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Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule 5 - Témoignages du 4 mars 2008


OTTAWA, le mardi 4 mars 2008

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui à 17 h 38 pour étudier, en vue d'en faire rapport, de nouvelles questions concernant son mandat.

Le sénateur Tommy Banks (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Je déclare ouverte cette séance du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Nous avons le plaisir d'accueillir M. Ronald Thompson, FCA, commissaire par intérim à l'environnement et au développement durable; M. Neil Maxwell, vérificateur général adjoint; M. Andrew Ferguson, directeur principal; et M. Richard Arseneault, directeur principal. Nous avons rencontré la plupart de ces témoins lors de précédentes audiences du comité.

Ronald Thompson, FCA, commissaire à l'environnement et au développement durable par intérim, Bureau du vérificateur général du Canada : Merci de nous avoir invités à témoigner cet après-midi. Nous sommes ravis d'être ici pour discuter du chapitre 2 de notre rapport de vérification de 2006 traitant de l'adaptation aux répercussions des changements climatiques.

Comme nous l'avions signalé en 2006, le Canada est vulnérable aux répercussions des changements climatiques et les effets du réchauffement se feront probablement sentir davantage dans les régions du Nord du Canada. La fonte du pergélisol et la réduction de la glace marine transforment déjà de nombreux aspects de la vie des gens du Nord.

En 2006, la commissaire à l'environnement et au développement durable a présenté nos constatations sur la gestion par le gouvernement des changements climatiques. Celles-ci portaient, entre autres, sur la nécessité d'élaborer et de mettre en oeuvre un plan d'action complet, précis et réaliste qui prévoit tant des mesures d'atténuation des gaz à effet de serre que des mesures d'adaptation aux changements climatiques.

Nous avons alors conclu que des mesures immédiates pour faciliter l'adaptation aux changements climatiques pourraient contribuer à protéger la population canadienne et ses biens, et à réduire les coûts que ces changements risquent d'entraîner pour l'économie, la société et l'environnement.

[Français]

Comme vous le savez sans doute déjà, nous avions noté en 2006 que le Canada avait un besoin urgent d'une stratégie d'adaptation, mais que les principaux ministères fédéraux chargés du dossier, Environnement Canada et Ressources naturelles Canada, avaient alors réalisé peu de progrès à cet égard.

Bien que certains ministères aient commencé à élaborer leurs propres stratégies, aucune d'entre elles n'avait été encore approuvée. La collaboration avec les provinces et les territoires et l'utilisation que les administrations faisaient des renseignements disponibles pour évaluer les répercussions des changements climatiques étaient limitées.

En 2006, nous avions également signalé que la population canadienne et les décideurs devaient disposer de meilleures données sur les éventuelles conditions climatiques. Ainsi, il n'y avait pas de renseignements adéquats sur la façon d'adapter la conception des infrastructures telles que les routes et les systèmes d'égouts.

Nous avions constaté qu'il y avait des lacunes graves dans la base de connaissances et que la planification des activités de science du climat en était au point mort.

[Traduction]

Nous avions également recommandé qu'Environnement Canada et le Bureau du Conseil privé déterminent les responsabilités des ministères et organismes fédéraux qui contribuent aux efforts d'adaptation du gouvernement fédéral. Ces ministères et organismes devaient ensuite préciser la façon dont le gouvernement du Canada gérera l'adaptation aux changements climatiques. Le gouvernement avait accepté notre recommandation.

C'est là un exemple du genre de questions que nous nous attendons à trouver dans une stratégie ou un plan fédéral global de développement durable. Vous vous souviendrez peut-être que j'ai parlé de la nécessité d'un tel plan en novembre dernier lorsque j'ai discuté des résultats de notre vérification des stratégies de développement durable.

Pour s'attaquer aux questions complexes de longue haleine telles que l'adaptation aux changements climatiques, il est clair que le gouvernement devra faire preuve de persévérance à long terme. En d'autres mots, il devra travailler avec empressement, d'année en année, sans relâche.

J'aimerais noter que nous n'avons pas effectué d'autre travail de vérification sur ce sujet depuis la publication de notre rapport en 2006. Nous voulons allouer aux différents ministères le temps nécessaire pour mettre en oeuvre nos recommandations avant d'entamer un suivi.

Le comité pourrait jouer un rôle prépondérant en invitant périodiquement les trois ministères responsables du dossier sur l'adaptation aux répercussions des changements climatiques, soit Environnement Canada, Ressources naturelles Canada et Affaires indiennes et du Nord Canada. Ces ministères pourraient alors fournir plus de précisions sur leurs plans et projets pour lutter contre les changements climatiques ainsi que sur la mise en oeuvre des recommandations que nous avons formulées au chapitre 2 de notre rapport de 2006.

Le président : Il se trouve que votre rapport qui met l'accent sur le Nord tombe justement à point et coïncide avec le domaine qui nous intéresse en ce moment puisque nous allons nous rendre dans le Nord. Nous avons décidé de nous pencher sur la question de l'adaptation au changement climatique dans le Nord; et deuxièmement, sur l'incidence du développement industriel et commercial, les deux étant plus ou moins concomitants.

Je m'adresse brièvement aux sénateurs : à la fin de la séance, nous devons tenir une brève réunion à huis clos au sujet de ce voyage parce qu'il y a quelques faits nouveaux que je veux porter à votre connaissance avant que nous allions plus loin dans la planification de notre voyage.

Le sénateur Mitchell : Je vous remercie beaucoup pour votre exposé. Je vous souhaite la bienvenue. C'est très encourageant que vous ayez adopté ce thème. Comme vous le dites, il est nécessaire de travailler « sans relâche » dans ce dossier.

Quand vous avez entrepris l'étude en 2006, comment se fait-il que vous ayez mis l'accent sur l'adaptation au changement climatique ou les répercussions du changement climatique, au lieu de vous pencher sur des initiatives et programmes susceptibles de réduire les émissions, par exemple? Était-ce un choix arbitraire ou a-t-il été dicté par un événement quelconque?

M. Thompson : Je vais répondre brièvement, après quoi je vais céder la parole à Neil Maxwell, qui a dirigé la vérification qui a donné lieu au chapitre 2 en 2006 et d'autres vérifications.

En 2006, la commissaire a déposé au Parlement un rapport dans lequel on abordait un certain nombre d'aspects du changement climatique, celui-ci étant l'un d'eux. Dans notre rapport de l'automne 2006, nous n'avons pas traité exclusivement de l'adaptation au changement climatique; nous nous sommes penchés aussi sur d'autres questions. Je vais maintenant demander à Neil Maxwell de vous parler de ce qui a été fait à l'automne 2006.

Neil Maxwell, vérificateur général adjoint, Bureau du vérificateur général du Canada : Nous avons fait quelque chose d'absolument sans précédent quand nous avons pris la décision, dans le rapport de 2006, de consacrer toutes les ressources du groupe du commissaire à une seule question, le changement climatique. Nous nous sommes penchés à la fois sur l'adaptation et sur une série de mesures d'atténuation. Par exemple, nous avons examiné les progrès accomplis dans le dossier des systèmes de plafond et d'échange au Canada, l'un des éléments clés de Technologies du développement durable Canada et de la gestion globale du dossier du changement climatique. C'était l'un des chapitres; nous aimons qualifier de chapitres les différentes parties du rapport. C'était donc le premier chapitre; le deuxième chapitre était les travaux sur l'adaptation que vous avez sous les yeux. Dans le troisième chapitre, nous avons examiné un certain nombre de programmes précis que RNCan dirigeait pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et beaucoup de portefeuilles énergétiques. C'était donc un vaste effort que nous avons déployé en 2006.

Le sénateur Mitchell : C'est pourquoi vous en êtes arrivés là où vous en êtes maintenant?

