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Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule 15 - Témoignages du 27 mars 2007


OTTAWA, le mardi 27 mars 2007

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles, auquel a été renvoyé le projet de loi S-210, Loi modifiant la Loi sur la capitale nationale (création et protection du parc de la Gatineau), se réunit aujourd'hui, à 19 h 20, afin d'en étudier la teneur.

Le sénateur Tommy Banks (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bonjour mesdames et messieurs. Je déclare la séance ouverte. Je suis heureux de vous accueillir à la présente réunion du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Nous poursuivrons aujourd'hui notre étude du projet de loi S-210, une mesure visant à modifier la Loi sur la capitale nationale en ce qui a trait à la création et à la protection du parc de la Gatineau. Ce projet de loi d'intérêt public émanant d'un sénateur vise à établir les limites du parc de la Gatineau et à en garantir le maintien en exigeant que toute modification éventuelle soit soumise à l'approbation du Parlement.

Aujourd'hui, nous entendrons trois témoins : M. Stephen Hazell, directeur général du Sierra Club du Canada; M. Doug Anions, vice-président de la section vallée de l'Outaouais de la Société pour la nature et les parcs du Canada, et Mme Muriel How, présidente du Comité sur le parc de la Gatineau.

Je m'appelle Tommy Banks et je viens de l'Alberta. Je vais vous présenter les autres membres du comité.

Le sénateur Cochrane est la vice-présidente du comité et elle représente Terre-Neuve-et-Labrador. Le sénateur Adams représente le Nunavut et les sénateurs Mitchell et McCoy représentent quant à eux l'Alberta.

Vous avez la parole, monsieur Anions.

Doug Anions, vice-président, Section vallée de l'Outaouais, Société pour la nature et les parcs du Canada : Honorables sénateurs, je suis ravi de prendre la parole devant le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles au nom de la Société pour la nature et les parcs du Canada. Le mémoire que nous avons présenté comprend des recommandations en faveur de l'adoption du projet de loi S-210. Nous croyons qu'il s'agit d'une occasion unique et importante et d'un objectif réalisable.

La Société, dont le siège social est situé à Ottawa, est un organisme national qui compte 13 sections régionales au Canada et qui a mis sur pied des projets dans la plupart des provinces. À l'heure actuelle, nous avons plus de 17 000 membres. Depuis notre fondation, nous nous sommes surtout concentrés sur des parcs nationaux et, à l'occasion, sur des parcs provinciaux. Dernièrement, nous avons commencé à participer à quelques projets de grande envergure, comme le projet de conservation de la région Yellowstone-Yukon, dans l'Ouest canadien, que bon nombre d'entre vous connaissez sans doute. Nous appuyons aussi le projet de conservation du territoire compris entre le parc Algonquin et les Adirondacks, situés plus près d'ici, dans l'est du pays. De plus, nous organisons des campagnes de moins grande ampleur, notamment pour la protection de la rivière Dumoine, dans l'ouest du Québec.

Notre section de la vallée de l'Outaouais a été créée en 1969. Un petit groupe de personnes avait alors exprimé ses préoccupations à l'égard des répercussions sur le parc de la Gatineau d'un plan d'aménagement qui venait d'être annoncé et qui prévoyait la construction de nombreuses routes et installations.

La Société avait réclamé à l'époque une mesure législative et, 30 ans plus tard, elle continue de le faire. Avec le temps, nous avons constaté que le parc de la Gatineau avait une histoire très complexe et qu'il était difficile d'assurer sa protection.

D'un autre côté, nous avons beaucoup appris au sujet de ce parc. Il s'agit d'un écosystème riche et d'une étendue considérable qui pourrait parfaitement être désigné aire protégée. Le parc est situé aux limites de la forêt boréale et il est extrêmement riche en biodiversité et très complexe et intéressant sur le plan géologique. Son histoire a été façonnée par les Algonquins, les commerçants de fourrures, les bûcherons et les pionniers et elle ressemble donc à celle du reste du Canada. Nous sommes convaincus que la protection du parc de la Gatineau est d'une importance primordiale.

Au fil des ans, nous avons également constaté que beaucoup de gens adorent le parc de la Gatineau. Je ne connais personne qui n'aime pas cet endroit.

Lors d'un sondage Decima effectué en 2006 par le Ottawa Citizen, 82 p. 100 des répondants ont déclaré qu'ils étaient en faveur de la protection du parc de la Gatineau et considéraient qu'il devrait devenir un parc national. Dans son plan directeur de 2005, la Commission de la capitale nationale a fait part de ses préoccupations au sujet du morcellement du parc, de la disparition de certains habitats et des répercussions grandissantes des activités récréatives.

Notre organisation partage ces préoccupations. Nous convenons avec la CCN de la nécessité de mettre davantage l'accent sur la préservation des écosystèmes. Dans le récent Plan directeur du parc de la Gatineau, on a déterminé que la CCN devait gérer ce parc en tant qu'aire protégée de catégorie II, telle que définie par l'Union internationale de conservation de la nature, ou IUCN, comme c'est le cas pour nombre de nos parcs nationaux. Il s'agit d'abord de protéger afin de préserver.

Nous voulons que le parc de la Gatineau soit géré comme un important écosystème régional et une zone centrale protégée dans la région de la capitale nationale. Cependant, nous avons certaines inquiétudes au sujet de la capacité de la CCN à protéger le parc. Elle dispose d'un portefeuille bien garni de biens immeubles, a des responsabilités à l'égard de terres, de ponts et de boulevards, doit s'occuper de six résidences officielles et gérer de nombreux baux visant de grandes superficies. La CCN a besoin de beaucoup d'argent pour fonctionner. Il est regrettable qu'elle vende nos terres publiques afin d'obtenir des fonds pour financer ses travaux d'immobilisations. Elle est fortement portée à vendre, étant donné qu'elle peut garder l'argent pour ses activités. Beaucoup de secret entoure les questions territoriales et les ventes de terrain, lesquelles sont souvent réalisées en dépit d'une forte opposition locale.

Néanmoins, nous avons des raisons d'être optimistes. Dans le récent Plan directeur du parc de la Gatineau, on a démontré un intérêt pour la conservation. La CCN prépare un rapport concernant l'état du parc, et un plan de conservation a finalement été mis en œuvre, après toutes ces années.

Nous sommes en faveur du projet de loi S-210. Le parc de la Gatineau a un urgent besoin de protection. Il est possible de se départir de parcelles de son territoire sans obtenir l'approbation du public ou du Parlement. L'empiètement urbain augmente à un rythme alarmant. L'imposition de limites ne serait pas un luxe. C'est ce que nous voulons, et le public aussi. Il faut intervenir sans tarder. Merci d'avoir entendu notre témoignage sur cette question.

Muriel How parlera maintenant de certaines de nos recommandations particulières.

Muriel How, présidente, Comité sur le parc de la Gatineau, Société pour la nature et les parcs du Canada : Monsieur le président, honorables sénateurs, bien que nous appuyions entièrement ce projet de loi, nous souhaitons aussi vivement que les propriétés privées situées à l'intérieur du parc soient toutes achetées. La Commission de la capitale nationale a réalisé bien peu de progrès dans ce domaine, malgré les nombreux documents de planification dans lesquels elle se dit en faveur de l'idée. Nous savons que diverses parcelles de terrain au lac Meech et à Kingsmere n'ont pas été acquises alors qu'elles étaient disponibles. Il semble que la CCN a obtenu des millions de dollars suite à la vente de terrains excédentaires, mais que pas un sou de cet argent n'a servi à des acquisitions pour le parc de la Gatineau.

Par ailleurs, nous avons appris, car j'ai lu les procès-verbaux, qu'il y a actuellement dans le parc, sur le chemin de la Montagne, un terrain connu localement sous le nom de ferme Radmore. S'il n'est pas acheté par le gouvernement, nous craignons que ce terrain devienne le premier lotissement à l'intérieur des limites du parc, et je pense que ce serait très grave.

