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Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles

Fascicule 30 - Témoignages du 7 juin 2007


OTTAWA, le jeudi 7 juin 2007

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, à qui a été renvoyé le projet de loi C-18, Loi modifiant certaines lois en matière d'identification par les empreintes génétiques, se réunit aujourd'hui à 10 h 56 pour en faire l'examen.

Le sénateur Lorna Milne (vice-présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La vice-présidente : Je souhaite la bienvenue aux témoins et aux membres du public qui sont ici ou qui suivent nos délibérations à la télévision. Nous entreprenons aujourd'hui l'étude du projet de loi C-18, Loi modifiant certaines lois en matière d'identification par les empreintes génétiques.

Le projet de loi C-18 a été présenté à la Chambre des communes le 8 juin 2006. Il modifie le Code criminel, la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques et la Loi sur la défense nationale afin de faciliter l'application du projet de loi C-13, qui a reçu la sanction royale le 19 mai 2005, mais qui n'est pas entré en vigueur, à part quelques articles. Parmi les caractéristiques les plus importantes du projet de loi C-13, il y a lieu de noter qu'il augmente sensiblement le nombre d'infractions pour lesquelles une ordonnance de prélèvement d'ADN peut être rendue.

J'ai le plaisir de présenter l'honorable Rob Nicholson, ministre de la Justice et procureur général du Canada, qui est venu nous expliquer en détail l'objet du projet de loi C-18. Le ministre est accompagné de M. Greg Yost, avocat à la Section de la politique en matière de droit pénal du ministère de la Justice, et du lieutenant-colonel Jill Wry.

Je vous souhaite la bienvenue au Sénat.

Honorables sénateurs, le ministre peut rester avec nous pendant une heure. Il commencera par présenter un exposé, après quoi il répondra à nos questions. Pendant la deuxième heure, nous entendrons des représentants de la GRC.

Monsieur le ministre, vous avez la parole.

[Français]

L'honorable Robert Nicholson, C.P., député, ministre de la Justice et procureur général du Canada : Madame la vice-présidente, je suis heureux de comparaître devant vous aujourd'hui afin de parler du projet de loi C-18, Loi modifiant certaines lois en matière d'identification par les empreintes génétiques.

[Traduction]

Ce projet de loi sera d'une grande utilité pour les organismes d'application de la loi dans les efforts qu'ils déploient afin d'appréhender les criminels, ainsi que pour les procureurs qui cherchent à traduire en justice des accusés afin de déterminer leur culpabilité ou leur innocence. Bien sûr, ce sont les Canadiens qui seront les bénéficiaires ultimes puisque l'utilisation accrue des données génétiques renforcera la sécurité publique.

L'analyse des empreintes génétiques relevées sur les lieux d'un crime et l'utilisation de données génétiques comme preuve devant les tribunaux, qui prêtaient à controverse il y a 20 ans, sont courantes aujourd'hui. Je ne m'appesantirai pas sur les statistiques concernant les incidences de l'ADN sur le système pénal. Tout le monde sait que l'analyse des empreintes génétiques a permis de disculper de nombreux suspects qui auraient pu être condamnés à tort dans le passé sur la base de preuves circonstancielles. Elle a également entraîné la condamnation de nombreux accusés qui auraient pu autrement échapper à l'attention de la police.

Les modifications du Code criminel et de la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques que nous examinons aujourd'hui ont pour objet d'assurer un fonctionnement plus efficace de la Banque nationale de données génétiques et d'augmenter le nombre de profils génétiques conservés dans le fichier des condamnés et le fichier de criminalistique de la banque de données.

Les empreintes génétiques sont très précieuses en criminalistique parce qu'à part les jumeaux identiques, il n'y a pas deux personnes qui partagent la même empreinte. Chaque cellule de l'organisme contient les mêmes données génétiques de la naissance à la mort. Un seul cheveu ou une trace de sang permet d'établir un profil génétique. De plus, l'ADN reste décelable même après très longtemps ou après avoir été exposé à des conditions environnementales extrêmes. Les caractéristiques de l'ADN sont telles qu'il est possible d'obtenir des résultats sur les lieux d'un crime, qu'il soit récent ou non, à partir d'échantillons biologiques correspondant à un profil génétique unique.

La banque de données facilite les enquêtes policières en établissant des liens entre les profils conservés dans le fichier des condamnés et le fichier de criminalistique.

La banque met à jour les statistiques figurant sur son site Web toutes les deux semaines. Je crois savoir qu'elle permet chaque semaine de faire correspondre, en moyenne, une cinquantaine d'échantillons d'ADN relevés sur des lieux de crimes à des profils génétiques de condamnés ainsi qu'une dizaine de profils de criminalistique.

Les honorables sénateurs savent sans doute que le projet de loi C-18 est le fruit de la collaboration des responsables fédéraux, provinciaux et territoriaux qui se préparent en vue de l'entrée en vigueur de toutes les dispositions de l'ancien projet de loi C-13 de la dernière législature. Les principales dispositions de cette loi qui ne sont pas encore en vigueur sont les suivantes : la disposition qui permet aux tribunaux de rendre une ordonnance permettant de prélever des échantillons sur des personnes ayant fait l'objet d'un verdict de non-responsabilité pour cause de troubles mentaux; l'inscription sur la liste des infractions désignées du leurre d'enfants sur Internet, du recours à des menaces verbales, du harcèlement criminel et des actes de gangstérisme; le transfert de la liste des infractions secondaires à la liste des infractions primaires du vol qualifié, de l'introduction par effraction dans un logement et des infractions liées à la pornographie juvénile; ainsi que la création, dans la liste des infractions primaires, d'une nouvelle sous-catégorie comprenant 16 infractions d'une violence extrême. Il y a également la disposition qui ajoute à la définition des infractions secondaires toutes les infractions punissables d'une peine d'emprisonnement de cinq ans ou plus. Toutefois, ces infractions doivent avoir fait l'objet d'un acte d'accusation pour que le tribunal puisse rendre une ordonnance de prélèvement.

Le projet de loi C-18 comprend de nombreuses modifications destinées à rendre plus claires les dispositions de l'ancien projet de loi C-13, y compris l'introduction de nouveaux formulaires à l'usage des tribunaux. Il comporte en outre d'importantes améliorations. Par exemple, le projet de loi permet de tenir une audience en vue d'une application rétroactive de la loi si une personne purge encore une peine pour une infraction désignée. Auparavant, une telle audience ne pouvait avoir lieu que si la personne purgeait une peine d'emprisonnement de deux ans ou plus. Il y a, en effet, un certain nombre de cas dans lesquels des personnes avaient été condamnées avant le 30 juin 2000 à de multiples peines consécutives pour différentes infractions, y compris des infractions permettant un prélèvement rétroactif. Même si le tribunal considérait que ces personnes s'étaient rendues coupables d'infractions graves, il n'avait prononcé contre elles aucune sentence de deux ans d'emprisonnement ou plus.

Le projet de loi ajoute la tentative de meurtre et la conspiration en vue de commettre un meurtre aux infractions permettant un prélèvement rétroactif. Ces infractions graves comportent un risque élevé de récidive et sont punissables de l'emprisonnement à vie.

En vertu du projet de loi, une personne commet une infraction si elle ne se présente pas pour un échantillonnage d'ADN. La création de cette nouvelle infraction devrait augmenter le taux de conformité aux ordonnances de prélèvement. De plus, les procureurs de la Couronne seront autorisés à présenter une demande d'ordonnance de prélèvement dans les 90 jours suivant le prononcé de la sentence. Cette disposition permettra à la Couronne de revoir les dossiers et de présenter une demande en cas d'oubli.

Le projet de loi permettra aussi d'exécuter n'importe où au Canada un mandat délivré contre une personne qui ne s'est pas présentée pour un échantillonnage d'ADN. Il permettra en outre à l'organisme d'exécution de la loi chargé de faire le prélèvement d'autoriser un autre à le faire pour son compte. Une fois que les projets de loi C-13 et C-18 seront entrés en vigueur, les nouvelles dispositions s'appliqueront aux personnes condamnées pour une infraction commise avant leur entrée en vigueur.

Il est impossible, pour le moment, de prévoir l'effet que ces changements auront sur le nombre d'échantillons transmis à la Banque nationale de données génétiques pour analyse et saisie dans le fichier des condamnés. Cela dépendra de l'utilisation que les procureurs feront des nouvelles dispositions et de la façon dont les tribunaux exerceront leurs pouvoirs discrétionnaires.

Le ministère de la Justice, le ministère de la Sécurité publique et la GRC travailleront en collaboration avec les provinces pour les aider à se préparer en vue de l'entrée en vigueur de cette mesure législative et les encourager à utiliser pleinement les nouveaux outils qu'elle met à leur disposition. Je crois pouvoir compter sur l'entière collaboration des provinces qui, je pense, attendent avec impatience l'adoption du projet de loi.

En ce qui concerne le fichier de criminalistique, le projet de loi ajoutera de nombreuses infractions à la liste des infractions désignées, ce qui permettra d'ajouter à la Banque nationale de données génétiques les profils relevés sur les lieux de crimes. Nous ne pouvons cependant pas prévoir le nombre d'échantillons supplémentaires qui en découleront. Cela dépendra dans une grande mesure des ressources dont la police disposera pour relever des empreintes génétiques sur les lieux de crimes et des capacités d'analyse des laboratoires. Il est cependant clair que l'adoption du projet de loi ne peut qu'entraîner une augmentation du nombre de profils conservés dans le fichier des condamnés et le fichier de criminalistique et, partant, un accroissement du nombre de correspondances établies.

Voilà qui met fin à cet exposé. Je serai maintenant heureux de répondre à toutes vos questions.

La vice-présidente : Merci, monsieur le ministre.

Le sénateur Nolin : Le projet de loi modifie encore une fois la définition des infractions primaires et secondaires. Il semble que, sous l'effet combiné des projets de loi C-13 et C-18, certaines infractions passeront d'une liste à l'autre. Comme vous l'avez mentionné, la pornographie juvénile en fait partie. Est-il possible de fournir au comité une liste non officielle, une liste administrative ou encore le nouveau libellé de l'article 487.04 pour nous permettre d'évaluer le projet de loi C-18?

M. Nicholson : C'est une demande raisonnable. Comme vous le dites, les listes d'infractions primaires et secondaires comportent différentes catégories. Il y a même dans la liste des infractions primaires une sous-catégorie que j'ai mentionnée, pour laquelle les tribunaux n'auront aucun pouvoir discrétionnaire en matière d'ordonnances de prélèvement.

Cela étant dit, nous serons heureux de vous fournir une ventilation pour faciliter vos délibérations.

Le sénateur Nolin : J'ai une autre question concernant l'arriéré. Je sais qu'à titre de ministre de la Justice, vous êtes chargé de faire adopter les lois appropriées et qu'un autre de vos collègues est responsable de l'arriéré. Toutefois, c'est vous qui comparaissez devant le comité ce matin. Je suis sûr que vous avez lu le rapport publié en mai par la vérificatrice générale au sujet de l'arriéré. Compte tenu de l'objet et de la teneur des projets de loi C-18 et loi C-13, il est probable que cet arriéré augmentera.

Tout d'abord, est-il vrai qu'il y a un arriéré?

M. Nicholson : Sénateur, vous avez raison. Il serait probablement plus indiqué que mon collègue, le ministre de la Sécurité publique, réponde à cette question. Je crois savoir cependant que vous entendrez, immédiatement après mon témoignage, des représentants de la Gendarmerie royale du Canada qui pourront vous donner des précisions à ce sujet. Je suis heureux de dire qu'avec l'entrée en vigueur du projet de loi C-13 et l'adoption du projet de loi à l'étude, des ressources supplémentaires seront disponibles. Il importe que nous reconnaissions tous que ces mesures entraîneront une plus grande utilisation des ressources de la banque de données. Il est donc raisonnable de fournir des ressources supplémentaires. Je comprends bien ce que vous dites. Il est certain que nous voulons avancer et accélérer le processus.

