Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Transports et des communications
Fascicule 15 - Témoignages du 5 juin 2007
OTTAWA, le mardi 5 juin 2007
Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunit aujourd'hui à 9 h 35 pour étudier, en vue d'en faire rapport, le trafic de frets conteneurisés actuels et éventuels manutentionnés par les ports à conteneurs de la porte d'entrée du Pacifique, les ports à conteneurs de la côte est et les ports à conteneurs du centre du Canada, sur les principaux marchés importateurs et exportateurs desservis par ces ports et les politiques actuelles et futures à cet égard.
Le sénateur Lise Bacon (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente : Honorables sénateurs, ce matin, nous allons poursuivre notre étude du fret conteneurisé. Nous sommes heureux d'accueillir M. John Best, directeur général du Southern Ontario Gateway Council, qui sera notre témoin. Merci d'avoir accepté notre invitation, monsieur Best. Nous sommes heureux de vous avoir parmi nous ce matin. Nous allons d'abord vous écouter, puis les sénateurs vous poseront des questions.
John Best, directeur général, Southern Ontario Gateway Council : Merci. C'est un plaisir pour moi de me trouver ici aujourd'hui pour vous parler de la politique des transports au Canada.
J'ai pensé vous donner d'abord un bref aperçu de ce qu'est le Southern Ontario Gateway Council, puis faire un tour d'horizon rapide du contexte actuel où s'inscrivent les transports, de notre point de vue, en Ontario. Par la suite, je serai heureux de répondre à toutes vos questions.
Le Southern Ontario Gateway Council est modelé sur le Greater Vancouver Gateway Council. Or, nous savons tous que le conseil de Vancouver a été un succès foudroyant. Il existe maintenant depuis plus d'une dizaine d'années. Nous croyons que le Vancouver Gateway Council y a été pour beaucoup dans le travail d'élaboration et de consultation à propos de ce qui allait devenir la stratégie Asie-Pacifique. Le succès du conseil nous impressionne. Il y a un autre « conseil de porte d'entrée », comme vous savez, à Halifax. Celui-là nous a devancés d'un an. La naissance de notre conseil à nous remonte à décembre 2006; nous sommes donc nouveaux.
Nous ne nous intéressons pas qu'aux investissements de l'État. Nous savons qu'il y aura aussi des investissements notables du côté du secteur privé, mais il vaut la peine de noter que le plus récent budget prévoit une affectation de près de un milliard de dollars pour l'Asie-Pacifique et quelque chose comme 500 millions de dollars pour le poste frontalier de Windsor, quelle que puisse en être la forme finale. Il y a également deux milliards de dollars qui sont affectés de manière plus générale à l'Ontario et à la région de l'Atlantique.
Voilà ce que nous voulons faire valoir aujourd'hui : nous souhaitons vraiment faire partie du processus en question. Tandis que les autorités provinciales et fédérales s'appliquent à choisir les investissements et les projets qui conviennent, au Southern Ontario Gateway Council, nous tenons vraiment à faire partie de ce processus.
Pour vous donner une idée de notre organisme, disons que la plupart des grandes entreprises de transport au Canada, surtout celles qui touchent au fret, y sont des membres votants. Il y a les chemins de fer de catégorie 1 aussi bien que l'association des chemins de fer. Il y a les administrations aéroportuaires de Toronto et de Hamilton. Il y a les ports de Toronto et de Hamilton. L'Ontario Trucking Association, la société Purolator, l'Association des chemins de fer du Canada et la Corporation de gestion de la Voie maritime du Saint-Laurent en sont également membres votants, tout comme une poignée d'entreprises de camionnage du secteur privé. Vous voyez donc que tous les modes de transport sont représentés au sein de notre conseil.
Puis, il y a les membres-ressources qui représentent les associations de l'industrie, par exemple l'Association des fabricants de pièces d'automobile du Canada et l'Association canadienne du transport urbain, ainsi que les administrations municipales qui se trouvent dans nos régions. Chacune des municipalités de notre zone est membre du conseil, aux côtés des chambres de commerce et services de développement économique qui leur sont rattachés.
Notre mission consiste à mettre sur pied un système de transport intégré marqué au coin de l'excellence en vue de favoriser la prospérité du sud de l'Ontario. Nous travaillons à composer avec la croissance effarante et l'augmentation de l'activité économique qui surviendront au cours des 20 prochaines années dans le Sud de l'Ontario. Nous devons nous assurer que le réseau de transport suit le rythme, sinon, il n'y aura pas croissance.
Nous sommes prêts à collaborer étroitement avec les autorités fédérales et provinciales ainsi qu'avec des intervenants du secteur privé — en jouant, nous l'espérons, le rôle de catalyseur, dans la mesure du possible. Nous avons à l'esprit deux types d'investissement et d'infrastructure. Il y a évidemment l'infrastructure matérielle, que nous avons négligée sous de nombreux aspects au fil des ans. Il y a aussi l'infrastructure immatérielle, c'est-à-dire les politiques, qu'il nous paraît nécessaire de mettre en place. Nous sommes heureux de constater que le gouvernement s'attache actuellement à cette question.
J'arrive d'une conférence internationale sur les villes-portes, tenue à Vancouver. Des gens venus de toutes les régions du monde y ont présenté 21 exposés. On peut se demander pourquoi l'idée d'une « porte d'entrée » a subitement la cote et que tout un chacun s'attache aux villes-portes et aux corridors.
Ce sont de grands concentrateurs d'emplois, d'où notre intérêt. Ce sont des projets qui exigent énormément de capitaux. Ce qu'il y a de bien avec l'idée d'une porte d'entrée, c'est que cela favorise l'intermodalité. Or, c'est important si nous voulons que le réseau soit plus efficace.
Durant les 50 prochaines années, nous ne réussirons jamais à construire suffisamment de routes pour que puisse se réaliser toute la croissance prévue. De toute évidence, il faut qu'il y ait une réorientation des modes de transport, et je crois que tout le monde comprend la situation.
Ce qu'un conseil de porte d'entrée a de bon, c'est qu'il permet de battre en brèche la mentalité de fragmentation qui touche les transports. Dans le cas du Sud de l'Ontario, nous commençons à envisager un réseau, par opposition à un ramassis de municipalités qui se querellent à propos du budget d'infrastructure. Cette époque-là est révolue.
L'important est de promouvoir l'efficacité du réseau de transport dans son ensemble. Ce n'est pas vraiment une question de responsabilité fédérale, mais c'est une question importante : cela force les autorités à planifier l'aménagement des terres à long terme. Les gares de triage intermodales et les grandes installations de traitement du fret occupent beaucoup de terrain. Il faut de grands terrains pour cela. C'est bruyant et c'est laid, mais c'est absolument essentiel, sinon nous n'allons pas parvenir à étendre le réseau de transport pour permettre la croissance prévue.
Je vais vous donner quelques statistiques sur l'Ontario. La région du Sud de l'Ontario, que nous assimilons au Grand Toronto jusqu'à Peterborough, à l'est, et jusqu'à Waterloo, Brant et Niagara, à l'ouest, se situe au 12e rang des régions d'Amérique du Nord pour la taille. C'est le principal carrefour économique du Canada. La région compte pour 68 p. 100 du PIB de l'Ontario et environ 27 p. 100 du PIB du Canada. C'est une région importante.
L'autre fait qui me paraît important — vous avez peut-être déjà une donnée à ce sujet devant les yeux —, c'est la mesure dans laquelle le Canada compte sur le commerce international : pour le commerce avec divers pays du monde, le Canada vient au deuxième rang. Seule l'Allemagne le devance, et ce n'est que légèrement. Nous dépendons du commerce international pour près de 38 p. 100 de notre PIB.
Si on regarde le cas des États-Unis, on constate que seulement 10,2 p. 100 du PIB américain se rapportent au commerce international. Cela donne une idée de notre vulnérabilité relative, si vous voulez, par rapport aux autres pays. Le Japon est considéré comme un acteur d'importance sur la scène du commerce mondial, mais cela ne compte que pour 12,5 p. 100 de son PIB. Le Japon compte des centres urbains très fortement peuplés qui lui permet d'écouler sur son territoire même une bonne part de sa production.
