Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Transports et des communications
Fascicule 13 - Témoignages du 9 mai 2007
OTTAWA, le mercredi 9 mai 2007
Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications, auquel a été renvoyé le projet de loi C-11, Loi modifiant la Loi sur les transports au Canada et la Loi sur la sécurité ferroviaire et d'autres lois en conséquence, se réunit aujourd'hui à 18 h 17 pour examiner le projet de loi.
Le sénateur Bacon (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente : Ce soir, nous poursuivons l'étude du projet de loi C-11, Loi modifiant la Loi sur les transports au Canada et la Loi sur la sécurité ferroviaire et d'autres lois en conséquence.
Nous accueillons M. Joseph Galimberti, directeur des relations gouvernementales à Air Canada, et M. Mike McNaney, vice-président des relations gouvernementales chez WestJet. Messieurs, je vous souhaite la bienvenue au comité. Nous allons commencer par vos exposés, puis les honorables sénateurs auront sûrement des questions à vous poser.
Mike McNaney, vice-président, Relations gouvernementales, WestJet : Je vous remercie de nous donner l'occasion de comparaître ce soir. WestJet est le petit transporteur aérien poli de l'Ouest. À côté de moi se trouve Joseph Galimberti, d'une ligne aérienne dont le nom m'échappe, mais qui semble être assez bien connue au pays.
Nous sommes ici aujourd'hui pour vous parler de l'article 27 du projet de loi C-11. Cet article oblige les transporteurs aériens à inclure tous les frais et taxes divers dans le prix d'un billet d'avion annoncé, c'est-à-dire à faire de la publicité de type « tout inclus ». Nos préoccupations au sujet de l'article 27 découlent du fait inévitable que la publicité sur les tarifs aériens au Canada relève de plusieurs paliers, soit les gouvernements fédéral et provinciaux, et des pratiques internationales.
Pour cette raison, l'article 27, s'il est adopté dans sa forme actuelle, aura plusieurs conséquences non intentionnelles. L'adoption de cet article n'améliorera pas la protection des consommateurs et désavantagera les transporteurs canadiens dans la vente de sièges à bord de leurs propres avions.
Pour ma part, je vous exposerai la situation au Canada, alors que M. Galimberti traitera des conséquences plus vastes. L'article aura des répercussions tant sur le plan national qu'international pour les deux transporteurs.
Au Canada, il y a essentiellement deux groupes qui font de la publicité sur les billets d'avion — les transporteurs aériens et les agents de voyage. Le gouvernement fédéral réglemente la publicité que font les transporteurs aériens. Nous avons actuellement le droit d'annoncer les tarifs de base, c'est-à-dire le montant réel en dollars que nous pouvons recevoir pour un service rendu. Les gouvernements provinciaux réglementent la publicité que font les agents de voyage sur les billets d'avion. L'Ontario et le Québec exigent que les agents de voyage fassent de la publicité de type « tout inclus ». Dans les huit autres provinces, les agents de voyage ont le droit de faire leur publicité de la même façon que nous; autrement dit, ils peuvent annoncer le tarif de base. Cela veut donc dire qu'à l'heure actuelle, la pratique fédérale est conforme à celle de huit provinces sur dix.
Si le projet de loi C-11 est adopté, et que les transporteurs aériens doivent inclure tous les frais dans la publicité, la loi fédérale sera conforme à celle de l'Ontario et du Québec, mais, par le fait même, elle ne le sera plus par rapport aux autres provinces, où les agents de voyage continueront à annoncer le tarif de base. En d'autres mots, si le projet de loi C-11 est adopté sans modification de l'article 27, nous nous trouverons dans la situation exceptionnelle où les agents de voyage pourront annoncer des sièges à bord de nos avions à un prix inférieur à celui auquel nous pouvons en vertu de la loi annoncer ces mêmes places. Cela changera un peu la relation commerciale que nous entretenons actuellement avec les agents de voyage.
Les transporteurs aériens ont consacré des milliards de dollars en dépenses en capital et en investissements de toutes sortes au cours des dernières années pour fournir le service, accroître leur flotte, et les risques inhérents à l'exploitation d'une ligne aérienne. Dans un contexte plus large, l'adoption de l'article 27 obligera les transporteurs aériens à annoncer leurs sièges à un prix plus élevé que celui d'un tiers intermédiaire.
Le fait que nous versons des commissions aux agents de voyage lorsqu'ils vendent des sièges à bord de nos avions vient compliquer davantage la situation. À l'heure actuelle, WestJet paie une commission de base de 9 p. 100.
Si le projet de loi est adopté, les transporteurs vont afficher un prix plus élevé. Quand l'agent de voyage va faire une réservation, le client va payer une commission sur chaque vente en plus du prix de vente inférieur affiché. Cela modifie un aspect de notre modèle de gestion du tout au tout. Pour être honnête, cela nous donne la chienne. Je ne suis pas certain que ce soit la façon de le dire en termes juridiques, et je m'excuse auprès des traducteurs qui essaient d'y voir clair. Quoi qu'il en soit, cette mesure change un aspect de notre modèle de gestion.
Bien sûr, l'article 27 n'a pas été écrit ainsi dans le but de modifier du tout au tout le modèle de gestion des transporteurs aériens. Il se justifie surtout par la protection des consommateurs. Cependant, comme nous sommes dans un champ de compétence partagé, dans la réalité, il s'avère que l'article 27 va changer notre modèle de gestion du tout au tout.
Pour ce qui est des autres arguments présentés du point de vue de la protection du consommateur, nous ne pensons pas qu'ils tiennent la route non plus en raison de la multiplication des compétences dans le domaine de la publicité sur les tarifs aériens au pays. On a fait valoir qu'il fallait éliminer la confusion chez les consommateurs sur les différentes façons dont les agents de voyage et les transporteurs aériens conçoivent leurs publicités. Certaines personnes ont l'impression que grâce au projet de loi C-11 et à l'article 27, cette confusion va disparaître. Je ne vois pas en quoi le fait de modifier la loi fédérale pour qu'elle soit conforme à celles de deux provinces et nécessairement, qu'elle diverge avec celles des huit autres, tire la situation au clair. Nous serions portés à dire que ce projet de loi ne réussit pas à améliorer la protection des consommateurs.
L'autre argument donné en faveur de cet article, c'est la nécessité que les consommateurs aient l'information adéquate sur les taxes et les frais qui s'ajoutent aux prix pour prendre des décisions éclairées. Encore une fois, ce n'était certainement pas l'intention de ce projet de loi, mais compte tenu de la multiplicité des compétences dans ce domaine, il y a encore des conséquences involontaires qui compromettent l'utilité du projet de loi.
Les agents de voyage facturent des frais à leurs consommateurs, ce qui est parfaitement légitime de leur part. C'est parfaitement légitime en affaires. Les agences ont un but lucratif, tout comme nous, et les agents travaillent avec acharnement à servir leurs consommateurs. Cependant, ils chargent des frais de réservation de 10 $ à 60 $. Comme les agents de voyage vont pouvoir afficher un tarif inférieur à celui des lignes aériennes, les consommateurs seront portés à s'adresser aux agents de voyage pour faire leurs réservations. Par conséquent, en plus des taxes et des frais, les consommateurs risquent également de payer des frais additionnels de 10 $ ou 60 $ pour la réservation faite par l'agent de voyage.
Je répète que ces frais sont parfaitement légitimes en affaires. Cependant, si l'une des principales raisons d'adopter cet article, mesdames et messieurs les sénateurs, c'est de veiller à ce que les consommateurs aient l'information qu'il faut sur les taxes, les droits et les frais supplémentaires pour prendre une décision éclairée, la multiplicité des compétences dans ce domaine va les pousser vers une option qui va les faire payer plus de frais qu'autrement. C'est une conséquence concrète de la multiplicité des compétences dans ce domaine, et elle doit être prise en compte quand on étudie l'efficacité de ce projet de loi et de cet article.
En bref, nous ne croyons pas que l'application à l'échelle nationale de l'article 27 dans sa forme actuelle nous permette d'atteindre l'objectif de la protection des consommateurs. Nous croyons qu'il empire quelque peu la situation, qu'il accroît la confusion, et nous sommes déconcertés par la façon dont il risque de renverser complètement un aspect de notre modèle de gestion collectif et d'ajouter des coûts importants à nos activités.
Je vais céder la parole à M. Galimberti, qui va vous parler des incidences internationales générales.
Joseph Galimberti, directeur, Relations gouvernementales, Air Canada : Je vous remercie de me permettre de m'adresser à vous ce soir, nous vous remercions de nous en donner le temps. M. McNaney a souligné certaines incohérences que le projet de loi C-11 et l'article 27 vont créer sur le marché intérieur. Air Canada partage totalement les inquiétudes de WestJet à cet égard. Je dois le répéter, parce que cela sonne faux de la bouche d'un représentant d'Air Canada : Air Canada partage totalement les inquiétudes de WestJet.
Nous avons également de sérieuses réserves à propos des incidences de l'article 27 sur Air Canada alors que nous cherchons à être concurrentiels sur le marché mondial. Notre pratique correspond actuellement à celle admise au sein de chaque marché international important. Au moment où nous cherchons activement à amener les clients à utiliser notre site web comme point d'achat principal, notre position concurrentielle sur le Web sera entravée en permanence par le projet de loi C-11 et l'article 27 puisque nous serons tenus d'afficher les taxes et les frais imposés par le gouvernement à la première page des tarifs, alors que nos concurrents internationaux continueront de les afficher au point d'achat selon la pratique généralement acceptée.
Si le projet de loi C-11 obligera les transporteurs étrangers à afficher le coût réel dans les médias canadiens, le gouvernement du Canada ne peut d'aucune façon réglementer leurs activités commerciales sur le Web. En adoptant ce projet de loi, le gouvernement du Canada placera les sociétés aériennes canadiennes en situation commerciale désavantageuse de façon permanente sur le plus grand marché en expansion de l'industrie en ce qui concerne les ventes.
Par conséquent, des transporteurs étrangers comme Air France, KLM et British Airways seront en mesure d'afficher en permanence des tarifs plus bas sur les premières pages pour des vols au départ et à destination du Canada. De plus, le gouvernement du Canada aura créé un environnement où nos partenaires commerciaux du réseau Star Alliance tels que United, Lufthansa et British Midland pourront afficher des tarifs plus bas que ceux d'Air Canada, en vertu d'une pratique commerciale essentielle et répandu, appelée le « partage de codes » avec un membre du réseau, pour des vols assurés par nos propres appareils.
Ce projet de loi arrive à un moment crucial compte tenu des aspirations commerciales d'Air Canada sur la scène mondiale. La semaine dernière, nous avons accepté la livraison de notre deuxième gros-porteur 777 de Boeing et nous en attendons 15 autres. Nous avons récemment annoncé que nous prendrons livraison de 30 gros-porteurs 787 de Boeing, ce qui nous permettra de parcourir une distance considérable grâce à notre parc aérien figurant parmi les plus grands et les plus efficaces au monde. Il va sans dire que les deux acquisitions représentent des investissements de capitaux importants, des investissements en actifs qui, par leur définition même, ouvriront l'industrie canadienne sur le monde et vice versa.
Par surcroît, Transports Canada, sous la direction du ministre Cannon, cherche activement à ouvrir de nouveaux marchés pour les transporteurs canadiens en élargissant le portefeuille de droits de ligne internationaux grâce à l'application continue de la politique Ciel bleu, qui fait naître des occasions sur le plan international et de la concurrence sur le plan national, que nous accueillons volontiers. Compte tenu de l'orientation du gouvernement, le projet semble non seulement déphasé par rapport à la politique gouvernementale, mais il va également maintenant à l'encontre du but recherché en nuisant de façon permanente à la compétitivité des transporteurs canadiens en ce moment crucial dans le domaine de l'aviation internationale au Canada.
Cet article modifié par la Chambre des communes non seulement ne tient pas compte des déséquilibres qu'il engendre, mais il ne prend pas en considération le principal outil de vente du XXIe siècle, soit Internet, ni la réalité commerciale qui nous oblige à faire de la publicité et des affaires dans cet environnement.
Dans cette optique, Air Canada et WestJet aimeraient proposer conjointement au comité de modifier l'article 27 afin de refléter le projet de loi initial, qui maintient la protection des consommateurs en laissant au ministre le pouvoir d'établir une réglementation en matière de publicité lorsque la situation le justifie et qui donne aux transporteurs aériens la souplesse nécessaire pour éviter les importants problèmes commerciaux que M. McNaney et moi avons expliqués aujourd'hui.
Je soutiens respectueusement que ce n'était pas l'intention du Parlement de proposer un amendement qui crée davantage de confusion concernant la nature du régime tarifaire des vols intérieurs, confusion qu'entraîne malheureusement l'article 27 dans sa forme actuelle. Je crois également que ce n'était pas son intention de proposer un amendement qui dirige les consommateurs canadiens vers les transporteurs étrangers, ce que l'article 27 codifie malheureusement à perpétuité. S'il y a un dossier qui mérite un second regard serein et en toute connaissance de cause sur les conséquences de la loi, je soutiens respectueusement qu'il s'agit de celui-ci.
