Délibérations du comité sénatorial permanent des
Pêches et des océans
Fascicule 8 - Témoignages du 26 avril 2007
OTTAWA, le jeudi 26 avril 2007
Le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans se réunit aujourd'hui à 10 h 47 afin d'examiner, pour en faire rapport, les questions relatives au nouveau cadre stratégique en évolution du gouvernement fédéral pour la gestion des pêches et des océans du Canada.
Le sénateur Bill Rompkey (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Mesdames et messieurs, la séance est maintenant ouverte. Avant de souhaiter la bienvenue à nos invités, j'aimerais vous signaler que j'ai comparu devant le Sous-comité des budgets et de l'administration pour lui soumettre notre budget. Les membres du comité s'y sont montrés favorables, mais n'ont pas pu l'adopter puisqu'il n'y avait pas quorum à la réunion. Nous avons déjà les crédits nécessaires pour aller au lac Winnipeg, mais il nous faut des fonds supplémentaires pour nous rendre au Nunavik, et je m'attends à ce que nous les obtenions.
Nous sondons actuellement les sénateurs en ce qui touche notre visite au lac Winnipeg. Nous aimerions connaître votre réponse d'ici demain, vendredi, parce que nous devons commencer nos préparatifs. Je vous demande donc de faire preuve de diligence et de transmettre votre réponse aussi rapidement que possible au greffier.
Ce matin, nous avons invité les fonctionnaires à venir nous parler des annonces que le ministre a faites récemment et qui auront des conséquences pour toutes les côtes. Nous sommes très heureux de les accueillir.
Je demanderai au sous-ministre, l'amiral Murray, de bien vouloir nous présenter les personnes qui l'accompagnent. En fait, les membres du comité connaissent déjà David Bevan et Wayne Follett, mais je demanderai tout de même à l'amiral de bien vouloir nous les présenter.
Larry Murray, sous-ministre, Pêches et Océans Canada : Je vous remercie beaucoup de nous donner l'occasion de discuter avec vous des nouvelles initiatives et approches qui ont été annoncées le 12 avril dernier.
Comme vous l'avez indiqué, m'accompagnent aujourd'hui David Bevan, sous-ministre adjoint de la Gestion des pêches et de l'aquaculture, et Wayne Follett, directeur général régional de Terre-Neuve-et-Labrador.
À votre demande, ils feront de courtes présentations — qui, je crois, vous ont déjà été fournies — au sujet des annonces nationales et des annonces pour Terre-Neuve faites le 12 avril. Nous répondrons ensuite volontiers à vos questions et prendrons note de vos observations et de vos vues sur les annonces, le renouvellement des pêches en général et la voie à suivre.
Nous estimons que les annonces faites par le ministre Hearn marquent le début d'une nouvelle façon de faire dans la pêche. Elles sont le fruit de la vaste mise à contribution des pêcheurs, des provinces et d'autres intervenants lors de sommets et de processus de consultation qui ont eu lieu au Canada atlantique. Il s'agit de la fin d'un processus et du début de la voie à suivre.
[Français]
Les annonces portaient sur un certain nombre d'initiatives que David et Wayne résumeront. Toutes ces initiatives reposent sur une nouvelle vision de la gestion des pêches — une approche «De l'océan à la table» qui tient compte de toutes les composantes de l'industrie de la pêche, soit le pêcheur, le transformateur, l'acheteur, le distributeur, l'épicier, le restaurateur et le consommateur. Pour notre ministère, cela signifie une nouvelle façon de faire.
Le mandat lié à toutes ces composantes ne nous revient pas et ce n'est pas ce que nous demandons. Le mandat et la gouvernance des pêches sont très diffus, et le rôle de notre ministère est en train de passer de la réglementation de la ressource à la collaboration avec les provinces — qui sont responsables de la transformation — avec les autres ministères fédéraux — qui sont responsables du développement économique, de la commercialisation internationale, de la formation — et avec tous les intervenants de l'industrie de la chaîne de valeur des produits de la mer, en vue d'assurer une gestion plus complète qui vise à tirer le maximum de la valeur à long terme de la ressource.
D'une certaine façon, il faudra opérer un changement de culture pour notre ministère, pour l'industrie et pour d'autres — un changement que nous jugeons nécessaire pour mieux positionner le secteur canadien de la pêche sur le marché mondial concurrentiel et complexe.
[Traduction]
Au bout du compte, le secteur de la pêche sera plus petit, plus souple et plus concurrentiel, il sera mieux en mesure de répondre aux demandes sur le marché et il générera plus de revenus pour les pêcheurs, pour d'autres membres de l'industrie et pour les Canadiens en général.
Or, nous n'oublions pas le caractère public de la gestion des pêches et le rôle unique des pêcheurs côtiers indépendants qui sont au coeur de la culture et de l'identité du Canada atlantique — et nous avons pris des mesures pour continuer d'appuyer et de renforcer l'indépendance de la flottille côtière pendant que s'effectue la transition à un secteur de la pêche concurrentiel.
Je voudrais brièvement souligner trois points. Premièrement, selon nos discussions avec nos pêcheurs dans la dernière année, c'est évident qu'une seule solution ne convient pas à tous. Il faudra adapter les solutions et les approches à chaque pêche — et les pêcheurs eux-mêmes doivent faire partie de la solution.
Quelques-unes des initiatives annoncées le 12 avril sont de portée nationale, mais d'autres sont axées sur le Canada atlantique et d'autres encore sur les pêches de Terre-Neuve-et-Labrador. Les discussions se poursuivent sur les trois côtes, et nous pouvons nous attendre à ce que d'autres initiatives régionales soient élaborées au cours des prochains mois.
Deuxièmement, toutes ces initiatives se fondent sur des politiques et des processus qui ne pourront nous mener jusqu'au bout sans modification législative. Nous savons que nos mesures seront plus efficaces si nous pouvons compter sur le cadre législatif et les outils juridiques que nous fournirait une nouvelle Loi sur les pêches.
Enfin, ces nouvelles initiatives ne signifient pas que nous écartons notre mandat visant la conservation. La conservation reste notre priorité et notre responsabilité principale, c'est comme toujours la gestion de la pêche en vue d'assurer la survie de la ressource pour les générations futures. Cela dit, nous croyons que la viabilité de l'industrie et la conservation sont étroitement liées et que les initiatives annoncées le 12 avril entraîneront de meilleurs résultats sur le plan de la conservation ainsi que la viabilité assurée de l'industrie.
Je cède maintenant la parole à M. Bevan qui vous donnera un aperçu national des initiatives en cours.
Le président : Avant de donner la parole à M. Bevan, je voudrais indiquer au comité que je dois partir à 11 h 45. J'ai demandé au sénateur Hubley de prendre le fauteuil à compter de ce moment. Si je pars, ce n'est pas par manque d'amitié envers vous ou pour une autre raison, mais simplement parce que j'ai un engagement que je dois tenir.
David Bevan, sous-ministre adjoint, Gestion des pêches et de l'aquaculture, Pêches et Océans Canada : Je vais maintenant vous parler de l'approche de l'océan à la table pour l'industrie canadienne de la pêche. Je vais vous faire un bref survol des pêches canadiennes, des défis auxquels l'industrie est confrontée, du processus de l'approche de l'océan à la table, des annonces du 12 avril dernier ainsi que des prochaines étapes.
La troisième diapositive nous montre l'évolution de l'industrie de la pêche au Canada au fil des ans. Autrefois, l'industrie était surtout axée sur des volumes élevés de poisson de fond, mais elle est désormais axée sur les mollusques et les crustacées, les poissons à nageoires représentant un pourcentage de moins en moins important et l'aquaculture, elle, a pris beaucoup d'ampleur au cours des dernières années.
L'industrie génère des revenus de 4,3 milliards de dollars au titre des exportations, près de un milliard de dollars en ventes sur le marché intérieur et l'aquaculture, pour sa part, des revenus de 753 millions de dollars. Elle donne de l'emploi à 80 000 personnes et joue un rôle très important dans les collectivités côtières du Canada atlantique. Elle contribue de façon importante au PIB de cette région du pays.
De nombreux intervenants jouent un rôle au sein de l'industrie. L'Agence canadienne d'inspection des aliments exerce une surveillance sur les usines de traitement; notre ministère réglemente l'exploitation de la ressource; Affaires étrangères et Commerce international Canada s'intéresse au marché étranger; Agriculture et Agro-alimentaire Canada s'occupe de la commercialisation; et les provinces, elles, réglementent la transformation du poisson.
Par le passé, chaque intervenant a eu tendance à ne s'intéresser qu'à son propre domaine d'intervention et à ne pas se préoccuper de la situation dans son ensemble. Nous avons appris cette année que nous devons prendre en compte l'ensemble de l'industrie parce que de cette façon, nous pouvons optimiser la valeur des ressources halieutiques.
Le président : Pourriez-vous nous indiquer la valeur des débarquements de poissons?
M. Bevan : Il s'agirait de tout le poisson de fond — le saumon sur la côte ouest. Sur la côte est, le poisson de fond comprend notamment le thon rouge, le maquereau, le hareng, la morue et l'aiglefin.
Comme vous le voyez, il ne s'agit que d'une petite partie de l'industrie. On voit que cette partie de l'industrie n'est pas aussi importante que l'aquaculture ou la pêche au homard. En fait, elle est à peu près équivalente à la pêche au crabe, ce qui est un important changement survenu au cours des 15 dernières années.
Le président : Je posais la question parce qu'il s'agit effectivement d'un important changement.
M. Bevan : La quatrième diapositive indique les pressions externes qui s'exercent sur l'industrie. Au nombre de ces pressions, mentionnons le renchérissement du dollar, l'augmentation du prix du carburant ainsi qu'une concurrence accrue de la Chine. En 2006, on a constaté un véritable étau coût-prix, les prix du poisson étant moins élevés et certains pêcheurs n'étant pas parvenus à recouvrer leurs coûts de façon raisonnable. Les prix ont quelque peu remonté, mais l'industrie fait toujours face à une importante concurrence de la part de la Chine. Elle est aussi confrontée à des défis liés à l'accès au marché en raison de l'imposition de tarifs.
L'aquaculture, pour sa part, n'atteint pas son plein potentiel en raison principalement de la complexité du régime réglementaire. J'ai appris qu'à Terre-Neuve, pour obtenir l'approbation d'une concession, il faut s'adresser à 18 organismes gouvernementaux distincts. L'aquaculture a donc cessé de se développer au Canada, contrairement à ce qui se passe au Chili, en Norvège et dans d'autres pays. La croissance de ce secteur s'est donc stabilisée. Or, l'industrie de l'aquaculture a un carnet de commandes qui est complet pour les deux prochaines années. L'industrie ne peut pas suffire à la demande. Les aquaculteurs obtiennent un bon prix pour leur produit, qui est en demande sur le marché, mais ils ne peuvent pas accroître leur production en raison de la façon dont l'industrie est réglementée.