Quatre-vingt-quatre pour cent des produits américains importés en Ontario passent par le Sud de l'Ontario, pour l'essentiel à Windsor et à Sarnia, et aussi, dans une moindre mesure, à Niagara. Quatre-vingt quatorze pour cent de ce que nous expédions aux États-Unis retrouvent le chemin des mêmes ponts et tunnels, mais en sens inverse.
Nous avons créé notre organisme parce que le réseau des transports dans le Sud de l'Ontario fait face à de lourdes pressions attribuables, en partie, à l'investissement déficient qui a marqué les 20 dernières années. Nous n'avons pas à nous attarder à ce fait; c'est une réalité pour tous les ordres de gouvernement. Aujourd'hui, les exigences imposées au réseau ont commencé à s'accroître assez rapidement. Le moment est venu d'être proactif et d'adopter des techniques de gestion et des mesures qui nous permettent de nous assurer de jeter les bons fondements, de manière à ce que se réalise la croissance prévue.
En parlant de croissance, dans notre région particulière, l'accroissement de la population devrait se chiffrer à trois millions d'ici 2020. Nous devons faire de la place à trois millions de personnes. Nous envisageons un accroissement de l'activité économique qui se situe entre 40 et 60 p. 100. D'une manière ou d'une autre, nous devons trouver les activités voulues pour transporter toutes ces marchandises et toutes ces personnes. Ce ne sera pas une mince tâche.
Je sais que vous vous attachez à la question particulière des conteneurs, et j'ai moi-même quelques idées à ce sujet. Si on regarde les grands ports d'Amérique du Nord, on constate que le plus grand est, bien entendu, celui de Los Angeles- Long Beach, puis vient au deuxième rang le port de New York-New Jersey, quoique ce dernier paraisse minuscule par comparaison. Les marchandises manutentionnées au port de Los Angeles-Long Beach représentent en ce moment l'équivalent de 13 millions d'EVP. Ce nombre va quadrupler d'ici 2020.
Le port de New York prend en charge un peu plus de 4 millions d'EVP en ce moment. Cela va tripler d'ici 2020. On peut voir que les augmentations ressemblent à cela tout le long des deux côtes américaines. Nous pouvons prévoir des augmentations et des exigences semblables dans le cas du réseau canadien, surtout dans la région du Pacifique.
Le trafic des marchandises dans le Pacifique est à ce point congestionné qu'il est devenu plus rentable pour certains expéditeurs de faire transiter les cargos par le canal de Panama et le canal de Suez. Nous commençons à avoir des cargos asiatiques qui accostent dans les ports de l'est. Je suis sûr que d'autres personnes vous ont expliqué la situation. Selon toutes les prévisions, la tendance va se maintenir. Ils ont les énormes navires Panamax, mais le problème, c'est que ces navires ne peuvent accoster qu'à un très faible nombre de ports.
Tout cela laisse entrevoir une congestion monstre dans les ports côtiers en question et, de ce fait, la nécessité de trouver une façon nouvelle d'assurer le transport et le triage des conteneurs.
Le concept de ports intérieurs fait l'objet d'une certaine exploration aux États-Unis : les conteneurs y sont simplement pris du quai le plus rapidement possible, là où il y a congestion, et expédiés vers l'intérieur des terres, où il y a plus de place et de temps pour procéder au tri et réacheminer les marchandises vers leur destination finale. Il est question de ports intérieurs dans des endroits comme le Kansas, là où il n'y a pas d'eau. Les marchandises arriveront par train ou par camion, surtout par train.
L'administration américaine responsable des transports étudie les voies d'eau intérieures pour voir s'il serait possible d'y accroître le transport des conteneurs. C'est une décision qui pourrait être à l'origine d'occasions à saisir dans le Sud de l'Ontario. Cela ne fait aucun doute, Halifax est bien placé pour prendre en charge une augmentation importante du trafic de conteneurs. À un moment donné, le port de Halifax devra lui aussi délester les installations côtières relativement limitées d'une part des marchandises. C'est à ce moment-là que le nombre de conteneurs augmentera dans la Voie maritime du Saint-Laurent. Jusqu'à maintenant, cela ne se justifiait pas.
De même, les marchandises qui se trouvent dans les conteneurs gagnent en variété. Jadis, les conteneurs renfermaient des produits finis. Maintenant, on y trouve toutes sortes de minerais et de biens en vrac.
Nous croyons qu'il y a l'occasion de construire un grand centre de logistique et de triage dans le Sud de l'Ontario. Nous ne sommes pas parfaitement sûrs de l'endroit à choisir; cependant, je crois que l'avenir se dessine de cette façon et qu'il y aura bien ce genre d'installations en Amérique du Nord. C'est un phénomène propre à l'Amérique du Nord. La question est de savoir quelle part de l'activité en question se déroulera au Canada, et quelle part, aux États-Unis.
J'ai parlé à un conseiller en développement économique dont le bureau se trouve en Californie, à cheval sur la frontière avec le Mexique. Récemment, il a découvert le Canada et la Voie maritime du Saint-Laurent; maintenant, il fait valoir dans toute l'Amérique du Nord le potentiel énorme de cette voie maritime de 1 200 milles. Bien entendu, nous avons aussi une excellente infrastructure ferroviaire qui nous relie à la côte est.
Il y a là beaucoup d'activité. Tout le monde se concentre sur le trafic de conteneurs. À un moment donné, lorsque la question de la rentabilité sera étalée au grand jour, on investira dans la logistique. L'économie manufacturière du Sud de l'Ontario est encore centrée sur l'industrie de l'automobile, mais nous constatons que Detroit est quelque peu délaissé comme centre manufacturier au profit, de plus en plus, du Sud des États-Unis. Nous ne savons pas très bien quel sera l'effet sur nos usines d'assemblage de véhicules automobiles, mais, de manière générale, les observateurs sont d'avis que l'activité va diminuer, quoique l'industrie des pièces d'automobile suscite davantage d'optimisme dans le sud de l'Ontario. De fait, elle emploie bien plus de gens que les usines d'assemblage. L'impression, c'est que nous demeurons concurrentiels dans ce domaine et que nous le demeurerons encore à l'avenir.
Voilà bien des divagations autour de l'activité à venir dans la partie est de l'Amérique du Nord en ce qui concerne le trafic de conteneurs. Nous sommes d'avis qu'il y aura une grande occasion à saisir. Dans le secteur privé comme dans le secteur gouvernemental, il s'agira de savoir si nous tirons parti de ce qui nous paraît être une occasion assez importante.
La présidente : Nous savons déjà que le modèle de l'Ontario Gateway Council a servi à améliorer la planification des transports au Canada. C'est une tribune où les principaux intervenants peuvent collaborer à l'établissement des défis à relever et des solutions à mettre en œuvre.
Le Vancouver Gateway Council a réussi à établir un consensus parmi les intervenants de la Région de Vancouver, au cours des dix dernières années. À Halifax, le projet Atlantic Gateway fait l'objet d'efforts considérables. De même, le consensus local est solide en Nouvelle-Écosse.
J'aimerais savoir ce que vous pensez de la relation entre le Southern Ontario Gateway Council et le gouvernement fédéral, surtout entre la porte d'entrée et Transports Canada. Quelle influence avez-vous sur la mise au point du cadre stratégique national qui se prépare en ce moment?
Étant donné l'accent qui a été mis sur la porte d'entrée de l'Asie-Pacifique ces dernières années, croyez-vous que le gouvernement fédéral et d'autres gouvernements sont sensibles aux besoins du centre du Canada?
