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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Finances nationales

Fascicule 11 - Témoignages du 27 février 2007


OTTAWA, le mardi 27 février 2007

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui à 10 h 17 pour l'étude du Budget des dépenses supplémentaires (B), déposé au Parlement pour l'exercice se terminant le 31 mars 2007.

Le sénateur Joseph A. Day (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Je vous souhaite la bienvenue à cette 29e réunion du Comité sénatorial permanent des finances nationales, qui débute maintenant. Je suis le sénateur Joseph A. Day et j'exerce les fonctions de président de ce comité.

[Traduction]

Le comité se penche sur les dépenses gouvernementales, que ce soit directement, sur le budget lui-même, soit indirectement, en étudiant les projets de loi qui accordent des pouvoirs d'emprunt ou qui portent sur les propositions de dépenses établies dans le budget.

Aujourd'hui, nous allons entreprendre l'examen du Budget supplémentaire des dépenses (B) du gouvernement déposé au Parlement pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 2007.

Le Budget supplémentaire des dépenses (B) de 2006-2007 requiert l'approbation du Parlement pour l'engagement de dépenses qui n'ont pas été suffisamment détaillées ou qui n'étaient pas connues lors du dépôt du Budget principal des dépenses ou du Budget supplémentaire des dépenses (A) 2006-2007 déposé plus tôt cette année et que notre comité a examiné avant Noël.

Je tiens à souhaiter la bienvenue à notre témoin de ce matin, qui n'en est pas à sa première comparution devant notre comité, mais qui comparaît aujourd'hui pour la première fois dans son nouveau rôle de président du Conseil du Trésor, l'honorable Vic Toews.

M. Toews a été élu pour la première fois à la Chambre des communes en 2000, et a été réélu en 2004 et en 2006. Il a également occupé le poste de ministre de la Justice et procureur général du Canada. Avant de faire carrière en politique fédérale, le ministre Toews a siégé comme député à l'Assemblée législative du Manitoba. Il est avocat de formation et possède beaucoup d'expérience dans ce domaine. M. Toews a également été conseiller juridique du premier ministre du Manitoba lors des discussions sur l'accord du lac Meech en 1990 et a été nommé conseiller de la reine en 1991.

Accompagnent aujourd'hui M. Toews, et ce ne sont certes pas des étrangers à notre comité non plus, du Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada, nous avons le plaisir de souhaiter la bienvenue à nouveau à M. David Moloney, secrétaire adjoint principal, Secteur de la gestion des dépenses, et à Mme Laura Danagher, directrice exécutive, Division des opérations et prévisions de dépenses, Secteur de la gestion des dépenses. Nous allons tous nous souvenir de ces titres.

Monsieur le ministre, je vous cède la parole. Je crois savoir que vous souhaitez faire un bref exposé, après quoi les sénateurs auront bien hâte de vous poser des questions sur le Budget supplémentaire des dépenses (B).

L'honorable Vic Toews, C.P., député, président du Conseil du Trésor : Je suis heureux d'être ici et de discuter du Budget supplémentaire des dépenses (B) pour 2006-2007.

Après ma déclaration d'ouverture, nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions et de réagir à vos commentaires. Étant donné la vaste expérience que possèdent mes deux collègues, et mon manque d'expérience, je crois que ce sont eux qui répondront à la plupart des questions. Non seulement les honorables sénateurs en tireront quelque chose, mais moi aussi.

Le dépôt du Budget principal et du Budget supplémentaire des dépenses afin de demander au Parlement l'autorisation de procéder à des dépenses constitue un volet fondamental de la surveillance des plans de dépenses du gouvernement par le Parlement. Ces dernières années, à la demande des parlementaires, nous avons apporté plusieurs améliorations aux documents du budget des dépenses afin de leur fournir une information plus significative et d'accroître la convivialité de ces documents.

Entre autres, nous avons amélioré la clarté des tableaux sommaires, nous avons présenté les besoins financiers bruts pour chaque organisation et nous avons fourni une explication des fonds disponibles pour justifier les nouveaux besoins de dépenses. En outre, nous avons ajouté un tableau à la page de chaque organisation afin de tenir compte de tous les transferts entre crédits, à l'intérieur des organisations et entre elles, et nous avons ajouté une description complète du transfert. Ces opérations sont également résumées dans un tableau inséré au début du document. Ces améliorations permettent aux parlementaires de mieux comprendre les plans de dépenses du gouvernement afin de tenir ce dernier responsable.

Le Budget supplémentaire des dépenses (B) de 2006-2007 vise à obtenir l'autorisation du Parlement de consacrer 424,5 millions de dollars à des dépenses qui n'avaient pas été suffisamment précisées ou qui n'étaient pas connues à l'époque du dépôt du Budget principal des dépenses de 2006-2007 ou du Budget supplémentaire des dépenses (A) de 2006-2007. Il informe également le Parlement de réductions totalisant 314,4 millions de dollars au chapitre des dépenses législatives prévues que le Parlement a déjà approuvées en vertu d'une loi, ce qui se traduit par un budget supplémentaire des dépenses net de 110,1 millions de dollars.

En présentant ce Budget supplémentaire des dépenses (B), le gouvernement donne suite aux priorités annoncées dans le discours du Trône, dans le budget de 2006 et dans la Mise à jour économique et financière de novembre 2006. Parmi ces priorités, mentionnons une augmentation de 74,2 millions de dollars pour l'agriculture et l'agroalimentaire, plus particulièrement des sommes de 40,4 millions de dollars pour appuyer le Programme de couverture de culture pour compenser les dommages causés par les inondations en 2005 et 2006. Cette annonce a été faite par le ministre de l'Agriculture dans ma propre circonscription de Provencher, qui a été touchée par de graves inondations au cours des dernières années. Ce programme était certainement le bienvenu.

Nous avons 33,8 millions de dollars pour financer des initiatives de création de débouchés pour le secteur agricole afin de favoriser des investissements qui appuient l'orientation d'agriculteurs, et de produits agricoles et agroalimentaires, vers de nouveaux secteurs d'activités et marchés. Là encore, en tant que député d'une région rurale, je dis que ce programme est très bien accueilli.

Une somme de 32,6 millions de dollars a été attribuée aux provinces et aux territoires pour la présentation de services et l'exécution de programmes de justice pour les jeunes, programme que je connaissais bien lorsque j'étais ministre de la Justice, et l'affectation de 30,6 millions de dollars pour réaliser la réduction du taux de la taxe sur les produits et services et pour l'adoption de mesures liées aux crédits d'impôt personnels.

Monsieur le président, le présent budget supplémentaire des dépenses tient compte de l'engagement du gouvernement à donner suite aux priorités énoncées dans le discours du Trône, dans le Budget et dans la Mise à jour économique et financière.

Comme je l'ai déjà mentionné, l'un des moyens que le nouveau gouvernement du Canada a pris pour raffermir la responsabilisation et rétablir la confiance des Canadiens consiste à fournir aux parlementaires une information de meilleure qualité sur les plans de dépenses du gouvernement. C'est également pourquoi nous procédons le plus rapidement possible pour mettre en œuvre la Loi fédérale sur la responsabilité, l'une des lois les plus vastes et les plus complexes qui aient été adoptées. Je tiens à remercier tout particulièrement mon prédécesseur, qui est maintenant ministre de l'Environnement, pour les efforts concertés et difficiles qu'il a déployés, de même que mon personnel pour le travail effectué pour déposer cette loi.

La loi renferme des dizaines de mesures, prévoit d'importants changements qui influeront sur plus de 45 lois fédérales et en créeront deux nouvelles. Ensemble, ces mesures visent presque tous les secteurs de l'administration fédérale, et même plus. À l'instar d'autres lois complexes, diverses dispositions de cette loi entreront en vigueur à des dates différentes. Je sais que dans la presse et ailleurs on s'est inquiété du fait que la loi n'entrait pas en vigueur immédiatement à tous égards une fois la sanction royale proclamée, mais en fait, monsieur le président, compte tenu de la nature très complexe de la loi, mon personnel a pris la peine d'établir un calendrier, qui se veut raisonnable et rationnel, compte tenu des consultations qui doivent encore avoir lieu à divers égards. Je suis très satisfait des progrès qui ont été réalisés non seulement avant que la Loi entre en vigueur, mais aussi des progrès qui se font actuellement.

Bon nombre d'éléments de la loi sont entrés en vigueur à la date de la sanction royale, entre autres la désignation des sous-ministres et des administrateurs généraux à titre d'administrateurs des comptes, et le nouveau mandat confié à la vérificatrice générale de « suivre l'argent à la trace ». D'autres dispositions de la Loi fédérale sur la responsabilité sont entrées en vigueur à des dates précises. Par exemple, les nouvelles règles sur le financement électoral ont été appliquées le 1er janvier 2007. Les restrictions touchant les dons à des candidats politiques seront en vigueur six mois plus tard, le 12 juin 2007.

