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Délibérations du comité sénatorial permanent de
la Sécurité nationale et de la défense

Fascicule 7 - Témoignages du 14 avril 2008


OTTAWA, le lundi 14 avril 2008

Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, auquel a été renvoyé le projet de loi C-40, Loi modifiant le Code canadien du travail, la Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants, la Loi fédérale sur les prêts aux étudiants et la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, se réunit aujourd'hui à 16 h 7 pour examiner le projet de loi.

Le sénateur Colin Kenny (président) occupe le fauteuil.

[Translation]

Le président : Avant de commencer, je vais présenter brièvement les membres du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense qui sont présents. Je m'appelle Colin Kenny, je suis le président du comité. À l'extrémité de la table, vous voyez le sénateur Hugh Segal. C'est un spécialiste bien connu des politiques publiques, originaire de l'Ontario. Il siège au Sénat depuis août 2005, notamment au Comité sénatorial permanent des peuples autochtones et au Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts. Il est également président du comité de sélection du Sénat.

À côté de lui, on voit le sénateur Nancy Ruth, militante féministe de l'Ontario. Mme Ruth est sénateur depuis mars 2005. Elle est membre du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, de même que du Comité sénatorial permanent des finances nationales. Enfin, elle est membre de notre sous-comité des anciens combattants.

À côté d'elle se trouve le sénateur Grant Mitchell d'Edmonton, en Alberta. Il a été nommé au Sénat en mars 2005. Il a fait carrière en politique, dans l'industrie des finances et dans la fonction publique en Alberta. De 1986 à 1998, il a siégé à l'assemblée législative de l'Alberta, où il a été chef de l'Opposition de 1994 à 1998. Il siège au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles.

Tout juste à ma droite vous voyez le sénateur Tommy Banks, de l'Alberta. M. Banks a été appelé au Sénat en avril 2000. C'est un musicien et artiste de spectacle accompli que connaissent bon nombre de Canadiens. Il siège au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles, de même qu'au sous-comité des anciens combattants.

À ma gauche on voit le sénateur David Tkachuk, de la Saskatchewan. M. Tkachuk a été nommé au Sénat en juin 1993. Au fil des ans, il a été homme d'affaires, fonctionnaire et enseignant. Il est vice-président de notre comité.

À sa gauche se trouve le sénateur Joseph Day, du Nouveau-Brunswick. M. Day a eu une carrière fructueuse d'avocat dans le secteur privé. Il siège au Sénat depuis octobre 2001. À l'heure actuelle, il est président du Comité sénatorial permanent des finances nationales et vice-président de notre sous-comité des anciens combattants.

À côté de lui, vous voyez le sénateur Michael Meighen, de l'Ontario. M. Meighen a été nommé au Sénat en septembre 1990. Il est avocat, membre des barreaux du Québec et de l'Ontario. En ce moment, il est président de notre sous-comité des anciens combattants et membre du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce tout comme du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans.

Au bout de la table vous voyez le sénateur Wilfred Moore, qui a été appelé au Sénat en septembre 1996. Il représente la division sénatoriale de Stanhope Street-South Shore, en Nouvelle-Écosse. Il a été politiquement actif à la municipalité de Halifax-Dartmouth et a siégé au conseil d'administration de l'Université Saint Mary's.

Bienvenue, mesdames et messieurs les sénateurs et membres du grand public. Nous sommes ici aujourd'hui pour poursuivre notre étude du projet de loi C-40, Loi modifiant le Code canadien du travail, la Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants, la Loi fédérale sur les prêts aux étudiants et la Loi sur l'emploi dans la fonction publique.

Le projet de loi C-40 vise à protéger les emplois civils des réservistes qui travaillent pour un employeur sous réglementation fédérale et la fonction publique fédérale. De même, le projet de loi protégerait les réservistes qui fréquentent un établissement d'enseignement postsecondaire à temps plein en leur permettant de conserver le statut d'étudiant actif aux fins du Programme canadien de prêts aux étudiants. Ainsi, pendant qu'ils sont en congé, ils n'auraient ni à verser de remboursement ni à accumuler de l'intérêt.

Le projet de loi vise également à modifier le Code canadien du travail de manière à accorder la protection du droit à l'emploi à l'employé qui prend un congé sans solde pour faire son service dans la réserve. De même, le législateur y interdit la discrimination en matière d'emploi à l'égard du statut de réserviste.

Dans le même ordre d'idées, le projet de loi C-40 modifie la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, qui régit le processus de dotation de la fonction publique. La mesure vise à garantir que les fonctionnaires ont le droit d'être rétablis dans leurs fonctions à la suite du congé qu'ils prennent pour servir dans la réserve.

Le 13 février 2008, conformément à la motion présentée par le leader du gouvernement à la Chambre, l'honorable Peter Van Loan, le projet de loi C-40 est réputé avoir été étudié à toutes les étapes prévues et adopté à l'autre endroit.

Nous sommes là aujourd'hui pour écouter deux groupes de témoins et discuter ensuite avec eux. Le premier provient du Conseil de liaison des Forces canadiennes. Il est représenté par M. John C. Eaton, le président; M. Miller Ayre, le vice-président; et M. Léo M. Desmarteau, le directeur exécutif. Puis, de la Chambre de commerce du Canada, nous accueillons le vice-président exécutif responsable des politiques, M. Michael N. Murphy.

Nous allons commencer par écouter M. Eaton.

John C. Eaton, président, Conseil de liaison des Forces canadiennes : Merci et bonjour. Je suis le président national du Conseil de liaison des Forces canadiennes, ou CLFC. J'ajouterais que le CLFC célèbre cette année son 30e anniversaire. L'organisme a été fondé en 1978, au moment où le ministre de la Défense nationale de l'époque, Barney Danson, a demandé à des hommes d'affaires pour voir s'ils pouvaient aider des réservistes à prendre congé afin de faire leur service. L'employeur donnerait congé à l'employé membre de la réserve tout en s'assurant qu'il a droit à ses vacances aussi.

Je suis accompagné aujourd'hui de M. Ayre, vice-président de l'organisation et de M. Desmarteau, directeur exécutif. J'ai également amené cet après-midi Mme Valerie Keyes, prochaine directrice exécutive du Conseil de liaison des Forces canadiennes, car M. Desmarteau doit prendre sa retraite très bientôt.

Le Conseil de liaison des Forces canadiennes compte dix présidents provinciaux qui proposent bénévolement leurs services pour exercer le mandat du conseil dans les provinces. Le CLFC est un organisme ministériel qui rend des comptes au ministre de la Défense nationale. Outre notre conseil national, nous avons des conseils provinciaux qui aident nos présidents provinciaux à fournir les services et les programmes du CLFC partout au pays. En ce moment, près d'une centaine de bénévoles oeuvrent au sein des conseils provinciaux. Pour faire le travail, nous comptons sur un réseau de réservistes à temps partiel qui prennent en charge nos services sur le terrain. Les conseils national et provinciaux, de même que les services sur le terrain, comptent sur l'appui d'un secrétariat situé à Ottawa, qui fait partie de l'organisation du Chef (réserves et cadets) au ministère de la Défense nationale.

Le CLFC a pour vocation de faire en sorte que les réservistes soient davantage disponibles pour la formation et les opérations sans les pénaliser ni imposer non plus un fardeau injuste aux employeurs. Depuis qu'il existe sous forme de conseil, le CLFC a obtenu l'appui de 190 établissements d'enseignement postsecondaire, ce qui représente 60 p. 100 de notre objectif; et de plus de 6 000 employeurs. Voilà un des résultats les plus concrets du travail accompli par le conseil.

En guise d'introduction, je veux dire mon appréciation de l'effort accompli par le ministre du Travail, Jean-Pierre Blackburn, en parrainant ce projet de loi et en faisant valoir les mérites partout au pays. Cela ferait en sorte que les réservistes seront davantage disponibles pour la formation et les opérations. Je félicite le ministre Blackburn du leadership dont il a fait preuve en encourageant les provinces à se donner leur propre loi en la matière. Je veux le rassurer sur un fait : au CLFC, nous allons coopérer pleinement avec les mesures adoptées pour que les réservistes puissent mieux équilibrer leur carrière civile et leur carrière militaire.

Je dois admettre que, de tradition, le CLFC s'oppose à l'adoption de mesures législatives pour garantir la disponibilité des réservistes pour la formation et les opérations — d'abord par crainte qu'il y ait discrimination du point de vue des pratiques d'embauche et de l'évolution professionnelle et, ensuite, en raison de la complexité que suppose la tâche sur le plan de la sphère des compétences. Cependant, depuis l'automne 2006, au moment où la Nouvelle-Écosse est devenue la première province à adopter une loi pour protéger les emplois en la matière, CLFC fait diligence à cet égard et travaille pour que les dispositions législatives visant à protéger les emplois des réservistes fonctionnent. Nous allons continuer à le faire.

Parmi les questions que je souhaite soulever, il y a celle du dédommagement des employeurs. Nous savons que les employeurs qui engagent des réservistes en viennent à apprécier les valeurs et compétences que ces derniers amènent au travail du fait de leur formation militaire et de leur expérience des opérations des Forces. De même, nous avons vu de nombreux employeurs prendre fait et cause pour leur patrie. Le soutien de nos Forces canadiennes et, plus particulièrement, de notre réserve n'a jamais été aussi fort. Tout de même, certains employeurs, et particulièrement les petites et moyennes entreprises, peuvent éprouver de la difficulté à assumer les coûts à engager pour libérer les employés appelés à être déployés dans le cadre d'une opération militaire. Pour cette raison, nous estimons qu'il faudrait envisager de dédommager les employeurs qui libèrent un employé en vue que ce dernier puisse participer à une formation et à une opération militaires. Il faut étudier cette nouvelle mesure d'encouragement pour en établir les coûts, notamment, et tirer les enseignements utiles de l'expérience vécue dans les autres pays ayant mis en œuvre un programme de dédommagement. L'étude pourrait englober diverses formes d'indemnisation comme les encouragements fiscaux et les forfaits hebdomadaires ou annuels.

Nous notons que plusieurs des mesures prévues pour mettre en œuvre la loi en question figurent dans le règlement, comme en fait foi l'article 247.97 du Code canadien du travail qui est proposé. Les questions que représentent la durée des congés et leur fréquence, l'obligation de reprendre un employé qui revient plus tôt que prévu, la façon de déterminer ce qui cause « un préjudice injustifié à l'employeur », par exemple, revêtiront une importance capitale aux yeux de nombreux employeurs. Pour cette raison, nous recommandons vivement que vous consultiez les employeurs à propos de la nature des mesures en question avant d'adopter le règlement en bonne et due forme.

Pour terminer, j'insisterais sur l'importance de l'établissement d'un bon plan de communication quant à la mise en œuvre de ce texte de loi. Nous croyons qu'il y aura au moins 29 lois ou règlements portant sur la protection et le soutien de nos réservistes dans le contexte des établissements d'enseignement et des employeurs partout au pays. Le CLFC veut faire savoir qu'il s'engage à soutenir la diffusion de renseignements détaillés à ce sujet, à l'externe et à l'interne, au moyen de ses réseaux bien établis.

En guise de conclusion, je souhaite réitérer l'engagement entier du Conseil de liaison des Forces canadiennes pour ce qui est d'appuyer la mise en œuvre de la loi, à l'avantage de nos réservistes, de nos employeurs et de nos établissements d'enseignement.

Le président : Merci monsieur Eaton. Pouvons-nous entendre M. Michael N. Murphy, vice-président exécutif de la Chambre de commerce du Canada?

Michael N. Murphy, vice-président exécutif, Politiques, Chambre de commerce du Canada : Je suis heureux d'être ici pour représenter la Chambre de commerce du Canada. Évidemment, nous sommes heureux de présenter nos observations sur la question vitale de l'accommodement des membres de la force de réserve en milieu de travail et dans les établissements d'enseignement. Il y a quelque 25 000 réservistes, dont 2 000 oeuvrent dans le secteur privé assujetti à la compétence fédérale et le secteur public fédéral; 12 000 autres sont aux études. Comme les réservistes sont nombreux et qu'ils possèdent des compétences polyvalentes, ils apportent une importante contribution au marché du travail canadien.

À l'heure actuelle, aucune loi canadienne ne protège les emplois des réservistes qui servent dans les forces armées, soit pour respecter des engagements internationaux, comme en Afghanistan, soit pour venir en aide aux autorités civiles en cas de catastrophe. En outre, le Canada n'accommode pas les réservistes qui fréquentent des établissements d'enseignement. Le projet de loi C-40 vise à répondre à ces préoccupations en protégeant les emplois des réservistes qui oeuvrent dans les industries assujetties à la compétence fédérale et dans la fonction publique fédérale, et en apportant une aide aux réservistes qui étudient.

Nous sommes tout à fait d'accord avec le but du projet de loi C-40 et bon nombre des dispositions que le texte comporte. Ainsi, les dispositions autorisant les étudiants réservistes qui fréquentent un établissement postsecondaire à conserver leur statut d'étudiant, à ne pas accumuler d'intérêts sur leurs prêts d'étude et à ne pas faire de versement durant leur service actif encouragent les études et la participation à la force de réserve.

Nous sommes d'accord avec le but du projet de loi C-40 et croyons qu'il importe de protéger les emplois des réservistes des Forces canadiennes, mais nous nous préoccupons des éventuelles répercussions du projet de loi sur le marché du travail canadien, particulièrement dans un contexte marqué par des pénuries croissantes de compétences et de travailleurs.

L'actuelle pénurie de compétences est un des problèmes structuraux les plus importants de l'économie canadienne. Lentement, elle est en train de dégénérer en crise. Dans le cadre d'une enquête que nous avons récemment menée auprès de nos membres, les deux tiers des répondants ont déclaré qu'ils sont touchés par des pénuries de compétences, et 90 p. 100 d'entre eux qualifient le problème de plutôt grave ou de très grave. Il s'agit d'un problème d'envergure nationale et, pour leur aider, nous devons disposer d'un cadre souple qui favorise la mobilité de la main-d'œuvre au pays.

Le projet de loi C-40 accorde aux réservistes une protection légale des emplois qu'ils occupent. Or, les entreprises canadiennes ont déjà adopté des politiques de congé pour service militaire tels les congés autorisés non payés et les vacances payées. Certains employeurs garantissent même l'emploi des employeurs réservistes qui ont des affectations à plus long terme, alors que d'autres offrent une rémunération supplémentaire pour que les indemnités militaires correspondent au salaire du personnel civil durant les affectations. Cependant, ce ne sont pas tous les employeurs qui peuvent établir de telles politiques.

La Chambre de commerce du Canada est en faveur d'une approche axée sur les mesures incitatives, qui peuvent prendre la forme de crédits d'impôt, dans cette situation. Au minimum, une telle approche pourrait permettre de rembourser les dépenses engagées par les employeurs et encourager les entreprises de toutes tailles à mettre en place des politiques de congé pour service militaire efficaces. Ces mesures incitatives pourraient être fixées à un maximum approprié pour chaque réserviste, par année, si la conjoncture financière le permet.

En plus de protéger les emplois des réservistes des Forces canadiennes, une approche fondée sur des incitatifs accorde aux employeurs la marge de manœuvre nécessaire et tient compte des besoins et des capacités des entreprises de toutes tailles.

Nous recommandons la modification du projet de loi C-40 de telle sorte que soit adoptée une approche axée sur les incitatifs, ce qui permettrait de faciliter et d'encourager la participation de toutes les entreprises du secteur assujetti à la compétence fédérale. Une telle approche profiterait aux employeurs et aux réservistes des Forces canadiennes.

Le président : Merci beaucoup, monsieur Murphy.

Le sénateur Nancy Ruth : Monsieur Eaton, cela m'intéresse beaucoup de connaître les liens entre, d'une part, le CLFC, et, d'autre part, le ministère de la Défense nationale, le ministère du Travail et le ministère des Ressources humaines et du Développement social. De quelle manière votre groupe a-t-il été consulté pendant la période d'élaboration de ce projet de loi, et avez-vous été en mesure d'exprimer vos préoccupations au sujet des petites et moyennes entreprises ainsi que des mesures incitatives à adopter?