L'industrie est aussi confrontée au changement des conditions environnementales et océaniques. Dans l'Atlantique, il y a certains lieux de pêche au large de Terre-Neuve-et-Labrador dont la température a augmenté de 4,5 degrés Celsius par rapport aux années 1990 et ces températures sont supérieures aux moyennes à long terme. Dans le Pacifique, le saumon migre dans des conditions océaniques si différentes de ce qu'elles étaient autrefois que nous ne pouvons pas nous reporter à des données chronologiques pour prédire de façon exacte l'évolution de la situation.
À cela il faut ajouter des faiblesses internes, et notamment la surcapacité dans les secteurs de la récolte; le cadre réglementaire complexe; le manque d'intégration dans la récolte, l'aquaculture et la transformation; des politiques fédérales et provinciales ciblées sur la création d'emplois et non sur l'efficience ou la compétitivité; le vieillissement de la population active et de bas salaires; et le dépeuplement des collectivités côtières. Tout cela a entraîné des saisons de pêche courtes, une course à la récolte; des problèmes de qualité; une incapacité de mise en marché efficace; des opportunités manquées en aquaculture; et une faible productivité dans le secteur de la pêche sauvage. Les collectivités côtières qui dépendent de ces ressources sont donc particulièrement vulnérables et connaissent un dépeuplement.
Nous avons réagi à la situation en organisant, de concert avec les provinces, plusieurs sommets et tables rondes qui ont abouti au rejet du statu quo. L'industrie doit évoluer. Si elle ne le fait pas, cette évolution lui sera imposée. Si nous ne parvenons pas à gérer le changement, c'est l'inverse qui va se produire.
Les consultations suivies qui ont été menées auprès de l'industrie au cours de la dernière année ont abouti à la vision qui vous est présentée à la sixième diapositive : une industrie durable, économiquement viable et compétitive à l'échelle internationale. Cette industrie doit être en mesure de s'adapter au changement dans les ressources et les marchés. Nous avons constaté ces changements et nous y sommes confrontés tous les jours. Les quantités et les prix du crabe fluctuent et l'industrie doit être en mesure de s'y adapter. La même chose vaut pour les autres espèces.
L'industrie doit être en mesure de tirer profit au maximum des marchés mondiaux. Elle ne le fait pas à l'heure actuelle. Les prix que nous obtenons pour cette ressource ne sont pas aussi élevés que pour d'autres ressources.
L'industrie doit aussi jouer le rôle de moteur économique pour les populations des régions côtières et assurer des revenus attrayants aux participants à l'industrie. Nous ne parvenons pas en ce moment à attirer des travailleurs spécialisés dans l'industrie et si nous ne trouvons pas le moyen de le faire, nous ferons face à une pénurie importante de main-d'œuvre à mesure qu'augmenteront les départs à la retraite.
Nous pouvons réaliser cette vision grâce à une approche intégrée, de l'océan à la table, et dans certains cas, de la table à l'océan. Nous devons nous fonder sur le marché pour établir les mesures à prendre sur les lieux de récolte, dans les usines de transformation et sur les marchés.
Le but que nous devons viser est de coordonner les politiques et les programmes concernant l'exploitation, l'aquaculture, la transformation, la distribution et la commercialisation en matière de pêche afin d'en maximiser la valeur économique et de contribuer à créer une industrie économiquement viable capable de résister au choc de l'offre et à l'incertitude sur les marchés.
Cela suppose des changements importants. Nous devons accroître la compétitivité mondiale du secteur des produits de la mer; accroître la sensibilisation aux politiques et aux programmes fédéraux et provinciaux pertinents; accroître la résistance de l'industrie aux aléas économiques et aux fluctuations des ressources; et optimiser la valeur des débarquements des produits de la mer.
Nous avons essayé de stabiliser l'accès et l'attribution des ressources pour amener les intervenants à cesser de penser qu'ils régleront leurs problèmes s'ils obtiennent accès au poisson de quelqu'un d'autre et à s'intéresser plutôt à trouver les moyens d'optimiser la valeur du poisson qu'ils récoltent eux-mêmes.
Comme l'indique la huitième diapositive, l'approche de l'océan à la table est étayée par les programmes et les politiques annoncées le 12 avril dernier. Je signale qu'il s'agira d'un important changement de culture pour le gouvernement puisqu'il faudra obtenir la collaboration de tous les autres intervenants dont j'ai déjà parlé tout en essayant d'amener les pêcheurs, les transformateurs, les marchés et les courtiers à renoncer à l'affrontement en faveur de la collaboration.
L'augmentation de l'exonération des gains en capital devrait faciliter le transfert intergénérationnel des permis puisque les pêcheurs devraient pouvoir conserver 180 000 $ après avoir payé les impôts maximaux.
Le financement du renouvellement des programmes scientifiques est prévu, ce qui devrait nous permettre d'avoir accès à l'information dont nous avons besoin non seulement sur les stocks, mais aussi sur les écosystèmes dont nous dépendons.
Des fonds ont aussi été prévus pour permettre à la Garde côtière d'acheter de nouveaux navires.
Nous avons aussi entrepris une révision des droits de permis dans le but de moderniser le processus de traitement des demandes de renouvellement des permis et de mettre à jour un processus qui se fonde sur des données datant de 1993.
Nous avons aussi établi des listes de contrôle de la viabilité des pêches parce que nous devrons prouver au marché que le poisson que nous lui fournissons provient de pêches durables. Il ne suffit plus d'approvisionner simplement le marché. Il faut être en mesure de prouver que la ressource est renouvelable et que son exploitation ne contribuera pas au déclin des ressources halieutiques.
Nous avons aussi pris des mesures pour protéger l'indépendance de la flottille côtière dans la région de l'Atlantique et nous avons supprimé la possibilité de conclure des accords de fiducie pour protéger les permis et nous avons prévu un délai de sept ans pour permettre la modification des accords de fiducie en place.
M. Follett va maintenant vous parler des initiatives qui visent Terre-Neuve et qui comportent l'absorption d'entreprises, la mise en place de règles en matière de remplacement des bateaux et l'octroi de permis permanents pour la pêche intérieure à la crevette. Nous nous dirigeons vers l'auto-rationalisation. Nous avons aussi créé des parts régionales pour que les flottilles du Québec et du reste du golfe puissent commencer à étudier les moyens d'optimiser la valeur de leur part des ressources. La course vers la ressource n'a pas permis d'exploiter cette ressource en fonction du marché et d'en accroître la valeur.
Nous comptons régler d'ici 2010 la question des allocations temporaires du Québec. Des accords s'appliqueront jusqu'en 2008 et il faut prévoir une période de transition avant l'entrée en vigueur d'accords stables; c'est la raison pour laquelle nous nous sommes fixés l'objectif de 2010.
Nous avons aussi entrepris une étude sur la viabilité économique de la pêche à la crevette nordique. Nous avons étudié la pêche côtière et avons conclu qu'elle connaissait de véritables difficultés financières. Nous devons faire la même chose pour la pêche hauturière.
Nous comptons aussi examiner la situation des pêches au Nunavut.
La prochaine étape consistera à poursuivre les processus régionaux en cours au Québec, au Nouveau-Brunswick, dans le détroit de Northumberland et en Nouvelle-Écosse. Nous prendrons de nouvelles mesures à l'issue des annonces faites le 12 avril et nous apporterons les changements qui en découlent. Nous expliquerons par lettre aux pêcheurs les moyens que nous comptons prendre pour préserver l'indépendance de la flottille côtière. Nous examinons les changements à apporter à la gestion des transferts de permis à l'issue de la nouvelle initiative et nous travaillerons avec les flottilles de chaque espèce à trouver les moyens susceptibles de favoriser l'auto-rationalisation. Notre objectif est de permettre aux pêcheurs de déterminer eux-mêmes leur avenir. L'auto-rationalisation exigera que les pêcheurs collaborent entre eux et aboutira à la création d'une flottille côtière plus efficace et viable qui appartiendra aux pêcheurs côtiers et sera contrôlée par eux.
Wayne Follett, directeur général régional, région de Terre-Neuve-et-Labrador, Pêches et Océans Canada : Vous devriez avoir entre les mains une présentation intitulée « Canada-Terre-Neuve-et-Labrador, renouvellement de l'industrie de la pêche ». Ce titre est fort bien choisi puisqu'il s'agit effectivement d'initiative à laquelle participent tant le gouvernement fédéral que le gouvernement provincial. Je traiterai surtout ce matin des éléments de la stratégie de renouvellement sous l'angle fédéral, mais je vous présenterai aussi brièvement les éléments de cette stratégie qui seront mis en œuvre par la province de Terre-Neuve-et-Labrador.
La présentation est longue, mais je ne compte vous présenter que les huit premières diapositives. Vous pourrez vous reporter à l'annexe de la présentation pour obtenir de plus amples renseignements. Permettez-moi d'abord de faire une introduction. Comme M. Bevan, je vous parlerai d'abord des défis auxquels l'industrie est confrontée, et je traiterai ensuite de façon plus approfondie de la situation des diverses pêches à Terre-Neuve. Je vous expliquerai les objectifs de la stratégie de renouvellement annoncée le 12 avril, ses éléments ainsi que les prochaines étapes.
À la deuxième page, on voit que le processus a débuté à Terre-Neuve-et-Labrador en mai 2006. Notre ministre et mes collègues et moi avons participé à St. John's, Terre-Neuve, à un sommet organisé par le premier ministre et auquel avaient été conviés les principaux intervenants et dirigeants communautaires de la province dans le but de discuter de la situation du secteur de la pêche.
En mai 2006, la conjoncture, notamment la conjoncture économique, s'est assombrie dans l'industrie en raison de l'étau coût-prix dont a parlé M. Bevan. Un consensus s'est dégagé lors du sommet quant à la nécessité de certains changements. Le statu quo n'était pas une option.
À l'issue du sommet, le premier ministre et notre ministre ont lancé l'initiative de renouvellement de l'industrie Canada-Terre-Neuve. Au cours de l'été, des groupes de travail, composés de représentants du gouvernement et de l'industrie, ainsi qu'un comité directeur, que j'ai coprésidé avec le sous-ministre des Pêches et de l'Aquaculture de la province de Terre-Neuve-et-Labrador, ont examiné les différents aspects de l'industrie. Ces groupes de travail ont cerné un certain nombre d'options que nous avons soumises dans un rapport d'étape au ministre et au premier ministre à la fin août 2006.
