Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires étrangères et du commerce international
Fascicule 12 - Témoignages
OTTAWA, le mercredi 21 février 2007
Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et ducommerce international se réunit aujourd'hui à 16 heures pourélire un président et étudier l'efficacité de la promotion canadienne de la démocratie à l'étranger; le rôle du Parlement dans ce contexte.
[Français]
François Michaud, greffier du comité: En tant que greffier de votre comité, il est de mon devoir de présider à l'élection d'un président pour le comité.
[Traduction]
Je suis maintenant prêt à recevoir des motions à cet effet.
Le sénateur Corbin: Les instances qui ont tenu des discussions vont poursuivre leurs pourparlers pour un certain temps et, par conséquent, je propose que l'honorable sénateur Peter Stollery soit le président suppléant du comité pour la réunion d'aujourd'hui.
M.Michaud: Y a-t-il d'autres candidatures? Je n'en vois pas.
Le sénateur Di Nino: Que se passe-t-il? Je fais référence au fait que le sénateur Stollery soit élu président pour aujourd'hui seulement.
Le sénateur Andreychuk: Je pensais que, advenant la démission d'un président, le vice-président le remplaçait systématiquement pour une journée.
Le sénateur Corbin: Ce n'est pas automatique.
Le sénateur Andreychuk: Nous étions donc dans l'erreur dans quelques autres comités. Nous devrons parler au sénateur Milne.
La motion s'applique à la réunion d'aujourd'hui.
M.Michaud: Je vais relire la motion. Il est proposé par l'honorable sénateur Eymard Corbin que l'honorable sénateur Peter Stollery soit le président suppléant du comité pour la réunion d'aujourd'hui.
Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Le sénateur Peter A. Stollery (président suppléant) occupe le fauteuil.
Le sénateur Corbin: Les whips et les chefs ont parlé et continuent de communiquer ensemble. C'est une question provisoire.
Le sénateur Di Nino: Je tiens à préciser que j'ai posé une question de mon collègue, qui a été entendue par d'autres membres, et il semble que personne n'avait la moindre idée de ce qui se passait. C'est correct. Je ne vois pas d'inconvénient à ce que le sénateur Stollery soit le président suppléant pour cette réunion seulement, mais les membres auraient dû recevoir des directives à cet égard. Quand j'ai posé la question, la plupart des membres en face de moi ont également exprimé qu'ils ignoraient de quoi il retournait.
Le sénateur Downe: Les règles sont assez claires pourtant. Je crois que conformément à l'article 88 du Règlement du Sénat, le comité choisit son président. Nous n'avons pas de président, mais avons maintenant un président suppléant.
Le président suppléant: Permettez-moi de vous lire la procédure 783 du Beauchesnes, La procédure et les usages de la Chambre des communes:
S'il y a vacance de la présidence, le greffier du comité voità l'élection d'un nouveau président. Le vice- président ne joue ici aucun rôle (Comité permanent des finances, ducommerce et des questions économiques, Procès-verbaux et témoignages, 10 juillet 1973, p. 39:4).
La réunion peut maintenant débuter.
J'aimerais signaler, au cas où je l'oublierais, que le comité se réunira le 27 février 2007 mais n'aura pas de président après aujourd'hui. Par conséquent, la prochaine réunion du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international se déroulera le 27 février 2007 lorsque le Sénat lèvera la séance, mais pas avant 17 heures. L'ordre du jour comprendra l'élection d'un président et l'étude des questions qui pourraient survenir occasionnellement se rapportant aux relations extérieures, généralement au sujet de l'Afghanistan. Les témoins qui comparaîtront à cette réunion sont M.Christopher Alexander, représentant spécial adjoint du Secrétaire général des Nations Unies pour l'Afghanistan, et M.James Appathurai, porte-parole de l'OTAN. La séance pourrait être télévisée.
Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs?
Des voix: D'accord.
Le président suppléant: Avant que nous commencions la séance d'aujourd'hui, j'aimerais remercier, au nom de tous les membres du comité, le sénateur Segal pour son excellent travail en qualité de président du comité.
[Français]
Bienvenue à cette séance du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international. C'est la deuxième séance concernant notre nouvel ordre de renvoi qui porte sur l'efficacité de la promotion canadienne de la démocratie à l'étranger et le rôle du Parlement du Canada dans ce contexte.
[Traduction]
Aujourd'hui, nous souhaitons la bienvenue à M. Donovan, directeur de la recherche au Centre d'étude sur la démocratie de l'Université Queen's. Il a publié plusieurs articles au sujet de la promotion de la démocratie, y compris The Democracy Canada Institute: A Blueprint, avec Thomas Axworthy et Lieslie Campbell, ainsi qu'unnombre d'articles concernant les transitions démocratiques en Afghanistan et au Taïwan.
Nous avons également avec nous, par vidéoconférence de Washington, D.C., M.Leslie Campbell. Il a organisé des missions d'observation d'élections dans la région et a fourni de la formation sur les compétences que doivent posséder les candidats politiques, les fonctionnaires et les électeurs pour prendre part à la vie démocratique. M.Campbell est chercheur au Centre for the Study of Democracy de l'Université Queen's et était auparavant chef de cabinet du leader du Nouveau Parti démocratique.
David Donovan, directeur de la recherche, Centre d'étude sur la démocratie, Université Queen's: Monsieur le président et honorables sénateurs, je vous remercie de m'avoir invité pour vous parler de la promotion du Canada en matière de développement démocratique à l'étranger. Je remplace le président du Centre for the Study of Democracy, M.Thomas Axworthy. J'ai coécrit le mémoire de recherche du Centre sur la démocratie au Canada. J'espère donc pouvoir apporter une contribution à vos importants travaux de recherche sur le développement démocratique.
Je parlerai de la promotion de la démocratie en tant qu'objectif; du rôle du Canada au chapitre de la promotion de la démocratie à l'étranger dans un cadre comparatif, en faisant ressortir les différents modèles d'organisations de promotion de la démocratie — plus particulièrement des partis politiques; et du rôle du Canada en matière de promotion de la démocratie.
La promotion de la démocratie en tant qu'objectif est l'un des concepts les plus contestés en sciences politiques avec ses nombreuses connotations normatives. Par conséquent, il peut être délicat de favoriser le développement démocratique puisqu'une évaluation d'une transition vers la démocratie laissera nécessairement place à un débat sur le statut démocratique que doit atteindre un pays donné.
Le théoricien politique Robert Dahl soutient que la représentation est un élément essentiel d'une démocratie et que, pour avoir véritablement une démocratie, les institutions politiques qui favorisent cette représentation doivent être établies et bien implantées. M.Dahl fait valoir que des élections libres et justes sont nécessaires à la représentation. Les partis politiques interviennent ordinairement à titre de représentants.
Dans son plus récent livre, intitulé Confronting the Weakest Link: Aiding Parties in New Democracies, le théoricien Thomas Carothers a fait l'affirmation suivante au sujet des partis politiques dans les démocraties:
Bien que la démocratie soit évidemment un corpus d'idées et de pratiques politiques en constante évolution qui prendra de nouvelles formes au fil du temps, il est difficile d'imaginer à l'heure actuelle une véritable démocratie — qui offre aux citoyens d'autres solutions politiques concrètes et une représentation à grande échelle de leurs intérêts — sans de tels partis politiques et de telles organisations.
L'appui aux partis politiques est alors essentiel pour aider un pays en pleine transition vers la démocratie.
Après la troisième vague de démocratisation, comme on l'appelle, plusieurs organisations internationales de promotion de la démocratie ont été créées et renforcées en Europe, en Amérique du Nord et dans de nombreuses nouvelles démocraties. Depuis cette troisième vague, la promotion de la démocratie occupe une place encore plus importante sur la scène internationale. Par ailleurs, la demande d'aide pour créer des démocraties demeure élevée dans le monde entier.
Je vais maintenant parler du cadre comparatif et montrer comment l'aide à la démocratie est structurée dans les pays développés.
Les organisations d'aide à la démocratie se divisent en trois grandes catégories: plus particulièrement, les partis politiques fondés sur les modèles allemands ou suédois, les organisations internationales ou multilatérales telles que l'Institut international pour la démocratie et l'assistance électorale (IDEA) établi à Stockholm, de même que les associations nationales de coordination ou les institutions multipartites comme le National Endowment for Democracy (NED) aux États-Unis, la Westminster Foundation for Democracy (WFD) en Grande-Bretagne ou le Netherlands Institute for Multiparty Democracy (IMD).
En matière d'aide à la démocratie, le modèle d'établissement d'un parti politique est un aspect important, surtout en Allemagne, mais aussi en Suède, en France, en Espagne et dans certains autres pays. Le modèle allemand d'établissement des partis, oustiftungen, a servi de modèle à la création de tous les partis et constitué la première étape à suivre pour les organisations d'aide politique qui sont devenues actives à l'échelle internationale dans les années 1970 et 1980. Les deux plus grandes fondations allemandes réalisent chacune des recettes annuelles dépassant les 100 millions d'euros, bien qu'elles répartissent leurs ressources entre les initiatives nationales et internationales.
Dans les années 1980, d'autres instituts de partis américains se sont joints aux modèles de partis politiques allemands, soit l'International Republican Institute (IRI) et le National Democratic Institute (NDI), même si, en raison de l'étendue vaste et multipartisane de ses travaux, le NDI ressemble beaucoup à une organisation multipartite.
