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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce

Fascicule 10 - Témoignages du 5 mars 2008


OTTAWA, le mercredi 5 mars 2008

Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce se réunit aujourd'hui à 16 h 15 pour étudier la situation actuelle du système financier canadien et international (Loi sur les liquidations et les restructurations).

Le sénateur W. David Angus (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bonjour à tous, mesdames et messieurs les sénateurs, les témoins, les téléspectateurs de la chaîne CPA et les internautes.

Ceci est une réunion du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce. Nous poursuivons notre étude des questions touchant aux faillites et aux insolvabilités qui découlent de l'examen des projets de loi C-55 et C-12.

En procédant à l'étude de la législation en la matière, soit la Loi sur la faillite et la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, il nous est apparu que d'autres textes régissent les insolvabilités. En vérité, ce sont les témoins présents aujourd'hui qui nous l'ont fait remarquer. Nous sommes donc très heureux d'accueillir M. Paul Kovacs, président et chef de la direction de la Société d'indemnisation en matière d'assurances IARD, la SIMA, et M. Michael Hale, vice-président directeur d'Assuris.

Nous avons également parmi nous des fonctionnaires du ministère des Finances du Canada qui vont écouter votre exposé en même temps que nous. Nous allons donc tous en apprendre davantage au sujet de la Loi sur les liquidations et les restructurations.

Avant d'inviter nos témoins à débuter leurs exposés, j'aimerais vous présenter mes collègues en commençant par le vice-président de ce comité, le sénateur Goldstein, de Montréal, puis le sénateur Jaffer, de Vancouver, le sénateur Ringuette, du Nouveau-Brunswick et le sénateur Harb, de l'Ontario, et plus précisément de la région d'Ottawa.

Comme une cérémonie se déroule actuellement à l'édifice du Centre pour fêter le départ en retraite de l'huissier de la verge noire, M. Christopher, d'autres sénateurs devraient se joindre à nous après cette cérémonie.

Paul Kovacs, président et chef de la direction, Société d'indemnisation en matière d'assurances IARD (SIMA) : Merci beaucoup et bonjour à tous. Cette discussion m'intéresse et je vais, dans le cadre de l'examen plus vaste auquel vous vous livrez, vous entretenir de la Loi sur les liquidations et les restructurations.

Lors d'une séance récente, le sénateur Goldstein a demandé à l'Insolvency Institute of Canada si, dans le cadre de l'examen du cadre législatif du Canada sur l'insolvabilité auquel vous procédez, vous devriez analyser la Loi sur les liquidations et les restructurations. Je crois que la réponse est oui, et j'aimerais prendre quelques instants pour vous faire part de quelques motifs d'intégrer cette loi à votre examen.

Les trois éléments de la législation que sont la Loi sur les faillites et l'insolvabilité, la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies et la Loi sur les liquidations et les restructurations instaurent le cadre législatif qui régit les insolvabilités au Canada. La Loi sur les liquidations et les restructurations traite de l'insolvabilité des banques, des assureurs et d'autres institutions financières.

Notre organisation, la Société d'indemnisation en matière d'assurances IARD — la SIMA — est la caisse de garantie qui, en cas d'insolvabilité, assure une protection aux titulaires de polices d'assurance habitation, automobile et entreprise. Cette loi constitue notre cadre législatif. Tout ce que nous faisons dans l'intérêt des consommateurs découle de ce texte.

La première société d'assurance-bien du Canada — Phoenix Assurance — a été fondée il y a plus de 200 ans à Montréal. Depuis cette époque, nous avons vu un grand nombre de compagnies d'assurances arriver sur le marché et le quitter. Il est arrivé que leur sortie soit involontaire et, lorsque cela s'est produit, ce sont les dispositions de la Loi sur les liquidations et les restructurations qui se sont appliquées.

La SIMA compte plus de 200 assureurs membres. Nous n'avons pas assisté à beaucoup de faillites de compagnie d'assurances, mais c'est là un phénomène normal dans un marché au fonctionnement sain. Cela se produit à l'occasion et cette loi s'avère alors un élément important de l'arsenal dont nous disposons pour protéger les Canadiens.

Le président : Monsieur Kovacs, vous m'avez montré l'autre jour un document résumant les divers cas d'insolvabilité de compagnies d'assurances au cours des dernières années. Avez-vous remis ce document au greffier du comité ou est-il joint à votre exposé?

M. Kovacs : Nous vous avons transmis, à titre d'information, une analyse des 35 compagnies d'assurances qui ont fait faillite au cours des 50 dernières années. Dans le cadre de notre programme de recherche, nous avons tenté d'étudier chacun de ces cas, avec les conditions qui prévalaient à l'époque. Ces informations se trouvent dans le dossier que nous avons remis au comité.

Cela fait 20 ans que notre organisme a été mis sur pied et, au cours de cette période, nous avons dû faire face à une douzaine de faillites en assurance, touchant 250 000 titulaires canadiens de police. Nous avons versé au-delà de 150 millions de dollars en fonds provenant de l'industrie pour faire droit aux réclamations qui en ont découlé.

Parmi les mesures de liquidation que nous avons dû prendre en application de cette loi depuis 1990, environ les deux tiers ont touché l'industrie des assurances IARD. Au cours des dix dernières années, toutes les liquidations ont touché notre secteur. Nous sommes d'avis, et notre opinion est largement répandue dans le secteur, qu'il arrivera à l'occasion que des compagnies d'assurances fassent faillite. C'est normal dans un secteur dont le fonctionnement est sain et, en nous projetant dans l'avenir, nous continuerons très probablement à être l'un des organismes utilisant le plus cette législation.

Pendant nos 20 ans d'existence, nous avons surveillé attentivement dans la presse les échos des réactions des consommateurs aux divers cas d'insolvabilité dans notre secteur. Nous avons ainsi répertorié 55 articles consacrés à ces questions au cours de cette période. C'est là un nombre relativement faible et il arrive fréquemment que les articles publiés dans les journaux conseillent aux consommateurs ayant des problèmes de téléphoner à la Société d'indemnisation en matière d'assurances IARD, qui va s'occuper de leur problème. Les caisses de garantie ont permis de bien traiter les consommateurs au cours des 20 dernières années, et nous nous trouvons en excellente posture pour continuer à faire de même.

Nous sommes aussi d'avis que le système de réglementation des insolvabilités fonctionne bien au Canada. Des entreprises font faillite, mais cela fait partie d'un système au fonctionnement sain. Le Bureau du surintendant des institutions financières fait fort bien son travail de surveillance de l'industrie en l'aidant à cerner et à gérer les risques et en supervisant comme il convient les entreprises du secteur. Une fois encore, l'objectif de l'ensemble du secteur est, de façon adaptée et saine, de faire que le nombre de faillites soit faible, et le système réglementaire atteint parfaitement cet objectif.

Si le système de caisses de garantie fonctionne et si le système réglementaire fonctionne, cela ne nous empêche pas d'estimer que les dispositions de la Loi sur les liquidations et les restructurations que nous appliquons doivent être révisées. Elles sont en vigueur depuis la fin des années 1800 et n'ont pratiquement pas été modifiées depuis. Au cours du dernier siècle, les Canadiens ont été témoins de nombreux changement et le système que nous exploitons en a subi de profonds. Il est donc nécessaire d'apporter des ajustements techniques à ce système pour qu'il fonctionne encore mieux.

De tels ajustements techniques pourront rendre le système équitable, efficient et permettre au processus de liquidation d'assurer un meilleur service aux consommateurs canadiens. Nous sommes également d'avis que le système devient de plus en plus complexe avec des sociétés et des institutions financières dont la taille et la complexité ne cessent de s'accroître. La loi en vigueur n'est pas nécessairement adaptée à des situations aussi complexes.

Ce sont là deux axes de réflexion qui méritent qu'on s'y attarde. Dans le premier cas, la loi est en vigueur depuis 1882 et sa formulation n'a pratiquement pas évolué depuis. Elle est relativement souple et, grâce à des tribunaux et à des liquidateurs professionnels compétents, on peut l'appliquer intelligemment. Nous ne disons pas au comité qu'il y a un problème et que la loi cause des difficultés. Si le processus fonctionne bien, il est toutefois lent et coûteux. Il serait possible de l'améliorer en y apportant des ajustements techniques relativement mineurs. Pour vous donner un exemple rapidement, sachez que pour la plupart des liquidations dans lesquelles nous avons été impliqués, la quasi-totalité des versements, soit plus de 90 p. 100 sont intervenus au cours des quatre premières années. Malgré cela, des cas d'insolvabilité ont traîné pendant des décennies. Il faut du temps pour mener à terme une liquidation, et c'est un processus long et coûteux. Il serait possible d'améliorer le système en le rendant plus efficient.

L'Insolvency Institute of Canada a proposé quelques réformes techniques qui semblent intéressantes et bien conçues. Nous avons déposé le travail de recherche que nous avions commandé aux professeurs Thomas Telfer et Bruce Welling. Ce sont là des domaines dans lesquels, à l'occasion, on observe un consensus sur certains des changements techniques qui permettraient d'accélérer le processus en protégeant bine et de façon efficiente les intérêts des consommateurs.

Pour vous donner un exemple de changement qu'il serait possible d'apporter, imaginons qu'une caisse de garantie soit désignée pour inspecter le processus. Lors des 12 cas d'insolvabilité dans lesquels nous avons été impliqués, dans un cas sur deux, les tribunaux nous ont confié un rôle d'inspecteur. Lorsque ce ne fut pas le cas, nous n'avons pas été en mesure de défendre les intérêts des titulaires de police en assurant la défense des consommateurs. C'est là un aspect de la législation qui pourrait être modifiée assez facilement pour exiger que...

Le président : ... pour exiger qu'un inspecteur soit nommé?

M. Kovacs : C'est exact.

Le président : Est-ce que cela fait vraiment une différence?

M. Kovacs : À titre individuel, les titulaires de police n'ont pas assez de pouvoir pour exercer une influence sur le processus. Notre rôle est de les défendre. Souvent, il y a des dizaines de milliers de personnes qui ne réclament que de petits montants et c'est au nom de toutes que nous agissons.

