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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Droits de la personne

Fascicule 17 - Témoignages du 23 avril 2007


OTTAWA, le lundi 23 avril 2007

Le Comité sénatorial permanent des droits de la personne se réunit ce jour à 16 h 7 pour surveiller l'évolution de diverses questions ayant trait aux droits de la personne et examiner, entre autres choses, les mécanismes du gouvernement pour que le Canada respecte ses obligations nationales et internationales en matière de droits de la personne.

Le sénateur A. Raynell Andreychuk (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Honorables sénateurs, nous sommes réunis cet après-midi pour poursuivre l'étude qui nous a été confiée par renvoi et surveiller l'évolution de diverses questions ayant trait aux droits de la personne ainsi qu'examiner, entre autres choses, les mécanismes du gouvernement pour que le Canada respecte ses obligations nationales et internationales en matière de droits de la personne.

Dans le cadre de cet ordre de renvoi, nous avons choisi de nous pencher sur le nouveau Conseil des droits de l'homme des Nations Unies, qui a remplacé la Commission des droits de l'homme, à la suite d'un vaste programme de réforme des droits de l'homme aux Nations Unies. Nous avons reçu des témoins ici et nous nous sommes également rendus à Genève pour y rencontrer des fonctionnaires des Nations Unies, de notre propre ambassade et d'autres personnes, y compris des représentants des ONG travaillant dans ce domaine. Aujourd'hui, nous achèverons cette série d'enquêtes et d'audiences avant de soumettre un rapport.

Je suis heureuse de pouvoir accueillir aujourd'hui Isabelle Duplessis, professeure agrégée de la Faculté de droit de l'Université de Montréal, et Jean-Louis Roy, président de Droits et Démocratie, qui est accompagné de Lloyd Lipsett, adjoint principal au président. D'après ce que je comprends, M. Lipsett ne fera pas d'exposé mais aidera à répondre aux questions. Bienvenue. Nous suggérons généralement de brèves remarques liminaires, les sénateurs ayant généralement assez de questions pour avoir besoin d'être rappelés à l'ordre. J'espère que nos échanges seront fructueux et j'ai hâte d'entendre votre point de vue sur le nouveau Conseil des droits de l'homme.

[Français]

Isabelle Duplessis, professeure agrégée, Faculté de droit, Université de Montréal : Merci, madame la présidente. J'aimerais remercier tous les membres du Comité sénatorial permanent des droits de la personne de m'avoir invitée à partager quelques réflexions avec vous. Je compte vous parler du mandat du nouveau Conseil des droits de l'homme. Ce mandat est essentiellement la promotion et la protection des droits de la personne et il continue le mandat de l'ex- Commission des droits de la personne.

Lorsqu'on regarde le mandat et que l'on analyse l'efficacité et le fonctionnement de ce nouveau conseil, il ne faut jamais perdre de vue la raison de sa création. On a voulu un nouveau conseil et l'abolition la Commission des droits de la personne dans cette réforme des Nations Unies, qui est beaucoup plus large. On l'a voulu parce qu'il y avait un coup d'éclat. Il était apparent que la commission fût politisée et on le déplorait. Pourquoi l'était-elle?

Parce qu'elle était totalement traversée par ce qu'on appelle un vote par des blocs régionaux. Donc, pendant toute la guerre froide, le bloc de l'Est et le bloc de l'Ouest se sont affrontés au sein de cette commission et cela a entraîné un blocage. Le conseil est censé changer cette ancienne donne. Justement, avec la fin de la guerre froide, on pouvait imaginer et espérer un changement.

Il y a deux tâches particulières que le conseil doit accomplir et sur lesquelles j'aimerais attirer l'attention des sénateurs : l'examen périodique universel et la révision des procédures spéciales.

L'examen périodique universel est une initiative et une nouveauté qui vise précisément à faire taire les critiques concernant la politisation de l'ex-Commission des droits de l'homme. Comment? En évaluant tous les pays indistinctement, sans discrimination, quant à leur respect des droits de la personne, incluant les membres qui font partie du conseil et qui sont au nombre de 47, alors que l'ex-commission en comprenait 53. On veut faire taire les critiques de double standard, essentiellement en instaurant cet examen périodique universel dont — je vous le souligne, mais vous devez le savoir de toute façon —, on ne sait rien de son fonctionnement. Actuellement, un groupe de travail étudie cette question au sein du conseil. Les décisions les plus importantes seront prises en juin 2007. Il faut attendre cette session pour voir ce qui va se passer.

La deuxième tâche particulière à retenir lorsqu'on parle du nouveau conseil, c'est la révision des procédures spéciales. Je vous dirais que c'est le système de contrôle des normes hérité de l'ex-Commission des droits de l'homme. Cette procédure spéciale inclut notamment les rapporteurs spéciaux thématiques, pour un certain nombre de droits spécifiques, mais aussi des rapports spéciaux qu'on appelle « par pays » où l'on cible un pays et l'on condamne ce qui s'y passe. On dénonce, finalement, ce qui est perçu par bien des pays comme une sanction. Je vous dirais qu'il y a beaucoup de réticence relativement à ces rapporteurs par pays.

En plus d'appliquer l'examen périodique universel, le conseil doit procéder à une révision des procédures spéciales, mais en préservant les acquis de l'ex-commission. Je tiens à préciser que l'ex-commission a fait un travail remarquable. Il est impératif de voir plus loin que cette critique de la politisation de l'ex-commission. La commission nous a laissé un travail normatif important en commençant par la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948, et par les pactes sur les droits civils, politiques, économiques, sociaux, culturels et j'en passe. Elle nous a aussi laissé un système de contrôle, dont ses procédures spéciales et ses rapporteurs spéciaux; elle nous a laissé un mécanisme de contrôle spécifique de plaintes confidentielles, la fameuse procédure 1503. Toute cette révision des procédures spéciales doit se faire à l'intérieur d'un an, encore une fois, à partir de la première session du nouveau conseil, c'est-à-dire la date butoir de juin 2007, qui revient pour cette révision des procédures spéciales.

Je terminerai ma présentation d'ouverture en vous parlant de la proposition ou du document qu'on appelle le « document de travail conceptuel du haut commissaire aux Nations Unies aux droits de la personne concernant la création d'un corps unifié de traités ». Premièrement — vous le savez, mais je le répète —, le haut commissariat représentera le secrétariat du nouveau conseil. Donc, je dirais qu'il est le centre nerveux recevant l'information venant de tous les pays et des ONG. Je vais laisser M. Roy discuter de cette question, mais je pense qu'il faudra voir à institutionnaliser la participation des ONG au sein du conseil, et au sein de cette fameuse proposition de corps unifié de traités pour aller chercher une preuve fiable et objective, telle que la résolution portant sur la création du conseil nous le demande.

Je pense qu'on a des outils assez intéressants, et je terminerai en revenant sur cette proposition du haut commissariat, d'un corps unifié de traités. Vous le savez, actuellement, il y a sept organes de contrôle distincts qui, individuellement, évoluent, regardent et surveillent l'application et le respect des conventions. Vous retrouvez par exemple, un organe de contrôle sur un pacte concernant les droits civils et politiques, vous avez le comité des droits de l'homme, le Pacte sur les droits économiques, sociaux et culturels; la Convention sur les droits des enfants, sur les travailleurs immigrants; la convention pour éliminer toutes les formes de discrimination raciale, et une contre la torture. Chacun des sept organes est chargé de veiller à l'application d'une convention.

La proposition du haut commissariat serait de créer un organe qui surveillerait l'application de ces sept conventions. J'ai remis à votre greffière un document écrit et bien élaboré de 27 pages, où vous trouverez tous les détails juridiques possibles à l'intérieur. J'attire votre attention sur les difficultés juridiques immenses auxquelles nous sommes confrontés afin d'amender ces conventions et créer un organe unifié de traités. Je ne sais pas comment les Nations Unies vont s'y prendre. Ce sera difficile. Ils pourraient procéder par un amendement pour chaque convention, avec toutes les difficultés que cela soulève, ou bien adopter une résolution constitutive créant un organe unifié et abolissant les sept autres. Je pense que si l'Assemblée générale a une volonté politique claire, elle le fera, mais tout cela reste à voir. Comme je vous le dis, c'est une proposition qui est soumise aux États aux fins de réflexion.

Jean-Louis Roy, président, Droits et Démocratie : Je voudrais d'abord remercier le comité de nous accueillir. C'est une vieille habitude que nous avons, Droits et Démocratie, d'être avec vous, de dialoguer avec vous et nous l'apprécions toujours. Nous considérons le Sénat, les comités du Sénat, ce comité, comme l'un des lieux importants de la réflexion, de la prospective et de la proposition politique au Canada. J'essayerai d'éviter les éléments que la professeure Duplessis vient de traiter.

[Traduction]

Il nous faut jeter un regard neuf sur le système uni et la question de la promotion et de la protection des droits de l'homme dans le contexte de ce nouveau Conseil des droits de l'homme.

[Français]

Il y a des évaluations très partagées, comme vous le savez, sur les travaux actuels du conseil. Notre point de vue — et nous avons suivi les travaux de très près, nous étions à Genève pendant les travaux —, c'est que l'un dans l'autre, ce qui s'est accompli depuis juin dernier est substantiel et d'une grande importance.

Pour une grande majorité des 47 pays membres du conseil, tel qu'ils l'ont exprimé dans les documents qu'ils ont soumis jusqu'à maintenant, la question des droits civils et politiques est devenue — je pense aux documents de l'Inde, de la Chine et des autres — une étape ou un fragment d'un ensemble plus large qui inclut les droits sociaux et économiques. Il me semble qu'un jour ou l'autre, il serait intéressant que nos institutions, y compris le Sénat, poussent davantage l'analyse de ce qu'il faut faire dans les prochaines années concernant les droits sociaux et économiques.

Je voudrais dire aussi qu'il faut avoir de vraies attentes concernant le conseil des droits, tel que la professeure Duplessis vient de le signaler. En même temps, ce n'est pas le seul niveau où nous devons travailler. Il se passe aujourd'hui dans le monde, à l'échelle nationale, des événements considérables concernant les droits. Nous sommes témoins et partenaires au Maroc, par exemple, en Mauritanie, en République démocratique du Congo et ailleurs dans le monde, de l'initiative à l'échelle nationale de création de Commissions nationales des droits de l'homme. Nous le savons parce que nous sommes partenaires de l'émergence de l'institution nationale de protection des droits humains.

Au cours des prochains jours, nous accueillerons une délégation du Centre des droits de l'homme de l'Université des sciences politiques de Pékin. Ce centre a reçu le mandat de préparer des hypothèses pour la création d'une commission des droits de l'homme en Chine. À notre avis, il s'agit d'un événement considérable. Nous avons été partenaires de la création d'une Association des institutions nationales de droits humains des pays membres du Commonwealth.

On peut dire qu'il y a beaucoup d'événements considérables qui se produisent à l'échelle nationale. Du pont de vue régional, nous travaillons toujours avec nos partenaires asiatiques pour l'éventuelle création d'une Commission asiatique des droits pour toute l'Asie ou pour la création de commissions dans les régions asiatiques.

J'aimerais signaler que pour la première fois de son histoire, la Commission africaine a condamné le Zimbabwe dans des termes extrêmement crus et extrêmement clairs. Il y a trois semaines, lors du Conseil des droits sur le Darfour, le bloc africain s'est dissocié du Soudan et du bloc arabophone, en exigeant que les Nations Unies fassent un vrai travail au Soudan. Il faut donc prendre les Nations Unies pour ce qu'elles sont, un lieu indispensable.

Le Conseil des droits est un acquis extraordinaire. On a dit que la Déclaration universelle était la plus grande réalisation des Nations Unies et le nouveau conseil incarne cette extraordinaire invention, qui fait que les droits humains sont maintenant une priorité à l'ordre du jour d'un très grand nombre de pays.

Il est important, parlant du Conseil des droits, de ne pas oublier les autres niveaux et la politique canadienne doit refléter ces besoins d'appui sur les plans national et régional, ainsi qu'au niveau global des Nations Unies. Le Canada bénéficie d'un positionnement exceptionnel et la politique canadienne doit le refléter. En ce qui concerne les blocs régionaux, le Canada, à travers la francophonie, à travers le Commonwealth et à travers l'OEA, a l'obligation de créer des alliances qui viendront briser ces blocs régionaux qui, s'ils devaient durer, ramèneraient la politisation à son plus haut niveau au Conseil des droits. Il ne faut pas juger définitivement les travaux qui se font en ce moment à Genève.

