Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles
Fascicule 11 - Témoignages du 26 juin 2008
OTTAWA, le jeudi 26 juin 2008
Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui, à 9 h 7, pour examiner le projet de loi C-33, Loi modifiant la Loi canadienne sur la protection de l'environnement de 1999, dont il a été saisi par ordre de renvoi.
Le sénateur Tommy Banks (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bonjour et bienvenue à cette séance du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles, qui poursuit son examen du projet de loi C-33, Loi modifiant la Loi canadienne sur la protection de l'environnement de 1999.
Je m'appelle Tommy Banks, je suis un sénateur de l'Alberta et j'ai l'honneur de présider ce comité. Avant de commencer, j'aimerais vous présenter les sénateurs ici présents : le sénateur Nick Sibbeston, des Territoires du Nord- Ouest; le sénateur Ethel Cochrane, de Terre-Neuve-et-Labrador; le sénateur Bert Brown, de l'Alberta, le parrain de ce projet de loi au Sénat; le sénateur Grant Mitchell, de l'Alberta, critique de ce projet de loi au Sénat au nom de l'opposition libérale; le sénateur Mira Spivak, du Manitoba; le sénateur Willie Adams, du Nunavut; le sénateur Jim Munson, de l'Ontario et le sénateur Pierre Claude Nolin, qui est le vice-président du comité.
Nous accueillons aujourd'hui M. Chris Damas, analyste en investissements et également président de Balanced Capital Management Inc., sa propre entreprise de recherche en investissements.
Je vous remercie d'avoir accepté de témoigner aujourd'hui. Nous vous serions reconnaissants de bien vouloir faire votre déclaration liminaire. S'il vous plaît, efforcez-vous d'être aussi bref et concis que possible afin que nous ayons le temps de vous poser des questions.
Chris Damas, analyste en investissements, à titre personnel : Je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole devant vous ce matin.
Pendant 24 ans, j'ai travaillé dans le secteur des investissements, en tant qu'analyste boursier, négociateur et gestionnaire de portefeuille. À l'heure actuelle, j'exerce des fonctions d'analyste en recherche indépendant, concentrant mes efforts sur l'énergie, les engrais, l'agriculture et les biocarburants. Auparavant, j'étais chimiste organicien. J'ai aussi travaillé à titre de consultant en technologie de lutte contre la pollution auprès de l'industrie des produits forestiers. J'ai acquis beaucoup d'expérience dans l'évaluation des entreprises de biotechnologie à capital-risque et de produits de base.
Vous vous demandez peut-être pourquoi je suis ici et en quoi votre sujet m'intéresse. Il y a quelques années, une amie m'a appelé à Barrie en Ontario pour me dire qu'on allait construire une usine de production d'éthanol dans son quartier. Je lui ai demandé : « Qu'est-ce qui vous préoccupe, Brenda? » Elle a répondu : « Eh bien, l'usine pourrait exploser derrière chez moi. » Je lui ai alors dit : « Convenez-vous avec moi, Brenda, que s'il n'y avait pas de déraillement, il n'y aurait pas non plus ni chemin de fer au Canada ni la moindre industrie. »
Tel était mon point de vue sur la chose. C'était avant Noël, en décembre 2006. Pendant les Fêtes, j'ai étudié l'éthanol de façon plus poussée. C'était il y a longtemps.
J'ai consacré beaucoup de temps à l'étude du sujet, à la fois en tant que chimiste spécialiste de la chimie organique et analyste de produits de base et homme d'affaires. En effet, je précise que ma compagnie s'occupe aussi d'opérations sur actions, ce qui constitue mon gagne-pain. À l'instar de nombreux agriculteurs, je suis donc à la merci de prix sur lesquels je n'ai aucun droit de regard.
Mon objectif est d'encourager le choix de politiques favorables à la libre concurrence, et, partant, aux intérêts des agriculteurs canadiens, des producteurs de carburants, des utilisateurs de céréales et des consommateurs. Je tiens à ce qu'on adopte des politiques durables tant sur le plan environnemental que financier.
Si l'on veut atteindre le double objectif de la rigueur financière et de la reddition de comptes, à mon avis, on ne doit pas imposer aux contribuables le fardeau de dépenses non fondées, ni récompenser quelques entreprises qui ont importé des produits de base ou encouru des risques en spéculant sur ces mêmes produits aux frais du public.
J'aimerais décrire maintenant certaines des difficultés que connaîtront les utilisateurs de maïs en Ontario si l'on accorde encore d'autres subventions à la production d'éthanol. En raison de l'existence du Fonds ontarien de développement de la production d'éthanol, du Programme d'expansion du marché de l'éthanol et des subventions écoÉNERGIE pour les biocarburants, les entreprises de biocarburants envisagent de construire des usines de production d'éthanol en Ontario dont la capacité annuelle totale atteindrait 1,83 milliard de litres d'éthanol. Compte tenu de la production actuelle d'éthanol dans cette même province, il faudrait transformer par an 230 millions de boisseaux de maïs de bonne qualité. Or, cela dépasse de beaucoup ce que peuvent produire les récoltes de cette céréale en Ontario.
Bien que la récolte de maïs ontarien ait oscillé entre 200 et 230 millions de boisseaux au cours des dix dernières années, une bonne partie de cette récolte demeure à la ferme et n'est donc pas vendue. Elle sert à nourrir le bétail.
Comme dans une partie de hockey — et je n'ignore pas que M. Bob Friesen s'est servi de cette métaphore hier, mais j'ai été le premier à la mettre par écrit — il est plus important de voir où va la rondelle que de savoir où elle a été.
La campagne agricole de 2007-2008 a été exceptionnelle en Ontario, donnant aux agriculteurs une récolte de 275 millions de boisseaux. Ces céréaliculteurs étaient donc enthousiastes à la perspective de la production d'éthanol et, en conséquence, ont utilisé une superficie sans précédent pour la culture du maïs. Dans la plupart des cas, cela s'est toutefois fait aux dépens d'autres cultures. Malheureusement, une seule usine de production d'éthanol a ouvert ses portes en 2007, ce qui, paraît-il, a refroidi l'enthousiasme des agriculteurs.
