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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Langues officielles

Fascicule 4 - Témoignages


OTTAWA, le lundi 19 juin 2006

Le Comité sénatorial permanent des langues officielles se réunit aujourd'hui à 17 h 5 pour étudier, afin d'en faire rapport de façon ponctuelle, l'application de la Loi sur les langues officielles, ainsi que des règlements et instructions en découlant, au sein des institutions assujetties à la Loi.

Le sénateur Maria Chaput (présidente) occupe le fauteuil.

[Français]

La présidente : Bonjour et bienvenue à cette sixième réunion du Comité sénatorial permanent des langues officielles. Je m'appelle Maria Chaput, et je suis la présidente du comité. Je viens du Manitoba.

Nous recevons aujourd'hui des témoins, mais avant de leur donner la parole, j'aimerais vous présenter les membres du comité.

À ma gauche, le sénateur Andrée Champagne, de Grandville, le sénateur Fernand Robichaud, du Nouveau- Brunswick, à ma droite, le sénateur Madeleine Plamondon, le sénateur Claudette Tardif, de l'Alberta et le sénateur Rose-Marie Losier-Cool, du Nouveau-Brunswick.

Aujourd'hui, nous poursuivons notre étude sur l'application de la Loi sur les langues officielles. Nous recevons, dans un premier temps, les représentants de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada, la FCFA. Et dans un deuxième temps, le président du secrétariat du Conseil du Trésor et les hauts fonctionnaires.

La FCFA, comme vous le savez, est le porte-parole national et international des communautés minoritaires de langues officielles au Canada. Elle assure la représentation politique, la promotion et l'appuie au développement de ces communautés, en collaboration avec ses membres et ses partenaires. Nous avons demandé à la FCFA de venir commenter pour nous le renforcement récent de la Loi sur les langues officielles suite à l'adoption du projet de loi S-3, l'automne dernier.

Nous avons avec nous la vice-présidente de la FCFA, madame Lise Routhier-Boudreau, ainsi que madame Diane Côté, directrice des Liaisons communautaires et gouvernementales. Mesdames, la parole est à vous. Vous avez dix minutes pour faire une présentation et nous poursuivrons par la suite avec nos questions.

Lise Routhier-Boudreau, vice-présidente, Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada : Je vous remercie, madame la présidente. Permettez-moi tout d'abord de vous remercier de l'invitation à prendre la parole devant vous aujourd'hui. Le dossier que vous étudiez présentement, soit les tenants et aboutissants du renforcement de la Loi sur les langues officielles est d'une importance capitale pour les communautés francophones et acadienne.

La FCFA juge qu'il est essentiel pour les communautés francophones et acadienne d'être proactives sur les enjeux reliés à la mise en œuvre de la nouvelle partie VII. Nous avons donc profité lors de notre assemblée générale annuelle, cette fin de semaine, pour entamer, avec l'aide de nos panelistes, Mme Dyane Adam et Me Michel Doucet, une réflexion sur cette question avec nos membres et invités.

Commençons par le libellé de la nouvelle partie VII où il est question de l'engagement du gouvernement fédéral à favoriser l'épanouissement des communautés francophones et anglophones du Canada. La partie VII comprend désormais l'énoncé suivant :

Il incombe aux institutions fédérales de veiller à ce que soit prises des mesures positives pour mettre en œuvre cet engagement.

Il est donc clair que même si Patrimoine canadien conserve son rôle de coordination ce sont désormais toutes les institutions fédérales qui sont responsables d'agir pour favoriser l'épanouissement des communautés francophones et acadienne, appuyer leur développement et promouvoir la reconnaissance et l'usage du français dans la société canadienne.

Voilà pour le principe de base. Maintenant, quelles sont concrètement les attentes des communautés? Elles se résument, en gros, à trois points : tout d'abord, la question de la consultation des communautés et du développement de nouvelles relations basés sur la collaboration et le partenariat; ensuite, l'obligation des institutions fédérales d'agir en prenant des mesures positives; finalement, la reconnaissance de l'égalité du français et de l'anglais et la promotion active de la dualité linguistique au Canada.

Commençons par la question de la consultation des communautés. Pour nous, il s'agit de l'étape initiale de base qui pourrait s'adresser plus particulièrement aux institutions dont le mandat ne touche pas ou touche peu le développement des communautés. En ce qui concerne les institutions dont le mandat traverse plus directement les priorités de développement des communautés, il faut aller beaucoup plus loin que la consultation. J'y reviendrai plus loin.

Il n'en demeure pas moins que nous nous attendons à ce que la consultation, peu importe l'institution fédérale qui la réalise, respecte certains paramètres. D'ailleurs, lorsqu'on parle de cette question avec nos partenaires gouvernementaux, il y a toujours un certain malaise dans ce qu'implique réellement le fait de « consulter les communautés ».

La consultation, pour nous, se fonde sur le développement d'un dialogue continu et d'une relation de confiance entre les institutions fédérales et les organismes porte-parole des communautés. Cette collaboration continue permettra de mieux identifier les circonstances que requiert une institution plus large de la communauté. Elle permettra aussi d'établir une base de communication et de dialogue constructifs et une meilleure compréhension commune des enjeux.

Certaines balises de base sont essentielles au niveau de la consultation. L'institution fédérale qui consulte doit d'abord identifier clairement les objectifs et les résultats attendus et expliquer à la communauté la démarche qui sera entreprise. Elle doit également fournir à la communauté les ressources nécessaires, par exemple en termes d'information et de recherche. Enfin, et ceci est très important, elle doit prévoir un délai raisonnable afin que la ou les communautés aient le temps de prendre connaissance de la documentation et de se concerter.

Par ailleurs, la consultation n'est jamais aussi importante que ce qui est fait avec les informations recueillies. Les communautés doivent pouvoir comprendre comment leur participation a servi, éclairé ou influencé les décisions dans un contexte de consultation. Il est également essentiel qu'elles puissent comprendre, le cas échéant, pourquoi leurs recommandations ou leurs commentaires n'ont pas été retenus et quelles mesures alternatives seront prises par l'institution fédérale.

Mais surtout la nouvelle partie VII doit nous permettre d'aller beaucoup plus loin. Elle doit permettre aux communautés de développer les relations de collaboration et de partenariat avec les institutions fédérales, particulièrement celles dont le mandat touche directement au développement. Elle doit inciter les institutions fédérales à associer les communautés et à faciliter leur participation dans l'élaboration des politiques publiques qui ont un impact sur leur développement. D'ailleurs, lors de notre assemblée générale cette fin de semaine, la commissaire aux langues officielles nous a encouragés à nous contenter de rien de moins qu'une telle participation à tous les niveaux.

Au cours des dernières années, des mécanismes de gouvernance partagée ont vu le jour dans certains secteurs, je pense notamment au comité consultatif mis sur pied par Santé Canada, ainsi qu'au comité directeur Citoyenneté et Immigration Canada pour les communautés de langues officielles en situation minoritaire. Cette structure de gouvernance partagée laisse entrevoir cette participation accrue des communautés à l'élaboration des politiques. C'est dans ce sens qu'il faut dépasser la consultation sur les besoins.

La mise en œuvre de la nouvelle partie VII devrait permettre de renforcer les mécanismes de gouvernance partagée qui existe déjà et surtout d'en créer de nouveaux avec d'autres institutions fédérales.

En deuxième lieu, lorsqu'on parle de l'obligation des institutions fédérales d'agir, nous croyons que toute nouvelle politique et tout nouveau programme devraient être examinés sous l'angle de l'appui au développement des communautés et sous celui de la promotion de la dualité linguistique. Nous nous attendons à ce que, graduellement, l'ensemble des politiques et des programmes gouvernementaux soient revus pour les rendre compatibles avec les obligations contenues dans la nouvelle partie VII.

Par ailleurs, c'est dans le cadre de cet impératif d'agir que l'on peut entrevoir un grand potentiel de créativité et d'innovation. Par exemple, on pourrait imaginer que le ministère de la défense nationale et le ministère des anciens combattants collaborent avec le consortium national de formation en santé et la société Santé en français dans des initiatives d'échange d'expertise entre les professionnels de la santé. Cela aurait comme retombées possibles de meilleurs services de santé, tant pour les militaires et les anciens combattants que pour les communautés francophones et acadienne.

Enfin, nous accordons beaucoup d'importance à l'obligation des institutions fédérales de promouvoir la reconnaissance et l'usage du français et de l'anglais dans la société canadienne. Conséquemment, il faut d'abord que les institutions fédérales elles-mêmes reconnaissent l'égalité des deux langues sur l'ensemble du territoire. Cela signifie, par exemple, qu'elles adoptent des politiques qui reflètent et valorisent les deux langues officielles, quel que soit le groupe majoritaire sur le territoire. Nous croyons également essentiel que ces institutions, lorsqu'elles transigent avec les provinces et les territoires, s'assurent que les discussions incluent des mécanismes d'appui et d'encouragement qui feront en sorte que les gouvernements provinciaux et territoriaux reconnaissent leurs minorités de langues officielles et fassent la promotion de la dualité linguistique.

En résumé, pour les communautés francophones et acadiennes, le projet de loi S-3 signifie l'obligation pour le gouvernement d'assumer à nouveau le leadership dans l'appui au développement des minorités de langues officielles et dans la promotion de l'usage du français et de l'anglais partout au Canada. Comme le disait très bien la commissaire aux langues officielles lors de l'assemblée générale de la FCFA, cette fin de semaine, il faut que, au cours des cinq prochaines années, les institutions fédérales développent un « réflexe partie VII » en ce qui a trait à l'inclusion de mesures positives dans les politiques et programmes gouvernementaux.

L'engagement du gouvernement envers la dualité linguistique, valeur fondamentale de notre pays, équivaut à un engagement envers l'avenir du Canada.

J'en profite pour noter que la FCFA est actuellement très inquiète du fait que personne n'a encore été désigné pour succéder à Mme Adam, qui, comme vous le savez, quittera ses fonctions au mois de juillet. Il se pourrait qu'on se retrouve pour quelques mois avec une situation sans précédent : un commissariat sans commissaire.

