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Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles

Fascicule 19 - Témoignages du 13 décembre 2006


OTTAWA, le mercredi 13 décembre 2006

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, auquel a été renvoyé le projet de loi C- 19, Loi modifiant le Code criminel (courses de rue) et la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition en conséquence, se réunit ce jour à 16 h 5 pour examiner le projet de loi.

Le sénateur Donald H. Oliver (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Honorables sénateurs, la séance du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles est ouverte.

C'est notre première réunion au sujet du projet de loi C-19, Loi modifiant le Code criminel (courses de rue) et la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition en conséquence. Pour l'essentiel, le projet de loi s'attaque au problème des courses de rue en apportant quatre modifications au Code criminel. Il définit la course de rue et crée cinq infractions de course de rue. Trois de ces nouvelles infractions sont passibles de peines d'emprisonnement maximales plus longues que celles qui sont prévues actuellement pour la négligence criminelle et la conduite dangereuse d'un véhicule à moteur et prévoient des ordonnances obligatoires d'interdiction de conduire d'une durée minimale, la durée de l'interdiction augmentant progressivement en cas de récidive.

Nous avons le plaisir de commencer notre examen de ce projet de loi, honorables sénateurs, par le témoignage de l'honorable Vic Toews, ministre de la Justice et procureur général du Canada. M. Toews vient de la province du Manitoba et représente la circonscription de Provencher. Il a été élu pour la première fois à la Chambre des communes en 2000 et a été réélu en 2004 et en 2006.

Avant d'être élu à la Chambre des communes, M. Toews a participé activement à la politique provinciale au Manitoba. Il a été élu en 1995 à l'assemblée législative et peu après, nommé ministre du Travail. Il a été, de 1997 jusqu'en septembre 1999, procureur général et ministre de la Justice de la province du Manitoba.

M. Toews a pratiqué le droit au ministère provincial de la Justice du Manitoba de 1976 à 1991. En 1987, il a été nommé directeur du droit constitutionnel pour la province du Manitoba, et il a agi en qualité de conseiller juridique auprès du premier ministre du Manitoba lors des discussions sur l'Accord du lac Meech en 1990. Il a été nommé conseiller de la Reine en 1991.

Honorables sénateurs, M. Toews est accompagné aujourd'hui par Catherine Kane, avocate générale principale par intérim, Section de la politique en matière de droit pénal, et par M. Hal Pruden, avocat, Section de la politique en matière de droit pénal, tous deux du ministère de la Justice.

Bienvenue au comité.

Vous avez la parole, monsieur le ministre. Je vous invite à commencer.

L'honorable Vic Toews, P.C., député, ministre de la Justice et procureur général du Canada : Merci. Je suis heureux de revenir ici après l'après-midi agréable que j'y ai passé hier. J'ai apprécié les questions qui m'ont été posées hier. Je suis sûr que les membres du comité vont poser des questions tout aussi judicieuses et pénétrantes au sujet de ce projet de loi.

Je vous remercie, monsieur le président, de m'avoir présenté aussi gentiment.

Je suis heureux d'être ici pour vous parler du projet de loi C-19, Loi modifiant le Code criminel, pour qu'il s'applique aux courses de rue. Le projet de loi C-19 est une mesure législative importante qui concrétise l'engagement permanent qu'a pris notre gouvernement d'améliorer la sécurité de nos rues et de nos collectivités en luttant contre le crime.

Je vais vous présenter ce projet de loi et serai ensuite heureux de répondre à vos questions.

J'ai été heureux de constater que le projet de loi C-19 avait obtenu l'appui unanime des députés et qu'il sera rapidement adopté dans l'autre endroit. Cela montre, à mon avis, l'importance que nous attachons à ces réformes législatives. Les mesures que propose le projet de loi C-19 intéressent tous les parlementaires, quel que soit leur parti, et renforceront la protection de tous les Canadiens face à un comportement dangereux et stupide. Je suis convaincu que l'esprit de collaboration qui nous a permis d'en arriver rapidement à cette étape de l'étude du projet de loi va être préservé et nous permettra de le faire entrer en vigueur rapidement.

Le projet de loi C-19 propose la création de nouvelles infractions ciblées qui visent à dénoncer les courses de rue et à dissuader les délinquants d'exercer une activité extrêmement dangereuse et inquiétante dans les rues et les voies publiques des collectivités dans l'ensemble du Canada. Le projet de loi C-19 renforce les peines dont sont actuellement passibles ces infractions et donne aux policiers des moyens supplémentaires de lutter contre ce crime inquiétant. La création d'une infraction spéciale nous permettra également de mieux suivre l'incidence de cette activité au Canada. À l'heure actuelle, notre droit pénal comporte une lacune, étant donné qu'il ne contient aucun mécanisme de surveillance des courses de rue à titre de crime spécial, même s'il permet de condamner les personnes qui commettent des infractions reliées aux courses de rue. C'est pourquoi il est difficile de savoir, si ce n'est en se fondant sur des impressions ponctuelles, quelle est l'ampleur exacte du phénomène des courses de rue, en particulier dans les régions urbaines. La plupart des problèmes que signalent les policiers et les victimes visent les grands centres urbains.

Pour bien comprendre comment vont s'appliquer les nouvelles infractions de course de rue, permettez-moi de vous signaler que le projet de loi C-19 définit l'expression « course de rue » de la façon suivante, pour ce qui est des nouvelles infractions :

« course de rue » Épreuve de vitesse entre des véhicules à moteur dans une rue, un chemin ou une grand-route, ou tout autre lieu public.

La définition fait appel aux notions d'« épreuve de vitesse » et de « course », expressions que ne définit pas le projet de loi C-19. Ce sera donc aux tribunaux d'interpréter ces expressions.

Cela n'est pas rare, même dans les lois provinciales. Certains codes de la route provinciaux contiennent une disposition visant les courses, notion qui n'est pas définie par la loi. Ce sera ainsi à la common law et, comme Mme Kane l'a mentionné, au bon sens des tribunaux de déterminer ce qui constitue une épreuve de vitesse. C'est un rôle qui convient très bien aux tribunaux. Ils l'exercent de façon quotidienne pour de nombreuses raisons, et ils l'ont déjà fait dans le cadre de l'interprétation de l'expression « épreuve de vitesse ».

Il ressort de la jurisprudence qu'une course est une épreuve de vitesse entre des véhicules. Cette activité s'exerce, bien sûr, de différentes façons. Dans certains cas, il peut s'agir d'une course organisée dans laquelle les conducteurs se rencontrent à un moment et à un lieu donnés et se font la course sur une distance fixée d'avance. Cette activité serait visée par les nouvelles infractions.

Il y a une réserve et je vais vous parler un peu plus tard des courses appropriées ou légalement autorisées.

Le président : Nous avons reçu sur ce point de nombreuses lettres émanant d'organismes de rallye et je suis très intéressé à entendre ce que vous avez à dire à ce sujet.

M. Toews : J'ai l'intention de vous en parler.

Il arrive également qu'une course commence de façon spontanée; des conducteurs dont les voitures sont arrêtées au même feu rouge décident de faire la course. Ce type de comportement serait également visé par ces dispositions et, surtout, devrait également l'être. De la même façon, une épreuve au cours de laquelle deux voitures doivent se rendre à un point donné dans le moins de temps possible serait également considérée comme une course de rue.

Que la course soit organisée ou spontanée, elle met en danger des Canadiens innocents et ces deux types de course méritent d'être assortis de peines sévères. En fin de compte, ce sera à la poursuite d'établir que l'infraction de course de rue a été commise et aux tribunaux de le constater. La définition de « course de rue » utilisée pour ces nouvelles infractions est suffisamment précise et claire pour que les tribunaux puissent savoir quel est le genre de conduite qui constitue un comportement réprimé pénalement.

Permettez-moi également de dire que le projet de loi C-19 ne s'appliquerait pas les courses légitimes. Il ne criminalise pas les courses qui ont lieu sur des pistes fermées, des circuits, des rues fermées à la circulation ni les rallyes organisés par des autorités reconnues en matière de sport motorisé et qui respectent la loi. Des activités comme la course Targa à Terre-Neuve, par exemple, ne seraient pas visées par ce projet de loi. Avec le projet de loi C-19, le comportement dangereux que représentent les courses de rue serait sanctionné de façon appropriée par le Code criminel. Il ne s'appliquerait pas aux courses officielles qui ont lieu dans des rues fermées à la circulation.

Comment le projet de loi C-19 criminalise-t-il les courses de rue? Les cinq nouvelles infractions de course de rue s'appuient sur les lois pénales existantes pour apporter une réponse ciblée au phénomène des courses de rue. Plus précisément, le projet de loi C-19 crée les infractions suivantes : conduite dangereuse à l'occasion d'une course de rue, conduite dangereuse causant des lésions corporelles à l'occasion d'une course de rue, conduite dangereuse causant la mort à l'occasion d'une course de rue, causer des lésions corporelles par négligence criminelle (course de rue) et causer la mort par négligence criminelle (course de rue).

Ces cinq nouvelles infractions viennent compléter les règles actuelles en matière de conduite dangereuse et de négligence criminelle, mais exigent un élément supplémentaire, à savoir une course de rue. Pour que l'accusé soit déclaré coupable de course de rue, la Couronne est tenue d'établir que l'accusé a commis une des infractions incluses plus l'élément course de rue.

La course de rue n'est pas une infraction plus facile à établir que la négligence criminelle ou la conduite dangereuse, mais elle comporte un facteur supplémentaire. Cet aspect ne concerne pas seulement la dénonciation des courses de rue et l'objectif de dissuasion, mais notre capacité à connaître le nombre de ces infractions. Avant l'entrée en vigueur de ce projet de loi, il était possible de connaître le nombre des accusations de négligence criminelle causant des lésions corporelles, mais il n'était pas possible de savoir si cette négligence criminelle était reliée à une course de rue.

