Délibérations du comité sénatorial permanent des
Langues officielles
Fascicule 10 - Témoignages du 11 décembre 2006
OTTAWA, le lundi 11 décembre 2006
Le Comité sénatorial permanent des langues officielles se réunit aujourd'hui à 16 h 2 pour étudier, afin d'en faire rapport de façon ponctuelle, l'application de la Loi sur les langues officielles, ainsi que des règlements et instructions en découlant, au sein des institutions assujetties à la Loi, ainsi que pour l'étude de l'ébauche d'un rapport.
Le sénateur Maria Chaput (présidente) occupe le fauteuil.
[Français]
La présidente : Bonjour et bienvenue à cette 19e réunion du Comité sénatorial permanent des langues officielles. Je suis Maria Chaput, présidente du comité, et je viens du Manitoba. Avant de donner la parole aux témoins, permettez- moi de vous présenter les autres membres du comité. À ma gauche se trouve le sénateur Andrée Champagne du Québec; à ma droite se trouve le sénateur Mobina Jaffer de la Colombie-Britannique, le sénateur Fernand Robichaud du Nouveau-Brunswick, le sénateur Rose-Marie Losier-Cool du Nouveau-Brunswick, le sénateur Jim Munson de l'Ontario et le sénateur Pierre Claude Nolin du Québec.
Nous poursuivons aujourd'hui notre étude sur l'application de la Loi sur les langues officielles pour discuter de la prise en compte des langues officielles dans l'organisation des Jeux olympiques et paralympiques d'hiver de 2010 à Vancouver.
Nous recevons dans un premier temps l'honorable David Emerson, C.P., député, ministre du Commerce international et ministre de la porte d'entrée du Pacifique et des Olympiques de Vancouver-Whistler.
Il est accompagné des fonctionnaires de Patrimoine canadien qui sont Judith A. LaRocque, sous-ministre à Patrimoine canadien et David M. Robinson, directeur général du Secrétariat fédéral des Jeux olympiques et paralympiques d'hiver de 2010 à Patrimoine canadien.
[Traduction]
Bienvenu, monsieur le ministre, et merci d'être venu aujourd'hui. La parole est à vous.
[Français]
L'honorable David Emerson, C.P., député, ministre du Commerce international et ministre de la porte d'entrée du Pacifique et des Olympiques de Vancouver-Whistler : Honorables sénateurs, merci de votre invitation.
[Traduction]
Vous aurez constaté que je ne suis pas parfaitement bilingue.
J'aimerais tout d'abord vous remercier de votre travail sur les langues officielles. Je pense qu'il est capital et je pense que votre projet sur les Jeux olympiques qui nous intéressent tous et dont nous sommes fiers sera un excellent moyen pour atteindre les objectifs du comité et du Canada.
Merci également de m'offrir cette occasion d'aborder avec vous l'importante question des langues officielles aux Jeux olympiques et paralympiques d'hiver de 2010. En 2010, le Canada présentera ses premiers jeux d'hiver en 20 ans. Ce sera le moment de faire valoir le Canada aux yeux du monde. Nous savons que près de trois milliards de personnes regarderont les jeux et nous attendons quelque 250 000 visiteurs.
En accueillant des gens du monde entier, nous mettrons en valeur notre hospitalité, notre excellence athlétique et notre diversité culturelle. Les Jeux olympiques et paralympiques sont une occasion exceptionnelle de resserrer les liens entre les Canadiens et de faire de cette célébration, de cet engagement et de cette cause commune, une source de rapprochement. Nous devons veiller à ce que les Canadiens d'un océan à l'autre puissent participer à ces jeux. Nous devons veiller à ce qu'ils puissent les apprécier dans la langue officielle de leur choix.
Lorsque Vancouver a décroché les Jeux de 2010, nous avons vite compris qu'assurer le bilinguisme complet de cette manifestation plus grande que nature serait un défi. Nous nous sommes rendu compte qu'il nous fallait adopter une démarche proactive et qu'il fallait également s'assurer de l'engagement de tous les partenaires associés aux jeux.
En novembre 2002, le gouvernement du Canada a conclu une entente multipartite avec le Comité d'organisation des Jeux olympiques et paralympiques d'hiver de 2010 à Vancouver et avec le gouvernement provincial et l'administration municipale. C'est la première fois dans l'histoire des Jeux olympiques et paralympiques que des dispositions sur les langues officielles sont intégrées à une telle entente.
Par cette entente, le Comité d'organisation des Jeux olympiques, le COVAN s'est engagé à respecter les obligations de la Loi sur les langues officielles et des politiques afférentes. Parmi celles-ci, mentionnons les obligations suivantes : de s'assurer que les cérémonies d'ouverture et de fermeture font place aux deux langues officielles et aux cultures qui forment les fondements de notre société, de voir à ce que les employés et les bénévoles du COVAN soient en mesure de travailler dans les deux langues officielles, de promouvoir les jeux dans les deux langues officielles, au moyen de programmes culturels, de publicité, de panneaux indicateurs ou d'autres moyens de communication.
Je suis heureux de pouvoir affirmer que le COVAN a non seulement accepté de respecter ces obligations, mais de tenter d'en faire davantage puisqu'il partage notre engagement envers la dualité linguistique.
À preuve, le COVAN a récemment conclu une entente de partenariat avec le gouvernement du Québec. Cette entente porte sur une foule de domaines où le gouvernement du Québec et le COVAN travailleront ensemble notamment pour promouvoir la langue et la culture françaises. Le COVAN a aussi conclu des ententes avec des organismes pour que les communautés francophones de partout au pays participent à leur façon aux Jeux de 2010.
Mme Bissonnette a été le grand témoin de la francophonie aux Jeux olympiques et paralympiques de 2006 à Turin. Elle a exprimé plusieurs préoccupations à l'égard de l'utilisation du français lors de ces jeux et nous préparons les Jeux de 2010 à la lumière des rapports qu'elle a préparés. Notre gouvernement entend faire de ces Jeux un modèle de respect des langues officielles. Nous devrions recevoir au début de la nouvelle année un plan d'affaire à jour du COVAN qui comprendra une nouvelle version de sa stratégie sur les langues officielles. Cela nous permettra d'établir des étendards pour évaluer nos progrès et nos succès.
Je crois que le COVAN mérite nos félicitations pour son travail sur l'utilisation du français aux Jeux de 2010. De son côté le gouvernement fédéral doit s'assurer du respect et de l'emploi des langues officielles dans tous les aspects des Jeux.
Madame la présidente, comme ma collègue, la ministre Josée Verner, vous l'a dit en octobre : « Le gouvernement du Canada, en collaboration avec le comité organisateur et la Colombie-Britannique, a la volonté de projeter aux yeux du monde non seulement l'excellence de nos athlètes et la richesse de notre culture, mais également l'image d'un pays fort et fier de sa dualité linguistique. »
Tout comme Mme Verner et notre gouvernement, je suis déterminé à profiter des Jeux des 2010 pour donner au français la place qui lui revient au sein des Jeux olympiques et paralympiques.
J'aimerais aborder la radiodiffusion des Jeux olympiques et paralympiques d'hiver de 2010. Certains s'inquiètent du fait que le radiodiffuseur choisi pour présenter les Jeux ne puisse pas offrir partout au pays une aussi bonne couverture des Jeux aux francophones qu'aux anglophones. Cette question va droit au cœur des discussions d'aujourd'hui étant donné que la majorité des Canadiens suivront les Jeux à la radio ou à la télévision. Afin que tous les Canadiens aient un accès égal aux Jeux tant en français qu'en anglais, nous devons nous pencher sur cette question.
La semaine dernière j'ai rencontrée le commissaire aux langues officielles, M. Graham Fraser. Il a partagé avec moi ses inquiétudes au sujet de la radiodiffusion des Jeux en français. Je partage ses préoccupations et je peux vous assurer que c'est aussi vrai pour tous nos partenaires. Nous surveillerons cette situation de près pour garantir que tous les Canadiens puissent suivre les Jeux olympiques et paralympiques dans la langue officielle de leur choix. Je suis impatient de prendre connaissance des constats et des recommandations de votre comité à ce sujet.
Le sénateur Jaffer : Merci, madame la présidente et bienvenue, monsieur le ministre. Nous sommes tous deux de la même ville et nous voulons faire en sorte que les Jeux se déroulent sous le meilleur jour et que notre ville ne souffre d'impairs. Je suis sûre que nous travaillerons ensemble là-dessus.
Avez-vous prévu un échéancier pour mesurer l'avancement des préparatifs? Vous nous en avez parlé dans votre exposé mais avez-vous scénario sur la façon dont les jeux vont refléter notre dualité linguistique?
M. Emerson : Je dois vous dire que le COVAN a réalisé de grands progrès à bien des égards. Le comité a pris toute une gamme d'engagements pour le personnel, les bénévoles et les agents de liaison avec la communauté francophone. Le COVAN conclut une entente avec la province de Québec et il présentera son plan d'affaires au début de 2007. Ce plan comportera des dispositions claires et précises sur ce que le comité entend faire pour la dualité linguistique et la célébration de notre culture. Le comité dispose d'un système d'évaluation de l'efficacité et d'un barème de mesures. Le gouvernement du Canada aura l'occasion d'évaluer les propositions et le chemin critique du comité entre maintenant et 2010, car il est essentiel que nous sachions qu'ils sont adéquats.
