'égalité. Cela devrait s'appliquer aux deux niveaux. On m'a dit que les provinces faisaient telle chose, que le fédéral devrait faire telle autre chose, car c'était sa responsabilité. J'ai répondu à cela que rien n'était fait au niveau provincial. Cela soulève la question de l'égalité. Je ne peux pas comprendre qu'avec une Constitution disant que chaque Canadien doit être traité également, la communauté autochtone n'obtienne pas un traitement égal.

Le sénateur Angus : C'est toutefois une autre question.

Le sénateur Grafstein : Non.

Le sénateur Angus : Telle est la nature de notre fédération.

Le sénateur Grafstein : Telle n'est pas la nature de notre fédération. Selon moi, cela existait déjà avant la Charte. Le gouvernement fédéral avait la responsabilité de traiter les communautés autochtones sur un pied d'égalité. Il n'était pas censé les traiter différemment.

Le sénateur Angus : C'est une relation de fiduciaire.

Le sénateur Grafstein : C'est une fonction d'intendance. Nous avons entendu cette expression. C'est ce qu'a dit la Cour suprême du Canada. J'ai écouté ses paroles. Elles sont importantes.

Cela dit, non seulement le gouvernement a laissé tomber les communautés autochtones, mais il a aussi laissé tomber les autres communautés parce que nous payons la facture. Le contribuable paie la facture des soins de santé. C'est le poste budgétaire le plus important et cela a des conséquences sont désastreuses pour les budgets provinciaux.

Le sénateur Angus : Ce sont des questions intéressantes.

Le sénateur Grafstein : C'est la réponse à votre question.

Le sénateur Angus : Il est stimulant d'essayer d'assurer l'égalité, mais nous parlons de l'eau et de la salubrité des réseaux d'eau potable.

Le gouvernement actuel, par exemple, dans la mesure où nous savons quelles sont ses intentions, dit que sa politique à l'égard de l'environnement consiste à déterminer si la santé des Canadiens est directement touchée par les facteurs environnementaux comme la pollution atmosphérique ou la pollution de l'eau.

En avez-vous discuté avec les fonctionnaires? Avez-vous exercé des pressions sur le gouvernement actuel? Cela fait plus ou moins suite à la question du sénateur Sibbeston.

Le sénateur Grafstein : Non.

Le sénateur Angus : Votre réponse est non?

Le sénateur Grafstein : Ma réponse est non. En fait, il y a eu un silence extraordinaire à ce sujet.

Le sénateur Angus : Cela ne veut rien dire. Je ne pense pas que vous puissiez dire que le gouvernement fédéral n'a rien en préparation.

Le sénateur Grafstein : Je peux seulement vous dire une chose, et cela ouvertement. J'ai un certain nombre d'autres mesures d'initiative parlementaire devant le Sénat. Le gouvernement m'a fait savoir directement, par l'entremise des représentants ministériels, ce qu'il pensait de ces diverses initiatives. Par contre, il est resté tout à fait silencieux au sujet de celle-ci.

Le sénateur Angus : Cela devrait vous encourager.

Le sénateur Grafstein : C'est encourageant.

Le sénateur Angus : Nous allons consulter ces personnes. Si elles estiment que c'est acceptable, nous nous empresserons de donner suite et cette mesure deviendra la Loi Grafstein.

Le sénateur Grafstein : Je sais que le sénateur Banks et le sénateur Cochrane m'accorderont ce privilège, mais je ne peux pas assister à toutes vos audiences sur ce projet de loi.

Le sénateur Angus : Nous sommes là.

Le sénateur Grafstein : Je ne le peux pas, car j'ai d'autres responsabilités qui ne sont pas aussi importantes, mais qui ont quand même leur importance.

Je vais lire très attentivement la transcription de vos délibérations et j'y répondrai à la fin si j'estime que certaines déclarations sont inexactes. Si tel est votre désir — et rien ne vous oblige à accepter, mais je suis prêt à le faire — je vais lire la transcription de vos délibérations.

Si j'obtiens des renseignements supplémentaires sur des choses que j'estime inexactes, j'essaierai de les communiquer au comité. Je pense que le comité est maintenant saisi de ce dossier. Je sais que le sénateur Banks et le sénateur Cochrane sont des gens raisonnables. Nous voulons aller au fond des choses.

