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Délibérations du comité sénatorial permanent de
la Sécurité nationale et de la défense

Fascicule 9 - Témoignages du 2 juin 2008


OTTAWA, le lundi 2 juin 2008

Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, auquel a été envoyé le projet de loi C-287, Loi instituant la Journée nationale des Gardiens de la paix (Casques bleus), se réunit aujourd'hui, à 14 h 28, pour étudier ce projet de loi, ainsi que pour étudier, en vue d'en faire rapport, la politique de sécurité nationale du Canada.

Le sénateur Colin Kenny (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : C'est avec plaisir que je vous souhaite la bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense. Je m'appelle Colin Kenny. Je préside le comité. Avant que nous ne commencions, j'aimerais vous présenter rapidement les membres du comité.

À ma gauche se trouve le sénateur David Tkachuk, de la Saskatchewan. Il a été nommé au Sénat en juin 1993. Il a été homme d'affaires, fonctionnaire et enseignant, et il est vice-président du comité.

À sa gauche se trouve le sénateur Michael Meighen, de l'Ontario. Il a été nommé au Sénat en septembre 1990. Il est avocat et membre des barreaux du Québec et de l'Ontario. Il préside actuellement notre sous-comité des anciens combattants, et il siège au Comité sénatorial permanent des banques et du commerce ainsi qu'au Comité sénatorial permanent des pêches et des océans.

À sa gauche se trouve le sénateur Nancy Ruth, qui défend les droits des femmes. Elle vient de l'Ontario, et elle est sénateur depuis mars 2005. Le sénateur Nancy Ruth est membre du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, ainsi que du Comité sénatorial permanent des finances nationales. Elle est également membre de notre Sous-comité des anciens combattants.

Au bout de la table se trouve le sénateur Peter Stollery, qui a longtemps été député de la circonscription de Spadina. Il a présidé de nombreux comités du Sénat, le dernier en date étant le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international.

À ma droite se trouve le sénateur Wilfred Moore. Il a été nommé au Sénat en septembre 1996. Il représente la division sénatoriale de Stanhope St.-South Shore, en Nouvelle-Écosse. Il a participé activement à la vie communautaire de Halifax-Dartmouth, et il a siégé au conseil des gouverneurs de l'Université Saint Mary's.

À sa gauche se trouve le sénateur James Munson, journaliste canadien très réputé qui a joué récemment le rôle de directeur des communications du premier ministre Chrétien. Il a fait une longue carrière en journalisme, au Canada et à l'étranger. Il a été chef de pupitre pour CTV à Beijing de 1987 à 1992. Il a été également chef de pupitre et correspondant principal à Halifax et à Londres, en Angleterre; et il a couvert la guerre entre l'Iran et l'Irak.

Au bout de la table se trouve le sénateur Rod Zimmer, de Winnipeg, au Manitoba. Il a fait une longue et distinguée carrière dans les affaires et dans les œuvres de bienfaisance. Il est sénateur depuis août 2005. Il siège également au Comité sénatorial permanent des transports et des communications.

Honorables sénateurs, chers téléspectateurs, nous recevons aujourd'hui le lieutenant-général Walter Natynczyk. Le Lieutenant-général est vice-chef d'état-major de la Défense. Il s'est enrôlé dans les Forces canadiennes en août 1975. Pendant ses années de formation, il a servi auprès de l'OTAN en Allemagne au sein des Royal Canadian Dragoons. Il a servi comme commandant d'escadron au Collège militaire royal de Kingston, comme casque bleu, ainsi qu'au sein des forces de l'ONU déployées en Bosnie et en Croatie. Il assume les responsabilités de vice-chef d'état-major de la Défense depuis juin 2006, et il joue dans le cadre de ses fonctions le rôle de gestionnaire des ressources des Forces canadiennes et est le numéro 2 de la chaîne de commandement. Le lieutenant-général Natynczyk est considéré comme étant le remplaçant le plus probable du général Rick Hillier, chef d'état-major de la Défense.

Nous vous souhaitons la bienvenue, lieutenant-général Natynczyk. D'après ce qu'on nous a dit, vous aimeriez faire une déclaration. Nous avons hâte d'entendre ce que vous avez à dire.

Lieutenant-général W. J. Natynczyk, vice-chef d'état-major de la Défense, Défense nationale : Comme vice-chef d'état-major, j'ai la responsabilité, entre autres, de gérer les ressources du ministère. Je crois comprendre que vous vous intéressez aux évaluations stratégiques. Je vais mettre celles-ci en perspective en vous expliquant comment nous procédons à l'affectation des ressources au sein du ministère de la Défense nationale, ou MDN. Si vous avez des questions ou si vous voulez intervenir, je vous prie de le faire, sénateurs; sinon, je vais lire le texte de ma déclaration.

Merci de m'offrir l'occasion d'expliquer la façon dont les ressources sont affectées au ministère.

[Français]

L'objectif est de vous aider à mieux comprendre de quelle manière les évaluations stratégiques s'intègrent à ce système et comment nous nous occupons de celles-ci. Notre système est fondé sur le principe des défis, des priorités et de la gestion de risques, et ce, dans le but de garantir que nous traitons de façon prudente sur le plan financier les questions plus importantes pour la mise en œuvre de la mission de la défense.

[Traduction]

J'aimerais vous donner quelques renseignements sur les ressources du ministère de la Défense nationale. Le MDN a fait l'objet d'importants engagements financiers pour la défense depuis 2005. Le budget de 2005 prévoyait 7 milliards de dollars de nouveaux fonds budgétaires sur cinq ans, et le budget de 2006, en plus de confirmer l'engagement pris dans le cadre du budget de 2005, ajoutait 5,3 milliards de dollars sur cinq ans. Ensemble, les budgets de 2005 et de 2006 représentent une augmentation d'environ 30 p. 100 du financement du programme des services de la défense sur six ans.

Cependant, la planification à long terme et la gestion des ressources bénéficient d'un environnement de financement stable et prévisible. Le budget de 2008 a répondu à ce besoin, par l'intermédiaire d'un engagement à faire passer l'augmentation annuelle automatique du financement de la défense de 1,5 à 2 p. 100, à partir de 2011-2012. Ainsi, la Défense nationale va obtenir un financement supplémentaire d'environ 12 milliards de dollars au cours des 20 prochaines années. Ce financement stable et prévisible permet au ministère de faire une planification qui dépasse le prochain cycle budgétaire afin d'effectuer un examen complet du portefeuille de la défense et des besoins futurs.

Cette importante augmentation du financement de la défense a engendré un ensemble unique de défis et de possibilités. Nous avons été en mesure de faire l'acquisition très rapidement d'appareils C-17 et de commander de nouveaux appareils de transport aérien tactique de type Hercules C-130J, ainsi que d'investir dans l'équipement de combat terrestre. Cependant, il va falloir plusieurs années, dans bien des cas, pour réaliser les investissements visant l'augmentation de la taille de l'effectif et l'acquisition de nouvelles capacités et d'équipement nouveaux. Ainsi, nous avons constaté que le financement de la défense pour les quatre à cinq prochaines années va augmenter plus rapidement que notre capacité, surtout en ce qui a trait à l'effectif, à l'industrie et au processus d'approbation de l'acquisition d'immobilisations pour investir l'intégralité des fonds accessibles dans les quatre volets de la capacité militaire : l'effectif, les immobilisations, l'infrastructure et l'état de préparation opérationnelle.

Un certain nombre de programmes ont été mis en place pour régler ce problème de capacité prévu, et nous avons pris des mesures pour équilibrer la demande et l'offre à court et à long termes. Nous discutons avec les organismes centraux, le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada et le ministère des Finances du report de fonds prévu pour certaines années où nous aurons un surplus sur les années où nous nous attendons à connaître un déficit découlant de l'acquisition de toutes ces mobilisations. En outre, nous avons créé un fonds relatif aux possibilités touchant les programmes qui est utilisé pour augmenter pendant cinq ans les investissements dans l'entretien et la réfection des infrastructures, le maintien en puissance et un certain nombre d'autres initiatives, notamment un programme d'apprentissage visant notre effectif civil.

[Français]

Le côté positif de la question du solde du financement est que l'engagement financier à long terme du gouvernement nous a permis d'établir les défis qui découlent de cette question, de formuler des recommandations et de prendre des décisions au sujet de la planification des ressources, et ce, afin de déterminer dans quelles sphères et à quel moment les affectations substantielles et les ajustements doivent être réalisés dans le programme de service de la défense afin d'atteindre des résultats réalistes au meilleur coût. Ces résultats comprennent la détermination précoce des sommes excédant les capacités du ministère et la détermination du moment où ces fonds seront requis afin de répondre à des besoins essentiels en matière d'investissements lorsque notre capacité augmentera avec le temps.

Afin d'atteindre ces résultats, le ministère réalise la planification financière et la planification des ressources en se fondant sur une période de dix à 20 ans. Cette planification prend en compte le financement prévu ainsi que toutes les activités et acquisitions d'immobilisation abordables, connues et annoncées. Ce processus nous permet de déterminer la capacité financière au regard des propositions tant à court terme qu'à long terme. Les effets à long terme des décisions prises concernant les ressources sont toujours examinés. La planification à long terme, associé à un financement stable et garanti, nous autorise à réaliser des engagements de fonds auprès de nos gestionnaires supérieurs le plus tôt possible, ce qui leur permettre d'affecter les ressources le plus judicieusement.

[Traduction]

Permettez-moi d'aborder maintenant la question des évaluations stratégiques. Tous les gestionnaires supérieurs préparent une évaluation stratégique à l'automne dans le cadre du cycle de planification de la défense du ministère. Ces évaluations stratégiques constituent essentiellement le début du cycle de planification des activités du ministère. Les évaluations stratégiques ont pour objectif de présenter au sous-ministre et au chef d'état-major de la Défense l'état général du milieu d'activités du gestionnaire des ressources et de permettre à celui-ci d'expliquer la façon dont il va mener ses activités et affecter les tâches compte tenu de ses ressources. Les évaluations stratégiques présentent également, aux fins de considération par le ministère, les principaux domaines de risque des gestionnaires, dans lesquels les ressources, humaines ou financières, ou même le temps ne sont pas suffisants pour permettre l'exécution complète des tâches qui leur ont été attribuées. Ces domaines de risque font l'objet d'une évaluation, et les gestionnaires fournissent des détails sur la façon dont ils se proposent d'atténuer les risques et de gérer les répercussions de ceux-ci sur les résultats stratégiques connexes et sur les activités de programme, si le ministère ne leur fournit pas le personnel ou le financement nécessaire pour supprimer le risque en question.

L'objectif global des évaluations stratégiques, c'est de mettre l'accent sur les éléments stratégiques clés qui permettent de prendre de bonnes décisions. Les gestionnaires supérieurs élaborent également des plans d'activité plus détaillés qui doivent correspondre à leur budget et qui doivent leur permettre, de façon réaliste, de s'acquitter de leurs tâches et de respecter leurs priorités. Les plans d'activités appuient les évaluations stratégiques et comportent généralement les éléments suivants : premièrement, la liste, en ordre de priorité, de toutes les tâches importantes que le gestionnaire prévoit exécuter au cours des quatre prochaines années; deuxièmement, les attentes face à l'exécution de ces tâches, ainsi que les résultats attendus; troisièmement, les risques liés à l'exécution de ces tâches, compte tenu des ressources fournies; quatrièmement, des propositions de stratégie d'atténuation de ces risques; cinquièmement, le financement attribué aux organisations subordonnées. Ces plans d'activités sont fondés sur les niveaux de financement de base existants et prévus et demeurent donc à l'état d'ébauche jusqu'à ce que ces affectations initiales aient été rajustées et déterminées pour de bon dans le cadre du processus de planification des activités et par l'envoi des lettres d'approbation qui marquent la fin du cycle de planification des activités.

Une fois les évaluations stratégiques et les ébauches de plans d'activités présentées, les membres de mon personnel examinent, analysent et remettent en question les besoins financiers, évaluent les risques pour l'organisation et examinent les stratégies d'atténuation proposées par tous les gestionnaires supérieurs. Cette analyse est effectuée dans l'ensemble du ministère dans le but de relever les besoins et les risques les plus importants pour le ministère. Lorsqu'ils se préparent à effectuer cette analyse, les membres de mon personnel évaluent la situation budgétaire prévue pour l'exercice à venir et pour les dix prochaines années, et ils déterminent les ressources supplémentaires qui peuvent être rendues accessibles pour affectation par le sous-ministre et par le chef d'état-major de la Défense afin de répondre aux besoins financiers de base et pour l'année en cours. Cette évaluation tient également compte des besoins généraux du ministère afin, par exemple, de majorer le financement de base pour le maintien en puissance, pour l'entretien de l'infrastructure, pour les réparations, pour la recherche et le développement ainsi que pour maîtriser l'accroissement des dépenses d'effectifs. Tout cela vise à garantir une approche équilibrée en matière de financement des quatre volets de la capacité militaire dont j'ai parlé tout à l'heure.

Dans le cadre de la fonction de remise en question, je tiens compte des critères d'évaluation suivants : les besoins opérationnels, l'orientation des forces, la faisabilité sur le plan financier et les changements liés au milieu, par exemple, l'évolution du prix du carburant. On vérifie également que toute demande d'effectif ou de fonds est raisonnable, qu'elle est sensée et on vérifie qu'il est possible d'y répondre, c'est-à-dire que le gestionnaire supérieur est réellement en mesure de procéder à l'embauche ou de fournir les fonds demandés dans les délais prévus.

[Français]

Une fois que toutes les questions ont été évaluées, mon personnel formule les recommandations concernant l'ajustement des ressources allouées ou l'acceptation des risques et des stratégies de réduction de ces risques. Puisqu'il n'y aura jamais assez de fonds pour répondre à toutes les demandes, les tensions critiques font l'objet d'une recommandation pour un financement, et ce, sans jamais oublier que les ressources financières disponibles sont limitées.

Suite à mon évaluation et à une consultation avec les gestionnaires supérieurs, processus qui a lieu généralement entre novembre et février, une réunion d'une journée et tenue réunissant les gestionnaires supérieurs, le sous-ministre et le chef d'état-major de la défense. En février, durant cette séance, les principaux défis, tensions et risques sont présentés par les gestionnaires et discutés au point de vue de la stratégie du ministère.

À ce moment, le sous-ministre et le chef d'état-major ont la possibilité soit d'accepter les risques, qui ont été déterminés par les gestionnaires de niveau 1 et de fournir des directives sur les mesures d'atténuation des risques proposées, de suggérer la modification des tâches et des priorités ou de fournir les ressources nécessaires pour minimiser les risques qui sont considérés trop grands.

En février ou mars, les recommandations à propos des tensions et des risques sont ensuite réévaluées basées sur les décisions qui ont été prises et les priorités qui ont été établies lors de la réunion. Il en résulte des recommandations pour soit augmenter les affectations ou pour mettre en place des mesures de réduction des risques.

Par exemple, le chef d'état-major de la Force aérienne a identifié une contrainte de financement liée au coût du carburant puisque l'aptitude à voler et à mener des opérations avec les avions dépend directement des disponibilités du carburant, la provision de financement nécessaire pour cette contrainte a été assignée haute priorité. Ce financement évitera au chef d'état-major des forces aériennes de réaffecter des fonds du budget de l'organisation, ce qu'il devait faire au cours des années précédentes car son financement était moindre. Cela permet de diminuer les pressions financières exercées sur un programme.

[Traduction]

En réponse aux déficits de financement du maintien en puissance déclarés par les chefs d'état-major de l'Armée de terre, de l'Armée de l'air et de la Marine, nous allons être en mesure d'accroître le financement de façon significative pour augmenter le degré de soutien au chapitre des pièces de rechange, de l'équipement, de l'entretien et des vêtements opérationnels, ce qui va avoir un effet direct sur le niveau de formation et de préparation des forces. Il s'agit d'une augmentation du niveau de base qui sera suivie de nouvelles augmentations qui seront fonction des allocations subséquentes. Ces nouveaux fonds sont accordés à la Marine, à l'Armée de terre et à la Force aérienne en fonction des priorités ministérielles, et nous avons été en mesure de majorer les allocations des trois environnements au point où la proportion de financement de la demande exécutable a augmenté de beaucoup. La demande exécutable, c'est ce que le sous-ministre adjoint du matériel évalue qui peut être dépensé au cours d'une année donnée, compte tenu du personnel des projets, des contrats et de la capacité industrielle. Nous avons également réglé le problème courant de l'entretien de l'infrastructure en majorant le financement de base. En y ajoutant le financement à court terme provenant du fonds relatif aux possibilités offertes par les programmes, nous aurons atteint la norme de l'industrie en matière de financement des travaux d'entretien, qui est de 2 p. 100 des coûts de remplacement des biens immobiliers de l'ensemble de notre portefeuille d'infrastructure et de 2 p. 100 pour la réfection, c'est-à-dire le remplacement de l'infrastructure.

Une fois que le sous-ministre et le chef d'état-major de la Défense auront déterminé les allocations, je vais envoyer une lettre d'approbation du plan d'activités à chacun des gestionnaires supérieurs des ressources. Ces lettres contiennent l'orientation officielle concernant les tâches, les hypothèses relatives au risque, l'atténuation, la mise en œuvre et les ressources allouées. Une fois qu'ils auront reçu la lettre d'approbation, les gestionnaires ont le pouvoir d'exécuter leur plan d'activités. C'est ce qui marque la fin du cycle de planification des activités de l'exercice.

Une fois les affections financières terminées, le ministère surveille et rajuste les dépenses pendant tout l'exercice grâce à un certain nombre de mécanismes de contrôle. Dans certains cas, des demandes de financement relatives au plan d'activités jugées valides ne figurent pas dans le plan de mise en œuvre détaillé. Dans ce cas, les fonds sont mis de côté dans ce que nous appelons des « réserves protégées » en attendant la réception et l'approbation d'un plan comportant tous les coûts et toutes les justifications voulues, de façon à garantir que les gestionnaires ministériels sont en mesure d'utiliser les fonds alloués de façon efficace.

Le ministère intègre une certaine « programmation excédentaire », comme nous appelons cela dans chacun des plans d'exercice. La programmation excédentaire est un outil de gestion qu'on utilise pour maximiser l'effet du budget du ministère. Les ministères doivent faire une programmation excédentaire pour permettre les modifications apportées au calendrier, les retards approuvés, les changements touchant le budget des projets, les priorités opérationnelles imprévues et toutes sortes d'autres réalités touchant les programmes. La programmation excédentaire permet aux gestionnaires supérieurs d'avoir la marge de manœuvre nécessaire pour faire face aux impondérables, dans le but de maintenir l'équilibre de leur budget d'exercice. Le degré de programmation excédentaire est déterminé chaque année en fonction de ce qui a été nécessaire dans le passé et de l'évaluation de la probabilité que les ressources ne soient pas utilisées dans le cadre des projets et des plans de dépenses.

Ainsi, et conformément aux pratiques de gestion prudente du risque, on élabore et on applique une stratégie et un plan d'élimination de la programmation excédentaire avant la fin de l'exercice, surtout dans le cadre d'examens officiels des dépenses qui ont lieu à la fin de chaque trimestre. Le chef de programme et le sous-ministre adjoint des Finances et des Services ministériels effectuent un suivi du risque de programmation excédentaire pour moi. Les stratégies ministérielles relatives à la programmation excédentaire que nous élaborons chaque année définissent les mesures d'atténuation, par exemple les activités de programme qui peuvent faire augmenter les dépenses ou les faire cesser, afin que nous puissions affecter les fonds de façon efficace au cours de chacun des exercices tout en ne dépassant pas les dépenses autorisées à la fin de l'exercice. Il y a toujours des stratégies d'atténuation visant à faire cesser les dépenses au besoin.

Pour ce qui est des demandes de financement imprévues, elles peuvent aller des petites opérations d'urgence, comme ça a été le cas là où il y a eu des inondations au pays, ou encore d'une tâche pour laquelle le ministère ne demande pas de financement au gouvernement, jusqu'à l'augmentation des coûts des programmes actuels et à l'instauration de nouvelles activités.

Des fonds provenant des réserves sont accordés après un examen complet et une remise en question de l'état de besoin, et, si les fonds nécessaires excèdent les fonds contenus dans les réserves, le ministère trouve une source de fonds dans le cadre d'un examen des dépenses trimestrielles officiel, et, la plupart du temps, on peut utiliser des ressources non utilisées ailleurs dans le programme. Il y a cependant toujours l'option de réduire les dépenses relatives à des activités dont la priorité est moins élevée ou de mettre fin à ces dépenses. Il y a toujours la possibilité que les ressources non utilisées de programmes financés dépassent le degré de programmation excédentaire ou la capacité du ministère de prévoir de nouvelles dépenses de programme ou de majorer les ressources financières affectées au cours de l'exercice.

Nous tentons de garder en réserve les possibilités valables par rapport aux programmes, mais ces possibilités sont limitées, et le ministère peut être forcé d'avoir recours à une disposition de report au cours des exercices subséquents pour éviter que des fonds ne soient pas utilisés, ou comme c'est le cas pour les quelques années qui viennent, nous pouvons demander aux pouvoirs centraux de modifier le profil de financement du ministère sur de nombreuses années.

[Français]

Dans le but de régulariser sa planification financière et sa planification des activités à long terme, le ministère a entrepris le développement d'un plan d'investissements lequel détaillera ses investissements dans les quatre piliers de stratégie de défense Le Canada d'abord au cours des prochaines années.

Ce plan spécifiera comment le ministère rencontrera le mandat de stratégie avec les ressources qui sont effectuées. Le plan sera fondé sur les capacités et garantira que les capacités vont de paire avec le matériel, le personnel, l'infrastructure et les fonds nécessaires.