M. Maxwell : Oui, il nous a semblé qu'il était extrêmement important d'examiner l'adaptation parce que l'un des engagements pris par le Canada quand il a signé la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques en 1992 était de travailler au dossier de l'adaptation. Tout le monde est au courant des engagements que nous avons pris pour ce qui est de réduire les émissions de gaz à effet de serre, avec les autres pays signataires. Le Canada a pris un important engagement en 1992 et dans le cadre de cette vérification, nous nous sommes demandé dans quelle mesure le Canada progressait à cet égard.

Le sénateur Mitchell : Quand il s'agit de vérifier les progrès réalisés par le gouvernement dans un domaine comme le changement climatique — non pas en ce qui a trait à l'adaptation, mais plutôt le volet réduction des émissions — il me semble que cela doit être relativement difficile, car à partir de quel point de référence pouvez-vous juger les progrès accomplis par le gouvernement?

Par exemple, si la science nous apprend que nous devons réduire les émissions de tel montant et que nos efforts en matière d'émissions permettront de les réduire de la moitié de ce montant, seriez-vous en mesure d'établir le critère scientifique ou bien prendriez-vous comme point de comparaison un critère de Kyoto?

Voici où je veux en venir : le gouvernement dit qu'il va réduire les émissions de 10 ou 12 p. 100 d'ici 2020. Nous savons que ce n'est pas satisfaisant. À certains égards, le gouvernement pourrait aussi bien ne rien faire du tout parce que cela ne résoudra pas le problème. Je ne veux toutefois pas l'encourager dans cette voie. J'exagère aux fins de la démonstration. Que choisirez-vous comme ligne directrice, comme objectif ou comme paramètre à partir duquel vous pourriez juger de l'efficacité ou des progrès accomplis?

M. Thompson : Nous pourrions commencer par tenter de déterminer quelles sont les attentes du gouvernement. Dans ce cas particulier, c'est de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Si les attentes du gouvernement ne sont pas claires, nous attirons l'attention là-dessus parce que, à moins de savoir exactement ce qu'on tente de réaliser, on n'a aucun moyen de savoir si ce que l'on a fait à ce jour est un succès ou un échec. Nous commençons par les attentes en matière de réductions. Si le gouvernement a établi des attentes en matière de réductions, alors nous vérifions si le gouvernement a un système lui permettant de vérifier les réductions qui sont réellement attribuables aux programmes mis en place. Si le gouvernement n'a aucun processus pour faire un suivi des réductions au fil des années, alors nous attirons l'attention là-dessus en formulant des critiques.

Si le gouvernement a établi des attentes et a mis en place un mécanisme pour vérifier les progrès accomplis, alors nous examinons le degré de réussite au cours de chaque année, ou peut-être pour chaque période de trois ans. De telles mesures prennent du temps à se répercuter sur l'économie et l'écologie. Nous ferions une vérification de la manière dont le gouvernement fait rapport de cette information au Parlement et aux Canadiens. Si tout cela était clair, alors nous tenterions d'obtenir l'assurance que ce que le gouvernement signale en matière de réductions réalisées correspond bel et bien aux réductions effectivement réalisées.

C'est ainsi que nous nous y prendrions. Nous ne tenterions pas de convaincre le gouvernement que l'objectif qu'il s'est fixé ne convient pas. Il nous semble que c'est au Parlement qu'il incombe d'établir de tels objectifs. Cependant, une fois les cibles établies, nous vérifierions dans quelle mesure le gouvernement n'a pas atteint la cible.

Le sénateur Mitchell : Dans le projet de loi C-288, Loi de mise en oeuvre du Protocole de Kyoto, on prend un engagement en ce sens que le Parlement du Canada a dit au gouvernement qu'il doit mettre en place un plan pour réduire les émissions de 6 p. 100 par rapport au niveau de 1990. Or, le gouvernement a proposé un plan dans lequel on prend les émissions de 2006 comme point de départ.

Nous sommes en présence de deux étapes. Il vous faudrait décider de faire une vérification de ce domaine particulier parce qu'il semble que vous ayez un nombre infini de dossiers à vérifier. Cependant, cette décision viendrait plus facilement au commissaire à l'environnement qu'à la vérificatrice générale. Cela semblerait pertinent. Vous devez donc décider de faire la vérification et ensuite la mener à bien. Est-ce que c'est quelque chose que vous envisagez de faire?

M. Thompson : C'est curieux que vous posiez la question. La Loi de mise en oeuvre du Protocole de Kyoto exige que nous fassions une vérification au moins tous les deux ans et, aux termes de cette loi, nous serons probablement obligés d'en faire trois. Nous publierons un rapport en mai prochain et le suivant devra être publié au plus tard le 22 juin 2009.

À l'heure actuelle, nous sommes en train d'examiner comment nous allons faire les vérifications que nous avons au menu pour l'année prochaine. Nous y avons réfléchi et nous devrons poursuivre cette réflexion. Nous avons rencontré les responsables d'Environnement Canada qui, chaque année, intègrent les rapports et le plan. Nous avons à l'esprit le rapport de la Table ronde nationale sur le premier plan, dans lequel on critiquait très sévèrement les cibles individuelles, ligne par ligne, qui avaient été fixées pour chacune des mesures envisagées. Quoi qu'il en soit, nous réfléchissons actuellement à la manière dont nous allons assumer notre responsabilité.

Nous nous posons notamment la question suivante : y aura-t-il des réductions réelles et vérifiables d'ici mai 2009. Il est possible qu'il n'y en ait pas, faute de temps. Nous ne le savons pas encore. En mai 2011, deux ans plus tard, nous devrions avoir des renseignements clairs sur les réductions.

Nous étudions cela actuellement et nous réfléchissons à la manière dont nous pouvons remettre au Parlement, comme nous y sommes tenus par la loi, un rapport qui sera riche en informations et qui aidera à faire avancer le dossier.

Le sénateur Milne : Commissaire Thompson, je suis plutôt découragé par votre déclaration. Vous dites en particulier au paragraphe 6 : « En 2006, nous avions également signalé que la population canadienne et les décideurs devaient disposer de meilleures données [...] » Au paragraphe 10, vous dites que vous n'avez pas effectué d'autre travail de vérification sur ce sujet depuis la publication de votre rapport en 2006. Ensuite, vous nous demandez essentiellement de le faire à votre place. Nous nous ferons un plaisir de vous aider dans toute la mesure de nos moyens. Par contre, nous ne devrions pas faire le travail à votre place.

M. Thompson : Je suis entièrement d'accord, sénateur, et ce n'est pas le message que je vous transmets aujourd'hui. Nous avons actuellement du travail qui est en cours dans le dossier du changement climatique. Nous travaillons à la Loi de mise en oeuvre du Protocole de Kyoto, comme je l'ai dit il y a un instant. Nous avons une vérification qui sera probablement publiée en novembre prochain. M. Richard Arseneault, du Bureau des stratégies, vérifications et études en matière de développement durable, est chargé de ce rapport sur les émissions atmosphériques, y compris les émissions de gaz à effet de serre. Nous essayons de faire un suivi des progrès accomplis par le gouvernement à cet égard. Le rapport publié par le précédent commissaire à l'automne 2006 fera l'objet d'un suivi rigoureux et d'un nouveau rapport dans deux ans.

Nous devons donner au gouvernement suffisamment de temps pour prendre des mesures. Maintenant, cela dit, nous sommes certainement actifs pour ce qui est de vérifier le changement climatique et le travail accompli par le gouvernement à cet égard. C'est simplement que nous n'en sommes pas encore au point où nous pouvons faire rapport des résultats, parce que le travail n'est pas fini.