Le sénateur Jaffer : La semaine dernière, les représentants de la chaîne CTV ont comparu et ils nous ont assuré que CTV donnerait pour les Jeux olympiques de Vancouver un service 30 p. 100 supérieur à ce qu'il avait été à Turin. Cela m'a fait tiquer et je suis heureuse que vous ayez parlé du rapport Bissonnette, car à Turin, la performance pour le français laissait grandement à désirer même si l'on sait que l'Italie ne prétend pas, contrairement à nous, être un pays bilingue. Je m'inquiète de vos propos, d'une norme aussi basse. Il faut relever la barre parce que 30 p. 100, ce n'est pas assez et j'aimerais entendre ce que vous avez à dire là-dessus.
M. Emerson : J'en conviens. Graham Fraser et moi-même avons abordé la question et j'ai eu l'occasion d'en parler pendant la période des questions à la Chambre des communes. Selon moi, selon le gouvernement, il faut viser plus haut. Je pense que nous sommes sur le point d'y parvenir. Je pense que CTV a pris des engagements solides, étant donné ses réseaux et ses capacités. Toutefois, la chaîne CTV n'a pas la capacité qui permet de donner le service que nous escomptons, en particulier aux groupes francophones vivant hors Québec. Au sein du ministère du Patrimoine canadien, une équipe de juristes et de politologues examine les options qui pourraient permettre de combler cette lacune. Je m'engage, le gouvernement s'engage, à veiller à ce qu'on trouve une solution au problème.
Le sénateur Jaffer : On veut, bien entendu, que la programmation soit offerte au plus grand nombre de Canadiens possible dans la langue de leur choix. Toutefois, à l'occasion d'une séance d'un autre comité, j'ai appris quelque chose de la part du sénateur Nolin. Il ne s'agit pas tout simplement d'offrir quelque chose dans une langue ou d'offrir une traduction mais d'être sensible sur le plan culturel et d'offrir une programmation qui soit au départ en langue française et diffusée à l'échelle du pays également. Je vous exhorte à vous assurer qu'il ne s'agira pas uniquement de traduction d'émissions en langue anglaise mais qu'il y aura également des émissions en langue française.
M. Emerson : Je comprends votre argument et je suis d'accord avec vous. Songez-vous ici à la couverture télédiffusée ou aux autres célébrations et manifestations?
Le sénateur Jaffer : À tout.
M. Emerson : Vous avez raison et le COVAN est d'accord. Nous travaillons avec divers partenaires pour garantir une solide réflexion de la langue et de la culture françaises aux Olympiques. Personnellement, je crois que les Olympiques sont l'occasion de développer un sens de la nation et un sens de l'unité. La province de Québec, si j'ose le dire, a toujours récolté un nombre disproportionné de médailles et nous ne voulons pas rater l'occasion de faire la publicité de cela.
Le sénateur Jaffer : Le comité est allé à Vancouver il y a quelques semaines et nous avons rencontré les représentants de la communauté ethnique de langue française. On pourrait peut-être songer à faire participer cette communauté lors des Jeux, car assurément, on y trouvera les compétences en langue française. C'est une communauté qui se développe. Vous saviez quel défi elle a dû relever, je n'ai pas besoin de vous le dire. On pourrait certainement songer à sa participation lors des Jeux.
M. Emerson : Le COVAN a élaboré un protocole avec quelques organisations francophones, une nationale et une de Colombie-Britannique. Le comité tente de garantir l'organisation de toute une gamme d'activités, soit pour les visiteurs qui assisteront aux Jeux, soit pour les bénévoles ou les organisateurs des célébrations. Ces activités comporteront un lien et une participation solides de la part de la communauté francophone.
Le sénateur Munson : Il faudra bien souligner que ces Jeux sont les Jeux du Canada. L'image du pays, d'un pays bilingue, est ce que nous voulons projeter mais parfois les villes s'approprient les Jeux. Il ne faut pas l'oublier; il ne faut pas qu'il y ait de scission au niveau du bilinguisme ou de la culture. Savez-vous quel est le budget de publicité en français et en anglais assumé par le gouvernement fédéral?
M. Emerson : Je ne peux pas répondre à cette question. Nous avons reçu des propositions que nous sommes en train d'examiner quant aux débouchés stratégiques qui permettraient de mettre le pays en valeur dans toute une gamme de secteurs, certains culturels, certains commerciaux et certains orientés vers les investissements. Pour l'heure, les sommes de l'ensemble de ces mesures n'ont pas encore été fixées de sorte que je ne peux pas vous dire ce que la composante en langue française représente, peut-être que Mme LaRocque pourra vous répondre.
Judith A. LaRocque, sous-ministre, Patrimoine canadien : Je ne pense pas pouvoir ajouter grand-chose à ce qu'a dit le ministre. Comme M. Emerson l'a dit, nous sommes en train d'étudier la tournure que prendront les choses. Nous allons certainement respecter pleinement nos obligations fixées par les dispositions législatives et sans doute essayer d'aller au-delà, parce que c'est ainsi que nous avons fonctionné jusqu'à présent.
Le sénateur Munson : Le comité d'organisation de Vancouver doit combler 1 200 postes à temps plein, 3 500 postes à temps partiel et 25 000 postes bénévoles. Ce sont les postes qui vont exiger de parler couramment les deux langues officielles. Combien y en a-t-il dans chacune des catégories?
M. Emerson : Je ne voudrais pas citer un chiffre approximatif. Je sais que le COVAN souhaite un contingent assez important de personnel bilingue, francophone si possible. Je sais également qu'on offre une formation en langue française au personnel du comité. Quinze pour cent du personnel est désormais bilingue même si je ne peux pas vous dire à quel niveau.
Je vous assure que dans nos discussions avec le COVAN, nous allons nous assurer qu'on prévoit un fort effectif de francophones, chez les bénévoles et les employés. Tout comme vous, j'estime que c'est presque là l'essence de la nation et nous devons veiller à ce qu'un nombre important de francophones participent à ces manifestations comme il se doit.
Le sénateur Munson : À ce propos, allez-vous encourager les Québécois, les Acadiens, les Franco-Ontariens et les Manitobains à se rendre dans l'Ouest pour se porter candidats à ces postes?
M. Emerson : Nous nous attendons certainement à une grande migration vers l'Ouest, peut-être seulement temporairement, de la part des francophones canadiens.
Le sénateur Munson : A-t-on tiré des leçons des jeux qui ont eu lieu en Alberta et à Montréal par le passé? Avez-vous réfléchi avec des responsables au niveau fédéral pour cerner ce qui éventuellement n'a pas fonctionné ou a bien fonctionné, afin de bien ficeler votre plan pour 2010?
M. Emerson : Nous avons certainement étudié ce qui s'est passé à Turin, ainsi qu'à Montréal et à Calgary, pour en tirer des leçons. Je ne peux pas vous dire toutefois si on a mis l'accent sur la langue française et la question culturelle.
David M. Robinson, directeur général, Secrétariat fédéral des Jeux olympiques et paralympiques d'hiver de 2010, Patrimoine canadien : Nous avons tiré une leçon particulièrement de l'organisation des Jeux de Calgary. Nous voulons nous assurer que les services en langue française ne sont pas confinés à une section en particulier du comité d'organisation mais sont bien intégrées dans tout le comité. Ainsi, nous souhaitons que partout où il y aura des services pour le public, communication, commercialisation ou appui aux athlètes et aux entraîneurs, le comité apportera une capacité suffisante en français et en anglais.
Le ministre a fait allusion au plan d'affaire que doit nous présenter le COVAN au printemps. Nous allons veiller à ce que le COVAN injecte les ressources suffisantes dans ces secteurs pour garantir un niveau approprié de services en anglais et en français.
Le sénateur Champagne : Je souhaiterais continuer de parler de la langue pour un instant. J'ai participé activement aux Jeux Olympiques de Montréal en 1976. Je me souviens que quiconque ne pouvait pas parler les deux langues n'avait aucune chance d'être embauché. Pour l'être, il fallait être bilingue.
Si c'était la ville de Québec qui organisait les Jeux olympiques, je suis sûre que la même exigence aurait été appliquée par les responsables. On ne peut pas travailler pour les Jeux olympiques, recevoir des participants du monde entier, à moins de parler au moins deux langues.
Est-ce que ce sera là une qualification qu'on exigera des gens qui travailleront aux Jeux olympiques de Vancouver?
M. Emerson : Nous sommes déterminés à garantir une présence francophone solide et efficace. Il ne serait pas réaliste à Vancouver et à Whistler d'exiger que chaque employé et bénévole soit bilingue.
Le sénateur Champagne : Je songeais aux employés qui devront travailler avec le public
M. Emerson : Aux postes où il y aura interaction avec le public, il y aura de nombreux employés capables de parler français. Je ne peux pas affirmer qu'il n'y aura pas des secteurs oubliés, mais nous allons tenter l'impossible pour que les francophones puissent communiquer avec les responsables et les bénévoles en français. Fera-t-il une plainte? Sans doute.
Le sénateur Champagne : Je suis sûr que je n'exagérerais pas si je disais que vous n'êtes pas prêts à embaucher des francophones unilingues, n'est-ce pas?
M. Emerson : Nous n'allons pas embaucher d'unilingues francophones, dites-vous?
Le sénateur Champagne : C'est peu probable.
