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Délibérations du Comité permanent du
Règlement, de la procédure et des droits du Parlement

Fascicule 6 - Témoignages du 27 mars 2007


OTTAWA, le mardi 27 mars 2007

Le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement se réunit aujourd'hui à 9 h 38, conformément au sous-alinéa 86(1)f)(i) du Règlement du Sénat, en vue d'examiner les préavis requis pour les questions de privilège, le rétablissement des projets de loi et un avant-projet de budget.

Le sénateur Consiglio Di Nino (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Honorables sénateurs, nous avons deux points à examiner : un budget, qui doit être approuvé, et le rétablissement des projets de loi. Vous avez tous reçu un résumé des délibérations. Nous allons passer aux questions et aux observations.

Le sénateur Smith : Nous nous entendons tous sur la nécessité d'avoir une procédure bien établie qui permet le rétablissement efficace des projets de loi, sans préjudice aucun, et non une procédure ouverte et automatique. C'est aussi simple que cela.

Le président : Je suis d'accord avec vous, sauf que nous devons donner des directives aux attachés de recherche. Plusieurs questions ont été posées. Par exemple, la règle devrait-elle s'appliquer aux seuls projets de loi d'initiative ministérielle, ou aux seuls projets de loi d'initiative parlementaire? Le rétablissement devrait-il être automatique? Quel devrait être le mécanisme permettant de vérifier qu'un projet de loi est identique à ce qu'il était? J'ai pensé qu'il serait bon, ce matin, de se pencher sur ces questions et de donner des directives aux attachés de recherche pour qu'ils puissent préparer et soumettre très bientôt un projet de rapport.

Le sénateur Smith : Concernant les projets de loi d'initiative ministérielle, je présume que le gouvernement souhaiterait toujours aller de l'avant avec ceux-ci.

Le président : Est-ce qu'il faudrait alors que le parrain du projet de loi ou le gouvernement, s'il s'agit d'un projet de loi d'initiative ministérielle, présente chaque fois une motion en ce sens?

Par ailleurs, le rétablissement devrait-il être automatique? Je suis d'accord avec vous. C'est ce que disent les attachés de recherche. Aidons-le pour qu'ils puissent à leur tour nous aider.

James Robertson, attaché de recherche, Bibliothèque du Parlement : Je voudrais attirer votre attention sur le dernier paragraphe de la page 2, qui, je crois, reprend la proposition du sénateur Fraser. Nous n'avons pas eu le temps de nous pencher là-dessus. Je résume : le rétablissement ne devrait pas être automatique. La règle devrait s'appliquer aux projets de loi d'intérêt public et privé présentés par des sénateurs, et aux projets de loi d'initiative parlementaire présentés au Sénat. Tous les projets de loi devraient faire l'objet d'un examen pour s'assurer qu'ils sont identiques à ce qu'ils étaient au moment de la prorogation. À mon avis, cette vérification devrait être faite par le président. Par ailleurs, chaque projet de loi devrait faire l'objet d'une motion individuelle, chose que l'on peut faire dès maintenant.

Le sénateur Fraser propose également que les motions, avant d'être soumises à un vote, fassent l'objet d'un débat limité, pour simplifier le processus de rétablissement.

Si vous trouvez la suggestion intéressante, nous pouvons préparer un rapport et le soumettre au comité après le congé de Pâques.

Le président : Une ébauche suffirait.

Le sénateur Smith : La proposition, en gros, me paraît raisonnable, même s'il y a un ou deux points sur lesquels nous ne nous entendons pas. Il faudra probablement confier le dossier au comité de direction si le comité plénier ne se charge pas de revoir la question point par point. Je trouve la suggestion intéressante. Une fois que nous aurons reçu l'ébauche du rapport, nous pourrons la peaufiner.

Le sénateur Cordy : Vous avez bien résumé la proposition. Cela correspond à ce qui a été dit à la dernière réunion, soit que le rétablissement ne devrait pas être automatique. Que le dossier soit confié à un groupe de travail, au comité de direction, peu importe, nous pouvons aller de l'avant avec l'ébauche.