Je n'ai pas besoin de vous dire à quel point cette situation serait problématique. La commissaire actuelle a ouvert plusieurs portes et entrepris un travail important sur plusieurs enjeux qui détermineront l'avenir du régime des langues officielles au Canada, et c'est la continuité au niveau de ce travail qui préoccupe la FCFA. Il nous semble qu'au moment où l'adoption du projet de loi S-3 invite à un renouvellement du leadership du gouvernement fédéral au niveau de la promotion de la dualité linguistique, il faut un commissaire fort, engagé, qui travaillera avec les institutions fédérales autant qu'avec les communautés.

La personne qui succèdera à Mme Adam doit pouvoir maîtriser parfaitement les dossiers lorsque débutera la nouvelle session parlementaire à l'automne. Au moment où la nouvelle partie VII laisse entrevoir des changements significatifs dans le régime des langues officielles au Canada, on ne peut se permettre de déstabiliser ou d'affaiblir le commissariat aux langues officielles. Nous sommes prêts à répondre à vos questions.

Le sénateur Plamondon : La Loi sur les langues officielles vous donne des droits. À partir de ces droits, vous avez des attentes. Si les attentes ne sont pas comblées, c'est qu'il y a un manquement à la loi. Habituellement, lorsqu'il y a un manquement à la loi, il y a une poursuite, des pénalités. Qu'envisagez-vous pour faire respecter la loi?

Mme Routhier-Boudreau : Il est évident qu'on a toujours accès à des recours.

Le sénateur Plamondon : Lesquels?

Mme Routhier-Boudreau : Des recours judiciaires, à tous les niveaux. En même temps, on souhaiterait n'être obligé d'avoir accès à ces recours qu'en dernière instance. Il serait souhaitable de pouvoir établir une façon de collaborer et établir des relations de confiance avec nos partenaires, sans avoir toujours à miser nos gains et nos succès sur le fait d'entreprendre des recours. On souhaite que, avec la partie VII, cela devienne, d'abord et avant tout, une façon pour nous d'établir ces relations de confiance, puisque cela devient maintenant une obligation qui est très clairement définie.

Le sénateur Plamondon : Ma sous-question était justement à ce propos. Si cela fait longtemps que vous êtes consultés, qu'il y a des mécanismes et que vous êtes toujours obligés de prendre des recours, est-ce qu'il ne serait pas temps de radicaliser votre action?

Mme Routhier-Boudreau : Il est évident que, avec ce qui se passe au niveau du projet de loi S-3, ce sera la voie que nous choisirons de prendre mais, encore une fois, si cela s'impose. Je pense qu'il y a une ouverture sans précédent. Il y a eu une sensibilisation assez importante de toutes les instances. On ose espérer qu'on pourra procéder de cette façon pour faire avancer les choses. Peut-être que Diane voudrait rajouter quelque chose à ce sujet.

Diane Côté, directrice, Liaisons communautaires et gouvernementales, Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada : Je pense que la nouvelle loi sur les langues officielles, la nouvelle partie VII, change la donne de façon importante.

Dans un premier temps, oui, cela nous donne la possibilité d'avoir un recours juridique, ce qui n'était pas le cas avant pour cette partie de la loi. Mais en même temps, pour nous, c'est vraiment une occasion, et pour les institutions fédérales aussi, de travailler de plus près, dans un vrai dialogue. Avant, les institutions fédérales avaient toujours l'argument que ce n'était pas exécutoire, que c'était peut-être un souhait politique plutôt qu'une obligation. Maintenant, les institutions fédérales doivent agir. Nous, ce que nous voulons, c'est ouvrir le dialogue pour que cela puisse se faire.

Le sénateur Losier-Cool : Bienvenue à vous deux, cela me fait toujours plaisir de vous revoir.

Ma question ne touchera pas nécessairement, en tout cas pas pour le moment, le projet de loi S-3. Afin d'alimenter nos rapports ici, j'aimerais que vous nous donniez quelques données sur l'organisme qu'est la FCFA; autrement dit, qui représentez-vous? Je sais que vous représentez des associations; est-ce que, à un moment donné, il peut y avoir un chevauchement entre la FCFA et d'autres associations, soit au niveau provincial — je pense à la Fédération des francophones de la Colombie-Britannique ou d'autres. Pourriez-vous nous donner quelques informations sur la FCFA?

Mme Routhier-Boudreau : La FCFA regroupe les organismes porte-parole dans les différentes provinces et territoires, et un bon nombre d'organismes nationaux, qui ont des dossiers au niveau national, à la FCFA.

Le mandat que nous avons est aussi un grand mandat de concertation entre ces différents organismes, pour être en mesure d'établir des orientations favorables à l'épanouissement et au développement des communautés francophones et acadienne du Canada.

Lors de notre assemblée annuelle, on a justement entrepris tout un processus de réflexion et des modalités qui font en sorte qu'on a voulu resserrer nos mécanismes de gouvernance.

Notre intérêt est d'être en mesure de faciliter la concertation entre tous ceux et celles qui sont interpellés par la francophonie et intéressés à faire avancer les dossiers.

Oui, il y a présentement des organismes qui en chapeautent d'autres — vous pensez peut-être à la situation au Nouveau-Brunswick — que l'on souhaite voir travailler de façon parallèle sur les mêmes dossiers. On s'assure d'être en mesure d'établir une consultation assez régulière avec l'ensemble des intervenants francophones. D'ailleurs, au mois de juin prochain, on organise un grand sommet des communautés francophones et acadiennes justement pour interpeller tous les acteurs clés des intérêts des communautés francophones.

Le sénateur Losier-Cool : La FCFA regroupe les associations?

Mme Routhier-Boudreau : Oui.

Le sénateur Losier-Cool : Si je deviens membre d'une association provinciale, que ce soit la FANE ou la SANB, automatiquement, cette association est affiliée à la FCFA.

Est-ce qu'il y a chevauchement avec la SNA, qui n'est pas membre de la FCFA?

Mme Routhier-Boudreau : Je n'ai pas suffisamment de mémoire corporative pour bien comprendre l'historique de l'arrivée de la SNA. Diane serait plus en mesure de répondre à cette question.

Le sénateur Losier-Cool : Ils ont 125 ans cette année.

Mme Côté : La SNA s'est toujours intéressée aux dossiers culturels acadiens mais aussi à la promotion internationale de la communauté acadienne. Dans les années passées, il y a eu un protocole d'entente entre la SNA et la FCFA sur le dossier de la promotion internationale des communautés. Des membres porte-parole de l'Atlantique de l'Acadie sont membres de la SNA et aussi de la FCFA.

Notre mandat consiste à défendre les droits et les intérêts des francophones à travers le pays surtout par une intervention auprès du gouvernement fédéral et une promotion des communautés auprès de l'ensemble de la citoyenneté canadienne.

Par contre, le mandat de la SNA est lié beaucoup plus à l'Acadie. Il n'y a pas vraiment de croisement.

Le sénateur Losier-Cool : Les revendications politiques auprès des gouvernements se font par la SNA ou la FCFA pour les Acadiens?

Mme Côté : La FCFA, pour les Acadiens dans les provinces, est toujours l'organisme porte-parole qui présente ses revendications auprès de sa province. On peut appuyer, mais on n'est jamais porte-parole auprès d'une province. Notre revendication se fait au fédéral.

Le sénateur Tardif : Merci de votre excellente présentation. Je m'intéresse à la partie V de la Loi sur les langues officielles, plus particulièrement à l'impact sur la langue que peuvent occasionner les déménagements de sièges sociaux de régions bilingues à des régions unilingues, comme par exemple celui de la Commission canadienne de tourisme d'Ottawa à Vancouver, l'an dernier.

Quel est l'impact sur ces communautés lorsqu'il y a ces déménagements? Êtes-vous satisfaits des effets que cela entraîne sur vos communautés? Et est-ce qu'on vous consulte lorsqu'il y des déménagements de ce genre?

Mme Routhier-Boudreau : Nous ne sommes pas consultés ou très rarement. Cela nous préoccupe énormément parce que l'impact de ces déménagements est important sur les communautés.

Je peux peut-être me servir de l'exemple du Forum des maires. Cela nous ramène à l'aspect de l'importance de la consultation dont je vous ai fait part dans la présentation. A première vue on ne pense pas qu'il puisse y avoir un impact sur la communauté francophone. Si on prenait le temps de consulter, de faire une recherche, une enquête ou une analyse pour bien comprendre ces impacts, on pourrait éviter des décisions qui ont des conséquences très malheureuses pour la communauté. Effectivement un déménagement de ce genre peut causer un impact chez les travailleurs, sur l'économie et l'ensemble des gens de la communauté.

On disait dans la présentation que cela allait au-delà de la consultation. Il faut vraiment que les communautés soient appelées à partager ces préoccupations lorsque les politiques et les orientations sont prises par le gouvernement.

Le sénateur Tardif : Voyez-vous un lien, dans ces cas, entre les parties IV, V et VII de la loi?

Mme Routhier-Boudreau : Oui, il y a un lien.

Mme Côté : C'est extrêmement important de le souligner par rapport à cette décision de déménagement d'une institution fédérale, dont le siège social était à Ottawa, vers une région officiellement unilingue où les obligations d'application de la loi sont très minces, même selon la partie IV.

Tout s'enchaîne à partir du personnel, qui devra travailler à l'agence, jusqu'aux services offerts au public dans l'ensemble du pays, parce que c'est toujours le siège social. Selon la partie VII, une sensibilisation accrue doit être faite.

Le sénateur Tardif : Croyez-vous qu'il y ait lieu pour le gouvernement d'élaborer une réglementation sur la langue de travail, parce que actuellement, il n'existe qu'un décret temporaire.

Mme Routhier-Boudreau : Il sera important de développer des paramètres selon la situation. Est-ce qu'un règlement peut, de façon unilatérale, s'attaquer à toutes les problématiques dans toutes les situations? Je ne suis pas certaine qu'il y ait une solution pour l'ensemble des situations qui pourraient survenir. Il faut y aller au cas par cas. Cependant, il faut être proactif lorsqu'on entreprend les consultations pertinentes et cela est plus efficace lorsqu'elles ont lieu avant qu'on prenne des décisions de ce genre.

Mme Côté : Les recommandations de la commissaire au cours de la dernière année proposaient un regard d'ensemble sur le régime linguistique. De changer la dynamique de façon à ce que, au lieu de regarder la partie IV, la partie V, la partie VI ou la partie VII isolément, de les regarder comme un tout avec les objectifs de la Loi sur les langues officielles. Lorsqu'on parle de réglementation alors, on devrait la regarder de la même façon. Cela fait longtemps qu'on dit qu'au niveau de la Partie IV, le règlement ne répond plus à la réalité de 2006 et de l'avenir. Il y a déjà une importance à revoir le règlement sous la partie IV. Il serait important de regarder la Loi sur les langues officielles dans son ensemble.

