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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce

Fascicule 10 - Témoignages du 6 mars 2008


OTTAWA, le jeudi 6 mars 2008

Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce se réunit aujourd'hui à 10 h 50 pour étudier, afin d'en faire rapport, les questions relatives aux obstacles au commerce interprovincial; et aussi pour faire l'examen de la situation actuelle du régime financier canadien et international (Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole).

Le sénateur W. David Angus (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bonjour. Je vous souhaite la bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce. Je suis le sénateur David Angus, de Montréal, au Québec, et je suis le président de ce comité. Le sénateur Goldstein, du Québec en est le vice-président. Nous avons aussi le sénateur Meighen, de l'Ontario, le sénateur Tkachuk de la Saskatchewan, le sénateur Eyton de l'Ontario, le sénateur Harb de l'Ontario, le sénateur Ringuette du Nouveau- Brunswick, le sénateur Moore de la Nouvelle-Écosse et le sénateur Jaffer, de Vancouver.

Monsieur le ministre, nous vous souhaitons la bienvenue. Je pense que c'est votre première visite ici. Notre comité a eu de nombreuses délibérations sur des questions touchant votre portefeuille actuel, Industrie Canada. J'aimerais faire quelques observations préliminaires sur les raisons qui nous ont amenés à vous inviter ici aujourd'hui, et pour mettre cette séance en contexte.

Je tiens à souhaiter la bienvenue à nos téléspectateurs du réseau CPAC et sur le web. Nous avons appris que nous avons un large public sur le World Wide Web, et nous en sommes bien heureux.

L'audience d'aujourd'hui portera sur les obstacles au commerce interprovincial. C'est l'objet d'un ordre de renvoi que nous avons reçu du Sénat il y a déjà bien longtemps, le 23 novembre 2004. C'est à ce moment-là que le comité a été chargé de faire une série de trois études en table ronde sur des enjeux qui étaient alors et qui restent d'actualité.

L'une des tables rondes portait sur la question de la productivité et du retard que peut avoir la productivité de notre pays sur celle de nos partenaires commerciaux d'autres pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques, l'OCDE. Nous avons eu de longues audiences sur le sujet, dont nous avons fait le compte rendu au Sénat.

La deuxième table ronde portait sur la bombe à retardement démographique et les enjeux du vieillissement de notre population. Une bonne partie ce celle-ci est en bonne santé et ne fait plus partie de la population active. Cependant, nous avons de moins en moins de travailleurs pour soutenir le nombre toujours plus grand de retraités qui s'attendent à toucher des prestations pour leurs vieux jours, c'est-à-dire quand ils ne travailleront plus. C'est ce qui a été appelé la bombe à retardement démographique. Nous avons entendu des experts des États-Unis et du Canada, qui nous ont éclairés, et nous avons déposé un rapport sur le sujet.

Notre troisième sujet d'étude, ce sont les obstacles au commerce entre les provinces et entre les provinces et les territoires. L'ordre de renvoi autorisait le comité à étudier, en vue de présenter un rapport, les questions concernant les obstacles au commerce interprovincial qui existent au Canada et, plus particulièrement, la mesure dans laquelle ces obstacles entravent la croissance et la rentabilité des secteurs touchés ainsi que la possibilité, pour les entreprises des provinces et des États américains touchés, de former des régions économiques susceptibles de stimuler la prospérité; et les mesures que peuvent prendre les gouvernements fédéral et provinciaux pour faciliter la réduction ou l'élimination de tels obstacles au commerce interprovincial afin d'accroître les échanges commerciaux, de constituer une économie nationale et de renforcer l'union économique. Enfin, l'ordre de renvoi prévoyait que les documents et preuves fournis seraient intégrés au dossier et que nous présenterions un rapport au Sénat.

Ce mandat a été renouvelé à trois reprises. Nous arrivons maintenant à notre conclusion.

Monsieur le ministre, votre prédécesseur, le ministre Maxime Bernier, nous a fait part de ses vues l'année dernière. En plus de vous aujourd'hui, nous devons entendre deux témoins de la Banque du Canada la semaine prochaine, soit le premier sous-gouverneur Paul Jenkins, et le nouveau sous-gouverneur, John Murray. Le premier sous-gouverneur Jenkins a déjà été cité à de nombreuses reprises, disant que la Banque du Canada s'inquiétait de ce que ces obstacles au Canada continuent d'entraver la croissance de la productivité du pays et, partant, la compétitivité de notre économie à l'échelle mondiale. Nous avons donc pensé bon de vous inviter aujourd'hui, en tant qu'avant-dernier témoin dans cette étude. Nous sommes ravis de vous voir. Après votre présentation, mes collègues auront des questions à vous poser.

L'honorable Jim Prentice, C.P., député, ministre de l'Industrie : Je vous remercie, monsieur le président. Je tiens à souligner le beau travail que fait le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce. Il est bien connu dans les cercles parlementaires et au-delà que ce comité se distingue depuis de nombreuses années par son excellent travail et qu'il a eu une vaste influence sur l'élaboration à la fois de lois et de politiques publiques. C'est un plaisir pour moi que d'être ici.

Je suis accompagné de Paul Boothe, sous-ministre adjoint principal d'Industrie Canada. Il est un de ces éléments compétents qu'a recruté la fonction publique du Canada, après qu'il ait été sous-ministre en Saskatchewan et qu'il ait aussi travaillé avec le gouvernement de l'Alberta. Plusieurs autres fonctionnaires de mon ministère m'accompagnent aussi.

C'est un plaisir que de vous rencontrer pour discuter de l'importance d'une solide union économique. Je commencerai par présenter des observations préliminaires.

Le président : Est-ce que tout le monde a une copie de cette déclaration?

M. Prentice : Je ne suis pas sûr que vous l'ayez. Je ne le pense pas.

Je sais que je suis entre des mains capables. Monsieur le président, la dernière fois que vous et moi nous sommes vus, vous m'aviez invité à livrer une allocution sur la politique en matière de sciences et technologie dans le cadre d'une conférence, à Montréal. Cette allocution avait duré 45 minutes, et je vous promets de ne pas prendre autant de temps aujourd'hui.

Le président : Quoi que vous décidiez sera une valeur ajoutée, et nous sommes toute ouïe.

M. Prentice : Je vous remercie de m'avoir invité aujourd'hui pour discuter de l'importance d'une solide union économique, des travaux en cours pour renforcer l'Accord sur le commerce intérieur, généralement appelé ACI, dont nous avons discuté, ainsi que des progrès vers l'élimination des obstacles au commerce au sein de notre pays.

[Français]

Je suis ravi de constater votre intérêt pour le commerce intérieur et l'étendue des connaissances sur ce sujet à cette table. Nous savons qu'il est plus facile d'échanger des biens et des services entre les pays de l'Amérique du Nord qu'entre les provinces.

La situation actuelle fait en sorte que, pour certains Canadiens et certaines entreprises, les barrières au commerce interprovincial sont un problème plus important, tandis que pour d'autres, cela représente un obstacle d'envergure. L'Accord sur le commerce intérieur a constitué une première étape visant à améliorer la libre circulation des marchandises, des services, des investissements et des personnes.

[Traduction]

Par exemple, certains Canadiens, comme les enseignants et enseignantes et les infirmiers et infirmières, peuvent encore se faire refuser un emploi dans certaines régions du Canada parce que leurs compétences ne sont pas reconnues par un autre gouvernement. Dans d'autres circonstances, les entreprises se buttent à des exigences réglementaires qui découragent toute expansion de leurs activités hors de leur province, notamment lorsque les normes techniques diffèrent entre les provinces pour l'addition d'éthanol dans les carburants. Dans les deux cas, les obstacles au commerce sont réels.

À une époque où le Canada subit d'énormes pressions de la part de compétiteurs étrangers, il est contre-productif de maintenir ces barrières. Il y a beaucoup à faire. Il y a toutefois des signes encourageants. À l'occasion de réunions du Conseil de la fédération, en août 2007 et en janvier 2008, les premiers ministres ont réitéré l'importance d'un accord sur le commerce intérieur plus fort et plus efficace. Ils ont avalisé un plan de travail visant à améliorer l'Accord sur le commerce intérieur dans cinq domaines : la mobilité de la main-d'œuvre, la résolution des différends, l'énergie, l'agriculture et l'harmonisation des règlements en matière de transport.

[Français]

Le gouvernement a appuyé ce plan de travail parce que nous croyons qu'il renforcera considérablement l'Accord sur le commerce intérieur. Nous travaillons en étroite collaboration avec les provinces afin de mettre en oeuvre ce plan et nous continuerons à le faire.

[Traduction]

En particulier, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont donné la priorité à l'assurance de la pleine mobilité de la main-d'œuvre d'ici à avril 2009. Les fonctionnaires et organes de réglementation sont déterminés à lever avant cette date les obstacles qui restent encore. Des progrès ont été réalisés, mais il reste à voir si l'objectif pourra être pleinement atteint d'ici à l'échéance fixée.

Lors de la dernière réunion du Comité du commerce intérieur, mon prédécesseur, M. Bernier, a proposé un engagement plus ferme et la reconnaissance mutuelle immédiate des normes professionnelles. Comme vous l'ont déjà dit de nombreux intervenants qui ont témoigné devant vous, le mécanisme actuel de résolution des différends n'est pas efficace. À mon avis, un solide mécanisme de résolution des différends ayant force exécutoire, avec des sanctions pécuniaires, est indispensable. Nous travaillons avec les provinces pour remédier à cette lacune.

Il reste encore des questions à régler pour mettre la dernière main aux chapitres de l'agriculture et de l'énergie. Je sais que les premiers ministres ont dit vouloir constater des résultats, mais on peut dire sans exagérer que les discussions durent depuis déjà des années.

Je suis encouragé par le fait que certaines provinces ont accéléré la cadence. Elles seront les catalyseurs de l'amélioration de l'Accord sur le commerce intérieur. Je parle ici, précisément, de l'entente sur le commerce, l'investissement et la mobilité de la main-d'œuvre, appelée la TILMA, entre l'Alberta et la Colombie-Britannique, et les négociations commerciales entre l'Ontario et le Québec sont de bons exemples de l'élan qu'ont pris certaines provinces.

Le plan de travail auquel les premiers ministres ont donné leur aval l'été dernier s'inspirait largement de dispositions de la TILMA; l'échéance d'avril 2009 et la reconnaissance mutuelle immédiate pour la mobilité de la main-d'œuvre, ainsi que les sanctions pécuniaires pour la résolution des conflits sont des éléments que l'on retrouve dans la TILMA.

[Français]

J'espère que cet élan politique aboutira à des résultats concrets dans le cadre de l'Accord sur le commerce intérieur pour tous les Canadiens, pas seulement ceux qui sont visés par les accords bilatéraux.

[Traduction]

Le gouvernement est déterminé à améliorer le commerce intérieur partout au Canada. Dans le discours du Trône, notre gouvernement a déclaré qu'il étudierait toutes les solutions possibles pour réduire les obstacles au commerce, y compris le recours à ses pouvoirs en matière de commerce. Notre priorité est d'éliminer les obstacles au commerce qui ont des répercussions pour les Canadiens. Nous étudions des moyens par lesquels le gouvernement peut tirer le meilleur parti de ses pouvoirs, s'il le faut, pour réduire les obstacles au commerce.

Des initiatives comme les audiences de votre comité sont une occasion de souligner les progrès réalisés et, surtout, les défis qui restent à relever. Votre intérêt est apprécié, et il contribue à donner de l'élan à d'autres actions. Soyez assuré de mon plein engagement à l'égard d'une union économique efficace, qui sera essentielle à la prospérité du Canada. Alors que je vous en parle, je suis conscient du fait que vous avez entendu des avis contradictoires sur l'importance de cette union, alors que certains lui attribuent une grande importance et d'autres ne considèrent son absence que comme un irritant. Je vous dirais qu'en fait, nous faisons face à des enjeux très importants au plan économique, et nous sommes heureux de voir le comité accorder la priorité à cette question.

Si on regarde les chiffres du commerce interprovincial et international pour 2006, les échanges entre les provinces se sont chiffrés à 281,6 milliards de dollars. L'approvisionnement seulement des gouvernements provinciaux et fédéral se chiffre à plus de 20 milliards de dollars. L'approvisionnement est, bien entendu, un élément important de toute cette problématique.

Les estimations du coût des obstacles au commerce intérieur varient considérablement, et vous entendrez des économistes et de plus grands experts que moi vous en parler. Au plus bas de la fourchette de ces estimations, que certains situent à 0,2 p. 100 du PIB, les coûts seraient de 2 à 3 milliards de dollars par année; au plus haut, les coûts sont estimés représenter quelque 3,8 p. 100 du PIB, ce qui est évidemment bien plus. Je compte sur votre comité pour parler de quantification avec l'Institut C.D. Howe et des économistes reconnus comme M. Courchene, et d'autres encore.

Un examen de certains exemples des obstacles au commerce intérieur fait ressortir l'importance de cet aspect au-delà de l'élément économique. Par exemple, dans le cadre de leurs discussions sur la TILMA, au sujet du règlement sur les professions, l'Alberta et la Colombie-Britannique ont étudié les différences entre les normes de leurs provinces relativement à 247 métiers différents.

Les exemples des obstacles au commerce intérieur dans notre pays sont légion. Sans vouloir trop m'attarder sur le sujet, vous êtes au courant des restrictions qui ont été imposées sur certains produits alimentaires et sur l'alcool qui font ressortir le fait qu'il est plus facile pour un camion de l'Alberta de transporter un lourd chargement de marchandises au Mexique que d'aller en Colombie-Britannique, à cause des restrictions sur le poids et les dimensions des camions de transport de marchandises, qui varient d'une province à l'autre.

Nous avons des normes techniques provinciales différentes pour l'addition d'éthanol dans le carburant, aussi, et nous éprouvons un grand nombre d'autres difficultés, particulièrement en ce qui concerne l'approvisionnement, qui font la nécessité d'examiner les obstacles et restrictions si nous voulons continuer à faire prospérer l'économie canadienne.