Une autre préoccupation concerne le fait que, bien que la CCN parle d'acheter des terres, nous avons appris qu'elle envisageait de le faire seulement au juste prix du marché. Mais, honorables sénateurs, avez-vous déjà entendu parler de gens qui voulaient vendre leur propriété au juste prix? Ils en demandent toujours plus. Alors, comment la CCN s'y prendra-t-elle pour se porter acquéreuse des terrains? C'est l'une de nos plus grandes craintes à cet égard.

La SNAP aimerait que l'on crée un programme particulier destiné à l'achat de terres privées au sein du parc, mais je crois qu'on devrait aller plus loin et inclure les terres adjacentes au parc. La partie sud de ce dernier étant grugée par les routes et les développements urbains, nous perdons beaucoup de terrain, alors que ce devrait être le contraire.

Nous recommandons également l'interdiction de la vente de terres fédérales attenantes au parc. Lorsque le projet de loi S-210 a été déposé, même si nous en approuvions l'objet, nous avons jugé qu'il n'allait pas assez loin car, pour demeurer viable, le parc de la Gatineau doit être protégé. Or, le projet de loi S-210 ne contenait rien à cet égard. Nous applaudissons donc les deux amendements proposés par la nouvelle Ligue pour la préservation des terres boisés, qui consistent à préserver le parc pour que les générations à venir puissent en jouir, en tenant compte de l'intégrité écologique. Nous espérons vraiment que ces deux amendements seront ajoutés au projet de loi avant son adoption.

Finalement, nous constatons avec joie que le sénateur Spivak a ajouté la phrase qui, une fois pour toutes, désignera officiellement cette zone « parc de la Gatineau », parce que nous disons toujours qu'il n'a de parc de la Gatineau que le nom.

Nous avons passé les six dernières années à souligner la nécessité de bien des dispositions que renferme cette mesure législative et d'adopter une loi pour protéger le parc, car il est le seul dans tout le pays à ne pas faire l'objet d'une protection, malgré son importance et la proximité de la capitale nationale.

Nous espérons sincèrement que vous tiendrez compte de nos observations.

Stephen Hazell, directeur général, Sierra Club du Canada : Monsieur le président, honorables sénateurs, je représente le Sierra Club du Canada. J'étais auparavant directeur de la SNAP, association au nom de laquelle j'ai comparu à maintes reprises devant la Commission de la capitale nationale et d'autres organismes dans le but d'obtenir une loi du Parlement qui protégerait adéquatement le parc de la Gatineau.

Ce parc est un endroit incroyable, et peut-être que la majorité des gens à Ottawa ne se rendent pas compte à quel point il l'est. Il y a de cela deux hivers, je faisais du ski de randonnée nordique en compagnie d'autres personnes dans la partie ouest du parc, lorsque nous sommes tombés sur un cerf de Virginie qui avait manifestement été attaqué par une meute de loups. Il n'en restait pratiquement rien, hormis la tête, la colonne vertébrale et des morceaux de pattes. Nous avons parlé à des gens qui logeaient au bivouac du lac Taylor et qui, la nuit précédente, avaient entendu les loups attaquer le cerf, mais ceux-ci ont ensuite été dérangés et se sont sauvés. Cet endroit est situé à seulement à 40 kilomètres d'où nous sommes présentement.

Ce parc est une formidable richesse naturelle que l'on peut voir du Parlement, mais nous y faisons à peine attention. La CCN ignore si cette meute appartient à l'espèce menacée du loup algonquin ou à celle, plus répandue, du loup commun. Nous ne disposons d'aucun renseignement là-dessus, parce que bien peu de recherches sont menées dans le parc de la Gatineau — à la différence des parcs nationaux, qui ont d'importants programmes scientifiques —, malgré le fait qu'il s'agit d'un endroit incroyable.

Par ailleurs, le parc de la Gatineau est très abondamment fréquenté par les visiteurs. Nous l'aimons tous. Je suis allé y faire du ski le week-end dernier, et ce fut une expérience printanière fantastique : merci à la CCN d'entretenir si bien les sentiers. On s'en occupe bien, mais on en fait aussi une utilisation intensive. Les visites annuelles par kilomètre carré du parc de la Gatineau représentent huit fois celles du parc de Banff, le plus commercial au Canada. Les visiteurs sont nombreux au parc de la Gatineau et, heureusement, la majorité d'entre eux se concentrent dans son extrémité est, dans la région d'Aylmer, Hull et Chelsea. Il est intensivement fréquenté, mais ne bénéficie d'aucune protection légale. D'où l'importance du projet de loi S-210.

En tant qu'avocat, j'ai effectué une analyse en examinant certains des éléments essentiels qui seraient souhaitables dans le cadre d'une loi sur les zones protégées. Il existe toutes sortes de lois du genre partout au Canada. Nous avons tendance à nous concentrer sur la Loi sur les parcs nationaux, mais il y a également la Loi sur les espèces sauvages au Canada, les diverses lois provinciales, la Loi sur les zones de protection marine, et cetera.

Quels sont les principaux éléments à considérer en matière de loi sur les zones protégées?

1. A-t-on défini les limites du parc?

2. Y a-t-il une interdiction visant la vente de terres publiques au sein du parc?

3. Y a-t-il un processus d'acquisition des terres privées se trouvant dans le parc?

4. Y a-t-il une disposition de déclaration d'objet, une clause sur l'usage public, afin que les autorités publiques et de gestion comprennent ce qu'elles sont censées faire de ce parc?

5. A-t-on donné à l'autorité de gestion des directives stipulant que la protection de l'écologie des lieux est importante? Dans les parcs nationaux, c'est grande priorité, comme il se doit.

6. Y a-t-il des interdictions ou des restrictions concernant différentes utilisations des terres du parc qui sont susceptibles d'être incompatibles avec la protection de son écologie?

7. Y a-t-il une autorité de réglementation et de délivrance de permis adéquate afin que l'organe de gestion — en l'occurrence, la CCN — puisse vraiment faire son travail correctement et gérer l'afflux de visiteurs dans le parc?

En parcourant le projet de loi, vous verrez qu'un certain nombre de ces éléments ont été couverts, tandis que d'autres ont été laissés de côté. Cette mesure législative prévoit certaines dispositions à l'égard de la définition des limites du parc. L'interdiction de vendre des terres publiques est assez bien couverte. Dans le projet de loi, une procédure, une disposition assez élégante est prévue, qui vise à garantir à la Commission de la capitale nationale le droit de premier refus pour les terres mises en vente. Cette disposition assurera la protection du parc contre un des grands fléaux potentiels, soit le lotissement des terres privées à l'intérieur du parc. C'est un moyen très habile d'y parvenir, et nous l'appuyons fortement.

Dans sa forme actuelle, le projet de loi ne précise pas clairement son objet. On en parle dans le préambule, mais pas dans le projet de loi lui-même. C'est pourquoi le Sierra Club est également pour l'adoption des deux amendements proposés par la nouvelle ligue pour la préservation des boisés. Nous pensons que la clause sur l'usage public, pratiquement identique à celle portant sur l'usage des parcs figurant dans la Loi sur les parcs nationaux, est très importante. Nous vous encourageons à amender le projet de loi pour y inclure cette disposition. Voilà notre première proposition. La seconde est liée à l'intégrité écologique, qui est peut-être encore plus importante. L'amendement proposé par la nouvelle ligue pour la conservation des terres boisées obligerait la Commission à faire de la protection de la nature du parc non seulement sa priorité, mais sa priorité absolue.

D'autres initiatives sont également envisageables, mais la protection de l'intégrité écologique devrait passer en premier. En ce moment, la principale mission de la CCN est de développer des terres — même si, bien sûr, elle organise aussi plein d'activités pour la Fête du Canada. Elle possède environ 10 p. 100 du territoire de la région de la capitale nationale. Nous pensons qu'on devrait donner des instructions claires à la CCN pour que, dans cet endroit spécial qu'est le parc de la Gatineau, le respect de l'intégrité écologique soit la priorité numéro un. C'est pourquoi cet amendement particulier est fondamental.