Le sénateur Champagne : Je voudrais d'abord vous rassurer quant au commissaire aux langues officielles. Pas que je sois dans le secret des dieux d'aucune façon, mais je suis certaine qu'il y aura une nomination au moment opportun. Mme Adam est quand même en poste jusqu'à la fin juillet. Il est possible que la personne que l'on nommera soit déjà au courant et fasse du travail en coulisse. Je ne suis pas du tout paniquée par le fait qu'on laisse Mme Adam terminer son mandat en toute quiétude.

C'est peut-être la Québécoise en moi qui se demande comment la FCFA fonctionne face à l'immigration. Au Québec, les immigrants arrivent et ils sont automatiquement appelés à intégrer la vie culturelle francophone. Les enfants sont obligés d'aller à l'école française. Dans le cas des francophones hors Québec et des Acadiens, je sais que vous avez fait du travail avec les immigrants alors j'aimerais que vous nous en parliez un peu plus.

Mme Routhier-Boudreau : Puisque j'arrive à la FCFA et qu'il y a tellement de travail qui a été fait précédemment, je vais d'abord laisser Mme Côté vous parler un peu du dossier de l'immigration jusqu'à aujourd'hui.

Mme Côté : En 2002, on a mis sur pied un comité directeur sur la citoyenneté, l'immigration et les communautés francophones en situation minoritaire. Ce comité a d'abord développé un cadre stratégique pour promouvoir l'immigration francophone dans les communautés à l'extérieur du Québec. On se prépare à déposer un plan stratégique qui aurait dû être déposé ce printemps, mais qui malheureusement n'a pas pu l'être à cause du changement de gouvernement.

Il y a des priorités qui sont énoncées, entre autres promouvoir les communautés francophones à l'étranger, outiller les communautés pour qu'elles puissent mieux accueillir et intégrer les immigrants à l'intérieur des communautés et aussi permettre de créer un réseau entre les diverses communautés dans le dossier de l'immigration. C'est un dossier qui est fort complexe et qui implique plusieurs ministères et institutions fédérales. Actuellement, au comité directeur, plusieurs ministères et agences et aussi des gouvernements provinciaux ont des ententes fédérale-provinciales en immigration.

Maintenant, comment cela se passe dans les communautés? Évidemment, c'est encore assez récent. Il y a des communautés, par exemple en Ontario, qui ont quand même une quinzaine d'années d'immigration francophone, surtout à Toronto et à Ottawa, et d'autres qui sont plus récentes, comme en Alberta, où il y a des communautés très importantes à Edmonton et à Calgary. Il y en a une à Vancouver également.

Nous voulons des centres d'accueil et d'intégration francophones qui permettront à nos gens d'aiguiller les nouveaux arrivants vers les services qui sont offerts par et pour la communauté. Évidemment, les immigrants dont on parle et auprès desquels on fait la promotion actuellement, sont des immigrants provenant des pays de la Francophonie, donc des immigrants qui auraient déjà le français comme langue d'usage.

Le sénateur Champagne : Est-ce que ces gens sont approchés une fois installés au pays? Ou encore, est-ce qu'une organisation comme la vôtre peut se permettre de faire de la promotion dans les autres pays de la Francophonie afin de promouvoir l'immigration dans des régions du Canada où l'on parle français, autre que le Québec? Cela me semblerait intéressant comme idée.

Mme Routhier-Boudreau : Tout à fait. Au printemps dernier, une tournée internationale a été entreprise et lorsqu'on présentait le grand nombre de communautés francophones au pays sur la carte, les gens étaient très surpris. C'est peu connu. Nous entreprenons effectivement un grand travail de promotion à ce niveau.

La problématique d'augmenter la capacité de nos organismes et des communautés à accueillir des immigrants est encore très importante. Malheureusement, nous ne sommes pas en mesure d'offrir tous les services auxquels ces gens ont droit. Cela demeure un défi très important.

La présidente : Quelle est la santé des communautés que vous représentez? Vos membres, les francophones et les Acadiens du Canada sont dans quel état présentement? Quels seraient leurs plus grands défis d'après vous?

Mme Routhier-Boudreau : Ce qui nous aiderait énormément se situe sur le plan de la recherche. Il y a énormément d'initiatives qui sont prises au niveau gouvernemental pour entreprendre différentes recherches qui nous permettraient de bien connaître l'état de l'ensemble de nos communautés. Mais malheureusement, souvent, il n'y a pas de questions particulières qui nous permettraient d'aller chercher les données pertinentes sur les francophones. Les recherches sont faites pour la majorité.

Nous sommes souvent dans l'obligation de faire des constats, mais c'est difficile puisque la recherche est basée sur les données de la majorité. S'il y avait des interventions particulières, cela pourrait grandement favoriser notre situation parce qu'on pourrait entreprendre des démarches spécifiques pour les endroits qui sont ciblés.

Le sénateur Robichaud : Vous avez dit lors de votre présentation que pour avoir une consultation significative, il faut que les institutions croient en l'égalité des deux langues. J'y crois aussi. Pourriez-vous lancer des fleurs aux institutions qui le méritent et aussi nous indiquer les institutions qui ont un certain travail à faire avant de se mériter des fleurs?

Mme Routhier-Boudreau : Sans vous donner une liste d'institutions, ce qu'on identifie comme étant un grand problème, c'est toute la question de la promotion de la dualité linguistique, non seulement auprès des communautés francophones, mais auprès de l'ensemble des Canadiens et des Canadiennes. Je suis enseignante de carrière et pour avoir travaillé pendant 35 ans dans des écoles ou des sections de langue française, je peux vous dire que pour nos jeunes, ce n'est vraiment pas à la mode de parler français.

Il fallait vraiment travailler d'arrache-pied pour être capable de leur faire sentir cette fierté, parce que ce n'est pas valorisé et nous pouvons ressentir cela dans un grand ensemble d'institutions et de domaines. La question de la promotion de la dualité linguistique est centrale dans les activités que l'on entreprend et le gouvernement a un leadership important à exercer sur ce plan. Trop souvent, on se limite à desservir la population francophone quand on est dans l'obligation de le faire, mais lorsqu'on s'adresse à des populations ou à des forums où les intervenants sont majoritairement anglophones, il n'y a pas de valorisation de la dualité linguistique. Ce serait déjà un premier pas que de le faire.

Au niveau des institutions, je crois que Diane serait davantage en mesure de vous répondre.

Mme Côté : Il est difficile de faire un bulletin des institutions fédérales à ce stade. Par contre, l'exemple cité plus tôt et d'ailleurs contre lequel on a porté plainte est celui ayant trait au recensement. Statistique Canada avait opté, concernant l'envoi de son long questionnaire, à une distribution dans les deux langues officielles seulement dans les régions où il y avait plus de 5 p. 100 de francophones.

Le recensement est l'une des rares occasions où le gouvernement canadien prend contact avec l'ensemble de sa population et nous trouvions cela inacceptable que tous les Canadiens et les Canadiennes ne reçoivent pas leur questionnaire de recensement dans les deux langues. C'est tout simplement une question de normalisation du français et de l'anglais dans la société.

Le sénateur Robichaud : D'après vous, nous n'en sommes pas encore là, mais cela va-t-il prendre du temps?

Mme Côté : C'est une question de leadership, de volonté et de travail. Je ne pense pas que la réponse sera donnée en un jour et que ce sera terminé. C'est toujours quelque chose à poursuivre.

Le sénateur Robichaud : Oui, certainement. Je suis du Nouveau-Brunswick et Acadien; et même si cette province est la seule bilingue au pays, tout n'est pas fait. Il faut continuellement être vigilant. Vous avez parlé de valoriser la langue française. Malheureusement, je crois que souvent, nous les francophones, n'insistons pas assez lors de nos communications auprès des institutions, pour être servis dans notre langue. On est très accommodants.

On a récemment parlé à madame la commissaire et elle disait qu'il y avait certainement un rôle de leadership de la part des chefs de file dans les institutions pour inviter les gens à se servir de leur langue en milieu de travail. Nous avons encore un bon bout de chemin à faire sur ce plan. La solution n'est pas facile.

On a également parlé du déménagement de la Commission du tourisme à Vancouver. Des gens vous ont-ils appelés pour commenter de façon positive ou négative sur ce déménagement?

Si on pense au déménagement du ministère des Affaires des anciens combattants à Charlottetown à l'Île-du-Prince- Édouard — et l'Île-du-Prince-Édouard n'est pas une région désignée bilingue — les gens de cette région nous disent que la communauté francophone de l'Île-du-Prince-Édouard en a grandement profité. Pourrait-on voir la même chose à Vancouver?

Bien sûr, je ne veux pas contrebalancer les droits des gens qui étaient à la Commission parce qu'il y a très peu de francophones qui ont déménagé, mais il faudrait essayer de trouver un équilibre entre leurs droits et les droits des gens de la communauté qui trouveront un certain renouveau avec le déménagement de ces francophones.

Mme Côté : Vancouver et Charlottetown, en termes de populations et d'activités économiques, sont toutefois deux villes très différentes; et nous n'avons pas eu d'écho jusqu'à maintenant d'une façon ou d'une autre de la part de la communauté.

Le sénateur Comeau : Je m'intéresse au fait que la Nouvelle-Écosse est l'une des seules provinces à ne pas avoir encore signé l'entente avec le ministère du Patrimoine canadien et qu'il semble y avoir encore des ennuis concernant la signature de l'entente entérinée par toutes les autres provinces.

Avez-vous eut l'opportunité d'en discuter avec les autorités de la Fédération acadienne de la Nouvelle-Écosse afin de savoir si des progrès ont été faits concernant cette entente?

Mme Routhier-Boudreau : Il y a effectivement encore des difficultés, bien que les pourparlers se poursuivent. Évidemment, il y a beaucoup de problématiques, pas seulement en Nouvelle-Écosse, mais un peu partout, sur toute la question du renforcement des capacités au niveau communautaire.

En Nouvelle-Écosse, présentement, on ne sent pas que ces préoccupations sont suffisamment ciblées pour être capables d'en arriver à une entente, mais la volonté est là. Arrivera-t-on avant peu à un règlement qui sera satisfaisant pour l'ensemble des parties? On n'en est pas là encore.