Nous serons ravis de répondre aux questions des honorables sénateurs.
La présidente : Je vais laisser le soin à mes collègues de débattre de l'article 27, mais j'ai une question pour vous deux. J'aimerais entendre ce que chacun d'entre vous pense du mécanisme actuellement en place dans votre société pour traiter les plaintes des consommateurs. Combien de plaintes recevez-vous chaque année? Quelles sont les ressources, particulièrement les ressources humaines, affectées à la résolution des plaintes? De même, le nouvel article proposé 85.1 a pour effet d'éliminer le poste de commissaire aux plaintes relatives au transport aérien et d'en transférer les fonctions à l'Office des transports. Cet office peut choisir d'utiliser le processus de résolution des plaintes informel au besoin. Encore une fois, que pensez-vous du nouveau pouvoir de résolution des plaintes sur le transport aérien conféré à l'Office des transports et considérez-vous qu'il s'agit d'une amélioration comparativement au rôle actuel du commissaire aux plaintes relatives au transport aérien?
M. McNaney : À WestJet, il y a un groupe de service à la clientèle, et le service à la clientèle est en permanence un aspect important de tout ce que nous examinons. Si nous nous penchons sur la livraison d'un nouvel aéronef et la création de nouvelles destinations, quels que soient les pays visés, tous les aspects du service aux clients sont gérés en fonction de la meilleure façon d'offrir le service.
Nous avons différentes façons de recevoir des plaintes. Nous avons un site web qui comporte un portail pour signaler des plaintes. Bien entendu, nous incitons les clients à parler à quelqu'un dans l'avion. Nos agents de bord, nos agents de service à la clientèle, les personnes chargées de l'inspection, de même que les préposés de notre centre d'appels ont tous le pouvoir de prendre des mesures si quelque chose qui n'aurait pas dû arriver arrive. Si cela signifie de donner un crédit de 100 $ ou d'éliminer des frais imposés en raison d'un problème de réservation, ils ont le pouvoir d'agir.
Pour ce qui est de l'OTC et de son efficacité dans ce domaine, je pense que l'OTC répond bien aux plaintes qui lui sont présentées et qu'il en juge comme un organisme quasi judiciaire. Je ne voudrais pas avoir l'air arrogant en le disant, mais à WestJet, nous sommes d'avis que nous devons être assez vite et avoir assez de pouvoirs pour résoudre les problèmes des clients bien avant qu'ils présentent une plainte à un ministère ou à un organisme fédéral.
Je sais qu'il y a eu des plaintes portées à l'OTC sur WestJet. Quand je fais des vérifications pour voir où elles en sont, en règle générale, nous résolvons les problèmes bien avant que la plainte n'ait été traitée à l'OTC et que le client ait obtenu une réponse. Nous corrigeons la situation avant que le client ne reçoive d'avis officiel.
Cela ne signifie pas que tout le monde est content, mais généralement, nous estimons qu'il est de notre devoir de résoudre ces problèmes bien avant qu'un organisme du gouvernement ait à s'en mêler.
La présidente : Pensez-vous que l'Office des transports peut faire le travail?
M. McNaney : Je n'ai aucune idée du nombre de plaintes qui leur est présenté pour qu'ils tranchent. Dans une certaine mesure, je suppose que tout dépend des ressources, et je n'ai pas l'information nécessaire pour prendre une décision à cet égard.
Le sénateur Merchant : Au sujet des plaintes, quelles sont les conséquences d'une plainte portée à l'OTC? Savez-vous ce qu'ils font? Par exemple, si quelqu'un dépose une plainte au CRTC, le CRTC peut prendre des mesures. Il peut retirer son permis à quelqu'un ou adopter de nouvelles règles. Comment l'OTC fonctionne-t-il? Qu'arrive-t-il lorsque son personnel reçoit des plaintes?
M. McNaney : Tout dépend de la nature de la plainte.
Le sénateur Merchant : Supposons qu'ils reçoivent beaucoup de plaintes. Que font-ils pour les traiter?
M. McNaney : Je crains de n'avoir aucune idée de leur fonctionnement.
Le sénateur Merchant : Comment voudriez-vous qu'ils fonctionnent? Nous sommes les consommateurs. Quand nous portons plainte, que devrait-il arriver selon vous? Je sais que je vais toucher 100 $, mais si je me plains trop souvent, à quoi devrais-je m'attendre à votre avis?
M. McNaney : Tout dépend de la nature de la plainte. À ma connaissance, les plaintes portées à l'OTC sont généralement assez graves et portent sur des accusations selon lesquelles la personne se serait vu refuser l'accès raisonnable à un avion. Elles concernent divers transporteurs. Les plaintes dont j'ai entendu parler sont assez graves et ont des conséquences graves; l'OTC décide alors si la compagnie aérienne doit rembourser une certaine somme à la personne ou si la plainte est rejetée nette parce qu'il conclut que le transporteur a respecté ses tarifs et ses obligations en cas de problème.
Je suppose qu'en règle générale, on voudrait que l'institution du gouvernement fédéral qui reçoit les plaintes sur l'industrie ait les ressources nécessaires pour les traiter assez rapidement. Je n'ai aucune idée du budget de l'OTC et je ne sais pas non plus s'il a été soumis au comité de l'autre Chambre. Je ne sais pas si l'on s'est demandé s'il avait assez de ressources pour s'acquitter de ces tâches.
La présidente : Monsieur Galimberti, pouvez-vous nous dire de quelles ressources vous disposez pour régler les plaintes?
M. Galimberti : Nous avons considérablement de ressources humaines chargées de traiter les plaintes des consommateurs dans notre département des solutions pour les clients. Tout comme WestJet, nous acceptons les plaintes sur notre site web. On peut porter plainte par télécopieur ou communiquer avec notre service à la clientèle, et nous allons accepter les plaintes, ce qui n'est pas sans rappeler les méthodes de WestJet. Nous essayons de donner les outils qu'il faut à nos employés à toutes les étapes du processus de voyage pour résoudre les problèmes des consommateurs au fur et à mesure. C'est en tout dernier recours qu'ils doivent porter plainte sur notre site web. Habituellement, il s'est passé quelque chose de catastrophique quand une plainte est portée à l'OTC.
Le transport aérien est un mécanisme assez étrange. Il arrive qu'on ne puisse pas décoller; il y a des problèmes de mécanique, de sécurité ou de météo. La nature même des activités des lignes aériennes du Canada rend la chose extrêmement difficile. Nous faisons de notre mieux pour gérer ces situations. Quand le système fait défaut pour une raison ou une autre, je pense que nous réussissons assez bien à rétablir la situation. Nous consacrons considérablement de ressources au suivi de notre rendement en temps réel; notre bilan est mis à jour quotidiennement. Nous portons la même attention au suivi du nombre de plaintes reçues et du nombre de bagages perdus. Nous en faisons le suivi chaque jour. Nous consacrons beaucoup de ressources au service à la clientèle.
Il faut vraiment voir l'OTC comme un dernier recours. Quand une plainte est portée à l'OTC, on a généralement perdu un client et quelque chose d'assez grave s'est produit. Nous accordons évidemment la plus grande attention possible à chaque plainte qui se rend si loin. À ce stade-là, on ne peut généralement pas régler le problème grâce à quelques milliers de milles Aeroplan. Nous prenons ces problèmes très au sérieux.
Le sénateur Tkachuk : Comment gère-t-on la question des agents de voyage au Québec et en Ontario? Monsieur McNaney, vous avez mentionné que les agents de voyage avaient leurs propres frais. Dans une province comme la Saskatchewan, ils pourraient afficher des tarifs plus bas, auxquels s'ajouteraient les frais, plus les 30 ou 60 $ que le consommateur paierait, selon ce que l'agence de voyage facture. Comment gère-t-on la situation en Ontario et au Québec en ce moment?
M. McNaney : En vertu des dispositions sur le prix total, elles doivent inclure tous les coûts.
Le sénateur Tkachuk : Elles affichent donc un tarif plus élevé qu'Air Canada?
M. McNaney : À cause des taxes et des frais qu'elles incluent, oui.
Le sénateur Tkachuk : Elles ajoutent aussi leurs propres frais, n'est-ce pas?
M. McNaney : Je ne suis pas certain de savoir comment sont traités ces frais supplémentaires en Ontario et au Québec, sénateur.
M. Galimberti : Je pense que tout dépend des agents de voyage, qui décident d'inclure ou non leurs frais dans le prix affiché.
Le sénateur Tkachuk : Ne sont-ils pas tenus de les inclure dans le prix affiché en Ontario et au Québec?
Le sénateur Tkachuk : Quand ils vendent des billets d'avion, quelle que soit la ligne aérienne, les agents de voyage de l'Ontario et du Québec sont tenus d'afficher ou de déclarer dans leur publicité toutes les taxes gouvernementales et les frais.
Le sénateur Tkachuk : Doivent-ils aussi inclure leurs propres frais ou seulement ceux des gouvernements, des aéroports et des autres?
M. McNaney : Si je comprends bien, ils ne doivent afficher que les frais obligatoires, comme les frais des aéroports, la TPS, la TVP, et cetera, plutôt que tous les autres frais. N'oubliez pas que je me place du point de vue de l'Ouest canadien, où la publicité se fait comme chez nous. Il faudrait que je vérifie la façon de faire en Ontario et au Québec. Nous pourrons vous en reparler.
Le sénateur Tkachuk : Pour revenir à la question des frais, quand je loue une voiture, par exemple, les frais d'aéroport, les taxes et les frais d'utilisation me rendent fou. On serait porté à croire qu'ils auraient appris de la façon du gouvernement d'ajouter des frais. Quand je consulte un agent de voyage et que je veux louer une voiture, je demande que tous les frais soient inclus. Je demande ce qu'il va m'en coûter au total, donc je connais le prix réel. C'est la façon dont je veux que la comparaison se fasse. Ne pensez-vous pas que les consommateurs trouveraient cela utile? Du simple point de vue de la publicité disons à l'extérieur du Québec, de l'Ontario et de la Saskatchewan, il me semble que les consommateurs seraient contents de se rendre compte que les frais affichés correspondent au prix réel plutôt que de se faire dire : « Oh! En passant, le tarif de 99 $ va équivaloir à 200 $ ». Cela me dérangerait. La logique me porterait à croire que la personne qui affiche le tarif total serait en avantage concurrentiel.
M. McNaney : En toute logique, je pense moi aussi que les consommateurs en général aimeraient voir le prix final qu'ils vont payer. Le problème qui se présente à moi, quand j'essaie d'administrer mon entreprise, c'est qu'en raison de décisions qui ont été prises au moment de la création de la Constitution il y a bien longtemps, ce domaine fait partie des domaines maudits du partage des responsabilités fédérales-provinciales et de l'aspect international. Je vais vous en donner le parfait exemple.
Il y a plusieurs semaines, nous avons proposé un tarif promotionnel de 11 $ pour souligner le onzième anniversaire de WestJet. Le monsieur à ma gauche a proposé la même chose, bien sûr, et pour renchérir, il l'a fait dans l'Ouest canadien et nous avons dû lui emboîter le pas. C'est de bonne guerre en amour, à la guerre et en affaires dans le transport aérien.
De mon point de vue, nous avons offert un tarif à 11 $ avantageux pour le consommateur. Ce tarif a été cité en exemple devant ce comité la semaine dernière pour montrer pourquoi je suis un bandit dans mes techniques de publicité. J'ai prélevé 11 $ pour offrir ce service, puis j'ai prélevé 50 $ de plus pour Ottawa. La taxe sur cet achat de 11 $ était de 50 $.
Si l'on veut parler de la protection des consommateurs et des véritables besoins des consommateurs, ce qui dépasse la portée du projet de loi C-11 et de cet article, je dirais qu'il faut nous attaquer aux frais qu'on prélève de ce côté-ci, aux 50 $ qui s'ajoutent à un achat de 11 $ pour totaliser 62 $. Si l'on me demandait ce qui réjouit le plus les consommateurs, je parierais que c'est cette offre stratégique plutôt que le bilan des 10 ou 15 dernières années, depuis que différents ministères réclament leur part du gâteau et leur imposent ces 50 $. À mes yeux les consommateurs l'apprécient bien plus que mon obligation d'afficher les prix de façon plus évidente. Je ne pense pas que cette obligation protège le consommateur, parce que le consommateur n'a pas besoin de protection contre moi. En clair, il a besoin d'une protection contre Ottawa.
M. Galimberti : Pour répondre à votre question, je suis convaincu que mon consommateur est très frustré de voir un tarif de 99 $ se transformer en un prix de 140 $. Sur le site web d'Air Canada, nous décrivons en détail exactement d'où viennent ces taxes et ces frais. J'ai apporté des impressions d'écran qui montrent où l'argent va, de même qu'une impression d'écran qui explique exactement en quoi consistent ces frais. C'est avec plaisir que je vais les remettre au comité à titre de référence, s'ils les veulent.