On estime en effet que, pour 2008, les surfaces consacrées à la culture du maïs en Ontario passeront de 2,1 millions d'acres à 1,8 million, ce qui représente un recul de 15,5 p. 100 par rapport à l'année dernière. À la place, les agriculteurs de l'Ontario ont choisi de semer du blé d'automne en quantité inégalée à la fin de l'année, aux dépens du maïs comme source énergétique.
Dans le passé, l'Ontario a été obligé d'ajouter à son offre interne de maïs, de 50 à 75 millions de boisseaux importés. Toutefois, en raison de la récolte excédentaire de 2007, l'Ontario a vendu du maïs à l'extérieur de la province, au Québec et au Michigan.
Ici, j'aimerais vous rappeler que la plupart des usines de production d'éthanol de l'Ontario ne sont pas encore en activité, bien que certaines d'entre elles anticipent sur leurs besoins et achètent du maïs pour 2008 et 2009.
Qu'en est-il maintenant des autres industries qui utilisent du maïs? Comment se portent-elles?
Cette semaine, Casco, naguère la plus grande entreprise de transformation de maïs de l'Ontario, a été vendue à Bunge, une compagnie de transformation agricole encore plus grande. Tant les propriétaires que les actionnaires et les cadres supérieurs de cette entreprise ont probablement vu se dessiner à l'horizon les effets des inondations dans le Midwest ainsi que d'autres nuages, et ils ont décidé de partir.
Les usines de production d'éthanol à base de maïs les plus récentes sont situées le long de la Voie maritime du Saint- Laurent, des Grands Lacs et du Saint-Laurent ainsi qu'au nord de Montréal, ou encore, en bordure des chemins de fer de classe 1, ces derniers étant réservés aux liaisons intercontinentales les plus longues et les plus rapides. Deux termes peuvent expliquer ce choix : le maïs américain. Récemment, un marchand de céréales m'a dit que sans cet accès aux moyens de transport, les usines plus anciennes seraient écrasées.
En Ontario, si les cours du pétrole brut, de l'éthanol et du maïs se maintiennent à la hausse, les subventions provinciales et fédérales correspondront à 21 cents le litre d'éthanol. Cela représente 27 p. 100 de l'actuel prix de gros de ce biocarburant.
À l'heure actuelle, les gouvernements fédéral et ontarien garantissent les pertes techniques subies par les producteurs d'éthanol de maïs. Paradoxalement, ces subventions n'empêcheront pas que ces entreprises sur marge de subir de lourdes pertes dans ce secteur volatile. Comment faire en sorte alors pour que toutes les entreprises utilisant le maïs aient un accès égal et équitable au maïs ontarien? À cette fin, je propose que le projet de loi C-33 et le programme de subventions écoÉNERGIE pour les biocarburants veillent au moins de deux manières à ce que le marché soit équitable et à ce que les fonds soient acheminés aux agriculteurs canadiens. Premièrement, qu'il y ait un contenu canadien minimum dans les matières premières d'alimentation servant à la production de biocarburants subventionnés; en second lieu, que les biocarburants provenant de coopératives de céréaliculteurs canadiens reçoivent un traitement préférentiel en vertu de la loi et des règlements qui en découleront.
Le président : Monsieur Damas, avez-vous songé aux répercussions du régime de faveur accordé en vertu de l'ALENA?
M. Damas : Oui. Je me suis demandé s'il fallait l'inscrire dans l'article. Il se pourrait qu'on soit alors en contravention par rapport à certaines lois ou à certains règlements du tribunal de l'OMC. À mon avis, certaines de ces coopératives et usines intégrées à des parcs d'engraissement sont plus rentables et plus sensées que certaines des grandes usines.
Le président : Je tiens à rappeler à nos honorables sénateurs que le projet de loi dont nous sommes saisis ne porte pas sur aucun des sujets abordés par M. Damas. Il accorde au gouvernement l'autorité parlementaire de prendre des règlements par rapport aux biocarburants. Or, ces règlements, qui peuvent contenir tel pourcentage ou telle date, ne figurent pas dans le projet de loi sur lequel nous nous penchons.
Le sénateur Spivak : Savez-vous s'il existe des coopératives de production d'éthanol appartenant à des agriculteurs? J'ai posé la même question aux autres témoins.
En second lieu, Husky Energy a construit des usines de production d'éthanol au Manitoba et en Saskatchewan. Or, il semble que 75 p. 100 de l'éthanol provient des États-Unis. C'est au moins ce qu'on nous a dit — je voulais savoir si vous étiez au courant. Vous avez soulevé une question intéressante toutefois. Ces producteurs reçoivent une subvention même s'ils utilisent du maïs américain. Est-ce bien cela?
M. Damas : IL existe plusieurs coopératives de production d'éthanol appartenant à des agriculteurs aux États-Unis. Ainsi par exemple, United Ethanol appartient à United Cooperative. Je regardais ce qui se passe sur le marché nord- américain, dont nous faisons partie, à ma connaissance. Il y a donc plusieurs coopératives de ce genre aux États-Unis. Malheureusement, la plupart d'entre elles sont privées, ce qui signifie que je ne peux pas avoir accès à leurs états financiers. Je songe, par exemple, à United Ethanol, située à Milton, au Wisconsin, et qui appartient à la United Cooperative.
Est-ce que l'usine Pound-Maker appartient à une coopérative en Alberta?
Pour ce qui est d'Husky Energy, que je connais, je ne possède aucune information publique laissant entendre que le maïs provient des États-Unis, mais ce pourrait quand même être vrai.
Le sénateur Spivak : Dans votre exposé, vous avez dit que même si les producteurs d'éthanol importent leur maïs des États-Unis, ils vont quand même obtenir la subvention.
M. Damas : La subvention proposée?
Le sénateur Spivak : Par litre d'éthanol produit.