Au début du mois, j'ai effectué quatre annonces concernant la mise en œuvre de la loi et du plan d'action. J'ai annoncé de nouvelles pénalités et sanctions contre quiconque commet une fraude au détriment de l'État. Ces nouvelles mesures raffermissent et précisent les pénalités prévues par la Loi sur la gestion des finances publiques et le Code criminel. Le nouvel acte criminel sera passible d'une peine d'emprisonnement de cinq ans pour une fraude d'au plus 5 000 $, et d'une peine d'emprisonnement maximale de 14 ans pour une fraude de plus de 5 000 $.

La loi prévoyait également une plus grande transparence et une ouverture accrue de la part du gouvernement. Nous avons tenu notre promesse. À compter du 1er avril, la Loi sur l'accès à l'information sera maintenant applicable à sept mandataires du Parlement, à cinq fondations et à la Commission canadienne du blé. Grâce à cette mesure, le gouvernement n'a jamais affiché autant de transparence et d'ouverture. Ce n'est là que la première de deux étapes importantes de l'application de la Loi sur l'accès à l'information à un plus grand nombre d'organismes.

Nous avons également annoncé que des consultations seraient menées à compter du 1er mars sur les dispositions de la nouvelle Loi sur le lobbying. Ces consultations, qui se poursuivront jusqu'au 23 mars, représentent un élément fondamental du processus réglementaire parce qu'elles garantissent la prise en compte du point de vue des intervenants, des lobbyistes et des Canadiens pour assurer le fonctionnement efficace du nouveau système d'enregistrement en ligne, tant pour ses utilisateurs que pour les Canadiens. Ces mesures accroissent la transparence et font en sorte que les rares personnes qui abusent de la confiance des Canadiens et commettent une fraude s'exposent à des poursuites judiciaires et à des peines plus sévères.

Toutefois, la responsabilité au sein du gouvernement vise également une responsabilité accrue à l'égard des résultats. C'est pourquoi j'ai annoncé des mesures immédiates à la suite de la diffusion du rapport du Groupe d'experts sur les subventions et contributions. En rendant ces programmes plus efficaces et plus efficients, nous pouvons insister sur l'amélioration des résultats pour les particuliers et les organisations qui les utilisent et pour les contribuables qui en assument le coût.

Nous avons accompli beaucoup de travail en peu de temps, depuis la sanction royale de la loi. Je m'engage à poursuivre le travail pour assurer la mise en œuvre des dispositions de la loi dans les plus brefs délais, conscient que tous les éléments doivent être en place pour que les organismes visés puissent administrer correctement leurs nouvelles activités et se conformer à la loi. La Loi fédérale sur la responsabilité constitue la première mesure prise en vue de rétablir la confiance du public dans le gouvernement.

Une autre mesure consiste à faire en sorte que l'impôt provenant des revenus durement gagnés par les Canadiens soit bien utilisé à l'aide de notre nouveau système de gestion des dépenses afin d'améliorer les façons de dépenser. En novembre, nous avons annoncé les orientations d'un nouveau système de gestion des dépenses. Notre but consiste à veiller à ce que chaque dollar d'impôt soit dépensé judicieusement.

En termes simples, notre nouvelle approche de la gestion des dépenses appuiera une gestion axée sur les résultats en établissant des responsabilités claires pour les ministères, afin qu'ils définissent mieux les résultats prévus des programmes existants et nouveaux. Elle appuiera aussi un nouveau processus décisionnel centré sur les résultats en veillant à ce que tous les nouveaux programmes soient intégrés efficacement et entièrement aux programmes existants, grâce à un examen de toutes les dépenses, pour assurer une utilisation efficiente, efficace et optimale des fonds. Elle appuiera en outre un système de rapports axé sur les résultats en améliorant la qualité des rapports soumis au Parlement par les ministères et l'ensemble du gouvernement.

Je parle à l'occasion d'une statistique qui m'a véritablement impressionné, mais pas nécessairement de façon positive, à savoir qu'en six ans, les budgets de services votés du Parlement sont passés de 45 milliards à 90 milliards de dollars. Cela crée un impact d'environ 1 500 $ pour chaque famille de quatre personnes au pays chaque année. C'est beaucoup d'argent. Je soutiens que nous devrions adopter cet examen de la gestion des dépenses très rapidement et que non seulement nous examinions les nouveaux programmes, mais que nous examinions également les dépenses passées pour nous assurer que l'argent que nous affectons aux programmes actuels de services votés soit en fait de l'argent qui soit bien dépensé et que les Canadiens en aient pour leur compte dans le cadre de ces programmes. En bout de ligne, ce nouveau système permettra de faire en sorte que tous les programmes du gouvernement soient efficaces, efficients, axés sur les résultats et qu'ils permettent au contribuable d'en avoir pour son argent.

Monsieur le président, j'ai présenté le Budget supplémentaire des dépenses (B) de 2006-2007 dans le cadre de nos efforts soutenus pour assurer la responsabilité du gouvernement. À mon avis, le budget des dépenses permettra de préciser les dépenses du gouvernement et aidera le Parlement à nous rendre responsables des résultats. Notre but ultime consiste à veiller à ce que nous dépensions l'argent dûment gagné par les contribuables d'une manière efficace, pour le plus grand bien des Canadiens. Les Canadiens ne méritent rien de moins.

Monsieur le président, voilà qui met un terme à mon allocution. Et maintenant, je serai heureux de répondre à vos questions et de recueillir vos commentaires. Cependant, comme je l'ai précisé, il se pourrait très bien que mon personnel réponde à beaucoup plus de questions que je serai capable de le faire dans ce contexte.

Le président : Merci beaucoup, monsieur le ministre. Vous pouvez vous attendre à des questions intéressantes. L'objectif premier de la réunion d'aujourd'hui est d'examiner le Budget supplémentaire des dépenses (B) afin d'être prêts lorsque le projet de loi de crédits sera déposé en fonction de celui-ci. Nous vous remercions de vos commentaires concernant la Loi fédérale sur la responsabilité et le calendrier de mise en œuvre. Vous avez tout à fait raison de dire que le Sénat s'intéresse beaucoup aux intentions du gouvernement à l'égard de cette loi, sans doute parce que le Sénat était lui-même un point de mire lors de l'étude de ce projet de loi.

Le sénateur Ringuette : Soyez le bienvenu, monsieur le ministre. J'aimerais vous poser deux questions, et la première concerne votre responsabilité directe en matière de ressources humaines pour la fonction publique. Je constate que le Budget supplémentaire (B) ne prévoit aucun crédit supplémentaire en vue d'abolir les obstacles géographiques qui empêchent d'occuper un emploi dans la fonction publique. Je sais qu'on s'est efforcé d'abolir les obstacles pour les postes situés dans la capitale nationale. Cependant, cela n'est pas suffisant. Il faut éliminer les obstacles géographiques pour tous les emplois fédéraux dans tout le pays. C'est une question de droit à la mobilité conféré par la Charte. Cela voudrait dire également que le gouvernement fédéral fait preuve de leadership en matière de mobilité de la main- d'œuvre, car l'absence de mobilité est également un obstacle au commerce interprovincial. Monsieur le ministre, j'aimerais savoir ce que prévoit faire votre gouvernement pour abolir ces obstacles géographiques et quels sont les coûts prévus à cet effet dans le budget.

M. Toews : Beaucoup se sont dits inquiets des restrictions imposées aux particuliers qui seraient admissibles à des postes gouvernementaux dans la fonction publique fédérale. Dans bien des cas, l'admissibilité était restreinte aux personnes vivant dans la capitale nationale et dans les environs immédiats. Par contre, notre parti a exprimé son intérêt envers cette question en particulier, et je pense que nous devons effectivement adopter des mesures pour faire en sorte que les possibilités d'emploi dans la fonction publique soient accessibles aux personnes de toutes les régions du pays. À mon avis, cela constitue un bon principe de départ.

La question est préoccupante, mais il doit y avoir des limites quand les coûts dépassent de loin les avantages escomptés. Il faut établir un certain équilibre, en particulier pour les emplois d'été et les postes à court terme. Nous ne voulons pas déménager quelqu'un du Yukon qui viendra occuper un poste de trois mois ici. De même, nous ne voudrions pas déraciner des jeunes et les amener ici pour qu'ils occupent des postes à la Commission de la capitale nationale. Bien sûr, nous avons d'autres genres de programmes, des programmes provisoires et autres, qui sont destinés aux jeunes.

En général, nous sommes en faveur de la mobilité de la main-d'œuvre et du principe qui sous-tend cette réalité. Je ne sais pas si je peux vous dire quoi que ce soit au sujet des coûts pour l'instant. Il faudrait peut-être en discuter avec le ministre responsable.

Le sénateur Ringuette : Si je comprends bien, la réponse à ma question est que vous appuyez le principe, mais vous ne semblez pas disposés à agir en la matière.