Dans le cadre de projets internationaux d'aide à la démocratie, les fondations des partis politiques collaborent généralement avec des partis frères ayant des opinions politiques similaires dans des pays associés. Par exemple, l'Olof Palme Foundation en Suède, du Parti social-démocrate, fournit habituellement de l'aide au développement démocratique aux partis frères membres de l'Internationale Socialiste.
Les fondations des partis politiques jouissent d'une grande autonomie par rapport aux partis auxquels elles sont affiliées. De par la nature des fondations des partis indépendants, il est difficile de mener des efforts conjoints de promotion de la démocratie entre partis politiques.
Je vais maintenant aborder le modèle international/multilatéral. Le domaine de l'aide à la démocratie bénéficie d'un apprentissage commun et d'une coopération internationale. Il est donc utile de mettre en relief le modèle multilatéral. Parmi lesimportantes organisations, citons notamment l'Institut international pour la démocratie et l'assistance électorale, le World Movement for Democracy, le Programme des Nations Unies pour le développement, l'Organisation des États américains et l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe. L'Institut international pour la démocratie et l'assistance électorale, par exemple, auquel le Canada est membre, est une organisation multilatérale comptant des États membres sur tous les continents qui cherchent à appuyer une démocratie viable tant dans les nouveaux pays démocratiques que dans ceux qui le sont depuis longtemps. Il est important que le Canada soit représenté dans des entités multilatérales d'aide à la démocratie telles que l'Institut international pour la démocratie et l'assistance électorale pour apprendre des pratiques exemplaires d'autres organisations et les influencer. Cependant, la création d'un institut démocratique indépendant au pays ferait valoir les priorités du Canada en matière d'aide à la démocratie de façon plus directe.
Je passe maintenant au modèle multiparti et au modèle cadre. Les organisations qui correspondent le mieux au modèle d'internationalisation de l'aide à la démocratie et qui illustrent parfaitement le modèle de collaboration avec des partenaires internationaux et nationaux comprennent le NED, le Netherlands Institute for Multiparty Democracy et la Westminster Foundation. Tandis que le parti allemand «stiftungen» a servi de modèle à toutes les fondations des partis, le NED a servi de modèle aux organisations européennes et à d'autres organisations d'encadrement qui ont été formées au cours de la dernière décennie.
Les organisations multipartites, contrairement aux fondations des partis politiques, surveillent à des degrés divers les projets d'aide à la démocratie menés par des partis politiques en raison deleur composition multipartisane. Le Netherlands Institute forMultiparty Democracy, par exemple, opte pour une représentation proportionnelle des sept principaux partis politiques des Pays-Bas pour mener les activités des programmes tout en maintenant un effectif permanent neutre pour gérer l'approche politique générale. L'approche du Netherlands Institute for Multiparty Democracy a servi de modèle aux nouveaux partis créés récemment en Norvège et en Finlande.
Les organisations multipartites reçoivent du financement de base de sources publiques et conservent une certaine autonomie par rapport aux organismes gouvernementaux. Le modèle multiparti est particulièrement intéressant parce qu'il incorpore des éléments d'indépendance politique où les partis sont libres de collaborer avec des partis frères dans des pays partenaires et de créer des programmes en partenariat avec eux, et ce, tout en bénéficiant d'une vaste supervision d'une organisation d'encadrement pour assurer une cohérence politique.
Lorsque je présenterai le rôle du Canada en matière de promotion de la démocratie, je ferai ressortir un élément essentiel de notre mémoire sur la démocratie canadienne — qui est de fournir de l'aide aux partis politiques pour promouvoir la démocratie.
Notre analyse des organisations existantes de la communauté canadienne d'aide à la démocratie révèle clairement qu'aucune organisation n'accomplit beaucoup en matière d'aide aux partis politiques. Par exemple, même si l'ACDI dispose d'un énorme budget consacré à la gouvernance démocratique, aucun crédit n'est affecté au travail mené directement auprès des partis politiques. Le Centre parlementaire offre du soutien aux législatures pour bâtir des démocraties, mais parce qu'il doit se montrer neutre, il ne peut pas travailler officiellement de concert avec les partis politiques de ces législatures, ce qui pose évidemment certains problèmes.
Par ailleurs, la majorité des organisations canadiennes qui fournissent de l'aide à la démocratie à l'étranger ne canalisent pas uniquement leurs efforts vers un seul et même but, mais se donnent plutôt de nombreux objectifs et, parfois, l'aide internationale à la démocratie constitue seulement une part minime de l'ensemble de leurs budgets. Pour être plus précis, une institution comparable au Netherlands Institute for Multiparty Democracy ou au National Endowment for Democracy aux États-Unis fait défaut au Canada. Le Parlement devrait envisager d'ajouter cet élément à la communauté canadienne de promotion de la démocratie.
Je parlerai maintenant du rôle du Canada au sein de la communauté d'aide à la démocratie. En 2005, j'ai reçu une subvention pour étudier les modèles européens d'aide à la démocratie. J'ai appris que non seulement les organisations internationales d'aide aux partis politiques se multiplient dans de nombreux pays européens, mais aussi que leurs activités s'intensifient dans les Pays-Bas et en Suède et que de nouvelles organisations ont été créées en Finlande et en Norvège. La proposition de l'Institut canadien pour la démocratie a attiré une attention internationale et est évoquée par des organisations comme l'OCDE, le PNUD et l'Institut international pour la démocratie et l'assistance électorale. Les consultations internationales menées par le CSD — le Centre for the Study of Democracy de l'Université Queen's — ont montré clairement quand nous préparions le mémoire sur la démocratie au Canada que la communauté d'aide à la démocratie considère la création de la démocratie canadienne comme une initiative fort utile, particulièrement dans le secteur de l'aide aux partis politiques.
Permettez-moi maintenant de me pencher sur le rôle que doit jouer le Parlement. À Démocratie Canada, nous avons proposé un institut canadien pour la démocratie. Je vais mettre en évidence quelques-unes de nos principales recommandations. D'abord, Démocratie Canada devrait être une organisation indépendante qui relève du Parlement et ne devrait pas faire partie d'aucun ministère. Ensuite, les partis politiques du Canada devraient jouer un rôle de premier plan en matière d'aide à la démocratie à l'étranger. Démocratie Canada emploierait un réseau d'experts chargés d'offrir une expérience pratique dans le domaine du développement démocratique à ses homologues des pays associés. Les activités de Démocratie Canada seraient principalement axées sur l'aide aux partis politiques, y compris la formation sur les campagnes électorales, le processus électoral et les relations avec les médias, ce qui introduirait dans la politique étrangère canadienne un outil qu'elle n'a pas. Le programme comprendrait également l'augmentation de la transparence démocratique, la surveillance des élections, la promotion de la participation civique, surtout auprès des femmes, et de l'aide à la mise sur pied d'institutions démocratiques.
Enfin, Démocratie Canada aurait pour rôle de coordonner une délégation démocratique d'Équipe Canada en fonction des objectifs clés de la politique étrangère canadienne. Grâce à Démocratie Canada, notre pays pourrait fournir une aide coordonnée à un pays partenaire, qui comprendrait entre autres une aide aux partis politiques par les partis canadiens, une aide législative du Centre parlementaire, une aide électorale de la part d'Élections Canada. Démocratie Canada veillerait à canaliser les efforts de la délégation et serait responsable des programmes de démocratisation dans le pays partenaire.
Pour terminer, le Canada possède une vaste expérience des institutions et des processus démocratiques qui peut être partagée avec des démocraties émergentes. Un institut canadien pour la démocratie compétent établi dans un pays fédéral, pluriethnique, multilatéral et bilingue serait bien accueilli au sein de la communauté internationale de promotion de la démocratie et aurait une incidence considérable sur l'aide au développement des démocraties.
Le président suppléant: Monsieur Campbell, la parole est à vous.
Leslie Campbell, associé principal et directeur régional, Programmes pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord, National Democratic Institute: Je suis heureux de témoigner à votre comité par vidéoconférence. Je tiens à remercier le président et les membres du comité.
Je vous remercie également d'avoir mentionné mon lien avec le Canada. Je voulais dire d'emblée que, même si je travaille au National Democratic Institute depuis 13 ans, j'ai été chef du cabinet de MmeAudrey McLaughling au début des années 1990. J'ai également travaillé pour M.Gary Doer avant qu'il ne devienne premier ministre du Manitoba. Je suis d'ailleurs originaire du Manitoba.
C'est avec plaisir que je vais vous parler de mes deux grandes passions — la politique et la gouvernance au Canada — et du sujet d'aujourd'hui, l'importance de promouvoir la bonne gouvernance et la démocratie à l'étranger.
M.Donovan a fait référence au National Democratic Institute (NDI), une organisation que l'on peut qualifier d'institut d'aide aux partis politiques. Nous avons un lien avec le Parti démocrate américain, bien que nous n'ayons pas de rapports de gouvernance quotidiens avec lui. Notre lien est principalement attribuable à la présence d'un certain nombre de démocrates bien en vue qui siègent à notre conseil d'administration. L'ancienne secrétaire d'État Madeleine Albright en assure actuellement la présidence.
Plutôt que de répéter certains points que M.Donovan a couverts — comme il a été mentionné précédemment, nous avons coécrit un mémoire avec M.Tom Axworthy — je vais faire le point. M.Donovan a déjà présenté de solides arguments en faveur de la création d'un nouvel institut au Canada. Je veux faire valoir pourquoi il est important de réfléchir aux questions de démocratie et de bonne gouvernance et expliquer pourquoi le Canada est particulièrement bien placé pour faire la promotion de ces questions.