M. Damas : À ma connaissance, rien dans le programme ecoÉNERGIE pour les biocarburants n'empêche le producteur d'éthanol transformant du maïs américain d'obtenir la subvention.
Le sénateur Spivak : Vous avez fait certaines propositions, et le président vient de nous laisser savoir que le projet de loi ne fait qu'aborder les règlements, mais je suppose que les entreprises de transformation souhaitent son adoption afin de poursuivre leurs activités. Il revêt donc de l'importance à leurs yeux. Ce n'est pas comme s'il était neutre. Cela dit, est-ce que vous proposez que nous en amendions le texte, et quel serait l'essentiel de vos recommandations?
M. Damas : Je crois savoir que l'objet de ce programme relatif aux biocarburants est triple : il s'agit d'abord d'augmenter l'approvisionnement en carburant; de mettre sur pied un régime favorable à l'environnement et enfin, de récompenser les régions rurales du Canada. Or, il me semble que si l'on importe le maïs des États-Unis, on ne peut atteindre le troisième objectif.
Le sénateur Spivak : Je me pose aussi des questions au sujet des deux autres. D'après vos propos, il ne semble pas y avoir suffisamment de maïs en Ontario pour permettre la production d'éthanol et combler les autres besoins, comme nourrir les animaux. Est-ce là l'essentiel de votre témoignage?
M. Damas : Oui. J'aborde surtout la question de l'éthanol de maïs de l'Ontario car c'est ce que je connais le mieux. Or, la quantité de maïs utilisée pour nourrir les animaux est à la baisse. Il pourrait toutefois y avoir d'autres raisons qui expliquent cela dans cette province.
La quantité d'éthanol servant à l'utilisation humaine et industrielle a fortement augmenté l'année dernière. En 2006- 2007, on a en effet observé une production de maïs de 47 p. 100 par rapport à 36 p. 100 de l'année précédente, surtout en raison de la mise en service de l'usine de Suncor Energy à partir de juillet 2006.
Le sénateur Spivak : Selon un article du Globe and Mail, certaines compagnies aux États-Unis font faillite à cause de la hausse du prix des produits de base et d'autres facteurs. Si l'on en croit certains des témoignages que nous avons entendus, tout cela pourrait être rentable seulement si on avait accès à des céréales ou à du maïs à bon marché.
D'abord, quelle est la probabilité que les prix baissent? En second lieu, quel sera l'effet de tout cela sur les agriculteurs? J'entends par là, qui va profiter de la situation? Les producteurs sans doute, mais qu'en est-il des agriculteurs?
M. Damas : La subvention proposée cible deux marchés des fonds d'investissements différents. L'un est le marché du capital de risque — le fonds de la prochaine génération de biocarburants, qui correspond à 500 millions de dollars — mais l'autre est le marché traditionnel de l'éthanol. À l'heure actuelle, la technologie de transformation du maïs en éthanol est la plus développée pour produire du carburant. À mon avis, il n'est pas nécessaire que le prix du maïs soit faible.
Dans le secteur des produits de base, il s'agit d'une « entreprise d'extraction par séparation ». On sépare l'amidon du maïs. Il ne s'agit pas non plus d'un secteur à faible marge car il est très volatile. Il ressemble donc en cela au secteur pétrolier avec ses marges liées au raffinage.
Je le répète, à mon avis, il n'est pas nécessaire que le cours du maïs soit faible pour que les entreprises de transformation soient rentables. Il faut tout simplement que l'on puisse vendre l'éthanol à un prix plus élevé. Il faut que l'écart soit positif. C'est ainsi que les agriculteurs pourraient tirer profit de la situation. Malheureusement, comme on en a longuement discuté à votre comité, le prix des céréales est l'aboutissement de nombreuses forces du marché, et on ne sait pas toujours laquelle est intervenue.
Le sénateur Spivak : Bien, mais pourquoi ces compagnies font-elles faillite?
M. Damas : Il y a plus d'une centaine d'entreprises de production d'éthanol aux États-Unis.
Le sénateur Spivak : Est-ce trop?
M. Damas : Il y en a une autre centaine en voie de construction et encore 100 autres dont on planifie la construction. Dans bien des cas, les plans ont disparu.
Il circule une liste d'usines d'éthanol qui font faillite. Ce sont les gens de l'industrie qui dressent eux-mêmes une liste. Chaque semaine survient un problème, comme le report. VeraSun, le plus grand producteur d'éthanol de maïs des États-Unis à part la compagnie Archer Daniels Midland vient d'arrêter le fonctionnement de deux de ses usines. Ce sont pourtant les plus grandes, et elles devraient donc être les plus efficaces et coûter le moins cher aux producteurs, mais on a pourtant remis à plus tard l'ouverture de ces deux usines.
On ne peut tout simplement pas parler « d'aliments ». Le terme prête trop à controverse. Il peut signifier beaucoup de choses aussi. Ainsi par exemple, il peut désigner des flocons de maïs ou des tortillas au Mexique. Nous ne pouvons pas nous contenter de dire « des usines de production d'éthanol ».
C'est un peu comme ce qui se passe en agriculture, et je suis sûr que le sénateur Brown en sait beaucoup plus long là- dessus que moi. Il y a par exemple des exploitations agricoles dont le rendement est élevé tandis que d'autres ont un rendement plus faible, ce qui donne des moyennes. Il pourrait s'agir aussi de la main invisible d'Adam Smith qui retire certains des acteurs les plus faibles de l'industrie de la production d'éthanol.
Le président : Quand vous avez dit que la compagnie Archer Daniels Midland a arrêté les travaux relatifs à la construction de deux usines de production d'éthanol; est-ce que cela signifie qu'on a mis de côté les plans de construction, ou est ce qu'on a mis fin aux activités d'exploitation de deux usines déjà en service?
M. Damas : Il s'agissait de la compagnie VeraSun, sénateur.
Je me suis rendu dans l'Iowa l'année dernière pour voir ce qui se passait dans certaines des usines de VeraSun. Je crois que l'une des usines dont on a arrêté les travaux se trouve au Minnesota et n'était pas encore terminée. Voilà pour une d'entre elles. Je ne me souviens pas de l'autre toutefois. Je n'ai pas apporté les états financiers de la VeraSun avec moi.