Le président : J'ai quelques connaissances du droit des faillites, mais elles sont loin de valoir celles du vice-président. Je ne suis pas à l'aise avec le concept d'inspecteur rattaché à un organisme, ce qui pourrait avoir pour effet de désigner un représentant d'une entité comme la SIMA. Est-ce ainsi que cela fonctionne? Le tribunal confie-t-il vraiment un mandat d'inspection à l'organisation?

M. Kovacs : Dans la moitié des cas, lorsque les tribunaux ont voulu désigner des inspecteurs, c'est à nous qu'ils ont attribué ce mandat. Lorsqu'aucun inspecteur n'a été nommé, il s'est avéré difficile de savoir ce qui se passait, les intérêts de quels clients étaient défendus et d'être disponible pour discuter avec le liquidateur. Lorsque nous avons été nommés comme inspecteur, le processus s'est déroulé plus en douceur, certainement parce que nous avons essayé de tirer la situation au clair et de faciliter les choses.

Parmi les recommandations également formulées par l'Insolvency Institute et par Telfer and Welling, l'une visait à définir ce qu'un inspecteur devrait faire et ne pas faire, et à préciser comment il devrait procéder pour se rendre utile. Le liquidateur est censé liquider, pas l'inspecteur, mais quel rôle devrait jouer l'inspecteur?

L'autre recommandation allant au-delà de tels exemples, et à laquelle personne ne s'oppose, porte sur les ajustements mineurs à la législation actuelle afin de la rendre plus efficace pour les consommateurs. Traduire en recommandation une préoccupation de portée plus large, impliquant des révisions plus importantes, prendrait plus de temps. La plupart des compagnies d'assurances, des banques et des autres institutions financières font maintenant partie de grands groupes complexes. Nous sommes préoccupés par le fait que les caisses de garantie constituées pour faire face à d'éventuels problèmes d'assurance aient été soudain transférées ailleurs, peut-être dans un autre pays ou dans une autre entité de l'organisation.

Face à un groupe complexe, nous sommes d'avis que la Loi sur les liquidations et les restructurations ne permet pas d'anticiper ni de se préparer complètement à ce genre de faillites complexes, qui ont de plus en plus de chance de se produire. Nous les observons dans d'autres pays à travers le monde. Au Canada, la plupart des faillites pour lesquelles le système s'est révélé efficace ont été celles de compagnies d'assurances individuelles dans un domaine précis et dans une région donnée. Les modalités en place ont bien fonctionné et nous avons pu faire appel à la législation actuelle. En termes de politique publique, nous aurions intérêt à prendre conscience qu'une telle faillite complexe peut se produire et à nous préparer à agir en conséquence, pour ne pas être pris par surprise en pleine crise. Nous devrions nous y préparer.

Michael Hale, vice-président directeur, Assuris : Bonjour, Mesdames et messieurs. Je suis très heureux d'avoir ainsi l'occasion de vous entretenir de ces questions. Assuris est une société à but non lucratif.

Nous protégeons les titulaires canadiens de polices d'assurance contre la perte de prestations si une entreprise membre fait faillite. Assuris a été créée en 1990 et, depuis lors, elle s'est acquis la réputation de venir en aide aux titulaires de police et de limiter leurs pertes.

J'aimerais insister sur trois points. Tout d'abord, discuter des raisons pour lesquelles nous devrions procéder à un examen de la LLR, la Loi sur les liquidations et les restructurations, ensuite préciser certaines questions touchant les compagnies d'assurance-vie et leurs titulaires de police et, enfin, proposer quelques grands principes qui pourraient conduire à une législation plus efficace pour faire face à l'insolvabilité des institutions financières. Je compte vous inciter à faire avancer cette révision législative avant qu'un événement malheureux ne révèle les failles d'un système dépassé et ne plonge les assurés canadiens dans de sérieuses difficultés.

Tout d'abord, pourquoi revoir la loi? C'est une question compréhensible si nous nous penchons sur les compagnies d'assurance-vie. Après tout, au Canada, peu de celles qui sont à la réglementation ont fait faillite. Depuis 1990, on peut compter leur nombre sur les doigts d'une main et, en vérité, il nous resterait deux doigts.

Lorsqu'une faillite survient, elle touche un grand nombre de Canadiens. Nous estimons que près de trois millions de Canadiens étaient détenteurs de polices des trois compagnies d'assurance-vie qui ont fait faillite : Les Coopérants, La Souveraine et Confederation Life. Si une faillite devait survenir aujourd'hui, il est raisonnable de penser que ses conséquences seraient plus sérieuses, étant donné la complexité accrue des marchés financiers. Depuis le début des années 1990, nous avons plus particulièrement observé trois tendances importantes. Les institutions financières sont de plus en plus des sociétés multinationales, généralement des conglomérats. Les affaires de faillite sont aussi débattues plus âprement en cour, souvent par des investisseurs opportunistes qui achètent les créances des compagnies en difficulté. Lorsqu'une société internationale devient insolvable, les pays se disputent souvent le lieu des procédures de faillite.

Au cours des dix dernières années, les risques d'insolvabilité ont été plus faibles, en raison du resserrement des mesures de contrôle et de l'expansion économique. Mais nous constatons un changement marqué dans la conjoncture économique aux États-Unis, au Canada et dans le monde entier. Nous assistons aussi à la prolifération d'instruments financiers compliqués et potentiellement dangereux, comme les produits dérivés, les produits structurés et les obligations adossées à des actifs. Le rapport ministériel sur le rendement 2006-2007 présenté par le Bureau du surintendant des institutions financières affirme que la complexité accrue de l'industrie des services financiers, ajoutée à la concurrence qui s'exerce sur les marchés mondiaux, présente des risques pour les marchés financiers.

Malgré les efforts sans précédent que consacre l'industrie à la gestion des risques, nous sommes aux prises avec des événements inattendus, comme le désastre des hypothèques à risque qui a pris naissance aux États-Unis et s'est répandu dans le monde entier, par le biais des obligations adossées à des actifs au Canada, ce désastre a été en partie responsable de la crise du papier commercial adossé à des actifs, et a eu de graves répercussions sur de grandes institutions financières comme Citibank et Merrill Lynch. Nul n'est besoin d'être juriste pour réaliser qu'une loi fondée sur des règles, qui n'a fait l'objet d'aucune modification fondamentale depuis un siècle, ne peut aider à dénouer les complications auxquelles notre monde est confronté — encore moins inspirer des solutions efficaces

Les raisons qui militent en faveur de la révision et du renouvellement de la loi se multiplient. Les deux rapports dont M. Kovacs a fait état soulevaient de nombreuses questions inquiétantes, sur lesquelles il faudra se pencher.

Voilà les grandes lignes de la situation. Ceux-ci sont les problèmes propres aux compagnies d'assurance-vie et à leurs assurés? Je suis ici aujourd'hui avec M. Kovacs, parce que l'industrie de l'assurance vie est touchée par plusieurs des problèmes que vit le secteur de l'assurance IARD. De plus, il y a des préoccupations propres au secteur de l'assurance- vie. La différence la plus importante entre l'assurance TARD et l'assurance vie réside dans le fait que les polices d'assurance-vie individuelles sont des contrats à long terme, qui s'étalent sur de nombreuses années. Voyons ce que cela signifie sur le plan concret. Les retraités veulent que les polices qui leur assurent une rente de retraite continuent de leur procurer un revenu leur vie durant. En ce qui a trait à l'assurance vie et à l'assurance invalidité, nous devons considérer que l'assurabilité de la personne change au fil du temps; il est souvent difficile pour l'assuré de remplacer ses garanties d'assurance-vie lorsque sa police cesse d'exister. Par exemple, si une personne a subi une crise cardiaque, elle aura de la difficulté à souscrire une nouvelle police d'assurance.

En d'autres termes, pour offrir efficacement aux assurés une protection appropriée, aux détenteurs canadiens de polices d'assurance, Assuris doit être en mesure de faciliter le transfert des polices en vigueur de la compagnie en faillite vers des compagnies solvables. Bien sûr, nous avons réussi à le faire lors des trois faillites survenues au début des années 1990, mais nous attribuons davantage ce succès à la sagesse et à l'esprit créatif des juges, et des professionnels spécialisés en insolvabilité, qu'à la clarté ou à la pertinence des dispositions de la Loi sur les liquidations et les restructurations.

Cela nous amène à notre troisième point : quels sont les grands principes qui devraient présider à l'élaboration d'une loi plus limpide et plus robuste? La nouvelle loi ne devrait pas s'embarrasser de modalités détaillées qui n'auront peut- être aucune pertinence dans certaines circonstances, mais elle devrait préciser clairement les principes pertinents et les pouvoirs discrétionnaires du tribunal qui pourront s'appliquer. Ces modifications favoriseraient l'émergence de solutions novatrices et souples lorsqu'une faillite se profile à l'horizon et se concrétise. Nous avons besoin d'une loi qui précise clairement le processus à suivre et les pouvoirs du tribunal, en vue du transfert rapide des polices vers une compagnie solvable. Nous avons besoin d'une loi qui s'harmonise avec les politiques publiques actuelles — notamment les mesures de protection des employés récemment adoptées dans le cadre de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité. Nous avons besoin d'une description sans équivoque du rôle de conseil en matière de restructuration et de liquidation que tiennent les organismes d'indemnisation (comme la SIMA-IARD et Assuris) auprès du tribunal. Ces modifications législatives limiteront le coût des insolvabilités et renforceront la confiance du public envers l'industrie et le système financier.

En conclusion, nous sommes parvenus au bon moment. La révision complète et le renouvellement de la Loi sur les liquidations et les restructurations ne seront certes pas faciles, mais tout retard ne ferait qu'empirer les choses. Nous vous exhortons donc à obtenir dès maintenant la révision et le renouvellement de la loi. Nous parlons ici d'un renouvellement qui sera l'occasion de donner des principes clairs permettant de trouver des solutions créatrices plutôt que rigides, d'un renouvellement tenant compte des pratiques exemplaires observées dans les diverses législations en vigueur sur les faillites et répondant aux exigences particulières des institutions financières, d'un renouvellement tenant aussi compte des besoins des entreprises du système financier canadien et, plus important encore, d'un renouvellement améliorant la protection des titulaires canadiens de police.