À l'automne, nous avons rendu public un document de discussion fédéral-provincial indiquant les défis auxquels l'industrie est confrontée à Terre-Neuve-et-Labrador ainsi que les principales questions de politique devant être réglées avant d'aller plus loin. Nous avons lancé de vastes consultations. L'équipe du renouvellement a tenu 40 réunions, surtout dans des milieux ruraux. Nous avons rencontré des pêcheurs, des travailleurs d'usine, des associations, des maires, des municipalités, des conseils, soit un ensemble représentatif des intervenants de l'industrie de la pêche à Terre-Neuve-et-Labrador. Nous avons surtout voulu connaître l'avis sur la stratégie de renouvellement des principaux intéressés, soit les pêcheurs et les travailleurs d'usine. Les membres de notre équipe ont aussi participé à 40 autres séances communautaires que le syndicat des pêcheurs a tenues dans toute la province. Au total, 80 séances ont eu lieu. Les consultations ont donc été vastes.
La collaboration entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial a été très étroite dans le cadre de cette approche fédérale-provinciale de l'océan à la table. Un large consensus s'est dégagé quant à la nécessité de changements, mais quant à la façon de les évaluer. Cela a évidemment compliqué les choses pour nous. Nous avons cherché à proposer des recommandations équilibrées au ministre et au premier ministre, mais cet équilibre n'a pas plu à tous. La stratégie de l'océan à la table a été annoncée le 12 avril à St. John's, Terre-Neuve.
Les défis auxquels fait face l'industrie sont semblables à ceux qui se posent à l'échelle mondiale. Nous avons distingué des défis externes et des défis internes. Les défis externes sont ceux sur lesquels nous n'exerçons pas beaucoup d'influence. M. Bevan a déjà abordé quelques-uns d'entre eux. Ainsi, le dollar canadien a renchéri de 41 p. 100 en quatre ans, et nous vendons presque tous nos produits en dollars américains. Cela a eu un impact phénoménal sur les profits de l'industrie. Le prix du carburant, pour sa part, a augmenté de 55 p. 100 pendant la même période, créant un étau coût-prix. La compétitivité internationale de l'industrie a aussi diminué par rapport à celle de l'Islande et de la Norvège, et en particulier de celle des producteurs à faible coût comme la Chine et le Vietnam. La concurrence que nous livre la Chine est en particulier très vive.
L'industrie fait aussi face à une variation cyclique des prix du marché. Notre industrie est particulièrement vulnérable à la variation des prix de deux espèces de crustacés, le crabe et la crevette. La pêche côtière à la crevette a débuté à Terre-Neuve-et-Labrador en 1997 comme pêche fraîche. La transformation de la crevette se fait à terre dans les usines. Depuis 1997, le prix au débarquement est passé d'environ 65 cents la livre à 42 cents la livre et la plupart des pêcheurs diraient que ce prix est en-dessous du point de rentabilité. Cette année, pour la première fois depuis 1997, le prix de la crevette a légèrement augmenté.
Le prix du crabe, pour sa part, a tendance à osciller sur une période de deux à trois ans. En 2004, le crabe se vendait 2,40 $ la livre, et l'an dernier, seulement 96 ¢ la livre, ce qui représente une baisse phénoménale. Cette année, le prix est remonté pour atteindre environ 1,75 $ la livre.
Le principal point sur lequel je voudrais insister, c'est que l'industrie doit pouvoir faire face à ce genre de fluctuations et s'y adapter. Je vous expliquerai un peu plus tard certaines des stratégies qui sont à envisager pour lui permettre de le faire.
M. Bevan a traité des tarifs et de l'accès au marché. La crevette nordique en particulier, que nous vendons surtout sur le marché de l'Union européenne, fait l'objet d'un tarif de 20 p. 100, ce qui nous défavorise grandement.
On constate aussi une augmentation mondiale des produits de l'aquaculture. Au moment du début de la pêche côtière à la crevette en 1997, la quantité de crevettes consommées à l'échelle mondiale s'élevait à 3,5 millions de tonnes par année. L'an dernier, la demande en crevettes a atteint six millions de tonnes. La contribution de l'aquaculture à ce secteur a triplé, passant de 800 000 tonnes métriques à 2,4 millions. La courbe de l'offre et de la demande et les prix pour la crevette peuvent difficilement être stables avec une telle croissance de l'offre mondiale en crevettes.
L'équipe de renouvellement s'est aussi penchée sur les défis internes de l'industrie.
Le président : J'aimerais une précision. Deux facteurs interviennent, n'est-ce pas? Il y a d'abord l'augmentation de la demande et de l'offre à l'échelle mondiale et ensuite les nombreux obstacles à se dresser devant ceux qui veulent s'adonner à l'aquaculture.
M. Follett : Je crois que M. Bevan a déjà soulevé le problème que pose la réglementation fédérale et provinciale au Canada.
Le président : Je voulais mentionner ce problème auquel il faudra s'attaquer dans l'avenir. Je ne veux pas vous interrompre plus longtemps, mais je voulais simplement soulever le problème puisqu'il mérite que nous y consacrions un peu plus de temps.
Le sénateur Meighen : Le domaine de l'aquaculture est un domaine de compétence partagée entre le gouvernement fédéral et les provinces.
M. Follett : Dans le cadre des discussions sur le renouvellement de l'industrie, nous avons surtout insisté sur les questions qui relèvent de notre compétence. Il y a d'abord la question de la fluctuation et du déclin de la ressource. Il faut bien admettre à cet égard le rôle non négligeable de la nature. Nous devons gérer nos stocks de façon durable et nous faisons un lien dans toute la stratégie entre la viabilité de l'industrie et sa pérennité. Lorsqu'on gère un secteur continuellement en crise, il est ardu de faire les choix difficiles qui s'imposent et qui sont liés à la gestion de la ressource.
Nous avons constaté un déclin dans certaines pêches. À l'échelle nationale, nous voyons que la pêche au poisson à nageoires ne représente plus qu'un petit pourcentage de l'industrie. De nombreux stocks de poissons de fond continuent de faire l'objet d'un moratoire à Terre-Neuve-et-Labrador et nous exploitons maintenant plutôt le secteur des crustacés.
Pour ce qui est de la structure et de la capacité de l'industrie, il y a notamment la question de la relation entre les pêcheurs et les transformateurs ainsi que celle de la vive concurrence pour le marché portuaire. Dans le secteur de la pêche côtière à Terre-Neuve-et-Labrador, les transformateurs s'occupent de la transformation et les pêcheurs, de la récolte, mais il n'y a pas d'intégration verticale de l'industrie. Cela pose un défi pour ce qui est de l'établissement du prix au marché portuaire et du choix du début de la saison de pêche.
D'autres défis sont liés au caractère saisonnier de l'industrie. Les navires et les usines de transformation ne sont pas pleinement exploités en raison de ce facteur. L'une des statistiques sur lesquelles nous nous sommes fondés est le nombre de jours en mer. La taille d'un palangrier va de 35 à 65 pieds et ce bateau pêche le crabe et la crevette au large des côtes. En 2006, la flottille de bateaux de pêche à la crevette a passé en moyenne 37 jours en mer. Il s'agit d'un taux d'utilisation très faible pour un actif d'une valeur allant de un million à 2,5 millions de dollars. La flottille dont le taux d'utilisation a été le plus élevé est la flottille de pêche au crabe et à la crevette. Cette flottille a passé 64 jours en mer. Le taux d'utilisation des actifs est donc très faible et la surcapacité, elle, élevée.
Pour ce qui est du recrutement et de la rétention de la main-d'œuvre, nous avons examiné les données portant sur les pêcheurs et les travailleurs d'usine. Voici une autre statistique intéressante. Dans l'industrie de la pêche, les exploitants d'entreprise sont considérés comme des pêcheurs professionnels désignés. À Terre-Neuve-et-Labrador, la moitié d'entre eux ont plus de 50 ans. Ce qui est aussi intéressant de savoir, c'est que seulement 5 p. 100 des exploitants pêcheurs professionnels désignés sont âgés de moins de 35 ans. Les données démographiques portant sur les travailleurs d'usine sont semblables. La conclusion à laquelle nous sommes parvenus, laquelle a été renforcée par nos consultations, c'est que la pêche n'est plus une activité attrayante pour les jeunes. Nous avons d'énormes difficultés à attirer les jeunes dans l'industrie de la pêche en raison de son caractère hautement saisonnier et imprévisible ainsi que des bas salaires offerts.
Le salaire moyen d'un travailleur d'usine de transformation du poisson à Terre-Neuve-et-Labrador est de 8 000 $ par année. Si l'on ajoute à cela les paiements de transfert et les prestations d'assurance-emploi, un travailleur d'usine touche en moyenne 16 000 $ par année. Ce n'est donc pas une industrie qui est attrayante pour les jeunes, et certainement pas pour les plus talentueux d'entre eux. C'est une donnée alarmante pour l'avenir puisque l'industrie de la pêche fait concurrence à d'autres industries pour le recrutement des jeunes.
L'industrie de la pêche à Terre-Neuve-et-Labrador a beaucoup changé depuis l'imposition du moratoire sur les stocks de poisson de fond et de morue et depuis la conversion à la pêche aux mollusques et crustacés. L'industrie est maintenant plus saisonnière qu'elle ne l'a jamais été.
J'ai déjà traité de la question de l'accroissement et de la stabilisation des revenus.
La question de la conception des navires nous a été continuellement présentée comme une question importante, surtout en raison des règles sur le remplacement des navires qui remontent maintenant à deux décennies. Une mauvaise conception des navires, notamment en ce qui touche leur taille et leur capacité à pêcher au large des côtes, est ce à quoi il faut attribuer l'augmentation du caractère saisonnier de l'industrie. Cela n'a pas favorisé le débarquement d'un produit de qualité. Cela ne permet pas aux pêcheurs de travailler au tout début ou à la toute fin de la saison lorsque la demande peut être plus élevée ou lorsque le poisson, pour des raisons biologiques, peut être de meilleure qualité.
Bon nombre de navires ont une forme bizarre. On a soulevé la question de leur sécurité et de leur confort, mais surtout de leur consommation de carburant. Des recherches ont été faites pour notre compte à l'Université Memorial sur la conception type des navires côtiers et sur les améliorations qui pourraient être apportées à la flottille. Les simulations qui ont été faites ont permis d'établir qu'il serait possible à un navire de faire des économies de carburant allant de 40 à 50 p. 100 s'il était bien conçu.
