Aller au contenu
 

Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule 6 - Témoignages du 8 avril 2008


OTTAWA, le mardi 8 avril 2008

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles auquel a été renvoyé le projet de loi C-298, Loi visant à ajouter le sulfonate de perfluorooctane (SPFO) et ses sels à la liste de quasi-élimination établie en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999), se réunit aujourd'hui à 17 h 39, pour examiner le projet de loi.

Le sénateur Tommy Banks (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : C'est pour moi un plaisir de vous accueillir au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Je suis le sénateur Banks. Je suis albertain et je préside le comité. J'aimerais vous présenter les membres du comité : sont présents aujourd'hui, le sénateur Nolin, vice-président, le sénateur Milne, de l'Ontario, le sénateur Trenholme Counsell, du Nouveau-Brunswick, le sénateur Adams, du Nunavut, le sénateur Sibbeston, des Territoires du Nord-Ouest, le sénateur Spivak, du Manitoba, et le sénateur McCoy, de l'Alberta.

Nous sommes ici pour examiner le projet de loi C-298, Loi visant à ajouter le sulfonate de perfluorooctane (SPFO) et ses sels à la liste de quasi-élimination établie en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999). Ce projet de loi a été parrainé par l'honorable Maria Minna, C.P., députée de Beaches-East York. Il avait été présenté d'abord au cours de la première session de la 39e législature, sous le même numéro. Il avait été examiné par le comité et renvoyé à la Chambre. Il a été présenté à nouveau au cours de la présente session parlementaire. Il a franchi toutes les étapes à la Chambre et l'étape de la première lecture au Sénat, le 4 décembre 2007. La deuxième lecture en a été faite le 11 mars 2008, puis le projet de loi a été renvoyé à notre comité.

Nous avons aujourd'hui le plaisir d'accueillir M. Daniel Blasioli, avocat-conseil principal au ministère de la Justice Canada, et M. John Moffet, directeur général, Affaires législatives et réglementaires, à Environnement Canada. Pourriez-vous vous présenter, madame?

Lyne Monastesse, gestionnaire, Gestion des produits chimiques, Environnement Canada : Je m'appelle Lyne Monastesse et je suis gestionnaire, Gestion des produits chimiques, à Environnement Canada.

John Moffet, directeur général, Affaires législatives et réglementaires, Environnement Canada : Merci. Nous n'avons pas préparé d'exposé préliminaire parce qu'il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire et pas d'un projet de loi émanant du gouvernement. C'est un projet de loi qui a l'entier appui du gouvernement. Nous n'avons pas de changements à recommander.

Nous sommes ici pour répondre à vos questions concernant la teneur du projet de loi et ses incidences.

C'est là toute ma brève allocution préliminaire. Nous appuyons le projet de loi et nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.

Le président : Pourriez-vous donner des informations plus précises sur les amendements qui y ont été apportés à la Chambre? Deux de ces amendements représentent des changements importants en ce qui concerne, si j'ai bien compris, les procédures en vertu desquelles cette substance serait ajoutée à la liste de quasi-élimination. Est-ce exact?

M. Moffet : Oui. Quelques changements ont été apportés au projet de loi, après sa présentation. Je pense que la plupart des changements ont été apportés sur une base consensuelle au comité de la Chambre. Ils concernent le régime de quasi-élimination prévu dans la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999). Nous avons témoigné devant le comité de la Chambre et devant le présent comité et fait des commentaires sur certains des problèmes posés par les dispositions actuelles de la LCPE.

La LCPE exige qu'une substance, persistante, bioaccumulative et toxique soit ajoutée à la liste de quasi-élimination et soit soumise au régime de quasi-élimination prévu dans la loi. Ce régime exige que, lorsqu'une substance est ajoutée à cette liste, le gouvernement précise une limite de dosage (LD), c'est-à-dire le niveau le plus bas de cette substance qui peut être mesuré au moyen de méthodes d'analyse courantes.

La loi précise en outre que le gouvernement doit exiger des plans de quasi-élimination, plans que les utilisateurs ou producteurs de la substance doivent établir pour la quasi éliminer. Elle spécifie que le ministre de l'Environnement doit promulguer ce qu'on appelle des règlements limitant les rejets. C'est différent du règlement ou de l'instrument qui doit être élaboré pour toute substance ajoutée à la liste des substances toxiques. Ces règlements sont élaborés en vertu de l'article 93, en vertu des règlements pris par décret.

Tout cela semble bien beau. Nous avons décelé une catégorie de substances persistantes, bioaccumulatives et intrinsèquement toxiques, les PBTi, qui nous préoccupent tout particulièrement; nous accorderons donc au gouvernement moins de pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne ces substances qu'en ce qui concerne les substances toxiques ordinaires. Pour ces dernières, la loi précise que les ministres doivent proposer un instrument ou un règlement pour gérer la substance. En ce qui concerne les PBTi, elle spécifie certaines mesures à prendre. Comme je l'ai dit, tout ça paraît bien beau sur papier.

En pratique, ce régime a posé plusieurs problèmes. Par exemple, si une substance se répand dans l'environnement surtout sous forme d'émissions industrielles, d'une cheminée, par exemple, on peut facilement déterminer la limite de dosage associée à cette substance. On peut utiliser cette limite pour la réglementation de la substance; en d'autres termes, on peut préciser dans un règlement qu'aucune émission non mesurable ne peut sortir de cette cheminée industrielle.

Nous apprenons maintenant que plusieurs substances répondant aux critères des PBTi ne proviennent pas des cheminées industrielles mais qu'elles sont en fait utilisées dans la fabrication de produits commerciaux et y sont ajoutées intentionnellement. Elles pénètrent dans l'environnement soit par la dégradation du produit, comme une substance qui a été ajoutée à ma cravate, par exemple, pour la rendre lustrée et qui peut s'user, à la longue, à force de nouer et de dénouer ma cravate. Elle est davantage susceptible de se retrouver dans l'environnement quand je jette ma cravate et qu'elle va à la décharge publique ou lorsque je la lave, qu'elle s'use et que des particules se retrouvent dans les eaux usées. Nous ne sommes en fait pas capables de mesurer la quantité qui provient de ma cravate car, dans certains cas, il s'agit au total de très petites quantités à l'échelle nationale. Ce qu'on peut cependant mesurer, ce sont les quantités qui se retrouvent dans les effluents. Ce n'est pas une limite de dosage au sens de la loi.

Pour certaines substances, comme le SPFO, on ne connaît pas de possibilité d'établir une LD. En outre, ce serait une perte de temps car ça ne nous aiderait pas à réglementer la substance. On ne se mettra pas à réglementer les émissions provenant d'une cravate. Ce qu'on fera, c'est qu'on interdira complètement la substance et la cravate.

La loi exige un règlement concernant les rejets. Ce n'est peut-être pas intentionnel. Cependant, selon le libellé de la loi, ce règlement est différent de celui visé à l'article 93. Dans le contexte du SPFO, le gouvernement a reconnu que cette substance pose problème et a décidé que, parce qu'il s'agit d'un produit commercial et qu'il est intentionnellement introduit dans d'autres produits, la meilleure façon de procéder est d'en interdire l'utilisation. Le gouvernement est en voie de le faire par le biais d'un règlement que le gouverneur en conseil a proposé et qui sera prêt dans quelques semaines ou, tout au plus, dans un mois ou deux. Nous prévoyons qu'un règlement définitif sera en place ce printemps.

Je m'excuse pour ces explications quelque peu techniques, mais ces règlements sont des règlements d'interdiction pris aux termes de l'article 93 de la loi. Si nous appliquions la loi à la lettre en termes de quasi-élimination, nous promulguerions en outre un règlement ministériel sur les rejets. Cependant, ce règlement n'apporterait rien de plus puisqu'il y aurait déjà en place un règlement interdisant l'usage, l'importation et la vente de cette substance. Il faudrait élaborer un règlement sur les rejets sans qu'il soit possible d'y voir un avantage sur le plan environnemental ou sur celui de la santé.

Le projet de loi de Mme Minna, car c'est elle qui l'a présenté, indique que le gouvernement doit ajouter la substance à la liste de quasi-élimination, qu'il doit déterminer une limite de dosage et doit formuler ou promulguer un règlement limitant les rejets.

Je lui ai donné la même explication précise que celle que je viens de vous donner. Nous reconnaissons que le SPFO pose un problème. Nous admettons que cette substance devrait être réglementée. Après que Mme Minna ait présenté son projet de loi — et tout l'honneur lui en revient —, le gouvernement a présenté un règlement d'interdiction. Nous avons expliqué que nous estimons que ça réglera le problème et que, si on nous forçait à consacrer du temps et des ressources, alors que nous n'en avons pas beaucoup, à déterminer une limite de dosage et à élaborer un règlement sur les rejets, cela n'apporterait rien sur le plan de la santé ou sur le plan environnemental.

Cela dit, je ne peux pas parler pour la députée, mais je pense qu'elle et d'autres membres du comité ont convenu de modifier le projet de loi pour en supprimer ces obligations qui, à notre avis, n'auraient rien apporté sur le plan environnemental ni sur celui de la santé. C'est la raison essentielle pour laquelle le projet de loi se présente tel qu'il est actuellement, après avoir été modifié par rapport à la version initiale présentée par Mme Minna.

Le sénateur Milne : C'est très bien, mais le gouvernement préparera-t-il une nouvelle définition du terme « bioaccumulative »? Si je comprends bien, selon la définition traditionnelle, tout ce qui s'accumule dans les tissus adipeux est bioaccumulatif. Le problème en ce qui concerne le SPFO est qu'il n'est pas bioaccumulatif, car il s'accumule dans les tissus protéiques, dans les muscles, dans les tendons et dans des organes comme le foie des ours polaires.

M. Moffet : Sénateur, je voudrais répondre à la question de deux façons.

Ce projet de loi ne modifiera pas la définition du terme « bioaccumulation ». Il réglera uniquement le cas du SPFO. Nous appliquons le régime de la quasi-élimination de deux façons. En premier lieu, ce régime s'appuie sur des exigences législatives, puis il prévoit des règlements pris en vertu de ces exigences. Ces règlements définissent ce que nous entendons par « persistance » et par « bioaccumulation ».

Comme mon ex-collègue, M. Arseneau, l'ancien directeur général de la Direction de la science et de l'évaluation des risques, et moi l'avons signalé dans nos témoignages devant le présent comité et devant le comité de la Chambre, le gouvernement est en train de réexaminer ces règlements sur la bioaccumulation, précisément dans le but de régler le problème que vous avez signalé.

Nous reconnaissons pleinement que les règlements ont été élaborés avec une notion de bioaccumulation à l'esprit et que leur portée n'était pas assez vaste pour couvrir toutes les possibilités connues de bioaccumulation de ces substances; par conséquent, nous sommes en train de réviser ces règlements.

Tel que l'indiquait sa réponse provisoire au rapport du comité de la Chambre sur l'examen de la LCPE, le gouvernement a annoncé son intention de réviser les dispositions législatives concernant la quasi-élimination afin de prévenir le type de problèmes que je viens d'exposer, problèmes qui obligeraient le gouvernement à prendre des mesures qui seraient inutiles. Ça ne changerait rien à l'objectif de la quasi-élimination, mais ça permettrait au gouvernement de l'atteindre de la façon la plus directe et la plus efficace.

Le sénateur Milne : Je pense que la Belgique, la Suède, les États-Unis et le Royaume-Uni ont déjà pris des mesures pour interdire l'utilisation du SPFO. Ce projet de loi s'inscrira-t-il dans la lignée des mesures qui ont été prises dans ces pays ou va-t-il plus loin? Jusqu'où va-t-il?

M. Moffet : J'aimerais à nouveau donner deux réponses. La première est que nous devons être très prudents dans l'interprétation de ce que d'autres pays ont fait. Les États-Unis, par exemple, n'ont pas complètement interdit le SPFO. Il y a quelques années, ils ont élaboré une règle de nouvelle utilisation importante qui interdit les nouvelles utilisations, mais pas toutes les utilisations existantes du SPFO.