Je pense que nous courons un risque. Est-il plus simple d'inscrire 140 $ et que ce prix comprenne tous les frais inclus dans le voyage? Absolument. Est-ce que c'est plus clair? Non. Je pense que cela brouille les cartes en cachant davantage aux consommateurs où va l'argent de leur achat.
Le sénateur Tkachuk : Je vais me concentrer un instant sur les vols internationaux, disons de Toronto. Je suis peut- être le seul qui ne comprend pas bien, mais pour que tout le monde comprenne bien, Air Canada met sur son site de la publicité pour un vol de Toronto à Londres ou à Paris ou à une autre ville d'Europe. Bien sûr, beaucoup d'autres lignes aériennes en font de même. Vous dites que vous allez devoir afficher le tarif incluant tous les frais; en même temps, si je consulte le site web du transporteur aérien LOT ou du transporteur aérien australien... est-il en anglais, soit dit en passant?
M. Galimberti : Absolument.
Le sénateur Tkachuk : Le prix y serait affiché sans les frais, ce qui pourrait me porter à choisir leur site, puis à constater qu'il va m'en coûter autant, mais comme je suis déjà là, je pourrais quand même très bien réserver mon billet là. C'est ce que vous craignez.
M. Galimberti : Il ne fait aucun doute que les tarifs affichés sur la première page des sites Web seront toujours inférieurs sur les sites des transporteurs étrangers.
Le sénateur Tkachuk : C'est comme d'inscrire qu'on peut obtenir une télévision à écran plasma gratuite, mais qu'il faut acheter un million de matelas, n'est-ce pas?
M. Galimberti : Exactement.
Le sénateur Eyton : Je vous remercie d'être ici ce soir. J'aimerais vous interroger sur les travaux du Comité des transports, de l'infrastructure et des collectivités de la Chambre des communes. Selon mes notes, des représentants de votre association ont comparu devant le comité et n'avaient absolument aucune objection contre l'une ou l'autre des dispositions du projet de loi C-11. Ils ont également dit qu'il n'y avait aucun porte-parole des différents transporteurs aériens qui avait comparu devant le Comité des transports, d'où le projet de loi C-11. Est-ce exact? Si personne n'a témoigné, pourquoi?
M. Galimberti : À ce moment-là, le libellé du projet de loi C-11 nous convenait. Le problème, c'est l'article 27, que nous proposons de modifier pour lui redonner son ancienne forme. Il prévoyait un pouvoir discrétionnaire ministériel. Nous ne voyions pas de problème dans le projet de loi C-11 jusqu'à ce que le comité de la Chambre le modifie dans son étude article par article. En tant que porte-parole d'une ligne aérienne, je pense pouvoir parler au nom de mon association. Personne ne nous a demandé notre avis sur les diverses incidences de cet amendement sur notre plan d'activité. Le comité de la Chambre a agi, à tout le moins à notre avis, sans pouvoir mesurer pleinement l'ampleur de ce qu'il proposait.
Le sénateur Eyton : Peut-on dire que dans les circonstances, vous n'avez pas eu l'occasion de vous exprimer?
M. McNaney : Oui. Comme tous les honorables sénateurs le savent, dans la hâte qui précède le congé de Noël, on essaie de renvoyer les projets de loi des comités à la Chambre et de les catapulter ici; c'est exactement ce qui est arrivé à ce projet de loi à l'époque. Nous n'avons pas eu le loisir de nous présenter comme il se doit devant ce comité pour expliquer ce que nous sommes en train de vous expliquer.
Le sénateur Eyton : Transat a fait parvenir un mémoire au comité. Je ne suis pas certain que vous l'avez vu.
M. McNaney : Nous nous battons toujours entre nous sur cette question.
Le sénateur Eyton : Transat recommande que le Parlement prenne les devants en inscrivant les principes suivants dans le projet de loi C-11, ce qui permettrait non seulement une harmonisation longtemps attendue avec les administrations avancées, telles le Québec et l'Ontario, mais aussi de proposer un modèle et un repère aux autres provinces qui n'ont pas encore agi sur ce plan.
La société propose ensuite quatre principes. Je vais revenir à celui dont nous étions en train de parler, mais elle mentionne la publicité sur les forfaits tout compris des transporteurs aériens, un fonds national d'indemnisation des voyageurs, le resserrement des obligations financières minimales des nouveaux transporteurs aériens et enfin, la comptabilité des fiducies et des garanties financières pour l'industrie et les risques de faillite des transporteurs.
Je tiens à revenir à son mémoire sur la publicité de prix incluant tous les frais des lignes aériennes.
Nous avons déjà parlé du Québec; ce n'est là qu'une façon de faire pour afficher le prix total. Selon ce mémoire, l'Ontario offre l'option d'afficher le prix tout compris ou d'afficher le même prix, mais de montrer le détail des taxes, des frais et des surtaxes.
Ensuite, les gens de Transat disent ne pas voir pourquoi le législateur fédéral ne suivrait pas cette tendance, qui offre le maximum de transparence aux consommateurs tout en assurant des règles uniformes pour tous les transporteurs aériens (canadiens ou étrangers) qui vendent des services aériens aux consommateurs en partance du Canada sans égard au mode de distribution.
Transat souhaite un traitement uniforme partout et semble croire que c'est possible.
De toute évidence, c'est un point de vue très différent de celui que vous avez présenté ici, ce soir. Y a-t-il des raisons pour que la position de Transat soit si différente?
M. McNaney : Oui, mais j'aurais une petite chose à dire sur l'idée que le gouvernement fédéral soit un modèle pour les autres provinces.
Je ne suis pas certain de vouloir être le mannequin dans ce modèle, pour les motifs mêmes présentés dans notre témoignage : la situation diffère d'une province à l'autre et par définition, cette mesure nous placerait en désavantage concurrentiel pour la publicité future.
Transat connaît énormément de succès. L'entreprise se porte très bien depuis des années et nous avons une relation commerciale avec elle.
Nous sommes en total désaccord avec elle sur cette question. Je ne suis pas tout à fait certain de savoir quel est le statut juridique de Transat et comment elle distribue ses billets, mais je pense qu'elle est considérée comme une agence de voyage dans ses règles de publicité et non comme un transporteur aérien. C'est une entreprise totalement intégrée qui offre à la fois des conseils de voyage, des réservations de voyage, des vols nolisés et le reste, en plus de posséder un parc aérien. Elle a la même perspective que les agences de voyage dont les représentants ont comparu devant vous la semaine dernière.
Nous représentons environ 95 p. 100 du marché intérieur canadien. Transat n'offre pas de vol à l'intérieur du Canada, elle a donc beau jeu de dire que le gouvernement fédéral devrait être un modèle, mais ce sont nos avions qui parcourent le pays, et c'est nous qui devons composer avec les régimes des divers gouvernements. Pas elle.
D'un point de vue plus général, concernant l'idée de prendre ce qui a été adopté en Ontario et d'y harmoniser la loi fédérale, il faut dans une certaine mesure tenir compte des problèmes auxquels sont confrontés Transat et les agents de voyage en Ontario en raison de la mesure unilatérale prise par le gouvernement provincial. Le gouvernement fédéral est en train de commettre la même erreur, et l'on vous demande de la reproduire encore, de résoudre le problème de l'Ontario et du Québec en l'exportant au reste du pays et ailleurs dans le monde.
C'est comme de dire que nous allons régler ce problème en l'amplifiant : c'est ce que cette solution sous-entend. C'est une solution pour l'Ontario et le Québec, mais elle amplifie le problème et l'impose au reste du pays et du monde. Nous sommes en désaccord avec cette évaluation des choses.
Le sénateur Eyton : Je vous remercie de cette analyse. Cela me rappelle ma mère qui me disait que le monde n'irait pas si mal si tout le monde était anglican.
M. McNaney : Je parlerais plutôt des catholiques irlandais, avec ma bague claddagh, mais je vais m'en tenir aux anglicans.
Le sénateur Eyton : Qu'arrive-t-il quand un vol met à contribution plusieurs transporteurs? Si l'article 27 s'appliquait, il pourrait, par exemple, y avoir un vol commun entre Air Canada et United. Si je comprends bien, United pourrait agir différemment d'Air Canada, mais le vol resterait le même vol commun.
M. Galimberti : C'est un vol commun.
Le sénateur Eyton : Pour la publicité?
M. Galimberti : La publicité se fait habituellement de façon séparée. À l'heure actuelle, pour Air Canada, je peux vendre un siège de Lufthansa dans un billet de Francfort, disons, jusqu'à Mumbai, en Inde. Lufthansa a le même privilège de vendre des sièges d'Air Canada de Toronto à Francfort.
Le prix en bout de ligne serait le même. Cependant, le prix affiché sur la première page du site web serait différent. Lufthansa suivrait les règles de publicité du droit allemand.
Le sénateur Zimmer : Je vous remercie de votre exposé d'aujourd'hui et vous remercie de partager vos préoccupations avec nous. Il semble que les règles du jeu ne soient pas les mêmes pour tous, mais je suis content de voir que vous êtes tous deux bons joueurs. WestJet et Air Canada coopèrent dans ce dossier.
Monsieur Galimberti, vous avez mentionné dans votre déclaration qu'Internet est un outil de vente de plus en plus important. Quelle est la proportion de vos ventes qui se fait par votre site web?
M. Galimberti : Nous avons de loin franchi le cap des 50 p. 100 pour les ventes sur le site web. Ce ne sont pas nécessairement des ventes de vols nationaux. On peut facilement acheter un billet d'Air Canada de Hong Kong, puis prendre l'avion là-bas jusqu'à Toronto après avoir acheté ses billets par Internet de là-bas. Cela illustre le cœur du problème, c'est-à-dire que nous serons toujours en désavantage devant un concurrent comme Cathay.
L'article 27, tel qu'il est rédigé, tient bien compte des médias nationaux. Il se fonde sur la présomption que tous les transporteurs aériens diffusent leur publicité dans les journaux, à la radio ou à la télévision au pays et que les pages sur la vente de sièges représentent la totalité de la publicité du transporteur.
Depuis des années, l'industrie a pris une autre direction. Internet est notre outil de vente le plus important. Cela ne va aller qu'en augmentant. Nous n'allons que nous éloigner de la publicité conventionnelle. C'est ce sur quoi nous mettons le cap, donc l'article 27 diverge vraiment de l'orientation que prend l'industrie.
Le sénateur Zimmer : Monsieur McNaney, j'ai deux questions, dont l'une porte sur vos ententes contractuelles avec vos agents de voyage. Quant aux méthodes de publicité qu'utilisent les agents de voyage des autres provinces, qui ne sont pas tenus selon la loi provinciale d'afficher le prix tout compris, vous avez conclu une entente contractuelle avec eux. Ne pourriez-vous pas inscrire dans le contrat que pour recevoir leurs commissions, ils doivent eux aussi afficher le prix total? Ne pourriez-vous pas l'inclure dans vos contrats?
M. McNaney : Nous pourrions envisager cette option, une option à laquelle nous réfléchissons évidemment dans le contexte de ce projet de loi.
Le problème, c'est que nous risquons de ne pas pouvoir en assurer le respect parce qu'il y a des milliers d'agents de voyage. Il faudrait que nous embauchions des surveillants des agents de voyage afin qu'ils passent devant leurs boutiques pour s'assurer que le prix écrit au tableau dans la vitrine comprend tout. Il faudrait que nous feuilletions les annonces de journaux les fins de semaine. Ce ne serait pas réalisable pour nous.
Le sénateur Zimmer : Vous avez mentionné que ce projet de loi ajouterait des coûts à vos activités. Je sais que vous ne pouvez pas nous divulguer de chiffres d'affaires confidentiels, mais pourriez-vous nous décrire les paramètres de ce qui vous attendrait le cas échéant?
M. McNaney : Vous avez raison, je ne peux pas vous donner de chiffres d'affaires confidentiels ni de détails. Cependant, si l'on prend un tarif de retour moyen de WestJet, qui est d'environ 350 $, qu'on y ajoute la commission et les autres frais que nous devons prévoir pour le traitement du billet s'il passe par une agence de voyage, les coûts équivaudraient à environ 15 p. 100 du prix. Nous sommes prêts à accepter ces 15 p. 100; c'est le coût des affaires. Nous ne pouvons pas reproduire ce que les agences de voyage ont établi dans le pays pour ce qui est de leur rayonnement dans divers marchés. Nous avons pris la décision d'affaires consciente d'utiliser les agents de voyage dans notre réseau de distribution.
L'un des aspects malheureux de ce débat, c'est qu'il donne l'impression que les transporteurs sont ligués contre les agents de voyage. J'espère que les gens vont comprendre qu'à cause de l'incidence du projet de loi sur nos relations commerciales, nous devons formuler la chose de cette façon, mais que ce n'est pas caractéristique de nos relations professionnelles avec les agences de voyage du pays.
Ces coûts équivalent à 15 p. 100, et nous en sommes satisfaits. Ce sont des frais pour la vente de biens qui paraissent sur la déclaration de revenus. On ne peut pas les éviter.