Le sénateur Andreychuk : Je voudrais revenir à la limite de temps que propose le sénateur Fraser pour les débats. Pourquoi imposer une telle limite de temps? Pourquoi empêcher les sénateurs, y compris les sénateurs indépendants, de s'exprimer librement sur le sujet? Nous n'avons pas exploré cette question à fond. Je ne suis pas convaincue qu'il s'agit là d'une circonstance exceptionnelle.

Le président : Certains sénateurs ont exprimé, probablement mieux que moi, leur frustration de devoir présenter de nouveau des projets de loi trois ou quatre fois. J'ai constaté, lorsque j'ai moi-même déposé un projet de loi, que les opposants profitaient des occasions qui se présentaient pour en retarder l'adoption. J'aime l'idée d'avoir une période de débat « relativement » restreinte. Cela veut dire qu'une personne ne peut indûment retarder un projet de loi, que ce soit pour une bonne ou une mauvaise raison. Je suis d'accord sur ce point avec la sénatrice.

Le sénateur Smith : Sénateur Andreychuk, si les attachés de recherche doivent préparer un document de travail sur la question, pourquoi ne pas prévoir deux ou trois options, dont une qui définirait votre concept? Nous pourrions ensuite choisir celle qui est la plus raisonnable. Toutefois, entre-temps, donnez-nous des options.

M. Robertson : Je ne peux pas m'exprimer au nom du sénateur Fraser, mais je pense qu'elle veut proposer une procédure accélérée pour que le projet de loi atteigne le stade où il était au moment de la prorogation. Il faut décider, à un moment donné, s'il vaut mieux repartir à zéro et franchir toutes les étapes du processus législatif ou reprendre l'examen interrompu par la prorogation. Plutôt que de laisser le débat sur le rétablissement d'un projet de loi se poursuivre pendant des heures et des heures, il serait peut-être préférable de redéposer le projet de loi, de l'examiner en première lecture, ainsi de suite. À mon avis, c'est la seule raison pour laquelle une limite de temps à été proposée. Toutefois, nous pouvons certainement proposer d'autres options. L'idée était de prévoir une période de débat raisonnable, non pas de limiter le débat indûment.

Le sénateur Andreychuk : Mais qui va prendre la décision? Nous partons du principe que la dynamique qui a caractérisé le débat au cours des sessions antérieures va être la même. Qui va décider qu'un projet de loi a été adopté à contrecœur ou avec enthousiasme? Nous n'arrêtons pas de dire que nous souhaitons que les sénateurs soient traités sur un pied d'égalité. Or, nous savons qu'en vertu des règles, une ou deux personnes peuvent reporter l'étude d'une question.

Le problème se pose non seulement dans ce cas-ci, mais dans tous les cas. Soit nous acceptons ce processus et respectons l'indépendance de tous les sénateurs, soit nous commençons à imposer des règles qui vont avoir pour effet de restreindre tous nos privilèges. Si nous optons pour cette voie, nous avons intérêt à le faire ouvertement et à prendre conscience des conséquences que cela va entraîner.

Le président : Si j'ai bien compris, nous demandons aux attachés de recherche, en nous fondant sur le dernier paragraphe et les discussions que nous avons eues, de préparer un projet de rapport. Je ne m'attendais à ce que l'on se rende si loin ce matin.

Le dernier point à l'ordre du jour est la demande d'autorisation budgétaire. Vous en avez reçu une copie. Elle porte sur l'autre étude qui nous a été confiée, soit l'utilisation des langues ancestrales. Il serait utile que le comité voie comment les choses se passent concrètement. D'où la demande d'autorisation budgétaire pour une visite à Yellowknife et à Iqaluit. On m'a demandé pourquoi le comité ne se rendait pas jusqu'au Yukon. Seul l'anglais et le français sont utilisés là-bas.

On m'a dit, ce matin, que, malheureusement, le calendrier des séances de l'assemblée législative des Territoires du Nord-Ouest ne coïncide pas avec celui de l'assemblée législative du Nunavut. Nous allons donc modifier nos plans et nous rendre uniquement dans les Territoires du Nord-Ouest. Nous verrons, ensuite, s'il y a lieu d'aller au Nuvavut.