Pour ce qui est de la commercialisation, j'ai déjà abordé la question de la concurrence pour le marché portuaire. Il est difficile d'amener les transformateurs et les pêcheurs à conclure des ententes de collaboration sur les marchés lorsque la concurrence est si vive au quai. L'absence de collaboration en ce qui touche la commercialisation du produit est certainement l'un des grands obstacles que nous voyons à l'optimisation de la valeur de la ressource.
La stratégie que nous avons annoncée le 12 avril vise à mettre en œuvre l'approche de l'océan à la table. Elle facilitera la conversion vers une industrie durable, économiquement viable et compétitive à l'échelle internationale. Voilà l'objectif de la stratégie de renouvellement. Elle permettra de préserver l'indépendance des flottilles côtières et s'intégrera à une approche régionale en ce qui touche la transformation du poisson. J'en dirai davantage à ce sujet lorsque j'aborderai les questions qui relèvent de la province. La stratégie répondra aussi aux besoins des travailleurs déplacés et améliorera la santé et la sécurité au sein de l'industrie. Ce sont les parties prenantes, et non pas nous, qui ont soulevé la question de la santé et de la sécurité.
La dernière chose que j'aimerais dire au sujet de l'objectif global de la stratégie, c'est qu'elle offrira, aux pêcheurs en particulier, davantage de choix quant à la façon d'exploiter leur entreprise. Comme M. Bevan l'a fait observer, cela suppose l'adoption par Pêches et Océans Canada d'une nouvelle approche. Je crois que le ministère adoptera une approche moins paternaliste. Nous accorderons davantage de choix aux pêcheurs en particulier, et nous évaluerons les résultats de cette approche.
Enfin, j'aimerais signaler que la plupart des mesures que nous avons annoncées sont volontaires. C'est aux pêcheurs eux-mêmes de décider s'ils veulent adhérer à certains des changements de politique qui sont proposés et en faire profiter leur entreprise.
Pour revenir aux principaux éléments de la stratégie annoncée par Pêches et Océans Canada et relevant du gouvernement fédéral, comme l'a indiqué M. Bevan, le premier de ces éléments est le renforcement des politiques concernant les propriétaires-exploitants et la séparation des flottilles. C'est un élément que réclamaient les pêcheurs comme condition à leur participation à la mise en œuvre de changements à l'industrie. Nous avons annoncé des politiques en vue de réduire la croissance des accords de fiducie conclus entre les transformateurs et les pêcheurs. Nous avons aussi prévu des dispositions permettant aux banques d'accepter les permis de pêche en biens affectés en garantie, un changement auquel les pêcheurs attachaient beaucoup d'importance.
Dans la province, nous avons aussi proposé de nouvelles politiques à l'égard des baux. Plus particulièrement, un grand nombre pêcheurs ont abandonné l'industrie, mais ils sont parvenus à louer leurs actifs.
Nous avons aussi proposé une politique d'absorption pour permettre l'auto-rationalisation de la pêche. Pour résumer les choses, il s'agit d'un changement important dans la politique des pêches dans la mesure où nous permettons maintenant à un pêcheur d'acquérir l'entreprise d'un autre pêcheur, ce qui était interdit jusqu'ici. La politique relative à l'absorption d'entreprises ne visait que les flottilles. Il existe à l'heure actuelle un plafond en ce qui touche l'absorption d'entreprises. Comme une entreprise sera absorbée par l'autre, il y aura une entreprise qui disparaîtra. Le ministère reprendra l'enregistrement du navire et, dans la plupart des cas, les permis de pêche à diverses espèces. Deux entreprises fusionneront pour n'en faire qu'une seule.
Nous avons aussi considérablement modifié la politique de remplacement des bateaux dont j'ai parlé plus tôt. Nous avons simplifié les règles de mise en œuvre de cette politique et nous avons créé essentiellement trois flottilles. Il y aura une flottille de bateaux de moins de 40 pieds de longueur et une flottille de bateaux de 40 à 65 pieds de longueur. La flottille côtière actuelle comportant des bateaux de moins de 65 pieds pourra se doter de bateaux d'une longueur maximale de 89 ou 90 pieds, ces bateaux convenant sans doute mieux à la pêche à la crevette et au crabe sur la côte nord-est où la pêche se pratique jusqu'à 230 milles au large des côtes.
Nous avons aussi éliminé les restrictions sur l'indice volumétrique qui figuraient dans l'ancienne politique sur le remplacement des navires. Un pêcheur peut maintenant concevoir son bateau à sa guise.
Nous avons également annoncé la conversion des permis provisoires pour la crevette en permis permanents. J'ai dit plus tôt que la pêche côtière à la crevette avait débuté en 1997 avec la participation de la flottille côtière à cette pêche. Des permis temporaires ont alors été accordés. Le 12 avril, le ministre a annoncé qu'il convertirait les permis temporaires en permis permanents, essentiellement pour permettre aux pêcheurs visés de participer à la politique d'absorption.
Comme M. Bevan l'a fait remarquer, nous avons aussi consenti des investissements récents pour améliorer la science halieutique et l'évaluation des stocks. Le ministre a annoncé à cet égard l'achat d'un nouveau navire de recherche de 75 millions de dollars pour la région de Terre-Neuve-et-Labrador.
La révision des droits de permis dont a parlé M. Bevan sera utile de même que l'exonération des gains en capital. Nos politiques sur l'absorption s'appuient sur des estimations types du niveau de produit auquel nous pouvons nous attendre dans cinq ans à l'issue de l'absorption des entreprises ainsi que sur les avantages que cela comportera pour les pêcheurs de Terre-Neuve. Nous prévoyons que l'allégement fiscal représentera de 50 à 60 millions de dollars au cours des cinq prochaines années. Cet allégement sera financé par les trésors fédéral et provincial dans une proportion de 60/ 40.
Dans le cadre de cette stratégie, la province de Terre-Neuve-et-Labrador a aussi annoncé un certain nombre d'éléments dont je vous parlerai brièvement. Je suis certain que la province fournirait volontiers des précisions au comité sur ces divers éléments.
Le renouvellement du secteur de la transformation repose sur le renouvellement de la politique de délivrance des permis aux usines de transformation, laquelle permettra une certaine consolidation dans le secteur. Cette politique énonce les règles en vertu desquelles la province décidera ou non d'activer un permis inactif en cas de fermeture d'une usine et précise les seuils de ressources pour la gestion, en fonction de critères raisonnables, de la politique de délivrance des permis aux usines de transformation.
J'ai aussi abordé la question des défis qui se posent en matière de commercialisation. La province a accepté de financer la création d'un Conseil de commercialisation des fruits de mer dans le but d'obtenir la participation des pêcheurs et des transformateurs à l'élaboration et à l'analyse d'options de commercialisation ainsi qu'à des campagnes promotionnelles portant sur les fruits de la mer de Terre-Neuve. Enfin, ce groupe donnera son avis sur les politiques fédérales et provinciales qui influent sur l'approche de l'océan à la table.
L'une des solutions qui nous a été proposée pour relever le défi que pose la compétition au marché portuaire, c'est de permettre la tenue d'enchères dans les ports pour permettre aux pêcheurs de vendre leurs produits aux transformateurs. On procédera à un essai à cet égard sur la côte sud de la province dans le secteur 3Ps de la morue. La participation aux enchères sera volontaire dans ce secteur. Il n'y aura pas d'enchères cette année pour la crevette nordique, mais nous songerons à cette possibilité pour l'an prochain.
De concert avec la politique d'absorption, la province a annoncé un programme d'amélioration des garanties de prêts. Il existe déjà un programme semblable mis en œuvre par l'entremise des banques, mais celles-ci ont maintenant accepté d'augmenter le niveau des prêts qu'elles sont prêtes à consentir. Elles modifient leurs critères pour permettre le refinancement des accords de fiducie.
Enfin, les critères régissant le financement des entreprises dans le cadre de la politique d'absorption seront modifiés. Les pêcheurs souhaitant participer à la politique d'absorption pourront ainsi compter sur une source de capitaux garantis par le gouvernement.
La province compte également mettre sur pied un Conseil sur la sécurité de l'industrie des pêches de Terre-Neuve-et- Labrador. Elle a aussi annoncé un certain nombre d'améliorations aux mesures de réduction de la main-d'œuvre qui s'appliqueront s'il y a des fermetures d'usines ou si d'autres problèmes se posent dans l'industrie.
Pour ce qui est des prochaines étapes, nous avons beaucoup de travail sur la planche dans la région de Terre-Neuve. Nous devons notamment arrêter les détails de la mise en œuvre de la stratégie avec les pêcheurs et les transformateurs. Les changements proposés sont complexes et représentent la première étape dans le renouvellement du secteur. Nous comptons entreprendre le processus des consultations au printemps auprès de ceux que nous pourrons joindre et ensuite auprès des gens du Nord qui sont toujours emprisonnés dans les glaces. Notre objectif est de poursuivre les consultations à l'automne et de mettre pleinement en œuvre ces politiques d'ici la fin de l'année civile.
Le sénateur Baker : Je vous remercie de vos présentations. Je tiens à souhaiter officiellement la bienvenue à l'amiral Murray et au président Bevan — je dis « président » parce que M. Bevan est président de l'Organisation des pêches de l'Atlantique Nord-Ouest — deux hommes remarquables qui ont beaucoup contribué au développement de nos ressources océaniques. Ils sont des hommes d'exception et j'aimerais leur rendre officiellement hommage.
M. Follett mérite aussi des félicitations parce qu'il est responsable de la région la mieux gérée de Pêches et Océans Canada. Cette région est un modèle de gestion des pêches à l'échelle mondiale, ce que la plupart des gens reconnaissent d'ailleurs.
Je comptais poser des questions sur le système de surveillance des navires, ou SSN. J'aborderai sous peu la question des nouvelles annonces, mais peut-être me permettrez-vous de vous lire d'abord les trois questions que je voulais poser sur le système de surveillance des navires. Vous pouvez soit y répondre immédiatement, soit fournir au comité une réponse écrite d'ici 24 ou 48 heures.
Ma question est très simple. Je sais que c'est la règle qui s'applique, mais pourquoi exige-t-on que les navires canadiens rentrent au port pour faire réparer leur système de surveillance des navires si celui-ci est en panne alors qu'on n'exige pas la même chose des navires étrangers dans la zone de l'OPANO, l'Organisation des pêches de l'Atlantique Nord-Ouest?
