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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Finances nationales

Fascicule 19 - Témoignages du 20 juin 2007 - Séance du soir


OTTAWA, le mercredi 20 juin 2007

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui à 18 h 17 pour l'examen du projet de loi C-52, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 19 mars 2007.

Le sénateur Joseph A. Day (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Je vous souhaite la bienvenue au Comité sénatorial permanent des finances nationales. Je suis Joseph Day. Je représente la province du Nouveau-Brunswick au Sénat, et je suis président du comité.

[Traduction]

Le comité s'intéresse aux dépenses du gouvernement, qu'elles soient engagées directement dans le budget des dépenses ou indirectement dans des projets de loi portant pouvoir d'emprunt ou portant exécution des dépenses proposées dans le budget des dépenses. Ce soir nous poursuivons notre étude du projet de loi C-52, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 19 mars 2007.

Je suis heureux d'accueillir l'honorable Patrick G. Binns, chef du Parti progressiste-conservateur de l'Île-du-Prince- Édouard. M. Binns a d'abord été élu à l'Assemblée législative de l'Île-du-Prince-Édouard en 1978 où il a continué de siéger jusqu'en 1984. De 1984 à 1988, M. Binns a été député fédéral de la circonscription de Cardigan. Il est ensuite rentré à l'Île-du-Prince-Édouard où il a été réélu. Il est devenu premier ministre en 1996.

J'ai aussi le bonheur de vous présenter le professeur Paul Hobson de l'Université Acadia. M. Hobson est professeur au département d'économie. Il est membre du corps professoral de l'Université Acadia depuis 1981. Il est actuellement président de l'Association d'économique du Canada atlantique. M. Hobson a prononcé de nombreuses conférences et a publié de nombreux ouvrages sur la question du fédéralisme fiscal canadien ainsi que sur la fiscalité des biens et autres questions de finances publiques locales.

J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue au professeur Wade Locke de l'Université Memorial. M. Locke enseigne l'économie et se spécialise dans l'économie de Terre-Neuve, les ressources, les finances publiques, la politique gouvernementale, les indicateurs d'innovation, la productivité, l'évaluation des incidences économiques et les analyses coûts-avantages. Il a réalisé des travaux de recherche sur la dimension économique des activités pétrolières et gazières à Terre-Neuve-et-Labrador et dans tout le Canada atlantique, toutes questions qui intéressent notre groupe, soit dit en passant. M. Locke a fait des travaux très fouillés sur l'incidence économique et l'analyse financière des projets pétroliers et gaziers et des projets relatifs aux ressources minérales. Par ailleurs, plus récemment, il s'est intéressé aux questions liées au développement économique régional et aux arrangements fiscaux intergouvernementaux. Il est l'ancien président de l'Association d'économique du Canada atlantique et conseiller principal auprès du Conseil économique des provinces de l'Atlantique.

Monsieur Binns, voulez-vous commencer? Nous avons reçu des documents de vous, un communiqué du gouvernement du Canada du 26 octobre 2004 auquel vous ferez peut-être référence.

Je vous signale, honorables sénateurs, que nous avons reçu des documents de M. Hobson et de M. Locke et que nous n'avons pas pu les faire traduire intégralement, et nous en sommes désolés. Nous avons fait traduire des tableaux et le sommaire. Les autres documents seront traduits puis vous seront distribués.

Enfin, nous avons reçu de la correspondance du premier ministre de Terre-Neuve-et-Labrador, Danny Williams. Il nous fait savoir qu'il ne peut venir témoigner mais qu'il suit nos délibérations et souhaite commenter plusieurs points qui ont été soulevés. Je veillerai à ce que cette lettre soit distribuée. Elle est à la traduction.

L'hon. Patrick G. Binns député, à titre personnel : Honorables sénateurs, anciens collègues de la Chambre des communes, mesdames et messieurs, je suis venu aujourd'hui, comme d'autres l'ont fait avant moi, pour tenter de vous aider à décider si vous appuierez ou non le nouveau budget. Étant de l'Île-du-Prince-Édouard, je dirais oui au budget. En tant que Canadien, je dirais oui. À votre place, je crois que je dirais oui.

Pourquoi est-ce que j'en arrive à cette conclusion? Je crois qu'il est abordable. Il reconnaît l'existence d'un déséquilibre fiscal et tente de le corriger.

En ce qui a trait à l'abordabilité, le premier ministre Chrétien et le premier ministre Martin commençaient toujours les négociations lors des rencontres des premiers ministres en disant que les ressources financières étaient limitées et qu'il fallait éviter les déficits. Ils ont augmenté les transferts depuis que je suis premier ministre mais ils ont aussi repoussé à plus tard le rétablissement de l'aide tandis que les provinces accumulaient des déficits même quand tout le monde s'attendait à ce que le gouvernement fédéral annonce un surplus.

Le premier ministre Harper a aussi fait preuve d'une certaine retenue dans son budget mais il a néanmoins augmenté de façon appréciable les affectations au titre du Transfert canadien en matière de santé, du Transfert canadien en matière de programmes sociaux, de la péréquation et des nouveaux fonds dont l'écoFiducie Canada, des garanties de délais d'attente pour les patients et des programmes d'infrastructure. Il est aussi le premier à avoir reconnu l'existence d'un déséquilibre fiscal.

J'ai participé à environ 25 réunions sur le déséquilibre fiscal avec les premiers ministres fédéraux et provinciaux. J'ai toujours réclamé davantage de transferts fédéraux mais, comme je suis convaincu du rôle du gouvernement central, j'ai toujours essayé de réclamer seulement ce qui était équitable. Lors des conférences annuelles des premiers ministres provinciaux et des rencontres du Conseil de la fédération, j'ai pressé mes collègues de discuter à la fois des transferts en matière de santé et de programmes sociaux et de péréquation.

Les provinces qui ne reçoivent pas de paiements de péréquation ne voulaient jamais discuter de péréquation parce qu'elles étaient convaincues, me semble-t-il, que la bonification de la péréquation entraînerait une réduction d'autres transferts fédéraux qu'elles recevraient normalement de façon automatique. C'est pourquoi il faut une formule permanente.

J'ai aussi été frustré de voir que certains dirigeants provinciaux avaient tendance à soutenir qu'un enrichissement de la péréquation entraînerait nécessairement une ponction de leurs revenus provenant des ressources naturelles. Ces dirigeants laissaient entendre aux Canadiens que les provinces riches en ressources seraient obligées de faire des chèques au profit des bénéficiaires de la péréquation qui seraient financés à même les revenus que la province tirait des ressources naturelles. C'est bien entendu de la foutaise puisque la péréquation est financée par tous les contribuables canadiens, y compris par ceux de l'Île-du-Prince-Édouard, que ce qu'il s'agit de déterminer c'est la façon dont le gouvernement fédéral distribue ses recettes fiscales.

Depuis le milieu des années 90, moins de ressources ont été affectées au fonds de la péréquation comparativement à ses niveaux historiques où le transfert avoisinait 1,1 p. 100 du PIB du Canada.

Le Conseil de la fédération, dans son rapport intitulé Réconcilier l'irréconciliable : S'attaquer au déséquilibre fiscal du Canada, recommandait comme optimale une formule utilisant la norme de 10 provinces et l'inclusion de tous les revenus provenant des ressources naturelles. C'est la position que défend depuis longtemps l'Île-du-Prince-Édouard. C'est la seule véritable solution à long terme puisqu'elle permet réellement de comparer la richesse relative de chaque administration et favorise l'attribution de paiements de péréquation en conséquence. L'Île-du-Prince-Édouard appuie aussi la position du Conseil sur la volatilité et l'abordabilité, à savoir qu'il y aurait une norme grâce à une moyenne mobile de toutes les sources de revenus sur trois ans, retardée de deux ans.

Vous aurez aisément compris que je suis réticent à accepter la formule O'Brien qui inclut 50 p. 100 des revenus provenant des ressources naturelles car j'estime que cette formule ne peut constituer une solution à long terme. Toutefois, c'est un compromis et c'est préférable à l`exclusion de tous les revenus provenant des ressources dans la formule, et il y a une formule.

L'étude réalisée récemment par le Conseil économique des provinces de l'Atlantique (CEPA) ne devrait pas être utilisée pour faire une comparaison historique des paiements de péréquation. Le groupe de travail du Conseil de la fédération et le groupe d'experts O'Brien ont tous les deux été constitués parce que toutes les administrations s'entendaient sur la nécessité de revenir à un programme de péréquation basée sur une formule.

Le 26 octobre 2004, le premier ministre Martin a fait savoir par un communiqué, que vous avez fait distribuer, que le taux de croissance serait de 3,5 p. 100 jusqu'en 2009-2010. Le communiqué incluait par ailleurs un tableau, joint, qui couvrait la période allant jusqu'en 2013-2014, précisait qu'il était inclus à titre d'illustration seulement et que les niveaux pour 2010-2011 seraient réexaminés en fonction des indicateurs de disparités élaborés par le groupe d'experts.

Pour ma part, je me souviens que lors de la rencontre des premiers ministres provinciaux, tenue avant la publication du communiqué, d'avoir su que les 3,5 p. 100 seraient de plus courte durée et ne seraient en vigueur que jusqu'à l'élaboration de la nouvelle formule.

Le CEPA ne s'est pas penché sur l'augmentation des transferts fédéraux au titre du TCS, du TCPS, de l'infrastructure, des garanties de délais d'attente pour les patients, de l'écoFiducie Canada et de la formation de la main-d'oeuvre qui sont annoncés dans ce budget. Ces transferts auront une incidence appréciable sur les finances des provinces. J'estime qu'il faut aussi tenir compte de ces transferts pour avoir une idée complète de la situation.

Ces mesures seront très avantageuses pour l'Île-du-Prince-Édouard. Elles profiteront tout particulièrement de la nouvelle base des dépenses qui reconnaît que les petites administrations ont des coûts administratifs élevés. Cela aura une importante incidence sur notre capacité d'assurer des services à un niveau de qualité et de fiscalité sensiblement comparable et apporte un complément à la péréquation.

Wade Locke, professeur, Université Memorial de Terre-Neuve-et-Labrador, à titre personnel : C'est pour nous un honneur et un privilège d'être invité à témoigner devant les sénateurs et devant ce comité très réputé. Nous sommes ravis de ce privilège. Par souci du temps, nous n'allons pas entrer dans les détails de notre mémoire mais nous sommes disposés à répondre à toutes les questions que pourraient avoir des sénateurs.

Permettez-moi d'expliquer qui nous sommes en mettant l'accent sur ce qui n'a pas encore été dit. M. Hubson et moi- même nous intéressons à la politique gouvernementale et à la péréquation depuis environ 50 ans de sorte que notre intérêt ne date pas d'hier. C'est un sujet que nous trouvons fort intéressant et nous avons tenté de faire une contribution positive à la politique publique au Canada.

Quand le budget a été déposé et qu'il annonçait un changement à la formule de péréquation, nous, à titre de conseillers du CEPA, avons décidé qu'il s'agissait d'une question de politique publique légitime et que nous devrions tenter de déterminer ce que signifieraient ces changements à la formule de péréquation pour chacune des provinces de l'Atlantique. En outre, au moins deux des provinces devaient prendre des décisions et faire des choix. Quand nous avons voulu nous renseigner, nous avons constaté une pénurie d'information. Les données concrètes étaient rares. Les décideurs feraient leur choix en fonction des chiffres. Puisque nous avions la capacité ainsi que les aptitudes et la volonté de produire des chiffres aux fins d'un exercice de simulation — et non de projection — c'est ce que nous avons décidé de faire. Nous n'entrerons pas dans le détail des résultats précis que nous avons obtenus et qui sont connus du public mais nous répondrons à vos questions si vous en avez.

Avant de céder la parole à M. Hobson, j'aimerais dire que j'ai pris connaissance des comptes rendus dans les médias. Certains attribuent l'essentiel de ces changements au rapport du groupe d'experts O'Brien. Je me permets de signaler aux sénateurs que bon nombre des changements mis en oeuvre par le projet de loi C-52 reflètent des choix faits par le gouvernement plutôt que des recommandations du groupe d'experts O'Brien. Lorsqu'un changement discrétionnaire qui ne résultait pas des recommandations du groupe d'experts O'Brien devait être apporté, il l'a été d'une manière qui a fait du tort à des provinces comme Terre-Neuve-et-Labrador. Je vais permettre à M. Hobson de continuer.

Paul Hobson, professeur, Université Acadia, à titre personnel : Bonjour, sénateurs. J'aimerais moi aussi dire que c'est un privilège et un honneur de comparaître ce soir devant le Comité sénatorial permanent des finances nationales.

Comme l'a dit M. Locke, nous avons entrepris de simuler dans le cadre des travaux que nous effectuions pour le compte du CEPA les effets des propositions budgétaires sur les droits à péréquation des quatre provinces de l'Atlantique. Nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions au sujet des résultats précis que nous avons obtenus. J'aimerais vous livrer brièvement les trois messages fondamentaux que renferme notre mémoire.

Premièrement, notre analyse numérique révèle que la Nouvelle-Écosse, à tout le moins, aurait intérêt à opter pour le programme actuel qui est beaucoup plus avantageux pour elle sur le plan financier. Si c'est le choix qu'elle fait, et nous croyons qu'il est fort probable que la province choisisse cette option, il y aura au pays deux programmes de péréquation qui fonctionneront en même temps. Nous croyons que cette situation n'est pas tenable à long terme.

Le deuxième message que j'aimerais vous livrer concerne l'article 36, qu'il n'est jamais inutile de mentionner dans une discussion comme celle-ci. Nous avions cru comprendre que les paiements au titre des accords résultaient d'une entente de développement économique destinée à réduire les disparités et à accroître les possibilités de développement au moyen de paiements effectués aux termes de l'article 31 de la Constitution. Ces paiements n'étaient pas versés dans le cadre du programme de péréquation.