Pour ce qui est de demander à votre comité de convoquer comme témoins ces trois ou peut-être quatre ministères, une importante constatation qui figure dans le chapitre 2 du rapport de 2006 était qu'il n'existe aucune stratégie globale chapeautant l'ensemble des efforts déployés par le gouvernement dans le domaine de l'adaptation au changement climatique. Cela n'existait pas en 2006. Nous ignorons si une telle stratégie a été mise en place. Nous ne pouvons pas le faire. Cependant, ces trois ou quatre ministères le peuvent assurément. S'ils ne l'ont pas déjà fait, il serait utile, pour accélérer le processus d'ensemble, si votre comité, à supposer que vous soyez disposés à le faire, les oblige à rendre des comptes. Vous pourriez dire : Vous avez accepté de faire cela il y a un certain nombre d'années, deux années ont passé, alors qu'est-ce qui a été fait?

Le sénateur Milne : Autrement dit, vous n'obtenez pas de réponse. N'avez-vous pas accès aux ministres de ces ministères?

M. Thompson : Certainement, sénateur, mais nous n'avons pas encore complété le suivi sur la teneur de notre rapport de 2006.

La raison pour laquelle je demande à votre comité et à d'autres aussi de convoquer ces ministères, c'est que nous avons besoin de temps pour terminer notre travail de vérification et que, dans l'intervalle, eh bien, le temps file, comme on dit. Je ne suis pas certain que cette stratégie globale ait été élaborée. Elle devrait être en place à l'heure qu'il est. J'ai appris par expérience, depuis 31 ans que je travaille dans ce domaine, que les dossiers débloquent quand les comités et les parlementaires disent qu'ils veulent que le travail avance. C'est pourquoi nous sommes toujours prêts à venir témoigner devant votre comité en tout temps, sans préavis. C'est vous qui êtes les catalyseurs de l'action.

Le sénateur Milne : Je crois savoir que le gouvernement a annoncé un nouveau budget pour les programmes d'adaptation en décembre dernier. Était-ce un progrès considérable, ou bien est-il nécessaire que la stratégie soit mise en place d'abord, avant que les fonds puissent être utilisés à bon escient?

M. Thompson : Sénateur, je suis content que vous ayez mentionné cela. Je crois que le gouvernement a annoncé 85,9 millions de dollars. J'ignore si cet argent est destiné à la stratégie pour l'ensemble du gouvernement que nous réclamions en 2006. Nous venons tout juste de commencer à examiner cela.

C'est justement la question que je poserais à ces trois ou quatre ministères. Si ce n'est pas cela, alors de quoi s'agit-il? Pouvez-vous ou devriez-vous, au gouvernement, dépenser 85,9 millions de dollars sans savoir exactement où vous allez? Je me pose la question. Ce sont des questions que ces fonctionnaires devraient se faire poser par des parlementaires qui se soucient du dossier et auxquelles ils devraient répondre.

Le sénateur Trenholme Counsell : Je vous remercie d'être venu discuter avec nous d'un sujet aussi important. Vous êtes manifestement bien informé au sujet de notre situation au Canada. Vous avez piqué mon intérêt quand vous avez discuté de l'infrastructure comme les routes et les égouts et des liens avec les provinces qui contrôlent la conception et la réglementation dans ce domaine.

Je veux vous interroger sur les graves lacunes dans nos connaissances. Vous avez consacré la plus grande partie de votre exposé au plan d'adaptation; mais pourriez-vous décrire ou même seulement énumérer quelques-unes de ces lacunes dans nos connaissances, en particulier celles qui sont les plus cruciales?

M. Maxwell : Les lacunes dans nos connaissances prennent plusieurs formes différentes. La plus fondamentale est la question de savoir si nous en savons suffisamment, grâce à la surveillance continue de notre climat, pour être en mesure d'effectuer la modélisation nécessaire. L'une de nos préoccupations dans le cadre de cette vérification était qu'Environnement Canada, qui est responsable du réseau de surveillance, n'avait pas évalué quels étaient ses besoins quant à un réseau pour appuyer l'adaptation. Tout commence par là. Les lacunes dans nos connaissances se situent également au niveau de questions plus concrètes et d'ordre pratique. Vous avez dit que ce dossier relève en grande partie des compétences provinciales, ce qui est vrai. Nous avons critiqué Environnement Canada, qui est chargé de prendre toute l'information disponible et d'en tirer des conclusions sur le plan pratique. Par exemple, en termes de changement climatique, on sait que la gravité et la fréquence des événements météo extrêmes seront accentuées à l'avenir. Les municipalités doivent donc concevoir des réseaux de canalisation d'évacuation des eaux capables d'accepter un volume accru. Environnement Canada n'avait pas fait de mise à jour à cet égard depuis bon nombre d'années. Ce ne sont là que deux exemples.

Notre argument au sujet des lacunes dans le savoir était de portée plus étendue. Cela revient à ce que disait le commissaire au sujet de l'absence d'une stratégie : on ne sait pas vraiment de quelle information on a besoin tant qu'on n'a pas établi ses priorités. Si le gouvernement fédéral considère que l'un de ses rôles fondamentaux est de veiller à ce que les municipalités aient une information à jour, cela oriente les recherches et le savoir dans une certaine direction. S'il décide que sa priorité est différente, cela oriente la quête d'information dans une autre direction. Presque tous les aspects de cette problématique pointent vers l'absence d'une stratégie gouvernementale et le fait que l'on ne sait pas exactement quel est notre objectif en fait d'adaptation.

Le sénateur Trenholme Counsell : Comme nous irons dans le Nord, la question de l'adaptation me préoccupe et, chose compréhensible, je l'ai abordée quelque peu sous l'angle médical. Pourriez-vous nous indiquer plusieurs domaines clés où il faut examiner l'adaptation des gens et des communautés et en discuter? Pourriez-vous me dire quelles rubriques figurent en tête de votre liste?

M. Maxwell : Si le comité décide de tenir des audiences et de recevoir des représentants des ministères, il pourrait être intéressé à prendre connaissance de plusieurs travaux qui font autorité et qui sont l'oeuvre de scientifiques, et non pas de vérificateurs. J'ai apporté aujourd'hui un document du Arctic Climate Impact Assessment. C'est un rapport de 2004. C'est un groupe de plusieurs centaines de scientifiques, un effort d'envergure mondiale, essentiellement pour rassembler toutes les connaissances de la communauté scientifique au sujet des répercussions du changement climatique dans l'Arctique. C'est circumpolaire et ce n'est donc pas limité au Canada; c'est un effort international.

Le sénateur Spivak : Pardon, en quelle année avez-vous dit?

M. Maxwell : C'est un rapport qui date de 2004-2005. Nous sommes des vérificateurs et ils sont des scientifiques. Nous n'avons pas l'expertise voulue pour vérifier des travaux scientifiques et nous ne prétendons nullement posséder une telle expertise. Ce rapport a été cité très généralement comme source d'information faisant autorité sur les répercussions en question. Comme je l'ai dit, plusieurs centaines de scientifiques y ont travaillé. Nous citons certains de leurs exemples dans notre propre rapport, mais le leur est beaucoup plus approfondi.

Sur le plan des répercussions sociales, la communauté scientifique est préoccupée par les répercussions sur les peuples autochtones, et il en est longuement question dans ce rapport. Par exemple, l'amincissement de la banquise va perturber les activités de chasse; on s'inquiète au sujet des mammifères qui vivent sur la glace, par exemple le phoque annelé. On s'inquiète beaucoup des conséquences sur la culture autochtone et les activités traditionnelles de chasse et de cueillette. Dans le même ordre d'idées, on s'inquiète aussi des répercussions du changement climatique sur les hardes de caribous. Je n'entrerai pas plus avant dans les détails, sauf si cela vous intéresse, mais il s'agit de l'incidence du climat sur les habitudes migratoires, en particulier chez le caribou.

Bon nombre des répercussions sociales dont on a discuté dans la communauté touchent les peuples autochtones. Dans bien des cas, ce sont des répercussions économiques; bien sûr, quand l'économie est touchée, tout le monde est touché.