Si les règles du jeu changent, de sorte que ces coûts dépassent les 15 p. 100, alors il serait de plus en plus probable que nos coûts augmentent, parce que si nos publicités étaient les mêmes, nos clients pourraient choisir et consulter notre site web plutôt qu'un agent de voyage. Maintenant, ils vont voir 100 $ pour un vol de Vancouver à Maui, alors que nous allons afficher 140 $ pour le même vol. Il ne faudra pas qu'énormément de consommateurs cessent d'acheter directement de WestJet à un coût de 15 p. 100 pour que ces coûts s'élèvent à des millions de dollars. C'est la situation qui nous guette.
Le sénateur Tkachuk : Quelles vont être les incidences d'Expedia ou d'Orbit sur vous? Si une personne se trouve à Phoenix et qu'elle consulte le site web d'Expedia pour voir les prix des autres transporteurs aériens, votre prix devra lui aussi tout comprendre, n'est-ce pas?
M. McNaney : Oui.
Le sénateur Zimmer : Vous semblez être les victimes. Dans l'ancien temps, on se rendait à la porte d'embarquement et l'on se faisait presque harceler pour payer 10 $ afin d'embarquer dans l'avion. Cela irritait les gens, donc les frais des aérogares, entre autres, vous ont été transférés. Vous êtes presque les victimes. Vous êtes les transporteurs, mais vous devez percevoir leur argent alors que vous essayez d'uniformiser les règles du jeu. C'est difficile à faire. Vous êtes presque les méchants dans cette histoire.
Avez-vous une idée de qui établit les frais d'amélioration des aéroports, les frais de sécurité, les frais environnementaux et les autres coûts connexes? Combien font-ils par année? Comment dépensent-ils cet argent? Qui surveille ces dépenses? En avez-vous une idée, l'un ou l'autre?
M. McNaney : Vous touchez une corde sensible pour nous. Nous pensons que pour protéger les consommateurs, il ne faut pas m'obliger à afficher en plus grosses lettres, mais simplement nous attaquer à cette taxe de 50 $ qui s'ajoute à un achat de 11 $. Votre question met la table pour des pressions futures que je vais exercer à ce comité et des pressions que je vais exercer dès maintenant.
Dans notre industrie, nous devons nous attaquer aux questions que vous venez de soulever. Regardons un peu la pléthore d'organisations qui imposent des frais. Une partie du problème, c'est qu'il n'y a pas seulement un méchant à Ottawa. Le ministère des Transports s'acquitte de mandats et de responsabilités, et je sais très bien qu'il y a une foule de fonctionnaires des Transports dans cette pièce. Le ministère des Finances, NAV CANADA et les aéroports eux- mêmes ont tous des responsabilités qui sous-entendent des frais ou des fonds. Cela s'ajoute à la sécurité.
En bout de ligne, tous ces groupes réclament leur part sur le billet d'avion. Nous sommes en train d'essayer de cibler l'ensemble des organismes qui jouent un rôle dans ce domaine et de leur poser directement les questions que vous nous posez. Qui est responsable? Qui fait le suivi? Pourrions-nous unir nos forces de façon cohérente pour nous attaquer à cette taxe de 50 $ sur une vente de 11 $?
Je recommanderais au comité de s'attaquer à cette question de front. Les représentants de notre industrie seraient ravis de revenir en parler en profondeur avec vous.
M. Galimberti : Je vais remettre au comité un exemple de billet Ottawa-Toronto imprimé dans les deux langues officielles, qui coûte 99 $ pour l'aller et autant pour le retour. Sur ce billet, il y a des frais de 24 $ de NAV CANADA, 9,34 $ pour l'ACSTA — ce qui doit être lu optiquement — 35 $ pour les frais d'améliorations aéroportuaires pour les aéroports d'Ottawa et Pearson et 15,91 $ pour la TPS et la TVP. Cette somme ne comprend pas les quelque 350 millions de dollars que le gouvernement prélève chaque année pour les loyers des aéroports, ni la taxe d'accise sur le carburant de 4 ¢ le litre que le gouvernement fédéral prélève sur les vols intérieurs. Cela vous donne une idée du régime de taxation.
Les frais d'améliorations aéroportuaires varient énormément d'un bout à l'autre du pays. Ils sont présentés à la dernière page de mon mémoire. Nous n'avons aucun contrôle sur la façon dont les aéroports dépensent les frais d'améliorations aéroportuaires. Nous n'avons rien à dire sur la façon dont sont établis les frais pour la sécurité. NAV CANADA a fixé ses frais de façon arbitraire. L'organisme détient une importante réserve, de l'ordre de millions de dollars, que paient nos passagers, et cette réserve est maintenue à perpétuité, en cas d'urgence.
Cela me ramène à ce que j'ai dit tout à l'heure : mes clients sont très contrariés lorsqu'un tarif de 99 $ devient 130 $. C'est un grave problème, qui me préoccupe beaucoup.
Le sénateur Zimmer : Lorsque je vais à l'hôtel maintenant, on ajoute à ma facture des frais de commercialisation de 8 $. Ce sont des frais qui permettent à l'hôtel de me vendre une chambre. Je paie des frais de commercialisation pour que la chambre me soit vendue. Ce que les associations font aujourd'hui pour exister est dérangeant. Elles additionnent tous ces frais et vous les imposent pour que vous leur donniez leur argent. Je suis désolé pour vous. Vous vous trouvez dans une situation très difficile.
Le sénateur Dawson : J'ai consulté des sites Internet — Flightcenter.ca, Travelocity.ca, Airfare.com, Lowfares.com, FareCompare.com, Priceline.com, Expedia.com, et cetera. Dans chacun de ces sites, si je demande un prix — compte tenu, monsieur Galimberti, que vous êtes associé avec United pour les vols aux États-Unis — est-ce vrai que les prix affichés sur ces sites seront toujours inférieurs aux vôtres?
M. Galimberti : Je ne suis pas certain de la façon dont fonctionnent les aggrégateurs, tous les Expedia et Orbit du monde. Cela dépend davantage du site que vous consultez, si le domaine racine est .ca. L'aggrégateur devient alors une entité assujettie à la réglementation canadienne. Je ne sais pas comment ils fonctionnent sur la scène internationale. Les choses semblent différentes d'un site web à l'autre.
Le sénateur Dawson : Le Québec et l'Ontario doivent surveiller les prix sur Internet, alors si leurs règlements ne sont pas respectés dans ces douzaines de sites, comment font-ils pour appliquer la loi à ces entreprises internationales qui se trouvent probablement dans un bureau de poste quelque part?
M. McNaney : Je crois comprendre que les aggrégateurs ont leur siège social en Ontario, et de là ils doivent afficher des tarifs tout inclus.
Dans d'autres domaines comme les soins de santé, où les provinces exercent chacune leurs compétences, les ventes par Internet sont assujetties à des lois différentes. Cela ne veut pas dire qu'on ne pourrait pas déménager dans une province qui n'exigerait pas l'affichage des tarifs tout inclus. Toutefois, je peux me tromper, mais je crois que les moteurs de recherche pour les sites portant le domaine racine .ca ont leur siège social en Ontario.
Le sénateur Dawson : Bon nombre de sites ne portent pas le domaine .ca, mais plutôt .com. Il est possible d'acheter un billet par carte de crédit sur un site international, peu importe ce qu'il est, et dans votre cas, on dirait que vos tarifs pour un vol Québec-Floride sont plus élevés que ceux de United; vous pouvez prendre un avion de United Airlines ou d'Air Canada.
M. Galimberti : S'il s'agit d'un aggrégateur basé en Europe ou aux États-Unis, peu importe comment ses pratiques d'affaires sont établies, le gouvernement canadien ne peut pas contraindre ou réglementer ce site. Si lowfares.com décide de mettre en place un système qui n'inclut pas les taxes et les frais, il inclura fort probablement les taxes et les frais pour notre vol.
Le sénateur Dawson : Qu'arrivera-t-il si le ministre se présente devant nous et dit qu'il accepte le texte actuel parce qu'il veut que nous adoptions ce projet de loi? Si nous acquiesçons à votre demande et que nous revenons au texte original proposé par le ministère des Transports il y a six mois, nous risquons de renvoyer le projet de loi à la Chambre des communes et au Comité des transports de la Chambre des communes. Il sera modifié encore et nous sera renvoyé, et ces projets de loi, dont certains sont au Feuilleton depuis maintenant quatre ans, seront retardés. Vous pouvez comprendre notre situation.
Si vous aviez pu convaincre le ministère des Transports que ce qui a été fait au comité de la Chambre des communes... Nous pourrions au moins lui dire que nous sommes d'accord avec vous, que nous modifierons le projet de loi et que nous le renverrons à la Chambre des communes, parce que nous essayons d'être la Chambre du second examen objectif et nous améliorons les projets de loi pour qu'ils soient constructifs, comme ils doivent l'être.
Je vous pose la question — et je m'adresse aussi au parti ministériel. S'il est justifié de renvoyer le projet de loi à la Chambre, est-ce qu'il pourra nous être retourné et passer en troisième lecture avant la fin de l'été? Vous avez parlé de la pression sentie lors des délibérations de décembre à la Chambre des communes. Or, nous avons maintenant peut-être quatre semaines pour adopter des projets de loi avant la fin de la présente session. Dans un contexte de mi-mandat, vous pouvez imaginer qu'il pourrait y avoir prorogation et, dans ce cas, le projet de loi mourrait au Feuilleton encore une fois.
Nous pourrions être en faveur de vos recommandations, mais croyez-vous que nous pouvons examiner le projet de loi, le modifier, revenir au texte original, sans inventer une nouvelle formulation, le renvoyer à la Chambre et le recevoir à nouveau ici? Ne craignez-vous pas que d'autres aspects du projet de loi qui vous satisfont mourraient en même temps?
M. McNaney : Ce que je retiens — et je présume que c'est vrai aussi pour M. Galimberti — c'est qu'il y a d'autres dispositions dans ce projet de loi et qu'il s'agit de la deuxième ou troisième tentative d'adoption du projet de loi, mais je ne crois pas que le sentiment de frustration que vous éprouvez en essayant de faire adopter ce projet de loi dans le délai imposé par un éventuel congé parlementaire soit suffisant pour adopter une disposition qui ne nous convient pas.
Au bout du compte, si cette disposition est adoptée dans sa forme actuelle, voilà la décision que vous prenez : vous adoptez un projet de loi qui conclut que le Parlement est bien avisé d'exiger, dans un secteur hautement capitalistique et cyclique comme le nôtre — où tout le monde se félicite lorsque l'industrie a une marge de profit de 4 p. 100 — que l'entreprise qui fournit le service annonce son produit à un prix supérieur par rapport à une autre entité qui vend un élément de ce service.
Je ne peux absolument pas voir comment une telle décision serait économiquement justifiée dans une industrie quelconque — et certainement dans une industrie aussi capitalistique et cyclique que la nôtre. Je comprends les contraintes de temps et les exigences que vous avez. Toutefois, j'implore le comité de songer aux conséquences s'il adopte ce projet de loi simplement parce qu'il s'agit de la troisième tentative ou que la Chambre ajournera bientôt ou que vous envisagez une défaite parlementaire. Nous sommes ceux qui en subiront les conséquences.
Le sénateur Dawson : Monsieur Galimberti, nous vous saurions gré de déposer les documents que vous avez.
M. Galimberti : Je me ferai un plaisir de remettre au greffier les documents dont j'ai parlé, à la fin de la réunion.
La présidente : Craignez-vous, malgré votre participation au processus de réglementation, que le règlement sur la publicité ne vous convienne pas? Le projet de loi n'est pas précis quant à la formulation du règlement.
M. McNaney : Pour ce qui est de WestJet, vous me demandez d'espérer que les choses se règlent d'elles-mêmes. L'espoir est une chose merveilleuse le dimanche, lorsque je suis à l'église. Durant les six autres journées de la semaine, l'espoir ne suffit pas dans une stratégie d'affaires. Le règlement peut-il rendre les choses moins dommageables? C'est possible. Le règlement peut-il rendre les choses encore pires que je ne le crains déjà? C'est possible aussi.
M. Galimberti : Nous pouvons dire que nous avons beaucoup confiance dans nos organismes de réglementation. En même temps, nous ne pouvons pas établir nos plans d'affaires en fonction d'un sentiment de confiance.
Le sénateur Mercer : J'appuie la position d'Air Canada et de WestJet concernant l'article 27, à savoir qu'il doit être modifié. Il s'agit d'une industrie fragile. Nous l'avons vu dans le monde entier. Je ne crois pas que nous devons faire quelque chose qui désavantagerait nos transporteurs locaux. Je ne voyage pas avec WestJet parce que WestJet ne va pas là où je vais. Je voyage avec Air Canada, et cela m'irrite que vous parliez des 777 et des 787 alors que vous ne pouvez pas mettre de l'ordre dans votre marché intérieur. Le marché international m'importe peu, parce que c'est dans le marché intérieur que vous continuez de cafouiller.