S'agissant du paragraphe 36(2) et du nouveau programme, je vous rappelle qu'en vertu de ce paragraphe, le Parlement et le gouvernement du Canada prennent l'engagement de principe de faire des paiements de péréquation. Dans le cadre de ce nouveau programme, pour la première fois une distinction est faite entre l'admissibilité et les paiements réels mais le gouvernement s'est engagé à effectuer des paiements de péréquation afin qu'il y ait des revenus suffisants pour assurer des services à un niveau de qualité et de fiscalité sensiblement comparable.

En vertu du nouveau programme, la capacité fiscale après l'instauration du plafond sera pour certaines provinces — Terre-Neuve-et-Labrador, Saskatchewan et Nouvelle-Écosse pour certaines années où le plafond s'appliquera — la même que celle de l'Ontario. Pour d'autres provinces, dont le Nouveau-Brunswick, l'Île-du-Prince-Édouard, le Québec et le Manitoba, leur capacité fiscale correspondra à la capacité fiscale totale, la totalité des revenus provenant des ressources étant incluse, et la mesure de la capacité fiscale utilisée aux fins de l'instauration du plafond sera différente. Quand peut-on parler de capacité fiscale égale dans le cadre de ce nouveau programme?

Il faudrait peut-être songer à respecter l'esprit des paragraphes 36(1) et (2).

Enfin, nous soutenons dans notre mémoire que le nouveau programme viole à la fois l'esprit et la lettre des accords, tant l'Accord atlantique, l'Entente de 2005 concernant les paiements compensatoires. Le programme les viole de deux façons. Il y a d'abord l'instauration d'un plafond dans le cadre du nouveau programme de péréquation qui entraîne la défalcation des paiements au titre de l'accord, et il y a ensuite l'utilisation des mesures antérieures au plafond, aux termes du calcul des paiements au titre de l'accord pour 1985 et 2007 et il y a bien sûr la mesure de la capacité fiscale totale utilisée pour déterminer si les paiements seront plafonnés. Nous pouvons parler du libellé des articles des accords lors de la période des questions.

Le président : Merci, monsieur Hobson. Je suis désolé, mais je ne sais pas où vous vouliez en venir. Vous pourriez peut-être expliquer l'inégalité de l'application du plafond lorsque 100 p. 100 des revenus provenant des ressources naturelles entrent dans le calcul, et vous avez nommé un certain nombre de provinces qui sont touchées, et nous dire quelle conclusion vous en tirez.

M. Hobson : Je vais vous donner une réponse partielle que M. Locke pourra compléter. D'abord, en réaction aux commentaires du premier ministre Binns, j'aimerais préciser que notre document porte expressément sur les dispositions du budget qui touchent à la péréquation. C'est là que nous avons concentré notre travail. Le premier ministre Binns a tout à fait raison de dire qu'il y a bien d'autres choses dans le budget. Nous nous sommes intéressés uniquement à la péréquation et très particulièrement à l'interaction entre le programme de péréquation et les accords. Nous connaissons à fond les accords. Je vais demander à M. Locke de répondre à votre question.

M. Locke : Étant donné que 50 p. 100 des revenus provenant des ressources naturelles seront exclus aux fins du calcul des paiements de péréquation, toute province riche en ressources qui n'est toutefois pas suffisamment riche pour que le plafond s'applique à elle, recevra un paiement de péréquation fondé sur un taux d'inclusion de 50 p. 100 de sorte que lorsque l'on ajoute les autres 50 p. 100, sa capacité fiscale totale avec la hausse des paiements de péréquation la fera passer à un autre niveau à condition qu'elle n'atteigne pas le plafond. L'Île-du-Prince-Édouard sera la province qui aura la capacité fiscale totale la plus faible, compte tenu de tous les paiements. Le Nouveau-Brunswick se classera au deuxième rang. La situation sera différente au Québec et au Manitoba. La Saskatchewan et l'Ontario auront une situation comparable puisqu'elles atteignent toutes les deux le plafond. Terre-Neuve-et-Labrador et la Nouvelle-Écosse seront dans une situation différente en raison de l'application des accords.

Le sénateur Murray : Est-ce trop simpliste de décrire ainsi la situation : une inclusion de 50 p. 100 pour calculer vos droits à péréquation mais un taux d'inclusion de 100 p. 100 pour calculer votre capacité fiscale?

M. Locke : La définition de la capacité fiscale est asymétrique et cela modifie la capacité des provinces de financer des services. La capacité des provinces varie de l'une à l'autre. Toute province dont la capacité fiscale est inférieure au plafond a des moyens différents selon la richesse de sa capacité fiscale au titre des ressources.

Le président : J'ai une liste de sénateurs qui ont hâte d'en discuter avec vous. Chacun de vous se sent-il capable de discuter, en plus de la péréquation et des accords sur les ressources extracôtières, les autres dispositions du projet de loi C-52 qui touchent au transfert par habitant et au transfert vertical de fonds?

M. Locke : M. Hobson répondra à ces questions en notre nom.

Le sénateur Rompkey : Je souhaite la bienvenue à nos invités et j'aimerais poser d'abord des questions au sujet de l'accord.

Le ministre des Finances nous a dit que Terre-Neuve-et-Labrador pouvait choisir l'accord si elle le souhaite, sans modifications ni changements. D'autres, dont John Crosbie hier soir, nous ont dit que les changements annoncés dans le budget vident l'accord de sa substance. D'ailleurs, c'est aussi ce que disait le premier ministre avant de devenir premier ministre — à savoir que l'imposition d'un plafond et d'autres mesures videraient l'accord de sa substance. Le premier ministre MacDonald a confirmé que certains changements annoncés dans le budget annuleraient les bienfaits de l'accord.

J'aimerais que vous commentiez pour nous les divers articles du projet de loi qui s'appliquent à l'accord. C'est une toute autre question que de savoir si ce qu'a fait le gouvernement est légal ou non. Mon collègue le sénateur Baker est mieux en mesure que moi de parler des aspects juridiques. Il a été légiste parlementaire à l'assemblée législative provinciale, comme vous le savez, et John Crosbie a failli retenir ses services hier soir, mais il a décidé de rester parmi nous.

Le sénateur Cowan : C'était le contraire.

Le sénateur Rompkey : Il connaît mieux le sujet que moi. J'aimerais que vous nous expliquiez ceci. Il y a cinq pages dans le budget, à compter de l'article 78 à la page 91, qui portent sur l'accord. J'aimerais que vous commentiez ces articles et que vous nous expliquiez quels effets ils auront sur l'accord puisqu'on nous a dit que nous pouvons choisir de garder les accords et qu'ils seront inchangés.

M. Locke : Je vais demander à M. Hobson de vous répondre. Je dirai toutefois que nous sommes tous d'avis que l'accord a certainement été modifié. C'est incontestable. Le nouveau système instaure de nouveaux critères d'admissibilité pour l'Accord atlantique et cela a des conséquences dramatiques et négatives pour des provinces dont Terre-Neuve-et-Labrador. En outre, le changement apporté à l'accord de 1985, qui utilise les paiements de péréquation pour calculer le plafond, constitue certes un changement. Je vais laisser le professeur Hobson vous expliquer les changements précis.

M. Hobson : Ce n'est pas une mince tâche alors allons-y. Il ne suffit pas de lire le libellé des dispositions relatives aux accords, à compter de la page 91, comme l'a dit le sénateur Rompkey.

Le sénateur Rompkey : J'aimerais d'abord obtenir des éclaircissements au sujet d'autres questions que j'ai jugées importantes relevées dans ce que vous avez dit; selon vous, les accords sont des ententes de développement économique conclues en vertu du paragraphe 36(1) de la Constitution. J'ai posé la même question au ministre et il m'a répondu qu'il n'en est rien. J'ai noté avec intérêt votre confirmation du fait qu'il s'agit effectivement d'ententes de développement économique aux termes du paragraphe 36(1).

Cela dit, la péréquation a une incidence. Elle existe. C'est une politique nationale à laquelle nous ne pouvons pas échapper, et qui a donc une incidence sur les accords. Veuillez poursuivre votre analyse de ces incidences.

M. Hobson : J'ajouterai, sénateur, que si vous lisez le libellé de l'Accord atlantique de 1985 et celui de l'Accord Canada-Nouvelle-Écosse, vous constaterez qu'il est clairement fait mention du développement économique en vertu du paragraphe 36(1).

Il y a un élément de vérité dans ce que chacun dit — dans ce que dit le ministre Flaherty, dans ce que dit M. MacDonald et dans ce que vous a dit M. Crosbie.

Permettez-moi de vous expliquer comment je comprends la position du ministre Flaherty. Oui, la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve-et-Labrador peuvent opter pour le programme de péréquation actuellement en vigueur. Elles peuvent exercer ce choix jusqu'en 2019-2020, année où les accords expirent. C'est une option. Si Terre-Neuve-et-Labrador opte pour le programme actuellement en vigueur, ce qui semblerait être leur meilleure option selon nos chiffres, le programme continuerait d'être en vigueur pendant les deux prochaines années, après quoi la province n'aurait plus droit aux paiements de péréquation.

Les paiements prévus à la partie I de l'Accord de 1985 seront graduellement éliminés jusqu'à l'an 2011-2012 en vertu de ce programme. En 2011-2012 puis 2012-2013, elle n'aura plus droit aux paiements de péréquation et ne sera plus admissible à une prorogation de l'accord. Selon nos calculs, la province retrouvera son droit à péréquation dans les années subséquentes mais, à ce moment-là, son droit aux paiements prévus dans l'accord aura expiré. En ce sens, rien ne change pour Terre-Neuve-et-Labrador.

Il en va de même pour la Nouvelle-Écosse. Elle aussi peut opter pour le régime actuellement en vigueur. Permettez- moi de saisir cette occasion pour vous présenter nos chiffres à cet égard.

Selon nos chiffres, la Nouvelle-Écosse a fait le choix sensé pour cette année. Le budget lui donnait le choix, non pas d'adhérer au nouveau programme — bien que le choix soit parfois présenté de cette façon — mais plutôt de choisir une combinaison de chiffres. Les paiements de péréquation et les paiements prévus à l'accord selon le programme actuellement en vigueur; les paiements de péréquation et les paiements prévus à l'accord en vertu du nouveau programme. Le meilleur choix combiné était celui qui donnait des paiements combinés plus importants, et c'est le choix qu'a fait la province. C'est le nouveau programme qui apportait les bénéfices les plus grands mais la Nouvelle-Écosse n'a pas opté pour le nouveau programme; elle n'a pas eu à le faire. Elle pouvait choisir un chiffre et c'est ce qu'elle a fait.

Toutefois, pour 2008-2009, la Nouvelle-Écosse aurait été plus avantagée par le nouveau programme. Je renvoie les sénateurs au tableau récapitulatif à la fin du sommaire de notre mémoire, à la page 4, et plus particulièrement aux tableaux A1 à A6.

Si la Nouvelle-Écosse opte pour le nouveau programme en 2008-2009, elle touchera 64 millions de dollars de plus. Le problème qui se pose pour la Nouvelle-Écosse c'est que pour obtenir les fonds, elle doit faire un choix officiel. Si elle adhère au nouveau programme, elle perdra les garanties qu'offre le programme actuellement en cours. Or, le projet de loi C-52 ne lui permet pas de faire ultérieurement un choix différent. Je sais qu'il a été question de modifier cette exigence mais, selon le libellé du projet de loi C-52, la province ne pourra pas changer d'idée. Son choix est irrévocable. En ce sens, les accords continueront de s'appliquer comme ils s'appliquent depuis 2005.

Qu'arriverait-il si la Nouvelle-Écosse optait pour le nouveau programme en 2008-2009? Pour cette seule année, selon nos calculs, la province recevrait 64 millions de dollars de plus sans être assujettie au plafond. Il n'y aura pas de défalcation par rapport aux paiements prévus dans l'accord. Ces derniers seront calculés selon la formule du nouveau programme de péréquation, comme le prévoient les dispositions qui se trouvent aux pages 91 et suivantes, soit les modifications corrélatives aux accords.

Toutefois, pour les années à partir de 2008-2009, selon nos calculs, il serait plus avantageux pour la Nouvelle-Écosse de demeurer sous le régime en place. En ce sens, l'accord continue. Si la Nouvelle-Écosse décidait de participer au nouveau programme, selon nos calculs, entre 2009-2010 et 2013-2014, elle serait assujettie à une récupération fiscale des paiements en vertu de l'accord étant donné le plafond qui est imposé en vertu du régime de péréquation. C'est dans ce sens que l'accord n'est pas respecté. Je crois que c'était là le sens des observations de M. Crosbie hier soir.

Par ailleurs, c'est dans ce sens, je crois, que la Nouvelle-Écosse craint que les accords ne soient pas respectés car les paiements en vertu des accords sont récupérés avec la péréquation. L'intention des accords c'était que toute récupération fiscale des revenus extracôtiers dans le cadre de la péréquation serait remboursée à la province et tout cela a changé aux termes du nouveau programme.

Le plafond qui est imposé est un aspect qui fait en sorte que les accords ne sont pas respectés, et c'est le cas pour la Nouvelle-Écosse et pour Terre-Neuve-et-Labrador.

Étant donné que Terre-Neuve-et-Labrador ne recevra plus de paiements de péréquation dans deux ans même sous le régime actuel, et sous le nouveau régime, bien que ce ne serait jamais son choix étant donné nos chiffres, ce qui a encore des conséquences plus graves pour Terre-Neuve-et-Labrador, c'est le libellé que l'on retrouve si on se reporte à la page 91 du projet de loi C-52, ce que le sénateur Rompkey nous a demandé de faire.

Ce n'est pas tout à fait la page 91. Le plus important est à la page 93. Tout est documenté dans notre mémoire. Nous avons un chapitre qui porte sur les changements apportés à la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces et sur les changements apportés aux accords. On fait tout un historique des accords et de la façon dont ils ont été modifiés. C'est expliqué clairement dans le document.

Si l'on se reporte à l'article 80 à la page 93 du projet de loi C-52, on peut voir les changements, c'est-à-dire la façon dont l'accord de 1985 sera modifié. Tout d'abord, il y a l'article 220.1 qui est proposé. On voit que les paiements en vertu de l'accord sont calculés, dans le cadre du nouveau programme, en utilisant les montants avant l'imposition du plafond.