Le sénateur Nolin : Au stade de la deuxième lecture, tous les sénateurs avaient la même préoccupation. C'est très bien d'améliorer la loi, mais il faut aussi que les agents de police soient en mesure de l'appliquer. Cela est essentiel.

M. Nicholson : Je le crois aussi. C'est une observation raisonnable. L'utilisation des données génétiques a été un pas de géant dans le domaine de l'application de la loi. Ces données ont permis de disculper plusieurs personnes et d'en faire condamner d'autres. Toute mesure qui permet à notre système d'assurer la justice pour tous est un pas dans la bonne direction. Ce projet de loi constitue un important progrès. Je suis très heureux de participer à son adoption.

Le sénateur Baker : Monsieur le ministre, vous avez mentionné dans votre exposé préliminaire que de nombreuses dispositions du projet de loi C-13 n'ont pas été proclamées.

M. Nicholson : Oui.

Le sénateur Baker : Pouvez-vous nous donner les raisons pour lesquelles vous n'avez pas proclamé ces dispositions du projet de loi C-13?

M. Nicholson : Nous nous sommes aperçus que l'ancien projet de loi avait besoin de certaines modifications. Des discussions ont eu lieu entre les responsables fédéraux, provinciaux et territoriaux. Comme cela se produit parfois — et ce n'est pas là une critique de l'ancien projet de loi —, il y a eu certaines omissions qui nécessitaient des modifications. Les deux projets de loi peuvent être considérés comme complémentaires. Je vais demander à M. Yost de vous donner des détails à ce sujet.

Greg Yost, avocat, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice Canada: Le projet de loi C-13 a été sensiblement modifié au comité après d'importantes discussions, avant d'être adopté par la Chambre. Malheureusement, on a manqué de temps pour examiner tous les détails, consulter les partenaires provinciaux, et cetera. On craignait à ce moment que le gouvernement ne tombe à l'occasion d'un vote sur le budget. Le projet de loi a donc franchi assez rapidement les étapes à la Chambre et au Sénat.

Lorsque nous avons commencé à discuter avec nos collègues provinciaux, nous avons décelé certaines difficultés. Comme il faut du temps pour préparer les mesures législatives nécessaires, par suite de problèmes de capacité et autres, que vous aurez l'occasion d'examiner avec les représentants de la GRC, j'en suis sûr, nous avons pensé que nous disposions d'une certaine latitude. Comme le projet de loi avait été récemment adopté par la Chambre et le Sénat, un autre projet de loi destiné à le corriger aurait dû être adopté assez rapidement. Le gouvernement précédent a déposé le projet de loi C-72, qui est mort au Feuilleton. Nous avons profité de la période électorale pour tenir une réunion de deux jours avec nos collègues provinciaux ainsi qu'avec des représentants de la police, des services correctionnels et des tribunaux. Nous avons examiné les projets de loi C-13 et C-72 d'une façon très minutieuse et avons abouti à d'autres modifications qui, nous le croyons, permettaient de remédier à l'ensemble des problèmes décelés. Nous sommes certains que le projet de loi que vous examinez actuellement fera l'affaire, mais nous ne le saurons avec certitude qu'à l'usage. Quoi qu'il en soit, tous les intéressés semblaient satisfaits. La décision a été prise par le présent gouvernement : corriger les défauts, mettre au point les dispositions, puis appliquer le projet de loi.

Voilà l'historique de ce projet de loi.

Le sénateur Baker : Je comprends. Je connaissais la réponse avant d'avoir posé la question. Il arrive effectivement que les comités de la Chambre des communes et du Sénat fassent des modifications que le ministère de la Justice ne juge pas pratiques ou réalisables dans les circonstances et qui, parfois, sont parfois contraires à la loi.

Bref, le gouvernement ou le ministère de la Justice n'a pas aimé les modifications faites au comité et a donc décidé de ne pas proclamer certaines dispositions de la loi.

Je note que vous avez modifié le libellé de certains articles, par rapport au projet de loi initial. Vous avez introduit dans la version anglaise une expression assez étrange, « as soon as feasible », qui me paraît intéressante. Nous sommes habitués à des expressions telles que « as soon as practicable » ou, en français, « aussitôt que possible » ou « dès que possible ». Vous voudrez peut-être nous donner quelques explications au sujet de l'expression « as soon as feasible ».

M. Yost : Je suis sûr que cette question n'est pas adressée au ministre. Toute la section de rédaction législative du ministère de la Justice s'est débattue pour trouver les mots appropriés. Je travaille aussi sur des projets de loi concernant la conduite avec facultés affaiblies, dans le cadre desquelles nous discutons d'expressions telle que « fournir immédiatement » ou encore « aussitôt que possible » ou « dès que possible ».

L'expression anglaise « as soon as feasible » est celle que préfèrent actuellement les rédacteurs législatifs car elle assure plus de souplesse que l'expression « as soon as practicable ». Il peut arriver, dans certaines circonstances, que des efforts extraordinaires permettent de réaliser une chose, qui reste donc dans le domaine du « possible ». C'est ce qu'évoque l'expression « as soon as practicable ». Toutefois, dans le monde réel, un vendredi soir, par exemple, dans un poste très occupé, l'expression « as soon as feasible » laisse une plus grande marge. C'est en tout cas l'intention qui a présidé au choix de ce libellé. Je suppose que les tribunaux nous diront en temps et lieu si c'est bien le cas.

La vice-présidente : Honorables sénateurs, nous n'aurons le ministre que pour les 45 prochaines minutes, puisqu'il est arrivé un peu en retard. Nous pourrons convoquer les fonctionnaires du ministère à un autre moment s'il y a lieu. Nous devrions donc adresser nos questions au ministre.

Le sénateur Baker : Ces modifications de la loi sont très importantes, madame la présidente. Est-ce que M. Yost pourra rester après le départ du ministre ou bien partira-t-il en même temps que lui?

M. Yost : Je prévoyais rester, mais j'avais l'intention de me limiter à écouter nos amis de la GRC.

Le sénateur Baker : Puisque nous discutons du libellé de la loi, serait-il possible, madame la présidente, de demander à M. Yost de rester? M. Yost pense-t-il que les représentants de la GRC peuvent répondre à cette question ou à d'autres du même genre?

M. Yost : Il s'agit d'une question de rédaction législative que je ne poserai certainement pas aux responsables de la GRC qui doivent venir. Ce sont des biologistes, et cetera. qui pourront surtout vous parler des laboratoires.

Malheureusement, l'avocat de la GRC qui s'occupe de ces questions, David Bird, témoigne actuellement devant un autre comité. Il s'occupe du programme de protection des témoins. Si vous souhaitez que nous revenions à un moment où M. Bird sera disponible, nous sommes à votre disposition.

Le sénateur Baker : J'ai une dernière petite question à adresser au ministre. Qu'est-il advenu de l'examen quinquennal de la loi sur les empreintes génétiques? Avez-vous eu l'occasion de jeter un coup d'œil à la recommandation de notre comité concernant l'examen quinquennal de la Loi sur la défense nationale et l'étude du juge Lamer? Le gouvernement n'a pas tenu compte des recommandations du juge Lamer en ce qui concerne les cours martiales et la nomination des juges, dont le mandat n'est que de cinq ans. Ce projet de loi ne satisfait pas aux critères d'un tribunal impartial en fonction de nos lois. Le gouvernement a-t-il l'intention d'examiner les recommandations de notre comité à cet égard?

M. Nicholson : Nous sommes toujours heureux d'examiner les recommandations formulées par votre comité. Nous les avons toujours prises très au sérieux. Comme je connais le sénateur Baker depuis des années, je me sens obligé de dire cela.

Le sénateur Baker : Comme d'habitude, monsieur le ministre, vous faites de l'excellent travail. Malheureusement, ce n'est pas le cas des autres membres du gouvernement.

M. Nicholson : Merci pour le compliment, sinon pour le reste.

Quoi qu'il en soit, je vais demander au lieutenant-colonel Wry de parler des éléments du projet de loi liés à la Défense nationale. À mon avis, la correction des défauts du projet de loi C-13 représente un important progrès. Comme vous le savez, nous avions essayé, au cours de la dernière législature, d'y apporter des modifications grâce au projet de loi C-72. En un sens, le projet de loi va au-delà des considérations partisanes pour tenter d'améliorer le système.

Est-ce que tout est parfait? Si nous reprenons notre examen dans 15 ou 20 ans, la science aura évolué. L'un de nos défis, dans le cas du Code criminel, consiste à essayer de devancer les changements de la technologie.

J'ai trouvé intéressants vos commentaires concernant la rédaction législative. Comme vous le savez, c'est un autre domaine qui a évolué avec les années. Vous vous souviendrez, sénateur, qu'il y a 20 ans, lorsque vous et moi étions à la Chambre des communes, la loi était telle que si vous mettiez le feu à votre voiture, ce n'était pas un incendie criminel, mais que vous pouviez être accusé de cette infraction si vous mettiez le feu à un tas de légumes. Nous avions adopté cette disposition du Code criminel au XIXe siècle. Nous devons constamment réexaminer les dispositions du Code pour nous assurer qu'elles correspondent aux réalités de la société ainsi qu'à l'évolution des sciences et de la technologie.

Quant à vos recommandations ou à celles de votre comité, le gouvernement y est toujours sensible. En dernière analyse, nous visons le même objectif, qui est de nous assurer d'avoir un Code criminel efficace et à jour.

Je sais que vous avez formulé quelques observations concernant la Défense nationale, qu'il vaudrait peut-être mieux adresser au ministre responsable de ce secteur. Cela étant dit, certains éléments du projet de loi s'appliquent au système de justice militaire. Le lieutenant-colonel Wry voudra peut-être présenter quelques observations à ce sujet.

Lieutenant-colonel Jill Wry, directrice juridique, Justice militaire, politique et recherche, Cabinet du Juge-avocat général : Sénateur Baker, je vais essayer de répondre de mon mieux à vos observations. Les modifications de la Loi sur la défense nationale qui figurent dans le projet de loi s'expliquent par le fait que le système de justice militaire comporte aussi un régime permettant de prélever des échantillons d'ADN. Tout en reconnaissant qu'il y a des différences entre la justice militaire et la justice pénale, nous essayons, dans la mesure du possible, de faire correspondre les deux régimes, notamment en ce qui concerne les empreintes génétiques. Les modifications que vous voyez dans le projet de loi relativement à la Loi sur la défense nationale sont liées aux modifications apportées au Code criminel. Elles permettent d'inscrire dans la Loi sur la défense nationale les mêmes changements et mises à jour du régime des empreintes génétiques que dans le Code criminel.

Sénateur Baker, pour répondre à vos commentaires concernant les recommandations du juge Lamer et l'examen du système de justice militaire, je voudrais vous rappeler que la réponse du gouvernement à ces recommandations a déjà été présentée au Parlement dans le cadre du projet de loi C-7. Le Parlement en est déjà saisi.

La vice-présidente : Sénateur Baker, si vous avez d'autres questions, j'inscris votre nom pour le deuxième tour de table.

Pour les fins du compte rendu, je signale que le colonel Wry est le juge-avocat général.

Lcol Wry : Je vous remercie de la promotion, mais je suis plutôt la directrice juridique, Justice militaire, politique et recherche, au Cabinet du Juge-avocat général.

Le sénateur Andreychuk : Monsieur le ministre, je suis ici depuis longtemps, mais pas aussi longtemps que le sénateur Baker et vous. Lorsque nous avons commencé à parler de données génétiques, nous avons tous essayé de comprendre de quoi il s'agissait, comment l'ADN est prélevé, sous quelle forme et de quelle façon il est conservé et protégé. Si je m'en souviens bien, nous étions préoccupés à ce moment par le fait que l'ADN serait prélevé sur des personnes accusées, mais non condamnées. Nous avions également des craintes concernant la protection de la vie privée et la conservation des échantillons aux fins prévues par la loi, et non à d'autres fins. Nous avions en outre des préoccupations au sujet des jeunes. Dans notre système de justice, les jeunes se distinguent des adultes. Nous étions donc préoccupés par le prélèvement d'échantillons d'ADN sur des jeunes.