En ce qui a trait à l'autre condition que j'ai décrite, celle qui concerne les interdictions visant les usages inappropriés des terres, aucune interdiction relative à l'exploitation minière, pétrolière, gazière ou forestière n'est prévue dans le projet de loi S-210, alors que dans un monde parfait, il pourrait en être autrement. De même, le projet de loi ne prévoit aucune autre autorité de réglementation chargée de délivrer des permis, ce que nous devrions idéalement changer.

Avec ces amendements, ce projet de loi renferme la plupart des éléments qu'on pourrait souhaiter voir dans une bonne loi sur les zones protégées. D'autres moyens de parvenir à ces fins ont été envisagés, surtout par des représentants de la SNAP. Nous pourrions en faire un parc national, régi par une loi distincte que nous appellerions « loi sur le parc de la Gatineau » ou créer une réserve d'espèces sauvages en vertu de la Loi sur la conservation de la faune. D'autres moyens sont envisageables. Nous avons ce projet de loi devant nous. J'ai cru comprendre qu'il était susceptible d'être adopté; et le Sierra Club vous encourage à le faire. Le projet de loi contient la plupart des éléments que nous voulons y voir; c'est pourquoi nous y sommes favorables et invitons votre comité sénatorial à l'approuver, en tenant compte des amendements que la nouvelle ligue pour la conservation des terres boisées vous a également proposés.

Le sénateur Cochrane : Pourriez-vous me dire quel est actuellement le statut juridique de ce parc?

M. Hazell : D'après ce que j'ai compris, le parc bénéficie d'une protection juridique comparable à celle des parterres de tulipes du parc de la Confédération.

Le sénateur Cochrane : Cela ne m'aide pas beaucoup.

M. Hazell : Il n'a aucune protection juridique. Le territoire est protégé du fait que la CCN en possède ou en contrôle la majeure partie et, dans sa sagesse, la Commission a, dans l'ensemble, fait un assez bon travail pour empêcher qu'il y ait beaucoup de développement dans le parc. Toutefois, comme l'ont dit mes collègues, l'empiètement urbain gagne du terrain. Il y a le boulevard McConnell-Laramée; la possibilité que l'autoroute 50 traverse le parc; le développement de lotissements; une fréquentation touristique à la hausse; des gens qui font de l'escalade dans des écosystèmes très fragiles; et le parc subit des pressions qui iront en augmentant, car la population d'Ottawa et de Gatineau continue de croître, et le nombre de visiteurs aussi.

En ce moment, le parc est très peu protégé. Rien n'est prévu à ce chapitre dans la Loi sur la capitale nationale, qui régit le parc de la Gatineau. Je crois qu'on ne mentionne même pas ce parc dans la loi. On y fait allusion une fois? Mais aucun règlement particulier ne le vise. Certaines dispositions traitent de la circulation routière et de la propriété, mais le régime législatif et réglementaire dans son ensemble est, à mon avis, totalement inadéquat.

Le sénateur Cochrane : Quand le parc de la Gatineau est-il devenu un parc?

M. Hazell : On l'appelle ainsi, mais ce n'est pas vraiment un parc. Il y a eu, en 1960, un décret en conseil qui visait à en définir les limites, et le personnel du sénateur Spivak a mis la main sur une carte, avec l'aide de Jean-Paul Murray, je crois. Des limites ont été tracées sur une carte qui date de 1960 et qui a été jointe au décret mais, même à la CCN, on ne s'entend pas sur le statut du parc. Y fixe-t-on des limites ou pas? Beaucoup de confusion entoure cette question, et je pense que Jean-Paul Murray en a parlé lorsqu'il a comparu ici. C'est un problème, un casse-tête. Peut-être le Sénat pourrait-il y mettre de l'ordre, qu'en pensez-vous?

Le sénateur Cochrane : C'est plus facile à dire qu'à faire. Nous tâcherons de visiter ce parc. Je n'y suis jamais allé. J'adore les parcs nationaux; je les aime beaucoup. Mais celui-ci n'est ni un parc national, ni un parc provincial ou municipal. Qu'est-il donc, alors?

M. Hazell : Sénateur, la question est celle-ci : que pourrions-nous en faire? Certains de mes collègues, à la SNAP, connaissent bien le parc et seraient enchantés de vous servir de guides pour une visite. Nous pourrions en trouver qui seraient ravis de vous y emmener et de vous montrer d'autres endroits que le Camp Fortune.

Le sénateur Cochrane : Nous ferons ce que nous pourrons.

Vous avez dit que le parc de la Gatineau était comparable à un parc national en raison de sa beauté et de ses attraits. Pensez-vous qu'il devrait être désigné parc national?

M. Hazell : Dans un monde idéal oui, mais je vous déconseille d'aller dans cette direction. En vertu de la Loi sur les parcs nationaux du Canada, le gouvernement fédéral doit être clairement propriétaire des terres du parc. Le parc de la Gatineau est unique en ce sens que toutes sortes de terres privées le parsèment. De plus, le gouvernement provincial y a des intérêts qui représenteraient 17 p. 100 du parc, bien que cela, je pense, fasse également l'objet d'un litige. La province en est-elle propriétaire ou pas? Je pense que vous avez déjà entendu des témoignages à ce sujet.

Parcs Canada n'en veut pas vraiment. Je ne m'engagerais tout simplement pas dans cette voie. À ce stade-ci, adoptons ce projet de loi, et laissons la CCN gérer le parc; si nous y intégrons des directives relatives au respect de l'intégrité écologique, cela imposera des contraintes juridiques à la Commission. Voilà ce que je propose.

Le sénateur Cochrane : Des contraintes qu'ils n'ont pas déjà.

M. Hazell : Exactement.

Le sénateur Cochrane : Êtes-vous tous d'accord?

M. Anions : Ce projet de loi contribuera grandement à protéger le parc. Nous appuyons cette mesure législative car cela fait 30 ans que nous la demandons et nous croyons qu'elle fera enfin bouger les choses.

Le sénateur Cochrane : Êtes-vous d'avis que la CCN devrait avoir le contrôle de cette zone?

Mme How : Dans les circonstances, oui, parce que, comme l'a dit M. Hazell, obtenir le statut de parc national ne se fait pas du jour au lendemain. Il faudrait attendre des années. Pour l'instant, c'est ce qu'il convient de faire. Dans cinq ou dix ans, qui sait, une autre loi s'imposera peut-être. Je pense que c'est la bonne façon de faire et que le parc devrait continuer d'être administré par la CCN. Chose certaine, des contrôles plus rigoureux doivent être mis en place. Même la CCN admet que c'est le parc le plus morcelé; il l'est beaucoup trop. On continue d'y construire des routes, d'y vendre des maisons et de le fragmenter encore plus. C'est très décourageant lorsque vous essayez de le préserver pour les générations futures.

Le sénateur Cochrane : Monsieur Hazell, en quoi le maintien de l'intégrité écologique comme première priorité dans la gestion du parc vous empêcherait-il de l'exploiter pleinement?

M. Hazell : La Loi sur les parcs nationaux du Canada exige que Parcs Canada fasse du maintien de l'intégrité écologique sa première priorité dans la gestion des parcs. C'est donc une contrainte qui lui est imposée. Cela signifie qu'avant d'entreprendre quoi que ce soit, ses gestionnaires doivent se pencher sur l'incidence que cela pourrait avoir sur l'environnement et bien comprendre l'ampleur de leurs projets. Que ce soit pour la construction d'une route, qui est souvent nécessaire, ou pour l'aménagement d'un camping, qui est souvent souhaitable, il faut s'interroger sur les conséquences environnementales. C'est la priorité numéro un : y a-t-il un impact quelconque?

Parcs Canada invite les gens à venir découvrir les trésors naturels à travers son réseau de parcs nationaux. Vous pouvez aller à Banff pour magasiner sans toutefois apprécier la nature environnante. L'idée derrière cette disposition est d'essayer d'amener les gens à connaître leur patrimoine naturel. On vise un certain type de visiteurs. Les gens qui veulent magasiner peuvent se rendre à Calgary ou ailleurs. Cela a une incidence, et c'est ce que nous voulons.

Le sénateur Cochrane : Pourrait-on continuer de pratiquer les mêmes activités?

