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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones

Fascicule 1 - Témoignages du 28 novembre 2007


OTTAWA, le 28 novembre 2007

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd'hui, à 18 h 17, pour examiner, en vue d'en faire rapport, les responsabilités constitutionnelles, conventionnelles, politiques et juridiques du gouvernement fédéral à l'égard des Premières nations, des Inuits et des Métis et d'autres questions générales relatives aux peuples autochtones du Canada.

Le sénateur Gerry St. Germain (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Honorables sénateurs, étant donné que cette séance est l'une de nos premières, je vais présenter les membres du comité. Le sénateur Hubley, qui vient des Maritimes; le sénateur Sibbeston, qui vient du Nord; et le sénateur Dallaire, à qui je souhaite la bienvenue au comité. Le sénateur Dallaire est un atout pour nous, car il possède une vaste expérience des populations en situation de détresse. Nous nous réjouissons à l'avance de votre contribution. Nous formons une équipe. Si vous avez quelque chose à dire, n'hésitez surtout pas à le faire. Nous essayons de laisser nos idées partisanes de côté. Nous ne travaillons pas pour nous, mais bien pour les Premières nations, à qui nous essayons d'offrir aide et collaboration.

Le sénateur Dallaire : Merci beaucoup. Je suis très honoré. J'avais demandé de faire partie du comité et je suis heureux d'avoir été accepté. C'est avec un sentiment d'humilité que je constate l'énorme tâche que nous devons accomplir pour aider les peuples autochtones. J'espère être utile au comité.

Le président : Merci. Ce soir, nous avons avec nous le sénateur Gustafson et le sénateur Peterson, qui viennent tous les deux de la Saskatchewan.

Le sénateur Gustafson : La province des Rough Riders.

Le président : Honorables sénateurs, ce soir, nous revenons sur l'étude que nous avons faite, comme la plupart d'entre vous le savent, au sujet de l'approvisionnement en eau potable sécuritaire pour les Premières nations. Sénateur Dallaire, je ne sais pas si vous avez pu prendre connaissance de notre rapport là-dessus, mais notre comité a jugé qu'il était nécessaire afin d'indiquer notre position sur la situation désastreuse qui existe dans certaines communautés des Premières nations. À la suite du rapport et de nos discussions, nous avons décidé de convoquer des témoins d'Affaires indiennes et du Nord Canada. Nous sommes heureux d'accueillir ce soir Mme Christine Cram et M. Marc Brooks.

Christine Cram, sous-ministre adjointe déléguée, Secteur des Politiques socioéconomiques et des opérations régionales, Affaires indiennes et du Nord Canada : Bonsoir à vous tous, honorables sénateurs. Je vous remercie de me donner l'occasion de donner suite à la présentation que M. Brooks et moi-même avons faite en mai dernier sur la qualité de l'eau dans les réserves des Premières nations.

Alors que l'année 2007 tire à sa fin, les défis relatifs à l'eau des Premières nations demeurent d'une grande importance pour le gouvernement du Canada et les Canadiens. Dans son discours du Trône, le gouvernement s'est engagé à mettre en œuvre une nouvelle stratégie visant à améliorer l'approvisionnement en eau potable pour les Premières nations. Le gouvernement poursuivra ses efforts en vue de régler les nombreux problèmes concernant la qualité de l'eau potable dans les réserves des Premières nations.

[Français]

Le gouvernement a pris note du rapport du comité sur l'approvisionnement en eau potable sécuritaire pour les Premières nations complété en mai de l'année courante. Ce rapport présente un compte rendu succinct de certains des principaux défis à relever dans ce domaine, ainsi que plusieurs suggestions concises et utiles en vue d'améliorer la situation actuelle.

[Traduction]

J'ai l'intention de parler des conclusions du rapport ainsi que de l'approche du gouvernement du Canada pour surmonter certains des défis relevés par le comité, mais j'aimerais d'abord faire le point sur les activités d'amélioration de la qualité de l'eau potable qui ont été menées au cours des six derniers mois, ainsi que souligner certains des progrès qui ont été réalisés.

Tout d'abord, le gouvernement du Canada, par l'entremise de Santé Canada, poursuit ses nombreuses initiatives visant à aider les collectivités des Premières nations à assurer la qualité de l'eau potable dans les réserves. En plus de poursuivre la mise en œuvre de sa Stratégie de gestion de l'eau des Premières nations, le ministère s'emploie également à mettre en œuvre le Plan d'action 2006 et le Protocole pour la salubrité de l'eau potable dans les communautés des Premières nations. Grâce à ces initiatives, des progrès ont été réalisés dans certains domaines clés, ce qui comprend une réduction du nombre de systèmes de traitement d'eau à risque élevé au Canada, une augmentation du nombre d'opérateurs autochtones certifiés exploitant les usines de traitement des eaux, ainsi que des activités critiques de surveillance et de contrôle dans le cadre du Programme des opérations de la salubrité de l'eau (POSE) et une ligne d'assistance 1-800 qui a été établie pour aider les opérateurs d'usines de traitement de l'eau dans les réserves. J'aimerais faire remarquer qu'un autre rapport d'étape sur le plan d'action est en préparation. Ce rapport soulignera, plus particulièrement, les progrès qui ont été réalisés dans les domaines susmentionnés.

De belles réussites ont également été observées par AINC au cours des derniers mois. Par exemple, en août dernier, la qualité de l'eau potable d'une communauté des Premières nations du Manitoba a été menacée en raison d'actes de vandalisme qui ont mené à une fuite de formazine et d'un autre produit chimique inconnu dans le réservoir d'eau. Immédiatement, un avis de non-consommation a été émis, sur la recommandation de l'opérateur, et de l'eau en bouteille a été fournie par AINC. Grâce à la formation offerte par le Programme de formation itinérante, les opérateurs autochtones des usines de traitement de l'eau ont été en mesure de purger, de nettoyer, de désinfecter et de rincer le système. Ils se sont rendus dans toutes les résidences de la communauté pour montrer aux gens comment purger leurs conduites d'eau. Par conséquent, l'avis de non-consommation a été levé en moins de trois jours.

[Français]

Au Manitoba, une collectivité des Premières nations a été aux prises avec un avis concernant la qualité de l'eau en raison d'un injecteur de chlore défectueux. Un injecteur de chlore de rechange a été installé le jour suivant et les opérateurs de l'usine de traitement ont surveillé les niveaux de chlore à l'usine et dans les canalisations de distribution. L'agent d'hygiène du milieu a été appelé sur les lieux, de même que le contrôleur de l'eau de la collectivité, qui a vérifié les échantillons de l'eau, et l'avis de ne pas consommer a été retiré peu de temps après. Cet exemple illustre bien comment la chaîne de communication a été utilisée efficacement, évitant ainsi une crise d'approvisionnement en eau en utilisant l'approche à barrières multiples des Affaires indiennes et du Nord Canada.

[Traduction]

Ce sont là deux exemples parmi d'autres des progrès qu'on a observés, et ils démontrent bien que les mesures mises de l'avant par le ministère, en collaboration avec ses partenaires des Premières nations, donnent des résultats.

En mai dernier, le comité a publié un rapport final sur la salubrité de l'eau potable pour les Premières nations. Ce rapport a été examiné par les représentants d'AINC avec un grand intérêt. Le ministère a pris note de deux recommandations importantes contenues dans ce rapport, notamment, celle demandant de procéder à une vérification des réseaux d'aqueduc et à une évaluation indépendante des besoins en biens durables et en ressources humaines de chacune des communautés des Premières nations relativement à la distribution d'eau potable sécuritaire avant mars 2008; et celle demandant d'entreprendre un processus de consultation complet auprès des organismes et des communautés des Premières nations concernant les options législatives pour élaborer des normes de qualité de l'eau dans les réserves.