[Traduction]

La stratégie budgétaire pour 2008-2009 est la suivante : ce sera une année d'investissement dans l'amélioration de l'état de préparation, dans le maintien en puissance et dans le comblement des lacunes, ainsi que dans les mesures d'adaptation aux nouvelles conditions du milieu, par exemple à l'évolution du coût du carburant. En outre, l'initiative de cinq ans qui touche les possibilités offertes dans le cas des programmes a permis au ministère de répondre à certains besoins financiers qui existaient depuis longtemps et d'investir dans la préparation, dans le maintien en puissance et dans des initiatives lancées par les gestionnaires supérieurs qui vont donner lieu à une réduction des besoins trimestriels au cours des exercices à venir.

Pour conclure, nous nous préparons pour l'avenir sur les plans tactiques et stratégiques.

Le sénateur Meighen : Bienvenue, lieutenant-général Natynczyk; c'est avec plaisir que nous vous recevons. Merci de l'exposé complet sur la planification des activités et sur les affectations budgétaires que vous nous avez présenté. J'ai chuchoté à mon collègue, le sénateur Tkachuk : « Mieux vaut que ce soit vous que moi qui ayez à faire tout cela. » C'est extrêmement détaillé, évidemment, et ce que vous faites est aussi près qu'on peut raisonnablement l'espérer de la perfection pour ce qui est de l'utilisation de ressources limitées afin de répondre aux besoins de plus en plus grands.

Vous en avez peut-être déjà parlé, mais où en êtes-vous dans le processus qui vous amènera à prendre une décision finale? Vous avez assurément franchi l'étape initiale.

Lgén Natynczyk : Nous avons presque terminé. L'an dernier, c'est en juillet que l'on m'a délégué le pouvoir d'envoyer les lettres d'affectation, et j'espère que nous allons pouvoir faire cela en juin cette année. C'est le chef d'état- major de la Défense et le sous-ministre qui doivent donner leur approbation. Nous essayons d'accélérer le processus. Nous avons tiré de nombreuses leçons de ce qui s'est passé l'an dernier, par exemple le fait que plus tôt nous pouvons confirmer les ressources allouées aux gens, plus vite ils peuvent les affecter, ce qui fait qu'ils peuvent utiliser l'argent de façon plus efficiente et plus efficace. Nous essayons de terminer un mois plus tôt, et j'espère que je vais obtenir le pouvoir de faire envoyer les lettres d'approbation au cours de la semaine qui vient ou de la suivante.

Le sénateur Meighen : Pouvez-vous donner une idée au comité, au moins en termes généraux, des pénuries de premier niveau auxquelles vous avez été en mesure de remédier, ainsi que de celles qui subsistent?

Lgén Natynczyk : Nous en attendons la confirmation, mais nous prévoyons des besoins importants dans les trois services en ce qui concerne ce que nous appelons leur approvisionnement national, c'est-à-dire les ressources consacrées aux pièces de rechange, à l'entretien, aux vêtements et ainsi de suite. Nous prévoyons pouvoir augmenter les ressources de deux des services d'environ 7 p. 100, et de l'autre, d'environ 11 p. 100, pour répondre à ces besoins. Le chef d'état- major de la Force aérienne a des besoins importants dans son service en raison du coût du carburant. Nous pensons pouvoir lui accorder plus de 25 millions de dollars pour régler ce problème.

C'est le genre de choses que nous avons été en mesure de faire grâce à une vision à long terme des ressources accessibles, qui nous permet de prévoir ce qui va se passer au cours des quelques années qui viennent. Ça peut en fait nous encourager à prendre un peu plus de risque en procédant à ces affectations dans le cadre du financement de base. Le poste de vice-chef d'état-major est nouveau pour moi; je ne suis normalement qu'un fantassin. Depuis que j'occupe le poste, j'ai appris que plus nous sommes en mesure de dire rapidement au sous-ministre adjoint du Matériel de combien d'argent il dispose pour les pièces de rechange, plus vite il peut commander, auprès des entreprises qui les fabriquent, des moteurs, des chenilles, des roues et d'autres pièces de rechange dont nous avons besoin pour maintenir les parcs de véhicules en service.

Si nous essayons de faire cela en cours d'exercice, nous n'avons pas suffisamment de temps pour faire en sorte que les entreprises fabriquent ces pièces et nous les livrent. Plus nous procédons rapidement, mieux c'est.

J'ai appris il y a un an que nous devons être en mesure de dire à tous les gestionnaires non seulement ce qui est à leur disposition pour l'exercice en cours, mais également quelles sont leurs affectations théoriques pour l'année suivante, pour ce qui est du financement de base. Il faut que j'essaie de le faire à la fin de l'été, en septembre, pour qu'ils sachent quel sera le financement qu'ils obtiendront en 2009-2010 dans le cadre de ces affectations.

Le sénateur Meighen : Imaginons que nous ne sommes pas en Afghanistan et que nous finissions par y aller au cours du présent cycle. Évidemment, le besoin en pièces de rechange et en équipements de remplacement augmenterait de façon spectaculaire. Comment prévoyez-vous ce genre de choses?

Lgén Natynczyk : Ça revient à cet examen trimestriel dont je parlais; celui-ci offre une bonne marge de manœuvre. Encore une fois, comme je l'ai dit dans mon exposé, les gens font des plans assez exhaustifs. Cependant, une fois qu'un plan est appliqué, il peut se passer toutes sortes de choses, que ce soit des difficultés à livrer les produits chez les entreprises ou le fait que l'argent est là, mais que les approbations n'ont pas été obtenues. Il y a un processus de collaboration permanente entre nos contrôleurs, pour ce qui est de la somme d'argent qui peut être dépensée pendant un trimestre donné. Cela offre une bonne marge de manœuvre pour la réaffectation des ressources en fonction des éléments prioritaires.

Le sénateur Meighen : Que se passe-t-il si vous suivez le processus pour vous apercevoir plus tard qu'il n'y a que tant d'argent et que vous devez donc supprimer des capacités dans certains domaines? En avisez-vous le gouvernement? Quelles sont les mesures que vous prenez dans ce genre de situation?

Lgén Natynczyk : Nos agents sont toujours en communication avec ceux du Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada et du ministère des Finances, et ils travaillent toujours en collaboration avec eux. C'est une constante tout au long de l'exercice, le fait d'indiquer les besoins financiers auxquels nous pouvons être confrontés en raison de besoins imprévus.

La capacité de modification ou de rajustement en cours d'exercice est limitée. Ça revient au fait de devoir signer des contrats à long terme pour l'acquisition de pièces de rechange et ainsi de suite. Nos sources de financement, vers la fin de l'exercice, se résument vraiment au carburant et autres choses du genre dont nous faisons l'acquisition à court terme.

Le sénateur Meighen : Vous pouvez toujours obtenir une affectation d'urgence ou en demander une.

Lgén Natynczyk : Nous procédons aussi à une programmation excédentaire. Nous faisons cela dans une certaine mesure, mais nous reconnaissons qu'il y a un certain nombre de projets qui, s'ils sont tout à fait valables en soi, possèdent les caractéristiques qui font qu'on peut y mettre fin si l'argent n'est effectivement pas accessible. Nous pouvons décider de reporter cela sur l'année suivante sans pénalité.

Le sénateur Meighen : Pouvez-vous nous dire si, à ce moment-ci, vous allez devoir abandonner certaines capacités en raison du manque de fonds?

Lgén Natynczyk : D'après ce que je sais, nous sommes sur le point de n'abandonner aucune capacité.

Le sénateur Meighen : Allez-vous réduire certaines capacités?

Lgén Natynczyk : Je ne pense à aucune capacité qui puisse faire l'objet d'une réduction.

Le sénateur Meighen : C'est encourageant.

Selon certains rapports, le MDN a reporté au cours de la dernière année des fonds de l'ordre de 500 millions de dollars. Si c'est vrai, est-il difficile de justifier l'augmentation du financement alors que vous n'avez pas dépensé ce qui vous a été accordé au cours de l'exercice précédent?

Lgén Natynczyk : Nous avons eu un problème il y a un peu plus d'un an. Le MDN a présenté son budget, et je pense qu'il nous est resté 100 000 $. Ce n'est pas mal, pour un budget de 16,5 milliards de dollars. L'an dernier, nous avions de l'argent dans des réserves pour le cas où nous n'obtiendrions pas le financement intégral de certains besoins liés à l'Afghanistan. Encore une fois, il y a eu beaucoup de changements, et, comme le sénateur l'a dit, on pourra peut-être fournir des fonds pour répondre à certains de ces besoins, mais peut-être pas. Nous avons réservé des fonds à la réforme de l'approvisionnement, ce qui fait qu'il y a de l'argent affecté, dans une réserve, à cette réforme. Nous avions un grand projet d'immobilisations, le Projet de l'hélicoptère maritime ou PHM, et nous avions de l'argent de côté pour effectuer les paiements en cours d'exercice si les échéances étaient respectées. Ce qui est arrivé, c'est que, vers la fin de l'exercice, en octobre ou en novembre, nous avons appris que nous allions recevoir l'argent pour l'Afghanistan. On nous a dispensés, pour ce qui est de la réforme de l'approvisionnement, et nous étions sur le point de procéder à un report des fonds réservés au PHM. Nous n'avons pas eu à faire les paiements, puisque les services n'ont pas été fournis.

Au cours du troisième trimestre, nous avions une importante somme d'argent, mais notre programmation excédentaire était de l'ordre de 200 millions de dollars, et nous disposions de 600 à 700 millions de dollars. Il nous est très difficile de dépenser l'argent de façon efficace et efficiente en cours d'exercice.

Vers la fin de l'exercice, nous nous sommes retrouvés dans une situation unique où nous avions beaucoup d'argent et où notre programmation excédentaire était de l'ordre de 200 millions de dollars. Comme nous n'avions pas à faire le paiement relatif à la réforme de l'approvisionnement ni à assumer tous les coûts relatifs à l'Afghanistan, nous avons reçu une importante injection de fonds. Il nous restait à dépenser l'argent de façon efficiente et efficace avant la fin de l'exercice. Nous n'avons pas été en mesure de dépenser cet argent de façon efficace, efficiente et adéquate — nous avons fait tout ce que nous avons pu pour nous approvisionner en carburant; nous nous sommes assurés que toutes les citernes étaient pleines, que les navires avaient fait le plein, et ainsi de suite —, ce qui fait que nous avions encore cet argent à la fin de l'exercice. Nous avons demandé au ministère des Finances combien d'argent nous pouvions reporter. Compte tenu de la situation particulière du Projet de l'hélicoptère maritime, c'est-à-dire qu'il s'agit d'argent du crédit 5, nous avons demandé la permission de reporter ces fonds sur l'exercice suivant. Nos agents sont encore en train de régler cette question avec ceux du ministère des Finances.

Au bout du compte, nous devons faire preuve de diligence raisonnable lorsqu'il s'agit de dépenser l'argent des contribuables.

Le sénateur Meighen : Les Forces armées canadiennes ont toujours été fières de l'excellence de leur formation. Il est juste de dire que nous sommes toujours confrontés au problème d'une possible pénurie de formateurs — beaucoup de formateurs ont été déployés en Afghanistan, et il n'y en a pas autant que nous le souhaiterions, surtout pour l'armée ici, au pays —, mais il faut que les marins naviguent pour acquérir des compétences et que les gens de la Force aérienne accumulent leurs heures de vol pour faire de même.

Lgén Natynczyk : Assurément.

Le sénateur Meighen : Les Canadiens peuvent-ils se coucher ce soir en sachant que l'augmentation du coût du carburant et les contraintes auxquelles tout un chacun fait face pour ce qui est d'obtenir des fonds suffisants ne vont pas avoir une incidence négative sur la formation offerte dans les forces, surtout dans la Force aérienne et dans la Marine?

Lgén Natynczyk : Sénateur, je peux vous dire que, pendant l'exercice en cours, nous avons augmenté passablement les sommes réservées au carburant et à l'approvisionnement national pour continuer d'offrir la formation de niveau élevé dont les membres de la Force aérienne, les membres de la Marine et les soldats ont besoin pour continuer d'exercer leur profession avec compétence. C'est quelque chose que nous avons appris. Nous ne le cédons à personne pour ce qui est de la formation que nous offrons et de la compétence de nos officiers et de nos militaires du rang. Nous offrons l'une des meilleures formations au monde. C'est la raison pour laquelle, dans le cadre de cette approche de financement, nous avons placé la formation dans le haut de la liste des priorités, juste après les opérations, pour nous assurer que nos hommes et nos femmes ont ce dont ils ont besoin.

Dans le cadre des besoins déterminés pour l'exercice en cours, et compte tenu de l'augmentation des coûts, c'est la raison pour laquelle nous procédons à des augmentations, surtout pour ce qui est de la Force aérienne, parce que c'est son budget pour le carburant qui détermine son contingent annuel d'heures de vol ou CAHV, pour ainsi dire. Nous avons reconnu ce fait, et nous avons augmenté le budget.

En ce moment, environ la moitié de l'effectif de la Marine est en mer, au large de la côte Est; la Force opérationnelle interalliée 150 se rend dans le golfe Persique, le commodore Bob Davidson étant responsable du commandement de trois navires. Nous avons des navires dans le Pacifique, où nous participons à des exercices de grande envergure. Le rythme de la formation est très élevé dans tous les services en ce moment, et nous devons nous assurer que l'ensemble des activités est réalisé avec efficience.

Le sénateur Munson : Vous dites que, peu importe le coût du carburant — parce que les Canadiens font face à des coûts exorbitants —, peu importe, il n'y aura pas de compressions?

Lgén Natynczyk : Ce que je dis, c'est que, au cours du présent exercice, nous avons été en mesure de répondre aux besoins des services découlant du prix actuel du carburant.

Nous avons trouvé le moyen d'utiliser les fonds qui restaient à la fin de l'exercice en remplissant les citernes de bon nombre de nos bases. Lorsque nous avons de l'argent, nous remplissons les citernes. C'est ce que nous sommes en mesure de faire à court terme. Par ailleurs, le chef d'état-major de la Force aérienne a indiqué que ses besoins les plus importants sont les besoins en carburant.

Pour ce qui est de l'avenir, je ne peux pas vous dire qu'il va toujours en être ainsi. Je sais ce qui se passe pendant l'exercice en cours et ce qui va se passer au cours des quatre prochains exercices, et je peux vous dire quels vont être les coûts en carburant. Nous avons intégré cela à notre plan budgétaire global.

Le président : J'aimerais obtenir des précisions au sujet de certaines de vos réponses aux questions du sénateur Meighen. Vous avez parlé du fait que le processus de planification commence au début de l'exercice et se poursuit jusqu'en juin. Au cours de l'exercice précédent, il s'est terminé en juillet. Pourquoi passez-vous le premier trimestre de l'exercice à faire ça? Pourquoi ne pas commencer avant le début de l'exercice, pour que vos commandants le sachent dès le départ?

Lgén Natynczyk : Nous sommes en train de ramener cela en arrière pour que ça se passe en avril. C'est une chose dont nous avons pris conscience. Nous avons passé une partie de la période à démêler les nouvelles priorités de la défense. Nous essayons de déplacer ça vers la gauche sur le calendrier pour arriver à terminer et à commencer ça en avril.

En ce moment, la réalité, c'est que c'est environ un mois après la fin de l'exercice précédent que nous savons où nous en sommes, puis nous devons attendre de voir comment les choses se placent pour être en mesure de confirmer les affectations budgétaires.

Idéalement, nous serions en mesure de terminer cela au début de mai. Ainsi, après la fin d'un exercice, nous laisserions les choses se placer pendant un mois, puis nous vous enverrions les lettres d'affectation et entamerions le nouvel exercice. Mon but, en ce moment, c'est de déplacer ça vers la gauche sur le calendrier, pour ainsi dire.

Le président : Vous avez parlé de programmation excédentaire. Le ministère a publié son rapport annuel en novembre. À la page 13 de ce rapport, on parle de la croissance des Forces canadiennes, puis il y a eu un changement. Le nombre prévu de nouveaux soldats des forces régulières est passé de 13 000 à 7 500, et le nombre prévu de nouveaux soldats des réserves est passé de 10 000 à 1 000.

Compte tenu des fonds très importants qui ont été reportés, pourquoi ne pas avoir fait de cela l'un des programmes visant à régler la situation?

Lgén Natynczyk : Encore une fois, l'un des défis qui se pose, c'est de faire les choses en cours d'exercice. Ce dont vous parlez s'est passé plutôt vers la fin de l'exercice. Nous avons appris à procéder à une programmation excédentaire, non seulement pour ce qui est des sommes d'argent, mais également pour ce qui est du recrutement.

Vous avez peut-être entendu le général Hillier dire récemment dans une tribune publique que, pour l'exercice précédent, je pense que le recrutement stratégique était d'environ 6 500 ou 6 600 soldats, et nous avons atteint cette cible. La personne qui est chargée de la planification de notre effectif nous a dit que nous devrions envisager le recrutement de 7 000 personnes cette année. Nous avons répondu : « Faisons une programmation excédentaire. Recrutons 8 000 personnes. Essayons de gonfler les chiffres un peu. » Nous savons que nous devons prendre de l'expansion dans l'ensemble. Ainsi, nous avons décidé de ne pas arrêter à 7 000 personnes et de nous rendre plutôt jusqu'à 8 000; si nous arrivons à atteindre ce chiffre, tant mieux.

C'est l'un des domaines dans lesquels nous voulons procéder à la programmation excédentaire, parce que nous avons constaté que les questions relatives à l'effectif sont le facteur déterminant de beaucoup de nos activités. Nous voulons gonfler un peu l'embauche de personnel.

Le sénateur Nancy Ruth : Je voulais obtenir des précisions sur la fonction de planification excédentaire. Des 500 millions de dollars qui n'ont pas été utilisés, est-ce qu'il y a une partie qui découle de la planification excédentaire, ou encore des mesures qui n'ont pas été appliquées? De quelle façon utilisez-vous la fonction de planification excédentaire?

Lgén Natynczyk : C'est la programmation excédentaire. En fait, le report de 500 millions de dollars donne à croire que nous n'avons pas été suffisamment ambitieux, persuasifs ou affirmatifs au chapitre de la programmation excédentaire l'an dernier. Nous n'avons pas effectué une programmation excédentaire suffisante pour dépenser ces 500 millions de dollars que le ministère avait reçus pour répondre à des demandes bien fondées et raisonnables.

L'année d'avant, il ne nous est resté que 100 000 $, sur un budget de 16,5 milliards de dollars. Nous avons utilisé le budget, donc, et il faut accorder le crédit à nos planificateurs financiers et à notre personnel de contrôle. En même temps, nous avons pensé que nous avions peut-être été trop affirmatifs et trop ambitieux l'année précédente, alors nous avons décidé de maintenir la programmation excédentaire entre 200 millions et 400 millions de dollars. Au début de l'exercice, nous allons prévoir 400 millions de dollars à cet égard, et nous allons essayer de ramener cela à 200 millions de dollars au cours de l'exercice, puis à zéro. C'est le plan que nous avions élaboré pour l'exercice qui vient de se terminer.

À la mi-exercice, nous avions atteint cette cible de 200 millions de dollars en programmation excédentaire, mais le ministère des Finances et l'organisme central nous ont dit que nous allions obtenir tout l'argent que nous avions demandé pour l'Afghanistan, et que nous n'aurions pas à débourser les 170 millions de dollars pour la réforme de l'approvisionnement. Nous avons ensuite constaté que le Projet de l'hélicoptère maritime n'allait pas aboutir à temps. Tout à coup, nous nous retrouvions avec 700 millions de dollars, alors que les nouveaux besoins que nous avions à combler n'étaient que de l'ordre de 200 millions de dollars. C'est le problème qui s'est posé pour la deuxième moitié de l'exercice.

Comme je l'ai mentionné dans mon texte, il y a tellement de facteurs qui entrent en jeu au cours de l'exercice que, à l'occasion de ces examens trimestriels, nous discutons avec chacun des sous-ministres adjoints des services. Je leur demande donc quels sont leurs besoins, quelles sont les dépenses pertinentes qu'ils pourraient faire, dans quoi ils pourraient investir et dans quel domaine ils ont de la difficulté à dépenser l'argent prévu. À ce moment-là, ils nous disent que nous pouvons réaffecter ces fonds pour répondre aux besoins de quelqu'un d'autre. C'est un processus de collaboration qui se déroule pendant tous les exercices.

Le sénateur Zimmer : Bienvenue de la part d'un autre Winnipegois. Je tiens à vous remercier du rapport très complet que vous nous avez présenté.

Lorsque vous vous êtes enrôlé dans les Forces canadiennes en 1975, c'était un autre Winnipegois qui était ministre de la Défense nationale : Jim Richardson, du Manitoba.

Mes questions ont davantage trait à votre poste et au rôle que vous jouez. Est-ce que votre rôle de vice-chef d'état- major de la Défense a changé au sein des nouvelles Forces canadiennes transformées? Le cas échéant, de quelle façon? Est-ce que cela a modifié les priorités en matière de financement, d'infrastructure et d'effectif dont vous vous occupez?

Lgén Natynczyk : Mon rôle de vice-chef d'état-major au sein de l'organisation transformée a beaucoup changé. Il y a tout juste un peu plus de dix ans, j'ai travaillé au bureau du vice-chef d'état-major pour l'amiral Murray, qui occupait alors le poste, puis de nouveau dans le cadre des opérations J-3, et j'ai travaillé pour l'amiral Garnett, lorsque c'était lui le vice-chef d'état-major. J'ai vu le poste évoluer de façon significative dans le cadre de la transformation. Dans l'ancienne structure, le vice-chef d'état-major ne jouait que le rôle de remplaçant du chef d'état-major de la Défense, en plus de gérer les ressources ministérielles.