J'aimerais savoir ce que vous pensez aujourd'hui, compte tenu de l'expérience acquise depuis quelques années dans le domaine des données génétiques. Nous sommes plus à l'aise aujourd'hui quand on nous parle d'ADN. Nous savons ce qu'on peut faire ou ne pas faire des échantillons. Je m'intéresse surtout aux principes. Veillons-nous encore à ce que la plupart des échantillons soient prélevés sur des personnes condamnées plutôt que des personnes sur lesquelles pèsent simplement certains soupçons? Cette question est distincte du prélèvement d'empreintes génétiques sur les lieux de crimes. L'autre question relève de la protection de la vie privée. Les protocoles nécessaires sont-ils en place? Êtes-vous satisfait de la façon dont les échantillons sont conservés et utilisés, au Canada et à l'échelle internationale? Lorsque nous transmettons des renseignements à l'étranger, sommes-nous sûrs qu'ils sont conservés selon des normes semblables aux nôtres? Et qu'en est-il des jeunes?

M. Nicholson : Sénateur, vos questions portent sur un domaine assez vaste. Vous aurez remarqué dans les deux projets de loi à l'étude que beaucoup de ces questions sont abordées en tenant compte des distinctions que nous avons établies entre les infractions, pour les raisons que vous avez mentionnées. J'ai indiqué que nous avons regroupé les infractions les plus graves et les plus violentes dans une sous-catégorie des infractions primaires prévues dans le Code criminel. Nous n'accordons aucun pouvoir discrétionnaire dans le cas de ces infractions parce que les conséquences sont trop importantes. Ainsi, si une personne est condamnée pour meurtre, nous voulons disposer de son empreinte génétique pour pouvoir la comparer aux données recueillies sur les lieux de crimes ainsi qu'aux données relatives à d'autres crimes conservées dans la banque. En établissant des distinctions entre différentes infractions, qu'elles soient primaires ou secondaires ou encore qu'elles fassent partie de cette sous-catégorie spéciale d'infractions désignées, nous tenons compte des préoccupations que vous avez mentionnées.

Pendant que vous présentiez vos observations, M. Yost m'a signalé certaines des précautions que nous avons prises. Compte tenu de ce qu'on m'a dit au cours des séances d'information et de mon expérience personnelle de ce secteur particulier, je suis persuadé que, collectivement et individuellement, nous prenons très au sérieux toute la question de la protection de la vie privée et des renseignements personnels et avons adopté des mesures aussi soigneuses que n'importe quel autre pays du monde.

M. Yost : Les mesures législatives à l'étude s'inscrivent entièrement dans le cadre des intentions initiales du Parlement. Nous ne prélevons des échantillons d'ADN que sur des personnes déjà condamnées, avec l'autorisation d'un juge. La question de savoir si cette façon de procéder doit être maintenue pourrait être étudiée dans le cadre de l'examen parlementaire, qui est déjà en retard.

Un certain nombre de pays prélèvent des échantillons sur une base différente. Dans la plupart des États, les prélèvements sont faits automatiquement par les services correctionnels dans tous les cas d'infractions graves. Dans d'autres pays et dans sept États américains, les prélèvements se font au stade de la prise des empreintes digitales, ce qui soulève des questions auxquelles l'examen parlementaire répondra, nous l'espérons.

Les projets de loi C-13 et C-18 donnaient suite à des consultations entreprises en 2002 par le ministère de la Justice pour répondre à de sérieuses préoccupations des provinces. Nous n'avons jamais pensé que ces mesures législatives se substitueraient à l'examen parlementaire. Nous avons peut-être été trop optimistes à l'époque. Lors des consultations de 2002, nous avions l'impression que ces modifications seraient en vigueur avant le début de l'examen parlementaire. Cela reste possible, mais les deux processus sont en retard sur ce qui avait été prévu.

Pour ce qui est de la protection de la vie privée, la Cour suprême du Canada a formulé, à deux reprises, des commentaires très favorables sur les mesures prises. Vous voudrez peut-être poser des questions à ce sujet aux représentants de la GRC. Si j'ai bien compris, l'échantillon d'ADN arrive en même temps que les renseignements d'identification et le sang. Il y a deux empreintes digitales identiques et un code à barres. La banque de données génétiques reçoit uniquement l'échantillon accompagné de l'empreinte digitale et du code à barres pour fins d'analyse. Les renseignements d'identification sont immédiatement transmis au service de l'identité. Lorsque les responsables cherchent à établir une correspondance, ils n'ont aucune idée de l'identité de la personne en cause. On ne peut donc pas les soupçonner de manœuvres quelconques.

Vous avez parlé d'échanges internationaux. Les biologistes vous donneront une réponse plus précise, mais je peux vous dire que l'analyse produit un imprimé ressemblant à un électrocardiogramme, qui est transposé sous forme d'une série de chiffres. Si un pays étranger nous demande de faire une recherche ou si nous demandons à un pays étranger d'en faire une — nous avons eu quelque 200 cas de ce genre —, seuls ces chiffres sont saisis dans l'ordinateur pour déterminer s'il existe des chiffres correspondants. Il y a des cas, qui ont fait l'objet de modifications au projet de loi C-13, où on peut se demander si la correspondance décelée n'est pas un faux positif.

Si 11 des 13 chiffres de la série correspondent, le travail est révisé des deux côtés. Dans ces circonstances, le projet de loi C-13 permet aux laboratoires canadiens — cette disposition est déjà en vigueur — de communiquer le profil génétique lui-même pour déterminer si une erreur a été commise.

Le projet de loi à l'étude nous permettra de faire la même chose à l'échelle internationale. Nous ne transmettrons jamais les échantillons prélevés de substances corporelles qu'il est possible de soumettre à une autre analyse. Au départ, le demandeur ne reçoit que la série de chiffres. Plus tard, il peut obtenir l'imprimé pour déterminer si une erreur a été commise.

La vice-présidente : Je suis un peu inquiète au sujet des dispositions du projet de loi relatives à la communication de renseignements à d'autres gouvernements. Si un État étranger envoie une demande, aura-t-il accès aussi bien au profil génétique qu'aux renseignements personnels? Je crois savoir qu'en vertu du premier projet de loi, les renseignements tirés du profil génétique pouvaient être communiqués à des gouvernements étrangers. D'après les témoignages reçus par le comité de la Chambre des communes, il semble que ce projet de loi autorise la communication du profil génétique lui-même.

M. Yost : Les dispositions législatives initialement adoptées par le Parlement autorisaient la Banque de données génétiques à dire aux demandeurs s'il y avait ou non une correspondance. Le fait de déclarer qu'il n'y a pas de correspondance est important, car il permet d'exclure 130 000 personnes du groupe des suspects. Le problème est qu'il y a des correspondances partielles ou modérées. Le projet de loi C-13 apportait une solution à ce problème en autorisant le commissaire à communiquer le profil à un laboratoire pour que les scientifiques décident entre eux s'il y a ou non correspondance. Aucun renseignement d'identification n'est jamais communiqué. Personne ne sait de quelle personne il s'agit. La Banque de données génétiques envoie le profil à un laboratoire judiciaire de la GRC ou à un laboratoire de l'Ontario ou du Québec. Les scientifiques des deux laboratoires examinent les profils et décident s'il y a ou non correspondance.

Le projet de loi à l'étude corrige une erreur que nous avions faite. D'après les dispositions législatives actuellement en vigueur, le commissaire communique le profil s'il le juge approprié. Le commissaire ne fait pas cela en Ontario et au Québec. Les scientifiques examinent les profils et, s'ils sont sûrs d'avoir une correspondance, ils peuvent demander les renseignements d'identification.

Je suis sûr que les représentants de la GRC vous apprendront, comme ils l'ont fait au sujet du projet de loi C-13, que des centaines de correspondances ont été découvertes par suite de cet échange d'information. Par conséquent, c'est un moyen utile. Il est cependant important de réduire le nombre des profils ainsi échangés.

La vice-présidente : Je comprends bien cela, monsieur Yost. Ma question portait sur la politique de communication de cette information aux États étrangers. Je crois savoir que cela fait l'objet d'une entente internationale en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels ainsi que d'un accord avec Interpol. Ce dernier accord permet de s'assurer que le pays qui reçoit les renseignements respecte les conditions que nous imposons. Mais quelles conditions le Canada impose-t-il?

M. Yost : J'ai vu les ententes, et nous avons formulé des commentaires à leur sujet. Nous insistons pour que les gouvernements étrangers respectent nos règles relatives à la protection des renseignements personnels, et cetera, mais je ne suis pas vraiment bien placé pour répondre à cette question. David Bird, qui a négocié ces ententes à l'échelle internationale, serait beaucoup mieux en mesure de vous expliquer la teneur de l'accord conclu avec Interpol. Cet accord a d'ailleurs pu être modifié depuis la dernière fois que je l'ai vu, au moment de sa signature.

C'est tout ce que je peux vous dire. Je sais que nous ne communiquons pas les substances corporelles. Nous n'envoyons que les profils.

Le sénateur Fraser : À quels pays étrangers sommes-nous disposés à communiquer ces renseignements, aussi expurgés qu'ils soient? Il me semble qu'il y a des pays à qui j'hésiterai à les envoyer. Y a-t-il des critères? Avons-nous une liste approuvée?

M. Yost : Je crois que nous communiquons les renseignements à tout pays qui a signé l'accord avec Interpol concernant la protection de nos renseignements personnels. En pratique, les banques de données génétiques qui existent se trouvent essentiellement dans les pays de l'OCDE. Vous devrez peut-être poser la question aux représentants de la GRC. Je crois savoir, pour ma part, que nos échanges sont faits, en très grande majorité, avec les États-Unis, puisque les Canadiens et les Américains passent la frontière de part et d'autre, de même qu'avec le Royaume-Uni et l'Europe de l'Ouest.

Le sénateur Fraser : Je serais sûrement inquiète si nous échangions des renseignements avec des pays n'ayant pas un système judiciaire semblable au nôtre.

M. Yost : Nous aurions reçu une série de chiffres du pays demandeur. Si notre banque de données contient des chiffres correspondants, nous communiquerons l'identité de la personne en cause. Selon toute probabilité, cette personne résiderait encore au Canada et ne serait pas susceptible d'extradition.

Nous communiquons donc ces renseignements au pays demandeur. Nous lui dirions, par exemple, qu'il s'agit de M. X qui a été condamné pour telle ou telle infraction et qui a été vu pour la dernière fois au pénitencier de Kingston. C'est tout ce que nous communiquons, à condition qu'il y ait correspondance. Nous devons également avoir reçu un profil relevé sur les lieux d'un crime.

Je ne crois pas qu'il s'agisse uniquement d'un problème de données génétiques. Les membres d'Interpol n'ont pas tous des normes judiciaires semblables à celles du Canada. Pour déterminer de quelle façon la GRC traite ces questions, vous devriez peut-être interroger M. Bird.

Le sénateur Fraser : Nous devrions peut-être obtenir une liste des pays membres d'Interpol. Je ne sais pas.

La vice-présidente : Je ne le sais pas non plus.

Le sénateur Stratton : Je voudrais parler d'une question de politique. Au Royaume-Uni, toute personne accusée d'un acte criminel est tenue de donner un échantillon d'ADN. Nous avons choisi, à cet égard, d'accorder un pouvoir discrétionnaire aux juges afin de protéger les droits individuels. Avez-vous envisagé, le gouvernement a-t-il envisagé d'adopter la méthode britannique, c'est-à-dire d'imposer la prise d'un échantillon aussitôt qu'une personne est accusée d'un acte criminel? Avez-vous discuté de cette méthode?

M. Nicholson : Nous avons procédé à une revue des initiatives législatives prises dans ce domaine particulier au Royaume-Uni et ailleurs. Nous avons défini nos propres méthodes en tenant compte de nos lois sur la protection des renseignements personnels et des dispositions de la Charte. Nous avons une politique proprement canadienne de collecte des échantillons d'ADN. Selon le genre d'infraction, les règles et les tests sont différents. D'une façon générale, nous préférons limiter les prélèvements aux personnes déjà condamnées.