Sur la scène internationale, on se rallie de plus en plus à l'opinion que l'aide au développement traditionnelle risque plus d'être mal utilisée ou gaspillée dans des pays où les processus et les institutions démocratiques font défaut et où les principes de base de bonne gouvernance et la primauté du droit ne sont pas respectés. Je crois que nous avons tous entendu nombre de ces histoires — corruption, gaspillage, préjugés à l'égard de certains groupes ethniques dans une société, problème de «kleptocratie», comme on les appelle parfois, où les dirigeants utilisent l'aide et les projets de développement pour leur propre intérêt.
La plupart des agences de développement, y compris des organisations comme la Banque mondiale et d'autres entités menées par elles, ont pris conscience au fil du temps qu'une bonne gouvernance — je ne fais pas seulement allusion à des ministres compétents ou à des hauts dirigeants qualifiés, mais aussi à la démocratie, pour que les citoyens aient notamment des assemblées délibérantes comme les parlements pour assurer une surveillance — est cruciale pour une bonne utilisation de l'aide.
Le second point qui a été porté à notre attention au cours des quatre ou cinq dernières années, surtout après les attentats du 11septembre, est que l'absence de démocratie ou de possibilité departiciper aux systèmes politiques peut mener à l'exportation du terrorisme — dans le cas du 11 septembre — mais aussi à l'exportation de nombreux problèmes.
L'une des analyses fondamentales du 11 septembre qui, à mon avis, reste encore valable à ce jour, révèle que certains pays — dans le cas du 11 septembre, nous faisons référence plus précisément à l'Arabie saoudite et aux pays de la région du Golfe, mais nous pourrions en dire autant de nombreux pays — où les citoyens n'ont pratiquement pas voix au chapitre dans les décisions qui ont une incidence sur leur vie, où du ressentiment est suscité, où de la frustration s'accumule au fil du temps, où la répression et l'autoritarisme sont institués et pratiqués, ont tendance à exporter leurs problèmes. Je ne cherche pas à leur trouver des excuses, mais les extrémistes qui ne peuvent influencer la politique dans leur propre pays tentent d'influencer d'autres pays en commettant entre autres des actes de terrorisme.
Comme beaucoup d'entre vous le savent, l'une des réponses de nombreux pays dans le monde entier a été d'essayer d'encourager une plus grande ouverture et la fin des dictatures et des régimes autoritaires dans certaines régions du monde, dans l'espoir de donner davantage l'occasion aux citoyens de participer à leurs propres systèmes de gouvernance, ce qui pourrait réduire les tentations de s'en prendre à d'autres pays.
Je tiens à mentionner également que par démocratie, j'entends les principes de base de la démocratie. Je ne parle pas d'une sorte de croisade idéologique, mais d'élections en vue de choisir périodiquement des dirigeants. Je fais allusion aux parlements ou aux assemblées élues en tant que mécanisme de surveillance pour assurer une reddition de comptes. Je fais référence aux idéesfondamentales de libre accès à l'information, où les gouvernements devraient renseigner leurs citoyens sur les décisions qu'ils prennent et les dossiers qu'ils traitent tels que les budgets.
Il ne s'agit pas d'un concept occidental de la démocratie ou d'une pratique de démocratie. Dans le cadre de mon travail, que j'occupe depuis maintenant plus de 13 ans, il existe de multiples façons de réaliser les objectifs en matière de reddition de comptes, de surveillance et de solutions de rechange au pouvoir. Il n'y a pas qu'une seule façon d'y parvenir. Je crois sincèrement que chaque citoyen, chaque personne sur cette Terre — et je crois que les recherches publiques le confirmeront — désire avoir un certain droit de regard sur les décisions qui ont une incidence sur leur vie.
Pourquoi le Canada devrait-il s'engager? Je souligne que le Canada s'investit déjà activement. Par exemple, des Canadiens occupent des postes de cadre supérieur au sein de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et de l'Organisation des États américains. Le NDI, l'organisation pour laquelle je travaille, emploie 30 Canadiens à des postes de direction dans ses bureaux à l'étranger. En plus des 30 Canadiens occupant ces emplois, plus de 350 éminents Canadiens actifs sur la scène politique ont joué un rôle à un moment ou à un autre dans les programmes du NDI, y compris pratiquement tous les anciens chefs de parti au Canada.
Les Canadiens qui travaillent à la Banque mondiale et aux Nations Unies jouent un rôle de premier plan dans les programmes de gouvernance et de primauté du droit. Nous aidons à établir des politiques dans un certain nombre d'organisations. Beaucoup d'entre vous savent que M. Jean-Pierre Kingsley vient d'accepter un poste de président dans un organisme frère établi à Washington — la Fondation internationale pour les systèmes électoraux (IFES).
Nous contribuons déjà en tant que particuliers. Je soutiens qu'il serait excellent de mettre à profit une part de ce savoir-faire et de lui donner plus une réalité canadienne.
Pourquoi les Canadiens s'engagent-ils déjà autant? Je crois qu'il y a plusieurs raisons. D'abord, les Canadiens sont bien accueillis à l'étranger et les motifs du Canada, particulièrement dans le secteur de l'évolution politique, sont rarement contestés. Une organisation canadienne se fera bien entendre partout dans le monde dans les domaines de la démocratie et de la gouvernance. De notre vision multilingue, multiculturelle et tolérante émergent des personnes sensibles aux cultures et aux peuples étrangers qui évoluent dans des contextes étrangers.
Les partis politiques canadiens ont des modèles d'organisation populaire très avancés qui conviennent à de nombreux pays en développement. Contrairement aux grands partis européens, qui sont financés à même les fonds publics, ou aux partis américains qui dépendent des dons privés, les partis canadiens sont décentralisés et gérés par des bénévoles, disposent de budgets modestes constitués à la fois de fonds publics et privés et ont des limites de dépenses rigoureuses. Les partis politiques canadiens sont des membres importants et appréciés des principaux regroupements politiques internationaux soit l'Internationale libérale, l'Internationale socialiste et le Parti centriste. Ainsi, les partis et leurs chefs appartiennent déjà à un réseau international de militants politiques.
Le système parlementaire canadien et l'expérience des parlementaires actuels et anciens sont intéressants pour beaucoup à travers le monde. La plupart des démocraties émergentes ont opté pour un système parlementaire, et le modèle canadien est mieux adapté aux nouveaux parlements que le système coûteux et trop compliqué propre aux États-Unis.
L'Assemblée nationale du Québec peut aussi servir d'exemple dans des pays où le système politique ressemble au modèle français; et les assemblées législatives provinciales canadiennes se comparent à celles de nombreux pays en développement, de par leur taille et leur budget.
La fédération canadienne est un modèle de décentralisation, de partage du pouvoir et de respect des droits des minorités. Nous faisons beaucoup pour transmettre aux autres ce qui fonctionne au sein de notre fédération.
Le Canada est reconnu à l'échelle internationale pour organiser des élections justes et efficaces et tenir des registres électoraux fiables. Il y a beaucoup d'autres choses sur ma liste, mais je vais m'arrêter ici, pour ne pas abuser de votre temps. J'ai transmis des copies de mes notes au greffier, et je lui serais reconnaissant de bien vouloir vous les distribuer.
Le Canada a énormément de choses uniques à offrir. N'empêche que malgré son extraordinaire mine de talents comme je l'ai dit plus tôt, des centaines de Canadiens travaillent dans le domaine et ses contributions uniques, le Canada déploie des efforts tous azimuts, sous-financés et méconnus. Et peut-être plus important encore, les Canadiens n'éprouvent pas un fort sentiment d'appartenance envers leur pays et on ne fait pratiquement rien pour promouvoir la participation du Canada à l'avancement de la démocratie pour faire écho à notre identité internationale. Je suis persuadé que certains ne seront pas d'accord, mais croyez-en une personne qui travaille à l'étranger depuis 13 ans pour un organisme qui n'a pas beaucoup d'équivalents canadiens. Même s'il est admirable qu'autant de Canadiens se démarquent au sein d'organismes internationaux, on ne reconnaît pas pour autant les mérites du Canada.
Avant de conclure, j'aimerais insister sur quelques-uns des commentaires de M.Donovan sur ce que nous pourrions faire pour remédier à la situation, non seulement pour tirer parti de l'expérience des politiciens et des parlementaires canadiens, mais aussi pour rehausser l'image du Canada sur le plan de la promotion de la démocratie et dans la gouvernance, qui revêt une importance capitale. Nous avons proposé la création d'un institut; mais, en réalité, il est plutôt question de deux. Le premier serait un institut politique visant à mettre en valeur les idées et les talents au sein de nos partis politiques. Comme M.Donovan l'a souligné, le Canada est l'un des rares pays développés à ne pas disposer d'un pareil institut. Il vous a donné un aperçu de ce à quoi il pourrait ressembler.
Le deuxième serait évidemment ce que nous avons appelé provisoirement «Démocratie Canada», soit un organisme cadre qui prendrait en compte tous les efforts de démocratisation du Canada. M.Donovan a parlé du Centre parlementaire du Canada, et il y a aussi le Centre international des droits de la personne et du développement démocratique situé à Montréal, de même que d'autres organismes importants.
À notre avis, la création d'un nouvel institut, pour l'instant appelé «Démocratie Canada» donnerait beaucoup plus de poids et de visibilité aux efforts du Canada et nous serait d'une grande aide.