On se pose toujours la question suivante en ce qui a trait aux accords : les paiements en vertu de l'accord doivent-ils être calculés en utilisant les montants établis avant ou après l'imposition du plafond? C'est là la question.

Le montant des paiements après l'imposition du plafond est en partie la façon dont le programme de péréquation fonctionne. Les accords visent à compenser les pertes de revenus extracôtiers grâce à la péréquation. L'utilisation des chiffres avant l'imposition du plafond crée un problème A vrai dire cela entraîne des conséquences monétaires. Il ne s'agit pas simplement de mots. Ce calcul a une incidence monétaire.

Les dispositions de l'article 80 du projet de loi visent à modifier l'accord atlantique de 1985. Cela s'applique à Terre- Neuve-et-Labrador.

Le président : Je n'aime pas vous interrompre, mais le temps passe et nous avons beaucoup de sénateurs. Le sénateur Rompkey vous a posé une question complexe, mais pouvez-vous conclure?

M. Hobson : J'allais justement tenter de le faire.

Je demanderais aux sénateurs de se reporter à l'article 83 qui parle de la Loi sur les paiements de péréquation compensatoires supplémentaires à la Nouvelle-Écosse et à Terre-Neuve-et-Labrador. C'est la loi de 2005. Encore une fois, on utilise les montants établis avant l'imposition d'un plafond pour calculer les montants auxquels ces provinces ont droit en vertu de l'accord et on a introduit un nouveau seuil arbitraire pour exclure une province des montants auxquels elle aurait droit en vertu de l'accord.

L'article 84 aborde la question du point de vue de la Nouvelle-Écosse alors que l'article 83 aborde la question du point de vue de Terre-Neuve-et-Labrador. Ce sont des changements corrélatifs qui ont été apportés au libellé.

Le président : Les numéros ont peut-être changé par rapport à ceux que nous avons ici. Vous utilisez les numéros de la Chambre des communes et vous nous demandez de nous reporter à des numéros qui ne correspondent pas au projet de loi que nous avons sous les yeux. Il y a un décalage d'un ou deux numéros, pour aider les honorables sénateurs.

Le sénateur Rompkey : Sénateur Rompkey, je suis désolé, mais la question que vous avez posée a pris une bonne partie du temps des honorables sénateurs.

Le sénateur Rompkey : Je le sais, mais si nous pouvions simplifier les réponses, le budget modifie effectivement l'accord.

M. Hodson : C'est exact.

Le sénateur Rompkey : Ces articles du projet de loi portant exécution de certaines dispositions du budget modifient financièrement les deux accords.

Le président : Sénateur Rompkey, je mettrai votre nom sur la liste pour le deuxième tour de table. Le sénateur Angus qui est le parrain du projet de loi au Sénat, a la parole.

Le sénateur Angus : Merci, monsieur le président. Bienvenue, messieurs, à tous les trois. C'est bien que vous participiez à ce débat.

Si j'ai bien compris, monsieur Hobson et monsieur Locke, vous êtes professeurs. Vous travaillez ensemble au Conseil économique des provinces de l'Atlantique. Ce mémoire que vous avez présenté ce soir contient en annexe un document que vous avez publié plus tôt au mois d'avril, n'est-ce pas?

M. Locke : Non, c'était il y a une semaine.

Le sénateur Angus : Je ne m'étais pas vraiment penché sur la question jusqu'à ce que le projet de loi C-52 arrive au Sénat. Je trouve toute la question de la péréquation et de son incidence sur la mosaïque canadienne assez fascinante et de toute évidence fondamentale au fonctionnement de notre fédération, alors j'espère que vous pourrez m'aider.

Monsieur Locke, le 4 avril vous avez présenté un exposé sur l'incidence du budget sur la péréquation et les paiements en vertu des accords à Terre Neuve et Labrador, et vous avez projeté que d'ici les 13 prochaines années Terre-Neuve-et-Labrador recevrait 5,6 milliards de dollars de plus à la suite du budget. Vous souvenez-vous avoir fait cela?

M. Locke : C'est exact, sénateur. Les chiffres ont été revus plus tard à la suite d'entretiens avec le ministère des Finances.

Le sénateur Angus : C'est ce que je comprends. Il y a eu des entretiens avec des hauts fonctionnaires du ministère des Finances. J'ai ici une lettre datée du 13 avril dans laquelle vous révisez publiquement vos chiffres et projetez que Terre- Neuve-et-Labrador n'aurait rien à gagner en adoptant le nouveau régime de péréquation.

Vos projections précédentes ont eu un impact important sur ce débat, comme vous le savez, je crois. Je crois comprendre que ce débat a attiré l'attention et que ce n'était pas tout à fait positif pour le gouvernement conservateur. Vous avez tenté de vous retirer du débat à ce moment-là en publiant un communiqué le 13 avril dans lequel vous déclariez :

Même si je continuerai à traiter cette question de façon professionnelle et non politique, j'ai l'intention, après avoir expliqué le contenu de ce communiqué de presse aux intéressés, de ne plus dire quoi que ce soit d'autre sur cette question en particulier. Je ne ferai pas non plus d'autres analyses de cette question spécifique. Je laisserai les représentants fédéraux et provinciaux informer la population.

Apparemment, quelque chose a changé pour vous, et vous et M. Hobson êtes ici ce soir pour tenter encore une fois d'évaluer l'impact du nouveau programme de péréquation. Je vous demande pourquoi vous avez jugé nécessaire de participer à nouveau au débat et pourquoi vous vous sentez à l'aise de donner des chiffres extrêmement hypothétiques — je suppose qu'il est hypothétique de tenter de projeter ces chiffres pour une décennie — en disant que c'est la preuve conclusive d'une évaluation en particulier.

M. Locke : Vous avez soulevé plusieurs questions et j'aimerais répondre à chacune d'entre elles.

Comme vous l'avez dit, nous avons effectivement fourni de l'information le 4 avril, à la suite de nos entretiens avec les représentants du ministère fédéral des Finances à ce moment-là. Tout cela tourne autour d'interprétations particulières et de politiques gouvernementales en ce qui a trait aux éléments qui déclenchent l'Accord atlantique. Initialement, nous donnions de l'information au sujet d'une interprétation qui était conforme à celle du gouvernement provincial. Lorsque nous avons donné cette information publiquement, à un moment donné nous avons reçu un certain nombre d'appels téléphoniques et de courriels. Je crois qu'il y a environ 40 courriels que j'ai échangés avec les hauts fonctionnaires du ministère des Finances. Après avoir évalué et assimilé toute l'information, il est apparu clairement que le mécanisme déclencheur avait été modifié par suite de la politique gouvernementale. Par conséquent, cela en fait empêchait Terre-Neuve d'être admissible à l'Accord atlantique. La raison pour laquelle on avait un impact de cinq ou six milliards de dollars auparavant était dû au fait que l'accord fonctionnait selon le nouveau régime, ce qui n'était plus le cas vu les nouvelles hypothèses.

Pour ce qui est de ne plus vouloir participer à ce débat, ça été une période assez stressante. J'ai publié ce communiqué à deux heures du matin. Je me sentais assez seul à ce moment-là. Je travaille dans mon sous-sol, seul. Je n'ai pas une équipe comme les ministères fédéral ou provincial des Finances. J'avais espéré que les ministères fédéral et provincial publient leurs propres chiffres. Malheureusement, personne ne l'a fait. Le débat n'allait pas disparaître. En fait, il devenait de plus en plus brûlant. En tant que conseillers principaux en politique auprès du Conseil économique des provinces atlantiques, nous avions une responsabilité envers le conseil et on nous a demandé d'examiner l'impact pour chacune des provinces.

Le temps guérit bien des choses. Avec le temps, j'ai pensé qu'étant donné que personne d'autre ne le ferait et que nous pouvions le faire, nous allions procéder à une simulation. Pour Terre-Neuve et la Nouvelle-Écosse, il n'est pas possible de faire un choix sans procéder à une simulation. Nous n'avons jamais présenté ces chiffres comme étant les seuls possibles ou comme étant des chiffres précis. Nous avons dit que c'était un exercice de simulation qui se fondait sur des suppositions raisonnables. Si d'autres provinces ou d'autres groupes choisissent un autre scénario, alors nous nous en réjouirions.

En fait, comme vous le savez, lorsque le premier ministre de la Nouvelle-Écosse était ici hier pour parler des chiffres, il a publié ses propres chiffres. Ces chiffres se fondent sur un scénario différent. Bien que les chiffres spécifiques soient différents — et nous nous attendons à ce qu'ils le soient — la conclusion fondamentale à laquelle les chiffres de la Nouvelle-Écosse nous permettent d'arriver n'est pas différente de celle à laquelle nous sommes arrivés. Nous n'avons jamais dit que nos chiffres étaient les seuls possibles, nous les avons présentés pour encourager et faciliter le débat d'une façon plus ciblée.

Nous avons décidé d'y revenir parce que nous pensions que nous pouvions apporter une contribution positive, significative et non partisane. C'est toujours ce que nous tentons de faire. Dans les 50 ans d'expérience que nous avons entre nous deux, nous avons appris que jouer le jeu de la politique ne mène nulle part; ce n'est pas une situation gagnante. Cependant, nous sommes fermement convaincus que grâce à nos compétences et à notre capacité de comprendre le secteur pétrolier et gazier extracôtier à Terre-Neuve-et-Labrador et en Nouvelle-Écosse, nous pourrions contribuer au débat de façon positive. Je laisse aux autres le soin de déterminer si notre contribution est positive. Cependant, nous croyons que si les gens avaient la possibilité d'examiner nos chiffres ils pourraient alors dire : « Nous ne sommes pas d'accord avec ce scénario, nous allons donc suivre un autre scénario. »

Nous n'avons jamais présenté ces chiffres comme étant des prévisions. Malheureusement, étant donné l'information contenue dans le budget, les deux provinces devraient avoir un genre de simulation ou de prévision des revenus pour pouvoir prendre la décision appropriée.

Par ailleurs, nous étions intéressés à savoir si le Nouveau-Brunswick et l'Île-du-Prince-Édouard, par exemple, étaient touchés de façon positive ou négative du fait que ces provinces n'avaient pas le même choix que la Nouvelle- Écosse et Terre-Neuve.

Le sénateur Angus : Merci. Cela a été utile.

Je suppose que le Conseil économique des provinces atlantiques peut être considéré comme un groupe de réflexion? Vous ne défendez pas les intérêts d'un groupe en particulier; vous n'êtes pas à la solde de qui que ce soit; vous ne représentez pas de membres, n'est-ce pas?

Je sais que vous êtes des universitaires très respectés et bien connus.

M. Locke : Nous faisons ce travail bénévolement. Nous vous avons remis nos CV, de sorte que vous saurez pour qui nous avons travaillé par le passé. Nous avons fait du travail pour le gouvernement fédéral à maintes reprises, pour le gouvernement de Terre-Neuve, pour la plupart des gouvernements provinciaux et territoriaux, pour l'industrie et pour bien d'autres organismes. C'est quelque chose que nous croyons devoir faire car nous sommes membres de la communauté universitaire. Nous faisons cela pour fournir dans la mesure du possible une évaluation objective, indépendante. Nous laisserons les autres décider s'il faut peaufiner ou s'il est nécessaire d'avoir des solutions de rechange. Nous faisons cela pour faciliter, améliorer et contribuer à un meilleur débat sur la politique gouvernementale concernant une question qui est importante pour le Canada et la région.

Le sénateur Angus : Je crois que vous savez que le ministre des Finances et des hauts fonctionnaires de Finances Canada, avec qui vous communiquez régulièrement, ne sont pas d'accord avec vous.

M. Hobson : Ils m'ont dit qu'ils considèrent que faire des prévisions est une démarche sans fondement, et je ne serais pas en désaccord avec cela.

Nous avons tout simplement simulé les propositions dans le budget en utilisant des données. Nous ne doutons pas un instant que Finances Canada l'ait fait également, ou que la Nouvelle-Écosse l'ait fait également. En fait, ils vous ont présenté certains de leurs chiffres hier.

Soyons très clairs : personne n'a dit que nos chiffres étaient erronés. Finances Canada ne l'a pas dit et la Nouvelle- Écosse non plus. Les chiffres varient, mais nous devons être très clairs : personne n'a dit que nos chiffres étaient erronés.

Le sénateur Angus : Vos chiffres révisés.

Le sénateur Mitchell : Pourquoi ont-ils été révisés?

Le sénateur Angus : Parce qu'ils étaient erronés.

Le président : À l'ordre, s'il vous plaît.

M. Locke : Puis-je répondre?

Le président : Monsieur Locke, vous avez la parole pour répondre à la question qu'a posée le sénateur Angus. Vous pouvez répondre à toute observation qu'il a faite également.

M. Locke : Nous avons fait part de nos chiffres au ministère des Finances le 4 et le 13 avril. Finances Canada savait que nous allions publier une nouvelle étude sur le Canada atlantique. Nous avons montré nos chiffres révisés — et non pas corrigés — en nous fondant sur de nouvelles hypothèses et une meilleure compréhension de ce qui a été fait en matière de politique gouvernementale concernant le déclencheur de l'accord. C'est ce qui a motivé tout cela; c'est pour cette raison que les chiffres devaient être révisés.

Nous nous sommes rendu compte qu'un déclencheur arbitraire avait été mis en place qui ne venait pas d'O'Brien. Ce n'était pas ce à quoi on songerait normalement, et ce n'était même pas un déclencheur fondé sur la façon dont les paiements en vertu de l'accord étaient calculés dans le budget ou dans la loi sur la mise en oeuvre du budget. Une fois que nous nous sommes rendu compte de cela, nous nous sommes sentis obligés de réviser les chiffres.

Cela dit, nous avons fait part de nos chiffres aux hauts fonctionnaires de Finances Canada lors d'appels conférences, et ils nous ont dit que même s'ils n'avaient pas fait leur calcul d'après ce scénario spécifique, on comprenait clairement quels étaient les problèmes à ce moment-là.