Certains pays ont pris des mesures pour interdire la plupart des utilisations du SPFO. On fait actuellement, au niveau international, des efforts pour ajouter le SPFO à un accord international, ce qui obligerait un plus grand nombre de pays à agir. C'est la première réponse. Je ne voudrais pas que vous pensiez que le Canada est très en retard sur de nombreux autres pays. La deuxième réponse est que la principale mesure que vous visez sera réalisée par le règlement d'interdiction proposé. Comme vous le savez, l'élaboration d'un règlement se fait en deux étapes. La première ébauche est d'abord proposée dans la partie I de la Gazette du Canada et la version finale est publiée après une période prévue pour les commentaires. Le gouvernement a proposé d'ajouter le SPFO aux règlements d'interdiction en décembre 2006 et le gouvernement les aura terminés pour ce printemps.

Nous avons reçu peu de commentaires et nous ne prévoyons pas de modification marquée de la version proposée; nous prévoyons en outre que la version finale sera publiée dans la Gazette du Canada dans le courant du printemps.

Le sénateur Milne : Monsieur le président, il me semble que le but de ce projet de loi correspond exactement aux mesures sur la sécurité des aliments, des produits de consommation et des produits médicaux au Canada, qui ont été présentés à la Chambre aujourd'hui. Je me demande si M. Moffet ou l'un d'entre vous a des commentaires à faire à ce sujet.

M. Moffet : À en juger d'après toutes les mesures qui ont été prises, y compris les règlements d'interdiction et l'initiative résultant du présent projet de loi, à savoir d'ajouter le SPFO à la liste de quasi-élimination, on pourrait en conclure que c'est plus ou moins conforme à l'objectif visé par le gouvernement dans le contexte de cet autre projet de loi. D'après les explications données au sujet de ce projet de loi, il faut atteindre deux objectifs généraux. Le premier est qu'il est essentiel de permettre des interventions nationales plus vigoureuses et la deuxième est qu'il est impératif de poursuivre et d'intensifier nos efforts à l'échelle internationale, car une forte proportion de ces substances sont produites et intégrées à des produits fabriqués à l'étranger, puis importés au Canada. Vous pouvez comprendre les difficultés auxquelles sont confrontés les responsables de la réglementation quand on demande à la frontière si un certain produit contient du SPFO. C'est un garde-frontière qui pose la question, et vous ne le savez pas.

Nous voulons que soient prises des mesures internationales pour que personne n'utilise du SPFO, ni aucune autre substance qui pose problème, dans des produits, et c'est important. J'insiste sur cet aspect, car ce projet de loi ajouterait le SPFO à la liste de quasi-élimination qui, abstraction faite de tout autre facteur, aurait un vigoureux impact symbolique sur la communauté internationale.

Nous savons que les fabricants et les producteurs examinent des listes comme la liste de quasi-élimination du Canada pour savoir quelles substances font déjà l'objet d'une réglementation et lesquelles seront réglementées plus tard. Il ne faut pas sous-estimer les répercussions symboliques qu'aurait, sur le plan international, le fait d'ajouter le SPFO à la liste de quasi-élimination. Ce serait conforme à notre objectif général, qui est d'associer une action vigoureuse à l'échelle nationale à des efforts coordonnés à l'échelle internationale.

Le sénateur Milne : Il me semble que vous expliquez que vous envoyez un message à d'autres pays, mais si un garde- frontière voit une cargaison de tapis en provenance de Chine ou d'un autre pays, comme vous l'avez pertinemment signalé, il ne saura pas s'ils ont été traités par exemple par un revêtement de molécules de carbone à longue chaîne pour éviter qu'ils se tachent.

Estimez-vous que ce projet de loi vous aidera pour ce qui s'en vient dans quelques semaines? Contribuera-t-il à mettre du mordant dans les mesures que les gardes-frontières ou les inspecteurs de douane peuvent prendre à l'entrée des produits dans notre pays?

M. Moffet : Ce projet de loi comme tel ne donnera pas de mordant aux mesures que peuvent prendre les gardes- frontières. Les règlements d'interdiction rendront l'importation des tapis ou de tout autre produit illégale, à l'exception des produits contenant du SPFO assujettis à des dispenses d'une durée limitée. Lorsque les règlements seront définitifs, il sera illégal d'importer ce type de produits.

Les incidences de ce projet de loi sont surtout symboliques. Elles ne nous octroient pas de pouvoirs de réglementation supplémentaires. Ce projet de loi indiquerait clairement que le gouvernement est bien décidé à atteindre l'objectif final, à savoir la quasi-élimination de la substance; il devrait accroître l'efficacité de nos efforts à l'échelle internationale pour prôner l'adoption de mesures semblables par d'autres pays afin d'interdire totalement l'utilisation future de cette substance.

[Français]

Le sénateur Nolin : Je voudrais poser mes questions, si c'est possible, au représentant du ministère de la Justice Canada, M. Blasioli. Quels sont les défis, en termes juridiques, que pose un projet de loi d'initiative parlementaire comme celui-ci?

[Traduction]

Daniel C. Blasioli, avocat-conseil, ministère de la Justice Canada : Nous sommes heureux de signaler que le ministère de la Justice n'a aucune préoccupation en ce qui concerne ce projet de loi. Il s'inscrit tout à fait dans le cadre des pouvoirs législatifs du Parlement. Une des difficultés que nous voyons en ce qui concerne les projets de loi d'initiative parlementaire — et celui-ci est un exemple — est l'obligation qu'ont les ministres de légiférer et de prendre des règlements. Ça va à l'encontre de vos conventions générales en matière de rédaction, mais le contexte dans lequel nous vivons actuellement, avec un gouvernement minoritaire, est un facteur dont nous devons tenir compte.

Le sénateur Nolin : Approuvez-vous le libellé du projet de loi?

M. Blasioli : Le gouvernement n'a aucune inquiétude au sujet du projet de loi actuel.

Le sénateur Nolin : Nos obligations internationales sont-elles respectées?

M. Moffet : Les mesures que nous prenons respectent nos obligations internationales et, comme je l'ai expliqué au sénateur Milne, elles aideront le militantisme du Canada en faveur d'une prise de position plus vigoureuse sur le SPFO à l'étranger.

Certains autres pays ont pris des mesures restreintes et nous atteignons ce niveau, ou le dépassons en fait, par le biais d'une interdiction très générale. En outre, ce projet de loi nous permettra d'adopter une position plus ferme dans le cadre d'initiatives internationales, comme le protocole relatif aux POP — polluants organiques persistants — dans le cadre duquel nous préconisons d'ajouter le SPFO à la liste des substances visées.

Le sénateur Spivak : Ma question concerne la scène internationale. Que pensez-vous de l'élimination des 12 substances considérées comme les plus terribles dans le contexte de l'accord sur les polluants organiques persistants? Est-ce que j'adresse ma question aux mauvaises personnes?

M. Moffet : Je ne suis pas certain d'avoir compris la question. Voulez-vous savoir avec quelle rapidité nous les avons éliminées?

Le sénateur Spivak : Oui. Je vous demande d'indiquer ce qu'il en est non seulement au sujet de cette substance mais aussi d'autres substances visées par le protocole relatif aux polluants organiques persistants.

M. Moffet : Je m'excuse, mais je ne suis pas sûr que nous soyons tous les trois les personnes les plus appropriées pour donner une réponse complète et dire exactement quelles mesures le Canada a prises en ce qui concerne ces 12 substances.

Le sénateur Spivak : Je poserai ma question au témoin suivant.

Le sénateur Trenholme Counsell : Je suis médecin, en même temps que sénateur. J'aimerais savoir si, à la suite de l'étude que vous avez faite sur ce groupe de produits chimiques et sur le sulfonate de perfluorooctane, nous avons des données sur les incidences présumées sur la santé humaine de l'accumulation de ces produits chimiques dans les muscles, le foie ou d'autres organes.

M. Moffet : Je peux faire un commentaire d'ordre général, puis mon collègue pourra peut-être donner des informations plus précises. Il y a à Environnement Canada et à Santé Canada des groupes spécialisés dans l'évaluation des risques. Ces groupes communiquent généralement leurs constatations aux gestionnaires de risques. Mme Monastesse, par exemple, dirige un des principaux groupes d'Environnement Canada qui élabore des stratégies de gestion des risques, y compris des règlements. Nous n'avons ni l'un ni l'autre les connaissances techniques nécessaires dans l'évaluation des risques, si ce n'est les informations qui nous ont été communiquées.

Mon interprétation de la science fondamentale est que nous prenons maintenant des mesures parce que, depuis quelques années, nous avons acquis de nouvelles connaissances scientifiques en ce qui concerne la bioaccumulation et les incidences néfastes possibles sur les animaux. Ça inclut les animaux qui sont tout au sommet de la chaîne alimentaire, plus haut que nous, comme les ours polaires, qui mangent de nombreux autres animaux. Nous avons à notre disposition quelques données concernant les incidences sur les êtres humains, mais elles sont très limitées.

Le principal motif de notre décision d'agir maintenant est lié aux préoccupations que nous avons au sujet des incidences probables sur les humains en se basant sur les études et les données relatives aux incidences sur les animaux sauvages.

Le sénateur Trenholme Counsell : Existe-t-il des données pathologiques ou une étude portant spécifiquement sur la question, à l'échelle internationale?

M. Moffet : Les évaluations de risques indiquent que ce produit est persistant et que, par conséquent, il subsiste longtemps et se bioaccumule. On le constate de plus en plus fréquemment, malgré que la production ait pratiquement cessé. Nous savons que cette substance pose un risque d'après les incidences que nous constatons sur la faune. Lorsqu'ils ont fait l'évaluation des risques, nos collègues de Santé Canada ont décidé que l'exposition est insuffisante pour en tirer la conclusion définitive que les niveaux actuels posent un risque pour la santé humaine. Cependant, le gouvernement préfère pécher par excès de prudence et estime qu'il ne faut pas en arriver à ce que les niveaux soient tels que ça poserait des risques pour la santé humaine. Nous savons que ça pose un risque pour les animaux sauvages; nous pouvons donc en déduire que cette substance en pose probablement aussi pour la santé humaine. Je suis sûr que, puisque cette évaluation a été faite, et que diverses autres études l'indiquent également, ça pourrait poser des problèmes pour la santé humaine. La seule mesure qu'on puisse prendre actuellement, c'est d'interdire totalement l'usage de la substance, et c'est précisément ce que ferait le règlement proposé par le gouvernement.

Le sénateur Trenholme Counsell : J'ai une dernière question à poser. Je ne m'attends pas nécessairement à ce que vous sachiez cela, mais je pense qu'on a peut-être fait des études à ce sujet dans le contexte du projet de loi. A-t-on fait des études en laboratoire sur d'autres animaux pour s'assurer des incidences de ce groupe de substances chimiques sur les systèmes enzymatiques métaboliques et de toute autre activité liée aux tissus?

M. Moffet : Nous disposons d'un nombre suffisant de données probantes pour soupçonner que ces substances ont de graves répercussions, surtout à concentration assez élevée. Je n'en suis pas sûr et je ne suis pas scientifique, mais je ne pense pas que nous ayons assez de preuves pour en conclure de façon définitive que ces incidences existent ou sont exactement ce qu'elles semblent être; nous disposons toutefois d'un nombre suffisant de données pour être préoccupés et pour penser qu'une intervention immédiate est justifiée.

Le sénateur Trenholme Counsell : Quand vous dites que vous êtes préoccupés et que vous avez un nombre suffisant de preuves pour soupçonner ces substances d'avoir des répercussions graves, faites-vous de l'extrapolation et pensez- vous qu'elles en ont sur la biologie humaine?

M. Moffet : Je ne pense pas avoir la réponse à cette question. Je connais les conclusions tirées par Santé Canada à la suite d'une évaluation officielle des risques effectuée il y a quelques années. Je ne doute pas que les données scientifiques aient continué à évoluer avec l'attention constante portée sur cette substance, à l'échelle internationale. Je m'excuse, mais je ne suis pas capable de donner une réponse définitive.

Le sénateur Milne : Je crois savoir que le SPFO s'accumule dans le foie des ours polaires prélevés par les habitants du Nord. Je pense en outre que certaines études ont été faites sur les êtres humains et que Environmental Defence Canada en a fait deux.