Le sénateur Smith : Si les membres du comité trouvent le budget un peu élevé, ils peuvent m'en attribuer la responsabilité. J'ai pensé, dans un premier temps, que le comité de direction ferait le voyage. Toutefois, lors de nos discussions, nous avons convenu que les membres du comité qui le désirent devraient pouvoir se joindre au groupe. Nous examinons cette question depuis plusieurs années. L'idée d'organiser une période d'essai avec des députés inuits qui parlent l'inuktitut semble faire consensus. Certains pensent que cette langue devrait avoir le même statut que le français et l'anglais. Compte tenu du nombre de personnes qu'il faudrait pour offrir un service d'interprétation, les coûts risquent d'être élevés. Par ailleurs, certains ont proposé que les députés qui souhaitent s'exprimer dans une langue ancestrale donne un avis raisonnable.

Est-ce que par avis raisonnable, on entend plusieurs heures, de sorte qu'il y aurait toujours quelqu'un qui serait prêt à intervenir, ou encore plusieurs jours? Le comité, lorsqu'il s'est penché sur la question lors de la dernière session, et j'agissais à titre de président à l'époque, a sondé tous les sénateurs autochtones. Par exemple, le sénateur Dyck a indiqué qu'elle parlait le cri et qu'elle aimerait pouvoir faire une déclaration en cri à l'occasion, peut-être deux ou trois fois par année. Elle a dit qu'elle accepterait volontiers de donner un avis d'une semaine. D'autres ont affirmé qu'ils devraient pouvoir s'exprimer dans leur langue à n'importe moment.

Nous voulons traiter les langues autochtones avec respect. Nous voulons trouver une solution pratique, mais également économique, que nous pouvons justifier, parce qu'il s'agit ici de deniers publics.

Nous voulons visiter les deux assemblées législatives. Il y en a une qui a examiné la question de l'usage des langues autochtones plus à fond, et c'est l'assemblée législative des Territoires du Nord-Ouest. Je veux voir de visu comment elle compose avec la situation dans la pratique et sur le plan économique. Est-ce qu'elle négocie avec plusieurs syndicats, ou est-ce qu'elle fait appel à des contractuels, au besoin?

J'ai pensé que cette mission d'étude devrait être au comité de direction. Toutefois, nous avons fini par conclure que tous les membres du comité devraient avoir le droit d'y participer, si possible. Compte tenu des coûts que va entraîner, au fil des ans, la mise en place d'un service d'interprétation, il est essentiel que cette décision importante fasse l'objet d'un examen approfondi et que nous trouvions une formule qui soit à la fois juste, pratique et rentable. Voilà ce que nous devons faire.

Le sénateur Joyal : Comme je le disais au sénateur Hays, je fais partie de ce comité depuis 10 ans et jamais, au cours de cette période, les membres ne se sont déplacés ou ont manifesté le désir de voyager.

Deux autres options s'offrent à nous. Nous pourrions faire venir les témoins des Territoires du Nord-Ouest ou d'Iqaluit. Ils pourraient nous rencontrer ici ou témoigner par vidéoconférence, ce qui coûterait moins cher.

Autrement, nous pourrions créer un sous-comité et inviter les sénateurs qui le désirent à en faire partie. Le groupe pourrait faire le voyage et préparer un projet de rapport à son retour. Nous devrions toutefois explorer l'autre option avant d'accepter d'envoyer 19 personnes.

Le président : La question est complexe.

Je suis allé dans le Nord à titre personnel à plusieurs reprises. Il y a trois ou quatre ans, j'ai rendu visite à un député de l'assemblée législative des Territoires du Nord-Ouest. J'ai eu l'occasion de voir comment les choses se passaient. J'ai trouvé l'expérience très enrichissante. J'ai rencontré de nombreuses personnes. Il y avait sept ou neuf langues différentes qui étaient utilisées à l'assemblée législative.

Je pense qu'une visite personnelle serait utile. Je n'ai pas vu comment les choses se font au Nunavut, même si j'ai eu l'occasion de m'y rendre à titre personnel. Ces voyages n'avaient à rien à voir avec le gouvernement ou le Sénat.