Je reviens à une question que la présidente a posée au sujet du processus de plaintes. Vous avez dit qu'Air Canada traite les plaintes et qu'il y a suffisamment d'employés à cette fin. Je ne vous crois pas. Il y a deux semaines, à l'aéroport d'Ottawa, je ne pouvais monter à bord de l'appareil qui devait me rendre à Toronto parce que l'avion avait changé. J'étais vraiment ennuyé. Toutefois, la situation a suscité la colère d'un autre passager qui devait absolument prendre cet avion. Je n'ai aucune idée si c'était pour des raisons d'affaires ou pour des raisons personnelles; cela m'importait peu.
Comment a réagi le préposé au comptoir? A-t-il essayé de le calmer, de trouver une autre solution, de l'amener au comptoir de Porter Airlines et d'obtenir un billet pour lui? Non, il a appelé les agents de sécurité. Excusez-moi, mais ce n'est pas un bon service. Vous continuez de vous présenter ici et je suis estomaqué chaque fois que je vois un représentant d'Air Canada devant notre comité. Je suis estomaqué que vous veniez ici et que vous demandiez notre aide alors que vous ne pouvez pas fournir un service efficace et courtois à vos clients dans chaque aéroport du Canada.
M. Galimberti : Bien souvent, les interactions avec les clients sont, de par leur nature, des interactions individuelles. Je sais tous les efforts que nous mettons, les outils que nous fournissons et ce que nous faisons pour permettre à notre personnel d'aider les clients. Je suis grandement troublé chaque fois que j'entends parler d'un incident — et il y en a — où le service à la clientèle laisse à désirer.
Je ne peux pas parler de l'incident dont vous avez été témoin. Ce n'était certainement pas une expérience plaisante, ni pour ce passager ni pour ceux autour de lui. Tout ce que je peux dire, c'est que, à tous les niveaux des opérations, je crois que nous essayons très sincèrement de régler les problèmes liés à notre clientèle. Nous examinons les données que nous recueillons en menant des sondages auprès de nos clients et en surveillant activement les plaintes que nous recevons afin de régler ces problèmes.
Le sénateur Mercer : Monsieur Galimberti, je réponds à des sondages constamment. Je suis un membre élite ou super élite, selon la région où je dois me rendre. Savez-vous sur quels vols portent les sondages? Sur le vol Ottawa- Toronto, un vol de 45 minutes. Que peut-il se passer d'ennuyeux, mis à part le fait que je ne suis pas parti en priorité sur ce vol? On ne m'appelle jamais pour me poser des questions sur le mauvais service offert sur le vol Ottawa-Halifax que je prends toutes les semaines.
Comme je l'ai dit, je vais vous appuyer tous les deux; si c'est moi qui dois proposer l'amendement au projet de loi pour satisfaire les deux compagnies aériennes, je le ferai.
M. McNaney a peut-être les mêmes problèmes, mais je l'ignore parce que je ne voyage pas avec sa compagnie aérienne.
Je ne sais pas combien d'argent Air Canada consacre au perfectionnement du personnel au comptoir, que ce soit à l'enregistrement ou après que vous ayez passé les contrôles de sécurité. À l'époque où Air Canada et Canadian Airlines ont fusionné, c'était facile de faire la distinction. Les employés de Canadian Airlines étaient ceux qui vous donnaient un bon service, et les gens qui ne se souciaient pas de vous étaient les employés d'Air Canada. Dépensez-vous un peu d'argent pour régler ce problème?
M. Galimberti : Oui, nous dépensons beaucoup d'argent pour régler les problèmes de service à la clientèle de façon continue. Je m'engage personnellement devant vous et devant le comité à vous transmettre toute l'information possible, qui n'est pas confidentielle, sur la nature de ces programmes.
Le sénateur Merchant : Je déteste m'acharner sur vous parce que vous venez de recevoir un bon coup de fouet, mais si les plaintes que reçoit une compagnie aérienne correspondent plus à la part du marché qu'en 2000, alors les plaintes que reçoit WestJet doivent être à la hausse et celles d'Air Canada doivent être à la baisse, puisque votre part du marché a augmenté, monsieur McNaney.
Monsieur Galimberti, recevez-vous plus ou moins de plaintes qu'en 2000?
M. Galimberti : Pour ce qui est d'Air Canada, je crois que les plaintes sont à la baisse. La part du marché est une mesure que nous pouvons examiner. Nous transportons plus de passagers aujourd'hui que jamais auparavant. Je crois que c'est le dix-septième mois consécutif où nous enregistrons un coefficient de remplissage record. Bien que WestJet ait certainement pris de l'expansion au pays, nous transportons beaucoup plus de personnes qu'auparavant. Nous avons eu 32 millions de passagers l'an dernier, un chiffre énorme.
Les plaintes sont-elles à la baisse? Je crois sincèrement que oui. Le nombre de voyageurs est-il à la baisse? Non, c'est plutôt le contraire. Le nombre de passagers atteint des chiffres record.
M. McNaney : Nous n'avons pas observé de hausse appréciable malgré la fréquence plus élevée. Nous croyons que nous avons la responsabilité d'essayer de régler les problèmes ou les plaintes bien avant qu'un organisme du gouvernement ne soit obligé de les régler pour nous.
Le sénateur Merchant : Mon commentaire vaut ce qu'il vaut; je voyage avec WestJet et Air Canada, parce que je vis à Regina, mais bien des gens disent qu'ils préfèrent voyager avec WestJet. Ce sera leur premier choix. C'est peut-être parce que vos avions sont différents; ils sont un peu plus spacieux. Les avions d'Air Canada qui font la navette entre Regina et Winnipeg sont petits. Toutefois, je crois que c'est aussi une question de service. On dit qu'Air Canada devient arrogant et que WestJet donne un meilleur service, et ce commentaire vaut ce qu'il vaut.
M. Galimberti : J'ai grandi à Regina, alors je suis particulièrement sensible à ce marché puisque j'y retourne fréquemment; de plus, ma mère prend encore l'avion de là de façon régulière. Cela me dérange d'une certaine façon. Je peux seulement vous dire que je suis personnellement assez dynamique dans mon service.
Les relations que nous avons ne sont pas limitées au gouvernement fédéral. J'entretiens des relations avec les gouvernements provinciaux et les administrations municipales. Nous avons des liens continus avec nos partenaires aéroportuaires. Nous rencontrons les représentants des chambres de commerce. Nous avons rencontré le maire Fiacco, de Regina, et son équipe à plusieurs reprises pour leur exposer en détail le service que nous offrons, l'argent des touristes et des gens d'affaires que nous amenons dans les communautés partout au Canada. Nous sommes une présence dans les localités partout au Canada. Nous avons un excellent programme de bienfaisance que nous appelons Horizons Enfance, qui fait don de millions de dollars et de millions de milles aériens pour des voyages gratuits partout au pays au courant d'une année.
Devenons-nous arrogants? J'espère sincèrement que non. En mon nom personnel et au nom de la compagnie aérienne, je peux vous dire que nous faisons tout ce que nous pouvons pour rejoindre les localités et leur dire que nous sommes présents.
Le sénateur Merchant : J'ai une question au sujet de l'article 19, qui enlève à l'office le pouvoir de mener, de sa propre initiative, des enquêtes sur les monopoles sur les vols intérieurs et les tarifs. Encore une fois, je suis originaire de l'Ouest et je vis dans une ville où le choix est limité. Vos entreprises sont-elles en faveur de ces dispositions? Pourquoi doit-on retirer ce droit de l'office?
M. McNaney : Concernant WestJet, je peux vous dire que je me concentre sur l'article portant sur la publicité des tarifs tout inclus, et je ne me suis donc pas attardé au raisonnement derrière cette autre disposition.
M. Galimberti : Je ne crois pas qu'il convienne de forcer un transporteur qui a un objectif commercial d'effectuer un vol qui n'est pas rentable. L'histoire des faillites dans l'industrie aérienne a été souvent racontée. Le chemin est jonché d'avions abandonnés par les défuntes compagnies aériennes. Suis-je d'accord pour retirer ce pouvoir à l'OTC? Pour dire franchement, je ne sais pas dans quelle mesure il a utilisé ce pouvoir. Je ne sais pas s'il l'a fait souvent. Je suis passablement à l'aise avec cet article.
Le sénateur Merchant : Enfin, j'aimerais dire certaines choses pour le compte rendu au sujet de l'article 27. Il me semble qu'on privilégie ici la publicité par rapport à la connaissance. Il y a quelques années, un certain gouvernement a adopté la TPS parce que, disait-il, ce serait plus facile pour le consommateur de voir la taxe. Il me semble que le contraire s'applique dans ce cas-ci. Je sais que la chose irrite les gens, mais je crois que nous avons le devoir de les informer. La population doit savoir quelles taxes sont imposées par le gouvernement. Cela les ennuie peut-être, mais je ne crois pas que nous servons l'intérêt public en cachant des choses au consommateur. Je vous appuie à cet égard.
La présidente : Merci beaucoup, monsieur McNaney et monsieur Galimberti, de votre présence ici ce soir. Nous vous avons entendus et nous verrons ce que nous pouvons faire avec le projet de loi. Nous ferons de notre mieux. Nous essayons toujours d'atteindre nos objectifs, c'est-à-dire protéger le public tout en permettant à l'industrie de fonctionner.
Nos prochains témoins sont M. Cliff Mackey, qui représente l'Association des chemins de fer du Canada, ainsi que M. Claude Mongeau et M. Jean Patenaude, porte-parole de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada.
Cliff Mackey, président, Association des chemins de fer du Canada : L'Association des chemins de fer du Canada — l'ACFC — qui compte une soixantaine de membres, représente pratiquement tous les chemins de fer en exploitation au pays, notamment les grands chemins de fer marchandises de classe 1, le CN et le Chemin de fer Canadien Pacifique, les chemins de fer régionaux et d'intérêt local ainsi que les chemins de fer voyageurs intervilles, de banlieue et touristiques. À titre de président de l'ACFC, je me réjouis de l'occasion qui m'est offerte de commenter le projet de loi C-11.
Les honorables sénateurs se rappelleront qu'il y a près de sept ans, la Loi sur les transports au Canada avait fait l'objet d'un examen. Nous avions participé activement à ce processus; le comité responsable de l'examen avait déposé son rapport et nous nous étions réjouis de bon nombre de ses recommandations. Le projet de loi C-11 constitue, selon nous, une partie de la réponse au rapport de ce comité.
Je m'adresse à vous aujourd'hui au nom de l'association. Premièrement, je tiens à exprimer clairement que nous appuyons sans réserve l'intention du projet de loi C-11 et la plupart des dispositions qu'il renferme, mais il y en a une en particulier qui préoccupe grandement l'ensemble du secteur ferroviaire, en l'occurrence le paragraphe 95.1, qui traite du bruit et des vibrations causés par la construction et les activités ferroviaires.
Comme vous le savez sans doute, le Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités de la Chambre des communes a modifié les dispositions sur le bruit pour en éliminer la disposition sur le critère du bruit raisonnable proposée dans la version initiale et y substituer l'obligation pour un chemin de fer de :
[...] faire le moins de bruit et de vibrations possible, compte tenu [...] (de)
d) l'incidence possible sur les personnes qui résident en des lieux adjacents au chemin de fer.
L'ACFC craint que ce changement de libellé ne soit néfaste pour le secteur ferroviaire, pour les personnes qui comptent sur un service ferroviaire marchandises et voyageurs fiable de même que, dans certains cas, pour l'organisme de réglementation. Comme de nombreuses entreprises industrielles canadiennes, les chemins de fer doivent parfois fonctionner 24 heures sur 24 et sept jours sur sept afin d'être en mesure d'acheminer les produits essentiels au bien-être économique et social de notre pays. Notre économie ainsi que la viabilité des expéditeurs d'un bout à l'autre du pays dépendent d'un service ferroviaire efficace et fiable. Vous avez tous pu constater récemment, j'en suis sûr, ce que des interruptions du service ferroviaire, même de courte durée, peuvent avoir comme répercussions sur l'économie.
Je vais vous présenter une analyse juridique sommaire que nous avons préparée et qui met en lumière certaines de nos préoccupations au sujet du paragraphe 95.1.
Je tiens à dire que mon collègue Jean Patenaude m'accompagne ce soir. Il est spécialiste des questions concernant la réglementation dans le secteur des transports et il pourra discuter du sujet plus en détail avec vous si vous le souhaitez.
Permettez-moi d'abord de vous parler du libellé du paragraphe 95.1, qui, selon nous, est rarement utilisé. L'expression « le moins possible » n'est pas souvent utilisée pour établir des normes dans la législation fédérale. En fait, Transports Canada a reconnu, lors de sa comparution devant le comité de la Chambre des communes que ces mots n'étaient pas souvent utilisés. Des mots tels que « raisonnable » et « déraisonnable » sont des termes établis qui ont fait leurs preuves. L'utilisation d'un libellé s'écartant de la terminologie établie donnera lieu selon nous à des contestations de la part des différentes parties, y compris les organismes de réglementation fédéraux, ce qui exigera une interprétation judiciaire et engendrera, il faut l'avouer, davantage d'incertitude.