Cet organisme a mené des tests sur des Canadiens de différentes régions du pays pour déterminer s'ils avaient du SPFO et d'autres substances chimiques dans le corps. C'est ce qu'on appelle des tests pour déterminer la charge corporelle en matières toxiques. La première étude, dans le cadre de laquelle des tests ont été effectués sur 11 adultes de différentes régions du pays, a été publiée en novembre 2005. Les résultats indiquaient que tous les participants avaient du SPFO dans l'organisme. Les résultats de la deuxième étude, qui portait sur cinq familles de différentes régions du pays, ont été publiés il y a deux semaines. Les conclusions sont les mêmes que celles de la première étude : tous les membres des familles concernées avaient du SPFO dans le corps.

M. Moffet : J'aimerais faire deux observations. La première est que M. Khatter, de Environmental Defence, est ici et qu'il fera un exposé. Il pourra faire des commentaires sur les résultats de cette étude.

La deuxième est que, ce que j'essaie d'expliquer, c'est que nous savons que nous en trouvons dans les tissus humains. J'essaie d'être prudent, car nous n'avons pas de données scientifiques définitives sur les répercussions précises de la présence de cette substance dans nos tissus. Nous savons cependant que certaines études indiquent que sa présence dans l'être humain, dans l'environnement et chez les animaux sauvages peut avoir des répercussions graves.

Le sénateur Milne : A-t-on fait des études qui expliqueraient pourquoi cette substance s'accumule plus rapidement dans l'Arctique que dans le sud de l'Ontario, par exemple?

M. Moffet : Nous pouvons répondre à cette question de façon très générale. C'est lié à la façon dont fonctionne la chaîne alimentaire, à la nature des vents dominants et à d'autres facteurs. Des substances chimiques pénètrent dans les Grands Lacs; elles sont ingérées, tombent dans les sédiments au fond d'un lac; les organismes qui se nourrissent sur le fond d'un lac en ingèrent, ceux-ci sont mangés à leur tour et un oiseau les mangent finalement.

Le sénateur Milne : Vous semblez suggérer que ça se propage par la voie atmosphérique.

M. Moffet : Les oiseaux émigrent vers le Nord et les ours polaires les mangent. On a également détecté la présence de cette substance ici, et elle s'accumule. Elle s'accumule dans des animaux comme les ours polaires, car ceux-ci sont entièrement carnivores et ils emmagasinent ce qu'ils mangent pendant de longues périodes.

On constate la présence de nombreuses substances qui posent problème, et pas seulement de SPFO, en fortes concentrations dans le Nord. Ça sert d'avertissement aux autres régions du monde; ça pose des risques considérables pour les personnes qui consomment de la nourriture traditionnelle et mangent les animaux qu'elles tuent, contrairement à celles qui achètent leur nourriture.

Le président : Pour terminer cette question, est-ce un fait connu que le SPFO se propage dans certaines circonstances par la voie de l'air, plutôt qu'uniquement par le biais de la chaîne alimentaire?

M. Moffet : Je m'excuse. J'arrive en terrain glissant pour ce qui est de mes connaissances techniques. Nos collègues de Santé Canada font toutefois signe que oui de la tête.

Je ne suis pas la personne appropriée pour répondre à ces questions et faire des commentaires sur les différentes sources et sur la trajectoire de ces substances. Si le comité veut des informations supplémentaires, nous pourrions arranger ça. Nous nous excusons pour le fait que notre directeur intérimaire de la Division des substances actuelles, Robert Chénier, qui est le principal expert sur les impacts écologiques de la substance, n'était pas disponible ce soir. Nous pourrions toutefois nous arranger pour qu'il donne des réponses.

Le président : Je tiens à préciser que la propagation du SPFO par la voie aérienne n'était pas exclue. Nous avons appris que le SPFO se déplace dans l'environnement, qu'il y reste longtemps et qu'il est persistant.

Monsieur Moffet, vous avez signalé tout à l'heure qu'il y avait une distinction entre le SPFO et les substances toxiques normales. Faut-il en conclure que ces dernières ne sont pas persistantes ni bioaccumulatives?

M. Moffet : Je regretterai probablement l'emploi de ces termes-là. Une « substance toxique normale », ça ne devrait pas exister. Je voulais faire la distinction entre les substances toxiques persistantes et bioaccumulatives et les autres substances toxiques.

Dans le contexte de la LCPE, nous examinons la toxicité d'une substance. Nous nous demandons par exemple si une substance pose un risque inhérent à sa composition chimique. Puis, nous nous demandons si elle pose un risque parce qu'elle a des propriétés dangereuses et s'il y a des possibilités d'exposition pour l'environnement ou d'exposition directe pour les humains. Ce sont les critères sur lesquels est basée notre évaluation des risques aux termes de la LCPE.

En se basant sur cette évaluation des risques, on peut en conclure qu'une substance est toxique pour les humains ou pour l'environnement, ou les deux. En outre, une substance peut être toxique et persistante, toxique et bioaccumulative ou posséder les trois caractéristiques. Certaines substances toxiques possèdent les trois caractéristiques, mais pas la plupart. Ce ne sont que celles qui possèdent les trois caractéristiques qui, en vertu de la loi, sont sujettes à quasi- élimination.

Nous pouvons interdire et avons interdit de nombreuses substances qui ne répondent pas aux trois critères. Si elles causent le cancer en concentrations minimes, nous prendrons des mesures importantes sans qu'elles doivent nécessairement être persistantes ou bioaccumulatives. Cependant, si elles le sont, en plus d'être toxiques, nous devons prendre des mesures importantes.

Le sénateur Spivak : Pour en revenir à ma question initiale et à la Convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants, les substances qu'on appelle les « Douze salopards » étaient censées être éliminées, et pas quasi éliminées. Est-ce que ce sont celles dont vous parlez, qui sont toxiques, bioaccumulatives et persistantes?

Ce projet de loi attire mon attention sur une mesure qui était censée être prise rapidement et qui ne l'a probablement pas été : l'élimination totale, et pas la quasi-élimination, des « Douze salopards ». Si vous ne pouvez pas répondre à cette question, je vous le pardonnerai.

M. Moffet : Vous avez demandé si toutes les substances font partie de la liste de la Convention de Stockholm. Je n'ai pas la réponse à cette question. Cependant, il y a quelque temps, le Canada et la communauté internationale ont décrété que ces 12 substances posaient de gros problèmes. Peu importe le fait qu'il s'agisse de PBTi, il s'agit de substances très préoccupantes et elles ont été ciblées par la communauté internationale.

Le concept de la quasi-élimination a été introduit par la Commission mixte internationale lorsqu'elle a examiné les polluants pénétrant dans l'écosystème des Grands Lacs. La « quasi-élimination » est un concept qui a été adopté pour indiquer qu'on veut se débarrasser de certaines substances. Cependant, sur le plan technique, nous ne sommes pas tout à fait certains d'avoir éliminé totalement ces substances. Tout ce que nous savons, c'est que nous les avons éliminées dans des proportions mesurables. C'est la notion de la quasi-élimination.

Le sénateur Spivak : C'est une notion différente de celle de l'interdiction. Si on interdit la fabrication d'une substance, on n'a pas à se demander s'il en subsiste de petites quantités. La notion de la quasi-élimination est suspecte, car on sait que des niveaux très faibles de certaines substances ont des incidences spécifiques selon le sexe. Ce n'est toutefois pas ma question. Un autre témoin pourra peut-être répondre à la question sur les « Douze salopards », car j'aimerais savoir ce qu'ils sont devenus.

M. Moffet : Nous vous ferons parvenir un état de la situation des « Douze salopards » par écrit. Sauf votre respect, je vous rappelle que l'approche proposée par le gouvernement en ce qui concerne le SPFO est l'interdiction.

Le sénateur Spivak : Oui, je comprends cela; il n'est toutefois pas question d'en interdire toutes les utilisations. Il s'agit de « certaines utilisations ». Il n'existe pas encore de produits de remplacement. C'est ce qui est écrit dans nos notes.

M. Moffet : C'est exact, et c'est pour cela que sont incluses dans le règlement du gouvernement certaines dispenses très spécifiques de durée limitée. Il n'y a pas de dispenses permanentes; elles sont d'une durée limitée. Elles ont pour but d'indiquer clairement aux utilisateurs et aux producteurs concernés qu'ils ont cinq ans pour changer de branche ou pour trouver une autre solution qui leur permettra de continuer sans utiliser du SPFO.

Le sénateur Spivak : Je voudrais faire un commentaire sur le Protocole de Montréal, qui a supprimé les chlorofluorocarbures, ou CFC, de l'environnement, car on présume qu'ils posent un risque terrible. Certaines de ces substances ont toutefois des répercussions tout aussi néfastes sur la santé humaine. Elles ne sont pas tout à fait aussi néfastes, mais elles sont très néfastes. La question de temps est importante.

Ce que je veux dire, c'est qu'on estimait que c'était terrible d'accorder un délai aux entreprises, mais elles se sont toutes soumises aux contraintes. Je pense que c'est la même chose en l'occurrence.

M. Moffet : La raison pour laquelle on a utilisé les CFC est que leurs répercussions sur la santé humaine sont minimes; ils ont toutefois un impact sur l'environnement. Le Protocole de Montréal a été si efficace que le principal producteur a déjà mis au point une autre solution rentable.

Le règlement d'interdiction proposé par le gouvernement est fondé sur le fait qu'on estime que certaines utilisations sont en quantités si considérables qu'il faut les interdire, qu'on dispose ou non d'une alternative commerciale. Cependant, d'autres utilisations ont des fonctions sociales importantes, comme agents extincteurs. Dans ces cas-là, il faut faire un compromis entre le rôle social important que joue cette substance et les avantages indéniables d'une interdiction de son utilisation. Par conséquent, le compromis que l'on a fait a été d'accorder une dispense d'une durée limitée.

Le sénateur Spivak : Les CFC sont, naturellement, un problème entièrement différent; je sais très bien qu'ils ne sont pas toxiques. Cependant, on estimait que c'était tellement important que, peu importe ce qui était disponible, l'échéance devait être très courte. Je pense qu'il y a toujours des alternatives possibles; c'est une simple question de volonté.

Le président : Un éminent chimiste nous a expliqué que si on demandait à des chimistes de résoudre le problème, ils le feraient immédiatement, sans difficulté.

Nous nous sommes préoccupés au sujet des conséquences non intentionnelles des projets de loi. Monsieur Blasioli, y a-t-il un danger de créer un précédent en ajoutant cette substance à la liste de quasi-élimination en ayant recours à d'autres procédures que ce qui est prescrit pour d'autres substances régies par d'autres règlements ou par d'autres lois. Y a-t-il un danger d'établir un précédent dangereux en éliminant certaines sauvegardes? Est-ce que ça vous préoccupe?

M. Blasioli : C'est une excellente question, qui concerne davantage les opérations. Je laisse la parole à M. Moffet.

M. Moffet : Je ne pense pas que le gouvernement soit préoccupé au sujet des répercussions de ce projet de loi, car il se sent très à l'aise de reconnaître explicitement que cette substance devrait être ajoutée à la liste de quasi-élimination.

Le président : Sera-t-il plus facile d'ajouter d'autres substances à la liste de quasi-élimination à l'avenir en utilisant des moyens semblables plutôt que ceux prescrits par la LCPE (1999)?

M. Moffet : Oui.

Le président : Ce serait bien.

M. Moffet : Est-ce que d'autres projets de loi d'initiative parlementaire pourraient exiger que d'autres substances soient ajoutées à la liste de quasi-élimination?

Le président : Ou des projets de loi émanant du gouvernement. Est-ce qu'en procédant ainsi, on contournerait les dispositions de la LCPE (1999)?

M. Moffet : C'est concevable, quoique je ne veuille pas faire des suppositions.

Le président : Est-ce un raccourci efficace?

M. Moffet : Ça nous a permis d'ajouter une substance qui nous préoccupe particulièrement à la liste de quasi- élimination sans devoir suivre une procédure qui serait redondante.