M. Toews : Je sais que cette question fera l'objet d'un débat. Le Sénat est actuellement saisi d'un projet de loi, et je crois qu'il sera renvoyé à la Chambre en temps opportun. Au moment où le débat aura lieu, nous serons en mesure de préciser nos idées un tout petit peu plus. Le projet de loi comme tel, même si je n'en appuie pas toutes les dispositions, est un bon point de départ de cette discussion.

Le sénateur Ringuette : Mon autre question concerne les coûts additionnels à la page 68, soit les crédits supplémentaires pour la mise en œuvre et l'administration de l'accord sur le bois d'œuvre Canada-États-Unis conclu en 2006. Je vois que 20,1 millions de dollars sont consacrés à cet accord. Je pense que c'est à peu près la même somme que le gouvernement du Canada aurait dû engager pour contester devant les tribunaux l'accord précédent en vertu de l'ALENA. En ce qui concerne les coûts, je crois qu'il n'y a ni gain ni perte, que l'on ait contesté l'accord en vertu de l'ALENA ou que l'on ait accepté l'accord qui a été signé.

L'autre problème, c'est que l'Agence du revenu du Canada et le ministère de la Justice vont demander au total 217 millions de dollars de crédits supplémentaires au cours des neuf prochaines années pour mettre l'accord en œuvre. Des problèmes ont surgi la semaine dernière et le gouvernement américain n'apprécie guère que les gouvernements provinciaux aident à moderniser l'industrie du bois d'œuvre dans leurs territoires respectifs.

Monsieur le ministre, avons-nous vraiment signé une bonne entente si nous devons engager tout cet argent pour la faire appliquer et que nous nous demandions encore si les Américains pensent que nous ne respectons pas l'accord? Nous avons perdu notre souveraineté, nous avons perdu des milliers d'emplois et de petites collectivités rurales sont en train de devenir des collectivités fantômes parce qu'elles ont perdu ces recettes tirées du secteur du bois d'œuvre. Je vois que c'est encore le gouvernement fédéral qui assumera tous ces coûts.

M. Toews : Les provinces, sans exception, étaient en faveur de cet accord, si je me souviens bien. C'était aussi le cas de la grande majorité des producteurs de bois d'œuvre. Il en coûte toujours de l'argent pour mettre une entente en œuvre. Je ne peux faire de commentaires sur ce que vous dites, à savoir que nous avons perdu des emplois à cause de cette entente. Je crois que l'entente offre un certain niveau de stabilité dans l'industrie du bois d'œuvre. Cette industrie a toujours connu des pertes et des gains selon les conditions du marché. Comme nous le savons, le marché de la construction résidentielle américain a souffert et a décliné pendant un certain temps. Je ne sais pas si cela fait partie des répercussions que certaines collectivités ont subies au Canada, mais je crois savoir que le marché de la construction résidentielle américain est en train de reprendre son souffle. Il semble prometteur. Le marché canadien, lui, est solide.

Essentiellement, vous vous demandez si cette entente a été une bonne entente sur le plan politique. Tout ce que je peux dire, c'est qu'il vaudrait peut-être mieux demander au ministre lui-même de s'expliquer. Le ministre Emerson est une personne très compétente. Je l'ai entendu expliquer et défendre cette entente à maintes reprises et j'ai toujours été très impressionné par ses arguments. Il était ministre responsable du bois d'œuvre dans le gouvernement précédent. Il n'a pas changé d'avis sur les avantages qu'offre l'entente sur le bois d'œuvre.

Mon ministère a la responsabilité de veiller à ce que l'argent nécessaire pour mettre en œuvre cette entente soit bien dépensé. Si vous estimez que certains de ces coûts ne sont peut-être pas justifiés, je suis certain que mon ministère se penchera sur la question. Cependant, je ne suis pas d'accord avec vous qu'il s'agit d'une politique néfaste et je pense que pour mettre en œuvre cette politique à l'aide de l'entente sur le bois d'œuvre, ces crédits sont nécessaires d'après ce que j'ai pu établir.

Le sénateur Ringuette : En ce qui concerne la politique, je pense que nous allons convenir de ne pas être d'accord, parce que l'avenir pas très lointain prouvera que cette politique était erronée.

Le sénateur Mitchell : Soyez le bienvenu. Le gouvernement a annoncé récemment des crédits supplémentaires de 200 millions de dollars pour la reconstruction en Afghanistan. S'agit-il de nouveaux crédits pour l'aide ou d'un transfert provenant d'ailleurs? Ou encore, est-ce que ce sont des crédits pour le prochain exercice?

M. Toews : Est-ce que vous parlez de l'annonce d'hier?

Le sénateur Mitchell : Ou de l'annonce toute récente.

M. Toews : Je suis désolé, je n'ai pas cette information, mais je vais la trouver pour vous.

Le sénateur Mitchell : J'aimerais beaucoup savoir s'il s'agit de nouveaux crédits nets ou d'un transfert.

Le président : Si vous voulez, nous allons demander à notre greffier de trouver ces renseignements, après quoi nous les distribuerons à tous les membres du comité.

Le sénateur Mitchell : Nous attendons la nomination du ou de la commissaire aux nominations publiques. Le projet de loi a été adopté depuis probablement 75 jours, c'est beaucoup. Entre-temps, tandis que le ministre Fortier nous dit que des efforts sont déployés pour établir les exigences de ce poste, un bon nombre de nominations politiques ont été effectuées sous réserve d'une seule exigence, à savoir que les personnes nommées devaient être des conservateurs, je crois. Je me demande si vous pourriez imposer un moratoire sur ce genre de nominations jusqu'à ce que le ou la commissaire aux nominations publiques soit désigné. Je remarque que vous avez ici des crédits utilisés à cette fin, donc les choses sont lancées. Ne serait-il pas mieux de cesser de faire ces nominations jusqu'à ce que le ou la commissaire aux nominations publiques soit en poste?

M. Toews : Je pense que certaines nominations devront continuer de se faire, que le ou la commissaire aux nominations publiques soit en place ou non. Notre gouvernement a pris ces décisions au cas par cas. Je pense qu'il aurait pu faire plus de nominations plus rapidement, mais je crois que dans l'attente de la désignation du ou de la commissaire, il y a eu un certain retard dans ces nominations.

Quant à ce que vous dites, à savoir que la seule exigence est d'être conservateur, je n'ai certainement aucune preuve à cet égard. Ces nominations ne touchent pas directement les responsabilités du ou de la commissaire aux nominations publiques, mais je me souviens, quand j'étais ministre de la Justice, d'avoir recommandé la nomination d'une ancienne présidente du Laurier Club qui n'avait aucun lien avec les conservateurs. En fait, le seul lien qu'elle avait, c'est qu'elle était responsable de la collecte de fonds de l'un des candidats à la direction du Parti libéral. Si l'un des critères consistait à être conservateur, alors j'ai commis une erreur en recommandant que cette personne soit nommée juge.

Le sénateur Mitchell : C'est incompréhensible. C'est peut-être l'exception qui confirme la règle.

M. Toews : En fait, je pourrais vous en mentionner quelques autres.

Le président : Allez-y. Nous avons besoin d'autres exceptions.

Le sénateur Mitchell : Oui, nous avons besoin d'autres exceptions pour véritablement infirmer la règle.

Je suis très intéressé par l'initiative sur la gestion des dépenses et deux des trois critères, à savoir : gestion en fonction des résultats et décision axée sur les résultats.

Je suis étonné de voir qu'au début de l'année, le gouvernement a annulé des programmes sur les changements climatiques qui avaient été mis en œuvre par le gouvernement précédent. Ce qui est intéressant, dans le contexte de la réunion d'aujourd'hui, c'est que ces programmes ont été évalués par votre Conseil du Trésor qui les a jugés exceptionnellement efficaces. Nous avons une note de service destinée au ministre dans laquelle le Secrétariat du Conseil du Trésor estime que ces programmes devaient coûter 10 $ la tonne. Ces programmes auraient contribué à réduire de 20 mégatonnes les gaz à effet de serre, ce qui est tout juste en dessous des 10 p. 100 de ce que le Canada s'est engagé à atteindre en vertu de Kyoto. C'était là un résultat extrêmement important, mais les programmes ont été annulés sans coup férir. J'ai consulté diverses sources pour essayer d'obtenir de l'information pouvant appuyer l'hypothèse de certains de vos collègues, à savoir que ces programmes étaient inefficaces. En fait, votre propre ministère a dit que les programmes étaient très efficaces.

Ma question, finalement, est donc la suivante : Quelles assurances pouvons-nous avoir que cette gestion et ce processus décisionnel axés sur les résultats ne sont rien d'autre que de la rhétorique? Vous saviez que ces programmes étaient efficaces et ils ont été annulés. Conformément à ces critères, il ne faisait aucun doute que ces programmes donnaient des résultats. Si nous faisons de la gestion axée sur les résultats, nous aurions dû poursuivre ces programmes

M. Toews : Je pense que nous pourrions tenir un débat sur l'efficacité de ces programmes. Je ne veux pas démolir le travail des analystes du Conseil du Trésor qui se sont penchés sur la question. Comme nous le savons, souvent, au début, les programmes paraissent réalisables, efficaces et efficients, mais leur mise en place révèle parfois que ce n'est pas le cas. L'un des exemples les plus frappants est le registre des armes à feu et les problèmes qu'a causés l'administration de ce programme. De toute évidence, le Conseil du Trésor avait examiné le registre des armes à feu très soigneusement, il avait donné les orientations stratégiques et pris certaines décisions. Je dis ceci de façon bien objective, et je crois qu'à l'évidence le résultat démontrait que le programme n'était pas aussi efficace et efficient qu'il aurait dû l'être.