Les pouvoirs fédéraux de réglementer le commerce sont largement décrits dans notre Constitution et dans divers autres textes. Le paragraphe 91(2) de la Loi constitutionnelle de 1867 fait de la réglementation du trafic et du commerce un pouvoir du Parlement. Vous entendrez des experts juridiques vous dire comment cette clause a été interprétée, en commençant par le Comité judiciaire du Conseil privé jusque dans des affaires dont a traité la Cour suprême du Canada. Il existe à la fois un pouvoir général et un pouvoir international et interprovincial, et ces deux types de pouvoirs sont assujettis à des contraintes différentes. Je pense que le pouvoir interprovincial est un pouvoir sain, en ce qui concerne les marchandises, les services et le capital.

La mobilité des personnes entre provinces n'est pas assurée par le paragraphe 91(2) de la Loi constitutionnelle de 1867, mais il en est néanmoins fait mention dans le paragraphe 6(2) de la Charte, qui traite du droit de se déplacer et de gagner sa vie dans toutes provinces sans obstacles, et il commence à y avoir une certaine jurisprudence à ce sujet.

Au sujet du mouvement interprovincial des marchandises, il en serait question à l'article 121 de la Constitution, qui a retenu l'attention de l'appareil judiciaire; il stipule que les articles du cru, de la provenance ou manufacture de n'importe quelle province est admis en franchise dans les autres provinces. L'appareil judiciaire jouit d'un grand pouvoir sur la signification de ces dispositions et leur évolution entre les mains de l'actuelle Cour suprême du Canada. Il est généralement reconnu que l'harmonisation des normes et l'élimination des subsides sont au nombre des aspects problématiques, et que ces questions débordent de la portée des pouvoirs constitutionnels du gouvernement fédéral.

Je serais heureux de connaître vos avis sur toutes ces questions. Pour terminer, en ma qualité de ministre de l'Industrie aux prises avec tous les aspects complexes de la mondialisation et des innovations technologiques qu'ont connus les transports et les communications, qui ont ouvert le marché mondial, je dirais que le Canada doit se montrer plus compétitif et plus habile que jamais.

La libéralisation du commerce en est un élément essentiel, que l'on parle de l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis ou l'Accord de libre-échange nord-américain, ou des arrangements conclus entre les pays de l'Union européenne et d'autres, mais en plus, nous devons nous concentrer, en priorité, sur les dispositions relatives au trafic et au commerce dans notre pays, en éliminant tous les obstacles inutiles qui ne font qu'entraver l'expansion de notre propre économie canadienne.

Je suis heureux de pouvoir collaborer avec le comité, qu'il ait décidé de se concentrer sur ce rapport et qu'il ait l'appui de diverses autorités pour l'orienter.

Le président : Merci, monsieur le ministre. Voilà une présentation précise et pertinente, et vous avez abordé beaucoup des aspects, sinon tous les aspects qui sont ressortis de nos audiences jusqu'à maintenant. Le fait que vous reconnaissiez que nous avons entendu des avis contradictoires faisant de ces questions d'importants enjeux ou de simples irritants est en contraste flagrant avec ce que nous avons entendu de plusieurs syndicats sur la question de la mobilité de la main-d'œuvre.

Vous avez fait un commentaire qui a rappelé un propos du premier ministre du Québec, Jean Charest, qui disait qu'il est plus facile pour le Québec de faire affaire avec le Liechtenstein et le Luxembourg qu'avec la Saskatchewan et l'Ontario.

Le sénateur Goldstein : Ce n'est pas vrai pour le Liechtenstein en ce moment.

Le président : Je me trompe peut-être sur les pays. Quoi qu'il en soit, ces observations sont semblables à celles du ministre.

Dans le discours du Trône, vous avez parlé de pouvoirs fédéraux; nous nous y intéressons évidemment. Vous n'êtes pas allé jusqu'à nous dire exactement ce que fera le gouvernement actuel pour faire avancer cette initiative, mais l'intention est louable. Nous cherchons souvent un titre approprié pour nos rapports. Nous avons parlé de « donner une impulsion à l'action future ». Peut-être nos conseillers voudront-ils l'utiliser. C'est exactement le concept qui sous- tend la table ronde.

Le sénateur Meighen : Étant l'un de ceux qui ont souffert des obstacles à la mobilité, dans la profession juridique, j'apprécie ce dont a parlé le ministre. J'aimerais beaucoup pouvoir pratiquer à Halifax, mais il est probable que les examens seraient trop difficiles pour moi. C'est pourquoi je laisserai cela au sénateur Moore.

Le président a dit exactement ce que je voulais dire. Cependant, pourriez-vous expliquer un peu plus cette initiative particulière? Qu'y a-t-il de nouveau, monsieur le ministre?

Je suis un ancien, mais je me souviens de discussions sur la réduction des obstacles au commerce entre les provinces depuis l'époque où j'ai commencé à m'intéresser à la politique publique. Nous avons fait quelques progrès, mais pas autant que beaucoup d'entre nous l'aurions espéré. Il y a manifestement une solide minorité qui s'oppose à ce que nous allions trop loin dans ce sens. Ils disent : « Si vous voulez un État unitaire, soit, mais vous devrez accepter qu'il existe des différences dans une fédération. »

Pourriez-vous expliquer ce qui est excessif, en termes d'obstacles? Comment est-ce que vous apaiseriez les préoccupations exprimées principalement par les organisations syndicales qui ont témoigné devant nous?

M. Prentice : Théoriquement, sans entrer dans les détails, je dirais comme le ministre de l'Industrie que les pays qui détiennent l'avenir entre leurs mains sont ceux qui peuvent s'organiser de manière à ce que l'intégration de biens et services, du capital et de la main-d'œuvre les rende compétitifs sur la scène internationale. Je reste toujours pantois devant le rythme du changement sur le marché mondial, la rapidité avec laquelle le capital traverse le globe, la vitesse avec laquelle les emplois peuvent traverser d'un pays à l'autre, la cadence à laquelle tout change. Il y a un ouvrage fascinant, intitulé Supercapitalism, de Robert B. Reich, l'un des grands penseurs des États-Unis. Il fait une analyse intéressante de tout cela.

Si nous voulons être à l'avant-garde de tout cela et pouvoir tirer parti des grands atouts naturels et humains que nous avons, il nous faudra nous organiser en tant que pays. Si nous avons du mal à faire traverser la frontière entre l'Alberta et la Colombie-Britannique à un camion de marchandises parce que les deux provinces appliquent des normes différentes, cela n'augure rien de bon pour notre capacité de composer avec d'autres problèmes plus grands.

Je pense qu'il est extraordinairement important que nous nous attaquions à ce problème. Le commentaire académique qui a été fait au sujet de ce que d'autres pays ont accompli, y compris des pays fédéraux comme l'Australie, comparativement à ce que nous avons pu réaliser au Canada, est indicateur d'un consensus entre savants, y compris l'Institut C.D. Howe, M. Courchene et d'autres, comme quoi il y a beaucoup à faire.

Je tiens à souligner que certaines choses positives commencent à arriver. Nous avons fait d'importants progrès en tant que pays, sur le plan des normes, par exemple. C'est peut-être grâce au bon travail du Conseil canadien des normes et d'autres. Nous semblons avoir moins de problèmes avec les normes que sur d'autres plans. La TILMA est aussi très prometteuse. Je pense que le Conseil de la fédération fait du bon travail, et la reprise des négociations entre le Québec et l'Ontario est encourageante.

En tant que gouvernement fédéral, nous voulons encourager la poursuite de ces efforts. L'intégration, l'harmonisation et la reconnaissance mutuelle dont nous parlons doivent se faire à une quantité de niveaux pour faire que notre économie soit plus efficace. Par définition, il faudra pour cela la participation de tous. J'espère bien qu'elle se manifestera avec une vigueur renouvelée.

Le sénateur Meighen : Monsieur le ministre, est-ce que le jury essaie encore de déterminer si la TILMA est avantageuse pour l'Alberta et la Colombie-Britannique — en fait pour le pays dans son ensemble — et dans quelle mesure? Est-ce que nous devons attendre encore un peu avant de pouvoir en juger de manière définitive? Peut-être pourrions-nous exploiter la TILMA pour encourager la conclusion d'ententes similaires entre les autres provinces?

M. Prentice : On a beaucoup parlé de la TILMA. Je voudrais insister sur le fait que ces provinces ont accompli énormément en relativement peu de temps. Des éléments de l'accord font l'objet de critiques, et bien des gens ont relevé des lacunes dans son application. Cependant, le processus de la TILMA et l'entente elle-même comportent d'énormes avantages pour les économies des deux provinces.

Je suppose que la question à poser, c'est si l'entente peut avoir une application plus vaste. Est-ce un modèle qui pourrait être répété dans tout le pays?

Je ne doute pas que l'entente a été conçue sur mesure, selon les caractéristiques particulières de deux provinces de l'Ouest. On peut supposer qu'elle pourrait s'appliquer ailleurs dans l'Ouest du Canada. Je suis encouragé par des discussions parallèles qui se déroulent actuellement entre l'Ontario et le Québec. Ces deux provinces devront formuler des solutions pour entretenir des relations économiques et assurer leur intégration mutuelle. Je pense que la TILMA comporte d'importants avantages et est un modèle dont on peut s'inspirer.

Le sénateur Meighen : Il se trouve que je m'intéresse à la question de l'organe de réglementation commun ou unique. Notre collègue, le sénateur Grafstein, a présenté un projet de loi au Sénat visant la création d'un organe fédéral unique. Personnellement, je penche pour un organe de réglementation commun, qui entend l'adhésion des différentes compétences plutôt qu'une loi fédérale qui affirme : « C'est ainsi et pas autrement. » Le sénateur Grafstein soutient que le gouvernement fédéral a le pouvoir de le faire. Je pense que cela peut être sujet à débat, mais nous verrons bien. Le gouvernement a constitué un comité, sous la présidence de l'honorable Thomas Hockin, pour examiner la question.

Je me demande si vous pouvez commenter cet aspect. Notre système de passeport est quelque peu lourdaud et inefficace, bien que nous y ayons apporté des améliorations. Dans quelle mesure est-il important qu'il n'y ait qu'un organe de réglementation, dans le sens où nous aurions une entente pour qu'il n'y ait qu'un organe plutôt que 13 pour réglementer les valeurs mobilières dans ce pays?

M. Prentice : C'est une question qui tient beaucoup à cœur au ministre des Finances, et il en a parlé. Je pense qu'il a comparu devant votre comité pour en discuter.

Le président : Oui.

M. Prentice : Il a constitué un comité d'éminents Canadiens, dont M. Kvisle, l'un des chefs d'entreprise les plus distingués de notre pays. Je sais que ce comité fera un excellent travail et présentera un rapport offrant des solutions possibles et des recommandations. Je pense que cela viendra très rapidement.

Le sénateur Ringuette : Monsieur le ministre, je comprends que vous ayez beaucoup de défis à relever, avec l'état de l'économie mondiale, et particulièrement de l'économie de l'Amérique du Nord. Est-ce que votre ministère tient des statistiques sur ce qui se passe dans les divers secteurs de notre économie, et par province? Sont-elles mises à jour continuellement, de façon à ce que vous sachiez ce qui se passe dans les différents secteurs, dans les différentes provinces?

M. Prentice : Oui, absolument. Je reçois des rapports de Statistique Canada, en ma qualité de ministre de l'Industrie. Statistique Canada est reconnu à l'échelle mondiale pour son professionnalisme et sa capacité de rassembler et d'agréger des données économiques. Celles-ci sont régulièrement versées dans le site web du ministère. Je reçois des rapports quotidiens sur la situation.

Le sénateur Ringuette : Dans vos observations préliminaires, vous avez dit qu'il nous faut une solide union économique, et je pense que c'est très important. Pour avoir une solide union économique, il faut que toutes les provinces aient une solide économie. Vous êtes informé, quotidiennement, de l'état de l'économie par secteur et par province. J'aimerais porter à votre attention une occasion que nous avons laissé échapper, quand nous n'avons pas ciblé les fonds de la Fiducie nationale pour le développement communautaire sur certains secteurs, et nous ne l'avons pas distribué aux provinces pour que chacune puisse faire le nécessaire pour consolider son économie dans ces secteurs.

L'autre commentaire que je voudrais faire concerne la mobilité de la main-d'œuvre. La Constitution stipule qu'on ne peut faire obstacle, au Canada, à la mobilité de la main-d'œuvre pour un emploi lucratif. Comme vous l'avez dit, 237 métiers ne sont pas régis par des normes d'une province à l'autre. En passant, le gouvernement fédéral, dans ses propres pratiques d'embauche, ne reconnaît pas le facteur de mobilité stipulé dans la Constitution. Nous avons supprimé la capacité du gouvernement fédéral de contribuer à normaliser les métiers et professions, relativement aux ententes fédérales provinciales qui ne fixent pas d'objectifs en matière de formation de la main-d'œuvre, de transfert de fonds aux provinces pour l'éducation postsecondaire au niveau universitaire et de coopération dans l'examen de tous les diplômes professionnels, dans une perspective de normalisation.

Il nous faut une espèce de levier pour inciter les provinces à faire des progrès dans les dossiers de la mobilité de la main-d'œuvre et de la réglementation du transport, ce pour quoi nous disposons d'outils qui pourraient être utiles. Pourquoi ne les employons-nous pas?

M. Prentice : Je parlerai d'abord de la Fiducie nationale pour le développement communautaire, un fonds de un milliard de dollars. Je ne suis pas d'accord avec vous que nous avons perdu une occasion de faire des choix ciblés.

Le principe de base même de la fiducie est que l'argent sera distribué aux provinces et que celles-ci pourront faire ces choix ciblés. C'est indispensable pour composer avec les problèmes du secteur forestier et du secteur manufacturier parce que les provinces pourront ainsi faire ces choix pour assurer une application appropriée des fonds de la fiducie. C'est le principe fondamental. Il y aura donc ciblage.

Pour répondre à votre question plus générale sur l'exercice du leadership fédéral, si on veut, je n'ai jamais dit que le gouvernement fédéral ne dispose pas des outils nécessaires. Ce n'est certainement pas ce que je disais. Le fait fondamental que je veux affirmer, c'est que ces enjeux sont complexes. Ils touchent à une myriade de normes réglementaires et d'exigences professionnelles dans notre économie. Tout le monde à la table doit en discuter de manière concertée. C'est essentiel. Le gouvernement fédéral a certainement les capacités d'approvisionnement pour diriger la manœuvre. Je ne dis pas le contraire, mais toutes les provinces doivent collaborer avec le gouvernement fédéral pour que cela puisse se faire.