Le sénateur Angus : En ce qui concerne cet échange, pourrait-on dire que vous n'étiez pas en désaccord avec le ministre des Finances du Nouveau-Brunswick qui a rejeté votre étude en disant que ce n'était qu'un scénario, que si on changeait quelques statistiques dans cette formule on obtiendrait un autre chiffre? Je pense que c'est ce que vous dites.

M. Locke : Pour être clair, nous sommes d'accord pour dire que si l'on change le scénario, on arrive à un chiffre différent. Il n'y a pas de scénarios crédibles, raisonnables, qui puissent être utilisés et qui pourraient changer l'orientation fondamentale des résultats présentés dans le document du Conseil.

Nous n'avons jamais laissé entendre que c'était là les chiffres. Alors qu'on obtiendra des résultats différents — ou des chiffres différents, pour reprendre vos mots — la conclusion fondamentale, c'est-à-dire que pour les deux premières années la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick et l'Île-du-Prince-Édouard sont avantagés par le nouveau système et qu'après cette période, que ce soit deux ou trois ans, ils seront avantagés par le régime en place, risque peu de changer à moins qu'il y ait des scénarios très particuliers.

Le sénateur Angus : Je pense que nous sommes tous d'accord pour dire qu'il s'agit d'un domaine extrêmement complexe. Même le premier ministre Williams et le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador ont refusé de rendre publiques leurs projections en raison des hypothèses et des variables qui changent. Pour expliquer leurs décisions, leur ministre des Finances, Tom Marshall a dit : « Il y a toute une série de chiffres et toute une série d'hypothèses qu'il faudrait faire pour effectuer ces calculs. Si nous prenons ces hypothèses [...] nous allons nous lancer dans un débat sur les particularités de nos hypothèses. » N'est-ce pas là une observation exagérée? Êtes-vous d'accord avec cela?

M. Locke : Les gens peuvent utiliser différents scénarios avec différentes hypothèses et obtenir des chiffres différents. L'objectif des chiffres ce n'est pas de dire que ces chiffres sont les seuls possibles et qu'il faut accepter notre scénario plutôt qu'un autre. Ces chiffres sont là pour aider à cibler le débat et à comprendre les problèmes que l'on aurait si, par exemple, on avait un chiffre arbitraire fondé sur la politique gouvernementale qui exclurait Terre-Neuve de l'accord. Cela vous permet de comprendre que si certaines choses se produisent, d'autres pourraient se produire sur le plan de l'orientation.

Ces chiffres sont là pour donner un ordre de grandeur et nous ne disons pas que ce sont les seuls chiffres possibles. Nous encourageons Finances Canada et chacune des provinces à publier leurs chiffres, et nous serions heureux d'y avoir accès.

Le sénateur Angus : Je tiens à remercier M. Binns, qui est un vieil ami.

Je n'ai pas profité de l'occasion pour vous poser des questions parce que vous avez été si éloquent dans vos remarques liminaires, et je vous en remercie.

Le sénateur Ringuette : Merci d'être ici ce soir.

Je crois que tous les membres de notre comité seraient d'accord pour dire que le ministère des Finances n'a pas fourni de chiffres. Les hauts fonctionnaires du ministère ont comparu devant notre comité la semaine dernière. Nous sommes le Comité sénatorial des finances nationales qui examine le budget, et pourtant ils n'ont pas pu nous donner de chiffres sur la péréquation.

L'autre question importante est celle du Transfert canadien en matière de programmes sociaux et le financement de l'enseignement postsecondaire pour lesquels il n'y a eu aucune analyse du coût par province. Il est clair que c'était là une décision purement politique. Ils ont indiqué à trois reprises au cours de la courte période que nous avons eue pour poser des questions aux témoins qu'il n'était pas nécessaire de mesurer la capacité fiscale.

Non seulement ce budget ne respecte pas l'accord légal avec Terre-Neuve-et-Labrador et la Nouvelle-Écosse, mais il ne respecte pas non plus la Constitution du Canada au paragraphe 36(1) pour les accords et au paragraphe 36(2) pour les transferts aux provinces et en ce qui a trait à la capacité fiscale d'offrir des services égaux aux Canadiens peu importe où ils vivent, que ce soit à l'Île-du-Prince-Édouard, au Nouveau-Brunswick ou en Saskatchewan. La Saskatchewan a fait plusieurs exposés devant le comité au cours de notre étude sur les équilibres budgétaires verticaux et horizontaux. La Saskatchewan a présenté un exposé convaincant sur l'impact par habitant pour les petites provinces comme l'Île-du-Prince-Édouard, le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse. Il y a certainement un manque important de coopération de la part du ministère des Finances pour s'assurer que les parlementaires, qui sont responsables devant les contribuables, et tous les Canadiens, connaissent les chiffres. Ils ne veulent pas que nous connaissions les chiffres; et cela est un fait.

Je me rends compte que l'étude qui a été préparée pour le Conseil économique des provinces de l'Atlantique ne portait que sur la péréquation pour les provinces atlantiques. Je trouve étonnant que, lorsque l'on ne tient compte que des paiements de péréquation, l'Île-du-Prince-Édouard perdra 196 millions de dollars et le Nouveau-Brunswick perdra 1,1 million de dollars en vertu du nouveau régime qui est proposé par rapport à l'ancien régime.

Est-il possible pour vous de faire le calcul pour le Québec? Est-il possible de faire le calcul pour d'autres provinces? La Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick et Terre-Neuve-et-Labrador sont d'accord avec vos chiffres de sorte que votre scénario semble être bien fondé.

M. Hobson : Eh bien, madame le sénateur, pour simuler les résultats pour les quatre provinces atlantiques, étant donné la nature du programme de péréquation, il faut simuler le résultat pour les dix provinces en vertu du régime actuel et du nouveau programme. Évidemment, nous avons les résultats pour les autres provinces.

Étant donné que nous parlons surtout de notre document à l'intention du Conseil, je répondrai tout simplement à votre question en disant que la même situation prévaut pour le Québec. Au cours des trois premières années, le Québec est avantagé par le nouveau programme. Par la suite, il aurait été préférable qu'il ait l'option du régime actuel. C'est une tendance commune dans toutes les provinces et c'est pour cette raison que nous l'avons fait pour le Nouveau- Brunswick. Ce n'est pas une option pour le Nouveau-Brunswick, mais si cela avait été une option, qu'est-ce que cette province aurait fait? La Nouvelle-Écosse a réellement un choix. En partie, dans notre document, nous disons que la Nouvelle-Écosse choisira sans doute le régime actuel; ensuite, nous aurons deux programmes de péréquation. Pensez- vous que dans deux ou trois ans quelqu'un demandera pourquoi la Nouvelle-Écosse a un programme plus généreux que les autres provinces?

Le sénateur Ringuette : Les autres provinces poursuivront le gouvernement fédéral.

M. Hobson : C'est à cause du taux de croissance annuel de 3,5 p. 100 qui est prévu dans le régime actuel. Le premier ministre Binns a raison lorsqu'il dit que lorsque le régime actuel a été établi, le taux de croissance de 3,5 p. 100 devait prendre fin en 2010-2011. En vertu du budget à l'étude, du moins pour la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve-et- Labrador, le chapitre sur Terre-Neuve-et-Labrador à la page 72 du document indique pour chaque exercice subséquent, que la péréquation augmentera de 3,5 p. 100 par an. J'ai entendu le ministre des Finances dire catégoriquement que ce taux de croissance annuel sera maintenu jusqu'en 2019-2020. Naturellement, le régime actuel dominerait, malgré le fait que personne ne s'attendait à ce qu'il soit toujours en vigueur. Dans le budget à l'étude, c'est réellement une option et nos chiffres révèlent, et je pense que les chiffres de la Nouvelle-Écosse révèlent également, que c'est là un choix très réel pour eux et que c'est vraisemblablement le choix qu'ils feront, à moins de pouvoir mettre en place un autre accord.

Le sénateur Ringuette : Le Nouveau-Brunswick est d'accord avec vos chiffres. J'ai une demande assez importante. Est-il possible pour vous de fournir au comité les chiffres que vous avez utilisés pour faire une simulation pour les autres provinces et territoires? Vous avez fait une simulation pour le Québec et vous avez les chiffres pour les quatre provinces atlantiques.

M. Locke : La réponse est certainement oui, mais c'est une question de temps et cela dépend dans combien de temps vous en aurez besoin.

Le président : S'il faut signer un contrat avec vous pour que vous produisiez ces documents, alors il faudrait en parler à un autre moment, mais nous en parlerons.

Le sénateur Ringuette : Nous avons parlé de la péréquation, alors j'aimerais maintenant parler du système de transfert par habitant pour financer l'enseignement postsecondaire et les services sociaux, et aussi pour les soins de santé et le programme d'infrastructure.

Plus particulièrement en ce qui concerne les transferts pour le financement des programmes sociaux et de l'enseignement postsecondaire, l'ancien système utilisait des points d'impôt. Il y avait une péréquation associée pour compenser l'écart en ce qui a trait aux points d'impôt pour les provinces et ensuite il y avait un supplément. Cela n'existe plus. Le projet de loi C-52 propose uniquement des transferts en espèces. Oublions la péréquation et la capacité fiscale. Le paragraphe 36(2) de la Constitution a disparu de ce budget puisqu'on ne tient plus compte de la capacité fiscale. Avez-vous calculé des chiffres pour le transfert des programmes sociaux?

M. Hobson : Non, sénateur, cela ne faisait pas partie de l'étude du CEPA, mais toutefois nous avons réfléchi à cette question. Je vais vous répondre brièvement. Il faut remonter à 1977. J'ai souvent entendu le sénateur Murray parler avec éloquence du financement des programmes établis et de ses antécédents mais je me permets de vous rappeler qu'en vertu des accords de financement des programmes établis, il existait des programmes à coûts partagés, prévoyant des paiements en espèces aux provinces, paiements assortis de transferts de points fiscaux selon le programme, selon le moment. En 1977, tous les soins de santé et l'éducation postsecondaire ont été intégrés. On souhaitait alors que la moitié de la somme du transfert soit versée à la province en liquide et l'autre moitié devait correspondre à la valeur équivalente aux points fiscaux transférés auparavant auxquels s'ajoutaient les points fiscaux transférés désormais. Le but était une meilleure reddition de comptes de la part de la province en matière de financement de ces programmes.

La logique qui sous-tend le changement de cadre, à savoir délaisser le paiement en espèces calculé d'après la valeur résiduelle, repose sur le fait que les provinces obtiendraient l'équivalent, par habitant, de la valeur des points fiscaux et des transferts en espèces.

Cela implique un redéploiement massif des ressources au titre de ce programme, à l'avantage surtout de l'Ontario et de l'Alberta et cela produit un glissement dans l'ensemble du régime de financement de l'enseignement postsecondaire en particulier. Il y a bien entendu les questions qui entourent les vestiges du Régime d'assurance publique du Canada qui a pris fin en 1995. Nous tenons à signaler qu'il s'agit ici d'un redéploiement massif de ressources en faveur de l'Ontario et de l'Alberta.

Le sénateur Ringuette : Quelle pourrait être l'incidence d'un tel changement dans le cas d'un programme sur 30 ans pour aider les provinces à fournir des services à des niveaux comparables? Quand je me reporte au budget, je constate qu'au titre des transferts canadiens en matière de programmes sociaux et d'enseignement postsecondaire, l'Île-du- Prince-Édouard ne recevra que 7 $ de plus par habitant. L'Ontario, quant à elle, en recevra 40 $ de plus par habitant. L'Alberta recevra 102 $ de plus par habitant.

Prenons l'année prochaine. L'Alberta recevra 333 millions de dollars supplémentaires, et nous sommes loin des 7 $ par habitant. L'Ontario recevra 445 millions de dollars supplémentaires et les huit autres provinces devront se partager 14 millions de dollars. Répétez-moi encore une fois que nous devons appuyer ce budget.

Le président : Vous n'avez pas à répondre. C'était une remarque.

Le sénateur Ringuette : J'ai demandé à nos témoins s'ils avaient les chiffres des transferts.

M. Binns : Je voudrais répondre à cette question. Le sénateur Ringuette a fait plusieurs allusions au programme de 30 ans qui a été abandonné comme si on venait d'annoncer cela dans le dernier budget.

Le glas a sonné pour ce programme quand on a commencé à sabrer dedans dès 1994-1995. Pendant bien des années, le programme représentait 1,1 p. 100 du PIB et est demeuré stationnaire très longtemps. Après 1994-1995, les sommes au titre de la péréquation ont commencé à chuter pour ne représenter que 0,8 p. 100 du PIB, et c'est ce qui a vidé le programme de sa substance.

Cela ne s'est pas produit soudainement cette année. Les sommes qu'il représente cette année au titre de la péréquation sont le résultat d'une augmentation progressive depuis quelques années. Nous ne sommes pas revenus à 1,1 p. 100. J'appuie ce que le sénateur dit à cet égard. Il faudrait pouvoir atteindre cette limite car pendant des années elle s'est révélée satisfaisante.

Prétendre que l'obligation constitutionnelle n'est soudainement pas respectée alors qu'elle ne l'a pas été depuis 30 ans, n'est pas exact selon moi.

Le sénateur Nancy Ruth : Monsieur Binns, j'imagine que vous avez étudié la péréquation tout aussi longtemps que ces professeurs, mais sous un angle différent, en tant que premier ministre qui devait mettre en œuvre les services que la péréquation permettait d'offrir. À certains égards, c'est le concret qui m'intéresse, la façon de procéder et l'utilisation de l'argent.

Je pense également que vous avez été témoin de bien des discordes de la part des provinces de l'Atlantique et d'autres discordes lors de diverses réunions de premiers ministres. Dites-moi comment le désaccord actuel et la bisbille entourant la péréquation rejaillissent sur la région de l'Atlantique, de votre point de vue en tant qu'habitant de l'Île-du- Prince-Édouard.

La soirée est avancée et depuis quelques jours, nous avons constaté une grande discorde. Vous avez dit que la formule de péréquation était positive parce qu'il s'agissait d'une formule, et qu'elle était claire de votre point de vue. Pouvez-vous nous rappeler quels en sont les éléments qui sont positifs et pourquoi quelque chose clochait auparavant.