Le sénateur Trenholme Counsell : Je voudrais savoir si notre proposition est beaucoup moins vigoureuse que les règlements américains.

M. Moffet : Je pense que les règlements d'interdiction sont plus exhaustifs que les mesures qui sont en place au niveau fédéral aux États-Unis.

Le sénateur Trenholme Counsell : J'en doute. J'accepte votre explication, mais il est indiqué que « depuis 2000, l'Agence de protection de l'environnement des États-Unis (EPA) a imposé une interdiction du SPFO, avec des dispenses pour des utilisations spéciales dans les secteurs de l'aviation, de la photographie et de la microélectronique ». Il faut en avoir la certitude. Il est indiqué que, dans le cadre des études effectuées sur le sang des cordons ombilicaux de nouveau-nés, dans 99 p. 100 des cas, on avait détecté la présence de ces substances chimiques. C'est une information très frappante. Il ne s'agit pas d'une substance qu'on retrouve uniquement dans les ours polaires ou dans les visons, dans l'Arctique. Ces données de l'étude de Mme Goldman, de l'École de santé publique Bloomberg de l'Université Johns Hopkins, indiquent que le SPFO est présent dans 99 p. 100 des cordons ombilicaux soumis à un test.

Ça répond à ma question précédente sur le caractère universel du problème. Il est essentiel que le comité sache si on envisage une mesure beaucoup moins stricte que celles qui ont été prises aux États-Unis. On pense souvent qu'on fait mieux au Canada. J'aimerais avoir une réponse à cette question, quoique pas nécessairement tout de suite.

M. Moffet : Pour être bien clair, je signale que ce projet de loi n'a pas pour objet d'imposer des restrictions sur l'utilisation du SPFO. Il ajoute cette substance à la liste de quasi-élimination. Les règlements que j'ai mentionnés interdiraient l'utilisation du SPFO, sous réserve de quelques dispenses d'une durée limitée et, dans certains cas, de dispenses pour des quantités restreintes. Ces dispenses sont semblables à celles qui ont été mises en place ou qui ont été proposées par d'autres pays, notamment par ceux de l'Union européenne.

Je ne connais aucune interdiction équivalente au niveau fédéral, aux États-Unis. Il existe une restriction sur une nouvelle utilisation importante au niveau fédéral, mais ce n'est pas l'équivalent d'une interdiction sur les importations, sur la production et la vente de produits contenant cette substance, alors que c'est ce que feraient les règlements canadiens.

Le sénateur Milne : Ces règlements ont-ils été publiés dans la Gazette du Canada?

M. Moffet : La version initiale des règlements a été publiée en décembre 2006; nous prévoyons qu'ils seront prêts définitivement et entreront en vigueur ce printemps.

Le sénateur McCoy : Si j'ai bien compris vos explications, vous n'avez pas besoin de ce projet de loi; il n'apporte rien, mais vous n'y êtes pas opposé. Ce sont les règlements que vous avez proposés, mais qui ne sont pas encore en vigueur, qui feront tout le travail. Est-ce un bon résumé du témoignage que nous avons entendu?

M. Moffet : C'est un résumé élégant, mais à une exception près. J'estime que ce projet de loi a une valeur symbolique. Il envoie un signal aux producteurs et utilisateurs, à l'échelle mondiale. Nous savons que la gestion de la chaîne d'approvisionnement prend de plus en plus d'importance et qu'elle est basée sur des choses comme des listes, et pas uniquement par des règlements. Par ailleurs, au niveau international, le fait d'ajouter une substance à la liste de quasi-élimination devrait, à mon sens, augmenter les probabilités d'une intervention internationale en ce qui la concerne.

Le président : Merci, messieurs. Vous nous avez beaucoup aidés à comprendre l'objet et les incidences de ce projet de loi.

Nous rencontrons maintenant notre deuxième groupe de témoins, dont nous apprécions beaucoup la présence, toujours à propos du projet de loi C-298, Loi visant à ajouter le sulfonate de perfluorooctane (SPFO) et ses sels à la liste de quasi-élimination établie en vertu de la LCPE (1999).

Notre deuxième groupe est composé de la Dre Lynn Goldman, qui communique avec nous par vidéoconférence, et de M. Benevides, avocat à l'Association canadienne du droit de l'environnement. La Dre Goldman est professeure à l'Université Johns Hopkins. Dr Khatter, qui est conseiller politique de pollution à Environmental Defence, se joindra à nous.

Dre Lynn Goldman, professeure, Université Johns Hopkins : Bonsoir. C'est un honneur pour moi de témoigner aujourd'hui sur le projet de loi C-298, Loi visant à ajouter le sulfonate de perfluorooctane (SPFO) et ses sels à la liste de quasi-élimination établie en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999).

Comme vous l'avez expliqué, j'enseigne la médecine de l'environnement à l'École de santé publique Bloomberg de l'Université Johns Hopkins. Ma formation est en pédiatrie et en santé publique. J'ai également travaillé pour le gouvernement américain de 1993 à 1998. J'étais administratrice adjointe pour les substances toxiques à l'Agence de protection de l'environnement des États-Unis (EPA). J'étais chargée d'administrer les lois américaines concernant les produits chimiques et les pesticides. À l'heure actuelle, je fais des recherches sur le SPFO et sur d'autres produits chimiques polyfluorés. C'est à ce titre que je témoigne aujourd'hui.

Comme vous le savez, les composés polyfluoroalkyles comme le sulfonate de perfluorooctane et d'autres produits sont des produits chimiques généralisés. Ils sont faits par l'homme et ils ont été largement dispersés dans l'environnement.

En 2004, nous avons entrepris à Baltimore une étude pour évaluer chez les nouveau-nés la distribution et les facteurs de l'exposition des fœtus à ces composés. Notre échantillon de commodité comptait 299 nouveau-nés issus de grossesses uniques — autrement dit, pas des jumeaux ni des triplés — en 2004 et 2005 à l'hôpital Johns Hopkins. Ils ne sont pas forcément représentatifs de tous ceux qui naissent dans la région de Baltimore mais, au meilleur de nos connaissances, il n'y a pas de grande source d'exposition à ces composés dans cette région, comme des usines de fabrication et de transformation.

Les centres américains de contrôle et de prévention de la maladie ont analysé dans leur laboratoire d'Atlanta, en Géorgie, des échantillons de sang à la recherche de dix produits chimiques polyfluorés en ayant recours à la technologie la plus avancée. Le SPFO et l'APFO ont été détectés dans 99 et 100 p. 100 des sérums ombilicaux. En d'autres termes, le SPFO a été détecté dans 99 p. 100 des échantillons.

Nous avons publié les niveaux que nous avons découverts en ce qui concerne ces composés dans la revue américaine Environmental Science & Technology. J'ai communiqué au comité les références de nos études. Nous avons constaté que les concentrations de SPFO et d'APFO étaient étroitement liées et les huit autres composés polyfluorés que nous avons examinés ont été détectés beaucoup moins souvent et à des concentrations beaucoup plus faibles.

Une autre constatation intéressante que nous avons faite sur notre échantillon est que les niveaux étaient répartis de façon très égale. Ils étaient un peu plus élevés pour les bébés noirs et asiatiques que pour les bébés blancs, mais les autres caractéristiques démographiques et socioéconomiques, comme l'âge de la mère, son niveau d'instruction et d'autres variables de statut socioéconomique, que ces personnes vivent à Baltimore ou non, n'étaient pas associées de façon marquée à des concentrations de ces contaminants dans le sang du cordon ombilical. C'est une constatation intéressante pour les scientifiques car, pour la plupart des substances environnementales, on constate certains liens avec la classe sociale et le lieu de résidence que nous n'avons pas observés pour ces composés.

Étant donné que les études expérimentales sur des animaux ont indiqué que ces substances sont associées à une toxicité pour le développement des bébés, nous avons examiné des données sur l'issue de la grossesse, comme l'âge gestationnel et la croissance des bébés. Nous avions à notre disposition plusieurs paramètres critiques souvent associés à ces issues, avec le tabagisme et d'autres paramètres, ce que nous appellerions « variables confusionnelles ». On a décelé un lien négatif entre le SPFO et l'APFO et le poids à la naissance. Une association négative a été faite pour ces deux substances avec la circonférence de la tête des bébés. Ce lien avec la circonférence de la tête était important, car les bébés ayant été davantage exposés au SPFO et à l'APFO avaient la tête légèrement plus petite à la naissance, même après avoir fait une correction pour d'autres facteurs comme l'âge gestationnel des bébés. Nous n'avons pas remarqué de lien avec la grandeur des bébés.

Nous avons ensuite examiné une autre mesure de la croissance appelée l'« indice pondéral », qui est en fait une mesure de la masse corporelle des bébés. Nous avons constaté que les bébés avaient un indice pondéral moins élevé lorsqu'ils avaient été exposés davantage au SPFO et à l'APFO.

Je voudrais expliquer ce que ces résultats pourraient indiquer. Nous avons examiné les publications sur la toxicologie et avons relevé de nombreuses preuves de toxicité affectant le développement chez les animaux ayant du SPFO et de l'APFO dans leur organisme, quoique ces études expérimentales sur des animaux aient été faites à des niveaux de dosage beaucoup plus élevés que ceux que nous avons observés dans notre population. En outre, un enquêteur a signalé dernièrement que des souris nouveau-nées, qui avaient été exposées au SPFO ou à l'APFO, avaient fait montre plus tard d'une neurotoxicité en ce qui concerne le développement; étant donné que nous savons que les composés qui causent de la toxicité au cerveau provoquent aussi parfois un ralentissement de sa croissance; c'est une constatation intéressante.

De nombreuses autres études épidémiologiques sur les effets qu'ont ces composés sur la santé des bébés humains ont été faites. Un des sénateurs a posé une question à ce sujet. Il y a une étude que nous ne jugeons pas pertinente, car elle portait sur des travailleurs, était fondée entièrement sur le souvenir que l'on avait du poids du bébé à la naissance et ne s'appuyait pas sur des informations clés comme l'âge gestationnel. C'est toutefois très important de tenir compte du poids à la naissance pour pouvoir contrôler l'âge gestationnel. Nous savons que le bébé est d'autant plus gros que l'âge gestationnel est avancé.

Cependant, une deuxième étude faite au Danemark a examiné 1 400 femmes et leurs bébés en s'appuyant sur des méthodes un peu différentes des nôtres. Les chercheurs danois ont fait les mêmes constatations que nous en ce qui concerne le lien entre le poids à la naissance et la présence d'APFO, mais pas entre le poids à la naissance et le SPFO. Ils n'ont pas signalé de résultats en ce qui concerne la circonférence de la tête ou l'indice pondéral, qui étaient nos constatations les plus importantes.

Nous ne pouvons pas encore en conclure que les résultats de notre étude ont été confirmés par d'autres études, quoique l'étude danoise semblerait indiquer, du moins en ce qui concerne l'APFO, que d'autres études pourraient publier des résultats semblables en ce qui concerne le poids à la naissance.

Quelle serait l'importance de ces études? Il y a deux facteurs qui sont importants. Le premier est le fait de trouver ces composés dans un pourcentage aussi élevé de bébés faisant partie de la population. Le problème en ce qui concerne notre étude est que nous ne sommes pas capables d'évaluer les types de données que nous avons à notre disposition, les sources et les parcours de ces composés pour les bébés. En d'autres termes, nous ne savons pas vraiment comment leurs mères ont été exposées. Nous savons que les bébés ont probablement hérité des composés de leur mère, car ils sont présents dans le sang du cordon ombilical, à la naissance, mais nous ne savons pas comment les mères ont été contaminées.

Des informations récentes publiées dans la revue américaine Science indiquent que des chercheurs ont décrit un nouveau mécanisme de bioaccumulation, relatif aux chaînes alimentaires des mammifères qui respirent de l'air. Étant donné que nous sommes des mammifères qui respirent de l'air, ça nous concerne. Ces chercheurs ont décrit une nouvelle catégorie de polluants organiques persistants à coefficient de partage octanol-air élevé (KOA); par conséquent, ces composés peuvent être absorbés par les voies respiratoires et, étant donné la mauvaise élimination respiratoire, les concentrations de ces composés sont amplifiés chez les mammifères. Il semblerait que ce soit le cas en ce qui concerne le SPFO et l'APFO, et c'est probablement la raison pour laquelle on n'avait pas prévu qu'ils seraient des bioaccumulateurs, car ils n'ont pas des coefficients de partage octanol-eau (KOW) élevés ni des coefficients artésiens octanol-eau élevés, contrairement aux POP classiques.