En ce qui concerne la première recommandation, des travaux sont en cours en vue de mettre au point un cadre de référence pour une évaluation technique indépendante de tous les réseaux d'alimentation en eau et de traitement des eaux usées des communautés des Premières nations. Les objectifs particuliers de cette évaluation comprennent les éléments suivants : procéder, sur une base prioritaire, à une évaluation des réseaux publics et privés d'alimentation en eau et de traitement des eaux usées dans les communautés des Premières nations, ainsi que des pratiques opérationnelles qui sont liées à ces réseaux; déterminer le niveau de risque associé à chaque réseau public; et faire des recommandations quant aux améliorations opérationnelles et physiques qu'il faudrait apporter pour réduire les risques pour la santé et la sécurité.

L'évaluation technique fournira également à AINC les données nécessaires pour étudier la possibilité d'offrir des services d'approvisionnement en eau à des ménages des Premières nations au moyen de réseaux privés locaux et de petits réseaux communs.

En ce qui concerne cette évaluation, et le besoin de revoir nos politiques pour les réseaux d'alimentation en eau et de traitement des eaux usées, le ministère a sollicité l'engagement du secteur privé, ainsi que de l'Association canadienne des eaux potables et usées, pour examiner les services d'eau potable et d'eaux usées de communautés autres que celles des Premières nations, en mettant l'accent sur les petites collectivités rurales.

Il a été déterminé que plusieurs régions rurales et petites villes du Canada ont recours à des réseaux privés individuels d'eau potable et de traitement des eaux usées pour répondre à leurs besoins. Elles en ont décidé ainsi principalement pour des raisons pécuniaires, mais aussi pour des motifs environnementaux, de santé et de sécurité. De façon générale, on juge trop dispendieuse l'installation de réseaux canalisés centraux dans les petites localités en raison des coûts des réseaux de canalisations associés. Par ailleurs, le fonctionnement et l'entretien de ces réseaux sont onéreux et requièrent l'embauche de personnel compétent que les petites localités ont de la difficulté à trouver, à rémunérer et à maintenir en poste. Pour ces raisons, plusieurs petites localités favorisent les réseaux autonomes simples et peu coûteux qui offrent des solutions rentables, écologiques et durables.

Pour ce qui est de la deuxième recommandation du comité, le gouvernement du Canada examine les options pour l'élaboration d'un régime de réglementation de l'eau potable pour les communautés des Premières nations. Il est important de noter que des discussions ont eu lieu entre les Premières nations et le ministre Prentice, alors qu'il était ministre d'AINC, concernant son option préférée.

En mai, M. Brooks et moi vous avons informé que l'option dont l'ancien ministre Prentice et le chef national Fontaine avaient discuté consistait à incorporer les normes provinciales et territoriales dans un régime de réglementation fédéral. Depuis ces discussions, comme vous le savez, le ministre Strahl a été nommé ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien.

[Français]

Le ministre Strahl étudiera soigneusement les différentes options législatives et les recommandations faites par le Comité sénatorial des peuples autochtones, de même que les options énoncées dans le rapport du groupe d'experts, avant de faire des recommandations à ses collègues du Cabinet.

[Traduction]

Par ailleurs, une évaluation récapitulative de la Stratégie de gestion de l'eau des Premières nations est en cours. Elle se fondera sur les données fournies par AINC et Santé Canada pour évaluer, premièrement, les progrès qui ont été réalisés en ce qui concerne l'approvisionnement en eau potable de qualité et le traitement efficace des eaux usées dans les réserves de 2003 à 2007; deuxièmement, la valeur créée par les investissements d'AINC dans des réseaux d'alimentation en eau et de traitement des eaux usées pour les communautés des Premières nations; et troisièmement, l'importance et l'utilité de l'approche élaborée et mise en œuvre dans le cadre de la stratégie, de même que les améliorations qui auront été apportées. AINC a l'intention d'examiner les recommandations en matière d'évaluation afin d'améliorer l'exécution des programmes à long terme.

Pour terminer, bien que d'importants progrès aient été réalisés dans le domaine de la gestion de l'eau des Premières nations, il reste encore beaucoup à faire. Le gouvernement du Canada, et plus particulièrement le ministre Strahl, a réitéré à maintes occasions son engagement à aider les Premières nations à obtenir de l'eau potable salubre, propre et fiable. AINC continuera de réduire le nombre de communautés dont le réseau d'aqueduc présente un risque élevé et ira de l'avant avec les différentes initiatives qui ont été mentionnées aujourd'hui.

Nous continuerons de chercher de nouvelles approches en vue d'optimiser les ressources existantes et de réduire les risques liés à la consommation de l'eau afin que les citoyens des Premières nations puissent jouir d'un accès à de l'eau potable de qualité et sans danger.

Le président : Madame Cram, vous avez dit qu'une nouvelle stratégie était mise au point dans la foulée du discours du Trône, mais je n'ai pas vu qu'il était question d'une nouvelle stratégie dans ce discours. Pouvez-vous nous dire ce que vous avez changé depuis le discours du Trône?

Mme Cram : Quand nous avons comparu, en mai dernier, nous avons indiqué que, selon les responsables de la Stratégie de gestion de l'eau des Premières nations, le financement devait être renouvelé à la fin de mars 2008. Depuis notre comparution, nous avons travaillé dans le cadre de la stratégie ainsi que du plan d'action actuellement en vigueur. J'en ai parlé un peu dans mon exposé.

Notre prochaine étape consistera à demander le renouvellement de la Stratégie de gestion de l'eau des Premières nations. C'est la raison pour laquelle nous sommes en train d'en faire le bilan. En ce moment, nous évaluons notre façon de procéder. Cela nous permettra d'avoir une idée des améliorations à apporter. De plus, nous examinons le rapport de votre comité ainsi que le rapport d'experts sur les options législatives possibles.

Le président : Il n'y a pas encore de stratégie définie. Elle est au stade embryonnaire, en cours d'élaboration, n'est-ce pas?

Mme Cram : C'est exact, elle en est à l'étape de l'élaboration.

Le sénateur Sibbeston : Lorsque le nouveau gouvernement a été formé, j'ai été impressionné quand le ministre Prentice a dit qu'il allait s'attaquer au problème de l'eau chez les Premières nations. Il semblait sérieux. Cela laissait entendre que de nouvelles initiatives allaient être mises sur pied ou que de nouveaux fonds allaient être injectés dans des programmes de gestion de l'eau, et que les choses pouvaient bouger rapidement au ministère.

Avez-vous noté une différence depuis que le nouveau gouvernement est au pouvoir? Est-ce qu'il y a eu plus d'efforts, d'initiatives ou de fonds pour la question de l'eau chez les Premières nations?

Mme Cram : Dans le cadre de la Stratégie de gestion de l'eau des Premières nations, le ministère a consacré 1,6 milliard de dollars sur cinq ans. Dans le budget de 2006, nous avons reçu 60 millions de dollars de plus, répartis sur deux ans. Il y a aussi eu l'annonce du plan d'action relativement à l'eau et le dépôt de deux rapports d'étape au Parlement, l'un en mars 2006 et l'autre, en décembre de la même année. Nous espérons présenter un autre rapport d'étape bientôt.

Il y a eu une amélioration importante dans la réduction des systèmes d'approvisionnement de l'eau qui étaient à haut risque. Je vais maintenant laisser la parole à M. Brooks afin qu'il explique dans les grandes lignes les améliorations apportées.

Marc Brooks, directeur général, Direction générale du développement communautaire, Affaires indiennes et du Nord Canada : Comme Mme Cram l'a mentionné, des fonds supplémentaires de 60 millions de dollars ont été prévus dans le budget de 2006. Plus important encore, le gouvernement a manifesté une nouvelle volonté de nous donner les moyens d'améliorer de nombreux systèmes à risque élevé. Il y a deux ans, environ 193 systèmes sur 752 étaient réputés être à risque élevé, c'est-à-dire que, tout considéré, les probabilités qu'un problème survienne étaient assez importantes. La communauté courait un danger relativement grand en matière d'eau potable.