M. Best : Je crois que oui. Quant à savoir si notre gouvernement est ouvert à ce sujet, nous avons l'impression qu'il y a un intérêt renouvelé pour l'infrastructure des transports. Transports Canada siège à titre consultatif à notre organisme. Ses responsables assistent à nos réunions et y prennent une part active. Ils y sont depuis la création de notre organisme; ils appuient très vivement le concept. Ils nous ont donné de bons conseils quant à la position à prendre pour mieux traiter avec les administrations supérieures.
Je dirais que Transports Canada a joué un rôle extrêmement positif au sein du conseil de porte d'entrée. C'est un ancien ministre du Sud de l'Ontario qui a eu l'idée de mettre sur pied le Southern Ontario Gateway Council. Il a eu l'idée en observant ce qui se passe à Vancouver et, récemment, à Halifax. Comme il est ministre originaire du Sud de l'Ontario, il a cru que le projet avait une grande valeur et qu'il était probablement assez urgent d'établir un conseil de porte d'entrée.
Il existe des différences à relever. À Vancouver et à Halifax, il s'agit de portes d'entrée portuaires, pour ainsi dire. Autrement dit, le travail essentiel consiste à décharger les conteneurs qui arrivent par bateau et à les acheminer vers les destinations diverses au Canada. Dans notre cas à nous, s'il s'agit d'une porte d'entrée, c'est qu'il y a une si grande part du commerce canado-américain qui passe par notre région. Cependant, nous sommes aussi une destination dans le sens où il y a ici un marché de sept millions de personnes. Il n'y a pas que le trafic import-export. Bon nombre des produits qui sont fabriqués chez nous sont consommés chez nous. Les problèmes de transport sont un peu plus complexes.
En outre, c'est l'axe est-ouest qui prévaut dans le cas de Halifax et de Vancouver. Nous, nous avons deux axes : est- ouest, nord-sud. Dans notre région du Canada, le commerce nord-sud avec les États-Unis est aussi important que le commerce est-ouest. Ce ne sont pas des conteneurs, ce n'est pas un trafic maritime, mais il y a le transport par train et par camion, les deux grands modes. Nous avons des actifs maritimes dans le sens où nous nous trouvons au cœur même de la voie maritime. Nous travaillons à bien exploiter cet actif, qui est maintenant utilisé à environ 50 p. 100 de sa capacité; le nombre de navires qui s'y trouvent pourrait être deux fois plus grand.
Y aurait-il une façon, par exemple, de détourner le trafic des conteneurs au profit de la voie maritime? Cela renvoie à une décision qui appartient aux transporteurs, mais y a-t-il une façon de rendre l'option plus attrayante? Y a-t-il des conséquences à envisager du point de vue de la politique gouvernementale, par exemple pour le péage? Faut-il moderniser la voie maritime? Celle-ci a 60 ans et elle comporte peut-être des éléments d'infrastructure qui, s'ils étaient rénovés, en feraient une voie navigable plus concurrentielle, efficace et donc plus attrayant aux yeux des transporteurs.
La présidente : Le comité a eu droit à différents points de vue sur la relation qui existe entre les chemins de fer et les exploitants de terminaux. À Montréal, la relation semble être très bonne. Cependant, à Vancouver, on nous a dit que les sociétés ferroviaires ne fournissaient pas ni à temps ni en nombres suffisants des wagons aux expéditeurs et aux terminaux.
Les expéditeurs et les exploitants terminaux sont-ils satisfaits du niveau de service fourni par le Southern Ontario Gateway, du point de vue de l'efficience?
M. Best : Encore une fois, ce n'est pas une dynamique qui privilégie tant le transport par voie ferrée, mais, évidemment, il y a des chemins de fer et aussi un grand nombre de chemins de fer sur courte distance qui offrent leurs services dans la région.
Je ne crois pas que la disponibilité des voitures pose de graves difficultés chez nous, en partie du fait que, là où il n'y a pas de voiture de train, il y a toujours un camion. Il y a une dynamique qui fait que si vous n'êtes pas compétitif sur le marché, il y a toujours une autre façon de faire transporter les marchandises. Je ne crois pas que nous ayons vu ce problème chez nous.
Cela ne fait aucun doute : il y a eu une saine concurrence entre le secteur ferroviaire et le secteur du camionnage. Les deux se souciaient d'avoir une bonne part du marché et ils appréhendent les modifications des politiques qui pourraient favoriser l'autre. Cependant, au sein de notre organisme, ils ont su mettre de côté leurs divergences, et nous avons réussi à travailler ensemble de manière efficace. À mon avis, la capacité ferroviaire ne pose pas chez nous le problème qu'il pose certainement dans l'ouest du Canada.
La présidente : Il existe maintenant des services de transport sur courte distance dans la Voie maritime du Saint- Laurent et dans d'autres voies navigables canadiennes, mais pas encore pour les conteneurs. Dans le cas de la Voie maritime du Saint-Laurent, le transport sur courte distance ne serait possible que pendant neuf mois d'une année. Le service ferroviaire est offert douze mois par année.
Le transport sur courte distance dans la Voie maritime du Saint-Laurent peut-il vraiment concurrencer le transport ferroviaire et le transport par camion dans un proche avenir, et comment y arriver? Croyez-vous que le transport sur courte distance peut tenir une place importante dans le trafic des conteneurs? Le cas échéant, quelles politiques faudrait-il adopter pour assurer la viabilité du transport maritime sur courte distance?
M. Best : Je ne crois pas que nous ayons encore formulé de demandes ou de positions là-dessus. Nos membres maritimes sont bien d'avis que le transport sur courte distance sur les voies navigables peut tenir un rôle beaucoup plus important dans le cas de la Voie maritime du Saint-Laurent, jusque dans le Sud de l'Ontario.
Quant à la fermeture de la voie maritime l'hiver, on croit qu'il serait possible de ramener cela à un mois peut-être. La fermeture de la voie maritime tient non pas tant au temps qu'il fait, mais à la nécessité de procéder à d'intenses travaux d'entretien. Les glaces ne constituent pas un problème insurmontable. Pour que la voie maritime soit praticable douze mois par année, il faudrait dédoubler le canal Welland à certains endroits. Cela représente un investissement énorme, qu'il faudrait parvenir à justifier.
Nous regardons la croissance économique et le transport maritime qui sont envisagés au cours des 15 prochaines années et, clairement, nous voyons que le réseau routier ne peut être élargi au point de tout prendre cela en charge.
Le secteur ferroviaire a une certaine capacité à mettre en œuvre à cet égard, mais, d'après le consensus général — et c'est certainement ce que j'ai entendu à la conférence internationale sur les portes d'entrée à laquelle j'ai assisté à Vancouver au début du mois dernier —, le transport des conteneurs par voie d'eau jusqu'au cœur du territoire de l'Amérique du Nord a un avenir.
Il y aura des types de produits où le procédé ne sera peut-être pas utile. S'il est question de livraison juste à temps et de concepts du genre, comment un transport qui prend 30 jours ou deux semaines peut-il concurrencer un transport qui se fait sur 500 milles en huit heures? Si l'approvisionnement est constant, tant et aussi longtemps que le contenant arrive au quai de livraison tous les mardis matin à 9 h, personne ne se soucie de savoir combien de temps il a fallu pour y arriver. On peut faire valoir que le transport de certaines marchandises pourrait être rendu plus efficient. Puis, il y a toute la question qui consiste à savoir s'il est plus abordable d'organiser le transport par voie d'eau et, évidemment, c'est attrayant aussi du point de vue environnemental.
Le sénateur Tkachuk : Vous avez dit que deux milliards de dollars sont affectés à l'Ontario et aux Maritimes, et que le conseil souhaitait se brancher sur le processus. Qu'entendez-vous par-là? Le conseil a-t-il à l'esprit une démarche administrative ou consultative particulière qui vous paraît possible, à vous et au conseil?
M. Best : Il y a une démarche qui est déjà en cours. Transports Canada ainsi que la Province de l'Ontario et la Province du Québec ont mis sur pied un comité de SMA dont les membres se réunissent et étudient la politique des portes d'entrée de manière générale. Maintenant que les fonds sont répartis, évidemment, ils cherchent le meilleur endroit où investir.