Ces résultats n'ont été publiés que l'année dernière, mais je pense que cela aura malgré tout un impact profond sur la façon dont nous abordons la question de la bioamplification et indiquent que nous aurons peut-être besoin de mettre en place de nouvelles politiques pour nous assurer que nous prenons les mêmes mesures qu'en ce qui concerne les polluants organiques persistants, comme nous le faisons pour les substances qui s'accumulent dans les réseaux aquatiques, ceux qui ont des coefficients octanol-eau élevés.

Quelle sera l'incidence sur la santé plus tard dans la vie de ces bébés? Nous ne savons pas vraiment quelle sera l'importance de ces conclusions à cet égard. Notre étude n'est pas conçue pour en faire un suivi. Nous savons que, d'une façon générale, un changement de poids et un changement d'indice pondéral indiquent des altérations métaboliques plus graves et que ça peut poser problème. Cependant, certaines personnes ont émis l'hypothèse inverse que ce serait parce que les bébés sont plus petits que ces composés s'accumulent dans leur organisme.

L'autre chose que nous savons, c'est qu'un changement de circonférence de tête avait, comme je l'ai mentionné, été associé à la neurotoxicité mais, en l'occurrence, nous n'en avons pas la certitude.

En terminant, nous avons des incertitudes en ce qui concerne l'importance réelle de nos constatations. Ces composés sont toutefois persistants dans l'environnement et chez l'humain. C'est pourquoi j'aurais tendance à appuyer des propositions comme celle d'interdire progressivement l'utilisation du SPFO. Je suis également préoccupée au sujet de l'APFO et des produits chimiques qui sont des précurseurs du SPFO et de l'APFO dans l'environnement. Je me rends compte qu'ils ne sont pas soumis à votre législation actuelle. Je pense cependant qu'ils poseront également des problèmes à l'avenir.

Je vous remercie de m'avoir invitée à témoigner. Je suis disposée à répondre à vos questions et à discuter de ces questions avec vous.

Hugh Benevides, avocat, Association canadienne du droit de l'environnement :Pour la gouverne des membres du comité qui ne me connaissent pas et qui ne connaissent pas mon organisation, je travaille pour l'Association canadienne du droit de l'environnement. C'est un centre d'aide juridique créé dans le contexte d'Aide juridique Ontario. À ce titre, nous représentons des clients, des groupes écologiques et les personnes qui répondent aux critères de l'aide juridique, pour leurs problèmes environnementaux. Nous existons depuis 1970.

Conformément à cette fonction de représentation de la clientèle, au cours de ces années, nous avons également participé à la réforme du droit et à des travaux de réforme des politiques. Dans ce contexte, mes collègues ont présenté au cours des dernières années plusieurs mémoires axés spécifiquement sur les produits chimiques perfluorés, les PPF.

Mes commentaires sont très généraux. Je félicite le comité pour son rapport sur l'examen de la LCPE. Je ne me contente pas de vous féliciter, mais je veux aussi relever certaines des recommandations pertinentes à ce projet de loi, et surtout la recommandation 5 qui dit ceci :

[...] que la définition et l'application du principe de quasi-élimination dans la LCPE 1999 et la Politique de gestion des substances toxiques soient modelées sur celles de l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs.

Ce qui est toutefois plus important, vous le signalez dans la note placée au-dessus de la recommandation, c'est que « le comité n'a pas examiné la question de la quasi-élimination en profondeur », mais qu'il

« [...] croit que la notion de quasi-élimination en vertu de la LCPE 1999 doit être repensée pour être plus efficace ».

J'aborde la question car — et c'est peut-être un oubli de notre part — nous n'avons pas remis à ce comité le mémoire de deux pages que nous avions fait parvenir au comité de l'autre Chambre en janvier 2007. Notre mémoire contenait des observations sur les faiblesses de la notion de quasi-élimination dans la LCPE. Certains sénateurs se souviennent peut-être que, bien que les défenseurs de l'environnement voulaient une définition ou une formulation plus élaborée de la notion de « quasi-élimination », c'était plus conforme à la notion initiale de quasi-élimination — et je reviens aux commentaires qu'a faits tout à l'heure le sénateur Spivak —, à savoir qu'elle était apparentée à la notion de prévention de la pollution. Ce qui ressort du projet de loi C-32, c'est-à-dire le projet de loi qui a donné naissance à la LCPE de 1999, c'est une formulation de la notion de « quasi-élimination » entièrement axée sur les rejets de substances et pas du tout sur l'impératif de la prévention de la pollution, à la source. En d'autres termes, l'interdiction d'emblée de l'emploi de certaines substances ou leur élimination — que l'on veuille l'appeler « quasi-élimination » ou non — ou leur interdiction.

C'est dans ce contexte que j'ai fait quelques observations sur le projet de loi que vous êtes chargé d'examiner. Je ne peux pas en toute bonne conscience dire que je pense que c'est une initiative intéressante, malgré la valeur symbolique importante évoquée tout à l'heure par M. Moffet. Je serais heureux qu'on me corrige. Si au moins la communauté internationale comptait sur le fait que le Canada ajoute le SPFO à sa liste de quasi-élimination pour accélérer le processus d'inclusion de cette substance dans la réglementation mondiale mentionnée tout à l'heure.

Je ne tiens pas à ce qu'on pense qu'une limite de dosage exigée actuellement aux termes de la loi pour la quasi- élimination est ce que je voudrais. J'estime, moi aussi, que ça coûterait cher de calculer comment et en quelles quantités cette substance est libérée des décharges publiques et quels sont ses autres mécanismes de dégradation.

J'en parle parce que je tiens, en toute honnêteté, à signaler que je doute que l'inscription de cette substance sur la liste de quasi-élimination par le Canada aura cet effet symbolique. Je pense que tous les étrangers qui s'intéressent à ces mécanismes ou instruments et observent le Canada se demandent ce que ça veut dire et ce qu'on fera au sujet de cette substance. M. Moffet a été honnête avec vous. Il a signalé que, dans le contexte de ce projet de loi, le fait d'ajouter le produit à la liste de quasi-élimination ne changerait rien. J'ai apprécié sa franchise à cet égard.

En ce qui concerne la question du règlement d'interdiction qui, d'après M. Moffet, est imminent, j'aimerais faire un lien avec les recommandations de votre comité concernant l'établissement de délais pour la Loi canadienne pour la protection de l'environnement. Je pense qu'il s'agit des recommandations 16 et 17. Nous avons témoigné, avec M. Khatter, en février 2007, à propos des substances perfluorées.

Notre mémoire proposait des délais. Je n'en parle pas pour signaler que nous vous l'avions dit ou quoi que ce soit de cette nature. Cependant, si le délai que nous avions proposé, entre la publication d'un instrument proposé — c'est-à- dire le règlement d'interdiction proposé mentionné par M. Moffet, qui a été publié dans la Gazette du Canada en décembre 2006, il n'y a même pas 18 mois, et c'est le délai actuel — et sa forme définitive avait été adopté, le règlement aurait déjà dû être publié. Nous avions proposé un délai de six mois. Je suis heureux d'apprendre que le règlement sera publié. J'attire toutefois votre attention sur le fait que vous étiez dans le vrai en disant que seuls des délais obligatoires obligeraient le gouvernement à passer à l'action.

Enfin, je voudrais attirer l'attention du comité sur une lettre que mes collègues, Kathleen Cooper et Fe De Leon, ont adressée au directeur de la Division du secteur chimique en février 2007. Je m'excuse de ne pas avoir apporté des exemplaires de ces documents, mais je les remettrai volontiers au greffier. La lettre recommandait que pour la gestion des produits chimiques à base de SPFO, il soit obligatoire qu'une liste spécifique, exhaustive et explicite des substances chimiques soit intégrée au règlement. Je pense que le règlement proposé ne contient pas de liste semblable. Par conséquent, le règlement d'interdiction ne couvrirait pas le groupe le plus large possible de substances. Ça concerne le règlement, pas le présent projet de loi. Je félicite le comité d'examiner les questions plus générales.

Dr Kapil Khatter, conseiller en politiques sur la pollution, Environmental Defence : Je vous remercie pour cette occasion de faire un exposé. Je suis médecin de famille à Ottawa et je suis conseiller en pollution pour Environmental Defence, un organisme écologique national qui s'intéresse à un large éventail de questions environnementales, y compris les substances toxiques, les espèces fauniques et le zonage.

Le comité comprend maintenant que le SPFO pose un grave problème. Mme Goldman a signalé qu'il est plus persistant et bioaccumulatif que certaines des substances faisant partie des « Douze salopards » dont on s'est déjà préoccupé. Des données récentes indiquent que les niveaux de SPFO dans l'organisme des ours polaires ont maintenant surpassé les niveaux de BCP qui nous préoccupaient déjà. L'EPA a écrit que le SPFO est une technologie inacceptable qui devrait être éliminée pour protéger la santé humaine et l'environnement de conséquences qui pourraient être graves à long terme.

Environmental Defence appuie ce projet de loi. Nous sommes heureux que vous preniez cette initiative. Comme l'a fait remarquer M. Moffet, le projet de loi a déjà été partiellement efficace. Depuis qu'il a été présenté, il a incité le gouvernement à établir des ébauches de règlement et à inscrire le SPFO sur la liste des substances toxiques au Canada. Nous attendons malheureusement encore que ces règlements soient définitifs.

Le projet reste important. Comme l'ont fait remarquer le sénateur Milne et M. Moffet, les règlements sur la bioaccumulation sont désuets. La façon dont ils sont conçus pose un problème, car ils n'intègrent pas une substance comme le SPFO, malgré le fait que nous sachions pertinemment qu'il est terriblement bioaccumulatif. Des fonctionnaires comme M. Moffet sont en mesure de dire que nous savons qu'il est bioaccumulatif, mais on ne peut rien faire car les règlements actuels ne le permettent pas. C'est pourquoi les fonctionnaires du ministère appuient un projet de loi qui leur permet de placer le SPFO sur la liste de quasi-élimination, où ils estiment que cette substance devrait se trouver.

M. Moffet a fait remarquer que ça aurait une valeur symbolique sur le plan national et sur le plan international. À l'intérieur du pays, le projet de loi fixe un objectif et une norme canadiens en ce qui concerne l'opinion que nous avons du SPFO et la mesure que nous voulons prendre à son sujet, à savoir sa quasi-élimination de notre environnement.

Ça indique également la position du Canada vis-à-vis la Convention de Stockholm et l'inscription du SPFO sur la liste des polluants organiques persistants. Nous avons eu des discussions avec le gouvernement et il est disposé à appuyer le projet d'inscription du SPFO dans la Convention de Stockholm. Le gouvernement estime que le projet de loi fait à l'échelle internationale une assertion en faveur de l'inscription du SPFO sur la liste. Il a été recommandé par le Comité d'examen des polluants organiques persistants que le SPFO soit inscrit dans la Convention de Stockholm et qu'il devrait peut-être constituer le treizième membre du groupe des « Douze salopards ».

Il y a deux ou trois raisons pour lesquelles c'est important; M. Moffet en a d'ailleurs mentionné une. La première est que bien que les entreprises américaines et canadiennes s'appliquent peut-être à supprimer graduellement le SPFO et que nous ayons des règlements pour tenter de contrôler les produits de consommation importés dans notre pays, de récents reportages indiquent qu'il est difficile d'appliquer les règlements dans ce domaine. Bien que nous sachions que le plomb pose un problème et qu'il existe des règlements bien précis à son sujet, on continue d'importer au Canada des produits contaminés au plomb en raison de la difficulté de faire respecter les règlements.

Une raison pour faire cette assertion à l'échelle internationale est qu'il est essentiel que des pays autres que les pays développés, qui ont des règlements environnementaux stricts, cessent d'utiliser, de produire et d'intégrer du SPFO à des produits importés au Canada.