Mon rôle est beaucoup plus vaste. Je participe davantage aux opérations, dans le cadre desquelles je soutiens le chef d'état-major de la Défense, ou CEMD, parce qu'il n'y a plus de sous-chef d'état-major de la Défense — ce poste est devenu un poste de contre-amiral ou de major-général. Lorsque le CEMD n'est pas à Ottawa ou lorsqu'il n'est pas au Canada, je m'occupe de superviser les opérations à sa place, beaucoup plus que ne le faisaient les vice-chefs d'état- major de la Défense précédents.

Les responsabilités ministérielles n'ont pas vraiment changé, sauf pour ce qui est de la création, dans le cadre de la transformation, du poste de chef — Développement des forces, qui est un poste de major-général qu'occupe actuellement le major-général Mike Ward. Il s'agit d'une organisation que nous avions supprimée dans les années 1990, lorsqu'il y a eu une réduction de 35 p. 100 du budget du quartier général de la Défense nationale, ou QGDN. Ce bureau et cette organisation s'occupent de déterminer les capacités futures des forces armées, à court et à long termes. Même dans les années 1990, nous avions de la difficulté à trouver les ressources nécessaires pour élaborer ce genre de plan. C'était difficile de maintenir ce genre de bureau en activité. Le bureau a été réétabli, alors je participe beaucoup plus non seulement à la gestion ministérielle, mais également au développement des forces à long terme.

Dans le cadre de mon mandat suivant, je supervise un certain nombre d'organisations qui font partie du MDN. La transformation a fait en sorte que je suis maintenant chargé de superviser toutes les organisations qui se trouvent à l'extérieur du Canada, par exemple les attachés militaires, notre personnel de liaison à Londres, Washington, Colorado Springs, entre autres. Il s'agit surtout d'offrir un soutien administratif à toutes ces organisations. Ça a été un changement important.

Enfin, mon organisation gère celle du chef du renseignement de la Défense. Celui-ci travaille pour le compte du chef d'état-major de la Défense et pour le sous-ministre, mais il relève de mon organisation pour ce qui est de l'administration. Voilà donc quelques-uns des changements importants qui se sont produits dans le cadre de la transformation.

Le sénateur Zimmer : Je sais que de nouvelles personnes sont nommées à de nouveaux postes et qu'il y a un plan directeur. Vu votre expérience et vos priorités personnelles, dans quelle mesure pouvez-vous exercer votre influence sur le plan directeur? Celui-ci est-il plus ou moins établi pour de bon?

Lgén Natynczyk : Je dirais que l'une des caractéristiques et l'un des principes des opérations militaires, c'est la souplesse. En effet, pour ce qui est du Conseil des forces armées, c'est-à-dire des principaux leaders des forces armées, c'est ainsi que nous nous adaptons aux besoins qui évoluent constamment. Je ne pense pas qu'il y ait un plan coulé dans le béton à un point tel qu'on ne puisse le rajuster au chapitre de la planification de la relève et de l'effectif, notamment. En effet, nous sommes tout à fait capables de nous adapter. Je suis un soldat, et je fais beaucoup de gestion financière, avec l'aide précieuse de notre personnel du contrôle et des finances. Nous sommes tous capables d'adaptation.

Le sénateur Zimmer : Quelle est la nature de votre relation avec l'État-major interarmées stratégique? Cette organisation s'acquitte-t-elle maintenant de responsabilités qui appartenaient précédemment au vice-chef d'état-major de la Défense? S'acquitte-t-elle maintenant de certaines de vos responsabilités?

Lgén Natynczyk : Je gère l'État-major interarmées stratégique lorsqu'un besoin imprévu se fait sentir, mais le directeur du personnel de l'État-major interarmées stratégique — qui est actuellement le contre-amiral Bruce Donaldson — rend des comptes directement au chef d'état-major de la Défense. En gros, c'est lui le chef des opérations des Forces canadiennes. Comme c'est le cas au sein d'autres structures des forces armées, le chef des opérations relève directement de son commandant, qui, dans ce cas-ci, est le chef d'état-major de la Défense.

Évidemment, lorsque le chef se trouve à l'étranger ailleurs qu'à Ottawa, le chef des opérations relève de moi, puisque je remplace alors le chef d'état-major de la Défense pour ce qui est des conseils ou de l'orientation dont il peut avoir besoin.

Le sénateur Zimmer : Les réserves sont très fortes à Winnipeg. Vous vous rappelez peut-être que notre ancienne lieutenant-gouverneur, Mme Pearl McGonigal, était chef des réserves à Winnipeg, et nous avons fait un voyage à Cheyenne Mountain, à Colorado Springs. Nous avons entendu dire que le recrutement pour les réserves est sous- financé. Si c'est vrai, comment va-t-on faire passer la force de réserve à 30 000 soldats? À quel rythme?

Lgén Natynczyk : Le rythme de croissance de la réserve qui est prévu est de 750 soldats par année. Le rythme de croissance de la force régulière était de 1 000 soldats, ce qui fait que les réserves, au rythme de 750 soldats par année, sont en train d'atteindre leurs objectifs. Je sais que ces fonds sont affectés au chef du personnel militaire. Dans le cas des réserves, ces fonds sont en fait affectés aux chefs de service — le chef d'état-major de la Marine, le chef d'état-major de la Force aérienne et le chef d'état-major de l'Armée de terre —, qui définissent eux-mêmes les priorités auxquelles ils veulent consacrer l'argent réservé au recrutement.

Pour ce qui est des réserves de l'armée au Manitoba, le général Leslie pourrait vous donner plus de détails, sénateur.

Le sénateur Zimmer : Le sénateur Meighen a abordé la question, et je sais que le sénateur Munson attend avec impatience de vous la poser, alors je vais lui couper l'herbe sous le pied. Les gens parlent de vos forces et de vos faiblesses, mais il y a une façon simple de poser la question : qu'est-ce qui vous tient éveillé la nuit?

Lgén Natynczyk : Ce qui m'inquiète, ce sont les imprévus. Comme je me suis occupé d'opérations, ici, à Ottawa, du point de vue de la planification, et pour avoir participé à plusieurs opérations, je me demande toujours ce qui se cache dans l'ombre et que je ne suis pas prêt à affronter. Dans notre domaine, il n'est jamais possible de prévoir tout ce qui va se passer, du point de vue tactique, les techniques que l'ennemi pourrait utiliser contre nous et que nous n'avons pas prévues, et du point de vue stratégique, les endroits où nous pourrions devoir intervenir sans que cela ne soit prévu.

En outre, je suis préoccupé par le fait que la bonne personne occupe le bon poste au bon moment, et qu'elle possède les compétences voulues. Nous apprenons des choses sur le plan démographique. Le recrutement a diminué dans les années 1990. Nous comptons dans nos rangs quelques générations de soldats qui arrivent à 20, 25 ou 30 ans. Cependant, les soldats que nous aurions dû embaucher dans les années 1990 ne sont pas là pour les soutenir.

Je me préoccupe de la façon dont je vais m'y prendre pour faire en sorte que ces gens continuent de porter l'uniforme, et qu'ils continuent à être prêts et aptes à faire leur travail, et je veux aussi m'assurer que nous nous tirerons bien de cette période de croissance.

Le sénateur Zimmer : Merci. Winnipeg s'ennuie de vous, mais vous vous occupez de choses plus importantes maintenant. Bonne chance, et Dieu vous bénisse.

Lgén Natynczyk : Merci beaucoup.

Le président : Au sujet de la stratégie Le Canada d'abord de la Défense, l'augmentation prévue de votre budget est de 1,5 p. 100 jusqu'à 2011, puis de 2 p. 100 pour les dix années suivantes. Si vous faites le calcul, ça revient à passer de 1,2 à 3 p. 100 du PIB à 0,87 p. 100 du PIB. Compte tenu de l'inflation, et surtout de l'inflation dans le domaine militaire, qui semble être plus élevée que l'indice des prix à la consommation, comment allez-vous arriver à assurer le financement dans l'avenir?

Lgén Natynczyk : Sénateur, tout ce que je peux dire, c'est que nous avons jeté un coup d'œil sur les prévisions que nous avons pour ce qui est des budgets alloués. Nous avons examiné la question du remplacement des principales flottes de combat sur cette période, ainsi que des capacités de combat essentielles. Nous avons dû vérifier, pour cette période, si nous allons avoir les fonds nécessaires pour effectuer ces remplacements dans les proportions annoncées. En fonction de l'information budgétaire la plus précise qui nous vient de notre agent chargé d'établir les coûts et de faire affaire avec les gens du service des acquisitions, nous avons établi un plan pour qu'il nous soit possible de répondre à ces besoins pendant cette période.

L'autre aspect, c'est qu'une partie de ces coûts s'étend bien au-delà de cet horizon de financement de 20 ans. Si, par exemple, nous remplaçons un navire en 2015 ou en 2020, et que ce navire est encore en service après 2028, alors le financement va au-delà de cette période aussi, en raison de la comptabilité d'exercice. Grâce aux fonds qui nous ont été alloués, nous avons été en mesure de remplacer ces flottes de combat essentielles.

Le président : Lorsque nous jetons un coup d'œil sur les cinq domaines d'acquisitions importantes — les avions de recherche et de sauvetage, les systèmes de combat terrestre, les destroyers, les frégates et les appareils de patrouille maritime et les navires porteurs — nous ne voyons pas de date prévue pour ces achats. Il y a des périodes de risque au cours desquelles vous n'aurez pas cette capacité pendant un certain temps. Nous ne voyons pas, par exemple, la mention concernant les satellites ou les véhicules sans pilote, les drones.

C'est une liste d'achats très coûteux. Nous ne voyons pas de date certaine pour ces achats, et nous savons que l'équipement se dégrade.

Lgén Natynczyk : Sénateur, nous avons dit au cours de la conférence de presse qu'un document sera publié par le gouvernement à un moment donné. Je ne sais pas à quel point la chose sera fidèle à la réalité. L'annonce et le déploiement étaient axés sur le remplacement des grandes flottes de combat. Un nombre important de programmes d'envergure beaucoup plus petite et certains des projets dont vous venez tout juste de parler figurent dans cette liste. Il y a dans notre cadre de financement des articles comme les armes personnelles, les jeeps, les vêtements, et ça va jusqu'aux systèmes satellitaires.

Le problème que nous avons eu avec les organismes centraux et le problème que la Défense a toujours eu, c'est que notre organisation est très complexe et ne ressemble à aucun autre ministère. Il y a tant de grands projets et de projets d'appui que, à moins que nous ne soyons en mesure d'expliquer tout cela à l'organisme central, les gens là-bas pensent que nous augmentons constamment ces projets.

Cette fois-ci, nous avons tout décrit : voici les principales flottes de combat, et voici également tous les autres projets d'appui relatifs à ces flottes de combat. En incluant cela dans un budget à long terme connu, nous sommes arrivés à leur prouver que cela fonctionne. C'est le cas si nous enlevons certains projets — parce que les percées technologiques les rendent inutiles, ou pour d'autres raisons — qui, selon nous, ne répondent pas aux besoins. Nous avons choisi les projets qui, selon chacun des services et chacun des sous-ministres adjoints, étaient les projets prioritaires à inclure dans le plan de financement global pour les 20 prochaines années.

Le président : Je vous suis, mais, par rapport à la richesse du pays, nous constatons que le budget des forces armées diminue. Nous allons voir une part moins importante de nos ressources être affectée aux Forces armées, même si nous vivons une période où il y a des risques. Certains d'entre nous sommes très préoccupés de voir des proportions diminuer avec le temps, alors que nous voyons le prix de l'équipement, les coûts liés aux salaires et le prix des satellites augmenter. Nous constatons que vous n'êtes pas en train de progresser vers l'objectif fixé par l'OTAN, qui est de 2 p. 100. Au lieu de cela, nous voyons que vous descendez sous la barre des 1 p. 100, et il semble que les choses ne vont pas dans le bon sens.

Lgén Natynczyk : Encore une fois, sénateur, avec les ressources qui nous sont allouées, nous essayons d'obtenir les outils technologiques qui sont à notre portée pour nous assurer que nos hommes et nos femmes ont l'équipement dont ils ont besoin pour relever les défis que le Canada et le gouvernement leur demandent de relever.

Le sénateur Meighen : Je pense que j'ai compris ce que vous avez dit, et je suis plutôt d'accord. Avez-vous dit que le ministère de la Défense nationale est différent à de nombreux égards des autres ministères qui doivent suivre un processus, notamment un processus budgétaire?

Lgén Natynczyk : Je dirais que nos activités sont différentes par rapport aux produits et programmes. Notre programme a pour objectif de former des hommes et des femmes en uniforme qu'on charge de se rendre dans des endroits dangereux pour accomplir des missions risquées, et nous devons nous assurer qu'ils auront tout l'équipement, toute la formation et tout le soutien dont ils ont besoin pour réussir leur mission et pour atténuer les risques auxquels ils font face. À cet égard, c'est une activité unique pour le gouvernement.

Le sénateur Meighen : Cependant, le processus que les règles du Conseil du Trésor vous obligent à suivre est exactement le même que celui que doivent suivre ces autres ministères qui ne présentent pas ces caractéristiques uniques, non?

Lgén Natynczyk : C'est exact. Il n'y a qu'un seul processus au sein du gouvernement en ce qui concerne ce que nous faisons. En même temps, depuis deux ans, depuis que je suis vice-chef d'état-major, nous avons été en mesure de nous adapter à certains des besoins qui découlent des opérations. Je me rappelle encore septembre 2006, l'opération Méduse et la façon dont nous avons réagi dans ce cas-là. Les organismes centraux nous ont donné une certaine marge de manœuvre au moment où des changements importants sont survenus.

Le sénateur Meighen : Pensez-vous que vous pourriez présenter des arguments convaincants pour être traité différemment des autres ministères sur le plan budgétaire?

Lgén Natynczyk : Je ne suis pas sûr qu'il faille que nous soyons traités différemment. Il s'agit davantage de comprendre la complexité des opérations militaires. Dans le temps où je participais à des opérations, je disais souvent que plus on s'éloigne du lieu de combat, plus il est difficile de comprendre ce qui se passe. Les gens qui se trouvent au front, hommes et femmes, voient l'ennemi utiliser différentes techniques et tactiques contre eux, et leurs besoins en ressources évoluent donc. Le défi que nous avons à relever, c'est de nous adapter assez rapidement ici, au Canada, pour leur permettre d'arriver à la victoire. Nous devons nous assurer que tous les décideurs d'Ottawa savent qu'ils doivent contribuer et venir en aide à ces hommes et femmes.

Le sénateur Meighen : J'ai l'impression que c'est un obstacle que vous n'avez pas encore réussi à surmonter.

Lgén Natynczyk : Nous avons très bien réussi jusqu'à maintenant.

Le président : Pour reformuler la question du sénateur Meighen, l'impression que le comité a, c'est que vous passez davantage de temps à vous battre contre des bureaucrates qu'à vous battre contre des talibans, et nous ne sommes pas convaincus que c'est le bon système. Connaissez-vous le rapport Brown?

Lgén Natynczyk : Non.

Le président : Le rapport Brown porte sur la Gendarmerie royale du Canada, la GRC. À de nombreux égards, il s'agit d'une organisation complexe qui est très différente de la plupart des autres organisations, mais celle-ci a des points communs avec la vôtre. Une des recommandations du rapport Brown était qu'on supprime les restrictions imposées par Travaux publics et Services gouvernementaux Canada et par le Secrétariat du Conseil du Trésor pour permettre aux gestionnaires de la GRC de gérer tout le processus eux-mêmes. L'argument allait précisément dans le même sens que ce que le sénateur Meighen disait, c'est-à-dire que vos organisations sont particulières et que le Conseil du Trésor ne semble pas avoir une structure adaptée à cela. Pour celui-ci, il n'y a pas de problème si vous faites l'acquisition de machines à écrire pour 28 ministères. Je suis sûr que vous achetez des machines à écrire, mais je sais que vous faites également l'acquisition d'équipement très complexe qui parfois fonctionne mais parfois ne fonctionne pas aussi bien que vous l'auriez souhaité. Savez-vous s'il y a des études en cours sur la possibilité, pour le ministère de la Défense nationale, de négocier avec le Conseil du Trésor?

Lgén Natynczyk : Je sais que l'ancien sous-ministre adjoint du Matériel a mis sur pied un projet qui portait là-dessus. D'après mon expérience des deux dernières années, deux années d'opérations bien remplies au cours desquelles nous nous sommes assurés non seulement de répondre aux besoins à court terme de nos forces de combat, mais également de leurs besoins à long terme, nous avons travaillé en étroite collaboration avec le Conseil du Trésor, le ministère des Finances, Travaux publics, Industrie Canada et le Bureau du Conseil privé. Nous avons mis au point un mécanisme nous permettant de nous réunir régulièrement pour effectuer le suivi de tous ces grands projets annoncés en juin 2006 et aussi des nouveaux projets qu'on lance — le projet des avions de recherche et de sauvetage et ces autres projets, au fur et à mesure qu'ils sont mis en œuvre — pour nous assurer qu'ils s'inscrivent tous dans la même orientation malgré le fait qu'ils représentent différents ministères. Nous avons créé ces mécanismes au ministère par l'intermédiaire du sous- ministre adjoint du Matériel, qui l'a fait en collaboration avec Travaux publics et avec les autres ministères que j'ai nommés.

Le sénateur Munson : Je vais donner suite à la question posée par le sénateur Zimmer. Vous ne dormez pas toutes les nuits, général. Vous avez dit, en réponse à la question du sénateur Zimmer, que vous vous préoccupez du fait d'avoir les bonnes personnes dans vos rangs et de la force de l'effectif. Nous dites-vous que c'est l'un des plus gros points faibles en ce moment?

Lgén Natynczyk : L'un des défis que nous devons relever, comme le chef d'état-major l'a mentionné, c'est celui qui consiste à recruter des gens qui possèdent des compétences techniques dans certains de nos domaines, surtout dans la Marine, à recruter des gens qui possèdent de bonnes compétences techniques, par exemple les techniciens spécialisés dans l'utilisation de radar et de sonar. Nous pouvons relever le même défi du côté de la Force aérienne. En outre, nous allons être confrontés à un écart entre les générations, puisqu'il y a des gens qui ont 20 ou 25 ans de service et qui arrivent au point où ils peuvent prendre leur retraite et toucher une partie de leur pension, et, sur le plan démographique, les caractéristiques du groupe qui les suit sont très différentes.

Si nous voulons un sergent qui possède dix ou 15 ans d'expérience, il faut dix ou 15 ans pour le former. Comment faire pour nous assurer que les gens qui occupent les postes en ce moment soient heureux de continuer de servir? Nous constatons que le choix de s'enrôler dans les forces est un choix personnel, mais que le choix du moment de la retraite est presque toujours un choix familial. Le conjoint a beaucoup d'influence lorsqu'il s'agit de choisir le moment de la retraite. Comment faire pour nous assurer que les familles soient heureuses de faire partie des forces armées, tout en essayant de renforcer notre effectif, que ce soit dans le domaine technique ou de façon générale?

Le sénateur Munson : Y a-t-il un vide?

Lgén Natynczyk : Ce n'est pas un vide. Nous nous trouvons en fait dans une assez bonne situation en ce moment, mais nous nous inquiétons de ce qui pourrait arriver.

Le sénateur Munson : Pour changer de sujet un peu, à votre avis, quels sont les défis que devra relever le nouveau patron, la personne qui remplacera le général Hillier comme chef d'état-major de la Défense? C'était le « général charismatique ». Il était près de la population canadienne, et les gens se sentaient plus près de l'armée qu'avant lui, et il réussissait souvent à les convaincre. Quels sont les défis à relever pour son successeur?

Lgén Natynczyk : Nous profitons d'un mouvement au Canada qui fait que les Canadiens s'identifient aux hommes et aux femmes qui sont en danger, qui les représentent, que ce soit à la pointe de l'épée en Afghanistan, à 40 000 pieds dans les airs ou dans l'Atlantique Nord. Les Canadiens comprennent, par le regard des gens qui portent l'uniforme, ce que les forces armées font. Le défi va consister à trouver le moyen de continuer de profiter de cette vague de soutien public, de cette vague qui existe grâce aux hommes et aux femmes en uniforme qui se sont approprié toute la transformation, qui s'y sont identifiés; ils sont en faveur de cette transformation et veulent qu'elle se poursuive. Comment faire pour continuer de permettre aux Canadiens et aux membres des Forces de s'identifier à celle-ci?

Le sénateur Munson : Je pose les questions, et vous me les renvoyez. Comment le nouveau titulaire du poste va-t-il faire cela?

Lgén Natynczyk : Il faut faire preuve de leadership partout; non seulement la personne qui se trouve au sommet de la chaîne de commandement, mais dans l'ensemble de celle-ci. Nous l'avons dit aux officiers supérieurs, et nous l'avons entendu dire dans toutes les bases de nos unités déployées : les gens sont en faveur des changements en cours, et ils veulent savoir comment nous allons y donner suite.

Le sénateur Stollery : Je tiens d'abord à rappeler à tout le monde que je ne suis pas un membre permanent du comité. Je suis ici aujourd'hui pour donner un coup de main, alors les membres permanents du comité vont peut-être mieux comprendre que moi les réponses à certaines des questions que je vais poser.