M. Eaton : En un mot, non, nous n'avons pas été consultés.

Le sénateur Nancy Ruth : Vous n'avez pas été consultés?

M. Eaton : Non. Cependant, indépendamment de ce fait, il y a une chose qui nous intéresse : c'est de nous assurer que, au moment où le projet de loi sera adopté, le réserviste qui souhaite servir son pays peut le faire et bénéficie d'une protection. Ce sera une protection d'ordre législatif. Auparavant, il ne pouvait en être assuré de cette façon. Nous sommes ravis de pouvoir travailler en vue de l'adoption de la nouvelle loi.

Nous sommes en communication constante avec nos alliés internationaux : les Britanniques, les Américains et les Australiens. Ils ont des lois. L'Australie, en particulier, a prévu un dédommagement. Les Britanniques prévoient certaines formes de dédommagement dans le cas de certains réservistes.

Le sénateur Nancy Ruth : Est-ce l'employeur qui est dédommagé?

M. Eaton : Oui, c'est l'employeur.

Il existe des lois à divers endroits, dans le monde. Le Canada ne fait que rattraper son retard sur les autres.

Le sénateur Nancy Ruth : Y avait-il une façon quelconque de s'entretenir avec le ministre Blackburn ou quelqu'un d'autre à propos de la question, au moment où vous aviez appris que le projet de loi se préparait?

M. Eaton : C'est arrivé très vite. Monsieur Ayre, voulez-vous commenter cela?

Miller Ayre, vice-président, Conseil de liaison des Forces canadiennes : Le CLFC est un regroupement de bénévoles qui existe en dehors du secrétariat. Il y a la question de savoir si nous avons été consultés, qui est une formalité. M. Desmarteau et d'autres au sein du Secrétariat ont peut-être été consultés. Cependant, le CLFC en tant qu'organisme se réunit deux fois par année. Il faudrait qu'il y ait un appel fait directement auprès du président, peut-être par un des ministres, pour que le processus de consultation commence. Ce n'est pas comme consulter une chambre de commerce, où il y a un groupe sur place qui est prêt à répondre à l'appel. Le CLFC n'est pas à proprement parler le groupe où se trouve M. Desmarteau. Nous formons un regroupement de bénévoles.

Le sénateur Nancy Ruth : Cependant, vous êtes les bénévoles au service d'une association d'employeurs. L'initiative de Barney Danson, dont vous avez parlé, visait à rallier les employeurs au projet, à les inciter à libérer les hommes et les femmes et à servir leur pays.

M. Ayre : C'est cela.

Le sénateur Nancy Ruth : Il me semble que cela fait encore partie de votre mandat. Ai-je raison d'affirmer que vous représentez encore ce secteur de la société? Je présume que de nombreux employeurs vous financent.

M. Ayre : Oui.

Le sénateur Nancy Ruth : Il est dommage qu'ils ne vous aient pas appelé.

M. Eaton : À titre de précision, nous ne sommes pas financés par des employeurs.

Le sénateur Nancy Ruth : Qui vous finance?

M. Eaton : Nous recevons notre financement du ministère de la Défense nationale. Nous avons un budget d'environ deux millions de dollars par année. L'argent sert à verser le salaire de nos agents de liaison sur le terrain, de notre secrétariat et de M. Desmarteau, notre directeur exécutif.

Le sénateur Nancy Ruth : Le MDN fournit les deux millions de dollars en question?

M. Eaton : Le MDN, voilà.

Le sénateur Nancy Ruth : La somme entière?

M. Eaton : Oui.

Le sénateur Nancy Ruth : Quelle surveillance exerce-t-on là-dessus au ministère et en quoi êtes-vous comptable au ministère de la Défense nationale?

M. Eaton : Nous tenons les comptes.

Le sénateur Nancy Ruth : Aidez-moi à comprendre le lien qu'il y a entre vous et les hommes et femmes membres de la réserve, entre vous et les employeurs qui se soucient de ce projet et entre vous et le MDN. Comment tout cela s'intègre- t-il?

M. Eaton : Je suis responsable devant le ministre de la Défense nationale, point à la ligne. Je lui suis comptable, à lui et à personne d'autre. L'organisme qui soutient tout le travail, les hommes et les femmes d'affaires de tout le Canada qui se sont joints à nous, tous sont bénévoles, sauf pour les membres rémunérés des Forces qui soutiennent les réservistes.

Le sénateur Nancy Ruth : Qui sont les membres de votre conseil?

M. Eaton : M. Ayre est membre.

Le sénateur Nancy Ruth : Je veux dire qui représente le secteur des affaires, l'armée ou les réservistes.

M. Eaton : Tous les bénévoles représentent le secteur des affaires — ce sont des hauts dirigeants provenant de diverses sociétés et entreprises, des entrepreneurs. C'est un échantillon diversifié du secteur des affaires.

M. Ayre : Chaque province compte un président et un conseil qui représentent diverses régions de la province.

Le sénateur Nancy Ruth : Pendant votre déclaration préliminaire, vous avez affirmé que cette façon de procéder n'était pas la solution privilégiée par votre groupe, jusqu'à ce que les provinces s'y lancent. Avez-vous l'impression d'une façon ou d'une autre qu'on vous force la main?

M. Eaton : Non, je ne crois pas qu'on nous force la main. Ça semble être la façon dont on veut procéder au pays. Les gens veulent une loi pour protéger les emplois des réservistes. Nous sommes tout à fait d'accord avec cela.

Ce qui est arrivé dans le passé, c'est que nous avons reconnu que l'existence d'une loi peut s'accompagner peut-être de discrimination. La Grande-Bretagne et les États-Unis ont constaté cela. Je crois que les Australiens n'ont pas vécu le même problème. Nous avons décidé que, si nous les sollicitions, nous pouvions convaincre l'industrie, les administrations gouvernementales et les établissements d'enseignement à nous appuyer de manière bénévole. Jusqu'à maintenant, cela a fonctionné.

Cependant, les temps changent, et nous sommes prêts à nous adapter.

Le sénateur Nancy Ruth : Votre groupe a-t-il une relation particulière avec les réservistes eux-mêmes? Quelle est la nature de cette relation étant donné que votre conseil est formé de gens d'affaires?

M. Ayre : Chaque province compte des agents de liaison qui sont des membres en règle de la réserve et qui travaillent auprès des réservistes. Ils se rendent régulièrement chez les réservistes pour leur expliquer ce que fait le CLFC et le travail que nous accomplissons au nom des réservistes. Si les réservistes ont des problèmes avec leur employeur, ils peuvent s'adresser à nous. À ce moment-là, nous allons voir l'employeur et nous essayons d'aplanir les difficultés ou les problèmes qui existent.

Le sénateur Nancy Ruth : La branche politique et la branche militaire ne vous ont pas consultés au sujet de ce projet de loi. Les réservistes ont-ils consultés à propos de ce projet de loi?

M. Ayre : Nous consulter n'est pas aussi simple que vous pourriez le croire. Les réservistes auraient leur propre point de vue à exprimer, ce qu'ils ont fait, je crois. Les réservistes nous rencontrent régulièrement. De nombreux réservistes sont présents aux réunions que nous tenons deux fois par année. Nous avons un comité interne qui se penche sur les lois provinciales, par exemple, et ce comité-là comprendrait des réservistes provenant de l'effectif même du CLFC, et puis aussi nos gens à nous.

Nous sommes au courant du projet de loi, et nous y travaillions nous-mêmes en ce qui concerne l'action des provinces. La loi fédérale est arrivée très rapidement. Nous ne nous sommes pas réunis à ce moment-là. Cependant, il y a le rapport de notre comité et nos observations sur les modifications que nous aimerions voir adopter. À nos yeux, sous sa forme actuelle, le projet de loi ne présente pas de problèmes de taille. Par conséquent, de notre point de vue, il s'agissait de communiquer avec notre secrétariat, auquel les Forces armées se seraient adressées. Nous travaillons régulièrement avec les réservistes qui font partie de notre groupe de liaison; ils seraient donc conscients de notre point de vue, aussi.

Le sénateur Nancy Ruth : D'accord. Pour terminer, cela m'intrigue de savoir à quoi ressemblent les dédommagements et encouragements prévus en Australie, en Grande-Bretagne et aux États-Unis.

Léo M. Desmarteau, directeur exécutif, Conseil de liaison des Forces canadiennes : En Australie, lorsqu'un employé prend congé pour participer à une opération militaire, l'employeur peut demander un dédommagement d'un peu plus de 1 000 $ par semaine après le 13e jour consécutif de l'absence de l'employé. Au Royaume-Uni, il y a une réserve d'intervention rapide, une réserve appelée à prendre en charge des tâches particulières. On y prendrait des dispositions particulières pour les réservistes en question auprès de l'employeur. Ce sont les deux seuls régimes d'indemnisation dont j'ai connaissance en ce moment. Les États-Unis ne comptent pas de régime d'indemnisation.

Le sénateur Day : Je vais d'abord déclarer mon intérêt personnel en ce qui concerne le Conseil de liaison des Forces canadiennes. Je connais ces messieurs, et j'ai siégé au conseil du Nouveau-Brunswick il y a de cela bon nombre d'années. Monsieur Ayre, j'ai connu votre prédécesseur, M. Robert Murray, qui a été vice-président pendant de nombreuses années. Il a servi le Conseil de liaison des Forces canadiennes pendant de nombreuses années, aux côtés de M. Eaton. Les deux formaient toute une équipe.

J'ai toujours été d'accord avec l'idée que vous avez de demander à l'industrie d'établir un régime d'indemnisation de manière bénévole. Monsieur Eaton, je dois dire, je n'arrive pas à bien saisir l'idée : si le gouvernement veut procéder de cette façon, alors donc, c'est de cette façon que nous allons procéder. Je me demande encore s'il convient de légiférer pour forcer l'industrie à adopter certaines obligations. Cela ne peut-il pas avoir pour effet de dissuader l'industrie d'engager des gens dont elle sait qu'ils font partie de la réserve? Cela a toujours été un souci dans le passé. J'aimerais que vous preniez un peu de recul pour songer au moment où on se demandait s'il fallait en faire une exigence ou une mesure volontaire accompagnée peut-être de mesures incitatives, comme M. Murphy l'a souligné.

Si vous étiez revenu à cette étape-là et que le gouvernement n'avait pas encore présenté ce projet de loi, encourageriez-vous cette approche?

M. Eaton : Ma réponse à cette question serait : oui, mais avec un bémol. Je dis cela parce que, en 2006, la Nouvelle- Écosse a adopté une loi pour protéger les emplois des réservistes et, depuis, cinq autres provinces ont emboîté le pas. À l'heure actuelle, six des dix provinces disposent d'une loi qui protège les emplois des membres de la réserve. Par conséquent, il semblerait qu'il soit naturel pour le gouvernement fédéral de monter à bord du même train et d'établir un régime d'indemnisation.

Le sénateur Day : M. Ayre a fait remarquer que vous étiez en train d'analyser les régimes adoptés dans les diverses provinces.

M. Eaton : Chaque président provincial se penche sur cette question.

Le sénateur Day : Avez-vous une liste de préoccupations ou de modifications dont vous aimeriez nous faire part? Vous avez souligné plus tôt qu'il y avait certaines modifications que vous aimeriez voir apporter.

M. Ayre : À nos yeux, c'est un assez bon projet de loi. Il y a une chose qui nous préoccupe et qui fait déjà partie du projet de loi : l'avis de un mois. Dans certains cas, les réservistes connaîtront la date bien avant cela. Il devrait y avoir une façon de faire en sorte que le réserviste soit tenu de mettre son employeur au courant de la chose dès qu'il est au courant lui-même. C'est peut-être qu'il a été accepté ou qu'il y a une démarche quelconque à laquelle il doit se plier. Ainsi, l'avis d'un mois donné à l'employeur serait prolongé. Ça pourrait se régler plus tard.

Le retour hâtif pourrait poser un problème aussi. Si l'employeur engage quelqu'un pour remplacer le réserviste pendant une période précise et qu'un réserviste revient plus tôt que prévu, l'employeur est pris avec deux personnes appelées à faire un même travail. La première question consiste à savoir si l'employeur ou le réserviste devrait être en mesure d'annuler l'accord s'il est impossible de régler la situation.

Il est à présumer que la deuxième question reste à déterminer; elle sera prévue dans le règlement. La situation devient assez difficile pour les employeurs, surtout ceux qui ont une petite entreprise, si le réserviste est appelé à servir à répétition. Nous croyons qu'il devrait s'écouler jusqu'à 36 mois entre les congés de cette nature. Dans certains cas, le règlement prévoit peut-être 24 mois entre les déploiements, mais nous croyons qu'un intervalle de 36 mois serait l'usage.

Le projet de loi ne soulève pas de grandes questions, mais les problèmes qu'il soulève demeurent importants. Notre travail a toujours consisté à aplanir la relation entre l'employeur et le réserviste. Le projet de loi vise à protéger les réservistes, mais vous pouvez encore adopter des mesures qui ne diminuent pas cette protection, mais qui facilitent la vie de l'employeur. Nous croyons que notre tâche consiste à réunir les deux parties, à aplanir les tâches et les difficultés auxquelles font face les employeurs.

Le sénateur Day : Les lois provinciales vous paraissent-elles semblables, sinon comportent-elles des différences importantes?

M. Ayre : Avant que le projet de loi ne soit publié en février, il n'y avait pas moyen de le rendre pareil. Je suis au courant de la situation à Terre-Neuve-et-Labrador, où les autorités nous ont consultés de manière approfondie. Nous leur avons dit ce qui se passait dans les autres provinces et avons expliqué les difficultés éprouvées. Je vais vous donner un exemple des différents problèmes législatifs qui surviennent. Le 37e groupe-brigade du Canada (réserve) est le commandement des réservistes du Nouveau-Brunswick et de Terre-Neuve-et-Labrador. Cependant, de grandes différences s'annonçaient entre la Loi du Nouveau-Brunswick et celle de Terre-Neuve-et-Labrador. Cela voulait dire que les réservistes de la même brigade seraient assujettis à un règlement différent, ce qui s'est produit ailleurs au pays aussi. Étant donné les sphères de compétence, les réservistes sont soumis à divers règlements d'un territoire à l'autre. C'est un problème qu'il faut régler, mais il y a aussi la question du temps. Si le projet de loi progresse ici, les provinces, vraisemblablement, vont s'accorder sur le règlement fédéral une fois que celui-ci sera connu. Il s'agira d'harmoniser les règles, mais ça ne se fera pas du jour au lendemain. Comme nous l'avons dit, il y a 29 règlements différents.

Le sénateur Day : Je ne suis pas sûr de comprendre ce que vous entendiez par là.

M. Ayre : À coup sûr, nous souhaitons harmoniser les choses : cela facilite beaucoup notre travail.

Le sénateur Day : Je ne suis pas sûr de vous avoir compris quand vous avez parlé des 29 textes de loi différents.

M. Desmarteau : S'il est question des lois du travail, disons qu'il y en a une dans chaque province et une dans chaque territoire, ce qui donne au total 13 textes de loi. L'enseignement postsecondaire est de compétence provinciale, de sorte qu'il y a dix textes de loi différents qui protègent les étudiants réservistes, ce qui donne 23. Il y a quatre textes de loi qui sont touchés par le projet de loi C-40, ce qui donne 27. La Loi sur la défense nationale comporte un article qui traite de l'emploi des réservistes, ce qui donne 28. De même, sous le régime de la Loi sur la défense nationale, il y a des dispositions réglementaires touchant l'entraînement et le congé des forces de réserve, qui énoncent les règles touchant les congés pour service militaire des membres de la fonction publique du Canada, ce qui donne 29 textes de loi au total. Bien entendu, nous n'avons pas inclus la référence aux réservistes dans notre système d'enseignement public, qui pourrait être employé dans le cadre d'opérations intérieures, mais non pas d'opérations internationales. Ça donnerait dix textes de loi de plus. Voilà pourquoi j'ai dit qu'il y en avait au moins 29, mais ça pourrait même être 39 textes de loi.