Je vous remercie de votre attention.
Le sénateur Segal: Merci, monsieur le président. Je tiens à remercier MM.Donovan et Campbell d'avoir pris le temps de venir témoigner aujourd'hui. Je voudrais revenir sur deux aspects de leur présentation. Tout d'abord, j'aimerais que vous m'expliquiez le lien entre le Parlement du Canada et ce que vous considéreriez comme une structure appropriée pour mener des efforts de démocratisation à l'étranger, et comment cela s'articulerait autour de l'institut politique dont vous parlez. Dans le document préparé par la Bibliothèque du Parlement à notre intention, on trouve une longue liste des divers organismes gouvernementaux qui mènent des activités de promotion de la démocratie, que ce soit sur les plans des droits de la personne, de la participation des femmes ou du processus électoral. On pense que ces organismes ont leur place et on les laisse se multiplier. Comment pouvons-nous être plus efficaces en n'ayant qu'un seul organisme axé sur le travail des partis politiques ou relevant directement du Parlement, comme le National Democratic Institute et la National Endowment for Democracy font avec le Congrès américain, et la Westminster Foundation avec le Parlement britannique?
J'aimerais que vous me disiez, selon vous, quel est l'avantage d'avoir un organisme qui relève directement du Parlement. Je sais que si nous voulons amener les États défaillants et ceux où règnent la division et la discorde à opter pour la démocratie plutôt que pour la guerre, nous devons parfois entrer en contact avec des gens qui ne sont pas nécessairement reconnus officiellement comme des interlocuteurs dignes de foi et des acteurs étatiques. Monsieur Campbell, j'imagine que c'est ce en quoi consiste votre travail au Moyen-Orient. Comme nous l'avons vu en Irlande du Nord et ailleurs, à un moment donné, des négociations entre des acteurs étatiques légitimes et des participants non étatiques étaient nécessaires pour amorcer le processus démocratique.
J'aimerais savoir si l'option parlementaire permettrait d'augmenter le nombre de personnes sur le terrain avec qui les Canadiens pourraient travailler en vue de promouvoir l'avènement de la démocratie. J'aimerais aussi connaître le lien entre l'option parlementaire et le processus de l'institut, qui vise avant tout la primauté du parti politique comme source de démocratisation, laquelle doit être forte dans un pays cible, sans quoi il sera pratiquement impossible d'y instaurer une démocratie durable. Je vous demanderais d'y réfléchir.
M.Campbell: À mon avis, il faut séparer le gouvernement desa politique. D'après mon expérience, un gouvernement, qu'ilsoit américain ou canadien, a de bonnes raisons d'avoir un programme. D'ailleurs, je dois travailler avec tous lesinterlocuteurs légaux et non violents. Toutefois, le gouvernement, son agence de développement — l'ACDI auCanada et l'USAID aux États-Unis —, ainsi que ses ambassadeurs doivent entretenir des relations avec le gouvernement étranger.
Si l'institut pour lequel je travaille relevait directement d'un ministère ou tentait de mettre en œuvre les politiques gouvernementales, mon partenaire serait forcément un ministre ou un premier ministre. Dans ce cas, si je voulais donner un séminaire ou offrir une formation à un parti de l'opposition, ce serait très difficile, non seulement du point de vue du gouvernement américain, mais aussi de celui du parti de l'opposition, qui pourrait ne pas approuver la politique gouvernementale américaine — je vais d'ailleurs parler brièvement des États-Unis, parce que je travaille pour un organisme américain. L'avantage d'avoir une relation sans lien de dépendance — et nous insistons sur le fait que cela devrait être avec le Parlement canadien et non avec le gouvernement canadien—, c'est que je peux me rendre dans un pays et dire que je ne représente pas la politique du gouvernement américain. Je suis là en tant que militant d'un parti politique canadien et je suis accompagné de mes collègues qui comprennent les partis politiques. Nous voulons négocier en tant qu'homologues politiques, sans aucunement promouvoir une quelconque politique gouvernementale — et cela aide beaucoup.
En deuxième lieu, comme vous l'avez dit, cela donne un peu plus de liberté aux partenaires. Au NDI, nous devons nous conformer à diverses lois et règles américaines. Si une organisation est fichée comme terroriste, nous n'allons pas faire affaire avec elle. Cependant, dans le cadre de notre travail au Moyen-Orient, nous avons rencontré, par exemple, des partis islamistes légaux et non violents. Nous avons entre autres travaillé avec le PJD au Maroc et son pendant au Yémen. En tant qu'organisme indépendant, nous sommes libres d'aller là-bas et d'établir des contacts, non pas avec des organisations terroristes, mais des organisations marginalisées avec lesquelles une organisation officielle, gouvernementale ne traiterait pas.
Nous avons cette possibilité parce que nous sommes financés par la National Endowment for Democracy, dont les fonds sont approuvés par le Congrès. En définitive, elle rend des comptes au Congrès et jouit d'une grande liberté. Je dirais qu'il est important de relever du Parlement et de garder ses distances vis-à-vis du gouvernement.
Concernant la question des partis politiques et l'importance de les renforcer, j'utilise souvent l'analogie de l'offre et de la demande. Les initiatives de développement dépendent en grande partie de la demande. Nous apprenons aux citoyens des pays en développement à exiger davantage de leur gouvernement et de leurs partis politiques. Nous ne travaillons pas du côté de l'offre— c'est-à-dire des gens qui élaborent les politiques, dressent les budgets et décident de la répartition et de l'utilisation des fonds. Nous les laissons se débrouiller seuls. Nous ne croyons pas que notre rôle consiste à développer la capacité des partis politiques — l'élément politique des parlements — c'est-à-dire à leur montrer comment adopter un projet de loi, examiner un budget, en établir les priorités et faire des compromis. Nous n'abordons pas du tout ces questions dans les pays en développement.
Les seuls organismes qui le font, ceux qui, comme vous, prennent des décisions concernant l'affectation des fonds et l'établissement des priorités, sont des organismes comme le NDI ou les instituts des partis. À ma connaissance, ce n'est pas ce que fait le Canada. Une part importante des fonds que nous consacrons à l'aide au développement sert à sensibiliser les gouvernements aux demandes des citoyens, mais ceux-ci sont incapables d'y répondre adéquatement, tout comme leurs parlements, d'ailleurs.
M.Donovan: À moins qu'un organisme indépendant soit créé, je peux dire sans me tromper qu'il serait pratiquement impossible de travailler avec des partis politiques. Dans le cadre de nos recherches pour Démocratie Canada, nous nous sommes entretenus avec des représentants de l'ACDI, qui nous ont dit qu'une grande partie de leur budget était consacrée à la gouvernance démocratique, mais qu'ils ne disposaient d'aucuns fonds pour travailler auprès des partis politiques, car un ministère se doit de rester neutre.
De plus, j'ai assisté à la conférence du Democracy Council, la semaine dernière à Ottawa, au cours de laquelle j'ai rencontré un conférencier du Centre parlementaire du Canada, dont le travail consiste à aider les assemblées législatives d'autres pays. Il a indiqué qu'on ne pouvait pas faire plus et qu'il nous était impossible d'entrer en contact avec les partis politiques des corps législatifs que nous aidons, parce que nous devons paraître neutres. C'est pourquoi nous avons proposé un organisme qui relève du Parlement.
Le sénateur Segal: À votre avis, quelles relations Démocratie Canada entretiendrait-il avec les différents groupes qui sont aussi là-bas et qui accomplissent un travail remarquable, notamment Droits et Démocratie Canada et le Centre parlementaire du Canada? Dans le meilleur des mondes, qui financerait l'organisme que vous proposez?
Pouvez-vous expliquer pourquoi les organismes croient qu'ils ne peuvent pas interagir avec des partis politiques à l'étranger? Qu'est-ce qui empêche les ministères de transiger avec les partis politiques? Ayant été vous-même sur le terrain, vous serez probablement en mesure de vous prononcer là-dessus.
M.Campbell: Il y a deux façons de définir ce que serait la relation entre un nouvel institut, si celui-ci était établi au Canada, et les autres organismes existants. Tout d'abord, ce que je maintiens depuis des années, c'est que des organismes tels que le Centre parlementaire du Canada et Droits et Démocratie ont du mal à obtenir des fonds. Ce sont de petits organismes. Selon moi, si l'on créait un organisme du type Démocratie Canada, celui-ci deviendrait un organisme-cadre qui financerait les autres organismes. Autrement dit, il offrirait une structure et une orientation stratégique. Il emploierait de nombreux experts ainsi que des parlementaires, des militants politiques, etc., et il aiderait à trouver du financement.
Cela ressemble à ce que fait la National Endowment for Democracy, qui regroupe des instituts centraux dont le Centre for International Private Enterprise, qui est membre de la Chambre de commerce américaine, et l'International Centre for Labour Solidarity, affilié à l'AFL-CIO. Celle-ci octroie aussi du financement à des organismes tels que le Centre for Study of Islam and Democracy et le Women's Learning Partnership et à une dizaine d'autres organismes américains.
Cet organisme n'a pas pour but de les chapeauter, mais plutôt de les aider. Le fait que la NED ait au sein de son conseil d'administration des figures politiques très puissantes — des sénateurs, des présidents de la Chambre de commerce et de l'AFL-CIO, et cetera. — donne plus de poids à leur travail.
Les organismes actuels devraient poursuivre leur excellent travail, mais un institut canadien pour la démocratie leur serait d'une très grande aide, d'autant plus qu'il assurerait leur financement.