Je pense qu'il convient de faire une gestion axée sur les résultats et d'avoir un processus décisionnel axé sur les résultats, mais ce qui importe avant tout, c'est de faire la preuve des résultats. Je crois que cette troisième composante est tout aussi importante que la gestion et la prise de décisions axées sur les résultats parce que l'évaluation des résultats nous donne l'information qui nous permet, à vous et à moi, de délibérer sur le mérite d'une politique par rapport aux sommes engagées.

Le sénateur Mitchell : Une question de suivi rapide alors, parce que je suis tout à fait d'accord. Cela veut dire que vous nous donnerez une évaluation des résultats sur l'initiative concernant le laissez-passer de transport en commun qui, selon l'ancienne ministre Rona Ambrose, remplace maintenant l'équivalent de 56 000 voitures. Il est presque incompréhensible d'en venir à une telle conclusion; il est difficile d'imaginer comment on peut arriver à une telle conclusion. Allez-vous nous donner une évaluation des résultats concernant ce programme en particulier pour nous montrer à quel point cette initiative sur les changements climatiques est efficace ou non.

M. Toews : Nous n'allons pas être capables de produire un rapport sur chaque programme, chaque année. Le calendrier de l'examen des programmes n'est pas encore établi. En fait, j'en discute actuellement avec le ministre des Finances.

Je peux vous assurer qu'il est prioritaire pour le ministre des Finances de concevoir un système qui nous permette non seulement de produire des rapports, mais d'avoir un processus décisionnel et un système de gestion axés sur les résultats; nous allons nous rencontrer très bientôt pour savoir ce que cela implique, pour déterminer à quelle cadence les programmes seront examinés et ce qu'il en coûtera pour ce faire.

Le sénateur Mitchell : Il serait important de publier le calendrier des programmes qui feront l'objet d'un examen et des autres, de sorte que l'on évite de penser ou que l'on n'insinue pas que vous allez faire un rapport sur les programmes qui semblent donner des résultats et que vous omettiez de publier des rapports sur ceux qui n'en donnent pas. J'aimerais voir ce calendrier, et je suis sûr que la population canadienne le souhaite également.

J'aimerais voir quelles sont vos priorités. Si vous me permettez une suggestion, il me semble que, aussi importants que soient Kyoto et les programmes sur les changements climatiques, ils devraient toujours faire l'objet d'un rapport d'évaluation parce qu'ils sont controversés. Votre parti estime que cela peut n'être même pas un problème, mais dans le cas contraire, vous ne faites pas grand-chose. Quant aux autres qui sont véritablement préoccupés par les changements climatiques, ils doivent amener le gouvernement, le public et l'industrie à s'intéresser à obtenir ce que je crois être des résultats absolument réalisables et non pas croire que nous ne pouvons rien faire et qu'il faut jeter l'éponge.

M. Toews : Votre suggestion me paraît intéressante. Je vais en faire part au ministre des Finances et à d'autres fonctionnaires. Je sais pertinemment qu'il veut avoir un examen ordonné de tous les programmes dans un délai bien précis.

De toute évidence, le délai a des répercussions sur les crédits que nous affecterons au processus. Certains m'ont proposé des façons de faire des rapports de manière plus régulière sans qu'il en coûte plus que ce qui a été proposé. Ce programme coûte cher.

Le sénateur Di Nino : Ma première question concerne les crédits supplémentaires qui sont accordés à la Stratégie canadienne de la biotechnologie, qui existe depuis un certain temps. À mon avis, on ne consacre pas suffisamment de crédits à cette initiative. Je pense qu'elle devrait être probablement considérée à un échelon supérieur.

Je me demande si vous pourriez nous donner de plus amples renseignements sur cette stratégie pour que nous puissions utiliser davantage les ressources dont nous disposons afin d'amenuiser notre dépendance à l'égard des combustibles fossiles, etc., et que nous adoptions des mesures qui aideront l'économie et permettront l'élaboration d'autres solutions de rechange pour améliorer l'environnement.

M. Toews : De fait, la biotechnologie est une question importante. Je sais que le Canada rural surtout est très emballé par le biodiesel, l'éthanol et d'autres solutions aux combustibles traditionnels. Ces nouveaux carburants sont considérés non seulement avantageux pour notre environnement, mais particulièrement appropriés pour rendre notre économie rurale et agricole plus durable. En réalité, c'est une possibilité très encourageante.

Les questions détaillées concernant la Stratégie canadienne de la biotechnologie devraient être adressées à Industrie Canada, qui a été désigné comme ministère chargé de cette stratégie au moment de sa création après approbation du Cabinet en 1998. La Stratégie canadienne de la biotechnologie, SCB, remplaçait une stratégie nationale en matière de biotechnologie qui a d'abord été créée en 1983 au moment où le gouvernement a renouvelé son engagement à établir un équilibre entre les avantages sociaux et économiques de la biotechnologie en regard du besoin de protéger l'environnement, la sécurité humaine et la santé.

La SCB est une initiative horizontale qui implique 10 ministères et organismes. L'initiative se poursuit selon les plans de travail annuels de la SCB dans cinq éléments ou domaines : innovation pour relever les défis nationaux; milieux d'affaires habilitants; réglementation pertinente; répercussions à l'échelle internationale; engagement et information du public.

Les crédits transférés du Budget supplémentaire des dépenses (B) permettront de financer des initiatives interministérielles dans ces cinq éléments. Plus précisément, les fonds seront utilisés pour renforcer la collaboration interministérielle afin que le Canada puisse assumer ses responsabilités réglementaires concernant les produits biotechnologiques; pour élaborer un programme stratégique fédéral concernant la bioéconomie et les produits biologiques; pour examiner les possibilités qu'offre la biotechnologie pour les entreprises canadiennes dans le secteur de la santé; pour aborder les défis en matière de réglementation comme la biotechnologie aquatique et la moléculture végétale; pour réaliser des projets de communications en matière de biotechnologie destinés aux Canadiens et aux décideurs; pour mettre en œuvre un programme de statistiques sur la biotechnologie qui offre des mesures de rendement du Canada en la matière.

Je vous donne ici une réponse technique; mais peut-être que le ministre responsable pourrait vous donner des explications plus détaillées et plus faciles à comprendre.

Le sénateur Di Nino : Je vous remercie de votre réponse. J'espérais que vous me parliez davantage des partenariats que l'on pourrait créer avec le secteur privé. Je pense qu'il a été question du secteur de la santé. Je suis convaincu que c'est une bonne chose pour nous. Cela étant dit, je pense que le gouvernement lui-même devrait établir un partenariat avec le secteur privé plutôt que d'essayer de tout faire seul. Je ne suis pas certain si vous pouvez répondre à cela.

M. Toews : J'ai participé récemment à une annonce qui a été faite à l'Université du Manitoba et qui portait sur des sociétés privées qui prennent des idées et les mettent en marché pour en faire des applications commerciales. C'est un secteur tout à fait emballant. Nous avons annoncé les crédits prévus à cette fin. Je ne me souviens pas comme ça de combien d'argent il était question exactement, mais nous avons été à même de constater un véritable partenariat entre les universitaires et le secteur privé. C'est exactement ce qui doit être fait pour transposer ces idées en un projet commercial qui soit rentable et, on l'espère, rentable également pour le gouvernement.

Le sénateur Di Nino : Je vous remercie de cette réponse. Je pense que nous devrons assurer le suivi, comme vous l'avez dit, auprès du ministre responsable. C'est là un programme passionnant auquel nous devrions consacrer davantage de ressources.

Tout le monde est toujours d'accord avec une réduction générale des dépenses, mais dans certains secteurs, à mon avis, une telle réduction n'est pas nécessairement une chose positive.

Dans votre budget supplémentaire, vous dites que les fonds affectés au programme de la Subvention canadienne pour l'épargne-études n'ont pas été utilisés. Je ne veux pas dire que le programme est un échec, mais les taux de participation sont très faibles. Cela m'inquiète. Je pense que ce programme peut permettre à nos jeunes de se préparer à affronter les défis de demain.

On a reproché aux responsables de ce programme de ne pas en faire la promotion auprès du bon public cible. Je devrais peut-être adresser ma question au ministre responsable, mais je me demande si vous ou vos fonctionnaires avez des commentaires à faire à ce sujet.

M. Toews : M. Moloney aimerait faire des commentaires. Cependant, je suis certain que la Chambre accueillerait volontiers toute recommandation de votre comité sur le marketing à faire et le public à viser dans le cadre de ce programme.