La question du recrutement suscite ma curiosité. Ça fait 36 ans que je suis au Parlement. Lorsque je suis arrivé, nous parlions tous des forces armées, et nous parlions de 100 000 hommes. Les forces comptent maintenant 55 000 membres — j'ai aussi entendu dire qu'il y en a 64 000, mais je ne sais pas lequel des deux chiffres est le bon. Lorsque je suis arrivé, cependant, il y avait un peu plus de 100 000 soldats.

Ça me rappelle ce que Woody Allen dit au sujet des courtiers, c'est-à-dire qu'ils investissent votre argent jusqu'à ce que vous n'en ayez plus. Il semble que le chiffre diminue constamment, mais qu'on discute de plus en plus.

Je me suis trouvé à quelques reprises en zones de combat, plus que je ne l'aurais souhaité, et je sais qu'on dit par rapport au Vietnam qu'environ 15 p. 100 des soldats qui y ont été envoyés ont pris part au combat. Même si on cite toutes sortes de chiffres, le fait est qu'une petite proportion seulement est témoin un jour d'un coup de fusil tiré dans un moment de colère. Soyons clairs là-dessus.

Je sais que pour d'autres, 16,5 milliards de dollars, ce n'est pas beaucoup, mais pour moi, c'est beaucoup. Je trouve que c'est beaucoup surtout si on n'arrive qu'à envoyer par exemple 1 000 personnes en patrouille — je parle de l'armée, bien entendu. L'objectif des forces a diminué d'au moins 30 000 soldats depuis que je suis ici, mais peut-être plus, et le plan, c'est de faire augmenter de nouveau l'effectif. Encore une fois, lorsque j'étais jeune, tous les gens que je connaissais au Royaume-Uni essayaient d'éviter le service obligatoire, et tous les soldats français que j'ai connus n'étaient pas contents d'être là. Ils ne voulaient pas être à l'endroit où ils se trouvaient. Il semble que c'est la même chose au Canada, puisqu'il y a ce problème de recrutement, sinon les chiffres n'auraient pas constamment baissé comme ils l'ont fait depuis 36 ans, depuis que je suis au Parlement. Que répondez-vous à cela?

Lgén Natynczyk : Sénateur, je dirais que je ne suis pas sûr que votre impression est fondée en ce qui concerne le désir des Canadiens de s'enrôler dans les forces. D'après ce que je sais, pour avoir parlé à plusieurs commandants chargés du recrutement, c'est que les gens font la file au centre de recrutement. L'un de nos problèmes, c'est de trouver un moyen de les enrôler rapidement, ce qui est extraordinaire. Ça nous ramène à ce que j'ai dit tout à l'heure au sujet du fait que je devrais procéder à une programmation excédentaire et fixer un objectif de 7 000 soldats. Peut-être devrais-je établir l'objectif à 8 000 ou à 9 000 soldats. La question est de savoir comment je peux faire pour modifier l'approche de façon à accélérer le processus d'admission et à inscrire les recrues au camp d'entraînement le plus rapidement possible. C'est un gros effort.

Le sénateur Stollery : N'est-il pas vrai que nous avons assoupli des critères d'admission, pour ce qui est de la condition physique?

Lgén Natynczyk : Nous avons utilisé l'épreuve de condition physique pour ralentir le processus. Les candidats subissent cette épreuve dès qu'ils arrivent à St-Jean, au Québec, c'est-à-dire à l'endroit où se trouve notre camp d'entraînement de base. Ils doivent subir l'épreuve dès qu'ils arrivent, et la plupart des candidats la réussissent. Ceux qui ne la réussissent pas sont inscrits à un programme de remise en forme, et dès qu'ils sont capables de réussir l'épreuve, ils sont réintégrés au groupe principal, de façon à accélérer le processus. Nous ne souhaitons en aucun cas refuser des candidats qui, en raison de leur mode de vie sédentaire, ne sont pas capables de réussir l'épreuve physique, qui consiste en une série de pompes et de tractions, à laquelle s'ajoute un mille et demi de course à pied. Ainsi, nous leur offrons la possibilité de se remettre en forme à St-Jean. La motivation est très grande de le faire et de rejoindre le groupe principal. En faisant cela, nous avons grandement élargi le bassin de candidats. Ces gens veulent s'enrôler.

En effet, encore par rapport au rythme des opérations, pour des raisons quelconques, peu importe comment nous faisons les choses, nos soldats veulent retourner sur le lieu des opérations. Lorsque je me suis rendu sur le théâtre des opérations tout de suite après l'opération Méduse, en novembre 2006, je me promenais parmi les soldats et je leur demandais quelles étaient les choses qui les mettaient vraiment en colère. La réponse qui revenait le plus souvent était la suivante : « Monsieur, nous n'aimons vraiment pas cette politique qui nous empêche de retourner en Afghanistan. » En fait, l'autre jour, en revenant de Cold Lake, en Alberta, j'ai rencontré à l'aéroport d'Edmonton quatre soldats qui s'en retournaient à Petawawa, en Ontario. Ils avaient été en Afghanistan l'an dernier, et ils avaient suivi le cours de leadership à Wainwright, en Alberta, et ils m'ont dit qu'ils voulaient dire au sergent-major de mettre leur nom sur la liste pour l'affectation de septembre à leur retour à Petawawa. Ils veulent retourner en Afghanistan. Ce sont les soldats qui seront dans les véhicules blindés, dans les véhicules de transport des troupes d'infanterie, des soldats qui feront le travail. Pour une raison quelconque, il y a dans nos rangs de nombreux professionnels extraordinaires qui veulent servir et qui sont eux aussi témoins des changements extrêmement importants qui sont en train de se produire.

C'est vrai que c'est la première fois que les Forces canadiennes connaissent une période de croissance, depuis la guerre de Corée, exception faite d'une petite poussée à la fin des années 1980. Pendant la guerre de Corée, nous avions environ 125 000 soldats. En 1988, notre effectif a atteint 90 000 soldats, mais depuis, les chiffres ont beaucoup diminué.

Aujourd'hui, vous avez parlé de 55 000 membres de la force régulière. Il s'agit des membres de la force régulière qui ont suivi un entraînement complet. Il y a aussi 10 000 soldats dont l'entraînement n'est pas terminé, mais qui sont répartis dans l'ensemble des centres d'entraînement, qu'il s'agisse de soldats, d'officiers, de membres de la Force aérienne ou de la Marine, pour un total de 64 500 soldats de la force régulière, c'est-à-dire de gens en uniforme, dont 55 000 sont entraînés et prêts à partir.

En outre, nous avons environ 2 100 réservistes en service à temps plein non seulement en Afghanistan, mais également dans les escadrons de la Force aérienne et sur des navires, que ce soit des navires de la défense côtière ou des frégates. Voilà donc toute la force régulière ou tous les soldats en service à temps plein, c'est-à-dire environ 66 000 personnes en service à temps plein.

Du côté de la réserve, nous avons les noms d'environ 34 000 réservistes. En ce moment, il y en a environ 25 000 qui font partie de l'effectif rémunéré. Ce sont les chiffres actuels. Les objectifs établis dans le cadre de la stratégie de la Défense Le Canada d'abord sont les suivants : faire passer la force régulière à 70 000 soldats et la force de réserve à 30 000 soldats membres de l'effectif rémunéré, pour un total de 100 000.

Le sénateur Stollery : Le fait est que vous avez 55 000 personnes formées à l'heure actuelle, et ce chiffre comprend la Marine, la Force aérienne et l'armée.

Lgén Natynczyk : C'est exact.

Le sénateur Moore : Je vais poursuivre sur le thème abordé par le président. Vous avez parlé de l'acquisition de cinq grands éléments d'immobilisations. J'aimerais que vous m'expliquiez les chiffres en détail. Nous parlons d'un total allant de 45 milliards à 50 milliards de dollars. Quel est le coût des avions de recherche et de sauvetage? Je pense qu'il s'agit de 17 nouveaux avions.

Lgén Natynczyk : Le ministre a indiqué, lorsque nous avons fait l'annonce, qu'il voulait obtenir le coût de chacun des éléments secrets pour pouvoir continuer d'avoir un certain pouvoir de négociation avec les entrepreneurs. C'est la directive du ministre.

Le sénateur Moore : Est-ce que ça veut que vous ne pouvez pas nous donner de chiffres concernant ces éléments?

Le président : Je pense que l'idée, c'est que, s'ils nous donnent des chiffres précis dès maintenant, ils n'auront plus de pouvoir de négociation.

Le sénateur Moore : Je comprends. Eh bien, c'est difficile de ne pas parler de ça.

Le président : Pouvez-vous nous donner un ordre de grandeur?

Le sénateur Moore : Il a parlé de 45 à 50 milliards de dollars.

Lgén Natynczyk : C'est l'ordre de grandeur pour l'ensemble des projets.

Le sénateur Moore : Pour les cinq projets?

Lgén Natynczyk : Pour les grands projets de la Couronne, et l'autre aspect, c'est que le coût de chacun des projet est déterminé par le moment de son exécution. Si, disons, nous recevons une pièce d'équipement en 2020, le fait que nous utilisions la méthode de comptabilité d'exercice a pour effet de nous amener au-delà de 2028, c'est-à-dire bien au-delà de la période de 20 ans prévue pour le paiement de cette pièce d'équipement. Dans ce cas, les 45 à 50 milliards de dollars dont j'ai parlé seraient pour une période supérieure à 20 ans.

Le sénateur Moore : Le président a abordé deux ou trois autres éléments qui figurent sur la liste que j'ai ici. Je n'ai rien vu en ce qui concerne le projet conjoint d'avion sans pilote; je n'ai rien entendu au sujet du projet de remise en état à mi-vie des sous-marins; il a également parlé des projets dans l'espace. Je ne sais pas s'il a parlé du projet Polar Epsilon et du projet SAPPHIRE. Je n'ai rien entendu au sujet du projet de navires de soutien interarmées; il doit y en avoir trois, je pense. L'annonce a été faite en juin 2006. Je n'ai rien entendu au sujet du remplacement des hélicoptères Sea King ni des appareils Chinook dont nous devons faire l'acquisition, 19 appareils neufs et six appareils usagés. Quels sont les coûts supplémentaires liés à ces éléments?

Lgén Natynczyk : Dans le cadre des cinq projets annoncés en juin 2006 — le C-17, l'appareil Hercules C-130J, le soutien interarmées, les camions de transport moyens et les hélicoptères de transport moyen à lourd Chinook —, les coûts d'acquisition étaient d'environ 16 à 17 milliards de dollars, en plus des coûts relatifs à la logistique et au soutien intégrés, qui portent le total à environ 30 milliards de dollars. Ces acquisitions sont toutes antérieures à l'adoption de la stratégie de la Défense Le Canada d'abord, et c'est la raison pour laquelle vous n'avez pas vu ces projets dans les listes.

En plus de cela, le projet d'entretien des sous-marins, c'est-à-dire le contrat de soutien en service des sous-marins de classe Victoria fait partie de nos activités d'entretien ordinaires. De même, la prolongation de la durée de vie des navires de classe Halifax est antérieure à ce dont vous parliez. C'est la même chose pour le projet SAPPHIRE, le projet dans l'espace. Tout cela est antérieur à ce que nous sommes en train de décrire.

Le sénateur Moore : Vous avez dit que ces éléments antérieurs totalisent environ 30 milliards de dollars, en plus des 45 à 50 milliards de dollars que coûteront les cinq grands projets dont vous avez fait mention dans votre compte rendu?

Lgén Natynczyk : C'est exact, et, en même temps, tout cela doit figurer dans les plans d'investissement dont j'ai parlé et qui concernent ce dont il est possible de faire l'acquisition au cours de la période de 20 ans en question.

Le sénateur Moore : C'est beaucoup d'argent. D'où proviendra le financement?

Lgén Natynczyk : C'est la raison pour laquelle je viens de dire que le financement sur 20 ans, y compris les injections d'argent que nous avons reçues depuis 2005 et le facteur de rajustement de 2 p. 100 par année à partir de 2011-2012, finançait à même ce budget sur l'ensemble de cette période...

Le sénateur Moore : L'an dernier, par exemple, l'indice des prix à la consommation a connu une hausse de 2,6 p. 100, peut-être un peu plus, mais vous comptez sur le fait que l'indice des prix à la consommation ou l'inflation, peu importe la norme, ne dépasse pas 2 p. 100 par année?

Lgén Natynczyk : C'est différent pour chacun des aspects de la défense. Il y a différents facteurs de rajustement pour les différents secteurs. Le facteur de rajustement est fonction du secteur dont vous parlez : les secteurs de l'aérospatiale, de la construction de navires, de l'acier et du carburant ont tous des facteurs d'inflation différents.

Le sénateur Moore : Il y a un dénominateur commun à tous les secteurs, et c'est le fait qu'il s'agit de l'argent des contribuables, du dollar, qui est soumis aux forces de l'inflation, et il s'agit aussi du moyen qu'on va utiliser pour payer ces 18 milliards de dollars, et c'est de ça que je parle.

Lgén Natynczyk : Nos agents financiers ont travaillé avec les organismes centraux. Le ministère des Finances et le Conseil du Trésor ont travaillé en collaboration pour déterminer les formules qui nous permettront de procéder à une importante restructuration des forces armées dans un avenir proche pour nous assurer d'exercer une certaine rigueur et de rentabiliser au maximum l'investissement des contribuables canadiens dans leur sécurité.

Le président : Général, un document va bientôt être publié là-dessus, et je dois dire que les membres du comité ont de la difficulté à démêler tous ces chiffres. Pouvons-nous vous demander de revenir nous faire un compte rendu sur le financement?

Lgén Natynczyk : Certainement. Encore une fois, mon chef de programme et le sous-ministre adjoint des Finances et des Services ministériels ont déterminé nos formules d'établissement des coûts pour l'avenir. Nous avons suivi un processus rigoureux pour nous assurer d'établir tous les coûts, jusqu'aux coûts liés à chacun des membres des Forces canadiennes, et aussi à l'équipement de soutien de chacun des navires, de chacun des avions et de chacun des bataillons de soldats.

Le président : Personne ici ne dit que vous avez tort, mais ce que nous disons, c'est qu'il y a un certain scepticisme quant au fait que le financement qui vous est accordé pour l'avenir est suffisant, et nous aimerions que quelqu'un nous fasse un compte rendu là-dessus au cours des prochaines semaines.

Lgén Natynczyk : Certainement.

Le sénateur Nancy Ruth : Comment les chiffres qui ont trait au recrutement changent-ils? Qui les fait changer? Comment tout cela se passe-t-il? Comment se fait-il que le nombre de recrues augmente et diminue?

Lgén Natynczyk : Dans nos modèles, nous prévoyons un taux d'attrition d'environ 7 à 8 p. 100. Vu la croissance actuelle, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, nous prévoyons que la force régulière va connaître une augmentation d'environ 1 000 personnes par année et que l'augmentation va être d'environ 750 personnes par année pour les réserves. Les personnes qui se chargent de la modélisation de l'effectif nous ont proposé de recruter 6 500 personnes l'an dernier pour pallier l'attrition, et, du côté de la force régulière, d'embaucher 1 000 soldats de plus, puisque l'attrition prévue était de l'ordre de 5 500 personnes.

Nous constatons maintenant l'effet de l'écart démographique ou la bulle dont je parlais tout à l'heure. Il y a des gens qui se rendent à 20 ou 25 ans, qui décident qu'ils en ont assez et qui prennent leur retraite. À ce moment-là, notre taux d'attrition passe de 7 à 8 p. 100. Certains de nos alliés envient quiconque a un taux d'attrition de moins de 10 p. 100. Certains d'entre eux ont un taux d'attrition de 12 à 15 p. 100. À cet égard, nous devrions nous compter chanceux, mais en même temps, nous voulons assurer notre croissance et nous voulons être sûrs que notre effectif possède toutes les connaissances et l'expérience nécessaires pour que nous puissions continuer d'être professionnels, comme nous l'avons toujours été et comme nous devons l'être.

Il s'agit de trouver l'équilibre, c'est-à-dire de recruter le bon nombre de personnes et de s'assurer que les centres d'entraînement, que ce soit ceux de l'armée, de la Marine ou de la Force aérienne, ne soient pas surchargés, de façon à préserver le niveau élevé de compétence de l'ensemble de l'effectif. Il s'agit non seulement d'attirer de nouvelles recrues, mais également de s'assurer que les centres d'entraînement de tous les services puissent faire en sorte que les recrues participent au combat ou intègrent les unités opérationnelles le plus rapidement possible, avec le bon ensemble de compétences.

C'est la raison pour laquelle j'ai dit tout à l'heure que nous allons essayer de gonfler les chiffres et de procéder à une programmation excédentaire pour ce qui est du recrutement. Le facteur principal, ce sera les systèmes de formation et le nombre de recrues qu'ils pourront former. Nous sommes en mesure de former assez rapidement beaucoup de fantassins, mais dès qu'il s'agit de domaines plus techniques, que ce soit des techniciens, des pilotes ou des membres d'équipage de navire, c'est plus difficile, surtout si la formation dure plus longtemps en raison de la complexité technique.

Comment faire pour trouver l'équilibre dans tout cela?

Le sénateur Nancy Ruth : C'est donc ainsi que les choses évoluent.

Lgén Natynczyk : Assurément. Ça évolue constamment.

Le sénateur Nancy Ruth : Vous avez dit tout à l'heure qu'il arrive souvent que les décisions liées à l'attrition ou à la retraite dépendent de la situation familiale et de l'avis des femmes des soldats. Avez-vous des programmes visant les femmes des soldats, pour les encourager à rester ou à partir?

Lgén Natynczyk : Dans nos nouvelles familles, ce sont les conjointes. Nous avons vraiment appris au cours des trois dernières années à nous assurer que les familles ont le soutien dont ils ont besoin lorsque les membres des forces sont déployés, que ce soit en Afghanistan ou en Afrique, ou même qu'ils se trouvent à bord d'un navire quelque part dans l'Arctique pendant un bout de temps. Comment faire pour nous assurer de répondre aux besoins de ces familles? Nous venons tout juste d'organiser une grande conférence à Toronto, dans le cadre de laquelle nous avons réuni le personnel des centres de ressources pour les familles des militaires, les commandants de base et les chefs, pour qu'ils discutent des leçons apprises et des pratiques exemplaires. Notre chef du personnel militaire et son personnel ont échangé avec les Américains, les Britanniques et les Australiens. Tout le monde est confronté au même genre de besoins opérationnels. Nous devons déterminer les causes de l'attrition et trouver des façons d'y remédier. Nous devons apprendre à appliquer les leçons apprises pour nous assurer que les conjointes sont heureuses d'appuyer les Forces canadiennes.

Le sénateur Nancy Ruth : Souvent, à Toronto, d'où je viens, les forces ont organisé au Rogers Centre une grande foire avec des fusils et des hélicoptères, et elles recrutaient de nouveaux soldats à un train d'enfer. Pourquoi ne pas aller aux parades de la fierté gaie à Toronto, à Vancouver ou ailleurs? On m'a demandé si je pense, à titre de membre du Comité de la sécurité nationale et de la défense, que les forces demeurent aussi homophobes que les forces de partout dans le monde ont toujours été. Pourriez-vous me dire pourquoi vous ne faites pas de recrutement à l'occasion des parades de la fierté gaie?

Lgén Natynczyk : Les Forces canadiennes célèbrent la diversité à tous les égards, et nous sommes le reflet de la société canadienne.

Le sénateur Nancy Ruth : Faites-vous du recrutement dans ce milieu?

Lgén Natynczyk : Je n'ai pas d'information détaillée là-dessus. Il faudrait que je pose la question au chef du personnel militaire, puisque cela concerne le processus de recrutement.

Le sénateur Nancy Ruth : Vos programmes pour les familles, dont vous venez tout juste de parler, visent-ils également les partenaires et les conjoints du même sexe?

Lgén Natynczyk : Certainement. Au ministère, tout le monde a accès au soutien offert par les centres de ressources pour les familles des militaires.

Le sénateur Nancy Ruth : Pourriez-vous demander à votre chef du personnel militaire pourquoi on n'effectue pas de recrutement à l'occasion des parades de la fierté gaie?

Lgén Natynczyk : Oui, je vais le faire.

Le président : Vous avez été très patient au cours de l'heure et demie qui vient de s'écouler, et nous vous en sommes reconnaissants. On m'a dit que, au ministère, on trouve que c'est une excellente façon d'occuper un après-midi. Merci beaucoup, général, d'avoir témoigné devant nous. Merci d'avoir répondu à nos questions en toute sincérité. Nous savons que vous occupez un poste très exigeant, et je suis toujours impressionné de voir le nombre d'heures que vous consacrez à votre travail. J'ai l'impression que vous aimez ce que vous faites, et c'est sûrement en partie pour ça.

Lgén Natynczyk : Sénateur, nous essayons tous d'apporter une contribution.

Le président : Au nom du comité, merci beaucoup d'avoir témoigné devant nous et de nous avoir aidés à faire avancer notre étude.

Honorables sénateurs, j'aimerais que nous réglions une petite chose en ce qui concerne le Sous-comité des anciens combattants. Sénateur Meighen, vous avez la parole.

Le sénateur Meighen : Votre sous-comité des anciens combattants, auquel a été renvoyé le projet de loi C-287, Loi instituant la Journée nationale des Gardiens de la paix (Casques bleus), est heureux de vous apprendre que ce projet de loi a été adopté sans amendement, mais avec l'observation suivante : votre comité fait remarquer que l'objectif de la Journée nationale des Gardiens de la paix est de reconnaître les efforts passés, présents et futurs des gardiens de la paix canadiens et de tous les Canadiens qui contribuent au maintien de la paix.