Quand on s'entretient avec des experts dans ce domaine, l'une des plus vives inquiétudes concerne probablement ce qui se passe quand le pergélisol fond. Dans le Nord canadien, une grande partie de l'infrastructure — immeubles, pistes d'atterrissage, routes, pipelines et égouts — est bâtie en posant l'hypothèse que le pergélisol sera toujours gelé en permanence. C'est l'une des grandes inquiétudes, car le pergélisol est déjà en partie fondu.

M. Thompson : Un autre problème plus pointu est celui des routes aménagées sur la glace. Durant l'hiver, le seul moyen de transporter des quantités appréciables de matériel à partir d'une ville comme Yellowknife vers les mines de diamant situées plus au Nord, c'est d'emprunter les routes de glace. La saison d'hiver durait auparavant 18 semaines ou plus. Avec le réchauffement planétaire, la saison est maintenant d'environ huit semaines et elle pourrait se raccourcir encore beaucoup à l'avenir. Si l'on peut transporter le matériel de Yellowknife jusqu'à une mine de diamant pendant seulement huit semaines au lieu de 18, s'il faut tout transporter par avion le reste du temps, le coût est énorme. Si la saison des routes de glace est plus courte, cela augmente d'autant le coût des activités commerciales dans le Nord. Par conséquent, certaines entreprises qui emploient beaucoup de gens dans le Nord sont en difficulté. Là aussi, le problème fait boule de neige.

Par ailleurs, il pourrait être intéressant de discuter avec les gens de l'attitude des Autochtones dans le Nord, qui doivent mettre dans la balance à la fois le changement climatique et le développement économique. Ils veulent des emplois, eux aussi. À quoi sont-ils prêts à renoncer pour avoir la garantie de conserver leurs emplois?

La situation est complexe dans le Nord. Le concept des routes de glace nous est parfois totalement étranger pour nous, à Ottawa, quoique cet hiver, nous n'en sommes peut-être pas très loin. C'est certainement une réalité importante partout dans le Nord.

Le sénateur Spivak : Dans quelle mesure pouvez-vous être pointu quant aux chiffres? Je comprends que vous ne pouvez pas remettre en question la politique du gouvernement, mais en matière d'adaptation, allez-vous demander quel est l'échéancier? C'est une considération essentielle. Si l'on attend trop longtemps, les routes de glace pourraient devenir parfaitement secondaires, en comparaison de ce qui pourrait arriver au Gulf Stream.

Les cibles du gouvernement pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre ont été critiquées partout, même par des gens comme l'Association canadienne des producteurs pétroliers, l'ACPP. Vous examinez les cibles; allez-vous examiner aussi les méthodes utilisées pour atteindre ces cibles, en vérifiant les chiffres et les possibilités correspondantes? Vous êtes des spécialistes des chiffres, mais il y a différentes manières de jongler avec les chiffres. Pouvez-vous faire des calculs savants qui mettront en lumière le succès ou l'échec éventuel de ces mesures?

M. Thompson : J'ai dit tout à l'heure que le but de la vérification était de voir ce que le gouvernement entendait accomplir avec un programme particulier. Les intentions, ou ce que nous appelons les attentes, doivent à notre avis être claires et mesurables dans toute la mesure du possible. Très souvent, il est possible de mesurer tout cela. Cela se situe au tout début de la mise en oeuvre d'un programme.

Si nous constatons qu'on a mis en place un programme sans avoir mesuré les attentes qui y sont associées et l'échéancier prévu pour les réaliser, nous n'hésitons pas à critiquer vertement ce programme.

Si le programme mis en place s'accompagne d'attentes mesurables, nous vérifions qu'il y a des attentes à court, moyen et long terme. Dans le cas du changement climatique, comme nous l'avons dit dans l'exposé, c'est une problématique à long terme. Il faut que le gouvernement du Canada soit animé d'un sentiment d'urgence pour s'attaquer à ce problème énergiquement et sans relâche pendant très longtemps afin d'obtenir un changement.

Il ne sert à rien de dire que l'on va faire quelque chose d'ici deux ans. C'est important de savoir si l'on est ou non dans la bonne voie, mais il faut avoir une idée de ce que l'on tente d'obtenir à court, moyen et long terme. Dans un dossier comme celui du changement climatique, c'est à long terme qu'un véritable changement peut intervenir, à l'avantage de nos enfants et petits-enfants.

Si l'on a mis en place des attentes mesurables et clairement énoncées, nous tentons d'en faire la vérification.

Si les responsables ont fait preuve de négligence en énonçant les attentes, s'ils se sont contentés de lancer des chiffres un peu au hasard, nous sommes alors très critiques. Si les attentes sont bien réfléchies, élaborées le plus soigneusement possible, compte tenu des techniques disponibles en matière d'estimation et de prévision, nous faisons un suivi de ces attentes au fil des années.

Si les chiffres publiés au fil des années en matière de réduction réelle sont raisonnables comparativement aux attentes à court, moyen et long terme, nous allons le dire. Autrement dit, nous dirons que le public peut faire confiance au rapport du gouvernement qui montre qu'au fil des années, les émissions de gaz à effet de serre ont diminué dans telle ou telle proportion.

Nous avons beaucoup de travail à faire pour être en mesure de faire des interventions pointues, mais je vous prie de me croire : tout le long du cheminement, nous serons le plus pointus possible.

Le sénateur Spivak : Si vous prenez connaissance de l'objectif d'une compagnie à échéance de dix ans et si vous constatez que les moyens que cette compagnie entend prendre pour atteindre cet objectif sont mauvais, n'informerez- vous pas la compagnie qu'elle a fait fausse route? À titre de comptables agréés ou de spécialistes des chiffres, n'iriez- vous pas aviser la compagnie de l'existence d'un tel problème? Voilà où je veux en venir.

M. Thompson : Je vais faire une observation avant de céder la parole à M. Maxwell. C'est courant dans le cadre d'une vérification législative. Nous le faisons constamment. Nous vérifions la qualité de la gestion.

Dans ce cas particulier, si des attentes, des objectifs ou des cibles ont été établis et que le ministère que nous vérifions a mis en place, pour atteindre ses objectifs, une structure de gestion que nous savons insatisfaisante, nous le disons. Est- ce que je me trompe, monsieur Maxwell?

M. Maxwell : Pas du tout.

Il n'y a probablement pas de meilleur exemple que celui de ce rapport de 2006. Pour passer en revue la chronologie des événements, la question était : ce gouvernement n'avait-il pas un engagement clair et un objectif clair? La réponse était bien sûr affirmative; le gouvernement s'était engagé à atteindre l'objectif de Kyoto. Nous nous sommes exprimés très clairement et avons été très critiques envers le gouvernement dans ce rapport, dont nous sommes particulièrement fiers. Nous avons dit que le gouvernement était tout simplement mal parti pour remplir cette obligation. Comme dans votre analogie avec le monde des affaires, nous sommes intervenus pour dire que non seulement le gouvernement n'est pas sur la bonne voie pour atteindre cet objectif, mais qu'en plus, les mesures prises pour tenter de l'atteindre sont clairement déficientes.

Nous convenons que lorsqu'un gouvernement prend une décision en matière de politiques et fixe une cible déterminée, si les interventions et le débat public inclinent à dire que ce n'est pas suffisant et que la cible devrait être plus ambitieuse, nous sommes d'avis que ce sont là des questions extrêmement importantes. Cependant, beaucoup d'institutions peuvent répondre à ces questions, par exemple la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie.

D'autre institutions ont nourri un débat public très animé sur ce sujet, comme nous le savons tous. À nos yeux, notre tâche est très pointue : s'assurer que les politiques et les décisions prises par le Parlement sont bien mises en oeuvre. C'est ce à quoi nous travaillons avec acharnement. Ce sont nos efforts à cet égard qui ont débouché sur ces rapports de vérification et qui, espérons-le, ont apporté une certaine valeur ajoutée.