Ces nouvelles infractions lancent un message clair. Ces mesures sont fondées sur les règles existantes et seront donc plus efficaces et plus ciblées. Les nouvelles infractions de course de rue permettront de réaliser les objectifs les plus fondamentaux et normatifs du droit pénal; à savoir, plus précisément, la dénonciation et la dissuasion. Il est évident que l'insouciance que manifestent les participants aux courses de rue à l'égard de la sécurité des citoyens appelle des sanctions pénales appropriées.

Sur ce point, le projet de loi C-19 renforce les peines actuellement prévues par nos lois pénales à l'égard des courses de rue. Ce projet de loi fait savoir à la population que les courses de rue ne sont pas tolérées. Le projet de loi reflète cet objectif en associant des peines d'emprisonnement maximales aux infractions de course de rue les plus graves et en imposant des interdictions de conduite obligatoire pour une période minimale aux personnes déclarées coupables de course de rue. C'est une peine juste pour les personnes qui abusent de façon insouciante du privilège de conduire et qui mettent en danger la vie de Canadiens innocents, sans parler de leur propre vie. Selon le droit actuel, un tribunal peut imposer une ordonnance d'interdiction de conduire aux personnes déclarées coupables de conduite dangereuse ou de négligence criminelle.

Le projet de loi C-19 imposerait des ordonnances d'interdiction minimales d'un an pour une première infraction, de deux ans pour une deuxième infraction et de trois ans pour une troisième ou une infraction subséquente. Dans les cas les plus graves de récidivisme de course de rue, le projet de loi C-19 prévoit une ordonnance obligatoire d'interdiction de conduire à perpétuité. Cette ordonnance doit être prononcée lorsque le contrevenant a déjà été déclaré coupable de deux infractions de course de rue causant des lésions corporelles ou la mort, et qu'une au moins de ces déclarations de culpabilité porte sur une course de rue causant la mort.

Cette disposition envoie le message qui convient : les conducteurs qui ont commis plusieurs infractions de course de rue et causé des souffrances inimaginables à des Canadiens innocents en raison de leurs actes criminels insouciants ne devraient plus jamais conduire. L'effet combiné de l'augmentation des peines d'emprisonnement maximales et des interdictions de conduire obligatoires va réduire ce genre d'activité au Canada.

Avant de terminer mes commentaires, j'aimerais également parler d'un aspect auquel j'ai fait allusion au début de mon exposé. Le projet de loi C-19 nous permettra de suivre le nombre des infractions de course de rue commises au Canada, chose que nous ne pouvons pas faire à l'heure actuelle. La création d'infractions pénales spéciales nous permettra d'obtenir grâce au Centre d'information de la police canadienne, par exemple, des statistiques se rapportant uniquement à ces infractions. Les déclarations de culpabilité concernant les courses de rue donneront lieu à un suivi uniforme et permettront d'infliger des peines plus sévères aux récidivistes.

Comme je l'ai déjà dit, il n'y a pas de tâche plus grande ou plus importante pour un gouvernement que d'assurer la protection de ses citoyens. Je prends cette responsabilité très au sérieux et je pense que le projet de loi C-19 renforcera la protection des Canadiens, où qu'ils se trouvent. Les Canadiens ont hâte de voir ce projet de loi adopté et j'espère que nous pourrons faire rapidement adopter ce projet de loi en collaborant tous à son examen.

Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.

Le président : Merci, monsieur le ministre, pour un excellent exposé et pour nous avoir bien expliqué ce projet de loi. Le fait que l'expression « course de rue » soit définie dans le projet de loi m'a intéressé; si la définition fait référence à l'idée de « course », le mot « course » lui-même n'est pas défini, et vous avez dit que c'est une question d'interprétation qu'il est approprié de confier aux tribunaux.

Étant donné que le mot « course » a déjà été examiné par les tribunaux, ces derniers ont eu l'occasion de préciser dans ces différentes affaires ce qu'était une course. Il y a donc une jurisprudence. Pourquoi n'avez-vous pas essayé de faire la synthèse de cette jurisprudence et d'insérer cette définition dans le projet de loi?

M. Toews : La difficulté est de préciser l'élément matériel essentiel de façon à englober toutes les modalités possibles des courses. On risquerait d'obtenir une définition longue et compliquée, par exemple, qui devrait préciser si la course doit être spontanée, s'il doit y avoir une personne chargée de donner aux voitures le signal du départ et ce genre de choses. Cela peut devenir très compliqué.

En fait, la première fois que j'ai poursuivi un accusé pour avoir commis une infraction de course de rue contrairement aux lois provinciales, le juge a déclaré que ce n'était pas une course parce qu'il n'y avait personne à l'extérieur des véhicules pour donner le signal du départ aux conducteurs. J'ai pensé que c'était là une conception beaucoup trop étroite de ce qu'est une course et j'aurais interjeté appel si le juge n'avait pas déclaré l'accusé coupable sur d'autres chefs d'accusation.

Dans ce genre de situation, nous avons besoin de juges qui ont la capacité de décider, d'après les faits, s'il s'agissait d'une course. Peut-on dire qu'il y a une « course » dès que les preuves établissent que les pneus du véhicule tournaient plus rapidement que se déplaçait le véhicule? C'est le genre de choses qu'il faut examiner. Le juge peut étudier les circonstances et dire qu'une personne raisonnable en déduirait qu'il y avait une course. Dans les cas où il n'est pas approprié de tirer une telle conclusion, le juge peut dire que les preuves montrent qu'il y a eu conduite dangereuse mais pas de course.

Le président : Je comprends cela. Vous avez parlé de loi provinciale. La plupart des provinces ont adopté des lois relatives aux véhicules à moteur. Avez-vous examiné d'autres provinces et savez-vous si l'une d'entre elles a en fait défini le mot « course »?

M. Toews : Je ne l'ai pas fait. Je sais qu'au Manitoba, ce mot n'était pas défini.

Le sénateur Baker : Ce mot est très clairement défini dans certaines lois provinciales, en particulier en Colombie- Britannique.

L'année qui a suivi le jugement d'acquittement auquel le ministre a fait référence, un poursuivant du Manitoba du nom de R. C. George a obtenu une déclaration de culpabilité pour course. Cette définition du mot « course » est encore utilisée de nos jours. J'ai remarqué qu'elle avait encore été utilisée par la Cour supérieure de justice de l'Ontario il y a deux ans dans l'affaire Menendez, que M. Pruden doit certainement connaître.

M. Toews : Est-ce que la Cour a fait référence à l'affaire que j'avais perdue?

Le sénateur Baker : Non, mais cette affaire comporte un aspect étonnant. Il ne serait d'ailleurs pas étonnant que la Cour ait mentionné votre nom puisque vous avez agi comme avocat dans près de 50 affaires judiciaires rapportées. Écoutez cette phrase tirée du résumé de la décision. C'est une affaire de 1982, R. c. Flannery, Manitoba, recueil Carswell. On peut lire ceci dans le résumé : « les deux véhicules ont accéléré côte à côte, et ont atteint la vitesse de 50 kilomètres à l'heure ». La limite de vitesse était dans cette affaire de 50 kilomètres, mais le juge a décidé, comme vous le disiez il y a un instant...

M. Toews : Qui était le juge?

Le sénateur Baker : Le juge était un monsieur du nom de Ferg.

M. Toews : Oui. C'était probablement Lorne Ferg. Il y a deux frères Ferg : Pat et Lorne.

Le sénateur Baker : Je vois. L'aspect intéressant de cette affaire est que le juge n'a pas déclaré qu'il fallait dépasser la limite de vitesse pour qu'il y ait eu course et que c'était donc à lui de déterminer s'il y avait eu course ou non. Il a déclaré que la vitesse n'était pas un élément nécessaire pour qu'il y ait une course. Cette affaire a depuis été citée dans plusieurs provinces.

Pour revenir à la question initiale, qui portait sur la définition de « course », qu'a mentionnée le président, le code de la route de la Colombie-Britannique précise clairement le sens du mot « course ». Il y a une description préliminaire qui mentionne « [...] la situation de la route, la circulation, la visibilité » et aussi « [...] en tenant compte des autres usagers de la route » et la disposition se lit ensuite ainsi :

[...] en faisant une des choses suivantes :

a) distancer ou tenter de distancer un ou plusieurs autres véhicules à moteur.

b) empêcher ou tenter d'empêcher un ou plusieurs véhicules à moteur de dépasser.

c) conduire à une vitesse excessive pour arriver, ou tenter d'arriver, à une destination donnée avant un ou plusieurs autres véhicules à moteur.

Cela pose un problème. Si c'était la définition retenue, alors pour une première déclaration de culpabilité, concernant une course simple, la peine infligée serait la perte de votre permis de conduire pendant un an, mais cette définition pourrait tout aussi bien s'appliquer à deux taxis qui se rendent à l'aéroport, si l'on prend la définition utilisée dans la loi de la Colombie-Britannique. Qu'avez-vous à répondre à cela?

M. Toews : C'est la raison pour laquelle la course de rue est combinée à la conduite dangereuse. Il faut d'abord établir la conduite dangereuse, ou la conduite dangereuse causant des lésions corporelles ou la négligence criminelle ayant causé des lésions corporelles, plus la course de rue. S'il n'y avait qu'une course de rue simple, l'accusation serait probablement portée aux termes de la loi provinciale.

Par conséquent, les deux taxis qui se rendent à l'aéroport peuvent fort bien essayer d'arriver avant l'autre, mais cela ne veut pas nécessairement dire que les chauffeurs de taxi ont commis une infraction de conduite dangereuse.