J'ai trouvé la visite dans les Territoires du Nord-Ouest fort instructive. Je pense que vous devriez aller sur place au lieu d'inviter les témoins à venir ici ou à profiter de leur passage, à Ottawa, pour rencontrer le comité.

Pour ce qui est du nombre de personnes qui voyageraient, le sénateur Smith a bien cerné le problème quand nous avons abordé la question. À l'origine, nous avons pensé demander l'autorisation que le comité de direction ou un petit groupe se déplace. Il est difficile de dire aux membres du comité qu'ils ne peuvent pas y aller. Voilà pourquoi nous présentons une demande de budget : nous voulons que tous les membres du comité puissent, s'ils le désirent, faire le voyage, même si nous sommes pleinement conscients du fait qu'ils ne pourront pas tous y aller.

Le sénateur Losier-Cool : Monsieur le président, pour ce qui est de préparer un budget qui permet à tous ceux qui le désirent de se déplacer, la même règle s'applique à tous les comités. Tous les membres du comité ont le droit de se déplacer s'ils le désirent.

[Français]

Ils ont le droit d'y aller s'ils le désirent. Il est certain que tous les membres du comité ne pourront pas nécessairement faire partie du voyage. Il en est ainsi chaque fois qu'un comité se déplace.

Pour ce qui est de la deuxième question, je connais le but de la rencontre. Il s'agit de la cueillette d'information et de la question des langues autochtones. S'il est vraiment question de se pencher sur les différentes langues parlées, je vous signalerai que le Comité des langues officielles a été saisi par les francophones des Territoires du Nord-Ouest, au fil des ans, du fait que le français n'avait pas sa place en tant que langue officielle parmi les autres langues utilisées là-bas. Il serait donc intéressant d'entendre ces gens, dans le cadre de cette quête d'information. Il suffirait de trouver ces francophones. Il existe une association de francophones et une communauté francophone vivant à Iqaluit et dans les Territoires du Nord-Ouest.

[Traduction]

Le sénateur Keon : Je ne veux pas retarder quoi que ce soit, mais je me demande si nous savons vraiment dans quoi nous nous lançons. Les brèves notes que nous avons parlent des langues ancestrales des premiers habitants du territoire. Or, je ne sais pas combien de langues existent.

J'ai eu l'occasion, dans une vie antérieure, d'organiser la mise sur pied de services d'interprétation pour des gens qui habitaient dans le Nord, des représentants des Premières nations. Il n'y avait aucun problème quand on nous avertissait à l'avance. Nous avions des interprètes sur place. Toutefois, quand on ne nous avertissait pas à l'avance, il était difficile d'offrir un service d'interprétation en raison du grand nombre de dialectes qui étaient utilisés. Aussi, les interprètes n'arrivaient pas à suivre parce que les témoins utilisaient des dialectes différents.

Il faut prévoir un cadre structuré. Le comité doit savoir combien de langues ancestrales vont être utilisées. Reconnaître l'importance des langues et fournir des services d'interprétation sont deux choses différentes. Nous devons prendre les mesures qui s'imposent pour répondre aux besoins.

Je ne sais pas s'il est vraiment nécessaire que tous les membres du comité se rendent à Iqaluit. J'y suis allé à quelques reprises et il n'est pas facile d'y obtenir de l'information. Il n'y a pas beaucoup de ressources là-bas. Il serait peut-être préférable de faire venir les gens.

Le président : Il pourrait être utile de faire circuler l'information que nous avons recueillie et aussi un résumé des discussions, qui se poursuivent depuis quelques années, pour faire le point sur les questions que le sénateur Keon a soulevées.

Je tiens à vous rappeler qu'il est question ici du Sénat, des services qui peuvent être offerts aux représentants des collectivités autochtones qui siègent au Sénat ou encore aux sénateurs qui souhaitent s'exprimer dans une langue ancestrale. Aucune décision n'a encore été prise.