Le sénateur Comeau : Je note aussi que la fédération en Alberta semble avoir des problèmes semblables. Les priorités de la communauté albertaine ne sont pas les mêmes priorités que celles des fonctionnaires, surtout en ce qui concerne les priorités pour la santé en Alberta. Les fonctionnaires n'ont pas encore compris le rôle valable que nos fédérations, dans chacune de nos provinces, ont à offrir au gouvernement fédéral. L'Alberta et la Nouvelle-Écosse sont-ils des cas isolés, ou va-t-on voir un peu plus de cela partout au Canada?

Mme Routhier-Boudreau : Effectivement, il existe une problématique importante sur ce plan. On en a un peu parlé dans la présentation. C'est toute la question d'être en mesure de développer une relation de confiance avec les intervenants qui représentent le gouvernement dans les différentes provinces et territoires. Malheureusement, on a trop souvent l'impression d'être parfois consultés que pour être consultés, mais que finalement les décisions prises ne sont pas toujours celles qui coïncident avec les priorités déterminées.

On comprend très bien que les priorités des communautés ne peuvent pas toujours être respectées, mais il est important d'être capable de comprendre pourquoi. Dans le cas qui vient d'être mentionné en Alberta — je pense que cela fait partie de la problématique — si les priorités des communautés ne peuvent pas être respectées, il faut comprendre pourquoi et il faut donner par la suite aux communautés des indications à savoir à quel endroit il faut intervenir si cela ne relève pas d'un domaine en particulier.

Le sénateur Comeau : M. Johnson semblait ne pas mâcher ses mots lors de ses commentaires à ce sujet. C'est un peu inquiétant lorsque ces gens, en grande partie des bénévoles qui sont très attachés à leur communauté et qui en connaissent les besoins sont rendus au point de se parler par l'entremise des médias. Surtout depuis que le projet de loi S-3 est passé et que l'on doit examiner les relations entre les fonctionnaires fédéraux et les communautés.

Mme Routhier-Boudreau : Je suis confiante quant au fait que S-3 nous donnera peut-être, justement, cette ouverture pour entreprendre des discussions comme celle-là, qui auront un effet bénéfique sur l'ensemble du travail qu'on a à faire en partenariat et en collaboration avec les instances.

Le sénateur Comeau : Je vous remercie d'être venue comparaître devant nous aujourd'hui. J'espère que vous voudrez bien m'excuser d'avoir dû m'absenter pendant un moment aujourd'hui; soyez assurées que je lirai très attentivement le compte rendu des échanges de cet après-midi.

Le sénateur Losier-Cool : Vous avez tenu cette fin de semaine la réunion annuelle de vos associations. Pour faire suite à la question de la présidente, est-ce que ces associations membres sont positives, confiantes dans l'avenir? Est-ce qu'elles ont en leur sein une relève? Pour ce qui est du financement, lorsqu'on les rencontre chez nous, que ce soit la Fédération des femmes canadiennes françaises ou d'autres, on parle toujours du financement; on a de la difficulté à fonctionner et à faire connaître spécifiquement S-3 et ce que cela va signifier maintenant pour ces communautés. Comment se sentent vos membres à ce point de vue?

Mme Routhier-Boudreau : Au niveau du financement, il est évident qu'il y a un problème majeur. Le renforcement des communautés est une priorité pour la FCFA. On s'attaquera à ce problème de façon importante durant les prochaines années. Il est clair que l'appui à ce niveau est loin d'être suffisant.

En revanche, il y a une grande détermination et une grande volonté de la part des communautés de faire le travail qui s'impose. Ce qui est important pour l'ensemble des communautés, pour la FCFA, c'est de travailler de façon concertée pour être capable de se donner des orientations, des plans de développement et des plans stratégiques qui maximiseront nos ressources et qui nous permettront d'avoir une portée importante au niveau de nos actions et de notre influence.

On a vu en fin de semaine que l'ensemble des personnes présentes veut travailler dans ce sens. Nous voulons démontrer les résultats qu'on atteint et démontrer concrètement que nous contribuons de façon importante à l'essor du Canada en tant que francophones. Et c'est certainement avec cette orientation que l'on aborde les prochains mois et les prochaines années.

Le sénateur Losier-Cool : Merci, vous avez là tout un défi; une réalité et un beau défi.

Mme Routhier-Boudreau : Merci.

Le sénateur Tardif : En tant qu'Albertaine, j'aimerais remercier le sénateur Comeau d'avoir soulevé des questions très importantes concernant la détérioration des relations entre Patrimoine canadien et l'Alberta.

J'aimerais revenir sur toute la question des changements administratifs qui sont survenus depuis le 23 janvier. Comment voyez-vous les effets d'un transfert de responsabilités du Conseil privé à Patrimoine canadien pour la responsabilité des langues officielles, et comment voyez-vous cela pour votre organisme?

Mme Routhier-Boudreau : Je dois vous avouer que nous avons certaines préoccupations face au changement établi. Nous sommes un peu inquiets de ce qu'il puisse y avoir une confusion dans les dossiers de l'un et de l'autre. Pour nous, avoir maintenant différents intervenants modifie aussi notre façon de faire. Il y a toute une adaptation à faire sur ce plan.

Cela nous a aussi pris un peu par surprise parce que, au niveau du Conseil privé, on voyait cela comme étant un moyen efficace de transiger avec les différentes instances. Actuellement, on travaille de la même la façon et l'on continue à souhaiter que ce soit, évidemment, très efficace, mais il nous reste encore, pour l'heure, à nous approprier la maîtrise de ce nouveau fonctionnement.

Le sénateur Plamondon : Dans l'une de vos dernières phrases, vous avez dit : «J'ai confiance qu'avec S-3, peut-être... ». Pour moi dire « j'ai confiance » puis «peut-être» tout de suite après, cela n'inspire pas confiance ! Avez-vous un plan d'action?

Mme Routhier-Boudreau : C'est effectivement notre dossier prioritaire pour les mois qui viennent. La première étape était pour nous de consulter nos organismes pour nous assurer d'avoir un plan concerté par rapport aux démarches qui doivent être entreprises à ce niveau.

On avait aussi comme invité M. Graham Fraser qui nous a parlé un peu de ses derniers écrits et qui mentionnait le problème selon lequel les communautés ont peut-être beaucoup trop travaillé en sourdine dans les années précédentes. Je peux vous dire que pour notre part, notre mandat cette année était de bien faire valoir l'importance du travail que nous faisons pour et avec les francophones. Je suis certaine que vous allez entendre parler de nous et il n'y a pas de «peut-être» là-dedans.

La présidente : Mesdames, merci beaucoup pour votre présentation.

Mme Routhier-Boudreau : Merci à vous.

(La séance est suspendue.)

(La séance reprend.)

La présidente : Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant l'honorable John Baird.

[Traduction]

Bienvenue, monsieur le ministre, et merci de vous joindre à nous aujourd'hui. L'honorable John Baird est président du Conseil du Trésor. Il est accompagné de représentants de l'Agence de gestion des ressources humaines de la Fonction publique du Canada de même que des représentants de l'École de la fonction publique du Canada, M. David Waung et Sylvain Dufour.

L'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada est chargée de l'élaboration et de la coordination des politiques et des règlements dans la fonction publique fédérale qui concernent les communications avec le public et la prestation de services, la langue de travail et la participation des Canadiens d'expression française et d'expression anglaise.

[Français]

L'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada doit fournir une orientation générale à toutes les institutions fédérales assujetties à la Loi sur les langues officielles.

Quant à l'École de la fonction publique du Canada, elle assure la formation linguistique des fonctionnaires fédéraux et collabore avec les organismes centraux pour examiner et élaborer une approche moderne à l'égard du bilinguisme et de l'apprentissage des langues officielles. L'École regroupe, depuis 2003, les activités de trois anciens organismes fédéraux, Formation et perfectionnement Canada, Formation linguistique Canada et le Centre canadien de gestion.

L'honorable John Baird, C.P., député, président du Conseil du Trésor : Je vous remercie, madame la présidente. Honorables sénateurs, c'est un grand plaisir pour moi d'être ici parmi vous pour parler de la fonction du Conseil du Trésor.

[Traduction]

Je tiens à vous remercier de m'avoir invité à prendre la parole devant votre comité aujourd'hui. Vous serez nombreux à vous poser des questions au sujet de mes responsabilités et des enjeux qui intéressent le comité. Je serai heureux de répondre à vos questions après ce bref mot d'ouverture. Je tâcherai d'être bref pour que nous ayons l'occasion de dialoguer et que vous ayez la possibilité de poser des questions.

Lorsque le premier ministre m'a demandé d'assumer les fonctions de président du Conseil du Trésor, j'ai dû relever un défi de taille, à savoir, mener à bien une des principales priorités du nouveau programme du gouvernement. Nous devions, en premier lieu, instaurer la Loi fédérale sur l'imputabilité. Le projet de loi à la Chambre se déroule bien et nous espérons qu'il sera soumis sous peu au Sénat pour fins d'étude. L'adoption de cette loi devrait nettement contribuer à restaurer la foi des Canadiens et Canadiennes en leur gouvernement. Ils verront vraiment leurs parlementaires collaborer pour faire renaître la confiance dans les institutions publiques et le processus politique. Cette loi rétablira une solide culture fondée sur les valeurs et l'éthique dans la fonction publique, ce que j'appelle une culture de responsabilisation.

Je suis conscient, cependant, que même si ces priorités sont d'une importance cruciale, il y en a d'autres sur lesquelles je dois me pencher en tant que président du Conseil du Trésor.

[Français]

En tant que président du Conseil du Trésor, j'ai d'importantes responsabilités à l'égard des langues officielles dans la mesure où celles-ci affectent les employés fédéraux, c'est-à-dire fait en sorte que les Canadiens et Canadiennes peuvent se faire servir dans la langue de leur choix, tel qu'il est stipulé dans la Loi et les règlements, et fait en sorte que les institutions fédérales reflètent la dualité linguistique du Canada et favorisent l'équité en milieu de travail de façon à ce que les Canadiens et Canadiennes de langue française et anglaise puissent profiter de chances égales d'avancement et, le cas échéant, travailler dans la langue de leur choix.