Le sénateur Day : Comme M. Eaton l'a souligné, il serait bien d'harmoniser les choses à cet égard. Comme vous l'avez souligné, monsieur Desmarteau, on a adopté en 2002 un texte de loi dans le cadre de la Loi sur la sécurité publique. Cela a permis de modifier une disposition ou d'en ajouter une à la Loi sur la défense nationale. La disposition en question s'appliquait à tous les travailleurs au Canada, et non seulement les travailleurs sous réglementation fédérale, dans la mesure où ils sont membres de la réserve, qu'ils soient ou non à l'emploi d'une entreprise sous réglementation fédérale ou provinciale. Une protection leur a été accordée. Ce texte de loi n'a jamais été promulgué. Monsieur Eaton, étiez-vous au courant de l'existence de ce texte de loi?

M. Eaton : Nous en étions conscients, et nous étions conscients aussi de la loi de 1988 sur la protection des emplois, qui n'a pas été adoptée, elle non plus. Nous avons simplement continué notre travail.

Le sénateur Day : En 1988, cette loi a-t-elle été adoptée? C'était laquelle?

M. Ayre : C'était une étude.

Le sénateur Day : De fait, la loi de 2002 a été adoptée, mais elle n'a jamais été promulguée. Elle a obtenu l'assentiment des deux Chambres et la sanction royale, mais elle n'est jamais entrée en vigueur. Il me semble qu'elle comportait une façon intéressante de procéder. Elle ne traitait que des cas d'urgence, mais l'urgence n'était pas définie.

Si vous songez aux mesures d'encouragement dont M. Murphy parlait... plutôt que de réglementer la chose, puis de devoir discuter des dispositions réglementaires par la suite — personne ne sait à quoi elles ressembleront, et tout le monde en est nerveux —, peut-être vaudrait-il mieux adopter des dispositions législatives comme celles qui figuraient déjà dans la Loi sur la défense nationale, qui s'appliquaient à tout le monde dans certaines situations, puis traiter de la situation des encouragements dont vous vous êtes toujours occupés dans le passé, peut-être en y prévoyant à l'intention des employeurs quelques incitatifs comme ceux que vous avez préconisés, vous et M. Murphy.

M. Eaton : Je ne sais pas si vous vous engagez dans des trucs un peu plus techniques, mais, certainement, nous voulons simplement nous assurer que les réservistes sont prêts à aller servir les Forces canadiennes soit sur le théâtre des opérations, soit en cas d'urgence — et tout va bien jusqu'à maintenant.

Le sénateur Day : Monsieur Eaton, je suis comme vous. Je crois au travail que font les réservistes et je les tiens en très haute estime, et je voudrais avoir le meilleur régime possible pour les protéger et protéger leur emploi. Je cherche à savoir quelle serait la meilleure formule pour y arriver.

M. Eaton : Il semble que nous l'ayons essentiellement trouvée, d'après nous.

Le sénateur Day : Nous avons la bonne politique; je ne suis pas sûr que nous ayons la bonne loi.

Le sénateur Meighen : Si le projet de loi est adopté, j'aimerais que M. Murphy nous dise davantage jusqu'à quel point il l'appuie, étant donné qu'aucun encouragement n'est prévu, particulièrement pour les petites entreprises.

Monsieur Eaton, quel est selon vous le rôle futur du CLFC? Je vous donnerai quelques suggestions, et vous pourrez me dire lesquelles n'ont pas de sens. Une des tâches, à laquelle le sénateur Day a fait allusion, consisterait à surveiller les effets des lois provinciales en place et de la nouvelle loi fédérale aussi, si elle est adoptée, et d'en constater les résultats. Votre conseil sera-t-il à même de faire cela?

M. Eaton : Nous serions heureux de le faire. Quant à la voie que nous pourrions emprunter, au rôle que nous pourrions jouer à l'avenir, aux États-Unis, lorsqu'ils ont dépêché la Garde nationale et la réserve en Afghanistan et en Irak, ils ont découvert qu'il y avait eu des problèmes une fois les réservistes et les membres de la Garde nationale revenus au pays. Je crois qu'il y a eu 22 000 demandes de renseignements formulées par les membres de la réserve et de la Garde nationale. Cela représente environ 28 p. 100 de l'ensemble des questions soulevées. Si vous voyez là où je veux en venir, il y a environ 100 000 problèmes qui ont été soulevés et qu'il fallait régler. C'est beaucoup de problèmes à régler et il faudrait, je crois, un peu plus d'une année pour régler chacun d'entre eux. Je ne dis pas qu'ils s'y attaquent un problème à la fois, s'attachent à plusieurs, mais il y aurait plusieurs choses à régler. Notre assiette serait pleine.

Le sénateur Meighen : Dans le cas des Américains, savez-vous qui étaient ceux qui étaient appelés à régler le problème? Est-ce que c'était des représentants du juge-avocat général?

M. Eaton : Oui.

Le sénateur Meighen : Y a-t-il aux États-Unis un organisme qui ressemble au vôtre?

M. Eaton : Oui, il y en a un.

M. Desmarteau : C'est le National Committee for Employer Support of the Guard and Reserve, ou ESGR.

Le sénateur Meighen : Est-ce qu'il s'est mêlé de cette affaire?

M. Desmarteau : Oui.

M. Eaton : C'est notre contrepartie. En Grande-Bretagne, c'est le National Advisory Board for the Reserves of Britain's Armed Forces; en Australie, c'est le Defence Reserves Support Council.

Le sénateur Meighen : Il me semble que, comme le sénateur Day l'a dit et que vous l'avez dit vous-même, nous sommes tous un peu nerveux et nous nous demandons si cette mesure législative est bien celle qu'il faut adopter, étant donné la possibilité de discrimination préalable à l'emploi. Cependant, nous avons observé ce que nos alliés ont fait, ce que les provinces font, et j'en suis venu moi-même à la conclusion que c'est la voie à emprunter. Ça ne veut pas dire que c'est parfait, et ça ne veut pas dire qu'il ne faudrait pas surveiller la situation de près. Il me semble que vous êtes parfaitement adaptés à la tâche de surveillance en question étant donné que la question de la voie législative à adopter peut être ou non réglée, mais la question de savoir quel sera l'effet de la loi sur les personnes ne sera peut-être pas réglée non plus.

M. Eaton : Cela fera partie de nos responsabilités à l'avenir. Tout de même, la grande tâche que nous devons accomplir au CLFC, c'est de nous assurer que l'employeur et le réserviste se concertent pour que les Forces armées disposent d'un nombre viable de réservistes à qui confier les responsabilités que le Canada a acceptées.

Le sénateur Meighen : Dans ce cas, l'employeur est le gouvernement fédéral; il faut donc traiter avec un employeur nouveau, énorme.

M. Eaton : Oui, nous en sommes tout à fait conscients. C'est un employeur qui est gros et parfois très méchant.

M. Ayre : Nous avons des ententes avec les ministères individuels.

Le sénateur Meighen : Monsieur Murphy, dois-je en conclure que même si, selon vous, le projet de loi soulève des préoccupations qui se conçoivent aisément du côté des petites entreprises, étant donné qu'aucune mesure d'encouragement n'y est prévue, vous appuyez le projet de loi, le projet de loi C-40?

M. Murphy : Oui. Nous avons jugé qu'il est temps que le gouvernement agisse, qu'il fasse ce qu'il faut faire. Cela fait presque un an que nous avons des discussions à ce sujet avec nos membres. Nous avons bien débattu des questions soulevées à l'assemblée annuelle de la chambre l'automne dernier et avons conclu que le moment était venu pour le gouvernement d'adopter des mesures plus significatives, et ne pas faire simplement ce que nous avons fait jusqu'à maintenant.

Nous abordons aussi la question du point de vue de l'environnement dans lequel les entreprises évoluent au Canada de nos jours. Si vous allez faire un tour dans quelques entreprises au Canada aujourd'hui, vous verrez qu'on n'a pas à attendre très longtemps avant que la question des compétences et des travailleurs soit soulevée. Cela fait partie de l'environnement dans lequel nous évoluons aujourd'hui. La situation est extrêmement difficile pour toutes les entreprises, mais particulièrement pour les petites et moyennes entreprises. Comment trouver le juste équilibre dans un contexte où il y a un problème qui nous apparaît, aujourd'hui, qui fait que nous ne traitons pas adéquatement les réservistes, alors il faut régler cette question-là, mais, en même temps, il faut garder un œil sur ce qui se passe sur le marché où les réservistes ont évolué et où ils évoluent déjà aujourd'hui. C'est ce que nous cherchons à voir.

Nous avons proposé l'automne dernier d'essayer de trouver une mesure qui satisferait chacun tout en atteignant l'objectif fixé. C'est pourquoi j'ai dit que nous sommes d'accord avec le but du projet de loi.

Le sénateur Meighen : Voyez-vous quelques parallèles entre la situation que nous regardons en ce moment et l'expérience que nous avons connue en ce qui concerne les mesures législatives touchant les congés de maternité et de paternité? Il y a peut-être un meilleur avis qui est fait dans ces cas-là, mais il n'y a pas de dédommagement dont je serais au courant.

M. Murphy : Il n'y en avait pas, en fait, dans le cas des congés parentaux, mais cette question a donné lieu aux mêmes genres de discussions que celles que nous avons en ce moment.

Le sénateur Meighen : Diriez-vous que nous nous occupons, comme société, comme pays, de cela de façon équitable et efficace pour toutes les personnes concernées?

M. Murphy : De façon générale, je dirais que oui, tout à fait, et ça a commencé plus précisément par les grandes entreprises qui ont dû s'adapter et qui étaient beaucoup plus en mesure de faire face à un changement important comme celui dont nous parlons. Encore une fois, le problème correspondant était celui de la gestion de la main-d'œuvre dans les petites entreprises, et il a fallu plus de temps pour le régler dans le cas d'un certain nombre de petits employeurs.

Le sénateur Meighen : Nous en sommes rendus aux petits employeurs.

M. Murphy : Un fait concret, lorsqu'il s'agit de la législation du travail, c'est que c'est une chose de l'envisager dans le contexte des lois fédérales, qui s'appliquent à un nombre limité d'entreprises, surtout aux gros employeurs qui font partie de l'économie. La réalité, c'est que peu importent les modifications apportées par Ottawa au Code canadien du travail, on est à peu près sûr de voir des dispositions semblables, sinon identiques, adoptées dans toutes les provinces du pays. Il y a beaucoup d'exemples de cela.

Le sénateur Banks : Avant de commencer à poser des questions, je dois expliquer, pour le compte rendu, comme je le fais chaque fois que ce genre de projet de loi nous est présenté, mes réserves au sujet de ce qui est à de nombreux égards un projet de loi cadre, qui dit voici une bonne idée, et nous voulons aller dans cette direction et nous allons vous dire plus tard, à un moment non précisé, comment nous allons faire cela exactement. Il en résulte une longue liste de questions auxquelles personne ne peut répondre à ce moment-ci. Il s'agit de questions très pertinentes qui ont pour but de préciser quels congés sont réputés ne pas briser la continuité, ce qui constitue et ce qui ne constitue pas une opération aux fins de la loi, la définition d'entraînement annuel aux fins de la loi, et cetera. Ces questions font partie d'une longue liste que vous avez vue, j'en suis sûr, alors je me suis opposé à ce genre de projet de loi lorsque le gouvernement précédent l'a proposé et lorsque le gouvernement actuel l'a fait également. Les choses essentielles manquent dans le projet de loi; tout est là, sauf l'essentiel.

Cela dit, monsieur Eaton, d'après ce que je comprends, depuis près de 30 ans, l'opinion officielle du conseil de liaison est que, comme le service militaire dans les réserves était volontaire, il devrait en être de même de la protection des emplois des réservistes.

M. Eaton : C'était notre position.

Le sénateur Banks : C'est peut-être une question qui est maintenant sans objet, parce que les événements l'ont réglée. Je pense que vous avez déjà dit que, vu qu'il y a des lois provinciales et le projet de loi du gouvernement fédéral, nous n'avons pas le choix d'aller dans ce sens.

Si vous aviez le choix entre le texte législatif dont le sénateur Day a parlé et qui fait partie de la Loi sur la sécurité publique, que le Parlement a étudiée pendant près de trois ans et qui a reçu la sanction royale le 6 mai 2004, texte qui prévoit cette protection, non seulement pour les membres de la fonction publique et les gens qui travaillent dans des domaines réglementés par le gouvernement fédéral, mais pour tous, avec le même genre d'exception dans le cas des entreprises de trois ou cinq personnes... Si vous aviez le choix entre l'application de cet article ou de cette loi du Parlement qui existe déjà et qui a été adopté, d'une part, avec ses dispositions qui protègent tous et chacun, et le projet de loi qui est devant nous, mais qui n'a pas encore été adopté, d'autre part, que choisiriez-vous?

M. Eaton : C'est une question difficile. C'est comme si vous me demandiez si je préférerais conduire une Chevrolet ou une Chrysler. J'imagine que j'aimerais conduire une auto qui me permette de partir du point A pour me rendre au point B. Avec le projet de loi C-40, nous nous dirigeons vers des mesures de sécurité spécifiques, si vous voulez, visant la réserve des Forces armées, et, à ce moment-ci, nous sommes tout à fait en faveur de cela.

Le sénateur Banks : Mais le projet de loi en question ne protège que...

M. Eaton : L'autre projet de loi n'a pas été appliqué en 2004, sénateur.

Le sénateur Banks : Il a été adopté. C'est une loi du Parlement. Cette partie de la loi en question n'a pas encore été appliquée, ce qui soulève une question intéressante au sujet du fait de savoir si le gouvernement précédent ou le gouvernement actuel a prêté attention à la volonté du Parlement, mais je laisse cela de côté. C'est une loi du Canada; c'est une réalité.

M. Eaton : Mais une loi qui n'a pas été appliquée.

Le sénateur Banks : Oui, mais elle existe. Si vous aviez le choix entre les deux, vous qui avez 30 ans d'expérience, que choisiriez-vous? La différence importante entre les deux, d'après ce que je peux comprendre, c'est que la loi existante, qui peut être appliquée demain après-midi moyennant une signature, protège tout le monde. Le projet de loi proposé ne protège que les réservistes qui travaillent pour le gouvernement du Canada et ceux qui travaillent dans un domaine réglementé par le gouvernement fédéral. En d'autres termes, je présume qu'il y aura beaucoup de réservistes qui ne seront pas protégés par le projet de loi actuel, tandis qu'ils le seraient en vertu de la Loi sur la sécurité publique. Quel serait votre choix?

M. Eaton : Nous avons déjà, si vous voulez, brouillé les cartes en adoptant des lois provinciales qui protègent beaucoup de gens dans les provinces, et comme ces lois protègent six personnes sur dix et protègent de plus en plus de gens, je pense que le projet de loi C-40 est probablement le texte législatif à adopter à l'échelon fédéral.

Le sénateur Banks : Vous ne vous préoccupez pas des réservistes qui ne sont pas protégés par le projet de loi, tandis qu'ils le seraient en vertu de la Loi sur la sécurité publique? Une personne qui, par exemple, travaille dans une grande imprimerie qui emploie des milliers de personnes et qui n'est pas visée par la réglementation fédérale n'est pas protégée par le projet de loi

M. Eaton : Cette personne serait probablement protégée par une loi provinciale, alors elle jouit de la protection dont elle a besoin.

Le sénateur Banks : J'espère que vos bons espoirs concernant l'harmonisation des lois provinciales seront davantage fondés dans ce genre d'affaire qu'ils ne le sont dans tous les autres aspects des lois.

M. Eaton : J'admets qu'il y a des différences, sénateur.

Le sénateur Banks : Oui. Monsieur Murphy, vous avez dit tout à l'heure, en réponse à une question, que vous étiez en faveur du projet de loi. Cependant, dans votre exposé, vous avez dit qu'il faut le modifier et le renvoyer, et que nous devons l'envisager du point de vue des mesures d'incitation plutôt que comme un moyen de dissuasion. Quel est votre point de vue, au juste?