Nous sommes prêts, comme l'a indiqué le sénateur Smith, à faire un essai avec une langue. Si nous ne pouvons pas faire les choses correctement, nous n'offrirons pas de service. Nous devons nous assurer qu'il y a des interprètes qualifiés qui sont prêts à faire le travail. Par ailleurs, il faudra donner un avis, du moins à ce stade-ci. N'oublions pas non plus que nous ouvrons une porte qui pourrait aboutir à un élargissement des services d'interprétation, au fil des ans.

Il serait peut-être bon — et je m'adresse surtout au personnel — de faire circuler l'information que nous avons recueillie ces dernières années.

[Français]

Le sénateur Robichaud : À mon avis, nous en sommes maintenant au point où nous devrions explorer toutes les solutions pour satisfaire les sénateurs Watt et Adams. Il est clair qu'on ne peut pas refuser à ces gens de s'exprimer dans leur langue et, du même coup, permettre aux autres sénateurs de bien comprendre ce qu'ils disent. Il ne s'agit absolument pas de savoir si nous devrions ou ne devrions pas le faire, il s'agit plutôt de voir comment cela pourrait se faire dans la pratique et de remédier à la situation.

Je suis d'accord qu'un investissement de 110 000 $ viendrait peut-être assombrir nos efforts pour diminuer les dépenses et raviver notre crédibilité aux yeux du public, mais peut-être pourrait-on retenir la suggestion du sénateur Smith, à savoir qu'un groupe de trois personnes se rendent sur place pour constater ce qui se passe. Cependant, cela m'embarrasse lorsqu'on parle de mission d'observation, parce qu'on ne bénéficie pas de l'interprétation dans les deux langues officielles du pays. Je crois fermement que les comités du Sénat devraient toujours — même en voyage — être interprétés dans les deux langues officielles. C'est certain qu'une mission d'observation est plus économique, mais je n'aime pas vraiment cela.

En résumé, je crois qu'il faut cesser de revenir sur les discussions à savoir si on devrait ou pas satisfaire les sénateurs Watt et Adams et qu'on doit faire tous les efforts nécessaires pour remédier à la situation. Je pense que certains sénateurs pourraient vous amener l'argument que les Autochtones ont le droit de se servir de leur langue ancestrale. Sur quoi pourrait-on se baser pour leur refuser ce droit? Je crois qu'on devrait le faire.

[Traduction]

Le président : Je tiens à préciser, avant de céder la parole au sénateur Smith et au sénateur Andreychuk, que le montant demandé constitue un maximum. Je ne m'attends pas à ce que tout cet argent soit utilisé. Et, pour répondre à votre question, les services d'interprétation sont inclus dans le budget.

Le sénateur Smith : Je voudrais revenir au point qu'a soulevé le sénateur Keon. Il a dit que nous ne savons pas vraiment dans quoi nous nous lançons. Nous savons fort bien dans quoi nous nous lançons, car nous avons examiné les obligations juridiques à fond et nous sommes arrivés à la conclusion qu'il n'y a aucune loi qui empêche le Sénat d'offrir un tel service s'il décide de le faire.

Nous voulons, par respect pour les langues autochtones, souligner l'importance qu'elles revêtent pour notre culture, nos traditions, notre peuple. Nous voulons manifester une certaine reconnaissance vis-à-vis de ces langues.

Nous savons également quelles sont les langues que maîtrisent les sénateurs autochtones, parce que nous avons mené un sondage auprès d'eux. Essentiellement, nous savons que presque tous les sénateurs, mis à part les deux dont la langue maternelle est l'inuktitut, sont satisfaits du système actuel : ils doivent donner jusqu'à une semaine d'avis afin de nous permettre de faire des arrangements avec le bureau qui s'occupe de trouver des contractuels. Il faut trouver un interprète qualifié, mais nous sommes assez bien organisés sur ce plan à l'heure actuelle.

Nous ne sommes pas tous d'accord sur la période d'essai de l'inuktitut. Le service d'interprétation ne serait-il disponible que dans la salle du Sénat? Quel serait le préavis requis? Ce service serait-il offert en tout temps, et aussi aux comités? Allons-nous mettre en place une structure aussi complexe que celle qui existe pour l'anglais et le français? Il semblerait que nous ne soyons pas tous convaincus de la nécessité d'avoir une période d'essai.