David Moloney, secrétaire adjoint principal, Secteur de la gestion des dépenses, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada : En ce qui concerne les tout derniers changements, les taux de participation ont été inférieurs à ce qui avait été prévu. À peine plus du tiers des enfants canadiens — selon nos statistiques, 34 p. 100 des enfants canadiens de moins de 18 ans — sont bénéficiaires d'un régime enregistré d'épargne-études, à peine 4 p. 100 de plus qu'il y a neuf ans. En 2006, les subventions canadiennes pour l'épargne-études totalisaient 490 millions de dollars.

En ce qui concerne le calendrier, il existe des restrictions bien compréhensibles mais strictes interdisant la publication des résultats des recherches d'opinion publique lorsque le Parlement est dissous pour des élections générales, et ce calendrier a eu des répercussions sur les mesures que le gouvernement a pu prendre pour réaliser de nouvelles activités afin de publier ces résultats.

Il y a eu des problèmes concernant le nombre de fournisseurs du secteur privé qui se sont joints au programme en plus grand nombre, comme vous le savez, en ce qui concerne les régimes comme tels, et l'on s'intéresse à cette question. Il se fait actuellement encore passablement de travail pour savoir comment mieux servir les familles à revenus modestes et faibles dans ce domaine. Ce travail doit se poursuivre. Le bon d'études canadien, qui offre jusqu'à concurrence de 2 000 $ sur 15 ans au titre de l'épargne pour l'éducation des enfants provenant de familles à faibles revenus, faisait partie de cela. Le taux d'appariement augmente pour les enfants de familles à faibles revenus, et les critères d'admissibilité au programme ont été élargis pour les enfants pris en charge par d'autres. Il faudra un certain temps avant que certaines de ces initiatives soient mises en place, mais il semble que l'incapacité du gouvernement à entreprendre des communications dans les médias de masse constitue véritablement un problème.

Le sénateur Di Nino : D'après ce que j'en sais, monsieur le ministre, le segment du marché à exploiter et qui semble le moins participer au programme est celui des familles à plus faibles revenus. De toute évidence, je pense que nous n'en faisons pas assez pour les informer au sujet de ce programme. J'espère vraiment que cette information sera transmise au ministre responsable de sorte que nous puissions corriger la situation, car à mon avis, ce programme est un très bon outil, et je pense que les familles qui sont dans la catégorie des plus faibles revenus seraient bien plus disposées à profiter du programme, parce que les avantages sont également plus élevés en ce qui a trait aux crédits offerts.

Monsieur le ministre, la vérificatrice générale s'est dite préoccupée par le recours plus fréquent aux budgets supplémentaires, ou a critiqué le recours à cette pratique. En effet, je pense qu'elle a établi un lien entre le recours accru aux budgets supplémentaires et le fait qu'une situation déficitaire devienne excédentaire, et elle a soulevé certaines préoccupations que je partage avec elle. À mon avis, elle estime que pour faire une bonne planification, la plupart des dépenses nécessaires doivent provenir du Budget principal des dépenses plutôt que d'utiliser des budgets supplémentaires. Qu'en pensez-vous?

M. Toews : J'ai déjà entendu cette critique, sénateur. Mon adjoint répondra à la question, mais je pense que nous devons prendre note de cette question. Je vais laisser les membres de mon personnel me venir en aide.

M. Moloney : Comme l'a fait remarquer la vérificatrice générale, la situation financière du gouvernement est passée d'un déficit à un budget équilibré et excédentaire au cours d'une décennie. Dans son rapport, la vérificatrice générale compare la taille moyenne des budgets supplémentaires dans une décennie d'excédents à celle enregistrée dans une décennie de déficits. Le rapport tire la conclusion qui s'impose. Dans les budgets présentés au cours des neuf années qui se sont écoulées depuis que la situation financière du gouvernement est équilibrée, les gouvernements ont décidé relativement tard au cours d'un exercice financier de présenter de nouvelles propositions de dépenses qui verraient le jour au cours de l'exercice financier suivant, et qui se poursuivent souvent pendant plusieurs années.

Nous, au Secrétariat du Conseil du Trésor, faisons en sorte que le Conseil du Trésor puisse permettre au président de présenter au Parlement des budgets supplémentaires dans lesquels on demande des autorisations pour 130 ministères ou organismes. Dans le Budget principal des dépenses, que le président a déposé il y a une heure pour le prochain exercice, nous avons plusieurs centaines de crédits. Il s'agit d'un processus plutôt long, détaillé et exigeant. Nous devons consacrer quelques mois d'efforts très intensifs pour préparer ces prévisions budgétaires.

Il est malheureux qu'avec les budgets qui sont déposés à la fin de l'hiver, et avec le Règlement qui exige que le Budget principal soit déposé avant le 1er mars, nous n'ayons pas le temps de pouvoir refléter dans le Budget principal qui doit être déposé à la fin de février les initiatives qui peuvent être décidées autour de cette date. Ces dernières années, 2006-2007 étant un exemple, le Budget principal des dépenses a parfois été déposé avant les prévisions budgétaires. Ainsi, plusieurs initiatives stratégiques ne sont présentées que dans des budgets supplémentaires.

S'il s'agit d'initiatives pluriannuelles, les dépenses pour la deuxième année se trouveront dans le Budget principal qui est présenté. C'est en fait le cas des initiatives que le gouvernement actuel a présentées dans le Budget supplémentaire des dépenses (A) l'automne dernier. Les dépenses permanentes pour ces initiatives sont en fait présentées dans le Budget principal des dépenses qui a été déposé aujourd'hui pour l'an prochain.

Le sénateur Di Nino : La vérificatrice générale s'intéresse à cette question depuis plusieurs années, comme M. Moloney l'a si bien dit. Cela ne reflète pas nécessairement les dernières demandes présentées dans les budgets supplémentaires ou la demande précédente. Cela recoupe les huit à 10 dernières années. J'ai la même inquiétude quant à la tendance qui semble se dessiner, et je pense effectivement qu'au cours de cette période, nous avons assisté à ce qui pourrait être considéré comme une autre façon d'obtenir des crédits sans avoir à passer par le Budget principal. Votre explication est bonne, mais c'est là une question qui doit être examinée parce qu'il me semble qu'elle prend de plus en plus d'importance depuis quelques années.

Le sénateur Nancy Ruth : J'ai été remplie d'espoirs à vous entendre parler du système de gestion des dépenses, notamment parce qu'il vise à améliorer la façon dont les dépenses sont gérées pour s'assurer que chaque dollar d'impôt est bien dépensé.

Je suis ici depuis peu, et j'ai entendu la ministre Oda, en sa qualité de ministre de la Condition féminine, dire que les préoccupations des femmes se retrouvent dans chaque ministère et que chaque élément du budget de chaque ministère est analysé. J'essaie de comprendre comment ou si cela se produit véritablement. Comment cette analyse des préoccupations des femmes se fait-elle dans les ministères, et qui mesure les résultats d'une telle analyse? Je n'obtiens jamais de réponses satisfaisantes à mes questions.

Vous avez dit que le système de gestion des dépenses consiste à voir comment on utilise l'argent des contribuables et s'il est dépensé de façon responsable. Comment le système de gestion des dépenses pourrait-il être utilisé pour l'analyse de l'égalité hommes-femmes que le Canada s'est engagé à faire en 1995? Si cette analyse n'est pas faite à l'aide du système de gestion des dépenses, où se fait-elle au gouvernement?

M. Toews : Est-ce que vous faites particulièrement référence à l'analyse de l'égalité hommes-femmes?

Le sénateur Nancy Ruth : Je veux savoir qui mesure les répercussions des décisions budgétaires sur les pauvres, les femmes, sur les questions raciales, sur les problèmes auxquels le Canada s'est théoriquement engagé à trouver des solutions. C'est la mise en œuvre de ce système qui est tellement difficile.

Nous savons tous que le Canada est au premier rang des pays où il fait bon vivre, pour ce qu'on en dit. Cependant, quand vient le temps de respecter nos engagements, nous ne sommes pas tellement bons. Je veux savoir pourquoi il en est ainsi, comment régler le problème, comment améliorer la situation et qui s'en chargera?

M. Toews : C'est là un de nos plus importants défis. Comme je l'ai dit tout à l'heure dans mon exposé, on m'a donné les chiffres sur l'augmentation du nombre des budgets de services votés qui ne semble pas avoir fait l'objet d'une véritable analyse. Une fois que les crédits sont inclus dans le budget des services votés, ils sont simplement acceptés et les problèmes comme l'optimisation des ressources ou l'impact sur les sexes ne sont pas soigneusement pris en considération. Si je pense à des initiatives que nous avons proposées pour donner suite à nos engagements électoraux, si je peux revenir sur mon expérience de ministre de la Justice, l'une de mes grandes préoccupations a toujours été de savoir ce qui advient des ressources affectées à des priorités lorsque les priorités changent. Si certaines des priorités ne sont plus des priorités pour notre gouvernement, qu'advient-il des ressources qui ont été dépensées pour réaliser ces priorités? Est-ce que ces ressources sont maintenant transférées à nos nouvelles priorités de sorte que nous n'ajoutons pas simplement aux dépenses existantes, mais plutôt que l'on considère les dépenses antérieures et pourquoi on dépense de l'argent à telle enseigne pour le redistribuer ensuite à qui mieux mieux?