[Français]

Le sénateur Nolin : Dans votre rapport 2006, vous faites état de la qualité du travail au ministère des Affaires indiennes. Vous notez dans votre rapport qu'ils attendent l'autorisation gouvernementale, pour procéder à cette mise en place.

À votre connaissance, depuis la publication du rapport, ont-ils obtenu ces autorisations? Sinon, quelle est la cause de cette non-action? Si oui, pouvez-vous nous en parler?

[Traduction]

M. Thompson : Franchement, nous ne savons pas s'ils ont reçu cette autorisation. Le chapitre 2 raconte l'histoire troublante de trois grands ministères fédéraux qui sont responsables de mettre en place des mesures raisonnables en matière d'adaptation au changement climatique. D'une manière ou d'une autre, ce que je retiens de ce chapitre, c'est que les trois n'ont pas pu accorder leurs violons, pour parler sans détour. J'ignore pourquoi ils n'ont pas pu accorder leurs violons. Quand il s'agit d'une grande initiative gouvernementale, un élément fort important est un engagement ferme aux échelons les plus élevés au gouvernement. Cet engagement était-il suffisamment ferme en 2006? Je l'ignore. J'ai tendance à en douter, compte tenu de ce que nous avons constaté. Quant à savoir s'il existe ou pas aujourd'hui, nous cherchons, mais nous ne le savons pas encore.

[Français]

Le sénateur Nolin : Si je comprends bien, vous avez là un ministère qui prend ses responsabilités et qui décide de pousser au maximum la prise en charge de cette responsabilité. Mais à cause d'une mauvaise appréciation plus globale du gouvernement, dont plusieurs ministères qui doivent interagir, votre bonne volonté s'en trouve neutralisée. C'est ce que je comprends de la situation.

[Traduction]

M. Thompson : Je dois faire des conjectures, mais je pense que c'est assez proche de la vérité. C'est peut-être ce qui s'est passé. Ce qu'il y a, c'est que le MAINC est vraiment responsable de tout ce qui se passe au Nord du 60e parallèle, dans le territoire que le comité va visiter.

Si vous examinez l'adaptation au changement climatique au Nord du 60e, il est certain que le MAINC a un rôle majeur à jouer. L'adaptation au changement climatique a une incidence sur le pays tout entier. C'est là que d'autres ministères entrent en jeu, par exemple RNCan, Environnement Canada et peut-être Santé Canada.

Il est certain qu'il est nécessaire, à notre avis, de déployer un effort concerté de la part de plusieurs ministères pour en arriver à un plan raisonnable en ce qui a trait à l'adaptation au changement climatique.

L'une des grandes questions que nous nous posons, c'est de savoir si les 85,9 millions de dollars qui ont été annoncés en décembre correspondent ou pourraient déboucher sur la stratégie globale que nous réclamions il y a deux ans.

Nous ne le savons tout simplement pas, mais il est certain que c'est une question clé qui pourrait et devrait être posée à ces trois ou quatre ministères.

[Français]

Le sénateur Nolin : Monsieur Maxwell, avez-vous de l'information additionnelle?

[Traduction]

M. Maxwell : Je n'ai pas d'autres détails, sauf que c'était très troublant — pour reprendre un point souligné par le commissaire — que RNCan et Environnement Canada n'aient pas établi clairement la répartition des rôles entre les deux ministères. Nous signalons dans notre rapport une tendance récurrente : un ministère dépense beaucoup d'argent des contribuables pour élaborer une ébauche de stratégie, la développe jusqu'à un certain point et y travaille pendant un an ou un an et demi, après quoi tout reste bloqué. Très souvent, cela bloque faute d'une entente entre les deux ministères clés quant à la manière dont il faut s'attaquer au dossier de l'adaptation.

Nous documentons trois efforts différents de ce genre; un qui mettait en cause les provinces et deux autres qui étaient des tentatives à l'intérieur de l'appareil fédéral pour élaborer une stratégie. Les trois fois, on a essayé, et ce fut un échec dans les trois cas.

[Français]

Le sénateur Nolin : Essayons d'être un peu plus précis. En 2006, vous nous rapportez que le ministère des Affaires indiennes et du Nord a développé une stratégie assez élaborée, mais est arrêté parce qu'il y a des autorités supérieures qui ne leur donnent pas l'autorisation d'aller de l'avant.

D'après votre réponse, deux autres ministères sont peut-être bousculés parce que Affaires indiennes et du Nord a déjà bougé dans un sens tandis qu'eux ne sont peut-être pas rendus à cette vitesse de croisière.

Depuis 2006, avez-vous de l'information sur ce qui se passe? Il est quand même troublant de constater qu'un ministère veut aller de l'avant pendant que deux autres ministères veulent que vous arrêtiez votre réflexion sous prétexte que vous touchez à leurs responsabilités.

M. Maxwell : Nous n'avons pas de mise à jour concernant la situation au ministère des Affaires indiennes et du Nord.

[Traduction]

Ce sont d'excellentes questions à poser au ministère. Encore une fois, cela nous ramène à la même notion.

Quand nous avons terminé la vérification et formulé les recommandations, nous avions hâte d'avoir une discussion comme celle que nous avons aujourd'hui. Nous avions très hâte que les parlementaires posent ces questions aux représentants des ministères. Comme l'indique la discussion d'aujourd'hui, je crois que les sous-ministres de ces trois ministères devraient répondre à des questions pointues et la vôtre est certainement l'une des questions à poser.

Le président : Notre comité a fait de temps à autre des observations sur ce malaise, quand on ne sait pas trop bien qui est aux commandes; en fait, si personne n'est aux commandes à ce niveau-ci, ces gens-là ne passent pas à l'action. Plus précisément, il y avait une organisation informelle comprenant des sous-ministres et des sous-ministres adjoints qui étaient censés, d'après ce que nous avions compris à un moment donné, se pencher sur tous ces dossiers ayant à voir avec l'environnement, l'écologie, le développement durable, et cetera.

Êtes-vous au courant de ce groupe et savez-vous s'il est actuellement actif?

Richard Arsenault, directeur principal, Bureau du vérificateur général du Canada : Au chapitre 1 du même rapport, nous nous sommes penchés sur la question de la gouvernance. L'adaptation au changement climatique est un dossier horizontal de développement durable. Beaucoup d'intervenants sont en cause. Nous avons tenté de comprendre comment ils travaillaient ensemble. Avaient-ils mis en place une structure pour coordonner leurs efforts? Cette réflexion a évolué avec le temps.

À un moment donné, ils avaient un secrétariat qui était censé exercer un contrôle continu et faire rapport sur les dépenses. Il a été démantelé et remplacé par un organisme au Conseil du Trésor, lequel a commencé à agir. D'après nos renseignements les plus récents, qui n'ont pas encore fait l'objet d'une vérification, ce groupe de coordonnateurs centraux chargés de l'intégration horizontale se situe à Environnement Canada. Nous ne sommes pas certains que ce soit bien le cas, mais c'est ce que nous déduisons de nos renseignements les plus récents.

En termes d'adaptation, d'après les derniers renseignements, il y a deux ministères directeurs, Environnement Canada et Ressources naturelles Canada. Quand nous nous sommes penchés sur ce dossier dans le passé, les deux ne travaillaient pas bien ensemble. Encore aujourd'hui, ils continuent d'y travailler. Nous ne savons pas encore quel est le résultat de leurs efforts parce que nous n'avons pas fait de vérification. Nous prévoyons faire très bientôt un important rapport de suivi sur le changement climatique, mais nous ne l'avons pas encore fait. Nous donnons du temps aux ministères pour mettre en oeuvre nos recommandations.