Dans ce cas, nous avons mis surtout l'accent sur ce que j'appellerai les coûts accessoires. Ainsi, nous avons, comme l'a mentionné Mme Cram, mis sur pied une ligne 1-800 afin de permettre aux communautés ne disposant pas nécessairement d'un opérateur accrédité en traitement de l'eau de recevoir l'aide d'un ingénieur qualifié ou d'un technicien spécialisé dans le domaine, en mesure de travailler avec la population.

Nous nous sommes également associés à ce que l'on appelle le Programme de formation itinérante. Il s'agit de techniciens spécialisés qui se déplacent d'une communauté à une autre dans tout le pays. Ils donnent de la formation pratique, font du mentorat et enseignent à des techniciens de l'eau comment réparer les pannes, corriger les problèmes et effectuer l'entretien préventif. L'accent a été mis sur ces initiatives ainsi que sur les efforts en vue de diminuer le nombre de systèmes à risque élevé. De plus, nous voulons former davantage d'opérateurs de station de traitement d'eau et les maintenir au sein des communautés. Cette pénurie d'opérateurs ne touche pas seulement les Premières nations, mais l'ensemble du Canada.

Le sénateur Sibbeston : Êtes-vous les plus hauts responsables du ministère concernant l'eau des Premières nations?

Mme Cram : Le ministère est organisé d'une manière telle que nous couvrons les sept régions au sud du 60e parallèle. La majorité du travail exécuté par Affaires indiennes et du Nord se fait par le truchement de notre bureau régional, en collaboration avec des partenaires autochtones. Nous nous occupons des régions au sud du 60e parallèle qui regroupent la grande majorité des réserves. La Stratégie de gestion de l'eau des Premières nations et le plan d'action s'adressent surtout aux réserves. Nous avons un secteur qui possède une capacité régionale. La direction de M. Brooks s'occupe de tous les programmes d'infrastructure. Elle est dotée d'une équipe dédiée spécialement à la question de l'eau. Nous avons également accès à des ingénieurs, lesquels ne s'occupent pas uniquement de l'eau. Ils peuvent être chargés d'autres projets d'infrastructure.

Le sénateur Sibbeston : Je ne sais pas comment le gouvernement fédéral fonctionne, mais je viens des Territoires du Nord-Ouest, où j'ai déjà été membre du gouvernement. J'étais ministre responsable des communautés, notamment. Je sais que si j'étais ministre et que je recevais un rapport de ce genre, je ne l'accepterais pas, car il ne parle pas de l'urgence de la question. Ce n'est pas suffisant. Je ne trouve pas que les choses ont beaucoup changé.

Vous avez terminé votre déclaration en disant qu'il y avait eu d'importants progrès dans le domaine de la gestion de l'eau des Premières nations, mais qu'il restait encore beaucoup à faire. C'est une déclaration générale qui ne veut pas dire grand-chose, sauf que vous vous occupez du dossier. J'aurais pensé, étant donné que notre comité sénatorial s'est penché sur la question et a encouragé le ministère à s'intéresser au problème, en soulignant qu'il était bien réel et urgent pour la population, que le ministère et les hauts fonctionnaires comme vous se seraient empressés de s'attaquer au dossier en lui accordant toute la priorité. Je n'ai pas l'impression qu'on a saisi l'urgence de la situation.

Depuis notre dernière rencontre, au printemps dernier, à part faire allusion à notre première recommandation, vous n'avez rien fait de plus que mettre la dernière main au cadre de référence. Les choses ne progressent pas vite. Combien d'années vous faudra-t-il pour passer à l'action? Est-ce ainsi que le gouvernement ou le ministère des Affaires indiennes fonctionne? Est-ce que quelqu'un se soucie de la question? Avez-vous l'intention d'intervenir de façon importante? Ne voulez-vous pas employer des termes plus précis au lieu de dire qu'il y a eu des progrès, mais il reste encore beaucoup à faire? Ce genre de déclaration générale ne veut rien dire. Ce n'est pas ce que je souhaite entendre.

Vous êtes des hauts fonctionnaires. N'y a-t-il pas un sentiment d'urgence? Ne vous inquiétez-vous pas? Est-ce que vous ne brûlez pas d'impatience d'améliorer le sort des Autochtones dans tout le pays? Est-ce que vous ne faites que vous présenter au rapport et dire c'est ainsi que sont les choses, et il faudra des années et des années? Est-ce que vous autres faites une différence dans le système? Est-ce que ce que dit notre comité sénatorial, le travail que nous faisons, revêt une importance quelconque? Est-ce que cela fait une différence?

Mme Cram : Je pense que cela compte beaucoup, et c'est quelque chose qui, selon nous, est très important parce que cela influe sur la santé et la sécurité de personnes. Nous estimons avoir fait des progrès. Je demanderais à M. Brooks de vous donner des précisions. Nous avons fait des progrès au titre de la réduction du nombre de réseaux d'alimentation en eau à risque élevé, et aussi nous avons trouvé des opérateurs certifiés, et des remplaçants pour eux. Cela s'est fait en relativement peu d'années. Nous sommes bien heureux d'avoir pu faire des progrès. Est-ce que cela suffit? Je suis sûre que tout le monde dans cette pièce, nous compris, serait d'accord pour dire que nous voudrions beaucoup faire plus et avoir plus de résultats à annoncer. Je peux vous assurer que tous les fonctionnaires qui travaillent à ce dossier sont profondément résolus à réaliser ces améliorations. Je vais demander à M. Brooks de parler des progrès précis qui ont été réalisés.

M. Brooks : J'aimerais insister sur le fait que tout cela nous tient à cœur. Si notre présentation vous a donné l'impression contraire, c'est loin de la vérité. C'est important pour nous. Nous ne voulons pas voir de communautés, quelles qu'elles soient, souffrir de problèmes de santé. Je ne pense pas qu'aucun Canadien souhaite que quiconque ait des problèmes de santé et de sécurité.

Pour ce qui est des réseaux à haut risque, j'ai dit qu'il y en avait 193 quand le ministre Prentice a annoncé le plan d'action. Nous avions réduit ce nombre de 50 p. 100 en mars dernier. Il restait 97 réseaux, et il y a eu d'autres réductions. Actuellement, on est encore en train d'en déterminer le nombre pour le prochain rapport du ministre Strahl.

En ce qui concerne le nombre d'opérateurs de stations d'épuration des eaux qui suivent une formation, nous avons 1 140 opérateurs formés et 463 d'entre eux ont obtenu la certification de niveau 1, ce qui signifie qu'ils sont actuellement des opérateurs de stations de niveau 1.

Nous avons instauré des mesures de surveillance pour nous assurer que si le réseau d'une collectivité éprouve la moindre difficulté, une espèce de système de rechange ou complémentaire peut prendre la relève pour essayer d'éviter les problèmes d'eau qu'on a eus dans le passé.

Sénateur, je voudrais souligner que nous essayons de faire les choses un peu différemment. Mme Cram a parlé de certaines études qui ont été entreprises dans les régions rurales du Canada. Bien des Canadiens des régions rurales, dont je suis, ont des puits et des fosses septiques. Je vous dirai que mon système fonctionne extrêmement bien. Je fais tester l'eau une fois par année pour m'assurer qu'elle est bonne et qu'elle satisfait aux normes. Nous avons bien d'autres collectivités comparables, des collectivités qui ne sont pas des Premières nations, qui n'ont pas de système d'épuration des eaux. Ils ont des puits et des fosses septiques individuels. Nous nous intéressons à ces collectivités pour notre évaluation.