M. Emerson : Je ne pense pas que ce soit hors de question. Il faut être pratique.
Le sénateur Murray : Le sénateur Jaffer l'a dit, le comité s'est rendu à Vancouver en septembre. Après plusieurs jours, je suis rentré plus encouragé que jamais.
Tout d'abord, les efforts déployés pour garantir que la dualité linguistique du Canada est reflétée aux Jeux olympiques me porte à croire que Vancouver, ce n'est pas Turin. À Turin, on parlait l'anglais et la langue de la ville hôte était l'italien. Même si là-bas il y a un historique, le français n'en était pas moins relégué au troisième rang. Cela ne peut pas être le cas et je suis sûr que ce ne le sera pas à Vancouver et au Canada. On constate que le COVAN fait de gros efforts et non seulement cela — même si je déteste le mot — il y a une interface entre le COVAN et les organisations francophones de Colombie-Britannique, même avec les bénévoles, pour garantir un effectif de bénévoles bilingues recrutés pour participer à la tâche.
Il y a de très bonnes intentions et je pense que les compétences nécessaires pour aboutir existent. Je suis entré de Vancouver très encouragé. J'ajoute en passant que j'ai également été très encouragé par ce que nous avons entendu dire à propos de la vitalité et de l'enthousiasme des organisations de langue française et à propos des activités des communautés de langue française en Colombie-Britannique. Je dois reconnaître que l'ouverture d'esprit des gens frappait. Le maire a comparu devant le comité et à témoigné en français.
En outre, ce que les représentants francophones nous ont dit à propos des politiques du gouvernement provincial de la Colombie-Britannique était tout à fait encourageant, surtout quand on sait quel énorme défi la Colombie- Britannique, la porte d'entrée du Pacifique, doit relever dans d'autres secteurs que je n'ai pas besoin de vous énumérer. Cette province qui essaie de refléter à sa façon la dualité linguistique est un modèle d'encouragement.
À propos de la radiotélédiffusion des Jeux, j'essaie de me rappeler pour lui faire justice le témoignage que nous avons entendu il y a une semaine. Le président de la Société CBC/Radio-Canada et plusieurs fonctionnaires ont comparus ici et il y avait également les dirigeants de Bell Globemedia. Il y a eu tout un va-et-vient ici. Il semble que Bell Globemedia ait écrit une lettre à Radio-Canada il y a un certain temps lui offrant une solution : On propose que la CBC se serve du signal de Globemedia et qu'elle diffuse ce signal sur Radio-Canada. Radio-Canada nous a dit ne pas avoir reçu cette lettre mais, de toute façon, la Société compte refuser cette offre pour diverses raisons. Cependant, elle est prête à conclure un accord commercial avec CTV.
Quand les représentants de CTV ont comparu devant le comité, ils se sont naturellement plaints du silence de Radio- Canada. Ils ne semblaient pas très chauds pour poursuivre des négociations. Ils ont dit avoir déposé une offre sur la table et être prêts à engager des pourparlers mais ils ont donné l'impression aux membres du comité que c'était là leur dernier mot.
Peut-être qu'une médiation s'impose et sinon, il faudrait leur faire entendre raison. Êtes-vous contre ce genre de mesures? Je sais que Mme LaRocque ne s'y oppose pas.
M. Emerson : C'est une question délicate, car le gouvernement du Canada ne peut pas donner de lignes directrices à la CBC. Il nous faut procéder avec beaucoup de doigtée, mais je peux vous assurer qu'entre Beverley Oda, le COVAN et tous les autres intervenants dans le dossier, on peut s'attendre à ce qu'il y ait des efforts énormes pour garantir une résolution de l'affaire.
Il faut respecter le fait que c'est CTV qui a obtenu ce contrat, et qu'il n'a pas été rédigé par le COVAN mais par le Comité olympique international. La CBC, cela se comprend, ne veut pas se contenter de retransmettre la programmation et le signal d'une autre chaîne et souhaite offrir sa propre programmation. Il va être capital au cours des quelques prochains mois de travailler à résoudre cette impasse. Nous trouverons une solution quelconque.
Le sénateur Murray : Merci.
[Français]
Le sénateur Losier-Cool : Merci, madame la présidente.
En ce qui a trait à l'Entente multipartite avec le groupe de Vancouver, nous savons tous, monsieur le ministre, que lorsque nous visitons un pays étranger, la première impression que nous avons est souvent celle qui demeure.
Je disais donc que des milliers de voyageurs vont arriver à l'aéroport international de Vancouver. Dans l'entente, y a-t-il des exigences au niveau des services dans les deux langues officielles à l'aéroport de Vancouver, afin que les voyageurs puissent identifier tout de suite le caractère unique qui est celui de deux langues officielles au pays?
[Traduction]
M. Emerson : Je pense qu'on exige que les aéroports offrent des services dans les deux langues officielles. Presque sûrement grâce à un accord entre plusieurs parties, le Comité organisateur de Vancouver veillerait à ce que les préposés sur place soient capables d'accueillir les visiteurs, les athlètes et les entraîneurs en anglais ou en français. Je vous rassure donc à ce propos même si j'obtiendrais confirmation auprès de John Furlong à la première occasion.
Le sénateur Losier-Cool : Il y a autre chose au-delà des services offerts par un aéroport, par exemple les commerces et les boutiques. Vous avez répondu au sénateur Munson en ce qui concerne l'aspect commercial et les commerçants pourraient être incités à répondre à leurs clients dans les deux langues officielles.
Une fois que l'on quitte l'aéroport, on est sur la route.
[Français]
J'en viens donc à la signalisation bilingue dans les villes, que ce soit Whistler ou Vancouver. Je souhaite fortement que le gouvernement s'assure d'une signalisation bilingue sur les routes.
[Traduction]
M. Emerson : Merci, nous allons nous occuper de cela.
[Français]
Le sénateur Champagne : Je vais revenir un petit moment, si vous me le permettez, sur la question de la télévision. Je pense que ce que Radio-Canada voulait éviter, c'était d'avoir à diffuser les annonces publicitaires de Globemedia car il perdait ainsi des sommes d'argent assez importantes. Le sénateur Munson nous a fait remarquer également que Radio- Canada pourrait acheter de la publicité pour diffusion pendant les Jeux, vu qu'il y aura 550 heures de diffusion en français et plus que le double en anglais. Je pense que l'on peut s'attendre d'ores et déjà à ce que le budget de publicité en anglais soit plus important qu'en français.
Je voulais aussi revenir aux cérémonies d'ouverture et de clôture des Jeux. Pouvez-vous me dire qui en a la responsabilité? Qui a vraiment un œil de supervision là-dessus?
[Traduction]
M. Emerson : Officiellement, la responsabilité des cérémonies incombe au COVAN, mais ceux qui paient les musiciens ont leur mot à dire pour le choix des partitions. Je m'attends donc à ce que le gouvernement du Canada travaille en étroite collaboration avec le COVAN pour ce qui est des cérémonies d'ouverture et de fermeture pour garantir la prééminence de la dualité linguistique, des racines culturelles et de la diversité. Nous avons tous été déçus d'entendre parler de ce qui s'était passé à Turin en Italie. Je n'ai entendu que des critiques acerbes sur ce qui s'était passé là-bas.
[Français]
Le sénateur Champagne : La belle chanson italienne était merveilleuse à la fin, mais c'était de l'italien et de l'anglais. Le français a vraiment fait figure de parent pauvre à Turin et je pense que tout le monde ici et à bien d'autres endroits au Canada, nous espérons que le français et les francophones auront l'occasion de faire meilleure figure à Vancouver.
Le sénateur Nolin : Moi aussi, je voudrais vous relancer sur la question des cérémonies d'ouverture et de fermeture. Ce n'est pas à vous et à personne autour de la table que nous apprendrons cette nouvelle : Le Canada bilingue ou le Canada français, c'est beaucoup plus que le Québec; le Canada français — et vous en avez un bon exemple ici — ce sont des francophones qui vivent une culture qui est la leur, qui n'est pas uniquement la culture québécoise, c'est une culture qui leur est propre. Et pour faire le suivi de la question de ma collègue, le sénateur Champagne, j'ose croire que le gouvernement du Canada mettra tous ses efforts pour assurer, pas uniquement le bilinguisme ou la saveur québécoise à l'intérieur de ses cérémonies, mais aussi le côté unique de la culture. Je pense aux francophones qui vivent dans l'Atlantique et aux francophones qui vivent dans les Prairies, entre autres.
Je ne voudrais pas qu'on se dise, deux ou trois mois avant l'échéance, qu'il est trop tard, que c'est déjà bouclé et qu'on aurait voulu que ce soit mieux.
Alors quelle sorte de mécanismes le gouvernement du Canada a-t-il déjà mis en place ou s'apprête-t-il à mettre en place pour assurer un suivi des engagements d'un peu tout le monde? Tous nous font des promesses et nous donnent leur parole que tout va bien aller et qu'on va faire tout ce qu'on peut. Les Jeux durent deux ou trois semaines. Lorsqu'on sera rendu à deux mois de l'échéance, il sera trop tard; les sommes auront été engagées et les contrats auront été attribués. J'espère que vous avez imaginé des mécanismes de suivi pour assurer que ceux qui ont des décisions politiques à prendre — c'est-à-dire vous, monsieur le ministre, le ministre des sports, le premier ministre du Canada, les gens en autorité qui jouent gros dans une telle opération — pourront avoir des avis et pourront corriger le tir avec force et détermination si besoin est.