M. Binns : Je reviens au principe que la situation idéale serait une norme s'appliquant à toutes les provinces et faisant intervenir tous les revenus provenant de l'exploitation des ressources.

Je pense que le cadre fixe n'a jamais été considéré comme une solution à long terme. Ce n'était considéré que comme une solution à court terme. Le gouvernement fédéral a accepté d'injecter 10 milliards de dollars en 2004-2005 et 10,9 milliards de dollars en 2005-2006. Puisqu'il n'y a pas eu d'entente quant à la formule pour les sommes à être versées à l'avenir ou encore le partage des coûts et que le débat faisait rage, le Conseil de la fédération a souhaité obtenir une opinion là-dessus et il a donc constitué un groupe d'experts pour étudier la question. Bien entendu, le gouvernement fédéral a constitué son propre groupe d'experts avec le même objectif.

Je dis tout simplement qu'étant donné que les rapports n'ont pas été présentés dans les plus brefs délais — qu'il a sans doute fallu y consacrer le temps qui s'imposait mais je ne vais pas ergoter là-dessus — on s'est entendu sur une augmentation à hauteur de 10,9 milliards de dollars entre 2005-2006 et 2006-2007. Pour cela, il fallait un taux de croissance suffisant. Par conséquent, les premiers ministres ont convenu que, du moins en attendant que la nouvelle formule soit adoptée, un taux de croissance de 3,5 p. 100 serait considéré comme étant suffisant. C'est l'argument qui a emporté la décision.

Quand tout le monde s'est entendu sur un cadre fixe pour la péréquation, cela se bornait à son application pour une très courte période en attendant qu'on adopte une nouvelle formule à long terme. Il est impensable qu'un cadre fixe ait des conséquences jusqu'en 2014, voire 2020. À mon avis, les premiers ministres n'ont jamais pensé qu'il en serait ainsi.

M. Hobson : Je suis tout à fait d'accord avec le premier ministre Binns. Personne ne s'attendait à ce que le cadre fixe perdure. En fait il s'agissait d'une mesure provisoire.

Néanmoins, je réitère que le cadre fixe est offert d'après les dispositions du budget comme en témoigne l'article qui figure au bas de la page 72 du projet de loi. Les modifications à la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces figurent au nouveau paragraphe 3(7) proposé à la page 72 du projet de loi. C'est un vrai choix qui est offert à la Nouvelle-Écosse et à Terre-Neuve-et-Labrador.

Pour la Nouvelle-Écosse, le choix est véritable. La Nouvelle-Écosse peut choisir le cadre fixe jusqu'en 2020. Il est également clair, page 72, qu'une croissance annuelle de 3,5 p. 100 s'appliquera à la péréquation, d'après cet arrangement. Le ministre des Finances l'a affirmé sans équivoque dans les déclarations qu'il a faites ces dernières semaines.

Le sénateur Nancy Ruth : Je me tourne de nouveau vers M. Binns. Dans les tableaux présentés par MM. Locke et Hobson, l'Île-du-Prince-Édouard perdrait 196 millions de dollars d'ici une douzaine d'années.

Monsieur Binns, vous-même et le premier ministre Ghiz, appuyez le programme de péréquation. Pouvez-vous nous dire ce que vous pensez de ce chiffre? Est-il fiable ou crédible? Pourquoi vous-même et le premier ministre Ghiz donnez-vous votre aval au système actuel, si c'est effectivement le cas?

M. Binns : Comme je l'ai dit plus tôt, ce chiffre serait fiable si le cadre fixe était maintenu jusqu'en 2020. À vrai dire, si on ajoute 3,5 p. 100 par année à l'assiette, ce chiffre de 196 millions de dollars est juste.

Je prétends qu'on ne tient pas compte des autres aspects qui figurent dans le budget. C'est pourquoi, à mon avis, la comparaison entre les deux chiffres ne tient pas à long terme.

Le sénateur Nancy Ruth : Que dites-vous de ces autres chiffres — le transfert en matière de santé, l'enseignement postsecondaire, et cetera?

M. Binns : Dans ce budget, il y a des mesures concrètes, par exemple, s'agissant de l'Île-du-Prince-Édouard, des sommes aux titres du temps d'attente, de l'écoFiducie, de l'infrastructure, qui sont tous des transferts fédéraux énormément bonifiés — et dans notre cas, une augmentation du financement de base qui proportionnellement représente des sommes supplémentaires pour nous et reconnaît le fait que nous sommes une petite administration. Il faut tenir compte de cela dans l'ensemble des calculs.

Le sénateur Murray : Monsieur Locke et monsieur Hobson, vous avez diffusé un document plus volumineux sur ces projections. Vous expliquez les hypothèses sur lesquelles se fondent les projections. Pour contester vos chiffres, il faut contester les hypothèses. Pour ma part, je ne compte pas le faire, mais d'autres le feront sans doute.

J'ai une question à vous poser et il ne s'agit pas des accords conclus avec la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve-et- Labrador, mais il s'agit du Nouveau-Brunswick et de l'Île-du-Prince-Édouard. Pouvez-vous m'expliquer pourquoi ces deux provinces semblent être lésées quand on compare le nouveau programme et le cadre fixe? Est-ce parce qu'on tenait compte de la totalité des recettes tirées des ressources, dont la norme faisant intervenir cinq provinces, ou y a-t-il une autre explication?

M. Locke : Vous me demandez pourquoi elles sont lésées?

Le sénateur Murray : Vous faites une comparaison entre le nouveau programme et le cadre fixe. Pourquoi y a-t-il diminution dans leur cas? Le nouveau programme est basé sur une norme faisant intervenir dix provinces. C'est une amélioration. Je suis le premier à reconnaître qu'il y a des améliorations à la péréquation — c'est fondé sur une formule, et cetera. Pourquoi ces provinces y perdent-elles? Quel est le facteur qui intervient ici?

M. Locke : S'il y a un écart dans les résultats, c'est essentiellement dû au fait que le cadre fixe prévoit une augmentation de 3,5 p. 100 des sommes destinées à la péréquation. Par conséquent, les droits à la péréquation — pas les droits mais les fonds disponibles aux fins de la péréquation — augmentent relativement vite. Si l'assiette est réduite, l'augmentation est rapide. Avec le nouveau système, l'assiette est plus importante et l'augmentation plus lente. Tout système appelé à croître rapidement, même si l'assiette est réduite, va tôt ou tard l'emporter sur un système à croissance lente. Cela s'explique par le taux de croissance implicite des sommes consacrées à la péréquation.

Le sénateur Murray : Bien sûr, c'était la cagnotte qui allait augmenter de 3,5 p. 100. Comme M. Binns le sait, rien ne garantissait qu'une province donnée allait recevoir 3,5 p. 100 de plus. Cela s'applique à l'ensemble.

M. Locke : C'est exact et c'est le cas.

Le sénateur Murray : Monsieur Binns, ravi de vous voir, battu mais non rompu, après les élections récentes à l'Île- du-Prince-Édouard. Tous ceux à qui j'en ai parlé m'ont dit que votre gouvernement qui s'était maintenu au pouvoir longtemps a été renversé parce qu'un vent de changement soufflait. Personne à ma connaissance n'a tenu de propos désobligeants sur le premier ministre Binns. Vous partez la tête haute pour cette raison et bien d'autres. Je veux vous rendre hommage ici.

Votre différend avec vos amis, à vos côtés, tient au fait qu'ils comparent le nouveau programme et le cadre fixe. Je veux bien mais il faut bien un point de comparaison. On aurait pu choisir comme point de comparaison l'ancienne norme faisant intervenir cinq provinces. Je ne sais pas quel aurait été le résultat. Ils peuvent peut-être nous dire si les chiffres auraient été très différents. Qui sait?

On a dit que la cagnotte augmenterait de 3,5 p. 100, mais si la Nouvelle-Écosse est la seule province à retenir le cadre fixe, on doit présumer que la cagnotte est destinée à elle seule et qu'elle augmentera de 3,5 p. 100. N'est-ce pas?

M. Locke : Non. Le calcul serait fait comme si les 10 provinces étaient sous le régime du cadre fixe.

Le sénateur Murray : La Nouvelle-Écosse est-elle au courant?

M. Hobson : Oui, le libellé est très clair à la page 71 du projet de loi.

Le sénateur Murray : Permettez-moi de m'y reporter. Je pense que vous affirmez, en attribuant cela à votre successeur le premier ministre Ghiz, que vous subissez une baisse au titre du Transfert en matière de programmes sociaux. Vous en êtes conscient. Vous toucherez 4 millions de dollars de moins cette année et l'année prochaine, et 5 millions de dollars l'année suivante. Entre cette année et les deux années suivantes, votre Transfert en matière de programmes sociaux aura diminué de 13 millions de dollars.

Si les projections fournies sont justes, vous subirez une diminution de péréquation par rapport au cadre fixe. Toutefois, d'après votre témoignage et celui de votre successeur, vous escomptez 35 millions de dollars pour l'infrastructure cette année et 38 millions de dollars l'année suivante. Vous comptez obtenir 5 millions de dollars au titre de l'écoFiducie Canada cette année et encore 5 millions de dollars l'année prochaine. Ces gains annihilent ce que vous perdez par ailleurs. C'est bien ce que vous-même et M. Ghiz dites, n'est-ce pas?

M. Binns : Je ne peux pas parler au nom du nouveau premier ministre et je n'ai pas l'intention de le faire. D'après ce que j'ai pu constater, une province considère l'ensemble des transferts fédéraux d'une année à l'autre. Même si je n'étais pas là en 1994-1995, nous avons été tous contrariés quand le gouvernement fédéral était considérablement déficitaire et que les provinces en subissaient le contrecoup. Toutefois, nous avons sans doute compris les mesures qui s'imposaient à l'époque, jusqu'à un certain point.

La bagarre a commencé à mon avis après 1994-1995. Ce n'est pas fini parce que bien des gens essaient de récupérer ce qu'ils estiment avoir perdu en transferts fédéraux à cette époque. Comme je l'ai dit, il y a encore moyen d'y parvenir. Nous n'avons pas trouvé la solution définitive, pour ainsi dire. En tant que premier ministre, j'ai toujours essayé de voir quels transferts globaux fédéraux n'étaient pas assortis à un programme donné. Ainsi, il existe une certaine souplesse quant à l'utilisation de ces sommes — nous pouvons bonifier nos programmes de soins de santé et d'éducation, et cetera, pour répondre à nos besoins.

Nous avons pu constater ces dernières années que nous avons commencé à récupérer certaines sommes. Le transfert en matière de santé et de programmes sociaux a bien augmenté ces dernières années. Les paiements de péréquation ont de nouveau atteint le niveau de 2001-2002. Maintenant, ils l'ont dépassé mais sans toutefois avoir rattrapé l'inflation que nous avons subie entretemps.

Selon moi, ce budget continue de redresser le déséquilibre fiscal. Tout n'est pas réglé sur ce plan, mais c'est, jusqu'à un certain point, un compromis. Certains compromis ont été réalisés en dehors de la péréquation au sens propre. Ce qu'a dit le sénateur Murray est exact.

Je suis le premier à reconnaître que le financement de base que nous recevons, par exemple pour les temps d'attente, aide énormément l'Île-du-Prince-Édouard. Si l'on calcule ce que nous recevons par habitant, cela représente environ 2 millions de dollars. Avec le financement de base, nous recevons 12 millions de dollars. C'est une aide appréciable qui nous permet de faire face à certains de nos coûts en matière de soins de santé.

Je dis tout simplement qu'il faut englober tout cela dans l'ensemble des transferts fédéraux pour déterminer la véritable situation d'une province.

Le sénateur Murray : Certains d'entre nous ont des points de vue très arrêtés en ce qui concerne l'évolution de la péréquation en tant que programme clé pour aplanir les disparités fiscales. Je m'en tiendrai à cela.

Le sénateur Cowan : Monsieur Binns, vous avez été premier ministre pendant de nombreuses années. Vous avez participé à bien des conférences de premiers ministres et à quantité de discussions sur les programmes de péréquation et leur évolution au fil des ans. Êtes-vous préoccupé par le fait que, comme MM. Hobson et Locke l'ont expliqué, si la Nouvelle-Écosse et/ou Terre-Neuve choisissaient le cadre fixe, il existerait deux programmes de péréquation en vigueur simultanément au pays?

M. Binns : Pour ma part, je considère toujours que les choses sont mobiles et pas nécessairement fixées. À mes yeux, ce budget et les dispositions législatives afférentes s'inscrivent dans un processus évolutif. Les provinces concernées ont tout à fait les moyens de se défendre elles-mêmes, de faire leurs propres démarches en vue de trouver une solution d'accord avec le gouvernement fédéral. J'espère que ce sera le cas. Étant donné que ma province n'adhère pas à un accord, je souhaite tout simplement qu'au bout du compte, ces provinces reçoivent un traitement équitable qui n'ait pas de conséquence fâcheuse pour les autres.

Le sénateur Cowan : Vous êtes tout à fait à l'aise à l'idée qu'il y ait deux programmes, pendant un certain temps du moins, au sein de la même fédération? Étant donné votre expérience de plusieurs années, est-ce une chose que vous auriez pu imaginer?

M. Binns : Comme je l'ai dit, la solution idéale est autre que le compromis proposé. Toutefois, le compromis est plus avantageux que le statu quo. Idéalement, je préconise encore une norme faisant intervenir les 10 provinces, incluant toutes les recettes tirées des ressources. Le gouvernement a largement les moyens de procéder ainsi. Je pense depuis longtemps que le total disponible devrait de nouveau représenter 1,1 p. 100 du PIB du pays. Tous ne sont pas d'accord là-dessus. Parfois il faut accepter un compromis.

Des aménagements s'imposent évidemment en l'occurrence, entre la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve-et-Labrador et le gouvernement fédéral.

Le sénateur Cowan : Vous pensez que cette comparaison entre le nouveau programme et le cadre fixe n'est pas applicable à l'Île-du-Prince-Édouard parce que l'Île-du-Prince-Édouard n'a plus le loisir de choisir le cadre fixe.