Deuxièmement, j'aimerais savoir ce que dit la loi au Canada à cet égard? De quelle loi s'agit-il au juste? Je n'arrive pas à la trouver. J'aimerais que quelqu'un me dise exactement où se trouve la disposition pertinente qui ne doit pas comporter plus d'une phrase.
Comme les pêcheurs paient des frais mensuels pour ce service, ne devraient-ils pas être assurés de son bon fonctionnement? Le fait pour le pêcheur de payer des frais d'utilisation mensuels ne devrait-il pas suffire pour l'assurer du fonctionnement du SSN?
Voilà les trois principales questions que j'avais à poser à ce sujet. Vous pouvez y répondre plus tard si vous le souhaitez.
J'aimerais aussi poser une autre question. Je viens de me rendre compte qu'un changement remarquable a été apporté à la politique sur les pêches. Au cours des dix dernières années, un secteur a pris beaucoup d'ampleur tout comme le secteur immobilier, et c'est celui du courtage des permis de pêche. Ce secteur connaît un grand essor dans l'est du Canada. Un pêcheur peut mettre en vente un permis, un courtier intervient et offre ce permis sur l'Internet, négocie un accord de vente et demande ensuite à Pêches et Océans Canada si l'acheteur répond aux conditions voulues pour le transfert du permis. La vente est ensuite finalisée.
Comme les banques et les entreprises s'en sont mêlées, des groupes commerciaux sont maintenant propriétaires de nombreux permis. Les banques considèrent les pêcheurs comme les garants du prêt. Les permis appartiennent à des groupes commerciaux, mais ils sont émis au nom d'un pêcheur. Ce système existe au Canada depuis dix ans.
Je suis fort heureux que le ministre ait maintenant décidé d'imposer une règle. À mon avis, il s'agit d'une décision judicieuse qui ne plaira cependant sans doute pas au milieu des affaires et aux banques. Les pêcheurs ne pourront plus céder leurs permis ou les transférer à des sociétés auxquelles ils appartiennent.
Il s'agit d'un énorme changement sur lequel la Cour suprême du Canada est appelée à se prononcer dans le cadre de l'application de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité. L'affaire à l'origine du renvoi devant la Cour suprême est Banque royale du Canada c. Saulnier. Je ne sais pas si vous la connaissez. Elle met en cause un pêcheur ayant fait faillite dont les permis de pêche ont été saisis pour être vendus sur le marché libre.
Un permis ne pourra plus être transféré à une société, mais seulement à un pêcheur. Quand le nouveau système, celui qui crée, si je ne m'abuse, le statut de pêcheur professionnel indépendant aux fins de propriété des permis, sera-t-il en place? Le ministre a annoncé cet excellent système, mais je présume qu'il faudra un certain temps avant que les mesures administratives nécessaires à sa mise en œuvre aient été prises. Quand le système sera-t-il en place? Quels documents les pêcheurs devront-ils signer pour confirmer qu'ils ne céderont pas leurs permis à une société?
Voilà donc les deux questions que je voulais poser, la première sur le SSN et l'autre, sur la catégorie du pêcheur professionnel indépendant.
M. Bevan : Pour ce qui est du SSN, le Canada rattrape en fait son retard sur le reste du monde. Il s'agit d'une condition d'obtention du permis aux termes de la Loi sur les pêches. Ce système nous permet non seulement de gérer le volume des captures, mais aussi la durée des fermetures de zones éventuelles.
Le système dans la zone canadienne est assez complexe; le délai pour la présentation du rapport est d'une heure. Dans les zones de l'OPANO, le problème des fermetures de zones ne se pose pas de la même façon. Ces zones sont en effet très grandes et il est plus rare que leur fermeture soit imposée. Un accord international fixe à deux heures le délai pour la présentation du rapport.
La flottille dans la zone de l'OPANO est une flottille hauturière. Si un problème est constaté au port, le bateau a un mois pour le régler. Dans la zone canadienne, l'agent des pêches décide si le navire doit rentrer au port ou non. À Terre-Neuve, 28 navires sur 900 ont été rappelés au port pour qu'ils réparent leur SSN.
Les pannes sont peu nombreuses dans la zone de l'OPANO, et les systèmes sont réparés dès que les navires rentrent au port. Les systèmes sont en panne pendant moins de 1 p. 100 des jours de mer. En cas de panne, le navire doit évidemment présenter un rapport manuel et nous pouvons aussi établir l'emplacement des navires par d'autres moyens, notamment par la surveillance aérienne.
Quant aux changements qui visent à préserver l'indépendance de la flottille côtière, nous essayons de permettre aux pêcheurs d'avoir accès à des capitaux en faisant en sorte que les banques puissent leur consentir des prêts. Ce sont les accords conclus à la cachette qui aboutissent à des accords de fiducie que nous voulons désormais empêcher. Dans ce genre d'accords, une entreprise ou une usine de transformation avance les capitaux pour obtenir un permis au nom d'un pêcheur. C'est cependant la société qui exploite le permis. La nouvelle politique mettra fin à ce genre de pratique.
Les pêcheurs professionnels désignés devraient recevoir au début de la semaine prochaine la lettre que nous leur destinons. Nous demanderons aux pêcheurs d'indiquer s'ils ont conclu un accord de contrôle. Ils devront faire une déclaration écrite devant un agent de permis désigné et confirmer que les renseignements fournis sont exacts.
Si le ministère des Pêches et Océans apprend que contrairement à ce qu'il a déclaré, un pêcheur a conclu un accord de contrôle, il prendra les mesures qui auront été expliquées dans la lettre dont je viens de parler. Les pêcheurs qui feront de fausses déclarations s'exposeront à des poursuites aux termes de la Loi sur les pêches. Il se peut aussi que le permis ne soit tout simplement pas émis ou que la situation soit corrigée autrement. Le nouveau système entre en vigueur dès maintenant.
Les pêcheurs auront six mois pour faire ces déclarations et à compter de la déclaration d'un accord de contrôle, ils auront un délai de sept ans pour régler le problème, et notamment pour devenir des pêcheurs désignés indépendants.
Le sénateur Baker : Aucun transfert ne sera permis. Vous nous dites donc que depuis l'annonce du ministre, aucun transfert de permis n'est possible à moins que ce soit à un pêcheur indépendant, c'est-à-dire à un pêcheur qui ne fait pas partie d'une société, n'est-ce pas?
M. Bevan : C'est juste.
Le sénateur Baker : Qu'en est-il de la question que je vous posais, monsieur Follett, en ce qui touche la disposition législative relative au SSN?
M. Follett : L'exigence relative au SSN est une condition d'obtention d'un permis aux termes de la Loi sur les pêches. Les permis temporaires sont donc délivrés aux termes de la Loi sur les pêches.
Vous avez cependant demandé que je vous lise la disposition précise. Je pourrais le faire, si vous le souhaitez.
Le sénateur Baker : Il ne devrait s'agir que d'une ligne. D'après vous, cette exigence devrait être clairement énoncée sur le permis de pêche. Je ne pense pas que ce soit plus d'une ligne.
M. Follett : Plusieurs lignes et paragraphes traitent de cette exigence sur le permis. Je n'ai pas ce passage devant moi.
Le sénateur Baker : Non. Vous m'avez mal compris.
Lorsqu'une personne est accusée d'une infraction aux termes de la Loi sur les pêches, c'est parce qu'il y a violation présumée du règlement. La contravention précise la disposition qui a été violée. Je vous pose la question — et je serai honnête avec vous — parce que je suis ce dossier depuis des années. La majeure partie de la jurisprudence récente est surtout constituée d'affaires entendues en Nouvelle-Écosse ou au Nouveau-Brunswick. Dès son départ du port, le pêcheur devait mettre en marche son SSN et le système devait demeurer en marche jusqu'à son retour au port sous peine de s'exposer à des poursuites. À un moment donné, cette exigence a été modifiée, monsieur Follett, et il doit y avoir une phrase sur le permis indiquant que le SSN doit être en marche du début de la saison à la fin de celle-ci, et ce même si le pêcheur ne pêche pas.
Je pose la question parce que les pêcheurs sont mécontents. Lorsque le bateau est en cale sèche, leur épouse ou leur conjointe éteint le système parce que cela leur permet de faire des économies. Le temps d'antenne coûte très cher chaque mois. Ne recevant pas de signal pendant que le bateau est en cale sèche, le MPO intente alors des poursuites contre eux. C'est ce qu'on appelle une infraction de responsabilité stricte. Autrement dit, aucune défense n'est admissible comme dans le cas de l'excès de vitesse.
J'aimerais pour ma propre gouverne connaître cette phrase. À un moment donné la loi a été modifiée pour qu'il soit possible de porter ces accusations aberrantes.
M. Bevan : Cela a fait l'objet de poursuites devant les tribunaux. L'accusation qui est portée est celle de violation des conditions du permis.
Le sénateur Baker : Oui, c'est juste. J'aimerais simplement connaître exactement quel est le libellé de cette accusation.
M. Bevan : L'accusation elle-même sera violation des conditions du permis. Les conditions du permis sont lues au pêcheur au moment où il lui est délivré et des explications lui sont fournies à cet égard. Si le pêcheur ne respecte pas les conditions de son permis, il s'expose à des poursuites.
Cette condition a été contestée devant les tribunaux qui en ont confirmé la validité. Je crois que c'est devant un tribunal du Nouveau-Brunswick que le ministère a eu gain de cause.
J'attire aussi votre attention sur le fait que lorsque nous rencontrons les pêcheurs pour discuter avec eux des plans de pêche et des conditions d'un plan de gestion intégrée, ils sont libres de nous faire connaître leur avis. Il s'agit d'espèces, et l'on peut donner en exemple le cas du thon, qui peuvent rapporter gros sur le marché noir. Certaines flottilles ont réclamé des mesures de contrôle. Voilà qui explique la condition figurant sur le permis.
Le sénateur Baker : La loi actuelle au Canada exige-t-elle donc que le système de SSN soit en marche du début à la fin de la saison de pêche?
M. Bevan : Les conditions des permis peuvent varier en fonction des pêches. Cette exigence s'applique dans le cas de certaines pêches où l'on a constaté de nombreux cas de violation du règlement. Elle peut ne pas s'appliquer à toutes les pêches. Tout dépend de la nature de la pêche et des consultations que nous avons eues avec les pêcheurs. Les conditions s'appliquant à une pêche en particulier reflètent les consultations qui ont eu lieu sur l'établissement des conditions des permis.