On observe des signes très encourageants. L'Alberta et la Colombie-Britannique ont fait plus, avec la TILMA, depuis trois ans qu'il n'a été accompli dans les décennies qui ont précédé. De même, le Conseil de la fédération s'est renouvelé, et l'Ontario et le Québec commencent à se pencher sérieusement sur ces questions. C'est une source d'optimisme, et nous ferons notre part pour travailler avec eux.

Le sénateur Ringuette : En ce qui concerne la Fiducie nationale pour le développement communautaire, vous avez dit que le principe de base est que les provinces font des choix ciblés. Vous avez dit, aussi, que vous disposez de tous les outils et les données nécessaires sur les personnes et les collectivités qui perdent les emplois et, donc, leur économie. Vous receviez ces renseignements quotidiennement, et c'est ce qui aurait dû être l'objectif de la répartition des fonds de la Fiducie nationale pour le développement communautaire. C'est votre responsabilité fédérale. D'après vos observations préliminaires, pour créer une solide union économique, il faut de solides économies dans toutes les provinces. C'est sur les collectivités des provinces qui sont les plus touchées que vous auriez dû vous concentrer en priorité au moment de répartir les fonds de la Fiducie nationale pour le développement communautaire.

En ce qui concerne la mobilité de la main-d'œuvre, je suis heureuse que vous soyez d'accord avec moi que le gouvernement fédéral dispose d'outils pour faire levier. J'aimerais insister sur un autre aspect...

Le président : Sénateur, il nous reste une demi-heure, et bien d'autres sénateurs voudraient pouvoir poser des questions. Vous avez fait des déclarations intéressantes, mais posé peu de questions. Je ne pense pas que nous soyons ici pour argumenter avec le ministre. Si vous avez une question, je vous laisserai la poser. Autrement, je vais laisser la parole au suivant.

Le sénateur Ringuette : En ce qui concerne la mobilité de la main-d'œuvre, que faites-vous au sujet de l'absence de normes pour les travailleurs migrants?

M. Prentice : Tout d'abord, je vais parler des droits de mobilité, qui s'inscrivent sous le régime que prévoit l'article 6 de la Charte. La loi n'a pas défini exactement ce que l'on entend par ces droits à la mobilité que défend la Charte. La Cour suprême, dans l'affaire Canadian Egg Marketing Agency c. Richardson, a donné une interprétation assez limitative de l'article 6. Je sais que ce n'est pas définitif, et d'autres décisions portent à croire qu'il s'agit peut-être d'un pouvoir plus vaste que cela.

Les normes visant les travailleurs migrants sont à l'ordre du jour de la discussion qui, je crois, doit être tenue aux tables de négociation sur les détails. Les provinces ont parlé, spécifiquement, des travailleurs migrants dans le secteur agricole.

Le président : Merci, sénateur. Si nous pouvons avoir un deuxième tour, vous serez la première sur la liste.

Le sénateur Harb : Merci. Monsieur le ministre, je suis heureux que vous ayez abordé certains éléments très importants : tout d'abord, vous avez parlé du problème et avez reconnu qu'il est plus facile de faire des affaires ailleurs qu'entre les provinces.

Est-ce que quelqu'un s'est intéressé à l'observation par les provinces des règles, tant celles de l'ALENA que de l'OMC? Avez-vous une liste de contrôle, et est-ce que tout le monde la respecte? Dans la négative, quels aspects ne sont pas respectés?

M. Prentice : Est-ce que vous voulez parler de l'observation des dispositions de l'ALENA?

Le sénateur Harb : Oui. Est-ce que toutes les provinces respectent les dispositions de l'ALENA relativement à la mobilité des biens et services et de la main-d'œuvre? Je pose aussi la même question au sujet de l'OMC.

Je sais que l'ALENA respecte les règles de l'OMC, mais cela va plus loin. Est-ce que vous connaissez des provinces ou territoires qui n'observent pas ces règles?

M. Prentice : Au Canada, la libéralisation du commerce et les ententes que nous avons conclues à l'échelle internationale sont survenues rapidement. L'Accord de libre-échange Canada-États-Unis, et ensuite l'Accord de libre- échange nord-américain ont créé des régimes commerciaux plus libéralisés que ce que nous avons entre certaines provinces. En un sens, cela accélère le commerce entre le nord et le sud, et nous n'avons pas encore surmonté des obstacles institutionnels au commerce d'est en ouest, au pays.

En un sens, le régime des échanges commerciaux internationaux montre la voie; il fait ressortir certains des enjeux que nous devons régler dans notre propre démarche.

Puisque les provinces participent au commerce nord-sud, il est clair que nous devons nous plier aux exigences de l'ALENA.

Le sénateur Harb : Je comprends votre frustration, et je sais que ce n'est pas aussi simple que cela peut en avoir l'air.

Vous parlez de deux choses. En ce qui concerne la question constitutionnelle, je dirais que le pouvoir résiduel dont dispose le gouvernement fédéral lui permettra de faire bien des choses pour la mobilité. Rien dans la Constitution n'empêche le gouvernement fédéral d'établir une norme nationale dans n'importe quel domaine professionnel auquel les gouvernements provinciaux appliquent des normes. Non seulement le gouvernement fédéral pourrait-il ainsi régler certains des problèmes de mobilité, mais cela permettrait au Canada de se positionner, à l'échelle internationale, comme lieu accueillant pour les professionnels qui veulent s'établir. Comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, l'article 6 de la Charte et l'article 92 de la Constitution assurent la mobilité au sein du Canada.

C'est bizarre, mais avec plus de 200 organisations professionnelles au Canada, ayant chacune ses normes, on pourrait dire qu'au mieux c'est un cartel, et au pire une organisation comme la mafia dont l'unique objectif est de fermer les frontières et de dicter combien de professionnels pourront obtenir un diplôme chaque année. Pourquoi les gouvernements antérieurs n'ont-ils pas exercé ce type de pouvoir, et pourquoi n'avons-nous pas encore été jusqu'au fond du problème?

L'Institut C.D. Howe a comparu devant nous et nous a dit penser que c'est 0,1 p. 100 du PIB, mais ce pourrait être 1 ou 2 p. 100 du PIB. Quand nous avons demandé pourquoi il n'avait rien fait de tel, on nous a répondu qu'il n'a pas les ressources pour le faire. Nous avons posé la même question à M. Bernier.

Est-il possible au gouvernement fédéral de dire : « Je veux connaître exactement la nature de ce problème d'obstacles au commerce entre provinces? » Il a une incidence sur la productivité et la capacité des entreprises de circuler d'une province à l'autre. Une fois que nous le saurons, nous pourrons répondre : « Voici les aspects qui, selon nous, posent un problème. »

M. Prentice : Je laisse la question complexe de la quantification aux experts. Comment quantifier les auxiliaires médicaux de Lloydminster, en Alberta, qui doivent être accrédités des deux côtés de la frontière entre la Saskatchewan et l'Alberta? Comment quantifier le coût économique de cette mesure, ou des autres contraintes professionnelles, comme celles qui sont imposées aux avocats, aux hygiénistes dentaires et autres?

Ce qui est important, c'est que si nous voulons être compétitifs sur un marché mondial d'avant-garde, où la main- d'œuvre et le capital peuvent se déplacer rapidement d'un bout à l'autre du globe en quête du lieu optimal pour faire des affaires, il nous faut éliminer le plus grand nombre possible de ces obstacles.

On peut se perdre, avec la quantification. Cependant, il nous faut être efficaces et éliminer les pratiques qui manquent d'efficience. Il serait injuste de dire que rien n'est arrivé, puisqu'à bien des niveaux, nous faisons d'importants progrès. Au plan des normes, le Canada a de bons antécédents, comparativement à d'autres États fédéraux. C'est le fruit d'un bon travail en collaboration.

L'un des aspects les plus difficiles qui ressort est celui des professions, et je vous dirais que c'est vraiment le nœud du problème. Une fois qu'on entre dans la réglementation des professions, on entre dans la zone grise entourant le pouvoir constitutionnel de l'État fédéral comparativement au pouvoir des provinces en matière de droit de propriété et de droits civils. Encore une fois, pour composer avec la myriade de professions et de métiers qui existent, il faudra que chaque province s'efforce de simplifier et d'éliminer la bureaucratie et les procédures d'accréditation inutiles.

Précisons que du travail se fait sur les titres de compétences, particulièrement les titres étrangers, par le gouvernement fédéral. Nous travaillons là-dessus avec nos partenaires des provinces.

Le président : Je vous remercie. Je pense que nous avons été au fond de l'un des éléments clés de ce problème.

Le sénateur Tkachuk : Depuis mes débuts ici, et cela fait maintenant très longtemps, nous débattons de ce problème. Personne ne va jamais jusqu'au fond. Nous avons parlé de quantification. La Commission canadienne du blé a empêché un agriculteur d'amener son grain de Saskatoon à une ferme qui voulait produire des pâtes. N'est-ce pas ridicule?

Nous avons dans chaque province des monopoles sur l'alcool, qui empêchent la vente libre du vin que nous produisons dans cette province-ci. Cela n'avait guère d'importance quand il n'existait pas de vins canadiens, à part ceux que nous faisions dans les fermes, chez nous. Maintenant, nous avons une industrie vinicole en Ontario et une en Colombie-Britannique, mais il faut demander à un bureaucrate de Regina la permission de vendre le vin. Ce n'est pas difficile à quantifier.

Nous avons des compagnies énergétiques qui ont le monopole de la production de l'énergie. Je me souviens de l'époque où nous avions des compagnies de téléphone en Saskatchewan et à Saskatoon, et un appel à Regina me coûtait plus cher que ce que je paye maintenant pour un mois entier d'appels téléphoniques n'importe où en Amérique du Nord.

Ce sont là les grands obstacles sur lesquels je n'entends jamais de grands débats entre les premiers ministres des provinces. Ils protègent tous leur propre territoire. Ils doivent savoir que ce n'est pas une bonne politique publique pour le pays.

J'ai dit que l'agriculture et l'approvisionnement figurent sur la liste du Conseil de la fédération. Quelles sont les priorités du gouvernement national en matière de commerce agricole au sein du pays, et quelles sont les priorités sur lesquelles travaille le Conseil de la fédération?

Ma deuxième question concerne l'approvisionnement. Est-ce que nous sommes en train d'assister à une balkanisation de l'approvisionnement entre l'Alberta et la Colombie-Britannique? Est-ce que ces provinces sont en train d'élargir leur politique d'approvisionnement, en vertu de la TILMA, vers d'autres régions du Canada, ou est-ce que l'entente se limite aux gouvernements et aux affaires de ces deux provinces seulement?

M. Prentice : Je vais d'abord parler de l'approvisionnement. Voilà un domaine pour lequel les gouvernements peuvent collectivement montrer la voie. Les gouvernements fédéral et provinciaux investissent plus de 20 milliards de dollars dans l'approvisionnement chaque année. À ce que je comprends, la TILMA a préparé la voie pour faciliter l'approvisionnement entre l'Alberta et la Colombie-Britannique. Il n'est pas question de créer un bloc régional dont les autres seraient exclus. Ce n'est pas l'objet de l'entente. C'est plutôt d'assurer l'harmonisation des normes entre les deux provinces afin que l'approvisionnement soit plus accessible aux participants du marché. Il n'est pas question d'exclure qui que ce soit.

Le sénateur Tkachuk : Je sais que n'importe quelle province qui voudrait se joindre à la TILMA peut le faire, et participer au processus. Cependant, le Québec et l'Ontario mènent les négociations de leur côté. Est-ce que vous craignez une balkanisation, c'est-à-dire que l'Ontario et le Québec aient une entente et l'Alberta et la Colombie- Britannique une autre? Cela ne peut être bon pour le pays, et risquerait de compliquer les choses.

M. Prentice : Tout ce que l'on peut faire pour éliminer les obstacles au commerce est utile. Il ne fait aucun doute que l'Accord sur le commerce intérieur est la meilleure solution qui soit, parce que tout le monde en est signataire. Il a été signé en 1994, mais il a eu ses limites et ses critiques. Les mécanismes d'application de la loi, en particulier, ont fait l'objet de critiques. D'autres ont signalé que l'on négocie plusieurs chapitres depuis plus de dix ans, sans jamais aboutir à rien.

Compte tenu de ces circonstances, certaines provinces ont essayé d'aller de l'avant de toute façon. Il serait intéressant de voir quelle approche le nouveau gouvernement de la Saskatchewan décidera d'adopter, au sujet de la TILMA. Il est certain que, dans l'ensemble, le projet de l'Accord sur le commerce intérieur est la meilleure solution si un consensus peut être atteint. Le Conseil de la fédération est d'accord avec cela et s'efforce de faire des progrès dans ce sens.

Le sénateur Moore : À propos du chiffre de l'approvisionnement, vous avez parlé de 20 milliards de dollars. Au départ, je pensais que vous disiez que c'était le total que toutes les provinces dépensent sur l'approvisionnement. Cependant, vous venez d'y inclure aussi le gouvernement fédéral.

M. Prentice : C'est vrai. Vous le verrez dans le dernier rapport de l'Institut C.D. Howe. Ce chiffre englobe l'approvisionnement fédéral et provincial.

Le sénateur Moore : Vous avez dit que les échanges commerciaux entre les provinces se chiffrent à 281 milliards de dollars. Avez-vous une idée de ce que ce serait s'il n'y avait pas d'obstacles. Qu'est-ce que nous manquons?

M. Prentice : Encore une fois, on en revient aux extrapolations de pourcentages. Est-ce une proportion de 0,2 p. 100 ou encore de 3,8 p. 100 qui nous échappe? Il s'agit là de la fourchette de taux avancée récemment par des commentateurs économiques. Nous pourrions débattre à l'infini de la quantification. Mais je pense que tout le monde serait d'accord pour dire que nous tentons d'améliorer l'efficacité de l'économie canadienne afin de pouvoir livrer concurrence sur la scène internationale.