La raison, c'est que les personnes accusées d'une infraction bénéficient de la présomption d'innocence. On peut soutenir, à juste titre, qu'un accusé ne devrait pas être fiché en permanence dans une banque de données s'il est en fait innocent. Le projet de loi dont vous êtes saisis se fonde sur l'ancien projet de loi C-13. À part l'exception dont M. Yost peut vous parler, il ne s'applique qu'aux personnes condamnées. Encore une fois, le juge aura un pouvoir discrétionnaire, sauf dans la sous-catégorie particulière des infractions primaires. Nous avons adopté cette approche qui nous semble raisonnable. D'autres pays ont des expériences et des solutions légèrement différentes, mais c'est cette approche que nous avons choisie.

M. Yost : Le ministère de la Justice suit la situation dans les autres pays. Nous savons que le régime britannique, qui consiste à prélever un échantillon d'ADN au moment de la prise des empreintes digitales, a été contesté en vertu de la Convention européenne sur les droits de l'homme et a été maintenu à l'unanimité. Nous savons aussi que sept États américains sont en train d'adopter le même régime. Nous attendons que les tribunaux se prononcent sur sa constitutionnalité. De toute évidence, nous devons prendre une décision qui respecte la Charte. Nos experts de la Charte comparaîtront peut-être devant le comité chargé de l'examen quinquennal pour discuter des avantages et inconvénients de ce régime.

Le système britannique a fait l'objet de trois décisions. La principale était que le prélèvement de l'échantillon d'ADN met en cause le droit individuel à la vie privée et que ce droit doit être protégé. Les responsables ont jugé que les précautions prises à cet égard au Royaume-Uni — qui sont, à mon avis, inférieures à celles du Canada — sont suffisantes pour garantir les intérêts de la personne en cause. L'avantage pour le public — 15 p. 100 de correspondances dans la base de données — découle du prélèvement d'ADN au moment de la prise des empreintes digitales. Nous espérons avoir l'occasion de présenter ces faits lors de l'examen, mais il appartient au Parlement de se prononcer sur l'équilibre à réaliser. Nous changerons la loi si vous le souhaitez.

Le sénateur Bryden : Quand cet examen aura-t-il lieu, à votre avis?

M. Nicholson : Les comités intéressés ont déjà beaucoup à faire. Votre comité et celui de la Chambre des communes sont en train d'examiner la Loi antiterroriste. Nous serions heureux s'ils pouvaient entreprendre l'examen cet automne. Nous donnerons suite aux recommandations qui seront formulées.

Le sénateur Bryden : S'agira-t-il d'un comité parlementaire, ou bien l'examen sera-t-il entrepris séparément par les comités des deux Chambres?

M. Yost : L'article 13.

Le sénateur Bryden : Est-ce que c'est l'un ou l'autre ou les deux ensemble?

Le sénateur Nolin : Les deux peuvent le faire séparément ou en commun.

Le sénateur Bryden : Ce serait utile.

Lorsque vous enlevez aux tribunaux leur pouvoir discrétionnaire, les résultats ne sont parfois pas très bons pour ce qui est des accusations portées et des condamnations. Vous êtes-vous intéressés à cette question? Je ne crois même pas que le juge qui prononce la sentence décide du prélèvement d'ADN. Est-ce lui-même ou un autre?

M. Nicholson : C'est toujours le juge qui prononce la sentence.

Le sénateur Bryden : Il y a toujours lieu de s'inquiéter des droits individuels, mais on doit se soucier aussi des pratiques des tribunaux. Je me demande quelle est la réaction des juges quand ils ont l'obligation de faire quelque chose s'ils condamnent un accusé. Vous avez dit que le prélèvement est automatique dans un certain nombre de cas.

M. Nicholson : Oui.

Le sénateur Bryden : Je crois que les tribunaux seront d'accord à un certain niveau, mais pas à un autre. Beaucoup de juges ne seraient pas très heureux, je crois, si les gens sont tenus de donner un échantillon d'ADN au moment où des accusations sont portées contre eux.

M. Nicholson : C'est bien possible, mais ce n'est pas ce que prévoit le projet de loi dont le comité saisi. Je suppose que ces questions pourraient être soulevées dans le cadre d'un examen par les comités des deux Chambres ou par un comité mixte. Pour ce qui est du rapport entre le projet de loi et les juges qui prononcent la condamnation, comme je l'ai mentionné, le prélèvement n'est automatique que dans un nombre assez limité d'infractions. Pour la grande majorité des infractions, la décision appartient aux juges.

Dans le cas de cette sous-catégorie assez limitée des infractions primaires, je crois que la majorité des Canadiens trouveront raisonnable qu'une personne condamnée pour meurtre soit fichée dans la Banque de données génétiques. C'est toujours la question à laquelle nous essayons de répondre : qu'est-ce qui peut être considéré comme raisonnable dans les circonstances?

Lorsque j'ai examiné le projet de loi pour la première fois et que j'ai considéré cette sous-catégorie, elle m'a semblé raisonnable. Je pense que la plupart des gens seront du même avis. Comme vous l'avez dit, nous essayons toujours d'en arriver à une décision raisonnable qui protège à la fois les droits individuels et les droits de la société.

Le sénateur Bryden : Il semble que de plus en plus de pays adoptent la pratique du prélèvement automatique d'ADN, notamment dans un certain nombre d'États des États-Unis. Si quelque chose est à la mode en Californie, nous en héritons deux ou trois ans plus tard. Nos responsables, notre police et nos législateurs sont influencés par ce qui se passe de l'autre côté de la frontière. Ce n'est d'ailleurs pas une mauvaise chose.

Il y a cependant des préoccupations parmi certains groupes minoritaires, et particulièrement les minorités visibles. Ils craignent, si nous adoptons de plus en plus la pratique des prélèvements non discrétionnaires ou de prélèvements obligatoires au moment où des accusations sont portées, d'être soumis à un profilage racial. Certains groupes sont déjà inquiets maintenant, avant même que cela ne soit prévu dans la loi. Vous avez dit que nous n'avons pas actuellement de prélèvements automatiques et que nous n'envisageons pas d'adopter cette pratique.

M. Nicholson : Vous soulevez une question intéressante. Vous avez noté, à juste titre, que nous suivons ce que font les autres sur le plan judiciaire. C'est tout simplement logique de le faire. M. Yost a mentionné un certain nombre de pays. Nous partageons également — ce qui ne surprendra personne — des renseignements avec l'Australie, pour des raisons évidentes. Des pays comme l'Australie, la Grande-Bretagne, les États-Unis et l'Europe occidentale ont des systèmes semblables au nôtre. Nous ne nous conformons pas nécessairement à ce qui se fait ailleurs. Ayant étudié le Code criminel, vous savez sans doute que c'est une adaptation du Code criminel britannique du XIXe siècle et que, jusqu'en 1949, notre ultime cour d'appel se trouvait au Royaume-Uni.

Toutefois, malgré tout ce que nous avons en commun, nous avons, comme l'a noté M. Yost, des règles différentes de protection des renseignements personnels et de collecte de données génétiques. Même si notre système est semblable à celui d'autres pays, nos façons de procéder sont proprement canadiennes. Cela est indiqué pour beaucoup des raisons que vous avez énumérées. Nous nous soucions des droits individuels et de la protection des renseignements personnels. C'est tout ce que nous essayons de faire.

Pour revenir à la question de l'échantillon d'ADN à prélever sur une personne condamnée pour meurtre, je dirai encore une fois que nous essayons d'agir d'une façon raisonnable. Je crois que ce projet de loi établit un équilibre approprié.

Le sénateur Bryden : Ma confiance dans les analyses génétiques a été secouée lorsque M. Yost a dit que les renseignements sont communiqués en cas de correspondance partielle ou modérée. Je ne savais pas qu'il y avait des correspondances partielles et modérées entre les empreintes génétiques. Je croyais qu'une analyse permettait de trancher d'une façon catégorique d'un côté ou de l'autre.

M. Yost : Vous obtiendrez de meilleures explications des biologistes de la GRC, mais je peux vous dire que la banque de données génétiques définit pour chaque empreinte 13 locus qui sont saisis dans l'ordinateur. La GRC vérifie à deux reprises pour s'assurer d'avoir les bons renseignements. Toutefois, on prélève rarement 13 allèles sur les lieux de crimes. Nous n'avons pas réussi jusqu'ici à persuader les criminels de laisser sur les lieux des traces de sang bien nettes sur de petites cartes. Il nous arrive donc souvent d'avoir des échantillons dégradés, des échantillons partiels et des mélanges. Si une personne a été victime d'un viol collectif, l'échantillon obtenu est un mélange. Les scientifiques arrivent à répondre à des questions difficiles au sujet de la correspondance entre les empreintes génétiques en recourant à des méthodes trop savantes pour que j'y comprenne quelque chose. J'ai assisté à des conférences pendant lesquelles je n'ai pas saisi grand-chose, mais je fais confiance aux scientifiques.

Par conséquent, cela arrive. Si l'échantillon est dégradé, ils arriveront peut-être à établir la correspondance sur sept locus, ce qui comporte une probabilité d'erreur, disons, d'un sur un million, alors qu'avec 13 locus, cette probabilité n'est que d'un sur 10 billions, ou quelque chose de semblable. Plus le nombre de locus correspondants est petit, plus la probabilité d'erreur est grande. Si certains locus ne correspondent pas, les scientifiques savent qu'il faut exclure la personne en cause. Voilà pourquoi il est important de vérifier. Si l'ordinateur établit une correspondance approximative, mais dit que le locus no 6 d'une empreinte est un 1314 alors que le locus no 6 de l'autre empreinte est un 1413, les scientifiques vérifient s'il y a une erreur de saisie. Dans tous les cas, cela se fait d'une façon anonyme parce que personne n'a la moindre idée de l'identité liée à l'empreinte examinée, qu'elle provienne des lieux d'un crime ou qu'elle soit tirée des fichiers de la Banque nationale de données génétiques.

Le sénateur Bryden : C'est donc une question de jugement. La possibilité d'une erreur humaine est toujours présente.

M. Yost : Oui, cette possibilité existe toujours. Une correspondance entre des empreintes génétiques n'est qu'un indice pour la police. Elle peut constituer et constitue ordinairement la base d'une demande qui est présentée à un juge pour le convaincre qu'un prélèvement d'ADN serait utile dans le cadre d'une enquête, afin d'établir s'il y a lieu ou non de soupçonner une personne. Le scientifique qui a procédé au prélèvement sur les lieux du crime se présente devant le juge et prouve hors de tout doute la correspondance entre les empreintes, ce qui permet au juge de rendre une ordonnance de prélèvement. Ce n'est donc pas la Banque de données génétiques qui agit. L'analyse est faite au laboratoire judiciaire. Le responsable du laboratoire pourra donc dire : « Voici ce que j'ai et voici ce que j'ai obtenu grâce à l'ordonnance de prélèvement. » La correspondance établie par la Banque de données génétiques ne constitue donc qu'un indice qui peut entraîner la délivrance d'une ordonnance de prélèvement.

Le sénateur Bryden : Il faudrait s'adresser aux responsables de l'émission CSI.

M. Yost : Vous constaterez probablement en interrogeant les biologistes de la GRC que l'émission CSI n'a pas cessé d'empoisonner leur vie.

La vice-présidente : Si nous communiquons des renseignements partiels à un pays étranger et que, dans ce pays, la personne en cause soit jugée innocente en fin de compte, est-ce que nous insistons pour que les renseignements communiqués soient détruits?

M. Yost : Je crains de ne pas pouvoir répondre à cette question. Je pense que je ne m'aventurerai pas à le faire. J'essaierai d'obtenir la réponse de M. Bird. Nous aurions communiqué un nom. En cas de correspondance, nous aurions transmis au pays demandeur le nom de la personne en cause. Les autorités de ce pays auraient encore à constituer un dossier, à obtenir une condamnation, à recourir peut-être à une extradition. De notre côté, nous ne saurions pas si la personne a été jugée innocente ou coupable. Nous ne saurions même pas si elle a fait l'objet d'accusations dans l'autre pays. À ma connaissance, nous avons eu trois correspondances dans des affaires internationales et avons pu donner des résultats positifs au sujet de trois violeurs en série.