Nos homologues du gouvernement de l'Ontario nous ont invités à faire partie du processus. Nous n'avons pas encore déterminé officiellement s'il s'agit de siéger au groupe dont il est question ou d'autres choses. Nous n'avons pas à nous soucier tant de l'aspect précis du mécanisme; plutôt, nous voulons contribuer à la décision prise. Nous voyons des investissements importants qui arrivent dans le domaine des transports à la suite d'une vingtaine d'années où ils ont fait défaut. Nous voulons nous assurer que cela se fait convenablement et veiller à ce que toute décision prise tienne compte de l'efficacité et du long terme.
J'ai un ami ontarien qui parle parfois de l'école budgétaire du Père Noël pour les infrastructures... Dans le dossier dont il est question ici, il faut se préoccuper d'autres choses que les belles annonces et procéder avec soin. Nous savons que, même si les transports ont quelque peu la cote en ce moment et qu'il y a eu des ressources allouées, la situation pourrait changer, comme cela a été le cas dans le passé. Nous souhaitons nous assurer que les ressources en question sont utilisées le plus efficacement possible.
Le sénateur Tkachuk : En tant que pays commerçant, le Canada a-t-il une politique nationale des transports?
M. Best : Je ne saurais répondre à la question.
Le sénateur Tkachuk : Voilà qui m'en dit beaucoup.
M. Best : Je suis sûr qu'il existe des éléments d'une politique à divers niveaux, mais si nous avions une politique, nous envisagerions notamment d'harmoniser les douanes autant que possible. La façon dont nous faisons passer les marchandises par la frontière revêt une importance capitale. En ce moment, Nous sommes dans une situation où le dollar canadien est presque à égalité avec le dollar américain. La faiblesse du dollar était un des avantages énormes que nous avions à titre de pays manufacturier. Il y a déjà de la grogne à ce sujet : on dit que le secteur manufacturier commencera à ressentir que cet avantage se perd. Nous avons encore certains avantages, dont le moindre n'est pas notre réseau de la santé.
De toute évidence, c'est un avantage qui diminue, et il faut ajouter que nous nous approchons peut-être de la parité et que les embouteillages aux frontières posent un problème aussi bien que le manque de fluidité à la frontière. Les pièces d'automobile passent à la frontière, dans un sens comme dans l'autre. Les voitures fabriquées à Toronto sont expédiées au Michigan, puis distribuées dans toute l'Amérique du Nord. D'après l'usage actuel en fabrication d'automobiles, chaque usine produit maintenant l'offre mondiale du modèle dont elle a la charge. Que ce soit une minifourgonnette ou autre chose, toutes les unités sont fabriquées dans une usine particulière, quelque part en Amérique du Nord, puis envoyées partout dans le monde.
Il importe que la circulation transfrontalière ne pose pas de problèmes; qu'elle soit le plus fluide possible. Ce n'est pas facile, étant donné le climat politique que nous vivons, notamment à la suite des attaques du 11 septembre. Il y a les moyens de détection électronique et autres procédés techniques qui permettent de préserver la sécurité tout en permettant que les marchandises soient transportées sans délai.
Dans le centre du Canada, le transport maritime sur courte distance supposerait vraisemblablement le recours à des traversiers lacustres. Nous ne parlons pas des traversiers pour passagers qui n'ont pas fonctionné, mais plutôt de traversiers qui contiennent soit des conteneurs, soit des remorques routières. Or, il existe une option nettement plus viable qu'il serait possible de justifier très rapidement d'un point de vue commercial. Je ne suis pas spécialiste de la politique des douanes, mais je sais que certains postes frontaliers bénéficient d'un droit acquis en ce qui concerne le recouvrement des coûts. Si vous mettez sur pied un nouveau poste frontalier — disons, un traversier entre Erie, en Pennsylvanie, et Nanticoke, en Ontario —, le plus souvent, Douanes Canada exige le recouvrement intégral des coûts liés à l'aménagement et la dotation en personnel des centres d'inspection, alors que ce n'est pas l'intégralité qui a à être recouvrée aux vieux postes frontaliers. Cela peut faire obstacle à un projet, surtout à l'étape de la mise sur pied d'une nouvelle voie de commerce. Vous allez peut-être vouloir vous pencher sur cette question.
Le sénateur Tkachuk : Vous parliez plus tôt du port de Los Angeles-Long Beach et du fait que les ports dont vous avez parlé commencent à souffrir de congestion. Vous dites que les expéditeurs cherchent une autre voie de commerce et qu'ils reviennent par le canal de Suez et vont directement à New York et à New Jersey. Pourquoi le port de Vancouver et, pour l'avenir, le port de Prince Rupert ne sont-ils pas des solutions de rechange au port de Los Angeles- Long Beach, et qu'est-ce que nous pouvons faire pour nous assurer que les ports canadiens en question deviennent une option à cet égard?
M. Best : Ce sont des options envisagées. Le cas de Vancouver, et je ne saurais en parler avec beaucoup de précisions techniques, est très simple : il fonctionne déjà à plein régime. Ce qui explique l'établissement du port de Prince Rupert. J'ai parlé à des gens à Prince Rupert, et ils s'attendent que le port soit achalandé dès le premier jour. Grâce au Canadien National, les marchandises circuleront par une sorte de voie oblique de Prince Rupert jusqu'à Chicago et jusqu'au Mississippi. Les gens-là envisagent de relever leur capacité pour prendre en charge l'activité supplémentaire. Je crois que c'est une question de capacité. Je ne crois pas que ce soit une occasion qui nous file entre les doigts. Il faut se demander : quelle taille faut-il donc donner à ces ports? À un moment donné, il faut faire des prévisions. Combien de temps cela va-t-il durer? Est-ce que ce sera permanent ou est-ce que ce sera un cycle de 20 ans? Ce sont là des grandes inquiétudes que nourrissent les gens.
Il y a également un problème énorme à régler — et je m'engage ici dans un dossier technique où je deviens un peu mal à l'aise — en ce qui concerne les conteneurs vides. Les conteneurs arrivent remplis à ras bord, mais il est difficile de les renvoyer autrement que vides. Ce sont des problèmes de logistique qu'il faudra probablement confier au secteur privé, mais il y a bien des difficultés qui existent. Malheureusement, un conteneur vide prend autant de place qu'un conteneur plein, et il faut dégager l'espace dans les ports pour que les bateaux puissent continuer à décharger. Les navires qui attendent d'être déchargés sont nombreux, et c'est un gros problème qui touche le système, à tel point qu'il y a eu, il y a deux ou trois semaines de cela, un article paru dans le National Post où on disait, de fait, que, dans certains cas, dans le cas de la fabrication de produits de grande qualité, les responsables commençaient à rapatrier la tâche. Nous avions transféré la tâche en Asie en raison du rapport coût-avantage, mais, maintenant, étant donné les difficultés que pose le transport, du fait de la congestion, il y a une partie de la fabrication qui est rapatriée en Amérique du Nord.
Le sénateur Phalen : À quel point le Southern Ontario Gateway représente-t-il un concept nouveau pour le Sud de l'Ontario?
M. Best : Comme je l'ai dit, au terme de préparatifs qui ont duré deux ans, nous nous sommes mis en branle l'an dernier. Ça se passe très bien pour une organisation qui est relativement nouvelle. Nous avons l'avantage de voir comment Vancouver a procédé pour avoir beaucoup de succès et, bien entendu, nous communiquons avec les responsables des portes d'entrée de Vancouver et de Halifax. Nous croyons avoir maintenant une bonne prise sur les choses. Notre relation avec les autorités fédérales et provinciales est fructueuse. Nos membres tiennent vraiment à ce que les décisions prises en matière de politiques et d'investissements au cours des trois ou quatre prochaines années procurent le plus grand avantage possible pour la santé à long terme du réseau. Je dirais que les choses vont bien.
Le sénateur Phalen : Quelle est grosso modo la part du trafic de marchandises conteneurisées qui passe entre les mains du Southern Ontario Gateway?