[Traduction]

C'est un processus continu. Il faudra des années avant de parvenir à la formule finale. On fait en ce moment beaucoup de bon travail. Nous avons lu tous les rapports et j'estime que nous devrions nous retenir de porter un jugement définitif à cette étape-ci. Dans les années qui viennent, le Conseil passera des procédures à la substance.

Laissez-moi dire quelques mots sur certains mécanismes que le Conseil est en train de définir, ainsi que sur ses règles explicites.

Tout d'abord, nous ne saurions trop insister sur l'importance de l'examen périodique universel. En effet, les critiques les plus solides et les plus constantes portaient sur la sélectivité de la Commission lors de cet examen. Cette sélectivité est une chose du passé. Tous les pays doivent désormais dire quelque chose sur ce qui se passe chez eux.

Nous préférons l'option 2. Comme vous le savez, le groupe de travail sur l'examen périodique universel a proposé deux méthodes. Je pense que la seconde est de loin supérieure, parce qu'elle permettra au Conseil de tenir sa session habituelle et de travailler à d'autres questions plutôt qu'au rapport sur le pays seulement.

Je voudrais aussi souligner que l'examen périodique n'est pas un examen par des pairs. Certaines des recommandations du groupe de travail visaient à l'établissement d'un examen par des pairs. Dans ce cas, les États se pencheraient sur des États. C'est ce que nous voulons, mais nous voulons aussi que la société civile participe au processus, ainsi que les experts et les institutions nationales.

En ce qui concerne les procédures spéciales, il convient de garder à l'esprit la résolution 60/251 de l'Assemblée générale des Nations Unies qui en demande le maintien. Ce n'est pas seulement une décision du conseil. L'Assemblée générale s'est clairement prononcée. Il faut maintenir le système et, quand on fait allusion au système, on y inclut les rapporteurs spéciaux thématiques, comme l'a mentionné Mme Duplessis.

[Français]

Nous avons besoin de rapporteurs spéciaux et thématiques, notamment pour les groupes les plus marginalisés et les plus fragiles, et pour les entités dont les droits sont les plus menacés à travers le monde.

Inutile pour moi de plaider le fait qu'il est important que soient maintenus les groupes de réflexion, l'organe consultatif d'experts, l'ancienne sous-commission des droits de l'homme. Je pense que preuve est faite de façon indiscutable qu'il y a des enjeux émergeants concernant les droits humains. Pour ne prendre que quelques exemples, il y a la responsabilité sociale des multinationales, la gestion de l'histoire, la gestion de la religion, la question des Autochtones. Dans le passé, cette sous-commission établissait les bases à partir desquelles la commission travaillait sur les normes et il est nécessaire de la maintenir.

Le Canada est membre du conseil et le sera pour les quatre prochaines années. C'est l'un des tout premiers pays dont la politique des droits humains sera revue puisqu'on a décidé que les pays membres du Conseil seront les premiers à subir cet examen.

Le Canada a enrichi de façon substantielle le budget du haut commissariat qui en a bien besoin. Sur la question du Darfour, le Canada a été un des pays qui a poussé pour qu'une session spéciale ait lieu. Un pays comme le Canada et les pays membres du Groupe de l'Europe et d'autres doivent occuper le terrain. Il est vrai de dire qu'il est indécent que les sessions ne portent que sur Israël et la Palestine, mais si on ne prend pas d'initiatives, les sessions vont porter sur des sujets que nous trouverons inacceptables. L'équilibre doit se faire dans les prises de perspectives.

Nous l'avons dit à plusieurs reprises et je voudrais le redire devant vous aujourd'hui : compte tenu de l'importance des droits humains dans la politique internationale, la politique régionale et les politiques nationales, compte tenu de ce qui se passe en Chine et de son impact sur un nombre croissant de pays et des contenus de la politique de ces pays, notamment en matière de droits humains, compte tenu de ce qui se passe dans le monde arabe, — la Chine et le monde arabe étant en quelque sorte pour nous les deux nouvelles frontières des droits humains — je crois que le Canada a les moyens et devrait avoir la volonté politique de créer un poste de représentant spécial des droits de l'homme.

[Traduction]

Il faudrait au centre d'un système politique une personne employée à plein temps comme ambassadeur itinérant, qui veillerait à ce que le Canada se fasse les alliés voulus.

[Français]

Dans ce contexte où nous devons construire le Conseil des droits, définir une politique canadienne en appui aux institutions régionales des droits, repenser nos politiques en fonction des outils nationaux, le gouvernement devrait considérer sérieusement les formules qui ont été adoptées ailleurs.

La Grande-Bretagne a créé un comité paritaire de la Chambre et du Sénat concernant les droits de la personne. Est- ce qu'au Canada une formule de cette nature ne serait pas intéressante? Est-ce qu'on ne pourrait pas avoir un comité du Cabinet, un comité du Conseil des ministres ou un sous-comité du conseil des ministres qui suit ces questions sur les droits humains?

Dans ce contexte, compte tenu de ce qui se passe à Genève, nous avons décidé à Droits et Démocratie d'ouvrir un bureau en permanence à Genève dont les objectifs sont triples.

Premièrement, suivre les travaux du conseil et gérer de façon plus directe avec le haut commissariat l'entente que nous avons avec Mme Arbour pour les trois prochaines années sur les interventions conjointes pour les droits et les démocraties dans un certain nombre de pays du monde.

Deuxièmement, donner aux ONG canadiennes, qui n'auront pas les moyens de suivre les travaux du conseil qui se réunit trois fois statutairement par année en plus des sessions spéciales, un point de chute à partir de notre bureau de Genève via Internet ou autre. On informera les 60 partenaires des ONG canadiennes, qui travaillent sur les droits humains, et l'on organisera d'une façon plus solide des événements parallèles en invitant les gouvernements à l'occasion des sessions du conseil.

Je me permets donc de dire que nous sommes en train de compléter la création d'un réseau canadien d'ONG dédié aux droits humains. Cela a déjà existé, mais a été abandonné. Droits et Démocratie assumera le secrétariat de ce réseau dans les prochaines semaines ou mois. Nous le faisons avec le ministère des Affaires étrangères et avec les autres instances qui s'intéressent aux droits de l'homme dans notre pays. Vous trouverez plus de détails dans le rapport écrit que nous venons de déposer dans les deux langues officielles.

[Traduction]

La présidente : Je voudrais poser une question aux deux témoins. Madame Duplessis, j'ai trouvé utile que vous parliez des différents traités et de leurs méthodes, ainsi que de la façon dont on pourrait les fusionner. Jusqu'à présent, nous avons surtout entendu parler de la difficulté de les fusionner, étant donné que chacun est tellement spécialisé.

Dans ce que j'ai écrit, je n'avais pas envisagé les éléments de la convention elle-même, ni la façon de les réunir dans la pratique : comment gère-t-on tous ces éléments? Comment leur donne-t-on constance et poids? Je vous remercie de vos remarques.

Ce que l'on craint avant tout, c'est de ne plus avoir la même capacité que par le passé de faire entendre notre point de vue sur les droits de l'homme, que l'on soit membre de la population canadienne ou du gouvernement du Canada. Par le passé, nous avons dit que la Commission des droits de l'homme était politisée — si politisée qu'il était temps d'y remédier. Bien des initiatives ont toutefois été entreprises au fil des ans, parfois à l'initiative des Canadiens, pour contrer le jeu politique qu'entraîne inévitablement la réunion de plusieurs nations ayant différents points de vue.

Nous entendons dire que le nouveau conseil est affecté par le même phénomène : la dimension politique s'est tout de suite installée. Nous essayons en fait, semblerait-il, de défendre tous les acquis assurés à l'époque de la Commission. Hormis l'examen périodique universel, il ne semble y avoir aucune mesure nouvelle ou novatrice pour résoudre la question des manœuvres politiques. Ai-je raison, d'après vos deux points de vue?

[Français]

Mme Duplessis : Je comprends la réponse relativement mitigée parce qu'il semble que la révision ou l'innovation se concentre sur l'examen périodique universel. Néanmoins, des choses ont été faites pour calmer les craintes de politisation surtout sur le plan de la composition du conseil, bien qu'au départ des États voulaient un club vertueux et que très peu d'États fassent partie de ce club des champions des droits de l'homme.

On a abordé ces craintes en permettant la suspension d'un État qui viole massivement les droits de l'homme avec une majorité qualifiée aux trois quarts. À partir de ce qu'on a hérité de la commission, ce sont de nouvelles façons de faire qui se mettent en place. En ce qui a trait à la politique des blocs régionaux, qui, à mon avis, est le plus grand danger pour la politisation, le Canada a travaillé énormément avec des ONG, des petits pays comme la Suisse, un État qui a énormément travaillé dans ce projet de nouveau conseil des droits de l'homme, donc des pays moins polarisés.

En ce moment, la polarisation se fait avec la répartition géographique de manière très simple. Le groupe des États africains et le groupe des États asiatiques ont la majorité automatique. Ils l'obtiennent et il est évident qu'ils forment un bloc sur plusieurs sujets face au bloc régional de l'Europe et des pays de l'Amérique latine. Il est évident que le Canada doit, non pas absolument rester dans le bloc des pays européens, mais il doit travailler des affiliations transversales avec des ONG et des petits pays en tant que moyenne puissance.

Votre comité a déjà mentionné que le Canada était une moyenne puissance et je crois qu'une moyenne puissance sur le plan international doit utiliser le droit et trouver des façons de se dépasser. Car le droit est un outil qui permet de dépassionner un débat. Le Canada devrait se faire un ardent défenseur de la résolution et de ses principes. On a tous les principes directeurs entre nos mains pour éviter une confrontation entre blocs qui serait extrêmement dommageable.

[Traduction]

M. Roy : Vous posez une question qui ne laisse pas indifférent et vous connaissez la situation mieux que nous tous. La situation à Genève comporte de nombreux nouveaux éléments. Tout d'abord, vous avez mentionné l'examen périodique universel, qui est extrêmement important. Nous en verrons les résultats dans 18 ou 24 mois, quand le Conseil présentera en bloc l'état des droits de l'homme.

Deuxièmement, interviennent les modalités du choix des pays qui font partie du Conseil des droits de l'homme. Ils doivent prouver par leurs propres politiques qu'ils prennent ces questions au sérieux, avant de pouvoir être membres du comité. Il sera aussi intéressant de voir comment sera intégrée cette notion.

Comme vous le savez, les membres du Conseil peuvent convoquer des séances spéciales. C'est également un élément nouveau. Et ils l'ont fait au cours des 10 derniers mois. C'est important.

Enfin, le Conseil doit présenter un rapport annuel d'ensemble à l'Assemblée générale des Nations Unies. Cela aussi, c'est nouveau. Ainsi, la question des droits de la personne sera soumise chaque année à l'Assemblée générale annuelle des Nations Unies. C'est un élément complètement nouveau.

Ce sera fascinant de voir les résultats du Conseil au cours des deux ou trois prochaines années. Le Conseil sera toujours politisé. Il ne faut pas se faire d'illusions. La Chine est la Chine et les États-Unis sont les États-Unis; c'est le monde dans lequel nous vivons. Les gouvernements ne vont pas franchir cette porte et décider de s'abstenir dès lors de tout jeu politique.

Il y aura des manœuvres politiques. Mais certains mécanismes, comme l'examen périodique universel, empêcheront les manœuvres politiques.

Je voudrais parler du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme. Après deux ou trois ans à fonctionner comme secrétariat, il sera entièrement remanié, question à laquelle on travaille d'ores et déjà. La moitié des activités seront nouvelles. C'est un aspect qui a trait à ce dont vous avez parlé au sujet du traité. Il est trop tôt pour décider de fusionner tous les traités en un seul document juridique.

Par exemple, le haut-commissaire participera à un examen portant sur 85 pays et retirera des informations de tous ces traités. Il en sortira quelque chose. Je ne sais pas quoi, mais il en sortira quelque chose. Je ne sais pas si cela se fera aux dépens des autres fonctions du haut-commissaire, mais il s'élaborera de ce fait quelque chose de hautement important.

Le sénateur Poy : J'ai une question spécifiquement pour M. Roy. Vous avez parlé de la Commission asiatique et de la Commission africaine, en soulignant qu'elles fonctionnaient en bloc. A-t-on constitué ces commissions pour créer des règles distinctes? Il serait logique de penser que les mêmes règles s'appliquent à tous. S'agit-il uniquement de blocs politiques? J'ai besoin d'un éclaircissement.