M. Murphy : Comme je l'ai dit dans mon exposé, la Chambre est tout à fait d'accord avec l'intention du projet de loi, qui est de faire ce qu'il faut faire pour les réservistes. À l'heure actuelle, le cadre qui sert à envisager cette question est très limité. Lorsque nous l'avons examiné, nous avons convenu qu'il était temps de mettre en place quelque chose de plus, alors la question est devenue « que faut-il faire »? Le gouvernement a choisi de s'engager dans cette voie. Nous avons proposé autre chose; ce n'est pas ce qui est devant vous aujourd'hui. À mon avis, les deux propositions répondraient au critère selon lequel il faut faire quelque chose, faire ce qu'il faut faire pour les réservistes, que ce soit des travailleurs ou des étudiants. Nous avons formulé une proposition, et nous pensons encore qu'elle mérite d'être examinée. Évidemment, ce serait plus facile si nous étions encore en train d'en parler.

Le sénateur Banks : Nous sommes en train d'en parler, monsieur Murphy.

M. Murphy : Nous sommes en train d'en parler ici dans le contexte d'un projet de loi qui est devant nous plutôt que d'en être à l'étape précédant la promulgation.

Le sénateur Banks : Un projet de loi qui est devant nous n'est pas un fait accompli.

M. Murphy : Assurément pas.

Le sénateur Banks : Bref, vous nous recommanderiez de renvoyer le projet de loi pour qu'on y apporte des modifications de façon qu'il soit axé sur des mesures d'incitation plutôt que sur une espèce d'exigence obligatoire?

M. Murphy : Notre proposition, c'est de l'examiner en profondeur.

Le sénateur Tkachuk : Monsieur Murphy, six gouvernements provinciaux ont déjà adopté des lois. Est-ce que les chambres de commerce provinciales ou la Chambre de commerce du Canada ont appuyé ces lois dans chacune des provinces? Je dirais que la majeure partie de vos membres sont visés par les lois provinciales.

M. Murphy : C'est exact. La loi fédérale ne s'applique qu'aux secteurs réglementés par le gouvernement fédéral.

Le sénateur Tkachuk : Il s'agit de 3 000 réservistes, n'est-ce pas?

M. Murphy : Je pense que c'est plutôt 2 000. Cependant, pour ce qui est des autres 11 000 réservistes qui travaillent pour un employeur, ils sont protégés par une loi provinciale. C'est quelque chose qu'il faudrait que je vérifie, sénateur. Je ne peux pas répondre à la question de savoir quelle était la position de nos filiales dans chacune des provinces par rapport aux six lois qui ont été adoptées.

Le sénateur Tkachuk : Lorsque vous parliez d'incitatifs, parliez-vous d'une loi axée sur des mesures d'incitation ou plutôt de dédommagement, comme M. Eaton en a parlé tout à l'heure?

M. Murphy : Vous pouvez voir ça de plusieurs façons différentes. Nous utilisons le régime fiscal du Canada de toutes sortes de façons pour inciter à certains comportements économiques. Nous le faisons régulièrement dans le domaine des affaires. Il y a de nombreux exemples de cela. Nous réfléchissions à l'idée qu'il fallait faire quelque chose dans le domaine dont il est question aujourd'hui, alors y a-t-il une option qu'on utilise ailleurs dans l'économie? Le cas échéant, nous pourrions peut-être envisager de l'appliquer dans le cas qui nous occupe aussi, surtout chez les petits employeurs, pour lesquels on a déjà recours au régime fiscal, comme je l'ai mentionné. C'était ça l'intention.

Le sénateur Tkachuk : Avez-vous un exemplaire du texte de l'amendement proposé?

M. Murphy : Par rapport au libellé que nous proposerions?

Le sénateur Tkachuk : Oui.

M. Murphy : Non, je n'en ai pas. Nous pourrions y travailler si cela vous serait utile, mais je n'ai pas ce document avec moi.

Le sénateur Tkachuk : Avez-vous effectué des études que nous pourrions consulter? Je veux simplement démêler tout cela. M. Eaton et son organisation se sont prononcés en faveur du projet de loi, mais ils disent également qu'ils aimeraient voir réaliser une étude sur la question du dédommagement. Je ne veux pas vous faire dire des choses que vous n'avez pas dites, monsieur Eaton, mais je pense que j'ai paraphrasé correctement ce que vous avez dit.

M. Eaton : Oui.

Le sénateur Tkachuk : Monsieur Murphy, appuyez-vous le projet de loi dans son libellé actuel, si nous envisageons des façons d'offrir des incitatifs ou un dédommagement dans l'avenir, ou voulez-vous que nous nous occupions de cela? Tout ça coûte quelque chose. Je ne pense pas que nous pourrions faire cela rapidement.

M. Murphy : Il y a toujours deux façons de voir les choses. Vous pouvez adopter un projet de loi et en faire une loi pour ensuite passer à autre chose et espérer qu'il se produise quelque chose pour ce qui est d'essayer de régler les problèmes que nous avons soulevés, ou vous pourriez vous dire « Voilà qui mérite un examen. Essayons de déterminer comment nous pourrions atteindre l'objectif visé. »

Selon nous, la deuxième option est la meilleure.

Le sénateur Tkachuk : Apporter un amendement ici, vous voulez dire?

M. Murphy : Oui.

Le sénateur Tkachuk : Le projet de loi vise 3 000 réservistes, mais aussi 12 000 étudiants, non?

M. Murphy : C'est exact.

Le sénateur Tkachuk : Appuyez-vous les dispositions du projet de loi qui visent les étudiants et qui feraient en sorte qu'il y ait des lignes directrices qui leur permettraient de ne pas payer d'intérêts sur leurs prêts d'étude pendant leur service?

M. Murphy : Certainement. Comme je l'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, nous avons examiné tous les éléments en question, et nous sommes en faveur de ce qui est proposé.

Le sénateur Tkachuk : Je pense que nous ne souhaitons pas que le tout soit reporté pendant trop longtemps.

M. Murphy : La rédaction du texte est efficace.

Le sénateur Mitchell : J'aimerais dire rapidement que les membres du comité viennent tout juste de rentrer d'Afghanistan. Ça a été une expérience remarquable à de nombreux égards. Cela nous a permis plus précisément d'observer les militaires à l'œuvre, dont beaucoup sont des réservistes. Je pense que je puis dire au nom de tous que nous avons été énormément impressionnés par la qualité du travail des gens là-bas et par leur professionnalisme, non seulement au sens militaire, mais aussi parce qu'ils comprennent le peuple afghan et font un travail important auprès de la population.

Merci de tout le travail que vous faites pour les aider. C'est extraordinaire, et ils le méritent.

J'aimerais aborder la question de la façon dont vous dénichez des employeurs ou dont vous faites la promotion. Travaillez-vous seulement auprès d'employeurs qui ont déjà des employés réservistes ou essayez-vous d'encourager tous les employeurs à embaucher des réservistes? En d'autres termes, votre travail comporte-t-il un volet promotion?

M. Eaton : Il est clair que vous pourriez affirmer que nous faisons la promotion des réserves. L'un des moyens que nous utilisons, c'est notre programme ExécuTrek. C'est le programme dans le cadre duquel nous amenons les employeurs voir l'entraînement des réservistes pendant une journée. Ce peut-être à la BFC de Wainwright, au Centre d'instruction de Meaford du Secteur du Centre de la force terrestre ou à l'un des grands camps où nous procédons à l'instruction militaire. Cela permet aux employeurs de voir ce que fait la réserve.

De cette manière, nous suscitons l'intérêt des employeurs pour ces jeunes gens qui servent leur pays. C'est quelque chose d'énormément important à nos yeux. C'est le principal moyen que nous utilisons. On peut faire cette promotion en se rendant dans les camps de l'armée, en amenant les employeurs dans un aérodrome ou sur un bateau et en leur montrant ce qui se passe dans la Marine et dans la Force aérienne.

M. Ayre : Il y a un programme de récompense dans le cadre duquel les réservistes nomment chaque année les employeurs qui ont fait preuve de collaboration et ainsi de suite, à l'échelon provincial et à l'échelon fédéral. Nous citons le nom des employeurs et nous remettons des certificats et des récompenses dans le cadre d'un événement. Les réservistes et les employés participent à cet événement. Nous organisons ce genre d'activités de promotion : des dîners, des allocutions, et ainsi de suite.

M. Desmarteau : Pour ce qui est de cibler des groupes d'employeurs, nous essayons bien de joindre les employeurs en général. Nous essayons de nous concentrer sur les employeurs dont nous savons qu'ils emploient actuellement beaucoup de réservistes. Les services de police de l'ensemble du pays, par exemple, ont tendance à compter beaucoup de réservistes dans leurs rangs. Nous organisons des séances de groupes de discussion avec les Manufacturiers et les exportateurs du Canada. Nous avons également déjà présenté des exposés devant les membres de clubs Rotary et de chambres de commerce de différentes villes partout au pays.

Par ailleurs, notre priorité va aux employeurs de réservistes. Ça a toujours été une priorité importante. Lorsque nous discutons avec les membres des unités de réserve du pays, nous essayons d'encourager les réservistes à inviter leur patron à participer au programme ExécuTrek ou à soumettre la candidature de leur patron pour une récompense. Nous joignons également les employeurs par l'entremise des réservistes; ils nous mènent à leurs employeurs.

Le sénateur Mitchell : Lorsque vous rencontrez des réservistes au chômage, leur remettez-vous une liste d'employeurs? Comment les employeurs qui participent à ces séminaires ou qui se rendent à la BFC de Wainwright... comment trouvent-ils des réservistes à embaucher?

M. Desmarteau : Le conseil ne voulait pas devenir une agence d'emploi. Par conséquent, nous n'encourageons pas les réservistes à s'adresser à nous s'ils cherchent du travail. Nous ne voulons pas les aider à trouver du travail. Par contre, si les employeurs participent à nos activités et sont impressionnés, et s'ils veulent embaucher les réservistes, nous les aidons à communiquer avec les unités de réserve pour qu'ils puissent trouver des employés à embaucher parmi les réservistes. Les employeurs sont souvent impressionnés par les compétences et les valeurs des réservistes.

Le sénateur Mitchell : Je viens d'Alberta, et les employeurs de cette province ont de la difficulté à trouver des gens à embaucher parce que la demande de main-d'œuvre est très forte.

Simplement pour vous donner la possibilité de le répéter pour le public, vous avez mentionné — et c'est un fait — qu'il y a d'énormes avantages à embaucher une personne qui suivi un entraînement militaire, parce que cette personne a des compétences et une formation. Dans un sens, on peut dire que les réservistes sont toujours en train de suivre une formation. En d'autres termes, ils suivent des séances de perfectionnement professionnel aux frais du gouvernement et au nom de leur entreprise. Pouvez-vous décrire de façon générale les compétences que les employeurs trouvent particulièrement intéressantes chez leurs employés réservistes? S'agit-il seulement de l'expertise en matière de logistique, de la capacité d'organiser, de gérer, de diriger?

M. Eaton : Pour parler en termes généraux, l'employeur embauche une personne qui est attentive, qui est concentrée et qui va s'acquitter des tâches qui lui sont attribuées. Si on dit à un réserviste ce qu'on veut qu'il fasse, il le fait. Les réservistes sont probablement plus concentrés que la moyenne sur ce qu'ils font. Voilà une façon très générale de décrire la chose.

Oui, il y a parmi les réservistes des jeunes qui peuvent travailler comme cuisinier-minute, mais ce que les employeurs doivent rechercher, c'est la personne qui est capable de se concentrer, qui est polie et attentive, et qui, lorsqu'on lui donne un ordre, sait ce qu'on veut et s'exécute.

M. Desmarteau : La compétence la plus importante, c'est probablement le leadership, c'est-à-dire la capacité de travailler de façon autonome, ainsi que de travailler en équipe. Leur vie en dépend, alors ils peuvent travailler à la fois de façon autonome et en équipe. Il y a aussi la loyauté, qui est une valeur extrêmement difficile à trouver de nos jours. Si un employeur a affaire à un réserviste, il sait qu'il a affaire à quelqu'un qui peut être loyal et qui va l'être si l'employeur fait lui aussi preuve de loyauté. Si les gens découvraient les compétences et valeurs que les réservistes acquièrent dans le cadre de l'entraînement et des opérations militaires, nous n'aurions pas suffisamment de réservistes en ce moment pour répondre à la demande.

Le sénateur Mitchell : Oui. L'une des choses les plus importantes, en affaires, dans la vie et dans la société, c'est le leadership. Pour ma part, je ne connais que relativement peu d'endroits où on forme explicitement les gens pour qu'ils soient capables de leadership; l'armée fait partie de ces rares endroits. Je connais les militaires, et je sais que le leadership est une partie importante de ce qu'ils font. Mais comment acquiert-on cette compétence? Ça ne s'apprend pas à l'école. Où est-ce que ça s'apprend? Toutes les entreprises veulent que leurs gestionnaires possèdent cette compétence.

M. Desmarteau : Non seulement l'armée est l'un de ces endroits, mais je pense que c'est le meilleur endroit pour ce qui est de la formation. Ce sont probablement les Forces canadiennes qui offrent la meilleure formation.

Le sénateur Mitchell : Il m'arrive de regretter de ne pas être passé par là avant de devenir chef du parti libéral en Alberta. Le point commun entre les deux, c'est qu'on travaille dans les tranchées, permettez-moi de vous le dire!

Pour ce qui est des réservistes étudiants, entre autres, y a-t-il des employeurs qui recrutent surtout des réservistes étudiants? Est-ce une possibilité?

M. Eaton : Je ne pense pas que les choses se passent ainsi dans les universités. Ces dernières années, nous avons ciblé les universités et les établissements d'enseignement. Nous l'avons fait surtout pour nous assurer que, de façon uniforme dans tous leurs départements, les responsables des établissements en question s'assuraient que les étudiants qui suivaient un entraînement dont l'horaire entrait en conflit avec celui des examens pouvaient régler leur conflit d'horaire et pouvaient obtenir qu'on prenne les mesures nécessaires, par exemple en leur donnant congé. Il s'agissait en réalité d'attirer leur attention et de s'assurer que l'administration travaillait avec les départements.

Le sénateur Mitchell : Une dernière question, par rapport aux incitatifs. Ça m'intéresse parce qu'il s'agit d'aller au- delà du gouvernement fédéral et des employeurs visés par la réglementation fédérale.

Vous avez mentionné que le gouvernement australien verse 1 000 $ par semaine. C'est beaucoup d'argent, mais il ne fait aucun doute que ça en vaut la peine. Lorsque vous parlez du régime fiscal, monsieur Murphy, que verriez-vous à cet égard? Pouvez-nous donner des exemples? Ils ne paient certainement pas les réservistes lorsqu'ils ne travaillent pas. Peut-être y a-t-il un supplément, mais ils obtiennent déjà une déduction fiscale ou une radiation pour cela. Parlez-vous réellement d'un crédit d'impôt, d'une espèce de majoration?

M. Murphy : Oui; exactement.

Le sénateur Mitchell : Ils ont droit à une radiation pour la formation supplémentaire ou pour le remplaçant du réserviste?

M. Murphy : Vous avez mis en plein dans le mille. Il y a d'autres idées dans l'air pour ce qui est des incitatifs et de nouvelles possibilités pour le secteur privé, surtout pour les petites et moyennes entreprises, pour qu'elles pensent à former leur personnel. Cela pourrait être l'une des applications évidentes, et ce pourrait même être pour quelqu'un qui ne travaille dans une entreprise que depuis six mois. À ce moment-là, l'employeur a un problème si l'employé prend congé. S'il y a quelque chose pour l'aider à gérer ce genre d'exigence, ça tomberait bien. Nous envisageons ce genre de chose.

Le sénateur Mitchell : Je remarque qu'une partie du projet de loi vise à garantir que les réservistes ne sont pas victimes de discrimination. Une fois qu'ils sont devenus l'employé d'un employeur, ils sont déjà embauchés. Existe-t-il des données selon lesquelles certains employeurs évitent d'embaucher des réservistes parce qu'ils ont peur de les voir appeler au service et avoir de la difficulté à les remplacer et de devoir offrir une nouvelle formation?