Par conséquent, monsieur le président, je propose que le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la Défense adopte maintenant le projet de loi C-287, Loi instituant la Journée nationale des Gardiens de la paix (Casques bleus), sans amendement, mais avec l'observation, et que le président ou son remplaçant désigné renvoie le projet de loi au Sénat dès que possible.

Le président : Merci. Y a-t-il des questions ou des commentaires? Qui est pour?

Des voix : D'accord.

Le président : Qui est contre? La motion est adoptée à l'unanimité.

Je propose que nous chargions le sénateur Meighen de renvoyer le projet de loi au Sénat. Sénateur Meighen, êtes- vous disposé à faire cela?

Le sénateur Meighen : Oui, avec joie.

Nous recevons maintenant le lieutenant-général A.B. Leslie, chef d'état-major de l'Armée de terre. Le lieutenant- général Leslie s'est enrôlé dans le 30e Régiment d'artillerie de campagne pendant qu'il étudiait à l'Université d'Ottawa. En 1981, il a été muté dans la force régulière, et il a d'abord servi auprès du 1er Régiment de la Royal Canadian Horse Artillery. Le lieutenant-général Leslie a également servi dans le cadre d'une série d'affectations en Allemagne, à Chypre et en Bosnie, et il a obtenu la Médaille du service méritoire pour ses actions sur la ligne de feu en août 1995. Il a récemment été nommé commandant de la Force opérationnelle à Kaboul et commandant adjoint de la Force internationale d'assistance à la sécurité en Afghanistan, qui est dirigée par l'OTAN. Il occupe le poste de chef d'état- major de l'Armée de terre depuis juin 2006, et c'est également l'un des candidats pressentis pour remplacer le général Hillier comme chef d'état-major de la Défense.

L'adjudant-chef Wayne Ford, sergent-major régimentaire de l'armée, l'accompagne.

[Français]

Lieutenant-général A. B. Leslie, chef d'état-major de l'Armée de terre, Défense nationale : Monsieur le président, l'armée demeure axée sur la formation des soldats pour les opérations nationales et internationales. La bonne nouvelle est que les soldats de l'armée de terre, avec un excellent appui et l'assistance de l'ensemble des Forces canadiennes, ont accompli un énorme travail au cours de la dernière année.

[Traduction]

L'armée a apporté des changements considérables en améliorant la façon dont elle produit des soldats, notre grande priorité, ainsi que la façon dont elle prépare les unités, les formations et les brigades affectées à des opérations complexes, en tenant compte des expériences que nous avons récemment vécues sur les champs de bataille. Grâce à un processus dynamique et souple fondé sur les leçons apprises, on a effectué un changement de cap important à l'égard des centaines de trousses de formation pour les capacités terrestres.

La culture de l'armée change pour le mieux : un grand nombre de soldats, qui ont participé ou participeront à des combats au péril de leur vie, sont plus ouverts et disent plus franchement ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas, et ils n'ont pas peur de remettre en question les vieilles idées ou de commenter les nouvelles idées.

[Français]

Notre doctrine principale pour les opérations contemporaines, fondée sur l'idée des opérations dispersées adaptatives, avec un accent sur les missions anti-insurrection — situées légèrement à droite sur le spectre des conflits — a été réécrite et publiée. Ceci a conduit l'Armée de terre à franchir une nouvelle étape au plan international, en s'éloignant rapidement des paradigmes de la Guerre froide d'il n'y a que quelques années.

[Traduction]

Les travaux relatifs à la doctrine, qui ont été accomplis à une vitesse remarquable, ont entraîné de multiples discussions, jeux de guerre et exercices de réflexion dans tous les rangs de l'armée, lesquels ont à leur tour mené à la mise sur pied de nouveaux groupements tactiques et de nouvelles structures de formation dans les forces régulières et la Réserve, ainsi que de nouvelles capacités à l'égard des opérations cinétiques — soit l'application de la force meurtrière — et non cinétiques — qui visent à gagner le cœur et la faveur des gens — qui n'existaient pas auparavant.

[Français]

Cela a conduit à un remaniement complet et bien articulé du plan d'acquisition de matériel de l'armée s'échelonnant sur une période de 30 ans. Pour satisfaire à ces exigences de résultats, un grand nombre d'équipements sophistiqués et essentiels ont été acquis et rapidement mis en place, parfois directement en théâtre d'opération. Cela a largement contribué à sauver des vies, ainsi qu'au succès de la mission.

[Traduction]

Grâce à de nouvelles structures de commandement et à de nouvelles façons de penser, les forces terrestres de l'armée canadienne sont à l'avant-garde de la technologie numérique dans le monde : en effet, de nouveaux systèmes et de nouvelles procédures ont été élaborés de toutes pièces et intégrés aux opérations au cours des six derniers mois. Les unités et les formations de soutien au combat de l'armée ont entrepris une complexe période d'évolution, tout en contribuant de façon remarquable à la réussite des missions nationales et internationales. Eux aussi, ils ont souffert, sont morts ou ont été blessés au combat pendant qu'ils s'acharnaient à dépêcher des fournitures à la force de manœuvre ou au personnel médical, à des gens qui sont prêts à mettre leur vie en péril pour sauver leurs soldats, malgré la myriade de tâches et, parfois, le manque de ressources pour toutes les accomplir.

[Français]

De même, un changement culturel est fermement en route afin de bien faire comprendre que toute personne qui porte un uniforme de combat, et qui combat sur le terrain, est tout d'abord un soldat et ensuite un spécialiste.

Bien que facile à dire, cette attitude est très difficile à implanter au sein des nombreuses organisations de soutien qui existent en dehors de la chaîne de commandement de l'armée. Le transfert de trois écoles des Forces canadiennes et de la Réserve des communications à l'armée est d'une aide certaine dans la mise en œuvre de cette notion.

[Traduction]

D'ailleurs, l'effectif des forces régulières et celui des forces de la réserve ont rarement été aussi proches, sur le plan tant théorique que spirituel. Dieu merci, nous avons la Réserve. La réaction des soldats des brigades et des bataillons de la Réserve à l'appel aux armes, à la hauteur de celle de leurs confrères de la force régulière, était rien de moins que grandiose : des milliers d'entre eux sont aujourd'hui en service à temps plein, au pays ou à l'étranger, et ils assument une partie du fardeau.

[Français]

Piloté par le remarquable travail récent du chef du personnel militaire et son équipe, le niveau d'attention porté à nos blessés et aux proches des soldats tués s'est accru considérablement. De plus, les différentes familles régimentaires et associations ont également été d'une aide précieuse en aidant leurs camarades et les familles ayant perdu l'un des leurs.

En ce qui concerne le support, les membres civils de l'équipe de l'armée ont répondu admirablement à l'appel. Ils continuent à soutenir une part croissante de la charge de travail causée par le départ des soldats provenant des institutions d'entraînement et d'appui qui quittent pour l'entraînement avant déploiement et/ou en mission, et ce pour des périodes allant jusqu'à 18 mois. Et cela, souvent sans d'éventuels remplaçants pour ces importantes fonctions qui doivent quand même être exécutées.

Le personnel civil sur les bases militaires, dans les écoles et dans les unités de soutien ont emboîté le pas. En regard de notre nouvelle orientation vers les régions nordiques, l'inclusion des Rangers au sein de l'équipe de l'armée s'est avérée très bénéfique en stimulant notre attention vers ce domaine de compétences vitales qui est souvent négligé en termes d'expertise des capacités et d'attitude.

Afin de soutenir cette action, un certain nombre d'unités de l'armée auront la tâche de se spécialiser au niveau des opérations en Arctique et dans le Nord.

[Traduction]

Les soldats, les unités et les formations de votre armée ont été éprouvés au combat, dans le cadre de missions complexes d'aide et d'imposition de la paix échelonnées sur une période de 18 mois à deux ans; ils ont été mis à l'épreuve aux plans mental et physique comme jamais depuis la guerre de Corée. L'armée connaît sa période de changement la plus importante en 50 ans aux chapitres de la doctrine, de l'équipement, des structures, des régimes d'instruction et des attitudes.

Les résultats — qui ont entraîné des éloges à l'échelle nationale et internationale de nos amis et alliés impressionnés par la conduite de vos soldats, de vos unités, de vos brigades et de vos formations dans le cadre d'opérations complexes, au pays et à l'étranger — découlent directement de la contribution de milliers de membres de la force régulière et de la Réserve, de civils et de Rangers à la préparation de ces opérations. Le degré de soutien de l'armée, de tout le MDN, des organisations de niveau un et, en effet, de partout dans la ville et à l'échelle du pays a été rien de moins qu'extraordinaire, particulièrement dans le cas des différentes organisations qui se sont révélées extrêmement compétentes et ont beaucoup contribué au moyen de leur participation active à l'accomplissement de la tâche. Il y a eu de merveilleuses réussites chez les membres réguliers de la Réserve, les Rangers et les civils de l'équipe de l'armée. Il y en aura encore bien d'autres.

L'armée fait face à des défis, les deux plus importants consistant à remédier à la pénurie de leaders tactiques expérimentés dans la force de campagne — les gens qui accomplissent le travail sur le terrain, en vérité — et à réagir à la réalité persistante de l'armée vidée. Cependant, il est stimulant d'être soldat canadien aujourd'hui, car le sentiment de devoir et l'engagement à l'égard de la défense du pays sont extraordinairement forts.

Cela conclut les commentaires que j'avais préparés. Je serais ravi de répondre à vos questions, avec l'aide du sergent- major de l'armée, mon partenaire de l'équipe de tir.

Le sénateur Moore : Par le passé, vous avez critiqué la nouvelle structure de commandement et vous jugiez que cela a peut-être mis l'armée aux prises avec un manque de personnel expérimenté pour occuper différents postes aux nouveaux quartiers généraux. L'équipement s'use; nous avons de la difficulté à répondre aux demandes continues de personnel pour servir en Afghanistan. J'aimerais avoir vos commentaires à ce sujet, et nous pourrons ensuite parler de votre budget, ou de l'insuffisance de celui-ci.

À la lumière des commentaires que vous venez de faire, faites-moi un compte rendu des commentaires que vous avez faits dernièrement.

Lgén Leslie : L'intention qui sous-tend la formation des nouveaux quartiers généraux de commandement — les quartiers généraux de commandement opérationnel, dont un qui est responsable des opérations internationales, dont un qui est responsable des opérations internes, dont un qui est responsable du soutien et dont un qui est responsable des forces spéciales — est reconnue et entièrement appuyée. Cette intention est de séparer la mise sur pied des forces de l'emploi de la force.

Par le passé, nous n'avions qu'une équipe relativement modeste qui s'efforçait d'accomplir toutes ces tâches. La mise sur pied des forces, le recrutement, l'instruction et l'équipement, puis le rassemblement de ces personnes pour former une équipe de, disons, environ dix, puis des groupes de 100 compagnies, puis des groupements tactiques formés de 1 000 soldats, et enfin une force opérationnelle de plus de 3 000 soldats, et la gestion de tous les facteurs habilitants connexes, c'est une démarche très compliquée. On peut dire la même chose de la coordination de l'exécution des missions. Naturellement, le pendule est allé dans l'autre direction au cours des deux dernières années, et on veille à ce que l'aménagement de ces nouveaux quartiers généraux de commandement opérationnel soit compatible avec les ressources qu'ils jugent nécessaires pour accomplir le travail.

Les répercussions sur l'armée, car le personnel de ces nouveaux quartiers généraux devaient bien provenir de quelque part, sont flagrantes. On a retiré beaucoup de personnes des régiments, des bataillons et des brigades pour peupler ces nouveaux quartiers généraux, créant du coup des lacunes dans les différentes structures de l'armée à un moment où nous en avons le plus besoin. C'est naturel.

Lorsqu'il y a de nouvelles idées, il faut puiser les ressources quelque part. En l'occurrence, les ressources sont des gens de dix ou 15 ans d'expérience qui peuvent accomplir le travail. Il y a concurrence, au sein des Forces canadiennes, pour le même groupe de personnel militaire expérimenté, qui peut prendre part aux missions internationales, mais qui peut aussi faire la transition vers les quartiers généraux.

Le sénateur Moore : Récemment, on a mentionné dans les médias que nous avions refusé d'accéder à la demande d'affecter une personne à un poste de commandement. Est-ce que c'était au Ghana? Est-ce une conséquence de la nécessité de muter de nouvelles personnes aux quartiers généraux?

Lgén Leslie : Je crois que c'était au Congo. Je ne sais pas à quel point la demande était officielle. Je sais qu'on avait envisagé la possibilité d'envoyer une équipe de commandement au Congo, mais ce n'est jamais une seule personne. Lorsqu'un officier général est envoyé pour diriger une structure multinationale très complexe, comme je l'ai déjà fait dans l'ex-Yougoslavie, plusieurs centaines de personnes doivent l'aider.

Nous sommes aussi engagés que vous pourriez l'attendre en ce qui concerne nos obligations internationales actuelles. Je ne parle pas au nom des Forces canadiennes, je parle au nom de l'armée.

Le sénateur Moore : Je comprends.

Lgén Leslie : L'armé aurait beaucoup de mal à assumer une tâche supplémentaire. Si elle est si importante que toute autre activité doit cesser, nous pouvons évidemment le faire, mais il y aura des conséquences.

Le sénateur Moore : Et qu'en est-il de votre réponse à ma question au sujet de l'équipement et des préoccupation que vous avez exprimées par le passé?

Lgén Leslie : L'armée dispose de milliers de véhicules, et ils sont là pour être utilisés par des Canadiens, soit pour une intervention au pays, soit pour un déploiement international. Vu la cadence actuelle des opérations, le nombre limité de véhicules et de techniciens de véhicules militaires et la disponibilité des pièces de rechange, il s'agit non pas nécessairement d'obtenir de l'argent, mais plutôt de concilier la disponibilité de techniciens et la disponibilité de pièces de rechange. Quelques mots sur les problèmes auxquels nous faisons face en ce qui concerne la disponibilité des pièces de rechange : nos véhicules sont mis à rude épreuve dans le cadre du combat et de l'instruction.

À tout moment, l'armée contribue environ 2 250 soldats en Afghanistan. Ces soldats sont en formation, c'est-à-dire qu'ils suivent une formation de base individuelle portant sur la sensibilisation culturelle et les nuances et les subtilités du théâtre afghan. De plus, 2 250 autres suivent une formation individuelle sur le maniement des armes et prennent conscience des menaces plus subtiles auxquelles ils devront peut-être faire face. Nous leur apprenons comment interagir avec Affaires étrangères et Commerce international Canada et l'Agence canadienne de développement international, l'ACDI, et nous leur expliquons les rôles et responsabilités liés à la reconstruction et à l'aide humanitaire. Il y a aussi 2 250 personnes qui suivent une formation de groupe. Nous rassemblons en équipes des milliers de personnes, puis nous les formons. Nous déployons cette force au moment même où 2 250 soldats reviennent.

À tout moment, l'armée compte 16 000 soldats de la force régulière et de la Réserve sur le terrain. C'est assez remarquable. Tous ces soldats ont besoin d'équipement pour s'exercer. L'équipement est utilisé 24 heures sur 24, sept jours sur sept, et beaucoup de gens font un travail d'entretien génial, y compris les employés civils qui se sont retroussés les manches dans les grandes garnisons pour réparer des véhicules à deux heures du matin afin qu'ils soient prêts à être utilisés à trois ou à quatre heures.

Par conséquent, notre taux de véhicules hors d'usage, ou VHU, selon le type — et plus le véhicule est lourd, plus il est susceptible d'être endommagé, car nos jeunes femmes et nos jeunes hommes les mettent à rude épreuve — oscille entre 20 et 30 p. 100. Cela ne demeure pas constant pendant toute l'année, mais le taux s'applique à l'ensemble des parcs de véhicules. Voilà la mauvaise nouvelle.

La bonne nouvelle, c'est que nous obtenons de nouveaux parcs de véhicules si rapidement que, parfois, je les envoie en Afghanistan et je laisse aux jeunes femmes et aux jeunes hommes intelligents qui composent l'armée le soin de déterminer, avec un peu d'aide d'experts techniques de l'industrie, comment en faire une utilisation optimale, rapidement et intelligemment. On a besoin de temps et d'argent pour déterminer comment soutenir nos parcs de véhicules ici au Canada. Il y a des solutions.

Le sénateur Moore : Sont-ils au Canada à des fins de formation, entre autres?

Lgén Leslie : Oui, à des fins de formation. Nos efforts sont dirigés en priorité vers les parcs de véhicules outre-mer, ce qui est compréhensible. Le maintien et le soutien des parcs de véhicules au Canada exigent de l'argent. J'ai de bonnes raisons de croire que je vais obtenir les fonds. Nous songeons peut-être à retenir les services de sous-traitants civils pour qu'ils se rendent à nos bases pour assurer le soutien en garnison pour libérer les précieux techniciens militaires qui iront sur le terrain, au Canada et dans le cadre de missions internationales.

Le sénateur Moore : Dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé d'un plan s'échelonnant sur une période de 30 ans. Cela s'applique-t-il à l'Afghanistan?

Lgén Leslie : Non, monsieur, cela ne touche pas l'Afghanistan.

Le sénateur Moore : À quoi le plan s'applique-t-il?

Lgén Leslie : La gamme de types de missions que le gouvernement du Canada peut décider d'entreprendre va de l'intervention au pays, qui est la priorité, jusqu'au combat de moyenne intensité. Entre les deux, il y a les opérations de maintien et de rétablissement de la paix ainsi que les mesures anti-insurrectionnelles. De plus, ce contexte comporte des sous-paradigmes. En Afghanistan, par exemple, nous menons une campagne anti-insurrectionnelle en plus de mener des activités d'imposition de la paix, de maintien de la paix, de soutien humanitaire, de reconstruction locale et régionale, de soutien d'Affaires étrangères et Commerce international Canada et à l'ACDI et d'instruction des forces autochtones.

La vie de soldat peut difficilement être plus compliquée qu'en Afghanistan.

Le plan échelonné sur 30 ans dont j'ai parlé dans ma déclaration préliminaire porte sur le plan de croissance du personnel militaire et la gestion de notre équipement, en fonction du financement que l'armée s'attend à recevoir.

J'ai mentionné le concept de l'armée vidée. La bonne nouvelle, c'est que l'armée a eu la permission d'augmenter le personnel des forces régulières de 3 075 membres au cours des trois à quatre prochaines années, ce qui m'enchante.

Le sénateur Moore : L'important, c'est de recruter des gens qui sont intéressés. Nous avons déjà eu cette discussion dans le cadre de l'un de vos témoignages précédents, et vous avez dit que vous prêteriez attention au recrutement. Ce n'est pas une chose facile. Vous en êtes-vous occupé? Avez-vous observé des améliorations depuis la dernière fois que vous êtes venu témoigner?

Lgén Leslie : Je ne suis toujours pas satisfait du temps que l'on met à intégrer un jeune Canadien parmi nos rangs une fois qu'il a montré un intérêt. Une personne qui veut se joindre à la Réserve souhaite qu'on lui fasse visiter un manège militaire dans la semaine — ou certainement le mois — qui suit, elle veut avoir une idée du moment où elle pourra se présenter à une base militaire et commencer l'instruction de base. Dans bien des cas, ce processus est encore trop long.

Cela dit, beaucoup de travail a été accompli au cours des deux dernières années pour surmonter certains des obstacles institutionnels. Dans une certaine mesure, c'est aux Forces canadiennes qu'il incombe de régler le problème. Nous avons créé ces obstacles au cours des 15 à 20 dernières années.

Le sénateur Moore : Vous êtes-vous chargé du personnel de la Réserve comme du personnel des forces régulières?

Lgén Leslie : Certainement; dans notre esprit, honnêtement, la distinction entre le personnel des forces régulières et de la Réserve ne nous importe plus.

Le sénateur Moore : On intègre graduellement les réservistes aux Forces régulières.

Lgén Leslie : L'important, c'est non pas d'où vous venez, mais ce que vous pouvez faire.

Le sénateur Moore : Exactement.

Lgén Leslie : Que Dieu les bénisse; en 30 ans de service, je n'ai jamais vu des réservistes si bien réagir. C'est formidable.

Le sénateur Moore : Dans le cadre de vos responsabilités liées aux besoins en effectifs de l'armée, vous vous penchez sur le recrutement tant de réservistes que de membres des forces régulières.

Lgén Leslie : Oui, monsieur; 17 600 réservistes canadiens sont membres de l'armée. Ce chiffre a été augmenté de 1 800 membres supplémentaires, en conséquence du transfert de commandement des unités de la Réserve des communications à partir du 1er avril.

Le sénateur Meighen : Bienvenue parmi nous, lieutenant-général et adjudant-chef Ford, je suis heureux de vous recevoir. Je crois savoir que vous êtes venu non pas pour répondre à des questions, mais plutôt pour donner des conseils.

Adjudant-chef Wayne Ford, sergent-major de l'armée, Défense nationale : Je vous écoute, monsieur.

Le sénateur Meighen : Pour revenir à la dernière question du sénateur Moore, ce que vous avez dit est absolument vrai. La Réserve a agi de façon exemplaire. Sans la Réserve, Dieu sait comment nous aurions pu respecter nos engagements militaires aux quatre coins du monde.

Qu'a-t-on fait en particulier pour aider et favoriser le recrutement de réservistes et pour leur faciliter la vie, pendant qu'ils sont en service et après leur déploiement, par exemple, dans le cadre de leur réintégration à la vie civile?

Lgén Leslie : Sans la Réserve, je ne serais pas capable, en tant que commandant de l'Armée de terre, de faire ce que l'équipe de l'armée fait actuellement — sans aucun doute.