Le sénateur Baker : La flottille de pêche au crabe et à la crevette se conforme de façon générale au règlement. Est-il vrai que la loi exige que la flottille de pêche hauturière au crabe utilise le SSN? C'est M. Follett qui en parlait. Il faut que le SSN soit en marche du début à la fin de la saison. J'aimerais que vous nous répondiez par un oui ou par un non.
M. Murray : Comme M. Bevan l'a dit, cela varie d'une pêche à l'autre. Nous serions heureux de fournir au comité les conditions qui régissaient l'utilisation du SSN et qui s'appliquaient en 2006 ou qui s'appliquent cette année aux termes de différents permis. Je ne voudrais pas vous induire en erreur par mégarde parce que j'ignore vraiment ce qu'il en est pour certaines pêches en particulier. Nous vous fournirons volontiers cette information.
Le sénateur Adams : Vous traitez de certains changements qui ont été apportés. Le comité n'est pas encore saisi du projet de loi sur les pêches. Ces changements figurent-ils dans le projet de loi?
M. Murray : Je demanderai à M. Bevan de vous donner des précisions quant au lien entre la Loi sur les pêches et les annonces qui ont été faites le 12 avril puisque ces changements relèvent entièrement du ministre et des diverses provinces qui participent à cette initiative.
Toutes les mesures visent cependant à moderniser le cadre de réglementation, à améliorer la conservation, à favoriser une gestion commune et à assurer une plus grande stabilité et transparence en ce qui touche l'attribution des permis. Nous pensons qu'il vaudrait mieux, quel que soit la forme que prendra le projet de loi C-45, que ces changements de politique s'inscrivent dans le contexte d'une nouvelle Loi sur les pêches. M. Bevan voudra peut-être vous donner davantage de précisions.
M. Bevan : Comme on l'a fait remarquer, les politiques visent à permettre aux pêcheurs de déterminer leur propre avenir. Elles ont pour objectif de favoriser la conservation, d'assurer la stabilité de l'accès aux ressources et aux permis et d'accroître la valeur des ressources halieutiques.
Ces changements peuvent être apportés par l'entremise de la politique, mais la loi actuelle accorde un pouvoir discrétionnaire absolu au ministre sans cependant encadrer ce pouvoir. Le mot « conservation » n'y figure pas. Il n'y est pas non plus question de l'approche fondée sur la prudence ni des écosystèmes. La stabilité de l'accès et de l'attribution des permis n'est assurée que par l'entremise de la politique parce que la loi permet au ministre de changer tout cela du jour au lendemain. La nouvelle loi encadrera le pouvoir discrétionnaire accordé au ministre. La transparence sera assurée et des règles régiront la façon dont le ministre peut exercer son pouvoir discrétionnaire. Pour l'instant tout cela ne se reflète que dans les politiques. Un ministre pourrait tout chambouler à sa guise. Un ministre pourrait changer le processus d'attribution sans avoir à suivre un processus quel qu'il soit. À notre avis, une nouvelle loi assurera une plus grande stabilité du point de vue juridique et reflétera davantage l'orientation que nous comptons prendre.
Nous ne pouvons pas non plus conclure des ententes exclusives avec les flottilles de pêche. Les flottilles ne peuvent nous faire savoir les sanctions qui, selon elles, devraient s'appliquer aux diverses infractions possibles. La cogestion avec les flottilles n'est pas possible parce que la Loi sur les pêches ne le permet pas. Nous ne pouvons pas sanctionner certains comportements et nous ne pouvons pas non plus conclure de véritables ententes de gestion conjointe. Nous ne disposons pas de ces pouvoirs. Bien que le ministère souhaite être moins paternaliste, c'est tout de même lui qui doit prendre toutes les décisions et le ministère doit l'appuyer. Nous ne pouvons pas travailler avec des organismes du domaine des pêches qui souhaiteraient exercer une plus grande influence sur l'application des règlements. En effet, la loi actuelle ne nous le permet pas. Tout cela sera cependant possible aux termes de la nouvelle loi.
Le sénateur Adams : À la huitième diapositive, vous faites une suggestion qui est sans doute bonne pour le Nunavut. On voit en vert « Examen des pêches au Nunavut ». Faut-il en conclure que nous ne savons pas ce qui se passe pour l'instant dans cette région? Allez-vous examiner la situation dans cette région dans l'avenir? Ces nouvelles politiques s'appliqueront-elles dans le Nunavut?
M. Bevan : Ces politiques s'appliqueront dans l'ensemble du Canada atlantique, y compris dans le Nord. Nous voulons dire que nous devons évaluer la situation au Nunavut en ce qui touche les quotas, les parts attribuées ainsi que la gestion des pêches. Nous devons surtout nous pencher sur le désir du Nunavut d'avoir un accès accru aux ressources. Nous nous sommes engagés à étudier toutes les pêches à cet égard et à établir comment répondre aux aspirations du Nunavut.
La question de l'indépendance de la flottille côtière ne revêt pas autant d'importance pour l'instant au Nunavut où cette flottille n'existe pas, le gros des quotas appartenant à la Baffin Fisheries Coalition. C'est à cette coalition que le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut a recommandé que les quotas soient attribués. La structure qui existe dans cette région n'est pas la même que celle dans le Sud.
Le sénateur Adams : J'ai trois autres questions à poser et vous en avez reçu copie. Mon anglais laisse parfois à désirer, mais vous avez ces questions par écrit. Pendant la campagne électorale, le premier ministre a promis d'acheter trois brise-glace pour la région de l'Arctique. Cet achat n'est pas prévu dans le budget de cette année.
Ma deuxième question a trait à un examen qui a eu lieu l'an dernier. Après une visite dans le fjord Grise, pour étudier notamment la question des frais de navigation, j'ai assisté à la réunion du 19 octobre 2006 du Comité de la Chambre des communes qui portait sur l'élimination des frais pour les services de navigation maritime au Nunavut.
Le ministre ne s'est pas engagé auprès du comité à éliminer ces frais. Nous apprenons maintenant que les frais dans le Nord, dans la région au-dessus du 60e parallèle, ont été éliminés en 1997. Or, la Garde côtière a continué de percevoir ces frais jusqu'en 2002. Je ne sais pas où l'argent est passé. Ma question porte sur les frais de navigation. Des frais de navigation sont imposés à l'égard de chaque chargement. Vous pouvez regarder la carte. Si vous imposez des frais de navigation jusqu'à Iqaluit et Frobisher Bay, cela ne représente qu'à peu près un dollar. Dans le fjord Grise, les frais sont supérieurs de 20 p. 100. La Chambre des communes a éliminé ces frais en 1997, mais nous apprenons maintenant que le Conseil du Trésor les a perçus jusqu'en 2002.
Nous sommes retournés l'an dernier au fjord Grise et nous avons appris que la facture d'épicerie annuelle du ménage moyen est 28 000 $. Les expéditeurs doivent payer des frais de navigation à la Garde côtière, ce qui explique que les frais d'expédition sont deux fois plus élevés. Si ces frais n'existent plus, pourquoi le gouvernement continue-t-il à les percevoir?
M. Murray : En réponse à votre première question, les annonces faites le 12 avril portaient sur le renouvellement des pêches et ne traitaient pas de l'engagement pris par le gouvernement au cours de la dernière campagne électorale à l'égard de l'achat d'un brise-glace. Dans le budget 2006, le gouvernement a cependant annoncé la première étape du remplacement de la flotte de la Garde côtière. Il s'agissait de remplacer quatre navires de patrouille semi-hauturiers, de doter la Garde côtière de deux navires de recherche scientifique pour les pêches et de quatre navires de patrouille semi- hauturiers qui participeront avec la GRC à la surveillance du système des Grands Lacs et de la Voie maritime du Saint- Laurent, soit dix navires au total. La deuxième phase du remplacement de la flotte de la Garde côtière est prévue dans le budget 2007. Le budget comporte un premier investissement de 276 millions de dollars, dont 80 à 90 millions de dollars serviront à acheter des navires chargés d'assurer la sécurité. Dans le budget 2007, 324 millions de dollars ont été affectés au renouvellement de la flotte de la Garde côtière, ce qui permettra d'acheter quatre navires semi-hauturiers ainsi qu'un nouveau navire de recherche des pêches et un grand navire de recherche océanographique.
Le renouvellement de la Garde côtière est donc en voie de se réaliser. Environ 750 millions de dollars ont donc été affectés à cette fin dans les deux budgets, le remplacement de certains navires étant jugé prioritaire. Les brise-glace de la Garde côtière font partie du programme de remplacement, mais aucune annonce n'a encore été faite à cet égard.
Le 12 avril, le ministre a fait une deuxième annonce portant sur les nouveaux navires dont je viens de parler et sur l'endroit où ils seraient déployés. Il a dit que deux brise-glace lourds quitteraient Halifax, l'un, le Terry Fox, pour St. John's en 2008 et l'autre, le Louis S. St-Laurent, pour Argentia en 2009. Ils se rapprocheront ainsi de leur région d'opération. Nous pourrons poursuivre les rénovations à l'Institut d'océanographie de Bedford, Halifax, et renouveler le reste de la flotte par l'achat des nouveaux navires dont j'ai parlé.
Les annonces n'ont donc pas traité de façon précise de l'engagement à l'égard du brise-glace polaire, mais il a été beaucoup question du renouvellement de la flotte de la Garde côtière et du redéploiement des brise-glace.
Pour ce qui est de votre question portant sur les frais de service maritime, le ministre a annoncé un examen de ces frais. Il a demandé au commissaire de la Garde côtière canadienne d'étudier la question avec des représentants de l'industrie. Il a aussi demandé que des représentants du Nord fassent partie de ce processus.
Je serai heureux, madame la présidente, de vous fournir davantage de précisions sur cette question et de répondre par écrit de façon plus complète aux questions du sénateur Adams. Le processus est en cours, comme on l'a annoncé, et aucun autre intervenant ne doit participer à cet examen.
Le sénateur Meighen : On peut caractériser l'aquaculture comme un statu quo qui n'est pas viable.
M. Bevan semble être d'accord avec cette affirmation. Corrigez-moi si je me trompe.
Dans le document que j'ai devant les yeux, on caractérise l'aquaculture comme étant une industrie qui n'a pas atteint son plein potentiel. Cette industrie est aussi confrontée à un cadre réglementaire complexe, au partage des compétences entre Pêches et Océans Canada et les provinces et à la mise en œuvre de politiques qui visent davantage à optimiser l'emploi qu'à rendre l'industrie efficace ou compétitive.