Le président : Merci beaucoup, monsieur. Avant de passer aux questions, j'aimerais vous demander quelques précisions. Tout d'abord, monsieur Hale, vous savez peut-être, mais je ne suis pas sûr que les membres du comité le sachent, que ce comité a réalisé, en 1994-1995, une étude de cas sur la faillite de Confederation Life. J'ignore si vous êtes au courant et si vous connaissez notre rapport. Le président du comité de l'époque était le sénateur Kirby. Notre rapport a traité de cette faillite de façon passablement détaillée, pas tant en termes de législation habilitante que de régime réglementaire, en s'intéressant au rôle du BSIF et à la capacité d'intervenir et de prendre la place des conseils d'administration, et cetera. À cette époque, il y avait un organisme canadien de compagnies d'assurances de personnes.

M. Hale : C'était bien nous. Nous nous appelions alors la Société canadienne d'indemnisation pour les assurances de personnes et nous sommes devenus Assuris.

Le président : C'est donc la même société.

M. Hale : Oui, c'est bien le même groupe. À la suite de cette étude, nous avons apporté quelques modifications à notre règlement, en nous dotant entre autres de moyens rapides d'intervention afin de pouvoir apporter une aide financière alors même que les activités de l'entreprise ayant fait faillite sont transférées à d'autres.

Le président : Si je me souviens bien, mais ce n'est pas tout jeune, lorsque la poussière est retombée, les pertes des titulaires de police avaient été passablement réduites. Est-ce exact? Il y avait quelques titulaires américains, il y avait aussi des problèmes de territoire, mais, dans l'ensemble, les montants récupérés ont été assez bons.

M. Hale : Les titulaires de polices de Confederation Life ont récupéré la totalité de leurs fonds.

Le président : Donc, monsieur Kovacs, même si le texte de la Loi sur les liquidations et les restructurations traduit son âge, et même si certaines de ses dispositions ne vous paraissent pas optimales, vous ne voyez pas dans celle-ci de dispositions que nous devrions étudier de toute urgence. Il n'y a pas de mesure devant à tout prix être prise demain, comme c'est le cas avec la LFI et la LACC. Par contre, vous nous avez fourni des renseignements complémentaires aujourd'hui. Les choses me paraissent un peu plus urgentes maintenant qu'elles ne l'avaient semblé il y a quelques semaines, lorsque nous nous sommes rencontrés.

M. Kovacs : Je continue sans aucun doute à vous dire que nous avons pu travailler avec le système, qu'il est souple et que les juges compétents et les professionnels du domaine de la liquidation ont trouvé la façon de bien utiliser le système, pas nécessairement parce que toutes les définitions sont bonnes. C'est ainsi que la législation actuelle précise qu'il faudrait accorder la priorité au versement des salaires aux commis. Aujourd'hui, nous dirions plutôt qu'il faut payer les employés, et les juges et les liquidateurs comprennent bien cette terminologie. Si la législation n'est pas parfaite, tous savent l'utiliser.

S'il devait y avoir une liquidation de l'autre côté de la frontière canado-américaine, on constaterait que la législation américaine est beaucoup plus restrictive et, si certains Américains venaient chez nous et tentaient de s'en remettre à la législation canadienne, ils contesteraient tout ce que nous faisons, je crois. Heureusement, ce n'est pas le cas et nous avons pu utiliser le système.

Je ne prétends pas qu'il y a un problème urgent. Nous avons pu bien fonctionner comme ceci. Toutefois, je crains que par la suite, et cela pourrait être plutôt tôt que tard... On ne sait jamais avec les insolvabilités, nous devrions nous y attendre et nous y préparer de façon efficace, en adoptant une attitude positive.

Le président : Quand cette loi a-t-elle été adoptée?

M. Kovacs : En 1882.

Le président : Vous ne voulez pas tout mettre par terre et recommencer à zéro?

M. Kovacs : Si nous devions formuler cinq ou six recommandations, celles-ci seraient de nature technique. Nous sommes très à l'aise avec l'essentiel de cette loi, qui fonctionne bien.

Le sénateur Meighen : Serait-il possible d'apporter certaines de ces modifications techniques par voie de réglementation?

M. Kovacs : Je ne le pense pas. Je crois qu'elles doivent figurer dans la loi elle-même.

Le sénateur Ringuette : Monsieur Kovacs, je regarde le document que vous nous avez remis, La faillite chez les assureurs. Cette étude précise à la page 26 que les causes les plus importantes d'insolvabilité dans le domaine des assurances multirisques, entre 1995 et 2005, étaient dans 40 p. 100 des cas une tarification inadéquate, et des provisions pour sinistres également inadéquates.

Les provisions pour sinistres inadéquates ont retenu mon attention. Si je me souviens bien, la Loi sur les institutions financières comporte une disposition qui s'applique aux compagnies d'assurance, voulant qu'elles se dotent de provisions suffisantes. Je vois ici que 40 p. 100 des cas d'insolvabilité tiennent à des provisions pour sinistres inadéquates. Quelle conclusion en tirez-vous et quelle recommandation formuleriez-vous face à ce problème précis?

M. Kovacs : Les recherches que nous avons faites sur les 50 dernières années au Canada sont parvenues à la même conclusion qu'une analyse des faillites américaines et européennes. La raison la plus courante, dans environ 40 p. 100 des cas, de la faillite d'une compagnie d'assurances est qu'elle n'est pas parvenue à prévoir les coûts qu'elle allait encourir et les réclamations qu'elle allait recevoir.

Vous acceptez un client, vous essayez d'anticiper en faisant appel aux techniques actuarielles les types de réclamation que vous allez avoir — il peut s'agir d'accidents de voiture ou d'incendies — vous exercez votre jugement professionnel le mieux possible pour prévoir ces coûts, et il arrive que vous ayez tort. Dans certains cas, vous avez tellement tort que l'entreprise est écrasée par les coûts qu'elle doit assumer et qu'elle n'est plus en mesure de payer les factures. Pratiquement toutes les compagnies d'assurance savent bien faire ces calculs et n'ont pas de problème, mais il arrive qu'elles en aient.

La raison la plus courante pour laquelle une entreprise fait faillite dans l'industrie des assurances IARD est que les règlements des réclamations ont été plus importants que prévus et plus élevés que les provisions qui avaient été constituées, et ce bien que les professionnels de la compagnie en question aient fait de leur mieux preuve de jugement et malgré la supervision du système réglementaire.

Le sénateur Ringuette : Je comprends ce que vous dites. À la page 28, cette étude fait une comparaison entre le Canada, les États-Unis, l'Union européenne et l'Asie. Le nombre d'entreprises canadiennes qui ont fait faillite au cours de la même période au Canada est de 35, alors qu'il est de 871 aux États-Unis. Toute chose étant égale par ailleurs, si vous faites le calcul en pourcentage des populations des deux pays, vous devez prendre le chiffre de 35 pour le Canada et le multiplier par 100. On obtient alors un chiffre très élevé. Vous devez en tenir compte, parce que ce sont vos clients.

M. Kovacs : Nous avons fait des comparaisons entre les pays et tenté d'ajuster les chiffres en fonction de leurs tailles, du nombre de compagnies d'assurances et du nombre de leurs clients. Il est plus courant pour nous de faire des comparaisons avec les États-Unis, et disons que ce pays est dix fois plus gros que le Canada.

Selon toutes les mesures que nous utilisons, la probabilité qu'une compagnie d'assurances éprouve de graves difficultés et fasse faillite est plus élevée aux États-Unis. C'est l'un des contextes dans lesquels il est le plus difficile de travailler à travers le monde. Au Canada, la probabilité d'une faillite est beaucoup plus faible qu'aux États-Unis. Elle est cependant plus élevée que dans la plupart des pays européens, mais cela n'empêche qu'un résultat de 35 entreprises canadiennes ayant fait faillite sur 50 ans reste, à notre avis, un chiffre très faible. C'est pourquoi on n'observe pas beaucoup de craintes chez le grand public que les compagnies d'assurances fassent faillite, parce que cela ne se produit pas si souvent. La plupart des 35 compagnies d'assurances qui ont fait faillite au Canada n'étaient pas de grandes entreprises, comme Confederation Life. Ce sont des compagnies multirisques relativement petites. Ce phénomène de faillite traduit un environnement sain. Il y a plusieurs centaines de compagnies, et certains font faillite à l'occasion.

Le sénateur Tkachuk : Vous avez indiqué que les montants des faillites étaient faibles. Quel était le total des passifs en question et comment se comparent-ils?

M. Kovacs : Il est beaucoup plus probable qu'une entreprise éprouve des difficultés et fasse faillite aux États-Unis qu'au Canada, et la taille moyenne de la compagnie faisant faillite est en général plus importante aux États-Unis. Quand quelqu'un décide d'agir et déclare que l'entreprise n'est plus en mesure de faire face à ses responsabilités, elle est fermée dans ce pays et il ne reste souvent rien dans les caisses.

Au Canada, et certainement de façon plus marquée au cours des dernières années, à cause des recherches du comité sur le cas de la Confederation Life, notamment, lorsqu'il a fallu intervenir, il restait des ressources dans l'entreprise. On est alors confronté à une entreprise éprouvant de sérieuses difficultés, mais dans notre pays il reste des fonds pour payer les factures. Le passif et les risques sont certainement plus faibles au Canada.

Le sénateur Ringuette : Étant donné les caractéristiques démographiques de la population canadienne, quels sont les facteurs de risque à prendre en compte, à votre avis, en ce qui concerne l'assurance-vie.

M. Hale : Nous avons un certain nombre de risques identiques aux risques généraux de nature économique qui touchent l'industrie des assurances multirisques. Nous constations l'arrivée de toute une gamme de nouveaux produits destinés aux retraites qui compliquent les garanties parce que, s'ils répondent probablement très bien aux besoins des clients, ils nécessitent une gestion attentive des risques.