À l'heure actuelle, nous disposons de près de 500 réservistes, et pas seulement en Afghanistan. La mission en Afghanistan, pour nous, se terminera en 2011. Beaucoup d'autres réservistes participent à d'autres missions. Il faut penser à institutionnaliser notre façon de préparer les troupes, de les équiper, de les former et de leur offrir le bon leadership et une sensibilisation culturelle adéquate pour qu'elles soient prêtes à affronter la réalité après 2011. Le gouvernement du Canada décidera où elles iront. Il est logique de penser qu'elles iront quelque part et qu'elles feront quelque chose dans des circonstances qui seront peut-être aussi dangereuses que celles de l'Afghanistan, mais le même genre de critères liés à la formation de base sera en place.

Sans la Réserve et l'étroite intégration des membres des forces régulières et de la Réserve, nous ne serions pas en mesure de déployer le même nombre de personnes qu'actuellement. La bonne nouvelle, c'est que la Réserve s'est montré tout-à-fait à la hauteur. Je crois que ce que nous faisons maintenant est viable, mais la marge de manœuvre est vraiment mince. C'est pourquoi le sergent-major de l'armée et moi-même passons la grande majorité de notre temps à Ottawa, pour parler aux membres de la Réserve, aux membres des forces régulières et tenter de s'assurer qu'ils comprennent la mission, en quoi consiste leur rôle, et nous cherchons les gens qui ont des aptitudes adéquates pour aller outre-mer et faire ce travail. Soit dit en passant, nous avons aussi besoin de gens qui restent au pays et veillent au respect de notre grande priorité, soit la protection des Canadiens au Canada.

Pour ce qui est des chiffres, j'ai mentionné 500 soldats, approximativement. J'estime que ce chiffre est viable. Encore 3 500 personnes sont en service à temps plein. Plus de 40 p. 100 de nos officiers et de nos sous-officiers supérieurs dans la Réserve actuellement sont en service à plein temps dans des établissements d'instruction et des écoles, et ils aident à réparer les véhicules — ils s'assurent tout simplement que le travail est accompli. Je n'ai jamais vu de tels chiffres en 30 ans de carrière.

Le sénateur Meighen : C'est très encourageant. Je me demande toujours si la structure qui régit le recrutement et l'instruction des réservistes est convenable et assez souple pour les attirer. J'imagine qu'une plus grande quantité de réservistes qui passent par le système ne ferait pas de mal. Je l'envisage comme un système qui cible essentiellement — du moins, aux étapes initiales — les étudiants universitaires, plutôt que les personnes sur le marché du travail. Si je ne m'abuse, vous exigez que la personne suive d'entrée de jeu deux cours d'instruction de 12 semaines. Il serait difficile pour une personne qui travaille comme mécanicien principal dans un garage d'annoncer à son employeur qu'il part pendant 12 semaines pendant l'été et l'automne, et encore l'été et l'automne de l'an prochain. Pourrait-on faire quelque chose afin de ratisser plus large, pour ainsi dire?

Lgén Leslie : Oui, on peut faire quelque chose. Au cours des deux dernières années, des centaines de cours d'instruction militaire ont été examinés, désassemblés et remontés, pas seulement pour les réservistes, mais aussi pour les membres des forces régulières, dans l'intention d'allouer plus de temps à la maison. Il y a encore beaucoup de travail à faire à ce chapitre, mais un grand nombre de nos cours sont mieux qu'avant.

Lorsque le sergent-major de l'armée était un jeune sapeur de combat, il devrait probablement partir pendant deux ou trois mois chaque année pour suivre des cours de perfectionnement professionnel à Gagetown, au Nouveau- Brunswick, ou je ne sais où le cours était offert, loin de sa base d'attache. Maintenant, tellement de nos soldats font ces activités et suivent cette formation, pour aller en Afghanistan ou pour participer à une autre mission, que nous tentons de leur allouer du temps à la maison, alors nous modularisons beaucoup de nos cours pour leur permettre de passer du temps à la maison. Nous n'en sommes pas encore là. Nous avons réalisé cet objectif pour un bon nombre de cours, mais certains sont encore trop centralisés et ne tiennent pas compte du fait que ce n'est pas tout le monde qui est disponible, comme les étudiants universitaires, pendant 12 semaines.

Une autre chose, c'est que nous envoyons les gens en mission au péril de leur vie, donc nous ne pouvons abaisser les normes de formation. C'est mon travail d'examiner presque toutes ces personnes avant qu'elles soient déployées outre- mer — par moi-même ou accompagné de mon partenaire d'équipe de tir — et de m'assurer qu'elles sont prêtes à y aller. À certains égards, notre formation devient plus longue, plus intense et plus coûteuse. Honnêtement, c'est ainsi que vont les choses.

D'un côté, nous voulons modulariser davantage nos cours. D'un autre côté, nous ne placerons les gens dans une situation périlleuse que s'ils ont reçu la meilleure formation possible, et parfois, cela suppose de passer plus de temps loin de chez soi qu'on pourrait normalement l'imaginer.

En ce qui concerne les réservistes aussi, puisque 500 d'entre eux vont à l'étranger chaque six mois et doivent être rompus à l'utilisation de l'équipement des forces régulières, il n'y a pas de méthode facile de former quelqu'un à utiliser les systèmes complexes destinés à la communication, aux soins médicaux ou au combat qui sont en place aujourd'hui. Nous ne pouvons pas nous permettre de couper ces formations. Encore une fois, nous sommes tiraillés entre le désir de qualité et la volonté d'allouer aux militaires du temps chez eux. Je ne sais pas si cela répond à votre question, ou si c'est trop de détails.

Le sénateur Meighen : Je m'inquiète toujours de la période de 12 mois pour une personne qui n'est pas aux études universitaires. Je crois que j'ai vu des hochements de tête; ainsi, j'en déduis que vous comprenez le problème pour quelqu'un qui n'est pas à l'université. Un étudiant universitaire peut bien souvent se libérer pour 12 semaines. Une personne qui n'est pas aux études à l'université aurait plus de mal.

Laissons cela de côté pendant un instant. Vous vous faites l'apôtre de la participation des réservistes, et il se trouve que je suis d'accord avec vous; je suis heureux d'entendre cela. Nous reconnaissons tous la merveilleuse contribution — à laquelle vous avez fait allusion — des réservistes. Nous ne pourrions pas faire ce que nous faisons sans eux.

Des critiques ont parfois dit que le Commandement de la Force expéditionnaire du Canada, ou CEMFEC, est un commandement qui cherche du travail, et il pourrait en trouver dans le cadre des Jeux olympiques. Effectivement, vous ferez un travail considérable au Jeux olympiques. Mais serons-nous en mesure de le faire tout en continuant notre mission en Afghanistan à un niveau convenable?

Lgén Leslie : Dans la mesure où l'effectif en Afghanistan ne baisse pas de façon marquée d'ici 2011, et si le nombre de tâches qui conviendraient à des soldats dans le cadre des Jeux olympiques demeure assez constant, la réponse est oui.

Il y a aussi des soldats qui termineront leur instruction préparatoire tout juste avant qu'ils montent dans les avions pour aller en Afghanistan au mois de mars et d'avril 2010. Nous avons déjà commencé à examiner l'enchaînement de cette instruction et nous avons rapproché l'échéance, ce qui permet de libérer près de 3 000 personnes qui pourront servir de réserve stratégique, formée à merveille, et faire office de réserve d'urgence, en quelque sorte, tout au long des Jeux olympiques, si nécessaire. Ne perdez pas de vue que les Olympiques s'étendent sur environ deux semaines. Toutefois, j'insiste sur le fait que, si les chiffres que j'ai vus relativement à la tâche demeurent assez constants, je crois que nous pouvons le faire.

Le sénateur Meighen : De toute évidence, ce n'est pas « dans le sac », comme on dit. Votre « je crois » reflète probablement bien la réalité.

En ce qui concerne le recrutement, si vous aviez plus d'argent, seriez-vous en mesure de recruter plus rapidement? Serions-nous capables d'attirer et de former plus de gens au niveau voulu? Il semblerait peut-être y avoir un manque d'argent et d'instructeurs pour former ceux qui en ont besoin, parce que beaucoup de vos instructeurs ont été déployés. Je ne sais pas dans quelle mesure il y a toujours une pénurie d'instructeurs dans le pays.

Vous avez dit qu'on vous a attribué 3 000 soldats supplémentaires pour cette année et l'an prochain; dites-le-moi si je me trompe. C'est en supposant qu'ils ont réussi à cheminer dans le système et ne sont pas en attente d'une autorisation de sécurité ou d'un examen médical, ou ne sont pas confrontés à un autre de la panoplie d'obstacles, dont nous avons entendu parler au cours des dernières années, une fois qu'on déclare vouloir se joindre aux Forces canadiennes.

Lgén Leslie : Sénateur, en ce qui concerne les Jeux olympiques, la défense des Canadiens chez eux est notre grande priorité. Nous réussirons à le faire. C'est une activité dirigée par la GRC. Au cours de la période à venir, elle précisera au Commandement du Canada le nombre exact de personnes de l'armée dont elle aura besoin. Nous répondrons à l'appel.

Pour ce qui est des Jeux olympiques, dès que les troupes seront appelées sur le terrain, une semaine avant, les deux semaines de l'événement et la semaine suivante — les troupes spécialisées devront être présentes plus longtemps —, ce sera la priorité du gouvernement du Canada.

À l'égard du nombre, il s'agit de 3 075 soldats. J'insiste sur l'exactitude de ce nombre. Je n'aimerais pas que le compte rendu indique que j'ai confirmé un nombre de 3 000. C'est 3 075.

Le sénateur Meighen : Je suis certain que ces 75 personnes sont essentielles.

Lgén Leslie : Certainement.

Le sénateur Meighen : Surtout si vous êtes de ce nombre.

Lgén Leslie : Quant à l'attrition et au maintien en poste, l'attrition augmente. Nous sommes aux prises avec un problème démographique lié aux baby-boomers, et nous tentons de le résoudre. Nous demandons à des gens qui ont de 20 à 25 ans d'expérience de rester plus longtemps. Nous tentons de maintenir un niveau d'enthousiasme élevé. Pour ce faire, les missions internationales sont parmi les meilleurs incitatifs. Le sergent-major de l'armée et moi, comme je l'ai mentionné, parlons à presque tous les soldats avant leur départ outre-mer dans le cadre d'un des plus grands exercices d'instruction. Nous avons l'habitude de les réunir et de leur expliquer ce que nous faisons et pourquoi nous le faisons, nous leur disons qu'ils sont prêts et, à la toute fin, nous demandons qui ne veut pas partir. Des 15 000 personnes et plus à qui nous avons parlé jusqu'à maintenant, je crois que seulement une personne a dit qu'elle ne voulait pas.

Le sénateur Meighen : C'est un brave type.

Lgén Leslie : Oui, nous faisons un petit travail de régie dans ce genre de situation. C'est difficile de dire que vous ne voulez pas partir devant 3 000 de vos collègues. Ils ont du cran et ils savent que le travail est difficile. La personne en question, que Dieu le bénisse, faisait face à un problème lié à son épouse, et tout venait de lui tomber sur la tête le matin même; il a bien fait. Il ne part pas; il n'y a pas de honte à cela. Il aura une autre chance de participer à cette mission.

Les taux d'attrition sont à la hausse dans certaines catégories d'officiers militaires. Dans les catégories spéciales, le taux varie de 7 p. 100 à 10 p. 100. La moyenne au cours des dix dernières années s'établissait à 6,1, 6,2 et 6,3 p. 100.

Pour ce qui est du recrutement, comme vous le savez, ce n'est pas l'armée qui est directement responsable; le recrutement incombe à tout le monde. Je n'essaie pas d'esquiver la question ici. Près de 10 000 braves Canadiens figurent sur notre d'instruction de base. Cela ne me réjouit pas. Il s'agit de 10 000 jeunes Canadiens qui ont pris la décision de se joindre à l'armée. À cause d'un manque de rendement et de capacité dans nos écoles, qui ne parviennent pas à leur offrir l'ensemble de compétences dont ils ont besoin pour aller outre-mer et survivre, nous n'avons pas pu les inscrire à des cours d'instruction. Il faudra y travailler.

Le sénateur Meighen : Pouvez-vous préciser? Est-ce une question d'argent, d'installation ou d'instructeurs?

Lgén Leslie : Il s'agit de nos capacités d'instruction.

Le sénateur Meighen : Vous ne disposez donc pas des instructeurs dont vous avez besoin les préparer?

Lgén Leslie : Non, nous ne les avons pas, pas plus que les places dans les écoles et la quantité d'équipement pour le faire mieux, plus vite et plus intelligemment. Nous devons coordonner nos gros systèmes de combat et les petits systèmes connexes, selon la disponibilité des champs de tir et, dans certains cas, de produits extrêmement rares, comme des munitions de guerre spécialisées; selon la capacité d'instruction, qui est compétente et, on l'espère, a l'expérience du combat; et selon la disponibilité du personnel, en fonction des les préférences linguistiques pour l'instruction, et nous devons coordonner tout ça pour assurer l'harmonie avec le ratio de déploiement du groupement tactique que nous envoyons en mission. Cela suppose beaucoup de mathématiques et de sciences, mais c'est avant tout un art.

Somme toute, nous avons 10 000 personnes sur nos listes d'instruction de base — pour les forces aériennes, terrestres et navales confondues —, et de ce nombre, près de 5 000 sont dans l'armée. Nous nous améliorons pour ce qui est de les faire entrer dans l'armée plus vite. Toutefois, il reste encore du travail à faire pour retirer ces gens de la liste d'instruction de base et les faire passer dans les bataillons et les régiments, où l'on commencera vraiment à les préparer à partir. Il y a encore beaucoup de place à l'amélioration dans les Forces canadiennes pour accomplir cet objectif.

Le sénateur Meighen : Je m'en tiendrai à cela. Je ne suis toujours pas certain de comprendre quelle est la solution. Est-ce l'argent? Je cherche le remède rapide, mais peut-être qu'il n'existe pas.

Adjudant-chef Ford : J'aimerais donner mon opinion du point de vue d'un sergent-major. Comme l'a mentionné le commandant plus tôt dans son exposé, l'armée vidée dont nous disposons au niveau tactique, l'élément de leadership, ce sont les mêmes gens qui ont besoin d'un système d'instruction qui leur permettra de mettre sur pied et d'instruire nos soldats. Il faut améliorer la synchronisation de l'admission des recrues et de leur intégration dans le système de formation. Avant cela, il faut s'assurer que notre système de formation fonctionne à pleine capacité. Avant que nous arrivions à ce point, il est difficile d'intégrer ces recrues à l'instruction, les former complètement et les déployer. Nous faisons de grands pas, mais nous n'y sommes pas encore.

Le sénateur Meighen : Je m'excuse, mais pourquoi le système ne fonctionne-t-il pas à sa pleine capacité? Est-ce parce qu'il n'est pas assez vaste, ou manque-t-il d'argent ou de personnes?

Lgén Leslie : Je suis général. Je vais prendre chaque cent que vous me donnerez, pour tout dire.

Le sénateur Meighen : Vous n'avez pas besoin d'être général pour faire ça.

Lgén Leslie : Le principal problème de l'armée, c'est que des sous-officiers subalternes et supérieurs s'en vont; ces gens sont le cœur et l'épine dorsale de tout corps armé.

Toutefois, nous leur imposons des exigences supplémentaires. On les perd à cause du vieillissement de la population, mais nous avons la chance d'en voir un bon nombre rester, alors qu'ils pourraient obtenir ailleurs un poste assez bien rémunéré — j'allais dire « un poste très bien rémunéré, » mais je ne veux pas encourager d'autres sous-officiers supérieurs à partir. Ils restent par devoir et par volonté de transmettre leur expérience durement acquise aux gens qui viennent après eux.

Actuellement, il manque à l'armée 1 000 caporals-chefs, qui est le poste de leadership de base. Nous avons une solution. D'ici décembre, je veux que nous promouvions 1 000 personnes au rang de caporal-chef, ce qui suppose qu'elles suivent un cours de formation modularisé de 12 semaines, des membres tant des forces régulières que de la Réserve, de façon à nous procurer les instructeurs supplémentaires dont nous avons besoin, non seulement pour préparer les gens à aller outre-mer, mais aussi pour en entraîner d'autres, afin que nous puissions les retirer de la liste d'instruction de base, mettre le paquet et assurer l'ajout de 3 075 membres des forces régulières. Nous accomplirons cette tâche. C'est notre grande priorité.

Nous modifierons légèrement les règlements. Nous reconnaîtrons l'expérience de combat et l'expérience opérationnelle à titre d'équivalence pour certains cours. Les gens doivent toujours satisfaire à des exigences minimales de connaissances et d'instruction de base.

Dans certains cas, nous ferons passer au rang de caporal-chef des soldats qui ont fait preuve de leadership dans des circonstances incroyables, dans le cadre de missions internationales. C'est presque comme une mesure de guerre pour un organisme qui compte beaucoup de ses membres sur le champ de bataille.

Toutefois, ce n'est que la première tranche. L'an prochain, nous voulons faire la même chose avec les sergents, puis l'année d'après, avec les adjudants. Dans trois ans, lorsque nous atteindrons le point culminant de 3 075 nouveaux membres, si tout fonctionne comme prévu — et je suis un éternel optimiste —, nous devrions être en mesure de nous occuper de la croissance des forces régulières tout en maintenant les opérations actuelles. Cependant, c'est une activité complexe.

Le sénateur Zimmer : Je sais que vous étiez chef d'état-major du secteur dans l'Ouest du Canada en 1996, et je veux que figurent au compte rendu mes félicitations pour le leadership que vous avez offert aux troupes pour leur excellent service durant les inondations survenues au Manitoba en 1997. Vous avez toute l'estime des Manitobains pour ce que vous avez fait et pour les autres services qu'ont offerts vos forces armées, ils ne l'oublieront jamais. Pourriez-vous transmettre ce message aux troupes? Les gens de Winnipeg ne les oublieront jamais.

Vous connaissez la phrase : « Tous ceux qui prendront l'épée périront par l'épée. » Comme j'ai devancé le sénateur Munson pendant le témoignage précédent, le sénateur Meighen vient de poser l'une de mes questions, mais j'ai une question supplémentaire concernant les réservistes.

Je reviens tout juste de l'Afghanistan. Nous avons constaté que les troupes, en plus d'assurer la sécurité, dispensent une formation à la police, de l'instruction, effectuent la construction des chemins et des activités de développement. Le personnel militaire construisait une boulangerie, un chemin et un atelier de broderie pour les femmes. Vu ce passage des opérations de combat au mentorat et, finalement, à d'autres travaux de développement en Afghanistan, vos unités devraient-elles continuer à être constituées de réservistes?

Lgén Leslie : Sénateur, je vous remercie de vos éloges. Pour rendre aux troupes le crédit qui leur revient, pendant les inondations, je n'étais qu'un colonel dans un bureau, et ce sont toujours les soldats qui font tout le travail. Ce sont eux qui ont rempli les poches de sable et ont interagi avec les gens et ils se sont très bien tirés d'affaire. Je vais leur transmettre vos commentaires.

Pour ce qui est de la coopération civilo-militaire, ou COCIM, question à laquelle vous avez fait allusion, elle est beaucoup plus marquée que ce que nous avions envisagé initialement, au plus fort de la guerre froide. Les soldats, les officiers et les sous-officiers, la plupart misant sur une solide expérience acquise dans les forces régulières ou la Réserve, interagissent avec les personnes sur place, les groupements tactiques et les équipes de liaison observateur-mentor, ceux qui font le travail merveilleux de former les forces autochtones. Ils interagissent avec l'ACDI et font office d'intermédiaires entre ceux qui détiennent les fonds et l'expertise en développement — l'ACDI et les Affaires étrangères — et les aînés des villages pour veiller à ce que l'on puisse réaliser ce qui est proposé dans certains délais ou en fonction des priorités des aînés. Nous avons six ou sept équipes en Afghanistan, et chaque équipe est composée de trois ou quatre personnes. C'est vrai que la grande majorité vient de la Réserve, mais il y a une proportion importante d'anciens membres des forces régulières qui ont regagné les rangs par la Réserve pour servir leur pays.

Il y a quelques jours, j'ai donné mon aval à l'établissement de toute une gamme de nouvelles structures, qui regroupent les capacités dans l'armée, une pour chacun des secteurs de la Force terrestre, et qui disposent de capacités de communication et de renseignement en plus de profiter de la COCIM, des services des membres des forces régulières et des membres de la Réserve pour nous permettre de mieux mettre sur pied ce genre d'activités. Pour répondre à votre question, je suis très satisfait de l'excellent travail accompli dans le cadre de la structure actuelle de COCIM, mais il en faut plus. Depuis le 1er avril, de nouvelles idées sont examinées par la chaîne de commandement de l'armée, et on met sur pied de nouveaux organismes pour mieux intégrer les membres des forces régulières et les réservistes.

Par ailleurs, parfois un membre de longue date des forces régulières qui n'a fait rien d'autre que servir dans un bataillon ou un régiment des forces régulières pendant 20 ou 30 ans n'a pas une expériences aussi étendue qu'un réserviste qui, lorsqu'il n'était pas en service, occupait peut-être un poste de banquier, d'ingénieur sanitaire en milieu urbain, d'expert-conseil ou d'expert en production d'énergie. Mais ils sont aussi capitaine ou sergent. Nous considérons que ces ensembles de compétences sont très précieux dans le cadre de la COCIM outre-mer. S'il faut creuser des fossés d'irrigation et qu'il se trouve que nous avons parmi nos rangs un ingénieur qui a de l'expérience dans la conception de routes, c'est plus facile. Nous ne profiterions peut-être pas des compétences aussi larges des membres de longue date des forces régulières. Peut-être, si nous consultions un sapeur de combat, mais ils sont rares.