M. Hazell : On ne touchera pas nécessairement aux activités actuelles, comme par exemple le ski ou le vélo. Là où il peut y avoir un impact, c'est en ce qui concerne la circulation des véhicules motorisés dans le parc de la Gatineau. Aucune étude n'a été menée jusqu'à présent pour déterminer si la pollution portait atteinte à l'écosystème. Nous devrons trouver des moyens plus écologiques de se déplacer dans le parc que de voir une personne par voiture. C'est quelque chose qui devrait se concrétiser dans un avenir prochain.

Le président : Avez-vous dit que vous êtes avocat?

M. Hazell : Oui.

Le président : J'ai l'impression que la partie du parc située au Québec appartient à Sa Majesté du chef du Québec. Il existe deux décrets en conseil, l'un du gouvernement du Québec et l'autre du gouvernement du Canada. Les deux gouvernements ont également conclu une entente selon laquelle l'entretien et l'exploitation de la partie du parc appartenant à la province de Québec, soit 17 p. 100, revenaient à la CCN tant que celui-ci demeure un parc, selon la définition qu'en donne l'entente. Est-ce exact?

M. Hazell : C'est ce que je pense, mais personnellement je n'ai pas examiné tous ces documents.

Le président : J'aimerais bien que vous le fassiez, si vous en avez l'occasion. Si vous n'avez pas ces documents, notre greffier peut vous en fournir une copie, puis vous nous direz si nous avons raison de penser ainsi.

Le sénateur Adams : J'y suis allé à quelques reprises. Je suis sénateur depuis près de 30 ans, mais je me suis rendu dans le parc de la Gatineau qu'à la demande du Président de la Chambre. Je sais qu'on y trouve l'ancienne résidence du dixième premier ministre du Canada, Mackenzie King. Je ne suis pas certain s'il l'a faite construire dans le parc ou s'il possédait déjà une propriété qu'il a ensuite cédée à la CCN. Comment cela s'est-il passé entre les riverains du lac Meech et Parcs Canada?

Vous parlez des préoccupations relatives au développement. Les premiers témoins ont dit qu'environ 200 maisons ont été construites dans cette zone. Combien la CCN vendait-elle les terres? Appartiennent-elles au gouvernement ou à la CCN? Comment le parc de la Gatineau est-il devenu une aire protégée?

M. Hazell : D'après ce que j'ai compris, l'ancien premier ministre King possédait déjà ces propriétés et les a ensuite léguées au gouvernement du Canada. On a adopté une loi — je crois qu'il s'agit de la Loi sur le parc de Kingsmere — pour accepter ces propriétés. J'ignore si on les a ensuite cédées au prédécesseur de la CCN. Je pense que c'est ainsi que tout a commencé.

Comme vous le savez tous, notre expert en la matière est Jean-Paul Murray, qui connait l'historique de ce dossier. Cela fait très longtemps que les représentants du gouvernement manifestent leur volonté de protéger le parc de la Gatineau. La Commission Greber en avait aussi parlé. Cette question perdure depuis plus d'un siècle.

Le sénateur Adams : Est-ce après le décès de M. King que le gouvernement a pris possession du parc?

M. Hazell : Oui, dans son testament, M. King l'a légué au gouvernement du Canada.

Le sénateur Adams : Est-ce depuis ce moment-là qu'il est administré par la CCN?

M. Hazell : Tout à fait. On a ensuite pris beaucoup d'expansion car le domaine de Mackenzie King se limitait à l'extrémité est du parc.

M. Anions : Après 1938, le Parlement a réservé des fonds pour l'acquisition de terres et la création d'un parc. Si je ne m'abuse, c'était 100 000 $ en 1938. C'est Mackenzie King qui a ouvert le bal, et c'est à partir de ce moment-là qu'on a commencé à acheter des terres pour le parc. On n'avait pas créé de parc officiel; on avait simplement convenu d'acquérir des terres jusqu'à ce que le parc devienne ce qu'il est aujourd'hui. Il n'a même pas encore été proclamé ni inscrit officiellement dans une loi.

Le sénateur Adams : La CCN est une agence gouvernementale. Vous avez dit plus tôt que des millions de dollars étaient dépensés chaque année pour l'achat de terres. On devrait créer un fonds public à cet effet. Avez-vous une idée de la valeur marchande de ces terres si un particulier voulait les acheter?

Mme How : En ce moment, il y a une résidence à Kingsmere pour laquelle on demande entre 500 000 et 600 000 $. Toutefois, il y a une maison, alors j'ignore combien on demanderait pour une acre de terrain seulement, probablement autour de 100 000 $.

Le sénateur Adams : C'est difficile de réaliser des profits. Présentement, vous n'avez pas grand-chose. Admettons que le parc de la Gatineau devienne un parc national; vous n'avez personne en ce moment qui travaille là-bas, n'est-ce pas? Il n'y a donc personne pour exercer des pressions. Avez-vous quelqu'un qui travaille dans le parc ou est-ce seulement la CCN qui s'en occupe?

Mme How : C'est la CCN qui le gère. Elle a un bureau à Chelsea, d'où elle administre le parc.

M. Anions : Ils ont des agents de conservation et quelques employés.

Le sénateur Adams : Combien?

Mme How : Une vingtaine.

M. Anions : La CCN a plusieurs employés permanents, dont un superintendant, un biologiste et des agents de conservation. Je dirais que moins de 15 employés s'occupent du parc. Toutefois, elle fait affaire avec beaucoup d'entrepreneurs.

Ce sont d'ailleurs eux qui s'occupent de l'entretien du parc et de la gestion du centre de visiteurs.

La CCN a réduit ses effectifs il y a quelques années. Le nombre d'employés est passé de 1 200 à 450. Il y a eu d'énormes compressions, et la CCN a maintenant souvent recours à des sous-traitants pour mener ses opérations.

Le président : Sénateur Adams, des représentants de la CCN comparaîtront devant notre comité jeudi matin, alors nous pourrons leur poser ces questions.

Le sénateur Adams : Si le parc de la Gatineau devient un parc national, est-ce qu'il sera pris en charge par Parcs Canada?

Le président : Ce projet de loi n'a pas pour but d'en faire un parc national.

M. Anions : Ce n'est pas ce que nous recommandons pour l'instant. N'empêche que ce serait possible à long terme, mais en ce moment, nous voulons faire adopter ce projet de loi parce qu'il contribuerait considérablement à protéger le parc, ce qui est notre principal objectif.

Le sénateur Mitchell : Cela m'intéresse beaucoup et je suis très sensible à votre cause. Vous avez dit qu'il y a des terrains privés dans cette zone. Si le parc de la Gatineau devient un parc national, la CCN devra probablement les acheter. Combien cela représente-t-il?

M. Hazell : Elle n'aurait pas nécessairement à les acheter. Ce serait bien que la Commission de la capitale nationale puisse acquérir le plus de terres possible à long terme, mais le Sierra Club préférerait qu'elle dépense son argent intelligemment. Nous aimerions qu'elle consacre le peu d'argent qu'elle a à la protection de la nature dans le parc. Nous ne voudrions pas qu'elle achète des propriétés à Kingsmere valant 500 000 $ chaque, mais plutôt de petites parcelles isolées au milieu du parc. Qui sait comment ces parcelles sont devenues privées? Nous devrions peut-être les acheter pour assurer la meilleure protection possible de la nature.

Il y a tellement à faire, mais cela s'inscrira dans un processus à long terme. Honnêtement, une fois que les limites du parc seront définies, les citoyens qui y vivent deviendront d'ardents défenseurs du parc, comme plusieurs le sont déjà, parce que la valeur de leur propriété augmentera.

Mme How : Ils seront des conservateurs du parc.

Le président : Il n'est nullement question d'expropriation dans cette mesure législative. En vertu de ce projet de loi, quiconque possède des terres à l'intérieur des limites proposées devrait consentir à la CCN le droit de refus s'il décidait de les vendre.

Le sénateur Mitchell : Il y a de nombreux attraits historiques dans ce secteur — le lac Meech, Kingsmere, et cetera. J'y suis allé à maintes reprises avec ma famille et nous avons beaucoup aimé l'endroit.