Permettez-moi de reformuler les énoncés prononcés au cours des dernières semaines par mes collègues du Cabinet, notamment que le gouvernement que je représente s'est engagé à raviver les langues officielles au sein de la fonction publique et à promouvoir la dualité linguistique.

[Traduction]

Comme le comité en est conscient, dans le domaine des langues officielles, il existe plusieurs autres partenaires qui collaborent à l'échelle de la fonction publique pour administrer la Loi sur les langues officielles. J'ai apporté avec moi des exemplaires d'un tableau où sont décrits les rôles des intervenants clés.

Mon portefeuille comprend les ministères du Secrétariat du Conseil du Trésor, l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique et l'École de la fonction publique du Canada. Ces institutions jouent un rôle important dans la promotion des services publics qui dirigent par l'exemple. L'Agence appuie le Conseil du Trésor dans l'application des politiques, directives et règlements en matière de langues officielles. Elle surveille les activités dans quelque 200 institutions fédérales qui sont assujetties à la loi, conformément à la partie VIII de la Loi sur les langues officielles.

L'École de la fonction publique est chargée de l'élaboration de produits d'apprentissage novateurs et de la prestation de services et de formation de qualité à l'intention des fonctionnaires fédéraux. Je dois avouer que j'apprends constamment une multitude de choses concernant les responsabilités en matière de langues officielles de chacune de ces institutions et que je m'y applique bien.

Ce printemps, j'ai eu l'occasion de rencontrer la commissaire aux langues officielles à deux reprises. Nous avons abordé la prestation des services bilingues et la façon de l'améliorer. Nous avons discuté du plan d'action pour les langues officielles et de la façon dont le gouvernement fédéral appuie actuellement le développement de nos communautés linguistiques minoritaires. J'ai dit à la commissaire que nous étudierons très attentivement les suggestions et les recommandations qu'elle a formulées il y deux semaines dans son dernier rapport annuel.

[Français]

Ce matin, j'ai présenté au Parlement le 17e rapport annuel sur les langues officielles du président du Conseil du Trésor pour la période 2004-2005. Ce document donne une bonne vue d'ensemble des programmes de langues officielles dans les institutions assujetties à la Loi.

[Traduction]

Bien que nous n'ayons pas atteint tous les objectifs que nous nous étions fixés, le rapport fait état des progrès énormes que nous avons réalisés pour faire accepter les langues officielles comme réalité dans la Fonction publique fédérale. Par exemple, voici comment se présente la situation actuelle, comparée à celle de 1978 : la plupart des employés satisfont aux exigences linguistiques rattachées à leur poste au moment d'y être nommé — soit 88,5 p. 100 en 2004-2005 par rapport à 69,7 p. 100 en 1978. Les superviseurs possèdent un niveau de compétence considérablement plus élevé dans la langue officielle. Environ 50 p. 100 d'entre eux avaient obtenu le niveau « C », soit le niveau linguistique le plus élevé en 2004-2005, comparativement à 12 p. 100 en 1978. Dans l'ensemble, on constate que 85 p. 100 des postes bilingues qui ont un rôle de supervision satisfont aux exigences linguistiques du poste, comparativement à 64 p. 100 en 1978. De toute évidence, la capacité s'accroît et s'améliore.

Cependant, il ne faut pas conclure que tous nos objectifs sont atteints, car le rapport souligne des difficultés persistantes. Il reste encore beaucoup à faire pour que les valeurs du programme des langues officielles soient acceptées.

Le rapport décrit également plusieurs initiatives ministérielles courantes qui pourraient vous intéresser particulièrement. Voici un exemple de la Nouvelle-Écosse. L'Agence du revenu du Canada a travaillé avec l'Université Sainte-Anne et le Collègue de l'Acadie afin de mettre au point des méthodes d'apprentissage à l'aide de vidéoconférence de façon que les fonctionnaires puissent maintenir ou acquérir des compétences linguistiques. Nous pourrions avoir un exemple à la page 22 de la version anglaise du rapport.

[Français]

Nous avons accru le niveau de contrôle du rendement linguistique des institutions fédérales. Pour ce faire, nous avons appliqué un nouveau modèle de responsabilisation. Cette démarche s'ajoute à plusieurs vérifications régulières qui ciblent des domaines prédéterminés en vue de les améliorer.

[Traduction]

Il y a beaucoup d'autres initiatives intéressantes mentionnées dans le rapport. Je vous invite à consulter le document.

J'ai voulu en savoir davantage sur les fonctionnaires et les investissements consentis pour améliorer leur maîtrise des langues officielles par l'entremise de l'École de la fonction publique du gouvernement. Le gouvernement s'est engagé à instaurer une culture de bilinguisme dans la fonction publique. Les employés de la fonction publique auront un accès accru à la formation grâce à huit fournisseurs du secteur privé dans la région de la capitale nationale et a dix accords conclus avec les collèges et universités du pays. Au cours des prochains mois, je compte réfléchir davantage sur ce dossier et je serai intéressé à connaître vos pensées au sujet des défis et des problèmes de façon à alimenter ses réflexions.

En ma capacité de président du Conseil du Trésor, je suis heureux de favoriser une culture propre à la fonction publique qui est solide et qui respecte ses valeurs essentielles. Je crois fermement que la force du Canada repose sur son engagement à promouvoir des chances égales pour tous, sur ses valeurs d'équité, de respect et d'inclusion. Le programme des langues officielles est basé sur ces valeurs. La fonction publique doit jouer un rôle exemplaire à cet égard. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions et d'obtenir vos conseils et avis sur la meilleure façon d'y parvenir.

[Français]

Le sénateur Tardif : Merci, Monsieur le ministre, pour votre présentation. Je m'intéresse à la question de la partie V de la loi, c'est-à-dire la partie qui touche la langue de travail des employés et aussi aux effets du déménagement d'un siège social d'une région bilingue à une région unilingue, plus particulièrement, au déménagement de la Commission canadienne du tourisme.

Lors de la comparution de votre collègue, le ministre de la Justice, nous lui avons demandé s'il envisageait la possibilité de moderniser la réglementation et, plus particulièrement, s'il n'était pas préférable d'adopter une réglementation pour la partie V de la loi, plutôt que d'intervenir de façon ponctuelle ou ad hoc, comme c'est le cas présentement pour la Commission canadienne du tourisme. Il a dit, et je cite :

La langue de travail des fonctionnaires est sous la responsabilité du président du Secrétariat du Conseil du Trésor. Celui-ci est appuyé dans ses responsabilités par l'Agence de gestion des ressources humaines de la Commission de la fonction publique du Canada.

Il a suggéré que l'on vous pose la question. Envisagez-vous la possibilité d'élaborer une réglementation sur la langue de travail?

M. Baird : Je vais faire quelques commentaires et demander à ma collègue, Mme Boudrias, de donner une réponse plus élaborée. Je suis le représentant d'un nouveau gouvernement qui n'a que cinq mois et j'ai travaillé très fort dans deux domaines. Premièrement, le projet de loi sur l'imputabilité et deuxièmement, les mesures contenues dans le budget fédéral. Lorsque la présente session se terminera, j'aurai plus de temps pour étudier les dossiers auxquels vous faites référence. En tant qu'ancien ministre provincial, je sais qu'il est toujours important de regarder comment les règlements et les programmes fonctionnent et si des améliorations sont nécessaires.

De temps en temps, il y a une différence entre la loi et ce qui suit. Il est important de voir si on est en train de réaliser toutes nos obligations maintenant, avant d'en faire plus. Bien sûr, le rapport que j'ai déposé au Parlement, c'est avec le gouvernement précédent et il y avait un appui très fort pour réaliser les objectifs de cette loi, spécialement dans la fonction publique.

Monique Boudrias, présidente intérimaire, Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada : Pour l'instant, nous croyons que la mesure temporaire que nous avions prise lors du déménagement vers Vancouver de la Commission canadienne du tourisme est suffisante. Nous devrons rediscuter avec notre ministre pour savoir si des initiatives additionnelles devraient être prises, si vraiment la méthode de transition est suffisante. Pour l'instant, nous avons été en mesure de faire de l'excellent travail avec les employés de la Commission canadienne du tourisme et leurs droits quant à la langue de travail ont été maintenus dans la situation actuelle.

Tant qu'il n'y aura pas d'autres initiatives ajoutées à ceci, la mesure temporaire est suffisante. Nous pourrions en discuter plus longuement si d'autres initiatives s'ajoutaient.

M. Baird : Ce serait une bonne idée de penser à déménager les entreprises gouvernementales dans la région de la capitale nationale. Il faut bien réfléchir avant de déménager en dehors de la capitale nationale.

Le sénateur Tardif : Je vous remercie de cette intervention, parce que souvent, vous l'avez bien dit, avant d'agir, il vaut mieux être proactif et anticiper quelles sont les conséquences. Ce serait important d'avoir des réglementations qui couvrent ces cas, plutôt que de revenir sur la question et de mettre en place des mesures temporaires chaque fois qu'il y a un déménagement.

M. Baird : Ce n'est pas quelque chose de proactif, c'est une partie de la décision. Est-ce que cela peut fonctionner dans une autre région qu'Ottawa? Ce n'est pas quelque chose sur laquelle il faut réfléchir après, cela doit faire partie de la décision.

Le sénateur Tardif : Est-ce que votre gouvernement serait prêt à revoir la liste des régions bilingues?

M. Baird : Je n'y ai pas encore réfléchi.

Diana Monnet, vice-présidente, Langues officielles, Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada : Jusqu'ici non, on ne s'est pas penché sur une redéfinition.

M. Baird : Je pense qu'il n'y a aucune différence entre nos politiques et celles du gouvernement précédent. Je n'ai pas vu d'avis selon lesquels le gouvernement précédent aurait fait un mauvais choix. Lorsque j'étais ministre des Affaires francophones, on a augmenté le nombre des régions. Il est important de regarder beaucoup plus que simplement les réalités de la population dans certaines régions.

Le sénateur Tardif : Je crois qu'il y a beaucoup de changements dans l'espace et le temps, depuis cette première définition.

M. Baird : Beaucoup d'immigrants parlent français. J'ai visité une école française dans le centre-ville de Toronto. Entre 30 et 40 différents pays y étaient représentés. Le visage de notre francophonie change beaucoup. Dans mon comté de la banlieue ouest, lorsque j'ai été élu comme député provincial pour la première fois, il n'y avait aucune école française, mais depuis que j'ai quitté on en retrouve maintenant deux. Cela commence à changer.