Le sénateur Moore : Cela ne peut que s'améliorer.

M. Prentice : Si nous sommes freinés par des obstacles au sein même de notre pays, il est difficile de concurrencer des économies étrangères qui sont à l'avant-garde du commerce.

Le sénateur Moore : Vous avez parlé des divers domaines dont s'occupe le Conseil de la fédération, dont la mobilité de la main-d'œuvre, l'énergie, l'agriculture et la résolution de différends. Quel est le principal obstacle à l'enlèvement de ces barrières? S'agit-il des tarifs exigés par les provinces relativement au transport des marchandises qui franchissent leurs frontières dans un sens ou dans l'autre? J'ai cru comprendre que toutes les provinces avaient leurs propres droits juridiques à cet égard. Les obstacles sont-ils d'ordre monétaire?

M. Prentice : Nous parlons de l'économie canadienne dans son ensemble. Il est probable que selon les sujets, il y ait différents obstacles. La négociation en vue de l'élimination des barrières commerciales pour les produits agricoles constitue l'un des domaines les plus complexes. En ce qui a trait aux normes, une fois que le travail est fait, c'est une simple question de réunir tout le monde pour procéder à leur harmonisation.

Le sénateur Moore : Les barrières en matière d'agriculture ont-elles à voir avec les tarifs?

M. Prentice : Les secteurs agricoles de chaque province ont leur office de commercialisation, entre autres institutions. L'harmonisation de ces organismes partout au pays a constitué une difficulté. En ce qui a trait à la mobilité de la main-d'œuvre, on a affaire à des professions autoréglementées qui s'inscrivent dans le cadre des compétences des provinces, et qui sont autorisées par la loi provinciale.

Le fait est qu'une bonne partie de tout cela demande simplement beaucoup d'efforts. Nous devons en faire une priorité. Nous ne sommes pas le seul pays à être confronté à ces problèmes. Par exemple, l'Australie a réalisé de grands accomplissements en parvenant à une entente, et en effectuant le travail approfondi. La création de l'Union européenne a été un processus d'harmonisation, ou de reconnaissance mutuelle des différentes normes en vigueur. Ce fut un exercice laborieux, difficile et variable.

Le sénateur Moore : Il est difficile de discuter de cette question sans y accoler certains chiffres afin de souligner l'urgence et les avantages qu'il y a à essayer de franchir certains de ces obstacles. Quelle barrière coûte le plus cher? Avez-vous examiné cela? Y en a-t-il une dont nous devrions particulièrement prendre note?

M. Prentice : Nous devons nous concentrer sur la libre circulation de la main-d'œuvre et nous attacher à faciliter l'accréditation de professionnels afin de favoriser le mouvement de la main-d'œuvre dans le pays, et ainsi créer des occasions d'emploi et répondre aux besoins de l'économie. Je dis cela à la lumière des travaux du comité sur les trois domaines d'étude; de la référence à la pénurie de main-d'œuvre qualifiée dans l'économie canadienne, qui découle de facteurs démographiques; et du fait que tous les groupes de dirigeants d'entreprise que je rencontre insistent sur le fait que leur plus grande difficulté consiste à recruter des travailleurs qualifiés.

Le sénateur Moore : En ce qui a trait au travail du Conseil de la fédération, cela fait-il partie de vos responsabilités, en tant que ministre de l'Industrie, de surveiller les progrès de l'organisme?

M. Prentice : Ils pourraient contester votre utilisation du terme « surveiller », mais nous collaborons et travaillons ensemble. Selon cet organisme, d'ici le 1er avril 2009, il y aura une mobilité totale de la main-d'œuvre, dans la mesure où c'est réalisable.

Le sénateur Moore : Vous le reconnaissez, et ils l'admettent eux-mêmes; et vous travaillez tous à atteindre cet objectif.

M. Prentice : C'est exact.

Le président : Vous avez dit que c'était une question importante et que nous devions en faire une priorité. Est-ce ce que vous faites vous-même? Lorsque vous dites « nous », je tiens pour acquis que vous parlez du gouvernement fédéral.

M. Prentice : Cela va au-delà du gouvernement fédéral. Mais c'est en effet une priorité pour notre gouvernement. C'est pourquoi nous l'avons souligné lors du discours du Trône.

Cela demandera beaucoup de travail. Il faudra que le gouvernement fédéral assume un rôle de leadership, mais aussi que les provinces déploient beaucoup d'efforts et qu'on accepte d'accorder une importance prioritaire à la question. Qui plus est, cela nécessitera un travail approfondi au chapitre des emplois et des normes d'accréditation professionnelle.

Le président : Notre comité s'est réjoui de voir qu'on parlait de la question dans le discours du Trône. Le fédéral doit prendre les devants à cet égard. Espérons que le gouvernement actuel en fera une priorité.

Le sénateur Eyton : Je vais revenir sur l'un des thèmes qui ont déjà été soulevés, mais d'une manière plus précise.

Habituellement, en matière de commerce, il faut cerner un problème, évaluer son importance puis déterminer le coût qu'il représente. Une fois le coût établi, on précise un certain degré de priorité, de même que la façon et le moment de le régler.

J'aimerais revenir à l'aspect des coûts. Vous avez parlé d'un coût équivalant à 0,2 p. 100 de notre PIB. Mais ce qui était nouveau pour moi, c'était ce pourcentage de 3,8 p. 100 de notre PIB. C'est beaucoup plus élevé que je ne le pensais. Ce dernier chiffre tient probablement compte non seulement de ce que j'appelle les dépenses, qui sont plus facilement mesurables, mais également des coûts intangibles auxquels vous avez fait allusion, plus particulièrement ceux associés à la perte d'une occasion commerciale. Ces coûts intangibles sont plus difficiles à évaluer. Quel aurait été l'avantage de procéder autrement? Bien sûr, il s'agira d'un nombre plus élevé que celui des dépenses, qui constituent un coût direct et mesurable.

Nous avons un problème; nous devons établir les coûts et, ensuite, déterminer comment et quand régler le problème. Pour assumer une position de leadership, ce qui est clairement nécessaire, le gouvernement, et en particulier votre ministère, doivent avoir une bonne idée des coûts et des avantages pour les Canadiens. Vous-même devez avoir certaines convictions quant aux coûts que cela représente pour les Canadiens et à la nécessité de régler le problème. Pourriez-vous vous prononcer là-dessus?

M. Prentice : En ce qui concerne le pourcentage de 3,8 p. 100, soit le chiffre le plus élevé de la fourchette que j'ai présentée, il est tiré d'un rapport du Conference Board du Canada intitulé Death by a Thousand Paper Cuts : The Effect of Barriers to Competition on Canadian Productivity. C'est le pourcentage avancé par l'organisme. Le chiffre à l'extrémité inférieure de la fourchette, quant à lui, provient d'un rapport intitulé Interprovincial Barriers to Trade, qu'on appelle parfois également l'étude Copeland. Le pourcentage de 0,2 pourrait être une sous-estimation des effets. Comme vous l'avez dit, cela ne reflète nullement les occasions perdues.

J'aimerais établir un parallèle intéressant. À titre de ministre de l'Industrie, je suis chargé de conclure des ententes avec les gouvernements des États-Unis et du Mexique en ce qui a trait au Partenariat nord-américain pour la sécurité et la prospérité. Il y a une semaine, j'ai pris part à des discussions là-bas. Depuis la signature de l'ALENA, le commerce bilatéral entre le Canada et les États-Unis a doublé, et celui entre le Canada et le Mexique a quintuplé. Toute discussion à propos d'une non-conclusion de l'ALENA n'aurait pas tenu compte de ce genre d'accroissements exponentiels en matière de débouchés commerciaux.

Sur le plan national, nous devons parvenir à une économie canadienne fonctionnelle en éliminant les inefficacités de manière à pouvoir élargir nos possibilités économiques. À mon avis, les conséquences de telles mesures seront importantes. En particulier, cela permettra à tous les Canadiens de tirer pleinement parti de ce qui se produit, par exemple avec les sables bitumineux en Alberta ou dans le secteur manufacturier en Ontario.

Le sénateur Eyton : Ce que j'essayais de faire valoir, c'est que vous-même devez en arriver à une certaine conviction à propos des coûts. Ceux qui s'opposent à quelque changement que ce soit diront que la différence entre 2 ou 3 millions de dollars est relativement mince, et que nous n'avons pas à nous en faire. Quoi qu'il en soit, si l'on prend le pourcentage le plus élevé, on parle d'environ 50 milliards de dollars, ce qui constitue un problème critique auquel il faut remédier sur-le-champ.

C'est une manière différente de considérer la question. On devrait déterminer ses propres priorités. Si vous retenez le chiffre le plus élevé, vous faites davantage que ce que l'Accord sur le commerce intérieur a permis de réaliser en plus de 12 ans. Cet accord ne fonctionne pas très bien. Il pourrait fonctionner efficacement pendant une courte période, mais le problème est plus urgent que ce que l'accord a permis de gérer pendant sa douzaine d'années d'application.

Dans votre rapport sur le marché du travail, vous avez dit que nous aurions quelque chose l'année suivante. Or, nous sommes 12 ou 13 ans plus tard. En ce qui a trait au règlement des litiges, vous avez affirmé qu'il y avait des progrès, mais tout cela demeure en plan. On n'a toujours pas traité de l'énergie, de l'agriculture et des transports. Cela n'indique pas que les partis en font réellement une priorité. Il est difficile pour une organisation qui se réunit une fois l'an d'atteindre cet objectif.

M. Prentice : Pour l'essentiel, les critiques formulées à l'encontre de l'Accord sur le commerce intérieur tenaient à ce que sa disposition sur le règlement des différends manquait de mordant. J'ai lu quelque part que sur les huit décisions rendues en vertu de l'Accord sur le commerce intérieur, les provinces ont choisi d'en rejeter six.

En revanche, l'Entente sur le commerce, l'investissement et la mobilité de la main-d'œuvre est véritablement musclée et comporte d'importantes mesures pouvant faire l'objet d'évaluations. C'est peut-être ce qui explique la réticence de certains intervenants à adopter rapidement cette approche. Elle aura de réelles conséquences.

Le sénateur Eyton : L'existence de l'Entente sur le commerce, l'investissement et la mobilité de la main-d'œuvre et le fait que l'Ontario et le Québec soient en pourparlers laisse croire qu'un leadership fédéral fort manque à l'appel. Pourtant, cela me semble être une question importante qui nécessite un solide leadership de la part du fédéral. Cela pourrait dépasser le cadre de l'Accord sur le commerce intérieur.

M. Prentice : Pendant bien des années, il y a eu une absence de leadership de la part du fédéral dans ce dossier. Je peux vous dire que c'est une priorité pour le gouvernement actuel. On l'a souligné dans le discours du Trône, et nous avons l'intention de nous en occuper, comme je l'ai expliqué aujourd'hui.

Le sénateur Eyton : J'ai été heureux de prendre note de votre nomination d'un groupe d'experts chargés d'examiner la réglementation des valeurs mobilières; et d'autres initiatives de ce côté pourraient être de mise, encore une fois, en dehors de l'Accord sur le commerce intérieur.

M. Prentice : Ce qui est différent, en ce qui a trait à l'économie mondiale aujourd'hui, ce n'est pas la mesure dans laquelle nous avons de la concurrence internationale — il en a toujours été ainsi —, mais la mesure dans laquelle les révolutions technologiques dans le domaine des communications et des transports ont accéléré le processus. Maintenant, le marché mondial concurrentiel se transforme très rapidement, voire même parfois instantanément. Nous devons mettre au point de nouvelles règles commerciales dans l'ensemble du Canada, qui ne nuisent pas à notre capacité de livrer concurrence à tous les niveaux, dans toutes les régions et dans chaque industrie. Toutes les provinces doivent se concentrer là-dessus.

Le président : Monsieur le ministre, je suis bien conscient que votre temps est compté; mais j'aimerais permettre à deux autres sénateurs de vous interroger.

Le sénateur Jaffer : La raison pour laquelle nous voulons aller en Inde et en Chine est que nous désirons profiter des marchés qu'il y a là-bas. Comme vous en avez parlé, c'est frustrant de ne pouvoir accéder à notre propre population.

Nous venons tous les deux de régions de l'Ouest du Canada et sommes satisfaits de l'Entente sur le commerce, l'investissement et la mobilité de la main-d'œuvre. J'ai été heureux que nos deux premiers ministres examinent cette dernière. Quoi qu'il en soit, dans une perspective fédérale, il est dangereux de créer des blocs régionaux, surtout lorsque deux provinces ont une économie florissante. Si l'Alberta et la Colombie-Britannique coordonnent leurs réglementations respectives, que les provinces de l'Atlantique font de même entre elles et qu'un conflit survient, qu'adviendra-t-il du libre-échange? L'Alberta et la Colombie-Britannique poursuivront de leur côté, les provinces de l'Atlantique en feront autant, et il restera des problèmes à régler.

Mes collègues et vous avez exprimé une opinion que je partage : la perspective de blocs régionaux ne m'enchante pas. Nous devons trouver des moyens de créer des blocs canadiens. Je sais que cette Entente sur le commerce, l'investissement et la mobilité de la main-d'œuvre vous convient, comme à moi-même, mais j'ai certaines réserves.

M. Prentice : Je respecte vos propos. Je me contenterai de dire que si les négociations relatives à l'Entente sur le commerce, l'investissement et la mobilité de la main-d'œuvre entre l'Alberta et la Colombie-Britannique, qui ont avancé à une vitesse lumière comparativement au reste du pays pendant des générations, fournissent l'élan nécessaire pour aller de l'avant à une échelle plus nationale, notre pays en sera enrichi. J'ajouterais, entre parenthèses, que c'est exactement ce qui est arrivé en Australie, où deux États sont à l'origine d'une action visant l'élimination des barrières commerciales sur le marché intérieur, ce qui est rapidement devenu une préoccupation nationale qui a rallié tout le monde. Il est utile de se le rappeler.

Le sénateur Jaffer : Monsieur le ministre, c'est une très bonne chose que deux États aient lancé le mouvement, mais sur le plan fédéral, nous devons nous assurer que cela se répande plus rapidement.