M. Roy : Comme vous le savez, sur le continent européen et dans notre hémisphère, dans les Amériques et en Afrique, nous avons la commission des droits de l'homme originale. Les commissions de l'Asie et de l'Afrique sont différentes. Dans cet hémisphère, elles sont la création du pays. Elles n'ont pas de liens directs institutionnels ou juridiques avec le Conseil des droits de l'homme de l'ONU.

Il en va différemment de la commission d'origine. Par exemple, les pays africains peuvent décider de nommer un rapporteur spécial. Si tel est le cas, ils reçoivent un rapport national sur ce qui se passe dans leurs pays membres. C'est là un niveau différent, sans lien avec l'autre, sauf que si vous êtes le Burkina Faso ou la Bolivie et que vous avez préparé un rapport pour votre commission d'origine, vous en utiliserez largement le contenu quand vous vous rendrez à Genève.

Le sénateur Poy : Le Conseil n'a pas de membres dans ces blocs?

M. Roy : Non.

Le sénateur Poy : Il est totalement différent.

M. Roy : Il est différent et indépendant.

Le sénateur Poy : En ce qui concerne les peuples autochtones, ont-ils leur propre bloc ou commission qui fait fi des frontières et des distinctions politiques?

M. Roy : Les peuples autochtones ont énormément progressé dans le système de l'ONU. Il y a 25 ou 30 ans, ils n'étaient pas représentés aux Nations Unies. Maintenant, ils ont un groupe qui joue un rôle important dans la préparation de la déclaration des droits des peuples autochtones de l'ONU. Hélas, le Canada a voté avec la Russie et la Russie, avec le Canada, sur cette question. C'est la première chose.

Ils ont également la tribune permanente à New York. C'est une dame déterminée des Philippines qui la préside. Ils n'ont pas de commission ou d'institution, mais ils font désormais partie du système. Nous ne pouvons pas travailler dans le domaine des droits de la personne ni dans celui des droits des peuples autochtones sans collaborer avec cette coalition à Genève ou cette tribune permanente à New York.

Le sénateur Poy : C'est un bloc qui transcende les frontières politiques : les peuples autochtones de l'Australie travaillent avec ceux du Canada?

M. Roy : Oui, c'est un réseau international.

Le sénateur Poy : Leur voix est-elle entendue au Conseil?

M. Roy : La Commission a décidé, il y a 10 ans, de créer ce groupe de travail qui travaille à présent depuis 10 ou 11 ans à l'élaboration d'une déclaration des droits des peuples autochtones.

Je vous répondrai ceci : il y a 10 ans, il était assez actif et assez remarqué pour être entendu au Conseil qui a décidé qu'il serait bon d'essayer de parvenir à un consensus sur les droits des peuples autochtones et de l'enchâsser dans une déclaration universelle.

[Français]

Le sénateur Dallaire : Madame Duplessis, vous avez indiqué qu'en tant que moyenne puissance, on ne devrait pas jouer un rôle purement axé vers les blocs; pour nous, le bloc européen.

Dans ce contexte, je suis d'accord à 100 p. 100. Ne pourrait-on pas avoir une philosophie complètement différente dans notre rôle à l'échelle internationale dans le domaine des droits humains, et devenir des chefs de file dans la volonté de percer ces blocs et d'être un pont pour les gros joueurs comme les États-Unis? Ne pourrait-on pas créer cette capacité? Y a-t-il un désir au ministère des Affaires étrangères? Cette initiative a-t-elle déjà été envisagée?

Mme Duplessis : Je suis tout à fait d'accord avec vous. Le Canada devrait jouer ce rôle. C'est la seule façon de nous sortir d'une logique polaire qui ne fonctionne pas. On croyait être sorti de ce monde bipolaire après la guerre froide et j'ai l'impression qu'un autre monde bipolaire est en train de se créer.

Pour ce qui est du ministère des Affaires étrangères, je ne pourrais pas vous répondre. Je n'ai aucune idée de la volonté de l'exécutif canadien par rapport à cette logique transversale. J'ai déposé un texte et vous avez des informations si cela vous intéresse. Plusieurs documents de travail conceptuels ont été déposés par des pays, des ONG qui auraient été fortement encouragées par le président du nouveau conseil Luis Alfonso De Alba, qui représente l'ambassadeur du Mexique, une autre puissance moyenne. Il a énormément encouragé — et le fait encore — des pays comme le Canada, la Suisse, le Luxembourg à utiliser des logiques transversales des droits de l'homme pour atteindre des pays perméables à la logique des droits de l'homme et créer des alliances sur des sujets plus spécifiques. Cette façon de faire est encouragée à l'intérieur même du nouveau conseil.

Le sénateur Dallaire : Notre visite récente nous a donné l'impression que nous étions tout simplement des pions des Américains.

Mme Duplessis : Non, je ne pense pas.

Le sénateur Dallaire : C'est l'impression que j'ai et j'aimerais voir la preuve du contraire sur le conseil. Êtes-vous consciente qu'il se fait de la recherche spécifique où une moyenne puissance comme la nôtre pourrait innover de nouvelles méthodes de travail avec les blocs. Y a-t-il vraiment du travail concret?

Mme Duplessis : Au Canada, à l'intérieur des ministères, je ne pourrais pas vous répondre, cependant à l'échelle internationale, je pourrais vous envoyer le lien au sujet du document de travail du Canada.

Le sénateur Dallaire : Mais aucun travail concret n'a été entrepris à ce sujet.

Mme Duplessis : À ma connaissance, non.

Le sénateur Dallaire : Ma prochaine question s'adresse à M. Roy.

Avec une loi fondamentale comme la Charte canadienne des droits et libertés et avec l'évolution des différents protocoles qui existent et leur application dans notre pays, vous avez évoqué nombre d'idées pour faire évoluer la situation des droits de la personne. Vous avez parlé d'un ambassadeur général, entre autres. Quelle opinion avez-vous d'un ministre attitré aux droits de la personne — plutôt que de s'en remettre au ministère de la Justice — semble gérer ce dossier comme une tâche secondaire et qui délègue cette responsabilité aux fonctionnaires?

M. Roy : On a déjà parlé de ce sujet ensemble. Je connais votre question et vous connaissez ma réponse, mais je suis content de pouvoir la reformuler devant le comité.

Si vous me le permettez, je voudrais ajouter à la réponse de la professeure Duplessis concernant la capacité du Canada de rassembler au-delà des groupes prévisibles comme le groupe européen.

[Traduction]

Nous l'avons fait dans notre campagne contre les mines terrestres. Nous l'avons fait pour la Cour pénale internationale. Nous l'avons fait récemment dans bien des domaines importants.

[Français]

Concernant maintenant votre question, est-ce qu'on devrait avoir un ministère des Droits de la personne?

[Traduction]

La première réaction serait de dire : « Pourquoi pas? ». Suivrait une réflexion plus approfondie sur les répercussions. Si, au bout du compte, les autres ministères, comme la Sécurité, la Défense, la Justice et les Affaires extérieures, se lavaient les mains des droits de la personne comme étant désormais du seul ressort de ce secrétariat, je serais contre.

Nous sommes à une époque où il doit être question des droits de la personne dans tous les domaines. Je demanderais aujourd'hui que le premier ministre nomme quelqu'un de proche du cabinet du premier ministre. Envisageons les dossiers de sécurité. Combien d'emplois avons-nous créés? Il y a eu plus d'emplois d'importance avec de gros budgets, mais pas un seul pour les droits de la personne.

[Français]

J'aimerais mieux avoir un comité du Cabinet sur la question des droits de la personne, présidé par le premier ministre, par exemple. Si nous sommes sérieux et pensons que la question des droits de la personne est le grand débat des 25 prochaines années dans le monde — et je crois cela —, il faudra aller à d'autres instances. J'ai travaillé avec des ministres fédéraux par le passé, dans d'autres fonctions, qui avaient le titre, mais pas les budgets et qui, malgré une très bonne volonté ne pouvaient pas livrer. Les gens disaient : « Mais non, il y en a un ministre de la Francophonie, pourquoi aller vers les Affaires étrangères ou à la Justice? Il y a un secrétaire d'État à la Francophonie avec un budget de 1,2 million de dollars! » Bien sûr, l'idée nous passe par la tête : pourquoi ne pas avoir un ministère des droits humains? C'est quand même tentant à première vue, mais quand on réfléchit un peu plus, on se demande si nous ne sommes pas en train de placer les droits humains dans un coin. Et c'est là que je commence à avoir de très sérieux doutes.

Le sénateur Fraser : J'aurais deux questions, une pour chaque témoin.

Je commencerai avec vous, madame Duplessis, si vous le permettez. C'est au sujet de cette question de l'unification des organes de contrôle, une seule autorité veillant sur toutes les conventions. Vous nous avez expliqué les difficultés juridiques immenses que cette solution amène, mais pensez-vous que ce serait une bonne idée que le Canada appuie cette proposition. Je ne vous cache pas que cela m'inquiète, car je pense que dès qu'on aura une seule autorité, certaines conventions seront négligées, à commencer par les droits des femmes. Qu'en pensez-vous?

Mme Duplessis : J'ai beaucoup réfléchi à cette question. Je crois que tout dépend de la structure de ce corps unifié. L'un des dangers serait effectivement le risque de perdre certains droits spécifiques ou certains groupes vulnérables qui sont protégés dans ces conventions, mais dans la proposition du haut commissaire, on a noté cette situation afin de l'éviter. Je pense donc que, déjà, c'est rassurant de savoir qu'ils sont conscients de ce danger clairement énoncé; on peut l'éviter si on le souhaite et si on a la volonté politique.

Ce qui m'inquiète plutôt, c'est la structure. Il est question d'un travail en chambre où il y aurait plusieurs chambres. On a repris un peu l'idée que chaque chambre ferait le travail d'un des organes conventionnels existants, donc il y aurait sept chambres, mais on s'est dit que cette proposition n'est pas viable parce que l'unification n'est pas réelle, c'est un paravent. Finalement, chaque chambre recrée le travail de l'organe conventionnel. Cependant, on veut aller plus loin. Nous avons commencé à discuter et nous avons trouvé qu'ils pourraient travailler en chambre en touchant aux sept conventions. Il faudrait partager l'expertise entre les différents experts et on a prévu — et cela m'intéresse au plan juridique —, une chambre qui recevrait toutes les plaintes, les pétitions individuelles pour les États qui ont ratifié les protocoles pour chaque convention. Une chambre s'occuperait de recevoir ces plaintes individuelles. Je trouve cela fondamental. Lorsqu'on parle d'un corps unifié, il y a un danger évident de fragmentation du droit international. Il y a de plus en plus de mécanismes de contrôle internationaux et de mécanismes quasi judiciaires et on n'arrive plus à retrouver et à prédire la règle de droit, ce qui est extrêmement dommageable pour un système juridique. Au bout du compte, c'est sa mort. Les États doivent connaître leurs obligations internationales avec précision. C'est pourquoi une chambre ou un corps unifié juste au niveau de la jurisprudence — on n'est pas censé l'appeler comme cela au plan international —, je pense que ce serait très bénéfique à ce niveau.

Je partage tout à fait votre crainte de voir certaines conventions et certains groupes perdre un peu l'étendue qu'ils avaient auparavant.

Le sénateur Fraser : Je vous donne un exemple. Je reviens de Strasbourg et j'ai été vraiment choquée. J'étais à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et, entre autres, on a regardé le projet de convention sur l'exploitation sexuelle des enfants et l'abus sexuel des enfants. Imaginez-vous, pour avoir un consensus parmi les pays européens, on a dû insérer dans cette convention des clauses échappatoires — qui sont à mon avis scandaleuses — qui donnent au pays le droit de ne pas accepter les dispositions, par exemple, sur la pornographie juvénile. C'est extraordinaire! C'était le prix — en Europe — d'un compromis. Si c'est le cas en Europe, imaginez ailleurs! Vous comprenez maintenant pourquoi je suis inquiète.

Monsieur Roy, cette question de code de conduite, plusieurs personnes nous ont dit comme vous que c'est un point d'inquiétude. Est-ce que vous pourriez nous donner plus de précision? Pourquoi est-ce un point d'inquiétude? Quels sont les dangers et qu'est-ce qui se passe? Qu'est-ce que vous savez sur ce qui se passe là-dessus en ce moment?

M. Roy : Dans les discussions sur les procédures spéciales concernant les rapporteurs, un certain nombre de pays ont proposé, premièrement, que le choix des rapporteurs spéciaux soit fait par le conseil. Deuxièmement, ils ont proposé que l'on encadre le travail des rapporteurs spéciaux d'un code de conduite.