M. Eaton : Ça ne s'est pas produit au Canada, mais la possibilité existe, oui. Il y a toujours de la discrimination. Cependant, nous n'avons pas franchi cette ligne.

Le sénateur Moore : En ce qui concerne le conseil d'administration de votre organisation, compte-t-il des membres du sexe féminin?

M. Eaton : Oui.

Le sénateur Moore : Combien?

M. Eaton : Il y a trois femmes qui occupent le poste de présidente à l'échelon provincial.

Le sénateur Moore : Trois sur dix.

M. Eaton : Ce n'est pas facile de trouver des femmes PDG.

Le sénateur Moore : Vous êtes le président d'un conseil d'administration national.

M. Eaton : Je suis le président national, point.

Le sénateur Moore : Est-ce que ces présidents et présidentes des conseils d'administration provinciaux forment votre conseil national?

M. Eaton : Oui.

Le sénateur Moore : Il y a dix conseils d'administration provinciaux au total.

M. Eaton : Les vice-présidents et moi-même.

Le sénateur Moore : Oui, et il y a vous deux, le vice-président et le président. Votre conseil d'administration compte 12 membres?

M. Eaton : Douze membres, c'est exact.

Le sénateur Moore : Je sais que 18 p. 100 des réservistes sont des femmes, et je veux m'assurer qu'elles ont la possibilité de se faire entendre ici.

Quelqu'un a dit qu'on n'a pas consulté votre organisation avant de dépôt du projet de loi. Monsieur Murphy, est-ce que la Chambre canadienne de commerce a été consultée?

M. Murphy : Au sujet du projet de loi avant qu'il ne soit déposé? Non.

Le sénateur Moore : Je partage les préoccupations du sénateur Banks en ce qui concerne les gens protégés par le projet de loi. Je pense aux étudiants. Dans votre mémoire, monsieur Murphy, vous dites qu'il y a 12 000 réservistes étudiants. S'il s'agit d'étudiants du Collège militaire royal, ils feront peut-être partie du secteur qui est réglementé par le gouvernement fédéral; je n'en suis pas sûr. Ils reçoivent un peu d'aide s'ils touchent un prêt d'études canadien ou un prêt d'études provincial. Savez-vous combien d'étudiants appartiennent à ces catégories? Des 12 000, combien y en a-t- il qui ont un prêt? Presque la moitié d'entre eux sont protégés? Ce serait dans ce cas-là pas mal de réservistes. Combien d'entre eux sont protégés par le projet de loi? Quelqu'un a-t-il effectué une analyse à ce sujet?

M. Murphy : Sur la proportion des 12 000 étudiants qui ont un prêt à rembourser?

Le sénateur Moore : Oui, parce que ce sont les seuls à obtenir une protection dans ce cas-ci.

M. Murphy : Je ne sais pas.

Le sénateur Moore : J'aimerais savoir. Est-ce que les étudiants du CMR seraient protégés, qu'ils aient un prêt ou non?

M. Murphy : L'établissement qu'ils fréquentent n'y change rien. Ce dont vous parlez, c'est des employeurs fédéraux. Pour ce qui est des étudiants, peu importe l'établissement qu'ils fréquentent.

Le sénateur Banks : J'ai deux petites questions. Premièrement, monsieur Desmarteau, je présume que vous connaissez les lois provinciales dans une certaine mesure. Sont-elles à peu près équivalentes ou sont-elles différentes? Protègent-elles des groupes précis ou sont-elles universelles?

M. Desmarteau : Elles sont universelles. Il y a cependant des différences et un manque d'uniformité quant à leur objet. Dans certains cas, elles visent les opérations internationales et non les opérations au pays, ou encore elles ne visent pas les congés que les réservistes doivent prendre pour suivre des cours en vue de participer à un entraînement.

Le sénateur Banks : Cependant, elles protègent tous les réservistes de la province plutôt que seulement ceux qui font partie de la fonction publique ou qui travaillent dans un autre domaine donné.

M. Desmarteau : J'imagine, oui. Ce serait tous les réservistes qui sont visés par les règles provinciales d'emploi. Si les réservistes d'une province donnée travaillent pour une entreprise qui est visée par le Code canadien du travail, alors c'est cette loi qui s'applique.

Le sénateur Banks : Merci.

Vous avez mentionné le fait que les réservistes sont le plus souvent des agents de police. Mis à part la GRC, est-ce que les services de police municipaux sont visés par la réglementation fédérale, et sont-ils visés par le projet de loi qui est devant nous?

M. Desmarteau : Je ne connais pas toutes les lois ni tous les règlements qui régissent les services de police de l'ensemble du pays. Je m'avancerais sur un terrain glissant en tentant de répondre à la question. Je ne suis pas spécialiste de ce domaine.

D'après ce que je sais, les services de police sont placés sous l'autorité municipale et ont des conseils d'administration municipaux. Comme ils sont gouvernés à l'échelon municipal, les politiques qui s'appliqueraient seraient les politiques municipales.

Le sénateur Banks : Je pense que vous avez raison, et si c'est le cas, les policiers ne seraient pas protégés par le projet de loi?

M. Desmarteau : C'est ce que je pense, oui.

Le sénateur Banks : Monsieur Eaton, vous avez pris connaissance de la position de la Chambre. Êtes-vous d'accord avec celle-ci?

M. Ayre : Si je peux répondre à la question, nous ne demandons pas le renvoi du projet de loi pour que des amendements y soient apportés.

Le sénateur Day : Monsieur Murphy, j'essaie de préciser le point soulevé par le sénateur Moore. J'essaie de comprendre qui la loi visera si le projet de loi est adopté. Les mesures prises en 2004 s'appliquaient à tous les employeurs et à tous les réservistes. Pour ce qui est du projet de loi, vous avez cité le chiffre de 2 000 réservistes, et le sénateur Tkachuk, dans d'autres notes d'information, avait 3 000 réservistes sur 25 000 au sein de secteurs régis par le gouvernement fédéral.

En outre, le sénateur Moore a parlé des étudiants. M. Eaton en a parlé plus tôt et il a expliqué que c'était une question de sphère de compétence. Les universités et les étudiants qui les fréquentent relèvent tous des provinces pour ce qui est des notes, de la continuité des notes et des congés dont ils ont besoin.

Cependant, le gouvernement fédéral intervient, et le projet de loi C-40 pourrait avoir des conséquences pour les étudiants qui ont un prêt d'études canadien. M. Desmarteau et moi savons que l'un des avantages de faire partie de l'une des réserves, c'est qu'on gagne suffisamment d'argent pour ne pas avoir besoin de notre prêt d'études canadien. Ainsi, la plupart des étudiants n'appartiennent pas à cette catégorie.

Avez-vous dit que vous pensiez que l'ensemble des 13 000 étudiants seraient visés par le projet de loi?

M. Murphy : C'est le chiffre que le ministre a donné pour ce qui est des étudiants qui pourraient être touchés par le projet de loi s'il était adopté. La raison, c'est qu'on envisage les populations visées par la Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants et la Loi fédérale sur les prêts aux étudiants. Le projet de loi modifie ces deux textes. Ainsi, il y a un vaste ensemble d'étudiants touchés par les modifications de l'une ou l'autre loi.

Le sénateur Day : Sauf ceux qui sont réservistes et qui gagnent suffisamment d'argent pour ne pas avoir besoin de prêt.

M. Murphy : Je n'ai pas de données sur le nombre de réservistes qui ont un prêt d'études. Ce que je soupçonne, c'est que la plupart des gens qui poursuivent des études postsecondaires ont une dette ou un prêt d'études et doivent commencer à rembourser pendant qu'ils travaillent.

La question était réellement de savoir si nous pensions que c'était quelque chose qui devait faire partie du projet de loi, et nous le pensions. Ce n'était pas seulement les employeurs ou les employés des entreprises qui allaient être touchés. Nous pensions qu'il fallait aussi s'occuper des étudiants.

Le sénateur Day : Du fait que les étudiants qui ont des prêts ont besoin d'aide?

M. Murphy : Oui, si on s'occupe des réservistes, il faut éviter de faire une discrimination en fonction de ce qu'ils travaillent ou de ce qu'ils sont étudiants.

Le sénateur Day : Vous avez dit tout à l'heure que vous vous êtes penché sur la question avant la présentation du projet de loi. Saviez-vous qu'une loi avait déjà été adoptée? Qu'en pensiez-vous? Pensiez-vous que le projet de loi devrait être promulgué?

M. Murphy : J'en avais une idée générale, mais je n'avais pas réfléchi à la question de savoir s'il fallait rédiger un texte législatif distinct, l'adopter et appliquer quelque chose d'autre.

Le sénateur Day : Monsieur Eaton, aviez-vous analysé la loi existante lorsqu'il s'agissait encore d'un projet de loi dans le but de déterminer s'il fallait adopter ce projet de loi ou s'il fallait rédiger un nouveau texte?

M. Eaton : Non, sénateur.

Le sénateur Day : J'aimerais terminer en souhaitant à M. Desmarteau un bon départ à la retraite et en le remerciant du travail qu'il a fait pour aider le Conseil de liaison des Forces canadiennes.

Le président : Au nom du comité, j'aimerais remercier le Conseil de liaison des Forces canadiennes et la Chambre canadienne de commerce. Nous vous sommes reconnaissants de nous avoir fait part de vos opinions. Nous ne pouvions pas envisager d'adopter le projet de loi sans entendre votre témoignage. Nous sommes chanceux d'avoir eu l'occasion de le faire.

Nous allons passer à notre prochain groupe de témoins. D'après ce qu'on nous a dit, vous n'avez pas préparé d'exposés, mais vous êtes prêt à vous présenter. Parlez-nous un peu du travail que vous faites dans la vie civile et dans les réserves. Lieutenant Kane, vous avez la parole.

Lieutenant Dwight Kane, NCSM Carleton : Merci beaucoup. Je suis heureux d'être ici. Le rôle que je joue dans les forces est celui de commandant adjoint de la 1re unité de sécurité portuaire. Je viens tout juste de commencer un entraînement d'un mois pour préparer un exercice : Réaction royale. Nous allons nous entraîner à Kingston, puis nous participerons aux exercices qui se dérouleront au Québec.

Ma vie dans les forces a commencé en 1985, lorsque je me suis joint à la force régulière, au sein de laquelle j'ai passé sept ans et demi. Je suis réserviste depuis 1993. J'ai servi à temps partiel, ce que nous appelons la classe « A », les soirs et les fins de semaine. J'ai également servi pendant de plus longues périodes, dans des postes d'état-major ou en mer. Tout récemment, j'ai servi dans le cadre d'une mission à l'étranger. J'ai participé à l'Opération Safari, qui est la contribution du Canada à la mission des Nations Unies au Soudan. J'ai servi comme observateur militaire au Sud- Soudan pendant six mois.

Dans ma vie civile, je suis conseiller indépendant en gestion et gestionnaire de projet dans ma propre entreprise. Je fais ce travail par intervalles depuis environ dix ans. J'ai terminé des contrats le 31 mars, parce que je savais que l'exercice s'en venait, et je me suis rendu disponible. Je vais servir pendant un mois, puis je vais prendre des vacances vers la fin de mai avant de recommencer à travailler le 1er juin.

Le président : Merci. Sergent Kowlessar, vous avez la parole.

Sergent Dominique Kowlessar, CD, RO31 Infantry, Section Commander, Governor General's Foot Guards : Je suis le sergent Dominique Kowlessar. Je suis membre des Governor General's Foot Guards, un régiment de la force de réserve basé à Ottawa. Je sers dans les Forces depuis 1992 et j'ai occupé différents postes. Notre régiment est un régiment d'infanterie, qui fait partie du 33e Groupe-brigade du Canada en Ontario. Dans ma vie civile, je travaille à Industrie Canada. Je suis agente principale de l'industrie à la Direction générale de l'aérospatiale, de la défense et de la marine depuis un an. Auparavant, j'ai passé sept ans au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, du côté du commerce international, à la Direction générale des secteurs commerciaux, où j'ai occupé les postes de déléguée commerciale et de directrice adjointe.

Le président : Nous allons passer à la période de questions.

Le sénateur Banks : Sergent Kowlessar, nous avons eu le grand plaisir de rencontrer des membres du 33e Groupe- brigade du Canada pendant nos voyages, notamment pendant un voyage que nous avons effectué récemment en Afghanistan. C'est toujours un plaisir que de rencontrer des membres de votre brigade.

Pour ce qui est du projet de loi C-40, vous seriez protégée vu l'endroit où vous travaillez — soit au gouvernement fédéral soit dans un secteur réglementé par le gouvernement fédéral. Est-ce que certains de vos collègues des Governor General's Foot Guards travaillent dans le secteur privé, ou, comme le lieutenant Kane, sont travailleurs autonomes, et, à ce titre, ne sont pas protégés? Est-ce qu'il y en a parmi eux qui s'inquiètent par rapport au fait de pouvoir reprendre leur emploi après le déploiement?

Sgt Kowlessar : Sénateur, j'ai des collègues qui travaillent à la fonction publique qui sont en train de suivre l'entraînement pour la prochaine force opérationnelle, qui partira en août. Pour ce qui est du secteur privé, aucun des membres de mon régiment qui participent à l'entraînement préparatoire n'en fait partie. Quant aux membres de la 31e Brigade avec qui j'ai suivi l'entraînement pendant quatre mois, de septembre à décembre, un de mes collègues travaillait pour General Electric; il a négocié son congé, et son employeur lui a offert cette protection et lui a garanti qu'il pouvait reprendre son poste après son affectation opérationnelle en Afghanistan.

Le sénateur Banks : D'après votre expérience, même si cela ne s'applique qu'à quelques-uns de vos collègues, le secteur privé était enclin à offrir volontairement cette protection d'emploi?

Sgt Kowlessar : Dans ce cas précis, mon collègue a négocié avec son employeur, et celui-ci était tout à fait disposé à soutenir les soldats qui servent en Afghanistan et lui avait garanti qu'il pourrait reprendre son poste à son retour.

Le sénateur Banks : Lieutenant Kane, j'aimerais que vous répondiez à la même question.

Lt Kane : Sans loi de ce genre, les réservistes doivent toujours négocier. Les réservistes travaillent avec leur employeur et lui donnent un avis le plus longtemps à l'avance possible et lui expliquent ce qu'ils espèrent et ce qu'ils s'attendent à faire, et ils travaillent avec lui. Si un projet de loi du genre de celui dont il est question était adopté, les choses continueraient de se passer de la même façon. Les réservistes n'invoqueraient pas la loi pour obliger leur employeur à leur donner congé. Ils continueraient de négocier. La loi pourrait être un outil supplémentaire à utiliser en cas de problème. Ils pourraient citer la loi et dire qu'il y a des dispositions qui prévoient telle ou telle chose, dans le cas où ces dispositions s'appliquent à eux, que ce soit au gouvernement fédéral ou au sein d'organisations relevant du gouvernement fédéral. Une loi offrant un soutien aux réservistes peut être quelque chose de bien, mais cela ne signifie pas que les réservistes vont automatiquement s'en remettre à cela. Ils vont toujours continuer de négocier avec leur employeur pour que la relation de travail soit avantageuse pour les deux parties.

Le sénateur Banks : Selon le projet de loi C-40, si ces négociations n'ont pas lieu, ou si elles ne connaissent pas une issue heureuse, et que le réserviste est appelé au service actif et déployé, l'employeur, s'il s'agit du gouvernement fédéral ou d'une entreprise visée par la réglementation fédérale, doit offrir une protection d'emploi aux réservistes jusqu'à ce qu'ils reviennent du déploiement. Est-ce exact?