M. Prentice : Oui, et nous le ferons. Bien sûr; c'est pour cela que nous avons souligné la question dans le discours du Trône.

Le sénateur Goldstein : Je vais vous faire un peu de publicité pour votre prochaine élection, peu importe quand elle aura lieu. Je veux que vos électeurs sachent que vous quittez la Colline très tard le soir pour revenir très tôt le lendemain matin. Je le sais, parce que nous sommes voisins; nous habitons tous les deux au dixième étage du même édifice. Nous savons que vous travaillez très fort, et que vos électeurs en ont pour leur argent. Il est clair que vos efforts produisent des résultats.

Les sénateurs Angus, Meighen et moi sommes des produits de Frank Scott, qui nous a enseigné le droit constitutionnel et qui respectait énormément les dispositions sur la paix, l'ordre et le bon gouvernement de la Constitution. Pendant de nombreuses années, il a adopté une position contraire à celle du Conseil privé, à savoir que le gouvernement fédéral détenait des pouvoirs qu'il n'exerçait pas nécessairement. Les gouvernements précédents n'ont pas rué dans les brancards pour ce qui est d'aider ou d'inciter les provinces à agir aussi rapidement qu'elles le devaient dans ce dossier. Je vous enjoins d'intervenir plus énergiquement pour exprimer aux provinces votre impatience à voir des progrès se réaliser encore plus rapidement qu'en ce moment.

Vous avez parlé tout à l'heure de l'expérience de l'Union européenne, dont la création, comme vous le savez, a été motivée par des considérations d'ordre économique. Cela est allé beaucoup plus loin, à tel point qu'au cours des derniers mois, les membres de l'Union européenne ont renoncé à leur « droit » — je mets ce mot entre guillemets — d'avoir un ministre des Affaires étrangères pour chaque pays. On est sur le point d'avoir un seul ministre des Affaires étrangères pour l'ensemble de l'Union européenne.

J'œuvre activement au sein de l'Union européenne grâce à un comité parlementaire auquel je collabore. Les gens continuent de me dire qu'il est très difficile de faire des échanges commerciaux avec le Canada, car on doit composer avec les règlements provinciaux. Le cas le plus évident est, bien sûr, celui des vins et spiritueux.

Cette situation est extrêmement frustrante pour les Français, les Italiens et, dans une moindre mesure, les Espagnols et les Portugais. Pour d'autres pays également, il est pratiquement impossible, de leur point de vue, de faire des échanges commerciaux avec le Canada. Il est beaucoup plus facile pour eux d'avoir des relations commerciales avec les États-Unis qu'avec le Canada. À mes yeux, cela constitue une indication et une justification de plus pour que le gouvernement fédéral exerce les pouvoirs qu'il détient. Le gouvernement doit être capable de poursuivre ce processus et d'arrêter de perdre, qu'il s'agisse de 0,3 p. 100 ou de 3,8 p. 100 de notre PIB. C'est pure sottise.

M. Prentice : Il s'agit là de commentaires très éclairés, particulièrement en ce qui a trait à la loi. Nous n'avons pas le temps d'aborder la question des autorités judiciaires. Il y a tout un débat à savoir si la décision prise à la fin du XIXe siècle par le comité judiciaire du Conseil privé était le fondement qui convenait pour définir une économie du XXe siècle, mais nous en sommes là.

Lorsque je considère le pouvoir constitutionnel que détient le gouvernement fédéral, je vois un certain nombre de dispositions importantes. L'article 121 est très clair à l'égard de la circulation des marchandises entre les provinces, et les tribunaux ont laissé entendre qu'ils étaient prêts à y donner un peu de vitalité. Par ailleurs, des lois émanant de la Charte portent sur la mobilité interprovinciale de la main-d'œuvre. On a beaucoup parlé du pouvoir du gouvernement fédéral en matière de commerce, mais la Couronne fédérale demeure investie du pouvoir important d'agir dans le sens d'un espace économique commun.

Le président : Monsieur Prentice, je crois comprendre que vous êtes obligé de nous quitter.

M. Prentice : Oui, monsieur, je dois partir.

Le président : Sénateur Ringuette, je vous en dois une; et nous sommes très fiables pour ce qui est de rembourser nos dettes.

Je voudrais vous remercier, monsieur le ministre, de même que votre fonctionnaire, M. Paul Boothe. Vos informations étaient fort bien documentées; il est clair que vous maîtrisez le sujet et que, par conséquent, vous êtes bien outillés pour apporter ce leadership que nous jugeons tous nécessaire. J'espère que lorsque nous publierons notre rapport, ce printemps, vos fonctionnaires, vos collègues du Cabinet et vous-même prendrez bonne note de nos recommandations.

M Prentice : Merci, monsieur le président. Ce fut un plaisir d'être parmi vous. Je vous encourage certainement à poursuivre avec M. Boothe. Il n'a pas eu beaucoup d'occasions d'intervenir aujourd'hui, mais il est l'une des personnes les plus brillantes que nous ayons recrutées dans la fonction publique fédérale. Il connaît extrêmement bien le domaine, et pourra vous être utile.

Le président : Est-ce bien au rapport Copeland que vous avez fait référence, tout à l'heure? Pourriez-vous ajouter un mot là-dessus, monsieur?

Paul Boothe, sous-ministre adjoint principal, Industrie Canada : Oui, c'est exact. Le professeur Brian Copeland est président du Département d'économie de l'Université de Colombie-Britannique. La faible proportion qu'il a avancée provient de ce qu'il est prêt à considérer comme des obstacles par rapport au simple exercice de leurs droits constitutionnels par les provinces. Il s'agit moins d'un désaccord au sujet de la dimension économique que d'un désaccord au sujet des autorités politiques, je dirais.

Le président : Très bien. Merci.

Nous allons maintenant entendre un second groupe de témoins au sujet de la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole, qui est pertinente à notre étude du projet de loi C-12, Loi modifiant la Loi sur la faillite et l'insolvabilité.

[Français]

La deuxième partie de notre rencontre aujourd'hui touche la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole.

[Traduction]

En ce qui a trait à la législation sur la médiation en matière d'endettement agricole, l'histoire canadienne remonte à la Loi sur l'examen de l'endettement agricole de 1986, qui a été remplacée par l'actuelle Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole en avril 1998. Nous sommes intéressés à entendre parler de son fonctionnement, de sa réussite pour ce qui est d'aider les agriculteurs insolvables et d'autres questions connexes. Nous n'avons pas étudié cette loi jusqu'ici, au cours de notre examen des lois sur l'insolvabilité, ni dans le cadre de notre vaste étude, en 2003. Par conséquent, l'information qu'on nous communiquera aujourd'hui sera en grande partie nouvelle pour nous.

Bien qu'il n'y ait pas d'obligation d'effectuer un examen parlementaire de la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole, le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire réalise une étude tous les trois ans, puis dépose un rapport au Parlement. Le plus récent a été présenté en mai 2005. Dans ce rapport, le ministre note ce qui suit :

Ces dernières années, l'incidence de situations financières très défavorables dans le secteur agricole et, de ce fait, la demande de services de médiation en matière d'endettement agricole ont été moindres qu'au cours des années 80 et au début des années 90. Cela dit, les niveaux d'activité actuels demeurent non négligeables, et la fourniture de services de médiation en matière d'endettement agricole est importante pour les agriculteurs qui ont besoin de ce service...

Le prochain rapport du ministre doit être déposé cette année.

Dans ce contexte que je viens de décrire, nous avons avec nous aujourd'hui, d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, Mme Jody Aylard, directrice générale de la Direction des programmes d'aide financière et de renouveau; et M. Jean-Denis Méthot, gestionnaire, Planification et coordination, Division du renouveau. Bienvenue à vous deux.

Jody Aylard, directrice générale, Direction des programmes d'aide financière et de renouveau, Agriculture et Agroalimentaire Canada : Merci. C'est un plaisir d'être ici. Avec l'accord du président et des membres du comité, je vais faire une déclaration d'ouverture qui me permettra de vous donner un aperçu du Service de médiation en matière d'endettement agricole, puis nous serons disponibles pour répondre à vos questions.

Le président : Ce serait bien.

Mme Aylard : Comme vous l'avez mentionné, c'est à la fin des années 1930 que la législation sur l'endettement agricole a vu le jour, alors qu'un ensemble de problèmes financiers majeurs avait amené le gouvernement à promulguer la Loi sur les arrangements entre cultivateurs et créanciers. Cette loi particulière, qui était demeurée inopérante depuis les années 1940, a été abrogée en 1988.

Au milieu des années 1980, le nombre exceptionnellement élevé de cas d'insolvabilité et de faillites agricoles a poussé le gouvernement à revoir la législation canadienne afin d'offrir une protection aux agriculteurs insolvables. Vous vous rappellerez que, à ce moment-là, les taux d'intérêt étaient élevés et le prix des denrées était faible.

La Loi sur l'examen de l'endettement agricole a été élaborée en 1986 pour faciliter la résolution des problèmes d'endettement des agriculteurs. Du 5 août 1986 jusqu'au 30 novembre 1997, près de 28 000 demandes ont été présentées au Bureau d'examen de l'endettement agricole. La Loi sur l'examen de l'endettement agricole a assuré aux agriculteurs insolvables et ceux qui avaient des problèmes financiers une protection contre la forclusion, une analyse de leur situation financière et des options, une tribune pour l'examen de leur situation financière avec un groupe d'experts et une possibilité de négocier un règlement ou un arrangement avec leurs créanciers.

À la lumière de l'expérience et des connaissances acquises avec la loi, on a décidé de l'abroger et de la remplacer par une loi offrant une protection contre la forclusion et prévoyant le recours à un médiateur professionnel impartial et unique, au lieu d'un groupe d'experts. Le médiateur offre une approche plus équilibrée vis-à-vis des agriculteurs et des prêteurs et permet une utilisation plus efficace des ressources.

L'objectif directeur de la législation actuelle et précédente est de fournir une tribune où les agriculteurs insolvables et leurs créanciers peuvent tenter de s'entendre concernant les dettes et les obligations et ce, à la satisfaction de toutes les parties. Le service, qui est facultatif pour les agriculteurs et les créanciers, est un processus confidentiel.

En vertu de la loi actuelle, qui a été adoptée en 1998, le gouvernement offre deux types de services. L'agriculteur peut présenter une demande, en vertu de l'alinéa 5(1)b) de la loi, pour un examen de sa situation financière et la médiation lorsqu'il a besoin d'aide pour résoudre ses difficultés financières.

L'agriculteur peut aussi présenter une demande, en vertu de l'alinéa 5(1)a) de la loi, pour la suspension des recours pris contre lui, l'examen de sa situation financière et la médiation s'il fait face à des recours judiciaires de la part du créancier pour non-respect de ses obligations envers ce dernier. La suspension des recours initiale est valable pour 30 jours; l'agriculteur dispose en tout de trois périodes de report des recours totalisant 120 jours. Dans les deux cas, les agriculteurs doivent être insolvables pour être admissibles.

Sur réception de la demande, un expert-conseil en finances du secteur privé est assigné au dossier. Il entre en contact avec les créanciers et choisit une date de rencontre, qui sera habituellement environ 45 jours après le dépôt de la demande de l'agriculteur. L'expert-conseil procédera alors à un examen détaillé de la situation financière de l'agriculteur, préparera les états financiers de l'exploitation agricole, élaborera un plan de rétablissement choisi par l'agriculteur et participera à la rencontre de médiation. Le rôle du médiateur professionnel du secteur privé est de fournir des services de médiation aux agriculteurs insolvables et à leurs créanciers afin de les aider à conclure une entente mutuellement satisfaisante pendant la réunion de médiation.

Les services des experts-conseils en finances professionnels et des médiateurs sont fournis à titre gracieux. Agriculture et Agroalimentaire Canada, AAC, procède par voie concurrentielle officielle pour embaucher ses 52 médiateurs et 85 experts-conseils en finances.

AAC offre ce service par l'entremise de cinq bureaux régionaux : Fredericton, qui dessert toutes les provinces de l'Atlantique, Québec, Guelph, Regina, et Edmonton, pour l'Alberta, la Colombie-Britannique et les territoires. On trouve 15 employés dans ces bureaux régionaux, qui sont chargés de l'administration générale du programme : accepter les demandes, déterminer si le demandeur a droit au service, coordonner les réunions de médiation, traiter les appels, et ainsi de suite. On trouve aussi deux employés au bureau d'Ottawa, qui sont responsables de la coordination générale du Service de médiation en matière d'endettement agricole; ils doivent, par exemple, coordonner les demandes de propositions pour l'embauche des professionnels, communiquer avec le bureau du ministre concernant la nomination des membres du comité d'appel de la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole, et répondre aux demandes de renseignements provenant de la ligne sans frais.

Le Service de médiation en matière d'endettement agricole compte cinq comités d'appel régionaux indépendants qui permettent aux agriculteurs ou aux créanciers d'un agriculteur d'en appeler d'une décision prise par l'administrateur régional de la loi d'Agriculture Canada. Les appels peuvent porter sur l'admissibilité d'un demandeur, le prolongement et la levée de la suspension des recours ou, encore, la levée de la suspension des recours en raison du non-respect des directives de tutelle. On recense à ce jour 364 dossiers d'appel.

Depuis que la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole est entrée en vigueur, le 1er avril 1998, le Service de médiation en matière d'endettement agricole a reçu un total de 5 992 demandes de partout au Canada. Environ 82 p. 100 des demandes ont donné lieu à des signatures d'ententes. Lorsqu'aucune entente n'est conclue en vertu de la loi, l'agriculteur peut examiner d'autres avenues pour résoudre ses problèmes financiers. L'une de ces avenues consiste à recourir volontairement à la Loi sur la faillite et l'insolvabilité. Il est à noter que les agriculteurs ne peuvent être forcés de déclarer faillite à moins que leur ferme ne soit une société.