Le sénateur Andreychuk : Si nous pouvons avoir une réponse écrite, j'aimerais savoir si nous communiquons des données génétiques uniquement pour les cas sur lesquels nous enquêtons, ou si nous le faisons aussi dans le cas d'incidents qui se sont produits ailleurs et pour lesquels il existe des liens. Autrement dit, il se peut que nous ne sachions pas ce qui se passe dans un autre pays si nous ne nous sommes pas occupés du cas à l'origine.

M. Yost : Vous obtiendrez des chiffres précis de la Banque nationale de données génétiques. Toutefois, j'ai assisté à une séance d'information organisée à Toronto, il y a deux semaines. Si je m'en souviens bien, il y a eu environ 250 cas, dont 160 venaient d'autres pays, et notamment des États-Unis. Dans 80 cas, nous avons demandé des renseignements à d'autres pays, encore une fois surtout aux États-Unis. Sur l'ensemble, il y a eu trois résultats positifs.

Le sénateur Baker : Le sénateur Bryden estime que les juges devraient conserver leur pouvoir discrétionnaire. Est-ce que M. Yost peut nous confirmer que certaines des infractions primaires et secondaires peuvent être de type mixte? Les infractions mixtes, qui peuvent faire l'objet d'un acte d'accusation ou d'une déclaration de culpabilité par procédure sommaire, comprennent les voies de fait simples, article 266 du Code criminel, dans la catégorie secondaire, et l'agression armée, article 267, dans la catégorie primaire. Il est donc important de maintenir le pouvoir discrétionnaire des juges dans ces cas. Sans ce pouvoir, il faudrait changer sensiblement ces infractions mixtes ou ce qui les distingue dans les catégories primaire et secondaire. Des voies de fait simples peuvent consister en un geste menaçant. Si je lançais ce crayon sur quelqu'un, mon geste pourrait être assimilé à une agression armée. Tout cela figure dans la jurisprudence.

Pouvez-vous le confirmer? Cela soulignerait l'importance du maintien du pouvoir discrétionnaire des juges car il ne faudrait pas procéder automatiquement à un prélèvement d'ADN sur une personne qui s'est rendue coupable d'une infraction relativement mineure, même si elle relève de l'article 266 ou 267.

M. Yost : C'est certainement le principe du projet de loi dont vous êtes saisis ainsi que du système actuel, tel qu'il a été approuvé.

À mon avis, c'est une question que le Parlement devra trancher dans le contexte d'un examen général, pour déterminer, en fonction de l'expérience d'autres pays et de notre jurisprudence, s'il faut maintenir le système actuel ou le changer pour nous rapprocher peut-être du système britannique, dans lequel on procède à un prélèvement automatique dès l'arrestation, ou du système américain qui englobe la quasi-totalité des personnes condamnées pour une infraction.

Vous m'avez demandé de vous confirmer que le pouvoir discrétionnaire des juges est nécessaire. Il n'y a pas de doute qu'il l'est dans notre système, sauf dans le cas de 16 infractions primaires extrêmement graves pour lesquelles il n'y a aucun pouvoir discrétionnaire. D'autres pays ont conclu que ce pouvoir n'est pas essentiel. Certains procèdent à un prélèvement automatique pour tous les condamnés et d'autres, pour toutes les personnes accusées de certaines infractions. Dans ce dernier cas, la prise de sang à des fins d'analyse génétique se fait en même temps qu'on prend les empreintes digitales et la photo. Il y a des pays qui ont choisi cette voie.

Le sénateur Baker : Dans notre système, si une personne est accusée d'une infraction mixte, celle-ci est assimilée à un acte criminel, comme vous venez de le signaler. Les infractions relatives à la conduite d'un véhicule, par exemple, qui font l'objet d'un acte d'accusation — certaines d'entre elles sont cependant mixtes —, entraînent la prise d'une photo et des empreintes digitales. Toutefois, la personne en cause a le droit d'en demander la restitution en cas de déclaration de culpabilité par procédure sommaire.

M. Yost : C'est exact.

La vice-présidente : Le ministre nous a dit que la sous-catégorie d'infractions extrêmement graves, pour laquelle le pouvoir discrétionnaire des juges est supprimé, implique dans tous les cas le recours à la violence. J'ai examiné l'article 487.04 du Code et j'ai pu constater que c'est effectivement le cas, sauf pour l'extorsion.

M. Yost : Je me souviens de la discussion que nous avons eue lorsqu'il a été question d'inscrire l'extorsion sur la liste. L'extorsion est une infraction très grave, qui comporte en général de sérieuses menaces de violence. Vous avez raison. L'extorsion n'implique pas nécessairement le recours à la violence. Chaque fois qu'on dresse une liste, il y a des zones grises pour lesquelles on se demande s'il faut aller dans un sens ou dans l'autre. La décision prise à ce moment, c'est que l'extorsion est une infraction assez grave pour figurer dans la liste, même si elle n'est pas nécessairement liée à de la violence. Il n'en reste pas moins que la personne qui se rend coupable de cette infraction fait en général des menaces très sérieuses de violence.

La vice-présidente : Merci beaucoup, monsieur le ministre. Je dois dire que c'est M. Yost qui a répondu à la plupart des questions.

M. Nicholson : Je n'y vois aucun inconvénient.

La vice-présidente : Monsieur Yost, avez-vous quelque chose à nous dire?

M. Yost : Le sénateur Nolin a demandé une liste. J'ai ici, dans les deux langues officielles, une codification administrative non officielle faite par notre bureau, qui montre le nouveau libellé du Code criminel, une fois que les projets de loi C-18 et C-13 seront entrés en vigueur. Je peux vous laisser ce document.

La vice-présidente : Honorables sénateurs, nous accueillons maintenant plusieurs responsables de la Gendarmerie royale du Canada : Joe Buckle, directeur général des Services des sciences judiciaires et de l'identité, John Bowen, directeur des Services de biologie, Isabelle Trudel, officier responsable de la Banque nationale de données génétiques du Canada, et Anne-Elizabeth Charland, officier responsable des Services scientifiques.

Joe Buckle, directeur général, Services des sciences judiciaires et de l'identité, Gendarmerie royale du Canada : Je voudrais vous remercier de m'avoir donné l'occasion de comparaître devant le comité aujourd'hui.

Le sénateur Baker : Je voudrais commencer par souhaiter la bienvenue aux témoins. Dans le cadre de l'étude de ce projet de loi, j'aimerais d'abord poser à M. Buckle une question générale concernant l'arriéré mentionné dans le rapport du mois dernier de la vérificatrice générale. Je voudrais ensuite poser une question à Mme Charland et à M. Bowen, qui témoignent fréquemment devant les tribunaux et qui ont fait l'objet de contre-interrogatoires aussi bons qu'approfondis. Je voudrais enfin conclure en abordant un autre chapitre du rapport de la vérificatrice générale.

Monsieur Buckle, la vérificatrice générale a noté un important arriéré lors de son examen de votre service. D'après les médias, vous auriez dit, au nom de la GRC, que vous prenez des mesures pour remédier à cet arriéré et régler des problèmes particuliers. Pouvez-vous expliquer au comité, maintenant qu'un mois est passé depuis la parution de ce rapport, où vous en êtes exactement au sujet de cet arriéré plutôt choquant constaté par la vérificatrice générale?

M. Buckle : Je vous remercie de me donner l'occasion de parler de cette question particulière. Comme vous pouvez l'imaginer, nous étions aux prises avec ce problème avant la parution du rapport de la vérificatrice générale, qui met en évidence le fait que les laboratoires judiciaires n'ont pas la capacité voulue pour assumer la charge de travail qu'imposent les enquêtes criminelles.

La vérificatrice générale a classé dans l'arriéré toute analyse qui n'a pas été terminée dans les 30 jours. Ce délai représentait la cible que nous nous étions fixés pour les cas courants. Les analyses urgentes sont terminées en 15 jours, mais nous avions pour cible de terminer les affaires courantes en 30 jours. Si l'on s'en tient à cette définition, oui, nous avions un arriéré avant l'examen, et nous l'avons encore. Toutefois, l'important, ici, c'est la mesure dans laquelle nous répondons aux besoins de nos clients. Nous avons déterminé que les analyses n'ont pas toutes à être terminées dans les 15 jours ou même dans les 30 jours. Il est évident que les cas de viol et de meurtre sont graves et qu'il faut y donner suite rapidement. Il y a peut-être ensuite les affaires d'introduction par effraction. Je ne cherche pas du tout à sous-estimer l'importance de ces affaires, surtout si elles se produisent en série, car elles peuvent démoraliser toute une collectivité. Toutefois, je crois que la plupart des gens conviendront que le viol et le meurtre sont de loin plus graves.

Nous avions tous ces genres d'affaires — viol, meurtre, introduction par effraction, et cetera. — dans la même file d'attente. À titre de civils travaillant dans un laboratoire judiciaire, nous ne sommes pas qualifiés pour définir les priorités de la police. Nous avions donc adopté, par défaut, le principe du premier entré, premier sorti. À cause de cette approche, nos temps de traitement sont devenus trop longs. Au moment de l'examen de la vérificatrice générale, les délais moyens se situaient aux alentours de 125 jours pour les affaires courantes. Nous reconnaissons très volontiers que c'est beaucoup trop long.

Notre objectif est de déterminer quels cas doivent sortir en premier, puis d'examiner nos capacités. Combien de cas devons-nous traiter et de quelle façon allons-nous le faire? La GRC a ajouté 5 millions de dollars à notre budget pour nous permettre d'engager plus de personnel et d'ouvrir un autre site d'analyse génétique. Depuis la parution du rapport de la vérificatrice générale, il y a un mois, nous avons déjà engagé 11 biologistes. Nous avons l'intention d'en engager 70 au cours de cet exercice. Nous comptons aussi ouvrir un nouveau site d'analyse génétique à notre laboratoire d'Edmonton.

De plus, nous organisons actuellement des réunions avec nos clients, nos agents de police et nos partenaires du milieu juridique pour déterminer s'il y a un meilleur moyen de définir l'ordre de priorité des cas qui se présentent. Nous avons abouti à une sorte de grille de priorité. C'est un peu comme un échiquier, avec des cases A1, A2 et A3 à l'extrême gauche, A1 représentant bien sûr les cas les plus graves, A2 les cas un peu moins graves, et ainsi de suite. Nous passons ensuite aux rangées B, C et D. L'objectif est de déterminer le délai que nos partenaires de la police voudraient attribuer aux cas classés A1. S'ils nous disent qu'ils veulent obtenir des résultats en 25 ou 30 jours pour les cas A1 et en 40 jours pour les cas A2, nous pouvons organiser nos ressources en fonction de ces délais définis d'après les priorités de nos partenaires de la police, et non en fonction de priorités internes.

Nous avons produit une série de questions avec l'aide de nos partenaires. Par exemple : y a-t-il risque qu'un suspect prenne la fuite? La collectivité est-elle encore en danger? Y a-t-il un risque de récidive? Nous avons obtenu un logiciel nommé Expert Choice qui analyse les réponses à ces questions et produit un résultat chiffré permettant de situer le cas dans notre grille. Nous disons alors à nos enquêteurs de la police : « Vous recevrez des résultats dans environ 40 jours, en fonction de l'information que vous nous avez transmise. Est-ce que ce délai vous convient? » S'ils répondent oui, nous allons de l'avant. Si le délai ne convient pas à nos interlocuteurs, nous leur demandons de nous fournir plus de renseignements pour déterminer s'il faut accorder une plus grande priorité à l'affaire. À l'heure actuelle, nous respectons notre calendrier d'exécution de tous ces projets. En fait, je dois me rendre en Colombie-Britannique la semaine prochaine pour connaître les objectifs des services de police de la province. Nous faisons d'ailleurs la même chose dans le cas des autres administrations.