[Traduction]
M. Emerson : Il faut dire que le COVAN a fait un bon travail jusqu'à présent. Comme je l'ai dit, quand le COVAN nous présentera un plan d'affaires révisé, le document sera important, car il exigera d'être paraphé par le gouvernement fédéral et nous allons exiger des mécanismes d'évaluation, des mesures de rendement et des chemins critiques. J'exhorte les membres de ce comité à faire appel à moi ou à quiconque aura la responsabilité de ce dossier au milieu de l'année prochaine pour confirmer que le cadre d'évaluation et de suivi répond à nos attentes. Vous avez mon assurance que nous allons travailler en étroite collaboration avec le COVAN, et nous ne parapherons pas le plan d'affaires tant que nous n'aurons pas l'assurance que nous obtenons des renseignements à point nommé. Si les choses n'évoluent pas de façon satisfaisante, nous pouvons intervenir avant qu'il soit trop tard. Vous auriez peut-être intérêt à rappeler certains témoins avant le milieu de 2007.
[Français]
Le sénateur Nolin : Monsieur le ministre, nous allons suivre cela de très près; merci de vos engagements. Je pense que tout le monde devra mettre la main à la pâte et les premiers témoins seront les communautés francophones de la Colombie-Britannique, avec qui vous avez déjà signé des ententes; vous y avez fait référence dans vos remarques liminaires. On nous laisse comprendre que le financement des activités de ces deux organisations, la Fédération des francophones de la Colombie-Britannique et la Fondation canadienne pour le dialogue des cultures, auraient besoin de financement plus élevé pour assurer une efficacité dans la reddition de services qui, selon moi, sera critique.
Ils sont sur place. Cela ne prend pas de grands voyages en avion, ils sont témoins de ce qui se fait et de ce qui se trame — ou souvent, de ce qui devrait se faire et ne se fait pas. Je pense que ces deux organismes auront besoin du support du gouvernement fédéral pour améliorer leurs capacités financières. J'ose croire monsieur le ministre — c'est une question un peu suggestive — que vous veillerez à convaincre votre collègue, Mme Oda, de financer à une hauteur acceptable les efforts et les besoins financiers de ces deux organismes.
[Traduction]
Ce pourrait être oui ou non.
M. Emerson : Si je ne m'abuse, c'est sans doute Mme Verner qui est la ministre responsable. Vous avez tout à fait raison. On ne peut pas faire cela pour rien. Il faut les budgets appropriés et c'est ce que nous sommes en train de prévoir actuellement.
[Français]
Le sénateur Nolin : Ces deux organismes seront certainement les yeux et les oreilles d'un comité comme le nôtre, car nous attacherons une attention particulière à leur opinion tout au long de cette aventure que nous souhaitons la plus heureuse possible.
La présidente : Je vais me permettre une question supplémentaire à celles du sénateur Nolin. Monsieur le ministre, dans cette grande organisation, avec tous ces partenaires, qui a vraiment le dernier mot? S'agissant de corriger le tir si on ne respecte pas la Loi sur les langues officielles, qui a le dernier mot? Est-ce que c'est vous, monsieur Emerson, ou quelque ministre? Est-ce que quelqu'un a l'autorité suprême ou est-ce que c'est partagé entre plusieurs?
[Traduction]
M. Emerson : Il y a un accord entre plusieurs parties. En tant que ministre responsable, je vous dirais que vous devez vous tourner vers moi pour garantir que tous les engagements pris aujourd'hui, ou à un autre moment, sont respectés. Je ne veux pas me décharger de cette responsabilité auprès d'un autre ministre. Je suis sûr que Mmes Verner et Oda se joindront à moi pour garantir que la tâche est accomplie selon vos souhaits.
[Français]
Le sénateur Robichaud : Pour ajouter à ce que mon collègue, le sénateur Nolin, disait concernant les demandes de financement venant des associations qui sont sur place, je pense que le choix du moment est très important. Il ne faudrait pas attendre trop longtemps. Il faudrait donner le temps à ces organisations d'être en mesure de profiter de ce financement pour mettre en place les personnes dont elles ont besoin.
Aussi, sur le plan de la diffusion, vous dites que vous allez surveiller cela de près et je n'ai aucun doute là-dessus. Or, les gens de Radio-Canada qui étaient ici la semaine dernière nous disaient que, s'il devait y avoir une entente avec Radio-Canada, il faudrait le faire dans les plus brefs délais, parce que cela demande toute une organisation de leur programmation. Il ne faudrait pas que Radio-Canada soit dans l'impossibilité d'en arriver à une entente par manque de temps.
Je vous dis tout simplement cela comme un conseil, car nous avons entendu les différents partenaires — ou les gens qui seront impliqués dans les Jeux olympiques et nous tous ici voulons que ce soit un grand succès.
[Traduction]
Le sénateur Jaffer : Je voudrais aborder la question du déménagement de la Commission canadienne du tourisme à Vancouver. C'est une de vos réalisations quand vous occupiez d'autres fonctions.
Quand Mme Demers est venue témoigner, j'ai été troublée par ses propos, à savoir qu'on envisage de déplacer des organismes fédéraux vers des collectivités bilingues, et non vers des collectivités unilingues. Cela signifie que Vancouver n'aura sans doute jamais la possibilité d'abriter un organisme fédéral. J'ai rappelé à Mme Demers qu'à Charlottetown, il y a un organisme fédéral et elle m'a répondu que Charlottetown avait besoin d'emplois et que Vancouver n'en avait pas besoin. Si nous réclamons des organismes fédéraux, ce n'est pas pour cette raison. C'est parce que nous voulons faire partie du Canada.
Elle a dit « Manifestement, le gouvernement fédéral doit être en mesure de servir les Canadiens et d'autres clients. » Elle a poursuivi :
Ces deux objectifs, à notre avis, vont pouvoir être atteints en maintenant les administrations centrales dans des centres où il y a une masse suffisamment critique de fonctionnaires fédéraux pour servir ce public. »
Vous êtes le ministre responsable de la Colombie-Britannique, et même si vous n'avez pas ces renseignements aujourd'hui, je voudrais que vous fournissiez au comité des détails sur la formation que les fonctionnaires fédéraux reçoivent en Colombie-Britannique. Évidemment, l'idéal serait que la Colombie-Britannique devienne bilingue pour qu'il y ait une raison d'y déménager des organismes fédéraux. Des fonctionnaires me disent qu'ils n'ont pas les mêmes avantages que les fonctionnaires qui travaillent à Ottawa pour ce qui est de la formation linguistique. Je vous remercie d'accepter de nous fournir ces renseignements. Combien de fonctionnaires suivent-ils une formation, dans quelle mesure est-elle disponible, sont-ils admissibles au programme de 12 mois auquel les fonctionnaires ont droit à Ottawa?
M. Emerson : Permettez-moi de vous dire que contrairement à d'autres, je ne pense pas que les institutions du gouvernement canadien devraient toutes être situées dans des localités bilingues. Si c'était le cas, ce serait épouvantable et ce serait source de divisions.
La CCT est le seul organisme fédéral situé en Colombie-Britannique. De tout temps, il n'y a jamais eu un grand nombre d'administrations centrales fédérales là-bas. Quand j'étais responsable de la Commission — et je ne le suis plus — j'ai demandé aux dirigeants de la CCT de veiller non seulement à respecter la lettre de la Loi sur les langues officielles mais d'aller encore plus loin afin de maintenir le niveau de bilinguisme qui existait quand la Commission était située à Ottawa. Comment y sont-ils parvenus? Je ne peux pas répondre à cette question. En outre, je ne sais pas vraiment quel niveau de formation et quel débouché on offre en Colombie-Britannique par comparaison aux autres régions du pays. Honnêtement, je ne pensais pas qu'il y avait une différence. Je pensais qu'en tant que fonctionnaires, à un certain niveau dans la hiérarchie et pour certains postes, il y avait une exigence nationale au bilinguisme. Je ne savais pas que les choses se passaient différemment en Colombie-Britannique.
Le sénateur Jaffer : Monsieur le ministre, sur papier, c'est identique, mais chaque ministère doit financer les programmes offerts et, invariablement, le financement s'épuise et on prévoit de reporter les programmes à l'année suivante. L'intention est sans doute là mais en pratique, il y a des lacunes.
Le sénateur Murray : Dans un petit service, il est difficile de se passer de quelqu'un qui souhaite suivre une formation linguistique. Plus on est loin du centre, plus il est difficile pour un employé de suivre des cours. De toute façon, c'est ce que l'on nous a dit.
M. Emerson : Je vais faire un suivi étant donné mon rôle de ministre responsable de la Colombie-Britannique. Tout comme vous, j'ai des inquiétudes. La Colombie-Britannique est une province, c'est certainement vrai pour la région de Vancouver, où l'immersion en langue française et la culture française sont acceptées. Cela suscite de l'enthousiasme. Cela se développe et c'est salutaire. Loin de nous l'idée de ne pas nous acquitter de nos responsabilités, à savoir financer et appuyer la croissance et l'expansion de la langue et de la culture françaises en Colombie-Britannique.
Voilà mon engagement. Croyez-moi. Quand j'étais jeune, je n'ai pas obtenu la formation que j'aurais due recevoir. Comme le sénateur l'a indiqué, je me sentais toujours trop occupé pour suivre cette formation quand j'ai eu l'occasion de le faire. Je le regrette. Les citoyens de Colombie-Britannique aussi veulent prendre par à la dualité linguistique du Canada.