Le sénateur Baker : Monsieur le ministre, vous avez abordé un point intéressant que le président a soulevé il y a un moment au sujet du rapport entre les lois provinciales et les lois fédérales. Vous avez dit il y a un instant que cela serait visé par la loi provinciale. Craignez-vous que dans des provinces comme la Colombie-Britannique, l'Ontario et le Manitoba, dont les lois provinciales ont des conséquences pénales et qui imposent des amendes importantes, les tribunaux jugent que leurs dispositions ou les vôtres soient nulles et sans effet?

M. Toews : Cela ne m'inquiète pas du tout. C'est un domaine auquel j'ai consacré une bonne partie de ma carrière juridique. Par exemple, quelle est la différence entre la conduite imprudente et la conduite dangereuse, si ce n'est une question de degré? Évidemment, le Code criminel accorde une importance beaucoup plus grande à l'intention que ne le fait la loi provinciale, et je crois qu'il existe ici une différence semblable.

Cependant, même si la course de rue exigeait une intention spéciale, un peu comme le fait le Code criminel, ce n'est pas ce qui rendrait l'une de ces dispositions inconstitutionnelles parce qu'elle ne respecte pas la répartition des pouvoirs, pourvu qu'une disposition ne soit pas incompatible avec l'autre. Il n'y a dans ce domaine rien d'incompatible entre les dispositions provinciales et les dispositions fédérales.

Le sénateur Baker : La loi provinciale de la Colombie-Britannique prévoit la confiscation automatique du véhicule. Le véhicule est mis à la fourrière. Il existe aussi, dans les lois provinciales, une disposition qui prévoit que dans ces cas- là, certaines mesures doivent être prises automatiquement. Ne craignez-vous pas que si l'on tente d'intenter des poursuites en vertu de ce projet de loi, quelqu'un soutienne qu'il y a double accusation? Vous admettez que le principe Kienapple s'applique ici.

M. Toews : Le principe Kienapple ne s'applique pas ici. Le principe Kienapple interdit de déclarer quelqu'un coupable de deux infractions qui découlent pour l'essentiel des mêmes faits.

Par exemple, j'ai longtemps travaillé au Manitoba à la rédaction des dispositions concernant la suspension administrative du permis de conduire et la saisie des véhicules à moteur. Aujourd'hui, au Manitoba, si un policier vous arrête et que vous avez plus de 0,08, votre permis de conduire est automatiquement suspendu pour une période qui commence dans sept jours. Il n'y a pas de procès.

Le sénateur Baker : Cela se fait au poste de police?

M. Toews : Au bord de la route et ensuite, au poste de police.

Le sénateur Baker : On ne peut pas utiliser ensuite la lecture effectuée au bord de la route.

M. Toews : Si vous avez plus de 0,08, cela suffit.

Le sénateur Baker : C'est une infraction à un règlement.

M. Toews : Oui. Mais ces personnes sont inculpées d'avoir 0,08 aux termes du Code criminel et sont déclarées coupables.

Le sénateur Baker : Dans cet exemple, que fait le procureur de la Couronne? Est-ce qu'il porte une accusation aux termes de la loi provinciale passible d'une peine d'emprisonnement de six mois et d'une amende de 2 000 $ ou porte-t-il une accusation aux termes du Code criminel fédéral? Ne pourrait-on pas soutenir que l'accusé fait face à une double accusation étant donné que la province a adopté des dispositions dans un domaine relevant de la compétence fédérale pour ce qui est des conséquences pénales?

M. Toews : Non. En fait, lorsque quelqu'un est accusé de conduite dangereuse, il est habituellement également accusé de conduite imprudente aux termes de la loi provinciale, et le procès porte sur les deux accusations. Les preuves sont appliquées, mutatis mutandis, aux deux accusations. Si l'accusé est déclaré coupable de l'infraction la plus grave, la Couronne suspend l'accusation de conduite imprudente. Je ne sais pas si le procureur de la Couronne est tenu d'agir de cette façon. Je ne connais pas très bien l'état actuel du droit, mais c'est la pratique appliquée généralement.

De plus, lorsque le conducteur a plus de 0,08, il est habituellement également accusé de conduite avec facultés affaiblies. Ce sont deux infractions distinctes. En fait, ces infractions comportent même des éléments différents. Avec un niveau d'alcool dans le sang de 0,08, il n'est pas nécessaire d'établir que les facultés du conducteur étaient affaiblies pour obtenir une déclaration de culpabilité; c'est donc une infraction distincte. Il peut toutefois y avoir des preuves de conduite avec facultés affaiblies qui permettent au juge de déclarer l'accusé coupable. Il pourrait arriver qu'un juge déclare l'accusé coupable à la fois de 0,08 et de facultés affaiblies, mais en pratique, lorsque l'accusé plaide coupable à une des accusations, la Couronne abandonne l'autre.

Le sénateur Baker : Est-ce que vous ou votre ministère craignez que l'absence de norme commune dans les différentes régions du Canada pour ce qui est des codes de la route provinciaux et des normes applicables aux pouvoirs des policiers puisse entraîner des différences dans l'application de la loi dans les différentes régions? Si c'est le cas, que pourriez-vous faire à ce sujet?

M. Toews : En fait, cela ne me préoccupe pas. Avec les lois provinciales, en particulier avec les codes de la route, la Cour suprême a clairement déclaré que les policiers avaient le droit d'arrêter des véhicules à moteur au hasard et de demander au conducteur son permis de conduire et l'enregistrement du véhicule. Cela se fait régulièrement. Il faut bien sûr tenir pour acquis que ces contrôles aléatoires ne sont pas fondés sur des motifs inappropriés, comme, par exemple, le profilage racial, qui est un problème grave que de nombreux services de police ont tenté de circonscrire en adoptant des règlements internes. Il existe des mécanismes qui permettent de veiller à ce que les policiers disposent de larges pouvoirs de contrôle en matière d'assurances, de permis de conduire et des autres aspects réglementaires, tout en évitant que ces policiers abusent de leurs pouvoirs.

Je ne propose absolument pas de limiter le pouvoir des policiers de contrôler le privilège — non pas le droit, mais le privilège — de conduire un véhicule à moteur. Je suis par contre en faveur de renforcer les règlements internes pour éviter que ces vastes pouvoirs soient mal utilisés.

Le sénateur Milne : Je voudrais vous poser d'autres questions au sujet de la définition de course de rue. Vous avez parlé de la définition qui existe dans certaines provinces. En Ohio, la course de rue peut également désigner « le fait de conduire un ou plusieurs véhicules sur un parcours commun déterminé, entre deux points, le déplacement des véhicules qui y participent étant chronométré, et pouvant prendre la forme de course d'accélération ou de vitesse ». Autrement dit, c'est une course contre la montre.

Le code de la route de la Californie précise que « une course de véhicules à moteur comprend la course d'un véhicule à moteur contre un autre véhicule à moteur, contre un chronomètre ou un autre dispositif servant à mesurer l'écoulement du temps ».

Je crois également savoir que le Code de la route du Québec prévoit également les courses contre la montre.

Est-ce que l'expression « course contre la montre » a été délibérément omise de ce projet de loi? Êtes-vous disposé à appuyer une modification de la définition de course de rue pour inclure les courses contre la montre, si les preuves s'y prêtent?

M. Toews : Ce genre de course est déjà compris. Il est compris dans la notion de course mais il ne se limite pas nécessairement à cela. Je ne veux pas que ces dispositions soient tellement restrictives qu'elles donnent naissance au genre de situation à laquelle j'ai fait face dans l'affaire Ross George, dans laquelle le juge a déclaré qu'il fallait qu'il y ait quelqu'un pour signaler le départ de la course avec un drapeau. Pour qu'il y ait course, il suffit qu'un des conducteurs fasse un signe de tête à l'autre, que les conducteurs emballent leur moteur, fassent crisser leurs pneus et que les véhicules démarrent.

Le sénateur Milne : Il y a encore deux véhicules.

M. Toews : Il faut qu'il y ait deux véhicules.

Le sénateur Milne : Que se passe-t-il si quelqu'un participe à une course contre la montre?

M. Toews : Cela pourrait être une conduite imprudente ou une conduite dangereuse, ou encore un pari ou un concours.

Hal Pruden, avocat, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice du Canada : S'il s'agit simplement d'un véhicule qui fait une course pour gagner un prix ou un pari, alors il n'y a pas de course avec un autre véhicule. Cependant, s'il y a deux véhicules, qu'ils se déplacent côte à côte ou qu'ils fassent tous les deux la course comme dans les épreuves contre la montre du Tour de France, au cours desquelles chaque coureur poursuit l'autre, ou s'ils partent de différents endroits de la ville pour voir qui peut arriver le premier à un endroit donné, alors il y a une course entre deux véhicules. C'est pourquoi, dans la jurisprudence, la notion de « deux véhicules » fait déjà partie de la notion de « course »

Le sénateur Milne : La course contre la montre est déjà prévue par la jurisprudence. Est-ce bien ce que vous essayez de me dire?

M. Pruden : S'il n'y a qu'une seule voiture et que le conducteur fait la course pour gagner un prix ou un pari, alors il peut s'agir de conduite dangereuse. Le conducteur serait poursuivi aux termes du Code criminel pour conduite dangereuse, si la façon dont le véhicule est conduit est dangereuse, mais il n'y aurait pas « conduite dangereuse associée à une course de rue », qui est la nouvelle infraction applicable aux personnes qui font une course, d'une façon ou d'une autre, avec un autre véhicule.

Le sénateur Milne : La course contre la montre n'est donc pas visée par ce projet de loi.

M. Pruden : S'il n'y a qu'un véhicule qui fait une course contre la montre, non.

Le sénateur Milne : S'il y avait des preuves qui montraient que cette course peut être tout aussi dangereuse pour les personnes qui se trouvent sur les côtés du chemin, seriez-vous favorable à ce qu'on modifie la définition de « course de rue »?