Le sénateur Spivak : Comme pour tout le reste, la question essentielle à se poser est à savoir si ces problèmes sont une étape normale? Beaucoup d'usines vont faire faillite et certaines d'entre elles vont prospérer — il ne s'agit pas vraiment du début de la disparition de l'industrie.
M. Damas : Cela souligne à quel point ce secteur est volatile. Or, dans une certaine mesure, le gouvernement est devenu un de ses partenaires.
Le sénateur Spivak : Il semble que la compagnie Archer Daniels Midland est celle qui bénéficie le plus des subventions. On rapporte qu'elle reçoit à peu près 51 cents le litre, enfin quelque chose d'approchant.
M. Damas : Toutes les entreprises de mélanges de carburants aux États-Unis reçoivent 51 cents par gallon.
Le sénateur Spivak : Quelle part du marché est détenue par Archer Daniels Midland?
M. Damas : C'est une bonne question. Elle a déjà détenu la plus grande. Depuis l'adoption des derniers projets de loi relatifs à l'énergie toutefois — la Energy Policy Act de 2005 et la Energy Independence and Security Act de 2007, beaucoup d'autres usines ont été construites. VeraSun occupe maintenant le deuxième rang, qui produit 1,6 milliard de gallons d'éthanol.
Le sénateur Spivak : Êtes-vous au courant du fait que 23 sénateurs américains, y compris le sénateur John McCain, ont envoyé une lettre à l'industrie de la défense de l'environnement pour demander un moratoire sur les subventions accordées à la production d'éthanol?
M. Damas : Oui. Je crois que c'est le sénateur Kay Hutchison du Texas qui a piloté cette initiative.
Le sénateur Spivak : Qu'est ce qu'ils cherchent? Est-ce qu'ils veulent que l'industrie survive par ses propres moyens?
M. Damas : Ils essayent d'inverser les normes obligatoires en matière de combustible renouvelable, normes qui sont semblables à celles que le gouvernement fédéral a proposées, soit de 5 p. 100 ou de 2 p. 100.
Le sénateur Spivak : Cela entraînera une réduction des subventions. Est-ce qu'ils vont quand même obtenir les subventions ou non?
M. Damas : Je n'ai pas lu le texte de la lettre envoyée, mais je crois que ces sénateurs ne sont pas d'accord avec le projet visant la production de 36 millions de gallons d'ici 2022. Cette année, on s'est déjà donné là-bas le mandat de produire 9 milliards de gallons d'éthanol, et la production oscille entre 8,5 à 9 milliards de gallons. Il s'agit d'un mandat national. J'ignore toutefois s'il s'agit d'une moyenne combinée, comme ce serait le cas dans le règlement proposé au Canada. J'espère que cela éclaircit un petit peu les choses.
Le président : Afin que nous comprenions la réponse que vous avez donnée au sénateur Spivak, les sénateurs américains cherchent à faire inverser l'exigence minimale en ce qui a trait au contenu des biocarburants. Est-ce bien cela?
M. Damas : Je ne peux pas parler au nom de Kay Hutchison et de John McCain. Je ne suis pas assez important pour cela.
Le sénateur Milne : Vous avez proposé deux choses; que d'une manière ou d'une autre le gouvernement veille à ce que tout éthanol utilisé ici comporte un minimum de contenu canadien et qu'on trouve le moyen d'accorder de l'argent à des coopératives de production d'éthanol appartenant à des agriculteurs canadiens. Toutefois, votre réponse au sénateur Spivak ne portait pas sur des entreprises canadiennes mais des entreprises américaines. À l'heure actuelle, est- ce qu'il existe des coopératives de production d'éthanol appartenant à des agriculteurs au Canada?
M. Damas : Si vous me le permettez, je vais consulter mes notes. Est-ce que vous entendez par là de l'éthanol de maïs?
Le sénateur Milne : Oui.
M. Damas : Non.
Le sénateur Milne : Qu'en est-il de l'éthanol? Je sais qu'on peut aussi en produire à partir de copeaux de bois ou de déchets de bois.
M. Damas : Husky possède les deux usines situées dans les Prairies, et à ma connaissance, c'est Pound-Maker qui est le propriétaire de celle ouverte en Alberta.
Le sénateur Milne : Ces usines n'appartiennent donc pas à des agriculteurs.
M. Damas : Je ne le pense pas, pas encore.
Le sénateur Milne : Est-ce que ça arrivera à la Husky un jour?
M. Damas : Pour le moment, il n'existe pas de coopérative de production d'éthanol appartenant à des agriculteurs. Je sais que le sénateur Brown a mentionné la possibilité qu'on en construise une à Unity, en Saskatchewan, et dans ce cas, il s'agirait bel et bien d'une coopérative.
Le sénateur Milne : Par conséquent, votre deuxième argument est nul et non-avenu. Comment faire en sorte que l'éthanol utilisé au Canada comporte un certain contenu canadien?
M. Damas : Je n'ignore pas que votre comité voulait apporter certains amendements, avec du muscle. Je ne suis toutefois pas avocat, il me serait donc difficile de rédiger un texte de loi maintenant, à la onzième heure.
Quoi qu'il en soit, je vous soumets cette idée si votre objectif est de favoriser les industries dans les régions rurales du Canada. J'ai d'ailleurs lu récemment un rapport rédigé par le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts au sujet de la pauvreté en milieu rural. Justement, il y a deux ans, l'agriculture était dans un état lamentable; cela faisait longtemps qu'elle souffrait de certains problèmes. Il me semble donc paradoxal que de grandes raffineries industrielles d'éthanol en soient réduites à importer du maïs américain pour aider les agriculteurs de leur coin. Ça ne semble pas acceptable, sénateur Milne.