Bien que le nombre de demandes soit de beaucoup inférieur à ce qu'il était dans les années 80, alors que le Bureau d'examen de l'endettement agricole recevait jusqu'à 3 000 demandes par année, les niveaux d'activité actuels sont encore importants, avec une moyenne annuelle de près de 450 demandes au cours des cinq dernières années. Une différence importante à noter entre le Bureau d'examen de l'endettement agricole et ce que nous faisons aujourd'hui, c'est que nous nous occupons seulement des agriculteurs insolvables, alors que la loi précédente prévoyait une aide aux agriculteurs en difficulté financière également; c'est pourquoi le nombre de demandes était beaucoup plus élevé dans le cadre de la loi précédente.

Les entreprises agricoles diffèrent beaucoup des autres entreprises du fait que la maison familiale fait habituellement partie de l'entreprise. En conséquence, si l'entreprise est en danger, la maison l'est aussi. Le Service de médiation en matière d'endettement agricole offre une structure qui peut mener à la résolution des problèmes d'endettement et ce, gratuitement, tant pour l'agriculteur que pour les créanciers. Il s'agit d'un programme qui a atteint sa maturité et qui représente un volet reconnu des services offerts au secteur agricole.

L'article 28 de la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole exige du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire qu'il procède à un examen périodique des activités menées en vertu de la loi, et nous prévoyons soumettre un rapport au Parlement au printemps pour nous acquitter de cette obligation.

Le président : Merci. Votre collègue a-t-il un exposé à présenter?

Jean-Denis Méthot, gestionnaire, Planification et coordination, Division du renouveau, Agriculture et Agroalimentaire Canada : Nous allons répondre aux questions.

Le président : Sénateur Gustafson, en reconnaissance de votre grande expertise dans ce domaine, je crois qu'il convient que vous soyez le premier à poser des questions.

Le sénateur Gustafson : Concernant les demandes que reçoit votre service, qu'arrive-t-il lorsqu'un agriculteur perd sa maison? J'ai cru comprendre qu'une faillite ne pouvait pas s'appliquer au quart de section sur lequel se trouve votre maison; cette partie est exclue.

M. Méthot : Ce quart de section est en Saskatchewan seulement, et cela fait partie du programme de médiation provincial de la Saskatchewan. Cela n'existe pas ailleurs au Canada, à ma connaissance.

Le sénateur Gustafson : Je crois que vous en avez parlé, mais sur le nombre de demandes d'aide que vous recevez, quel est le pourcentage d'agriculteurs qui évitent la faillite grâce à vous?

Mme Aylard : Sur le nombre total de demandes présentées chaque année, un arrangement acceptable tant pour le créancier que pour l'agriculteur est conclu dans environ 82 p. 100 des cas.

Le sénateur Gustafson : C'est beaucoup.

M. Méthot : Il s'agit d'un document juridique signé par l'agriculteur et les créanciers qui acceptent l'arrangement.

Le sénateur Eyton : Puisque nous parlons de l'arrangement, combien de cas s'avèrent une réussite totale?

M. Méthot : Le taux de réussite de 82 p. 100 concerne la conclusion d'un arrangement. Nous voulons maintenant communiquer avec les agriculteurs qui ont fait appel au service de médiation il y a deux ou trois ans pour savoir où ils en sont aujourd'hui. C'est nouveau; nous avons entrepris cela il y a quelques mois. Dans la plupart des cas, ces agriculteurs exploitent toujours une ferme. Leur mode d'exploitation peut avoir changé et il peut y avoir consolidation de dettes, mais ils sont encore là aujourd'hui. Parmi les 21 agriculteurs recensés, 20 exploitent encore une ferme, et un seul a quitté l'agriculture.

Le sénateur Gustafson : Certains agriculteurs vendent leur terre et leur machinerie sans faire de bruit. Ils ne veulent pas d'histoire et ils quittent l'agriculture, fauchés. Avez-vous des chiffres là-dessus? Il me semble qu'il y a plus d'agriculteurs qui quittent le secteur de cette façon que d'agriculteurs qui déclarent faillite.

Mme Aylard : Nous n'avons pas de statistiques là-dessus. Beaucoup ont participé à notre programme et beaucoup ont fait faillite. Toutefois, nous ne recueillons aucune donnée sur les agriculteurs qui ont géré eux-mêmes leurs affaires.

Le sénateur Gustafson : D'après mon expérience, les agriculteurs qui quittent l'agriculture sont probablement plus nombreux à le faire de cette façon, malheureusement, sans même savoir qu'ils peuvent obtenir de l'aide.

M. Méthot : Nous sommes certains qu'ils sont assez nombreux. L'an dernier, nous avons mené une campagne de sensibilisation partout au Canada. Nous avons inséré une brochure du Service de médiation en matière d'endettement agricole dans un grand nombre de revues agricoles. Nous avons aussi acheté de la publicité pour faire connaître le programme non seulement aux agriculteurs, mais aussi aux créanciers et aux comptables, les gens avec qui les agriculteurs travaillent, de sorte que s'ils s'entretiennent avec un agriculteur qui connaît des difficultés financières, ils peuvent l'informer de l'existence d'un service confidentiel et gratuit.

Le sénateur Gustafson : Je voulais aborder un autre sujet. Le prix des grains est très élevé et dépasse tout ce que nous avons vu au cours des 50 dernières années. Prenons par exemple un agriculteur qui n'a pas eu de récolte en raison d'une sécheresse. Le coût des intrants, comme les engrais, est à la hausse. Le coût des engrais est passé de 300 à 700 $ la tonne, et les coûts des combustibles ont doublé. Le pétrole se vend 106 $ le baril aujourd'hui. Il y a aussi le coût de la machinerie, et ainsi de suite. Cet agriculteur aura beaucoup plus de difficultés que si les prix des grains n'avaient pas grimpé, parce que les coûts des intrants sont difficiles à absorber.

Êtes-vous conscients de cela?

M. Méthot : Bien sûr. Nous suivons toujours de près les chiffres pour la médiation en matière d'endettement agricole, par secteur. À l'heure actuelle, ce problème ne touche pas les producteurs de céréales, mais nous voyons le nombre de demandes augmenter dans le secteur de l'élevage, surtout dans l'Est du Canada.

Le sénateur Gustafson : Ce sera extrêmement difficile pour ces agriculteurs qui n'ont eu aucune récolte l'an dernier. Leurs silos sont vides. Ce sera très coûteux d'ensemencer de nouveau puisqu'ils n'ont rien pour le faire.

Le sénateur Harb : C'est un sujet intéressant. Je ne connaissais pas la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole. Je crois que c'est excellent.

Croyez-vous que cette initiative devrait être élargie et appliquée dans d'autres secteurs, par exemple avec l'adoption d'une loi sur la médiation dans le secteur manufacturier? Quelle est votre expérience dans ce domaine?

Mme Aylard : Je n'ai aucune expérience dans le domaine des faillites ou dans d'autres secteurs. Je ne peux pas dire dans quel autre secteur cette mesure pourrait s'appliquer. Cette question dépasse mon expertise.

Nous recevons des commentaires positifs sur le caractère confidentiel du service gratuit et la capacité d'en arriver rapidement à un règlement pour toutes les parties. Dans la mesure où ces éléments pourraient profiter à d'autres secteurs, il y aurait certainement une possibilité. Je crois que la médiation s'impose de plus en plus comme moyen de régler les différends dans plusieurs domaines juridiques.

Le président : Comme le règlement extrajudiciaire de conflits.

M. Méthot : Dans le cadre de notre examen, nous avons demandé que des exemples de médiation dans d'autres pays ainsi qu'au Canada soient examinés. Nous savons qu'il existe des programmes de médiation pour les agriculteurs ailleurs. De plus, des programmes de médiation se répandent dans d'autres secteurs que l'agriculture. Il existe, par exemple, un programme de médiation obligatoire en Ontario. Ce sera intéressant de voir ce qui se fait ailleurs. La médiation est un processus relativement peu coûteux, mais rapide lorsqu'un règlement est nécessaire.

Le sénateur Harb : Supposons une situation où M. Angus est le créancier et M. Moore est un demandeur. Vous essayez de faire la médiation entre les deux. Vous avez réglé 95 p. 100 des questions en litige et il reste 5 p. 100 à régler. Qu'arriverait-il si, pour une raison quelconque, quelqu'un devait mettre la main dans sa propre poche? Ce ne serait pas M. Moore, puisqu'il n'a pas d'argent. M. Angus dit alors : « C'est tout. J'ai donné tout ce que je pouvais. »

Avez-vous accès à un fonds? Quel est votre budget et combien d'argent avez-vous pour faire différentes choses?

Mme Aylard : Notre budget annuel est d'environ 3,3 millions de dollars. Les salaires représentent environ 1 million de dollars, et le reste du budget est consacré au fonctionnement. Un important pourcentage sert à financer les services des médiateurs et des experts-conseils en finances, qui sont des consultants externes, qui effectuent l'analyse financière de la ferme et qui mèneront la médiation afin de régler la situation. Nous n'offrons pas de financement pour régler le genre de situation que vous avez décrit.

Le président : Devriez-vous le faire ?

Mme Aylard : Nous avons un taux de réussite de 83 p. 100 sans cela. Je crois que notre rendement est bon. Notre service consiste à fournir les services d'un tiers impartial pour régler les différends entre les deux parties.

Le sénateur Meighen : J'aimerais revenir aux commentaires faits par le sénateur Harb. J'ai eu l'honneur de participer aux travaux du comité des peuples autochtones hier et nous parlions des revendications territoriales au Nunavut. Un des problèmes vient du fait qu'il n'y a pas d'échange entre le gouvernement fédéral et les Inuits. Il nous faut un facilitateur ou un médiateur.

Votre taux de réussite est extrêmement encourageant. Si je retourne au Comité des peuples autochtones, je parlerai de votre taux de réussite et je dirai que même si la présence de deux cultures différentes complique les choses, la médiation pourrait être une façon d'en arriver à un consensus. Un accord a été signé, mais on ne s'entend pas sur sa mise en oeuvre.

Le Québec est pratiquement le miroir de la Saskatchewan des dernières années. Les demandes venant des autres provinces sont à la baisse. Pourquoi, selon vous, les demandes ont-elles augmenté soudainement au Québec? Vous avez dit que de nombreuses demandes proviennent des producteurs de porc, mais quelle est la raison?

M. Méthot : C'est le secteur de l'élevage et les problèmes que posent aux éleveurs le prix des aliments du bétail et le prix de leurs produits. Le Québec présente la moitié des demandes de médiation en matière d'endettement agricole de tout le Canada cette année. En comparaison, la Saskatchewan est loin derrière.

Toutefois, cette situation pourrait changer du jour au lendemain. Il suffit d'une petite chose, comme l'ESB. Après le fameux mois de mai marqué par l'encéphalopathie spongiforme bovine, beaucoup de producteurs de bœuf sont venus nous voir et les demandes ont grimpé. Aujourd'hui, le nombre de demandes de médiation provenant des éleveurs de bovins de boucherie a diminué.

Le sénateur Meighen : Les producteurs de porc du Québec représentent-ils un fort pourcentage des demandes par rapport au reste du pays?

M. Méthot : Oui.

Le sénateur Meighen : Le volume de la production porcine suscite des inquiétudes, mais c'est un autre sujet.

Puisque vous êtes les personnes responsables d'appliquer les dispositions de la loi, voyez-vous des choses dans la loi qui vous causent des problèmes particuliers? Y a-t-il des lacunes, quelque chose que vous aimeriez voir ajouter dans la loi pour vous permettre de faire certaines choses? Y a-t-il des choses que vous ne pouvez pas faire dans le cadre actuel de la loi?

Mme Aylard : Nous pourrions renforcer les mesures coercitives en cas d'infraction à la loi. Je dois faire une précision à ce sujet : il n'y a pas eu beaucoup d'infraction depuis que la loi est en place. Ce n'est pas un problème fréquent. Toutefois, nous n'avons pas eu beaucoup de succès pour ce qui est du suivi dans ces cas.

L'article 27 de la loi prévoit une procédure criminelle en cas de violation de la loi. Nous devons obtenir la collaboration des agents de la GRC, mais ce n'est pas une grande priorité pour eux. Nous les avons rencontrés l'automne dernier et avons établi une période d'essai de collaboration. Nous leur avons donné toute l'information dont nous disposions pour la conduite d'une enquête, et ils ont ce dont ils ont besoin pour entreprendre les prochaines étapes. Toutefois, nous n'avons pas eu l'occasion d'utiliser cela depuis que nous avons conclu cet arrangement.

Le sénateur Meighen : Quelle est la prochaine étape?

Mme Aylard : L'enquête.

Le sénateur Meighen : Lorsqu'elle sera terminée, quelle sera la prochaine étape? Supposons qu'il n'y a pas d'entente.

Mme Aylard : La poursuite devant un tribunal est la prochaine étape.

Le sénateur Meighen : Qui ferait cela? Le créancier serait-il responsable de cela?

Mme Aylard : Tout dépendrait de l'infraction.

Le sénateur Meighen : Supposons que l'agriculteur avait accepté de payer 20 cents le dollar sur une certaine période de temps et ne respecte pas cette entente. Le créancier pourrait-il s'adresser aux tribunaux?

M. Méthot : Une fois l'entente signée, notre travail est terminé. Si l'entente n'est pas respectée par la suite, l'agriculteur et les créanciers devront trouver eux-mêmes une solution.

Lorsque nous parlons d'une infraction à la loi, c'est une infraction durant une période où il y a suspension des recours. Une autre infraction peut avoir lieu lorsque le créancier garanti omet d'envoyer à l'agriculteur un avis d'intention de réaliser une garantie. Cet avis donne à l'agriculteur 15 jours ouvrables pour communiquer avec le Bureau de médiation en matière d'endettement agricole. Si l'agriculteur ne répond pas, des mesures seront prises. Si le créancier n'envoie pas cet avis ou s'il y a une infraction durant la suspension des recours, c'est alors que nous devons faire appel à la GRC. Les articles 22, 23 et 27 de la loi portent sur les infractions à la loi.

Le sénateur Meighen : Avez-vous fait des propositions pour renforcer la loi?

M. Méthot : Nous explorons la chose maintenant. C'est pour cette raison que nous avons rencontré la GRC, et nous essayons de déterminer comment nous pouvons en arriver à des solutions possibles avec nos bureaux régionaux.