Il y a certainement une faiblesse dans tout notre système. C'est pourquoi notre nouvelle initiative me rassure, et je vais m'entretenir avec le ministre des Finances pour qu'on la perfectionne. Nous tenons presque toujours compte de l'égalité hommes-femmes dans presque toutes les décisions que nous prenons, comme le processus de nomination des juges.

Le sénateur Nancy Ruth : Monsieur le ministre, je veux vraiment savoir ce qui se passe au sujet de l'argent. C'est d'argent dont je vous parle.

M. Toews : L'argent est très important. Je peux vous dire que dans chaque décision que nous prenons, nous nous assurons de tenir compte de l'égalité des sexes, non seulement en ce qui a trait aux crédits, mais aussi aux politiques. C'est une préoccupation du gouvernement, peu importe le ministère intéressé. La nomination des juges, par exemple, est toujours un problème. Nous cherchons toujours à effectuer des nominations en fonction du mérite, mais en supposant que les gens sont méritoires, alors il faut tenir compte de la question de l'égalité des sexes et essayer d'établir un équilibre. Vos observations sont pertinentes en ce qui a trait à l'élaboration de critères plus précis concernant cette réflexion que nous devons nous assurer de faire.

Le sénateur Nancy Ruth : La ministre Oda a dit que l'égalité hommes-femmes se fera et que les femmes au Canada ne devraient pas s'inquiéter des compressions effectuées à Condition féminine Canada parce que cette égalité se réalise dans d'autres ministères. J'essaie de comprendre comment cela se passe, qui en prend la mesure, qui s'implique, et qui est le souffre-douleur. Le Conseil du Trésor a-t-il un rôle à jouer là-dedans?

M. Toews : Je peux vous donner une réponse précise. Par exemple, la Politique sur la structure de gestion des ressources et des résultats exige que les ministères définissent les résultats qu'ils attendent et les mesures connexes de rendement pour tous leurs programmes. Cela s'applique à tous les programmes qui ont un objectif précis en matière d'égalité hommes-femmes comme cela s'applique à tous les autres programmes. Le Secrétariat du Conseil du Trésor est en train de mettre en œuvre la Politique sur la structure de gestion des ressources et des résultats et les systèmes connexes qui, lorsqu'ils seront opérationnels à 100 p. 100, donneront au gouvernement une vue d'ensemble des dépenses et du rendement par programme. Si un programme vise un résultat axé sur l'égalité des sexes, la politique exige que les ministères établissent une cible et un calendrier pour atteindre cette cible de même que des indicateurs pour informer les gestionnaires de programmes et leur dire s'ils sont sur la bonne voie.

Le sénateur Ringuette : C'est comme le programme d'alphabétisation.

Le sénateur Nancy Ruth : Est-ce qu'il y a un moyen qui me permette de savoir quand la politique sera pleinement mise en œuvre et ce que ces petites phrases dans ce paragraphe que vous avez lu signifient véritablement? Je veux savoir qui vérifie et qui évalue les choses; comment nous savons que les choses sont faites; et qui sont ceux qui déterminent les critères pour y parvenir. J'ai vraiment beaucoup de difficulté à trouver comment les choses se font. Je crois savoir que c'était la même chose pour Mme Maria Minna lorsqu'elle siégeait au Comité des finances de la Chambre des communes. Elle aussi avait beaucoup de difficulté à comprendre ce qui se passait. Nous avons tous de la difficulté à savoir si c'est bien ce qui se produit et si la ministre Oda est vraiment disposée à respecter ses engagements. Je ne sais tout simplement pas comment les choses se font. Si vous pouviez envoyer au comité une réponse plus détaillée, je l'apprécierais beaucoup.

M. Moloney : Je peux vous donner d'autres détails succincts qui expliqueront les choses. Premièrement, la Politique exige que les ministères soient plus précis quant aux résultats qu'ils veulent obtenir. Dans de nombreux programmes et activités spécifiques, dans tout le pays, il y aura des résultats axés sur l'égalité hommes-femmes et le ministère doit indiquer clairement au Parlement les objectifs qu'il cherche à atteindre. En vertu de la Politique, le ministère doit présenter un rapport clair au Parlement sur son taux de succès quant à l'atteinte de ces buts.

Deuxièmement, le Secrétariat du Conseil du Trésor examine tous les ministères pour voir si les résultats que ces derniers visent à atteindre sont conformes à ce que nous croyons être des décisions stratégiques. Nous examinons également la qualité de leurs rapports.

Je pense pouvoir vous donner un exemple tiré des activités du Secrétariat du Conseil du Trésor. Comme le sénateur l'a dit, chaque ministère est responsable d'effectuer une analyse sur l'égalité des sexes dans ses propres politiques et programmes, existants et nouveaux. Le Secrétariat du Conseil du Trésor entreprend une initiative complète de renouvellement des politiques au moment où nous examinons l'ensemble des politiques qui sont, généralement parlant, orientées de telle sorte qu'elles puissent guider la façon dont les ministères sont gérés et la façon dont ils se comportent. Nous examinons explicitement chacune de ces politiques, qui souvent ne comprennent pas d'analyse explicite de l'égalité hommes-femmes. Au moment où nous renouvelons ces politiques, nous demandons précisément à l'interne quelle influence, négative ou positive, exerce la politique pour régler les problèmes de la réalité hommes-femmes. Cela fait partie de notre évaluation des politiques et le président du Conseil du Trésor propose les politiques renouvelées une par une. Pour chacune d'entre elles, une telle analyse sera effectuée. Chaque ministère a pour tâche de faire cette analyse.

Le sénateur Nancy Ruth : Premièrement, puis-je supposer que cette analyse inclut les handicaps, les questions raciales et les autres critères de même que l'égalité hommes-femmes? Deuxièmement, serait-il possible que je voie certains documents internes dans lesquels on mesure l'impact de l'analyse de l'égalité hommes-femmes? Si je ne peux prendre connaissance de ces documents, je ne sais pas alors ce qui se passe et c'est mon problème. Je n'ai pas une analyse claire et lorsque je regarde les budgets, je ne peux simplement pas dire ce qui en est; je ne peux que deviner.

M. Toews : Nous allons voir ce que nous pourrons vous fournir à cet égard. Certes, depuis le peu de temps que je suis au Conseil du Trésor, j'ai vu une analyse concernant l'embauche de groupes minoritaires, par exemple. Cette analyse a été portée à mon attention, de sorte que je sais qu'au sein de tout le gouvernement, ce genre de question est prise en considération. Je n'ai pas de chiffres spécifiques sur les personnes handicapées, mais je sais ce qui advient d'autres minorités.

Le sénateur Nancy Ruth : Je vais vous donner un exemple. Si un gouvernement formule des recommandations concernant l'autisme, il présente en fait des recommandations qui touchent les garçons et il n'y a pas de comparatif pour les filles, que ce soit pour les troubles de l'alimentation ou pour tout autre problème spécifiquement féminin. C'est le genre de chose qui me trouble. La politique est publiée, mais il n'y a pas d'équilibre. J'aimerais beaucoup voir ce que vous pouvez remettre au comité.

M. Toews : Est-ce que vous nous demandez que chaque fois qu'il y a une politique sur la santé, par exemple, qui peut avoir des répercussions sur un sexe et non sur l'autre, nous trouvions une autre politique qui pourrait avoir des répercussions avantageuses sur l'autre sexe?

Le sénateur Nancy Ruth : D'ici 12 ou 18 mois, ce serait bien.

Si nous envoyons de l'aide en Afghanistan, pouvons-nous être certains que l'ACDI, ou peu importe qui est responsable, fait au moins un travail moitié-moitié? Je pense que c'est ce qui se passe actuellement en Afghanistan. C'est un bon exemple de la façon dont cela fonctionne.

Le rapport du Sénat sur l'Afrique subsaharienne renferme une analyse sur le microcrédit mais ne contient pas d'analyse sur l'égalité des sexes. Tout le monde sait que plus de 90 p. 100 des rendements sur les prêts consentis aux femmes sont mieux utilisés qu'ils ne le sont par les hommes, mais il n'y a pas d'analyse dans le rapport. Cette absence me fait peur.

M. Toews : Le microcrédit accordé aux femmes semble connaître un succès énorme. Nous ne semblons pas constater le même succès lorsque l'argent est consenti aux hommes. Vous ne diriez pas alors que nous finançons les perdants, n'est-ce pas?

Le sénateur Nancy Ruth : Non, mais si le rapport ne le précise pas, nous pourrions le penser.