M. Toews : Il faudrait essentiellement prouver qu'il y a conduite dangereuse. Cela est prévu. Je ne pense pas que je serais prêt à le faire pour le moment en raison des complications qu'une telle modification pourrait entraîner. Je suis convaincu que la conduite que nous voulons réprimer concerne dans 99 p. 100 des cas, et peut-être même davantage, deux personnes se trouvant dans deux véhicules différents, qui se déplacent sur une route et qui sont conduits de façon dangereuse parce qu'ils risquent de se heurter ou parce que les conducteurs risquent d'en perdre le contrôle. La personne qui fait une course contre le temps dans une rue exerce une activité dangereuse mais, dans l'ensemble, je pense que les policiers diraient que la conduite à réprimer est celle qui met aux prises deux ou plusieurs véhicules qui font une course dans une voie publique et mettent en danger le public.

Le sénateur Milne : Merci de m'avoir donné cette réponse, parce qu'elle m'amène à ma deuxième question.

Si j'ai bien compris le projet de loi, ce qui n'est pas toujours facile, il faut surmonter deux obstacles pour établir la conduite dangereuse. Il y a d'abord la conduite dangereuse et, ensuite, la négligence criminelle. Ce sont les deux obstacles qu'il faut surmonter.

M. Toews : Pas pour établir la conduite dangereuse.

Le sénateur Milne : Si vous voulez accuser quelqu'un d'avoir causé la mort au cours d'une course, de quoi allez-vous l'accuser?

M. Toews : Si une personne en tuait une autre à l'heure actuelle au cours d'une course de rue, alors elle pourrait être inculpée soit de conduite dangereuse causant des lésions corporelles ou la mort, soit de négligence criminelle causant des lésions corporelles ou la mort.

Le sénateur Milne : Il faut donc franchir ces deux obstacles.

M. Toews : Il faut établir la négligence criminelle et la mort ou la conduite dangereuse et la mort.

Le sénateur Milne : Il faut donc franchir deux obstacles.

M. Toews : Non, la mort est une conséquence assez grave.

Le sénateur Milne : Oui. Pour prouver qu'il y a eu course de rue, on ajoute alors un troisième obstacle. Pensez-vous qu'un procureur de la Couronne, qui est sûr d'obtenir une déclaration de culpabilité pour deux infractions, essaiera d'en obtenir une troisième?

M. Toews : Par exemple, la personne qui en a tué une autre en exerçant une activité donnée sera inculpée de conduite dangereuse. Supposons qu'il n'existe pas suffisamment de preuves pour établir la négligence criminelle, qui ressemble beaucoup à ce que les Américains appellent « homicide involontaire coupable à l'aide d'un véhicule à moteur », mais nous n'avons pas cette notion dans notre droit; supposons que les preuves indiquent clairement qu'il y a eu conduite dangereuse. La poursuite porterait une accusation de conduite dangereuse causant la mort à l'occasion d'une course de rue. Le juge examinerait les preuves et dirait : « Il n'y avait qu'un seul véhicule d'impliqué dans cette affaire; il n'y avait pas course de rue; mais il y a suffisamment de preuves pour dire qu'il y a eu conduite dangereuse causant la mort »; il pourrait ensuite déclarer l'accusé coupable de l'infraction incluse. Il n'est pas nécessaire de porter une accusation distincte. C'est une infraction incluse, tout comme le meurtre au premier degré, le meurtre au second degré et l'homicide involontaire coupable sont des infractions incluses.

Le sénateur Milne : Merci de cette précision. Nous allons entendre demain un certain nombre de groupes. Comme le sénateur Oliver vous l'a dit, ces groupes, qui sont tout à fait respectueux des lois, nous ont bombardés de questions parce que ce projet de loi les inquiète. Tous ces groupes respectent les règlements municipaux et provinciaux de façon à assurer la sécurité des participants et des spectateurs. Aviez-vous l'intention d'exclure expressément ces organismes de l'application du projet de loi? Je pense à des organismes comme la Grand Prix Association de Toronto. Ceux qui organisent les courses Indy dans les rues du centre-ville de Toronto commettent-ils une infraction au code de la route en organisant un événement qui est une course de véhicules qui s'effectue sur des voies publiques? Qu'arriverait-il à ASN Canada et à la course Targa à Terre-Neuve dont vous avez parlé?

M. Toews : Si cela constituait déjà une infraction pénale, alors ce serait la continuation de cette infraction. À l'heure actuelle, les courses s'effectuent sur des pistes qui sont fermées au public. Même si la course s'effectue dans d'autres circonstances, elle emprunte des voies publiques. Dans ce cas-ci, elles sont fermées à la circulation.

Le sénateur Milne : Je ne pense pas qu'elles le soient pour les courses Targa à Terre-Neuve.

M. Toews : C'est un rallye.

Le sénateur Milne : Pour les rallyes tout terrain, les organisateurs ne bloquent pas les routes.

M. Toews : Ils sont sans doute exemptés de poursuites, qu'il s'agisse de négligence criminelle ou de conduite dangereuse.

M. Pruden : Si la conduite en question constitue de la négligence criminelle causant la mort, qu'il s'agisse du comportement d'un conducteur de véhicule à moteur ou d'un autre comportement, la personne visée pourrait être accusée de négligence criminelle causant la mort. Ces rallyes routiers, qui sont tout à fait légaux, doivent respecter les lois fédérales et provinciales. Les conducteurs de ces véhicules ne conduisent pas dangereusement et leur façon de conduite ne constitue pas de la négligence criminelle causant des lésions corporelles ou la mort. Si ces participants continuent à bien conduire leurs véhicules, les dispositions ne s'appliqueront pas à ces rallyes routiers ni aux courses en circuit fermé.

Le sénateur Milne : Pour les courses en circuit fermé, le ministre Toews a mentionné que si la circulation est bloquée, cela est acceptable. Pour les courses Indy qui s'effectuent dans les centres-villes, par exemple à Montréal ou à Toronto, c'est acceptable.

M. Pruden : Pour la conduite dangereuse, oui. Cependant, pour ce qui est de la négligence criminelle, si quelqu'un a un comportement qui constitue de la négligence criminelle causant la mort, que ce soit en conduisant un véhicule ou en exerçant une autre activité, cette personne peut être inculpée de négligence criminelle causant la mort.

M. Toews : Par exemple, il est possible de frapper quelqu'un au cours d'un match de hockey sans que cela constitue des voies de fait. Cependant, dans d'autres circonstances, si vous frappiez quelqu'un comme ceci...

Le sénateur Milne : Ce l'est parfois.

M. Toews : C'est exactement ce que je voulais dire : ce l'est parfois. Il est possible d'intenter des poursuites dans ces circonstances. Cela ne change aucunement le droit substantiel sur ce point. Ce projet a pour but de dénoncer ce genre d'activité lorsqu'elle est contraire à la loi. Lorsqu'il s'agit de négligence criminelle, nous avons maintenant le droit de dire qu'il s'agit non seulement de négligence criminelle, mais de négligence criminelle à l'occasion d'une course de rue qui est, par conséquent, passible de peines plus sévères. Cela ne modifie pas le droit substantiel applicable au problème que nous essayons de régler. Nous reconnaissons qu'il y a un élément supplémentaire. Si la Couronne ne peut établir cet élément supplémentaire, il est toujours possible d'obtenir la condamnation de l'accusé pour négligence criminelle causant la mort, par exemple, si c'est l'infraction qui est incluse dans ce cas-là.

Le président : Merci de nous avoir fourni ces explications, monsieur le ministre.

Le sénateur Milne : Il a été rapporté que des policiers sont venus sur les lieux où se déroulaient certains événements en Nouvelle-Écosse et ont menacé d'inculper de conduite dangereuse les participants à une course en circuit fermé. L'adoption de ce projet de loi ne risque-t-il pas d'inciter les services de police à multiplier leurs interventions?

M. Toews : Cela ne change aucunement l'infraction substantielle; le projet ne fait que préciser un élément supplémentaire que la Couronne doit établir. Supposons qu'un comportement donné constitue de la négligence criminelle aujourd'hui. La seule chose qui changerait est que ce comportement deviendrait de la négligence criminelle dans le contexte d'une course de rue. Il faudrait établir un élément supplémentaire. Cela ne crée pas une nouvelle infraction. Le projet précise simplement qu'il s'agit de négligence criminelle causant la mort dans le contexte d'une course de rue.

Le sénateur Bryden : Je souhaite, et c'est en fait ce que nous essayons de faire, trouver un moyen pour que les personnes qui exercent des activités sportives légitimes, en utilisant notamment des véhicules pour faire des rallyes, comprennent que cette nouvelle loi ne risque pas de les obliger à cesser leurs activités.

Je sais qu'avec une nouvelle mesure législative, en particulier une mesure pénale, les juges et les tribunaux commencent toujours par examiner l'article de la loi pour savoir quels sont les éléments d'une infraction; vous avez également déclaré que la définition de course de rue que contient le projet de loi ne va aucunement toucher les activités des gens qui font des rallyes et ce genre de choses. J'ai toutefois écrit quelque chose que j'aimerais vous lire :

La formule du rallye performance comprend deux parties : les étapes spéciales et les sections de transit. Les étapes spéciales sont les parties compétitives du trajet et les voies utilisées sont fermées à la circulation pendant la course. C'est une course contre la montre qui s'effectue à des vitesses inimaginables pour le conducteur moyen.

Je pense qu'il s'agit là d'une situation où plusieurs véhicules participent à la course. Tous les conducteurs veulent arriver le premier. S'il y a un accident, l'accusation qui serait portée, en fonction des circonstances, serait celle de conduite dangereuse, mais cela est également visé par cette définition. Vous n'avez pas l'intention que ces activités soient visées par le projet de loi, mais d'après mon interprétation, cette activité pourrait l'être.