Le sénateur Baker : Pouvons-nous considérer cette réponse comme un exposé préliminaire du témoin pour qu'elle ne compte pas dans mon temps de parole? Lorsque nous avons des témoins de la GRC, nous nous attendons en général à des réponses courtes. En fait, la vérificatrice générale a mis en doute l'authenticité de certaines de leurs réponses. Elle a mentionné cependant dans son rapport qu'il n'y avait rien de délibéré de la part de la GRC.

Nous sommes très heureux de cette réponse détaillée que vous nous avez donnée, monsieur Buckle. J'aimerais maintenant passer à M. Bowen et à Mme Charland.

Tout d'abord, madame Charland, j'ai remarqué, en consultant récemment des cas de jurisprudence, que votre témoignage avait joué un rôle décisif dans certains jugements. Vous aviez parlé d'un chiffre de 1 sur... était-ce 9 billions? Vous pouvez sans doute le préciser. Savez-vous de quoi je vous parle?

Anne-Elizabeth Charland, officier responsable, Services scientifiques, Gendarmerie royale du Canada : Je crains de ne pas m'en souvenir.

Le sénateur Baker : Je vais vous lire ce passage. Il s'agit d'une décision disant ce qui suit : « D'après le témoignage de Mme Charland, la probabilité statistique de trouver dans la population générale une correspondance aléatoire avec l'ADN prélevé sur les vêtements de la victime était de 1 sur 950 billions. »

Vous en souvenez-vous maintenant? L'appelant disait qu'un tel nombre astronomique ne devrait pas être accepté tel quel comme preuve, et cetera. Nous avons cette décision de la Cour d'appel de la Saskatchewan dans l'affaire R c. Fisher, qui est fondée sur votre analyse. Il est mentionné ici que vous avez témoigné dans six provinces. C'était en 2003. Vous avez été appelée comme témoin expert dans 20 affaires, au cours desquelles vous avez été traitée comme telle.

Pour revenir à cette probabilité de 1 sur 950 billions, maintenez-vous toujours ce chiffre? Est-il vraiment possible d'en arriver à une telle estimation?

Mme Charland : Il s'agit d'une probabilité de correspondance aléatoire. C'est une estimation des chances de trouver une correspondance au hasard avec un profil établi dans ce cas particulier. L'estimation donne une idée de l'ordre de grandeur de la probabilité et du degré de signification de la correspondance. C'est en fait l'ordre de grandeur qui est important. Le chiffre exact représente le résultat du profil obtenu dans ce cas.

Le sénateur Baker : La Cour d'appel s'est déclarée d'accord avec vous et avec le juge de première instance. Je vais maintenant passer à ma principale question et aux raisons pour lesquelles je suis très heureux de vous voir comparaître comme témoin. Il ne s'agit pas de l'arriéré. Je voudrais parler d'un paragraphe figurant à la page 28 du rapport de la vérificatrice générale. M. Bowen voudra peut-être répondre à cette question, à titre de scientifique et de responsable directement touché par cette affaire.

J'ai trouvé assez troublantes deux observations de la vérificatrice générale. L'arriéré ne m'intéressait pas vraiment car, comme l'a dit M. Buckle, si vous vous fixez une cible de 30 jours, mais que les cas sérieux sont traités en 15 jours, je ne pense pas qu'il soit très important que le traitement d'affaires moins graves dure 90 ou 100 jours. Les médias ont surtout remarqué ces chiffres, mais ont manqué certains exemples concernant votre laboratoire. Ainsi, dans un cas de meurtre, un vêtement était de toute évidence taché de sang. Or les appareils de traitement automatique de votre laboratoire n'y ont rien décelé, en dépit du fait qu'on voyait des taches de sang à l'œil nu. Vos scientifiques se sont plaints et ont fait le travail à la main, je suppose. C'est l'objet de ma première question.

Ma seconde question est encore plus sérieuse. Je crois que vous savez où je veux en venir parce que le président du comité s'est inquiété de la qualité de votre travail au cours de la dernière réunion. Pourriez-vous nous parler de cela en premier? Vous représentez le laboratoire de la GRC. Il y a des laboratoires distincts en Ontario et au Québec qui ne relèvent pas de la GRC, n'est-ce pas? Ils ne font pas l'objet d'un examen aussi détaillé. Si cela se produit dans votre laboratoire, ils devraient peut-être prendre note des résultats.

Pourriez-vous répondre à la question, puisque nous n'avons pas eu de réponse jusqu'ici? Comment est-il possible que vos appareils automatiques ne décèlent pas des taches de sang visibles à l'œil nu?

John Bowen, directeur, Services de biologie, Gendarmerie royale du Canada : Plusieurs raisons peuvent expliquer ce fait. Ainsi, le mode d'entreposage peut avoir entraîné une dégradation des échantillons, qui peuvent avoir été soumis à de l'humidité, à une lumière solaire intense, et cetera. Plusieurs facteurs peuvent agir sur la stabilité de l'ADN lui-même.

Toutefois, dans ce cas particulier, c'était le résultat de la façon dont les échantillons ont été identifiés au laboratoire. Nous nous sommes servis d'un test qui a perturbé le processus automatisé. Nous n'avons réussi à découvrir le problème qu'en octobre 2006.

Le sénateur Baker : Il y a seulement quelques mois?

M. Bowen : Oui, il y a environ six mois. Nous avons alors écrit aux enquêteurs pour leur demander s'ils voulaient que leurs échantillons soient réanalysés parce que le test en question avait eu une influence sur la capacité d'isoler l'ADN des échantillons de ce genre. Le problème était dû à ce test, que nous utilisons pour identifier le sang.

Une fois que nous avons découvert le problème, nous avons pu y remédier aux laboratoires. Nous en avons également informé les enquêteurs sur le terrain pour qu'ils évitent d'utiliser le test dans de mauvaises conditions. Nous avons maintenant un processus qui nous permet de mieux isoler l'ADN et d'obtenir un bon profil génétique par des moyens automatisés.

Nous avons eu ce problème entre septembre 2005 et octobre 2006. Il nous a fallu un certain temps pour déterminer les facteurs scientifiques qui le causaient.

Le sénateur Baker : J'ai été alarmé quand j'ai vu cet exemple, mais j'ai trouvé le second exemple encore plus inquiétant. Il s'agissait d'une enquête sur un meurtre. Un échantillon prélevé sur un suspect servait d'échantillon de comparaison. Une fois que le profil correspondant a été examiné, l'échantillon a été soumis à une seconde analyse qui a abouti à un profil différent du premier.

Le plus choquant, dans ce cas, c'est que tout le monde craint que le profil génétique établi à partir d'un échantillon ne soit pas exact. Même s'il n'y a qu'une chance d'erreur sur 950 billions — et les tribunaux vous ont donné raison sur ce point, madame Charland —, ce n'est qu'une estimation. Cet exemple permet de croire que si un échantillon est traité par vos appareils, il peut donner un profil génétique dans un cas et un profil différent dans un autre.

Comment une telle chose a-t-elle pu se produire? Le rapport ne donne aucune explication. De quelle façon pouvez-vous expliquer une erreur de ce genre?

M. Bowen : Je me rends compte que cet exemple met en doute la fiabilité de la technologie. Dans ce cas particulier, nous avons obtenu, comme vous l'avez dit, un premier profil qui était complet pour tous les sites d'ADN que nous examinons. Lors de la deuxième analyse, le profil était incomplet. Il provenait du même échantillon. Il est probable que la quantité d'ADN utilisée dans le second test n'a pas suffi pour aboutir à un profil complet. Nous n'avons obtenu qu'un profil partiel.

Ce n'était pas du tout un profil faux ou différent. C'est seulement qu'il n'était pas aussi complet que celui du premier test.

Le sénateur Baker : Les enquêteurs du Bureau du vérificateur général disent que c'était à partir d'un échantillon connu. Cet échantillon a été traité deux fois et a produit des profils différents.

M. Bowen : Comme je viens de le dire, nous avons obtenu, à partir du même échantillon, un profil complet une première fois et un profil incomplet, la seconde. Ce n'était pas un profil différent, c'était un profil incomplet.

Le sénateur Baker : Il est donc possible que le profil ne soit pas exact.

M. Bowen : Non.

Le sénateur Baker : Cette possibilité a été évoquée, dans ce cas particulier, dans le rapport de la vérificatrice générale.

M. Bowen : Le profil n'est pas inexact. Il s'agit du même profil, sauf qu'il était incomplet. Il ne comportait pas tous les sites d'ADN qu'on utilise pour obtenir une correspondance. Ce résultat réduit la force du lien établi à l'aide de ce profil. Il ne permettrait cependant pas d'identifier la mauvaise personne.

La vice-présidente : Diriez-vous qu'il y a seulement 50 p. 100 de chances qu'il s'agisse de la même personne?

M. Bowen : Non, ce n'est pas 50 p. 100 de chances. Le profil est le même. Dans le cas du témoignage de Mme Charland, nous avions une probabilité d'erreur de 1 sur 950 billions. Si ce rapport est tellement faible, c'est probablement parce que l'ensemble des neuf locus ou sites testés ont donné un résultat. Dans cet exemple, le profil était incomplet. La probabilité d'erreur était peut-être de 1 sur 400 millions ou moins, ce qui réduit le degré de signification de l'association.

Le sénateur Baker : Monsieur Bowen, lorsque les scientifiques ont signalé des erreurs attribuables au matériel qu'ils utilisaient, ils ont procédé à des vérifications manuelles. Qu'est-ce que cela signifie? Veut-on dire par là que les tests manuels effectués dans le passé donnaient de meilleurs résultats? Est-ce que la vérification manuelle signifie que les scientifiques font le test non avec une grande machine, mais en manipulant eux-mêmes les échantillons? Est-ce bien ce que cela signifie?

M. Bowen : C'est exact. Le nouveau système est automatisé et fait intervenir des robots. Le problème réside dans la capacité d'isoler suffisamment d'ADN pour obtenir un profil. Cet aspect du système automatisé a causé des préoccupations. Nous avons résolu le problème, ce qui permet maintenant au système automatisé de mieux isoler l'ADN que la technologie précédente.

La vice-présidente : Est-ce que cela signifie que vous ne traitez plus les échantillons en lots? Lorsque nous avons étudié le premier projet de loi sur les empreintes génétiques, nous avions assisté à une séance d'information sur la façon de procéder. J'avais cru comprendre alors que les échantillons étaient traités en lots. Les traitez-vous individuellement maintenant?

M. Bowen : Non, dans la technologie manuelle précédente, nous traitions 26 échantillons à la fois. Grâce au système automatisé, nous les traitons par lots de 78.

La vice-présidente : Les lots sont donc plus importants.

M. Bowen : Oui.

Le sénateur Baker : Monsieur Bowen, vous êtes vous aussi cité très fréquemment comme témoin devant les tribunaux. Vous êtes presque aussi souvent soumis à des contre-interrogatoires que Mme Charland. Avez-vous jusqu'ici été soumis à des contre-interrogatoires portant sur cet aspect particulier dont je viens de parler? Pensez-vous que c'est à cause du rapport publié le mois dernier?

M. Bowen : Nous n'avons pas été soumis à des contre-interrogatoires portant sur ce rapport particulier, mais je m'attends à ce que cela se produise dans pas trop longtemps.

Le sénateur Baker : Je peux vous affirmer que rien de ce que vous dites devant le comité ne peut être utilisé devant un tribunal. Nous sommes couverts par l'article 118 du Code criminel. Nos délibérations sont assimilées à une procédure judiciaire. Vous bénéficiez donc d'une protection complète.

La vice-présidente : Nous sommes également couverts par les dispositions de protection des renseignements personnels qui s'appliquent aux comités et aux deux Chambres du Parlement.