Le monde change. Nous avons un gouvernement différent qui a une approche différente. Il y a un nouveau plan. Nous devrons examiner tout cela et en faire une analyse approfondie. Nous pouvons faire une comparaison avec d'autres pays pour voir ce qu'ils font et fournir cette information aux parlementaires. Cette comparaison offre également des possibilités intéressantes.

M. Thompson : Nous allons déposer jeudi un important rapport d'étape.

Nous avons constaté, et cela ressort clairement de ce rapport d'étape, que les ministères peuvent travailler ensemble. Nous en avons vu des exemples au fil des années. Il y a trois ou quatre éléments qui doivent être en place pour cela. Les ministères doivent avoir un engagement ferme au niveau de la haute direction; c'est essentiel. Il faut des instructions claires des cadres supérieurs à l'ensemble de l'organisation. Il faut aussi des objectifs réalistes. Nous avons parlé d'attentes à court, moyen et long terme. Ces attentes doivent être réalistes, réalisables et acceptables. Bien sûr, il faut obligatoirement un financement suffisant.

Quand tous ces critères sont respectés, notre gouvernement peut faire de grandes choses. Cependant, quand l'un ou plusieurs de ces facteurs sont absents, il devient très difficile de progresser, en particulier dans des situations où les ministères doivent travailler ensemble. Ce n'est pas toujours facile, mais cela a déjà été fait dans le passé. Il existe des preuves solides d'une telle collaboration.

Le sénateur Nolin : Quand les ministères demandent leurs budgets annuels, pourquoi personne ne demande-t-il ce qu'ils font de l'argent?

Le président : Cette fonction existait autrefois non seulement pour les budgets de développement durable, mais pour l'ensemble des budgets ministériels. Sous le gouvernement de M. Mulroney, il existait un organe de ratification semblable au Conseil du Trésor. Aucun effort n'était déployé à moins d'avoir été approuvé au préalable.

Le sénateur Nolin : Oui, M. Bouchard avait créé cela. C'était censé être l'équivalent de la réunion du jeudi matin du Conseil du Trésor, mais pour l'environnement.

Le président : Exactement. Si ce n'était pas satisfaisant, c'était bloqué net.

Le sénateur Nolin : Au Parlement, quand les ministères demandent de l'argent, ils ont toujours des plans et des projets. Nous avons un comité sénatorial qui se penche sur les finances, le montant dépensé, pourquoi on le dépense, et cetera. Tous les responsables comparaissent et ils sont très polis.

M. Thompson : C'est une autre excellente question. Beaucoup d'entre vous se rappelleront qu'il y a bon nombre d'années, le gouvernement a créé la partie III du Budget des dépenses dans un effort pour présenter au Parlement des plans de dépenses détaillées et des attentes qui devaient servir de base d'évaluation comptable, à la fin de l'année, pour voir ce qui avait été fait de l'argent. Ces documents se sont transformés en rapports ministériels sur le rendement présentés après le fait et en rapports sur les plans et les priorités qui sont présentés avant le fait.

Le système est devenu un peu plus perfectionné, mais le même principe s'applique; c'est-à-dire que l'on donne de l'information aux parlementaires avant le début de l'année pour qu'ils puissent avoir une idée de ce que le ministère tente d'accomplir avec l'argent demandé. Après la fin de l'année, les rapports ministériels sur le rendement constituent une tribune permettant aux ministères de rendre des comptes aux parlementaires, par exemple devant votre comité, au sujet de ce qu'ils ont accompli.

La situation s'améliore. Nous y travaillons depuis probablement 30 ans. Ce n'est toujours pas l'idéal, mais c'est mieux. Ces rapports deviendront toutefois meilleurs si les parlementaires les utilisent.

Quand les représentants des ministères se présentent au Parlement avec des rapports sur les plans et les priorités, ils expliquent ce qu'ils espèrent réaliser avec l'argent qu'ils ont demandé. Si les comités parlementaires veulent que les ministères leur expliquent exactement ce qu'ils prévoient accomplir, les comités mettent les porte-parole sur la sellette et leur posent des questions pointues, justement pour les raisons dont nous avons parlé tout à l'heure. Les parlementaires peuvent demander par exemple : comment savez-vous que votre plan est réaliste et qu'il permettra d'atteindre l'objectif fixé? Les ministères ont-ils fait la preuve qu'ils ont procédé à la réflexion voulue pour se prononcer avec une certaine confiance sur ce qu'ils entendent accomplir l'année prochaine, l'année d'après et l'année suivante?

Il y a un mécanisme en place. L'architecture de gestion et l'architecture comptable sont en place. Tout cela commence à fonctionner, mais devrait fonctionner encore mieux.

Le sénateur Nolin : Je suis certain que le mot « stratégie » apparaît probablement 100 fois dans ces documents.

Le président : Oui, sénateur, et il est suivi des mots « développement durable ».

Le sénateur Nolin : Oui, et aussi des mots « efficient » et « efficace ». C'est probablement à ce niveau que nous pouvons intervenir de manière assez énergique pour fouiller au-delà des bonnes intentions du témoin.

M. Maxwell : À ce sujet, pour faire suite à ce que le commissaire a décrit, si vous êtes intéressé, le Bureau du vérificateur général a publié un document qui est destiné aux parlementaires. Ce document décrit le processus du Budget des dépenses; le rôle que les parlementaires peuvent jouer; et on y explique comment utiliser les outils qui sont à la disposition des parlementaires, notamment les rapports du commissaire, les rapports du vérificateur général, et cetera.

Nous avons eu de très bonnes réactions des parlementaires. Si cela vous intéresse, nous vous en enverrons avec plaisir des exemplaires, ou bien nous pouvons prendre des arrangements pour que quelqu'un vienne vous faire un exposé sur cette question.

Le sénateur Nolin : Nous aussi, nous avons des responsabilités linéaires. Ce n'est pas exactement la tâche de notre comité de faire cela.

Le président : Je suis sûr que nous avons déjà reçu ce document. Cela m'a échappé et je vous serais très reconnaissant, monsieur Maxwell, si vous pouviez envoyer une douzaine d'exemplaires de ce document à la greffière, si vous en avez de disponibles.

M. Maxwell : Nous nous ferons un plaisir de le faire.

Le sénateur Cochrane : Vous avez fait un rapport de vérification en 2006. Votre prochain rapport sera publié jeudi, n'est-ce pas?

M. Thompson : Oui.

Le sénateur Cochrane : Dans l'intervalle, est-ce que vous demandez au gouvernement de produire un rapport d'étape quelconque pour vérifier ce qui a été fait à la suite de votre première vérification?

M. Thompson : À partir de la vérification de 2006 sur le changement climatique, qui comprenait un certain nombre de chapitres distincts, nous ferons certainement un suivi et nous ferons rapport au Parlement probablement dans deux ans sur les progrès accomplis relativement à chacun des engagements qui avaient été pris par le gouvernement.

Ce que nous déposons jeudi au Parlement est un rapport d'étape dans lequel nous examinons un certain nombre de recommandations que nous avons formulées et des questions que nous avons soulevées dans le passé, dont certaines remontent parfois à 10 ou 11 ans. Nous faisons un retour en arrière et une nouvelle vérification de ces dossiers et nous posons la simple question suivante : Avez-vous fait ce que vous avez dit que vous feriez? Autrement dit, quand nous avons vérifié ces divers dossiers dans le passé, vous avez pris des engagements. Les avez-vous honorés? Dans le rapport de jeudi, qui compte 14 chapitres, nous faisons un exercice de ce genre. Nous le faisons régulièrement. C'est le rapport d'étape le plus volumineux que le bureau du commissaire ait jamais produit.

Le sénateur Cochrane : Demanderez-vous des résultats jeudi?

M. Thompson : Plus que cela, nous vous ferons rapport sur ce que les ministères et organismes ont fait, à notre avis, en rapport avec les engagements qu'ils avaient pris dans le passé. Autrement dit, s'ils ont obtenu des résultats, nous allons le dire; s'ils n'ont pas obtenu de résultats, nous allons le dire aussi.