M. Toews : Pourriez-vous me relire cette définition du rallye?

Le sénateur Bryden : « Les étapes spéciales sont les parties compétitives du trajet et les voies utilisées sont fermées à la circulation pendant la course. »

M. Toews : Voilà.

Le sénateur Bryden : « C'est une course contre la montre qui s'effectue à des vitesses inimaginables pour le conducteur moyen. »

M. Toews : Pour vous répondre, ces sections sont fermées à la circulation. C'est l'élément clé. La définition est la suivante : « Épreuve de vitesse entre des véhicules à moteur dans une rue, un chemin ou une grand-route ou tout autre lieu public ». La notion de « lieu public » englobe tous les autres : rue, chemin ou grand-route. Si vous examinez n'importe quelle autre loi, vous constaterez que c'est la façon dont la notion de « lieu public » influence l'interprétation des mots « rue », « chemin » et « grand-route ». Lorsqu'une route est fermée à la circulation, par exemple, ce n'est plus une voie publique à ce moment et pour les fins prévues.

Le sénateur Bryden : Ne serait-il pas possible d'ajouter, avec vos collaborateurs, une disposition à cette définition, ou dans un endroit approprié du projet de loi, qui indiquerait clairement qu'il n'est pas nécessaire d'être un avocat spécialisé dans le code de la route, comme vous l'êtes manifestement?

M. Toews : Même si j'ai perdu un grand nombre de mes affaires?

Le sénateur Bryden : Cela nous arrive à tous. Ainsi, les citoyens ordinaires pourraient se dire en regardant ce qu'ils font que ce projet de loi ne les vise pas. Il ne serait pas nécessaire de s'adresser à un avocat et d'obtenir un avis juridique avant d'aller faire une course. Ces activités sont souvent organisées par des personnes comme celles-ci, mais ces courses se déroulent bien souvent dans des zones rurales et ce sont des gens de la campagne très simples comme moi qui y assistent.

Au lieu de les obliger à obtenir un avis juridique pour être sûrs que ce qu'ils font ne les rendra pas passibles de ces lourdes peines, si jamais ils étaient accusés de faire une course sur la route, ne serait-il pas possible d'ajouter une exception ou une disposition qui dirait : « [...] et pour plus de certitude, la définition qui précède ne comprend pas ce qui suit »? Je ne vois pas quel serait le désavantage d'adopter une telle clause.

M. Toews : À l'heure actuelle, ces groupes sont obligés d'obtenir des opinions juridiques et d'exercer la même diligence raisonnable pour être sûrs de bien respecter le code de la route ou la loi relative aux véhicules à moteur et que la course ait lieu dans un secteur approprié, fermé et auquel le public n'a pas accès. Ils font déjà autoriser ce genre de course par rapport aux lois provinciales appropriées.

Ce projet de loi ne changera rien du tout. L'autorisation que ces groupes obtiennent de nos jours, avant l'adoption du projet de loi, est exactement la même autorisation qu'ils devront obtenir si ce projet de loi est adopté. Rien ne changera.

Ce projet de loi réprime expressément la conduite dangereuse lorsqu'elle est associée à une course de rue. Une conduite dangereuse qui ne serait pas réprimée par le code de la route aujourd'hui demeurerait une conduite dangereuse demain, avec l'élément supplémentaire qu'il faut prouver à l'égard d'une course de rue. Dans ce sens, le fardeau qui incombe à ces personnes de veiller à ce que le circuit utilisé pour la course soit fermé au public ne serait aucunement changé.

Le sénateur Bryden : Il y a toutefois un élément supplémentaire. Si vous violez la loi, si vous avez un accident, il n'y a rien dans ce projet de loi qui dise que vous ne faites pas une course de rue dans ce genre de situation. Ce n'est pas clairement exprimé ici. La pénalité peut vous faire perdre trois ans, cinq ans et plus, selon qu'il y a d'autres facteurs.

J'aborde la question du point de vue des gens que je connais. Je ne pratique pas cette activité, mais je connais des gens qui le font depuis des années et qui aiment beaucoup la pratiquer. Il est important que nos lois ne semblent pas avoir pour but de compliquer la vie des gens mais de les protéger.

J'aimerais que vous examiniez, comme nous allons le faire après avoir entendu nos témoins, si un tel amendement serait utile. Si c'était le cas, j'ai appris par expérience qu'il est souvent préférable d'adopter un amendement que vous et votre ministère trouvent acceptable et que cela règle également la question de politique publique que nous aurons à régler à un moment donné.

M. Toews : Tout ce que je peux vous dire maintenant, c'est que si vos amis font une course dans un endroit qui est un lieu public, ils violent la loi et commettent probablement une négligence criminelle, une conduite dangereuse ou une conduite imprudente. Si leur course respecte les règlements provinciaux, municipaux et locaux, alors ils ne violent pas la loi parce qu'ils ne sont pas sur une voie publique. Dès que vous n'êtes plus dans un lieu public, qu'il s'agisse de rues, chemins ou grand-routes, vous ne commettez aucune infraction.

Le sénateur Milne : La course Indy s'effectue dans les rues du centre-ville de Toronto. Les rues sont fermées à la circulation, mais la course a lieu dans ces rues.

M. Toews : Ce n'est toutefois pas un lieu public aux fins du Code criminel ou du code de la route. C'est là l'élément essentiel. C'est l'aspect fondamental. Il ne serait pas possible d'emprunter ces rues au moment où a lieu la course Indy — à moins que je ne me trompe au sujet de vos capacités.

Le sénateur Andreychuk : Toujours sur ce sujet, je crois savoir qu'actuellement, une association légitime peut demander aux autorités provinciales ou municipales d'autoriser une course; ce projet de loi va-t-il modifier cette situation?

M. Toews : Non, pas du tout.

Le sénateur Andreychuk : S'il s'agit d'une course non officielle — des gens qui mettent quelques barrières et qui commencent à faire la course —, ce n'est probablement pas légal aujourd'hui, de toute façon.

M. Toews : C'est exact. Ce serait aujourd'hui une violation du code de la route provincial si ces gens ne respectaient pas les exceptions prévues pour les courses.

Le sénateur Andreychuk : Pourraient-ils quand même être accusés s'ils se trouvaient dans le secteur délimité par les organisateurs?

M. Toews : Ils pourraient quand même être accusés aujourd'hui, oui.

Le sénateur Andreychuk : C'est comme dans les sports professionnels comme le hockey; les joueurs ne sont pas soustraits aux lois même s'ils sont sur la glace, professionnels ou autres. Ils sont encore visés par le Code criminel. Les associations ne bénéficient donc pas à l'heure actuelle d'une exception générale.

M. Toews : Non. C'est exact, pour ce qui est de la négligence criminelle.

Le sénateur Andreychuk : Nous voulons donc qu'ils exercent leurs activités de façon raisonnable, malgré la vitesse, malgré la course, malgré le défi ou la compétition.

M. Toews : Vous avez absolument raison. Vous avez résumé tout cela beaucoup mieux que moi.

Nous disons pour l'essentiel qu'il n'y a pas d'exception lorsque les joueurs vont au-delà de l'activité protégée. Le hockey est, je crois, un exemple que les Canadiens comprennent bien. Ils se donnent bien sûr des coups au hockey; cependant, si quelqu'un commence à frapper d'une certaine façon, cela devient une activité dangereuse qui peut déboucher sur une accusation de voies de fait causant des lésions corporelles, d'homicide involontaire coupable ou de meurtre.

Le sénateur Andreychuk : Les règles n'ont donc pas changé.

Je crois que cette loi vise davantage à dénoncer une certaine activité qui amène bien souvent les citoyens à se sentir vulnérables. Il y a de plus en plus de jeunes qui prennent des voitures et qui pensent qu'il est « in » de faire la course. Cette activité a eu des conséquences désastreuses, elle a notamment causé des morts. C'est un peu comme au temps où on ne considérait pas que le fait de conduire et de boire était une chose répréhensible. Il a fallu sensibiliser la population, et pas uniquement lui faire comprendre les conséquences juridiques de cette activité.

Il semble que ce projet de loi vise davantage les jeunes qui utilisent des véhicules à moteur pour faire la course dans les rues et mettre en danger la population. Quel genre de campagne de sensibilisation ou de changement culturel allez- vous provoquer? Je pense qu'à lui seul, le droit ne permettra pas d'obtenir ce résultat.

M. Toews : Vous avez raison. Un comportement criminel aujourd'hui sera toujours criminel avec ce projet de loi. Il n'aura pas pour effet de transformer en criminel quelqu'un qui ne l'était pas hier. Si votre activité constitue de la négligence criminelle, ce projet de loi n'a aucunement pour effet de vous rendre davantage criminel. Il n'élargit pas la portée de la négligence criminelle. Je tenais à insister à nouveau sur ce point.

Ce projet de loi ne crée pas de nouvelle infraction dans ce domaine. La criminalité demeure la même, avec l'élément supplémentaire de course de rue que la Couronne doit établir. Le projet impose donc à la Couronne un fardeau plus lourd. L'élément pénal fondamental demeure inchangé, mais il peut être excusé si la personne en question respecte les règles de la circulation.

Le volet éducatif est un aspect très important. C'est un aspect que le projet de loi ne touche pas. La loi par elle- même, en dénonçant expressément cette activité, a un effet de sensibilisation parce qu'elle affirme que ce comportement n'est plus acceptable, mais il est possible que certaines provinces souhaitent agir dans le domaine de la sensibilisation dans le cadre de la formation des conducteurs et ce genre de choses. Ce n'est toutefois pas un aspect que l'on retrouve dans ce projet de loi.

C'est une activité qui est exercée en ce moment. Nous voulons expressément la dénoncer en adoptant ce projet de loi. Nous fournissons aux services de police provinciaux et municipaux les outils pour le faire.