Le sénateur Zimmer : Lorsque je suis venu ici avec le ministre en 1976, nous avons effectivement fourni des services dans le cadre des Jeux olympiques, mais je me souviens que le nombre de soldats avoisinait plutôt les 15 000, peut-être parce que c'était plus proche de Montréal et d'Ottawa. La plupart des gens, lorsqu'ils pensent aux Jeux olympiques, songent à la sécurité, mais les services ne se limitaient pas à cela. Ils ont offert des moyens de communication et bien d'autres services, et ils ont fait un travail fantastique. Je suis certain que le nombre oscillait plutôt entre 15 000 et 20 000 membres du personnel. Vous parlez d'environ 3 000. Est-ce imputable à la réduction de ces services, ou les gens ont-ils été remplacés par la police ou la GRC? Les nombres ne semblent pas correspondre.

Lgén Leslie : Monsieur, comme vous le savez, le dirigeant affecté aux Forces canadiennes provient du Commandement du Canada, le COMCAN. Je crois qu'il viendra témoigner devant vous. On a mentionné les Jeux olympiques d'hiver de 2010, qui se tiendront pendant environ deux semaines et seront suivis des Jeux paralympiques. Il s'agit de deux lieux distincts où le terrain est relativement accidenté, ce qui permet de prévoir par où l'on entrera, puisqu'il y a deux points d'accès et d'autres points d'accès possibles. J'ai été sur le terrain et je l'ai vu. Nous ne sommes pas responsables de la mission, mais il s'agit de nos troupes, alors nous avons tendance à faire ce genre de choses.

C'est la GRC qui est à la tête de l'effort de sécurité; ainsi, nous sommes un soutien secondaire. Mais la participation ne se limite pas aux éléments organiques d'armée. Parmi la liste de participants, on peut compter les ressources aériennes et maritimes, l'architecture de commandement et de contrôle, l'équipe d'intervention nucléaire, chimique et biologique, les forces spéciales et le soutien aux officiels. Les nombres dont je parle désignent les gens qui relèvent de moi, soit l'armée. Si un nombre supérieur est requis, évidemment, cela ira au sommet des priorités. Grâce à un remaniement assez judicieux de la durée de l'instruction et du moment désigné pour envoyer nos soldats se préparer à l'Afghanistan, nous sommes convaincus que nous disposerons de soldats supplémentaires en cas d'imprévu.

Ce qui excite notre vigilance, c'est l'imprévu — ce qui surviendra d'ici 2010 et nous obligera à modifier ou à repositionner nos forces —, alors nous devons intégrer une capacité supplémentaire dans tout cela.

Le président : Pourriez-vous apporter des précisions concernant ce que vous avez décrit au sénateur Zimmer il y a un moment? Êtes-vous en train de créer un nouvel organisme dans l'armée qui diffère de la Princess Patricia's Canadian Light Infantry, ou PPCLI, ou du Royal Canadian Regiment, ou RCR, ou du Royal 22e Régiment comme corps qui ira outre-mer? Créez-vous des unités permanentes qui sont à la tête d'autres groupes qui peuvent entrer en jeu pour compléter un groupement tactique?

Lgén Leslie : À court terme, nous effectuons des groupements tactiques avec des unités déjà en place. Au sein de chaque secteur de la Force terrestre, il existe des unités de communications, de renseignement, certaines unités d'ingénieurs distinctes, des organismes de COCIM, des unités d'opérations psychologiques et d'opérations d'information. Nous concevons ces groupes de façon à disposer de ce qu'on appelle des ressources d'opérations d'information qui sont regroupées.

Il ne s'agit pas d'une nouvelle unité en tant que telle; c'est plutôt une façon de s'assurer que des personnes aux fonctions compatibles travaillent ensemble pour qu'elles puissent se connaître et continuer à enrichir leur ensemble de compétences avant de partir faire les exercices de formation à Wainwright, en Alberta. Vous ne voudriez pas que votre équipe de hockey qui participera au gros match se rencontre juste avant de monter dans l'avion. Ainsi, aucune nouvelle unité n'est oubliée lorsqu'il s'agit de déterminer qui participera aux activités non cinétiques sur lesquelles nous nous concentrons beaucoup. J'entends par « cinétique » le côté violent et déplaisant, tandis que « non cinétique » correspond aux mesures qui garantissent la victoire et vous permettent d'aider la population locale à résoudre ses problèmes.

En ce qui concerne la structure de l'armée, beaucoup de travail a été accompli au cours des 18 derniers mois de groupements tactiques affiliés. Un bon exemple, c'est le 2e Bataillon du Royal Canadian Regiment, 2RCR, établi à Gagetown, au Nouveau-Brunswick. À cause du bas niveau de la force de bataillon, l'armée a dû aller partout dans les quatre sections; soit l'Ouest, le Québec, les Maritimes et l'Ontario, pour recruter des compagnies de carabiniers qui permettront d'établir la structure. Le 2RCR a fait un travail merveilleux. Tout le régiment peut être fier de ce qu'il a accompli. Cependant, cela ne contribue pas à la cohésion de l'équipe et à la connaissance intuitive de la manière dont vos amis réagiront dans une situation de stress, à moins que vous veniez de la même famille régimentaire et que vous ayez l'habitude de travailler ensemble.

Nous avons conçu de nouvelles structures pour nos compagnies de carabiniers, qui sont les fondements de l'Armée. Il y a environ quatre ans, une compagnie de carabiniers était composée de 100 personnes; ce chiffre grimpera maintenant juste en dessous de 150. Un groupement tactique était composé de 600 ou de 700 personnes; ce nombre variera maintenant entre 1 200 et 1 500. C'est là qu'iront les 3 075 nouveaux membres des forces régulières. Ils ne vont pas aux quartiers généraux. Nous avons réduit de 30 p. 100 l'effectif des quartiers généraux de l'armée au cours des deux dernières années. Nous avons appliqué la même formule aux autres membres des groupements interarmées. Notre effectif de tir indirect et de surveillance, l'acquisition d'objectifs, les petits véhicules aériens non occupés, les bases de repérage par le son et les sections radars sont passés d'une capacité en temps de paix de 100 personnes à près de 240. Des sapeurs de combat sont nécessaires chaque fois qu'on exécute une mission complexe, au pays ou à l'étranger. Un escadron de génie en temps de paix compte environ 100 personnes; ce chiffre augmentera à 250. Nous ne créons pas beaucoup de nouvelles unités. Même s'il y en aura de nouvelles, la grande majorité fait fond sur les structures que nous avons déjà.

Le sénateur Stollery : Comme je l'ai dit à notre témoin précédent, je ne suis pas un membre habituel de ce comité. Peut-être que mes idées ne seront pas nouvelles pour les autres membres du comité.

Ma propre expérience à l'égard de ces questions a principalement été acquise pendant la guerre algérienne. Je crois qu'il est important que le grand public comprenne les chiffres. Les chiffres sont importants.

Nous avions environ 480 000 soldats — 60 000 ou 70 000 dans mon district. Lorsque j'entends ces chiffres — et dans le cas d'une guérilla, c'est habituellement le cas —, nous parlons en fait de notre capacité à affecter deux bataillons à une patrouille, si je comprends bien. C'est-à-dire, deux bataillons ou 1 000 soldats, selon la taille d'un bataillon dans l'armée canadienne. Est-ce exact?

Lgén Leslie : Actuellement, il y a environ 1 200 soldats sur le terrain. Vous tombez pile. Anciennement, ce chiffre aurait supposé deux bataillons, et maintenant, il s'agit d'un seul groupement tactique large et diversifié.

Le sénateur Stollery : Vous avez parlé de certaines choses très intéressantes et vous avez fait une excellente observation. Quiconque a déjà travaillé dans le milieu des forces sait que ce sont les sergents, et ceux qui occupent des postes analogues, qui dirigent l'armée. On tombe rarement sur un officier lorsqu'on est sur le terrain. Les personnes qui vous maintiennent en vie sont les soldats. J'en connais long à ce sujet. Mes propres observations me portent à conclure que l'armée canadienne compte un effectif beaucoup plus large d'officiers que de soldats proprement dit. Comme vous l'avez dit, comment peut-on former des personnes sans sergents? C'est eux qui dirigent les opérations.

Je ne peux pas m'empêcher de faire ces observations, mais ma question est connexe à celle du sénateur Moore au sujet de la République démocratique du Congo. Vous avez parlé des missions internationales. Toutefois, vu les chiffres, je ne vois pas comment on pourrait faire quelque chose d'important dans n'importe quel dossier, en fait — certainement pas dans le cadre d'une mission internationale. J'ai dirigé le Comité des affaires étrangères dans le cadre d'une mission au Congo il n'y a pas trop longtemps. Je suis au courant de la situation depuis 50 ans. J'ai rencontré la MONUC — acronyme qui désigne les forces de maintien de la paix de l'ONU — au Congo. Les responsables affirment que la mission est composée de 17 000 personnes; la plus grande force que l'ONU n'ait jamais déployée. J'ai rencontré un brigadier-général pakistanais dans le Sud. Les Pakistanais et les Indiens sont des gens formidables. Si ce n'était de leur présence sur le terrain, le bain de sang qui est survenu aurait été pire.

Notre témoin précédent parlait des conjoints et de leur opposition au déploiement de leur conjoint en Afrique. Toutefois, la dernière fois que j'ai regardé, il n'y avait que huit membres des Forces armées canadiennes à la République démocratique du Congo. Avec des chiffres pareils, il n'est pas possible de faire grand-chose, où qu'on soit. Cependant, il semble déplorable, pour moi et pour mes collègues du Comité des affaires étrangères, après avoir terminé un gros rapport sur l'Afrique dans lequel nous recommandons d'accroître l'intervention canadienne à l'égard de cette situation tragique, où 5,4 millions de personnes sont mortes de faim ou ont été assassinées — et beaucoup d'entre elles ont été assassinées; ne sous-estimez pas ce fait.

Lorsque nous sommes allés au Congo, il fallait se méfier des grenades propulsées par fusée.

Il n'y a eu aucune participation du Canada à l'égard d'une tragédie d'une telle ampleur. Le général Hillier a été reçu au Comité sénatorial des affaires étrangères et du commerce international, et il a pratiquement balayé la question du revers de la main. Je ne fais pas ça, pas plus que les membres de notre comité. Il me semble dommage que les Forces armées canadiennes, dont les ressources sont évidemment limitées, n'ait pas joué un plus grand rôle dans la réaction à l'une des plus grandes tragédies des dix dernières années dans le monde.

Lgén Leslie : Les mesures anti-insurrectionnelles, conçues pour aider les États nations autochtones naissants à prendre leur envol, exigent la présence sur le terrain de beaucoup de soldats, comme le reflète l'expérience dont vous avez fait mention, dans le cas de l'Algérie. Comme vous le savez, nous sommes une force professionnelle et volontaire. L'une de nos préoccupations, c'est de prendre soin de nos troupes lorsqu'on les envoie outre-mer, dans des circonstances semblables à celles qu'a vécues mon père. Lorsqu'il était un jeune lieutenant, il est parti outre-mer en 1939 et est revenu en 1945.

Le sénateur Stollery : C'est comme tous nos pères.

Lgén Leslie : Il y a des limites au nombre de fois que nous pouvons leur imposer une telle chose sans qu'ils n'abandonnent. C'est tout un travail d'équilibre que de déterminer le genre de mission, le niveau de force et nos ambitions de leadership, puis de diriger nos efforts vers l'obtention des résultats. Dans le cas de l'Afghanistan, évidemment, c'est le gouvernement du Canada qui nous a envoyé. C'est notre grande priorité, donc il va sans dire qu'on devrait y consacrer des efforts à l'avenant.

Existe-t-il une capacité pour faire d'autres choses dans le monde? La réponse est oui, certainement. Lorsque vous parliez de la taille des forces, pensiez-vous à un nombre particulier?

Le sénateur Stollery : C'est une force multinationale; je crois qu'elle est composée de 17 000 soldats en tout. J'ai vu des soldats porter de petits chapeaux de l'Uruguay. Ce n'est pas un pays en particulier, mais le commandant du secteur sud était sans aucun doute Pakistanais. Il s'agit de la vieille armée indienne. Ils font cela depuis toujours. Le secteur nord était dirigé par un brigadier britannique.

Lorsque nous étions dans les hélicoptères, nous étions accompagnés de tireurs d'élite. C'était la première fois que je prenais place dans un hélicoptère avec des tireurs d'élite. Le Canada n'a-t-il pas un rôle à jouer? Ce n'est pas juste une question de reconstruire des pays qui s'écroulent. Le Congo s'est écroulé il y a longtemps, et son cas est très particulier. Tous les membres du groupe de direction à Kinshasa, où je suis allé à quelques reprises, nous ont demandés, vu notre capacité bilingue et notre absence d'histoire de colonisation, si la participation canadienne à la MONUC, la mission de l'ONU, ne pourrait pas être plus importante. Depuis plusieurs années, on répond toujours par un silence assourdissant.

Lgén Leslie : C'est une question d'équilibre, monsieur, entre la qualité de vie du cadre professionnel des sous- officiers. Certains officiers de rang moyen en sont à leur cinquième, sixième ou septième mission, pas nécessairement en Afghanistan, mais en ex-Yougoslavie ou je ne sais où; après 20 ou 25 ans, ils peuvent manifester leur mécontentement en quittant les forces.

Le sénateur Stollery : Ils ne veulent pas y aller, alors?

Lgén Leslie : Nous ferons ce qu'on nous dira de faire si le Canada y tient vraiment, comme c'était le cas pour votre père et le mien et celui du sergent-major, nos soldats mettront leur vie en veilleuse pendant six ans et iront se battre dans un conflit international énorme, comme en 1939-1945. Toutefois, quel est l'équilibre entre le temps que les forces passent à l'extérieur et le temps qu'elles passent chez elles?

Le sénateur Stollery : Je respecte votre réponse. J'imagine que je suis vieux jeu. J'ai grandi avec cette vieille chanson anglaise : « It's the soldiers of the Queen, my lads... »; j'imagine que les gens ne pensent plus ainsi.

Lgén Leslie : Nos soldats iront où le veulent les Canadiens, sans hésitation.

Le sénateur Stollery : Vous dites que, si vous les envoyez, ils ne resteront peut-être pas dans les forces armées.

Lgén Leslie : Pour ma part, il y a toute une gamme d'officiers supérieurs, probablement les plus importants, sous mes ordres. Si je devais partir outre-mer pendant six ans, je serais ravi d'aller au Congo; ce serait beaucoup moins dangereux qu'à Ottawa.

Toutefois, dans quelle mesure un soldat, un marin ou un membre de l'équipage d'un aéronef peut-il s'attendre à vivre une vie quelque peu normale? Je ne parle pas de la Marine. Le vice-amiral Drew Robertson est entièrement capable de le faire. Certains des membres des équipages de frégate se croisent comme ils commencent et finissent les missions. Oui, ils peuvent aller outre-mer, comme leurs ancêtres, pendant cinq ou six ans à la fois, et ils le feront encore, mais, au bout du compte, au pays, on en aura assez que les conjoints soient à l'étranger, hommes ou femmes.

Nous irons où vous nous envoyez. Nous le ferons.

Le sénateur Stollery : Je crois qu'on a seulement demandé un lieutenant-général, comme je l'ai lu dans le journal aujourd'hui. On n'a pas demandé de soldats, en réalité, donc vous pourriez vous porter volontaire.

Le sénateur Day : J'aimerais poser quelques questions pour mieux comprendre le rôle que vous jouez comme commandant de la Force terrestre dans la zone grise qui résulte de la transition de la mise sur pied de la force vers les activités opérationnelles.

Selon mon interprétation, il y a des commandants régionaux de la force opérationnelle interarmées. Faites-vous la même division par région pour la Force terrestre?

Lgén Leslie : Dans quatre des six cas, oui, monsieur, c'est ce que je fais. Les quatre commandants régionaux de l'armée — un pour la région de l'Atlantique, un pour le Québec, un pour le Canada central, soit l'Ontario, et un pour la région de l'Ouest — relèvent de moi. Je rédige leurs évaluations annuelles. Je leur octroie du financement et j'établis des priorités de formation. Je leur attribue toute une série de mécanismes de contrôle pour leur permettre d'accomplir leur travail. Ce sont des brigadiers-généraux très compétents. Chacun d'eux dirige en moyenne 10 000 personnes, sans inclure les cadets. Toutefois, dans tous ces cas, pour certaines activités, la responsabilité du commandement est partagée avec le commandant du Commandement Canada. S'il y a une situation à l'interne, ces ressources seront mises à sa disposition pour lui permettre de faire ce qu'il doit faire, des activités autrefois dirigées par l'armée.

La motivation qui sous-tendait l'établissement de ces nouveaux quartiers généraux était de séparer la mise sur pied de la force de l'emploi de la force pour mieux axer les efforts sur chacune de ces tâches.

Le sénateur Day : Par le passé, votre prédécesseur, comme chef de l'armée, aurait participé à l'emploi de la force et à la mise sur pied de la force. Votre rôle actuel, compte tenu du changement, est la mise sur pied de la force, mais certaines des personnes qui relèvent de vous pourraient porter les deux chapeaux et rendre compte également au secteur des opérations à Commandement Canada et à vous, qui représentez le secteur de la mise sur pied de la force. Est-ce exact?

Lgén Leslie : C'est exactement cela.

Le sénateur Day : On sort ici un peu du cadre du double emploi, mais est-ce que cela fonctionne bien? Le concept de la transformation fonctionne-t-il bien — dire que le chef d'état-major de l'Armée de terre est uniquement responsable de la mise sur pied de la force, tandis que certains de ses subalternes travaillent pour la mise sur pied de la force et l'emploi de la force?

Lgén Leslie : Cela complique la vie. Cela dit, ni le sergent-major de l'armée, ni moi ne sommes gênés de donner notre opinion au sujet du déploiement des troupes de l'armée.

Le sénateur Day : Je suis certain que c'est le cas. Quant aux activités, vous avez parlé de la COCIM, soit la coopération civilo-militaire, et la préparation de vos soldats. C'est la mise sur pied de la force; vous les préparez à composer avec la situation sur le plan civil en plus d'être des soldats de la Force terrestre. Leur rôle de soldat de l'armée consiste à apprendre à traiter avec des civils. Fait-on cela au niveau opérationnel au moment où vous commencez à former l'effectif pour une opération, ou le faites-vous de façon régulière, avant la formation du groupement tactique conjoint?

Lgén Leslie : Les équipes de COCIM, composées principalement de réservistes, mais pas exclusivement, se présentent de six à neuf mois avant le déploiement. Dans l'armée, nous disposons d'un système de mise sur pied de la force assez vaste, que nous avons mis au point au cours des deux dernières années, qui transfère la capacité, les talents d'instructeur, l'argent, les véhicules, les munitions, les interprètes afghans, les experts culturels afghans, les soldats de l'Afghanistan et les soldats afghans qui viennent au Canada pour contribuer à l'instruction. Nous les transférons partout dans le pays, selon l'itinéraire et l'horaire de chacun. Les soldats de la COCIM sont intégrés aux structures régionales, mais ils ne disposent pas nécessairement de tout le nécessaire pour s'entraîner fort afin d'évoluer sur la voie de la préparation, ce qui, dans la plupart des cas, prend de neuf à douze mois.

Le revers de la médaille, c'est que, si nous ne sommes pas sur la voie du déploiement, notre priorité ultime consiste à nous assurer que tout le monde se prépare. Ce n'est pas nous qui obtenons les capacités ou l'équipement nous-mêmes. Toutes nos énergies sont dirigées sur la grosse machine qui produit des douzaines de compagnies, de bataillons et de régiments selon un cycle de 18 ou de 24 mois.

Le sénateur Day : Il pourrait y avoir des membres de la Force aérienne, de la Marine et de la Force terrestre qui participent à la COCIM.

Lgén Leslie : C'est tout à fait possible. Cependant, bien souvent, le chef d'équipe de COCIM joue un rôle de liaison entre les groupes non tactiques, l'équipe de liaison mentor-observateur, l'ACDI et Affaires étrangères et Commerce international Canada. Cette tâche exige une connaissance approfondie du fonctionnement des groupements tactiques et des personnalités dans le groupe, en plus d'une compréhension de l'équipe. S'ils n'ont pas passé par le processus de préparation au complet, ils ne feront probablement pas une grande contribution à la COCIM.

Cela dit, les gens de la Marine et de la Force aérienne se sont joints à des équipes de COCIM et ont fait un travail génial.

Le sénateur Day : Dirigiez-vous leur instruction à ce moment-là?

Lgén Leslie : Oui, je le faisais.

Le sénateur Day : Quel rôle joue le chef du développement des forces dans la création d'un groupe interarmées qui se prépare à participer à des opérations?

Lgén Leslie : Il n'a pas de rôle à jouer à cet égard.

Le sénateur Day : Si je comprends bien, le chef du développement des forces relève du vice-chef d'état-major de la Défense. Quel est son rôle?

Lgén Leslie : Il encadre les activités de développement des capacités et de la croissance en matière d'équipement et travaille en étroite collaboration avec le chef de programme, qui, comme le laisse supposer le titre, dirige les programmes et décide où l'argent sera dépensé pour les Forces canadiennes, le ministère de la Défense nationale. Son rôle n'inclut pas le rassemblement de toutes les différentes équipes pour les préparer à une mission internationale. C'est l'apanage des commandeurs des Forces aérienne, terrestre et maritime.