Vous parlez ensuite de sommets, de forums, de tables rondes et de consultations. Je crois que toutes ces consultations durent depuis de nombreuses années et je voudrais que vous m'assuriez que des progrès réels sont faits pour assurer la clarté et la certitude dans cette industrie.
Voici un exemple des difficultés qui se posent. Contrairement à ce qui se passe aux États-Unis, les aquaculteurs canadiens ne sont pas tenus de faire rapport des poissons qui s'échappent de leurs enclos. La loi ne les oblige pas à le faire. Si un grand nombre de poissons s'échappent des enclos, cela peut avoir de graves problèmes et contribuer à propager des maladies dans les stocks de poisson sauvage.
Pourriez-vous nous dire quelque chose d'encourageant au sujet des progrès réalisés dans le domaine de l'aquaculture de façon générale?
M. Murray : Il s'agit d'un secteur qui revêt beaucoup d'importance pour le pays et nous serions heureux que le comité se penche sur la question.
À notre avis, l'industrie n'atteint pas son plein potentiel. Des discussions ont eu lieu avec les provinces au cours de l'année en vue de l'établissement d'un accord-cadre en matière d'aquaculture. Cet accord lierait le gouvernement fédéral, les provinces et l'industrie et préciserait le cadre réglementaire à respecter. L'objectif visé est d'éliminer les chevauchements tout en assurant les Canadiens que l'industrie est réglementée de façon rigoureuse et scientifique dans le but d'assurer leur sécurité.
Nous croyons effectivement que la réglementation est trop complexe et que cela pose de grandes difficultés pour l'industrie. Je ne suis pas certain que ce que je viens de dire rassurerait le Canadien moyen, en particulier dans certaines régions du pays, et notamment en Colombie-Britannique. Il faut certainement s'appuyer sur des données scientifiques. L'accord-cadre sur l'aquaculture traiterait du cadre réglementaire. Il traiterait aussi des investissements qui devront être faits par le gouvernement fédéral, les provinces, l'industrie et les milieux de recherche-développement. L'objectif visé serait de créer une infrastructure adéquate. Enfin, l'industrie jouirait aussi d'une certaine protection comme l'industrie agricole. L'industrie devrait évidemment investir dans un régime d'assurance risque pour protéger ses investissements à haut risque.
L'accord-cadre sur l'aquaculture a été élaboré de façon distincte et ne s'intègre pas à l'initiative dont nous avons parlé. Tout cela pour dire que beaucoup d'attention est accordée à l'aquaculture.
Ainsi, nous sommes tous conscients de la situation difficile au plan emploi sur la côte sud de Terre-Neuve. Ensemble, quelques ministères fédéraux, la province de Terre-Neuve et Cook Aquaculture ont investi l'an dernier 155 millions de dollars dans un grand projet d'aquaculture, ce qui est une excellente nouvelle pour cette région. Le projet permet aux gens de la région de travailler dans le domaine des pêches. Nous avons établi un bon cadre réglementaire en collaboration avec la province de Terre-Neuve.
Quant à ce que vous disiez au sujet des sommets, le dialogue et les consultations sont certainement de mise. J'insiste cependant sur le fait que la plupart des sommets qui ont eu lieu à l'issue des annonces faites le 12 avril ont porté sur le secteur de la pêche sauvage.
Quant au fait que tous ces sommets ne donnent pas beaucoup de résultats, comme je l'ai dit, ils ont surtout porté sur le secteur de la pêche sauvage. À notre avis, le premier sommet qui a eu lieu en mai à Terre-Neuve et les trois ou quatre autres qui l'ont suivi n'étaient pas comme les autres. Soixante-cinq personnes représentant tous les paliers de gouvernement ainsi que les collectivités et tous les intervenants de l'industrie y ont participé. Il y a ensuite eu à Terre- Neuve les plus vastes consultations que nous ayons connues. Encore une fois, l'accent a été mis sur le secteur de la pêche sauvage. Il est cependant évident que nous devons aussi faire des progrès dans la mise en œuvre d'un accord- cadre sur l'aquaculture, qu'il faut poursuivre les recherches scientifiques dans ce domaine et qu'il faut aussi améliorer le cadre réglementaire.
Le sénateur Meighen : À la quatrième page du document qui porte sur l'approche de l'océan à la table, on lit que l'aquaculture n'a pas atteint son potentiel. Pensez-vous au secteur de la pêche sauvage?
M. Murray : Non, cela nous paraît juste en ce qui touche l'aquaculture. Compte tenu du potentiel halieutique du Canada, nous estimons que le potentiel de l'aquaculture n'est pas atteint sur la côte sud de Terre-Neuve ou en Colombie-Britannique.
Comme M. Bevan l'a fait observer, l'aquaculture est plus développée dans d'autres pays. En Norvège, par exemple, l'aquaculture est maintenant la seconde industrie du pays. Au Chili, c'est aussi une grande industrie, bien que je ne sache pas quelle en est l'importance relative. Dans ces deux pays, l'aquaculture continue de se développer. Au Canada, la croissance de l'industrie, au départ importante, s'est stabilisée. Nous devons améliorer le cadre réglementaire et nous devons aussi apaiser les craintes que les Canadiens pourraient avoir en approfondissant nos recherches. Nous devons dans ce dossier collaborer avec toutes les parties prenantes.
Le sénateur Meighen : Ce cadre sur l'aquaculture fait-il actuellement l'objet de négociations actives?
M. Murray : On ne peut pas dire qu'il y a actuellement des négociations relatives aux immobilisations, mais l'accord- cadre est le fruit du travail du Conseil canadien des ministres des Pêches et de l'Aquaculture, qui se réunit régulièrement sous la présidence, à tour de rôle, du ministre fédéral ou du ministre de l'une des provinces. Le Conseil compte divers groupes de travail et l'un de ces groupes a élaboré l'accord-cadre sur l'aquaculture.
Chacune des provinces qui s'intéressent à l'aquaculture est habilitée à négocier une entente. L'entente-cadre existe déjà, mais le gouvernement fédéral ne nous a pas encore donné le feu vert pour négocier avec les provinces bien que le ministre attache évidemment beaucoup d'importance à la question.
Le sénateur Meighen : Est-ce une décision de politique?
M. Murray : C'est une décision de politique que le gouvernement du Canada doit prendre. Entre-temps, nous poursuivons les discussions sur le cadre réglementaire.
M. Bevan : À notre avis, le gouvernement a la responsabilité de réglementer l'industrie de l'aquaculture de façon à en assurer la viabilité. Nous pensons atteindre cet objectif. Nous devons aussi réfuter les accusations en ce qui touche les poissons qui s'échappent ou le tort causé par le pou du poisson aux stocks sauvages. Il nous faut donc prouver qu'aucun tort n'est causé et nous devons nous appuyer pour cela sur des données scientifiques. C'est un processus qui exige beaucoup de temps.
L'aquaculture n'a pas atteint le même niveau de développement que d'autres types d'activités agricoles axées sur la production de protéines. La difficulté, c'est que le régime réglementaire est complexe. Pour ne donner qu'un exemple, une personne qui voudrait ouvrir une concession aquicole devra s'adresser à Transports Canada pour obtenir une approbation en vertu de la Loi sur la protection des eaux navigables. Elle devra s'adresser à notre ministère pour les questions liées à l'habitat du poisson. Il faudra ensuite que l'emplacement fasse l'objet d'une évaluation environnementale et soit approuvé. Et il y a encore d'autres étapes. L'exploitant doit aussi s'adresser à l'Agence canadienne d'inspection des aliments pour qu'elle confirme la qualité du poisson et à Agriculture et Agroalimentaire Canada pour faire approuver la nourriture donnée au poisson et sa méthode de commercialisation. Vous voyez que le processus est très long. Une personne peut même dépenser jusqu'à 200 000 $ et consacrer deux ans à toutes les démarches nécessaires et finalement se voir refuser l'autorisation d'ouvrir une concession. Le processus est vraiment très exigeant. Il faut qu'il soit plus prévisible et plus simple. L'objectif du cadre réglementaire est en effet d'assurer la viabilité de l'agriculture et de veiller à ce que l'écosystème ne soit pas endommagé de façon irrévocable. Voilà l'objectif que nous visons par l'accord-cadre sur l'aquaculture.
Le sénateur Meighen : Qui détermine la quantité et le type de poissons pouvant être élevés dans chaque enclos?
M. Bevan : C'est dans le cadre du processus du choix du site que cette décision est prise. Je vous signale qu'il existe à cet égard des codes de déontologie au Nouveau-Brunswick qui précisent ce que doivent faire les exploitants, notamment lorsque des poissons s'échappent des enclos. À certains endroits, le poisson est vendu dès qu'il atteint un an. Les enclos sont ensuite laissés en jachère pendant un an pour éviter la propagation des maladies d'une génération à l'autre.
De nombreuses mesures sont prises pour améliorer la qualité du produit. L'industrie de l'aquaculture sur les deux côtes est gérée de façon rigoureuse pour en assurer la viabilité et elle est très compétitive à l'échelle internationale. Notre réglementation est parmi la plus rigoureuse au monde. C'est cependant très difficile de prouver la fausseté de certaines allégations.
M. Murray : L'industrie est sans doute moins bien acceptée en Colombie-Britannique que dans le reste du pays. Dans cette province, le premier ministre a créé un comité parlementaire, présidé par l'opposition, dont le mandat est d'étudier l'aquaculture. Le comité a déjà tenu des audiences et a entendu divers témoins. Je crois qu'il doit présenter son rapport en juin. Ce rapport est susceptible de présenter de l'intérêt pour le comité s'il est bien présenté à la date prévue.
[Français]
Le sénateur Robichaud : Vous parlez d'un programme de garantie de prêt amélioré et il est indiqué dans l'annonce du 12 avril dernier qu'il s'agit d'une amélioration de l'accès aux prêteurs traditionnels comme les banques en facilitant l'utilisation des permis comme garantie.
Quelle emprise les banques pourront-elles exercer sur le permis lorsqu'il est utilisé en guise de garantie?
M. Bevan : Nous voudrions donner aux pêcheurs l'occasion d'obtenir l'argent d'une autre source. Présentement, ce sont les prêteurs du domaine des pêches qui ont l'habitude de donner l'argent aux pêcheurs pour acheter les permis.
Le sénateur Robichaud : De prêter et non pas de donner.