Le sénateur Joyal : Je me demande si les autres témoins peuvent rester avec nous un peu plus longtemps. Je ne voudrais pas retarder le ministre.

Le président : Peut-être que Mme Kane et M. Pruden pourraient rester quelques minutes de plus.

Au nom du comité, je vous remercie d'être venu ici, monsieur le ministre. Vous avez non seulement présenté un excellent exposé, mais vous avez également répondu à des questions très difficiles.

Le sénateur Joyal : Je demande aux témoins d'excuser mon retard. J'ai dû rester dans la salle.

Ma première question concerne les procureurs généraux ou les ministres de la Justices des provinces. J'aimerais savoir si la question des courses de rue a été soulevée au cours de l'assemblée annuelle fédérale-provinciale que vous avez avec les procureurs généraux et les ministres de la Justice des provinces. Si c'est le cas, pensaient-ils que cette activité constituait un problème et ont-ils demandé que le Code criminel soit modifié pour le régler?

Catherine Kane, avocate générale principale par intérim, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice Canada : Comme vous le savez, il y a déjà eu deux projets de loi présentés officiellement sur cette question. L'un était un projet de loi d'initiative parlementaire et l'autre un projet de loi du gouvernement qui a été présenté au cours de la dernière législature. Ces deux projets de loi ont fait l'objet de discussions avec nos collègues des provinces.

Au cours de la dernière réunion FTP des ministres, il y a eu, comme c'est l'habitude, un examen qui a porté sur tous les projets de loi présentés actuellement à la Chambre des communes, et ce projet de loi a été mentionné à ce moment- là. Il a été expliqué. Ce projet de loi n'a suscité absolument aucune interrogation et nous en avons parlé avec nos collègues. M. Pruden pourrait sans doute vous en dire davantage au sujet des conservations que nous avons eues avec les personnes avec qui nous sommes en liaison.

À notre connaissance, personne ne s'est opposé à ce projet de loi. En fait, plusieurs provinces estiment que ce projet de loi est important — il nous donne le moyen de mieux suivre les courses de rue, ce que ne faisait pas, comme cela a déjà été noté, une simple accusation de conduite dangereuse ou de négligence criminelle causant la mort, qui ne nous permettrait pas de suivre le comportement de cette personne et de savoir qu'elle a déjà participé à des courses de rue.

M. Pruden : Les services de police sont tout à fait favorables à ce projet de loi. Ils ont lancé des campagnes d'éducation de la population dans le domaine des courses de rue.

On pourrait également noter que ce n'est pas une idée nouvelle pour les provinces. Le Parlement a modifié le Code criminel — c'était, je crois, en 2001 —mais il est possible que je me trompe sur ce point, ma mémoire n'est peut-être pas excellente. Le Code criminel a été modifié dans le but de créer une nouvelle infraction, celle de conduite dangereuse au cours d'une poursuite par la police. Il fallait prouver l'élément conduite dangereuse et l'élément poursuite policière. Si la poursuite réussissait à établir ces éléments, elle pouvait alors demander une peine située dans la gamme des peines plus sévères prévues pour la conduite dangereuse causant des lésions corporelles au cours d'une poursuite ou pour la conduite dangereuse causant un décès pendant une poursuite policière; le juge est alors tenu de fixer une peine se situant dans cette gamme de peines plus sévères.

Ce projet de loi fait la même chose. C'est un modèle semblable à celui que connaissent déjà bien les provinces, puisqu'elles ont déjà vu ce projet de loi antérieur être adopté par le Parlement.

Le sénateur Joyal : Autrement dit, c'est une initiative du ministre de la Justice fédéral et non pas une demande des ministres de la Justice ou des procureurs généraux des provinces, étant donné que ces problèmes sociaux s'aggravaient; le gouvernement fédéral a décidé de modifier le Code criminel sur ce point.

M. Pruden : C'est exact. Comme l'a dit Mme Kane, cela a commencé par un projet de loi d'initiative parlementaire et il y a ensuite un projet de loi du gouvernement au cours de la 38e législature.

Le sénateur Joyal : Ma deuxième question concerne la définition. L'article 1 du projet de loi énonce :

« courses de rue » Épreuve de vitesse entre des véhicules à moteur dans une rue, un chemin ou une grand-route ou tout autre lieu public.

Que vise l'expression « tout autre lieu public »? Le ministre a déclaré que « rue, chemin ou grand-route » influençait le sens de « autre lieu public ». Je pense que cette expression a une portée beaucoup plus large que « rue, chemin ou grand-route ». Un lieu public est tout lieu auquel le public a accès.

M. Pruden : Oui. Selon la jurisprudence, c'est un lieu auquel le public a accès. Si le public a accès au terrain de stationnement d'un centre commercial, ce terrain devient un lieu public.

Le sénateur Joyal : C'est ce que j'ai écrit dans la marge de mon texte. Pour moi, un lieu public est un lieu dont l'accès n'est pas interdit au public. Un petit terrain de stationnement n'est pas fermé en dehors des heures ouvrables. J'ai vu ça dans des émissions de télévision. Je ne dirais pas que ce sont des enfants parce qu'il faut avoir un permis de conduire, mais il y a des gens qui font la course dans des endroits accessibles le soir, parce que ces endroits sont accessibles.

Dans le contexte de cette définition, il s'agit un lieu public. Il n'est pas nécessaire que ce soit un chemin, une grand- route ou une infrastructure de ce genre. Par exemple, un lot vacant dont l'accès ne serait pas interdit par une pancarte pourrait être un lieu public.

Les juges seront amenés à interpréter cet article. Ils examineraient les autres articles du Code criminel pour préciser le sens de lieu public. Avez-vous examiné le Code criminel pour savoir ce qu'est un lieu public? L'élément essentiel est l'expression « lieu public ».

M. Pruden : Oui. Dans le cas de la disposition du Code criminel relative à la conduite dangereuse, on constate que la jurisprudence précise ce qu'est un lieu public. Cette jurisprudence existe pour la conduite dangereuse. Un des éléments de cette infraction est la conduite dangereuse associée à une course de rue.

Le sénateur Joyal : Qu'est-ce qu'un lieu public?

M. Pruden : C'est un lieu où le public a accès.

Le sénateur Joyal : N'importe quel lieu où le public a accès?

M. Pruden : Oui. Ce pourrait être le terrain de stationnement d'un centre communautaire. Si c'est un terrain privé, comme le terrain d'un centre commercial...

Le sénateur Joyal : Ou un terrain vacant.

M. Pruden : Un terrain vacant est peut-être différent d'un centre commercial auquel le public est toujours invité. Je n'irais pas jusqu'à dire qu'il est possible de conduire sur tous les terrains vacants.

Le sénateur Joyal : N'importe quel lieu auquel le public a accès. Il y a toutes sortes de situations possibles. Un lieu dans lequel deux véhicules peuvent faire la course pourrait être considéré comme un lieu public si l'accès à ce lieu n'est pas interdit.

M. Pruden : Le ministre a déclaré que 99 p. 100 de ce genre d'affaires visaient des courses dans des rues ou sur des chemins. Nous ne pensons pas qu'il y aura beaucoup de poursuites dans les cas où l'autre lieu public n'est pas une rue, un chemin ou une grand-route.

La plupart des affaires concerneront des rues et des routes.

Le sénateur Joyal : Je n'ai pas de mauvaise intention, même si je suis assis à côté du sénateur Bryden, mais prenons le cas d'une cour d'école pendant la fin de semaine. La plupart du temps, la grille n'est pas fermée et il n'y a pas de pancarte interdisant aux gens de pénétrer dans la cour d'école. Deux conducteurs pourraient fort bien utiliser une cour d'école, parce qu'il n'y a personne pour les en empêcher.

Ces conducteurs penseraient que le risque d'être pris n'est pas très grand, parce qu'il ne s'agit pas d'une rue, d'un chemin ou d'une grand-route. Serait-ce considéré comme un lieu public aux fins du projet de loi?

M. Pruden : Oui.

Le sénateur Joyal : Comme le sénateur Nolin l'a déclaré, tout lieu dont l'accès n'est pas interdit au public pourrait être réputé constituer un lieu public aux termes des articles du Code criminel que vous proposez.

M. Pruden : Oui, ce serait possible.

Le sénateur Joyal : S'ils commencent sur un chemin et vont ensuite dans un secteur que la police ne surveille pas, c'est l'essentiel de l'émission que j'ai vue. Il est possible que le sénateur Nolin et moi ayons vu la même émission de la CBC.

Le sénateur Nolin : C'est une situation très dangereuse. Il y a beaucoup de jeunes conducteurs qui utilisent les terrains de stationnement pour essayer d'aller de 0 à 60 en quelques secondes.

Le sénateur Joyal : Ils ne veulent pas le faire sur un chemin. Ils risquent davantage de se faire prendre sur un chemin que s'ils vont sur un terrain de stationnement où il n'y a personne la nuit.

« Public » ne veut pas dire que le lieu doit appartenir à une entité publique comme une municipalité ou un conseil scolaire. Il pourrait s'agir d'un lieu qui appartient à une personne privée, mais auquel la population a accès.

M. Pruden : C'est exact.

Le sénateur Joyal : Je ne vais pas en dire davantage sur ce point. Ma question suivante concerne la révocation ou la suspension du permis de conduire.

Pourquoi pensez-vous que la course de rue est une activité plus dangereuse que le fait de conduire un véhicule à moteur en état d'ébriété et de tuer quelqu'un ou de causer des lésions corporelles?

M. Pruden : Je comprends la question. Les fonctionnaires fédéraux, provinciaux et territoriaux ont reconnu l'existence de ce problème. Il faut examiner les autres dispositions en matière de course de rue dangereuse pour constater que ces dispositions sont harmonisées. Ce projet de loi reflète le fait que les fonctionnaires fédéraux, provinciaux et territoriaux s'intéressent de façon plus globale à l'harmonisation de toutes ces dispositions.