M. Toews : C'est un bon point.

Le sénateur Nancy Ruth : La « non-discrimination » n'existe pas. Si cela n'est pas précisé, on parle habituellement des « hommes blancs », ce qui est un énorme problème pour ceux qui ne sont pas Blancs, aussi — peut-être pas en Afrique.

Le président : Vous vous êtes engagé à nous fournir une analyse et des évaluations de l'efficacité des programmes qui sont en place actuellement. Si vous pouviez faire parvenir ces renseignements à notre greffier de sorte que nous puissions les distribuer à tous les membres du comité, nous l'apprécierions. Cela nous intéresse beaucoup.

M. Toews : Il sera peut-être pas mal difficile pour chaque ministère de faire ce genre d'analyse. Je ne sais pas exactement ce que je peux vous donner, mais nous pouvons vous donner ce que le Conseil du Trésor fait, par exemple. Cela pourrait être un bon point de départ.

Le président : Cela nous aiderait. Nous ne vous demandons pas de vous adresser à tous les ministères, mais un ministère doit dire à tous les autres : « Avez-vous terminé votre analyse de l'égalité hommes-femmes? C'est ce que nous faisons au Conseil du Trésor. » Nous apprécierions cette initiative afin de pouvoir déterminer quelle surveillance il se fait. Est-ce que vous pouvez nous aider à cet égard?

M. Toews : Oui, je le crois.

Le sénateur Stratton : Bienvenue à vous, monsieur le ministre et à vos fonctionnaires. Nous allons accueillir assez souvent M. Moloney et Mme Danagher bientôt. J'aimerais parler de la GRC.

La Gendarmerie royale du Canada est bombardée de tous bords et de tous côtés. Par exemple, il y a eu la grève des gardiens de sécurité dans les prisons de la Saskatchewan. Tout à coup, les aéroports sont en train de se remplir d'agents de la GRC. Vous avez été ministre de la Justice. Comment avez-vous tenu compte de cette réalité dans le budget de la GRC?

Il y a plusieurs années — j'espère que le problème est aujourd'hui réglé — on pouvait traverser le Manitoba jusqu'à Regina à 130 ou 150 kilomètres à l'heure, sans jamais apercevoir un agent de la GRC. Est-ce que l'on est en train de régler le problème? Je remarque ici que des crédits additionnels de 18,8 millions de dollars sont accordés à la GRC pour l'engagement de personnel supplémentaire. Qu'est-ce que cela veut dire? Les crédits sont-ils accordés pour contrer les effets de la grève de Regina ou s'ils le sont pour l'embauche de personnel chargé de surveiller la circulation sur les autoroutes?

Est-ce qu'on le sait? Si vous ne le savez pas pour l'instant, pourriez-vous obtenir l'information pour moi? Je l'apprécierais beaucoup.

M. Toews : La question de la GRC est très importante, surtout dans les régions rurales de l'Ouest où elle exécute la plupart des fonctions de la police municipale. Je connais bien le rôle de la GRC, en tant que ministre de la Justice fédéral et provincial. En 1998, comme vous vous en souviendrez, le gouvernement de l'époque a décidé de fermer la Division dépôt. Je ne comprendrai jamais pourquoi un gouvernement veut cesser de former des agents de la GRC quand tout le monde sait que dans cinq ans, la moitié des agents de la GRC seront admissibles à la retraite. Cette décision nous a placés dans une situation difficile dans l'Ouest canadien en ce qui a trait aux services policiers et nous n'avons pas encore repris le dessus. Ça a été une décision désastreuse.

Je me souviens un matin de m'être retrouvé à Morris, au Manitoba, sur l'autoroute 75, qui est l'une des principales artères qui mènent des États-Unis au Canada. J'y ai rencontré un agent de la GRC qui m'a dit être le seul agent de la GRC en service dans un secteur de 1 600 milles carrés. Je lui ai demandé comment il arrivait à faire son travail. Il m'a répondu qu'il était dans une voiture banalisée et que les gens le dépassaient à 130 kilomètres à l'heure. Il n'arrivait tous simplement pas à les arrêter.

Je suis très heureux de vous annoncer que la situation a changé. Nous nous sommes engagés à créer 1 000 postes supplémentaires à la GRC. Ces crédits offrent les ressources nécessaires et nous permettent d'engager le nombre de procureurs nécessaires supplémentaires pour traiter les demandes additionnelles de poursuites. Cela faisait partie de notre plate-forme électorale.

D'après ce que je comprends, nous avons accru les fonds accordés à la Division dépôt à Regina. Nous envisageons, je crois, former environ 1 800 agents par année alors que le gouvernement antérieur en formait de 800 à 1 000. Les 800 ne réussiront même pas à combler les départs à la retraite, ce qui nous a sérieusement inquiétés.

Nous avons également remarqué que nombre des éléments du crime organisé se déplaçaient dans les régions rurales. Je me souviens d'avoir eu une discussion avec certains de mes agriculteurs au sujet du registre des armes à feu. Cinq d'entre eux étaient autour de la table. Quatre n'avaient pas enregistré leur arme, sauf un, parce qu'il achetait les munitions pour les cinq. J'ai demandé à ceux qui n'avaient pas enregistré leur arme à feu s'ils n'avaient pas peur que la GRC frappe à leur porte. L'un d'eux m'a répondu : « Avant que la GRC vienne frapper à ma porte, elle devra s'occuper de deux opérations de culture de marijuana. Je ne crains pas qu'elle vienne s'enquérir de mon arme à feu. »

Quand j'y pense de façon cynique, je constate que des agents de la GRC font appliquer un registre qui n'a absolument aucun impact. Nous mettons nos ressources dans ce registre alors que nous permettons à des opérations de culture de marijuana et au crime organisé de s'infiltrer dans les régions rurales. Ces opérations ont d'énormes répercussions néfastes. Elles constituent des risques non seulement pour les grandes régions urbaines, mais aussi pour la santé, l'environnement, la sécurité incendie et une menace pour nos pompiers. Elles sont maintenant répandues dans les régions rurales. Je suis heureux de ces formations, surtout du point de vue d'un député rural. Nous ne pouvons plus considérer la question comme un crime urbain ou un crime rural; c'est le crime organisé qui est intégré dans tout le pays et à l'échelle internationale. L'augmentation du nombre d'agents de la GRC constitue un avantage énorme pour les gens de ma circonscription et d'ailleurs.

Sénateur, je pourrais vous donner exemple après exemple. Je me souviens d'être arrivé sur les lieux d'un accident à la jonction des autoroutes 59 et 52. Il s'agit de l'autoroute qui mène à Steinbeck, au Manitoba. Il y avait là un accident majeur impliquant un camion transportant de l'essence. Les pompiers volontaires dirigeaient la circulation et effectuaient le nettoyage nécessaire. Aucun agent de la GRC n'était sur place. Où était l'agent? L'agent répondait à un autre appel près de Plum Coulee qui doit être à 50 milles de là. C'est pour vous montrer à quel point nous manquons d'agents de la GRC. Les pompiers volontaires, aussi compétents soient-ils, dirigeaient la circulation et supervisaient un problème environnemental. J'étais content de voir que nous avions ces pompiers volontaires, mais était-ce là leur responsabilité?

J'ai bien hâte d'avoir nos nouveaux agents jeunes. Je suis très fier de dire que j'ai un neveu qui est en formation à la GRC et j'espère que plus de jeunes choisiront cette carrière.

Le sénateur Stratton : Merci beaucoup.

Le sénateur Murray : Je suis intrigué par la discussion que viennent tout juste d'avoir le ministre et le sénateur Stratton, et je vais demander si, dans la situation que décrit le ministre, le Manitoba avait demandé des renforts ou des agents de police supplémentaires à Ottawa pour se faire dire qu'il n'y en avait pas.

Je vais faire quelques observations générales. Si vous en avez le temps et le désir, vous pouvez réagir. Je comprends ce que vous dites, et je pense qu'il est très louable que vous vouliez cibler les budgets des services votés des divers ministères. Comme nous le savons, les programmes ont tendance à tout simplement prendre de l'expansion, s'élargir encore davantage et disparaître.

Par exemple, je vois ici un crédit supplémentaire de 16 millions de dollars pour d'autres initiatives concernant la sécurité publique et la lutte au terrorisme. D'après nos notes, cela s'ajoute aux 153 millions de dollars demandés à cette fin dans le Budget supplémentaire des dépenses (A) pour l'exercice qui tire à sa fin. Nous avons une autre note indiquant que depuis le budget de 2001, le gouvernement a annoncé des crédits supplémentaires totalisant 12,5 milliards de dollars pour cette initiative. Le Budget supplémentaire est un budget supplémentaire horizontal. Cependant, lorsque je regarde le chiffre total de 12,5 milliards de dollars, j'ai presque l'impression que nous sommes en train de créer un tout nouveau programme de lutte au terrorisme. Nous savons tous que le Canada n'a pas attendu le 11 septembre pour se doter de mesures antiterroristes. Je partage votre cynisme. Quant à moi, ce que je trouve particulièrement cynique ici, c'est que si un fonctionnaire ou un ministre veut accélérer l'approbation d'une demande de fonds, il trouvera une façon quelconque de la relier à des crédits pour lutter contre le terrorisme parce que personne au gouvernement, au Cabinet ou ailleurs ne veut être celui qui dira non à une mesure antiterroriste ou à du financement pour lutter contre le terrorisme. Quand une bombe éclatera quelque part plus tard, les gens commenceront à vous pointer du doigt en disant que c'est de votre faute parce que vous ne leur avez pas donné le million supplémentaire et que vous avez les mains tachées de sang. Le dialogue politique se situe à ce niveau dans notre pays. Je me demande si tout ce domaine de la lutte au terrorisme est assujetti à un examen aussi rigoureux qu'il devrait l'être avant que l'on cesse d'en parler dans le budget.