Le lac Pink a la particularité d'être méromictique. A-t-on répertorié les attraits uniques du parc sur le plan écologique? Est-ce son caractère singulier qui vous motive à vouloir préserver la zone, ou est-ce plutôt parce que celle-ci est bien préservée et que cela vaut la peine qu'on en fasse un parc?

M. Anions : Le parc de la Gatineau présente de nombreuses caractéristiques uniques et importantes qu'on ne trouve nulle part ailleurs. C'est un parc incroyable, de par son relief et ses paysages. Il y a aussi l'escarpement d'Eardley. On y retrouve un habitat appelé savane de chênes sèche, qui est un habitat très sec dans lequel peuvent vivre certaines plantes et fougères uniques. Des cavernes se sont formées suite à la fonte des glaciers. De plus, on peut y observer de nombreuses orchidées rares; il y a plus de 100 espèces de plantes exceptionnelles dans le parc.

Nous avons suffisamment de renseignements pour affirmer avec certitude que le parc de la Gatineau est un lieu très particulier, loin d'être ordinaire. La CCN et divers scientifiques l'ont attesté. Il serait facile de le démontrer.

Le sénateur Mitchell : Monsieur Hazell, vous disiez qu'il n'y a pas de travaux scientifiques précis qui y sont menés, mais qu'il y a un volet scientifique visant les parcs nationaux. Si on faisait de ce parc un parc national, y aurait-il nécessairement un programme scientifique?

M. Hazell : Non. Il faut quand même reconnaître que la Commission de la capitale nationale, selon son plan directeur, cherche à établir un plan de conservation et s'efforce d'accroître ses capacités scientifiques. Des travaux scientifiques sont effectués parce qu'il y a deux ou trois universités dans la région et aussi parce que des étudiants d'autres universités canadiennes s'intéressent au parc et l'étudient. Il n'y a pas de programme scientifique semblable à celui de Parcs Canada, par exemple.

Au fond, c'est ce que nous voulons. Comme l'a dit M. Anions, c'est un endroit très particulier, compte tenu de sa biodiversité, et nous ne comprenons pas complètement l'importance que cela représente. Il nous faut donc protéger le parc, sinon nous risquons de le perdre.

Le sénateur Mitchell : Le parc compte-t-il une pente de ski ou deux?

Mme How : Il y a des pistes sur deux versants d'une colline.

M. Hazell : Il n'y a qu'un exploitant.

Le sénateur Mitchell : Est-ce une entreprise privée?

Mme How : C'est loué au Camp Fortune.

M. Anions : Les installations de Camp Fortune appartiennent à quelques personnes, mais je crois que la CCN a signé un bail à long terme avec les propriétaires, qui leur laisse un peu de liberté. Ils sont censés présenter un plan d'exploitation chaque année, mais je pense qu'ils ne le font pas.

Camp Fortune est une anomalie, en ce sens que ses propriétaires peuvent prendre des décisions ne relevant pas de la gestion du parc. Les parcs nationaux ne permettraient pas ce genre de choses. Voilà quelques-unes des questions qui doivent être réglées d'une façon ou d'une autre.

Le sénateur Mitchell : Je suis un grand amateur de vélo de montagne. Peut-on y pratiquer cette activité?

Mme How : Oui, à beaucoup d'endroits.

Le sénateur Mitchell : Est-ce que cela pourrait occasionner des problèmes écologiques?

Mme How : Oui. Les cyclistes abiment les pistes et en sortent souvent. Ils ne sont pas surveillés, alors c'est un gros problème.

M. Hazell : Mme How a raison, les vélos de montagne causent des dégâts. Je pense qu'ils ont le droit de circuler, mais il faudrait mieux contrôler les cyclistes, car ils peuvent vraiment endommager les pistes. La solution? Ne pas les forcer tous à emprunter la piste no 1, qui est ennuyante pour un vététiste. Peut-être devrions-nous leur offrir plus de possibilités à l'extérieur du parc. Voilà un autre problème auquel nous devrions nous attaquer plus systématiquement.

M. Anions : Ces derniers mois, la CCN a tout de même cherché à rencontrer des groupes particuliers, comme le Club alpin du Canada et les vététistes. Elle essaie véritablement de nouvelles façons de maîtriser certains de ces problèmes. Notre organisation entretient toujours des relations avec la CCN, année après année. On explore aussi d'autres avenues possibles.

Le sénateur Mitchell : Puisqu'elle gère ce parc, passer au niveau supérieur lui permettrait de réaffirmer son engagement de gestionnaire de parcs, qui n'est pas sa vocation principale. Avez-vous discuté avec la CCN pour savoir ce que cela représenterait, et si elle serait capable de développer un parc? Est-ce qu'elle en donnerait la gestion en sous- traitance à un parc national?

M. Hazell : Au fil des années, nous avons discuté de la question de la capacité. Une fois le parc de la Gatineau réellement désigné comme étant un vrai parc, bénéficiant d'une protection juridique véritable, il sera beaucoup plus simple d'obtenir davantage de ressources pour effectuer des travaux scientifiques efficaces et apprendre de l'expérience d'autres agences comme Parcs Canada.

À vrai dire, c'est lié à la structure même de la Commission de la capitale nationale, avec son processus décisionnel pratiquement secret. C'est difficile d'amener le public à collaborer. Comme vous le savez, à Banff, les représentants de la Société pour la nature et les parcs du Canada de la section régionale de Calgary-Banff et les Bow Valley Naturalists travaillent en collaboration avec Parcs Canada, car c'est plus facile de discuter. Il y a aussi des plans de gestion des parcs. Si la Commission de la capitale nationale était une organisation un peu plus ouverte, il serait beaucoup plus facile de lui donner les ressources nécessaires pour mieux gérer le parc.

Le président : Elle aurait besoin de beaucoup plus de ressources qu'elle n'en a actuellement. Comme l'a dit M. Anions, lorsque la CCN a besoin de fonds d'exploitation, elle vend des terrains — c'est du moins ce que nous avons entendu. Cela semble inapproprié lorsqu'il s'agit de gérer ce qui semble être des terres publiques excédentaires. Si c'est un parc, il ne peut pas y avoir de terrains excédentaires, non?

M. Anions : Non. J'ai travaillé pour des parcs nationaux pendant presque 30 ans et cela n'est jamais arrivé. Je ne me souviens pas avoir entendu parler d'une telle chose. Une fois les limites du parc étudiées et fixées, il ne pouvait pas y avoir de terres excédentaires. On pouvait, à l'occasion, essayer d'acquérir plus de terrain, mais cette idée de vendre une propriété pour financer la construction d'autoroutes, de routes, de boulevards ou d'édifices, c'est quelque chose que Parcs Canada ne fait pas. Les fonds obtenus sont des crédits votés par le Parlement, et c'est ce qui est utilisé.

Le président : C'est pareil pour la CCN.

M. Anions : La CCN a dû chercher d'autres sources de financement parce que sa responsabilité est énorme. Elle s'occupe de six résidences officielles et de l'entretien de ponts, et l'argent obtenu n'est pas suffisant pour toutes ces installations.

Le sénateur Cochrane : J'aimerais poser une question à propos des vélos de montagne. Je sais que le sénateur Spivak présente ce projet de loi parce qu'elle ne voudrait pas que des vététistes se promènent un peu partout dans les zones vierges.

Le sénateur Mitchell : On ne parle pas de vélos moteurs.

Le sénateur Cochrane : Peu importe, sénateur, cela abime la végétation.

Est-ce que ces cyclistes peuvent emprunter des pistes spéciales? Y a-t-il de la surveillance pour s'assurer qu'ils respectent les consignes?

Mme How : Il n'y a pas assez d'agents de surveillance et les pistes sont loin de la zone principale. On fait de nouvelles pistes. J'ai marché le long d'une piste qui part de l'une des promenades. En général, les gens la connaissent peu, mais j'y ai rencontré des vététistes. Ils l'empruntent parce qu'ils ont moins de risques de se faire prendre et parce qu'elles sont plus intéressantes. Ils adorent passer par-dessus les racines, faire toutes sortes d'acrobaties et montrer leur adresse.