Le risque qui nous paraît le plus important pour l'avenir est la complexité de nos produits, et que les gens négligent la gestion des risques parce qu'ils n'accordent pas suffisamment d'attention ou qu'ils ne réalisent pas qu'ils ont acheté ces papiers commerciaux adossés à des actifs qui avaient une bonne cote mais qui sont gelés maintenant. Les risques sont liés à ce genre de choses. Bien évidemment, il peut y avoir des raisons extrêmes, comme une pandémie de grippe aviaire. Toutefois, il me semble que, dans l'ensemble, l'élément porteur des risques les plus importants est la complexité des produits et celle des instruments financiers.

Le sénateur Ringuette : Et-ce que vous entreriez les nouveaux prêts hypothécaires inversés dans la catégorie des nouveaux produits complexes?

M. Hale : Celui-ci n'est probablement pas aussi complexe que certains autres. C'est un ensemble. De façon générale, on observe une plus grande complexité et davantage de risques.

Le sénateur Jaffer : Monsieur Kovacs, vous disiez que les tribunaux devraient toujours désigner un inspecteur pour veiller aux intérêts des demandeurs individuels. Depuis que cette loi a été adoptée, beaucoup de choses ont changé. L'une d'entre elles est l'apparition des recours collectifs qui permettent à des demandeurs individuels de se regrouper, de se choisir un porte-parole et de bénéficier de conseils juridiques. Avez-vous réfléchi à la façon dont vous feriez face à un recours collectif?

M. Kovacs : Mon point de vue n'est pas celui d'une caisse de garantie. Je sais que le secteur de l'assurance a réfléchi aux recours collectifs parce que c'est une procédure qui a été appliquée dans le secteur. Les jugements n'ont pas encore eu pour effet de conduire à l'insolvabilité et c'est probablement pourquoi nous n'avons pas procédé à beaucoup d'analyses de ce point de vue.

Dans de nombreux cas de liquidation, nous avons eu le sentiment d'être les porte-parole des consommateurs. Au cours des liquidations les plus récentes, les tribunaux ont estimé que nous devrions être nommés comme inspecteur. Ils ont reconnu le rôle que nous avons joué.

Nous estimons que l'absence de réactions négatives dans la presse à certaines des faillites survenues il y a 20 ou 30 ans tient en partie au fait que nous jouons un rôle beaucoup plus actif au nom des consommateurs en étant, entre autres, souvent impliqués comme inspecteur dans le processus.

Si je n'ai pas réfléchi aux recours collectifs, j'ai réfléchi au rôle que nous avons joué et à la possibilité de travailler au nom des titulaires de police, dont nous avons fourni la preuve.

Le sénateur Jaffer : Vous avez mentionné que les États-Unis sont confrontés à un problème plus important que nous. Pouvez-vous nous expliquer la différence afin que nous réalisions bien ce qui pourrait se produire à l'avenir?

M. Kovacs : Il ne fait aucun doute, lorsqu'on les compare, les marchés canadiens et américains de l'assurance sont sensiblement différents. Aux États-Unis, les faillites sont courantes. Elles sont quelquefois importantes, spectaculaires et causent beaucoup de problèmes. Il y a un système de supervision, qui permet au gouvernement de surveiller le rendement des compagnies d'assurances d'un point de vue de solvabilité. Au Canada, ce système fonctionne bien alors que, aux États-Unis, il arrive trop souvent qu'il ne fonctionne pas bien.

Aux États-Unis, quand le gouvernement intervient sur le marché de l'assurance, c'est trop souvent pour avoir un effet sur les prix. Il est courant dans ce pays que le gouvernement impose aux compagnies d'assurances des réductions de tarifs, non pas parce que c'est logique du point de vue de la chose publique, mais parce que c'est une solution qui rend les politiciens populaires. Ce type d'intervention, vous amenant à réduire artificiellement les tarifs alors que les coûts peuvent continuer à augmenter, peut aggraver les problèmes d'insolvabilité du secteur américain de l'assurance.

L'absence, au Canada, de réglementation des prix a permis un régime d'insolvabilité beaucoup plus solide et qui a donné de bien meilleurs résultats ici, au Canada. Un marché sur lequel c'est un problème flagrant de nos jours est celui de la Floride. Toute personne ayant des biens en Floride sait combien ce marché est apparu chaotique depuis un certain temps.

Le sénateur Eyton : Je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui. Je suis frappé de constater combien il est agréable de vous avoir parmi nous, vous qui faites un si bon témoin. Vous êtes passablement positif et très professionnel. En plus, vous ne demandez pas beaucoup, même si les problèmes sont un peu plus urgents que nous ne nous y attendions.

En ce qui concerne vos commentaires, des efforts ont été faits pour fusionner les deux lois, la Loi sur les faillites et l'insolvabilité et la Loi sur les liquidations et les restructurations. C'était il y a quelques années et nous en avions discuté à l'époque.

Pour l'essentiel, je déduis de vos commentaires que vous êtes satisfait de la Loi sur les liquidations et les restructurations, à condition d'y apporter quelques améliorations. Vous n'avez pas l'intention aujourd'hui de demander la fusion de certaines dispositions des deux lois, afin de les combiner en une seule et d'avoir un seul régime réglementaire et une seule série de règles. Est-ce exact?

M. Hale : Le sens de notre message est que les institutions financières sont différentes, spéciales, et qu'elles ont besoin de leur propre législation. Le secteur de l'industrie, au sein de ce groupe, a ses propres particularités. Nous sommes contents d'être soumis à une loi distincte. Nous pensons tout simplement qu'elle devrait être mise à jour. Une fois encore, il s'agit là d'une chose importante mais pas urgente, et nous avons là une occasion bien réelle d'aller de l'avant.

M. Kovacs : Je tiens également à insister sur ce point. Je pense que les institutions financières sont des organismes très complexes. Elles ont comme clients des millions de Canadiens et, si elles font faillite, leurs répercussions sur le public sont très complexes. Les faillites récentes de banque en Angleterre ont montré le genre de difficultés qui surviennent si ce type de cas n'est pas bien géré.

C'est une bonne chose que d'avoir une loi distincte de la Loi sur les faillites et l'insolvabilité, la Loi sur les liquidations et les restructurations. En même temps, certaines améliorations ont été apportées à la Loi sur les faillites et l'insolvabilité qui n'ont pas encore été apportées à la Loi sur les liquidations et les restructurations. Il y aurait avantage à instaurer les liens qui conviennent entre les deux, mais les institutions financières sont différentes et il me paraît préférable qu'elles soient soumises à une législation distincte.

Le sénateur Eyton : Vous avez apparemment obtenu de bons résultats au Canada, et il n'y a donc peut-être pas beaucoup d'exemples. Cependant, y a-t-il des cas où vous avez pu observer des conflits entre la législation sur les faillites et celle sur les liquidations?

M. Kovacs : La réponse est oui. Afin de ne pas trop aller en détail dans les domaines qui ne relèvent pas nécessairement de mes compétences, nous avons tenté de demander à des spécialistes du processus de liquidation s'il y a eu beaucoup de « magasinage ». Y a-t-il des institutions qui puissent choisir la législation à laquelle elles seront soumises?

À ce que nous croyons savoir, il est relativement clair que cela est difficile à faire et cela ne se produit pas souvent. Les spécialistes vont vous citer un ou deux exemples sur une période assez longue au cours de laquelle une institution peut avoir débuté ses activités en étant soumise à une loi et avoir essayé de passer sous le régime d'une autre par la suite.

Il est relativement manifeste que la Loi sur les liquidations et les restructurations est destinée aux banques, aux compagnies d'assurances et aux institutions financières, et que la Loi sur les faillites et l'insolvabilité s'applique aux autres organisations. Nous pourrions recommander d'être plus clair, mais je crois que la situation l'est déjà passablement. Toutefois, il y a des différences entre les législations, et nous avons là une occasion de faire du rattrapage et il serait utile de préciser les choses pour garantir une plus grande cohérence.

Le sénateur Eyton : Au sujet de cette réponse, vous avez soulevé la question des conglomérats financiers. Je ne sais pas avec précision comment vous définissez un « conglomérat financier ».

Je connais un groupe qui appartient à une compagnie d'assurances et à une société d'assurances bien distincte, ainsi qu'à une société de fiducie et qui est géré par elles. Il s'agissait d'une propriété commune et peut-être, dans une certaine mesure, d'un contrôle commun, mais cela ne cadrerait pas avec votre définition de conglomérat financier. Ai-je raison? Je pose la question dans le contexte de pouvoir mixte afin de déterminer la législation qui devrait s'appliquer.

M. Kovacs : Je serais enclin à vous dire que le défi tient au fait que, dans la plupart des cas de faillite dont nous avions eu à nous occuper au cours de nos 20 ans d'existence, et très certainement dans notre secteur au cours des 50 dernières années, il s'agissait d'entreprises qui ne faisaient parti d'aucun groupe. Elles relevaient donc de la Loi sur les liquidations et les restructurations pour faire face au problème, et nous avons également pu recourir à cette loi. Toutefois, la plupart des entreprises appartiennent maintenant à une forme de structure, que ce soit au Canada ou à l'étranger. Nous n'avons pas beaucoup d'expérience dans ce domaine pour vous dire comment les choses pourraient se dérouler. Nous n'avons pas non plus de recommandations précises à faire en la matière. Je crois qu'il faut pour cela lancer un dialogue plus vaste. Nous avons certaines recommandations techniques précises qui seraient utiles pour les rares cas d'entreprises qui ont fait faillite par le passé.

Dans le cas de ces nouvelles structures plus complexes, nous pensons qu'il serait très difficile de déterminer comment procéder par liquidation dans une structure plus importante, qu'il s'agisse d'un groupe canadien ou d'un groupe implanté à l'étranger, qui ne serait pas nécessairement actif dans un secteur différent. Lors d'un exercice de simulation, nous nous sommes assis avec nos collègues des secteurs de l'assurance-vie, des services bancaires, et cetera, et nous avons trouvé une entreprise précise qui était soumise à l'application de ces trois lois. Dans chacune des structures, les règles à appliquer étaient légèrement différentes. Il nous est alors apparu que simplement parler de la façon dont les caisses de garantie réagiraient si une structure plus importante éprouvait des difficultés était un exercice alambiqué.