Le sénateur Joyal : Lorsque j'ai lu le projet de loi, j'ai pensé au code de la route. Il est possible que d'autres sénateurs aient abordé ce point. Ce projet de loi traite d'un aspect du code de la route qui est réglementé par les gouvernements provinciaux.

M. Pruden : Ce n'est pas tout à fait exact. Les gouvernements provinciaux interviennent en matière de suspension du permis de conduire provincial. Ils le font souvent lorsque l'accusé a été déclaré coupable de conduite avec facultés affaiblies aux termes du Code criminel fédéral.

Parallèlement, le Code criminel fédéral prévoit des ordonnances fédérales d'interdiction de conduire. Le projet de loi propose une interdiction de conduire fédérale, prévue par le Code criminel, qui s'applique à l'ensemble du Canada. Même si la personne en question réussissait à obtenir un permis dans une province donnée, l'interdiction de conduire fédérale s'appliquerait quand même partout au Canada. Cette personne pourrait dire qu'elle a un permis valide mais le tribunal lui répondrait que cela n'importe pas parce que le Code criminel lui interdit quand même de conduire.

Le sénateur Joyal : Par exemple, si quelqu'un voyait son permis de conduire suspendu aux termes de ce projet de loi au Québec et déménageait ensuite au Nouveau-Brunswick ou en Saskatchewan, cette personne pourrait-elle demander un permis de conduire et continuer à conduire un véhicule à moteur?

M. Pruden : Les provinces communiquent entre elles. Si quelqu'un arrivait à éviter les obstacles et était arrêté par la police au volant d'un véhicule, cette personne serait accusée d'avoir violé une ordonnance fédérale d'interdiction de conduire prévue par le Code criminel. Le fait de conduire en étant visé par une ordonnance d'interdiction constitue une infraction au Code criminel. Même si cette personne réussissait à éviter les obstacles en déménageant dans une autre province et obtenait un permis de conduire dans cette province, cela ne servirait à rien. Cette personne serait toujours en violation de l'interdiction de conduire du Code criminel.

Mme Kane : Cela se produit à l'heure actuelle dans le cas de la conduite avec facultés affaiblies. Le fait d'être déclaré coupable aux termes du Code criminel, qu'il s'agisse d'une seconde ou d'une déclaration de culpabilité subséquente, emporte interdiction de conduire quelque véhicule que ce soit, où que ce soit au Canada. Probablement, la personne ainsi déclarée coupable aurait son permis suspendu pendant un certain temps aux termes du code de la route provincial. Par exemple, si cette personne vivait en Ontario, son permis de conduire serait suspendu. Elle pourrait essayer de se procurer un permis au Manitoba, mais elle serait toujours visée par l'interdiction de conduire. Même avec un permis, aux termes du Code criminel, on ne peut conduire dans aucune province au Canada. C'est une interdiction fédérale. La personne qui viole une telle interdiction commet une nouvelle infraction et est passible des peines prévues par le Code criminel.

De la même façon, la personne qui viole l'interdiction de conduire alors que son permis est suspendu, parce que le permis est un privilège, risque de se voir imposer les peines prévues par le code de la route provincial.

Le sénateur Joyal : Permettez-moi de reformuler ma question pour que je comprenne bien les implications.

Dans le contexte du Code criminel actuel, la personne qui conduit et cause la mort de quelqu'un par négligence criminelle est coupable d'une infraction. Tel que le Code criminel est rédigé actuellement, cette personne ne risque pas de perdre son permis par l'application du Code criminel, mais par l'application du code de la route provincial.

M. Pruden : Les tribunaux ont le pouvoir discrétionnaire, dans les cas de négligence criminelle causant la mort, de rendre une ordonnance d'interdiction de conduire, par application d'une disposition fédérale. Cela n'est pas obligatoire. Le tribunal tient compte de tous les éléments de la peine et se pose la question suivante : Est-il nécessaire d'imposer une interdiction de conduire en plus des autres sanctions pénales que j'inflige à l'accusé? Il se pourrait que l'accusé ait fait l'objet d'une très longue peine d'emprisonnement. Aujourd'hui, le tribunal pourrait dire : « Je ne vais pas ajouter une interdiction de conduire ». Cela pourrait se produire à l'heure actuelle. Ce projet de loi propose des ordonnances obligatoires d'interdiction de conduire, tout comme nous avons des ordonnances obligatoires d'interdiction de conduire pour la conduite avec facultés affaiblies.

Le sénateur Joyal : À l'heure actuelle, les tribunaux peuvent, par exemple, tenir compte du fait que l'accusé a besoin de conduire pour gagner sa vie. Les tribunaux peuvent tenir compte de cet élément pour fixer la durée du permis lorsque, notamment, cette personne conduit des camions ou gagne sa vie comme chauffeur de taxi, par exemple.

Dans le cas d'une personne arrêtée en flagrant délit de course de rue, le juge n'aurait pas d'autre choix, dans le contexte que vous proposez, que d'imposer une sanction fondée sur la gravité de l'infraction que vous nous proposez d'adopter pour le motif qu'il s'agit d'une infraction pénale assortie d'une peine obligatoire.

M. Pruden : Cela nous rapprocherait du modèle actuel qui existe pour la conduite avec facultés affaiblies, pour laquelle il y a une suspension obligatoire du permis de conduire d'une durée minimale d'un an pour la première infraction, de deux ans pour la deuxième infraction et de trois ans pour la troisième infraction. C'est exactement ce modèle qui est adapté pour la première, deuxième et troisième infraction de conduite dangereuse avec course de rue. Une interdiction de conduire d'un minimum de un, deux et trois ans pour la première, la deuxième et la troisième infraction.

Le sénateur Joyal : Quelle est la définition de deuxième et troisième infraction?

M. Pruden : Une condamnation antérieure pour cette infraction. La Couronne ou la poursuite est tenue d'informer la défense de l'existence d'une condamnation antérieure lorsque la poursuite demande une peine minimale aggravée.

Le sénateur Joyal : Si le dossier pénal de l'accusé a été supprimé, serait-il quand même considéré comme ayant commis une première infraction?

M. Pruden : La condamnation aura été enregistrée et il aura été noté que l'accusé a demandé la réhabilitation.

Mme Kane : Pensez-vous au cas d'un accusé dont la condamnation aurait fait l'objet d'une réhabilitation entre- temps?

Le sénateur Joyal : Oui. Supposez que j'aie 18 ans — j'aimerais beaucoup ça, mais ce n'est pas le cas — et que je sois déclaré coupable d'une infraction. Quelques années après, j'obtiens une réhabilitation. Par la suite, je fais la course dans la rue et je suis déclaré coupable. Cette première infraction serait-elle considérée comme une première infraction, compte tenu du fait que j'ai obtenu une réhabilitation?

M. Pruden : La poursuite ne donnerait pas l'avis par lequel elle informe l'accusé qu'elle demande une peine plus forte et cela ne serait pas mentionné. Si l'infraction a fait l'objet d'une réhabilitation, elle ne figure pas sur le casier judiciaire.

Le sénateur Joyal : Comme nous l'avons tous vu dans l'émission de télévision à laquelle j'ai fait référence, cela concerne la plupart du temps des jeunes. Le jeune peut obtenir la réhabilitation par la suite, dans le cas du Code criminel, à l'égard des infractions de conduite en état d'ébriété ou de course de rue.

M. Pruden : C'est exact. Si la personne a suivi le processus pour obtenir la réhabilitation, on peut dire qu'habituellement, elle prend les choses au sérieux. On pourrait penser que cette personne ne voudra pas faire d'autres courses de rue.

Le sénateur Joyal : Je pose cette question parce qu'avec les mesures de sécurité supplémentaires que nous sommes en train de mettre en place, la possession d'un casier judiciaire est un élément très grave qui peut empêcher quelqu'un de s'installer à l'étranger, voire même de traverser la frontière. Nous créons une situation très grave pour les membres de la nouvelle génération qui sont visés par le projet de loi.

M. Pruden : Ces personnes sont déjà visées à l'heure actuelle par l'infraction de conduite dangereuse ou celle de négligence criminelle causant des lésions corporelles ou la mort. Cela ne fait pas courir à ces personnes un risque nouveau pour ce qui est de la criminalité de l'infraction incluse de conduite dangereuse ou de l'infraction incluse de négligence criminelle. Ces infractions existent déjà.

Le Canada ne se mêle pas de ce que les autres pays peuvent décider de faire avec une personne qui possède un casier judiciaire, que les infractions aient fait l'objet d'une réhabilitation ou non; le Canada n'a pas le pouvoir d'obliger les autres pays à faire quoi que ce soit pour ce qui est des personnes qui décident de s'y rendre.

Le sénateur Lorna Milne (vice-présidente) occupe le fauteuil.

La vice-présidente : Mon nom a été inscrit pour le second tour par le président avant qu'il ne soit obligé de quitter la salle.

Monsieur Pruden, vous avez parlé de l'harmonisation des lois fédérales et provinciales.

M. Pruden : Je ne parlais pas de l'harmonisation entre les lois fédérales et les lois provinciales; j'ai parlé de l'harmonisation entre, par exemple, l'interdiction de conduire minimale imposée dans le cas de conduite avec facultés affaiblies ou pour la conduite dangereuse associée à une course de rue, et les autres infractions fédérales pour lesquelles le tribunal a le pouvoir discrétionnaire de prononcer une interdiction de conduire plutôt qu'une ordonnance obligatoire d'interdiction.

La vice-présidente : L'alinéa 249(1)a) du Code criminel traite de la conduite dangereuse. Il me semble qu'avec le projet de loi C-19, un agent de la paix n'aura pas le pouvoir d'inculper les conducteurs de course de rue, à moins qu'ils ne frappent quelque chose ou ne blessent quelqu'un.