M. Best : Il y en a très peu. La majeure partie du transport se fait par camion ou par train. Je ne peux vous donner un pourcentage exact, mais le trafic conteneurisé est un phénomène essentiellement côtier. Il y a un peu de trafic conteneurisé au port de Toronto. Fait paradoxal, il arrive par camion et il part par camion. Il n'y a pas de trafic maritime conteneurisé à ce port-là, ou si peu. Le port de Hamilton, qui vient au premier rang pour le tonnage parmi l'ensemble des ports canadiens des Grands Lacs, prend en charge presque exclusivement des marchandises en vrac relevant de l'industrie de l'acier. Le trafic conteneurisé y est très faible. Il y a un certain trafic ferroviaire conteneurisé, en rapport avec l'industrie de l'automobile. C'est une occasion. Ce n'est rien de majeur en ce moment.
Le sénateur Phalen : Sur votre site web, vous dites que 84 p. 100 des importations ontariennes provenant des États- Unis passent par le Southern Ontario Gateway. Pouvez-vous nous renseigner sur ces importations, nous dire d'où elles proviennent, comment elles arrivent en Ontario et comment elles sont transportées à l'intérieur de la province?
M. Best : Sauf erreur, ce chiffre de 84 p. 100 s'applique aux marchandises que nous importons des États-Unis. C'est ce que nous faisons venir des États-Unis, alors il n'y a pas là-dedans de marchandises transportées par bateau sur les océans. Si l'on songe à tout l'équipement électronique et aux biens de consommation et vêtements en provenance de l'Asie, il est évident que nous nous trouvons là où les consommateurs sont le plus concentrés au Canada, alors le montant en dollars serait élevé, mais je n'ai pas de chiffre.
Le sénateur Phalen : Dans la section de votre site web qui porte sur les objectifs de sécurité et de sûreté à la frontière, vous dites que l'un de vos objectifs, c'est de surveiller et d'influencer les processus gouvernementaux de contrôle du fret aérien et de surface. Pouvez-vous expliquer au comité les améliorations qu'il est nécessaire selon vous d'apporter au contrôle du fret, ainsi que les processus gouvernementaux auxquels vous participez dans le domaine du contrôle du fret?
M. Best : Je pense que la principale préoccupation, en ce qui concerne le contrôle du fret, c'est l'harmonisation des protocoles des deux côtés de la frontière, que cela signifie qu'il nous faille convaincre les Américains d'adopter notre système ou que nous adoptions le leur, ou encore que nous adoptions un système hybride. Beaucoup de nos membres du secteur du camionnage nous disent que ce qui ralentit le plus le passage de la frontière, ce ne sont pas les files de camion aux ponts; la traversée ne pose pas problème. En réalité, Transports Canada fait un travail intéressant. Maintenant que tous les camions sont équipés d'appareils de localisation géographique, il est possible de déterminer combien de temps il faut pour passer du point A au point B. On pense qu'il y a des embouteillages sur les ponts et dans les tunnels, et il y a toutes sortes de problèmes du genre. Les gens de Transports Canada ont effectué des recherches dans le cadre desquelles ils ont recueilli des données en temps réel, et ils ont constaté que le temps de traversée moyen est de l'ordre de 18 minutes, ce qui est acceptable. Le problème, c'est le temps passé à remplir des documents. Les camionneurs américains sont réticents à transporter des marchandises au Canada parce qu'ils pensent qu'ils vont être pris dans des embouteillages et qu'ils vont devoir remplir de la paperasse. Cela signifie donc qu'il doit y avoir une espèce de transfert entre un chauffeur américain et un chauffeur canadien, ce qui occasionne évidemment des délais et des retards. C'est, à mon avis, le problème lié à la frontière le plus important dans la région où je travaille. Il s'agit d'harmoniser le processus d'autorisation d'entrée des marchandises avec celui du système américain.
Le sénateur Phalen : Nous commençons à recevoir du courrier de la part de citoyens sensibles à la question environnementale au sujet des projets de porte. Vous dites aussi, dans votre site web, que les problèmes de circulation et de pollution sont parmi les plus importants à l'échelle locale. Selon vous, quelles mesures précises faudrait-il prendre pour réduire la pollution de l'air causée par le transport de marchandises?
M. Best : Comme je l'ai dit plus tôt, je pense que les choses vont en quelque sorte se régler d'elles-mêmes, simplement parce que nous atteignons les limites de l'expansion du réseau routier. Cela suppose donc que nous allons commencer à adopter d'autres moyens de transport moins polluants, comme les trains et les bateaux. Par contre, l'activité totale va augmenter d'environ 40 p. 100. Même s'il y a un mouvement important vers le transport ferroviaire et maritime d'ici 2020, compte tenu de la croissance qui se fera en parallèle, il faudrait plutôt parler d'« atténuer » ce qui sera susceptible d'être un problème passablement grave que de le réduire.
En ce qui concerne la technologie, les camions vont-ils être moins polluants d'ici 20 ans? C'est à espérer. Il y aura des améliorations du genre, mais est-ce que tout cela, par exemple, le passage à des transports intermodaux moins polluants ou l'évolution technologique que nous allons connaître dans le secteur automobile, va compenser une augmentation de l'activité de 40 p. 100 en 15 ans? Je ne sais pas.
Le sénateur Dawson : Monsieur Best, des représentants du Port de Vancouver nous ont dit qu'ils avaient l'impression d'avoir besoin d'un « permis social » que leur donneraient les résidents du secteur, pour pouvoir continuer leurs activités et leur croissance. Est-ce que les gens des collectivités du Sud de l'Ontario se plaignent du fait que les activités de transport du fret à la porte d'entrée du sud de l'Ontario réduisent leur qualité de vie? Le cas échéant, de quoi se plaignent-ils précisément?
M. Best : Notre situation est un peu différente de celle de Vancouver ou de Halifax, où les installations portuaires sont de taille imposante et occupent des milliers d'acres de terrain sur le bord de l'océan, ce qui est évidemment un problème énorme. Oui, nous avons bien des problèmes du même ordre. La principale plainte que formulent les gens a probablement pour objet le réseau routier. Plus précisément, l'étalement urbain est en train de devenir un problème très important dans la région du Grand Toronto. Avec l'étalement urbain, on construit de nouvelles routes, ou les gens demandent de nouvelles routes. Il y a environ trois ans, le gouvernement de l'Ontario a adopté la stratégie de la ceinture de verdure, pour essayer de gérer la croissance sur le plan géographique.
Nos membres sont inquiets du fait que, si nous ne protégeons pas les corridors de transport — c'est-à-dire les futurs corridors de transport — alors ils vont devenir une source de tension lorsque nous tenterons de les construire. C'est un grave problème de société; pourquoi l'étalement urbain se produit-il? Parce que les jeunes couples qui veulent se marier veulent vivre dans une maison unifamiliale; ils ne veulent pas vivre dans un appartement. On peut prévenir l'étalement urbain en faisant diminuer la demande de logements, mais le logement est un problème très important dans le Sud de l'Ontario. Les collectivités sont en pleine croissance un peu partout. Il y a la politique de la ceinture verte qui doit protéger la frontière du Niagara. Elle va le faire, mais nous constatons déjà une identification rapide de l'autre côté de la ceinture verte. Pourquoi? Parce qu'il y a une demande.
L'enjeu peut sembler être une opposition entre les transports et des gens qui sont préoccupés par la pollution et le bruit. C'est la même chose en ce qui concerne les transports en commun. C'est super de dire : « Faisons en sorte que davantage de gens prennent les transports en commun », mais le problème, c'est quand vous ne pouvez rentrer chez vous à 17 h. Le train qui doit vous ramener chez vous part à 17 h, et vous devez rester plus longtemps au travail. Il vous faut aborder toute la question de la dynamique du travail. Lorsqu'une personne se déplace en prenant les transports en commun et qu'elle dit qu'elle doit entrer chez elle à 17 h, elle ne peut rester plus tard pour participer à des réunions.