Lt Kane : Je veux préciser une chose que vous avez dite. Vous avez parlé d'un réserviste appelé à servir. J'aimerais préciser que les réservistes servent de façon volontaire. On ne peut appeler les réservistes à servir que dans des circonstances exceptionnelles, circonstances que précisent les dispositions qu'on a citées dans le débat concernant la Loi sur la défense nationale, et qui porte sur des cas très exceptionnels. Chaque fois que nous servons, comme je le dis à ma mère, que ce soit pendant deux jours, deux mois ou deux ans, c'est de façon volontaire. Nous nous engageons nous- mêmes à participer aux opérations, et c'est la raison pour laquelle c'est davantage un processus de négociation, parce que nous demandons la permission de prendre congé.

Le sénateur Banks : Il peut y avoir un effet sous-jacent à cet égard, parce que je pense que la situation pourrait changer si le projet de loi était adopté. Le comité, par exemple, est d'avis que, comme les deniers publics sont utilisés pour offrir aux réservistes le meilleur entraînement possible, le déploiement ne devrait pas toujours être volontaire. Si nous utilisons une part importante des fonds publics pour offrir à un technicien une formation d'un niveau donné dans tel ou tel domaine, ce technicien devrait être obligé de servir lorsqu'on l'appelle. Qu'en pensez-vous?

Lt Kane : Votre question me semble de loin dépasser mes capacités ou la raison pour laquelle je suis ici aujourd'hui.

Le sénateur Banks : J'aimerais que vous me donniez votre opinion personnelle.

Lt Kane : En attendant qu'il soit modifié, le système actuel fonctionne, et les réservistes obtiennent tout le soutien possible, dans la marine, du système divisionnaire et d'officiers comme moi-même, qui les conseillent quant à la façon de régler les problèmes liés à l'emploi. Pour ce qui est de ce genre de modifications de fond des politiques ou de la loi, malheureusement, je ne peux vraiment pas formuler de commentaires.

Le sénateur Banks : Sergent, je vais vous poser la même question. Supposons que votre unité offre un entraînement à un technicien des communications, ce qui est un rôle capital dans le cadre d'une opération d'un groupe d'infanterie sur le terrain, et supposons que ce technicien des communications a suivi la formation sur l'équipement de communication avec les hommes et les femmes de ce groupe d'infanterie. Si l'unité est déployée pour quelque raison que ce soit, ou si une partie de l'unité l'est, il serait évidemment utile que ce technicien des communications soit déployé en même temps que les personnes avec qui il a travaillé précédemment, et les contribuables vont avoir dépensé beaucoup d'argent pour offrir à cette personne un entraînement de ce niveau.

À l'heure actuelle, cette personne peut décider de ne pas participer au déploiement. Pensez-vous que c'est bien?

Sgt Kowlessar : Sénateur, je ne vais pas reprendre votre exemple, mais je vais vous dire que je suis sous-officier supérieur et que l'armée a consacré beaucoup de temps à mon entraînement. Je suis réserviste à temps partiel depuis 16 ans et j'ai beaucoup d'expérience. Personnellement, je me sentirais obligée de participer au déploiement. Il faut que les soldats participent aux opérations, alors mon opinion personnelle c'est que oui, j'aimerais être déployée et apporter une contribution. Je voudrais m'assurer que les hommes et les femmes qui sont sous mon commandement rentrent bien chez eux et que nous accomplissions la mission.

Cependant, pour ce qui est de la loi, nous utilisons la loi en vigueur pour faire valoir nos arguments auprès de notre employeur dans le cadre du processus de négociation. La modification proposée dans le cadre du projet de loi de la Loi sur la fonction publique nous offrirait un outil de plus pour nous permettre de reprendre nos postes à notre retour et pour garantir notre réintégration à notre niveau de titularisation. Lorsque vous parlez du droit des réservistes de refuser de servir, un point c'est tout, le service demeure volontaire. Les membres des forces de réserve ont le droit de dire non.

Cependant, d'après mon expérience et celle des hommes et des femmes avec qui je sers, ces gens comprennent certainement le besoin et savent qu'ils ont une grande contribution à apporter, compte tenu de leur situation, de leurs compétences et de leur expertise. Les compétences que les réservistes acquièrent dans le cadre de leur emploi dans le civil sont transférables pour ce qui est des métiers très pointus.

Le sénateur Banks : Et vice versa.

Sgt Kowlessar : Oui, sénateur.

Le sénateur Banks : Je vais terminer en répétant ce que le sénateur Mitchell a dit lorsque nous avons visité des bases à l'étranger et partout au Canada. La contribution qu'apportent les réservistes est exemplaire et tout à fait admirable. Merci beaucoup.

Le sénateur Day : J'aimerais que vous nous expliquiez tous les deux s'il est difficile ou facile de passer du service militaire à temps plein au service civil et au service militaire à temps partiel. J'ai moi-même fait la transition entre mon emploi précédent et quelque chose de nouveau pendant un certain temps, et j'ai trouvé très difficile de revenir et de bâtir une clientèle et de faire toutes les autres choses qu'il faut faire. Vos proches doivent être très compréhensifs. Pourriez-vous nous parler un peu de cette adaptation nécessaire?

Lt Kane : Ça me fait plaisir de répondre à votre question, sénateur. Je peux envisager la chose de deux points de vue différents : le service à court terme, dans la classe « A », pendant les week-ends, et la transition d'un bureau à cloison pendant la semaine aux opérations navales pendant la fin de semaine. Le week-end dernier, par exemple, j'étais dans le Vieux-Port de Montréal pour une dernière fin de semaine de formation sur la sécurité portuaire. Sur le chemin du retour, un officier avec qui je travaille et moi discutions du fait que c'est très surréaliste de passer de cet environnement au train-train quotidien. Bien sûr, plus on part longtemps, plus la transition est importante.

Cela dit, on s'habitue à la longue. Une expérience que j'ai vécue, c'est de partir pour aller faire un exercice international aux États-Unis pendant deux semaines. Je travaillais sur un projet de gestion particulièrement stressant dans le cadre d'un marché conclu avec le gouvernement fédéral. J'ai participé à une opération au cours de laquelle je pense que beaucoup d'entre nous ont travaillé 100 heures par semaine pendant deux semaines d'affilée. Ça a été très difficile. C'est à titre d'entrepreneur indépendant que j'ai fait ce travail, en fait, et c'était mes deux semaines de congé. Je suis rentré au travail le lundi suivant. Malgré tout, j'étais plein d'énergie et je parlais haut et fort, comme on dit, lorsque je suis rentré au travail.

Le service à long terme peut être difficile. Lorsque j'ai servi dans le cadre de la mission au Soudan, j'ai eu du temps pour décompresser; j'ai eu un mois de congé. Cela faisait partie de mon congé de réserviste. Cette transition a été difficile. J'avais fait l'expérience d'un environnement totalement différent, d'un pays différent, ou je faisais un travail stimulant, intéressant et difficile, puis j'ai été obligé de revenir au genre de choses ordinaires que nous faisons. Il n'y a qu'à dire « projet de gestion des TI » et les gens ont une idée de ce dont il est question.

On finit par s'habituer à ces transitions, et plutôt que d'être un problème, ça devient une chose dont on peut tirer parti : vous êtes parti, vous avez fait quelque chose d'intéressant et de stimulant, et vous savez que vous allez recommencer bientôt.

Le sénateur Day : Sergent, j'aimerais que vous répondiez à la même question, mais avant, lieutenant Kane, vous êtes travailleur autonome lorsque vous n'êtes pas en service de classe « B ». Il n'y a donc rien dans le projet de loi qui pourrait vous offrir une protection par rapport à votre clientèle.

Lt Kane : C'est vrai. Cependant, le projet de loi toucherait mon rôle d'officier divisionnaire de la Marine. Je suis responsable d'un certain nombre de caporaux et de soldats de la Marine; je suis responsable de leur carrière, de leur avancement et de leur perfectionnement.

Ainsi, il faudrait que je sache ce que suppose le projet de loi. Il faudrait que je connaisse les responsabilités des réservistes et les responsabilités des employeurs, puisque le projet de loi semble s'appliquer dans les deux sens. Les réservistes ont des responsabilités comme celle de donner un préavis à leur employeur. Il semble y avoir certaines limites, en ce sens que les employeurs peuvent, en fait, dire qu'ils ne pourront pas protéger l'emploi des réservistes, pour quelque raison que ce soit.

Le projet de loi me toucherait dans le sens où je devrais le comprendre, que je devrais être capable d'en parler et que je devrais pouvoir conseiller les réservistes à qui il s'applique.

Le sénateur Day : Je suis heureux que vous l'ayez précisé.

Sergent, vous avez assisté à la séance précédente et vous comprenez pourquoi nous posons ces questions et nous tenons la séance : nous essayons de voir s'il est nécessaire et souhaitable d'adopter le projet de loi C-40.

Pouvez-vous répondre à la question concernant le fait de s'adapter au service à temps plein, puis au retour au travail et au fait d'essayer de reprendre ce qu'on a laissé de côté il y a six mois ou un an?

Sgt Kowlessar : Je n'ai pas encore participé à un déploiement opérationnel. J'ai l'intention de le faire. Ce que j'ai fait jusqu'à maintenant, c'est que j'ai suivi des cours dans l'armée, des cours de leadership qui ont duré jusqu'à neuf semaines, des exercices de deux semaines une fois l'an et, plus récemment, j'ai suivi une formation spécialisée. J'ai passé quatre mois à Toronto avec la Compagnie des opérations psychologiques. La transition vers le travail a été rendue plus facile, en quelque sorte. Mon employeur a été compréhensif. J'ai gardé les dossiers sur lesquels je travaillais avant de partir. Le retour à mes responsabilités s'est bien passé.

Le sénateur Day : Vous n'aviez pas de dossiers qui ne pouvaient pas attendre? Je ne veux pas faire de blagues au sujet du gouvernement fédéral. Vous avez tout simplement repris les dossiers auxquels vous travailliez six mois plus tôt?

Sgt Kowlessar : Avant de partir pour l'entraînement, j'ai pu aviser mon employeur suffisamment à l'avance pour me permettre de monter un dossier de transition pour le fonctionnaire qui allait s'occuper à ma place d'un projet assez important. Nous avons eu suffisamment de temps pour tout expliquer au nouveau fonctionnaire parce que j'ai pu annoncer mon départ à l'avance, et ce préavis a facilité la transition. Lorsque je suis rentrée, j'ai recommencé à travailler sur ce projet qui était toujours en cours.

Le sénateur Day : Sergent, le projet de loi C-40 n'a pas encore été adopté, et votre employeur a été très compréhensif. Y a-t-il un élément qui manquait dans votre relation et dont l'absence a rendu la transition du service militaire dans votre emploi au gouvernement fédéral plus difficile que le projet de loi C-40 pourrait fournir?

Sgt Kowlessar : La relation que j'entretiens avec mon employeur est très positive. Même celle que j'entretenais avec mon ancien employeur, le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, était très positive.

Voici comment j'ai procédé : j'ai prévenu mon employeur du fait que j'allais prendre congé et j'ai demandé au Conseil de liaison des Forces canadiennes de parler avec mes employeurs. Le CLFC s'est rendu très utile, puisqu'il a expliqué la mission et l'entraînement à mes employeurs et pris des mesures pour que mon directeur principal visite la BFC de Wainwright dans le cadre du programme ExécuTrek

Le sénateur Day : Ça rend les choses plus faciles.

Sgt Kowlessar : Compte tenu de ce qui est proposé par rapport à la fonction publique, le droit de réintégration au niveau actuel au retour est une chose très positive. C'est quelque chose qui n'existe pas en ce moment. Cependant, je n'ai pas eu de problèmes avec mon employeur parce que j'ai pris des mesures.

Le sénateur Day : Lorsque vous dites « c'est quelque chose qui n'existe pas en ce moment », vous voulez dire que la loi n'existe pas encore, mais que votre employeur vous a bel et bien permis de réintégrer votre poste sans que vous ayez à invoquer la loi?

Sgt Kowlessar : Oui.

Le sénateur Day : Selon vous, quelqu'un qui travaille au gouvernement fédéral et pour les ministères où vous avez dit travailler n'a pas besoin de la loi pour être protégé?

Sgt Kowlessar : D'après mon expérience au MAECI et à Industrie Canada, lorsque j'ai suivi le processus dont je vous ai parlé et que j'ai consulté le CLFC, nous avons examiné la loi existante et la partie de la Loi sur la défense nationale qui a trait aux situations d'urgence, et qui protège tous les civils ainsi que les membres de la fonction publique. Il y a eu beaucoup d'hésitations au CLFC par rapport à la portée des dispositions et au fait qu'elles assurent la sécurité d'emploi des membres des Forces qui reviennent de mission.

Nous nous sommes donc fondés sur cette loi et avons constaté que la portée en était un peu limitée. Les modifications proposées de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique offrent une sécurité accrue aux fonctionnaires puisqu'elles garantissent la réintégration au niveau actuel dans le cas où le ministère est restructuré ou dans d'autres circonstances.

Le sénateur Day : Pour ce qui est d'accumuler de l'ancienneté aux fins de la pension, est-ce que vous cessez d'en accumuler auprès de votre employeur actuel si vous vous absentez pendant une période prolongée? Vous n'êtes pas en train de travailler et vous n'êtes pas payée, mais vous ne perdez pas votre ancienneté? Vous ne cotisez à aucun régime de pensions, mais avez-vous par contre la possibilité, maintenant, de cotiser à un régime de pensions pour les réservistes?

Sgt Kowlessar : Oui. Le régime de pension de la Force de réserve a été créé en mars 2007. Lorsque les réservistes sont déployés dans le cadre d'une affectation opérationnelle, on considère qu'ils appartiennent à la classe « C », et ils obtiennent le même salaire et les mêmes avantages sociaux que les membres des forces régulières. Le régime de pension s'applique dans les deux cas, c'est-à-dire pendant l'entraînement et pendant le déploiement.

Le sénateur Day : Vous ne perdez pas de pension, mais c'est un régime différent. Ce que je veux dire, c'est que vous cessez de cotiser au régime de pensions du gouvernement fédéral pour cotiser à un régime de pension distinct, dans l'armée.

Sgt Kowlessar : Oui, c'est un régime de pension distinct, qui est celui de l'armée.

Le sénateur Nancy Ruth : Je suis contente de vous voir parmi nous. Êtes-vous propriétaire unique? Comment vous arrangez-vous pour vos déplacements? Qui s'occupe de l'entreprise et comment cela fonctionne-t-il?

Lt Kane : Je suis propriétaire de mon entreprise depuis environ sept ans. J'ai commencé comme propriétaire unique et, il y a environ cinq ans, je me suis constitué en société. Ma situation est différente. Nous avons parlé des réservistes qui doivent négocier avec leur employeur. Je dois voir plus loin. Je me suis associé à un petit groupe. Je suis réellement indépendant, mais je m'associe avec un petit groupe d'experts-conseils, et ce réseau est en pleine expansion. Je travaille avec les gens, dont certains ont déjà servi dans les Forces armées. Ils savent ce que je fais. L'entretien de ce réseau définit la façon dont vous travaillez dans le domaine. Il faut être à l'affût des projets qui s'en viennent, des possibilités à venir.

Le voyage à l'étranger était un gros problème pour moi. Les fins de semaine n'affectent pas mon revenu, mais six mois, c'est beaucoup de temps. J'étais bien prêt et disposé à résilier ou à abandonner les contrats qui m'avaient été octroyés pour que je puisse partir et exécuter la mission en question. J'en ai tiré une leçon. J'aurais pu être plus insistant. J'étais peut-être trop certain de pouvoir trouver rapidement d'autre travail; aujourd'hui, je me suis établi à nouveau et je continue. Il s'agit vraiment d'entretenir des relations, de faire du réseautage et de s'assurer de se tenir occupé.

Le sénateur Nancy Ruth : Vous avez un réseau de connaissances dans le domaine. Si vous ne pouvez pas mener à terme un contrat particulier, des collègues peuvent prendre la relève?

Lt Kane : Exactement.

Le sénateur Nancy Ruth : Quel pourcentage de vos contrats provient de vos activités de réseautage à titre de réserviste?