Vous avez dit que nous prenons bien du temps à établir le cadre de référence. Nous travaillons en étroite collaboration avec nos partenaires des Premières nations et d'autres intervenants dans le domaine, et nous nous interrogeons sur le meilleur type de solutions qui puisse être pour les collectivités en matière d'eau. Ce n'est pas pour nous qu'un cadre de référence fabriqué par les Affaires indiennes. Au bout de la vie utile de leur système actuel, quelle est la meilleure solution à adopter? Par les mesures que nous allons instaurer, nous espérons pouvoir fournir aux collectivités des solutions qui assureront une meilleure santé et plus de sécurité, et qu'elles pourront les adopter et s'y adapter.

Le sénateur Sibbeston : Dans votre déclaration, vous avez dit que le gouvernement tient compte du rapport du comité. Vous poursuivez en disant que le comité fait diverses suggestions. Comme c'est noble et aimable de votre part de prendre note de notre rapport et de considérer nos recommandations comme des suggestions! Vous en atténuez tellement la valeur; vous les rejetez du revers de la main. J'ai l'impression que vous ne nous prenez pas très au sérieux. Vous faites remarquer que nous vous présentons un rapport, et vous considérez que les recommandations que nous avons faites ne sont que des suggestions. C'est très faible. J'aimerais seulement voir plus de résolution, de sentiment d'urgence, de sentiment de dévouement, j'aimerais avoir l'impression que vous êtes prêts à consacrer votre vie aux peuples des Premières nations de notre pays.

Dans le Nord, quand je siégeais au gouvernement, un rapport comme celui-ci n'aurait jamais passé, parce qu'il manque de substance. Quand on veut faire quelque chose, on le fait tout simplement, mais vous n'en êtes encore qu'à peaufiner le cadre de référence. Combien d'années de plus vous faudra-t-il? Il me semble que vous occupez un poste assez élevé au ministère, ne pouvez-vous pas régler ce genre de chose avec plus de célérité et d'efficacité plutôt que de réfléchir pendant six mois ou plus aux modalités? C'est vraiment lamentable, c'est tellement peu. C'est tout à fait typique. Cela me fait vraiment penser à un gouvernement fédéral typique. C'est pourquoi les peuples des Premières nations de notre pays s'inquiètent, parce que rien ne se passe. Je ne sais pas ce que cela prendrait pour faire s'activer les gens comme vous, parce que je n'ai vraiment pas l'impression que vous soyez imprégnés du sentiment d'urgence. Je ne vois pas de détermination à faire quoi que ce soit. Vous ne faites que continuer comme toujours. « Ce ne sont que des Indiens. Nous allons nous en occuper, régler leur cas en temps et lieu. Mais vous savez, cela prendra des années. » J'ai l'impression que quand nous vous verrons dans six mois, ce sera pour nous entendre dire la même chose.

Le président : Je crois qu'ils entendent le message, sénateur. Je ne veux pas vous empêcher de parler, mais quatre autres sénateurs ont des questions à poser. Je comprends ce que vous dites. Est-ce que vous êtes prêts à répondre?

Mme Cram : Je suppose que tout ce que je peux vous dire, c'est que M. Brooks et moi-même saisissons très bien le sérieux de la question et nous essayons autant que possible de faire autant de progrès que possible. Je regrette que vous interprétiez nos propos comme un manque d'intérêt pour vos recommandations.

Le sénateur Sibbeston : Ce ne sont à vos yeux que des suggestions, et vous en avez pris note.

Mme Cram : La première recommandation est de faire une évaluation, et c'est ce que nous faisons. Je peux comprendre que vous trouviez que nous n'agissons pas assez vite.

La deuxième recommandation concerne la nécessité de consulter avant d'adopter une solution législative ou réglementaire. Je crois que ce que le comité a entendu au printemps dernier étaient des points de vue différents sur les meilleures solutions législatives et réglementaires.

Le président : Avez-vous le pouvoir, à votre niveau, d'apporter des changements qui feraient la différence?

Je ne doute pas de votre dévouement ou de votre ardeur à votre tâche. Pourrais-je néanmoins savoir si vous avez les moyens de faire une différence, ou vous faut-il passer par une voie hiérarchique qui, théoriquement, quel que soit l'enthousiasme qui vous habite, ne vous laisserait pas arriver à vos fins?

J'ai été ministre à Ottawa, et je sais combien ce processus peut être lourd. C'est pourquoi je pose cette question. Le fait est que nous avons tous des responsabilités, ici, mais est-ce que vous pourriez faire une véritable différence pour l'eau potable des Premières nations?

Mme Cram : Nous pouvons agir dans les paramètres de la Stratégie de gestion de l'eau des Premières nations, et c'est ce que nous avons fait. Pour adopter un nouveau modèle législatif, il faut l'autorité du cabinet. C'est pourquoi il faudrait que les ministres conviennent de ce modèle.

En ce qui concerne l'évaluation, tant que nous pouvons la faire avec les fonds attribués à la Stratégie de gestion de l'eau des Premières nations — nous recevrons ces fonds jusqu'à la fin de mars, puis nous en demanderons le renouvellement — nous pouvons faire l'évaluation. Nous devrons toutefois suivre le processus d'approvisionnement approprié pour entreprendre ce travail.

Le président : Aux yeux du public, nous avons un budget de 9,7 milliards de dollars pour le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Nous avons produit un rapport, et nous avons une obligation, en tant que parlementaires, et c'est ce qu'essaie de dire le sénateur Sibbeston. Si nous ne pouvons pas assurer une eau potable salubre aux collectivités des Premières nations, nous avons tout intérêt à nous dépêcher de régler le problème si nous avons encore 97 réseaux à haut risque. Un, c'est trop, ne serait-ce que si un seul enfant meurt à cause de l'insalubrité de l'eau potable. Je regrette vraiment, mais c'est notre position. Nous espérons que vous pouvez comprendre ce qui nous inquiète.

Le sénateur Peterson : J'aimerais que vous expliquiez un peu la vérification de systèmes. Je suppose que le rapport du sous-comité sénatorial, le rapport du groupe d'experts, est mis à la disposition de la personne qui est chargée d'établir ce cadre de référence. Je suppose qu'elle examine aussi les normes réglementaires, de même que la capacité physique et humaine de les appliquer.

J'aimerais bien qu'à la fin de la période de cette vérification, nous puissions déterminer les défis qui se posent à nous, pour que le plan de travail puisse aller de l'avant. Est-ce que ce serait possible?

M. Brooks : Ce que nous attendons de cette évaluation est une partie de la raison qui fait que le cadre de référence prend un peu de temps. Tout d'abord, nous travaillons en étroite collaboration avec bien des intervenants des Premières nations. Nous nous devons de ne pas l'oublier parce que nous travaillons avec des collectivités des Premières nations et il est certain que l'enjeu est d'envergure, pour elles.

Nous allons examiner toutes les approches possibles, y compris la Stratégie de gestion de l'eau des Premières nations, qui sont les normes non réglementaires que nous appliquons au ministère. Nous allons aussi examiner les montants alloués à chaque collectivité pour le fonctionnement et l'entretien des réseaux, la formation des opérateurs, les salaires et ce genre de chose.

Nous vérifions aussi les systèmes. Dans quelle mesure fonctionnent-ils bien? Il arrive bien, dans certaines collectivités, que certains membres de la Première nation n'aiment pas le goût du chlore, alors ils débranchent le dispositif de chloration de leur système. Cela peut entraîner la dégradation de l'eau et des problèmes de chloroforme. C'est le genre de choses que nous pourrons remarquer en faisant une évaluation complète et une vérification de tous les systèmes de traitement des eaux usées.

J'aimerais souligner que nous n'allons pas seulement examiner les systèmes des collectivités, mais aussi certains systèmes de particuliers — les puits privés dans les collectivités. Nous allons examiner les études d'hydrologie qui sont faites dans les diverses collectivités en vue de formuler les meilleures solutions possibles pour fournir une eau propre et salubre à tous les citoyens.

Le sénateur Peterson : Combien de temps, d'après vous, devrait prendre cette vérification?