Aux États-Unis, il y a le Bureau of Democracy, Human Rights and Labor au sein du Département d'État. Je pense qu'il existe un bureau semblable au ministère des Affaires étrangères du Canada, axé sur la démocratie. Il pourrait être responsable de plusieurs de ces organismes. C'est un autre modèle qui est tout aussi valable. Il s'agirait d'un bureau spécialisé dans la démocratie au sein d'un ministère fédéral — probablement celui des Affaires étrangères — qui s'occuperait des organismes actuels.
Personnellement, je pencherais davantage pour le modèle d'un organisme démocratique cadre puisqu'il mettrait les questions importantes à l'ordre du jour.
Quant à son financement, je dirais tout simplement qu'on devrait créer un institut qui relèverait du Parlement. Celui-ci recevrait un financement considérable — pas à l'américaine, mais substantiel — et deviendrait un organisme subventionnaire pour les organisations du secteur et mettrait en œuvre ses propres programmes.
Le sénateur Segal: Monsieur Campbell, vous ne nous avez toujours pas dit pourquoi les organismes gouvernementaux ne voulaient pas travailler avec les partis politiques.
M.Campbell: C'est une question qui me préoccupe beaucoup. Je ne veux pas paraître désinvolte, mais je dirais que les gens ont peur de la politique. Comme je l'ai déjà dit, je suis un animal politique. Quand je visite d'autres pays, je trouve que les partis politiques sont ce qu'il y a de plus utile et intéressant. Je travaille au Moyen-Orient, et beaucoup de gens sont surpris d'apprendre qu'il y a des systèmes multipartites dynamiques en place dans des pays comme le Maroc, l'Algérie, le Yémen et la Jordanie. Par contre, il est très difficile de convaincre un organisme de développement gouvernemental de travailler avec eux.
Je crois que dans une relation de gouvernement à gouvernement — en l'occurrence le gouvernement canadien ou américain —, ce genre d'organisme ne veut pas faire affaire avec des partis politiques. Il craint que cela vienne compromettre sa relation avec le ministre des Affaires étrangères, celui de la Planification ou du Développement. Pourtant, au Moyen-Orient ou ailleurs, notamment en Indonésie, au Sri Lanka et en Afghanistan, les partis politiques, comme au Canada, agissent à titre d'intermédiaires entre les citoyens et les décideurs politiques.
Je suis étonné de voir autant de gouvernements et de bailleurs de fonds qui pensent pouvoir favoriser le développement, promouvoir des politiques et accroître la participation des femmes. Par exemple, ils veulent faire participer davantage les femmes en politique, sans travailler avec les partis. Pourtant, si vous arriviez à convaincre les chefs de partis de mettre en place un système favorisant la nomination des femmes, cela pourrait se faire presque du jour au lendemain.
L'une des plus grandes réussites du NDI au Maroc, c'est d'avoir convaincu les chefs de partis d'accepter un système de quotas volontaires qui a permis d'élire 35 femmes au Parlement marocain aux dernières élections. Cette initiative s'est concrétisée grâce aux chefs politiques. Nous aurions pu dépenser des millions de dollars pour que des organismes mènent des campagnes de sensibilisation auprès du public, et cela aurait permis d'élire à peine cinq femmes. Notre collaboration avec les chefs de partis a permis l'élection de 35 femmes.
Je ne saurais vous dire pourquoi on évite les partis politiques. Toutefois, je fais ce travail depuis 13 ans et je peux vous assurer que ceux-ci jouent un très grand rôle dans le développement.
Le présent suppléant: Trente-cinq femmes ont été élues sur un total de combien?
M.Campbell: Le Parlement marocain compte près de 300sièges. On y trouve la plus grande proportion de femmes dans le monde arabe, à l'exception de pays comme la Syrie, où iln'y a même pas de semblant de démocratie. Des pays du Moyen-Orient qui sont un peu plus démocratiques, c'est au Maroc qu'on dénombre le plus de femmes élues.
[Français]
Le sénateur Dawson: Premièrement, d'anciens membres de la Chambre des communes ou du Sénat, même si les sénateurs prennent leur retraite à un âge plus avancé que les députés, seraient peut-être prêts à offrir leurs services, par exemple, mais vous n'avez rien mentionné à ce sujet. Leur expertise pourrait être efficacement canalisée si on voulait fait affaire avec le Parlement canadien.
Deuxièmement, d'anciens parlementaires provinciaux pourraient probablement participer à la tenue d'élections à l'étranger. J'y inclus également les partis politiques provinciaux.
Troisièmement, comment ciblerions-nous les pays dans lesquels nous voudrions intervenir?
[Traduction]
M.Donovan: Dans l'une des annexes de notre document surDémocratie Canada, nous avons fait valoir que les ex- parlementaires devraient avoir un rôle à jouer dans le développement. Je n'en ai pas parlé pendant ma présentation à cause des contraintes de temps, mais nous recommandons fortement de tirer profit de leur expérience.
Si je ne m'abuse, beaucoup d'entre eux ont participé à des missions du NDI.
M.Campbell: À ce sujet, je peux vous expliquer pourquoi je trouve si curieux que le Canada n'ait pas de pareil organisme.
L'actuel président de l'Association canadienne des ex-parlementaires, Doug Rowland, représentait le NDI au Maroc; il y travaillait et c'est un peu grâce à lui si d'anciens parlementaires ont participé aussi. Je n'ai pas la liste ici, mais je dirais que le NDI emploie au moins six anciens parlementaires à temps plein, à l'heure actuelle, anciens députés fédéraux ou provinciaux. Par exemple, notre directeur au Maroc est un ancien membre de l'Assemblée nationale du Québec, et plusieurs autres anciens parlementaires travaillent pour le NDI.
À mon avis, si le Canada venait à créer un institut de développement démocratique, il serait absolument essentiel de travailler avec des anciens parlementaires ou des anciens membres d'assemblées législatives, compte tenu de leur expérience pratique en matière d'organisation et de législation. Nous employons déjà un certain nombre d'ex- parlementaires, et ce serait une grande priorité pour un nouvel institut canadien.
En ce qui concerne les pays cibles, évidemment, c'est un gros problème. J'ai mes idées là-dessus. De prime abord, d'après mon expérience, je dirais que le Moyen-Orient a vraiment besoin du Canada. Juste pour vous donner un exemple, le NDI collabore avec le Fatah et d'autres petits partis politiques dans les territoires palestiniens — à Gaza et en Cisjordanie. Je peux vous dire d'emblée que nous avons grandement besoin d'un organisme canadien qui se consacre au développement politique dans les territoires palestiniens. Je pense entre autres au Zimbabwe. Sur le plan politique, il faudrait étendre nos activités au-delà de l'Afghanistan. On pourrait penser à certains pays cible, mais il s'agit aussi d'un sujet controversé.
Le sénateur Dawson: Monsieur le président, même si vous occupez ce siège temporairement, pourrions-nous inviter M.Rowland et des représentants de l'Association canadienne des ex-parlementaires à comparaître?
Le président intérimaire: Oui, bien sûr.
Le sénateur Dawson: Cela étant dit, le sénateur Segal nous manque en tant que président.
Le président intérimaire: C'est le sénateur Segal qui nous a proposé d'entreprendre cette étude. Nous le ferons.
Avant de céder la parole au sénateur Andreychuk, en ce qui concerne le personnel du NDI, si je ne m'abuse, un de vos membres a été tué récemment à Bagdad. Est-ce réellement sécuritaire de travailler dans un tel environnement? N'avez-vous pas perdu une jeune femme il y a à peine quelques semaines?
M.Campbell: Oui, tout à fait. Le 17 janvier dernier, une jeune femme et trois autres personnes ont été tuées. Or, c'est la première fois que cela se produit dans toute l'histoire du NDI, et ce, même si nous travaillons souvent dans des conditions hasardeuses. Nous avons envoyé des gens à Gaza, au Yémen, et nous avons un bureau à Beyrouth. Chose certaine, Bagdad est l'endroit le plus risqué. Presque par définition, nous travaillons dans des pays aux prises avec des conflits et de l'instabilité, et cela présente certains dangers.
Le sénateur Andreychuk: Permettez-moi de revenir sur la raison d'être de cet institut. Est-ce pour favoriser le débat, le processus électoral et le développement démocratique au Canada— ce qui n'est pas une mince tâche —, et ensuite le faire à l'étranger?
On critique souvent le NDI car on l'associe au Parti démocrate des États-Unis. J'ignore si le NDI s'en excuse ou s'il s'en réjouit. Lorsqu'il travaille dans d'autres pays, on lui reproche d'exporter un point de vue, alors qu'en fait, ce que le gouvernement canadien a essayé de faire, par l'entremise de Droits et Démocratie, du Centre parlementaire du Canada et des initiatives du MAECI, c'est de bâtir certaines structures multipartites.
Je ne saisis pas très bien comment nous pourrions aborder le volet canadien, si je puis m'exprimer ainsi, par rapport au volet international. Si cet organisme doit relever directement du Parlement, on devra faire affaire inévitablement avec le parti au pouvoir. Comment peut-on réellement être représentatif de tous les Canadiens?