Mme Aylard : Comme nous l'avons dit tout à l'heure, nous sommes au beau milieu de notre examen de trois ans. Ce sera l'occasion d'examiner cette question et d'autres où il y a place à amélioration. Nous nous attendons à avoir ce rapport bientôt.

Le sénateur Tkachuk : Vous avez fait remarquer que jusqu'en 1997, environ 28 000 demandes ont été adressées au Bureau d'examen de l'endettement agricole. Ces demandes ont été présentées par des gens qui avaient des problèmes et qui cherchaient de l'aide sans toutefois être insolvables, et aussi par des gens qui étaient en situation d'insolvabilité.

Après l'adoption de la Loi sur la médiation en matière d'endettement, en 1997, les chiffres semblent tomber d'un coup. À cette époque, il y avait des problèmes extraordinaires et le prix du blé n'avait jamais été aussi bas. Est-ce que la loi a réglé le problème, ou que s'est-il passé?

Mme Aylard : Vous avez raison. Dans le cadre de la loi précédente, les agriculteurs qui avaient des problèmes financiers et les agriculteurs insolvables avaient accès au service. Environ un tiers était insolvable, soit quelque 9 000, et les autres avaient des problèmes financiers, mais n'étaient pas insolvables.

Ce qu'il faut comparer, ce sont les 9 000 agriculteurs insolvables durant cette période de 11 ans et les quelques 6 000 agriculteurs insolvables qui ont présenté une demande en vertu de la nouvelle loi. Le nombre a baissé. Nous avons observé une plus grande stabilité financière dans le secteur agricole. Il y a plusieurs raisons à cela, mais la diminution par rapport à la période précédente n'est pas aussi importante que ce que laissent supposer les statistiques.

Le sénateur Tkachuk : Le nombre d'agriculteurs qui se prévalaient du programme pour régler leurs problèmes avant la faillite semblait important. Pourquoi attendre que la personne soit acculée à la faillite si elle peut parer le coup? Était-ce une bonne idée d'avoir un programme en deux étapes? Est-ce encore une bonne idée?

M. Méthot : En 1998, avec l'adoption de la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole, les agriculteurs qui éprouvaient des difficultés financières ne pouvaient plus demander un examen de leur situation financière et une médiation dans le cadre de ce service. Toutefois, le Programme de consultation agricole a été créé. Un expert passait cinq jours ouvrables avec l'agriculteur pour faire une évaluation de la ferme et dresser un plan d'action. Ce programme était conçu pour les agriculteurs qui étaient aux prises avec des difficultés financières ou sur le point de l'être. Ce programme a duré jusqu'à la création des Services-conseils aux exploitations agricoles canadiennes. Le nouveau service n'a pas été offert en même temps dans toutes les provinces parce qu'il fait partie du Cadre stratégique pour l'agriculture. Entre 1998 et le début du Programme de consultation agricole, environ 5 000 personnes ont présenté des demandes.

Le volet Renouveau du Cadre stratégique pour l'agriculture présente les Services-conseils aux exploitations agricoles canadiennes. Ceux-ci comprennent un service qu'on appelle Évaluation de l'exploitation agricole. Tous les agriculteurs canadiens y ont accès. Ils ont le droit de s'en prévaloir une fois au coût de 100 $. Jusqu'à ce jour, environ 18 000 agriculteurs du Canada ont tiré avantage de ce service. Certains détiennent 100 p. 100 des capitaux et d'autres, très peu. Par conséquent, un vaste éventail d'agriculteurs utilise ce service.

C'est ainsi que nos services ont évolué pour passer de l'examen de l'endettement agricole à la médiation en matière d'endettement agricole et du Programme de consultation agricole à des services-conseils.

Le sénateur Tkachuk : Vous nous avez donné des statistiques sur le nombre d'agriculteurs à qui a profité le mécanisme de médiation. Je ne sais plus trop si vous avez dit avoir les statistiques des trois dernières années ou être en train de les recueillir.

M. Méthot : Nous sommes en train de recueillir les statistiques des trois dernières années afin de les analyser et d'en faire rapport au Parlement.

Le sénateur Tkachuk : Serait-il possible et vaudrait-il la peine de remonter encore plus loin? Ce serait bon à savoir. Je suis étonné que nous n'ayons pas tenu de statistiques. Il s'en dégage une attitude « nous avons la solution, à plus tard », et l'on ne sait pas comment on y est arrivé.

Mme Aylard : Actuellement, le programme ne prévoit pas de vérification rétrospective avec les agriculteurs. Pour répondre à votre question précédente sur les améliorations, nous pourrions retourner chercher plus de renseignements pour évaluer les effets à long terme de ce programme. Nous pourrions du même coup déterminer là où nous avons réussi et là où nous pourrions nous améliorer.

Nous commençons à le faire, mais il faut pour cela sonder les clients. Nous remontons à trois ans seulement. C'est là où nous en sommes.

Le sénateur Tkachuk : Il serait bon de savoir si ce programme vaut la peine ou non. Vous pouvez bien mener cette entente à terme, mais cela ne veut pas dire qu'elle a été fructueuse. Quand vous aurez terminé votre étude sur les trois dernières années, nous aimerions la voir. J'aimerais que vous envoyiez cette étude à notre greffière quand vous aurez terminé. Nous l'apprécierions beaucoup.

Mme Aylard : Le rapport qui en découlera doit être déposé au Parlement. Nous allons le présenter en mai, si ma mémoire est bonne.

M. Méthot : En mai ou en juin. Nous espérons le terminer d'ici le mois de mai.

Puisque nous parlons des choses à espérer, il y a parfois des gens qui se demandent s'il devrait y avoir un suivi d'expert un an ou deux après le recours au service de médiation afin de nous aider à mieux comprendre le fonctionnement de la médiation en matière d'endettement agricole et de l'entente. La loi ne prévoit rien de tel pour l'instant, mais ce pourrait être envisagé à l'avenir.

Le sénateur Tkachuk : Compte tenu de ce qu'a dit le sénateur Harb, c'est probablement une bonne idée, même si l'on ne veut pas faire de cette loi la nouvelle Loi sur la faillite et l'insolvabilité. Chose certaine, nous pourrions revoir la philosophie derrière ce concept et déterminer si elle est fructueuse, pourquoi et ce qui s'est passé. Ce serait bon à savoir.

Le sénateur Harb : Ce devrait être l'une des principales recommandations.

Le président : Tout à fait. C'est la raison pour laquelle nous avons invité ces personnes à venir nous aider à le déterminer.

Le sénateur Moore : Monsieur Méthot, vous avez piqué ma curiosité quand vous avez dit que vous vouliez régler ces questions rapidement. Comment comptez-vous le faire et que veut dire rapidement? Quand un agriculteur communique avec l'un de vos bureaux sur le terrain et indique qu'il est en difficulté, qu'est-ce qui se passe?

M. Méthot : Premièrement, nous devons recevoir une demande de l'agriculteur pour le Service de médiation en matière d'endettement agricole, puis nous devons déterminer le degré d'urgence de son besoin.

Le sénateur Moore : C'est l'un des bureaux sur le terrain qui le fait?

M. Méthot : Oui, l'un des bureaux sur le terrain reçoit la demande et la traite. L'agriculteur peut préciser son degré d'urgence. Il peut y avoir des cas d'urgence où l'agriculteur est sur le point de perdre sa ferme. L'agriculteur peut disposer de quelques jours ou de quelques heures à peine avant que quelqu'un ne vienne prendre sa moissonneuse- batteuse. Si le formulaire est bien rempli et que l'agriculteur est admissible, nous pouvons suspendre les recours quelques heures après la réception de la demande.

La prochaine étape consiste à déterminer s'il y a du bétail en péril, par exemple, ou des biens périssables. Le cas échéant, nous allons envoyer un expert à la ferme dans un délai d'un jour ou deux pour rencontrer l'agriculteur. En cas d'extrême urgence, ce pourrait être le jour même. Normalement, ce n'est pas le cas, mais quand les animaux sont mal nourris ou qu'ils sont à la veille de manquer de nourriture, nous pouvons tenir une réunion de médiation provisoire immédiatement avec le créancier garanti et l'agriculteur pour que les animaux restent en santé pendant les 45 jours avant la tenue de la réunion.

Le sénateur Moore : Il faut environ 45 jours.

M. Méthot : Oui, il faut environ 45 jours avant que la réunion avec tous les créanciers ait lieu. Les créanciers garantis et non garantis y sont invités. Nous parlons de médiation avec suspension des recours, ce qui est différent d'une médiation sans suspension des recours, où seuls les créanciers garantis sont invités.

En pareil cas, l'expert a pour objectif de déposer un rapport au bureau environ 35 jours après la réception de la demande. Encore une fois, nous pouvons aller plus vite au besoin. Nous nous organisons pour tenir une réunion avec l'ensemble des créanciers, l'agriculteur, l'expert et le médiateur le 45e jour afin d'essayer de parvenir à une entente. Ce sont les grandes lignes de notre façon de faire.

Le sénateur Moore : Je suis impressionné par le taux de succès de 82 p. 100, ce qui équivaut à 370 demandes sur 450.

Le sénateur Tkachuk : Pour le gouvernement ou n'importe qui d'autre, c'est une vitesse fulgurante si l'on arrive à traiter autant de demandes en 45 jours.

M. Méthot : Il peut falloir tenir une deuxième réunion de médiation. C'est rare, mais s'il y a des questions auxquelles on n'a pas réponse ou si les créanciers veulent de plus amples renseignements de l'agriculteur, nous pouvons en prévoir une autre dans les 30 jours pour parvenir à une entente. Nous avons la marge de manœuvre nécessaire pour tenir une seconde séance au besoin.

Le sénateur Moore : Aux réunions de médiation, vous analysez les titres de créance du demandeur. La plupart des demandeurs sont-ils en difficulté en raison du marché et de l'exploitation de la ferme ou ont-ils plutôt des problèmes personnels qui mettent leurs activités en péril?

M. Méthot : Il y a beaucoup de raisons pour lesquelles ils s'adressent au Service de médiation en matière d'endettement agricole, comme le prix des produits et des intrants par rapport à leurs obligations. Il y a aussi des facteurs personnels comme une séparation ou un divorce, qui peuvent entrer en ligne de compte. Il n'y a pas deux fermes exactement dans la même situation.

Le sénateur Moore : Vous avez dit espérer un renforcement de l'application des sanctions en cas d'infraction à la loi et vous avez mentionné le rôle de la GRC. Quand vous trouvez une solution et que vous concluez une entente, le bris de cette entente constitue-t-il un délit civil ou criminel? Pourquoi la GRC interviendrait-elle?

M. Méthot : La GRC n'intervient pas après le processus de médiation quand il y a une entente entre l'agriculteur et les créanciers, c'est alors la fin de notre rôle. Personne n'interviendra si l'entente signée pendant la réunion de médiation n'est pas respectée. L'article 23 de la loi porte sur cette situation.

La loi prescrit clairement que dès qu'il y a entente, nous devons mettre un terme au processus de médiation. Si une suspension des recours a été accordée, nous devons l'annuler aussi. C'est tout, notre rôle se termine là parce que c'est tout ce que nous pouvons faire.

Le sénateur Moore : Je pensais que vous aviez affirmé passer le relais à la GRC.

M. Méthot : Oui, s'il y a infraction aux règles pendant la suspension des recours. Par exemple, si nous suspendons les recours le premier jour...

Le sénateur Moore : ... et que quelqu'un vient enlever la moissonneuse-batteuse à la ferme et la vend.

M. Méthot : Exactement. La moissonneuse-batteuse est protégée par la suspension des recours. C'est un exemple.

Le président : C'est une bonne précision.

Le sénateur Ringuette : Compte tenu des mes 20 années d'expérience de la vie publique et de la région que je représente, la région de la pomme de terre au Nouveau-Brunswick, je connais bien vos programmes. Ils sont bons pour le milieu agricole.

Je tiens à souligner à mes collègues que ce mécanisme est excellent et qu'il a été conçu pour le milieu agricole en raison de l'histoire des collectivités du secteur agricole, qui n'est pas la même que celle d'autres secteurs de l'industrie. Ce sont des réseaux « tricotés serré » d'économie locale et d'entraide. On peut boucler la boucle en 45 jours, et tout le monde comprend la situation des parties. Ce n'est pas évident dans d'autres secteurs, et j'aimerais vous remercier du bon travail que vous faites pour les agriculteurs. Je n'ai aucune question pour les témoins.

Le président : Nous vous encourageons à vous exprimer. J'espère que les bonnes personnes de la région de la pomme de terre verront que vous défendez leurs intérêts.

Le sénateur Eyton : Votre témoignage est intrigant pour ce qui est des coûts. Combien coûtent ces programmes? J'ai un esprit analytique et j'aime estimer les coûts par demandeur ou par dossier. Comment votre modèle fonctionne-t-il? Est-ce que les coûts généraux viennent en premier, suivis du rendement?

Mme Aylard : Nous examinons les coûts sous deux angles. Il y a les coûts des services de consultation et de médiation, ainsi que les coûts d'exploitation pour l'aspect gouvernemental du programme. L'an dernier, nos services de consultation et de médiation ont coûté en moyenne 4 500 $ par cas. La partie gouvernementale représentait un peu plus de 3 900 $ par dossier clos.

Le sénateur Eyton : Quelle est la dette moyenne visée dans chaque cas?

Mme Aylard : Je ne connais pas la réponse à cette question.

Le sénateur Eyton : Avez-vous une idée?

M. Méthot : Ce peut aller entre 100 000 $ et des millions de dollars, mais nous n'avons pas de somme moyenne.

Le sénateur Eyton : La moyenne peut être très élevée.

M. Méthot : D'après un sondage, 25 p. 100 des propriétaires de grandes fermes qui ont présenté une demande de médiation ont des ventes agricoles brutes de plus de 250 000 $ par année.

Mme Aylard : C'est vrai.

Le sénateur Eyton : Nous pouvons tous bien comprendre l'avantage pour les agriculteurs. J'aimerais jeter un coup d'œil aux pauvres créanciers, y compris les créanciers garantis, parce que nous devons nous soucier de leur sort. Comment les créanciers en général trouvent-ils le programme? L'accueillent-ils bien ou ont-ils des réserves? Les programmes offerts ont-ils pour effet de rendre le crédit plus difficile à obtenir ou d'augmenter le coût du crédit pour les agriculteurs?