[Français]

Le sénateur Nolin : Lorsque le ministre témoignait tout à l'heure, certains de mes collègues s'interrogeaient sur l'article 31 du projet de loi proposé. Cet article vise, entre autres, à modifier l'étendue des échanges d'information qui peuvent se produire entre vous, via le commissaire, et des pays étrangers ou des organismes étrangers. Avant de continuer, est-ce que vous êtes familier avec cet aspect du travail de la banque, sinon un autre témoin pourrait-il nous informer?

[Traduction]

Connaissez-vous les dispositions régissant les relations internationales, ou bien faut-il que je pose la question à quelqu'un d'autre?

M. Buckle : Nous connaissons ces relations, mais je ne crois pas que nous ayons les compétences spécialisées nécessaires pour vous répondre. David Bird serait la personne la plus indiquée à cet égard.

La vice-présidente : Vous êtes le troisième à nous recommander de convoquer M. Bird comme témoin. Je crois que nous allons devoir le faire.

Le sénateur Nolin : Vous pourriez peut-être nous aider à comprendre un mot utilisé dans la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques. Avez-vous le texte de la loi sous la main? Je pourrais peut-être vous le lire. Trois genres de renseignements peuvent être communiqués : deux maintenant et un troisième si le projet de loi C-18 est adopté. Il s'agit des renseignements qui peuvent être transmis à un autre pays ou à une organisation internationale.

Voici le texte de l'alinéa 6(1)c) de la Loi :

si, à son avis, un profil semblable s'y trouve, ce profil;

En anglais, c'est l'adjectif « similar » qui est utilisé. J'aimerais savoir ce que signifie pour vous un profil semblable.

Après avoir entendu la question posée par le sénateur Baker et la réponse qui y a été donnée, après que nous avons parlé du rapport de la vérificatrice générale, l'adjectif « semblable » me semble avoir un sens assez étendu. J'aimerais donc que vous nous disiez ce que signifie le mot « semblable ».

Si nous adoptons le projet de loi C-18, cette disposition nous permettra de communiquer à des organismes internationaux des profils génétiques s'ils sont semblables à ceux que nous avons déjà, ce qui n'est pas le cas actuellement.

M. Buckle : Je vais peut-être demander à l'un de mes collègues, Mme Trudel ou M. Bowen, de répondre à cette question. Il s'agit ici de correspondance modérée, de la définition de « semblable » et de l'étendue de cette définition.

Le sénateur Nolin : Il y a peut-être un mot à utiliser à des fins législatives et un autre dont on se sert en pratique.

Isabelle Trudel, officier responsable, Banque nationale de données génétiques du Canada, Gendarmerie royale du Canada : Je vais essayer de donner une explication. Le mot « semblable » est utilisé pour désigner ce que nous appelons une correspondance modérée. Lorsque nous procédons à des comparaisons, nous employons deux genres de profils génétiques. Le fichier des condamnés contient des profils de source unique, c'est-à-dire provenant d'un même individu. Comme l'a expliqué M. Bowen, les profils obtenus à partir d'échantillons prélevés sur les lieux d'un crime peuvent être incomplets ou partiels. Si l'ADN s'est dégradé parce qu'il a été exposé à différentes conditions ambiantes, il peut ne pas donner un profil génétique complet sur les 9 ou les 13 sites de l'ADN que nous examinons.

Nous pouvons aussi avoir, dans le cadre d'une enquête judiciaire, des profils provenant d'un mélange d'ADN appartenant à plus d'un individu. Nous procédons alors à une interprétation pour essayer de déterminer s'il est possible de dissocier le mélange pour que ses éléments puissent être comparés à d'autres profils.

Pour expliquer une correspondance modérée, je prendrai l'exemple d'un profil du fichier des condamnés qui correspond dans une certaine mesure à un profil provenant des lieux d'un crime. Cela signifie que le premier profil peut être compris dans le second ou lui est semblable. Certains renseignements génétiques peuvent également manquer. Par exemple, si le profil provenant des lieux du crime a subi une certaine dégradation, il peut lui manquer un site d'ADN.

Je crois qu'on vous a déjà expliqué que le profil est représenté par une série de chiffres. Par exemple, deux chiffres, disons 16 et 17, peuvent être associés à un site d'ADN. Ces deux chiffres se retrouvent dans le profil du fichier des condamnés, mais le profil provenant des lieux du crime peut, en cas de dégradation, ne contenir qu'un 16. C'est ce que nous appelons une correspondance modérée ou étroite. Il demeure possible que les profils proviennent de la même personne, la dégradation expliquant alors l'information génétique qui manque.

Dans le cas d'un échantillon mélangé provenant des lieux d'un crime, il peut y avoir des renseignements supplémentaires. Pour reprendre mon exemple, le profil tiré du fichier des condamnés peut contenir un 16 et un 17 pour un site donné d'ADN. Si l'échantillon mélangé provenant des lieux du crime n'a pas pu être dissocié, le laboratoire peut avoir attribué au même site d'ADN les chiffres 16, 17 et 18. Le 18 pourrait provenir d'une seconde source, mais, compte tenu de l'information génétique disponible, le scientifique n'a pas réussi à dissocier clairement le profil.

Lors de la comparaison de deux profils de ce genre, nous parlons de correspondance étroite ou modérée. Cela signifie que l'échantillon du fichier des condamnés, avec 16 et 17, peut avoir contribué à l'échantillon qui a donné 16, 17 et 18.

Le sénateur Nolin : Si j'ai bien compris, en cas d'adoption du projet de loi C-18, nous pourrons communiquer à l'échelle internationale les renseignements que nous communiquons actuellement à l'échelle nationale. C'est bien cela?

Mme Trudel : Oui, c'est exact. Comme les deux profils comparés ne sont pas de source unique — je parlerai, par exemple, d'un profil tiré du fichier des condamnés —, les scientifiques du laboratoire d'origine et du fichier des condamnés doivent discuter entre eux des motifs de la correspondance étroite. Y a-t-il une explication? L'échantillon s'est-il dégradé?

Pour que les scientifiques recommandent qu'un profil soit versé dans le fichier des condamnés, le profil doit répondre à certaines de leurs directives d'interprétation. Un profil comportant des éléments manquants peut ne pas être recommandé s'il se situe en deçà de leur seuil d'analyse. Les scientifiques en discutent. Toutefois, lorsque les profils sont versés dans le fichier de criminalistique, ils ne peuvent voir que les séries de chiffres. Ils n'ont pas accès aux renseignements complémentaires que détiennent les scientifiques et le laboratoire au sujet de la force du profil ou de la proportion de mélange. Avant de fournir une piste aux enquêteurs, c'est-à-dire des profils concluants, une discussion doit avoir lieu entre le laboratoire d'origine et, dans ce cas, la Banque de données génétiques, afin de décider s'il existe une correspondance valable pouvant justifier la communication à un organisme étranger de renseignements personnels concernant l'échantillon trouvé dans le fichier des condamnés.

Je voudrais également signaler que, si le projet de loi C-18 est adopté, c'est le profil génétique qui serait communiqué. L'échantillon biologique ne serait pas envoyé à l'étranger. Seuls les renseignements seraient communiqués pour décider s'il existe une correspondance valable.

Le sénateur Nolin : Le sénateur Baker a posé une question au sujet de l'arriéré. L'adoption du projet de loi C-18 augmentera probablement votre charge de travail de 50 p. 100.

Le sénateur Baker : Je n'ai pas posé de questions à ce sujet, mais c'est vrai.

Le sénateur Nolin : Pour faire face à cette augmentation de la charge de travail, suffira-t-il d'augmenter le budget de votre organisation de façon à éviter tout arriéré ou, du moins, à maintenir l'arriéré dans des limites raisonnables? Vous préférez peut-être que nous posions cette question au ministre responsable, c'est-à-dire l'autre ministre.

M. Buckle : J'aimerais faire une distinction ici entre la Banque de données génétiques et le secteur de la police criminelle. La banque, dont Mme Trudel assure la gestion, est un exemple de succès sur tous les plans. Elle dispose de capacités suffisantes pour absorber les effets que les projets de loi C-13 et C-18 auront sur ses propres opérations.

Nous sommes cependant préoccupés par le fonctionnement de nos laboratoires, qui a fait l'objet du rapport de la vérificatrice générale. C'est ce que j'appelle notre secteur de la police criminelle, qui aide les enquêteurs de la police sur une base quotidienne. Les résultats de son travail alimentent le fichier de criminalistique de la banque de données. Nous devons veiller à renforcer les capacités de ce secteur. C'est dans ce domaine que le financement provenant du ministre...

Le sénateur Nolin : C'est ce que vous appelez le fichier médico-légal, n'est-ce pas?

M. Buckle : Oui.

La vice-présidente : Dans la même veine, je crois que vous avez signalé fin février que les laboratoires judiciaires ne disposaient pas de techniciens en génétique. Votre budget vient d'être augmenté de 5 millions de dollars. Avez-vous maintenant des techniciens en génétique dans vos laboratoires?

M. Buckle : Pouvez-vous répéter, s'il vous plaît?

La vice-présidente : Le 27 février, la GRC a signalé que les laboratoires judiciaires n'avaient aucun technicien en génétique. On avait également noté à ce moment que vous vous attendiez à ce que la charge de travail... 120, je m'excuse. Je regardais un mot dans cette note que j'avais pris pour un « non », mais il s'agit en fait du chiffre 120. Je m'excuse... Vous n'avez vraiment pas à paniquer.

Vous vous attendiez donc à ce que la charge de travail augmente de 42 p. 100, mais je crois qu'à ce moment, vous n'aviez pas tenu compte de l'article 6 du projet de loi, qui autorise une augmentation très sensible de la communication de données à l'échelle internationale. Est-ce que votre proportion de 42 p. 100 a augmenté? Avez-vous un effectif suffisant pour faire le travail?

M. Buckle : Oui. Encore une fois, il faut faire ici une distinction entre la banque de données et le secteur de la police criminelle. La communication internationale de renseignements aura des effets sur la banque qui, nous le croyons, a des capacités suffisantes pour absorber le surplus. La proportion de 42 p. 100 est une estimation assez optimiste des effets sur les opérations de nos laboratoires. Toutefois, je ne crois pas que nous n'ayons jamais été en meilleure position pour répondre à la demande. La GRC a ajouté 5 millions de dollars à mon budget. Après l'adoption de ce projet de loi, le gouvernement doit nous fournir des crédits supplémentaires de 15 millions de dollars sur deux ans.

Je ne peux pas affirmer que nous pourrons absorber la totalité de l'excédent, parce qu'il est possible que cela se révèle inexact à l'avenir. Je crois toutefois que nous prenons toutes les mesures nécessaires, grâce aux nouveaux crédits, pour être en mesure de répondre à la demande aussi bien dans le secteur de la police criminelle qu'à la Banque de données génétiques.

Le sénateur Nolin : À combien s'élevait votre budget avant que vous ne receviez les 5 millions supplémentaires?

M. Buckle : Il était de 10 millions de dollars.

Le sénateur Nolin : Vous aviez déjà 10 millions. Avec les 5 millions supplémentaires et les 15 millions qui s'y ajouteront, vous passerez donc de 10 à 30 millions de dollars. C'est bien cela?

M. Buckle : Sur une période de deux ans.

Le sénateur Nolin : C'est énorme.

M. Buckle : Effectivement.

[Français]

Le sénateur Rivest : Les corps de polices provinciales du Québec et de l'Ontario ont-ils rencontré les mêmes problèmes sur les arriérés que vous avez connus à la GRC?

[Traduction]

M. Buckle : Je ne connais pas les nombres exacts. Je crois savoir cependant que ces laboratoires ont les mêmes problèmes de capacité que nous et s'inquiètent autant de l'augmentation de la demande. J'ai également appris qu'ils avaient approché leurs collègues provinciaux pour se renseigner sur les possibilités d'augmentation de leur budget.

Le sénateur Bryden : Cela concerne aussi l'arriéré. Pouvez-vous nous dire quels délinquants sont tenus de donner des échantillons d'ADN et quelles infractions ils ont commises? Je n'ai pas besoin d'une liste, mais je veux mieux comprendre. Quelqu'un a mentionné que les prélèvements sont obligatoires en cas d'introduction par effraction. Si une personne se rend coupable d'introduction par effraction, est condamnée sur acte d'accusation et est incarcérée pendant plus de deux ans, sera-t-elle fichée dans la Banque de données génétiques?