Certains ont prétendu que l'expression « le moins possible » renvoie au concept de caractère raisonnable. Nous nous sommes longuement penchés là-dessus, et nous avons conclu que ce raisonnement est inexact. La première version du projet de loi C-11, qui précisait que la compagnie de chemin de fer était « tenue de ne pas faire de bruit déraisonnable », a été modifiée pour en retirer le concept de caractère raisonnable et le remplacer par l'expression « le moins possible ».
En conséquence, nous croyons que l'Office des transports du Canada, ou toute autre partie qui, dans l'avenir, déposera une plainte liée au bruit, pourra soutenir que l'intention du Parlement était de remplacer le critère du caractère raisonnable par une obligation stricte.
Deuxièmement, je tiens à faire valoir que le paragraphe 95.1 dépasse les exigences de la loi. À l'heure actuelle, lorsqu'une plainte liée au bruit est déposée contre un chemin de fer, celui-ci peut généralement invoquer comme moyen de défense qu'il n'a commis aucune faute et que ses activités n'entraînent pas plus d'inconvénients que ce qui serait autrement acceptable compte tenu de l'emplacement de la résidence de la personne qui porte plainte. Cela concerne encore une fois le concept de caractère raisonnable. Or, le paragraphe 95.1 aurait pour effet d'imposer une obligation stricte au chemin de fer dépassant celle qui est imposée aux personnes vivant à proximité d'installations ferroviaires.
Troisièmement, le paragraphe 95.1 élimine, selon nous, le recours à la défense fondée sur l'autorisation légale. Comme certains d'entre vous le savent sans doute, une entreprise est autorisée, par voie législative, à exercer des activités dont le but est de servir l'intérêt du public et de la collectivité en général, même si ces activités pourraient être considérées comme une nuisance par certains. L'expression « le moins possible » rendra presque impossible pour une compagnie de chemin de fer, à notre avis, de recourir à cette défense avec succès.
Quatrièmement, nous croyons qu'aux termes du paragraphe 95.1, les obligations incombent uniquement au chemin de fer. En effet, les promoteurs immobiliers ne sont, en contrepartie, tenus par aucune obligation d'aviser les compagnies de chemin de fer avant d'entreprendre des travaux de construction à proximité d'infrastructures ferroviaires. De plus, aucune disposition n'oblige les conseils d'aménagement communautaires à établir des normes de construction pour les ensembles résidentiels à proximité des infrastructures ferroviaires, et il n'existe aucune restriction concernant l'émission des permis de construction municipaux ou d'autres documents similaires.
Je tiens à faire remarquer au comité que les chemins de fer ont pris des mesures appréciables pour atténuer les répercussions de leurs activités sur les résidents. Ils sont allés jusqu'à transférer leurs triages et leurs activités en dehors des centres des villes et des municipalités et les ont relocalisés dans des secteurs à zonage industriel pour se rendre compte, malheureusement, quelques années plus tard, que des unités résidentielles étaient construites tout près de leurs installations, ce qui a donné lieu encore une fois à des plaintes liées notamment au bruit.
Récemment, l'ACFC a commencé à collaborer étroitement avec la Fédération canadienne des municipalités dans le cadre d'un protocole d'entente afin d'améliorer les relations entre les municipalités membres de la FCM et les chemins de fer. Le protocole d'entente s'appuiera sur les travaux déjà réalisés dans le but d'améliorer les lignes directrices en matière de planification municipale et d'élaborer de nouvelles techniques et technologies d'atténuation du bruit et des vibrations causés par les activités ferroviaires. Nous estimons qu'il s'agit là de la meilleure approche et nous croyons qu'elle fonctionne très bien.
Malheureusement, le paragraphe 95.1 ne tient pas compte de cette initiative. Selon cette disposition, l'obligation de la compagnie de chemin de fer est liée aux résidents du secteur, et non aux règlements de zonage en vigueur à l'échelle locale ou à d'autres règlements municipaux.
Enfin, aux termes du paragraphe 95.1, les chemins de fer auront constamment l'obligation de répondre aux plaintes, même lorsqu'une mauvaise planification ou d'autres causes pourront être à l'origine du problème à l'échelle locale. En outre, le fardeau financier que pourrait imposer une telle obligation pour le chemin de fer ne sera pas pris en considération.
En conclusion, je dois dire qu'à notre avis les chemins de fer tant marchandises que voyageurs doivent avoir l'assurance qu'ils pourront maintenir leurs activités actuelles de manière stable. Le secteur ferroviaire s'est largement efforcé de collaborer avec les collectivités — et je peux vous dire qu'il continuera de le faire dans l'avenir.
Si les chemins de fer marchandises, qu'ils soient de classe 1 ou d'intérêt local, sont forcés de réduire leurs heures d'exploitation, les chaînes d'approvisionnement des fabricants subiront immédiatement d'importantes conséquences négatives. Les chemins de fer ne sont tout simplement pas en mesure d'augmenter leurs volumes de trafic à certaines heures de la journée pour tenir compte des préoccupations de chaque collectivité ni de les réduire à d'autres moments.
En outre, comme vous le savez, beaucoup de voyageurs comptent sur les fournisseurs de services de transport ferroviaire pour se rendre au travail chaque jour et se déplacer d'une grande ville à une autre au pays. Restreindre les activités de transport ferroviaire de voyageurs aurait des répercussions négatives sur les déplacements des personnes en plus d'avoir des conséquences non seulement sur l'économie, mais également sur l'environnement, selon nous.
Pour terminer, je dois dire que, même si l'ACFC appuie sans réserve l'intention du projet de loi C-11, elle est convaincue que cette mesure législative n'offre pas de position d'équilibre appropriée entre des intérêts antagonistes en ce qui concerne la gestion du bruit. En conséquence, le projet de loi pourrait donc être néfaste pour le secteur ferroviaire et pour ceux qui dépendent des services de transport ferroviaire. Selon moi, l'énoncé de la version originale du projet de loi offrait un équilibre plus approprié à cet égard.
Claude Mongeau, vice-président exécutif et chef de la direction financière, Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada : Je suis ravi d'être ici ce soir. Je voudrais reprendre les propos tenus par M. Mackey, qui s'est exprimé en termes éloquents. Je voudrais aussi vous parler de l'aspect pratique et exhorter très franchement les honorables sénateurs à prendre la bonne décision, c'est-à-dire à proposer une modification à cette disposition en particulier. Nous avons présenté au comité de la Chambre des communes notre point de vue au sujet du projet de loi C-11. Nous avions de nombreuses préoccupations, mais en fin de compte, nous sommes satisfaits des principaux éléments de cette mesure.
Une seule disposition fait exception, à savoir celle qui traite du bruit. Je comprends sa raison d'être — après tout, je suis un homme pratique. Pendant de nombreuses années, il a existé un vide juridique en ce qui a trait au règlement des différends et à la médiation. Ce projet de loi redonne à l'Office des transports du Canada le rôle d'examiner les différends relatifs au bruit avec tout le sérieux dont il sait faire preuve et de rendre des décisions qui obligeront le chemin de fer visé à régler les problèmes concernant le bruit. Il s'agit là d'un changement très important, que nous appuyons.
Nous croyons toutefois que l'Office des transports du Canada ainsi que la loi devraient s'appuyer sur un cadre stratégique approprié. Je dois dire très honnêtement que l'élimination de la disposition sur le critère du bruit raisonnable pour y substituer l'obligation pour un chemin de fer de faire le moins de bruit possible fait en sorte que la norme n'est plus claire. Pour faire le moins de bruit possible, un train doit-il faire de la lévitation?
Le fait est que les activités ferroviaires causent du bruit. Les chemins de fer doivent fonctionner 24 heures sur 24. Dans certaines régions, nous menons des activités depuis longtemps et cela a des répercussions sur les collectivités à proximité. D'après mon expérience, je peux vous dire que c'est principalement au Québec et en Colombie-Britannique que les problèmes sont les plus nombreux, car ces deux provinces comptent davantage de régions urbaines et elles ne se sont dotées d'aucun système de zonage approprié.
En Ontario, la situation est tout autre. Cette province oblige quiconque demande un changement de zonage pour procéder à des travaux de construction à donner un préavis raisonnable. Cela permet à la compagnie de chemin de fer de prendre connaissance du fait qu'un ensemble résidentiel ou autre sera construit à proximité de ses installations. La compagnie peut alors exprimer son point de vue à la Commission des affaires municipales de l'Ontario. La Commission exige par exemple qu'aucun quartier résidentiel ne soit établi à moins de 300 mètres d'une cour de triage et que les maisons soient bâties avec des matériaux d'isolation acoustique. Toutes ces mesures permettent au bout du compte d'éviter bien des problèmes.
Au Québec, l'établissement d'ensembles résidentiels relève uniquement de la compétence des municipalités, et c'est pourquoi il arrive souvent que, du jour au lendemain, de nouveaux quartiers résidentiels se retrouvent juste à côté de nos installations. Les activités ferroviaires causent du bruit; c'est la réalité, et nous n'y pouvons rien.
Certaines personnes, qui se sont toujours accommodées assez bien du bruit, peuvent tout à coup ne plus être capables de le tolérer parce qu'ils vivent une période difficile dans leur vie, qui les rend plus stressées ou les empêche de dormir. Il est humain de devenir exaspéré par le bruit d'un chemin de fer qui se trouve à proximité. C'est la réalité. Exiger que les chemins de fer fassent le moins de bruit possible ne constitue pas une obligation acceptable.
La disposition, telle qu'elle était rédigée précédemment, conformément à ce qui avait été convenu avec Transports Canada, précisait que les compagnies de chemin de fer étaient tenues de ne pas faire de bruit déraisonnable. Selon le libellé actuel, la loi nous oblige à faire le moins de bruit possible.
Mais qu'est-ce que le moins possible au juste? C'est impossible à déterminer. L'Office des transports du Canada a un rôle à jouer. Le règlement d'application de la loi sera peut-être strict, mais quoi qu'il en soit, c'est le critère du bruit raisonnable qui devrait être appliqué. C'est ce qui permettra de traiter convenablement les différends avec les résidants et en même temps de protéger cette industrie essentielle pour notre économie.
C'est en tant que vice-président exécutif du CN que je vous demande de prendre la bonne décision en proposant une formulation plus raisonnable.
Le sénateur Tkachuk : Y a-t-il déjà eu une autre disposition dans un règlement ou dans une loi qui traitait du bruit?
M. Mackey : Oui, mais à la suite d'une poursuite en justice il y a un certain nombre d'années, les pouvoirs à cet égard, qui, du point de vue de la réglementation, étaient conférés à l'Office des transports du Canada ont été annulés par un tribunal, ce qui a alors créé un vide juridique. L'une des principales raisons pour lesquelles ce projet de loi doit être adopté, est la nécessité d'avoir un cadre réglementaire acceptable, de sorte qu'il existe un mécanisme de règlement des différends avec les collectivités et d'autres parties. Les pouvoirs ont été annulés par suite d'une décision rendue par un tribunal.
Le sénateur Tkachuk : En quoi consistait-elle auparavant?
Jean Patenaude, chef adjoint du contentieux, Compagnie des chemins de fer nationaux du Canda : Elle offrait un moyen détourné de traiter les différends liés au bruit. L'Office des transports du Canada, en raison des cas dont il était saisi, croyait comprendre que cette disposition lui donnait le pouvoir de régler les différends entre deux parties.
Le sénateur Tkachuk : Et il s'agissait d'une disposition d'un règlement.
M. Patenaude : Non, il s'agissait d'une disposition de la loi. C'était un peu tiré par les cheveux, mais l'Office ne cherchait qu'à assurer un équilibre entre les intérêts de chacune des deux collectivités. Le tribunal a jugé que la disposition ne permettait pas d'établir avec suffisamment de certitude que l'Office pouvait jouer un tel rôle. C'est ce qui a créé un vide juridique.
Le sénateur Tkachuk : Est-ce que la décision d'opter pour le concept de caractère raisonnable a été prise à la suite de consultations avec le ministère, votre association et d'autres entités?
M. Mackey : Oui, une vaste consultation a eu lieu. Nous y avons participé et nous avons recommandé que le critère du bruit raisonnable soit appliqué.
M. Mongeau : C'est à la suite de nombreuses consultations avec des hauts fonctionnaires de Transports Canada et d'autres personnes haut placées qu'on a abouti à la formulation qui figurait dans la première version du projet de loi.
Le sénateur Tkachuk : Je m'interroge toujours au sujet des personnes qui achètent une maison à proximité d'un chemin de fer et qui se plaignent ensuite du bruit. Je ne comprends jamais.
Lorsque nous avons tenu des audiences dans l'Ouest, de nombreuses personnes qui ont comparu devant nous se sont dites préoccupées par le bruit, notamment le maire de Delta, qui est une ville située à proximité d'un chemin de fer. Elles se plaignaient du bruit et voulaient qu'on fasse quelque chose. Peut-être que cette disposition concernant le bruit contribuera à améliorer la situation, mais ce qui m'intéresse, c'est de savoir comment on en est venu à modifier le libellé original pour le remplacer par l'expression « le moins possible »? Quelle a été la logique ou le débat qui a suscité ce changement? C'est très relatif. Le moins possible peut vouloir dire aucun bruit du tout.