Quand vous étiez au pouvoir, avez-vous fait une simulation quelconque pour connaître l'incidence du nouveau programme? Le cas échéant, vos chiffres sont-ils très différents de ceux que le rapport de MM. Locke et Hobson contient?

M. Binns : La simulation que nous avons faite portait davantage sur les recettes tirées des ressources, suivant le pourcentage qui interviendrait dans la formule, sur l'incidence que cela aurait pour nous.

Le sénateur Cowan : Y a-t-il des programmes de développement économique en vigueur entre l'Île-du-Prince- Édouard et le Canada?

M. Binns : Pas beaucoup. J'ai parlé tout à l'heure des modifications aux transferts fédéraux après 1994-1995. Non seulement le TCSPS et la péréquation ont-ils diminué de façon spectaculaire, mais il y a eu réduction des autres transferts, des programmes de développement économique.

Le sénateur Cowan : Les transferts aux titres de ces programmes étaient-ils inclus dans le calcul de la capacité fiscale de l'Île-du-Prince-Édouard?

M. Binns : Notre capacité fiscale était calculée à partir de notre propre assiette fiscale plutôt qu'à partir des transferts versés, si je ne m'abuse.

Le sénateur Cowan : On n'aurait pas cru que les transferts aux titres d'accords économiques seraient inclus dans l'assiette aux fins de calculer la capacité fiscale d'une province, n'est-ce pas?

M. Binns : Tout à fait.

Le sénateur Cowan : Je voudrais adresser une question à MM. Locke et Hobson. Si je ne m'abuse, pour la Nouvelle- Écosse et Terre-Neuve-et-Labrador, une des difficultés est le fait que les paiements en vertu de l'accord sur les ressources extracôtières sont inclus dans le calcul de la capacité fiscale de ces provinces, n'est-ce pas?

M. Hobson : C'est exact. Il en est ainsi pour le calcul de la capacité fiscale totale afin de déterminer le plafond.

Le sénateur Cowan : M. Binns a évoqué des programmes modestes à l'Île-du-Prince-Édouard et selon lui, les transferts aux titres de ces programmes n'étaient pas inclus dans le calcul de la capacité fiscale de l'Île-du-Prince- Édouard.

D'autres programmes comme le pacte de l'automobile en Ontario, la garantie de prêts et les transferts au Québec, ou encore l'aide à l'industrie aérospatiale sont-ils inclus dans le calcul de la capacité fiscale de ces provinces?

M. Hobson : Non.

Le sénateur Cowan : Que vous sachiez, y a-t-il quelque part au pays des transferts aux titres de programmes de développement économique qui sont inclus dans le calcul de la capacité fiscale des provinces bénéficiaires?

M. Hobson : Non.

Le sénateur Cochrane : Merci d'être venu. Moi aussi je tiens à féliciter M. Binns car je sais qu'il a fait du bon travail pour la province de l'Île-du-Prince-Édouard. Je connais Pat Binns depuis assez longtemps, depuis l'époque où il était député. Je tiens à le féliciter de s'être révélé un premier ministre exceptionnel pour l'Île-du-Prince-Édouard.

Ma question s'adresse à M. Locke car il est professeur à cette remarquable université qui est la mienne, l'Université Memorial dans ma province.

On n'a cessé de répéter qu'aucune province ne serait moins bien nantie à cause de ce budget. Je souhaite que la province profite de l'exploitation de ses ressources naturelles et de la prospérité qu'elle apporte car les ressources naturelles non renouvelables ont contribué au succès de la fédération canadienne.

Je demande votre aide pour mieux comprendre les discours et les manipulations médiatiques auxquels nous sommes confrontés ici. Quelle incidence ce budget a-t-il sur le bilan de Terre-Neuve-et-Labrador? Que nous révèlent les chiffres? Peut-on croire que les prétendues modifications corrélatives qui figurent dans le budget n'aggravent en rien la situation de la province?

M. Locke : Elles l'aggravent. Et de façon appréciable. Les modifications corrélatives contenues dans le projet de loi ont pour conséquence d'empêcher Terre-Neuve de se prévaloir de l'accord en vertu du nouveau système. Terre-Neuve ne pourra plus, après 2012 se prévaloir du cadre fixe car elle ne sera plus admissible aux dispositions de l'accord. C'est ce que révèlent en partie les modifications corrélatives.

Si Terre-Neuve pouvait continuer de profiter du cadre fixe sans avoir à basculer dans le nouveau système, même si après 2009, elle n'avait plus droit à des paiements de péréquation. Elle se trouvera avantagée avec les années. Il n'est pas vrai de dire que les modifications législatives corrélatives ne lui nuiront pas.

Le sénateur Cochrane : Vous avez dit plus tôt que ma province sera une province nantie d'ici quelques années. Savez- vous pendant combien de temps ma province pourra demeurer une province nantie? Bénéficierons-nous de cet attribut à long terme ou à moyen terme? Plus précisément, que nous arriverait-il si, d'ici quelques années, ces projets pétroliers ne voient pas le jour? Que nous arriverait-il?

M. Locke : Cela dépendra de l'exploitation des champs pétroliers et gaziers et d'autres enjeux. Il est tout à fait plausible de prévoir que Terre-Neuve n'aura pas accès aux paiements de péréquation en 2009 jusqu'à environ 2013. Ensuite ces provinces auront encore besoin de la péréquation à moins qu'il y ait une augmentation importante de revenus pétroliers découlant des nouveaux projets qui ne sont pas encore en chantier.

Le sénateur Cochrane : Que se passe-t-il vraiment si une province devient une province nantie mais plus tard redevient une province moins nantie? Cela pourrait nous arriver dans quelques années. Nous deviendrons une province bien nantie dans quelques années, mais deux ans plus tard, nous nous retrouverons dans la situation où nous sommes, encore une fois, une province moins nantie. Qu'est-ce qui se passe à ce moment-là?

M. Locke : Nous serions obligés de revenir au nouveau cadre en vertu des lois corrélatives. À ce moment-là, nous n'aurons pas le choix. L'accord n'existe plus, ni le cadre fixe.

Le sénateur Di Nino : Je veux m'en tenir à une seule question : le plafond. Une de nos collègues nous a expliqué qu'à son avis, ce plafond était injustifié et elle a dit que l'Ontario ainsi que l'Alberta en bénéficieraient.

Premièrement, j'aimerais parler au nom de la province de l'Ontario et surtout au nom du premier ministre de l'Ontario qui a dit qu'il voulait, au nom des Ontariens, faire comprendre clairement à tous les Canadiens que l'Ontario est un partenaire solide, un partenaire qui donne son appui, mais que nous ne resterions pas silencieux si jamais nous nous trouverions dans une situation où nous aiderions à financer des paiements de péréquation aux provinces ayant une capacité financière qui dépasse la nôtre. Je veux m'assurer que ces observations font partie du procès-verbal.

L'Ontario a ses problèmes aussi. C'est surtout son secteur industriel qui est en difficulté. Depuis deux à cinq ans, l'Ontario a perdu littéralement des centaines de milliers d'emplois.

Il faut tenir dûment compte du fait que, à l'heure actuelle, il n'y a que deux provinces qui contribuent à la péréquation. Il faut s'entendre pour dire que si jamais une province, ou plus qu'une province, devient, d'une façon ou une autre, mieux nantie, il ne faut pas qu'elle s'attende à recevoir un paiement de péréquation des provinces qui ont encore les moyens de le faire.

Pour revenir à la question du plafond, on a beaucoup discuté de cette question et j'aimerais simplement citer les observations de Janice MacKinnon, une ancienne ministre des Finances du gouvernement NPD de la Saskatchewan. Elle a qualifié le plafond « d'un principe de base », un principe commun sans lequel les provinces de l'Ouest, qui sont très prospères et qui ont beaucoup de ressources, pourraient recevoir des milliards des profits pétroliers tandis que les contribuables ontariens seraient tenus de leur verser des paiements de péréquation.

En examinant le rapport O'Brien, on voit que les auteurs ont inclus le plafond parce qu'ils estimaient qu'il créerait une certaine équité dans certaines situations, si jamais ces situations devaient se produire. J'aimerais connaître votre point de vue sur cette question et ensuite, j'aurai peut-être une courte question supplémentaire.

M. Locke : Premièrement, j'aimerais vous signaler que la péréquation est un programme financé par le gouvernement fédéral et que toutes les provinces font des versements à ce programme, pas seulement une ou deux.

Le sénateur Di Nino : Nous connaissons la réalité.

M. Locke : Vous avez fait valoir votre point de vue et je voulais simplement être clair.

Le groupe de travail O'Brien a adopté un principe par lequel toute province qui reçoit des paiements de péréquation ne devrait pas, en recevant un tel paiement, se trouver dans une meilleure situation qu'une province qui n'en reçoit pas. Voilà le principe. On pourrait en faire valoir d'autres, mais ce groupe a notamment adopté celui-là. Par conséquent, le groupe a également fait sienne une définition asymétrique de la capacité financière, qui s'applique aux fins de la péréquation et qui détermine si vous dépassez le plafond.

Cela a créé certains problèmes. La grande question n'est pas de savoir si oui ou non le plafond est exécutoire et ne devrait pas l'être. Cela a créé d'autres problèmes : chaque province qui ne le dépasse pas a une capacité financière par habitant différente si elle a des revenus par habitant différents provenant de l'exploitation des ressources. Peut-être que nous devrions nous préoccuper de cet autre principe — c'est-à-dire que chaque province devrait avoir plus ou moins la même capacité de fournir des biens et des services.

Cependant, le vrai enjeu, c'est l'accord, et l'accord n'est pas du tout différent du Pacte de l'automobile, du financement octroyé par Partenariat technologique Canada à l'industrie au Québec ou en Ontario. Inclure toutes les initiatives de développement économique serait juste, mais il est injuste d'inclure seulement une initiative en particulier pour déterminer la capacité financière. Voilà ma plus grande préoccupation. Je ne pense que je ne m'opposerais pas à l'idée, en ce qui concerne la péréquation, sans exclure les paiements versés aux termes de l'accord de la capacité financière, qu'une province ne devrait pas avoir droit à la péréquation si, en ayant de tels paiements, la province dépasse la province la plus faible qui n'en reçoit pas. Je le dis en supposant que l'accord sera éliminé de la définition de la capacité financière et que l'accord sera traité comme il a été défini dans les lois de 1985 et de 2005.

Le sénateur Di Nino : Le ministre des Finances a dit que l'accord n'est pas un avantage économique dans ce sens-là; êtes-vous d'accord?

M. Locke : Non.

Le sénateur Rompkey : Il n'a pas parlé d'un avantage économique mais plutôt il a dit qu'il ne s'agissait pas d'une entente de développement économique.

Le sénateur Di Nino : Il ne s'agissait pas de développement économique.

Le président : Je crois que M. Locke a bien compris la question.

Le sénateur Di Nino : Très bien. Je voulais juste m'en assurer. Il y avait une divergence d'opinion sur cette question.

Permettez-moi de vous poser une autre question en ce qui concerne cet aspect. Je crois que c'est le premier ministre Calvert qui a dit aujourd'hui que nous étions en train de vendre nos biens. Je suis d'accord avec lui. On vend les biens, mais le produit de ces biens revient aux provinces pour — je ne sais pas s'il faut employer le mot investir — servir à d'autres fins qui pourraient augmenter la richesse et la valeur de cette province. Il y a donc une certaine valeur permanente relative aux produits de — pour emprunter ses mots — la vente de ces biens. Seriez-vous d'accord pour dire qu'il faut continuer à bâtir la richesse d'une province?

M. Locke : Bien sûr. Cependant, si jamais une province atteint le plafond et le dépasse en raison de l'exploitation de ses ressources, alors, comme la lettre publiée dans le journal par M. Courchesne l'expliquait à la population canadienne, la structure des incitatifs change de façon draconienne. Selon la formule actuelle, on parle des revenus provenant de l'exploitation des ressources. Alors, il est dans votre intérêt de décrire sous un faux jour comment valoriser ce genre de choses. Par exemple, vous pourriez dire qu'un hôpital ou que des lignes de transmission seront construits. C'est un véritable problème auquel il faut faire face. Et ce qui est encore plus important, c'est qu'il faut comprendre que des provinces comme Terre-Neuve et la Nouvelle-Écosse ont des faiblesses de base que l'accord pourrait régler. Prenons l'exemple du service de la dette par habitant. L'aide fournie par l'accord pourrait permettre à ces provinces d'assumer leurs responsabilités pour qu'elles puissent, une fois qu'elles n'auront plus besoin de la péréquation, avoir la capacité de poursuivre leur développement de façon permanente de manière avantageuse non seulement pour elles mais pour tout le Canada.

Le sénateur Di Nino : Je crois que nous sommes tous du même avis. C'est une question de catégorie.

Le sénateur Baker : Je tiens à féliciter nos trois témoins, puisque chacun est une personne de marque dans sa profession.

Avant de poser ma question, j'aimerais revenir au commentaire du sénateur Di Nino au sujet de la péréquation et je tiens à souligner, monsieur le président, que dans le projet de loi que nous étudions, à la page qui précède la liste des paiements de péréquation qui seront versés à chaque province cette année, l'Ontario recevra 400 millions de dollars pour l'aider à mettre au point un régime fiscal unique pour les sociétés. Pourquoi est-ce important? Connaissez-vous le montant exact de péréquation que recevra Terre-Neuve-et-Labrador cette année? Il s'agit quand même d'un montant intéressant, n'est-ce pas?

De plus, le sénateur Stratton, qui est assis à côté du sénateur Di Nino, est du Manitoba. Quelle province canadienne reçoit le montant le plus élevé en paiement de péréquation par habitant, avec ce projet de loi? Le Manitoba. Pas la Nouvelle-Écosse, pas Terre-Neuve, pas le Nouveau-Brunswick, pas l'Île-du-Prince-Édouard, mais c'est plutôt le Manitoba qui reçoit le montant le plus élevé en paiement de péréquation par habitant au Canada. Pour ce qui est du montant global, c'est le Québec qui en reçoit le plus, puis le Manitoba. Par habitant, le Manitoba est une des provinces de l'Ouest qui reçoit le montant le plus élevé en paiement de péréquation par habitant. Je tenais à vous le dire.