Le sénateur Eyton : Vous aviez certainement certaines structures précises à l'esprit quand vous avez suggéré que nous fassions quelque chose au sujet des conglomérats financiers. Quelle serait, pour vous, une définition simple d'un conglomérat financier?

M. Kovacs : Pour moi, une telle définition coifferait ce que vous venez de décrire comme étant la structure que vous connaissez bien au Canada. Il s'agirait d'une entité avec laquelle il ne serait pas simple de traiter du point de vue de la réaction d`une caisse de garantie ou d'un client et ferait partie d'un conglomérat financier, toute organisation dont la structure la fait relever de divers régimes de solvabilité, par exemple de ceux de plusieurs pays.

Le sénateur Eyton : Il y a du travail à faire.

M. Kovacs : Il y a certainement du travail de réflexion à faire dans ce domaine.

Le sénateur Moore : J'aimerais préciser les rôles de vos organisations respectives. La Société d'indemnisation en matière d'assurances IARD est composée de plus de 200 assureurs-membres, et il y a des compagnies d'assurances multirisques au Canada. Vous nous avez dit, au cours des 20 dernières années, il n'y a eu qu'une douzaine de membres à faire faillite. Je me souviens des cas de Confederation Life et de La Souveraine. Je ne me souviens pas des autres. Nous avons payé plus de 150 millions de dollars pour régler les réclamations des propriétaires d'habitations, d'automobilistes et d'entreprises du Canada victimes de ces insolvabilités. L'argent venait des assureurs-membres.

Où les compagnies membres prennent-elles l'argent pour payer les réclamations? Font-elles porter le coût de ces réclamations par les détenteurs de polices émises par ces assureurs, en augmentant le montant des primes? Ces 150 millions de dollars, cela fait beaucoup d'argent. Comment cela fonctionne-t-il? Avez-vous constitué une caisse pour ce type d'urgences au sein de votre société? Comment cela fonctionne-t-il?

M. Kovacs : C'est une des conditions d'attribution d'un permis au Canada : toute entreprise qui veut vendre des assurances IARD doit appartenir à une caisse de garantie pour obtenir ce permis. Vous devez appartenir à notre organisation. Vous devez prendre l'engagement que, si l'une des compagnies fait faillite — nous en avons 208 actuellement — les coûts de cette faillite seront partagés entre les membres restants. Nous devons couvrir tous les coûts.

Le sénateur Moore : La répartition se fait-elle au prorata? Sur quoi repose-t-elle?

M. Kovacs : Elle est fonction du montant des primes versées à l'entreprise. Si une compagnie a vendu 10 p. 100 de l'assurance, sa part des coûts est de 10 p. 100. En vérité, la formule est un peu plus compliquée puisque les calculs se font par province, ce qui fait que si une faillite survient au Québec, nous pourrions répartir les coûts entre les compagnies québécoises. Si la compagnie travaille à Terre-Neuve, nous pourrions également répartir les coûts entre les entreprises implantées sur le marché terre-neuvien. Les coûts seraient des coûts additionnels partagés par les entreprises qui survivent et celles-ci devraient faire le nécessaire pour couvrir les coûts associés à cette faillite. Nous avons convenu, dans le cadre de nos modalités de fonctionnement, que nous paierions toutes les revendications en souffrance découlant de l'insolvabilité.

Le sénateur Moore : Y a-t-il de frais annuels ou quelque chose d'équivalent? Y a-t-il des frais calculés au prorata pour être membre de la société?

M. Kovacs : Nous faisons payer les quatre employés que nous avons, ce qui fait que nous disposons d'environ un million de dollars par année pour faire fonctionner l'organisation avec quatre employés. Nous avons constitué une caisse. Nous disposons de 40 millions de dollars à la banque et, si une faillite devait survenir, nous pourrions réagir rapidement.

Le sénateur Moore : Assuris s'occupe des titulaires de police. Comment procédez-vous? Par exemple, quand une compagnie comme Confederation Life éprouve des difficultés, intervenez-vous et devenez-vous la compagnie d'assurances jusqu'à ce que ces affaires soient remises en ordre? Quel est votre rôle et comment êtes-vous financé?

M. Hale : Nous avons une structure de financement qui se compare à celle de la SIMA. Nous avons versé 200 millions de dollars pour protéger tous les titulaires de police au cours des trois faillites ou pour leur assurer les niveaux de prestations qui leur avaient été promis. Nous avons environ 110 sociétés membres. Nous disposons d'un fonds initial de 100 millions de dollars, afin de disposer immédiatement de liquidités au besoin, et nous avons une capacité à recueillir un montant dépassant les quatre milliards de dollars au bout d'un certain temps. Nous avons également le droit de facturer les membres à perpétuité, au besoin, pour régler les coûts d'une insolvabilité.

Le sénateur Moore : Monsieur Hale, les compagnies d'assurances sont-elles obligées par la loi de devenir membres d'Assuris?

M. Hale : Pour obtenir un permis de vente d'assurance-vie au Canada, vous devez devenir membre d'Assuris. C'est une structure très comparable.

Nous fonctionnons de façon différente en ce sens qu'un liquidateur de compagnie d'assurance-vie va maintenir les polices de la faillite actives, et nous sommes en faveur de cela et nous disons aux titulaires de police que nous allons nous occuper d'eux. Ensuite, nous aidons le liquidateur à transférer ces polices à des entreprises solvables — quelqu'un les achète. Pour tenir la promesse faite par Assuris aux titulaires de police, nous devons fournir les fonds nécessaires et nous avançons ce financement au liquidateur.

Le sénateur Moore : Avez-vous bien dit pour tenir les promesses que vous avez faites? Pouvez-vous nous expliquer de quoi il s'agit?

M. Hale : Eh bien, par exemple, dans un cas de compagnie d'assurance-vie, nous promettons aux titulaires de police qu'ils font recevoir au moins 85 p. 100 de la valeur de leurs polices ou que celles-ci vont continuer à être valides pour au moins 85 p. 100 de leur valeur. Si ces polices sont vendues alors que le liquidateur ne recouvre que 70 p. 100 des montants, nous avançons les fonds pour permettre ces transactions et ensuite, nous recouvrons notre mise lorsque les sommes recouvrées de la faillite sont encaissées.

Toutefois, ce qui est essentiel pour être en mesure d'assurer la protection qui convient aux titulaires de police est de transférer ces polices. En vérité, à des fins de restructurations, c'est un domaine dans lequel la LLR pourrait nous venir en aide, en procédant plus rapidement à une restructuration sous la supervision d'un tribunal. Il serait utile que ces dispositions figurent dans la LLR pour faciliter les transferts rapides de police.

Le sénateur Goldstein : Merci, messieurs, d'être venus et de nous avoir ainsi éclairés. De nombreux Canadiens suivent ces exposés et nous sommes sur les rangs pour obtenir un Emmy Award. Il est important que notre auditoire sache qu'au cours des 60 dernières années, quand une compagnie d'assurances canadienne a fait faillite, les autres compagnies d'assurances canadiennes et les caisses d'assurance ont pris le relais pour s'assurer que les titulaires de police continuaient à être couverts aux mêmes conditions que par le passé. Notre auditoire doit également savoir que les primes de ceux qui ne souhaitaient pas bénéficier de cette couverture leur ont été remboursées et que les réclamations au titre de l'assurance dommage ou les risques assurés donnent lieu à des indemnisations satisfaisantes, à de très rares exceptions près. Les Canadiens peuvent avoir confiance dans l'ensemble du secteur de l'industrie et dans les responsabilités qu'il assume, qui sont manifestes quand il s'agit de s'assurer que le système protège son intégrité et que les titulaires canadiens de police sont protégés.

Cela dit, nous avons vu au cours des six derniers mois des cas d'insolvabilité qui ne nous auraient jamais paru possibles. J'ai eu la chance de rencontrer M. Kovacs ce matin et ce fut une réunion très enrichissante pour moi. Nous avons eu l'occasion d'aborder un sujet dont je vais vous entretenir rapidement.

Nous ne pourrons pas apporter des modifications à la Loi sur les liquidations et les restructurations pendant un certain temps. C'est une réalité parce que cela s'est passé ainsi par le passé.

Nous sommes en mesure de faire une recommandation du fait de ces auditions, avec l'espoir que le gouvernement y prêtera une oreille attentive. Je vous incite donc à envisager de nous faire un autre exposé par écrit sur d'autres amendements. Ce faisant, gardez à l'esprit la complexité du fonctionnement, non seulement du secteur des assurances, mais également de l'ensemble des institutions financières qui offrent des services comparables.

Si un groupe devait devenir insolvable, nous n'avons tout simplement pas les mécanismes nécessaires avec la législation actuelle pour y faire face avec un niveau appréciable de certitude. Je fais la distinction entre la certitude et l'intelligence parce que j'ai une grande confiance dans l'intelligence des tribunaux. Toutefois, il doit y avoir une forme de structure que les tribunaux pourraient utiliser. Je vous invite donc à nous soumettre quelque chose par écrit pour que le comité puisse l'étudier et éventuellement demander au ministère des Finances de s'en occuper.

Il faut aussi savoir que nombre de ces entreprises sont implantées des deux côtés de la frontière, comme nous l'avons vu avec la faillite de Confederation Life. La Loi sur les liquidations et les restructurations ne comporte pas de dispositions s'inspirant des modèles de loi que nous avons avec la LACC et la LFI au sujet des faillites survenant dans les deux pays. Si nous devions être confrontés à un cas d'insolvabilité touchant également un pays étranger, que ce soit les États-Unis ou un autre, nous ferions alors face à une situation doublement difficile. La situation serait très particulière aux États-Unis parce qu'ils ont un système fortement réglementé et structuré, ce qui n'est pas le cas ici dans la même mesure.