Il faut aborder les facteurs humains qui sont à l'origine de certains de ces graves problèmes. Nous pourrions tous prendre l'autobus si nous pouvions savoir d'avance ce qui va composer notre journée, et je pense que les gens le feraient.
Le sénateur Dawson : À Vancouver comme à Montréal, nous avons entendu parler du double monopole du CN et du CP. Vous avez parlé du fait qu'il y a de la concurrence dans le secteur du transport routier, plus que dans le secteur du transport ferroviaire et que, dans une certaine mesure, dans le transport maritime. Est-ce que le fait que ces deux secteurs peuvent servir le marché est un avantage concurrentiel pour vous?
M. Best : Oui. Dans le Sud de l'Ontario, les deux sociétés ferroviaires commencent à partager leurs lignes. Elles ont compris qu'elles peuvent faire rouler plus de trains si elles partagent les lignes et qu'elles déterminent que tous les trains qui vont vers l'est vont emprunter une voie, et tous ceux qui vont vers l'ouest, l'autre. Elles collaborent. La voie ferrée est un actif fixe. Si une voie ferrée va jusqu'à l'usine Toyota de Woodstock, l'autre société ferroviaire ne peut offrir le service à cette entreprise. Il semble y avoir eu une certaine répartition dans le Sud de l'Ontario. Je pense que les sociétés ferroviaires collaborent dans une mesure passablement importante.
Le sénateur Dawson : Le sénateur Tkachuk a parlé des autres portes d'entrée. Pour se rendre à la porte d'entrée du Sud de l'Ontario, il faut passer par les portes d'entrée de l'Atlantique et du Québec. Quel genre de communications ou de collaboration structurelle y a-t-il entre les portes d'entrée?
Je peux comprendre que votre organisation soit représentée à Transports Canada. Les gens que nous avons rencontrés à Montréal nous ont dit qu'ils étaient représentés aussi. L'un d'entre eux travaille pour le bureau de l'Atlantique, l'autre, pour le bureau de l'Ontario.
Y a-t-il coordination, à l'échelle nationale, de ces trois portes d'entrée? Par ailleurs, pour ce qui est des fonctionnaires, ont-ils un quelconque point de vue national, ou est-ce que chacun retourne à son bureau régional et qu'il n'en ressort rien à l'échelle nationale?
M. Best : Je ne sais pas. Notre relation avec notre représentant est excellente, mais je ne sais pas ce qui se passe derrière le rideau. Je pense qu'il doit y avoir une certaine coordination.
Le sénateur Dawson : Communiquez-vous avec les gens des portes d'entrée de l'Atlantique et du Québec?
M. Best : Je communique à une fréquence raisonnable avec mes homologues des conseils des portes d'entrée de l'Atlantique et de Vancouver. En ce qui concerne Transports Canada, cependant, je ne traite pas avec les fonctionnaires de ces deux régions. Nous discutons avec les personnes-ressources du centre du Canada. Je ne sais pas ce qu'il y a derrière cela au chapitre de la coordination.
Le sénateur Dawson : Organisez-vous des réunions, par exemple, avec le conseil de l'Atlantique?
M. Best : Non. Nous n'organisons pas de réunions, mais nous échangeons des renseignements de façon régulière. Il n'y a pas d'associations.
Le sénateur Dawson : Il n'y a pas de porte d'entrée de l'Est?
M. Best : Non, pas encore.
Le sénateur Dawson : En parle-t-on?
M. Best : Certainement; les représentants du Port de Halifax ont dit très clairement que leur succès dépend de la capacité du Centre du Canada de recevoir tous les conteneurs supplémentaires qu'ils prévoient recevoir. Ils se sont rendus à Toronto pour vanter leur port et leur idée. Il n'y a rien eu de plus officiel, pour autant que je sache.
Le sénateur Johnson : Monsieur Best, le Southern Ontario Gateway Council dit que l'un de ses objectifs stratégiques, par rapport à son infrastructure et ses buts, c'est de chercher à obtenir l'amélioration des évaluations environnementales provinciales. Quels problèmes avez-vous, en ce qui concerne le processus d'évaluation environnementale de la province?
M. Best : Ce dont nous nous plaignons, c'est du temps qu'il faut pour effectuer les évaluations environnementales dans le cadre des projets de transport.
Dans le Sud de l'Ontario, il reste peut-être une possibilité de construction d'un grand corridor de transport, soit le corridor Niagara-Grand Toronto. Il tracerait une diagonale entre Fort Erie et le Grand Toronto, et il servirait à faciliter l'expédition de produits manufacturés. Le processus est déjà en cours depuis environ six ans. Ça a été un peu un faux départ, et il a fallu rectifier le tir. Nous parlons de six ans d'évaluations environnementales ou EE. J'ai participé à une réunion, il y a trois semaines, où les gens essayaient de corriger la situation en disant : « Voici le nouveau processus d'EE, l'autre n'a pas fonctionné. » Ils parlent d'un délai de 10 ans avant la mise en chantier. En tout, c'est donc un délai de 16 ans. C'est peut-être le pire cas à s'être jamais produit, mais c'est notre cas.
Les choses ont un peu bougé. Le gouvernement provincial a récemment annoncé son intention de rationaliser le processus d'EE. Dans le cadre des gros projets, on voit toujours les gens essayer d'obtenir des EE accélérées ou des EE de classe, de façon à ne pas avoir à passer par l'EE complète. La raison pour laquelle les gens résistent tant aux EE, c'est qu'il s'est produit quelque chose, au cours des 20 dernières années, qui a fait que l'EE sonne le glas d'un projet aujourd'hui, juste à cause des retards.
Y a-t-il une façon dont nous puissions examiner ces problèmes environnementaux? Tout le monde est d'accord pour dire qu'il faut les régler. Comment atténuer ces problèmes? S'il n'est pas possible des les atténuer, il faut peut-être réviser le plan. Est-ce qu'il faut 10 ou 16 ans pour le faire?
Le sénateur Johnson : Voilà qui est dur.
M. Best : Oui. Ce qu'on pense, c'est : respectons le processus d'EE.
Le sénateur Johnson : Comment le processus de l'Ontario se compare-t-il aux processus d'évaluation environnementale du gouvernement fédéral?
M. Best : Ça dépasse mes compétences, sincèrement. Je ne sais pas comment les deux processus s'agencent. Il y a le processus de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale, que nous avons vu appliquer à un projet de route à Hamilton. On a été en mesure, par voie judiciaire, de supprimer le processus de l'ACEE.
C'est ça, le problème : les gens essaient d'éviter les EE. Tout le monde est d'accord pour dire que nous devrions effectuer des évaluations environnementales exhaustives pour tout grand projet d'infrastructure; cependant, si on laisse l'évaluation environnementale tuer le projet, essentiellement, alors le système fait défaut. C'est assurément le point de vue de nos membres. La question qui se pose, c'est : pouvons-nous accélérer le processus tout en continuant de faire du bon travail?
Le sénateur Johnson : À votre avis, qu'est-ce que le comité devrait recommander aux gens qui s'occupent du processus d'évaluation environnementale du gouvernement fédéral? Pour le conseil, qu'est-ce qui permettrait d'améliorer le processus, vu le délai de 16 ans dont vous avez parlé?
M. Best : Il est clair que la question que vous me posez est trop technique pour que je sois en mesure d'y répondre. Assurément, j'espère qu'on harmonisera les deux processus d'EE, de façon que nous n'ayons pas à tout faire en double. Je crois qu'il y a une certaine harmonisation des deux EE. Après avoir passé par un processus provincial de cinq ou six ans, il serait extrêmement désagréable d'avoir à tout refaire pour suivre un processus fédéral.
La principale chose, c'est l'harmonisation. Si quelque chose a fait l'objet d'une étude et d'un examen à l'un ou l'autre niveau, les résultats devraient être valables pour les deux gouvernements. Notre principale préoccupation, ce serait d'éviter les dédoublements.