J'ai décidé que j'irais au moins à Yellowknife, quoi qu'il arrive. Si je dois utiliser mes points pour le faire, cela ne me dérange pas. Certains membres du comité estiment que nous ne devrions pas utiliser nos propres points.

Nous avons été saisis de ce dossier il y a quelques années maintenant. Certains des sénateurs concernés considèrent que nous n'agissons pas avec diligence, et je suis sensible à leurs préoccupations. D'un autre côté, ils veulent que le travail soit bien fait.

Si quelqu'un veut proposer une motion autorisant un plus petit groupe à faire le voyage, je ne serai pas offusqué, mais je pense que nous devons consulter les membres d'une assemblée législative qui a déjà composé avec cette situation et qui a plusieurs années d'expérience à son actif. L'Assemblée législative des Territoires du Nord-Ouest, à Yellowknife, est la plus expérimentée à ce chapitre.

Je suis satisfait de cette proposition. Comme je l'ai dit plus tôt, si quelqu'un souhaite réduire le nombre de participants, je ne serai pas offensé. D'une manière ou d'une autre, j'estime que je dois me rendre à Yellowknife pour voir comment cela se passe là-bas. Si je dois me servir de mes points, je le ferai.

Le sénateur Andreychuk : Le sénateur Smith semble croire que nous avons déjà pris une décision. Si c'est le cas, je devais être absente quand ça s'est passé. Je pensais que nous ne faisions que discuter.

Le sénateur Smith : Je n'ai pas dit que nous avions pris une décision, mais plutôt que nous étions parvenus à un consensus.

Le sénateur Andreychuk : Si nous nous sommes mis d'accord sur quelque chose, j'aimerais le savoir. Nous avons convenu qu'il fallait régler un problème, mais je ne crois pas que nous ayons déterminé, au moyen d'un consensus ou autre, la façon de nous y prendre.

Ce qui m'importe, c'est de savoir si les groupes autochtones peuvent réclamer ce droit ou non. Je ne crois pas que nous nous soyons prononcés catégoriquement là-dessus.

En ce qui concerne la question des langues ancestrales, je partage tout à fait l'avis du sénateur Keon. Il n'y a peut- être que deux ou trois sénateurs autochtones aujourd'hui, mais qui sait combien ils seront demain ou après-demain. Nous ne parlons que des territoires du Nord, mais il conviendrait également d'examiner ce qui se passe dans les provinces de l'Ouest et de l'Est. Si on accorde ce droit, il faut que ce soit à tous les Autochtones. Ne pensez-vous pas que leurs droits devraient être reconnus d'une autre façon?

La question des dialectes est très importante. Au Canada, on parle de nombreux dialectes et langues autochtones, c'est d'ailleurs pourquoi nous envisageons d'accorder aux sénateurs le droit de communiquer dans leur langue maternelle. Par contre, je ne vois pas ce que nous pourrions apprendre dans les Territoires du Nord-Ouest, étant donné que notre situation est complètement différente.

Nous pourrions tout aussi bien nous rendre en Saskatchewan ou en Nouvelle-Écosse parce que nous devons inclure toutes les langues ancestrales et traiter tous les Autochtones également. Qu'en est-il des Métis? Quelles mesures devrions-nous prendre à leur égard?

Il semble que nous ayons réglé le problème en partie, mais il faut faire beaucoup plus qu'être justes envers tous les futurs sénateurs autochtones. J'aimerais que nous discutions davantage de nos conclusions avant de déterminer s'il faut consulter l'Assemblée législative des Territoires du Nord-Ouest. Chaque situation est unique; ils ont leurs besoins et nous, les nôtres. D'une part, je ne voudrais pas donner l'impression de voyager pour trouver des solutions à leurs problèmes, qui ne s'appliqueraient pas du tout au reste du pays. D'autre part, je ne voudrais pas donner de faux espoirs à une communauté autochtone sur des droits ou des coutumes avant que nous n'ayons décidé quoi faire.