Comme le président l'a mentionné, ce genre de proposition risque d'être jugée non conforme à nos accords commerciaux internationaux. Je précise ici que selon un marchand de céréales, certains de ces règlements avaient été conçus d'abord pour contourner les exigences du GATT. Je pensais de toute manière que le GATT était assez ancien.
Le sénateur Milne : Il l'est certainement.
Si le gouvernement va de l'avant avec les plans qu'il a annoncés — qui ne figurent d'ailleurs pas dans ce projet de loi qui ne constitue qu'une loi habilitante — plans qui se retrouveront en entier dans des règlements que personne parmi nous n'a vus encore, il se pourrait qu'il subventionne la production d'éthanol à l'extérieur du Canada ou des producteurs canadiens d'éthanol qui achètent leur maïs à l'extérieur de notre pays.
M. Damas : Je suppose que moi-même et d'autres témoins qui m'ont précédé ici essayons d'influencer l'issue des règlements. J'ai lu le projet de loi et j'ai noté qu'il est sujet à interprétation. Il s'agit d'un projet modificatif de nature administrative à la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, je ne m'attends donc pas à ce que mes amendements soient mis en œuvre aujourd'hui.
Le sénateur Milne : Votre réponse est très claire.
Est-ce que le Canada importe de l'éthanol en provenance du Brésil, pays qui est le plus grand producteur de ce biocarburant du monde entier?
M. Damas : Je crois savoir qu'on a utilisé une certaine quantité d'éthanol brésilien pour se conformer aux normes relatives aux carburants de remplacement renouvelables en vigueur en Ontario.
Le sénateur Milne : Est-ce qu'il peut être expédié par navire citerne?
M. Damas : Je n'ai pas de renseignements ou de données là-dessus, mais je suppose qu'il est transporté ici par navire citerne.
Le sénateur Mitchell : Monsieur Damas, je suis d'Edmonton, ville qui pendant des années a été à l'avant-garde des programmes de recyclage au moyen des bacs bleus. Ça fait maintenant partie de la culture à Edmonton. Hier, on a annoncé qu'Enerkem et que GreenFieldEthanol ont signé une entente de partenariat avec la ville d'Edmonton afin de construire une usine de production de biocarburants qui utilisera comme matière première des déchets municipaux. Cela soulève la question du moment choisi pour présenter un tel projet de loi.
On semble prévoir énormément d'investissements pour très bientôt, le marché semble offrir des certitudes à cet égard. À l'heure actuelle cependant, la situation est très variable car diverses provinces mènent la barque des biocarburants de manière différente et strictement provinciale. Ce projet de loi permettrait une administration pancanadienne de la question.
Savez-vous si d'autres entreprises prévoient investir bientôt dans cela? Est-ce qu'on projette d'investir d'autres capitaux qui pourraient aider le Canada à atteindre les normes en matière de carburants à l'éthanol?
Le président : Sénateur Mitchell : j'ignore si nous avons devancé les autorités ici, mais je crois que c'est aujourd'hui même qu'on doit annoncer la construction de la nouvelle usine.
Le sénateur Mitchell : Nous avons reçu le communiqué de presse.
Le président : L'annonce doit être faite à 14 h 30.
Le sénateur Mitchell : Le bulletin d'information à l'intention des médias a paru hier. Je suis sûr que tout le monde est déjà au courant.
M. Damas : Sénateur Mitchell, parlez-vous de l'éthanol déjà disponible, ou de l'éthanol de la prochaine génération?
Le sénateur Mitchell : Je parle des deux.
M. Damas : J'ai constitué une base de données de toutes les usines produisant de l'éthanol actuellement en Amérique du Nord. En ce qui concerne l'éthanol cellulosique, le biodiésel et d'autres projets, comme le combustible diésel à base d'algues, je ne dispose pas de beaucoup de renseignement. J'ai bien un dossier là-dessus, mais ces projets sont encore très peu avancés.
En ce qui a trait aux carburants renouvelables de tout le Canada, il ne semble pas y avoir de normes nationales, et votre projet de loi n'en fournira pas une parce qu'il relève de certaines normes à certains égards et en impose d'autres à d'autres égards. Ainsi, l'Alberta n'a pas de norme en matière de carburants renouvelables. Oui, le projet de loi imposerait une norme de carburants renouvelables de 5 p. 100 mais est-ce que cela serait d'une importance primordiale pour la construction de cette usine? Je ne suis pas en mesure de répondre à la question. L'annonce d'aujourd'hui signifie que l'éthanol ne sera pas produit avant plusieurs années.
En tant qu'analyste des marchés d'investissement et investisseur en capital de risque, je tiens à savoir si le gouvernement était sérieux lorsqu'il s'est engagé à mettre sur pied une industrie de qualité internationale. Si vous le permettez, je dirais tout de même qu'une proposition de 5 p. 100 et de 2 p. 100 est assez timide.
Le sénateur Mitchell : C'est une réflexion intéressante.
M. Damas : Cela montre peut-être qu'on n'a pas suffisamment étudié la question. C'est comme mettre son orteil dans l'eau pour voir quelle est sa température.
Le sénateur Mitchell : Les producteurs canadiens d'éthanol subissent certainement des pressions pour importer du maïs des États-Unis étant donné que le maïs américain est généreusement subventionné. Est-ce bien cela? Comme c'est très souvent le cas, les subventions agricoles accordées aux céréaliculteurs et aux autres producteurs, tant en Europe qu'aux États-Unis, désorganisent les marchés internationaux. Cela crée des pressions, et, à bien des égards, nous ne sommes pas en mesure de leur faire concurrence.