Le sénateur Cochrane : Peu importe.

Le président : Et ils finissent parfois par se casser une clavicule.

Le sénateur Cook : Comment les limites du parc sont-elles définies?

M. Hazell : Comment sont-elles déterminées? Une partie de notre équipe a fait des vérifications du côté ouest du parc, dans la région du Pontiac. Cette zone n'est pas très fréquentée. Depuis, le parc est mieux délimité. Je n'ai pas vérifié cela moi-même. Par contre, au moment de la vérification, on ne pouvait pas savoir si on était dans le parc ou pas. Il y a plein de larges ornières creusées par les VTT. Je dirais que ces derniers ont causé plus de problèmes que les vélos de montagne — dans ce secteur du parc, du moins.

Si nous pouvions délimiter le parc plus clairement et fournir plus de ressources, cela pourrait devenir un avantage économique pour la région du Pontiac qui ne profite à peu près pas de la présence du parc. Il s'agit d'une région dont l'économie tourne au ralenti et qui a grand besoin d'aide. Si quatre ou cinq agents de conservation étaient placés vers l'extrémité ouest du parc pour détourner le trafic des visiteurs vers cette extrémité du parc, ce serait une bonne chose pour le Pontiac.

Mme How : Ce ne serait pas la même chose pour ceux qui pratiquent la culture de la marijuana.

Le sénateur Cochrane : Les limites sont-elles définies dans ce projet de loi?

M. Hazell : Je ne pourrais pas dire si elles sont exactes telles qu'elles sont décrites.

Le président : Si le projet de loi était adopté, ce seraient là les limites. Sont-elles exactes?

M. Hazell : Je ne comprends toujours pas.

Le président : Laissez-moi formuler la question plus clairement. À l'heure actuelle, il n'y a pas une seule limite du parc sur laquelle tout le monde s'entend.

Mme How : Pas autour de la totalité du parc, non. C'est exact.

Le président : Si le projet de loi est adopté, il sera lié à son annexe qui décrira, au moyen d'une carte — qui n'est pas là en ce moment —, une limite précise qui deviendra alors une limite au sens de la loi. Ayant examiné cette carte, êtes- vous à l'aise avec ce qu'elle propose?

Mme How : Je ne pense pas que je serais en mesure de discuter de cette situation, parce qu'on peut présumer que les limites seront définies très attentivement et qu'il s'agira des limites légales.

Le sénateur McCoy : Oui; selon l'endroit où ils ont tracé la carte.

Mme How : À notre connaissance, elles seraient exactes.

M. Hazell : Personnellement, je n'ai pas étudié la carte pour voir s'il y avait des divergences ou non.

Le président : Peut-être voudriez-vous jeter un coup d'oeil sur la carte qui est actuellement utilisée comme un exemple de ce qui deviendrait l'Annexe 2 de la loi et nous dire si vous êtes d'accord avec les limites indiquées. Si la loi est adoptée, nous ne voudrions pas nous rendre compte après coup que nous avons oublié une zone ou une route.

M. Anions : L'arpentage initial effectué en 1960 a été utilisé lorsqu'ils ont fait du parc de la Gatineau un sanctuaire de gibier dans la province de Québec. Il y a des endroits où la limite est restée la même, mais il y a également des endroits où elle a changé parce que des terrains ont été vendus. D'autres terrains ont été acquis, comme la vallée du Ruisseau-Meech. Nous ne sommes pas certains si la vallée sera incluse dans ce parc.

Il y a beaucoup de confusion à ce sujet. La CCN est propriétaire de beaucoup de terrains. Elle est propriétaire de 10 p. 100 de la région de la capitale nationale et elle est propriétaire de terrains autour du parc de la Gatineau.

Cependant, le simple fait qu'elle est propriétaire des terrains ne signifie pas que ces terrains feront partie du parc.

Le président : De toute façon, la CCN ne fixera pas la limite. C'est le Parlement qui le fera. Si vous ne le savez pas maintenant, je veux que vous y jetiez un coup d'oeil lorsque l'Annexe 2 sera arrêtée et présentée, ce qui devra se faire avant l'adoption du projet de loi, pour voir si vous êtes d'accord que l'on n'a pas inclus cette partie. Vous avez tout à fait raison. Cela ne dit pas que les terrains de la CCN sont dans le parc. Ce n'est pas ce que cela dit.

Le sénateur McCoy : En fait, c'est le Cabinet, le gouverneur en conseil, qui dispose de 60 jours pour faire cela. Cela fait encore plus peur à certains égards, mais à d'autres égards, c'est plus accessible.

J'ai une question au sujet du sondage de Decima Research de 2006. Avons-nous une copie de ce sondage? Est ce que vous allez partager ces résultats avec nous de manière que nous sachions combien de personnes ont participé au sondage.

M. Anions : Il y en avait 400.

Le sénateur McCoy : S'agissait-il de résidents du parc?

M. Anions : Je pense que des résidents étaient inclus, mais je pense qu'il s'agissait d'un sondage aléatoire quelconque.

Le sénateur McCoy : Il serait utile de connaître les fondements scientifiques du sondage, surtout à la lumière de l'intérêt actuel que la question suscite dans la région. À Chelsea, c'est le sujet de l'heure, par exemple. Ceci ne reflète pas l'autre point de vue dans cette histoire. Vous pouvez vouloir ou non commenter l'autre point de vue, celui de ceux qui n'appuient pas ce projet de loi. Sinon, c'est correct, nous pouvons avoir accès à ce genre d'information ailleurs aussi.

M. Anions : Bien que, personnellement, je ne connaisse pas de gens qui s'opposent fortement, je pense que certaines personnes qui s'opposeraient sont celles qui aimeraient voir plus de développement dans le parc, comme des routes. Il y a probablement suffisamment de gens qui aimeraient voir une promenade traverser le parc comme cela était prévu initialement. Nous avons lutté contre ce projet. Il y a des gens qui aimeraient certainement avoir plus de routes, mais je pense qu'il s'agit d'un groupe relativement restreint. Je ne les connais pas. J'espère que c'est un petit groupe.

M. Hazell : Si on remonte à il y a un certain nombre d'années, nous avons eu un certain nombre de discussions avec les maires et les échevins des diverses municipalités qui longent le parc. Certains se sont montrés favorables et d'autres, non. Nous connaissons un conseiller municipal dans le Pontiac qui était farouchement opposé à une protection juridique du parc. Il était un de ceux qui cultivaient de la marijuana à l'intérieur du parc, alors il s'y opposait. Nous avons rencontré le maire de Chelsea et quelques conseillers municipaux là-bas. À ce moment-là, nous ne parlions pas des détails précis de ce projet de loi, mais d'une protection législative. Ils avaient un appui modéré à l'égard de cette protection et le maire était un peu prudent.

Il y a des avantages économiques importants liés au fait d'avoir un parc national à votre porte. L'expérience d'une collectivité comme Canmore, par exemple, en témoigne. Une partie du travail comprend un effort de communication pour expliquer aux gens qui vivent à Chelsea et à Aylmer qu'il y a des avantages et que ces avantages ne peuvent qu'augmenter avec le temps au fur et à mesure que les pressions en matière de développement augmenteront.

Le président : Nous allons inviter le maire de Chelsea, par exemple, et d'autres propriétaires fonciers à venir nous parler de cette question.

Le sénateur McCoy : Ayant été l'auteure d'une stratégie de mobilité régionale pour un corridor important, je pense que vous avez raison au sujet des collectivités qui sont la porte d'entrée d'un parc. Il y a des avantages. En termes de gestion, vous avez fait quelques recommandations, dont l'une est de rendre explicite la priorité d'assurer l'intégrité écologique. Vous appuyez l'interdiction de la vente de terres publiques. Je crois comprendre que vous appuyez le droit de premier refus. Ce qui me frappe, c'est la mesure suivante. Si la CCN voulait effectivement utiliser son argent de manière stratégique, comme vous le laissez entendre, pour faire l'acquisition peut-être des terrains meilleur marché initialement pour consolider ses acquis et décider de refuser d'acheter ce manoir de 500 000 $, alors, ce dernier peut être vendu sans plus de formalités. Le propriétaire suivant, l'acheteur pourrait encore une fois être un promoteur, et si ce terrain est suffisamment grand, il pourrait le subdiviser. Il n'y a pas de protection de deuxième niveau ici.