M.Campbell: Je pourrais vous donner plusieurs explications. Tout d'abord, vous avez raison, sénateur, qu'il y a le risque qu'un organisme soit perçu comme étant partisan ou associé à une opinion qu'il tente de faire valoir à l'étranger. Même si elles recherchent des partenaires idéologiques, les fondations politiques allemandes, qui ont vu le jour au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, ne semblent pas être confrontées à ce problème. Au NDI, nous avons essayé d'être multipartites; nous ne cherchons pas nécessairement des partenaires qui pensent comme nous. Nous travaillerons avec tous les partis représentés. Nous nous présentons comme un groupe très international. La majorité des gens qui travaillent pour le NDI à l'étranger ne sont pas des Américains — pas parce que nous n'aimons pas les Américains, mais il est important de montrer que nous ne faisons pas la promotion d'un système en particulier, surtout du modèle américain, si on ne veut pas se heurter à une forte résistance.
Je dirais que ce qui compte, c'est la conception, la façon dont vous créerez l'institut — parce que vous avez parfaitement raison, vous ne voudriez surtout pas qu'un organisme canadien semble promouvoir un point de vue politique ou ne rechercher que des partenaires aux vues similaires.
Je suis tout à fait d'accord sur le modèle que M.Donovan vous a présenté. Il ressemble beaucoup à celui de l'Institut néerlandais pour la démocratie multipartite, un organisme regroupant tous les partis néerlandais. À mon avis, c'est ce que le Canada devrait faire aussi.
Le sénateur Segal et moi-même en avons discuté à maintes reprises, puis j'ai parlé avec des gens d'autres partis, et nous nous entendons tous sur un point: une fois que nous traversons les frontières du Canada, nous devons mettre de côté notre idéologie et notre allégeance politique.
Je crois qu'il serait tout à fait possible de créer un institut canadien multipartite sans avoir l'air de chercher seulement des partenaires qui pensent comme nous.
M.Donovan: Je suis d'accord avec M.Campbell à propos de l'Institut néerlandais. Je tiens à signaler que le point de vue de M.Campbell est aussi partagé par Thomas Carothers, par exemple, et d'autres théoriciens de la démocratie qui ont dit que l'Institut néerlandais avait été capable d'échapper à l'influence des fondations politiques indépendantes bien établies, comme les modèles allemands. Cet institut peut travailler en toute liberté et sans beaucoup de pressions politiques. Même s'il compte un peu plus de représentants du parti au pouvoir, il n'en demeure pas moins qu'il assure une représentation proportionnelle de tous les partis politiques. Le Canada pourrait créer quelque chose de différent, mais c'est ainsi que fonctionne l'Institut néerlandais. Il fait appel à tous les partis politiques pour promouvoir la démocratie à l'étranger.
Le sénateur Andreychuk: En ce qui concerne les partis politiques représentés au Parlement, il convient de se demander si notre système permet une juste représentation des Canadiens, compte tenu de la structure des partis et de la structure parlementaire que nous avons actuellement.
Je sais que nous y revenons souvent, et je le dis d'après mon expérience à l'étranger, mais c'est d'abord et avant tout au sein des partis politiques que l'on observe le plus grand manque de démocratie. Qui sont-ils alors pour enseigner la démocratie à d'autres et aider les femmes et les minorités à faire valoir leurs droits? Nous ferions mieux de renforcer la démocratie au sein de notre propre système avant de répandre la bonne parole à l'étranger.
M.Campbell: Je peux répondre en décrivant le type d'activités qu'un tel institut pourrait mener. Cela pourrait vous éclairer.
L'institut pourrait, par exemple, former des candidats et des directeurs de campagnes électorales; donner des conseils sur l'élaboration de mécanismes visant à assurer la démocratie et la transparence au sein des partis — un sujet très important dans tous les pays; organiser, avec le concours de militants et de dirigeants de partis politiques, des colloques sur le recrutement de bénévoles; et formuler des recommandations sur le financement des partis politiques. À mon avis, l'organisme pourrait conseiller les partis sur la collecte de fonds, mais il ne devrait jamais leur offrir une aide financière, car il s'agit là d'un terrain très dangereux sur lequel s'aventurer.
L'institut proposé pourrait également contribuer à l'élaboration et à la communication de messages destinés aux électeurs ainsi qu'à la rédaction de documents énonçant la constitution, les règlements administratifs, la structure et les activités promotionnelles des partis politiques. Il pourrait collaborer à la recherche sur les lois et les règlements liés au financement des partis, inviter des militants politiques étrangers à prendre part, à titre de stagiaires, à des campagnes électorales canadiennes, et faire participer des politiciens, par exemple d'anciens parlementaires, à des missions d'observation d'élections à l'étranger.
Je ne crois pas que l'institut aurait un rôle à jouer au Canada; il essaierait de mettre en œuvre toutes ces initiatives à l'étranger. Je conviens qu'il existe des lacunes à l'échelle nationale, mais elles n'ont aucun rapport avec le programme d'un institut canadien pour la démocratie.
Le sénateur Corbin: Pouvons-nous justifier l'argent dépensé pour la promotion de la démocratie ou caractériser les résultats obtenus? Pouvez-vous me donner deux ou trois exemples de réussites? Y a-t-il des cas où les interventions ont échoué, où les efforts déployés sont restés vains?
Les Canadiens se préoccupent des sommes dépensées dans le domaine de la saine gestion publique. Selon la note d'information que nous avons, entre 1999 et 2004, le financement relatif à la bonne gouvernance représentait environ 20p.100, soit plus de 380 millions de dollars, des versements annuels globaux effectués par l'ACDI. Ces données sont tirées d'un document publié en avril 2006 par le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Le 18 octobre 2006, la ministre canadienne de la Coopération internationale a déclaré au Comité permanent des affaires étrangères et du développement international de la Chambre des communes qu'en 2005, l'ACDI avait consacré plus de 375 millions de dollars à des programmes de gouvernance démocratique. Les contribuables canadiens veulent évidemment savoir quels sont les résultats.
M.Campbell: J'ai quelques réponses à cette question et j'invite M.Donovan à exposer plus en détail les enjeux canadiens.
Le NDI ainsi que tous les organismes associés à la NED présentent des projets très détaillés comprenant des plans d'évaluation et de contrôle, qui sont examinés minutieusement. Nous respectons toutes les règles du gouvernement américain concernant notamment les marchés publics. La surveillance est rigoureuse; nous nous soumettons à des vérifications externes indépendantes, souvent organisées par nous-mêmes, dont un grand nombre sont effectuées par des ministères ou par des vérificateurs indépendants. Comme c'est le cas pour toute activité publique, les investissements doivent faire l'objet d'un examen complet, et les résultats doivent être communiqués. Il existe d'ailleurs aux États-Unis une abondante documentation sur le financement efficace de projets liés à la démocratie, car les subventions qu'on y accorde sont énormes.
Je vais donner quelques courts exemples de réussites. Le NDI a été créé il y a de nombreuses années, mais je ne citerai pas des initiatives dont vous avez sans doute entendu parler. Vous n'avez peut-être jamais imaginé que des organismes de promotion de la démocratie auraient pu jouer un rôle dans certains événements.
Le plébiscite qui s'est tenu au Chili dans les années 1980 et qui a permis de mettre fin au régime Pinochet est principalement le fruit de consultations qui se sont déroulées entre le NDI, d'autres organismes et des militants chiliens. Les conseils et la formation que les militants ont reçus ont fini par les convaincre qu'un plébiscite pacifique était un moyen de communiquer un message au gouvernement Pinochet.
Aux Philippines, dans la Révolution du pouvoir du peuple, dirigée par Corazon Aquino, on accordait une grande importance à ce qu'on appelle la surveillance du processus électoral. En effet, des milliers de citoyens se sont engagés volontairement à surveiller les élections qui ont fait perdre le pouvoir au président Marcos. L'idée de surveiller le processus électoral du pays est la résultante des programmes de promotion de la démocratie.
J'ai mentionné tout à l'heure l'exemple des 35 femmes élues lors des dernières élections au Maroc, dans le Moyen- Orient. Ces résultats ont été le fait non pas d'un seul organisme — la question intéressait aussi vivement la population marocaine —, mais bien de l'appui d'organismes internationaux comme NDI.
Il existe de nombreux exemples de réussites. Pour chaque projet exécuté, qu'il représente 100000$ ou un million de dollars, nous présentons des rapports trimestriels. Chaque trimestre, nous quantifions les résultats de la période visée et expliquons si nous nous rapprochons des objectifs ultimes fixés dans la proposition initiale. Il importe de quantifier ce travail et sa progression vers l'atteinte des objectifs.
M.Donovan: J'aimerais en revenir au rôle de promotion deladémocratie que joue le Canada en tant qu'organisme de coordination. Il existe plusieurs organismes actifs dans ce domaine et dans celui de la gouvernance démocratique — toutefois, comme nous l'avons dit, aucun ne s'occupe du soutien des partis politiques. Nombre de ces organismes sont financés par l'intermédiaire de l'ACDI, des Affaires étrangères ou d'autres sources gouvernementales. Un éventuel avantage de l'Institut canadien pour la démocratie dont les travaux seraient coordonnés est qu'il pourrait se rendre sur place pour vérifier la reddition de comptes.
Il existe manifestement, sur le plan international, un besoin d'exécuter plus de travaux en matière de développement de la démocratie, particulièrement en ce qui concerne le soutien des partis politiques. Je reviens tout juste d'une réunion qui a eu lieu ce matin au CRDI. Le secrétaire général de l'Institut international pour la démocratie et l'assistance électorale de Stockholm y a parlé d'un récent projet qu'a mené à terme l'institut, soit l'évaluation du besoin de promouvoir la démocratie en termes de soutien des partis politiques. C'est l'institut qui a mené l'étude la plus fouillée, que je sache. Il a examiné quelque 30 pays différents dans chaque région de démocratie en développement et en sont venus à la conclusion que la plupart de ces pays ont besoin d'un plus grand soutien pour le développement de partis politiques.