M. Damas : Ce n'est pas ainsi que je vois les choses. Pour l'instant, je considère qu'il ne s'agit que d'une question liée à l'offre et à la demande. L'Ontario ne dispose pas d'un stock de maïs suffisant pour alimenter les usines d'éthanol proposées. Nous savons tous que toutes ces usines ne seront pas construites. Les affaires sont les affaires, et si le prix du maïs continue de dépasser 7 $ le boisseau et que le prix de l'éthanol ne réagit pas en conséquence, ce qui n'a pas encore été le cas, certaines de ces usines ne seront pas construites et tout ce maïs ne sera pas nécessaire. Peut-être que deux tiers des usines proposées seront construites. J'ai déjà dit que pour produire 2,3 milliards de litres d'éthanol de maïs en Ontario, il faudrait 230 millions de boisseaux de maïs de sorte que les usines ne seront pas particulièrement touchées par le prix soit disant peu élevé du maïs américain. L'offre pour le maïs de l'Ontario pour ces usines atteint parfois 1 $ de moins que le prix à la livraison à Chicago. Le coût du transport jusqu'à Chicago varie entre 55 et 60 cents. En fait, ils abaissent encore le prix du maïs canadien de 40 ou 50 cents. Si les producteurs souhaitent vendre leur maïs aux usines, ils acceptent ce qu'elles leur donnent, sinon elles vont l'obtenir grâce à un cargo provenant de Toledo.
Le sénateur Mitchell : Savez-vous quelle portion de l'éthanol produit au Canada provient du maïs, par rapport aux autres céréales?
M. Damas : Je pourrais facilement le calculer.
Le sénateur Mitchell : Avez-vous une idée générale?
M. Damas : En Ontario, il y a 465 millions de litres d'éthanol de maïs. Au Québec, il y en a 130 ou 150 millions de litres, mais vous pouvez me reprendre si je me trompe. Je dirais donc qu'environ 600 millions de litres sur 1 milliard de litres sont cotés, ce qui équivaut à environ 60 p. 100.
Le sénateur Mitchell : Monsieur Damas, vous avez dit que vous ne savez pas avec certitude où en est le développement de la technologie de deuxième génération ou le temps que cela pourrait prendre. Pouvez-vous nous donner des détails à ce sujet.
M. Damas : J'ai eu beaucoup d'expérience pour ce qui est de prédire les industries qui mettent longtemps à porter fruit. Comme vous savez, il existe deux technologies différentes : le gaz de synthèse et la dégradation des enzymes. Mes amis chimistes m'ont dit que les deux options sont toujours viables. Il s'agit d'une question de coût; il faut faire la preuve de la mise à l'échelle et obtenir le financement nécessaire pour les projets. J'ai apprécié le débat visant à déterminer si cela prendrait trois à cinq ans ou dix à 15 ans. Pourquoi ne pas simplement viser le milieu?
Le sénateur Mitchell : On en serait alors à sept ans et demi, ce qui ne serait pas mal. Si les prix des céréales demeurent aussi élevés qu'ils le sont aujourd'hui, les producteurs d'éthanol subiraient beaucoup plus de pression pour trouver des sources moins coûteuses. Les déchets municipaux pourraient certainement être l'une de ces sources. Par conséquent, les forces du marché pourraient faciliter un tel processus.
M. Damas : Une augmentation du coût du maïs n'accélèrerait pas nécessairement l''intérêt porté à cette technologie, mais une augmentation du coût de l'essence le ferait sans aucun doute. Cela pourrait être vu comme le Saint-Graal du capital de risque des carburants. Ce qui me préoccupe, c'est que cela ne tient pas compte d'une bonne partie des actifs investis dans l'éthanol de maïs. Un peu comme Ontario Hydro, nous pourrions avoir quelques milliards de dollars dans les usines, et adapter une usine à une autre technologie peut créer des problèmes d'émissions.
À l'heure actuelle, ICM Inc. et Delta-T Corp. aux États-Unis nous fournissent un modèle standard de production d'éthanol de maïs, selon le modèle souhaité; le modèle 40, 50 ou 108. Ces usines sont conçues attentivement en vue de produire de grands volumes d'éthanol de maïs avec, espérons-le, peu d'émissions. Je ne devrais pas dire cela parce que bien des gens en ont discuté. Je ne suis pas certain qu'il serait si facile d'adapter une usine produisant 400 millions de litres d'éthanol de maïs en vue d'utiliser les déchets municipaux ou des copeaux de bois comme matière première.
Le sénateur Mitchell : Les systèmes d'échange de crédits d'émission de carbone sont liés à la périphérie de cette question. Que pensez-vous de leur utilité comme mécanisme financier visant à faire la promotion des investissements dans des exploitations agricoles et d'autres petites entreprises pour, ainsi, faciliter les initiatives de lutte contre les changements climatiques?
M. Damas : Je pense que c'est la bonne façon de procéder. Permettez-moi humblement de vous dire que je n'ai pas suffisamment de détails. Le sénateur McCoy était ici, et je sais qu'elle est vice-présidente du « centre des changements climatiques ». Je pense qu'il est impossible de gérer quoi que ce soit à moins de le mesurer.
Le sénateur Mitchell : Il pourrait s'agir d'une façon de le mesurer.
M. Damas : Il est impossible de récompenser les réductions d'émission de carbone, à moins de leur accorder une valeur. Dans une certaine mesure, le gouvernement tente d'intervenir grâce à sa réglementation, et il s'agit d'une façon bien intentionnée mais quelque peu maladroite de favoriser ce que le libre marché pourrait atteindre si nous accordions une valeur adéquate à la réduction du carbone sur le marché. Me voilà, avec mes 15 minutes de gloire, mais je pense que d'autres pourraient probablement répondre à cette question mieux que moi.
Le président : Monsieur Damas et invités, nous avons reçu un message de M. Robin Speer de l'Association canadienne des carburants renouvelables, qui nous dit que POET est le plus important producteur d'éthanol aux États- Unis; Pound-Maker, de la Saskatchewan, appartient à des agriculteurs; enfin, IGPC est un producteur de maïs appartenant à des agriculteurs d'Aylmer et GreenField compte un grand nombre d'investisseurs agricoles. Je voulais simplement vous transmettre ce message.
Le sénateur Munson : Monsieur Damas, vous avez mentionné que les 5 p. 100 et les 2 p. 100 étaient des objectifs quelque peu timides. Pour remettre les choses en contexte, pensez-vous que le Canada est en mesure de produire la quantité de biocarburants nécessaires en vertu de cette grande stratégie du gouvernement, ou devrons-nous importer du carburant?