M. Arseneault : Nous avons un exercice annuel dans le cadre duquel nous demandons aux ministères de faire eux- mêmes rapport sur leurs progrès et recommandations. Pour le rapport de 2006, nous n'avons pas encore amorcé ce processus. Nous allons commencer en 2008. Nous obtiendrons des renseignements fournis par les ministères qui n'ont pas fait l'objet de vérifications, mais cela permet de nous tenir à jour à certains égards.

Le sénateur Cochrane : Est-ce une vérification?

M. Arseneault : Nous ferons une vérification au moment du suivi, ce que nous prévoyons pour 2010, en fait.

Le sénateur Cochrane : Avez-vous trouvé des traces de certains programmes qui pourraient être élaborés pour améliorer le sort des gens dans le Nord? Êtes-vous en mesure de dire cela?

M. Thompson : Faites-vous allusion à ce que nous allons déposer jeudi?

Le sénateur Cochrane : Je le suppose.

M. Thompson : Dans ce rapport en particulier, pas vraiment. Ce n'était pas l'objet du rapport. Nous ne nous sommes pas penchés sur le changement climatique dans ce rapport, parce que nous ferons un suivi de ce dossier séparément. Il faut laisser passer plus de temps.

Comme mon collègue l'a dit, nous avons un chapitre qui traite en partie du Nord, nommément l'assainissement des sites contaminés, y compris les mines abandonnées dans le Nord. En ce sens, nous allons donner au Parlement des renseignements sur les progrès accomplis dans ce dossier. Ce n'est pas négligeable.

M. Maxwell : Pour revenir au chapitre 2 du rapport de 2006 sur l'adaptation, nous avons fait plusieurs observations sur la manière dont les programmes d'adaptation pourraient être conçus dans le Nord. Je dis « pourraient » parce qu'il incombe au gouvernement d'élaborer une stratégie — je suppose que vous avez déjà entendu cela à répétition ce soir.

Le sénateur Cochrane : Il n'est pas mauvais de mettre des choses de ce genre dans un rapport.

M. Maxwell : Pour vous donner des exemples des programmes qui ont été mis en oeuvre ailleurs au Canada, nous traitons d'intéressantes expériences menées au Québec et dans les Prairies. Dans le cadre de ces expériences, les gouvernements ont pris des dispositions pour que les chercheurs et les experts, c'est-à-dire les gens qui comprennent bien les répercussions étudiées, soient directement en contact avec les gens qui prennent les décisions, qu'il s'agisse de dirigeants du monde des affaires, de décideurs gouvernementaux ou des gens qui représentent les collectivités dans le dossier des répercussions sociales. Plusieurs expériences ont été menées avec succès au Canada jusqu'à maintenant — ce qui nous ramène à la question posée tout à l'heure au sujet des lacunes dans la recherche — qui ont permis d'acheminer l'information qui est connue aux décideurs.

Vous nous interrogez sur les programmes qui pourraient bien fonctionner dans le Nord, et il existe certainement des exemples de programmes en cours et qui se sont révélés utiles à ce jour.

Le sénateur Cochrane : Je pense que nous devrions nous procurer ce rapport, monsieur le président.

Le président : Le rapport de jeudi?

Le sénateur Cochrane : Celui-là aussi, mais je veux parler du rapport de 2006. Nous devrions lire ce qu'il contient sur le Nord avant d'aller là-bas.

Le président : Nous devrions le faire. Nous l'avons tous.

Le sénateur Cochrane : Nous ferions mieux de le relire.

Le président : Ce serait une bonne idée de le faire, avant d'aller plus loin dans notre réflexion sur ce que nous allons faire dans le Nord. Ce serait une bonne chose.

Le sénateur Cochrane : Allez-vous me faire part de vos réflexions sur l'engagement des actionnaires dans tout ce dossier du changement climatique?

M. Thompson : Il y a beaucoup d'intervenants et d'actionnaires dans le dossier du changement climatique, comme dans beaucoup de dossiers environnementaux. Il y a bien d'autres dossiers environnementaux que celui du changement climatique, mais le changement climatique est extraordinairement important. Quand je songe aux actionnaires en l'occurrence, ce que je vois, ce sont mes enfants et mes petits-enfants. Ce sont eux qui vont hériter d'un Canada qui sera ou bien le merveilleux pays que nous connaissons aujourd'hui, ou bien quelque chose de différent qui ne sera pas aussi merveilleux.

Si le gouvernement fédéral, de concert avec les autres gouvernements, devient un bon protecteur de l'environnement, alors notre merveilleux pays sera transmis intact à nos enfants et à nos petits-enfants. Sinon, il y aura d'importants changements et d'énormes difficultés. Je veux que mon petit-fils puisse contempler un huard qui survole un lac un soir d'été, ou qu'il puisse être réveillé par des chants d'oiseaux le matin, qu'il ait amplement d'eau potable et de l'eau pure pour s'y baigner et s'y promener en bateau — tout cela, nous le prenons pour acquis, mais nous ne le devrions pas. Qui sont les actionnaires? J'ai tendance à dire que ce sont les enfants. Nous sommes les intendants et agissons au nom des enfants.

Le président : Pour revenir à ce que vous disiez il y a un instant au sujet de la détermination et de l'engagement des échelons supérieurs du gouvernement, dans votre rapport de 2006, vous avez dit que le MAINC avait mis en place un bon plan pour l'adaptation dans le Nord. Comme vous l'avez dit, c'est l'essentiel de leur domaine qui est situé au Nord du 60e parallèle. À l'époque, on disait dans votre rapport que le ministère n'avait pas reçu l'autorisation du gouvernement de mettre en oeuvre ce plan. Y a-t-il quelque chose à signaler à cet égard? Pourriez-vous répondre à cette question précise et ensuite nous dire ce que vous pensez de l'idée qu'il soit nécessaire d'obtenir une telle approbation, nous préciser combien de temps il faut pour l'obtenir, et cetera?

M. Maxwell : Le ministère travaillait à plusieurs dossiers à l'époque. Ce dont nous avons pris connaissance semblait raisonnable, mais il n'y avait pas mis la dernière main. Dans certains cas, il attendait l'approbation ou bien n'avait pas terminé le travail. Cela a pris plusieurs formes. Tout d'abord, le MAINC s'est engagé à passer en revue tous les divers programmes offerts par le ministère à la fois dans le Nord du Canada et au Sud du 60e afin d'identifier lesquels de ces programmes seraient touchés par le changement climatique. C'est important. Je vais donner des exemples, mais quand on commence à réfléchir aux programmes fédéraux qui sont en place, pas seulement au MAINC, mais dans l'ensemble des ministères, on se rend compte qu'un très grand nombre de programmes pourraient être touchés. Par exemple, le sénateur s'intéresse à la disponibilité de l'eau dans les Prairies. Quelle incidence aura la baisse des précipitations sur les programmes de soutien du revenu d'Agriculture et Agroalimentaire Canada? Songeons aussi à Diversification économique de l'Ouest; on peut se demander si le soutien offert à diverses industries sera à l'épreuve du changement climatique. Ministère par ministère, on trouve des exemples de situations où il est important que le ministère comprenne bien quelles seront les répercussions afin d'évaluer l'impact sur ses propres programmes.

Le MAINC n'a pas encore fait cela. Il s'était engagé à faire quelque chose. À l'époque, nous avons dit qu'il progressait bien, mais le travail n'a pas été fini. De même, il s'était engagé à élaborer une stratégie d'adaptation pour le Nord. Encore une fois, nous avons vu le même scénario. De bons progrès, mais le travail n'a pas été fini.