Lt Kane : Jusqu'à maintenant, aucun. Tous les contrats que j'ai décrochés auprès de membres de mon réseau et de clients sont attribuables au bouche à oreille et au mérite; autrement dit, j'accomplis un bon travail et on m'en offre d'autre. À bien y penser, je peux affirmer honnêtement que mes contrats ne sont aucunement liés à mes contacts sociaux et à mon travail avec les réservistes. C'est mon cas.

Le sénateur Nancy Ruth : Savez-vous si d'autres propriétaires uniques qui sont constitués en société et qui comptent un ou deux employés obtiennent du travail auprès des Forces armées?

Lt Kane : Je ne sais pas, sénateur. Je ne suis pas au courant. Je n'ai jamais de contrats avec elles. J'ai fait mes premières armes comme entrepreneur au sein d'une entreprise qui avait un contrat avec le MDN, mais ce n'est pas mon cas.

Le sénateur Nancy Ruth : J'aimerais vous demander quelque chose à tous les deux. Il a, certes, une présomption générale selon laquelle il s'agit de la manière la plus ingénieuse d'aider l'armée à se doter de l'effectif d'hommes et de femmes dont elle a besoin pour faire ce qui doit être fait à ce moment particulier de l'histoire du Canada. Dans quelle mesure considérez-vous qu'il s'agit d'un avantage, soit pour votre entreprise, soit pour vos clients, soit pour le secteur de la fonction publique dans lequel vous travaillez? Quelle contribution apportez-vous, et quels sont les points problématiques?

Lt Kane : Je crois que nous avons entendu les témoins précédents exposer leurs idées à ce sujet. Il ne nous revient peut-être pas de juger; nous ne voulons pas trop nous vanter.

Le sénateur Nancy Ruth : Si vous vous trouvez devant nous, c'est que vous faites partie de l'élite. Laissez-nous connaître vos réponses, et nous ferons la part des choses.

Lt Kane : C'est peut-être un postulat délicat, mais je vais l'assumer.

Je répéterai ce qui a déjà été dit : ce que les employeurs trouvent chez les réservistes, c'est le leadership. Dans mon cas, on m'a donné un emploi particulièrement difficile en fonction de ce qu'on décrivait comme mes aptitudes pour la communication. En fait, on ne pouvait pas mettre le doigt dessus; on ne savait pas de quoi il s'agissait. On m'a dit : « Vous apportez une contribution et nous aimons votre style de communication. » C'était du leadership. J'entends par là la capacité de prendre les devants, d'être solide et de savoir ce qui doit être fait. En d'autres mots, voir ce qui doit être accompli et passer à l'action.

Si vous êtes la personne dans la pièce qui a le rang le plus élevé, c'est vous le chef. Nous voulons voir du leadership chez les jeunes et chez les militaires subalternes. En outre, et c'est la priorité, toute une gamme d'autres aptitudes, comme la communication, entrent en jeu. J'entends par là la capacité à s'exprimer clairement et à se présenter devant un groupe. Le souci du détail, l'attitude et la façon de se vêtir. Ce genre de chose. Les réservistes prennent de nombreuses habitudes pendant leur carrière, que cela soit conscient ou non. Par exemple, une certaine disposition à tirer plaisir de son travail, une capacité d'évoluer au sein d'un groupe de personnes qui aiment faire la même chose et de s'amuser. Nous avons une maxime dans les forces : si vous ne vous amusez pas, c'est que vous ne vous y prenez pas bien. Les gens appliquent cette attitude à leur emploi. Je suis désolé, mais j'ai oublié le deuxième volet de la question.

Le sénateur Nancy Ruth : J'aimerais tout d'abord entendre le sergent.

Sgt Kowlessar : J'aurais quelque chose à ajouter à ce qu'a dit le capitaine au sujet du leadership. Quelle est la contribution des réservistes à leur emploi dans le secteur civil? J'ai suivi le cours de commandement de section d'infanterie, et j'ai donné une formation en leadership à plusieurs soldats. J'ai reçu la rétroaction de mes employeurs sur mon rendement au travail, et j'ai observé le rendement d'autres réservistes. Ils apportent leurs aptitudes pour l'organisation disciplinée, leur capacité de travailler en équipe, de s'adapter, leur flexibilité et leur capacité de travailler dans des circonstances exigeantes.

Lorsque j'ai remporté le poste de directrice adjointe au MAECI, l'un des facteurs décisif était mon expérience de la gestion du personnel, de très grands groupes. Cela m'a aidé dans ma carrière. Pour mon poste actuel à la Direction de l'aérospatiale, Direction générale de l'aérospatiale, de la défense et de la marine, à Industrie Canada, le fait d'avoir participé à une affectation opérationnelle avec des soldats canadiens et d'avoir utiliser l'équipement construit en grande partie grâce à l'industrie canadienne s'est révélé un atout. Il a également été profitable de revenir et de renforcer ces réseaux et ces relations afin d'aider les entreprises canadiennes à connaître leurs activités dans ces secteurs.

À titre de réserviste, j'ai beaucoup à offrir à mon organisme. Je suis reconnaissante de son soutien. Votre invitation à exposer mes commentaires sur la modification constitue une bonne occasion de faire la lumière sur ce point.

Le sénateur Nancy Ruth : J'aimerais que vous me donniez simplement votre impression, parce que je ne crois pas qu'il existe beaucoup de données ou de réponses à ce sujet : ceux qui ont servi dans la Réserve et qui travaillent dans la fonction publique du Canada obtiennent-ils des promotions plus rapidement ou plus lentement?

Le président : Répondez simplement par l'affirmative.

Le sénateur Nancy Ruth : Juste votre impression.

Sgt Kowlessar : Un proche collègue à moi a été promu très rapidement. Il travaille comme civil au MDN. Quant à moi, je dirais que, oui, les compétences que j'ai acquises dans l'armée ont grandement contribué à ma carrière dans la fonction publique.

Le sénateur Nancy Ruth : Le deuxième volet de ma question concernait les conflits qui surviennent à votre travail. Cette situation pourrait vous arriver à l'un comme à l'autre, puisque vous travaillez avec des collègues et des réseaux.

Vous disposez de ces compétences — admettons que vous avez un avantage sur le plan du leadership et de la capacité à travailler fort, à maintenir une discipline et à bien communiquer. De quels genres de conflits pouvez-vous entendre parler, par exemple en prenant une bière avec vos collègues?

Lt Kane : Parlez-vous des conflits entre les réservistes et leur employeur?

Le sénateur Nancy Ruth : Non, entre les réservistes et les autres employés. Lorsqu'ils reviennent, leurs compétences se sont améliorées. Ils ont peut-être l'esprit plus aiguisé, ou ils sont plus rapides. Cela plaît au patron, qui leur offre une promotion. Il existe de nombreux styles de leadership. Certains travaillent mieux dans une situation que dans une autre. Le sujet des groupes mixtes a fait couler beaucoup d'encre. Voilà le genre d'éléments qui m'intéresse.

Lt Kane : Les gens ont des préjugés lorsqu'ils apprennent que j'ai fait le service militaire ou que je suis dans la Réserve, alors je dois me forcer à adopter le style de leadership d'une personne du type B pour ne pas me trouver à donner des ordres. Cela ne fonctionne tout simplement pas.

Dans un environnement civil, il faut parler à tout le monde, rassembler les gens et écouter les différents points de vue. À certains moments, il peut être nécessaire de donner des directives claires et absolues — et c'est plaisant. Cependant, plus souvent qu'autrement, il faut travailler avec les gens et être détendu.

Une chose que je ne vous ai pas dite d'emblée, c'est que je suis ce qu'on appelle un officier MAR SS, soit un officier d'opération maritime de surface. Je conduis des navires; je navigue et je fais du guet sur le pont. Normalement, nous avons presque tous une personnalité de type A : nous aimons la compétition et sommes parfois autoritaires. De toute évidence, ce style de leadership ne fonctionne pas dans la plupart des emplois civils. Ainsi, il faut connaître son public, son environnement, apprendre et s'adapter. Si vous tentez d'être un sergent ou un lieutenant dans votre environnement, je peux vous garantir que cela ne fonctionnera pas.

Les réservistes apprennent rapidement quelle part de leur expérience ils peuvent adapter à leur emploi dans le secteur civil. Dans mon cas, le style de leadership que j'exerce dans le secteur civil varie beaucoup de mon style de commandement militaire.

Sgt Kowlessar : Pour répondre au premier volet de votre question, lorsque j'ai servi à titre de directrice adjointe au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, j'ai travaillé beaucoup à la dotation. Les procédures de dotation étaient assorties de certains critères, comme les connaissances et les qualités et aptitudes personnelles, sur lesquelles nous fondions notre évaluation des candidats. Tous les concours sont assujettis à ces politiques. Nous examinons le C.V. du candidat pour voir s'il a l'expérience nécessaire. Le candidat est alors soumis à un examen écrit, à une entrevue et à un contrôle des références, comme je l'ai été à différents degrés dans le domaine du commerce. Pour ma part, je n'ai pas été témoin du mécontentement de mes collègues en raison du résultat d'un concours particulier.

Le sénateur Nancy Ruth : Cela n'a rien à voir avec le projet de loi. Il y a une initiative de la fonction publique visant à octroyer des emplois aux conjoints des membres décédés des forces armées. Je ne sais pas si cela comprend les réservistes, mais la mesure s'applique à la police. Que pensez-vous de l'idée de favoriser l'accès des conjoints à la fonction publique?

Lt Kane : C'est la première fois que j'en entends parler. Quant à moi, je ne peux pas faire de commentaires.

Sgt Kowlessar : Je ne peux pas faire de commentaires à ce sujet.

Le sénateur Mitchell : Ma première question est de savoir quelle était la nature de l'exposé qu'on vous a fait pour vous préparer à la séance d'aujourd'hui? J'ose à peine poser la question. Vos supérieurs ou vos collègues vous ont-ils préparé à cette rencontre?

Lt Kane : On nous a fait un exposé sur la formule et dit à quoi nous pouvions nous attendre, comment cela se déroulerait et ce que vous pourriez attendre de nous. Si vous voulez savoir si on nous a dit quoi dire, la réponse est non.

Le sénateur Mitchell : Dans notre discussion à ce sujet, la conclusion évidente a fait surface. Pour quelqu'un comme vous qui a sa propre entreprise, un départ est préjudiciable. Lorsque vous partez, vous perdez de l'argent ou des clients, ou vous faites du surplace. En outre, n'est-il pas aussi vrai que beaucoup de réservistes qui participent à un déploiement gagnent moins que leur salaire? Rien ne garantit que leur salaire sera compensé ou maintenu par leur employeur. Peut- être que cela arrive parfois, mais beaucoup de réservistes doivent perdre de l'argent.

Lt Kane : C'est vrai. Cela dépend de la rémunération offerte par leur employeur. Il n'existe pas d'exigence précise prévoyant un complément salarial.

Des situations intéressantes surviennent dans la Réserve : un militaire subalterne pourrait être le patron d'une personne qui occupe un rang supérieur dans la même unité.

Le sénateur Mitchell : Je voulais que cela figure au compte rendu.

Avez-vous des collègues qui ont perdu leur emploi parce qu'ils ont participé à un déploiement? En connaissez-vous qui se sont fait décourager par leur employeur de participer à un déploiement, dont l'employeur ne voulait pas coopérer? Connaissez-vous des collègues qui n'ont pas pu obtenir d'emploi chez un certain employeur parce qu'ils sont membres de la Réserve?

Sgt Kowlessar : Je ne suis pas au courant de telles situations.

Lt Kane : La Réserve perd parfois des gens parce qu'ils ne peuvent pas se libérer pour un déploiement. Ils n'ont pas assez de temps. Ainsi, parce qu'ils craignent de perdre leur emploi civil, nous perdons des gens.

C'est pourquoi les dispositions visant à soutenir les réservistes sont bénéfiques. L'un des éléments liés aux conseils ou au counselling à l'endroit des personnes, si une telle mesure était en place, serait la disposition concernant les deux semaines de formation annuelle. Ce serait bien, car, comme je l'ai mentionné, dans mon cas, ces deux semaines étaient mes seules vacances. Si les réservistes doivent utiliser leur période de vacances pour la formation, ils ont moins de temps à accorder à leur famille et à eux-mêmes. Ainsi, toute disposition visant la formation serait probablement très profitable pour les réservistes et la Réserve elle-même, qui s'efforce de dispenser ces formations.

Le sénateur Banks : Comment le savez-vous, lieutenant? Je n'ai peut-être pas lu correctement, mais il semble que la question dont vous venez de parler est l'un des points qui, selon le projet de loi, seront traités dans le cadre d'un règlement ultérieur. A-t-on défini une telle chose à votre connaissance?

Lt Kane : Je ne parlais pas d'une mesure définitive. J'avançais qu'il serait profitable de prendre des dispositions relatives à la formation annuelle.

Le président : J'aimerais remercier le lieutenant Kane et le sergent Kowlessar de s'être présentés devant nous et de nous avoir aidés dans le cadre de notre étude du projet de loi. Nous apprécions beaucoup le fait que des réservistes aient pris du temps, loin de leur famille, pour venir nous parler. Honorables sénateurs, souhaiteriez-vous aborder d'autres points avant de procéder à une étude article par article du projet de loi C-40?

Le sénateur Day : Je suis prêt à commencer l'étude article par article, mais je sais que certains préféreraient prendre le temps de réfléchir aux témoignages et effectuer l'étude article par article à la prochaine réunion. J'aimerais qu'on discute des observations soulevées, dont la suivante : dans le cadre de l'élaboration du règlement prévu à l'article 247.97 proposé du Code canadien du travail, je propose que le Conseil de liaison des Forces canadiennes participe à titre consultatif. De plus, on pourrait songer à abroger cet article de la Loi sur la défense nationale, s'il est clair que le gouvernement actuel adopte une nouvelle orientation stratégique. On ne devrait pas conserver des dispositions qui n'ont jamais été appliquées.

Le président : Je croyais que le sénateur Banks avait déjà présenté des lois à ce sujet il y a longtemps.

Le sénateur Banks : Mon projet de loi n'est pas encore promulgué. Il y a aussi la Loi sur la sécurité publique. Si le projet de loi est adopté, il y aurait en place trois mesures législatives traitant de la question de trois façons différentes, mises de l'avant par trois groupes distincts. L'une de mes inquiétudes au sujet du projet de loi, c'est la possibilité qu'il recoupe les dispositions actuelles de la Loi sur la sécurité publique, qui pourrait être promulguée demain après-midi.

Le sénateur Day : Il s'agit d'une décision stratégique d'adopter une nouvelle orientation, n'est-ce pas?

Le sénateur Banks : Dans ce projet de loi, ainsi, ne devrait-on pas abroger l'article de la Loi sur la sécurité publique qui porte sur ces questions?

Le sénateur Day : Selon moi, on devrait non pas l'abroger, mais mentionner dans les observations qu'elle devrait l'être.

Le sénateur Meighen : La Loi sur la sécurité publique ne s'applique-t-elle pas à un contexte particulier, c'est-à-dire lorsqu'on décrète l'état d'urgence, ce qui n'est pas le cas ici?

Le sénateur Banks : Je dois relire le texte pour en être certain. Je ne crois pas que la loi exige que l'état d'urgence soit décrété. Je crois qu'elle dit seulement : « en cas d'urgence ».

Le sénateur Meighen : C'est ce dont je ne suis pas certain.

Le président : Nous avons accès à un conseil juridique si vous aimeriez entendre une opinion.

Le sénateur Meighen : Je ne sais pas si nous avons le temps d'entendre un argument juridique.

Le président : Nous avons trop d'avocats qui siègent à notre comité. Je vous signale simplement que nous y avons accès.

Le sénateur Banks : Je ne veux pas retarder le processus à cause de mes incertitudes. La loi actuelle, qui pourrait être promulguée mais ne l'a pas été, porte que, en cas d'urgence, tout le monde a droit à la protection prévue, pas seulement les groupes explicités. Selon la recherche effectuée par le personnel de la Bibliothèque du Parlement, le terme « urgence » englobe l'insurrection, l'émeute, l'invasion, la guerre ou les conflits armés. Si cette définition est comprise dans les définitions du texte de loi, alors toutes ces situations constituent une urgence aux termes de la loi.