Mme How : Je suppose que c'est vrai, mais je pense que vous allez constater que la plupart des propriétés ne sont pas suffisamment grandes pour être subdivisées. Alors, je pense que nous n'avons pas grand-chose à craindre de ce côté-là.

M. Anions : Nous espérons qu'avec le temps, des municipalités comme Chelsea apporteront leur aide à cet égard. Elles peuvent certainement faire davantage en termes de zonage et de restrictions pour empêcher la création de subdivisions et certaines formes de développement. Nous avons encore beaucoup de travail à faire pour convaincre ces municipalités et obtenir leur appui pour le parc.

Le sénateur McCoy : Est-ce que vous tentez d'obtenir ce genre de protection ou cet énoncé très important : même si nous n'achetons pas, ne le faites pas? Est-ce ce que vous êtes en train de me dire? Peut-être que c'est quelque chose de plus sensé.

M. Hazell : Vous soulevez un très bon point et c'est une lacune. Je pense qu'il est nécessaire d'avoir les gens qui vivent dans le parc de notre côté. Cela peut être difficile pour certains d'entre eux. Nous devrions essayer le plus possible d'obtenir leur appui. En empiétant davantage sur leurs droits en matière de propriété privée, je crains que nous allons les perdre.

Le sénateur McCoy : C'est probablement une question à poser à la CCN. Il existe une approche collaborative assez rentable pour gérer les propriétés, les parcs de ce genre, c'est l'approche des « limites aux changements acceptables ». Je suis certaine que vous connaissez cette approche. Elle a été utilisée pour la première fois par le U.S. National Forest Service qui possède de nombreuses propriétés récréatives en milieu sauvage à usages multiples. Au cours des 10, 15 ou 20 dernières années, ils ont raffiné leur approche. Il s'agit d'une approche collaborative entre les autorités, les utilisateurs et les environnementalistes, qui ne sont pas tous des groupes distincts. Peut-être voudriez-vous jeter un coup d'oeil sur cette question, parce qu'il peut s'agir d'une façon peu coûteuse de gérer et de surveiller votre propriété. Cela pourrait commencer à établir des ponts dans ces municipalités et cela pourrait certainement aider la capacité de la CCN.

M. Anions : À Adirondack Parks, il y a une collaboration où l'appui bâtit d'autres appuis. Nous appuyons cette approche.

Le sénateur McCoy : C'est fondé sur la sous-traitance. Si vous marchez dans une de ces pistes et que vous voyez les feux arrières du sénateur Mitchell devant vous, cela pourrait être l'indication que cela est allé trop loin.

Le président : Je veux vous demander d'être particulièrement vigilants lorsque ce projet de loi ira de l'avant parce que, comme l'a signalé le sénateur McCoy, il y a un déclencheur spécifique concernant la limite de ce parc. La limite du parc est la limite qui existe dans l'esprit de quelqu'un, en quelque part, tel que défini le jour où un projet de loi intitulé Loi modifiant la Loi sur la capitale nationale est déposé devant le Parlement au cours de la 1re session de la 39e législature. Ce projet de loi a maintenant été déposé et la limite qui sera établie par le gouverneur en conseil lorsque ce projet de loi sera adopté est la limite qui existait le jour où le projet de loi a été déposé. Quelle est cette limite?

Le sénateur McCoy : Une recommandation pourrait être faite pour modifier légèrement cette formulation, s'il y avait des objections importantes.

Le président : C'est pourquoi nous demandons à tout le monde de bien vouloir nous dire ces choses.

J'ai quelques questions. Premièrement, le droit de premier refus pourrait ne pas être exercé si une propriété qui est extrêmement coûteuse ou stratégiquement importante, qui pourrait peut-être permettre de relier des parties autrement disjointes du parc, si la CCN n'arrivait pas à réunir les fonds nécessaires dans le délai de 60 jours. Dans un tel cas, les propriétaires fonciers pourraient vendre la propriété à qui ils veulent. Est-ce que vous êtes d'accord avec cela?

M. Hazell : Nous ne sommes pas d'accord, mais c'est probablement quelque chose avec laquelle nous devrons vivre. La CCN n'a pas d'autre façon de persuader les propriétaires fonciers qu'il n'est pas dans leur intérêt de subdiviser une propriété. Il y a un exemple de propriétaire qui voulait subdiviser une propriété à l'intérieur du parc. Cependant, il avait besoin de services qui devaient traverser les terres de la CCN. La CCN n'a pas accepté de fournir ces services, alors il n'y a pas eu de subdivision. Elle n'a pas d'autres outils à sa disposition, bien qu'ils ne soient pas aussi efficaces que les outils réglementaires.

Je ne vois pas de façon de contourner ce dilemme, sénateur. C'est un bon point.

Le président : Il y a évidemment, dans toute cette question, l'intérêt du grand public et le fait que tout le monde s'entend pour dire qu'il doit y avoir un parc dans les limites de la région de la capitale nationale, et il se trouve qu'il y a justement un parc florissant qui se trouve là.

M. Anions : Lorsqu'on a pris la décision de créer un parc national dans la péninsule de Bruce, il n'y avait presque pas de terres fédérales à cet endroit. Parcs Canada essaie d'assembler un parc à cet endroit depuis environ 10 ans. Comme ils sont en train de créer un parc, une attribution de fonds spéciale a été faite pour permettre à Parcs Canada d'acquérir une certaine quantité de terrains lorsqu'ils deviennent disponibles. C'est de l'argent qui a été mis de côté pour créer le parc. En 1938, Mackenzie King a mis de côté 100 000 $ pour commencer à acheter des terrains pour créer un parc. La CCN doit faire la même chose. Elle doit obtenir de l'argent du Parlement pour améliorer le parc. Ce qui fait défaut, c'est une stratégie ou un plan précis pour acquérir les propriétés privées ou créer le parc.

Le président : En fait, il y en a un, et il est décrit dans ce projet de loi.

M. Anions : Oui, c'est ce que nous demandons qu'il y ait dans le projet de loi.

Le président : Une loi du Parlement ne peut exiger l'attribution de crédits parlementaires à quiconque année après année à certaines fins. Vous ne pouvez pas lier un gouvernement futur dans une loi du Parlement.

La situation que je décrivais était, espérons-le, hypothétique, mais si vous étiez un propriétaire foncier et que vous vouliez vous assurer d'avoir l'occasion de vendre votre terrain à quelqu'un d'autre que la CCN, pour quelque raison que ce soit, le moment stratégique pour mettre la propriété en vente serait le 10 février, parce que la probabilité de pouvoir obtenir un crédit parlementaire 60 jours avant la fin de l'année financière est extrêmement faible. C'est le scénario le plus pessimiste.

Nous allons parler aux propriétaires fonciers et je veux obtenir leur avis sur cette question. Supposons que je suis un propriétaire foncier et que la propriété a été entre les mains de ma famille pendant des années. Il y a eu quelques exemples de cela. Je crois que la ferme Radmore est une propriété où c'est le cas.

Personne n'a jamais rien dit au sujet d'un parc, de l'expropriation ou du premier droit de refus. Tout ce que je sais, c'est que j'habite sur cette propriété depuis avant ma naissance. J'ai dit plutôt qu'il y avait un droit du grand public et qu'il devrait y avoir un certain concept de parc fédéral sur le territoire de la CCN. Toutefois, cela entre directement en conflit avec le droit des propriétaires fonciers — et nous devons respecter les droits de propriété — de maximiser ce qu'il pourrait obtenir de la vente de cette propriété.

Mme How nous a expliqué plus tôt comment nous pourrions déterminer de manière précise la juste valeur marchande. Cependant, si j'ai 100 acres à vendre, la juste valeur marchande n'est-elle pas la valeur que j'obtiendrais si je pouvais subdiviser le terrain et le développer comme le ferait un promoteur? Est-ce qu'il ne serait pas raisonnable que je m'attende à être compensé pour le fait d'avoir perdu cette possibilité?