J'aimerais que nous soyons mieux préparés avant de nous rendre dans le Nord. Je ne dis pas que nous ne devrions pas y aller, mais il faudrait d'abord proposer un meilleur programme de travail.

Le président : À la lumière des discussions du comité durant cette législature et la précédente, il va sans dire que nous reconnaissons que nous devons accorder le même traitement à tous les peuples et à toutes les langues autochtones. Nous n'avons aucunement l'intention de nous limiter aux territoires du Nord.

Si nous avons arrêté notre choix sur ces deux assemblées législatives, c'est parce qu'elles ont l'habitude de composer avec plusieurs langues. Nous aurions pu également choisir le Conseil de l'Europe ou le Parlement européen mais, à mon avis, cela n'aurait pas été aussi pertinent. Le voyage proposé vise à accroître nos connaissances et notre compréhension non seulement du problème, mais aussi du processus concret qui doit être entrepris.

Nul doute que cette question est prise très au sérieux, alors si nous voulons faire quelque chose, aussi bien le faire comme il faut. Toutes les langues autochtones seraient acceptées, mais le service ne serait offert qu'au membre du Sénat issu d'une communauté autochtone qui en ferait la demande.

Le sénateur Cordy : Le sénateur Keon a soulevé des préoccupations d'ordre pratique très pertinentes que nous devons prendre en considération afin de déterminer ce que nous ferons exactement. Certes, les gens ont le droit de communiquer dans leur langue, mais les autres ont également le droit de comprendre ce qu'ils disent. Dans le cadre de notre étude sur les accommodements et les initiatives à prendre, il nous faut avoir davantage de matière à réflexion pour ensuite appliquer des mesures concrètes.

Certains ont évoqué l'aspect financier. Aussi louable que cela puisse paraître d'offrir en tout temps l'interprétation dans toutes les langues, au coût de 4,5 milliards de dollars par année, il sera difficile de le justifier sur le plan pratique.

En ce qui concerne le voyage dans le Nord, de toute évidence, il est toujours préférable de voir de quoi il retourne avant de se lancer dans quoi que ce soit. Il revient maintenant au comité de décider s'il veut y aller ou non. Par contre, je ne suis pas très enthousiaste à l'idée de n'y envoyer que certains membres. Tous les sénateurs peuvent se prévaloir de leur droit, pas seulement trois ou quatre. Il reste à décider si nous irons ou pas. Est-ce préférable d'y aller maintenant, pour voir comment ils arrivent à composer avec la situation, ou d'attendre d'être mieux renseignés? C'est évidemment au comité d'en décider, mais ne me dites pas que seuls quelques sénateurs choisis pourront y aller.

Le président : Évidemment, le budget a été établi pour l'ensemble des membres.

Nous voulons, entre autres, mieux comprendre le processus et enrichir nos connaissances. Nous sommes saisis de deux questions précises : la qualité de l'interprétation — et nous savons à quel point c'est difficile de l'avoir — ainsi que les infrastructures et tout ce que cela implique. Ce sont des questions dont le comité a discuté. Nous n'avons pas de réponse parce qu'il n'y a pas d'assemblée législative comparable dans le sud du Canada.

Le sénateur Smith : Quant aux droits, sénateur Andreychuk, nous avons traité la question en profondeur avec M. Audcent pendant plusieurs séances. Nous avons plus ou moins conclu qu'il n'y avait aucun droit légalement exécutoire, mais qu'il n'y avait pas de loi qui nous empêchait de continuer si nous jugions que c'était la bonne chose à faire. Et plutôt que de tergiverser, nous avons décidé d'aller de l'avant.

En ce qui a trait aux Territoires du Nord-Ouest, vous avez raison de dire que ce n'est pas le seul endroit où le problème des langues se pose. Toutefois, nous devons agir avec circonspection. Je ne connais pas d'autre assemblée législative qui a autant d'expérience en la matière. Lorsqu'elle a entrepris le processus, il semblerait qu'elle ait dépensé à tort et à travers. De l'avis de certains, il y a eu des problèmes de népotisme. Nous voulons en savoir le plus possible sur les erreurs qu'elle a commises afin de ne pas les répéter.