J'ai commencé par vous dire clairement que les renseignements que je vous ai présentés sont anecdotiques. Je n'ai pas de personnel de recherche. J'ai recueilli ces renseignements avec l'aide de ma secrétaire, de mes amis au Sénat qui m'aident de temps en temps, et de gens de l'extérieur qui m'écrivent. Je m'engage à lire attentivement la transcription de vos délibérations. Vous me permettrez peut-être, à la fin, avant que vous ne preniez une décision, de revenir pour répondre à ce qu'on dira. Je ne jugerai peut-être pas nécessaire de répondre si vous êtes satisfaits des témoignages, mais si vous avez de sérieux doutes, je le ferai. C'est un projet de loi important. J'y ai consacré près de six années et je ne le fais pas dans mon propre intérêt, uniquement pour protéger ma ville et ma région. La ville de Toronto a de l'eau potable saine, mais je ne pense pas normal qu'alors que nous avons une bonne eau potable à Toronto, il n'y en ait pas dans la communauté de mon ami, le sénateur Adams.

Le sénateur Angus : Vous lirez ces recommandations, comme l'a demandé le sénateur Cochrane, et vous reviendrez nous voir si vous avez des observations particulières à formuler.

Le sénateur Grafstein : Je vais le faire. Ne l'oubliez pas, je ne suis pas un expert de ces recommandations.

Le président : Comme vous l'avez vu à Vancouver, nous n'avons pas la garantie que les grandes villes ont de bons systèmes d'épuration de l'eau, car ces systèmes sont parfois vulnérables face à des événements imprévus.

Le sénateur Grafstein : Permettez-moi de vous citer quelques exemples. Il y a eu un problème à Winnipeg. Ce n'est pas la première fois que le problème se présente à Vancouver. Il y a eu un problème grave à Moncton. Aucune ville du pays, quelle que soit sa taille, n'a échappé à ce problème au cours des 10 dernières années.

Le président : Nous ne parlons pas seulement des réseaux de distribution ruraux et autochtones.

Le sénateur Grafstein : Non.

Le président : Tout comme nous avons l'obligation de fournir de l'eau saine, si c'est effectivement le cas, nous avons aussi l'obligation de veiller à ce que les conséquences des insuffisances du système soient les mêmes partout.

Le sénateur Grafstein : Je suis d'accord.

Le président : Je pense que nous en avons terminé avec nos questions pour le moment, sénateur Grafstein. Nous veillerons à ce que vous receviez la transcription de toutes nos délibérations concernant ce projet de loi et nous pourrions vous demander de comparaître de nouveau. Nous allons nous réunir à huis clos pendant deux minutes pour déterminer qui seront nos prochains témoins au sujet de ce projet de loi.

Le sénateur Grafstein : Comme je m'y suis engagé, je vais lire la transcription de vos délibérations, mais je pense que le ministère a d'importantes responsabilités vis-à-vis de la loi. Le ministre de la Santé est responsable de la santé publique de la nation. C'est clair. J'ai toujours demandé s'il y avait des responsabilités qui allaient au-delà des responsabilités que confère la loi. C'est un sujet de controverse, comme vous le savez, sénateur Angus. J'espère que le comité demandera à Santé Canada, à l'Agence canadienne d'inspection des aliments et au ministère des Affaires indiennes de comparaître. Exigez qu'ils vous rendent des comptes. Je vous demanderais, encore une fois, d'obtenir des témoignages de l'extérieur pour tester la véracité de leurs conclusions. Je lirai la transcription de vos délibérations pour aider le comité à prendre une décision équitable, avec l'esprit ouvert.

Le président : C'est ce que nous faisons toujours, sénateur.

Le sénateur Grafstein : Je le sais.

Le sénateur Angus : Sénateur Grafstein, je voudrais vous remercier et également vous féliciter pour cette initiative.

Le sénateur Grafstein : Merci. Je l'apprécie.

Le président : Nous levons la séance en attendant de nous réunir à huis clos pendant quelques minutes, sénateurs. Sénateur Grafstein, merci beaucoup.

La séance se poursuit à huis clos.


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