Je vous invite donc à envisager de recommander, pour le moins, que nous adoptions, pour la Loi sur les liquidations et les restructurations, des dispositions qui traiteraient des faillites touchant plusieurs pays afin que nous puissions éviter cet aspect du problème.

M. Kovacs : Avec votre permission, je remercie le sénateur Goldstein d'avoir soulevé cette question devant le comité aujourd'hui sur le rôle que la Loi sur les liquidations et les restructurations pourrait jouer dans la perspective plus large d'un cas d'insolvabilité au Canada. Je suis ravi que nous ayons eu cette occasion de parler de cette importante législation. Je me ferai un plaisir d'essayer de vous proposer certaines recommandations précises et concrètes. Je sais que je me répète, mais nos recommandations seraient de nature technique pour les aspects mineurs de la réglementation ou viseraient des modifications à la législation actuelle pour améliorer un processus que nous avons réussi à bien faire fonctionner.

En ce qui concerne les défis plus vastes, je ne sais pas dans quel délai nous serions en mesure de parvenir à un avis intelligent sur la façon de faire face à des institutions financières plus complexes, mais nous serions très heureux de partager certaines recommandations sur les changements techniques qui seraient fort bienvenus au sein de la petite collectivité qui s'occupe de ces questions. Ces recommandations ne soulèvent que fort peu de litiges et je serais ravi de vous les communiquer.

M. Hale : Nous, à Assuris, serions prêts à participer à ce processus. Nous sommes ravis de l'occasion.

Le président : Nous avons la chance d'avoir comme témoins suivants quatre représentants du ministère des Finances Canada et d'Industrie Canada. Je pense que vous étiez tous dans la pièce quand MM. Kovacs et Hale ont témoigné. Je crois savoir que vous avez également suivi nos délibérations de la semaine dernière. En vérité, ça été une véritable saga depuis que le projet de loi C-55 a été adopté, mais pas promulgué, parce que nous n'avons pas eu l'occasion de l'étudier en détail.

Ce fut davantage un problème pour les ministères de l'industrie et du travail, mais nous avons essayé de nous attaquer à l'ensemble du cadre législatif sur l'insolvabilité. Les deux témoins précédents nous ont signalé que cet aspect des choses avait été un peu négligé. Si nous devons nous occuper de la Loi sur les faillites et l'insolvabilité, pourquoi ne pas nous occuper en même temps de la Loi sur les liquidations et les restructurations, qui est plus pertinente pour les institutions financières que celle à laquelle vous vous intéressez davantage. Il y a également la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole, au sujet de laquelle nous entendrons également des témoins demain matin.

Roger Charland, directeur principal, Politique du droit corporatif, de l'insolvabilité et du commerce intérieur, Industrie Canada : Je vous remercie de cette occasion de m'adresser à vous aujourd'hui au sujet de la Loi sur les liquidations et les restructurations, également appelée la LLR. J'ai tendance à centrer mes commentaires sur la partie 1 de la LLR, car c'est celle dont le ministre de l'Industrie est responsable.

La LLR fait partie du régime juridique de l'insolvabilité du Canada avec la Loi sur les faillites et l'insolvabilité, la LFI et la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, la LACC. Les ministres de l'Industrie et des Finances partagent les responsabilités en ce qui concerne cette loi. La LLR s'applique à toutes les entreprises constituées en société en vertu de la Loi sur les corporations canadiennes, qu'on appelle également couramment sociétés à but non lucratif, banques, compagnies d'assurances et sociétés de fiducie, ainsi qu'à toutes les sociétés constituées en vertu d'un régime provincial.

La LLR ne s'applique pas aux sociétés constituées en vertu de la Loi canadienne sur les sociétés par actions ou de la Loi canadienne sur les coopératives. Ces lois ont leurs propres règles en matière de liquidation.

La LLR diffère de façon fondamentale de la LFI et de la LACC par trois façons. Tout d'abord, alors que la LFI et la LACC s'appliquent uniquement aux sociétés insolvables, la LLR traite de la liquidation des sociétés à la fois solvables et insolvables.

La LLR s'applique aux banques, aux sociétés de fiducie et aux compagnies d'assurances, que je désignerai de façon générique sous le terme d'institutions financières. Ni la LFI ni la LACC ne s'appliquent aux institutions financières. Le troisième point est que la LLR met en œuvre un processus qui dépend, dans une large mesure des tribunaux.

J'en viens à la partie 1, qui définit un processus dans lequel les tribunaux peuvent prononcer la dissolution d'une société et veiller à la liquidation de ses biens. Les dispositions s'appliquent à une société, qu'elle soit solvable ou non. La capacité de dissoudre une société solvable est un élément important de l'économie de marché et, à ce titre, la plupart des législations fédérales et provinciales sur les sociétés instaurent des régimes permettant de dissoudre des sociétés solvables.

Certaines sociétés, comme celles constituées en application de la Loi sur les corporations canadiennes et de lois spéciales du Parlement, ne peuvent être dissoutes qu'en recourant à la LLR. Dans ces cas, un liquidateur est nommé qui prend le contrôle des biens et les vend. Les créanciers sont remboursés intégralement et l'excédent est remis aux actionnaires de la société.

Le processus de liquidation de la partie 1 autorise également une société à se restructurer en proposant un compromis ou une entente avec ses créanciers. Cette restructuration ne peut se faire qu'avec l'approbation des créanciers. Une fois encore, c'est un processus à l'initiative des tribunaux qui nécessitait auparavant qu'une ordonnance de liquidation soit promulguée.

Même si certaines sociétés insolvables autres que des institutions financières pourraient choisir de recourir aux dispositions concernant la liquidation et la restructuration en application de la LLR au lieu de la LFI ou de la LACC, à ce que je sais, cela ne s'est jamais produit. Dans tous les cas, à tout moment, les créanciers peuvent contraindre les institutions non financières — les débiteurs — à se dégager du régime de la LLR et à se soumettre à celui de la LFI. De plus, le débiteur ne peut passer du régime de la LFI à celui de la LLR lorsque les procédures de la LFI ont été entamées.

Les dispositions sur la restructuration et la liquidation qui figurent dans la LLR sont différentes de celles que l'on trouve dans la LACC ou dans la LFI. En théorie, cela pourrait causer l'apparition d'un problème de « magasinage » de loi. Cela se produirait si un débiteur essayait de se placer sous le régime d'une loi qui lui soit plus favorable, à lui ou à ses intérêts propres. Toutefois, en réalisant notre étude, comme les créanciers ne peuvent pas être soustraits au processus de la LLR et se voir imposer celui de la LFI, nous n'avons trouvé aucun cas de ce genre. Les sociétés insolvables qui veulent se restructurer le font en général sous le régime de la LFI ou celui de la LACC, à moins qu'il s'agisse d'une institution financière. Cela dit, les dispositions de la LLR sont nécessaires pour un certain nombre de sociétés solvables, par exemple pour celles qui sont constituées en vertu de la Loi sur les corporations canadiennes ou créées par une loi spéciale du Parlement, comme elles n'ont pas d'autres moyens d'être liquidées.

Pour conclure, nous serons ravis de discuter de la façon dont la LLR peut être améliorée. Par exemple, il se peut qu'il n'y ait plus de raison de permettre à des sociétés insolvables de se dissoudre ou de se restructurer en application de la LLR quand elles pourraient le faire sous le régime de la LFI ou de la LACC. Ce sont des choses que nous devrons étudier, mais nous devrons nous assurer que ceux qui ont besoin de la LLR pour dissoudre une société peuvent continuer à le faire.

Nous allons continuer à surveiller l'utilisation qui est faite de la loi et à travailler avec nos collègues du ministère des Finances pour nous assurer que le Canada continue à disposer d'une législation juste, efficace et efficiente sur l'insolvabilité.

Le président : Dans votre travail, avez-vous à vous occuper de nombreuses lois remontant à 1882?

M. Charland : Nous n'avons pas la liste ici, mais nous avons trouvé 12 sociétés qui ont été créées par une loi spéciale du Parlement.

Le président : Vous voulez dire au XIXe siècle?

M. Charland : Oui, sénateur, depuis la Confédération, mais je crois qu'il y en a quelques-unes qui remontaient à la fin des années 1800 et au début des années 1900.

Le président : Ma question visait simplement à souligner le fait qu'il s'agit d'une vieille loi. Au lieu de faire du « couper, copier, coller », il vaut mieux parfois tout reprendre à zéro. Toutefois, nous nous en remettons à vous, vous êtes les spécialistes.

Le sénateur Goldstein : Monsieur le président, c'est parfois dans les vieux pots qu'on trouve les bons onguents.

Diane Lafleur, directrice, Division du secteur financier, Direction de la politique du secteur financier, ministère des Finances Canada : Je crois que vous avez déjà des copies de mes commentaires, en français et en anglais.

[Français]

Je tiens à vous remercier de nous avoir fourni l'occasion de discuter de la Loi sur les liquidations et les restructurations, d'entendre les préoccupations de la SIMA et d'Assuris et de constater l'intérêt du comité sur cette question tout à fait importante.

[Traduction]

Le gouvernement croit que la LLR est un cadre souple qui a permis aux parties de trouver des solutions sensibles à la liquidation ou à la restructuration d'institutions financières en faillite. Toutefois, nous convenons aussi qu'il faudrait se pencher sur les avantages potentiels que représente une modernisation axée sur les principes qui tiendrait compte des nouveaux défis que pose un système financier national et international de plus en plus complexe et intégré. Un nombre de modifications ciblées ont été faites à la LLR dans le passé. J'aimerais attirer votre attention sur trois changements importants au cours des dix dernières années. À la suite d'important cas de faillites dans le milieu des années 1990, le gouvernement a publié un livre blanc en 1995, auquel le témoin a fait allusion plus tôt, intitulé Renforcer et assainir le secteur des services financiers canadien, ce qui a amené à des révisions majeures à la LLR. C'est ainsi que, en 1996, des changements ont été apportés à la législation sur les institutions financières fédérales permettant une fermeture précoce des institutions financières fédérales. Le but était de faciliter les interventions précoces pour les institutions financières en difficulté. Ces modifications ont permis au surintendant des institutions financières de prendre le contrôle d'une institution financière de régime fédéral et les changements correspondant ont été apportés à la LLR pour en tenir compte. Des modifications ont également été faites pour les sociétés d'assurances. Parmi les révisions, des dispositions ont donné des pouvoirs au liquidateur de conclure une entente avec les associations d'indemnisation pour faciliter le paiement des réclamations ainsi que de donner au Tribunal et au liquidateur la flexibilité de transférer ou modifier les politiques, avec l'approbation du Tribunal.