Nous avons été saisis de cette question il y a plusieurs années déjà, et je pense que nous n'avons d'autre choix que d'en arriver à une conclusion et de rédiger un rapport ainsi que des recommandations.

Le sénateur Cordy a raison. Ce n'est pas tout le monde qui voudra y aller. J'ai d'abord essayé de restreindre le nombre de participants, puis je me suis incliné devant les arguments selon lesquels nous ne devrions pas refuser qui que ce soit. Par conséquent, je serais heureux de proposer l'adoption du présent budget. Ce serait une limite. Si nous ne devons aller qu'à un seul endroit cette fois-ci, parce qu'eux et nous ne siégeons pas en même temps, et si tous les membres du comité ne font pas partie du voyage, le coût total n'atteindra pas les 100 000 dollars. Pour un début, j'estime que c'est un budget raisonnable. Si une motion est requise pour approuver le budget, j'en fais la proposition.

Le président : Je vais accepter la motion.

Le sénateur Andreychuck : Nous devons d'abord régler les questions soulevées par le sénateur Keon avant qu'une motion ne soit mise aux voix.

Par ailleurs, le sénateur Cordy a fait une bonne remarque. Tous les sénateurs ont le droit de communiquer dans la langue de leur choix, mais les autres ont également le droit de comprendre ce qu'ils disent. J'irais même jusqu'à dire que si un sénateur a le droit de s'exprimer dans une langue autochtone, le public doit pouvoir le comprendre. Nous ne sommes pas ici pour voir à nos intérêts, mais plutôt pour représenter les intérêts de la nation en tant que parlementaires.

Cela m'amène à une nouvelle question : les autres Autochtones ont-ils le droit d'entendre les délibérations dans les deux langues officielles ou seulement dans leur langue d'origine? J'ai du mal à dire que ce n'est pas un droit ancestral. Si nous nous engageons dans cette voie, nous créons un précédent qui pourrait se transformer en droit, et nous devons en être conscients. Il ne s'agit pas de savoir si nous devrions le faire ou pas, mais plutôt de savoir comment et pourquoi nous le faisons et quelles conséquences y sont rattachées. Est-ce que nous partons tout de suite, au risque de créer des attentes, ou est-ce que nous invitons davantage d'Autochtones à participer au débat, ce que nous n'avons pas encore fait? Je pense que c'est un jugement de valeur.

Le président : Nous devons garder à l'esprit que ce dossier a été renvoyé au Sénat au cours de deux législatures successives. Ce comité en a été saisi il y a plusieurs années et en a beaucoup discuté. Nous avons recueilli beaucoup d'informations, et il serait utile d'en faire part aux membres du comité. Il nous est probablement impossible d'en arriver à recommandation sans aucune expérience. C'est d'ailleurs pour cette raison que le comité directeur a cru bon d'établir un budget maximal. Si tous les membres du comité souhaitent faire partie du voyage, on adoptera ce budget, mais il se peut que les dépenses soient moins élevées que prévu. J'estime que ce voyage est justifié car il nous permettra de faire rapport au Sénat en toute connaissance de cause.

Je respecte l'opinion de tous les sénateurs, mais je pense que nous devrions adopter le budget et élaborer un plan que nous présenterons au comité, en supposant que le comité de régie interne approuve le budget, ce qui pourrait ne pas être le cas.

La motion est donc mise aux voix.

Le sénateur Joyal : En attendant, je crois comprendre que le greffier du comité ou M. Robertson préparera une synthèse de nos discussions. Les sénateurs Keon, Andreychuck et d'autres ont soulevé leurs questions devant des témoins lors de séances précédentes. On a donc fait une bonne partie du travail. Un compte rendu de nos réflexions permettra aux sénateurs qui ont travaillé sur ce dossier ainsi qu'aux nouveaux de se rafraîchir la mémoire.

Le président : En ce qui concerne le budget, le comité de régie interne a fixé une date limite que nous devons respecter. Nous allons nous réunir avant de mettre au point un plan de déplacement. Êtes-vous d'accord?

Des voix : Oui.

Le président : Quelqu'un a-t-il une objection? Non?

La séance est levée.


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