Le sénateur Di Nino: Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, j'aimerais commencer par obtenir certaines précisions. Si j'ai biencompris, il est question d'intensifier, en réalité, les efforts depromotion de la démocratie à l'échelle internationale. Il s'agitdavantage de la contribution internationale que de la participation nationale, n'est-ce pas?
M.Donovan: Oui. C'est juste.
Le sénateur Di Nino: Il n'est pas question aujourd'hui du besoin d'accroître la promotion et l'efficacité, du moins, des efforts nationaux de développement de la démocratie. Je tiens à ce que ce soit bien clair.
M.Donovan: Oui, c'est ainsi que je le conçois.
Le sénateur Di Nino: Après avoir lu votre documentation de même que les notes d'information préparées à notre intention, je remarque que de nombreux organismes sont au service de ce marché ou répondent à ce besoin à l'échelle internationale. Ai-je bien compris que ce que vous me dites, cette multiplicité d'organismes ne fait pas un travail suffisamment efficace ou n'a pas suffisamment de ressources pour accomplir ce qui a besoin d'être fait pour promouvoir et développer la démocratie?
M.Donovan: Oui. C'est exactement ce que nous affirmons ou, plutôt, qu'il existe des lacunes dans les efforts déployés par le Canada pour promouvoir la démocratie à l'échelle internationale et que ceux-ci pourraient être mieux coordonnés.
Le Canada compte de nombreux organismes actifs dans le domaine de la société civile, des élections législatives et de ce genre de composante du développement de la démocratie, mais rien ne se fait sur le plan du développement des partis politiques, ce qui, comme nous l'avons soutenu, en représente une composante essentielle.
À l'échelle internationale, la Norvège et la Finlande sont en train de créer de nouveaux organismes de soutien des partis politiques, et la Suède et les Pays-Bas sont en train de renforcer les leurs. Leurs budgets sont augmentés et ils sont plus présents sur la scène internationale. Le Canada ne contribue pas beaucoup d'aide aux partis politiques sauf, comme l'a mentionné M.Campbell, par l'intermédiaire d'autres organismes internationaux ou des organismes de promotion de la démocratie d'autres pays.
Pour ce qui est du financement, Élections Canada fait de la surveillance d'élections à l'étranger, mais ce n'est pas là sa fonction centrale. J'ignore au juste ce qu'est son budget, mais il n'est pas très élevé. Le budget de Droits et Démocratie est de 5 millions de dollars par année. Nul n'affirmera que c'est suffisant pour soutenir des partis politiques à l'étranger. Même si l'organisme s'appelle Droits et Démocratie, il est axé sur le développement des droits de la personne et leur lien avec la démocratie et il ne s'occupe pas de partis politiques.
Nous affirmons qu'il y a moyen de faire plus, particulièrement dans le domaine du soutien international aux partis politiques.
M.Campbell: C'est parfois trompeur, parce que vous pouvez dénombrer bien des organismes, mais comme l'a mentionné M.Donovan — et la dernière fois que j'ai parlé à M.Kingsley du budget international d'Élections Canada, il était de quelque 1million de dollars. Le budget total de Droit et Démocratie oscille aux alentours de 5 ou 6 millions de dollars, mais le volet de promotion de la démocratie n'en représente qu'un tiers environ, de sorte qu'il serait peut- être inférieur à 2 millions de dollars. Ce sont là les deux plus grands organismes dans ce domaine.
On a mentionné tout à l'heure que, selon l'ACDI, 20p.100 environ de son budget sont consacrés à la démocratie et à la gouvernance. J'ignore ce dont elle tient compte dans ces calculs, mais ce n'est pas ce dont il est question aujourd'hui, soit le développement des parlements, des partis politiques, de la défense des droits dans la mesure où elle influence le soutien offert par la politique nationale aux élections. Les 20p.100 ne couvrent visiblement pas ces aspects; ce pourrait être par contre dans d'autres domaines qui y sont vaguement associés.
Beaucoup d'organismes y travaillent peut-être, mais nous parlons de fonds représentant probablement un total inférieur à10 millions de dollars canadiens. Je n'aime pas faire des comparaisons avec les États-Unis, mais juste pour vous donner une idée, les États-Unis consacrent 1,5 milliard de dollars à cette activité chaque année. Nous parlons donc 10 millions de dollars contre 1,5 milliard de dollars.
Pour vous donner un autre exemple, le budget d'une des fondations de parti allemandes, d'un seul organisme, est de 120millions d'euros par année. Je ne prétends pas que le Canada devrait faire les choses à cette échelle, mais ses contributions sont minuscules par rapport à d'autres, même faible par rapport aux Pays-Bas ou à la Suède.
Le sénateur Di Nino: Que le budget pour cette activité soit suffisant ou pas, ce que je vous entends dire, c'est que nous n'avons pas injecté suffisamment d'argent dans cette activité. Ce n'est pas forcément que nous ayons besoin d'un nouvel institut ou d'une nouvelle entité. Vous avez tous deux affirmé, je crois, que le Canada n'a pas consacré suffisamment de ressources à cette question. Ai-je raison?
M.Donovan: Nous affirmons que, du point de vue canadien, trop peu de ressources ont été affectées à la promotion de la démocratie à l'étranger, mais que la façon dont les ressources sont réparties est probablement plus importante que le montant réel ou, du moins, aussi importante que le montant réel des ressources affectées à la promotion de la démocratie. Comme je l'ai dit, il nous manque une composante clé de la promotion de la démocratie, soit le soutien des partis politiques.
Pour en revenir à ce que M.Campbell a dit il y a quelques minutes, le Canada pourrait peut-être s'inspirer d'un modèle, de quelque chose comme l'IMD hollandais ou d'autres pays de cette taille. L'IMD de Hollande affecte quelque 10 millions d'euros par année simplement au soutien des partis politiques. Si l'on se fie à l'évaluation de M.Campbell selon laquelle le Canada engage quelque 10 millions de dollars dans toute l'activité de promotion de la démocratie, ce n'est même pas l'équivalent de ce que les Pays-Bas, un pays comparable, dépensent pour le soutien des partis politiques.
M.Campbell: L'affectation de plus de ressources aux organismes existants est sensée. Le Centre parlementaire du Canada et Droits et Démocratie font de l'excellent travail, avec très peu de moyens. La situation a beaucoup évolué au cours des deux dernières années. Je sais que le ministère des Affaires étrangères a formé un Conseil de la démocratie et qu'il consacre plus de temps et d'efforts à ces questions. Je croyais que le Corps canadien, à l'ACDI, exerçait un bon leadership et avait commencé à faire du bon travail. Beaucoup a été accompli au cours des dernières années, mais je ferais miens les propos de M.Donovan selon lesquels la forme que prend l'aide est peut-être plus importante que les montants comme tels.
La plupart des étrangers et, je le soupçonne, la plupart des Canadiens seraient bien en peine de décrire ce que fait le Canada dans le domaine de la démocratie. J'estime donc qu'il faut aussi y injecter plus de cohérence.
Le sénateur Di Nino: Nos deux invités pourraient-ils nous diresi nous pourrions atteindre le même objectif que celui qui estproposé pour l'Institut canadien pour la démocratie en augmentant nos contributions à des organismes comme le PNUD ou l'Institut international pour la démocratie et l'assistance électorale.
M.Donovan: Je vais reprendre une partie de ce qu'a dit M.Campbell dans sa déclaration tout à l'heure. C'est une possibilité, mais le hic, c'est qu'en passant par un organisme international, vous ne pourrez pas forcément vous écarter de l'objectif de la politique étrangère canadienne. L'adhésion à ce genre d'organisme est cruciale. Ainsi, moi-même, j'ai travaillé à l'Institut international pour la démocratie et l'assistance électorale pendant un certain temps en 2005. C'est un organisme formidable qui regroupe beaucoup d'États. On y rencontre beaucoup de personnes différentes qui travaillent dans le domaine de la démocratie et qui peuvent ainsi nous renseigner sur les pratiques à leur avis exemplaires et ce genre de choses. Cependant, leurs politiques et leurs programmes sont dictés par l'Institut international pour la démocratie et l'assistance électorale, plutôt que par le Canada ou par un autre État-membre agissant de son propre chef. Le Canada a beaucoup d'expertise dans le domaine de la démocratie, des partis politiques par exemple. Si vous souhaitez soutenir des partis politiques à l'étranger en passant par des organismes canadiens, l'idée de le faire uniquement en passant par des organismes multilatéraux n'est pas forcément bonne. C'est pourquoi nous proposons la création d'un nouvel institut.
M.Campbell: Très brièvement, je vous répondrais par la négative. Je suis entièrement favorable au principe de renforcer notre contribution au PNUD, entre autres. Il est intéressant de s'entretenir avec des Canadiens travaillant dans le cadre du PNUD. Je sais qu'ils vous diraient que le Canada a besoin d'occuper plus de place sur ce terrain. Ils feraient bon accueil à une contribution plus importante.