Mme Trudel : Deux genres d'infractions justifient le prélèvement d'échantillons d'ADN en vertu du Code criminel : les infractions primaires, qui consistent essentiellement en crimes violents contre les personnes, et les infractions secondaires, qui comprennent l'introduction par effraction dans un logement et le vol qualifié. Après condamnation, une personne peut être tenue de donner un échantillon d'ADN à verser dans le fichier des condamnés de la Banque nationale de données génétiques. Toutefois, un juge doit signer une ordonnance pour que l'échantillon soit accepté par la banque.

Le sénateur Bryden : Il y a une catégorie d'infractions qui impose automatiquement le prélèvement d'un échantillon d'ADN. Ce sera certainement le cas après l'adoption de ce projet de loi, qui supprimera le pouvoir discrétionnaire du juge dans ces cas. Quelle proportion de votre travail est liée aux auteurs d'infractions primaires ou de crimes violents contre les personnes, comme le meurtre, la tentative de meurtre ou l'agression sexuelle, et quelle proportion est liée aux auteurs d'infractions secondaires telles que les infractions contre les biens?

Mme Trudel : Nos statistiques actuelles sur les types d'échantillons reçus par la Banque nationale de données génétiques indiquent en gros que 53 p. 100 des échantillons reçus sont liés à des condamnations pour des infractions primaires, tandis que 46 p. 100 relèvent de condamnations pour des infractions secondaires.

Le sénateur Bryden : Y a-t-il parmi les infractions secondaires des crimes contre les personnes?

Mme Trudel : Oui. Je crois que les voies de fait en font partie.

Le sénateur Bryden : Si vous soustrayez les voies de fait, qui sont des crimes contre les personnes, de vos statistiques concernant les infractions secondaires, vous resterait-t-il environ 30 p. 100 d'infractions contre les biens?

Mme Trudel : Je ne suis pas sûre de comprendre votre question. Voulez-vous connaître le nombre d'échantillons? Je n'ai pas ces données ici, mais je peux vous les faire parvenir, ce qui vous permettra de savoir combien d'échantillons correspondent à des infractions particulières. Je crois savoir que la majorité des échantillons que nous recevons proviennent de personnes condamnées pour une infraction secondaire, ce qui comprend l'introduction par effraction et le vol qualifié.

Le sénateur Bryden : Ce sont des infractions contre les biens. Nous avons appris aujourd'hui que l'extorsion figure dans la liste spéciale, je ne sais trop pour quelle raison. L'explication donnée, c'est que l'extorsion est une infraction grave, qui peut donner lieu à des infractions encore plus graves. Je ne suis pas sûr que ce soit une bonne idée de surcharger un système coûteux, compliqué et perfectionné d'identification des délinquants en y ajoutant le profil génétique de personnes coupables d'introduction par effraction ou de vol qualifié. J'ai l'impression que ces infractions peuvent, le plus souvent, être traitées d'une manière différente. Est-il possible d'attribuer une partie de votre arriéré et de votre surcharge de travail, qui continuera à croître avec le temps, au traitement de ces infractions? Je sais que vous n'avez pas de décisions à prendre à ce sujet. Il est probable que la décision nous appartient en fin de compte, à titre de législateurs. La suppression des infractions contre les biens qui n'impliquent aucune violence contre des personnes réduirait votre charge de travail. N'êtes-vous pas de cet avis?

M. Buckle : Je peux peut-être répondre à cette question. Je suis bien d'accord avec vous que les législateurs devraient revoir la façon dont nous utilisons cet outil médico-légal. L'établissement de priorités par la méthode que je vous ai exposée, avec les catégories A1, A2 et A3, constitue une tentative de notre part pour attribuer le plus de ressources aux cas les plus sérieux, comme le viol et le meurtre, et cetera. Toutefois, la demande augmente dans toutes les provinces. En vertu des ententes sur les analyses biologiques, les laboratoires de la GRC sont tenus de s'occuper de toutes les analyses concernant les infractions primaires et d'une partie des analyses relatives aux infractions secondaires, selon les capacités dont ils disposent.

Nous avons averti nos partenaires de la police que si nous devons nous occuper des infractions les moins graves, nos délais s'allongeront sans cesse dans le cas des infractions les plus graves. J'ai essayé de faire comprendre aux chefs de police et aux officiers de la police criminelle qu'ils doivent revenir aux méthodes de base et aux technologies classiques dans leurs enquêtes sur ces infractions, plutôt que de recourir chaque fois aux analyses génétiques. L'analyse génétique est la technologie à la mode que tout le monde connaît maintenant grâce aux nombreuses émissions télévisées sur les enquêtes policières. Elle n'est cependant pas toujours utilisée à bon escient.

J'ai cependant une réserve à formuler dans le cas de l'introduction par effraction. Nous avons actuellement 60 p. 100 de résultats positifs lorsque des échantillons prélevés sur les lieux d'effraction, dans les cas où aucun suspect n'a été identifié, sont comparés aux profils conservés par la banque. Environ 26 p. 100 des échantillons donnent un résultat positif par rapport aux fichiers des condamnés, ce qui signifie que nous sommes en mesure de résoudre des crimes. Il s'agit parfois de crimes relativement mineurs, mais cela fait quand même des criminels de moins dans la rue.

Si l'on examine l'application de l'outil génétique, on doit quand même tenir compte de ce qu'ils réalisent en faveur des diverses collectivités. Je viens d'une petite ville de Terre-Neuve où des vols par effraction en série pourraient bien démoraliser les gens.

Le sénateur Bryden : Les résultats positifs des comparaisons entre les échantillons d'introduction par effraction et le fichier des condamnés de la banque concernent-ils en général des personnes qui ont commis des vols ou bien des personnes coupables d'actes violents?

Mme Trudel : Les résultats positifs liés à une infraction primaire que nous obtenons à partir d'échantillons prélevés sur les auteurs d'infractions secondaires, tels que l'introduction par effraction et le vol qualifié, représentent environ 10 à 15 p. 100 du total. Ils sont souvent liés à des enquêtes portant sur des agressions sexuelles ou des meurtres. Si l'échantillon n'avait pas été prélevé après la condamnation pour une infraction secondaire, nous n'aurions pas pu fournir une piste pour faire avancer l'enquête sur une infraction primaire le plus souvent grave.

Le sénateur Bryden : Une personne fichée dans la Banque nationale de données génétiques a déjà commis une infraction primaire. Autrement, vous n'auriez pas son profil génétique.

Mme Trudel : Les chiffres que j'ai mentionnés concernent des échantillons prélevés après condamnation pour une infraction secondaire. Lorsque des substances organiques prélevées sur les lieux de crimes non résolus sont comparées à ces échantillons, nous arrivons à fournir aux enquêteurs une piste permettant de résoudre 10 à 15 p. 100 des cas d'infractions primaires.

Le sénateur Bryden : Je ne comprends plus. Si le profil génétique d'une personne figure dans la banque de données, de quel genre d'infraction cette personne s'est-elle rendue coupable?

Mme Trudel : Ce que je dis, c'est que lorsque nous recevons des échantillons prélevés après condamnation pour une infraction secondaire telle que l'introduction par effraction ou le vol qualifié, nous les comparons aux échantillons relatifs à des crimes non résolus figurant dans le fichier de criminalistique. Nous arrivons ainsi dans 10 à 15 p. 100 des cas à des résultats positifs liés à des infractions primaires dont on n'a jamais trouvé l'auteur.

Le sénateur Bryden : Vous parlez donc d'infractions primaires non résolues.

Mme Trudel : C'est exact.

Le sénateur Bryden : Et cela se produit pendant que vous faites des recherches sur des cas d'introduction par effraction.

Mme Trudel : Lorsque nous prélevons un échantillon sur une personne qui a été condamnée pour introduction par effraction ou pour vol qualifié, les chances d'obtenir un résultat positif lié à une infraction primaire non résolue sont de 10 à 15 p. 100.

Le sénateur Bryden : Compte tenu des avantages et des coûts, vaut-il la peine de continuer à s'occuper des cas d'introduction par effraction et de vol qualifié?

M. Buckle : Sur une base de rentabilité, je dirais, à titre d'administrateur supérieur, qu'il vaut la peine de maintenir notre unité chargée des cas d'introduction par effraction. Si les cas secondaires permettent d'augmenter de 10 à 15 p. 100 le taux de réussite des enquêtes sur des cas primaires, c'est un gain pour la société.

Le sénateur Milne : Je me demande si vous pouvez satisfaire ma curiosité. M. Yost, du ministère de la Justice, a dit qu'un profil génétique rappelle un peu un électrocardiogramme. Je croyais qu'il ressemblait plutôt à un code à barres. C'est ainsi qu'on nous l'a décrit au cours de notre séance d'information sur les essais génétiques.

M. Buckle : Nous serait-il possible de préparer une trousse à envoyer au comité?

La vice-présidente : Ce serait aussi intéressant qu'utile pour le comité.

M. Bowen : Nous pouvons le faire. Un électrocardiogramme présente une série de pics et de vallées. Lorsque nous tirons les données brutes de nos instruments, elles sont transposées sous forme d'une série de chiffres, comme l'a indiqué Mme Trudel. Nous l'assimilons à un code à barres, mais le profil ne ressemble pas à un code à barres.

La vice-présidente : Les choses ont évolué depuis notre séance d'information.

Le sénateur Baker : Cette séance a été intéressante. Vous avez bien répondu à nos questions. Je me rends compte que vous n'avez pas de laboratoires au Nouveau-Brunswick, à Terre-Neuve-et-Labrador ni à l'Île-du-Prince-Édouard. Vous en avez dans chacune des provinces de l'Ouest : Colombie-Britannique, Saskatchewan, Alberta et Manitoba. Vous avez annoncé aujourd'hui la création d'un nouvel établissement à Edmonton. L'examen de la jurisprudence nous a montré qu'il est important d'assurer la continuité de la possession des échantillons que vous soumettez à des essais. La continuité de la possession suffit parfois en soi pour constituer tout un dossier préparatoire. Il s'agit de l'intégrité des échantillons.

Pouvez-vous nous donner l'assurance que vous ne compromettez pas l'intégrité des échantillons et la continuité de leur possession en les envoyant de St. John's, à Terre-Neuve, à Edmonton, en Alberta? Ne serait-il pas de loin préférable de les envoyer de St. John's à Saint John ou d'un endroit du Nouveau-Brunswick à un autre endroit de la même province? Ne devrions-nous pas avoir un laboratoire là? Est-il vrai que le gouvernement du Canada décide lui-même des endroits où les laboratoires sont établis?

M. Buckle : Nous agrandissons notre établissement actuel d'Edmonton. Nous n'en construisons pas un nouveau. Nous installons simplement du matériel pour faire des analyses génétiques.

En principe, il serait avantageux pour nous d'avoir un laboratoire dans chacune des grandes villes du pays. En pratique, compte tenu de notre budget, nous avons six laboratoires dans six grandes villes. L'expédition des échantillons par service de messagerie est efficace. Nos protocoles d'expédition garantissent l'intégrité des échantillons et préviennent toute dégradation du matériel biologique. Par ailleurs, monsieur, je dois vous dire avec respect que je ne suis pas habilité à répondre à votre dernière question concernant le gouvernement.

Le sénateur Bryden : Quelles sont les six villes?

M. Buckle : Il s'agit de Vancouver, Edmonton, Regina, Winnipeg, Ottawa et Halifax. Il y a également deux laboratoires provinciaux.

La vice-présidente : Merci beaucoup d'avoir été aussi patients avec nous et d'avoir rafraîchi nos connaissances concernant les tests génétiques.

M. Bird s'est précipité après son autre réunion pour être ici au cas où nous aurions besoin de lui. Il ne nous reste cependant pas de temps. Nous allons devoir le convoquer un autre jour.

La séance est levée.


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