Une autre raison est que le SPFO est une substance persistante qui fait partie de ce qu'on appelle le transport à grande distance. On en a discuté au cours de la dernière réunion d'experts à ce sujet. Quand ce règlement a été publié dans la Gazette du Canada à titre de projet de règlement, il répondait aux critères du transport à longue distance, à savoir qu'il se propage finalement par la voie atmosphérique et fait le tour de la planète. Étant donné que les régions polaires sont plus froides, ça touche en fin de compte des pays comme le Canada. Quand les pays du Sud, comme la Chine ou l'Inde, produisent du SPFO, il peut contaminer les ours polaires et les habitants du Canada.

Une autre raison qui a déjà été mentionnée pour démontrer que ce projet de loi est important est qu'il permet de lutter avec plus d'efficacité contre les problèmes visés par les règlements sur la bioaccumulation de la LCPE. Le rapport du comité sur la Loi canadienne sur la protection de l'environnement recommande que ces règlements sur la bioaccumulation soient modifiés. Ce projet de loi est une façon supplémentaire d'indiquer que les règlements sont désuets, que le SPFO devrait être inscrit sur la liste et que c'est impératif. Il montre ce que le Parlement peut faire en matière de quasi-élimination. En outre, il indique ce que le Parlement peut faire pour démontrer l'importance de l'exercice d'un contrôle sur le SPFO, et sa toxicité, et faire savoir qu'il faut régler ce problème de toute urgence.

Environmental Defence espère que vous adopterez ce projet de loi et contribuerez ainsi à la protection des humains et de l'environnement contre les impacts potentiels du SPFO. Nous espérons en outre que vous contribuerez à l'autre projet auquel nous travaillons, à savoir la réforme de la législation concernant les produits chimiques au Canada. Nous sommes particulièrement préoccupés au sujet de substances chimiques comme le SPFO, qui sont les plus dangereuses. Ce sont des produits chimiques qui peuvent s'accumuler dans notre organisme et dans l'environnement, pour finalement causer des problèmes.

Le sénateur Milne : Docteure Goldman, je pense que les conclusions de votre étude sont très effrayantes et très préoccupantes. Faites-vous un suivi de ces bébés pour en faire une évaluation à différentes étapes de leur vie afin de déterminer si une circonférence de la tête ou une masse corporelle moindre aura plus tard une incidence sur leur développement?

Dre Goldman : Non, sénateur Milne. Nous ne sommes pas capables de faire un suivi de ces bébés car l'étude était conçue de telle sorte qu'ils restaient tout à fait anonymes.

Nous faisons actuellement d'autres travaux associés à cette étude. Nous avons un dépôt de sérum et nous évaluons les liens entre les niveaux d'hormone thyroïdienne et le SPFO et l'APFO. Nous comptons examiner aussi d'autres paramètres endocriniens, pour mieux comprendre la situation.

À l'École de santé publique Bloomberg de l'Université Johns Hopkins, je suis l'enquêtrice principale du Centre national d'étude sur les enfants. C'est le travail que nous espérons effectuer dans ce contexte, mais d'autres groupes de chercheurs font des études qui leur permettront d'autres études longitudinales.

Nous avons été très surpris des niveaux décelés et étonnés de déceler des preuves de la présence ou des effets de ces substances car, dans les études effectuées sur des animaux, les doses étaient beaucoup plus fortes. Nous ne nous attendions pas à avoir des résultats positifs à signaler.

Le sénateur Milne : Vous avez été étonnés de faire de telles constatations à des niveaux d'exposition aussi faibles. Vous signalez que vous continuez à faire des tests sur le sérum que vous avez stocké en vue de découvrir d'autres problèmes, par exemple, des problèmes thyroïdiens.

Dre Goldman : Oui, nous pensons que s'il y a un impact sur la croissance, on pourrait également constater des changements dans les niveaux hormonaux. Nous examinons par conséquent ces niveaux. Nous examinerons également le facteur de croissance semblable à l'insuline, qui est l'équivalent de l'hormone de croissance humaine pour le fœtus. Nous examinons ces niveaux pour déterminer s'ils sont modifiés ou non par l'exposition au SPFO.

Le sénateur Milne : Ça devient de plus en plus terrifiant d'une minute à l'autre. Il est peut-être maintenant déjà trop tard pour intervenir.

Monsieur Benevides, j'ai l'impression que vos commentaires ne sont pas défavorables à ce projet de loi, quoique vous ayez dit que vous ne l'appuyiez pas et que des problèmes se posent en ce qui concerne la définition, ou plutôt l'absence de définition, de la « quasi-élimination ». Ne pensez-vous pas qu'il faille commencer quelque part?

M. Benevides : Il est vrai que je n'y suis pas vraiment opposé, mais je ne pense pas que la valeur symbolique sera très importante. Je n'ai pas été très précis dans mon exposé préliminaire; cependant, j'ai signalé qu'une personne qui voudrait essayer de voir ce que le Canada a fait constaterait qu'il a inscrit le SPFO sur la liste sans prendre de mesures. Mes commentaires portent uniquement sur l'inscription de cette substance sur la liste de quasi-élimination.

La perspective d'un précédent a été mentionnée dans une question qui a été posée tout à l'heure, mais c'est un précédent différent de ce que vous avez évoqué qui me tracasse, monsieur le président. Nous sommes déjà préoccupés par le fait que quasi-élimination n'ait pas le sens qu'on lui donnait traditionnellement. En outre, le fait d'ajouter cette substance à la liste ne signifie pas qu'il y ait une forte probabilité pour que nous y inscrivions, bon gré mal gré, toutes sortes de substances dans le but inavouable de rehausser la réputation du Canada, mais c'est la crainte qu'on a. Je ne pense pas que le fait d'ajouter à la liste de quasi-élimination une substance qui nécessite des mesures énergiques, sans passer à l'action, diffuse un message très intéressant sur le Canada.

Le sénateur Milne : Monsieur Khatter, avez-vous lu les règlements proposés? Pensez-vous qu'ils vont assez loin? Règleront-ils les problèmes évoqués par M. Benevides?

Dr Khatter : J'ai deux réponses à cette question. La première est que la quasi-élimination, telle qu'elle est agencée dans la loi, exige que le ministre, plutôt que le gouvernement, prenne une quelconque mesure. Depuis que le projet de loi a été déposé, ses promoteurs ont négocié avec le gouvernement et fait savoir que ce serait bien si le gouvernement décidait d'avoir recours au règlement de prohibition pour atteindre le but de la quasi-élimination ou de l'élimination. Le comité de la Chambre a régressé en apportant un amendement à la disposition du projet de loi que le gouvernement aurait normalement été tenu d'appliquer, car d'autres dispositions pourraient également lui être utiles. Nous n'avons jamais laissé ignorer que ça nous importait peu qu'on utilise la disposition concernant la quasi-élimination du projet de loi ou que, lorsqu'il est nécessaire de procéder à la quasi-élimination d'une substance, on ait recours à une interdiction pour atteindre cet objectif. Comme l'a fait remarquer M. Moffet, lorsqu'il s'agit de produits de consommation, les règlements d'interdiction constituent parfois un moyen efficace d'atteindre cet objectif. Ce qui est important à nos yeux, c'est que le SPFO ne deviendra que la deuxième substance à être sur la liste de quasi-élimination. La seule qui ait été inscrite sur cette liste jusqu'à présent a déjà été éliminée progressivement; nous estimons par conséquent qu'il est important de faire savoir que ces substances posent un sérieux problème et qu'il est essentiel de les supprimer.

Pour ce qui est de savoir si les règlements d'interdiction vont assez loin, nous comprenons certains des problèmes qui nécessitent une élimination progressive d'une substance à cause de son utilisation dans la société. Nous aimerions que le gouvernement aille un peu plus loin. Nous sommes au courant de l'existence d'un rapport préparé par des experts- conseils britanniques qui ont fait une analyse du secteur et ont déterminé que ça pourrait aller plus vite. Nous avons vu d'autres documents indiquant qu'en ce qui concerne la galvanoplastie décorative, s'il y avait un interrupteur permettant de passer de « chrome 5 » à « chrome 3 », il ne serait pas nécessaire d'utiliser du SPFO et que ce changement pourrait être apporté dans un délai plus court que les cinq ans prévus. Cinquante pour cent des entreprises qui font de la galvanoplastie utilisent déjà un système de ventilation mécanique ne faisant pas intervenir le SPFO; il suffit par conséquent d'obliger les autres utilisateurs à adopter ce système. Ça implique, naturellement, certains coûts.

D'autre part, il y a des utilisations liées à la fabrication des semi-conducteurs pour lesquelles je suis moins au courant des solutions de rechange. Comme l'a signalé le sénateur Spivak, il est essentiel de s'appliquer davantage à trouver d'autres solutions en imposant des délais serrés pour l'adoption de ce type de changements.

Le sénateur Milne : Je pense que la Suède a proposé que le SPFO soit interdit à l'échelle mondiale, dans le cadre de la Convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants. En outre, la Suède, et la Bretagne aussi, ont présenté une demande à l'Union européenne pour qu'elle interdise également le SPFO. Il est possible que ce que M. Benevides considère comme un geste purement symbolique déclenche un passage à l'acte.

Dr Khatter : Je suis d'accord avec ce que vous avez dit. D'ailleurs, au cours des discussions que nous avons eues avec les fonctionnaires en ce qui concerne les mesures à prendre au sujet du SPFO, on a dit qu'il était important que le Canada prenne position sur la Convention de Stockholm. Je fais référence aux « Douze salopards », et c'est précisément pourquoi j'ai expliqué qu'il est essentiel qu'on veille à encourager l'élimination de l'utilisation du SPFO, à l'échelle mondiale, et à faire une déclaration à ce sujet, non seulement dans l'intérêt de la planète, mais aussi pour la santé des Canadiens et pour la faune canadienne.

M. Benevides : Il ne faut pas confondre une prise de position du Canada vis-à-vis de la Convention de Stockholm avec l'inscription par le Canada d'une substance sur la liste de quasi-élimination. Je tiens à préciser que nous sommes entièrement d'accord en ce qui concerne la nécessité de supprimer ce produit et d'autres substances persistantes, bioaccumulatives ou toxiques.

D'après ce que j'ai pu lire dans le Résumé de l'étude d'impact de la réglementation, le règlement proposé en ce qui concerne le SPFO prévoit quelques exemptions. M. Khatter en a conclu, en se basant sur des documents qu'il a vus, qu'il serait possible d'agir plus rapidement par le biais de cette réglementation.

Ce qui m'étonne, c'est que des représentants du gouvernement sont ici, mais qu'ils ne nous expliquent pas les motifs du retard et les raisons pour lesquelles on n'y remédie pas. Je veux seulement attirer l'attention sur cet aspect.

Le président : Pensez-vous qu'il y ait des considérations commerciales, monsieur Benevides?

M. Benevides : Oui, sénateur, il y a sans aucun doute des considérations commerciales.

Le président : Certaines d'entre elles seraient-elles raisonnables? D'autres ne seraient-elles pas déraisonnables?

M. Benevides : Je présume que oui, d'après le peu que j'aie pu lire au sujet du projet de règlement. Je présume que certaines de ces considérations paraissent raisonnables, mais je ne me mettrais pas dans une situation différente de celle du comité. Il faudrait analyser ces considérations.

Le président : Faites-vous allusion à ce qu'on a appelé les « dispenses d'une durée limitée »?

M. Benevides : C'est en plein cela. Nous sommes malheureusement tous dans la même situation, et nous constaterons que, comme cela arrive souvent, ces dispenses seront prolongées, car c'est toujours du domaine du possible.

Le président : Est-ce qu'à votre connaissance certaines dispenses sont d'une durée plus longue que cinq ans?

M. Benevides : Je ne le sais pas.

Dr Khatter : Aucune disposition du règlement ne prévoit une dispense d'une durée de plus de cinq ans.

Le sénateur Milne : Monsieur Benevides, le règlement a été publié dans la Gazette du Canada pour la première fois, pour solliciter les commentaires. Avez-vous fait des commentaires qui pourraient encourager le gouvernement à adopter une réglementation plus stricte?