Il y a quelque chose d'utile dans cette proposition. À partir du moment où il y a des dizaines d'experts qui sont des rapporteurs spéciaux, il doit y avoir, quelque part, une espèce d'adhésion de ces personnes à des normes politiquement convenables.

Prenons un cas précis. Il y a quelques années, lorsque M. Ramcharam était le haut commissaire intérimaire, un des rapporteurs spéciaux est allé en Chine et a fait une conférence de presse où il a, avant même que son rapport n'ait été reçu et évalué, condamné le gouvernement chinois dans des domaines qui touchaient à l'alimentation, la nutrition, l'agriculture, et cetera.

Cet individu qu'on a choisi, qui est compétent, qui a manifestement des choses à raconter, peut-il, au nom de la communauté internationale, après un séjour d'une semaine dans un pays, condamner la politique de ce pays au nom des droits humains? Il représente quand même le conseil. Il est nommé par le haut commissaire. Il y a des règles. Mais ces règles ne doivent pas empêcher les rapporteurs spéciaux d'avoir accès, lorsqu'ils sont dans un pays, à la société civile. Ces règles ne doivent pas les empêcher d'avoir accès aux partis de l'opposition, d'avoir accès aux documents et à ceux qui les produisent, aux hauts fonctionnaires des États, et cetera. L'accès des rapporteurs spéciaux doit être absolu. Maintenant, leur discrétion — c'est une question de bon jugement — est un vrai problème.

Sénateur Fraser, en relation avec votre question et à celle du sénateur Dallaire, il m'importe de vous dire un mot sur le Canada. Je crois que le Canada, récemment, a pris quelques positions d'importance; je vous les ai mentionnées tantôt. Le ministre des Affaires étrangères, Peter McKay, a annoncé hier la reprise du dialogue avec la Chine. J'applaudis cette déclaration. Je reviens d'une tournée d'universités de trois semaines en Chine, je crois que ce que M. McKay a annoncé ce matin est extrêmement significatif et important.

Mais il y a des champs qui s'ouvrent au Canada. Je l'ai dit dans ma présentation tantôt, on ne fera pas dans les prochaines années l'économie des droits sociaux et des droits économiques. Il faudra trouver une façon d'encadrer la reconnaissance des droits. Il y a beaucoup d'expériences qui se font dans le monde. Vous parliez de l'Europe. Les Français viennent d'accepter, par une loi de leur Parlement, le droit à l'habitation, à un logement. Il y a plusieurs expériences qui se font et qui mériteraient d'être colligées, sur lesquelles si le Canada prenait un leadership de savoir, il rendrait un immense service et briserait les frontières des blocs prévisibles.

La deuxième idée à laquelle le Canada pourrait s'attacher est cette question sur la Chine. Il y a une effervescence extraordinaire du débat public en Chine et en tant que pays, on ne peut pas simplement le constater; on doit venir, comme le font d'autres pays, en aide à la société civile chinoise, et on peut venir en aide à la société civile chinoise d'une façon plus importante qu'on peut le faire en Égypte, par exemple. Il y a quelque chose de très important à long terme et à l'OMC, les questions de droits socioéconomiques dans la négociation commerciale, les dimensions sociales, les dimensions par rapport à la santé — comme on l'a fait à Doha, mais par rapport à d'autres questions —, si le Canada se positionnait sur ces trois domaines, on reconquerrait un espace public global présent.

[Traduction]

Le sénateur Nancy Ruth : Vous avez parlé de la création d'un secrétariat pour les organisations non gouvernementales, afin de les rassembler. Selon vous, quel sera leur impact sur le Conseil? Comment peut-on le rendre plus efficace? Pensez-vous que les ONG, une fois de retour ici, feront pression sur les provinces pour mettre en œuvre le programme des droits de la personne? Que pensez-vous, accessoirement, des 100 000 $ annoncés par M. Harper pour le musée des droits de la personne, ainsi que du financement permanent de 20 millions de dollars par an? Quelle mission donneriez-vous au musée, pour faire progresser vos causes?

M. Roy : Le musée de Winnipeg a d'abord été annoncé par le gouvernement précédent.

Le sénateur Nancy Ruth : Oui, mais pas le financement permanent.

M. Roy : Vous avez raison, il n'y avait pas de financement permanent.

Vu que nous manquions de temps, nous avons inclus les pratiques exemplaires pour la participation des ONG dans la première partie du cartable que nous vous avons remis. Nous survolons les choses ici, mais, depuis juin dernier et la création du Conseil, tout ce qui concerne la participation des ONG a été acceptable. Il faut encore renforcer et institutionnaliser cet élément, mais les ONG ont été en mesure de participer au travail du Conseil de diverses façons au cours des dix derniers mois.

Le sénateur Nancy Ruth : Que font les ONG de retour au pays pour amener les gouvernements provinciaux à utiliser le financement fédéral en faveur des droits, notamment le droit au logement?

M. Roy : Que font les ONG canadiennes? Vous connaissez mieux que moi la réponse à cette question. Certaines ONG luttent pour le droit des femmes et ceux des Autochtones, en s'efforçant de convaincre des comités comme le vôtre. Là est leur activité. Il y avait 25 000 personnes dans les rues de Montréal hier, sur une autre question, ce qui illustre la vie de la société civile.

Le sénateur Munson : Il y a un gros cartable, mais aussi un article de deux pages extrait du Globe and Mail, que vous avez écrit il y a environ un mois. On revient à l'intégrité du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies. Vous aviez quatre suggestions : premièrement, l'établissement d'un mécanisme d'examen périodique universel efficace; deuxièmement, le maintien d'un système complet de rapporteurs spéciaux, afin d'enquêter sur des sujets tels que la violence à l'encontre des femmes ou les droits des peuples indigènes; troisièmement, le développement d'un corps consultatif d'experts fiables; et, quatrièmement, la création d'un mécanisme de plaintes qui permette à des particuliers d'avoir un recours en cas de violation des droits de la personne.

Vous dites que ces recommandations pourraient être mises en œuvre en l'espace de trois mois. Maintenant, ce serait deux mois. Ce sont des recommandations solides. Vous parlez de l'intégrité du nouveau conseil. Faute d'attaquer le problème de front, qu'adviendra-t-il de l'intégrité de ce conseil qui me semble diminuer semaine après semaine, chaque fois que nous entendons d'autres témoins ou entendons des récits portant sur le Darfour et d'autres pays?

M. Roy : Sénateur Munson, le Conseil travaille à ce renvoi à trois mois dans son échéancier depuis sa création, en juin de l'an dernier. Il lui reste encore deux mois pour finir le travail. Il est censé avoir mis en place les règles et les procédures d'ici juin.

Si le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies échouait, si l'examen périodique universel est une quelconque farce, un document de deux pages sans contenu, ce sera un coup porté à la doctrine et aux politiques des droits de l'homme élaborées dans le monde depuis 60 ans. Nous parlons du caractère universel des droits. Le Conseil est le lieu où l'on doit voir cette universalité à l'œuvre, clairement, avec des promesses tenues et des résultats. Si cela échouait à la suite d'une prise de contrôle par un groupe de nations — je doute que le scénario se réalise, mais on ne sait jamais — le coup serait terrible. Cela pourrait grandement compromettre ce qui a été établi au cours des 60 dernières années.

Le sénateur Munson : Le mois de juin approche à grands pas, et en tant que journaliste et sénateur, j'ai pu constater qu'à l'ONU les choses bougent très lentement.

M. Roy : Je le répète, à mon avis, tous les problèmes ne seront pas réglés d'ici juin. Les choses sont en cours d'évolution. Toutefois, nous recevrons une réponse à l'ensemble des questions d'ici juin.

Ainsi que l'a mentionné Mme Duplessis au sujet de la procédure spéciale et de l'examen périodique universel, nous devrions à tout le moins être mis au courant des éléments essentiels. Nous avons de bonnes raisons de penser que le Conseil fonctionnera relativement bien. La plupart de ses fonctions ne sont d'ailleurs pas nouvelles mais ont été héritées de l'ancienne commission.

Lors de négociations, en règle générale, ce sont les dix derniers jours ou les deux dernières semaines qui sont déterminants. Je suis sûr qu'il y aura des séances de négociation la nuit. Espérons-le et pressons aussi notre gouvernement.

Le sénateur Munson : Tout ce que nous pouvons faire, c'est donc d'espérer.

La présidente : Je vous remercie, monsieur Roy et madame Duplessis. Vous étiez nos derniers témoins, et nous sommes maintenant tout à fait prêts à rédiger notre rapport. Nous garderons à l'esprit l'échéance du mois de juin. Par ailleurs, nous tenons à donner notre avis au gouvernement dans les plus brefs délais et à lui relayer aussi les avis de bon nombre de nos témoins.

Vous nous avez fourni des renseignements inédits qui viendront utilement étayer notre rapport. Vous avez aussi réussi à exposer de manière succincte les problèmes tant politiques que fonctionnels que le Conseil devra résoudre.

Pour ma part, je ne cesserai pas de le soutenir. J'étais à la recherche de propositions et d'avis novateurs, et vous nous en avez fournis. Nous espérons participer au processus qui mènera à la mise sur pied d'un conseil redynamisé, et non le contraire, éventualité à laquelle nous préférons ne pas songer.

Je vous remercie de l'indulgence dont vous avez fait preuve pendant que nous vous faisions attendre ainsi que des documents que vous nous avez fournis. Ils nous seront extrêmement utiles.

Mesdames et messieurs les sénateurs, nous sommes en retard, et je n'ignore pas non plus qu'il y a une réunion de caucus aujourd'hui. Un document budgétaire vous sera distribué, que nous étudierons après l'audition du prochain groupe de témoins. Quant à la question des travaux futurs, elle sera confiée au comité de direction. Je vous proposerai auparavant une marche à suivre relativement à l'ensemble des questions.

Conformément à notre ordre de renvoi portant sur la Commission de la fonction publique du Canada, nous examinons des cas de discrimination présumés dans les pratiques d'embauche et de promotion de la Fonction publique fédérale et étudions la mesure dans laquelle les objectifs pour atteindre l'équité en matière d'emploi pour les groupes minoritaires sont réalisés.

Pour les fins du procès-verbal, en février 2007, notre comité a déposé un rapport intitulé L'équité en matière d'emploi dans la fonction publique fédérale : Nous n'y sommes pas encore.

Nous avons demandé à Mme Maria Barrados, présidente de la Commission de la fonction publique du Canada, et à ses collaborateurs de revenir témoigner devant nous afin de répondre à nos recommandations et à notre rapport et de nous faire bénéficier encore une fois de leurs avis. Ainsi que nous l'avons souligné dans le document, nous tenons vivement à entendre les réactions de la Commission à nos recommandations, mais à notre étonnement, nous avons entendu parler de certaines modifications des cibles ou d'enquêtes qui seraient chargées d'étudier leur pertinence, et cela est nouveau. Nous avons pourtant conclu qu'il n'y avait pas de raison de modifier les cibles : compte tenu de notre étude des antécédents en la matière, elles nous ont paru atteignables. La tâche paraît peut-être difficile, mais elle devrait être réalisable si l'on s'y prend avec constance et si l'on fait preuve de volonté politique et enfin si l'on met en œuvre les politiques et les pratiques appropriées.

Je tenais à souligner cela, et je suis d'ailleurs sûre que vous aborderez la question.

Madame Barrados, c'est vous qui prendrez la parole. Je suppose que les hauts fonctionnaires qui vous accompagnent, Linda Gobeil et Paula Green, vous aideront à répondre aux questions. C'est bien cela?

Maria Barrados, présidente, Commission de la fonction publique du Canada : C'est exact.

La présidente : Vous pouvez faire vos remarques liminaires après quoi nous allons passer aux questions de la part des membres du comité.

[Français]

Mme Barrados : Madame la présidente, je vous remercie de m'avoir invitée à témoigner devant le comité afin de discuter des constatations et des recommandations formulées dans le rapport préliminaire intitulé L'équité en matière d'emploi dans la fonction publique fédérale : Nous n'y sommes pas encore.

De la Commission de la fonction publique du Canada, m'accompagnent Mme Linda Gobeil, vice-présidente principale, Direction générale des politiques et Mme Paula Green, directrice générale, Équité et diversité.

En vertu de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, d'une part la CFP est chargée de découvrir les obstacles au recrutement et à la dotation et de les supprimer. D'autre part, elle doit élaborer des politiques et des pratiques qui favorisent l'établissement d'une fonction publique représentative.

Lors de témoignages antérieurs, nous avons expliqué que la composition de la fonction publique était à l'image de la disponibilité au sein de la population active. Pour ce qui est de trois des quatre groupes visés par l'équité en matière d'emploi, il existe toujours un écart entre la représentation des membres des minorités visibles dans la fonction publique et leur disponibilité au sein de la population active.