Le sénateur Munson : Pour les Jeux, vous êtes le porte-parole, n'est-ce pas? Les Jeux auront lieu en 2010. Où envisagez-vous d'être en 2010?
M. Emerson : C'est la meilleure!
Le sénateur Munson : C'est l'ex-journaliste en moi qui parle. Je n'y peux rien.
M. Emerson : J'ai l'intention d'être à Vancouver et de fréquenter Whistler.
Le sénateur Munson : Ma question n'est pas facétieuse. Les Jeux sont importants pour vous et vous voulez qu'ils soient une réussite, comme nous tous, dans les deux langues officielles.
M. Emerson : Oui, je le veux et j'ai l'intention d'être présent.
La présidente : Monsieur le ministre, merci d'avoir pris le temps de venir témoigner et merci de votre intérêt pour le travail du comité. Merci également de vous engager à faire en sorte que les deux langues officielles soient respectées aux Jeux de 2010.
Nous accueillons maintenant l'honorable Peter Van Loan, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre des Sport. Mme LaRocque et M. Tom Scrimger, directeur général de Sport Canada, l'accompagnent. Bienvenue monsieur le ministre. La parole est à vous.
[Français]
L'honorable Peter Van Loan, C.P., député, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre des Sports : Madame la présidente, je suis heureux d'être parmi vous aujourd'hui afin de vous parler d'un sujet qui nous préoccupe tous.
D'entrée de jeu, je tiens à vous assurer que le gouvernement du Canada partage votre volonté d'assurer la vitalité de la langue et de la culture françaises au Canada. Nous savons que notre dualité linguistique est un élément essentiel de notre identité et de notre société.
[Traduction]
Le sport occupe également une place de choix au sein de l'identité canadienne. Les intellectuels peuvent s'acharner tant qu'ils veulent à tenter de définir l'identité canadienne mais je sais très bien que les Canadiens et Canadiennes n'hésitent pas à définir fièrement leur identité à l'aide de sports que nous considérons typiquement canadiens comme le football à trois essais, le hockey, la crosse, le curling et d'autres.
Qu'il s'agisse de se lever pour entendre l'hymne national au début d'une partie ou de célébrer les victoires canadiennes dans les compétitions internationales, le sport nous donne de nombreuses occasions d'être fiers d'être Canadiens. Le sport incarne les valeurs canadiennes que nous chérissons — des valeurs comme persévérance, l'esprit de compétition, le goût de réussir, le travail d'équipe et la solidarité. Notre gouvernement aide les familles et les enfants canadiens à participer à des activités sportives dans leur communauté afin qu'ils puissent bénéficier d'un mode de vie sain et actif.
Le gouvernement a déjà démontré son engagement indéfectible envers le sport. À titre de ministre des Sports, je suis heureux d'avoir l'occasion de consolider le système sportif canadien et de le rendre plus inclusif et plus adapté aux besoins des athlètes canadiens. Il va de soi que les langues officielles sont au cœur de cette démarche.
Aujourd'hui, j'aimerais aborder trois sujets : tout d'abord, les conclusions, les difficultés et les mesures découlant du rapport intitulé Les obstacles linguistiques à l'accès aux sports de hauts niveaux; deuxièmement, les mesures prises par Sport Canada pour appuyer la dualité linguistique dans le système sportif canadien; et troisièmement, les mesures prises à l'égard des langues officielles pour les Jeux du Canada en 2007.
[Français]
À titre de ministre des Sports, je veux travailler avec les fonctionnaires de Sport Canada en vue de mettre en place un système sportif qui encourage la participation de l'ensemble de la population.
Nous voulons permettre au plus grand nombre de Canadiens de bénéficier des avantages du sport. Une des façons d'y arriver est de s'assurer que les athlètes peuvent atteindre le plein potentiel dans l'une ou l'autre de nos deux langues officielles. C'est pourquoi Sport Canada a suivi la recommandation du commissaire aux langues officielles afin de mener une étude indépendante sur la participation des athlètes de communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Cette étude visait à déterminer si la langue peut constituer un obstacle au sein du système sportif canadien, notamment pour les athlètes de haut niveau.
[Traduction]
L'étude sur les obstacles linguistiques à l'accès aux sports de hauts niveaux a révélé que la langue ne constituait pas un obstacle important à la carrière des athlètes de hauts niveaux. Les barrières financières et géographiques constituent les obstacles majeurs auxquels font face nos athlètes francophones et anglophones
L'étude démontre que les services bilingues de Sport Canada sont adéquats. Elle a également révélé que nous devions continuer à accroître le bilinguisme dans le système sportif canadien particulièrement dans le domaine de l'accès aux services et de leur prestation.
En réaction aux 14 recommandations de cette étude indépendante, nous avons mis sur pied un groupe de travail pour élaborer un plan d'action. Les membres du groupe de travail comprennent des représentants de la communauté sportive, du Commissariat aux langues officielles, des gouvernements provinciaux et territoriaux et des organismes des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
[Français]
Voilà une occasion de créer un système sportif encore plus ouvert, qui tient vraiment compte des besoins de nos athlètes. Le travail est déjà bien entamé.
Premièrement, comme je l'ai déjà mentionné, Sport Canada a fait beaucoup d'efforts pour accroître le taux de bilinguisme au sein de son personnel. Aujourd'hui, 96 p. 100 des employés peuvent travailler dans les deux langues officielles. Sport Canada a aussi affecté deux personnes à temps plein à l'élaboration et à la mise en œuvre de son plan d'action sur les langues officielles.
Je peux vous dire avec fierté que notre engagement envers les langues officielles va bien au-delà des murs de nos bureaux. Pour recevoir le financement de base de 52 millions de dollars que leur offre le gouvernement du Canada, les organismes nationaux de sport doivent s'engager à fournir à leurs membres des services dans les deux langues officielles.
De plus, nous versons près d'un million de dollars par année à des programmes d'organismes nationaux de sport et d'organismes de services multisports pour qu'ils se rapprochent de leur objectif en matière de langues officielles.
[Traduction]
Nous avons également pris des mesures pour que nos athlètes reçoivent des renseignements, des services de soutien et des services d'entraînement dans la langue officielle de leur choix. Par exemple, une partie des fonds accordés par Sport Canada a permis de traduire des documents et de donner des cours de langue à des entraîneurs.
Sport Canada travaille aussi en étroite collaboration avec l'Association canadienne des entraîneurs, les organismes nationaux de sports et les organismes de services multisports pour identifier des domaines nécessitant des améliorations au chapitre des langues officielles. De plus, nous colligeons des données afin d'avoir un bilan précis de la situation linguistique des entraîneurs des équipes nationales. Nos efforts portent déjà leurs fruits. Selon nos données, le nombre d'entraîneurs bilingues au niveau national a augmenté de 10 p. 100 au cours des trois dernières années.
[Français]
Sport Canada a révisé ses normes nationales de reddition de comptes à l'égard des organismes nationaux de sport; cinq de ces 20 normes portent sur les langues officielles. Sport Canada a élaboré ces nouvelles normes en collaboration avec les principales parties intéressées, dont le Commissariat aux langues officielles.
Permettez-moi de souligner qu'une de ces normes porte sur les sites Web des organismes nationaux de sport. Je sais que c'est un sujet qui vous intéresse beaucoup.
Cette norme précise que les sites Web des organismes nationaux de sport doivent présenter l'information dans les deux langues officielles, et ce, qu'elle soit destinée au public, à leurs membres ou à la communauté sportive. Cette information porte notamment sur l'initiation aux sports, les règles d'adhésion, les règlements, les calendriers et les horaires des activités.
Encore une fois, nous avons fait des progrès en matière de services bilingues. D'ailleurs, le commissaire aux langues officielles a reconnu ces progrès. Soyez assurés que Sport Canada continuera à travailler avec les organismes nationaux de sport, les organismes de services multisports et les centres canadiens multisports pour accroître la quantité et la qualité des services offerts aux athlètes et au public dans la langue officielle de leur choix.
[Traduction]
Enfin, j'aimerais aborder la question des langues officielles au Jeux du Canada de 2007 à Whitehorse. L'entente multipartite des Jeux du Canada précise que les langues officielles des Jeux sont le français et l'anglais, ainsi que les obligations de la société hôte en la matière. La société doit notamment offrir ses services dans les deux langues officielles au public, aux athlètes, aux entraîneurs, aux officiels et à tous les membres des missions provinciales et territoriales. L'entente multipartite précise également que la société hôte doit déployer des efforts particuliers pour recruter des membres de la communauté de langue officielle en situation minoritaire et encourager leur participation aux Jeux de 2007.
[Français]
C'est pourquoi l'Association franco-yukonnaise aide la société hôte à recruter et à former des bénévoles, ainsi qu'à planifier les cérémonies d'ouverture et la programmation culturelle. Durant les Jeux, Sport Canada vérifiera si les exigences relatives aux langues officielles sont respectées, comme stipulé dans l'entente.
[Traduction]
Je vais m'arrêter ici, car je suis sûr que vous avez des questions à me poser.
Je remercie les membres du comité de l'intérêt qu'ils portent à la question des langues officielles et du système sportif canadien. Comme je l'ai dit tout à l'heure, je me soucie de trouver le moyen de faire en sorte que notre système sportif soit accessible au plus grand nombre possible.