M. Benevides : Dans la lettre du 14 février 2007, j'ai fait référence à une des recommandations qui concernait l'inclusion d'une liste exhaustive et précise des substances qui seraient visées. C'est à la page 2 de la lettre. Nous avons en outre manifesté notre souhait que les interdictions soient de vraies interdictions, qu'elles soient aussi complètes que possible et soient appliquées dès que possible, sans aucune dispense.

C'est notre position en ce qui concerne l'usage des règlements d'interdiction, car en examinant ces règlements, qui constituent une série de règlements omnibus auxquels on ajoute périodiquement des substances, j'ai constaté qu'ils contenaient souvent des interdictions avec des dispenses; par conséquent, le titre comme tel induit en erreur, comme on pourrait le dire pour le terme « quasi-élimination ».

À propos de l'impression qu'on donne, je pense aux règlements pris en Ontario il y a quelques années avec des titres comme « règlement prévoyant les peines environnementales les plus sévères », et autres titres suggestifs semblables. Nous savons tous qu'il ne faut pas juger un livre à sa couverture.

Le sénateur Trenholme Counsell : Je m'adresse aux trois témoins. Je pense qu'on ne conteste pas que ce soit extrêmement intéressant, et j'estime que c'est extrêmement important.

J'aimerais que Mme Goldman fasse des commentaires sur l'observation qui a été faite à l'occasion de la présentation du projet de loi à la Chambre, à savoir qu'on a découvert que le SPFO pouvait causer le cancer du sein, du foie ou de la thyroïde et qu'il endommage le pancréas, le cerveau et le système immunitaire des animaux. Personne n'a fait allusion à cette information. Je sais que ça sort du cadre des travaux que vous faites maintenant sur des bébés, mais je présume que vous êtes parfaitement au courant de ce type d'information.

Dre Goldman : Je pense que c'est exact, outre l'information que j'ai mentionnée au sujet de la toxicité sur le plan du développement. Les cancers sont apparemment liés à certaines altérations biochimiques qui peuvent être suivies dans le cadre d'études toxicologiques sur les animaux qui semblent aller de pair avec les types d'études révélant un pourcentage accru de cancers. Les changements fondamentaux en biologie cellulaire peuvent être mesurés en examinant les altérations de l'expression de protéines dans les animaux. On constate une réelle constance biologique entre les changements au niveau des protéines ou ceux observés dans l'expression génétique et les cancers qui se déclarent.

Les problèmes sont, naturellement, toujours pertinents en ce qui concerne les personnes. Je pense qu'il est raisonnable de soupçonner au moins le SPFO d'être cancérigène pour l'être humain. La question n'a toutefois pas encore été examinée par le Centre international de recherche sur le cancer; nous attendons toujours des études définitives faites par des experts. D'après mon interprétation des données, cette substance provoque des changements métaboliques qui suscitent de vives préoccupations.

Certains des autres problèmes, comme la toxicité du foie, que vous avez mentionnée, pourraient se déclarer à très fortes doses. Un des problèmes en ce qui concerne les études expérimentales sur des animaux est qu'on utilise volontairement des doses allant jusqu'au maximum toléré.

En définitive, ce qui me préoccupe le plus, ce sont les cancers, la toxicité potentielle pour le système immunitaire et la toxicité pour le développement et la reproduction. Ce sont les questions qui me préoccupent le plus.

Le sénateur Trenholme Counsell : Je suis membre d'un autre comité sénatorial qui examine le développement dans la petite enfance. Un des principaux experts dans ce domaine nous a parlé d'épigénèse et nous a expliqué que des facteurs environnementaux pendant la vie intra-utérine et après peuvent avoir une incidence sur l'expression génétique. Il est allé jusqu'à dire que ça pourrait être un facteur, ou, naturellement, ne pas en être un, dans l'autisme. Avez-vous d'autres informations sur l'impact possible du SPFO sur le développement du cerveau?

Dre Goldman : En ce qui concerne les documents qui ont été publiés, une seule étude a fait l'objet d'un rapport, cette année en fait. Johansson et al. ont fait ce rapport dans une revue intitulée Neuro Toxicology. Les chercheurs ont exposé des souris nouveau-nées à du SPFO. Le niveau de développement du cerveau des souris néonatales est à un stade semblable à celui du développement d'un cerveau humain au cours du troisième trimestre de la grossesse. On a relevé chez ces souris des défauts neurocomportementaux. À l'âge adulte, les résultats de certains tests indiquaient un apparent déficit de l'attention et révélaient d'autres indices ressemblant à de l'hyperactivité, ce qui est assez préoccupant, puisqu'un de nos plus gros problèmes de santé publique actuels en ce qui concerne le développement de l'enfant, est lié à un déficit de l'attention et à l'hyperactivité. C'est la seule étude. Elle a toutefois toujours révélé ce type de résultats, pour le SPFO et aussi l'APFO. Ce groupe avait déjà produit des conclusions fiables avec d'autres composés qui s'étaient avérés neurotoxiques et, par conséquent, je n'ai aucune raison d'avoir des doutes. Dans le domaine scientifique, nous aimons voir des constatations reproductibles uniformes; il s'agit d'un domaine d'enquête très nouveau, et les publications ne sont pas encore très nombreuses.

Le sénateur Trenholme Counsell : J'aimerais partir ce soir en étant un peu plus certaine de ma connaissance de l'omniprésence de ce groupe de produits chimiques dans notre environnement, et pas seulement dans l'Arctique, qui a été signalée par le groupe de témoins précédent.

L'utilisation de produits à revêtement antiadhésif m'a réveillée. Nous avons lu des articles sur les poêles à frire et articles de cuisson à revêtement antiadhésif, et sur certains produits qu'on vaporise pour ne pas devoir graisser la poêle. Est-il possible que nous partions d'ici avec une meilleure connaissance de l'omniprésence de ces produits? Quand il s'agit de produits « antiadhésifs », est-ce que ça s'applique aux exemples que je viens de mentionner?

Mme Goldman : Une chose dont nous n'avons pas encore une forte certitude, car quelques études seulement ont été faites à ce sujet, c'est la mesure dans laquelle ces matières se détachent de revêtements comme ceux des poêles antiadhésives. Certains de ces revêtements sont à base de ces composés et de quelques autres composés. Une étude semble toutefois indiquer que ça peut dépendre de la marque de la poêle et de son état neuf. En d'autres termes, certaines matières peuvent se détacher, mais pas dans tous les cas. Certaines études, faites pour la plupart par l'industrie, indiquent qu'aucune particule ne se détache.

Lorsque le SPFO est utilisé comme antitache et vaporisé, c'est sous la forme de monomère mais, lorsque ces matières sont utilisées dans des revêtements antiadhésifs, elles ressemblent à un polymère; il s'agit d'une substance différente.

On pense qu'il est possible que ce soit au cours de la fabrication de ces revêtements que ces substances sont libérées dans l'environnement. Une autre hypothèse est que ça arrive lorsqu'on se débarrasse de ces articles.

Un autre fait est que ces composés, et je pense qu'il s'agit en particulier de l'APFO, ont été utilisés comme revêtement pour les sacs de pop-corn pour le micro-ondes. Une autre source possible d'exposition est liée à ses usages comme antiadhésif, pas uniquement pour les poêles à frire, mais aussi pour les sacs, les contenants alimentaires et plusieurs autres articles.

Dr Khatter : J'ai trouvé dernièrement des informations venant d'études européennes sur les produits dans lesquels le SPFO est utilisé. J'en parle pour démontrer combien il est difficile de s'attaquer à ce type de problèmes et de les régler par le biais de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement.

Les enquêtes européennes ont permis de constater qu'on utilise du SPFO dans les nettoyants pour sol, dans les produits à polir et dans les cires; dans les liquides pour lave-vaisselle; dans les produits à polir et cires pour automobiles; dans les nettoyants de dentiers et dans les shampooings. Nous acquérons de plus en plus de connaissances sur les produits dans lesquels on utilise du SPFO.

Le sénateur McCoy : Monsieur Khatter, si je comprends bien, il existe certains motifs stratégiques pour adopter le projet de loi et d'autres pour ne pas l'adopter. Je présume que le comité en discutera quand le moment de prendre sa décision sera venu.

On a suggéré que la présentation de ce projet de loi a joué un rôle de catalyseur pour le règlement d'interdiction de décembre 2006 qui est l'instrument qui permettra d'agir au sujet de ces produits au Canada. Il est toutefois resté en suspens.

Docteur Khatter, quelle certitude avez-vous que le règlement proposé sera promulgué?

Dr Khatter : Nous pensons bien qu'il le sera. Nous ne pouvons pas en être sûrs à 100 p. 100. Vous avez entendu les commentaires de M. Moffet, qui est un expert dans ce domaine. M. Benevides a fait des commentaires sur le délai après lequel il sera nécessaire de finaliser le règlement qui est prévu dans la loi, à savoir 18 mois. Nous estimons que c'eût été un bon préavis pour les personnes qui avaient besoin que le produit soit interdit progressivement. Nous n'avons pas de garanties que le règlement sera exactement le même que celui qui a été proposé mais, d'après M. Moffet, on ne devrait pas y apporter beaucoup de changements.

Le sénateur McCoy : Par conséquent, quand le règlement sera en vigueur, l'adoption ou le rejet du projet de loi ne jouera aucun rôle déterminant. Est-ce bien cela?

Dr Khatter : L'adoption ou le rejet du projet de loi n'auront pas nécessairement une incidence sur les règlements pour le moment. Cependant, il ne faut pas oublier que la raison pour laquelle le comité de la Chambre a accepté de retirer de ce projet de loi le mécanisme de quasi-élimination qui est prévu est qu'avec la garantie du gouvernement, le règlement de prohibition serait la façon appropriée de réaliser la quasi-élimination. Comme l'a fait remarquer M. Moffet, le gouvernement est entièrement d'accord avec ceux qui pensent que le SPFO devrait se trouver sur la liste de quasi-élimination. Il ne pouvait rien faire à cause des règlements désuets et il est heureux de voir un projet de loi dans lequel est mentionnée la quasi-élimination, comme il se doit.

Le sénateur Spivak : Je voudrais continuer à faire des remarques sur le règlement d'interdiction. Étant donné qu'il n'interdira pas toutes les utilisations, qu'en sera-t-il des autres usages? Est-ce qu'aux termes de ce projet de loi, le processus ne serait plus le même? On en a retiré la procédure normale de quasi-élimination.

M. Benevides : Sénateur Spivak, demandez-vous si, sans la promulgation du règlement d'interdiction, aucune mesure ne serait prise en ce qui concerne le SPFO, même si ce projet de loi est adopté, parce que cette substance se trouve sur la liste de quasi-élimination?

Le sénateur Spivak : Non, je signale que le règlement interdira le SPFO, mais qu'il n'en interdira pas tous les usages. Qu'arrivera-t-il en ce qui concerne les autres utilisations? On a, bien sûr, fixé un délai, mais que pourrait-il se passer dans le futur? Quels sont les risques? C'est exactement la même question que celle qu'a posée le sénateur McCoy.

M. Benevides : J'ai déjà mentionné que la quasi-élimination était indissociable de la limite de dosage. M. Moffet a fait des commentaires à ce sujet également. Il a mentionné que les rejets de SPFO ne sont pas appropriés.

Rien n'est parfait en ce qui concerne la version précédente du projet de loi et la version actuelle n'est pas parfaite non plus. Tel qu'il se présente actuellement, non seulement ne pourra-t-on rien faire en ce qui concerne le SPFO, mais en outre le projet de loi dissocie toute mesure possible concernant le SPFO des mesures exigées par la LCPE pour les substances figurant sur la liste de quasi-élimination.

Je ne m'en était pas rendu compte, mais je suis pratiquement certain que j'ai raison. L'article 79 de la LCPE (1999) exige des plans pour la quasi-élimination, semblables aux plans de prévention de la pollution, question que le comité a probablement analysée de plus près à l'occasion de l'examen de la LCPE, qui présente les mêmes lacunes. Ils ne doivent pas être rendus publics. Il suffit de les présenter au gouvernement et le gouvernement peut les examiner.