Comme je travaille dans ce domaine, j'estime tout à fait honteux que la direction d'un organisme américain revienne à M.Kingsley. Ne vous y méprenez pas. Je n'ai rien contre M.Kingsley, mais le fait qu'il va aux États-Unis pour assumer la direction de cet organisme électoral représente pour moi une véritable honte. Il est consternant de voir que tant de Canadiens doivent se joindre à des organismes étrangers pour faire ce travail, non pas parce que je crois que les Canadiens devraient le faire au sein d'un organisme canadien, mais parce que le Canada a tant à offrir et qu'il n'a pas les outils pour le faire. Si vous voulez mon conseil, donnez-lui cet outil et contribuez davantage à des programmes comme le PNUD.
Le sénateur Di Nino: Nous en parlerons à M.Flaherty.
Le sénateur Merchant: C'est un bon thème. Il est difficile de cerner ce qu'est le principe de la démocratie au juste. Au sein de notre propre pays, son application varie selon la situation.
Nous avons l'habitude de travailler au sein d'une démocratie. Nous élisons des présidents d'associations étudiantes dès la troisième et la quatrième années, de sorte que c'est un concept que nous connaissons bien. Pourtant, il ne donne pas toujours les résultats attendus.
Je me demande de quelle façon nous décidons d'exporter dans une certaine région du monde l'idée que nous souhaitons promouvoir. Combien de temps accordons-nous à un projet avant d'avoir le sentiment que nous avons atteint nos objectifs? Demeurons-nous là-bas indéfiniment?
Y a-t-il des parties du monde où vous allez pour promouvoir la démocratie et observez une certaine résistance de la part du parti au pouvoir? Je ne puis concevoir que, dans chaque région, le parti au pouvoir souhaite votre présence pour renforcer la démocratie en organisant les partis d'opposition.
M.Campbell: Quelle excellente question! Je suis le directeur des programmes de NDI au Moyen-Orient, et je fais souvent des blagues à ce sujet. Si je me rends dans un pays comme l'Algérie et que j'affirme aux autorités que je suis là pour renforcer leur démocratie, ce qu'elles en comprennent, c'est que je suis là pour essentiellement écourter leur passage au pouvoir. Or, il n'existe pas de gouvernement ou régime qui le souhaite.
Le National Democratic Institute est présent au Yémen depuis 1993. J'ai rencontré le président du pays il n'y a pas longtemps. Il m'a dit: «Si j'ai bien compris la raison d'être de NDI au Yémen et si tout se passe comme prévu, je n'aurai plus d'emploi». Je lui ai répondu que «c'était vrai, à moins que la population ne décide de vous réélire. Notre but n'est pas de nous débarrasser de vous et nous ne visons pas à changer le régime au pouvoir. En fait, nous nous opposons à toute initiative en ce sens. Oui, vous avez raison. En fin de compte, le résultat devrait être un transfert du pouvoir, la tenue d'élections libres et la présence d'autres candidats. Après quelques mandats, vous serez probablement défait et vous devrez passer à autre chose. Je ne le cache pas.» Ces paroles l'ont fait rire, et il m'a dit que j'avais raison, que c'est ainsi qu'il faudrait que cela se passe. Je ne crois pas que ce sera le cas là-bas, mais il a reconnu que c'est ce qui devrait arriver.
Ce n'est pas une question que je souhaite traiter à la légère, étant donné sa grande gravité. J'avoue que le président Bush et la guerre de l'Irak n'ont pas aidé. Malheureusement, quand le président Bush parle de démocratie, on croirait entendre sonner les cornes d'une croisade idéologique menée pour imposer aux autres les valeurs occidentales. Ce n'est absolument pas ainsi que je conçois la démocratie et sa promotion.
Pour moi, la démocratie est un concept universel, tout comme les droits de la personne. Il y a fort longtemps, en adoptant la Déclaration universelle des droits de l'homme, nous avons décidé qu'il existe des principes universels, que les êtres humains ont une valeur intrinsèque, que les pays industrialisés allaient tenter de protéger cette valeur dans leurs politiques et leurs programmes.
Selon moi, la démocratie, l'idée maîtresse que l'être humain mérite de pouvoir influencer les décisions qui affectent sa vie, est tout aussi universelle que l'idée des droits de la personne. C'est là un objectif de politique parfaitement légitime pour un pays. La façon de l'atteindre, tout comme dans le domaine des droits de la personne, est d'avoir, en plus d'une politique et de mesures gouvernementales, des mesures non gouvernementales, des mesures dans le cadre desquelles des personnes comme vous et moi et d'autres militants peuvent aller à l'étranger aux frais de l'État pour essayer de partager avec d'autres leurs expériences sur la façon dont l'homme peut avoir plus d'influence sur les décisions qui l'affectent.
M.Donovan: M.Campbell a fort bien résumé notre opinion.
Le sénateur Merchant: Le Canada est bien placé puisqu'il compte tant de citoyens en provenance d'un si grand nombre de pays différents. Nous pouvons parfois faciliter la promotion de la démocratie en laissant des immigrants — ceux qui viennent d'autres cultures et qui ont acquis une certaine connaissance de notre régime — retourner dans leur pays d'origine pour y promouvoir la démocratie.
Seriez-vous d'accord avec l'idée d'envoyer ce genre de personne dans d'autres pays, de même que certains d'entre nous en tant que profanes?
M.Campbell: Oui, tout à fait. C'est important. Parfois, cependant, il faut respecter certaines sensibilités. Il m'est déjà arrivé d'hésiter avant d'envoyer un ressortissant dans son pays d'origine.
Je n'engagerais pas forcément un Américain de souche marocaine pour aller travailler au Maroc. Nous avons un Marocain qui travaille au sein de notre programme au Koweït. Le NDI est présent en Afghanistan, et nous avons lourdement puisé dans notre bassin d'Américains de souche afghane avant de lancer notre programme là-bas, afin d'avoir leur avis et de les attirer. Nous misons largement sur les communautés immigrantes pour trouver des employés, l'expertise voulue et les conseils. C'est crucial, selon moi, et je crois que le Canada aurait beaucoup à offrir à cet égard.
Le sénateur Downe: Monsieur Campbell, en réponse à une question tout à l'heure, vous avez souligné le Chili comme un endroit où vous aviez connu du succès. Les citoyens chiliens ne trouvaient-ils pas étrange qu'on leur prodigue des conseils sur la réforme démocratique alors qu'ils se trouvaient sous une dictature militaire du seul fait que la CIA avait renversé le régime au pouvoir? N'ont-ils pas trouvé cela bizarre?
M.Campbell: Je crois qu'effectivement, ils étaient perplexes. Ily avait beaucoup de scepticisme.
Le National Endowment for Democracy a été institué en 1983 expressément en réaction à des événements comme l'activité de la CIA au Chili et la situation au Nicaragua. On estimait que l'ingérence dans les affaires internes d'un pays était mauvaise. Ceux qui ont contribué à la fondation du National Endowment for Democracy étaient des personnes comme Lane Kirkland de la FAT-CIO et plusieurs démocrates et républicains bien en vue, qui se sont dit: si l'on prétend tant tenir à la démocratie, on ne peut pas simplement choisir. On ne peut pas rejeter une personne au pouvoir parce qu'elle nous déplaît et en appuyer une autre qui nous plaît.
Le National Endowment for Democracy a été créé pour mettre tout cela au jour. Si vous consultez le site Web du NED, vous constaterez que chaque subvention y est énumérée, que l'information est publique.
Vous avez posé une bonne question. Plusieurs Chiliens étaient sceptiques, mais en bout de ligne, la coalition des Chiliens qui a organisé le plébiscite a surmonté toutes les barrières idéologiques. Elle regroupait des démocrates chrétiens, des sociaux-démocrates et des libéraux. Ils ont accepté de l'aide de l'extérieur, pas simplement américaine, et je crois qu'ils étaient contents de l'avoir.
Le sénateur Downe: J'apprécie cette réponse à sa juste valeur, mais on pourrait prétendre que c'était une dépense inutile. Si la CIA ne s'était mêlée au départ des affaires de ce pays, il n'aurait pas été nécessaire d'y retourner, et la population du Chili se serait évité des années de dictature militaire. J'imagine qu'on pourrait avancer le même argument ailleurs également.
Sommes-nous en train de financer des activités, quel que soit le moyen choisi, quel que soit l'objectif que vous et d'autres tentez d'atteindre, alors que, si nous laissions simplement les choses suivre leur cours, nous n'aurions pas à faire la dépense et les populations de ces pays n'auraient pas à en souffrir?
M.Campbell: On peut en débattre. C'est probablement vraiparfois. L'ingérence étrangère, particulièrement d'une superpuissance, crée effectivement des problèmes que nous tentons alors peut-être de résoudre par ce genre de travail. Selon moi, cependant, il s'agit probablement de l'exception plutôt que de la règle, mais votre argument a du bon.
Le président suppléant: C'est particulièrement juste en ce qui concerne les travaux du comité sur l'Afrique, parce que nous savons que la situation désastreuse au Congo et en Angola a été causée par la concurrence que se sont livrée les États-Unis au Congo à l'appui de Mobutu et les Cubains à Angola à l'appui des groupes militants. Nous avons en réalité provoqué nous-mêmes la catastrophe actuelle.
Je tiens à remercier vivement nos témoins. Nous avons eu un débat fort intéressant et très instructif. Nous remercions le sénateur Segal d'en avoir eu l'idée.
Le comité siégera à nouveau jeudi, quand il accueillera un groupe intéressant concernant la question de l'Afghanistan et de l'OTAN.
La séance est levée.