Le sénateur Di Nino : Et je vous en remercie. Avez-vous tenu compte du montant que nous contribuons?

Le sénateur Baker : Je savais que ça vous plairait, sénateur Di Nino.

Monsieur le premier ministre Binns, vous n'êtes plus un premier ministre, mais vous avez conservé le titre de « premier ministre ». J'ai noté ce que vous avez dit dans vos remarques préliminaires. Je vous cite, « En tant que Prince- Édouardien, j'appuie ce budget. » Et ensuite vous avez dit, « En tant que Canadien, j'appuie ce budget. » Vous êtes d'abord un Prince-Édouardien. Et c'est quelque chose qui revient souvent dans vos discours : « en tant que Prince- Édouardien. » On dirait que vous êtes d'abord et avant tout un citoyen de la province.

Avez-vous un commentaire? Est-ce que c'est une façon normale de s'exprimer?

M. Binns : Je ne sais pas où vous voulez en venir, mais je serais curieux de le savoir. Sénateur Baker, j'étais autrefois le premier ministre de l'Île-du-Prince-Édouard, et, tous les jours, mon devoir principal était de représenter l'Île-du- Prince-Édouard. Vous serez peut-être intéressé de savoir que je ne suis pas natif de l'Île-du-Prince-Édouard. Je suis né en Saskatchewan, et j'ai grandi en Alberta. J'ai choisi de vivre à l'Île-du-Prince-Édouard, et je me considère à la fois un Prince-Édouardien et un Canadien.

Le sénateur Baker : Cependant, en tant que Prince-Édouardien, vous portez d'abord un jugement sur un projet de loi de la Chambre des communes, et vous êtes d'abord un Prince-Édouardien.

Si vous étiez un Néo-Écossais, si vous étiez le premier ministre de la Nouvelle-Écosse, s'agirait-il ici d'un projet de loi que vous appuieriez?

M. Binns : Je crois que c'est une question qui regarde la Nouvelle-Écosse et le gouvernement fédéral, et je dirais que la même chose s'applique pour Terre-Neuve-et-Labrador et le fédéral.

Je crois que le budget de cette année est plus avantageux pour la plupart des provinces, par rapport à ce que nous avons connu dans le passé. J'ai déjà dit qu'il s'agit d'un projet en évolution. Ce que nous recherchons, en fin de compte, c'est l'équité, et la possibilité de la rendre permanente.

Ce que je constate, c'est qu'il y a quand même des négociations et des discussions qui se déroulent à huis clos, ou bien en public, et qui mèneront à d'autres changements éventuels. C'est la raison pour laquelle je cite la situation actuelle et l'offre qui se trouve sur la table. Selon moi, ce budget représente une amélioration importante pour l'Île-du- Prince-Édouard, par rapport à la situation que nous avons connue dans le passé. Cependant, selon moi, il ne s'agit pas de la solution ultime et je crois que l'Île-du-Prince-Édouard devrait continuer de s'assurer qu'elle aura un traitement équitable à long terme. Selon moi, il s'agit d'un projet inachevé.

Le sénateur Baker : Autrement dit si vous étiez le premier ministre de la Nouvelle-Écosse, votre opinion ne serait pas nécessairement celle du premier ministre de l'Île-du-Prince-Édouard, et vous acceptez ce budget même si la preuve est clairement faite que l'Île-du-Prince-Édouard sera perdante à long terme, même s'il y a des gains immédiats. Ai-je bien analysé votre position?

M. Binns : Non.

Le sénateur Baker : Vous croyez que d'ici trois ou quatre ans la province sera gagnante sur le plan de la péréquation?

M. Binns : Je parlais de l'ensemble des paiements de transfert fédéraux. Selon moi, nous serons gagnants pendant encore plusieurs années. Je vous ai dit qu'il s'agit d'un projet en cours. Je crois qu'il faudrait continuer à exercer des pressions pour améliorer le programme de péréquation. Encore une fois, l'objectif pour chaque province serait de se départir, éventuellement, de la péréquation.

Le sénateur Baker : Je crois que je n'irai pas plus loin avec ce premier ministre.

Je vais maintenant poser des questions aux autres témoins. Monsieur Locke, vous avez dit que vous avez eu de la difficulté à obtenir des chiffres exacts de la part du ministère des Finances. Le terme « exact » est, bien entendu, très important. Le premier ministre de Terre-Neuve a reçu, le 5 juin, une lettre indiquant que le plafond serait l'équivalent du montant que recevait non pas n'importe quelle province, mais la province qui a la capacité fiscale la plus élevée.

Le ministre des Finances est venu témoigner devant notre comité après que le premier ministre provincial eut envoyé une lettre au premier ministre fédéral lui demandant des précisions. Le ministre des Finances nous a dit qu'il s'agissait d'une faute de frappe, et qu'il ne voulait pas dire « la province non bénéficiaire qui a la capacité fiscale la plus élevée » mais, plutôt, « n'importe quelle province. » C'est toute une faute de frappe.

Combien est-ce que cela valait pour Terre-Neuve? Il voulait dire la moins élevée, mais vous avez écrit la plus élevée. Le document passe entre les mains de 50 personnes, et ensuite vous, en tant que ministre, devez signer le document. Je vous dirais qu'il s'agit probablement d'un contrat qui pourrait bien faire l'objet d'une poursuite.

Selon vous, monsieur Locke, quelle en aurait été la valeur? Avez-vous pris connaissance de cette lettre qui contenait cette faute de frappe, et qui était signée par le ministre des Finances? Est-ce que cela aurait réglé leur problème?

M. Locke : Je ne l'ai pas lue, mais le résultat serait le même que s'il n'y avait pas de plafond. Il y en avait pour des milliards de dollars, jusqu'à 5 ou 10 milliards de dollars. C'est un montant énorme. Nous n'avons pas examiné cette situation exacte, mais nous avons évalué ce que M. Williams avait dit au sujet de ce que signifiait la promesse. Nous n'étions pas inquiets du fait que la promesse ne pourrait peut-être pas être respectée, nous voulions tout simplement comprendre tout le contexte. Nous y avons jeté un coup d'oeil, et nous avons estimé que la valeur était d'à peu près 10 milliards de dollars.

Le sénateur Baker : C'est incroyable. Le premier ministre fédéral était sans doute fou de joie lorsqu'il a reçu cette lettre, et maintenant, en écoutant ce qui se passe à notre réunion de comité, il découvre qu'il ne s'agissait que d'une faute de frappe. Quelle grande déception pour lui.

M. Binns a dit que des négociations étaient en cours. Vous deviez distribuer une lettre du premier ministre provincial indiquant que M. Flaherty avait dit au Comité sénatorial des finances qu'il était en pourparlers avec la Nouvelle- Écosse, le Nouveau-Brunswick et Terre-Neuve afin de trouver un moyen pour que ces provinces puissent participer à ces accords ou bien s'en retirer afin de recevoir le montant le plus important des transferts fédéraux. Comme j'ai indiqué dans une lettre que j'ai envoyée, aujourd'hui au ministre, cet énoncé n'est pas exact. Le premier ministre de Terre-Neuve n'a pas pu participer à la réunion aujourd'hui parce qu'il est l'hôte du Sommet national des femmes autochtones qui se déroule cette semaine dans sa province, à Corner Brook; et c'est tout à fait normal qu'il y soit.

Pour conclure, j'aimerais féliciter les économistes qui sont ici aujourd'hui. Messieurs, vous avez fait un travail formidable, et je crois que ce que vous avez présenté est tout à fait exact. Je ne suis pas d'accord avec ce que disent M. Binns et le ministre des Finances.

Le sénateur Mitchell : Premier ministre Binns, le premier ministre Harper, avant qu'il ne devienne premier ministre, s'est dit engagé à améliorer les relations entre le fédéral et les provinces. Il est évident que son objectif n'a pas encore été atteint. En fait, les relations se sont grandement détériorées, au point où l'un de vos anciens collègues est en train de poursuivre le premier ministre devant les tribunaux. C'est très malheureux, et on se demande ce qui ce serait passé si le premier ministre avait décidé d'envenimer les relations. Ça ne pourrait pas être pire.

Il faut bien avouer que les relations ne se sont pas améliorées et qu'en même temps, il a apporté des changements très importants au niveau de la politique fédérale, des changements qui ont eu des répercussions sur les provinces. Il a changé la formule de péréquation, un sujet dont nous discutons depuis déjà un bon moment; il a mis fin aux ententes sur les garderies qu'on avait déjà négociées avec chaque province; il a annulé l'Accord de Kelowna, un accord qu'ont signé les provinces, les territoires et les chefs des collectivités autochtones; et il a renié les accords. On aurait cru qu'il aurait voulu, tout au moins, consulter ses homologues, les premiers ministres des provinces, d'une façon plus ou moins officielle et structurée avant de prendre des décisions qui auraient des effets aussi importants pour ses collègues. Il me semble que c'est manquer de politesse que de procéder ainsi.

Il n'a pas tenu de réunions officielles des premiers ministres depuis qu'il est devenu premier ministre fédéral; ai-je raison? Je crois qu'ils se sont réunis pour un repas au 24, promenade Sussex, vers le début de son mandat, mais il n'y a pas eu de conférence officielle des premiers ministres, comme c'était le cas dans le passé.

M. Binns : Je vous dirais que les conférences de premiers ministres sont à peu près aussi fréquentes avec le nouveau premier ministre que ce qui se passait auparavant avec les anciens premiers ministres. Il nous arrivait souvent d'attendre plus d'un an avant de se réunir.

Le sénateur Mitchell : Ça fait déjà 17 mois, mais je crois que vous devez vous demander si un changement au système de péréquation, l'annulation des ententes sur les garderies, l'annulation de l'Accord de Kelowna, et le non-respect des accords auraient pu se produire dans le passé en l'absence de toute discussion officielle avec les premiers ministres avec qui il dit vouloir améliorer les relations.

Est-ce qu'il a l'habitude de passer un coup de fil aux premiers ministres pour leur demander leur avis? Est-ce qu'il communiquait avec vous de temps en temps? Est-ce qu'il vous a demandé ce que vous pensiez du système de péréquation, ou s'il devait annuler l'Accord de Kelowna? Est-ce qu'il y a eu des communications entre le premier ministre et les premiers ministres des provinces, ou a-t-il tendance à agir de façon unilatérale?

M. Binns : Je ne suis pas d'accord avec plusieurs de vos énoncés.

Le sénateur Mitchell : Lesquels? Allez-y.

M. Binns : On a apporté des améliorations à certains programmes. Je ne sais pas s'il a communiqué par téléphone avec d'autres premiers ministres, mais je sais qu'il a communiqué avec moi assez souvent, et la porte était relativement ouverte.

Le sénateur Mitchell : Il est évident qu'il n'est pas retourné voir M. Williams ou M. MacDonald. Le premier ministre MacDonald a comparu devant le comité et il nous a dit très clairement qu'il n'y avait pas eu de discussions. C'est tout à fait remarquable.

Le sénateur Moore : Je veux donner suite aux questions du sénateur Ringuette concernant le Transfert canadien en matière de programmes sociaux. Si on utilise les chiffres de Statistique Canada du mois d'octobre, selon sa population, ma province, la Nouvelle-Écosse, recevra 6,5 millions de dollars de plus cette année, tandis que l'Alberta aura 344 millions de dollars. Pour vous montrer à quel point l'écart s'accroît, dans dix ans, la Nouvellle-Écosse aura 65 millions de dollars et l'Alberta 3,4 milliards de dollars.

J'aimerais entendre les observations des professeurs concernant cet état des choses. Je pense au danger que cela représente pour les universités. Je ne sais pas comment nous allons pouvoir être concurrentiels ni comment nous pourrons garder nos meilleurs professeurs, étudiants et chercheurs. Cela m'inquiète beaucoup. Il ne fait aucun doute que ce transfert crée des disparités énormes au pays. M. Binns a utilisé le mot « équité ». Il n'y en a pas dans ce régime.

Vous travaillez tous les deux sur le campus. Vous aurez probablement examiné l'incidence de tout cela. Qu'en pensez-vous?

M. Hobson : Il ne fait aucun doute que ce régime a des conséquences énormes pour le financement de l'enseignement postsecondaire dans toutes les provinces. L'Ontario et l'Alberta vont recevoir beaucoup plus. Par contre, je pense que la Nouvelle-Écosse recevra le quart de ce qu'elle aurait eu si elle avait reçu sa part des fonds supplémentaires versés dans le cadre du Transfert canadien en matière de programmes sociaux. Il y aura des conséquences également sur le financement de l'enseignement postsecondaire en Nouvelle-Écosse, au Nouveau-Brunswick, à l'Île-du-Prince-Édouard et à Terre-Neuve-et-Labrador.

Le sénateur Moore : Hier, le ministre des Finances de la Nouvelle-Écosse, M. Baker, nous a dit que selon l'ancien arrangement, nous aurions reçu 28 millions de dollars; maintenant nous allons recevoir 6,5 millions de dollars. Avez- vous examiné la situation dans les autres provinces, ou plus particulièrement à Terre-Neuve-et-Labrador, et l'incidence que cela aura sur l'Université Memorial?

M. Hobson : Je répète que nous avons surtout examiné la péréquation. Il n'est pas difficile de faire les calculs dont vous parlez. On pourrait vous fournir une réponse dans 24 heures.

Le sénateur Moore : Il serait intéressant d'avoir les chiffres. Je trouve la situation très alarmante. Je sais que les universités partagent mes inquiétudes. Si vous pouvez nous donner ces chiffres, cela nous sera fort utile.

Le sénateur Biron : Hier, l'honorable John Crosbie a proposé un amendement qui remettrait de la confiance et de la crédibilité dans les futurs arrangements entre le fédéral et les provinces. Il a dit que si le Sénat acceptait cet amendement, il ne voyait pas pourquoi le gouvernement ne ferait pas preuve de bon sens. Il pense que le gouvernement devrait se hâter d'accepter cet amendement si le Sénat l'adopte.