Le sénateur Comeau : Je voudrais parler de la partie VII — les services au public et la formation linguistique. Je suis content que vous ayez fait référence dans votre rapport annuel au fait que l'Agence de revenu avait réalisé un projet avec l'Université Ste-Anne et le Collège de l'Acadie pour évaluer les possibilités de l'éducation à distance. L'École de formation linguistique est en train d'élaborer un programme de formation qui sera administré par une école de la fonction publique plutôt que par des écoles déjà existantes. Il y a quelques exemples en Alberta et au Québec où la formation linguistique se fait déjà.

Pourquoi le gouvernement fédéral ne ferait-il pas la formation à partir de ces écoles déjà existantes qui ont une expertise en ce domaine? Pourquoi les fonctionnaires ne suivraient-ils pas un enseignement dans une école privée? En plus de se perfectionner dans une des deux langues officielles, les fonctionnaires seraient ainsi exposés aux difficultés que rencontrent les communautés en situation minoritaire et deviendraient de ce fait plus sensibilisés à la réalité de ces communautés. Ils comprendraient les implications du projet de loi S-3 de faire du Canada un pays qui reconnaît la dualité linguistique et qui en fait la promotion.

M. Baird : Le travail de sensibilisation est très important pour nos fonctionnaires ainsi que pour tous les Canadiens. En Ontario, la province d'où je viens, les francophones dans le comté de Prescott-Russell vivent dans un environnement majoritairement anglophone. Cependant, une des priorités du programme de formation linguistique est d'atteindre un haut niveau de connaissance de l'autre langue. C'est très important. Je prends votre commentaire en note.

[Traduction]

David Waung, vice-président, registraire, École de la fonction publique du Canada : J'aimerais préciser que nous travaillons en collaboration avec le secteur privé, les universités et les collègues pour fournir la formation linguistique. Nous avons conclu dix protocoles d'entente avec des universités et collèges partout au pays, et nous travaillons à accroître ce nombre afin de pouvoir offrir une formation linguistique de qualité qui répond aux besoins de la fonction publique.

Le sénateur Comeau : Ce que j'essaie de dire, c'est qu'un grand nombre de ces écoles sont très efficaces. Elles possèdent une vaste expérience et une longue histoire. Elles n'ont pas pris de raccourci pour en arriver là où elles sont aujourd'hui. Dans le cadre du processus, le fonctionnaire qui apprend une deuxième langue dont la connaissance est obligatoire se trouve également exposé aux réalités. Au lieu de fréquenter une école quelque part avec d'autres fonctionnaires, il fréquente une école en compagnie d'autres Canadiens. Le fait de se trouver dans une collectivité loin de la bulle d'Ottawa les expose à la réalité telle qu'elle existe. Nous entrons dans une toute nouvelle ère avec le projet de loi S-3. La fonction publique doit reconnaître que la notion de services au public a complètement changé aujourd'hui.

[Français]

M. Baird : J'ai reçu ma formation linguistique en français à l'Université Queen's. Le français n'est pas ma première langue. J'ai rencontré un ministre à Paris qui m'a dit que pour un francophone, mon anglais était très bien. Il était bien sûr un bon politicien.

Le sénateur Robichaud : Les témoins ont souligné l'importance de valoriser le français en milieu minoritaire. Dans votre rapport, vous dites que les superviseurs, les membres de la haute gestion, à divers échelons, doivent exercer davantage de leaderships en créant un milieu de travail qui valoriserait la dualité linguistique au quotidien et qui encouragerait les employés à utiliser la langue officielle de leur choix. Comment fait-on cela?

M. Baird : Avec du leadership, premièrement. Au début de mon mandat, à Rideau Hall, j'ai demandé à prêter serment en anglais et en français. Beaucoup de mes collègues ont fait la même chose. C'est important d'être proactif dans la fonction publique.

Mme Boudrias : Je voudrais partager avec vous une expérience très positive qui a eu lieu à Moncton avec une équipe d'employés de l'Agence de développement économique de l'Atlantique. Les employés, avec le comité de gestion de l'organisation, ont été reconnus, la semaine dernière, dans le cadre de la Semaine de la fonction publique, pour avoir mis sur pied les initiatives du Mercredi en français.

Cela donne l'occasion aux gens de langue anglaise de pratiquer leur français et vice versa afin qu'il y ait un échange entre les deux communautés linguistiques. C'est particulièrement bon pour les gens qui reviennent de formation linguistique qui, s'ils n'ont pas la chance de pratiquer, perdent la deuxième langue qu'ils ont apprise. C'est bon pour le maintien de l'emploi.

Ce sont des initiatives comme cela qu'on reconnaît à travers le Canada a chaque année. Dans l'Ouest du Canada, l'an passé —un groupe des provinces de l'Alberta et du Manitoba ont aussi gagné un prix pour avoir fait des initiatives en milieu de travail pour favoriser la deuxième langue. Ce sont des exemples où les gens se prennent en main. On a aussi eu une reconnaissance d'une personne de Toronto qui a mis en place une espèce d'initiative de Toast Master, autant pour des francophones que pour des anglophones. C'est ce genre de modèle, ce genre de leadership, pris tant par le leadership de l'organisation que par les employés, qui fait que le milieu de travail est plus propice aux deux langues officielles.

Ce ne sont pas des initiatives obligatoires. Dans les initiatives obligatoires, l'employé a le choix et le droit d'être supervisé en français, d'avoir son évaluation de rendement en français ou en anglais, selon la langue de travail. Je pense que ce qu'on voit de plus en plus, ce sont des modelages de bons comportements et c'est vraiment ce qui va faire le changement culturel dans les organisations.

Le sénateur Robichaud : Est-ce que Mme Monnet a quelque chose à ajouter?

Mme Monnet : Ce sont d'excellents exemples. Je peux ajouter que nous avons un réseau, des sous-ministres adjoints, de champions pour nous aider dans cette tâche. Les champions ont un rôle de leader, qui donne l'exemple dans leur institution, qui favorise et encourage de tels projets. On essaie donc d'avoir un impact multiplicateur dans nos efforts, et nos champions et nos directeurs de langues officielles nous aident énormément à cet égard.

Le message de base que l'on tente de faire passer dans la fonction publique, c'est de parler à l'autre personne dans sa langue, de reconnaître ses origines. C'est un signe de respect et c'est très important. On pense que cela aura un impact sur l'utilisation de l'autre langue également.

M. Baird : Mon problème est que, depuis longtemps, les francophones essayent de me parler en anglais, et j'ai besoin de plus d'expérience. Au Conseil du Trésor, j'invite toujours les fonctionnaires qui le peuvent à me parler en français.

Le sénateur Robichaud : Je suis d'accord. Nous sommes très accommodants. Nous le sommes peut-être un peu trop. Au niveau de la langue de travail, pouvez-vous me donner des exemples, ici dans la région de la capitale nationale, dans des directions de services à l'intérieur du ministère, où la langue de travail est le français?

Mme Monnet : Oui, chez nous. Et je pense que, il y a quelques semaines, le ministère de la Justice, M. Marc Tremblay vous a parlé de son unité où la langue de travail est le français.

Le sénateur Robichaud : Vous attendiez donc ma question, n'est-ce pas?

Mme Monnet : J'ai lu les notes de la comparution en fin de semaine, oui. Donc, oui, cela existe; pas autant qu'on le souhaiterait, mais cela existe.

Mme Boudrias : Évidemment, à l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada, on encourage les langues officielles. C'est un fait que l'on essaie de proposer à nos employés de travailler dans la langue de leur choix. En termes de support, cela signifie que nous devons assurer l'accès à nos employés aux services de traduction rapidement et que ces services soient en poste localement, dans nos organisations, au cas où l'employé aurait à faire, par exemple, une réunion d'information en français pour le ministre dans un délai très serré.

Il faut veiller à tout cela quand on dit qu'on va promouvoir la langue de travail et permettre aux employés de travailler dans la langue de leur choix. Il y a des outils que l'on doit s'assurer d'avoir pour nos employés. En général, si on outille bien nos milieux de travail, on est vraiment capable de donner la possibilité à nos employés de travailler dans la langue de leur choix.

Le sénateur Robichaud : Est-ce que vous avez constaté un changement d'attitude ou de pratique dans la préparation des documents? Dans le passé, on les préparait en anglais et ils étaient prêts tout de suite, plutôt que de les préparer en français et les traduire en anglais. Est-ce qu'il y a eu un changement à ce point de vue?

Mme Boudrias : Je pense qu'il y a un changement au sens où les gens qui ont des droits exigent de plus en plus de nos organisations et des leaders de la fonction publique qu'on respecte leurs droits linguistiques. Oui, je pense qu'il y a eu des améliorations dans plusieurs organisations. Évidemment, il y a des organisations où la langue de travail est plutôt l'anglais et où on n'a pas nécessairement mis à la disposition des employés tout l'outillage nécessaire, que ce soit la traduction électronique — à laquelle on ne peut pas se fier non plus à 100 p. 100.

Le sénateur Robichaud : Surtout pas !

Mme Boudrias : Il faut s'assurer que nos contrats avec le Bureau de la traduction sont suffisants. Également, si on donne des contrats à des entreprises privées, il faut s'assurer que celles-ci ont une bonne connaissance de la langue française et répondent à nos attentes et critères de qualité. Il faut considérer tout cela si on veut procurer un milieu de travail qui favorise l'autre langue. Je ne dis pas qu'on a atteint le Nirvana mais je pense qu'on a fait beaucoup de progrès.

Le sénateur Champagne : Travailler dans la langue de son choix, j'ai l'impression que c'est encore un peu utopique. Dès qu'on arrive dans un groupe, c'est la langue de la majorité qui, à un moment donné prédomine, et l'on a tendance à vouloir automatiquement adopter la langue de la majorité parce que ça va plus vite.

D'après vous, est-ce que le fait d'adopter la langue de la majorité, c'est une façon de progresser plus rapidement au sein de l'administration fédérale?

M. Baird : C'est bien sûr le constat qu'on faisait dans les deux Chambres. On disait qu'on avait fait beaucoup de travail au gouvernement fédéral en tant qu'institution pendant les trente dernières années, mais qu'il y avait encore du travail à faire.