Il semble que plusieurs choses se passaient en même temps. Dans certains cas, on attendait l'approbation et dans d'autres cas, on aurait dit que l'adaptation souffrait du même malaise que nous avons constaté dans d'autres ministères où, essentiellement, l'adaptation devient le cousin pauvre de l'atténuation. Le terme « atténuation » est utilisé dans le sens de réduction des émissions de gaz à effet de serre et on dirait que ce dossier retient toute l'attention. Je me rappelle que plusieurs experts, quand ils traitaient d'adaptation, utilisaient l'expression « cousin pauvre » parce que leur dossier ne recevait pas l'attention qu'il méritait.

En résumé, il y a plusieurs questions précises différentes qu'il serait important de poser au sous-ministre. Le commissaire a constaté que l'on réalisait de bons progrès, mais au moment de terminer la vérification, le travail n'avait pas été fini. Alors qu'arrive-t-il ensuite?

Le président : Demande-t-on la permission de dépenser de l'argent ou bien de mettre en oeuvre un programme, ou les deux?

M. Maxwell : Il faudrait que je consulte nos dossiers. Cependant, je crois que dans le cas des ministères comme le MAINC, les fonctionnaires disaient que tant que le gouvernement fédéral n'aurait pas de politique globale, il pouvait faire seulement un bout de chemin. La position de Santé Canada était que tant que le gouvernement du Canada n'a pas de plan global, il ne sert à rien que nous tentions d'agir de notre propre chef. Tout cela revient en grande partie au besoin d'une stratégie fédérale globale.

M. Thompson : En 2006, nous avons fait au chapitre 2 deux recommandations qui sont résumées aux pages 27 et 28. Dans chaque cas, le gouvernement de l'époque les a acceptées et a ajouté qu'il les étofferait davantage, qu'il les mènerait à bon port, si vous voulez, quand il aurait eu la chance d'élaborer et de mettre en place ce que l'on appelait alors un « programme environnemental fait au Canada pour réduire la pollution de l'air et les émissions de gaz à effet de serre ».

Quand le chapitre a été déposé, nous avions un accord de principe et les détails devaient suivre. C'était le cas non seulement au chapitre 2, mais aussi dans d'autres chapitres qui ont été déposés à l'automne 2006, et la même réponse a été donnée. Ces détails vont au coeur même de ce que vous disiez dans ces deux recommandations.

Il pourrait être utile que le comité, maintenant que deux ans se sont écoulés, pose la question : que s'est-il passé? Quels sont les détails à suivre? Comment ces ministères peuvent-ils travailler ensemble. Qui va prendre l'initiative?

Le président : Merci. J'espère que nous serons en mesure d'assumer cette tâche.

Le sénateur Mitchell : Vous avez dit que votre travail consiste en partie à examiner ce que le gouvernement déclare vouloir faire et à vérifier ensuite s'il l'a fait. Est-ce qu'on retourne en arrière jusqu'au discours du Trône dans le processus d'élaboration?

Par exemple, dans le dernier discours du Trône, le gouvernement a dit qu'il créerait une bourse du carbone. Dans le budget, il a apparemment mis de côté 66 millions de dollars. Quand ferez-vous une vérification pour voir si cela a été fait, ou si l'on est en train de le faire et de le faire efficacement?

M. Thompson : Les discours du Trône et les annonces budgétaires sont semblables à certains égards. Ce sont des énoncés d'intention. Nous ne vérifierions pas si l'on a donné suite à l'intention. Nous verrions si l'on a mis en place un programme concret pour réaliser cette intention. Si un tel programme a été mis en place, alors nous vérifions la qualité de la gestion de ce programme. Nous retournons en arrière pour voir quelle est l'origine de ce programme. Cependant, nous ne lançons pas une vérification tant qu'il n'est pas établi et opérationnel.

Le sénateur Mitchell : Supposons que le gouvernement décide qu'il tentera d'atteindre son objectif de réduction des émissions d'ici 2020 et qu'il prenne la décision de recourir à un système de plafonds et d'échanges plutôt que d'imposer une taxe sur le carbone, ce qui donnerait directement une valeur au carbone. Feriez-vous une évaluation de l'efficacité du système que le gouvernement a choisi, en comparaison d'autres possibilités comme une taxe sur le carbone, qui a été écartée?

M. Thompson : Non, nous ne le ferions pas. Si le gouvernement choisit une approche en particulier, nous faisons une vérification de ce choix.

Pour la Loi de mise en oeuvre du Protocole de Kyoto, on a demandé à la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie de se pencher sur cette question. Je pense que l'une des questions que l'on s'est engagé à examiner est de savoir si le gouvernement a mis en place des programmes efficaces. Avez-vous établi des cibles qui sont mesurables et qui permettront d'atteindre les objectifs que vous visez avec le temps? La table ronde se penche sur ces questions et nous intervenons après le fait pour vérifier ce qui a été fait.

Le président : Nous devons toujours comprendre que le Bureau du vérificateur général et le commissaire font des vérifications, ils ne critiquent pas les politiques. Une fois que le gouvernement de quelque parti politique a décidé de faire quelque chose, ils vérifient si le gouvernement a atteint ses objectifs.

Le sénateur Milne : Ma question découle de la dernière parce que je reviens aux 85,9 millions annoncés en décembre et à votre planification future.

À titre de vérificateurs, vous suivez la trace de l'argent. Comment cette somme sera-t-elle divisée entre les ministères? S'agit-il d'un programme d'un an ou étalé sur plusieurs années? Y a-t-il une stratégie? Apparemment, personne ne semble savoir s'il y en a une ou non. N'attendons pas trois ans pour découvrir si cette somme est dépensée judicieusement ou si elle est simplement éparpillée. Comment l'argent sera-t-il dépensé?

M. Thompson : Cette excellente question va au coeur de nos inquiétudes, quand nous nous penchons sur les progrès accomplis relativement aux problèmes et aux recommandations.

Nous sommes peut-être un peu négatifs parce que les vérificateurs ont tendance à l'être. Cependant, il semble qu'il y ait trop de discours et pas assez d'action. On passe son temps à annoncer des intentions, mais tant que celles-ci ne sont pas mises en oeuvre par l'entremise de programmes existants ou de nouveaux programmes, ce ne sont que des annonces ou des intentions. C'est une bonne chose; je ne dis pas que c'est une mauvaise chose. Cependant, à un moment donné, il faut passer aux actes si l'on veut que les effets s'en fassent sentir et il est certain qu'il faut qu'on soit passé à l'action avant que nous puissions faire une vérification.

Le sénateur Milne : L'annonce à elle seule ne vous incite pas à ouvrir l'oeil avec méfiance.

M. Thompson : Non, pas nécessairement. Comme on l'a dit tout à l'heure, ce cas particulier nous intrigue tous les quatre et nous nous demandons si ces 85,9 millions de dollars et la série de programmes qu'on va mettre en oeuvre représentent la stratégie pour l'ensemble du gouvernement que nous réclamions en 2006. Je ne le sais pas, mais nous allons poser la question et si vous faites venir trois ou quatre sous-ministres devant le comité, ce serait également une bonne question à leur poser.

Le président : Messieurs, je vous remercie. Je vous promets que nous aurons d'autres questions à vous poser après avoir discuté de façon plus approfondie de cette question et au sujet de ce que vous aurez à dire jeudi. Je sais que votre rapport sera étoffé et que nous serons très intéressés. Je sais aussi que vous répondrez promptement à nos demandes de renseignements, comme vous l'avez toujours fait dans le passé. Je compte également sur vous, monsieur Maxwell, pour nous donner nos devoirs à faire, c'est-à-dire nous envoyer copie du rapport que vous avez. Ce serait apprécié si vous pouviez dire à la greffière où nous pouvons nous le procurer.

M. Maxwell : Nous donnerons la référence et les sources à la greffière. Nous n'avons pas de copies disponibles du deuxième rapport, mais nous vous ferons parvenir copie de celui que nous avons publié.

La comité poursuit ses travaux à huis clos.


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