M. Crosbie nous a dit que c'est ce qu'il ferait s'il était premier ministre et s'il tenait à survivre. Est-ce que le Conseil économique des provinces de l'Atlantique appuie l'amendement de M. Crosbie?

M. Hobson : Nous ne pouvons pas parler au nom du Conseil économique des provinces de l'Atlantique, sénateur. Nous ne sommes que des conseillers supérieurs en politique. Il faudrait poser la question à la présidente, Mme Elizabeth Beale, et elle consulterait sans doute son conseil d'administration.

Nous ne sommes pas avocats et donc nous n'osons pas tellement nous prononcer sur cette question. Cependant, d'après ma compréhension de l'amendement, ce dernier encouragerait le plein respect de l'esprit et de la lettre des accords.

Selon l'amendement proposé, les recettes provenant des ressources extracôtières ne doivent pas être comprises dans le calcul de la capacité fiscale totale. Les accords concernent les recettes provenant des ressources extracôtières, donc on les élimine du calcul du plafond de la péréquation. Donc, il s'agit de toute somme payable en vertu de l'Accord atlantique, qui concerne les paiements à Terre-Neuve-et-Labrador selon l'Accord de 1985, et toute somme due à l'une ou l'autre province selon l'accord de 2005.

Si on élimine toutes ces recettes, on respecte pleinement l'esprit et la lettre de l'accord. Après avoir examiné l'amendement brièvement, je dirais que ce serait une façon d'assurer le respect intégral des accords dans le nouveau programme de péréquation.

Le sénateur Biron : Donc, vous êtes d'accord avec l'amendement?

M. Locke : Nous n'avons pas eu beaucoup de temps pour réfléchir à cela, mais nous estimons que l'amendement reflète assez bien notre point de vue.

Le sénateur Angus : À vous de décider si mon intervention est un rappel au Règlement, monsieur le président. Elle concerne le courriel envoyé par le premier ministre Danny Williams, auquel on a déjà fait allusion, et dont un extrait a été lu par le sénateur Baker. Le premier ministre Williams corrigeait une fausse impression laissée par CanWest hier. Selon le reportage, le ministre Flaherty avait dit au Comité sénatorial des finances nationales qu'il y avait des pourparlers avec la Nouvelle-Écosse, le Nouveau Brunswick et Terre-Neuve-et-Labrador. Cependant, j'ai revu avec soin les bleus, et il a dit qu'il était en pourparlers avec la Nouvelle-Écosse. Si quelqu'un a fait une erreur, c'est bien CanWest. Je n'accuse personne dans cette salle. Je voulais faire un rappel au Règlement pour apporter cette précision.

Le président : Nous avons un rappel au Règlement.

Le sénateur Cowan : Pour que tout soit clair dans le compte rendu, on a posé cette question au premier ministre MacDonald, qui a comparu devant nous hier après-midi. Il a dit qu'il n'y avait pas de consultation en cours entre le gouvernement fédéral et le gouvernement de la Nouvelle-Écosse, et que M. Flaherty s'est trompé quand il a dit cela hier matin.

Le sénateur Angus : Il s'agit peut-être d'un autre rappel au Règlement. J'ai ici la transcription officielle et il a bien dit qu'il était en pourparlers avec la Nouvelle-Écosse, mais pas avec les deux autres provinces. Voilà mon rappel au Règlement.

Le président : Je comprends ce que vous voulez dire.

Y a-t-il autre chose sur ce rappel au Règlement? Si CanWest Global a fait une erreur, on va sûrement la corriger lors de l'émission ce soir.

Le sénateur Baker : J'ai un autre rappel au Règlement, monsieur le président. Le texte qu'a lu le témoin en réponse à la question du sénateur Biron concernant l'amendement de M. Crosbie ne reprenait pas les mots exacts que ce dernier a utilisés. J'ai demandé au service juridique de rédiger un amendement selon ce que M. Crosbie a proposé et c'est ce texte-là que le témoin a lu. Il se peut qu'on ait l'amendement Crosbie lorsque nous retournerons au Sénat.

Le président : Merci. Même s'il ne s'agit pas d'un rappel au Règlement c'est intéressant quand même. Nous allons peut-être voir l'amendement plus tard. L'honorable John Crosbie a comparu hier et il a proposé une solution pour nous sortir de l'impasse.

Honorables sénateurs, le temps est presque écoulé. Nous avons même dépassé l'heure un peu. Je n'aime pas clore la réunion sans donner la parole à tous les sénateurs qui veulent poser des questions. Je vous demande de poser des questions concises.

Le sénateur Rompkey : Je voulais donner suite aux questions posées par le sénateur Angus à M. Locke concernant ces deux rapports : le premier est le rapport modifié, et les raisons pour lesquelles il l'a modifié; je ne suis pas certain que les membres du comité comprennent exactement ce qui s'est produit.

Vous avez rédigé un rapport, que vous avez rendu public, qui se fondait sur certains renseignements que vous aviez reçus. Le gouvernement provincial avait les mêmes renseignements. Une fois le rapport rendu public, vous avez reçu de nouveaux renseignements que ni vous ni le gouvernement provincial n'aviez reçus auparavant. À la lumière de ces nouveaux renseignements, vous avez présenté un autre rapport, qui était différent du premier. Racontez-nous ce qui s'est passé entre les deux rapports. Nous voulons que cela soit clair aux fins du compte rendu.

M. Locke : Je ne peux pas me prononcer quant aux renseignements que le gouvernement provincial a reçus. Je peux vous parler de mon expérience personnelle.

Avant de rendre publique la première analyse, celle du 4 avril, j'avais consulté beaucoup d'experts, dont les ministères fédéral et provinciaux des Finances. J'ai également envoyé des courriels pour poser une question au sujet d'une hypothèse primordiale, je voulais savoir si oui ou non une province qui, avant l'imposition du plafond, était admissible à la péréquation pouvait avoir droit aux paiements en vertu de l'accord. Deux personnes du ministère fédéral des Finances m'ont envoyé des courriels pour me dire que oui, mon interprétation était exacte. Les responsables des ministères provinciaux des Finances m'ont dit la même chose. Cela m'a semblé raisonnable, étant donné que les paiements en vertu de l'accord ont été calculés également avant l'imposition du plafond.

J'ai ensuite mis la dernière main à l'analyse. J'allais la rendre publique pour participer à la discussion. J'ai d'abord donné des copies au ministère fédéral des Finances et aux ministères provinciaux des Finances. Je voulais qu'ils sachent ce que je faisais. Je ne voulais pas agir de façon politique; étant universitaire, je tenais à rendre service à la population.

Quelqu'un du ministère fédéral des Finances m'a appelé à 14 heures le jour où je devais présenter mon analyse. On m'a dit que je devrais me préoccuper du fait que la loi d'exécution du budget, le projet de loi C-52, avait été présentée en Chambre jeudi — et on était mardi. On m'a dit que mon hypothèse, que j'avais confirmée auprès des fonctionnaires du ministère fédéral des Finances et ceux des ministères provinciaux des Finances, ne correspondait pas avec le projet de loi C-52. Le projet de loi prévoyait en fait un déclencheur arbitraire pour l'accord, selon lequel, si la capacité fiscale totale par habitant d'une province comme Terre-Neuve dépassait celle de la province non bénéficiaire avec la capacité fiscale la plus basse, la province n'avait pas droit à un paiement en vertu de l'accord.

Ce changement à lui seul — un changement discrétionnaire qui n'avait rien à voir avec O'Brien — a fait en sorte que, selon ce nouveau régime, l'accord ne s'appliquera plus jamais à Terre-Neuve.

Le sénateur Rompkey : Le ministère fédéral des Finances ne vous a pas donné ce renseignement avant que vous ne remettiez votre rapport. Il vous l'a donné seulement après avoir vu votre rapport. On estimait qu'il fallait corriger le rapport sinon il risquerait d'être gêné quand le rapport serait publié. Il savait que les renseignements qu'on vous avait donnés au début étaient incomplets. Ce n'est qu'après avoir lu votre rapport qu'on vous a tout dit. Ce n'est qu'à ce moment-là qu'on vous a tout dit.

Cela cadre bien avec quelque chose que vous avez dit au début. Vous avez dit que chaque fois qu'il y avait un changement discrétionnaire, il s'avérait néfaste pour Terre-Neuve-et-Labrador. Je me souviens que vous nous avez dit cela au début de votre témoignage. Je le répète, car j'estime qu'il est très important de l'avoir dans le compte rendu. Les renseignements que le ministère fédéral des Finances vous a donnés au début n'étaient pas complets. Ce n'est qu'après avoir vu votre premier rapport qu'ils vous ont donné des renseignements complets et exacts.

Voilà donc ma première question. Et je vous ai promis que je serai bref. Est-ce que je peux poser une deuxième question très rapidement, aussi très courte?

Je tiens à féliciter le sénateur Di Nino, qui est un homme juste. Il s'est interrogé sur le témoignage du premier ministre Calvert, qui disait que les ressources provinciales servaient à aider la province à devenir plus riche, à payer sa dette, et à devenir une province contributrice. Le sénateur Di Nino a bien compris cette notion, et j'en suis heureux. C'est le cœur même de l'argument. Le premier ministre Calvert n'a pas signé d'accord, mais sa province possède les ressources. Quant à nous, nous avons et un accord et les ressources, tout comme la Nouvelle-Écosse. On se trouve dans la même position. Je suis content que le sénateur Di Nino l'ait bien compris, car c'est le message qu'on essaie de transmettre. Ces ressources sont indispensables à notre économie. Elles nous permettent de contribuer et non de faire des demandes.

Le sénateur Ringuette : Je vous ai demandé beaucoup de renseignements et de données, et vous m'avez promis de les fournir en 24 heures. Le président me regarde et me demande implicitement si cela va entraîner des coûts. Est-ce que ces données vont nous coûter de l'argent?

M. Locke : Non.

Le sénateur Ringuette : Vous êtes plus généreux que les fonctionnaires du ministère des Finances.

M. Hobson : On a dit qu'on allait le faire. Nous n'avons pas fait la promesse.

Le sénateur Cowan : Monsieur Binns, à titre de premier ministre de votre province, vous avez signé un certain nombre d'ententes avec le gouvernement du Canada en matière de construction de ponts et d'autoroutes, d'éducation, de santé et d'éducation de la petite enfance. Est-ce exact?

M. Binns : Oui, vous avez raison.

Le sénateur Cowan : Bon nombre de ces ententes signées prévoyaient le transfert des fonds du Trésor fédéral à l'Île- du-Prince-Édouard.

M. Binns : Exact.

Le sénateur Cowan : En vertu de ces ententes, dont plusieurs étaient des ententes de plusieurs années, vous avez pris des décisions financières assez importantes au nom de la province de l'Île-du-Prince-Édouard.

M. Binns : Exact.

Le sénateur Cowan : D'après votre expérience, le gouvernement fédéral est-il déjà revenu sur une entente écrite entre le gouvernement de l'Île-du-Prince-Édouard et le gouvernement du Canada?

M. Binns : Eh bien, j'ai eu une expérience du côté de la péréquation, il avait été entendu que...

Le sénateur Cowan : Premier ministre Binns, je fais référence à des ententes signées.

M. Binns : Ces ententes dont vous parlez n'ont pas été forcément conclues, mais négociées à multiples reprises. Il a été entendu qu'on allait recevoir un certain montant en vertu de la péréquation, et nous avons appris plus tard que cela ne se produirait pas, et qu'on allait recevoir moins d'argent.

Le sénateur Cowan : Avez-vous déjà signé une entente, ou est-ce qu'un de vos ministres a signé une entente avec le fédéral, selon laquelle les fonds devaient être transférés à votre province, et qu'au bout du compte, rien ne vous a été donné?

M. Binns : Est-ce que vous aimeriez que je parle de la situation de la Nouvelle-Écosse?

Le sénateur Cowan : Non, en fait. Je ne parle pas du tout de l'Accord atlantique. Je parle de votre expérience en tant que premier ministre de longue date de votre province.

M. Binns : Vous vous posez la question parce que vous voulez que je me prononce sur leur argumentation.

Le sénateur Cowan : Est-ce que vous répondez oui ou non?

Le président : Êtes-vous capable de répondre à la question, monsieur Binns? M. Binns ne désire pas répondre à la question.

Le sénateur Cowan : C'est tout ce que je veux poser comme question.

Le sénateur Moore : Le 1er avril 2014, l'accord actuel sur le transfert en matière de santé prend fin, après quoi la répartition par habitant entrera en vigueur. Est-ce que vous vous êtes penché sur ces chiffres? La situation dans ma province de la Nouvelle-Écosse n'est pas différente de celle des autres provinces de l'Atlantique où les populations sont vieillissantes, les populations sont en décroissance, et les coûts de santé sont en croissance. Il faut se rendre à l'évidence. Il y aura un énorme écart entre les besoins et la disponibilité des fonds lorsqu'il s'agira de fournir des services de santé et d'éducation de qualité égale entre chacune des provinces. Avez-vous déjà examiné ces chiffres et les conséquences éventuelles?

M. Hobson : La même réponse donnée à la question sur le transfert social du Canada s'applique ici. Non, nous ne nous sommes pas encore penchés sur ces chiffres; je ne peux que donner la même réponse que tout à l'heure. Pour passer à une répartition par habitant, il faudra effectuer un transfert assez considérable des ressources financières aux provinces de l'Ontario et de l'Alberta.

Le président : Monsieur Hobson, monsieur Locke et monsieur Binns, je vous remercie d'être venus. Je vous remercie d'être restés plus longtemps que prévu afin de permettre à tous les sénateurs de vous poser leurs questions. Les témoignages et les renseignements que vous nous avez donnés seront très utiles dans nos délibérations. Merci.

Honorables sénateurs, vous avez tous reçu un avis de réunion pour 10 heures, ici même. Je vous demanderai alors si vous êtes prêts à passer à l'étude article par article du projet de loi.

La séance est levée.


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