Nous vous présentons aujourd'hui un tableau qui montre la représentation des quatre groupes désignés dans la fonction publique fédérale. Nous croyons qu'il est toujours possible de combler l'écart, mais ce qui nous préoccupe c'est plutôt le temps nécessaire pour y arriver.

En ce qui a trait à la direction, nous constatons que les femmes et les membres de minorités visibles sont toujours sous-représentés. Sous le régime de la nouvelle loi sur l'emploi dans la fonction publique, la Commission de la fonction publique a délégué l'ensemble de ses pouvoirs de dotation comme le prévoit la loi.

Celle-ci renferme également des dispositions qui permettent l'adoption des mesures ciblées en matière d'emploi.

[Traduction]

La Commission de la fonction publique peut entreprendre des activités qui permettront d'augmenter le nombre de demandes d'emploi de la part des membres des groupes visés par l'équité en matière d'emploi. Mais la responsabilité d'évaluer la candidature de ces membres incombe à présent au ministère ou organisme d'embauche investi du pouvoir délégué.

En vertu de la nouvelle Loi sur l'emploi dans la fonction publique, la Commission de la fonction publique a élaboré et diffusé des lignes directrices sur l'équité en matière d'emploi dans le processus de nomination pour aider les ministères à intégrer l'équité en emploi à la planification des ressources humaines et des activités. C'est avec intérêt que nous avons pris connaissance du récent rapport du comité ainsi que des recommandations visant à améliorer la représentativité de la fonction publique. Nous vous avons remis un document qui expose en détail nos commentaires au sujet de vos recommandations. Je me permettrai à présent d'évoquer quelques-uns de nos commentaires.

La première recommandation vise à renforcer le leadership en vue d'atteindre les buts de l'équité en emploi en liant les bonis des sous-ministres à l'évaluation du rendement. Ce domaine n'est pas directement du ressort de la CFP. Cependant, nous continuerons de fournir au greffier du Conseil privé les renseignements sur la dotation dont il a besoin, notamment les rapports sur l'équité en emploi, pour qu'il puisse en tenir compte au moment d'évaluer le rendement des sous-ministres.

Nous appuyons fortement la deuxième recommandation. La Commission incite les ministères et organismes à intégrer leur plan de ressources humaines et leur plan d'activités. Nous invitons les administrateurs généraux et administratrices générales à gérer l'embauche de façon stratégique et à faire de l'équité en emploi une partie intégrante des plans de ressources humaines. Il s'agit là de mesures qu'ils doivent adopter pour tirer le maximum des possibilités qu'offre la Loi sur l'emploi dans la fonction publique pour faire en sorte que les nominations répondent aux exigences opérationnelles et aux besoins organisationnels qui importent à l'organisation, y compris l'équité en matière d'emploi.

Nous vous appuyons aussi fortement en ce qui concerne la troisième recommandation. La Commission continue d'élargir l'accès aux emplois dans la fonction publique. Nous avons récemment modifié les lignes directrices en matière de zone nationale de sélection afin d'englober tous les emplois de niveau d'agent. Grâce à ces mesures, les emplois seront plus accessibles aux Canadiens et Canadiennes, y compris aux membres des groupes visés par l'équité en matière d'emploi. Les membres des minorités visibles, qui sont largement concentrés dans les régions de Toronto, de Vancouver et de Montréal, auront accès à plus d'emplois. Et nous savons que les emplois dans la fonction publique intéressent les membres des minorités visibles.

Les candidatures de membres des minorités visibles comptent pour environ 25 p. 100 de toutes les candidatures reçues. De ce pourcentage, seulement 10 p. 100 débouchent sur une nomination, soit un écart de 15 points de pourcentage. Cet écart fait l'objet de la récente étude sur le déclin du taux de nomination que je vous ai fournie aujourd'hui. Le terme « déclin » désigne l'écart entre la proportion des demandes d'emploi et celle des nominations. L'étude a révélé que le taux de nominations en ce qui concerne les quatre groupes visés par l'équité en matière d'emploi excédait leur disponibilité au sein de la population active. Dans l'ensemble, l'étude a démontré qu'il n'y a pas eu de déclin chez les Autochtones, les femmes et les personnes handicapées. Par contre, elle a confirmé que le déclin du taux de nominations chez les membres des minorités visibles était important et généralisé dans l'ensemble des groupes professionnels, des régions et des ministères.

Nous procédons à d'autres recherches et analyses pour déterminer si le déclin persiste sous le régime de la nouvelle Loi sur l'emploi dans la fonction publique et, le cas échéant, à quelle étape du processus de nomination il se produit et quels en sont les causes et les facteurs.

En l'an 2000, on a établi un objectif-repère de « un sur cinq » pour contrer la sous-représentation des membres des minorités visibles. À cette époque-là, il y avait peu de roulement au sein de la fonction publique. Depuis, la donne a changé. Nous étudions donc quels taux de nominations permettraient de rendre la fonction publique pleinement représentative et dans combien de temps.

Votre rapport traite de l'initiative que nous avons prise en vue d'améliorer la représentation des membres des minorités visibles au niveau de la direction. Nous avons réussi à établir un répertoire de 41 candidates et candidats préqualifiés au niveau EX-1. À ce jour, les ministères ont effectué 23 nominations en puisant dans ce répertoire. Trois candidatures sont à l'étude. Nous favorisons une plus grande utilisation du répertoire. Nous savons également que certains ministères utilisent leurs propres processus pour nommer des membres des minorités visibles. Mais cet effort doit se poursuivre.

Les questions relatives à l'emploi des Autochtones demeurent toujours importantes pour la Commission de la fonction publique. Nous savons que des mesures particulières sont nécessaires pour recruter des Autochtones et les maintenir en poste. Nous sommes en train de mettre sur pied un centre d'excellente autochtone à Winnipeg. Nous réexaminerons les outils d'évaluation adaptés à la culture des personnes. Nous examinerons l'utilisation de répertoires, nous formulerons des recommandations sur les questions touchant le maintien en poste des Autochtones et nous élaborerons une stratégie nationale sur l'emploi des Autochtones.

Bon nombre de nos activités actuelles et prévues appuient l'orientation globale énoncée dans votre rapport préliminaire. Je suis d'accord avec vous — nous n'y sommes pas encore. Nous effectuons des analyses dans le but de découvrir les obstacles systémiques, obstacles que nous nous sommes engagés à supprimer. Nous travaillons de concert avec les ministères et l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada afin de porter toute notre attention sur les problèmes et de mettre en place des initiatives. Parmi celles-ci, mentionnons le répertoire de candidates et candidats qualifiés issus des groupes de minorités visibles. Nous savons que nous devons augmenter le nombre de nominations des membres des minorités visibles et assurer l'établissement d'un environnement qui favorise la croissance et le développement de futurs leaders.

C'est avec plaisir que nous répondrons à vos questions.

La présidente : Merci, madame Barrados. J'aurais deux questions puis laisserai la parole à mes collègues.

Tout d'abord, maintenez-vous toujours les cibles dont vous nous aviez parlé, vu que vous n'avez pas de raison de les changer, contrairement à ce que certains semblent laisser entendre?

Deuxièmement, à la suite de notre rapport et de sa diffusion, nous avons reçu des commentaires et des manifestations de soutien, vous vous en doutez bien. L'un des commentaires que j'ai reçus personnellement soulevait une question que nous n'avions pas abordée dans notre rapport : il existe un dilemme, à savoir que, dans certains cas, les minorités visibles ne sont pas si visibles que ça, mais restent dans la catégorie des minorités visibles. Cette personne signalait notamment que, dans notre rapport et dans le fonctionnement de la Commission de la fonction publique, les personnes qui s'identifient peuvent profiter de certaines occasions; mais que la plupart des gens qui entrent dans un service s'efforcent de s'y intégrer et hésitent à participer à un processus d'auto-identification qui les met à part.

Il existe donc cette tension entre avoir les compétences et être membre d'une minorité visible ou avoir simplement les compétences.

C'est une difficulté pour la personne qui se porte candidate ou qui demande à être promue et nous n'en avions pas entendu parler dans les témoignages, ni y avions réfléchi.

Quelle est la part de l'auto-identification dans le travail que vous effectuez?

Mme Barrados : Laissez-moi parler d'abord des cibles : elles n'ont pas été fixées par la Commission de la fonction publique, mais par le gouvernement. Dans les cibles du gouvernement, j'ai demandé comment on était arrivé à la cible d'une personne recrutée sur cinq. Nous ne l'atteignons pas. Une personne recrutée sur cinq, c'est une cible ambitieuse, car il y a du rattrapage à faire. Il faut à l'heure actuelle faire du rattrapage pour être représentatif, mais on n'a pas toujours ce chiffre d'un sur cinq.

Le gouvernement ne dit rien quant à son objectif. Il ne parle plus d'objectif. Il serait approprié de demander à l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada quelle est sa cible. Cela m'a donné un peu de répit quant aux cibles.

Quel serait le niveau approprié d'embauche pour permettre le rattrapage? C'est une cible de rattrapage à court terme. Cela ne devrait pas être une cible à long terme. Au taux actuel, combien de temps nous faudrait-il? J'aimerais avoir une année. Le doublement du roulement par rapport à l'habitude offre une occasion en or, mais nous ne sommes pas habitués à ce type de roulement. Nous embauchons beaucoup de sang neuf et il y a une occasion à saisir. Si le gouvernement établit une cible, je vais vous dire franchement quelles sont mes intentions : je suis sur le point d'embaucher Statistique Canada pour produire une série de projections d'après la main-d'œuvre telle que nous la connaissons et la main-d'œuvre prévue à l'issue du nouveau recensement. J'ai la ferme intention d'utiliser le pouvoir de la Commission de la fonction publique pour pousser à la roue dans ce sens, mais j'ai fait le commentaire que je n'étais pas sûre de la cible dans ce contexte. Personne n'a expliqué quel était le chiffre juste, ni fourni une justification et une projection adéquates pour l'expliquer. Avec le roulement actuel, la cible serait peut-être moindre; à cause d'autres obstacles dans le système, peut-être cette cible est-elle trop peu ambitieuse. C'est ce que je voulais dire par mon commentaire.

À l'époque où j'ai comparu devant le comité, le gouvernement s'en tenait encore à sa cible d'une personne recrutée sur cinq. Mais l'acuité du problème a diminué et la cible, disparu.

Pour aborder à présent le second problème que vous avez mentionné, c'est un véritable dilemme. Il y a des gens pour qui toute la question de l'auto-identification est difficile; ils ne veulent pas s'auto-identifier; ils estiment que l'auto- identification est entachée d'un stigmate.

Je sais, par contre, que notre fonction publique n'est pas suffisamment représentative. Comment parvenir à la rendre représentative? Il faut un chiffre quelconque. J'aimerais avoir une cible quelconque. Tout le problème repose sur des questions de base : Avons-nous une idée raisonnable du chiffre exact? Que visons-nous? Comment savons-nous que nous avons atteint notre objectif?

Je me suis aperçu que les choses n'étaient pas parfaites. Les chiffres sont sans doute plus importants que ce dont il est fait état. Si les gens estiment pouvoir faire carrière dans la fonction publique sans tirer parti des programmes et initiatives d'équité en matière d'emploi, tant mieux pour eux.

Toutefois, nombreux sont ceux qui ne sont pas de cet avis. Pour eux, il me semble que nous avons besoin de ces cibles, jusqu'à ce que nous en soyons plus proches. Quel que soit le chiffre retenu, il faut que nous en soyons plus proches qu'à l'heure actuelle.

Le sénateur Nancy Ruth : Je voulais poser une question et vous demander une réponse sans doute entièrement spéculative.

J'ai lu les témoignages entendus par le Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des communes et les réponses des gestionnaires ou des sous-ministres adjoints à des questions portant sur l'analyse comparative entre les sexes.

L'intervenant du ministère de la Justice a dit que, vu que le ministère employait à présent plus de 50 p. 100 de femmes, il n'était pas véritablement nécessaire de procéder à une analyse comparative entre les sexes.

J'en suis restée sidérée et horrifiée. Ma question porte sur les répercussions de l'emploi. La Commission de la fonction publique du Canada procède-t-elle à de quelconques mesures des changements aux cibles? Certains ministères estiment-ils que la politique est susceptible de changer?

Mme Barrados : Ce sont des discussions que j'ai eu l'occasion de tenir à plusieurs reprises. D'ailleurs, la discussion passe rapidement à la question de savoir si nous ne sommes pas coupables de discrimination à l'encontre des hommes blancs, en tant qu'organisme.