Mme Aylard : Pour la préparation du rapport que nous allons présenter au Parlement, nous avons interrogé 32 créanciers. Une grande partie d'entre eux estime que l'information amassée par le consultant sur la situation financière de l'agriculteur est extrêmement utile. Ils ont trouvé que c'était très avantageux économiquement parce qu'ils n'avaient pas à recueillir eux-mêmes ces renseignements.

Une majorité, 54 p. 100, avait l'impression que ces programmes faisaient baisser les coûts de recouvrement de la dette pour le créancier et environ 25 p. 100 estimaient qu'ils permettaient un meilleur remboursement de la dette que d'autres recours, comme les poursuites judiciaires. Ce sont les premières observations qui se dégagent de notre examen.

Le sénateur Eyton : Êtes-vous en train de dire que le crédit s'en trouve plus accessible et non l'inverse?

Mme Aylard : Je ne pourrais pas vous dire si le crédit s'en trouve plus ou moins accessible. Les parties s'entendent en vue du remboursement des sommes dues.

Le sénateur Eyton : Je pensais à l'incidence sur le marché en général, quand une personne se présente dans une institution pour obtenir du crédit, parce que les gens savent que ce programme existe et qu'il peut les aider. Il pourrait cependant aussi nuire aux rapports avec les créanciers.

Mme Aylard : Je vois. Ce programme pourrait aider parce que si l'agriculteur a des difficultés, il y a des façons de les surmonter. Je ne suis pas certaine que nous ayons fait une analyse pour établir le lien entre la réussite du programme et l'accès au crédit en général pour les agriculteurs. Je serais portée à croire que les créanciers s'attardent davantage à des critères comme le ratio capitaux d'emprunt/capitaux propres, la valeur foncière et ce genre de choses.

M. Méthot : Nous avons remarqué que certains créanciers recommandent le Service de médiation en matière d'endettement agricole aux agriculteurs quand ils voient que les agriculteurs deviennent rapidement insolvables. L'un des principaux créanciers du Québec recommande fortement ce service. De ce point de vue, certains créanciers sont convaincus que la médiation en matière d'endettement agricole est la solution.

Le sénateur Tkachuk : Les analystes de la Bibliothèque du Parlement ont mentionné cette étude dans les notes d'information que nous avons reçues. C'est l'objet de ma question.

Vous avez affirmé déposer votre rapport au printemps et à l'automne. Vous en avez déposé un en mai 2005. Il y était écrit : « La conception d'un questionnaire par le Ministère pour les besoins de cette étude est en bonne voie et le sondage sera administré pendant l'exercice 2005-2006. » Il s'agissait d'un questionnaire préparé pour un sondage ou une étude sur les agriculteurs ayant utilisé le service de 1998-1999 à 2000-2001. Il était écrit que vous administreriez le sondage pendant l'exercice 2005-2006.

Est-ce le sondage dont vous parlez?

M. Méthot : Oui.

Le sénateur Tkachuk : L'avez-vous administré en 2005-2006?

M. Méthot : Non.

Le sénateur Tkachuk : Nous sommes en 2008.

M. Méthot : Nous y avons travaillé. Le premier groupe d'agriculteurs a reçu le questionnaire à l'automne 2007. C'est le sondage de suivi de 18 mois à 2 ans après la demande de médiation.

Le sénateur Tkachuk : Autrement dit, aucun sondage n'a été réalisé?

M. Méthot : Pas en 2005, pas pour le suivi 18 mois après. Nous faisons toujours un suivi tout de suite après la rencontre de médiation. Quand les gens partent, ils remplissent un sondage d'évaluation. Cependant, le sondage de suivi 18 mois ou 2 ans après la médiation n'a commencé qu'à l'automne dernier.

Le sénateur Tkachuk : Vous aviez pourtant dit que ce sondage (sur les données de 1998-1999 à 2000-2001) serait administré pendant l'exercice de 2005-2006. Nous sommes maintenant en 2008. Ce sondage n'a donc pas été réalisé?

Mme Aylard : C'était l'une des recommandations.

Le sénateur Tkachuk : Il était écrit dans le rapport que la conception d'un questionnaire par le ministère pour les besoins de cette étude était en bonne voie et que le sondage serait administré pendant l'exercice 2005-2006 auprès des agriculteurs ayant eu recours au service de médiation pendant ces années. De toute évidence, ce sondage n'a pas été fait. Le sondage que vous êtes en train de mener est-il ou est-ce un nouveau sondage?

Mme Aylard : Le sondage que nous sommes en train de mener vise à évaluer où les agriculteurs en sont 18 mois après que les agriculteurs et les créanciers ont utilisé le mécanisme de médiation. Nous essayons d'évaluer le succès de ce service à long terme.

Le sondage dont vous parlez...

Le sénateur Tkachuk : C'était dans votre rapport.

Mme Aylard : C'est vrai. Je suis désolée. Je n'ai pas la réponse. Je pourrais certainement l'obtenir.

Le sénateur Tkachuk : Pouvez-vous nous la faire parvenir?

Mme Aylard : C'est ce que je vais faire.

Le sénateur Tkachuk : Merci. Est-ce cette étude que vous êtes en train de faire ou une nouvelle?

Mme Aylard : Nous sommes en train de nous donner les moyens d'évaluer nos résultats à plus long terme. Comme M. Méthot l'a mentionné, nous avons sondé les clients juste après la fin du processus. Cependant, nous ne sommes pas retournés les voir 18 mois après pour savoir s'ils étaient toujours sur la bonne voie ou déterminer le succès à long terme de notre programme. C'est l'objet de l'étude que nous menons actuellement, qui a commencé en octobre dernier.

Le président : J'aimerais avoir une précision sur la question que le sénateur Moore a soulevée. Remontez-vous au début du programme?

M. Méthot : Non.

Le président : Vous penchez-vous sur les deux dernières années? S'agit-il des 18 mois après la période de 2006-2007?

M. Méthot : Nous allons continuer de sonder nos clients à l'avenir. Plus nous nous rapprochons du seuil de deux ans, plus nous allons envoyer des sondages.

Le sénateur Tkachuk : Si vous n'avez pas administré ce sondage, pouvez-vous nous expliquer pourquoi? Il semble se dégager du rapport que la conception du questionnaire était « en bonne voie ». Pourquoi le sondage n'a-t-il pas été mené? S'il l'a été, pourrions-nous le voir?

Mme Aylard : Absolument.

Le sénateur Tkachuk : Je vous remercie.

Le sénateur Gustafson : Recevez-vous un soutien quelconque des assureurs agricoles? Êtes-vous en mesure d'obtenir de l'aide de leur part?

M. Méthot : Nous travaillons uniquement avec les agriculteurs et les créanciers. Tous les créanciers, qu'il s'agisse d'organismes ou de personnes, sont censés participer à la séance de médiation. Ils sont invités à y assister. Notre loi énonce clairement que nous pouvons travailler uniquement avec les agriculteurs et leurs créanciers garantis et non garantis s'il y a un sursis.

Le sénateur Gustafson : Lorsqu'il est question de faillite, c'est très déchirant pour les agriculteurs car parfois, leur famille possède la ferme depuis trois et même quatre générations. Pour l'agriculteur, c'est à lui qu'appartient la ferme, et non à la banque. C'est ce qu'il croit.

Y a-t-il de l'aide à cet égard? Dans notre région, par exemple, trois personnes se sont suicidées, le printemps dernier, à cause de leurs déboires financiers. Existe-il de l'aide ou du soutien pour ces gens aux abois?

M. Méthot : J'ai travaillé durant quatre ans au bureau régional; je parlais chaque jour aux agriculteurs du Service de médiation en matière d'endettement agricole. Je comprends vos propos. Les gens vivent beaucoup d'émotions et de stress, et ils s'inquiètent grandement pour leur avenir. Pour eux, ce sont de durs moments. C'est difficile pour les agriculteurs de demander de l'aide, même pour la médiation. Il ne s'agit pas d'une faillite, mais d'un processus volontaire de médiation. Néanmoins, c'est pénible pour eux de le faire, ou même d'envisager d'autres solutions.

Parfois, ils ont conduit jusqu'à nos bureaux pour nous rencontrer avant de décider de présenter ou non une demande au Service de médiation en matière d'endettement agricole. Par moments, il a été difficile de les convaincre, même si nous leur avions expliqué le processus et les avions assurés qu'il était confidentiel, ce qui est très important pour les agriculteurs; ils se soucient beaucoup de la confidentialité. Nous leur avions recommandé d'examiner, au moins, l'évaluation de l'exploitation agricole et de rencontrer un conseiller pour seulement 100 $. À partir de là, ils choisiraient peut-être de demander la médiation. Il est arrivé qu'ils aient pris eux-mêmes cette initiative. Ils ont obtenu un avis à la suite de l'évaluation d'un conseiller, et ils ont ensuite décidé de demander l'aide du Service de médiation en matière d'endettement agricole.

Vous avez raison. On doit penser aux familles; c'est une région rurale, et tout le monde se connaît. Il y a des exploitations agricoles qui existent depuis trois, quatre et même cinq générations. Les agriculteurs redoutent beaucoup de devoir faire appel à la médiation.

Le Service d'assistance téléphonique pour les agriculteurs nous envoie également un certain nombre de personnes. Il y a de nombreuses lignes d'aide partout au Canada. Les intervenants recommandent le Service de médiation en matière d'endettement agricole à bon nombre des personnes qui les appellent.

Le sénateur Eyton : J'aimerais poser une autre question. Dans les notes qui nous ont été fournies, on indique qu'après l'examen financier de la situation de l'agriculteur, un médiateur unique et impartial est nommé pour aider l'agriculteur et les créanciers en cause à trouver un arrangement satisfaisant pour les parties. Le médiateur ne conseille pas les agriculteurs et il ne négocie pas en leur nom, ni au nom des créanciers.

Comment en arrivez-vous à une entente? Je présume que les créanciers se montrent parfois coopératifs et que le médiateur doit faire preuve de leadership. Sans cela, les parties ne feraient pas cause commune. Comment cela fonctionne-t-il?

M. Méthot : Pour le médiateur, c'est un tout un défi. Le conseiller apporte également son concours. Habituellement, ce dernier s'est entretenu avec la plupart des créanciers avant la rencontre; cela permet au moins d'avoir une bonne connaissance des attentes de chacun.

Le médiateur utilisera différents outils pour tenter d'arriver à une entente. Il peut prendre l'agriculteur à part dans une salle de caucus. Nous disposons toujours de deux salles : la salle de caucus et la salle de réunion. Durant la journée, au besoin, le médiateur demandera à certains créanciers ou à l'agriculteur de se rendre dans la salle de caucus pour pouvoir passer à l'étape suivante du processus de médiation.

Dans certains cas, une deuxième rencontre a été nécessaire.

Le sénateur Meighen : Peut-être en avez-vous déjà parlé et cela m'a échappé, mais j'aimerais savoir d'où viennent les médiateurs impartiaux et quelle formation ils ont reçue.

M. Méthot : Les médiateurs sont des professionnels de partout au Canada. Actuellement, nous cherchons 52 médiateurs pour les quatre prochaine années. Nous avons publié plus tôt cette semaine une annonce dans le système MERX. Nous avons des gens qui possèdent une expérience générale en médiation, et pas uniquement dans le secteur agricole. Plusieurs sont des médiateurs professionnels et font cela tous les jours. Nous avons également des agriculteurs qui sont qualifiés à titre de médiateurs et qui font un excellent travail. Nous avons une combinaison d'agriculteurs, de gens du secteur agroalimentaire qui font de la médiation à temps partiel, et de médiateurs professionnels qui sont embauchés par l'entremise du système MERX tous les quatre ans.

Le sénateur Meighen : Doivent-ils avoir de l'expérience dans le secteur agricole?

M. Méthot : Ce que nous recherchons et ce dont ils ont besoin, c'est de l'expérience en affaires, bien que des antécédents dans le secteur agricole soient un atout.

Le sénateur Goldstein : J'aimerais poser trois brèves questions.

Croyez-vous que le concept de médiation en matière d'endettement pourrait s'appliquer à l'insolvabilité des petites entreprises?

Je constate que la loi prévoit l'établissement de règlements. J'ignore si vous l'avez déjà fait. Si oui, je crois que cela intéresserait les membres du comité. Sinon, veuillez nous en aviser.

La loi énonce qu'il y a un sursis initial de 30 jours, qui peut être prolongé pendant trois autres périodes de 30 jours chacune. Croyez-vous que cette période totale de 120 jours soit toujours suffisante?

Mme Aylard : Je vais commencer par répondre à la première question. Comme je l'ai déjà indiqué, je ne suis pas spécialiste des petites entreprises. Toutefois, je sais que beaucoup sont des entreprises familiales et peut-être même gérées à partir de la maison. Le service pourrait profiter aux petites entreprises, car il est confidentiel, gratuit et peut réduire considérablement le stress de toutes les parties concernées.

En ce qui concerne la deuxième question, oui, nous pouvons vous remettre le règlement qui a été adopté en vertu de la loi.

Je vais laisser M. Méthot répondre à la dernière question.

Le président : Nous ferez-vous parvenir ce règlement, s'il vous plaît?

Mme Aylard : Oui.

M. Méthot : Voici le nombre de cas de médiation en matière d'endettement agricole en cours actuellement : il y en a 44 dans les 30 premiers jours, 52 dans la deuxième période de 30 jours, 15 dans la troisième et 11 dans la quatrième. Par conséquent, la plupart du temps, 120 jours sont suffisants. Mais il y a des exceptions, et il peut arriver qu'on ait besoin de plus de 120 jours. Puisqu'il y a une limite, chacun fait de son mieux pour s'assurer que la situation est réglée à l'intérieur de ce délai.

Le sénateur Goldstein : C'est très bien. Je vous remercie.

Le président : Je tiens à remercier les témoins pour leurs déclarations qui nous ont beaucoup éclairés. Je crois que la question de l'applicabilité aux petites entreprises est intéressante et pour vous et pour nous.

La séance est levée.


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