M. Brooks : Environ 640 collectivités ont une espèce quelconque de réseau d'alimentation en eau, y compris les puits et les systèmes d'épuration privés. Quand les groupes d'ingénieurs reviendront, ils devront nous dire combien de temps, selon eux, cela prendra. Nous aimerions en avoir terminé en 18 mois.

Le sénateur Peterson : La dernière fois que nous vous avons vu, le Programme de formation itinérant posait un gros problème. Nous nous sommes fait dire qu'il n'y avait pas de fonds disponibles pour ce programme, ce qui nous amène à demander pourquoi vous instaurez des normes réglementaires quand elles ne peuvent être respectées. Ils n'ont pas de gens sur place qui comprennent la nature des problèmes.

Est-ce que votre rapport traitera de cette question? Vous dites que vous avez offert une formation et la certification. Avez-vous trouvé de l'argent pour régler ce problème?

M. Brooks : Avec le plan d'action, nous avons réservé des fonds pour améliorer les activités de formation, ainsi que les activités de formation itinérantes. Nous avons entrepris une étude pour voir combien d'opérateurs itinérants sont nécessaires pour faire en sorte qu'il y en ait assez dans les collectivités; nous cherchons à atteindre une proportion de six pour un.

Ainsi, nous estimons devoir embaucher de 30 à 40 opérateurs itinérants, selon la proximité des collectivités. Sur ce plan, nous allons de l'avant avec des mesures de perfectionnement du système.

Le sénateur Peterson : Ils sont la clé de tout le problème. On peut avoir tous les règlements qu'on veut, mais sans les gens pour les appliquer, le système ne fonctionnera pas.

M. Brooks : Nous en convenons tout à fait. La dernière fois que nous nous sommes rencontrés — et peut-être n'était-ce pas arrivé à ce moment-là — les opérateurs itinérants étaient des organisations semi-autonomes de personnes dans tout le pays. Nous les avons réunis pour échanger des pratiques exemplaires et assurer la cohésion à l'échelle nationale.

Le sénateur Gustafson : J'ai bien aimé vos commentaires sur l'approvisionnement en eau. Est-ce que l'accès à l'eau est un gros problème? Est-ce que vous utilisez des puits? Je suppose que cela varie d'un endroit à l'autre.

M. Brooks : La politique actuelle, c'est que nous allons aller de l'avant avec le changement — et la réalisation de ce changement relève de notre autorité — depuis le milieu des années 1980. En vertu de cette politique, nous ne fournissons pas de financement pour les systèmes qui ont moins de cinq connections. S'il y a un puits communautaire qui a au moins cinq connexions, le ministère fournit un financement, mais pas pour les puits privés.

Il y a environ 14 000 puits privés dans les collectivités des Premières nations dans tout le pays, mais ils ont été financés soit par les bandes elles-mêmes, ou par les particuliers. En conséquence, dans certains cas, les puits n'ont pas été fabriqués comme ils l'auraient dû. Ils n'ont pas toujours été creusés assez profond pour atteindre une bonne nappe aquifère; peut-être qu'aussitôt qu'ils atteignaient l'eau, ils arrêtaient de creuser à cause du manque de fonds. Nous cherchons à essayer de changer cela pour fournir un appui pour les puits et les fosses septiques privés.

Le sénateur Gustafson : Est-ce que ce genre d'approvisionnement en eau pose des problèmes de santé actuellement? Est-ce que vous avez eu ce genre de problème?

M. Brooks : Nous avons entendu parler de puits privés qui posaient des problèmes. Divers cas ont été signalés dans quelques collectivités. Il y en a eu un au Yukon, il y a environ quatre semaines. Le ministère a travaillé avec la collectivité, qui est une Première nation autogouvernée. Nous leur avons offert des conseils techniques, avec le gouvernement territorial du Yukon.

Le sénateur Gustafson : L'attitude des collectivités est très importante. Nous avons eu des problèmes d'eau et d'égouts sans fin dans la petite ville où je vis. Les ingénieurs veulent venir de Regina et veulent qu'on leur donne plus d'argent pour analyser la situation qu'il n'en faudrait pour régler le problème. Ils sont censés avoir réglé le problème, et pourtant le système ne fonctionne toujours pas. N'importe quelle personne pratique aurait pu construire un réservoir, y brancher une grosse pompe, et pomper les eaux usées. Cependant, il devient difficile d'être pratique.

Il me semble que ce devrait être un défi d'importance pour le ministère. Est-ce que vous avez des fournisseurs habituels qui sont fidèles au ministère et vont d'un problème à l'autre? Comment cela fonctionne-t-il? Est-ce que c'est laissé au gré de la collectivité?

M. Brooks : En fait, c'est à la collectivité d'y voir. Les collectivités elles-mêmes concluent les contrats pour les systèmes. Le ministère essaie d'offrir des conseils techniques quand il le peut. Le problème, c'est que nous avons un effectif d'ingénieurs et, comme tout autre ministère, nous avons une pénurie de ces ingénieurs. Nous offrons autant que possible du soutien technique. En général, tout est fait en sous-traitance.

En ce qui concerne la surveillance des collectivités, j'ai parlé du numéro 1-800. Nous avons nous-mêmes conclu un contrat pour ces activités pour nous assurer que le financement existe et que les activités sont réalisées.

Le sénateur Hubley : Je vous souhaite la bienvenue à tous les deux ce soir. J'ai bien aimé voir la quantité de projets d'entretien préventif qui sont en œuvre. Cela me dit que vous allez dans la bonne direction, et que vous faites des progrès.

J'aimerais que vous m'aidiez avec les chiffres. En mars, le premier rapport d'étape — je crois, monsieur Brooks, que vous en avez parlé — déclarait qu'il y avait 193 réseaux d'alimentation en eau à haut risque dans les réserves, et ce chiffre était tombé à 97 à ce moment-là. Combien de temps, environ, cela a-t-il pris? Est-ce que cette réduction a été enregistrée au début du plan d'action?

M. Brooks : Oui. Il a fallu environ un an pour réduire ce nombre.

Le sénateur Hubley : Une question a été posée sur le nombre de réseaux d'alimentation en eau à risque élevé, et vous avez dit que le ministre attendait peut-être des chiffres. Pouvez-vous nous dire s'il est possible que le nombre ait augmenté encore? Ou est-ce qu'il aurait diminué d'autant?

M. Brooks : J'aimerais bien vous dire que oui, mais il n'y a pas eu de baisse radicale. Nous avons toutefois observé une réduction importante.

Le sénateur Hubley : Pouvez-vous me donner une idée de ce que cela représenterait en pourcentage ou en chiffre? Je n'essaie pas de critiquer après coup le rapport du ministre ou son rapport d'étape.

M. Brooks : Le ministre Prentice a indiqué dans son rapport de mars 2007 qu'il voulait réduire encore de 50 p. 100 les réseaux à risque élevé, et c'est ce que nous visons cette année. J'espère même que nous dépasserons cet objectif au cours de l'exercice financier actuel. En fait, nous essayons de faire passer le nombre de 97 à 49, si possible, d'ici à la fin de l'exercice financier. Nous nous efforçons d'améliorer ce résultat.

Le sénateur Hubley : Approchez-vous de cet objectif?

M. Brooks : Je crois que nous réalisons des progrès importants.

Le sénateur Hubley : Je vais en rester là, mais j'espère que nous réduirons le nombre des réseaux à risque élevé. Les chiffres sont importants, car ils montrent que nous prenons la question au sérieux. Je comprends que certaines situations sont faciles à régler au début, mais je suis sûre que d'autres le sont moins pour vous.

Lorsque vous parlez d'un réseau d'eau potable à risque élevé dans les réserves, s'agit-il d'un système communautaire ou individuel? Peut-on avoir dix différents systèmes d'alimentation en eau dans une seule collectivité?

M. Brooks : On pourrait facilement en avoir trois, quatre ou dix. Il y a parfois des puits communautaires qui peuvent desservir dix foyers, ce qui serait considéré comme un réseau.