M. Pruden : Un agent de la paix pourrait porter une accusation de conduite dangereuse au cours d'une course de rue même si personne n'est blessé ou tué. La conduite dangereuse au cours d'une course de rue est une des cinq nouvelles infractions que propose le projet de loi.

La vice-présidente : La disposition énonce : « Quiconque, par négligence criminelle, cause la mort d'une autre personne [...] est coupable [...] »; « Quiconque, par négligence criminelle, cause des lésions corporelles à autrui [...] est coupable [...] »; et « Commet une infraction quiconque, à l'occasion d'une course de rue, conduit un véhicule à moteur de la façon [...] ».

Il semble que le seul fait de participer à une course de rue ne peut donner lieu à une poursuite aux termes de ce projet de loi.

M. Pruden : Je devrais expliquer qu'il est vrai que l'infraction de négligence criminelle exige que soient causées des lésions corporelles ou la mort. Cela vient du fait qu'à l'heure actuelle, le Code criminel ne réprime pas la négligence criminelle si elle ne cause pas des lésions corporelles ou la mort. Les infractions qui figurent à l'heure actuelle dans le Code criminel sont la négligence criminelle causant des lésions corporelles ou la mort. Il existe toutefois à l'heure actuelle l'infraction de conduite dangereuse simple — sans lésions corporelles, ni mort — plus l'infraction de conduite dangereuse causant la mort et l'infraction de conduite dangereuse causant des lésions corporelles. Le projet de loi suit ce modèle et crée l'infraction de conduite dangereuse — simple sans qu'il y ait lésions corporelles ou mort, dans le cas des courses de rue.

La vice-présidente : Si c'est bien l'effet qu'a ce projet de loi, compte tenu des préoccupations du public dans ce domaine, pourquoi ne pas avoir créé une infraction indépendante?

M. Pruden : C'est une infraction indépendante. Par exemple, la conduite avec facultés affaiblies est incluse dans la conduite avec facultés affaiblies causant des lésions corporelles ou la mort. C'est un élément que la poursuite doit établir. C'est un élément de l'infraction de conduite avec facultés affaiblies causant des lésions corporelles ou de conduite avec facultés affaiblies causant la mort. Nous avons suivi le même modèle ici. De la même façon, il y a le modèle de la conduite dangereuse causant des lésions corporelles au cours d'une poursuite policière et celui de la conduite dangereuse causant la mort au cours d'une poursuite policière. C'est le même genre de modèle.

La vice-présidente : Une poursuite policière pourrait-elle être qualifiée de course de rue aux termes de ce projet de loi?

M. Pruden : L'élément essentiel est la conduite dangereuse, et non pas la poursuite policière. Un conducteur pourrait commettre l'infraction de conduite dangereuse au cours d'une course de rue, et à l'arrivée de la police, se retrouver en train de fuir des policiers. Les policiers pourraient fort bien avoir à inculper ce conducteur de plusieurs infractions.

La vice-présidente : S'il s'agit d'une simple poursuite policière et que le policier perd le contrôle de son véhicule et heurte un obstacle ou quelqu'un, est-ce que ce comportement constituerait une course de rue aux termes de ce projet de loi?

M. Pruden : Il existe déjà l'infraction de conduite dangereuse au cours d'une poursuite policière. Cette infraction a été créée en 2001, je crois.

La vice-présidente : La peine applicable à la course de rue ne serait pas infligée dans ce cas?

M. Pruden : Si l'accusé est déclaré coupable de conduite dangereuse au cours d'une poursuite policière et non pas de conduite dangereuse au cours d'une course de rue, bien entendu, il recevrait uniquement la peine applicable à la conduite dangereuse au cours d'une poursuite policière.

La vice-présidente : Et il est très peu probable que les policiers s'accusent eux-mêmes de course de rue.

M. Pruden : Voulez-vous savoir si les policiers peuvent être inculpés?

M. Pruden : Non. L'infraction actuelle vise la personne qui est poursuivie par la police. Je pense que le code utilise le mot « fuite ».

Mme Kane : Les policiers peuvent être inculpés de conduite dangereuse ou de négligence criminelle causant la mort, si leur comportement n'est pas conforme à la norme que doivent respecter les policiers. Il y a déjà eu des cas où des policiers ont poursuivi un véhicule alors que cela n'était pas nécessaire et ont été inculpés par la suite.

Pour ce qui est de savoir si un policier pourrait être inculpé de course de rue parce qu'il s'est lancé dans une poursuite policière, il est probable que, si le comportement du policier s'écartait de la norme, il serait inculpé de conduite dangereuse ou d'une autre infraction justifiée par les circonstances. Dans ce genre de cas, on demande habituellement à un autre corps policier de faire enquête et de décider s'il y a lieu de porter des accusations plutôt que d'attendre que le service de police de la collectivité concernée prenne cette décision.

La vice-présidente : Il serait peu probable qu'il porte une accusation de course de rue ou d'avoir causé une course de rue.

Mme Kane : Le contexte ne serait probablement pas celui d'une course de rue. Ce serait probablement un autre événement qui serait à l'origine du comportement des policiers.

Le sénateur Bryden : Dans le cas d'une personne qui a été déclarée coupable de conduite dangereuse causant la mort et qui est par la suite déclarée coupable de conduite dangereuse causant la mort à l'occasion d'une course de rue, est-ce que la deuxième condamnation est considérée comme une deuxième infraction ou une première infraction pour ce qui est de révoquer son permis de conduire?

M. Pruden : Pour de ce qui est des ordonnances d'interdiction, ce serait une première infraction, mais la poursuite présente toujours le casier judiciaire de l'accusé au juge chargé de fixer la peine appropriée. Au cours de l'enquête sur sentence, le tribunal est tenu d'imposer la peine appropriée, compte tenu de toutes les circonstances relatives à l'infraction commise et au contrevenant. Un casier judiciaire antérieur contenant une infraction de conduite dangereuse aura une influence sur la peine imposée par le tribunal.

Le sénateur Bryden : Je parlais plus précisément de l'interdiction de conduire.

M. Pruden : La période minimale d'un an s'appliquerait, mais avec une condamnation antérieure, je ne pense pas qu'un poursuivant ne soutiendrait pas que la peine appropriée devrait être plus sévère qu'une interdiction de conduire d'une durée d'un an, même si la condamnation précédente n'est pas une condamnation de conduite dangereuse au cours d'une course de rue, mais uniquement une condamnation pour conduite dangereuse. Cet argument serait présenté mais le tribunal ne serait pas tenu d'infliger une ordonnance d'interdiction d'une période minimale de deux ans. Cela n'empêcherait toutefois pas le poursuivant de demander une peine beaucoup plus sévère qu'une ordonnance d'interdiction de conduire d'une durée d'un an.

Le sénateur Bryden : Y a-t-il une période maximale pour l'ordonnance d'interdiction que le tribunal peut imposer?

M. Pruden : Oui.

Le sénateur Bryden : Voulez-vous dire que la peine minimale pour la course de rue n'est pas la peine maximale en cas de première infraction?

M. Pruden : C'est exact. Tout comme dans le cas de la conduite avec facultés affaiblies, la fourchette est de un à trois ans pour la première infraction, de deux à cinq pour la deuxième infraction et pour les infractions suivantes, cela va d'une interdiction de conduire de trois ans à une interdiction à perpétuité.

Le sénateur Baker : Il y a une disposition qu'il faudra peut-être modifier : en haut de la page 4 du projet de loi, la version anglaise du paragraphe (3.4) énonce ce qui suit, ce qui ne me paraît pas logique :

When an offender is convicted or discharged under section 730 of an offence committed under section 249.2 or 249.3 or subsection 249.4(3) or (4), the offender has previously been convicted or discharged [...]

Devrait-il y avoir un « and » ou un « or » ou un « and if » ou un « or if » juste après la virgule, dans la version anglaise? À votre avis, monsieur Pruden, que devrait-il y avoir là? Vous avez rédigé cette disposition.

M. Pruden : J'ai effectivement donné des directives de rédaction, mais ce sont les rédacteurs législatifs qui ont préparé cette disposition.

Le sénateur Baker : Est-ce un « or », parce qu'il y a une grande différence entre un « or » et un « and »? Il n'y en a pas non plus dans la version française.

M. Pruden : La version française utilise le mot « ou ».

Le sénateur Baker : Il va donc falloir insérer un « or » après le (4), madame la présidente.

La vice-présidente : Oui.

Le sénateur Baker : « Or if » serait peut-être préférable.

La vice-présidente : Pourrait-il s'agir d'une coquille?

Mme Kane : Oui. Si vous me permettez de suggérer une solution, nous pensons que cela pourrait être simplement corrigé à la réimpression du projet de loi.

La vice-présidente : Dans ce cas, il faut qu'il s'agisse d'une véritable coquille.

Mme Kane : Nous pourrions comparer la version française et la version anglaise et vous faire ensuite savoir s'il manque un ou plusieurs mots. Il faut examiner cela dans son contexte.

La vice-présidente : Pouvez-vous faire cela rapidement, parce que nous espérions entendre des témoins et peut-être passer à l'étude article par article du projet de loi demain matin.

Mme Kane : Nous devrions pouvoir vous fournir ce renseignement demain matin très tôt.

Le sénateur Baker : Je pense qu'il devrait y avoir là « and if » ou « if ». Si la version française utilise « ou », alors il faudrait insérer « or if ». Mais si M. Pruden et Mme Kane pensent qu'un « or » suffit, alors c'est ce que nous ferons.

M. Pruden : Nous allons examiner cela de très près ce soir et ferons savoir au comité ce qu'il en est demain matin.

La vice-présidente : Merci. Félicitations, sénateur Baker, d'avoir remarqué cette erreur.

La séance est levée.


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