À l'heure actuelle, environ 52 p. 100 des fonctionnaires sont des femmes, c'est pourquoi j'ai inclus les chiffres dans le document annexé. Il reste à savoir quels postes ces femmes occupent. Partout où il y a beaucoup de tâches de secrétariat dans la fonction publique, on est plus susceptible d'y trouver des femmes. Nous comptons toujours une grosse part d'emplois administratifs de secrétariat.

Dans le groupe de la direction, par contre, les chiffres ne sont pas bons. On y compte 38 p. 100 de femmes. C'est beaucoup plus qu'à l'époque où j'ai débuté. Les progrès réalisés sont considérables, mais nous n'avons pas atteint les 50 p. 100. Nous ne sommes pas surreprésentées.

Il existe également des créneaux dans la fonction publique, notamment dans les secteurs scientifiques et techniques, qui ont beaucoup de difficulté à même s'approcher d'une représentativité. Je comprends le défi, vu qu'il est difficile de recruter des femmes qui s'intéressent à ce type d'emplois, comme il est difficile de recruter des étudiantes universitaires dans ces domaines. Le groupe de relève n'est pas très étoffé, dans certains de ces domaines.

Vous avez également posé une question sur les répercussions de certains de ces commentaires. Je m'y connais un peu en statistique, si bien que je me préoccupe beaucoup des chiffres et de savoir s'ils sont exacts. J'essaie de mieux mesurer les chiffres réels, ainsi que les obstacles, avant de déployer des efforts accrus pour faire progresser les choses dans le sens voulu.

Avoir une bonne représentativité dans l'ensemble est une bonne chose, mais il n'y a pas de représentativité au sein du leadership dans certains secteurs.

Le sénateur Nancy Ruth : N'êtes-vous pas surprise, toutefois, qu'un représentant de Justice Canada dise que l'analyse comparative selon les sexes n'est peut-être plus importante, vu que 50 p. 100 des employés du ministère sont des femmes? Pour moi, les deux n'ont rien à voir nécessairement avec l'autre.

Mme Barrados : Je pense que cela a à voir avec le contexte où évolue la personne. Les chiffres étaient peut-être appropriés pour ce dont s'occupait cette personne. En ce qui me concerne, dans la fonction publique dans son ensemble, la partie n'est pas gagnée.

Le sénateur Poy : Madame Barrados, je voudrais vous poser une question sur les cibles.

À l'heure actuelle, dans l'embauche visant l'équité en matière d'emploi, le seul groupe à ne pas atteindre la cible est celui des minorités visibles. Toutefois, le pourcentage des chiffres d'embauche porte sur l'ensemble de l'embauche. Vous avez parlé du niveau de la direction et du groupe en dessous de ce niveau. Je crois que le chiffre est de 8 p. 100 à l'heure actuelle. Inclut-il tout le monde?

Mme Barrados : Il inclut l'ensemble des minorités visibles, oui.

Le sénateur Poy : À tous les niveaux de la fonction publique?

Mme Barrados : Oui.

Le sénateur Poy : Avez-vous des chiffres pour le niveau de la direction?

Mme Barrados : Dans le document qui vous a été distribué, nous vous avons fourni deux tableaux. L'un porte sur la fonction publique dans son ensemble, avec un chiffre de 8,1 p. 100; l'autre, sur le groupe de la direction, où les minorités visibles représentent environ 5,1 p. 100.

Le sénateur Poy : Merci, je n'avais pas regardé ces tableaux. Je viens juste de recevoir le document.

Pour ce qui est de la cible, vu l'immigration et l'afflux accru de membres des minorités visibles, vu aussi les enfants nés au Canada, il va falloir augmenter cette cible, en théorie. N'est-ce pas?

Mme Barrados : Nous voulons aboutir à la disponibilité dans la population active, pour l'ensemble de la fonction publique, puis ventiler les chiffres.

Vous avez raison. Avec l'évolution de la composition de la population canadienne, interviendra également une évolution du chiffre de disponibilité dans la population active. La cible d'un sur cinq dont nous avons parlé plus tôt était une cible de rattrapage. Nous nous efforcerons toujours de tenir compte de la disponibilité dans la population active pour faire le point sur notre situation. La cible d'un sur cinq me préoccupe.

Le sénateur Poy : Pour le rattrapage.

Mme Barrados : Oui, pour ce qui est de savoir à quelle vitesse nous voulons effectuer ce rattrapage. L'environnement a changé, si bien que le contexte est différent.

Le sénateur Poy : Vous avez mentionné un grand nombre de départs à la retraite.

Mme Barrados : Effectivement.

Le sénateur Poy : C'est donc le moment de faire du rattrapage, n'est-ce pas? C'est l'occasion à saisir?

Mme Barrados : C'est une occasion en or, mais je crains aussi que nous n'ayons pas effectué assez de travail. Les questions posées par le comité et dans votre rapport m'amènent à remettre en question cette cible. À quoi tiennent les obstacles, précisément? À quel moment l'emploi échappe-t-il aux membres des minorités visibles? L'intérêt ne manque pas. Et les minorités visibles franchissent avec succès les premiers filtrages électroniques — contrairement aux hypothèses envisagées un moment comme quoi elles ne comprenaient pas le système. À quel point du système surgit l'obstacle? C'est la question que nous nous posons maintenant.

Le sénateur Poy : Vous avez dit, si j'ai bien compris, que les chefs de ministère n'avaient pas de bonis spéciaux s'ils atteignaient une cible? Il n'y a pas de bonis liés à l'embauche? Vous ai-je bien comprise?

Mme Barrados : La nomination des sous-ministres et des responsables d'organismes se fait par le gouverneur en conseil. Elle ne relève pas de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, hormis en ce qui concerne les activités politiques. Le lien avec ces fonctionnaires passe donc en fait par le greffier du Conseil privé.

C'est pourquoi j'ai répondu comme je l'ai fait à votre première recommandation : que nous sommes responsables de ce domaine, mais que nous informons le greffier, afin qu'il sache que nous évaluons les gens sur leurs résultats en matière de dotation, y compris leur atteinte des cibles pour les membres des minorités visibles.

Le sénateur Poy : Vous ne pouvez rien imposer, en fait.

Mme Barrados : Non, pas dans ce cas-là. La capacité de la Commission de la fonction publique à imposer quelque chose relève d'autres éléments de la fonction publique : des sous-ministres.

Le sénateur Poy : J'aurais une brève question complémentaire sur l'auto-identification. Est-ce que cela inclurait les gens qui ont changé leurs noms de famille? La façon la plus facile d'identifier les gens est par leurs noms de famille. On les repère tout de suite comme n'étant ni francophones ni anglophones. L'auto-identification ne fait pas partie de cela?

Mme Barrados : Non, nous n'essayons pas de voir si un nom a une consonance étrangère ou s'il désigne l'appartenance à un groupe donné. Je suis sûre que vous connaissez des gens dont les noms ne correspondent pas à leurs origines.

Le sénateur Poy : C'est exact, les gens en changent.

Mme Barrados : Notre processus permet aux gens de s'autodéclarer. Dans le cas où un programme cible des membres de groupes des minorités visibles, il est particulièrement important pour ces derniers de déclarer eux-mêmes qu'ils en font partie, afin que cela leur serve de point d'entrée. Le processus demande aussi aux répondants d'indiquer quel poste ils occupent dans la fonction publique, et il y a probablement sous-déclaration à cet égard. Parmi ces gens, il y en a probablement qui ne tiennent pas à ce qu'on les identifie.

La présidente : Est-ce que vos documents relatifs au recrutement montrent que ces données ne servent qu'à cette seule fin? Vous savez, chez certains groupes d'immigrants, on craint ce que le gouvernement peut faire avec des renseignements, même lorsqu'il s'agit de quelque chose de positif. On pense qu'une fois les données recueillies dans une base générale, elles auront beau être positives, elles pourront être utilisées partout.

Est-ce que cela vous inquiète? Avez-vous réussi à surmonter cette crainte au moyen de messages publicitaires ou d'éducation populaire?

Mme Barrados : Je n'ai rien rencontré de ce genre. Bien entendu, nous collaborons avec la commissaire à la protection de la vie privée du Canada pour que tous nos systèmes soient pleinement conformes. Je vais cependant demander à Mme Green si elle a entendu parler de cas de ce genre ou si elle en a fait l'expérience.

Paula Green, directrice générale, Équité et diversité, Commission de la fonction publique du Canada : Non, pas vraiment. Toute notre publicité dit clairement que le répondant a le choix de s'autodéclarer ou non. Toutefois, si le processus ne se limite qu'à un groupe visé par l'équité en matière d'emploi ou à quelques-uns d'entre eux, comme les Autochtones ou les minorités visibles, alors, dans ce cas, les gens n'ont pas le choix. Autrement, ils ne sont pas autorisés à postuler l'emploi en question.

Le sénateur Fraser : Vous n'ignorez sans doute pas que la Commission des Nations Unies sur l'élimination de la discrimination raciale a récemment fait paraître un rapport où il est dit que nous devrions cesser d'utiliser l'expression « minorités visibles », que nous avons pourtant utilisée ici toute la soirée. Ma première réaction a été plutôt hostile, car mon expérience m'a montré que l'expression sert presque uniquement dans des circonstances positives : on parle ainsi d'action positive, de discrimination positive, de discrimination à rebours pour venir en aide aux membres de ces minorités qui ont besoin de soutien. Toutefois, lors d'une réunion officieuse, on nous a dit que certains Canadiens étaient d'avis que le terme était désobligeant ou discriminatoire — je ne me souviens plus.

Vous-même, avez-vous entendu des échos sur l'utilisation de cette expression, et de quel côté penchez-vous?

Mme Barrados : Je suis plutôt ouverte par rapport aux étiquettes et à la terminologie, et pourvu que les gens soient à l'aise avec l'utilisation de certains termes, ça me convient. Vous savez sans doute que l'expression « minorités visibles » figure dans la Loi sur l'équité en matière d'emploi et même dans les définitions et dans le texte expliquant l'objet de la loi. Aussi, je n'ai rencontré personne qui m'ait dit en privé que l'utilisation de cette terminologie lui posait un problème. Ça ne signifie pas que ces réticences n'existent pas, mais nous n'en avons ni rencontré ni observé.

Prévoyant que vous me poseriez cette question, nous nous sommes renseignés auprès des membres de la Commission, or personne n'a rencontré de difficulté à ce sujet. J'espère cependant qu'on l'étudiera à l'occasion du réexamen de la législation relative à l'équité en matière d'emploi, processus déjà amorcé à ma connaissance. Ni moi ni mon organisme ne souhaitons utiliser quelque terme que ce soit susceptible d'offense. En revanche, nous cherchons une terminologie qui rende possible une discrimination positive. En ce sens, donc, oui, ces termes sont discriminatoires.

La présidente : Je vous remercie d'avoir soulevé ce point, car les sénateurs en ont beaucoup discuté, et j'estime qu'il mérite réflexion.

Le sénateur Dallaire : Dans certains ministères, on se sert fréquemment des évaluations de rendement annuelles dans le cadre de concours menant à la dotation de postes, mais dans d'autres beaucoup moins. Parfois on ne les consulte pas du tout et parfois on les consulte. Selon vos observations, est-ce qu'on aurait tendance à donner des évaluations moins bonnes selon le sexe ou l'appartenance à une minorité visible, ou est-ce qu'on les interpréterait de manière tendancieuse, par rapport à l'obligation d'atteindre les cibles, et est-ce que parfois on tenterait peut-être de changer trop rapidement les règles du jeu?

Mme Barrados : C'est l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada qui est chargée de la gestion du régime d'évaluation de rendement, mais je ferai quand même certaines observations après quoi je demanderai à Mme Gobeil si elle tient à en faire elle aussi.

Votre comité s'est particulièrement penché sur le cas des sous-ministres. À l'heure actuelle, un contrat de rendement les lie au greffier et au premier ministre.

Le sénateur Dallaire : Je suis au courant de tout cela. J'aimerais savoir ce qui se passe aux échelons inférieurs.

Mme Barrados : Ce contrat de rendement est important parce qu'il concentre l'attention de celui ou de celle qu'il régit et aussi parce que cet effet se répercute jusqu'aux autres échelons des cadres.