C'est toutefois ce qui est prévu au paragraphe 79(2), qui indique les obligations d'une personne qui doit présenter un plan pour la quasi-élimination. Comment fera-t-on, à supposer qu'en ce qui concerne le SPFO, ces obligations concernent la réalisation de la quasi-élimination aux termes du paragraphe 65(3), où il est question de la limite de dosage.

Je ne pense pas qu'il y ait une obligation. Il est possible qu'on puisse faire quelque chose quelque part. Je pense qu'il faudrait apporter une modification à la LCPE (1999). Le paragraphe 79(4) indique en outre qu'il n'y a aucune obligation de préparer des plans pour la quasi-élimination tant que la substance n'a pas été ajoutée à l'annexe 1, à savoir la liste des substances toxiques.

Je pense que ça a été fait en ce qui concerne le SPFO; il a été ajouté. J'ai parlé à M. Moffet avant la réunion et il m'a dit que cette substance se trouvait sur la liste. On pourrait être tenu, sous réserve des conditions susmentionnées, à préparer et à réaliser des plans pour la quasi-élimination; cependant, d'après mon interprétation, c'est uniquement en rapport avec une limite de dosage.

Si vous pouviez exiger que les promoteurs des substances concernés indiquent comment ils procéderont pour respecter les délais et que ces plans étaient publics, nous serions beaucoup plus avancés. Je ne devrais pas demander ce que devient le règlement. D'après M. Moffet, il suit lentement sa trajectoire ardue. Les honorables sénateurs et le public sauraient toutefois ce que font les promoteurs et les utilisateurs, les importateurs et les fabricants pour trouver et utiliser des produits de remplacement non toxiques pour mettre sur les hottes aspirantes et autres gadgets, et pour trouver de nouveaux procédés pour faire la gravure sur les semi-conducteurs et pour nettoyer les dentiers.

Le sénateur Spivak : Je suis inquiète, car je prévois un scénario dans lequel les entreprises diraient qu'un produit chimique donné est important, qu'il est omniprésent dans l'industrie et qu'on ne peut pas trouver de produit de remplacement. Le gouvernement pourrait alors simplement prolonger le délai. Dès lors, ça pourrait durer une dizaine d'années.

Le règlement a-t-il été publié?

M. Benevides : Le règlement final n'a pas été publié. Le projet de règlement a été publié.

Le sénateur Spivak : Je présume qu'on a l'occasion de faire des commentaires, mais rien d'autre. À un certain moment, on militait pour pouvoir modifier les règlements, ce qui serait une excellente idée, à mon avis. Beaucoup de choses se font par voie de règlement et la raison initiale pour laquelle on ne modifiait pas les règlements a disparu.

M. Benevides : Voulez-vous dire par la direction législative? Voulez-vous dire que les législateurs auraient l'occasion de modifier la législation?

Le sénateur Spivak : Oui, je comprends votre prudence.

Dr Khatter : Je pense que M. Benevides et moi-même sommes bien d'accord sur le fait que la quasi-élimination est un outil qui est loin d'être parfait dans la LCPE. Nous pensons que si la Chambre a accepté d'avoir recours aux règlements d'interdiction plutôt qu'à l'outil de quasi-élimination en ce qui concerne le SPFO, c'est parce qu'elle est convaincue de la validité de l'argument de M. Moffet, à savoir qu'il est difficile de déterminer un moyen de quasi éliminer certaines substances, lorsqu'elles sont intégrées à des produits. Comment peut-on calculer les quantités qui se libèrent d'un produit? On en revient au fait que la quasi-élimination aurait due être liée à l'utilisation et pas uniquement aux rejets. En l'occurrence, il s'agit uniquement des rejets.

Nous estimons qu'il existe une solution pour régler ce problème, à savoir établir la définition de « rejet » quand on utilise une substance dans un produit qui sera commercialisé. La quasi-élimination du SPFO peut consister à ne jamais être autorisé à mettre une substance dans un produit dont elle s'échappera au cours de l'utilisation et de l'élimination du produit.

Je pense que nous sommes dans la situation suivante : nous appuyons la proposition d'ajouter le SPFO à la liste de quasi-élimination malgré le fait que celle-ci ne soit pas parfaite dans le contexte de la LCPE. Si cette loi contenait un outil plus efficace de quasi-élimination ou d'élimination, nous voudrions l'adopter, naturellement. Cependant, c'est le seul outil que nous ayons actuellement à notre disposition et nous préférerions l'utiliser que de ne pas l'utiliser du tout. Nous reconnaissons que les règlements d'interdiction sont le moyen auquel le gouvernement a décidé d'avoir recours pour régler le problème en ce qui concerne des substances persistantes et bioaccumulatives, qui doivent être quasi éliminées.

Le sénateur Brown : Docteur Khatter, si on obtient une interdiction de la fabrication de SPFO à l'échelle mondiale, ce qui, de l'avis général, serait très recommandable — la Dre Goldman a en effet découvert que les cordons ombilicaux de 99 p. 100 des nouveau-nés en contenaient — ce serait bien.

J'aimerais savoir, si on réussit à l'interdire à l'échelle mondiale et s'il s'agit d'une substance qui était associée à d'autres substances présentes dans l'environnement. Est-elle associée avec d'autres composés et devient-elle non toxique ou se transforme-t-elle en une autre substance ou devons-nous supporter les quantités de SPFO qui sont déjà dans le milieu?

Dr Khatter : Le SPFO n'est pas indéfiniment persistant et, par conséquent, il ne restera pas éternellement dans l'environnement. La question de sa durée dans l'organisme humain fait l'objet de nombreuses discussions et Mme Goldman a peut-être des informations récentes à ce sujet. La dernière fois que j'en ai entendu parler, on savait qu'il faudrait huit ans pour évacuer la moitié du SPFO de notre organisme, après l'élimination de cette substance. Elle se fractionne et s'élimine lentement, mais pour le moment, elle s'accumule; il est donc essentiel d'enrayer ce processus en éliminant l'utilisation du SPFO.

Le sénateur Brown : Ai-je bien compris qu'on en était arrivé à la conclusion que cette substance faisait partie des surfaces antiadhésives en Téflon?

Dre Goldman : Le SPFO ne fait pas partie des revêtements antiadhésifs. Certains revêtements antiadhésifs sont faits avec un composé étroitement associé au SPFO, appelé APFO, à savoir de l'acide perfluorooctanique. Ces revêtements sont fabriqués avec cette substance ou de l'APFO; par conséquent, c'est la base de la fabrication du SPFO ou de la fabrication de revêtements antiadhésifs.

Dans notre étude, nous avons décelé la présence d'APFO chez tous les bébés pour lesquels nous avons décelé la présence de SPFO, ainsi que le même type de preuves toxicologiques. Je pense que c'est plus complexe et je ne connais pas très bien la LCPE mais, d'après ce que j'ai entendu dire, il serait plus difficile de mettre la main sur de l'APFO car il n'est pas utilisé intentionnellement comme l'est le SPFO. Le SPFO est utilisé directement sous la forme d'un produit à vaporiser, comme antitache et à d'autres fins, alors que l'APFO est utilisé pour fabriquer d'autres produits. Ça finit toujours par se retrouver dans l'environnement.

À la longue, ce n'est pas seulement du SPFO, mais aussi de l'APFO, et certains autres composés appelés acides télomères utilisés pour fabriquer l'APFO qu'on y trouvera. On dispose de données plausibles indiquant qu'ils sont libérés et qu'ils se transforment en APFO et en SPFO dans l'environnement.

On a totalement perdu la maîtrise de la situation. Comme vous l'avez fait remarquer, on retrouve ces substances persistantes dans l'environnement. On peut cesser de les fabriquer et de les utiliser et, alors, les niveaux diminueront avec le temps, mais on n'avait pas prévu qu'elles poseraient un problème aussi grave. Par conséquent, nous sommes pris avec ces substances persistantes. On dénonce d'abord le SPFO; c'est l'approche qui a été adoptée aux États-Unis, quoiqu'elle soit très différente de la nôtre.

Le sénateur Milne : Docteur Khatter, votre groupe Environmental Defence a fait une deuxième étude sur le SPFO, sur un groupe de cinq familles de différentes régions du Canada. Serait-il possible d'avoir un exemplaire de cette étude? C'est peut-être quelque chose qui intéresserait Mme Goldman. La rigueur d'examen par les pairs qu'elle exigerait n'a peut-être pas été appliquée à votre étude, mais elle pourrait l'intéresser.

Combien de personnes ont participé à l'étude et dans quelles régions du pays vivent-elles?

Dr Khatter : L'étude porte sur un petit échantillon. Elle a été faite par un groupe écologique et pas par des chercheurs, avec un budget très restreint. Il s'agit d'un échantillon de 13 personnes seulement, réparties de façon assez aléatoire. Elle est notamment axée sur Sarnia et la réserve des Premières nations située à proximité de cette ville, en raison du taux de pollution élevé dans cette région. Cette étude avait notamment pour objet d'examiner les différences entre les personnes vivant dans ces régions et des Canadiens répartis de façon aléatoire à travers le pays.

Nous pouvons vous procurer ce rapport. Je pense qu'il en existe un résumé en français; par conséquent, nous pourrons peut-être vous procurer le résumé et la traduction.

Le sénateur McCoy : Docteure Goldman, nous avons discuté de l'utilisation du Scotchguard et de différents autres produits. Vous avez eu l'amabilité d'expliquer la différence entre l'APFO et le SPFO. Dans quelle catégorie se classent les produits connus comme produits ignifuges, utilisés pour traiter des articles tels que les draps de lit des berceaux pour bébés? Font-ils partie de ce groupe de produits chimiques?

Dre Goldman : Non. Les produits ignifuges font partie d'un tout autre groupe. Ces produits-ci ne sont, à ce que je sache, jamais utilisés comme produits ignifuges. Ils sont davantage semblables à du savon; ce sont des surfactifs : un côté de la molécule aime beaucoup l'eau et l'autre la déteste. C'est pourquoi ils sont aussi efficaces dans la protection contre les taches car le côté extérieur repousse l'eau. C'est également la raison pour laquelle ces composés sont utilisés dans la fabrication du GOR-TEX et pour les revêtements utilisés sur les imperméables. C'est une substance très glissante.

Le sénateur McCoy : Le groupe suivant que nous examinerons est celui qui inclut les produits ignifuges. Je pense qu'ils ont également été accusés d'être associés à des problèmes de développement chez les enfants.

Le président : Il n'y a apparemment pas d'autres questions. Je remercie les témoins. Madame Goldman, je vous remercie tout particulièrement de nous avoir consacré votre temps. Nous vous en sommes reconnaissants. Monsieur Khatter, c'était agréable de vous revoir. Merci beaucoup.

Nous aurons probablement d'autres questions à poser à ce sujet et peut-être sur d'autres sujets. J'espère que vous accepterez d'y répondre par écrit si nous vous en envoyons. Nous vous sommes reconnaissants pour le temps que vous nous avez consacré. Avez-vous d'autres commentaires à faire avant de partir?

Dr Khatter : Merci, sénateur. C'était un plaisir de revenir.

M. Benevides : Je signale la recommandation 23 faite par le comité dans son rapport sur la LCPE qui dit ceci : « ... les substances qui partagent un mode d'action, des sites de toxicité, un mode de bioaccumulation particulier et des modes de transport dans l'environnement soient évaluées par classe... ».

Nous avons discuté d'une substance sur une centaine de milliers ou plus de substances qui se trouvent dans notre environnement. Tout ce que nous pouvons faire pour accélérer la procédure en faisant une évaluation de ces substances et en les gérant ou, de préférence, en les réglementant, serait une amélioration. Je félicite le comité d'être conscient de cette nécessité et je me réjouis de voir la réponse du gouvernement.

Le président : Nous suivrons cela de près également, monsieur Benevides. Merci beaucoup.

Nous allons maintenant discuter de nos futurs travaux. Nous poursuivrons la séance à huis clos.

Le comité poursuit ses travaux à huis clos.


Haut de page