M. Mackey : Nous n'avons pas participé aux discussions à ce sujet. Je peux seulement répéter ce qu'on m'a dit.
Le sénateur Tkachuk : Qu'en disent vos avocats? Vous avez affirmé que l'utilisation de cette expression ne convient pas. Quelle est l'opinion de vos avocats?
M. Mackey : Je viens tout juste de vous en faire part. Durant les délibérations du comité permanent, des députés du Bloc ont fait savoir qu'ils voulaient absolument, pour quelque raison que ce soit, une obligation stricte. D'après ce que j'ai compris, c'est ce qui a provoqué cette modification à l'étape du comité. Le gouvernement, comme vous le savez, proposait d'appliquer le critère du caractère raisonnable lorsqu'il a déposé le projet de loi.
Le sénateur Tkachuk : Est-ce que ce critère figurait dans des versions précédentes du projet de loi?
M. Patenaude : Oui, dans la première version du projet de loi C-11 qui a été déposée.
M. Mongeau : Cette mesure législative confère à l'Office des transports du Canada le pouvoir d'agir à titre de médiateur dans le cas de ce genre de différends. Nous sommes en faveur de cela. Dans la première version, le projet de loi précisait à juste titre que les compagnies de chemins de fer étaient tenues de ne pas faire de bruit déraisonnable. Pour définir ce que cela signifie, l'Office s'appuiera sur le règlement d'application. Nous sommes tout à fait d'accord. Nous avons collaboré avec Transports Canada à chaque étape de l'élaboration du projet de loi pour faire en sorte que cette disposition y figure.
Si vous me demandiez ce qui s'est passé en comité — je vais peut-être être trop honnête — je vous répondrais que lorsqu'on fonctionne en situation de gouvernement minoritaire et qu'il arrive que des municipalités portent plainte à propos du bruit, principalement au Québec et en Colombie-Britannique, quelqu'un dira que ce n'est pas suffisant et qu'il faut faire davantage. Le comité a décidé d'apporter ce changement, ce qu'il peut faire étant donné que le gouvernement est minoritaire.
C'est pourquoi nous sommes ici aujourd'hui pour vous dire que, même si le pouvoir du législateur est souverain, il faudrait parfois se demander si nous faisons le bon choix. Je suis convaincu que nous allons trop loin. Il est impossible de déterminer ce qu'est « le moins possible », et il est évident que ce choix de mots ne tient pas compte de la réalité, c'est-à-dire du fait que les activités ferroviaires causent du bruit; c'est normal. Tant qu'il y aura des gens qui vivront trop près d'un chemin de fer, il y aura des problèmes.
Si je me fie à mon expérience personnelle, je peux vous dire qu'il y a des gens qui s'accommodaient très bien du bruit, mais qui, en raison de certaines circonstances, du stress, de problèmes familiaux, de la maladie ou de quoi que ce soit d'autre, se retrouvent malheureusement à faire de l'insomnie. Quand vous êtes éveillé la nuit et que vous entendez le bruit causé par le chemin de fer, vous attribuez la source de tous vos problèmes à cela. C'est un fait. Il appartient à l'Office des transports du Canada de trouver un juste équilibre. L'obligation pour les compagnies de chemin de fer de faire le moins de bruit possible ne constitue pas le bon critère à appliquer.
Le sénateur Zimmer : Je vous remercie de comparaître devant nous aujourd'hui. Croyez-le ou non, j'ai commencé à utiliser le train pour mes déplacements entre Winnipeg et la Saskatchewan. Mon cher collègue, le sénateur Tkachuk, et moi-même sommes originaires de la même province et nous posons des questions complémentaires. J'utilise le train parce que cela ne prend pas beaucoup plus de temps que de prendre l'avion, si on considère le temps qu'il faut pour se rendre à l'aéroport et y attendre le vol.
J'ai d'ailleurs pris le train dans les deux dernières semaines, et j'ai été étonné de constater à quel point j'ai pu apprendre des choses qui me serviront pour les travaux du comité en discutant avec le personnel à propos du service de transport ferroviaire et des problèmes qui y sont rattachés. J'ai toujours aimé entendre le bruit du chemin de fer dans la petite ville où j'habitais. Ce bruit m'aidait à me rendormir le samedi matin — j'aime bien l'entendre.
Monsieur Mackey, en ce qui concerne la phrase « l'incidence possible sur les personnes qui résident en des lieux adjacents au chemin de fer », vous avez exprimé votre préoccupation, car vous estimez qu'elle fait en sorte que les chemins de fer auront constamment l'obligation de répondre aux plaintes plutôt que de l'avoir de façon ponctuelle.
Si on précisait plutôt qu'il s'agit des personnes qui résident en des lieux adjacents au chemin de fer, mais qui habitaient là avant que la compagnie de chemin de fer ne commence à mener des activités, est-ce que cela vous conviendrait?
M. Mackey : La réponse courte est oui, car dans ce contexte, nous aurions de toute façon l'obligation, si nous avions l'intention d'établir une nouvelle ligne, d'obtenir l'assentiment de la collectivité. Il n'y aurait pas de changement à cet égard.
Le mot qui me préoccupe dans cette phrase est le mot « possible ». Il est impossible de le définir, et pourtant, il est rattaché à une obligation. C'est le mot le plus important. En outre, nous voudrions que le concept d'adjacent soit défini par voie réglementaire, par un jugement et, si nécessaire, par l'Office des transports. Nous sommes d'avis qu'il est extrêmement difficile d'essayer de définir ce concept par voie législative. Ce qu'on pourrait considérer raisonnablement comme étant adjacent sera différent d'un endroit à un autre au pays, en raison des environs, de la nature des activités et de bien d'autres éléments.
Le sénateur Zimmer : Quant au bruit et aux vibrations causés par la construction et les activités ferroviaires, les représentants de Transports Canada qui ont comparu devant nous le 25 avril nous ont dit que les tribunaux et l'Office des transports devront déterminer en s'appuyant sur la jurisprudence ce qui est déraisonnable par rapport à ce qui est raisonnable. Le libellé est intéressant à quelques égards. Premièrement, dans la première version du projet de loi, on utilisait les mots « raisonnable » et « déraisonnable », mais dans la version modifiée, on dit « le moins de bruit et de vibrations possible. »
Je ne veux pas sous-estimer l'importance du libellé, mais est-ce qu'il signifie que le concept de caractère raisonnable continuera de constituer la principale considération dans le cadre de l'examen des plaintes liées au bruit et aux vibrations?
M. Mackey : C'est pourquoi, dans mon exposé, j'ai affirmé que, selon nous, l'expression « le moins possible » ne renvoie pas au concept de caractère raisonnable. Si vous passez en revue les étapes de l'élaboration du projet de loi, vous constaterez clairement que l'intention de la Chambre des communes était de modifier la définition du concept de caractère raisonnable, car c'est exactement ce qu'elle a fait.
M. Patenaude : Lorsque l'Office des transports devra se demander quelle était l'intention du Parlement lorsqu'il a fait cela, il aura le droit d'examiner les travaux des comités sur ce projet de loi. Quand il constatera que dans la première version on précisait que la compagnie de chemin de fer était tenue de ne pas faire de bruit déraisonnable et qu'ensuite il y a eu une modification, de sorte qu'il est maintenant stipulé qu'elle doit faire le moins de bruit et de vibrations possible, il devra trouver une raison à ce changement. Sinon, il conclura qu'il était inutile et que la nouvelle formulation ne signifie rien. À mon avis, il jugera qu'il s'agit d'un critère différent.
M. Mongeau : Je dirais que c'est même plus simple que cela. Il suffit de se pencher sur le sens des mots « le moins possible », qui ne veulent pas dire grand- chose.
Le mot « raisonnable » est utilisé dans de nombreuses lois et il doit être interprété en s'appuyant sur des règlements et la jurisprudence. Il s'agit d'un critère connu en droit. L'expression « le moins possible » ne permet pas d'effectuer une interprétation.
Le sénateur Zimmer : On ne peut s'appuyer sur rien.
On nous a dit qu'on allait étudier la jurisprudence durant l'examen des plaintes. Y a-t-il déjà eu des plaintes de la sorte?
M. Patenaude : Oui. Il existe une jurisprudence, qui remonte à l'époque à laquelle l'Office des transports croyait qu'il lui incombait de rendre des décisions au sujet de ce genre de plaintes, mais depuis, le critère a changé, comme nous le savons.
Je dois dire aussi que, même pendant la période où il y avait un vide juridique, l'Office offrait des services de médiation auxquels nous faisions appel lorsqu'il y avait des plaintes concernant les chemins de fer. Dans ces cas-là, les deux parties s'entendaient sur un moyen de régler le différend. Je crois que c'est le critère du caractère raisonnable qui s'appliquait.
Le sénateur Tkachuk : On m'a fait remarquer qu'il est précisé au paragraphe 95.1 que « la compagnie de chemin de fer... est tenue de faire le moins de bruit et de vibrations possible » et qu'il est aussi indiqué « compte tenu des éléments suivants » :
les obligations qui lui incombent au titre des articles 113 et 114, le cas échéant;
Sur quoi portent ces articles?
M. Patenaude : Il s'agit d'obligations en matière de niveau de services que doivent respecter les compagnies de chemin de fer. Par exemple, elles doivent fournir des installations convenables pour la réception et le chargement des marchandises à transporter par chemin de fer. Il s'agit des obligations relatives au niveau de services qui figurent dans la loi.
Le sénateur Tkachuk : Cet alinéa a-t-il des conséquences sur ces obligations?
M. Patenaude : Il est indiqué qu'il faut en tenir compte, mais il faut aussi tenir compte de l'incidence possible sur les résidants. Cet alinéa nous préoccupe un peu, car il va de soi qu'on ne sait pas quelle est cette incidence parce qu'elle n'est sans doute pas la même pour tous les résidants. Il s'agit d'une incidence possible, qui peut varier.
Le problème, c'est que l'obligation de la compagnie de chemin de fer est liée aux résidants du secteur et non aux règlements de zonage par exemple. Si vous êtes dans un secteur industriel, vous vous attendez à ce qu'il y ait certaines activités industrielles, mais dans le projet de loi, on ne tient pas compte de cela. On indique seulement qu'il faut tenir compte de l'incidence possible sur les résidants.
Le sénateur Tkachuk : On dit aussi : « les lieux de construction ou d'exploitation du chemin de fer ».
M. Patenaude : En ce qui concerne les activités dans une cour de triage, on s'attendrait à ce que la norme soit différente, mais elle est la même, c'est-à-dire faire le moins de bruit et de vibrations possible.
[Français]
Le sénateur Dawson : J'ai été député et j'ai vécu avec le problème d'avoir, à côté du pont de Québec, une gare de triage qui existait depuis 125 ans. On a construit des édifices résidentiels tout près et les gens se plaignaient du bruit. Je leur disais que lorsqu'ils avaient acheté leur condominium, le chemin de fer était là. Le même problème est survenu avec l'aéroport d'Ancienne Lorette, pourtant les gens avaient acheté leur maison alors que les avions passaient au dessus de leur toit.
Je suis un peu préoccupé par la formulation qui semble un peu différente de l'anglais au français. En anglais on indique « as little noise as possible » tandis qu'en français on indique « le moins possible ». Il me semble évident que le moins possible serait de n'avoir aucune opération en toute logique. Mon dilemme — dont j'ai fait part aux témoins des compagnies d'aviation qui vous ont précédés — c'est que cela fait sept ou huit ans que vous faites des consultations pour ce projet de loi. Vous êtes rendus au quatrième ministre depuis les débuts des consultations. Vous êtes d'accord avec le projet de loi, mais vous nous demandez une petite modification. Si nous acceptons — parce qu'on est la Chambre du second regard et qu'on prend la responsabilité de l'amender et on le retourne à la Chambre des communes — on est rendu à la fin d'une période parlementaire qui peut être aussi la fin d'une session car le gouvernement pourrait décider d'une prorogation. On l'envoi à la Chambre des communes et elle, pour des raisons du Bloc québécois ou le NPD, amène le même amendement et nous le renvoie. C'est sûr qu'on adopterait le projet de loi, mais le risque est que vous perdiez votre projet de loi. Vous êtes les premiers à dire que vous êtes d'accord avec la majorité du projet de loi sauf pour ces articles.
Préférez-vous qu'on prenne la chance de ne pas avoir de loi et qu'on revienne dans six mois ou un an avec un nouveau ministre des Transports et une nouvelle législation et lorsque que ce projet de loi arrivera à l'étape de l'étude en comité de la Chambres des communes, ils demanderont peut-être la même chose?
À un moment donné, nous pouvons décider de prendre la chance d'apporter l'amendement et de l'envoyer à l'autre Chambre. Mais, en cours de route, ils peuvent ramener le projet de loi à la formulation originale. Cela nous rend perplexe; le ministère des Transports nous a dit qu'il est prêt à vivre avec le texte tel qu'il est. Il est votre partenaire. Le ministre aurait pu décider de venir nous voir au Sénat, nous dire qu'il ne trouve pas l'amendement présenté à la Chambre des communes raisonnable — c'est le cas de le dire — et nous demander de le changer. Il est venu ici et nous a dit qu'il était capable de vivre avec le projet de loi tel qu'il était.