Mme Boudrias : Je pourrais ajouter qu'actuellement, au niveau de nos stratégies de recrutement, quand on recrute les gens de l'extérieur, des jeunes universitaires, qu'ils soient bilingues ou qu'ils entrent dans des programmes de développement de carrière, on les envoie immédiatement en formation linguistique.

Plus on aura de telles stratégies, moins on aura des réunions où les gens ne pourront pas parler la langue de leur choix. C'est ce qu'on appelle le bilinguisme passif, c'est-à-dire quand les gens s'expriment dans la langue de leur choix tout en se faisant comprendre par l'autre. C'est assez fréquent. On a évolué, car il y a eu un moment, au gouvernement fédéral, où l'on parlait anglais parce qu'il y avait des gens qui n'étaient pas capables de suivre en français. Aujourd'hui, avec la capacité linguistique qu'on a créée au gouvernement fédéral, c'est assez normal de voir des rencontres où les gens se parlent dans la langue de leur choix, la réunion n'est pas traduite et les gens comprennent ce qui se passe.

Mais il y a des efforts à faire encore. On fera de plus en plus en sorte d'avoir des gens qui iront en formation linguistique avant d'entrer au gouvernement fédéral ou qui se verront offrir ces programmes dès le jeune âge. On dit que les enfants apprennent comme des éponges; les jeunes qu'on recrute au fédéral, qui viennent des universités, qui ont eu la chance d'être dans des cours d'immersion ou dans d'autres situations linguistiques, ont cette capacité et on optimise actuellement cette capacité.

Le sénateur Champagne : Je pense que c'est une chose absolument extraordinaire et on le voit lorsqu'on rencontre des jeunes, autant francophones qu'anglophones. Autrefois les jeunes anglophones ne parlaient pas français et les jeunes francophones se forçaient, ils baragouinaient en anglais. Je vois vraiment un changement, quand on voit des entrevues avec de jeunes universitaires anglophones qui peuvent vraiment bien s'exprimer dans un français correct. Et je pense que si on a donné l'exemple, tant mieux.

Est-ce que cela va nous servir? On a parlé tout à l'heure de Vancouver, du bureau de tourisme, on parle aussi des Olympiques qui s'en viennent — en 2010, c'est demain.

Qu'est-ce que votre ministère a prévu pour faciliter, améliorer les services aux athlètes et au public? Car on sera dans un milieu très anglophone, mais il y aura des gens de partout au monde.

M. Baird : J'ai eu l'opportunité de rencontrer les organisateurs des jeux olympiques de Vancouver et ils sont assez bien sensibilisés au fait que ce ne sont pas seulement les jeux olympiques de Vancouver, mais que l'hôte est bien sûr le Canada. Ils travaillent avec les autres régions pour qu'il y ait des bénéfices pancanadiens et, suite à votre commentaire, je vais m'assurer de ce qu'ils ont fait dans le dossier des langues officielles puisque je n'ai pas eu souvent l'opportunité d'en discuter avec les organisateurs.

Le sénateur Champagne : Nous comptons sur vous pour rappeler aux organisateurs que ce sera important pour l'image du Canada et pour nous tous.

M. Baird : C'est important dans le monde sportif; Toronto a perdu la tenue des jeux olympiques au profit de Pékin et notre relation n'était pas assez forte avec l'équipe de Paris et Toronto pour gagner dans le deuxième tour.

Le sénateur Champagne : Mais le français est une langue officielle de l'organisation des jeux olympiques, alors c'est important.

M. Baird : C'est une valeur internationale pour le Canada et si nous poursuivons nos efforts, peut-être que la prochaine fois nous pourrions gagner le deuxième tour.

Le sénateur Champagne : La prochaine fois.

M. Baird : J'espère.

[Traduction]

Je considère que vous et moi avons un défi à relever. Nous parlons de « bilinguisme ». Cependant, les communautés auxquelles j'appartiens parlent de langues. Nous devons promouvoir les langues officielles et développer une véritable identité canadienne. Nous devons parler aux gens et leur dire qu'ils doivent parler les langues officielles. Lorsque je dis aux gens qu'ils doivent être bilingues, ils me répondent, « Que voulez-vous dire? Nous sommes bilingues ». Nous devons promouvoir une culture des langues officielles.

Que faisons-nous à la fonction publique fédérale pour ceux qui ne parlent aucune des deux langues officielles? Avez- vous des programmes spéciaux qui encouragent ces personnes dont les langues ne sont ni l'anglais ni le français à apprendre l'une ou l'autre des langues officielles?

M. Baird : Il s'agit d'une difficulté unique à laquelle nous faisons face en tant qu'employeur à la fonction publique fédérale. La semaine qui a précédé ma nomination en tant que président du Conseil du Trésor, le Globe and Mail publiait un article en page couverture à propos des difficultés uniques auxquelles nous faisons face en matière de recrutement. Il existe de nombreuses personnes bilingues au Canada qui parlent l'anglais ou le français et une autre langue, et cela représente un défi particulier pour nous. Comment recruter un ingénieur en informatique qui pourrait être d'origine indienne et qui ne parle pas français? Comment pouvons-nous inciter quelqu'un à apprendre une troisième langue? Il s'agit d'une difficulté particulière. À bien des égards, nous avons fait de grands progrès en ce qui concerne certaines mesures d'équité en matière d'emploi mais à bien d'autres égards, nous avons beaucoup de travail à faire. C'est une situation qui me préoccupe particulièrement en ce qui concerne les grandes villes comme Montréal, Ottawa, Toronto et Vancouver — je pourrais en nommer beaucoup. Dans les grands centres urbains, cela pose une difficulté particulière parce que nous voulons que la fonction publique fédérale représente la composition de la société canadienne. Souvent, il est difficile d'apprendre une deuxième langue et encore plus difficile d'en apprendre une troisième. Je ne peux pas dire que nous ayons adopté de mesure particulière depuis que je suis arrivé.

M. Waung : Les conditions de vie des personnes dont la langue maternelle n'est ni l'anglais ni le français sont particulièrement difficiles. Il y a deux ans, nous avons fait une étude pour évaluer les taux de réussite de ces groupes et nous avons constaté qu'il n'existait pas de différence dans les taux de réussite d'apprentissage des langues officielles, indépendamment du pays d'origine du participant.

Le sénateur Jaffer : Ce ne sont pas les taux de réussite qui me préoccupent. Je considère que si vous parlez une deuxième langue, vous pouvez en apprendre une autre. Prévoyez-vous une formation particulière pour les fonctionnaires fédéraux dont la langue maternelle n'est ni l'anglais, ni le français?

Mme Monnet : Il existe un certain nombre de projets en cours qui donnent suite à vos préoccupations. L'un de ces projets, dans le cadre du programme d'innovation, a consisté à mettre au point un programme pour les personnes parlant le cantonnais afin qu'elles puissent apprendre le français sans avoir à apprendre d'abord l'anglais. Nous avons évalué les résultats en fonction des résultats obtenus à l'aide d'autres méthodes.

Le sénateur Jaffer : Où ce cours est-il offert?

Mme Monnet : Ce cours est offert à Vancouver. Il relève du conseil régional. Je crois que l'école a un projet pour les Autochtones qui tient compte de leurs besoins culturels et linguistiques particuliers lorsqu'ils apprennent une deuxième langue officielle. Comme M. Waung l'a mentionné, nous avons fait beaucoup d'études pour tâcher de déterminer si cela représente une difficulté accrue pour eux. Jusqu'à présent, nous n'avons pas vraiment relevé de problèmes précis. Le problème que l'on nous signale, c'est l'accès à la formation. Si nous pouvons offrir l'accès à la formation, ces personnes apprendront la langue.

Le sénateur Jaffer : Je viens de la Colombie-Britannique, et je crois qu'il faut assurer une véritable mobilité à la fonction publique entre Ottawa, Vancouver et Toronto. Cependant, ce que disent les fonctionnaires, c'est que les cours de français à Vancouver ne leur sont pas aussi accessibles qu'ils le sont à Ottawa. La formation linguistique offerte à Ottawa est très différente de celle offerte à Vancouver.

Vous n'aurez peut-être pas la réponse à cette question aujourd'hui, monsieur le ministre, et je l'accepte. Cependant, j'aimerais savoir précisément le montant consacré à la formation des fonctionnaires en Colombie-Britannique et le montant dépensé ailleurs. Je sais qu'il existe un grave problème en Colombie-Britannique pour ce qui est des cours de langue seconde. Cette situation est inacceptable. Des cours de français devraient être offerts à l'ensemble des fonctionnaires partout au pays. Il faudrait instaurer une culture qui rend obligatoire l'acquisition de ces deux langues.

M. Baird : Nous allons étudier la situation. Si nous pouvons obtenir des chiffres précis, nous tâcherons de vous les faire parvenir.

Le sénateur Jaffer : Avec la permission de la présidence, je vous demanderais de fournir cette information à la présidence. Une fois que nous la recevrons, nous aurons peut-être d'autres questions à vous poser. Je pourrais peut- être, par l'intermédiaire de la présidence, vous les adresser. Il faut vraiment que la formation soit offerte dans l'ensemble du pays.

Quelle est la situation en ce qui concerne les listes d'attente? Sont-elles très longues? Sont-elles plus longues dans d'autres provinces — vous pouvez voir où je veux en venir — qu'en Ontario?

M. Baird : Les listes d'attente sont assez longues. C'est l'un des problèmes auxquels nous devons faire face. Elles ne se sont pas développées du jour au lendemain et elles ne disparaîtront pas du jour au lendemain.

J'aimerais examiner nos exemples de réussite. La difficulté, c'est que si vous retirez quelqu'un du milieu du travail pour qu'il suive une formation linguistique tous frais payé pendant un an ou deux, est-ce que cela sera efficace? À son retour, cet employé sera-t-il vraiment bilingue? Utilisera-t-il la langue qu'il vient d'acquérir? Le fait d'être un député d'Ottawa comporte ses avantages et ses inconvénients. À titre de président du Conseil du Trésor, je reçois de nombreux conseils au supermarché ou à l'occasion de divers événements communautaires. Je tiens à m'assurer que si nous faisons un investissement aussi important, il faudra que l'employé ait la possibilité de se servir de ce qu'il a appris. Si un employé prévoit quitter la fonction publique dans deux ans, il n'est pas vraiment logique de former cet employé pendant un an ou deux. Cela revient à l'observation faite par le sénateur Champagne à propos des jeunes. Si nous parvenons à recruter des jeunes dynamiques ici à Ottawa, qu'il s'agisse d'un scientifique à l'Agence canadienne d'inspection des aliments, d'un ingénieur en informatique, d'un rédacteur de politiques ou d'une personne spécialisée en communication, et que nous les formons rapidement, l'avantage c'est que l'investissement sera beaucoup rentable puisque ces employés pourront contribuer pendant beaucoup d'années.