Le sénateur Johnson : Qu'est-ce que, selon vous, le comité doit absolument entendre avant de formuler ses recommandations stratégiques à l'intention du gouvernement fédéral en ce qui concerne le trafic de fret conteneurisé à la porte d'entrée du Sud de l'Ontario?
M. Best : J'ai lu la liste des membres de notre organisation. Ceux-ci sont en grande partie des entreprises de transport. Ce sont des sociétés ferroviaires, des services de messagerie, des camionneurs, des exploitants de ports, d'aéroports et d'installations.
Le point de vue que nous devons adopter, selon moi, et je pense que ce serait quelque chose d'utile pour vous aussi, c'est celui de l'expéditeur. C'est l'expéditeur qui est à l'origine de la demande et qui décide s'il va envoyer sa marchandise par camion, par bateau ou par train. Les expéditeurs doivent être représentés dans le cadre de tout débat sérieux sur les politiques de transport.
Par l'intermédiaire des manufacturiers et des exportateurs du Canada et d'autres organisations, j'essaie de créer des liens avec les expéditeurs. Ceux-ci comprennent comment le système fonctionne, et ils prennent certaines décisions en matière de transport et d'expédition. J'essaierais assurément de joindre ce groupe, comme nous avons l'intention de le faire. Nous ne pensons pas être en mesure de formuler les meilleurs conseils possibles si nous ne connaissons pas bien leurs points de vue.
Le sénateur Johnson : En ce qui concerne la porte d'entrée, quel genre d'engagement souhaiteriez-vous voir le gouvernement fédéral prendre, sur le plan financier, par rapport à ce que vous faites? L'Initiative de la porte et du corridor de l'Asie-Pacifique a reçu six cent millions de dollars.
M. Best : Je pense que c'est maintenant près d'un milliard de dollars.
Le sénateur Johnson : L'argent va servir à améliorer les infrastructures. Pour votre part, qu'aimeriez-vous obtenir?
M. Best : Vous serez peut-être un peu étonné. À ce moment-ci, nous n'avons pas de « demande ». Nous savons qu'il y a deux milliards de dollars de réservés, même si l'argent n'est pas encore alloué au Sud de l'Ontario. Je pense qu'une bonne partie de cet argent est réservée à la région de l'Atlantique. Je pense qu'il y a une possibilité qu'une partie de l'argent soit investie dans le sud de l'Ontario. La façon dont on a fait l'annonce donnait à penser que l'argent allait être accordé « en fonction du mérite », ce qui est une bonne chose. Il faut qu'il y ait des avantages démontrés pour le système national. Cependant, nous savons tous comment les annonces au sujet du financement sont faites et comment les projets se retrouvent subitement à l'ordre du jour, surtout en temps d'instabilité sur le plan politique. On met le ballon en jeu, puis il risque d'y avoir des mauvaises décisions, et c'est comme ça que des choses comme ce qui s'est passé à Mirabel finissent par se produire.
Je ne pense pas qu'il soit astucieux de se dépêcher à dépenser l'argent. Ce qui est astucieux, c'est d'allouer les ressources, puis d'élaborer un moyen sensé d'évaluer les meilleures façons de stimuler l'économie pendant les 20 prochaines années. Quelle est la meilleure façon de dépenser cet argent? Nous aimerions participer à cette discussion, mais il faut qu'il y ait d'abord des travaux de recherche.
Vous pourriez inviter ici des gens qui vous diraient comment dépenser deux milliards de dollars de façon plus créative que moi. Il y a ici une question de processus qui est plus importante, et c'est que les intervenants du réseau de transport du Canada n'ont pas eu cette occasion depuis 20 ans. Elle se présente tout à coup; essayons de la saisir comme il faut.
Ce genre de projets prend tellement de temps à réaliser qu'il pourrait être souhaitable de réfléchir un peu et d'élaborer un bon processus, qui, idéalement, sera le plus possible à l'abri des cycles politiques. Je sais que ce sera une tâche difficile.
Le sénateur Johnson : En ce qui concerne l'avenir de la porte d'entrée du Sud de l'Ontario, diriez-vous que les investissements dans l'infrastructure, par exemple, dans des réseaux de transport, dans la technologie, dans la sécurité ou dans le domaine du marketing seraient les enjeux les plus importants pour vous?
M. Best : Oui, pour ce qui est de l'infrastructure, les routes sont évidemment quelque chose qui relève de la province. Au besoin, on peut avoir recours à toutes sortes de mécanismes de financement créatif pour les routes, par exemple les postes de péage. Les Américains consacrent toutes les recettes de la taxe sur l'essence aux routes. Il n'est pas nécessaire de puiser dans les recettes générales pour obtenir de l'argent pour construire une route.
Les sociétés ferroviaires sont encore autonomes sur le plan financier; elles utilisent encore leur propre argent et celui de leurs actionnaires. Si nous avons besoin de plus d'installations intermodales, un moyen quelconque de faire passer les produits des camions au train et peut-être au bateau, c'est peut-être une occasion d'investir qui se présente. Le gouvernement fédéral a peut-être un rôle à jouer pour établir ce qui fera le lien entre ces modes de transport, dans un domaine où l'autorité n'est pas clairement définie, et où il y a un besoin d'établir des liens, mais où personne n'a encore clairement pris l'entière responsabilité de le faire. Voilà des domaines dans lesquels je pense que vous pouvez envisager de bonnes occasions d'investissement.
Le secteur privé va participer à cette initiative de toute façon, parce que c'est en grande partie le fondement de notre économie. Ce n'est pas comme les soins de santé, qui sont entièrement financés à même les deniers publics. Il y aura toujours d'importantes occasions d'investir pour le secteur privé dans ce domaine.
Le sénateur Munson : Vous dites que vous n'avez pas de demande à formuler, mais vous avez parlé plus tôt de nouvelles voies de commerce. Il me semble qu'il irait de soi de demander ces nouvelles voies de commerce du secteur privé et du gouvernement fédéral, vu que vous avez parlé de traversiers sur le lac Érié. Dans quelle mesure cette idée peut-elle être mise en pratique? Est-ce que c'est un projet à long terme, ou est-ce que c'est quelque chose que vous envisagez pour bientôt avec les fonctionnaires fédéraux et provinciaux?
M. Best : Il y a eu pas mal d'activités autour d'un éventuel traversier sur le lac Érié à l'époque où on a mis à l'essai le traversier de Rochester, ce qui n'a pas fonctionné. C'est bien dommage, parce que cet exercice a probablement eu pour effet d'assombrir un peu l'avenir des traversiers comme moyen de transport viable. À notre avis, il aurait été préférable qu'on commence par essayer de transporter des marchandises, parce que cela présente des avantages certains. Il est possible, par exemple, de faire le trajet de Port Dover, sur le bord du lac Érié, à Erie, en Pennsylvanie, en 90 minutes, par traversier. De là, l'accès est direct au réseau I-79, qui s'étend vers la Caroline et dans tout le Midwest américain. Cela pourrait permettre de passer moins de temps sur la route. Tout à l'heure, lorsque nous avons parlé du transport maritime, nous avons parlé de composer avec les délais que cela suppose et d'essayer de choisir des marchandises pour lesquelles le temps de transport n'est pas un problème. Voilà donc un exemple d'une façon plus rapide de traverser l'autre côté, plus rapide que de faire le tour du lac par la route, pour avoir accès à un réseau de transport important.
Le sénateur Munson : Est-ce que cette idée de traversier est une idée qu'on essaie vraiment de faire adopter à l'heure actuelle?
M. Best : Oui. La Corporation de gestion de la Voie maritime du Saint-Laurent et les deux grands ports de l'Ontario ont élaboré ensemble ce qu'ils appellent le processus de l'Autoroute H2O. Je ne sais pas si vous avez pris connaissance de cela dans le cadre de vos recherches. Essentiellement, ils font la promotion d'une initiative de marketing qui prône toutes sortes de façons d'utiliser davantage la voie maritime, notamment pour transporter des conteneurs, et il pourrait s'agir aussi de traversiers sur les lacs. C'est leur concept de marketing, mais ils sont toujours aux prises avec certains problèmes.