M. Damas : Je pense que les 5 p. 100 et les 2 p. 100 sont liés à l'éthanol, pas au maïs. La source n'est pas mentionnée. Je veux que ce soit clair. Je ne dis pas qu'il s'agit d'un objectif timide s'il s'agit de biocarburant provenant de céréales vivrières ou de graines oléagineuses. Il faut inclure toutes les sources possibles.
À court terme, je pense que nous ne pouvons pas aller au-delà de 5 p. 100 et 2 p. 100 parce que si la production d'essence varie entre 30 et 40 milliards de litres par an au pays, nous aurons besoin de 2 milliards de litres d'éthanol, pour l'essence seulement. À l'heure actuelle, nous n'en avons qu'un milliard de litres. Il faudra encore quelques années pour démarrer quelques usines supplémentaires. Pour l'instant, je pense que nous ne pouvons pas faire mieux que 5 p. 100. Il nous faut un plan à long terme pour veiller à ce que nous puissions répondre à cette demande grâce à d'autres sources.
Dans le Nord de l'Ontario, l'industrie des produits du bois vient de subir un coup dur, tout comme des entreprises comme Tembec et Cascades au Québec. Le Nouveau-Brunswick a une bonne réserve de bois dur. Le sénateur du Nouveau-Brunswick n'est pas ici.
Le sénateur Munson : Je viens du Nouveau-Brunswick, mais je suis un sénateur de l'Ontario. Le Nouveau-Brunswick souffre réellement : Bathurst, Campbellton et Dalhousie. Je viens du nord du Nouveau-Brunswick, et la situation est très difficile.
M. Damas : Oui, c'est très difficile. J'ai souvent agi à titre de consultant dans l'industrie des produits forestiers, pour les fabriques de pâtes et papier. Il y a des usines partout au Canada, et elles profiteraient de la production d'éthanol de cellulose provenant de déchets de bois. Je pense qu'à long terme, nous serons en mesure d'atteindre un objectif supérieur à 5 p. 100 et 2 p. 100; je ne suis tout simplement pas certain que cela proviendra de l'éthanol de maïs en Ontario.
Le sénateur Munson : Pensez-vous que les biocarburants fabriqués au Canada devraient être protégés de la concurrence étrangère?
M. Damas : Je ne pense pas. J'estime que les droits de douane sont une abomination. Selon moi, si nous voulons de l'éthanol moins cher, nous n'avons qu'à acheter davantage d'éthanol brésilien, mais ça ne répondrait pas aux autres objectifs liés à la stimulation manufacturière et rurale.
Le sénateur Munson : Je remplace un autre sénateur au comité, et je trouve ce débat fascinant. Nous avons entendu beaucoup de témoins hier. Hier soir, j'ai relu mes notes prises lors des témoignages des représentants de l'industrie. Il faut tenter d'établir un équilibre. Nous sommes censés être la Chambre de second examen objectif. Nous allons en discuter et procéder à l'étude article par article du projet de loi ce matin.
Hier, nous avons écouté les arguments — pour la première fois de façon approfondie, ou presque — du Syndical national des cultivateurs, que vous avez entendu, puis de la Fédération canadienne de l'agriculture, organisations qui ont toutes deux des opinions passionnées au sujet du projet de loi, d'un côté et de l'autre. Étant donné que mon grand- père était agriculteur, je ne suis pas perplexe, mais je pourrais pencher d'un côté ou de l'autre.
Vous avez écouté les témoignages d'hier, et j'aimerais savoir ce que vous pensez lorsque vous entendez ce type d'argument d'un côté ou de l'autre et la voie que le comité sénatorial devrait, selon vous, adopter.
M. Damas : J'ai entendu de nombreuses exhortations de ce côté-ci de la table, de même qu'un grand enthousiasme et beaucoup de crainte. Je pense qu'il nous faut moins d'exhortations et plus de transpiration. Nous devons nous atteler à la tâche et créer un rapport de consultation professionnelle intégrant l'industrie du carburant en Amérique du Nord, sinon du monde. Je n'ai entendu aucun terme comme « producteur à faible coût », « rendement du capital investi » ou « économie d'échelle ». La multiplication des avantages a fait l'objet d'un débat vigoureux : combien d'emplois et combien de dollars cela créera-t-il?
De nombreuses questions ont été soulevées, mais je n'ai pas entendu de réponses. J'ai du mal à croire que nous allons légiférer sans entendre les professionnels qui comprennent le marché des produits de base, qui est important. Je pense que les agriculteurs et les producteurs d'éthanol de maïs ont perdu le contrôle de la situation lorsqu'ils ont décidé d'avoir comme intrant un produit de base entièrement négociable à Chicago.
J'ignore si cela répond à votre question, sénateur, mais je ne peux pas me prononcer sur ce qu'ont dit d'autres professionnels. J'ai lu leurs observations, et j'aimerais vérifier quelques faits par moi-même.
Le sénateur Munson : Du point de vue du gouvernement, cela lui donne le droit de créer ce dont vous parlez, de s'atteler à la tâche et cela fournit au gouvernement une stratégie visant à assembler certaines pièces du casse-tête ensemble, à mesure que nous allons de l'avant.
M. Damas : J'espère que lorsque les règlements seront formulés et que les plans de subvention seront créés, les aspects de ces projets liés aux investissements seront étudiés soigneusement. Nous sommes dans une bonne position, au Canada. Nous avons beaucoup de recettes fiscales gouvernementales provenant de l'industrie pétrolière et je pense que la dernière fois où j'ai vérifié, nous avions des excédents au niveau fédéral, mais non au niveau provincial, en Ontario. Nous dépensons une partie de cet argent. Le faisons-nous de la bonne façon?
Nous avons entendu ici un monsieur pour lequel les granules de panic raide constituent la meilleure solution. Quelqu'un d'autre croit qu'il faut adopter le biodiésel algaire. Je pense que les sociétés de capital de risque devraient prendre ces décisions sur l'industrie de haute technologie et que le gouvernement devrait aider les usines de production d'éthanol de maïs pour veiller à ce qu'elles dépensent de l'argent de façon logique, d'un point de vue commercial.