M. Bevan : Oui. Nous voulions établir dans la politique la possibilité pour un pêcheur d'aller à une banque afin d'obtenir l'argent nécessaire pour acheter le permis de pêche. Ce faisant, nous voudrions mettre en place un processus par lequel le pêcheur et la banque doivent signer le transfert à un autre pêcheur. Nous espérons ainsi que la banque puisse prêter l'argent au pêcheur parce que c'est impossible pour le pêcheur d'obtenir l'argent et après cela de vendre le permis de pêche à un autre pêcheur sans l'approbation de la banque. J'espère que cela va donner la possibilité de diversifier les sources d'argent pour les transferts de permis de pêche.
Le sénateur Robichaud : Mais ce faisant, les pêcheurs ne donneraient-ils pas à la banque le pouvoir d'exercer une certaine influence? Advenant que le pêcheur qui a négocié éprouve des difficultés, cette banque ne pourrait-elle pas dire à ce pêcheur que son permis doit être transféré — surtout dans le programme de combinaison deux pour un — à un tel parce qu'il fait des bonnes affaires?
M. Bevan : Non, le but est d'établir un processus par lequel le pêcheur doit obtenir l'approbation de la banque avant qu'il puisse vendre le permis de pêche à un autre pêcheur. C'est impossible pour la banque d'avoir un permis de pêche.
Le sénateur Robichaud : Je comprends et ce n'est pas ce que je vous dis. Je vous dis que la banque peut exercer des pressions sur le pêcheur en difficulté afin qu'il vende à un autre pêcheur si ce pêcheur en question fait des bonnes affaires avec la banque. Et alors le pêcheur n'est plus libre, là.
M. Bevan : Oui, mais la banque peut exercer des pressions sur quelqu'un afin qu'il vende la maison pour obtenir l'argent nécessaire s'il y a un problème. C'est la même situation ici avec les pêcheurs. La banque peut exercer des pressions sur le pêcheur afin qu'il vende le permis de pêche si le pêcheur n'est pas capable de payer les frais, c'est vrai
Le sénateur Robichaud : Oui, ils peuvent l'encourager à vendre, mais aussi l'encourager à vendre à une telle personne plutôt qu'à une autre?
M. Bevan : Peut-être, mais l'intérêt de la banque est d'obtenir l'argent. C'est possible qu'elle doive exiger du pêcheur de vendre le permis de pêche, mais la banque n'a pas un grand intérêt concernant la personne qui va acheter le permis de pêche. Je pense que c'est seulement d'obtenir leur argent. Ils ne peuvent pas obtenir plus que le pêcheur a emprunté.
Le sénateur Robichaud : Je comprends, mais j'essaie de comprendre la différence par rapport à la situation qui prévalait auparavant. Avant, c'était des acheteurs qui prêtaient aux pêcheurs, maintenant c'est les banques; les acheteurs font affaire avec les banques. Dans les petites communautés de pêche, tout le monde se connaît et se touche et ils savent tout ce qui se passe.
Je me demande juste de quelle façon c'est différent. Mais si les pêcheurs ont opté pour cela, c'est à eux que la décision revient. J'ai de la difficulté à voir comment cela va changer beaucoup de choses.
M. Bevan : Selon les banques, dans l'entreprise la partie la plus valable est le permis de pêche. Ils veulent avoir la possibilité de s'assurer que le permis de pêche demeure dans l'entreprise et qu'il ne soit pas vendu sans l'approbation de la banque. Sans le permis de pêche, c'est impossible d'avoir le même genre d'arrangement avec les pêcheurs.
Le sénateur Robichaud : Je comprends bien cela. Vous avez, pour une seule province, Terre-Neuve-et-Labrador, une politique de la combinaison de deux pour un. Cela veut dire quoi?
M. Bevan : Pour le moment, oui. Mais c'est possible pour les autres flottilles d'avoir des consultations et des discussions avec le ministère des Pêches et des Océans. Les pêcheurs à quotas individuels peuvent avoir la possibilité de bénéficier de la politique de combinaison. Cependant, il est vrai que c'est seulement à Terre-Neuve-et-Labrador, pour le moment, que les pêcheurs peuvent commencer les discussions en détail pour bénéficier de cette politique.
M. Murray : Mais le ministère est ouvert à des propositions du même type qui pourraient provenir d'autres flottilles du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Écosse.
Le sénateur Robichaud : Cela veut dire que ce sont deux licences pour pouvoir pêcher dans un seul bateau?
M. Bevan : Non. Si la politique de combinaison est appliquée, un des deux permis de pêche sera annulé. Il est nécessaire d'avoir des quotas individuels pour chaque permis de pêche et ces permis peuvent ensuite être combinés. Le pêcheur peut également utiliser le bateau de son choix pour pêcher.
Le sénateur Robichaud : Mais l'effort de pêche ne diminue pas quand même? On garde le même quota, n'est-ce pas?
M. Bevan : Oui, le même quota.
Le sénateur Robichaud : On les combine.
M. Bevan : Il y aura moins de bateaux, mais le pêcheur peut utiliser le bateau de son choix. À Terre-Neuve-et- Labrador, on peut utiliser un bateau de près de 90 pieds de longueur.
[Traduction]
M. Follett : Permettez-moi de préciser qu'il ne s'agit pas simplement d'un système d'absorption des permis, mais aussi des entreprises.
Deux pêcheurs ne peuvent pas décider d'acheter ensemble le permis de l'entreprise. Ils doivent aussi acheter toute l'entreprise. C'est l'absorption de l'entreprise qui donne lieu à l'absorption des permis et des quotas individuels.
Chaque pêcheur ayant le statut de pêcheur professionnel désigné peut acheter une entreprise et en être propriétaire. En se portant acquéreur d'une entreprise, le pêcheur acquiert aussi le permis d'enregistrement d'un navire. Il peut ainsi avoir accès à un ensemble de permis lui permettant de pêcher différentes espèces, et dans certains cas, à des quotas individuels.
Le programme que nous mettons en place dans la région de Terre-Neuve prévoit l'absorption de toute l'entreprise. Lorsqu'il y a absorption de toute l'entreprise, les permis peuvent aussi être absorbés. On ne peut pas simplement absorber les permis. La rationalisation du secteur des pêches suppose l'absorption d'un certain nombre d'entreprises. C'est dans ce cas que les permis deviennent absorbables si je peux m'exprimer ainsi.
À Terre-Neuve, tout ne doit pas se passer entre un pêcheur et un autre. Nous pourrions tous les trois acheter votre entreprise et l'absorber...
Le sénateur Robichaud : Non, vous ne pourriez pas le faire parce que vous n'êtes pas pêcheur.
M. Follett : C'est juste. Si je veux savoir si la personne à qui j'ai affaire est pêcheur, je regarde toujours ses mains. Je crois que nos mains nous trahissent.
Il ne s'agit pas d'une absorption de permis. C'est une précision importante. C'est un processus qui ressemble davantage à celui des quotas individuels transférables que nous connaissons déjà et qui s'appliquent dans d'autres provinces.
Le sénateur Robichaud : Dans ma région, dans le secteur de la pêche au homard, deux pêcheurs peuvent combiner leurs permis. Lorsque deux pêcheurs utilisent le même bateau, ils ne peuvent prendre à bord que 250 pièges, ce qui suffit habituellement pour dix semaines. La deuxième personne n'a droit qu'à 125 sièges de plus et non pas à 250. Qui a pris cette décision? Est-ce le ministère ou les pêcheurs de la région?
M. Bevan : Je ne suis pas certain de l'origine de la décision. Nous ne prenons habituellement pas de décisions semblables sans d'abord consulter les pêcheurs. Je ne sais pas si c'est eux qui ont proposé cela ou s'ils y ont donné leur consentement. Nous pouvons nous renseigner si vous le souhaitez.
Le sénateur Robichaud : Je n'ai pas entendu qui que ce soit se plaindre de la situation, mais on m'a dit que c'était ce qui se passait. Pourquoi le pêcheur n'a-t-il pas droit à 250 pièges? La saison est limitée et on retire ainsi un bateau.
M. Bevan : Je ne suis pas certain que ce soit ce qui se passe vraiment. Il y aura des discussions plus poussées. Compte tenu en particulier de la situation dans le détroit de Northumberland, nous devons examiner de près ces politiques.
M. Murray : Nous vous serions reconnaissants de nous donner davantage de précisions parce que dans la région du golfe à tout le moins, nos gens pensent que ce système va s'appliquer à d'autres pêches comme celle du homard. Comme M. Bevan, je crois qu'il faut aller de l'avant. Cette approche et l'exonération de gains en capitaux de 750 000 $, qui se traduira par un gain pour le pêcheur de 180 000 $, favoriseront l'auto-rationalisation.
Les représentants du ministère dans la région du golfe on pensé que cela présentait de l'intérêt dans le cas de la pêche au homard au moins compte tenu de la situation dans le détroit de Northumberland et dans d'autres pêches. Le Conseil pour la conservation des ressources halieutiques rendra public un rapport cet été. Le système de contrôle ne fonctionne pas nécessairement à 100 p. 100. Nous verrons ce que le Conseil aura à dire à ce sujet.
Nous aimerions adapter ce système à d'autres pêches.
Le sénateur Robichaud : Le ministère compte-t-il transférer des permis de pêche au homard ou à d'autres espèces aux pêcheurs autochtones? C'est une question qui suscite beaucoup d'intérêt dans ma région parce que les transferts ont été nombreux. Lorsque les transferts battaient leur plein, le prix d'un permis de pêche au homard est passé de 60 000 $ à entre 200 000 $ et 250 000 $. Maintenant que les transferts sont terminés, le prix a baissé.
Certaines rumeurs veulent qu'il y ait d'autres rachats de permis. Pouvez-vous nous dire quelque chose à ce sujet ou préférez-vous ne rien dire?
M. Bevan : Le budget montre bien que nous ne sommes pas dans la même situation qu'au début de ce qu'on peut appeler l'initiative en réaction à la décision Marshall. Le programme de transfert de permis aux Premières nations était alors beaucoup plus important.
Certains programmes sont mis en œuvre dans le cadre de la Stratégie des pêches autochtones, et certains autres découlent du budget. C'est peut-être ce sur quoi portent ces rumeurs. Il n'y aura cependant pas de transfert de permis sur une grande échelle comme cela a été le cas après la décision Marshall, en 1999. Les circonstances ne sont pas les mêmes. Je ne pense pas que les capitaux soient suffisants pour avoir un effet perturbateur sur le marché.
La présidente suppléante : Cela met fin à notre réunion d'aujourd'hui. Je remercie les représentants du ministère de nous avoir fourni cette information.
Le comité ne se réunira pas la semaine prochaine.
La séance est levée.