J'ai observé que dans l'administration gouvernementale, on évalue les cadres du fait que leur rémunération dépend de leur rendement, qu'il y a donc une rémunération conditionnelle. Aux échelons EX-1 à EX-5, on effectue des évaluations de rendement qu'on met en regard des objectifs qu'on avait préalablement établis en collaboration avec le gestionnaire. J'ignore toutefois si l'équité en matière d'emploi fait partie de ce processus. J'en doute, si je me reporte aux résultats obtenus, mais c'est une bonne question et il faudrait la poser à l'Agence.

Aux autres niveaux, à mon avis, on a beaucoup plus de latitude pour recourir aux évaluations de rendement, et d'ailleurs, on y recourt surtout lorsqu'il y a des problèmes ou lorsqu'un employé envisage de chercher de l'avancement ailleurs.

Linda Gobeil, vice-présidente, Direction générale des politiques, Commission de la fonction publique du Canada : Par rapport au groupe de la direction, je suis d'accord avec vous et je ne suis pas non plus convaincue. Toutefois, dans certains ministères, c'est peut-être chose courante. Encore une fois, par rapport à l'évaluation de rendement, nous en discuterons puis nous chercherons à savoir s'il y a eu ou non des évaluations du rendement et dans quelle mesure les nominations ont pris en compte les minorités visibles et le reste.

Cela dit, je ne suis pas sûre que ce soit partout la norme de tenir des évaluations de rendement. J'en ai moi-même observé, mais encore une fois, je ne suis pas convaincue que tout le monde s'en serve.

[Français]

Le sénateur Dallaire : En tant qu'ancien sous-ministre adjoint aux ressources humaines du ministère de la Défense, je le sais.

Ma question a trait aux gens dans ces groupes; des femmes et des minorités visibles. A-t-on vu des tendances sous- estimées ou surestimées? Y a-t-il une perception que les gens ne performent pas ou soient retenus par une tendance découlant des évaluations qui sont faites?

Mme Barrados : Nous nous posons la question à savoir pourquoi nous n'avons pas plus de personnes, surtout les minorités visibles, qui sont promues ou qui entrent dans la fonction publique. Votre question touche la promotion. Ce n'est pas un domaine que nous avons examiné, mais c'est une très bonne idée.

Le sénateur Dallaire : Mon expérience au ministère de la Défense m'a démontré que beaucoup évoluent autour de cela particulièrement pour avancer dans l'échelle exécutive.

[Traduction]

Comment peut-on passer dans le groupe de la direction si on ne se sert pas de ces évaluations?

L'autre question relative aux minorités visibles tient à l'évolution démographique à venir dans notre pays. Lorsque le comité de la défense a effectué une étude démographique du recrutement, on y a entrevu les deux conséquences suivantes d'ici 2012, à moins qu'on assiste à un afflux considérable de recrues des minorités visibles : d'abord, il n'y aura pas suffisamment de recrues ou de gens disponibles provenant des Blancs, anglophones, francophones ou judéo- chrétiens et en second lieu, on pourrait assister à un ressac de la part de ces Blancs, anglophones, francophones et judéo-chrétiens, lesquels se demanderont pourquoi il n'y a que leurs enfants sous les drapeaux et personne d'autre?

Je m'adresse donc à la Commission à cet égard. Est-ce que la décentralisation de la fonction publique à l'extérieur d'Ottawa pourrait être utile? On en parle pour favoriser le bilinguisme. Est-ce que vous y songez?

Mme Barrados : Je me demande pour quelles raisons précises les minorités visibles n'entrent pas dans la fonction publique. Je sais que la fonction publique intéresse leurs membres et je sais aussi qu'ils font des demandes en grand nombre et qu'ils sont qualifiés. Ce n'est pas comme si ces candidats n'étaient pas à la hauteur des exigences. J'ignore ce qui se passe. Nous avons rendu cela obligatoire dans tous les postes d'agent, quel que soit le niveau. Tous les postes affichés à l'extérieur peuvent faire l'objet d'une demande partout au Canada. Le lieu où vit le candidat ou la candidate n'a aucune importance. Certes, le problème de la mobilité demeure cependant, et c'est un facteur à prendre en considération.

Je me soucie de ce que nous sommes en train de faire, et qui est de rendre la fonction publique représentative. Elle doit en effet refléter la population qu'elle dessert.

Cela dit, je ne tiens pas à ce qu'on se fixe une cible ou un nombre arbitraire, car je veux être en mesure de répondre dans le cas où il y aurait l'effet de ressac. Est-ce que je tiens à ce qu'un brillant jeune homme blanc dise « Je n'ai pas la moindre chance d'obtenir un emploi dans la fonction publique »? Non, ce n'est pas le message que je veux lui envoyer.

Je tiens à obtenir des chiffres exacts afin que nous puissions discuter en connaissance de cause et de manière raisonnable. Nous ne voulons rien de plus que la disponibilité par rapport à la population active. Nous voulons que la fonction publique reflète la population.

Le sénateur Dallaire : Ça nous a pris près de 30 ans pour qu'on ne pense plus que les Canadiens français n'obtenaient pas de promotion en raison de contingents, de leurs compétences linguistiques et le reste. Pourtant, à l'intérieur de l'organisation, on avait la perception que c'était grâce à leurs mérites qu'ils avaient gagné du galon.

Savez-vous quand cela se produira par rapport aux femmes? Également, faudra-t-il que nous passions par un processus aussi long par rapport aux minorités visibles, ou est-ce qu'on étudie la manière dont on pourrait faire avancer les choses?

Mme Barrados : Nous effectuons des recherches et poursuivons activement cet objectif. C'est pour cela que je m'exprime avec prudence. Une fois ce travail achevé, j'insisterai encore sur la nécessité de la représentativité de la fonction publique. Nous avons obtenu de bons résultats du côté du français, même si tout n'est pas parfait, mais de bons résultats.

Pour ce qui est de la participation accrue des femmes, nous avons réalisé de grands progrès, si je songe à ce qu'était la fonction publique à mon arrivée. Quant à la participation des handicapés, elle est devenue représentative de la population, mais seulement parce que notre population vieillit et que partant, les employés vieillissants commencent à souffrir de problèmes physiques chroniques comme des problèmes d'ouïe et le reste. Par conséquent, notre recrutement ne correspond peut-être pas vraiment à ce que nous pensons.

Le problème, c'est avec les minorités visibles. Nous ne semblons pas capables d'accélérer le rythme des progrès, même si progrès il y a. La situation est meilleure qu'elle ne l'était il y a cinq ans, mais j'aimerais savoir à peu près combien de temps il faudra pour que nous atteignions les niveaux dont la population canadienne a besoin.

Le sénateur Dallaire : Il a été prouvé que les cibles chiffrées ne marchent pas et ne trouvent pas grâce aux yeux des gens. Le fait que nous nous soyons fixé ce genre d'objectifs ne signifie pas que la philosophie ou la culture de l'institution a évolué à cet égard.

Est-ce que nous effectuons des recherches sur la manière dont la culture pourra davantage tenir compte des minorités visibles, ou laisserons-nous évoluer tout doucement les choses, comme par osmose, ainsi qu'on l'a fait à propos du français, en espérant que les gens changent d'attitude?

Par rapport à la situation du français, nous avons réalisé le bilinguisme, mais il y a un contrecoup parce qu'on se demande si on embauche les Canadiens français. Bien sûr, nous embauchons des gens bilingues, mais sont-ils nécessairement Canadiens français? Leur nombre a changé parce que davantage de Canadiens anglais bilingues se conforment aux normes. Nous retournons donc à nos calculs et revenons dans le cercle.

Mme Barrados : Nous sommes en mesure de vous fournir des chiffres là-dessus.

Le sénateur Dallaire : Ça va, je n'en réclame pas.

Mme Barrados : Je préférerais quant à moi ne pas les citer de mémoire, de peur de me tromper.

Par ailleurs, vous avez tout à fait raison d'affirmer que c'est une chose que d'avoir atteint certains objectifs chiffrés mais autre chose que de réussir à modifier en profondeur les structures de l'organisation. Bon nombre de membres des minorités visibles disent en effet ne pas se sentir appuyés par leur milieu lorsqu'il s'agit pour eux de s'épanouir sur le plan professionnel.

Malheureusement, les responsabilités en matière de gestion des ressources humaines ont été scindées dans la fonction publique, et la Commission de la fonction publique est chargée de la dotation seulement. Nous pouvons faire preuve de dynamisme et aller au-delà des chiffres exigés parce que nous disposons de tous les mécanismes pertinents pour que les choses changent durablement. Nous pouvons aussi imposer des conditions, donner des directives, car nous disposons du pouvoir de réglementer.

Cela dit, le développement professionnel relève de l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada et de l'école. Pour ma part, je ne suis jamais à court de propositions, mais mes attributions ne me permettraient pas de commander des recherches là-dessus.

Le sénateur Dallaire : C'est là pourtant que l'on observe les vraies subtilités de l'évolution. D'un côté, il y a la comptabilisation, de l'autre, il y a l'attitude.

À titre d'exemple, s'il y a davantage de femmes dans les forces armées, il y aura nécessairement plus de femmes dans les postes de responsabilités. Toutefois, aucune étude n'a porté sur l'incidence d'un plus grand nombre de femmes dans ces postes élevés par rapport aux idées en matière de leadership qui, pour le moment, sont le fruit d'un milieu masculin, par rapport aux structures, aux rapports interpersonnels et à toutes ces excellentes choses. On ne nous a pas préparés à l'arrivée des femmes, et par conséquent, on assiste à la collision d'attitudes différentes quand on aurait pu ménager une période de transition conçue précisément pour nous mener vers une nouvelle façon de faire les choses.

Ça n'est pas de votre ressort?

Mme Barrados : Pas directement, mais nous participons à ces efforts. Ainsi, par exemple, j'accorde 100 000 $ par année au Conseil national des minorités visibles dans la fonction publique fédérale afin de permettre à ses membres de se réunir et de tenir ces discussions. Je les rencontre et m'entretiens avec eux, mais je n'ai pas de pouvoirs réels qui me permettraient de faire quelque chose à cet égard.

La présidente : J'aimerais un éclaircissement. Vous avez affirmé que les membres des minorités visibles vous font parvenir des demandes, qu'ils sont nombreux à le faire et qualifiés. Toutefois, cela ne leur donne pas nécessairement un emploi, ni ne les empêche de décrocher. Par conséquent, soit qu'ils n'obtiennent pas d'emploi, soit qu'ils décrochent.

Vous avez dit qu'ils sont « qualifiés ». À mes yeux, cela signifie qu'ils ont les titres de compétences voulus. Aussi, dans votre rapport relatif aux taux de déclin, vous reconnaissez accorder la préférence à ceux qui ont la citoyenneté, ce qui me paraît normal. Je n'y vois rien à redire. Toutefois, lorsqu'on étudie la candidature de ceux et celles n'ayant pas encore obtenu leur citoyenneté ou qui font partie d'une autre catégorie, est-ce qu'on évalue leurs titres autrement? Un diplôme obtenu d'un établissement étranger est peut-être valide, mais a-t-il le même poids que les nôtres aux yeux des examinateurs, et cetera?

Ce genre de débat a aussi cours dans nos propres universités. Je me souviens de la mise sur pied des Centres d'excellence. Je devais alors m'opposer à ce préjugé, rappelant que certains des centres avaient été créés dans des universités de taille plus modeste et pas seulement dans les plus grandes, et qu'il fallait cesser de penser que seuls les grands centres pouvaient produire les meilleurs résultats. Certaines universités de petite taille étaient elles aussi riches de capacités et avaient à leur actif des résultats impressionnants.

Si l'on applique ce raisonnement au reste du monde, les candidats ont peut-être les titres de compétences voulus, mais est-ce qu'on leur reconnaîtra la même valeur? Est-ce là un des problèmes?

Mme Barrados : Ça se pourrait. J'ai dit que les gens ne réussissaient pas à décrocher les emplois. L'étude que nous avons effectuée s'est servie de notre logiciel de demande d'emploi électronique de la manière suivante : une série de questions est liée aux titres et qualités correspondant à l'emploi. Cette dernière catégorie recouvre les choses auxquelles on s'attend de la part de l'employé et les qualités dont il ou elle aura besoin pour s'en acquitter.

Parfois on y trouve une exigence précise. Voilà pour la première sélection, et, selon nos observations, les gens des minorités visibles satisfont aux exigences recherchées. Nous avons aussi des outils nous aidant à faire correspondre les titres de compétences de l'étranger avec leurs équivalents d'ici, mais c'est une fois passée cette sélection électronique et dénuée d'interaction avec des être humains que nous semblons nous heurter à des difficultés. C'est aussi au même moment que nous remettons le reste du processus entre les mains du ministère.