[Français]
Je crois sincèrement que les leçons apprises sur les terrains de jeux forment de grands athlètes. Plus important encore, elles forment de grands citoyens. C'est pour cette raison que les programmes sportifs doivent donner à plus de Canadiens possible, la chance d'aller à l'école de la vie en pratiquant des sports.
[Traduction]
Le travail important que vous accomplissez est au cœur même de la notion d'efforts pour réduire les barrières entre les Canadiens. Je suis impatient de continuer de travailler avec vous dans ce sens.
Je pense que chacun sait très bien que je travaille ardûment à ce dossier depuis des années, où plutôt 14 jours. Je vais faire de mon mieux mais j'ai la bonne fortune d'être appuyé par Judith LaRocque et Tom Scrimger, qui m'aideront à répondre à vos questions si elles portent sur des sujets difficiles à maîtriser après deux semaines en fonction.
Le sénateur Munson : Bienvenu, monsieur le ministre, félicitations et meilleurs vœux dans vos nouvelles fonctions. Je sais qu'il est difficile de consulter les chiffres mais Sport Canada a-t-il assez de ressources pour être un chef de file au titre des langues officielles? Votre budget est-il assez important, assez solide?
M. Van Loan : J'ai pu constater certains progrès et j'en conclus que les ressources que l'on a injectées ont fait une différence. Encore une fois, c'est sous un angle rétrospectif. Nous avons parlé d'entraîneurs et de leur niveau de bilinguisme. En 2003-2004, sur les 403 entraîneurs les organisations sportives nationales et athlètes de niveau national, 103 étaient bilingues. Autrement dit, 25,5 p. 100 en 2003. Trois ans plus tard, en 2006-2007 sur 599 d'entre eux, 213 sont bilingues, soit 35 p. 100. Cette augmentation s'est produite en trois ans seulement. Devant ces résultats, il faut se dire que l'argent a été injecté mais je pense qu'il y a également un facteur structurel, en raison de l'accord de contribution, facteur qui est un élément central, les organisations sportives nationales étant plus au fait du besoin.
Si on demandait s'il y a assez d'argent, la réponse de prime abord serait que non, il n'y en a pas assez. Si on nous donnait plus d'argent toutefois, nous nous en servirions à autre chose que pour la question des langues, parce que la priorité des organisations sportives et des athlètes en particulier est toujours l'entraînement.
Le sénateur Munson : Monsieur Scrimger, êtes-vous d'accord avec cette évaluation?
Tom Scrimger, directeur général, Sport Canada, Patrimoine canadien : Jamais je n'oserais être en désaccord avec le ministre, si bien que je m'en tiendrai à cela. Le ministre a cerné deux questions : d'une part, les budgets, et d'autre part, la volonté d'atteindre des objectifs communs. Nous progressons sur les deux fronts.
Mme LaRocque : De plus gros budgets sont toujours souhaitables, mais la volonté doit être là. Il faut être mordu. Le commissaire aux langues officielles nous a dit il y a quelques années qu'il n'existait pas nécessairement les structures nécessaires pour réussir. On a donc fait de gros efforts pour mettre ces structures en place et embaucher des personnes convaincues du bien-fondé de l'objectif. Il est capital que ces gens tiennent à la réussite.
Nous comptons sur un avantage supplémentaire, à savoir que Sport Canada est au sein du ministère du Patrimoine canadien, qui a également un programme pour les langues officielles. Nous pouvons donc tirer des leçons et appliquer des pratiques exemplaires. Nous pouvons faire avancer les choses d'une façon qui serait impossible si nous étions situés au sein d'un autre ministère. Cela aide également.
Le sénateur Munson : Monsieur le ministre, vous avez fait allusion au rapport intitulé Les obstacles linguistiques à l'accès aux sports de hauts niveaux. Vous avez dit que cette étude avait démontré que la langue n'était pas une entrave capitale à la participation des athlètes de hauts niveaux mais que le système, si j'ai bien compris, fonctionnait encore essentiellement en anglais.
M. Van Loan : Cette conclusion est fondée sur la perception des athlètes de haut niveau. Sport Canada a mené à bien cette étude, que nous reprenons de temps en temps. La dernière fois, c'était en 2005, c'est-à-dire assez récemment. On a posé 21 questions aux athlètes pour savoir si les services disponibles étaient adéquats. Le souci concernant les langues a été classé 18 sur 21. À mon avis, c'est là-dessus que se fonde la conclusion de l'étude. Les athlètes, pour la plupart, étaient assez satisfaits à cet égard.
D'autre part, l'étude fait valoir que ceux et celles qui deviennent des athlètes de haut niveau sont, par nature, des sujets brillants, incroyablement axés sur la réussite et très passionnés. Vous n'avez qu'à parler à des athlètes et vous verrez que c'est évident. Pour atteindre le niveau qu'ils ont atteint, ils ont surmontés des entraves qui sont souvent bien au-delà d'une barrière linguistique. Ce peut être des barrières sociales, l'opposition de la famille, des capacités physiques réduites. Manifestement, c'est courant chez les athlètes de haut niveau. Dans cette étude, on laisse entendre que le souci concernant les barrières linguistiques se fait sentir davantage chez les athlètes de moindre niveau, au départ, quand les athlètes s'intègrent au système; c'est là que la barrière linguistique ferait une différence.
Le sénateur Munson : M. Emerson nous a parlé des Jeux d'hiver de 2010 et de ce que le gouvernement du Canada fera pour garantir que les deux langues officielles soient à l'honneur au moment des Jeux d'hiver. Quel rôle Sport Canada jouera-t-il en 2010 sur le plan des Jeux paralympiques et du bilinguisme afin que nos deux entités culturelles soient traitées également?
M. Van Loan : M. Emerson, en tant que ministre responsable des Jeux olympiques de Vancouver, est mieux à même que moi de répondre à ces questions. Le gouvernement a pour l'essentiel assumé ses responsabilités grâce à un protocole d'accord avec le COVAN. Le gouvernement a établi les responsabilités et l'exigence est que les Jeux soient des Jeux bilingues. Je sais qu'on a parlé du niveau de bilinguisme aux Jeux olympiques de Turin. Nous souhaitons faire beaucoup mieux qu'à ces Jeux.
Le gouvernement du Canada, qui a conclu cette entente, laquelle prévoit une clause spécifique à cet égard, impose au comité organisateur de Vancouver des normes et c'est à lui qu'il appartiendra de les respecter.
Le sénateur Munson : Ces normes s'appliquent-elles aux Jeux paralympiques?
M. Scrimger : Je pense que oui. Nous sommes en train de parler de l'entente multipartite que le gouvernement fédéral a conclue avec le COVAN et le gouvernement de la Colombie-Britannique. Pour ce qui est des opérations quotidiennes et du déroulement des Jeux, cette question relève du ministre Emerson et de mon collègue David Robinson, qui était ici il y a à peine une heure.
Les Jeux olympiques et paralympiques de 2010 à Vancouver ont été confiés à un secrétariat, ce qui est bien la preuve d'engagements sérieux de faire des Jeux de 2010 une manifestation qui reflète véritablement la dualité linguistique du Canada à tous les égards. C'est ainsi que j'interprète cela, pour le fonctionnement de ces Jeux, et en tant qu'observateur assez objectif, c'est l'engagement très net que je constate chez tous ceux avec qui je traite.
Le rôle de Sport Canada au cours des Jeux de 2010 s'oriente vers l'appui lors de la préparation de nos équipes nationales et, en l'occurrence, leur préparation par l'intermédiaire de leurs propres programmes d'entraînement. Pour résumer la différence entre les responsabilités de mon collègue David Robinson et les miennes, je dirais qu'il a la responsabilité de s'assurer que les Jeux se dérouleront et que moi, j'ai celle de m'assurer que le Canada est sur le podium. C'est une façon rapide de faire la différence entre nos deux tâches.
[Français]
Le sénateur Nolin : Monsieur le ministre, félicitations pour votre nomination. Je comprends que cela ne fait que 14 jours, mais vous semblez déjà fort habile à maîtriser les nuances de vos responsabilités. C'est tout à votre honneur.
Dans votre discours, vous nous parlez de cinq normes qui touchent la question des langues officielles. Vous avez parlé des sites Web. Quelles sont les quatre autres normes qui ont été mises en place?
M. Scrimger : Les quatre autres normes...
Le sénateur Nolin : Cela me fait énormément plaisir de constater que vous faites partie du 96 p. 100.
M. Scrimger : On parle de la capacité de chaque organisme de sport d'identifier leurs membres par la langue officielle de chaque membre...
Le sénateur Nolin : Attendez, j'aimerais comprendre. Chaque organisme de sport doit être capable d'identifier ses membres...
M. Scrimger : — par leur langue officielle. À Hockey Canada, on a un million de membres.
Le sénateur Nolin : Autrement dit, il faut qu'il y ait une petite boîte qui marque « anglais » ou « français ».
M. Scrimger : C'est une des normes. La deuxième norme couvre tous les services que l'organisme national de sport doit offrir aux membres dans les deux langues officielles; la troisième : le site web de l'organisme doit être bilingue. Deux autres normes sont la communication avec les athlètes ou les membres de l'équipe nationale ainsi qu'une capacité pour les entraîneurs de l'équipe nationale d'offrir les services ou les instructions aux athlètes dans les deux langues officielles.