Lorsque nous parlons d'un réseau à risque élevé, il s'agit bel et bien d'un réseau. En théorie, une collectivité pourrait avoir dix réseaux pour ses diverses banlieues, mais un seul pourrait représenter un risque élevé.

Le sénateur Hubley : De toute évidence, des collectivités ont été retirées de la liste des collectivités à risque élevé. Certaines d'entre elles ont-elles été réinscrites à la liste?

M. Brooks : Je vais devoir vérifier. Pour autant que je sache, on a eu une collectivité dont le risque est passé de moyen à élevé. J'ignore s'il s'agissait d'une collectivité dont le risque avait été réduit. Je serai heureux de vous fournir ces renseignements.

Le sénateur Hubley : Ces renseignements pourraient intéresser le comité. Je suis sûre que certaines collectivités seraient réinscrites à la liste. Avez-vous des exemples d'une telle situation? Peut-être que le système fonctionne si bien que cela ne se produit pas.

Croyez-vous que nous adoptons la bonne approche? Faisons-nous les choses comme il faut?

M. Brooks : Je ne comprends pas ce que vous voulez dire par « approche ».

Le sénateur Hubley : D'après votre expérience et les cas de réussite que vous avez constatés, pensez-vous que nous agissons correctement? Croyez-vous que des fonds supplémentaires pourraient accélérer le processus et nous aider à atteindre une norme acceptable en matière de qualité de l'eau?

Mme Cram : Je crois que, comme M. Brooks l'a expliqué tout à l'heure, nous voulons voir, dans le cadre de notre évaluation, s'il y a d'autres options susceptibles de répondre aux besoins. Dans bien des cas, nous devons bâtir de grosses usines. Nous reconnaissons qu'il faut beaucoup de capacité et d'argent pour exploiter de grosses usines, et ce n'est peut-être pas toujours la meilleure solution.

Dans le cadre de notre examen, nous voulons repérer les moyens les plus rentables : ce qui donne les meilleurs résultats avec la capacité existante et ce qui constitue la meilleure solution pour une collectivité donnée. Nous voulons tenir compte de ces facteurs et examiner l'idée des puits et des fosses septiques qui, dans certains cas, pourraient s'avérer de bonnes options au lieu d'implanter une grosse usine dans une petite collectivité qui n'aura pas la capacité nécessaire pour l'exploiter.

Le sénateur Hubley : S'agissant des réseaux, avons-nous le choix? Y a-t-il des programmes ailleurs dans le monde qui utilisent différentes technologies? S'agit-il d'un processus continu qui existe dans votre ministère pour vous amener à chercher sans cesse une meilleure façon de faire?

M. Brooks : Oui, c'est le cas. En matière de recherche, nous travaillons, par exemple, avec l'Agence canadienne de développement international. J'ai travaillé avec l'ACDI il y a bien des années pour trouver des solutions d'alimentation en eau pour les pays en développement. Des systèmes utilisés à l'étranger peuvent être adaptés à bon nombre des collectivités au pays à un coût moindre, ce qui explique en partie pourquoi nous essayons de mettre davantage l'accent sur les puits individuels. Nous cherchons à accroître la reddition de comptes et la responsabilité des divers propriétaires d'habitations.

Le sénateur Hubley : Où en sommes-nous pour ce qui est de prendre certaines des grandes décisions sur la façon de résoudre le problème?

M. Brooks : Je ne sais pas si les décisions résoudront tous les problèmes, comme Mme Cram l'a souligné. Les puits et les fosses septiques ne constituent pas la solution appropriée pour toutes les collectivités. Nous visons à établir des réseaux de petite taille à la mesure des besoins de la collectivité.

Nous travaillons actuellement à l'élaboration de la politique, ainsi qu'à la préparation d'une norme pour la mise en service et le déclassement des puits individuels. Dès que la politique sera modifiée, nous veillerons à ce qu'elle soit accompagnée d'une norme quelconque pour permettre aux collectivités et aux particuliers de comprendre les attentes.

Le sénateur Dallaire : J'aimerais d'abord signaler que la courbe d'apprentissage étant plutôt raide pour moi ici, et comme je suis une personne visuelle, je vais demander à la greffière de fournir du matériel comme des cartes et des organigrammes. Deuxièmement, j'espère changer ma réaction initiale, d'après mon expérience au sein du Comité sénatorial permanent des droits de la personne, à savoir qu'Affaires indiennes et du Nord canadien est paternaliste et rétrograde. J'espère apprendre si c'est vraiment l'attitude ou la façon de procéder de cette organisation et de sa culture.

Mme Cram a indiqué qu'AINC est là pour aider les Premières nations. S'agit-il d'un mandat d'AINC en bonne et due forme ou y a-t-il une responsabilité législative plus précise?

Mme Cram : Des lois régissent notre travail. La Loi sur les Indiens est la principale mesure législative qui porte sur les réserves. En outre, chaque Première nation autonome, de même que celles qui ont négocié des traités modernes sont régies par des lois.

Lorsque nous utilisons des termes comme « aider », c'est en partie en raison du changement d'orientation qui est survenu à Affaires indiennes et du Nord Canada avec le temps. Avant les années 1980, le ministère exécutait des programmes. Dans les années 1980, il y a eu le transfert des responsabilités. Le gouvernement a répondu aux demandes des Premières nations qui affirmaient pouvoir faire un meilleur travail qu'AINC en matière de prestation de services à leurs commettants. La prestation des services est donc passée du ministère aux gouvernements des Premières nations et à d'autres organisations.

Dans bien des cas, ce que nous faisons vraiment, c'est fournir du financement. Environ 85 p. 100 du budget du ministère sert à accorder des fonds aux Premières nations et à d'autres organisations. Dans certains cas, le ministère s'occupera de certaines activités. Par exemple, les gouvernements des Premières nations ont un nombre suffisant d'opérateurs d'usines de traitement de l'eau parmi leur personnel. Toutefois, comme M. Brooks l'a indiqué, on a fourni de l'aide supplémentaire pour accroître le nombre des opérateurs. Lorsque nous reconnaissons ou constatons une lacune, le ministère peut conclure des contrats afin de fournir ces services aux collectivités qui ne sont pas en mesure de le faire toutes seules. Nous le ferons de façon provisoire.

Le sénateur Dallaire : Vous avez dit que lorsqu'une lacune est constatée, vous pouvez intervenir en essayant d'offrir de l'aide. Dans quelle mesure AINC peut-il être tenu responsable des problèmes? Interprétez-vous cela comme la mise en œuvre d'une nouvelle méthodologie dont vous avez conservé la responsabilité ou comme le simple transfert de la prestation de service alors que la responsabilité relève toujours du ministère?

Mme Cram : Nous dirions que notre ministère est responsable. Le Parlement octroie à Affaires indiennes et du Nord canadien des fonds pour faire certaines choses. Notre ministre doit rendre compte de ces dépenses au Parlement.

Vous avez souligné une tâche difficile, en ce sens que nous ne sommes pas le fournisseur final, mais que nous utilisons certains moyens, comme des instruments de financement, pour remplir l'obligation de rendre compte des dépenses. Les fonds sont accordés aux gouvernements et aux organisations des Premières nations, qui sont tenus de rendre compte au ministère de la façon dont ces fonds sont dépensés.

Avec le temps, nous voulons que les gouvernements des Premières nations rendent compte à leurs commettants. À l'heure actuelle, ils effectuent une vérification annuelle, mais nous aimerions un partage des responsabilités, dans le cadre duquel les gouvernements des Premières nations rendent compte à leurs citoyens, tandis que le ministère et le ministre rendent compte au Parlement.

Dans le cas des gouvernements des Premières nations autonomes, l'obligation de rendre compte est déjà transférée.

Le sénateur Dallaire : Toutefois, ils ne s'adressent pas directement au gouvernement fédéral, mais plutôt à AINC.