Le sénateur Tkachuk : Nous pouvons seulement nous occuper de ce que nous savons. Nous ne pouvons nous occuper de ce que nous ne savons pas.

Le sénateur Banks : Nous pouvons poser une question à ce sujet.

Le sénateur Tkachuk : Nous savons qu'il s'agit d'un projet de loi, et le reste n'est que conjecture — en fonction de l'éventualité de l'entrée en vigueur de la loi. Nous pourrions le mentionner dans les observations, à condition d'être clair. Je ne sais pas si nous avons tenu des audiences au sujet de l'autre projet de loi. Je déteste aborder des sujets qui pourraient poser problème.

Le président : C'est à vous, sénateur Meighen.

Le sénateur Meighen : Le fait d'ajouter une observation serait convenable, pour ma part. Toutefois, je vous fais remarquer que ce projet de loi traite de sujets comme la formation et la participation volontaire en Afghanistan, contrairement à l'autre projet de loi.

Le sénateur Day : Quant à l'argument du sénateur Tkachuk au sujet des audiences tenues concernant l'autre projet de loi, j'étais le parrain du projet de loi de 2002 sur la sécurité publique, et nous avons tenu de vastes consultations. J'ai parlé abondamment du fait que je trouvais avantageuse cette initiative visant à appuyer les réservistes, mais la loi n'a jamais été édictée. On en a débattu de long en large.

Le sénateur Tkachuk : Ce n'est pas ce que je voulais dire. Nous n'avions pas songé à la possibilité que la loi serait édictée pendant qu'on adopte le projet de loi. Je ne voulais pas dire que nous n'avions pas étudié ce projet de loi en particulier. De toute évidence, ce projet de loi a déjà été examiné.

Le président : Aimeriez-vous présenter d'autres observations ou commentaires maintenant?

Le sénateur Banks : Dans quelle mesure est-ce une question pertinente, Monsieur le président, ou est-il même utile, de se demander si, dans l'éventualité où la loi est adoptée, l'existence simultanée de ces deux lois poserait un problème? Ce n'est peut-être même pas un point à débattre.

Le président : Pour autant que l'autre loi n'est toujours pas édictée, ce ne sera pas une question.

Le sénateur Banks : Elle sera toujours là.

Le président : Si elle est édictée, il y aura un problème. Je n'ai pas encore vu de gouvernement assez stupide pour édicter dans la même semaine deux lois qui se recoupent.

Le sénateur Banks : S'il néglige de le faire dans les sept prochaines années, la question sera touchée par une certaine autre mesure législative.

Le président : Précisément. En pratique, ce n'est pas probable; mais théoriquement, c'est possible. Je penche pour le côté pratique, si cela peut vous aider.

Le paragraphe 96(7.1) du Règlement nous permet de poursuivre moyennant la permission d'omettre l'étude article par article. Ai-je la permission de le faire? Sinon, nous ferons l'étude article par article de la façon habituelle.

Le sénateur Day : Monsieur le président, vous avez présenté deux questions. Premièrement : passons-nous maintenant à l'examen article par article? Deuxièmement : renonçons-nous à l'examen article par article? Je suis d'accord pour l'omettre, si nous pouvons nous entendre pour annexer des observations.

Le président : Cette mesure n'écarte pas la possibilité de faire des observations.

Je vais lire le paragraphe 96(7.1) du Règlement du Sénat :

À moins de permission de ses membres présents, un comité ne peut omettre l'étude article par article d'un projet de loi.

Permettez-vous qu'on omette l'étude article par article du projet de loi C-40, Loi modifiant le Code canadien du travail, la Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants, la Loi fédérale sur les prêts aux étudiants et la Loi sur l'emploi dans la fonction publique? L'entente doit être unanime. Ceux en faveur, veuillez lever la main. Je devrais souligner que le sénateur Segal n'est pas membre du comité.

C'est unanime.

Le sénateur Day : S'il était membre du comité, il serait en faveur.

Le président : Nous avons résolu une question. La permission d'omettre l'étude article par article du projet de loi C- 40 a été accordée.

Sommes-nous d'accord pour adopter le projet de loi sans amendement?

Des voix : D'accord.

Le président : Ainsi, le projet de loi est adopté sans amendement.

Le comité souhaite-t-il discuter de la possibilité d'annexer des observations au rapport?

Des voix : Oui.

Le président : En vertu de l'alinéa 92.2f) du Règlement, nous pouvons tenir une séance à huis clos pour discuter d'une ébauche du rapport. Le comité souhaiterait-il discuter des observations en public ou à huis clos?

Des voix : En public.

Le président : Sénateur Day, vous avez commencé par présenter des observations que vous souhaitiez qu'on examine. Peut-être pourriez-vous les répéter aux membres du comité?

Le sénateur Meighen : À titre de précision, rédigeons-nous tout de suite les observations, ou formulons-nous simplement des suggestions pour que la version finale soit abordée en temps opportun?

Le président : Il y a deux façons de procéder, selon moi : vous pourriez charger les analystes de préparer une ébauche puis de la remettre au comité au complet, ou vous pourriez demander aux analystes de préparer une ébauche et de la soumettre à l'approbation du comité directeur. C'est à vous de choisir.

Le sénateur Meighen : La rédaction en comité est difficile. Je préférerais que le comité directeur revoie les observations une fois que le fond a été défini.

Le président : Aimeriez-vous présenter une motion à ce sujet?

Le sénateur Meighen : J'en fais la proposition.

Le président : Ceux en faveur de cette démarche?

Des voix : D'accord.

Le président : J'apprends vraiment à bien procéder. Voici la motion :

Le Sous-comité du programme et de la procédure est autorisé à approuver la version finale des observations annexée au rapport qui tiendra compte de la discussion d'aujourd'hui, moyennant toute modification de pure forme ou autre changement nécessaire sur le plan de la grammaire ou de la traduction.

Des voix : D'accord.

Le président : Adopté.

Sénateur Day, vous avez entamé la discussion en signalant que vous aimeriez que l'on ajoute certaines choses dans un rapport.

Le sénateur Day : Deux choses.

Le président : Veuillez présenter une chose à la fois, et nous verrons si les autres membres ont des commentaires.

Le sénateur Day : Dans le libellé du règlement prévu à l'article 247.97 du Code canadien du travail, on suggère de consulter le Conseil de liaison des Forces canadiennes. Vous pouvez ajouter « entre autres » si vous voulez. Cela veut dire que, sans égard aux entités consultées, il faut s'assurer de consulter le Conseil de liaison des Forces canadiennes.

Le président : Y a-t-il des commentaires sur cette recommandation?

Le sénateur Banks : Bonne idée.

Le sénateur Mitchell : Bonne idée.

Le président : Est-ce que quelqu'un s'y oppose?

Le sénateur Tkachuk : Je n'ai pas compris. Cela relève-t-il du ministre ou d'un comité? Par exemple, nous avons un comité de la réglementation.

Le sénateur Day : J'ai dit le ministre. C'est lui qui l'élabore.

Le président : Êtes-vous d'accord, sénateur Tkachuk?

Le sénateur Tkachuk : Je suis neutre. Je m'abstiens.

Le président : Veuillez présenter votre deuxième proposition, sénateur Day.

Le sénateur Day : Je n'ai pas l'article de la Loi sur la défense nationale qui a été généré par la Loi de 2002 sur la sécurité publique. Cependant, peu importe le numéro de l'article, il devrait être abrogé si le gouvernement a pris la décision stratégique de ne pas passer à l'action.

Le président : Voulez-vous dire « ne pas mettre en œuvre »?

Le sénateur Day : Oui, ne pas mettre en œuvre.

Le sénateur Meighen : Je n'ai pas d'objection, mais je ne comprends pas bien ce que demande le sénateur Day. Appuie-t-il l'initiative législative du sénateur Banks au Sénat visant à accélérer l'abandon d'une mesure qui ne sera pas édictée, ou se préoccupe-t-il plutôt du fait que deux mesures législatives, la Loi de 2002 sur la sécurité publique, dans l'éventualité où on l'édicte, et le projet de loi C-40, soient en vigueur simultanément?

Le sénateur Day : Je crains que le public et le gouvernement ignorent ce que le Sénat sait, soit qu'une autre mesure législative existe déjà, mais n'a simplement pas été appliquée. Mon objectif principal est de mettre au jour cet autre article qui n'a pas été mis en application.

Mon objectif secondaire est de demander au gouvernement de prendre en considération le conflit potentiel entre les deux démarches et, s'il a pris la décision stratégique d'abandonner la mesure précédente, de l'éliminer.

Le sénateur Meighen : Seriez-vous d'accord pour dire que, si la Loi sur la sécurité publique vise effectivement des secteurs comme le service volontaire et les droits de scolarité, contrairement au projet de loi C-40 — et c'est sur ce point que je ne suis pas certain —, elle devrait effectivement être promulguée et continuer de s'appliquer aux secteurs qui ne sont pas touchés par le projet de loi C-40?

Le sénateur Day : Quelle que soit la façon dont vous voulez présenter les choses.

Le sénateur Meighen : Par exemple, je ne crois pas que le projet de loi C-40 vise les états d'urgences, peu importe comment ils sont définis. La Loi sur l'emploi dans la fonction publique vise tout le monde, comme vous l'avez souligné, tandis que le projet de loi C-40 ne le fait pas. Toutefois, si l'état d'urgence était décrété, il serait utile que la Loi sur l'emploi dans la fonction publique soit en vigueur pour déterminer qui est obligé de servir.

Le président : Avant de conclure, le sénateur Banks souhaitait dire quelques mots.

Le sénateur Banks : Je ne crois pas qu'il serait convenable de recommander l'abrogation de cet article de la loi pour les raisons invoquées par le sénateur Meighen. Toutefois, je suis à cheval sur les principes — je l'assume —, et je reviens sur la disposition que j'ai présentée : nous ne pouvons pas reconnaître, dans une recommandation, que ce gouvernement, ou un autre, a le droit de décider, dans le cadre d'une mesure stratégique, de ne pas appliquer une loi du Parlement ou tout article de cette loi. Lorsque le Parlement adopte une loi, il s'agit d'une directive adressée au gouvernement. Si nous demandions une révocation, cela reviendrait à lui demander de présenter un projet de loi abrogatoire plutôt que de prendre la décision stratégique de à ne pas appliquer une partie de la loi, qui est une loi du Parlement.

Dans ce cas, je crois que nous devrions demander au ministre d'examiner très attentivement les dispositions de la Loi sur la sécurité publique relatives au même sujet et d'envisager la possibilité de faire concorder les deux mesures, et lui suggérer des façons de le faire.

Le sénateur Tkachuk : J'étais sur le point de soulever la même préoccupation que le sénateur Banks : nous formulerions une observation qui contredirait l'argument que vous avez exposé au Sénat en faveur de votre projet de loi, ce qui n'est pas une bonne idée.

Si je suis préoccupé, c'est aussi parce que j'étais absent. Ce n'est pas pour dire que je ne respecte pas votre connaissance du projet de loi, sénateur Day, mais j'étais absent au moment de l'étude de la Loi sur la sécurité publique et je ne la connais pas bien.

Le sénateur Day : Je crois que vous m'avez posé deux ou trois questions.

Le sénateur Tkachuk : Je ne sais pas ce que renfermait ce projet de loi; je ne sais pas si vous avez raison, Messieurs. Je ne me sens pas à l'aise de formuler une recommandation sur un aspect que certains d'entre nous ne connaissons pas suffisamment pour en discuter. Je ne sais pas si le sénateur Nancy Ruth était présente pendant l'étude de ce projet de loi, mais moi, je ne l'étais pas. Je sais que le sénateur Mitchell était présent, mais nous ne savons pas ce que renfermait le projet de loi, alors c'est difficile. Je crois qu'une étude ou quelque chose du genre serait indiqué.

Le président : Si je peux me permettre, le sénateur Banks a proposé que nous entreprenions une étude. Cela serait-il acceptable?

Le sénateur Day : Certainement. Mon objectif est de signaler que nous sommes au courant de l'existence de l'autre loi et de m'assurer que le ministre est au courant aussi.

Le président : Madame Radford, pourriez-vous nous dire ce que vous avez tiré de cette conversation, s'il vous plaît?

Melissa Radford, analyste, Bibliothèque du Parlement : J'ai noté que le Conseil de liaison des forces canadiennes devrait être consulté. Il faudrait également se pencher sur l'article de la Loi sur la défense nationale. Enfin, nous allons soit faire une étude soit au moins aviser le ministre de l'existence de l'autre mesure législative et lui demander de faire tout son possible pour faire concorder les deux lois.

Le président : Si j'ai bien compris, il faudrait que quelqu'un mène une étude, pas nous. Le comité est-il d'accord avec l'idée d'aviser le ministre?

Le sénateur Day : Je ne crois pas que la formule « mener une étude » est celle que nous devrions préconiser. Examiner, de la manière que le ministre jugera bonne, serait mieux, selon moi.

Le président : Souhaiteriez-vous inclure d'autres points aux observations?

Le sénateur Meighen : Je ne tire pas une fierté excessive du fait d'être l'auteur, mais vous avez demandé la consultation du Conseil de liaison des forces canadiennes. Je lui ai demandé s'il était prêt à assurer un suivi et à établir des rapports, si la loi était adoptée. Pourrait-on ajouter cela à la suggestion du sénateur Day visant le rôle du Conseil de liaison des Forces canadiennes?

Le président : Les membres du comité auraient-ils des commentaires à ce sujet?

Le sénateur Day : Je n'ai aucune objection à cet égard. Je crois qu'il s'agit d'un troisième point, par contre. Le mien consistait à recommander la consultation du Conseil de liaison des Forces canadiennes dans le cadre de l'élaboration du règlement. C'est une tout autre question. Je crois qu'il s'agirait d'une troisième observation.

Mme Radford : Pourriez-vous répéter cette proposition?

Le sénateur Meighen : Qu'on demande au Conseil de liaison des Forces canadiennes de surveiller et de suivre les répercussions du projet de loi C-40 et de rendre des comptes au ministre à ce moment-là.

Le président : Et le ministre devra déposer le rapport?

Le sénateur Meighen : Ce serait une bonne idée.

Le président : Dans les deux Chambres.

Le sénateur Day : Dans les deux langues officielles.

Le sénateur Meighen : Et sans retard.

Le président : Assurons-nous que Mme Radford a bien circonscrit cette idée.

Mme Radford : Oui, c'est fait.

Le président : Veuillez donc nous la lire.

Mme Radford : Qu'on demande au Conseil de liaison des Forces canadiennes de surveiller et de suivre l'impact du projet de loi C-40 et de rendre des comptes au ministre à ce sujet; le ministre déposera alors le rapport devant les deux Chambres.

Le sénateur Day : Du Parlement.

Le président : Les membres aimeraient-ils faire d'autres observations?

En l'absence de commentaires, après avoir examiné les observations, est-il entendu que le projet de loi sera renvoyé au Sénat, sans amendements et avec des observations, dès que possible?

Des voix : D'accord.

Le président : Merci. Le projet de loi est donc adopté et, j'aimerais que, dès que possible, vous prépariez une ébauche des observations et la communiquerez aux membres du comité directeur; ils se réuniront alors au premier moment, après notre réception d'une copie de l'ébauche, si cela vous convient, chers collègues.

Des voix : D'accord.

Le président : Y a-t-il d'autres questions à soumettre au comité à l'heure actuelle?

Le sénateur Moore : Je propose que nous levions la séance.

Le président : Il y a une motion pour lever la séance. Tout ceux qui sont pour?

Des voix : D'accord.

Le président : La séance sera levée dans quelques instants. Chers téléspectateurs, si vous avez des questions ou des commentaires, veuillez consulter notre site web au www.sen-sec.ca. Nous y affichons les exposés des témoins et le calendrier des audiences confirmées. Sinon, vous pouvez joindre la greffière du comité au 1-800-267-7362 pour de plus amples renseignements ou de l'aide pour communiquer avec les membres du comité.

La séance est levée.


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