Le sénateur Day : Le prochain groupe qui se prépare à aller en Afghanistan recevra une partie de son instruction à Wainwright. Cette activité relève-t-elle encore de vous, même s'il s'agit d'un groupe interarmées? Quel rôle jouez-vous à ce chapitre?

Lgén Leslie : L'activité relève toujours du commandement de l'armée jusqu'à ce que le sergent-major et moi les déclarions prêts pour les opérations. Nous le faisons littéralement au moment où ils montent dans l'avion pour y aller.

Le sénateur Day : Même si ce groupe pourrait être composé de membres des Forces aériennes et de la Marine?

Lgén Leslie : Je suis le principal responsable de la mise sur pied de la Force interarmées pour l'Afghanistan. Oui, je vois passer beaucoup d'excellents soldats de la Force aérienne et de la Marine.

J'étais outre-mer il n'y a pas très longtemps, et j'ai vu, à plat ventre dans la poussière, un personnage grisonnant qui aurait pu être n'importe quel soldat. L'homme manipulait avec précaution une chose déplaisante qui risquait de faire « bang ». Il avait une grosse barbe, ce qui n'est pas la norme dans l'armée. En fait, il s'agissait d'un expert en plongée navale qui nageait dans la poussière en Afghanistan pour désamorcer un explosif. Nous nous sommes alors un peu éloignés.

Je lui ai offert un transfert immédiat dans l'armée à un poste supérieur. Il a décliné l'offre. Ce que j'essaie de démontrer, c'est qu'ils font un travail merveilleux. Ils font toujours un travail merveilleux : lorsqu'ils entretiennent des navires, qu'ils font d'autres activités connexes, ou je ne sais dans quel autre cas.

De nouveaux ensembles de compétences, évidemment, pourraient être mis à profit dans une mission telle que celle de l'Afghanistan ou peu importe où nous irons par la suite.

Le sénateur Day : C'est une responsabilité supplémentaire qui vous a été donnée par le chef d'état-major de la Défense qui consiste à être le responsable de la mise sur pied de la force en Afghanistan, probablement parce que c'est à cet endroit que l'armée joue le rôle le plus important.

Lgén Leslie : Oui, l'armée regroupe probablement 90 p. 100 des soldats qui sont déployés sur le théâtre de guerre. L'ultime priorité consiste toujours à défendre le Canada, et nous sommes toujours en train de mettre sur pied des troupes qui assumeront aussi ces tâches.

Le sénateur Day : Cela a été utile. L'activité à Wainwright consiste-t-elle toujours à mettre sur pied des forces qui vont quitter le Canada et aller en Afghanistan?

Lgén Leslie : Oui, c'est cela.

Le sénateur Day : Lorsque le comité a voyagé dans tous les coins du pays, nous avons entendu, à plusieurs reprises, que les unités de formation étaient dépouillées d'équipement qu'on envoyait à Wainwright pour l'instruction dispensée à de grands groupes.

Avez-vous résolu ce problème, ou possédez-vous toujours des unités au pays qui ont vu leur équipement emprunté par les responsables de Wainwright?

Lgén Leslie : C'est moi qui suis responsable de dépouiller les unités d'armée de leur équipement pour l'envoyer à Wainwright ou à tout autre endroit où nous dispensons une instruction collective à grande échelle. Nous ne le faisons pas toujours à Wainwright; nous en offrons aussi aux États-Unis. Nous déployons deux grandes formations en Afghanistan chaque année. Si nous sommes dans notre cycle d'hiver, il est très difficile d'assurer une formation de l'envergure habituelle au Canada lorsqu'il fait moins 40. La formation se déroule habituellement en janvier, donc nous avons tendance à aller aux États-Unis pour mener les activités dans des conditions étrangement semblables à celles de l'Afghanistan.

Je comprends pourquoi vous avez parlé de « dépouiller ». Je préférerais parler d'une réaffectation judicieuse des ressources là où les efforts doivent être déployés.

Certains soldats dans l'armée sont mécontents de perdre leur véhicule militaire parce que le méchant commandant l'a envoyé à Wainwright pour que d'autres l'utilisent pour s'exercer. C'est bien dommage, mais c'est ainsi que ça va se passer, car nous ne pouvons pas nous permettre d'attendre pour fournir le matériel nécessaire aux gens qui s'en vont outre-mer.

En mon nom, des gens qui travaillent fort à Ottawa rétablissent constamment les priorités et transfèrent de l'équipement partout au pays. Dans une année, nous regroupons des milliers de véhicules pour nous assurer que les personnes qui en ont le plus besoin les ont en temps opportun.

Puisque nous avons actuellement tellement de soldats sur le terrain, ce qui est une bonne chose, dans un certain sens, l'accessibilité des zones de formation et de tir est aussi un problème. Wainwright, en Alberta, est une étape dans le parcours de la préparation au déploiement outre-mer. Il y a beaucoup d'instruction qui est dispensée à Petawawa et à Kingston, en Ontario; à Gagetown, au Nouveau-Brunswick et à Valcartier, au Québec, ainsi de suite.

Le sénateur Day : En tant que commandant des Forces terrestres responsable de la mise sur pied des soldats, croyez- vous que, d'ici peu, vous disposerez d'assez d'équipement pour ne pas être contraint à faire une sélection judicieuse pour déterminer le meilleur endroit où utiliser la quantité limitée d'équipement dont vous disposez?

Lgén Leslie : Je dirais que oui. Il y a eu des contributions aux parcs de véhicules de combat et de soutien de l'armée, et elles ont fait chaud au cœur et ont été très bien accueillies. À juste titre, on envoie outre-mer la plupart des ressources qui offrent une solide protection ou qui sont blindées. Au fil du temps, certains de ces véhicules nous reviendront. On les reconstruira, et ils seront disponibles pour l'instruction au Canada.

Nous sommes en train de retaper beaucoup de nos anciens véhicules de transport du personnel de modèle 113; nous les munissons de quelques milliers de livres de blindage à palettes sur les côtés en plus du blindage du fond de la caisse. Nous nous en servons pour remplacer les véhicules blindés légers, les VBL, qui sont endommagés dans le cadre de l'instruction ou des opérations. Le projet des camions permettra l'introduction de 1 000 à 1 300 véhicules supplémentaires au cours des prochaines années.

J'ai hâte de mettre au point l'art du possible : un véhicule d'assaut d'infanterie mieux blindé, qui sortira en nombres limités au cours des prochaines années. Il y a aussi la question du char de combat principal. Au cours des prochains mois, nous espérons obtenir les 100 chars que vous nous avez aidés — merci — à acquérir de la Hollande pour les retaper au Canada et les intégrer au reste. Ces gros engins sauvent des vies chaque jour.

Je suis certain que dans trois ou quatre années, nous disposerons de beaucoup plus de véhicules que maintenant, et de différents types.

Il y a un problème. Certains types d'équipement sont très rares et onéreux, et nous n'en aurons jamais assez. Par exemple, le système de Capacité d'ouverture d'itinéraire de circonstance, ou COIC, un groupe de trois ou quatre véhicules ultra perfectionnés très spécialisés a pour principale fonction, croyez-le ou non, à une époque où la guerre dépend de la haute technologie, de rouler devant les véhicules de transport de troupes et d'exploser lorsqu'ils passent sur une mine ou des explosifs. Je sais que vous êtes allé en Afghanistan, donc vous avez probablement parlé à ces jeunes et braves ingénieurs qui s'attachent dans ces véhicules et vont sur la route. Si les roues avant passent sur une mine, elles sont expulsées. Le périple est extrême, mais ils se relèvent, s'époussettent et continuent. Je crois qu'un homme a fait l'exercice à trois ou quatre reprises. C'est tout un périple.

Ces machines sont très coûteuses. Nous n'en aurons jamais assez pour les distribuer en fonction de la structure militaire de la guerre froide partout au pays. Nous les déplacerons d'un point à l'autre dans le pays pour qu'ils soient mis à la disposition de ceux qui en ont besoin.

Certains de nos systèmes de défense aériens, qui valent des dizaines de millions de dollars chacun, ne seront pas distribués à tout le monde pour que chacun puisse en disposer à tout moment. C'est l'idée qui sous-tend la disponibilité opérationnelle gérée.

Le sénateur Day : Vous avez mentionné la base des Forces canadiennes à Gagetown. Pour conclure, j'aimerais vous féliciter, vous et le commandant de BFC Gagetown ainsi que le commandant du centre d'instruction au combat pour la célébration du 50e anniversaire qui a lieu au Nouveau-Brunswick. Le moral est excellent dans cette région. Je voulais vous transmettre le message.

Lgén Leslie : Monsieur, je suis désolé d'avoir manqué cette célébration. Comme vous le savez, j'étais en Allemagne avec certains de nos membres d'équipage de chars qui se préparaient à partir.

Le président : La transformation du modèle actuel est en cours depuis environ trois ans. Nous sommes passés d'une situation où le sous-chef d'état-major de la Défense était responsable des opérations et disposait d'un effectif assez restreint; maintenant, cet effectif est divisé en quatre et, de toute évidence, on puise dans les ressources de l'armée, de la Marine et de la Force aérienne pour le constituer. Pour justifier la transformation lorsqu'on l'a annoncée, on a fait valoir qu'elle permettrait de simplifier le système de contrôle, à telle enseigne que les gens de Commandement Canada, lorsqu'il voudraient autoriser des activités, auraient une marche à suivre simple et rapide qui ne supposerait pas beaucoup de consultations. Cette justification s'est-elle avérée? Selon votre expérience de commandant de l'armée, est- ce ainsi que vous voyez les choses?

Lgén Leslie : Comme vous le savez, monsieur, la perspective varie selon l'endroit où l'on est assis. À mon avis, il est très peu probable que quelqu'un ait l'intention d'utiliser des ressources de l'armée sans consulter le commandant de l'armée. J'ai tendance à condamner une telle pratique.

Non pas pour des raisons d'ordre territorial ou des choses fondamentales de ce genre, mais parce que c'est une organisation vaste et complexe de 55 000 personnes, que le sergent-major de l'armée et moi dirigeons en votre nom, au nom de tous les Canadiens; c'est pourquoi, penser qu'on peut bouger les ressources sans qu'il y ait de graves conséquences de second ou de troisième ordre, ce n'est pas raisonnable.

On nous consulte. On nous consulte beaucoup pour partager des visions relatives aux brigades, aux régiments ou aux bataillons de l'armée.

Quant à la complexité du déploiement de la force, je suis certain que cela a facilité la direction des efforts dans le cadre de missions internationales. Selon moi, toutefois, cela n'a pas facilité les interactions entre moi, les quatre commandants opérationnels, les trois chefs des éléments terre, mer, air, et de l'effectif stratégique interarmées.

Le président : Selon un rapport, il y avait double emploi et triple emploi au sein de l'effectif. Avez-vous vécu cela?

Lgén Leslie : Forcément, lorsqu'une chose existe, par définition, dans le cadre d'une organisation vaste et complexe, il faut s'attendre à une certaine mesure de redondance. Je ne sais pas si on peut définir cela comme un double emploi dans le commandement opérationnel, mais je suis plutôt intéressé et préoccupé par le nombre de personnes prélevées dans les bataillons pour aller aux quartiers généraux, parce que je le vois dans mon optique, soit la nécessité d'envoyer des troupes faire des choses sur le terrain.

Le sénateur Nancy Ruth : La perspective varie selon l'endroit où l'on est assis, et me voici : une femme qui siège au comité. Je suis intéressée par l'instruction, surtout à la lumière de la résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations Unies; le Canada a participé à la rédaction et à l'adoption de la recommandation concernant les femmes, la paix et la sécurité. Je tiens vraiment à ce que les soldats connaissent ce texte avant qu'ils partent outre-mer.

Voulez-vous me parler un peu de la façon dont cela s'inscrit dans votre programme et quel type de formation les soldats suivent à cet égard?

Lgén Leslie : Sénateur, je ne sais pas — et je m'en excuse — si l'on dispense une formation particulière fondée sur la résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations Unies.

Je peux vous dire que les soldats ne sont plus définis par leur sexe. J'étais en Allemagne; j'en suis revenu il y a à peine deux heures, et, mardi, j'ai vu deux jeunes cavaliers à l'allure très robuste dans l'un de nos régiments blindés, qui seront déployés outre-mer en tant que tireurs à bord d'un Leopard 2; ce sont eux qui appuieront sur la détente pour lancer un obus de 120 millimètres sur un groupe de vils ennemis.

Comme vous le savez, des femmes soldats sont mortes au combat.

Le sénateur Nancy Ruth : La résolution 1325 aborde la manière dont les soldats vont dans un pays étranger et traitent les civils, surtout en ce qui concerne les femmes, la paix et la sécurité. Si vous pourriez apprendre si on en fait même mention dans votre programme, je vous en serais fort reconnaissante.

Lgén Leslie : Sénateur, je vais le faire.

Le sénateur Nancy Ruth : Nous avons adopté le projet de loi des réservistes. J'imagine que vous êtes heureux. Que peut-on faire d'autre pour vous?

Lgén Leslie : Continuez. Vraiment, cela s'adresse à tous les sénateurs : continuez; continuez à offrir du soutien; continuez à être intéressés. Lorsque nous demandons des choses, nous nous attendons à devoir répondre à toute une série de questions difficiles et, Dieu sait que nous le faisons. Nous allons, et nous faisons ce que vous nous demandez. Le rapport, le lien entre les Canadiens et les forces armées est très fort actuellement. Certains pourraient s'opposer à une mission ou à une autre. Toutefois, ce n'est pas nos affaires; nous faisons ce que nous dit le gouvernement. Nous faisons un bon travail, je crois, somme toute. Il viendra un temps où nous dirons que nous avons besoin de quelque chose. Si nous disons cela, c'est que nous avons de bonnes raisons de le faire. Généralement, soit nous l'avons, soit on nous a laissé croire que nous l'obtiendrons. C'est toute une différence par rapport au temps où j'étais sous-lieutenant il y a 30 ans, lorsque mes principaux soucis consistaient à faire briller mes bottes et ce genre de choses. Nous avons tous fait beaucoup de chemin. Nous avons pris de la sagesse en tant que nation. Je n'ai pas précisément répondu à votre question.

J'aimerais bien avoir plus d'argent, bien sûr. Je suis général.

Le sénateur Nancy Ruth : Vous avez mentionné beaucoup de choses dans vos réponses aux questions, mais je pensais plutôt à une mesure législative qu'à un poste budgétaire.

Lgén Leslie : Nous sommes sur la bonne voie. On a fait du bon travail dernièrement pour que les provinces s'attachent à certaines des questions liées à la loi qui régit la Réserve. Des experts pourraient proposer des façons de peaufiner ces lois — et je ne me compte pas dans cette catégorie — au cours des prochains 12 à 24 mois du premier cycle. J'espère qu'on continuera à entretenir une relation de soutien mutuel avec la Réserve, la force régulière et d'autres personnes des Forces canadiennes.

Je ne peux pas croire que les mots me manquent lorsqu'un sénateur me demande comment elle peut continuer à m'aider. J'imagine que c'est un message en soi.

Le sénateur Nancy Ruth : Je suis heureuse que vous soyez aussi comblé que vous le semblez.

Lgén Leslie : Il y a toujours place à l'amélioration, par contre.

Le sénateur Nancy Ruth : En ce qui concerne les femmes, la paix et la sécurité aussi.

Le sénateur Day : Peut-être que vous ne voudrez pas faire de commentaire sur cette question, mais comme vous le savez, depuis ses débuts, notre comité a fortement milité en faveur des Forces armées canadiennes et du renforcement et de l'accroissement de l'effectif des Forces canadiennes. Nous avons reçu l'un de vos prédécesseurs, qui a dit qu'il ne saurait plus quoi faire de nouveaux fonds. C'est ce qui me vient à l'esprit lorsque j'entends cette question.

Le général a fait remarquer qu'il disposait d'assez d'argent pour faire ce que l'on exigeait de ses troupes, et il ne saurait faire bon usage des fonds supplémentaires que nous pourrions demander pour les Forces armées canadiennes. C'est ce qui sous-tend certaines de ces questions, la question : « Que peut-on faire pour vous? »

Le président : Je ne suis pas sûr que cela était formulé comme une question.

Le sénateur Day : Peut-être voulez-vous dire merci; peut-être voulez-vous dire que, sans égard aux déclarations précédentes, nous aimerions avoir beaucoup d'équipement que nous n'avons pas encore.

Lgén Leslie : Il y a toute une gamme de capacités que moi et l'équipe qui dirige votre armée aimerions avoir. Je ne dis pas cela pour être politiquement correct : selon moi, en tant que commandant de l'armée, soit l'argent s'en vient, soit l'argent a déjà été versé. Il faut peaufiner certains détails ainsi que des questions de soumission concurrentielles qui visent à déterminer le véhicule particulier que nous nous procurerons ou le personnel qui fera le travail de mise à neuf. Toutefois, sur le plan stratégique, ce sont des détails.

Par exemple, j'aimerais que chacun de mes soldats soit muni de lunettes de vision nocturne, ce qui ne semble pas déraisonnable. Cela ne suppose pas une somme d'argent colossale — des dizaines de millions, ce que certains pourraient juger comme une somme considérable, si l'on songe à fournir ce genre de ressources à un si grand nombre de soldats. Nous les achetons aussi vite que possible sur le marché international.

J'aimerais que certains de nos véhicules blindés soient munis de systèmes de défense pour mieux protéger nos soldats. Il y a une pénurie mondiale d'un type de blindage particulier, car bien des gens l'utilisent à divers endroits dans le monde, et nous nous en procurons aussi vite que nous le pouvons. J'aimerais que nos VBL soient améliorés plus vite qu'ils le sont actuellement. La chaîne de montage fonctionne à London et à Edmonton; on fait de l'excellent travail, mais la disponibilité des pièces sur le plan international pose problème. Ce n'est pas juste le Canada qui possède des VBL. Nous avons mis au point un excellent véhicule et nous en avons vendu des milliers aux Américains. Tant mieux pour nous. C'est bien d'avoir de l'équipement avant les Américains. C'est une bonne chose. Faire en sorte qu'ils achètent notre marchandise, c'est encore mieux.

Ce sont des questions de nuance et de détail, mais de mon point de vue de commandant de l'armée, nous devons résoudre les problèmes de personnel; il faut être en mesure de promouvoir nos jeunes, ce qui est un outil de conservation du personnel en soi. Il faut reconnaître l'expérience de combat; nous devons réserver aux soldats une certaine quantité de temps chez eux entre les missions, et toutes ces choses commencent à se concrétiser au sein de l'armée. C'est pourquoi j'essaie de réfléchir. Nous parlons de véhicules d'assaut plus lourds, de véhicules de patrouille blindés. D'après ce que j'ai entendu, ce sont des demandes tout à fait réalisables. Nous avons besoin de nouvelles armes à feu pour remplacer les anciennes, et encore une fois, c'est tout à fait possible. Les résultats finiront par se manifester à l'autre extrémité du système.

Je ne parle pas d'un délai de dix ans; je parle de 18 ou de 12 mois. Le gros problème pour nous, c'est le personnel. De grands nombres de personnes se présentent dans nos centres de recrutement. Ce n'est pas nécessairement un problème qui échoit au gouvernement du Canada; c'est un problème que doivent résoudre les militaires. Nous devons aussi remédier au fait que nos listes d'instruction de base font état de 10 000 jeunes Canadiens compétents, et nous n'avons pas agi de façon assez dynamique ou rapide pour combler nos besoins, afin que ces gens arrivent dans les régiments et les brigades dans un délai raisonnable. Si, durant la prochaine année, nous pouvions couper ce nombre pour le faire passer de 10 000 à 5 000, la plupart de nos inquiétudes seraient dissipées, ce qui est une excellente nouvelle.

Le président : Au nom du comité, général, j'aimerais vous remercier, vous et l'adjudant-chef Ford, d'être venus témoigner. Ces deux heures ont été instructives. Je vous suis reconnaissant de nous avoir aidés dans notre étude. Vos témoignages ont été utiles; vos réponses ont été directes, et nous vous en remercions.

Adjudant-chef Ford : J'aimerais dire, avant que vous ne suspendiez la séance, monsieur le président, que, malgré les difficultés dont vous ont fait part les commandants d'armée aujourd'hui, il fait bon être soldat dans les Forces canadiennes à l'heure actuelle. Lorsque je sors et que je parle aux soldats, le moral des soldats qui servent aujourd'hui dans les Forces canadiennes est au beau fixe. Je suis très fier d'être le sergent-major de l'armée comme commandant du commandement de l'armée.

Le président : Je suis heureux de vous entendre, car nous savons que c'est par vous que passe le personnel enrôlé pour atteindre le leadership, merci beaucoup de votre contribution.

Une dernière chose pour le grand public qui nous regarde : si vous avez des questions ou des commentaires, veuillez consulter notre site web au www.sen-sec.ca. Nous y affichons les témoignages, les rapports du comité et les horaires d'audience confirmés. Sinon, vous pouvez communiquer avec la greffière du comité au 1-800-267-7362 pour de plus amples renseignements ou de l'aide pour joindre les membres du comité.

Chers collègues, pourrais-je avoir une motion pour poursuivre nos travaux à huis clos, s'il vous plaît?

Le sénateur Moore : J'en fais la motion.

Le président : Pour?

Des voix : D'accord.

Le président : Nous poursuivons maintenant nos travaux à huis clos.

La séance se poursuit à huis clos.


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