Vous nous mettez dans la situation où on peut prendre la chance de l'amender, car vous semblez avoir une revendication raisonnable — d'autant plus que, en français, ce doit être pire. Mais jusqu'où êtes-vous prêt à prendre le risque de ne pas avoir de loi du tout à la fin juin?
M. Mongeau : Je pense que nous ne serions pas ici si nous ne pensions pas que c'était la bonne chose à faire. J'ai fait appel à la sagesse du Sénat au tout début de ma présentation et je pense que nous venons ici avec une seule requête. Le projet de loi C-11 dans l'ensemble est une loi avec laquelle nous nous sentons à l'aise. Nous sommes convaincus que cet aspect n'est pas la bonne formulation ni la bonne politique, et nous pensons que votre sagesse au Sénat et, ultimement, le second regard à la Chambre des communes, vont faire en sorte que, lorsque vous allez lui renvoyer la loi avec l'amendement approprié, je suis confiant quant au fait que la Chambre va l'accepter. Je pense que c'est la meilleure chose à faire en la circonstance.
Le sénateur Dawson : Ma question était, étant donné échéancier et le nombre de jours parlementaires restant entre aujourd'hui et la mi-juin, compte tenu de la possibilité de prorogation, que vous êtes peut-être en train de nous dire : même si vous aimez le projet de loi, rejetez-le. Car il est possible qu'on n'ait pas le temps de le renvoyer, puis qu'il nous revienne; en d'autres termes, il va mourir au Feuilleton.
[Traduction]
M. Cliff : J'ai trois points à faire valoir.
Premièrement, je tiens à dire que nous avons l'intention, peu importe si cette loi est adoptée, de continuer à collaborer avec les collectivités relativement à ces problèmes. C'est important pour notre industrie et pour nos rapports avec la population. Nous allons continuer à respecter les mêmes normes que par le passé même s'il n'existe aucun cadre législatif à cet effet. Je considère qu'il ne s'agit pas d'un projet de loi urgent.
Deuxièmement, si nous pensions qu'il s'agit d'un problème mineur, nous ne voudrions pas intervenir; vous avez raison. De façon générale, nous croyons qu'un cadre législatif à ce sujet va dans l'intérêt de tous. Nous prenons ce dossier au sérieux et c'est pourquoi nous sommes ici aujourd'hui.
Troisièmement, quant au point que vous avez fait valoir au sujet du temps, même si nous étions prêts aujourd'hui à laisser tomber notre demande, il demeure que cette norme entraînera une multitude de problèmes dans l'avenir, qui nous obligeront plus tard à refaire la même démarche que maintenant. Malgré le fait que nous risquons de faire en sorte que le projet de loi meurt au Feuilleton encore une fois et qu'il doive être représenté, nous sommes prêts à prendre ce risque puisqu'il s'agit d'une question suffisamment importante à nos yeux et que, de toute façon, cela fait des années qu'on essaie de faire adopter cette loi.
Le sénateur Dawson : Vous n'avez pas réussi à convaincre le ministre et le ministère d'appuyer votre demande d'amendement, n'est-ce pas?
M. Cliff : Nous essayons encore. Je crois que les discussions qui ont eu lieu entre les diverses parties dans le cadre de l'examen du projet de loi à l'autre endroit ont mis le ministre dans une situation plutôt difficile.
Le sénateur Mercer : Le commentaire qu'a fait M. Mongeau tout à l'heure à propos de la situation de gouvernement minoritaire est tout à fait juste. Je crois savoir que l'amendement a été proposé par un néo-démocrate, appuyé par les députés du Bloc. Il y a des sénateurs conservateurs et libéraux autour de la table aujourd'hui. Si nous parvenons à nous mettre d'accord, d'ici à ce que le projet de loi soit renvoyé à la Chambre, nos collègues qui siègent à l'autre comité se seront entendus pour régler le problème. Ce n'est pas très logique à mon avis. Cela me fait penser aux gens qui veulent habiter plus près d'un aéroport et qui, dès qu'ils emménagent dans une maison située à proximité, ils commencent à se plaindre du bruit que font les avions. C'est ridicule.
Combien de plaintes concernant le bruit recevez-vous annuellement?
M. Mongeau : Je ne connais pas le nombre exact, mais je peux vous dire qu'il y en a davantage au Québec et en Colombie-Britannique. Les raisons sont compréhensibles. Au Québec, l'établissement d'ensembles résidentiels relève uniquement de la compétence des municipalités, et, dans cette province, on a construit de nouveaux quartiers résidentiels juste à côté de certaines de nos cours de triage. C'est ce qui donne lieu à des plaintes concernant le bruit. Dans la plupart des cas, c'est nous qui étions là en premier. Au fil du temps, on a bâti des maisons de plus en plus près des cours de triage, ce qui cause des problèmes. En Ontario, la situation est largement différente, car la Commission des affaires municipales de cette province a établi des normes simples. Par exemple, il est interdit que des résidences soient construites à moins de 300 mètres d'un chemin de fer sauf si certains critères de construction sont respectés, notamment des murs plus épais, des fenêtres fabriquées avec un matériau acoustique isolant, ou bien il faut respecter des règlements sur le bruit, qui font en sorte que les gens comprennent ce qu'implique le zonage résidentiel à proximité d'une cours de triage. Si ce genre de règles n'existent pas, comme c'est le cas en Colombie-Britannique et au Québec, là où nous avons davantage de plaintes, les problèmes persistent.
Le sénateur Mercer : Lorsque nous étions en Colombie-Britannique dans le cadre d'une autre étude, nous avons entendu beaucoup de plaintes à propos du service de transport ferroviaire jusqu'aux ports à conteneurs et à partir de ces endroits. De leur côté, les municipalités se plaignaient du fait qu'on prévoyait accroître ce service. Je comprends votre frustration.
Vous avez mentionné qu'il existe des règles en Ontario. Auriez-vous des conseils à donner au gouvernement fédéral? Y a-t-il des règles mises en application en Ontario qui selon vous devraient constituer des dispositions du présent projet de loi ou d'une autre mesure législative? Je sais que nous allons entrer dans le sujet des relations fédérales-provinciales- municipales.
M. Mongeau : Même si aucune loi ne nous y oblige, nous veillons à établir des normes communes avec les municipalités. Mon collègue travaille là-dessus quotidiennement.
M. Cliff : Nous entretenons des rapports avec la Fédération canadienne des municipalités. Nous collaborons avec elle principalement pour établir de meilleures normes en matière de planification et de meilleures procédures.
Pour revenir au point qu'a fait valoir le sénateur Dawson, je dois dire que j'hésiterais à proposer cela car il faudrait modifier la structure actuelle de la législation. Il faut tenir compte du fait qu'il y a d'autres lois. Par exemple, je suis certain que vous connaissez bien la Loi sur l'aéronautique, qui confère certains pouvoirs au ministre fédéral en ce qui concerne l'utilisation des terrains à proximité des aéroports. Ils ont cependant rarement été exercés.
Le sénateur Mercer : Nous n'avons pas parlé des coûts potentiels que pourrait entraîner le fait de remplacer les mots « le moins de bruit et de vibrations possible » par « du bruit déraisonnable ». Un jour, on inventera un train plus silencieux, et des gens de Vancouver ou de Montréal qui habitent à proximité d'un chemin de fer voudront que les trains actuels soient remplacés par ces nouveaux trains. Quelqu'un conclura que c'est une bonne idée.
Quels seraient dans ce cas-là les coûts pour les compagnies de chemin de fer et, au bout du compte, pour les clients?
M. Mongeau : En tant que chef de la direction financière, je peux vous dire que le coût de déplacement d'une cours de triage située dans un centre urbain peut varier largement; il peut être de 25 millions de dollars comme il peut s'élever à 200 millions de dollars. Lorsqu'il y a des différends avec les résidants qui vivent à proximité d'une cours de triage, les coûts sont considérables.
Ce qui nous inquiète le plus, ce sont les répercussions sur les heures d'exploitation. Quand on dit « le moins possible », il devient facile d'interdire à une compagnie de mener ses activités entre 21 heures et 7 heures. Cela peut paraître raisonnable, mais dans la réalité, les chemins de fer doivent fonctionner 24 heures sur 24 pour pouvoir parcourir une distance de 15 000 miles. Lorsqu'il est 19 heures à Halifax, il est quelques heures plus tôt ailleurs au pays, et il faut penser que nos trains se déplacent d'un bout à l'autre du Canada. Si nous arrêtons nos trains entre 21 heures et 7 heures à différents endroits en cours de route, il y aura des embouteillages. Nous pourrons moins bien servir nos clients et les coûts de fonctionnement seront plus élevés. C'est donc dire que ce n'est pas la bonne solution. Le mieux serait d'appliquer un critère plus raisonnable et d'adopter une loi plus acceptable.
M. Mackey : En ce moment, nous bénéficions d'un avantage concurrentiel grâce au réseau ferroviaire efficace que nous sommes en train de développer dans l'Ouest. Si on nous imposait ce genre de restrictions, nous perdrions cet avantage concurrentiel du jour au lendemain, et je peux vous garantir que le service serait désormais assuré par Long Beach, Portland, Seattle ou une autre ville, et cela occasionnerait la perte d'un très grand nombre d'emplois.
Le sénateur Mercer : Certains feront valoir que Long Beach ne peut pas assumer une hausse du trafic.
M. Mackey : Ils sauront s'adapter.
Le sénateur Merchant : Vous avez exprimé vos préoccupations très clairement. Je vous comprends tout à fait.
Je voulais vous poser des questions au sujet des répercussions financières, mais je crois que vous y avez répondu en répondant au sénateur Mercer. Vous avez aussi parlé de l'incidence sur l'environnement. Pouvez-vous nous en dire un peu plus long à ce sujet?
M. Mackey : Je vais vous faire part de quelques données pour mettre les choses en perspective. Les compagnies de chemin de fer au Canada transportent 65 p. 100 des marchandises acheminées par voie de surface au pays. S'agissant des émissions de gaz à effet de serre, nous produisons 3 p. 100 de la quantité totale émise par le secteur du transport au Canada. Le transport ferroviaire est très avantageux du point de vue de l'environnement.
Si, par l'entremise de cette mesure législative, vous imposez des restrictions aux compagnies de chemin de fer, qui auront pour effet de réduire notre productivité et notre capacité d'offrir des services à nos clients, il y aura inévitablement un plus grand recours aux autres moyens de transport, et cela aura sans aucun doute d'importantes répercussions sur l'environnement.
Le sénateur Zimmer : Monsieur Mongeau, j'ai deux questions à vous poser. La première concerne les fusions et les acquisitions et la deuxième, la police des chemins de fer.
Lorsque des représentants de l'Association du Barreau canadien ont comparu devant notre comité le 1er mai, ils ont exprimé plusieurs préoccupations à propos des dispositions du projet de loi qui concernent les fusions et les acquisitions. Entre autres, ils ont fait remarquer que le fait d'accorder au ministre une période de 42 jours pour déterminer la nécessité de procéder à un examen de l'intérêt public pourrait avoir pour effet de faire échouer la transaction. Pourriez-vous nous donner votre point de vue au sujet de cette disposition et de tout autre élément du projet de loi qui touche les fusions et les acquisitions?
M. Mongeau : Cette mesure législative ne vise pas uniquement le secteur du transport ferroviaire, et je comprends donc cette préoccupation. Dans le domaine des chemins de fer, le processus d'approbation d'une fusion ou d'une acquisition qui est suivi aux États-Unis, par exemple, est très long. La législation canadienne ne prévoit aucun processus de la sorte. Effectuer un examen de l'intérêt public dans le cas des transactions visant les compagnies de chemin de fer ne constitue pas un fardeau excessif à nos yeux puisqu'un processus semblable existe déjà aux États-Unis.
Dans d'autres secteurs de l'industrie du transport, où il y a davantage de transactions, c'est peut-être différent. Le problème que vous avez soulevé peut nuire aux intérêts commerciaux.
Le sénateur Zimmer : Quant à la police des chemins de fer, dites-nous ce que vous faites en ce qui concerne le changement à cet égard. Vous a-t-on informé de modifications qui pourraient survenir étant donné que certaines dispositions législatives concernant la police des chemins de fer qui figurent dans la Loi sur les transports au Canada seront transférées dans la Loi sur la sécurité ferroviaire?
M. Mackey : D'après les résultats des travaux menés par notre comité de la sécurité, auxquels j'ai participé, je peux vous dire qu'il n'y a aucune préoccupation à l'égard de ce changement.
M. Patenaude : Je peux vous le confirmer; cela ne nous pose aucun problème.
[Français]
La présidente : Messieurs, merci infiniment d'avoir été parmi nous ce soir. Nous allons continuer à faire notre travail le plus sérieusement possible et nous espérons en arriver à un consensus autour de cette table.
M. Mongeau : Nous aimons votre expression « le plus sérieusement possible ».
[Traduction]
La présidente : Je remercie beaucoup les témoins et les sénateurs.
La séance est levée.