Or c'est justement à partir de cette étape que nous observons une baisse des chiffres sans que nous sachions pourquoi. Lorsque nous administrons les programmes centralisés — en formation à la gestion, en économie et en leadership — nous atteignons les chiffres et réussissons à les maintenir.

À mon avis, le problème ne tient pas à un manque de gens assez qualifiés, bien que, dans certains cas isolés, certaines personnes estiment que leurs titres ont été rejetés à tort. Mais enfin, quelque chose se passe dans le système et nous tenons à le cerner.

La présidente : C'était l'éclaircissement que je cherchais à obtenir sur la lancée des propos du sénateur Dallaire. Quelqu'un peut avoir des titres de compétences, mais une fois rendu au ministère, surtout dans un ministère à vocation scientifique, ainsi que vous le rappeliez, son titre sera-t-il reconnu non seulement sur papier mais aussi de la part de celui ou de celle qui recrute et de la part des autres employés?

Mme Barrados : C'est une des questions auxquelles nous espérons trouver une réponse. À mon avis, le maintien de l'effectif ne pose pas de problème dans la fonction publique, alors ça doit être exclusivement le recrutement.

Le sénateur Munson : Au sujet du taux de déclin et des minorités visibles, compte tenu de ces chiffres, vous êtes-vous fixé un échéancier? Quand pourrons-nous nous expliquer pourquoi 25 p. 100 des candidatures sont d'abord acceptées mais que seulement 10 p. 100 d'entre elles se rendent jusqu'au bout? Est-ce que ce sera cette année?

Mme Barrados : Je vais demander à la personne qui est responsable de la gestion de la recherche de vous le dire. C'est une source constante de discussion parce que je veux des résultats tout de suite. Notre rapport annuel paraîtra au début d'octobre, et je veux que les premiers résultats macros paraissent dans le rapport annuel pour que nous puissions donner aux parlementaires une idée de ce que nous voyons, de ce que nous savons et ne savons pas. Il nous faudra probablement être quelque peu itératifs parce que nous avons défini le premier portrait de ce qui s'en vient, nous avons fait des sondages auprès des candidats, ces résultats s'en viennent, et nous réunissons des groupes témoins au sein de la commission.

Le sénateur Munson : Je cite votre deuxième recommandation : « Nous invitons les administrateurs généraux et administratrices générales à gérer l'embauche de façon stratégique et à faire de l'équité en emploi une partie intégrante des plans de ressources humaines. » Le mot « invitons » me saute aux yeux. Quand on parle d'un répertoire générique de membres des minorités visibles au niveau de la direction, vous encouragez une meilleure utilisation de ce répertoire. Est-ce le plus que vous pouvez faire, ou êtes-vous habilités à faire plus que simplement « inviter »? Est-ce qu'il suffit d'inviter pour inciter les responsables de la fonction publique à agir?

Mme Barrados : Je ne crois pas qu'inviter soit suffisant, mais je dois m'assurer de comprendre la cause du problème et de savoir où il se situe avant de faire plus qu'inviter.

Le sénateur Munson : Je vois. Donc, vous avez un marteau?

Mme Barrados : J'ai un marteau. Mais je veux m'assurer de l'utiliser judicieusement, parce que si je l'utilise mal, nous n'obtiendrons pas les résultats que nous voulons.

Le sénateur Munson : Je comprends. Au sujet du Centre d'excellence autochtone, je devrais en savoir davantage à ce sujet, mais ce n'est pas mon cas. Pouvez-vous nous expliquer brièvement en quoi consiste le Centre d'excellence autochtone de Winnipeg? Ça me semble fascinant et extrêmement important.

Mme Barrados : Avec la nouvelle Loi sur l'emploi dans la fonction publique, nous avons maintenant un régime où la Commission de la fonction publique conserve l'autorité, mais on nous encourage à déléguer aux ministères. Je crois que ce modèle est celui qui convient. Je n'ai aucun problème avec ce modèle. Cela veut dire que la Commission de la fonction publique établit les lignes directrices et la réglementation, mais comme nous provenons d'un monde où c'étaient nous qui gérions tout le système, j'ai encore beaucoup de gens chez moi qui s'occupent des processus. Parce que les capacités des ministères sont tellement limitées, nous conservons cette attribution. Elle est de nature discrétionnaire. Les ministères ne sont pas obligés de s'adresser à la Commission de la fonction publique s'ils ne veulent pas de notre soutien. Nous nous efforçons de mettre en place un système de soutien dans les secteurs où nous croyons difficile pour les ministères d'acquérir l'expertise voulue et de faire le travail eux-mêmes. Le recrutement autochtone est un domaine où se posent des problèmes de rétention : le recrutement, la rétention et s'assurer — particulièrement dans l'Ouest canadien où les Autochtones forment une partie tellement importante de la population — que nous recrutons ces personnes dans la fonction publique, et c'est pourquoi nous voulons créer un centre d'expertise géré par les Premières nations elles-mêmes.

Le sénateur Munson : Quelle est la taille du centre?

Mme Barrados : C'est tout petit. On ne parle que de trois ou quatre personnes. Ce centre ne fait que commencer. Toute cette activité que nous avons dans ce que j'appelle mon côté service doit être utilisée, parce que si on ne s'en sert pas, j'ai d'autres projets où je pourrais utiliser cet argent. Il s'agit ici de soutenir le système et de faciliter la transition.

Le sénateur Munson : J'ai hâte de savoir à quoi ça va nous mener. Merci beaucoup.

La présidente : Merci, madame Barrados. Comme d'habitude, vous avez accepté de venir nous rencontrer et de nous faire part de ces informations. Nous sommes heureux de voir que vous avez répondu à notre rapport et nous vous remercions de nous avoir dit qui d'autre contacter. Nous allons entendre d'autres témoins. Je vous assure que nous allons poursuivre votre action pour ce qu'il s'agit de surmonter les obstacles et ainsi, nous aurons une main-d'œuvre vraiment intégrée et représentative au sein de la Commission de la fonction publique. Je remercie nos témoins d'être venus.

Chers collègues, nous avons quelques petites affaires à expédier. Je suis consciente du fait que j'ai ici le président du caucus. Nous comptons demander à tous les sénateurs qui ont proposé des sujets d'études futures de plaider leur cause. Le problème, c'est que chaque fois qu'on fait ça, on manque de temps pour une raison ou une autre. Comme je l'ai fait savoir au sénateur Fraser, je ne savais pas que c'était ce que j'aime appeler un numéro sur commande. Nous avons parfois des séances d'information. Celle-ci semble être plus de ce genre. Mais il nous faut couper.

Je propose que le comité de direction siège cet après-midi pour déterminer comment procéder. Ce que je propose d'emblée, pour que vous puissiez y réfléchir et me faire vos commentaires, c'est que le comité de direction ait une discussion informelle avec tous les auteurs de propositions pour voir ce que nous pouvons en tirer, pour voir combien cela pourrait coûter et comment on pourrait mettre en place un plan d'action. Ensuite nous ferons nos recommandations à tout le comité avec le budget voulu.

Cependant, cela veut dire aussi que nous pourrions discuter de cela ce soir parce que nous nous sommes entendus pour poursuivre avec le Conseil des droits de l'homme. Nous avons discuté du budget et des voyages futurs, à New York et à Genève, si vous vous en souvenez bien, et ce budget ressemble pas mal à ce que nous avions proposé. Le texte du budget vous a été remis. Nous pourrions l'adopter pour en finir au moins avec ça, et de là on pourrait discuter des autres études futures.

Le rapport du Conseil des droits de l'homme a été rédigé, mais on ne voulait pas dépasser l'étape de l'ébauche. J'y ai jeté un coup d'œil. J'ai fait savoir qu'à mon avis la partie narrative est bonne, mais il faut donner plus de poids aux recommandations; le comité de direction devrait donc d'abord prendre connaissance des recommandations. D'ici demain ou dans deux jours, nous allons incorporer les témoignages que nous avons entendus aujourd'hui, le rapport sera traduit et ensuite soumis aux membres rapidement.

Nous voulons prendre le plus d'avance possible par rapport à cette date de juin. Le ministère suit nos travaux et sait ce que nous faisons. Ce genre de rapport ne constitue pas une surprise, mais c'est celui que nous voulons faire paraître.

Je propose que le comité de direction discute des travaux futurs et du Conseil des droits de l'homme et qu'il n'y ait pas réunion de tout le comité lundi prochain. Nous n'aurons pas du tout de séance de comité lundi prochain, et nous aurons toute une séance consacrée au Conseil des droits de la personne la semaine suivante, c'est-à-dire le 7 mai.

Autrement dit, le comité ne siégera pas lundi prochain et nous allons siéger le lundi suivant dans le but, j'espère, de déterminer l'ordre de nos travaux futurs et d'approuver le rapport sur les droits de la personne, le comité de direction y consacrant un peu plus de temps.

Quelqu'un a dit que j'étais trop démocrate. Le comité va devenir un peu moins démocrate, et le comité de direction va s'occuper des divers rapports. Nous devrions discuter avec tous ceux qui ont proposé un rapport de ce qu'ils envisagent et de la manière de procéder. Puis nous allons faire une proposition. Malheureusement, le caucus passe avant tout.

Si cela vous va, nous devrons voter le budget ce soir pour poursuivre nos travaux relativement au Conseil des droits de l'homme.

Le sénateur Nancy Ruth : La séance du 30 avril est annulée, et quand aura lieu cette longue séance que vous voulez pour le rapport?

La présidente : La semaine suivante.

La présidente : On discutera du rapport et des travaux futurs. Si le comité de direction fait bien son travail, je m'attends à ce que vous ayez lu le rapport et que vous soyez en mesure d'en discuter et de l'adopter avec les amendements voulus le 7 mai, et il sera déposé immédiatement après.

Le sénateur Fraser : Est-ce qu'on veut prévoir une réunion du comité de direction pour la semaine prochaine; c'est-à- dire d'ici une semaine?

La présidente : Si nous sommes disponibles. À titre de comité de direction, nous n'avons pas besoin de nous rencontrer le lundi. On pourrait simplement trouver une heure qui convienne aux trois membres.

Le sénateur Fraser : Si je vous ai posé la question, c'est que comme nous le savons tous, notre horaire est extrêmement chargé à partir de mardi matin.

La présidente : J'aimerais qu'on tienne une réunion du comité de direction demain. J'allais proposer qu'elle ait lieu pendant que le Sénat siège, à condition que vous ne participiez pas à la période des questions, bien entendu. Si vous participez à la période des questions, ou si vous voulez simplement rester à la Chambre, eh bien la réunion aura lieu dès que vous serez libres et Vanessa Moss-Norbury et Jean-Pierre Morin seront disponibles.

Le sénateur Fraser : En tant que supporteur fidèle, il faudrait qu'on soit présent à la réunion.

La présidente : Cela dépendra de votre participation à la période des questions. Il m'arrive parfois de vouloir quand même assister à la période des questions simplement parce qu'un sujet me préoccupe même si je n'ai pas l'intention d'y prendre la parole. Je vous laisse le soin de décider. Ça a très bien fonctionné de façon officieuse par le passé. Nous avons toujours agi de la sorte. Je demande à Mme Moss-Norbury d'être à la Chambre au début de la période des questions, accompagnée de Laura Barnett. C'est toujours une possibilité quand vous êtes occupés. Sinon, on pourrait fixer la réunion à 15 heures. Je ne sais pas par contre si la période des questions sera finie à cette heure-là.

On va essayer de se réunir en comité de direction donc à 15 heures. On aura besoin d'une autre réunion du comité de direction plus tard dans la semaine ou au début de la semaine prochaine pour nous permettre de discuter des travaux futurs. À vrai dire, et je dis ça parce que cela m'arrange, si je peux éviter un décollage à 6 heures du matin et arriver plutôt à 16 h 30, c'est préférable. On pourrait en discuter.

Tous les renvois qui ont été déposés de façon officielle figurent à l'ordre de renvoi qu'on a distribué ou qu'on vous fera parvenir sous peu.

Ensuite, il y a la question du budget. Vous vous souviendrez qu'on s'était entendu pour présenter le budget habituel qui comprendrait les services d'accueil, les services d'experts-conseils et ainsi de suite — et notre budget n'est pas très élevé, comparativement au budget de certains autres comités. Il y a des dépenses de déplacement pour huit sénateurs. On avait envisagé la possibilité de voyager à New York et ensuite à Genève pour un suivi. Le montant total s'élève à 152 809 $. C'est la deuxième fois qu'on passe en revue le budget. Est-ce qu'on s'entend sur le budget?

Des voix : Oui.

La séance est levée.


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