De plus, on a deux autres normes qui mentionnent les langues officielles, qui parlent de nos normes sur les questions du harcèlement et de l'abus, pour l'équipe nationale ainsi que pour les membres de l'organisation.
Le sénateur Nolin : Monsieur le ministre, monsieur Scrimger, madame LaRocque, depuis 20 ans, tous vos prédécesseurs, à l'approche des Jeux olympiques, ont eu à faire des arbitrages. Parce que des responsables d'équipes nationales, de toute évidence, favorisaient arbitrairement — c'est du moins comme cela que la population francophone du Canada le perçoit — des athlètes de langue anglaise, qui étaient moins performants que des athlètes de langue française.
Est-ce qu'il existe des normes sur la composition des équipes nationales qui doivent refléter un équilibre ou l'on doit avoir des équipes nationales qui sont composées des meilleurs athlètes, indépendamment de leur langue et de leur origine ethnique?
M. Van Loan : J'espère que les athlètes choisis sont les meilleurs.
[Traduction]
C'est certainement ce que nous espérons. Il a été question d'imposer des normes linguistiques aux athlètes. Je ne pense pas que ce soit souhaitable. Nous voulons les meilleurs athlètes possibles. Dans l'étude, on s'est demandé s'il y aurait un préjugé linguistique dans la sélection des athlètes formant nos équipes nationales. Et quelques preuves anecdotiques fournies me portent à croire que ces preuves ne sont pas concluantes. L'étude ne conclut pas formellement qu'il n'existe pas, mais M. Scrimger pourra peut-être en dire plus long.
[Français]
M. Scrimger : Il faut se souvenir que la sélection des équipes nationales est entièrement de la responsabilité de l'organisme national du sport, qui est indépendant et autonome de Sport Canada. On cherche toujours à ce que le processus de sélection pour les athlètes soit impartial. Si un athlète pense que la sélection pour l'équipe n'est pas impartiale, il peut toujours contester la sélection avec le Centre de règlement des différends sportifs du Canada. Nous avons établi ce service indépendant d'arbitrage et de médiation pour les athlètes qui pensent que la décision finale sur la sélection de l'équipe est toujours une question très complexe. La question des règlements pour la sélection, les normes que chaque athlète doit rencontrer pour la sélection, comment les équipes sont choisies, sont des questions très complexes dans chaque sport, mais je pense qu'à l'intérieur du système, depuis les derniers quatre ou cinq ans, on a un processus d'arbitrage indépendant. Les athlètes peuvent toujours profiter de ce service s'ils veulent contester la sélection finale de l'équipe.
Le sénateur Nolin : Vous n'êtes pas sans savoir — et je fais référence à des histoires concrètes, ce n'est pas une fabulation — qu'à chaque fois qu'on arrive au mois précédant les Jeux olympiques — ou les Jeux analogues, Commonwealth ou de la francophonie —, il y a toujours un athlète, malheureusement francophone... Il y en a peut- être dans la communauté anglophone qui se plaignent qu'il y a des entraîneurs francophones qui favorisent les francophones, mais dans les médias francophones, j'entends surtout parler du contraire. J'ai entendu parler de cet organisme indépendant de règlement des différends.
Je voulais savoir si vous vous en remettez complètement à cet organisme ou si, dans l'élaboration de vos normes, vous tentez d'amener vos entraîneurs — et ceux à qui vous confiez à la fois des fonds fédéraux et aussi l'avenir de nos athlètes d'élite — à saisir l'importance, tout en respectant les valeurs et les cultures différentes, de rechercher finalement pour l'équipe canadienne de quelque sport que ce soit, les meilleurs. C'est cela ma question. C'est pour cela que je vous ai posé des questions sur les normes. Cela semble tout beau, mais j'ai l'impression que ce n'est pas ce qui va empêcher le favoritisme. Je comprends l'indépendance, mais en bout de ligne, monsieur le ministre, c'est vous qui êtes responsable de distribuer les fonds fédéraux et j'ose croire que vous ne voudriez pas être, en bout de ligne, obligé d'arbitrer des questions de favoritisme qui me semblent hors d'ordre.
[Traduction]
M. Van Loan : Il est à espérer que le comité soit le meilleur endroit pour régler les différends. Certes, comme quiconque a déjà voulu être choisi pour faire partie d'une équipe le sait, la question du mérite est toute objective. La dynamique d'une équipe est un élément important. Je crois que cette formule offre à tout le moins l'occasion de discuter de ces préoccupations de façon objective, neutre, équitable et aussi, faut-il l'espérer, transparente.
Le sénateur Murray : Je suis très défavorisé du fait que je n'ai pas lu le rapport, de sorte que nous allons commencer par ceci.
J'ai suivi de près l'interprétation du rapport qu'a faite la ministre, en l'occurrence lorsqu'elle a dit que les barrières linguistiques n'existaient pas autant au niveau de l'équipe nationale qu'aux niveaux inférieurs, à mesure que les candidats gravissent les échelons.
L'un d'entre vous pourrait-il me donner plus de précision à ce sujet et me dire également si c'est plutôt le problème de quelqu'un d'autre que le vôtre ou le nôtre?
M. Van Loan : C'est le problème de quelqu'un d'autre étant donné que les organisations sportives nationales sont parfaitement capables de s'en charger. Si j'ai bien compris le problème, la difficulté se pose surtout au niveau des organisations sportives provinciales.
Le sénateur Murray : Dans quel genre de cas la langue serait-elle un obstacle aux niveaux inférieurs, à mesure que les candidats gravissent les échelons?
M. Scrimger : L'étude n'a pas conclu que la langue de la minorité, que ce soit l'anglais ou le français, représentait un obstacle en ce qui concerne les meilleures performances. Il avançait plutôt comme hypothèse que si obstacle il y avait, il se situait aux niveaux inférieurs.
C'est pour cette raison que l'une des recommandations de l'étude était qu'à moyen et à long terme, il faudrait examiner avec nos collègues des provinces et des territoires s'il n'existe pas un obstacle linguistique à un échelon inférieur dans le système sportif canadien.
Nous avons actuellement un groupe de travail qui se penche sur les 14 recommandations issues de l'étude et qui s'emploie à préparer un plan d'action, lequel sera soumis à la ministre. Nous allons devoir prendre ces recommandations que nous font les auteurs de l'étude et nous demander qu'elle est la meilleure façon de les mettre en application.
Je ne crois pas que l'étude contenait des preuves péremptoires permettant de dire où se situeraient ces obstacles. Il est évident que pour les athlètes canadiens de haut niveau qui sont accueillis dans l'équipe nationale, qu'il s'agisse d'une équipe junior ou sénior, les obstacles qui les empêcheraient de progresser son d'ordre financier et géographique.
Le sénateur Murray : Si certains athlètes, aux niveaux inférieurs, n'accèdent pas aux niveaux supérieurs en raison d'obstacles de nature linguistique, cela représente un problème et, au bout du compte, ce problème est le nôtre et le vôtre.
M. Scrimger : Cela devient effectivement un problème si, en raison d'une question de langue, nous devons perdre des athlètes de talent. La première chose que nous devons essayer de découvrir, c'est de savoir si c'est le cas et, dans l'affirmative, comment et pourquoi cela se produit-il.
Comme nous le savons tous, des athlètes quittent le système pour des raisons autres que des raisons linguistiques. Du point de vue de l'activité physique, le nombre de jeunes gens qui abandonnent les sports organisés au Canada est colossal. Il y a donc une question de génération qui se pose à nous, pourquoi tant de Canadiens quittent les sports organisés ou les sports de compétition à un si jeune âge, ce qui a pour effet de réduire considérablement le réservoir de talents dans lequel nous pouvons puiser pour aller chercher nos meilleurs athlètes de haut niveau.
La langue est peut-être une de ces raisons, mais je pars de l'hypothèse que ce n'est pas la seule. Mais c'est assurément l'une des raisons qui ont motivé les recommandations des auteurs.
Le sénateur Murray : Avez-vous déjà pu constater quelque chose portant à croire que ceux qui sont appelés à décider qui fera ou ne fera pas partie d'une équipe nationale utilisent un système de quota? Ce n'est pas comme au Sénat. On sait bien que nous voulons représenter la société canadienne, et c'est ce que nous faisons d'ailleurs, beaucoup plus que votre Chambre.
M. Scrimger : Le choix des membres d'une équipe nationale ne fait pas intervenir de critères linguistiques.
Le sénateur Murray : Je sais.
M. Scrimger : Pour vous donner une explication, lorsqu'il s'agit de choisir les membres d'une équipe, et je parle ici des Jeux olympiques, un exemple que tout le monde pourra probablement suivre facilement, ce choix est négocié, pour chaque discipline, par les membres du Comité olympique canadien, le détenteur de la franchise pour les Jeux et chaque organisation sportive nationale.
Pour ce qui est des sports lors des Jeux d'hiver, tels que le patinage de vitesse, il y aura des négociations particulières entre le COC et Patinage de vitesse Canada, afin de discuter des critères de qualification pour les athlètes participant aux Jeux olympiques. Ces critères sont négociés et font l'objet d'ententes, et les athlètes et les entraîneurs en sont informés.
Lorsqu'il s'agit de sports comme le patinage de vitesse, la question devient plutôt transparente. Un athlète répond aux exigences ou figure parmi les six patineurs les plus rapides. Mais encore là, nous avons un nombre limité de cas qui peuvent être soumis à l'arbitrage pour cause de circonstances atténuantes.