Personne n'a dit cela à mon père et personne n'a dit cela à mon grand-père. Est-ce un traitement équitable ou dois-je renoncer à ce droit dans l'intérêt du Canada? Est-ce que je suis obligé par une loi du Parlement de devenir aussi généreux que l'était Mackenzie King?

M. Hazell : Je pense qu'il y a un équilibre. Pour employer un angle légèrement différent, j'ai relu aujourd'hui la Loi sur la capitale nationale et on y fait allusion aux dispositions relatives à l'expropriation de la Loi sur l'expropriation. Je n'ai pas fait de recherche juridique sur la question et peut-être que vous pourriez demander à votre conseiller juridique de le faire. Je me demande si les droits d'expropriation en vertu de la Loi sur l'expropriation s'appliqueraient si ce projet de loi était adopté. Il pourrait s'avérer que la Commission de la capitale nationale aura moins de facilité à acquérir des propriétés que c'est le cas à l'heure actuelle.

Le président : Cela est entièrement possible.

M. Hazell : Les propriétaires fonciers devraient se réjouir; ils ne seront pas expropriés. Je ne suis pas certain de la fréquence avec laquelle la Loi sur l'expropriation est utilisée maintenant, mais je suis certain que les parcs nationaux n'ont plus accès à cette loi.

Le président : Rien ne peut devenir un parc national tant et aussi longtemps que tous les terrains ne sont pas la propriété de Sa Majesté la Reine du chef du Canada. Il ne peut y avoir de propriété privée à l'intérieur d'un parc national.

M. Hazell : Je crois qu'il y a certains intérêts à bail, n'est-ce pas?

Le président : Vous pouvez louer, mais vous ne pouvez pas être propriétaire. Il n'y a pas de propriété privée dans un parc national.

M. Anions : À pointe Pelée, on a acheté les chalets dans les années 70; alors, ils n'existent pas aujourd'hui.

Le président : D'après l'information que nous avons aujourd'hui, c'est une chose qui n'existe pas. À Banff, par exemple, beaucoup de gens sont propriétaires d'une maison, mais ils ne sont pas propriétaires du terrain. Il s'agit d'un bail de 41 ou 42 ans.

Le sénateur McCoy : Cela s'applique aux parcs nationaux.

Le président : Oui, ce qui n'est pas le cas ici. Dans nos recommandations au Sénat, nous voulons être prudents pour ne pas faire partie de ceux qui empiètent sur les droits personnels dans l'intérêt d'une grande collectivité ou des droits nationaux. C'est la raison pour laquelle nous posons ces questions.

M. Hazell : Je pense que Sierra Club du Canada dirait que c'est un prix juste à payer, étant donné le fait que vous allez, fondamentalement, être entouré d'un actif naturel extraordinaire et que vos enfants et vos petits-enfants pourront continuer de jouir de ces propriétés par le biais d'un contrat de fiducie ou uniquement par des dispositions simples dans votre testament. Cela ne touchera pas vos droits ni ceux de vos enfants. C'est uniquement si vous avez l'intention de faire de l'argent avec la propriété que vous allez nous considérer comme un obstacle sur votre chemin.

Le président : Si cela devait arriver, nous voulons nous assurer que vous obtiendrez un juste prix.

Pour payer les coûts d'exploitation des parcs nationaux — parce qu'ils n'arrivent pas à payer tous les coûts à partir des crédits parlementaires et qu'ils ne reçoivent pas suffisamment d'argent pour gérer les parcs de manière appropriée —, ils ont été obligés d'imposer des frais d'entrée et d'utilisateur, qui sont assez considérables. Si nous disons à la CCN que nous nous attendons que, dans son rapport annuel au Parlement, elle dise : « Voici ce que nous avons fait dans ce parc fédéral » et si les attentes du public et du Parlement sont qu'il s'agira du genre de parc qui servira à protéger les intérêts écologiques, il y a des coûts rattachés à cela. Ce genre de chose coûte de l'argent.

Pensez-vous que les gens qui ont participé à votre sondage, qui, d'après ce que je crois comprendre, ne payent rien pour aller dans le parc de la Gatineau, accepteraient cette idée?

Mme How : À l'heure actuelle, il y a des frais pour le ski de fond.

Le président : À l'heure actuelle, pour aller dans un parc, il y a des frais. Dans quelle mesure seront-ils heureux de payer pour cela? Dans le domaine du spectacle, en anglais, on appelle cela « tight gate ». Cela veut dire que vous les laissez entrer gratuitement, mais qu'une fois qu'ils sont à l'intérieur, vous leur faites payer le gros prix. Les parcs nationaux fonctionnent de cette manière. Vous payez pour avoir accès au territoire du parc. Voici quelles sont les limites. Lorsque votre voiture est à l'entrée, vous payez une somme considérable si vous voulez entrer dans le parc et davantage si vous avez l'intention de rester plus d'une journée. Est-ce que les gens qui utilisent le parc à l'heure actuelle se réjouiront de cette perspective?

M. Anions : Lorsque j'ai travaillé au parc national de Prince Albert, nous avions des barrières et toutes les voitures devaient s'arrêter et payer des frais. Pendant un certain temps, il y avait des frais pour les véhicules et des frais pour les familles. Au début, lorsque le système a été implanté, il y avait des gens qui étaient très mécontents et certaines personnes qui ne pouvaient pas vraiment s'offrir ces dépenses. Avec le temps, les gens ont fini par accepter l'idée graduellement. Après un certain nombre d'années, cela fonctionne très bien. Les gens se font à l'idée, surtout lorsqu'ils savent que l'argent sera utilisé pour soutenir et conserver le parc. S'ils pensent que l'argent servira à faire quelque chose pour le parc, c'est encore mieux.

M. Hazell : La question des frais pour avoir accès aux parcs est un sujet controversé dans la communauté environnementale. En Colombie-Britannique, on a envisagé la possibilité d'imposer des frais pour l'accès des parcs provinciaux. Il y a eu un débat assez important et beaucoup de mécontentement face à cette mesure. J'ai appuyé l'imposition des frais, mais je pense que les frais devraient être précisés dans la loi. D'après la lecture que je fais de la Loi sur la capitale nationale et de son règlement, la CCN n'a pas l'autorité nécessaire pour exiger les 10 $ que je paye chaque fois que je fais du ski de fond dans le parc. Elle n'a aucune autorité pour imposer ces frais. Il n'y a pas de règlement sur les frais; c'est ce que je veux dire. Je pense qu'il devrait y en avoir un.

Je pense que des frais devraient être imposés aux personnes qui conduisent leur voiture dans le parc et non pas uniquement aux fondeurs. Il y a un certain degré d'iniquité dans la façon dont les frais sont actuellement imposés pour l'utilisation du parc. Vous avez raison : c'est une question controversée. Il y aura beaucoup de résistance à cet égard. Toutefois, cela ne fait pas partie de votre projet de loi. Peut-être pourrions-nous faire des petits pas ici et ensuite, prendre un règlement pour l'autorité habitante.

Le président : Savez-vous si les frais que l'on paie actuellement dans le parc de la Gatineau sont payés à des intérêts privés ou à la CCN?

Mme How : Je pense qu'ils sont payés à la CCN.

M. Anions : Les affiches sur les pistes de ski de fond portent l'indication Lafleur.

Mme How : Je fais mon chèque à l'ordre de la Commission de la capitale nationale et l'argent est collecté au Centre des visiteurs.

Le président : Peut-être que c'est un peu des deux.

Chers témoins, merci beaucoup. Avez-vous un dernier mot à dire avant de partir?

M. Anions : Je veux simplement vous remercier de nous avoir laissés vous remettre nos mémoires; nous en sommes très heureux.

Mme How : Nous espérons que le tout sera adopté.

M. Anions : Nous sommes derrière vous à 100 p. 100.

Le président : Merci beaucoup de votre temps.

La séance est levée.


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