Mme Cram : Ils reçoivent habituellement une subvention.

Le sénateur Dallaire : Nous savons que le budget pour 2008-2009 n'est pas encore approuvé. Toutefois, nous savons également qu'il existe un programme quinquennal. S'agit-il de 1,6 milliard de dollars ou de 600 millions de dollars?

Mme Cram : Excusez-moi, c'est 1,6 milliard de dollars. Un montant de 1 milliard de dollars est prévu dans le budget de services votés d'AINC, alors que le montant de 600 millions de dollars est associé à la Stratégie de gestion de l'eau des Premières nations; c'est pour ce dernier élément que nous présenterons une demande de renouvellement le 31 mars prochain.

Le sénateur Dallaire : Il s'agissait de nouveaux fonds en 2003, mais ils n'ont pas été intégrés dans le budget de services votés lorsque vous les avez reçus. Est-ce toujours un projet qui doit être approuvé par le Conseil du Trésor?

Mme Cram : Oui.

Le sénateur Dallaire : Indique-t-on dans une proposition pour 2008-2009 que ce montant couvre les cinq prochaines années? Cherchez-vous à obtenir 800 millions de dollars?

Mme Cram : Nous devons présenter un mémoire au Cabinet et, par la suite, nous devons voir si cela figurera au budget. Nous travaillons toujours à l'élaboration de la proposition.

Le sénateur Dallaire : N'avez-vous pas cet argent?

Mme Cram : Non, le montant supplémentaire de 600 millions de dollars viendra à terme le 31 mars 2008. Nous travaillons maintenant à une nouvelle proposition de reconduction. Malheureusement, je ne peux pas vous dire combien nous solliciterons.

Le sénateur Dallaire : Il s'agit d'un projet que vous voulez poursuivre et cette somme n'est pas prévue dans le budget de services votés. Qui plus est, vous n'avez pas, dans votre limite de financement, un billet à ordre dans le plan global. Les 600 millions de dollars seront-ils inclus dans la demande de financement générale du ministère ou feront-ils partie de quelque chose de nouveau qui sera présenté au ministre?

Mme Cram : Ce sera quelque chose de nouveau. Il s'agit d'un programme par opposition à un projet. La durée des programmes qui doivent être renouvelés varie entre deux et cinq ans. Nous avons un programme qui est sur le point d'être renouvelé et sa période quinquennale prend fin le 31 mars 2008. Chaque ministère doit présenter des propositions pour le renouvellement de ces programmes. Nous sommes à élaborer une telle proposition que nous présenterons au ministre.

Le sénateur Dallaire : J'ai consacré quatre ans de ma carrière à la gestion de projets et aux acquisitions d'immobilisations au MDN. Cela ressemble à un grand projet de l'État. Je me demande seulement à quel point votre « stratégie » est développée pour défendre ce programme qui doit être renouvelé. Nous sommes au mois de novembre et le budget doit être présenté en février; on a probablement demandé en septembre de déposer les propositions budgétaires. Où en êtes-vous rendus avec cette demande de 600 millions de dollars, ou allez-vous demander plus?

Mme Cram : Je dirais que nous sommes avancés pour ce qui est de l'élaboration des propositions. En règle générale, le délai visé par les ministères, c'est de présenter une proposition au Cabinet avant les vacances de Noël dans l'espoir qu'elle soit incluse dans un budget subséquent. Notre objectif consiste à déposer notre proposition au Cabinet avant Noël.

Le sénateur Dallaire : Avez-vous préparé un mémoire au Cabinet?

Mme Cram : Nous y travaillons.

Le sénateur Dallaire : Cela semble un peu tard dans l'exercice, particulièrement si vous dites que la stratégie est toujours en évolution. Vous cherchez encore de nouvelles méthodologies pour, en fait, fournir cette capacité. Il me semble que vous êtes un peu en retard, mais je ne connais pas votre ministère aussi bien que les autres.

J'ai une question sur la sous-traitance et une préoccupation concernant le savoir-faire et la formation des gens, et cetera. Pourquoi l'ensemble du processus n'est-il pas confié en sous-traitance dans le cadre d'un mécanisme global à l'échelle nationale avec, peut-être, des ententes locales particulières pour que nous puissions — ou que vous puissiez — tenir les entrepreneurs responsables?

Y a-t-il une méthodologie nationale relativement à la sous-traitance pour assurer la surveillance, ou existe-t-il un contrat pour chacun de ces 197 systèmes ou autres problèmes?

M. Brooks : Il n'y a pas d'approche globale. Comme nous travaillons avec nos intervenants des Premières nations, il existe différentes approches. En Alberta, un groupe d'Autochtones offre des services d'ingénierie. Nous avons collaboré avec eux. Nous avons fourni du financement à ce groupe, qui a travaillé avec le Programme de formation itinérante. Comme je l'ai déjà mentionné, le Programme de formation itinérante était un organisme indépendant qui n'a pas été affilié à une organisation nationale. Nous nous efforçons de nous engager dans cette voie avec le Programme de formation itinérante. Diverses organisations offrent la formation : en Ontario, il y a un centre de formation près de Walkerton et, à Edmonton, le Northern Alberta Institute of Technology.

Le sénateur Dallaire : Si vous faites appel à des sous-traitants, ils devraient offrir la formation. Sous-traitez-vous des opérations clés en main ou seulement des parties, auquel cas vous devez vous occuper d'autres choses, comme offrir une formation ou un programme d'urgence? La sous-traitance couvre-t-elle tout cela, ou devez-vous combler les trous?

M. Brooks : Essentiellement, la majeure partie du financement, comme l'a expliqué Mme Cram, a été transférée aux collectivités des Premières nations. Dans le cas qui nous occupe, un grand nombre des personnes sont responsables de leur propre formation. On leur offre du financement pour leur formation.

Le sénateur Dallaire : Comment pouvons-nous vous demander de rendre des comptes? Il y a un petit problème ici. Nous ne pouvons pas les crucifier si c'est à l'échelon local. Reçoivent-elles suffisamment d'argent pour faire le travail? Se font-elles avoir par les sous-traitants et devraient-elles peut-être frapper à d'autres portes? Là encore, cela fait partie de mon parcours, et je ne veux pas trop pousser la limite.

J'aimerais aborder la question des provinces et des Premières nations. Pourquoi voudrions-nous même discuter avec les provinces de leurs préoccupations concernant les Premières nations? Pourquoi devrions-nous nous inquiéter de respecter des normes ou des exigences provinciales sur l'eau, alors que nous discutons fondamentalement d'une responsabilité fédérale à l'égard de gens qui sollicitent l'aide du gouvernement fédéral pour se doter de capacités? Nous avons un ministère qui en est responsable. Quel rôle la province joue-t-elle dans cet exercice?

Mme Cram : C'est une excellente question concernant la responsabilité provinciale. Je vais parler plus précisément du rôle de la province par rapport à l'eau.

Premièrement, il est important que les normes sur l'eau dans les réserves soient compatibles avec celles à l'extérieur des réserves, car l'eau ne reste pas à un seul endroit, mais se déplace. Il faut de l'uniformité. Deuxièmement, dans un certain nombre de cas, les Premières nations s'approvisionnent en eau dans les réseaux d'aqueduc municipaux avoisinants. Pour répondre aux besoins en eau d'une collectivité, il faut se poser la question suivante : existe-t-il une capacité dans la collectivité voisine? Les Premières nations concluent ensuite des ententes de services avec la municipalité pour qu'elle les approvisionne en eau. Vous voudriez que le même type de norme soit en place dans cette municipalité que dans la réserve. Vous ne voudriez pas des normes différentes pour analyser l'eau, par exemple.