De façon anecdotique, je crois que le rapport indique que dans certains sports d'équipe, où la sélection n'est pas nécessairement basée sur le mérite personnel et sur une norme prescrite — le hockey étant un parfait exemple — il y a des histoires de part et d'autre de la question. L'entraîneur, la dynamique d'équipe et d'autres facteurs peuvent influencer la sélection. Bien sûr, je ne suis pas au courant de l'existence d'un quota.
Le sénateur Murray : Finalement, vous n'avez peut-être pas la réponse à cette question, mais je suis curieux. Je voudrais savoir si l'amélioration linguistique des entraîneurs au niveau national est due à la formation linguistique ou si les comités de sélection des entraîneurs ont fait preuve d'une plus grande diligence en matière de bilinguisme.
M. Van Loan : C'est une question intéressante.
Senator Murray : Oui. Vous êtes peut-être sur la bonne voie.
M. Van Loan : Je pense que la même règle de mérite s'applique aussi bien aux athlètes qu'aux entraîneurs. Je pense qu'il y a des entraîneurs qui sont recrutés dans le système canadien — et c'est quelque chose qu'on voit dans tous les pays — qui ne parlent peut-être pas bien les langues du pays, mais qui peuvent être de très bon entraîneurs en gymnastique ou autres domaines de spécialisation.
Cependant, il est clair qu'une sensibilisation accrue parmi les organisations sportives nationales, une sensibilisation découlant de leurs ententes, va permettre aux gens d'être plus sensibles à la question. Que cela signifie que les gens doivent apprendre ou que les entraîneurs soient choisis en tenant en compte de ces questions, ce sont des développements positifs. Je ne crois pas, cependant, que l'on veuille instaurer un quota ou vouloir qu'une exigence linguistique entrave l'embauche des meilleurs entraîneurs possibles.
Senator Murray : C'est comme pour tout emploi, incluant les emplois au gouvernement : dans beaucoup de cas, c'est très important que les titulaires aient une connaissance pratique de deux langues.
Il serait intéressant à savoir si l'amélioration résulte en partie de la formation efficace du personnel ou si des organisations qui ont recruté du personnel compétent qui ont une maîtrise du français et de l'anglais.
M. Van Loan : Si vous aspirez à une carrière d'athlète, vous n'avez qu'à vous concentrer sur votre performance physique. Cependant, si vous voulez devenir entraîneur et conseiller plusieurs athlètes, vous pouvez être plus sensible au fait d'entraîner des athlètes qui ne parlent pas la même langue maternelle que vous. Vous voudrez peut-être acquérir cette compétence afin d'accroître les possibilités d'entraînement.
[Français]
Le sénateur Robichaud : Bien qu'il y ait eu énormément d'efforts faits à Sport Canada, plusieurs témoins nous on dit que la langue parlée était, et de loin, l'anglais. Même les athlètes francophones ne se servent pas des services mis à leur disposition. Même chez nous, qui est un milieu assez francophone, les jeunes qui jouent au hockey parlent anglais. Que pourrait-on faire pour encourager les athlètes à parler en français dans les sports d'équipe? Exige-t-on que les entraîneurs de ces équipes soient bilingues dès le départ? Ce n'est pas sous la juridiction de Sport Canada, mais de l'association du sport en question, n'est-ce pas?
[Traduction]
M. Van Loan : Il y a plusieurs niveaux à cette question. Au niveau des athlètes individuels, Sport Canada les encourage activement à demander des services dans la langue de leur choix.
Si vous devenez un athlète breveté, un athlète de haut niveau subventionné par le gouvernement, la lettre vous avisant que vous recevrez 18 000 $ par année indique aussi que, dans vos rapports avec Sport Canada, vous êtes encouragé à utiliser la langue de votre choix.
Dans l'entente entre l'organisme national de sport et l'athlète, on réfère au fait que l'organisme national de sport doit offrir à l'athlète des services dans la langue de son choix.
Pour ce qui est de la dynamique d'équipe, surtout pour une équipe de hockey, l'environnement est plus complexe. Vous n'avez qu'à demander à quelqu'un des Alouettes de Montréal ou des sénateurs d'Ottawa comment ils gèrent cette dynamique. Comme vous pouvez voir, je n'ai jamais eu l'expérience de cet environnement, et je demanderai à M. Scrimger de répondre à cette question.
[Français]
M. Scrimger : C'est une question d'offre et de demande. Nous travaillons sur les deux volets à Sport Canada. Nous voulons que chaque organisation nationale de sport soit capable d'offrir une gamme de services à leurs membres et athlètes dans les deux langues officielles du Canada. On travaille en étroite collaboration avec les organismes et on veut améliorer les services offerts. Comme le ministre l'a mentionné, il faut aussi encourager les athlètes à demander les services dans la langue de leur choix. La lettre que je signe chaque semaine pour les athlètes brevetés a pour but d'encourager les athlètes à demander les services. L'étude indépendante a suggéré que l'on considère avoir des campagnes de marketing pour les athlètes et les membres afin de les aviser des services disponibles et qu'ils doivent tirer avantage de ces services au niveau national. C'est un effort continuel de la part de Sport Canada. C'est un changement culturel au sein du système sportif canadien. Nous avons fait du progrès et nous voulons en faire davantage. C'est une question de travail continu avec les organismes de sports nationaux afin de nous assurer que la demande de services soit toujours là. Nous sommes en mesure de leur offrir les services par la suite.
Le sénateur Nolin : Monsieur Scrimger, vous avez parlé de harcèlement et d'abus dans les normes que vous aviez établies. Pouvez-vous m'expliquer quelle forme d'abus vous visez exactement? Comment ce harcèlement peut-il prendre forme? Puis-je imaginer un entraîneur qui abuse ou harcèle un de ses athlètes à cause d'une différence linguistique entre les deux? Quel type de problème tentez-vous de régler par cette norme contre le harcèlement et les abus?
M. Scrimger : Comme je l'ai mentionné, nous ne visons pas uniquement le fait de la langue officielle. La définition de cette norme est presque aussi large que dans le grand public ou dans la fonction publique. Suite à nos discussions avec le Bureau du commissaire aux langues officielles, nous avons décidé que cette politique devait être disponible et fournie aux membres de chaque organisation sportive et aux athlètes dans la langue de leur choix. Nous voulions éviter une situation où quelqu'un ne comprendrait pas ses responsabilités ou ses droits à cause d'une question linguistique.
Les cas d'abus ou de harcèlement sont rarement du fait de la langue, c'est plutôt une question de relation interpersonnelle ou d'un abus de pouvoir, par exemple, plus qu'autre chose.
Le sénateur Nolin : Je pensais que vous aviez spécifiquement des cas de harcèlement ou d'abus à cause de la langue utilisée.
M. Scrimger : Je ne veux pas dire que ces cas n'existent pas, mais je ne suis pas au courant.
Le sénateur Nolin : Vous voulez régler un problème qui existe peut-être, mais pour lequel vous n'avez pas de faits précis à nous soumettre.
Le sénateur Champagne : J'ai été ravi, monsieur le ministre, que vous disiez que, effectivement, de plus en plus les entraîneurs de Sport Canada, de l'équipe Canada, sont des gens bilingues. Vous m'avez fait sourire, monsieur le ministre, quand vous avez dit que les gens qui montent en grade comme entraîneurs savent maintenant qu'ils auront peut-être à faire affaire avec des francophones et qu'ils vont donc faire l'effort d'apprendre le français. Imaginez-vous un entraîneur francophone espérer avoir un poste de haut niveau chez vous sans parler l'anglais? Je n'ai pas l'impression qu'il y en aurait beaucoup.
J'ai un vague souvenir d'une jeune athlète qui avait finalement fait le pas et avait été envoyée dans une équipe canadienne dans une autre province. Imaginez-vous la petite fille de 16 ans, 15 ans, qui laisse papa, maman à la maison, qui laisse tout son entourage, qui s'en va vivre dans un milieu anglophone et qui, en plus, quand vient le temps de pratiquer son sport et vouloir se dépasser, ne peut avoir les conseils dans sa langue. C'est important que nous ayons de plus en plus d'entraîneurs qui parlent les deux langues, n'importe l'endroit où est placée l'équipe nationale dans notre grand pays. Je pense que c'est important. Merci de vos efforts à ce niveau.
[Traduction]
M. Van Loan : Merci, je suis d'accord avec ce qui a été dit. Je ne vous ai pas parlé des statistiques portant sur les athlètes brevetés, or il est intéressant de noter qu'à l'heure actuelle, environ un tiers de ces athlètes sont bilingues. Ce chiffre est considérablement plus élevé qu'une moyenne nationale. Ceci reflète le type de personnalité des gens qui réussissent très bien et qui deviennent des athlètes de haut niveau; ces gens-là réussissent très bien dans tous les domaines. Également, ces gens possèdent le potentiel de devenir les grands ambassadeurs de notre pays, et le fait de connaître les deux langues constitue un grand atout. Nous pouvons tous être fiers de ce chiffre élevé, car il dépasse de loin la moyenne nationale.
Le sénateur Champagne : Il faut continuer ce bon travail.
Le président : Merci d'être venu aujourd'hui. Merci, madame LaRocque et monsieur Scrimger. Nous suivrons la question de très près et nous allons peut-être communiquer bientôt avec vous.
La séance est levée.