Pour passer du sublime au ridicule, je vois 30,7 millions de dollars en crédits supplémentaires pour l'Agence du revenu du Canada afin de mettre en œuvre la réduction de la TPS et quelques autres choses. Le gouvernement a réduit la TPS de 1 point de pourcentage. Êtes-vous en train de me dire que l'Agence du revenu du Canada, qui a un budget d'environ 3 milliards de dollars et quelques poussières, ne pourrait pas trouver 30 millions de dollars pour mettre cette réduction en œuvre? Soit dit en passant, pourquoi faut-il 30 millions de dollars pour mettre en œuvre la diminution de la TPS? Vous allez réduire la TPS d'un autre point de pourcentage l'an prochain. L'Agence du revenu reviendra-t-elle demander encore 30 millions de dollars, ou si elle cachera sa demande sous une mesure de lutte au terrorisme, peut- être?

Voici une autre chose que je vais vous imposer en tant qu'ancien ministre de la Justice. Je vois 18,8 millions de dollars de crédits accordés à la GRC pour l'embauche de personnel supplémentaire et de procureurs fédéraux. C'est là, à n'en pas douter. J'aurais pensé que l'embauche de procureurs fédéraux se trouverait dans un crédit relevant de votre ancien ministère et non de la GRC. Pouvez-vous expliquer cela?

M. Toews : Je ne peux pas, mais mon collègue le peut. Je vais laisser aux autres le soin de répondre à ces questions sur les recettes nationales, la GRC et les procureurs.

Votre première observation portait sur la GRC et sur le fait de savoir si les provinces demandent des agents additionnels. Oui, absolument, elles le font. En fait, et c'est intéressant de le souligner, elles augmentent leurs dépenses et leurs crédits à l'échelle provinciale au maximum et annoncent qu'elles ont maintenant 30 millions de dollars supplémentaires pour la GRC, sachant que le gouvernement fédéral ne pourrait jamais respecter de tels engagements.

Le sénateur Murray : Est-ce que le Manitoba a fait une chose semblable?

M. Toews : Je crois que cela s'est déjà produit. Ainsi, on peut toujours prétendre que l'on a demandé des agents. Même dans le dernier gouvernement, le Manitoba demandait constamment plus d'agents de police qu'il savait que le gouvernement pourrait lui offrir parce que l'on ne formait pas suffisamment d'agents là-bas. Est-ce que les provinces présentaient des demandes? Oui. L'argent était-il disponible? Oui, au niveau provincial. Bien sûr, les crédits ont toujours été périmés parce que le gouvernement fédéral ne pouvait jamais satisfaire à la demande et fournir ces agents.

Je vais laisser les autres questions à mon collègue.

M. Moloney : La troisième question concernait les 1 000 postes pour la GRC, qui représentaient un total de crédits de 18,4 millions de dollars pour cette organisation. De plus, on trouve une petite somme de 400 000 $ dans un crédit du ministère de la Justice. Compte tenu du fait que nombre de ces agents de la GRC seront engagés pour mener des activités policières au niveau fédéral, on s'attend à ce qu'il y ait une augmentation du nombre de poursuites par le gouvernement fédéral.

Le sénateur Murray : Cette question m'a intéressé. Pourquoi ces postes sont-ils sous le crédit de la GRC et non pas du ministère de la Justice?

M. Moloney : Le sénateur fait peut-être référence à un crédit horizontal où nous avons réuni les deux. En fait, il y a un crédit 1 pour le ministère de la Justice de 405 000 $ spécifiquement réservé à cette fin, et il sera considéré comme horizontal. Il est relié à l'initiative gouvernementale dans ce domaine.

Le sénateur Murray : C'est sous le poste GRC « fonds pour augmenter le nombre de postes à la GRC et le nombre de procureurs fédéraux », à la page 192. Vous dites que c'est sous le crédit 60. Quoi qu'il en soit, c'est un très petit point.

Le président : Peut-être pourriez-vous nous fournir des explications par écrit.

M. Moloney : Certainement. Dans le domaine de la sécurité publique, deux initiatives précises sont en cause. L'une d'elles consiste à pouvoir améliorer le flot des échanges commerciaux dans un climat de sécurité accrue. Au total, 5,7 millions de dollars sont demandés par l'Agence des services frontaliers du Canada pour l'harmonisation de la cotation des risques et une initiative sur les données commerciales avancées qui fait partie du partenariat Canada-États-Unis sur la sécurité des conteneurs. Essentiellement, cette initiative facilitera l'acheminement des marchandises, des conteneurs remplis de marchandises, dans ce climat de sécurité accrue.

Deuxièmement, il y a un crédit de 10,1 millions de dollars que demande Sécurité publique et Protection civile Canada concernant la capacité de gestion des urgences dans la région de la capitale nationale et dans les provinces et territoires. Ce crédit est lié à toutes les catégories de planification des situations d'urgence et des catastrophes, des communications, et ainsi de suite.

En ce qui concerne l'Agence du revenu du Canada, les 30,6 millions de dollars font référence à un ensemble d'initiatives, dont l'une est la réduction du taux de taxe sur les produits et services. Je suis désolé de ne pas avoir la ventilation pour les six initiatives différentes, mais il y a des coûts reliés aux changements des systèmes et consacrés à l'information du secteur privé à ce sujet.

Le sénateur Murray : Il s'agit de 30 millions de dollars. Peut-être que l'ensemble des 30 millions de dollars n'ont pas été affectés à l'administration du programme de réduction de la TPS, mais la majeure partie doit l'avoir été parce que la réduction de la TPS est le principal élément mentionné dans le crédit.

M. Moloney : On précise également que des mesures ont été prises concernant les crédits d'impôt personnels. Il y avait quatre mesures totalement nouvelles. Il existe maintenant un crédit d'Emploi Canada, qui est de 1 000 $ pour les Canadiens qui engagent des dépenses pour leur travail.

Il y a maintenant un nouveau crédit d'impôt pour les manuels scolaires. Il y a un nouveau crédit d'impôt pour les laissez-passer du transport en commun. Il y a un nouveau crédit d'impôt pour la santé des enfants. Il y avait également des mesures concernant les entreprises au sujet d'un nouveau crédit d'impôt pour la création de postes d'apprentis et des changements aux droits sur le tabac et l'alcool. Dans ces domaines, la charge de travail va changer à cause des règles, des changements pour la technologie de l'information, des vérifications et ainsi de suite. Par conséquent, les 30,6 millions de dollars s'appliquent à l'ensemble des six secteurs ou plus.

Le sénateur Murray : Je me demande quelle part de cet argent est consacrée à l'embauche de nouveaux employés. Je soulève la question à nouveau parce que le gouvernement a décidé qu'il y aurait une autre réduction d'un point de pourcentage de la TPS en avril. L'Agence du revenu du Canada reviendra-t-elle demander encore 30 millions ou 20 millions de dollars? On ne le sait pas.

Vous vous demandez si les personnes qui préparent à l'origine ces présentations au Conseil du Trésor trouvent des termes pratiques et utiles comme lutte au terrorisme ou réduction de la TPS, les deux sont plus que plausibles en tant que domaines stratégiques. On a besoin de quelques millions de dollars, on va les mettre quelque part. Il faudrait beaucoup plus d'analystes que vous en avez au Conseil du Trésor pour s'intéresser à cette question, n'est-ce pas?

Le président : Toute information que vous pourriez nous faire parvenir par écrit pour clarifier ces éléments serait utile. Vous avez bien défendu vos points, et si vous voulez obtenir le point de vue du Ministère, cela pourrait aider.

Honorables sénateurs, nous allons rencontrer le président du Conseil du Trésor à nouveau mardi après la pause pour examiner le Budget principal pour le prochain exercice qui a été déposé ce matin. Je suis certain que les sénateurs dont le nom figure sur la liste pour la deuxième série de questions auront la chance de poser leurs questions pertinentes lors de la prochaine réunion avec le ministre.

Monsieur le ministre, merci beaucoup d'avoir comparu aujourd'hui devant le comité. Nous avons bien hâte de vous revoir pour vous entendre au sujet du Budget principal.

La séance est levée.


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