En 1999, la Loi sur les banques a été modifiée pour permettre aux banques étrangères d'établir des succursales au Canada. La Loi sur les banques a permis au Surintendant de saisir tous les actifs d'une succursale bancaire étrangère au Canada dans l'éventualité de l'insolvabilité, ou menace d'insolvabilité, d'une succursale d'une banque étrangère. Par conséquent, la partie II de la Loi sur la liquidation et la restructuration a aussi été modifiée pour permettre la liquidation des succursales bancaires étrangères au Canada.

Dans le cas d'une insolvabilité d'une banque étrangère avec une succursale au Canada, la succursale bancaire étrangère serait liquidée sous la loi canadienne. Les actifs de la banque étrangère au Canada seraient utilisés pour satisfaire les réclamations des déposants et des créditeurs de la succursale bancaire étrangère au Canada. Si ces actifs n'étaient pas suffisants pour rembourser les déposants et les créditeurs de la succursale, ces derniers pourraient s'adresser au liquidateur de la banque étrangère dans la juridiction d'origine.

[Français]

Plus récemment, dans la Loi d'exécution du budget de 2007, le gouvernement a mis en place des modifications pour moderniser la législation entourant la faillite et l'insolvabilité, qui prévoit le traitement des contrats financiers admissibles et des garanties.

Les modifications ont été apportées pour autoriser le gouverneur en conseil à définir, par voie de règlement, l'expression « contrat financier admissible » qui s'applique à la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, la Loi sur les liquidations et la restructuration, la Loi sur la compensation et les règlements des paiements et la Loi sur la Société d'assurance-dépôts du Canada.

Des modifications ont été apportées à ces cinq lois pour fournir la certitude dans la législation que la garantie de contrat financier admissible ne peut être l'objet d'une suspension des procédures.

[Traduction]

Les commentaires formulés par les témoins aujourd'hui arrivent à point nommé, compte tenu des efforts internationaux continuels pour améliorer la résilience du secteur financier, incluant les cadres traitant des institutions en faillite. Des travaux sont en cours au Forum sur la stabilité financière, lors de délibérations des ministres des Finances du G7 et au Comité de Bâle sur le contrôle bancaire. Les ministres des Finances du G7 ont demandé au Forum sur la stabilité financière (ou FSF) d'analyser les causes sous-jacentes des récentes perturbations financières, de mener des évaluations et de formuler les recommandations qui s'imposent. Un groupe de travail du FSF a publié un rapport préliminaire en février, sur lequel les ministres des Finances du G7 et les gouverneurs de banques centrales se sont penchés lors de leur réunion du 9 février, à Tokyo. L'une des recommandations laisse entendre qu'il faut renforcer les pouvoirs, au besoin, quand il s'agit de traiter avec des banques en mauvaise posture et en faillite, aussi bien au pays qu'à l'étranger. Des éléments de preuve matérielle démontrant l'intérêt porté à ce travail peuvent être notés dans le communiqué du G7 dans lequel les ministres affirmaient que « les autorités devraient examiner, s'il y a lieu, leur mandat, leurs mécanismes de coordination et leurs instruments afin de s'assurer que des mesures raisonnables et souples sont prises pour répondre aux tensions sur les marchés, y compris les arrangements visant à résoudre la faiblesse ou la faillite d'institutions financières, et ce, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de leur pays.

Dans le budget déposé le 26 février, le gouvernement a fait savoir, qu'il s'engage à améliorer ses principaux instruments visant à favoriser la résilience et la stabilité du système financier, à l'intérieur d'un cadre fondé sur des marchés ouverts et concurrentiels. De plus, le gouvernement est résolu à appuyer davantage l'application d'un cadre de réglementation du secteur financier qui favorise l'intégrité et l'efficience, qui repose sur des principes financiers bien compris, qui est réceptif et novateur.

L'examen de la LLR peut s'inscrire dans ces vastes efforts mondiaux et nationaux et serait conforme, et informé par, aux discussions permanentes entre les décideurs et les organismes de réglementation du secteur financier.

Le cadre législatif qui sous-tend l'insolvabilité constitue une partie, mais seulement une partie, de ce vaste cadre qui vise à protéger les déposants, les titulaires de polices et les créanciers, tout en contribuant à l'établissement de prix satisfaisants et à des comportements adéquats.

Le système financier canadien est solide, et les banques et les autres institutions financières sont saines et bien capitalisées. Tel que noté par le Fonds monétaire international dans son Programme d'évaluation du secteur financier publié récemment :

le système financier canadien est pleinement développé, très évolué et bien administré, et que de saines politiques macroéconomiques et un cadre solide de contrôle et de réglementation prudentielle sous-tendent la stabilité financière. L'assurance-dépôts et les mécanismes de gestion et de règlement des crises sont bien conçus.

[Français]

Le gouvernement est heureux de recevoir la contribution des parties intéressées et lira avec intérêt le rapport du comité. Nous sommes heureux de maintenir le dialogue avec les parties intéressées sur ces questions et d'en aviser à l'avenir les ministres.

[Traduction]

Le président : Êtes-vous en désaccord avec certains des commentaires formulés par les témoins précédents?

Mme Lafleur : Il ne s'agit pas d'être d'accord ou non. Notre priorité est de nous occuper des questions concernant la LLR qu'il faut aborder immédiatement et d'entretenir le dialogue sur les autres questions qu'il faudra aborder en temps voulu.

Pour réaliser une analyse complète, il est important que nous comprenions bien les questions qui sont en jeu. Nous devons réaliser que, lorsque des amendements sont apportés à une loi comme celle-ci, divers intervenants peuvent être touchés, au point de faire apparaître des gagnants et des perdants. Avant de recommander à apporter des modifications à une politique, il est donc important de bien mesurer ce que nous faisons, ainsi que les avantages et les inconvénients de cette proposition.

Le président : Êtes-vous à l'aise avec les points qu'ils ont soulevés? Vous paraissent-ils logiques? Les commentaires des témoins soulèvent-ils des questions chez vous?

Mme Lafleur : De façon générale, nous convenons tous que cette loi est en vigueur depuis longtemps. Il y a bien évidemment intérêt à réviser de façon régulière les lois en vigueur. J'aurais besoin de beaucoup plus d'information et de plus de détails sur la proposition avant de pouvoir vous donner un point de vue éclairé. Je me souviens par exemple d'avoir entendu dire qu'il faudrait des principes d'équité, mais j'ai oublié l'autre commentaire. Cela semble très bien mais je ne sais pas ce que cela signifie concrètement. J'aimerais avoir plus de détails. Comme vous, je serai ravie d'avoir des propositions détaillées sur papier.

Le président : Je suis sûr que les témoins précédents savent où vous trouvez. J'espère qu'ils vous adresseront également une copie de leurs propositions.

Quand vous dites que l'économie canadienne st en bon état et bien gérée, quel document citez-vous?

Mme Lafleur : Je citais un rapport récent du Fonds monétaire international qui, dans le cadre de son Programme d'évaluation du secteur financier, fait le point sur la situation du Canada. C'est un examen détaillé du fonctionnement du secteur financier canadien. Ma citation provenait directement de ce rapport. Je serai ravie d'en remettre une copie à ce comité.

Le président : Pouvez-vous le faire, s'il vous plaît?

Mme Lafleur : Oui.

Le président : Les honorables sénateurs sont-ils d'accord?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Ringuette : J'ai quelques brèves questions à poser, juste pour obtenir des précisions.

[Français]

Monsieur Charland, si j'ai bien compris, dans votre présentation vous avez dit que l'industrie pouvait avoir, lors d'une faillite, droit à l'un ou l'autre des modèles?

M. Charland : En théorie, il y a cette possibilité, mais on ne connaît pas de situations ou de causes où cela s'est produit. À notre connaissance, selon les informations que nous avons, les corporations se servent de la Loi sur la faillite ou de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies pour se restructurer.

Le sénateur Ringuette : À ce moment, pour pouvoir bénéficier des services des deux institutions dont on a entendu le témoignage tout à l'heure, ils doivent contribuer. S'ils n'ont pas contribué, la cour ne peut pas dire : vous allez déclarer faillite ou restructurer votre entreprise selon cette loi. Je voulais que ce soit clair étant donné le témoignage précédent. Je me disais : comment cela peut-il se produire? Cela peut se produire seulement si au moment de l'incorporation, il faut un processus pour qu'ils puissent faire une contribution à l'autre institution de partenariat?

M. Charland : Pour ce qui est des compagnies d'assurance, elles n'ont pas le choix. Elles doivent recourir à la LLR. Ce sont les parties 2 et 3 qui s'appliquent. L'exemple théorique dont je parlais dans la présentation concerne des sociétés à but lucratif qui ont été incorporées sous le Canada Corporation Act et de sociétés autres que des institutions financières, pas les compagnies d'assurance ni les banques.

Le sénateur Ringuette : Des exemples?

M. Charland : Si une association décide de s'incorporer comme organisme sans but lucratif, comme une association qui décide d'avoir pour mission d'œuvrer pour une cause en particulier, il n'y a pas d'exemple concret de société à but non lucratif qui me vient à l'esprit, mais il y a plein d'associations comme des clubs ou autres. Ce sont des sociétés à but non lucratif. Si ces sociétés devenaient insolvables et voulaient restructurer, en théorie, c'est possible pour eux de se servir du mécanisme prévu par la LLR.