Le sénateur Dallaire : Peut-être, si vous pouvez fournir quelque chose de mieux que la collectivité qui n'a pas l'assiette fiscale nécessaire, vous voudrez évidemment le faire. Si c'est pour le mieux et non pas pour le pire, pourquoi pas? Si nous avons la capacité d'offrir quelque chose de mieux, pourquoi ne pas le faire? Pourquoi ne pas aussi assurer une protection des cours d'eau plus grande que la province ou la municipalité?

Mme Cram : C'est possible, mais nous ne voudrions pas empêcher une collectivité des Premières nations d'acheter son eau d'une municipalité parce qu'elle n'a pas respecté une norme fédérale que nous jugeons plus élevée que la norme provinciale.

Le sénateur Dallaire : C'est peut-être un scénario extrême, mais je me méfie beaucoup des ententes provinciales conclues au sein des structures fédérales. Je ne suis pas convaincu que l'interaction fédérale-provinciale soit nécessairement constructive — non seulement pour l'eau, mais également pour les programmes sociaux. D'une part, elles disent que le gouvernement fédéral s'occupe d'elles et, d'autre part, elles soutiennent qu'il ne peut pas intervenir à cause d'une norme provinciale.

Je serais beaucoup plus intéressé à travailler avec le fédéral. Nous nous en chargerons et verrons comment le provincial progresse sans être limités par cela. C'est une toile de fond à ma question.

Mme Cram : J'aimerais utiliser l'exemple de l'éducation pour expliquer pourquoi il est important de travailler étroitement avec les provinces. Environ 50 p. 100 des enfants qui vivent habituellement dans une réserve fréquentent une école située hors-réserve. C'est fréquent au niveau secondaire, car un grand nombre de collectivités des Premières nations sont trop petites pour avoir une école secondaire. Si elles sont situées dans une région très isolée, elles ont probablement une école offrant la maternelle jusqu'à la 12e année. Toutefois, si elles sont plus près des régions urbaines, les enfants iront normalement à une école secondaire provinciale. Par conséquent, 50 p. 100 des enfants fréquentent des écoles provinciales. Nous devons travailler très étroitement avec la province parce qu'au bout du compte, nous voulons que les diplômes d'études secondaires obtenus par les enfants dans une école située dans une réserve ou une école provinciale soient reconnus par la province pour qu'ils puissent être admis dans des établissements postsecondaires. Je cite cet exemple uniquement pour illustrer pourquoi nous devons travailler étroitement avec les provinces.

Le sénateur Dallaire : Je suis d'accord avec l'idée de « collaboration », et cetera, mais pas forcément avec celle de « subordination », ou d'être à leur merci. Si cela fait notre affaire, tant mieux. Autrement, nous devrions régler le problème nous-mêmes. À mon avis, quand nous essayons de trop collaborer avec les provinces, nous avons tendance à nous abaisser à une norme qui n'est peut-être pas adéquate, et nous ferions mieux d'investir davantage. Bref, 9,7 milliards de dollars, en bon québécois, ne sont pas « les gros chars » pour un million de personnes dans un pays que l'on maintient pratiquement comme à l'époque coloniale. Je travaillerai certainement à ce dossier.

Le président : C'est une bonne nouvelle. Vous obtiendrez peut-être plus de financement.

Monsieur Brooks, vous avez dit que vous êtes en train de faire une évaluation.

M. Brooks : Nous mettons la dernière main au cadre de référence.

Le président : La première recommandation du rapport du comité demandait à AINC d'effectuer une vérification professionnelle de l'infrastructure du service d'approvisionnement en eau. Avez-vous fait quoi que ce soit en ce sens?

M. Brooks : C'est le cadre de référence dont j'ai parlé.

Le président : C'est lié à l'évaluation.

M. Brooks : Oui. Si vous le permettez, sénateur, notre division chargée de faire rapport sur l'état des ressources inspecte le tiers des systèmes chaque année. Nous examinons en profondeur les ressources, en ne faisant pas que vérifier le fonctionnement et l'entretien des systèmes, mais aussi en tentant de trouver la bonne solution pour la collectivité.

Le président : Vous réalisez des progrès, mais d'après ce que disent mes collègues ce soir, il doit y avoir un sentiment d'urgence. Si, dans l'un des pays les plus riches au monde qui génère de la richesse à un rythme phénoménal, nous ne pouvons pas approvisionner tous les résidents en eau potable, il y a un problème. Je ne peux pas dormir sur mes deux oreilles tout en siégeant à un comité faisant partie du système fédéral qui a une responsabilité fiduciaire à l'égard des Premières nations. Tout le monde devrait avoir accès à de l'eau potable, que ce soit les Premières nations ou les touristes. Tout le monde a le droit d'avoir accès à de l'eau potable dans un pays riche comme le nôtre.

Mme Cram a parlé du financement suffisant pour cette initiative. On ne peut pas se permettre un autre Kashechewan. Peu importe qui est au pouvoir, que ce soit le NPD, le Bloc, les conservateurs ou les libéraux, un incident de ce genre est inacceptable au Canada. J'essaie de transmettre le message d'urgence que le sénateur Sibbeston vous a transmis. Je ne peux pas croire que nous ne soyons pas plus avancés dans cette évaluation. Vous n'êtes peut-être pas les bonnes personnes à qui nous devons nous adresser, mais j'espère que vous l'êtes. Comme l'a dit le sénateur Dallaire, le ministère est complexe et les questions sont si disséminées que je ne peux qu'espérer que notre message passe. Quand vous terminerez l'évaluation, je vous demanderais d'en faire parvenir une copie au comité le plus tôt possible.

Le sénateur Peterson : Tout d'abord, je ne crois pas que nous parlions de l'évaluation, mais plutôt du cadre de référence et il faudra encore 18 mois pour l'achever. Est-ce exact?

M. Brooks : Non.

Le sénateur Peterson : Quand pensez-vous le terminer?

M. Brooks : Au cours des prochaines semaines. Comme il s'agira d'un appel d'offres public, nous devons suivre une procédure.

Le sénateur Peterson : Par la suite, les choses commenceront à bouger. Entre-temps, faites-vous de la gestion des crises en cas de problème? Devez-vous intervenir et le régler avant la publication du rapport?

M. Brooks : En raison de la surveillance qui a été mise en place, les cas de gestion des crises ont beaucoup diminué. Notre ministère intervient si un problème touchant l'eau survient dans une collectivité. Mme Cram a démontré que la surveillance a donné d'assez bons résultats.

Le sénateur Peterson : Plutôt que d'attendre 18 mois, le comité pourrait-il recevoir un rapport d'étape tous les six mois pour connaître l'évolution du dossier?

M. Brooks : Nous serions plus qu'heureux de le préciser dans le cadre de référence.

Le sénateur Dallaire : En raison du problème lié à l'eau et de nombreux autres facteurs, une loi sur l'eau potable pour les Premières nations garantirait-elle votre financement de base? Serait-ce plus constructif que de travailler à un programme annuel quinquennal, qui peut ou non réussir à régler cette facette du problème?

Mme Cram : La loi serait une mesure constructive. Quant à savoir si les fonds seront garantis, cela dépendra du libellé de la loi. Une solution serait d'énoncer les conditions dans la loi; ce pourrait être une façon de vous assurer de recevoir le financement adéquat.

Le sénateur Dallaire : L'a-t-on proposé au ministre? La Direction générale des politiques de votre ministère examine- t-elle cette possibilité?

Mme Cram : Nous ne sommes pas rendus à ce point concernant la loi parce que, conformément aux recommandations du rapport, nous étudions d'abord la question de consultation.

Le président : Je remercie les témoins d'avoir comparu ce soir et les félicite d'avoir défendu avec fermeté leur position dans cette période difficile, car la question aurait pu être explosive. Il ne fait aucun doute que notre comité prend la question au sérieux. Notre message à l'intention du ministère des Affaires indiennes et du Nord Canada est le suivant : nous devons prendre les bouchées doubles pour arriver à des résultats le plus tôt possible.

Encore une fois, je vous remercie de votre patience et de votre compréhension.

La séance est levée.


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