Lorsqu'ils effectuent l'analyse économique, leur hypothèse, c'est qu'il faut que le projet soit sensé si nous faisons l'acquisition du bateau. Puis il y a les questions comme celle de savoir si nous pouvons améliorer les ports des deux côtés. Pour des traversiers de cette taille, il faut des infrastructures importantes pour décharger les conteneurs sur la rive. Il y a un volet infrastructure, et il y a toute la question des douanes. Ne pouvons-nous pas éviter d'imposer un trop gros fardeau à ce projet en exigeant que les postes frontaliers fassent leurs frais au départ? Y a-t-il une façon de rendre cela plus attrayant?
Il y aurait un volet d'investissement dans les infrastructures qui, évidemment, si le gouvernement fédéral voulait soutenir un nouveau projet, international de par sa nature, pourrait se prêter plus facilement à la participation du gouvernement fédéral. C'est peut-être quelque chose à envisager.
Le sénateur Munson : Est-ce que ce serait l'argent qui pourrait faire l'objet de la demande?
M. Best : Ce pourrait très bien être le cas. Je ne veux exclure aucune demande. À l'heure actuelle, ce que nous faisons, c'est d'examiner les besoins. Nous pouvons déterminer les besoins; les routes sont engorgées, et il y a des problèmes de circulation à la frontière.
Nous avons essayé de nous fonder sur des travaux de recherche le plus possible, de façon à ne pas faire d'erreurs. Le meilleur exemple, c'est le problème du poste frontalier où nous pensions que l'infrastructure était inadéquate. Dans le secteur du pont Ambassador, l'infrastructure est inadéquate; le réseau routier de Windsor est totalement inadéquat. Cependant, à Niagara, ce n'était pas le cas. Les ponts sont adéquats, mais ce sont les douanes des deux côtés qui ne sont pas adéquates. Nous n'arriverons pas à régler le problème seul. Il arrive parfois que les problèmes administratifs ou liés aux politiques sont aussi importants que l'insuffisance de l'infrastructure.
Le sénateur Munson : Est-ce que serait une bonne idée de réunir toutes ces organisations concurrentes et d'établir un plan national cohérent? C'est peut-être ce qui est en train de se produire. Le gouvernement fédéral devrait-il établir des liens entre toutes ces portes d'entrée et entre les aspirations des intervenants de celles-ci?
M. Best : C'est une idée intéressante, si vous voulez lier les trois grands morceaux du casse-tête des transports; il y a trois conseils de portes d'entrée et groupes d'intervenants. L'un des avantages d'un conseil de porte d'entrée, c'est que lorsque nous arrivons ici, par exemple, avec une demande, nous en avons déjà débattu avec les différents intervenants qui sont en concurrence. Nous avons donc déjà déterminé certaines priorités. C'est peut-être plus facile de s'occuper des transports de façon stratégique s'il y a un processus de présélection en place en raison de la composition de notre organisation. Si nos membres sont tous d'accord pour dire que tel ou tel projet est le meilleur, si nous arrivons à obtenir un consensus sur quelque chose du genre, alors vous savez que les secteurs du transport maritime, du transport ferroviaire et du transport routier se sont tous penchés sur la question, et, à mesure que le projet avance, les manufacturiers vont aussi formuler des propositions, tout comme les principaux expéditeurs.
Une des expériences les plus instructives que j'ai vécues, ça a été de participer à une conférence sur l'expédition, où j'ai entendu les gens de Canadian Tire parler de la façon dont ils transportent leurs marchandises, de la façon dont ils prennent des décisions et de ce qu'ils choisissent d'importer de la Chine. Toute cette information est fascinante, et c'est une part essentielle de toute discussion que nous pouvons tenir ici.
Le sénateur Munson : C'est une partie essentielle de notre étude. Merci beaucoup.
Le sénateur Fairbairn : Je viens de l'Alberta, et même si nous ne sommes pas sur la côte, et sommes même loin de celle-ci, la question des affaires et d'un partenariat avec la porte d'entrée a été très importante chez nous.
Combien de temps a-t-il fallu au groupe de Vancouver, qui a ensuite étendu ses activités jusqu'à Edmonton, pour obtenir une réaction positive et l'argent pour lancer le processus?
M. Best : Dix ans. Il y a toujours des faux départs lorsqu'on essaie d'appliquer une idée pour la première fois. J'aimerais assurément pouvoir penser que nous allons envisager sérieusement de vrais projets pour les deux ou trois années qui viennent.
Je ne sais pas si les représentants de Vancouver sont venus ici décrire leur processus, et je suis un peu réticent à raconter leur histoire, de peur de mal le faire. La première chose qu'ils ont dû faire, ça a été de déterminer ce qui était important pour le lower mainland, en Colombie-Britannique. Où se trouvaient les goulots d'étranglement? Qu'est-ce qui causait les problèmes de circulation? Ils se sont occupés de choses vraiment fondamentales. Ils ont dit : voilà un endroit où il faut construire un deuxième pont; nous avons besoin ici d'un passage à niveau pour la voie ferrée. Ce n'était rien de très compliqué. Ils ont dit clairement quels projets devaient être élaborés.
Fait intéressant, maintenant que bon nombre de ces projets commencent à porter fruit, les gens sont convaincus que c'était des projets importants. On a réussi à convaincre les gens — peut-être en Alberta, en Saskatchewan et encore un peu plus loin de la côte — que les goulots d'étranglement en question étaient encore les plus importants. Peu importe si vous expédiez des marchandises de Calgary ou d'Abbotsford, en Colombie-Britannique, vers la côte. Les problèmes demeuraient le goulot d'étranglement d'une autoroute et le deuxième pont qu'il fallait construire. Tous les goulots d'étranglement se trouvaient dans la partie sud de Vancouver, et ils étaient un obstacle à l'expédition de marchandises vers le reste du Canada, vers Winnipeg, et le problème s'est tout simplement étendu jusque dans les Prairies.
Les gens de cette organisation ont mis leurs idées en commun, ce qui est digne de mention, parce qu'on a tendance à ne prêcher que pour sa paroisse dans ce genre de dossier. Ce qui a été la clé de la réussite, c'est que trois provinces ont adopté la liste en question. Assurément, d'autres projets se sont étendus dans les autres provinces au fur et à mesure que les choses prenaient de l'ampleur.
Le fait qu'on ait pu se réunir pour définir le problème, peu importe l'endroit touché et ce qu'il fallait faire pour le régler, a été la clé du succès. Ça a été cette capacité d'obtenir un consensus.
Le sénateur Fairbairn : Je vous souhaite bonne chance. Je sais qu'il ne fait aucun doute que cela a eu des répercussions énormes dans une région beaucoup plus grande que certaines personnes le penseraient. Mes amis de la Saskatchewan et du Manitoba savent que notre région du pays a subi de nombreux coups au cours des dernières années; beaucoup plus que tout ce dont le milieu agricole, par exemple, pourrait être responsable, et, avec le temps, cela pourrait devenir un avantage très important pour les autres régions du pays, bien au-delà de la côte de la Colombie- Britannique
M. Best : Comme je l'ai dit plus tôt, on parle d'un port intérieur au Kansas, et ces ports créent des emplois. Il y a beaucoup de travail de logistique à faire, dans le tri, l'expédition et le transfert des marchandises de camions dans des trains, ainsi que beaucoup de bons emplois dans le domaine de la logistique si cette idée de ports intérieurs se matérialise comme la plupart des gens du milieu des transports pensent qu'elle le fera.
La présidente : Monsieur Best, merci beaucoup d'avoir témoigné devant nous ce matin. N'hésitez pas à nous faire parvenir tout renseignement supplémentaire que vous pourriez nous communiquer. Nous avons été très heureux de vous recevoir ce matin.
La séance est levée.