Le sénateur Ringuette : Est-ce qu'il y a des situations où, à votre connaissance, les banques à charte canadiennes, à cause de leurs multi-fonctions ou de leurs multi-produits, dont une composante est de l'assurance habitation ou automobile, une partie de leurs fonctions pourrait être dissociée et incorporée?

M. Charland : Je vais laisser mes collègues du ministère des Finances Canada parler des banques et de votre question. Je préciserais que dans la mesure où on parle de banques, d'assurances ou de trusts, ils ne peuvent pas se servir de la Loi sur la faillite. Ils doivent passer par le mécanisme. Mes collègues du ministère des Finances Canada vont en parler davantage.

Le sénateur Ringuette : Ils sont complètement sous la même protection.

Mme Lafleur : L'exemple le plus évident est une banque qui détient un courtier en valeurs mobilières qui est assujetti aux lois provinciales. S'il y a une faillite ou une restructuration dans ce domaine, ce ne serait pas sous le processus de la LLR.

[Traduction]

Le sénateur Meighen : Nous avons entendu les exposés des témoins précédents, et maintenant le vôtre. Les choses semblent bien se dérouler. Les témoins précédents aimeraient voir apporter certains amendements, mais à ce que j'ai compris de leur témoignage, il n'y a pas d'urgence en la matière.

[Français]

À qui va l'initiative? Dans votre esprit, est-ce au ministère ou reste-t-elle à l'industrie?

[Traduction]

Mme Lafleur : Comme je l'ai indiqué dans mes commentaires, au cours des dix dernières années, le gouvernement a pris des initiatives dans un certain nombre de domaines qui semblaient nécessiter des correctifs normaux. Si la LLR ne figure pas dans le groupe de lois régissant le secteur financier qui tomberait en désuétude sans examen quinquennal, nous avons, à l'occasion de ces examens réguliers tous les cinq ans, apporté des amendements à la LLR quand cela s'est avéré nécessaire. Nous en avons inscrit dans les diverses révisions à apporter à la législation par le passé.

Je ne voudrais pas que les sénateurs s'imaginent que nous n'avons pris aucune initiative. Nous en avons pris un certain nombre et cela se vérifie. Comme ministère, nous sommes ouverts en permanence à ce que les intervenants ont à dire quand ils veulent nous faire part de leurs préoccupations ou de leurs priorités ou lorsqu'ils estiment qu'il faut apporter des modifications. Au bout du compte, nous étudions leurs demandes, essayons de consulter et d'être aussi transparents que possible, de bien comprendre la nature des équilibres en jeu, et cetera. Nous faisons ensuite des recommandations de politique. À partir de là, le gouvernement définit ses priorités.

Tout ce que je peux vous dire aujourd'hui est que nous allons bien sûr informer nos ministres des points essentiels de la discussion d'aujourd'hui et de toutes recommandations qui pourraient nous être faites à l'avenir concernant des amendements précis. Nous allons faire tout en notre pouvoir pour formuler des recommandations éclairées aux ministres.

[Français]

Le sénateur Goldstein : C'était une présentation très intéressante. Ce n'est pas la première fois que nous entendons Mme Lafleur, qui est toujours très intéressante et très informative.

[Traduction]

L'expérience que j'ai acquise dans une vie antérieure m'amène à me poser des questions sur la Loi sur les liquidations et les restructurations. La principale préoccupation est que le processus découlant de cette loi est mis en œuvre presque exclusivement à l'initiative des tribunaux. J'ai une grande confiance dans les tribunaux, mais ce n'est pas toujours la structure qui convient le mieux pour résoudre les problèmes. Nombre des problèmes survenus dans les liquidations de banques et de compagnies d'assurances seraient mieux résolus au conseil d'administration que devant un tribunal. Il ne semble pas y avoir de mesures incitatives pour inciter à étudier et à résoudre les problèmes de cette façon.

Je me demande donc si l'examen auquel vous procédez, qui se fait en permanence, pourrait ou non envisager une procédure se rapprochant de celle en vigueur aux États-Unis, qui de façon relative, accorde un rôle moins important aux tribunaux et un rôle plus important aux créanciers dans le déclenchement du processus et dans la façon dont celui- ci se déroule.

En second lieu, je suis préoccupé par la possibilité du transport des insolvabilités d'assureurs et, dans une moindre mesure, des banques. Nous avons maintenant le modèle de loi de la CNUDCI, avec quelques modifications, qu'on retrouve dans des parties de la Loi sur les faillites et l'insolvabilité et de la LACC. Vous avez récemment adopté le même genre de définitions pour les contrats financiers admissibles et le même type de conclusions pour les contrats financiers admissibles dans la Loi sur les liquidations et les restructurations que dans la LACC et dans la Loi sur les faillites et l'insolvabilité.

Y a-t-il quelque chose qui pourrait actuellement vous amener à cesser d'ajouter à la Loi sur les liquidations et les restructurations des dispositions inspirées du modèle de la CNUDCI, et de les adopter, traitant des cas d'insolvabilité et de faillite touchant plusieurs pays? Vous avez déjà commencé à procéder de cette façon quand, il y a cinq ou six ans, vous avez apporté des modifications faisant que, en cas de faillites touchant l'étranger, les créanciers canadiens seraient indemnisés les premiers à même les actifs canadiens. Vous avez fait des pas dans la bonne direction en traitant des répercussions des insolvabilités touchant plusieurs pays, mais vous vous êtes arrêtés en chemin. Je ne vous demande pas de réponse, mais plutôt d'envisager de procéder de cette façon.

Je dois vous dire que nous avons vu des expériences de ce genre par le passé. Il y a quelques années, certains d'entre nous, actifs dans le domaine des faillites, ont réalisé que la faillite d'une entreprise de courtage était différente de celle d'un autre type d'entreprise. Cela nous a amenés à ajouter un chapitre à la Loi sur les faillites et l'insolvabilité traitant uniquement des faillites des entreprises de courtage. Nous avons suivi les dossiers de plusieurs petites entreprises et d'une grande qui ont suivi ce processus, et il a fonctionné, pas de façon parfaite, mais suffisamment bien pour que nous soyons convaincus qu'il fonctionne.

Je me demande si vous pourriez envisager de procéder de la même façon. De cette façon, lorsque nous interromprons nos travaux pour cinq mois après la présentation de notre rapport, et que des mesures auront été prises, nous saurions que les cas d'insolvabilité transfrontaliers d'assureurs appartenant à des banques sont couverts de façon raisonnable par les dispositions en vigueur et que les Canadiens sont raisonnablement protégés. Je soulève cette question à votre attention et j'espère que nos témoins précédents feront de même. Je sais que l'Insolvency Institute of Canada vous apportera son aide gracieuse dans ce domaine.

Mme Lafleur : Je vous remercie de vos conseils sur ces questions. Je ne connais pas très bien les modalités qui s'appliquent aux États-Unis. Dans la mesure où vous seriez en mesure de nous fournir davantage de détails sur celles- ci, nous serions certainement intéressés à les étudier. Je vous remercie.

Le sénateur Goldstein : Les choses sont censées se passer dans l'autre sens.

Le président : Dans ce cas, ce serait une valeur ajoutée.

Le sénateur Goldstein : C'est bien que vous le mentionniez, monsieur le président.

Le sénateur Moore : Mme Lafleur, à la page 8 de vos commentaires, vous avez dit : « Le système financier canadien est solide, et les banques et les autres institutions financières sont saines et bien capitalisées. » Vous avez ensuite cité le rapport du FMI qui dit que l'assurance-dépôts et les mécanismes de gestion et de règlement des crises sont bien conçus.

Face à la dégradation récente de la situation de nos banques à charte à la suite de leurs investissements en papiers commerciaux adossés à des actifs, votre ministère a-t-il suivi la situation et comment y fait-il face? Le FMI était-il au courant de cette situation?

Mme Lafleur : Bien évidemment, le ministère des Finances et tous les autres organismes de réglementation du secteur financier ont suivi attentivement les événements récents. Je vous signale qu'une délégation du FMI était sur place en août et en septembre derniers, quand le marché des papiers commerciaux adossés à des actifs s'est effondré. Ils étaient donc au courant de ce qui se passait. Ils ont procédé à des visites de suivi avec nous et parlé directement aux principaux intervenants dans les institutions. Leurs connaissances étaient de première main.

Le sens de cette citation et le texte complet du rapport en question traduisent bien la situation actuelle. Le rapport est à jour dans ce domaine.

En ce qui concerne précisément les banques canadiennes, elles continuent à être bien capitalisées et bien réglementées par le surintendant des institutions financières. Si vous voulez obtenir de plus amples précisions dans ce domaine, il vaudrait mieux que vous parliez directement au surintendant de l'état de santé des institutions financières canadiennes.

Le sénateur Moore : Je m'excuse, vous dites que nous devrions poser la question à quelqu'un d'autre. Est-ce que vous assurez une surveillance ou non?

Mme Lafleur : Bien évidemment, nous surveillons...

Le sénateur Moore : Que surveillez-vous?

Mme Lafleur : Nous surveillons les résultats financiers, les rendements, et cetera.

Le sénateur Moore : Surveillez-vous les investissements?

Mme Lafleur : Le ministère des Finances ne surveille pas au quotidien les activités de chacune des institutions financières. L'organisme de réglementation en la matière est le BSIF. Il dispose d'un système de réglementation qui lui permet de comprendre les détails des activités et du fonctionnement des institutions.

Le sénateur Moore : Je ne parviens pas à comprendre la différence entre votre rôle et celui du BSIF.

Mme Lafleur : Nous définissions le cadre réglementaire et le BSIF administre ce cadre. Le BSIF est l'organisme de réglementation qui assure la surveillance des institutions au quotidien.

Le président : Je vous remercie de vous être présenté devant nous aujourd'hui. Nous allons attendre les renseignements additionnels que vous nous ferez parvenir et le sénateur Goldstein vous adressera ses commentaires sur les points dont nous avons discuté. Comme je l'ai dit au départ, ce fut un plaisir d'avoir votre aide pour mieux comprendre les questions très complexes dont s'occupe le ministère des Finances du Canada.

La réunion se poursuit à huis clos.


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