Le sénateur Jaffer : Je comprends que vous êtes nouvellement entré en fonction, mais qu'est-ce que vous envisagez des mesures particulières pour raccourcir les listes d'attente?

M. Baird : C'est l'une des difficultés auxquelles nous devons faire face, comme c'était le cas pour le gouvernement précédent. Nous devons également prendre en considération les autres priorités comme les soins de santé, l'environnement, l'application de la loi, etc.

Le sénateur Jaffer : Ce qui prime, c'est l'unité de notre pays.

M. Baird : La santé est également importante pour les Canadiens, de même que les collectivités et un environnement sans pollution.

Le sénateur Jaffer : Pourrais-je vous demander de fournir des renseignements précis sur les listes d'attentes, si vous disposez de cette information, pour que nous ayons une idée de la situation?

M. Baird : Si nous avons cette information, nous vous la ferons parvenir.

[Français]

Le sénateur Losier-Cool : Monsieur le ministre, votre français se porte bien. Je dirais qu'il s'est amélioré depuis la dernière fois que je vous ai rencontré. Madame Boudrias, je dis bravo au Nouveau-Brunswick pour les Mercredis en français. Je souhaite que la colline du Parlement ait aussi ses Mercredis en français, les caucus deviendraient intéressants.

Monsieur le ministre, j'aimerais profiter de votre comparution pour que vous nous apportiez des précisions sur l'adoption du projet de loi S-3 en novembre dernier. La loi oblige les institutions fédérales à prendre des mesures positives et elle peut aussi fixer des règlements.

Le gouvernement a-t-il déjà fixé des règlements quant aux modalités d'exécution des obligations des institutions fédérales à l'égard de la partie VII? Quels seraient les critères que pourraient contenir ces règlements?

M. Baird : Je vais demander à Mme Monnet de répondre à cette question.

[Traduction]

Mme Monnet : La Loi sur les langues officielles confère la responsabilité de la réglementation au président du Conseil du Trésor.

[Français]

Cette responsabilité peut être déléguée et c'est certainement un point sur lequel nous travaillerons en collaboration avec le ministère du Patrimoine canadien qui est responsable de la partie VII.

M. Baird : Et bien sûr, en collaboration aussi Mme Josée Verner, la ministre responsable pour les langues officielles.

Le sénateur Losier-Cool : Monsieur le ministre, vous étiez à l'Île-du-Prince-Édouard au mois de mai dernier et lors d'une conférence de presse, vous avez dit que dans les prochaines semaines vous mettriez sur pied un groupe de travail qui étudiera le financement des organismes et les programmes de subventions et contributions.

Pouvez-vous dire au comité si ce groupe de travail a été mis sur pied et si oui, ce qui a été fait?

M. Baird : Je pense que c'est mon collègue qui y est allé. En fait, je ne suis pas allé à l'Île-du-Prince-Édouard depuis quelques années.

Le sénateur Losier-Cool : Dans un article de la Voix acadienne, on dit et je cite :

En conférence de presse, le président du Conseil du Trésor, l'honorable John Baird, a déclaré que dans quelques semaines il mettra sur pied un groupe de travail qui étudiera le financement des organismes et les programmes de subventions et contributions. C'est important pour les groupes qui reçoivent des fonds publics.

M. Baird : Oui, je m'excuse. C'est une annonce que j'ai faite à Ottawa.

Le sénateur Losier-Cool : C'est exactement cela. C'est le journal qui a rapporté votre annonce. Je m'excuse.

M. Baird : On a annoncé qu'un groupe de travail étudiera non seulement les subventions et les contributions dans le domaine des langues officielles, mais aussi les meilleures façons de fonctionner pour les organismes à but non lucratif et pour les fonctionnaires.

Le chef du groupe sera Mme Frances Lankin, ancienne ministre néo-démocrate de l'Ontario, maintenant présidente United Way à Toronto. Il y aura aussi un ancien sous-ministre à Ottawa et un homme d'affaires de Montréal. Ces gens vont travailler avec une équipe de fonctionnaires dans le but de faire rapport d'ici la fin de l'année sur la question des subventions.

Le sénateur Losier-Cool : D'accord.

M. Baird : S'il existe des règlements sur l'imputabilité, nous nous assurerons qu'ils fonctionnent bien.

[Traduction]

Il est très important d'avoir un mécanisme efficace de surveillance et de reddition des comptes. J'ai parlé à la vérificatrice générale et elle m'a indiqué qu'un bénéficiaire de subvention avait reçu une subvention de 5 000 $ et avait dû signer une entente de contribution de 75 pages. Cela n'est pas approprié pour un groupe à but non lucratif. Je ne peux pas croire qu'un fonctionnaire ait le temps de surveiller l'application de 75 pages de modalités. Nous voulons établir un équilibre approprié. À cet égard — je n'ai pas d'objection à le déclarer publiquement — je crois que le gouvernement précédent était animé de bonnes intentions après les problèmes qu'a connus Développement des ressources humaines Canada et après le programme des commandites, et je pense que les programmes étaient peut-être trop réglementés. J'espère que le présent groupe, qui compte trois personnes ayant des antécédents très différents, examinera ce qui constitue un régime de responsabilisation efficace et nous fera des recommandations en ce sens sans qu'il s'agisse forcement du régime le plus exigeant ou le plus sévère.

Le sénateur Losier-Cool : Vous êtes en train de me dire que ce groupe ne suit pas forcément les obligations de la Loi sur les langues officielles.

M. Baird : Il examine la situation dans son ensemble, mais rien en particulier concernant les langues officielles.

[Français]

Le sénateur Tardif : À la lumière des modifications apportées à la Loi sur les langues officielles avec le projet de loi S- 3, des fonctionnaires du ministère du Patrimoine canadien ainsi que le ministre de la Justice ont laissé entendre qu'il reviendrait à chaque institution fédérale, aux tribunaux et aux juristes de définir des mesures positives.

Comment votre ministère et les agences que vous chapeautez définissent-ils les mesures positives?

M. Baird : Le projet de loi S-3 a été adopté par les deux Chambres il y a quelques mois et c'est quelque chose de nouveau.

Mme Monnet : Je pense que jusqu'ici il n'y a pas de définition claire qu'on peut offrir au ministère. Par contre, il est clair pour le moment que chaque institution est appelée à étudier ses initiatives concernant des programmes et des politiques, à s'assurer qu'il y ait un impact positif sur les communautés dans le sens qu'il y ait une occasion de faire quelque chose pour la communauté.

En ce qui a trait à la définition des mesures positives, l'agence n'en a pas.

M. Baird : Parce que c'est nouveau.

Le sénateur Tardif : Quel rôle pourraient jouer les communautés de langues officielles dans la définition des mesures positives?

Mme Monnet : Si une institution prend l'initiative il y aura un impact sur la communauté. On va consulter la communauté en question et on va définir, d'un point de vue plus pratique, ce que la communauté désire et ce qu'on peut faire pour l'aider.

Ce serait une façon de procéder très terre à terre et pratique selon l'institution, selon la communauté et selon l'initiative en question. Il faut qu'on se parle, qu'on se comprenne et qu'on agisse en tant qu'institution pour favoriser l'avenir des communautés minoritaires.

Le sénateur Tardif : La commissaire aux langues officielles avait fait quelques suggestions par rapport aux mesures positives. Êtes-vous d'accord avec ses suggestions?

M. Baird : J'ai reçu le rapport de la commissaire aux langues officielles il y a deux ou trois semaines et j'ai rencontré la commissaire à deux ou trois reprises seulement.

Le sénateur Robichaud : Vous avez dit qu'afin de définir des mesures positives, il va falloir se parler. Quand va-t-on commencer à se parler?

Mme Monnet : Je pense qu'une discussion est déjà démarrée selon l'institution et selon les initiatives. Il y a des discussions entre la communauté et le gouvernement dans le contexte du Plan d'action sur les langues officielles deux fois l'an, une fois avec les fonctionnaires, une fois avec les ministres.

Également, Service Canada travaille de près avec les communautés afin de définir et comprendre leurs besoins en termes de services. Il y a toutes sortes d'initiatives qui dépendent des actions des institutions.

Le sénateur Robichaud : Mais on n'a pas réussi encore à définir ce qui était des mesures positives?

Mme Monnet : Je pense que cela dépend du contexte. Il faudrait voir le contexte, ce que la communauté en question voudrait voir, les possibilités de l'initiative et voir, dans un sens très pratique, ce qu'on peut faire.

M. Baird : Je dois ajouter que pendant la campagne électorale, le premier ministre a insisté sur le fait que la plus haute priorité de son gouvernement était le projet de loi sur l'imputabilité. À titre de ministre responsable dans ce dossier, j'ai travaillé très fort pendant les quatre derniers mois et demi sur ce sujet, avec les obligations financières, comme le Prix du gouverneur général, le Budget principal des dépenses, les projets de loi de finances, à la Chambre des communes. Comme on était un nouveau gouvernement, que les priorités étaient mises en place, on avait beaucoup plus de temps pour travailler les autres dossiers.

Je dois souligner que les obligations du gouvernement fédéral pour protéger et faire la promotion des langues officielles existe depuis déjà longtemps. Il y a 25 ans que la loi est entrée dans la Constitution, donc les obligations existent depuis beaucoup plus longtemps que le projet de loi S-3.

Le sénateur Robichaud : Mais ce qui s'est passé avant, c'est avant. On vous demande ce que vous faites pour définir des mesures positives, tout simplement.

M. Baird : Alors que j'étais ministre provincial, j'ai été heureux de la création de 12 conseils scolaires francophones dans chaque région de l'Ontario. Et pour la première fois dans l'histoire de l'Ontario, on avait l'équité dans le financement de l'éducation. C'était quelque chose de très important.

La présidente : Monsieur le ministre, au nom du comité, je vous remercie, vous et votre personnel, pour votre disponibilité.

La séance est levée.


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