Lorsque je fréquentais l'école de commerce à la fin de mon MBA — je pense qu'un administrateur de Dome Petroleum est ici — je me souviens que Dome Petroleum était le modèle de ce qu'il ne fallait pas faire dans le domaine des affaires.
Tous, autour de cette table, ont dit que le prix du pétrole augmente. Je suis anticonformiste dans mon domaine d'activité, et cela signifie que le pétrole va en diminuant. L'indice composé de Shanghai a subi un coup dur en Chine, ce qui constitue habituellement un indice du ralentissement éminent de l'économie. Nous devons savoir que si le prix du pétrole redescend sous la barre des 100 $, nous ne bloquons pas bon nombre de ces usines.
Le sénateur Kenny : Monsieur le président, est-ce que je dispose du même temps?
M. Damas : Je m'excuse, ma réponse était longue. J'espère avoir répondu à votre question, sénateur.
Le sénateur Munson : Qu'est-ce que cela signifie, être administrateur? Je ne suis qu'un journaliste vieillissant. Personne ne va me faire administrateur.
Le président : Sénateur, vous êtes un administrateur du Canada.
Le sénateur Munson : Voilà qui incite à la modestie. J'espère que Bert Brown sera d'accord.
Le président : Nous allons permettre à l'ancien administrateur de Dome Petroleum de formuler une observation, s'il lève la main, mais nous allons d'abord entendre le sénateur Brown.
Le sénateur Brown : Monsieur Damas, vous avez beaucoup parlé de l'éthanol de maïs. Je ne pense que le projet de loi mentionne l'éthanol de maïs. On y parle de biocarburants et le projet de loi vise à trouver une façon de déterminer lesquels sont viables. Pensez-vous qu'il n'est pas nécessaire de mener des projets pilotes pour lancer les biocarburants et déterminer si un biocarburant provenant de panic raide est meilleur que celui produit à partir de maïs ou de blé, qui fait l'objet d'expériences depuis des années à Red Deer, en Alberta? On y produit de l'éthanol de blé et on tente d'en produire à partir de paille de blé. On fait également des expériences avec l'orge. Ils utilisent en fait du blé tendre blanc, dont on ne se sert pas pour préparer du pain; on l'utilise pour nourrir le bétail.
Ne pensez-vous pas que notre façon de procéder est un peu plus raisonnable que celle des Américains? Nous nous limitons à 5 et 2 p. 100. Aux États-Unis, leur objectif était de 15 et 10 p. 100 de biocarburants. Lorsqu'on lance un objectif d'une telle ampleur aux États-Unis, une centaine d'usines sont créées du jour au lendemain. Bien sûr certaines de ces usines n'ont pas été planifiées de façon adéquate, n'étaient pas bien situées et ne disposaient pas d'un financement suffisant, de sorte que, naturellement, elles ont échoué. Au Canada, nous adoptons une approche beaucoup plus raisonnable, avec notre objectif de 5 et 2 p. 100.
S'il est vrai que 2 milliards de dollars peut sembler être un montant considérable, ne pensez-vous pas qu'il serait préférable d'entreprendre un projet pilote à l'échelle du Canada? On ne se concentre pas uniquement sur l'Ontario, et ce n'est pas l'objectif. Il y a des expériences en Colombie-Britannique sur les produits forestiers; des expériences sont également menées en Saskatchewan et en Alberta. L'avis qui sera publié aujourd'hui à 14 h 30 et dont on a parlé plus tôt porte sur les déchets de tout type dans la ville d'Edmonton. Je ne pense pas que ce serait possible si nous n'avions pas de plan pour lancer un tel projet.
J'essaie de trouver d'autres exemples, mais je pense que l'un des meilleurs est la situation survenue pendant la guerre, lorsque nous avons manqué de caoutchouc naturel. Des efforts incroyables ont été déployés pour produire du caoutchouc synthétique. Aujourd'hui, tous les véhicules dans le monde roulent sur du caoutchouc synthétique. Ils ne roulent plus sur du caoutchouc naturel.
J'aimerais savoir ce que vous pensez de tels projets. Ne pensez-vous pas qu'il faudrait un tel point de départ pour un projet comme celui-là qui toucherait tout le Canada?
M. Damas : Merci de cette question éclairée. Il s'agit davantage d'une affirmation que d'une question. C'est très intéressant.
Dans notre pays, il existe de nombreuses disparités régionales et des différences régionales. Dans une certaine mesure, nous tentons de trouver une politique unique. Les terres arables représentent 88 millions d'acres et la Saskatchewan dispose de 41 p. 100 de cette superficie. L'Ontario n'en compte que 10 p. 100. Nous tentons d'élaborer des règlements qui sont logiques pour tous.
L'autre différence réside dans le fait qu'une usine de production d'éthanol de maïs, prête à l'emploi, d'ICM à plus de 2 $US le gallon n'est pas la même chose qu'une usine pilote. Dans un cas, il s'agit d'une entreprise risquée. Dans l'autre cas, il faudra plus de soins et plus de travail avant de commencer les opérations.
Le blé a une teneur en protéine plus élevée que le maïs. Le gluten a tendance à empêcher les machines de bien fonctionner, de sorte qu'il faudra remplacer les types de blé à teneur élevée en protéine et à faible teneur en amidon par des variétés à faible teneur en protéine et à teneur élevée en amidon, comme vous le savez.
Certains de ces projets, comme le Fonds de biocarburants pro-gens, devrait relever du capital de risque, et nous n'avons mis que 500 millions de dollars dans le fonds de technologie de prochaines générations. Nous aurions dû y mettre un milliard de dollars. Les Japonais font des avancés très rapides dans ce domaine. Nous devons vraiment examiner ce que font les autres pays. Dans bon nombre d'industries, comme celle de l'énergie éolienne et de l'énergie solaire, nous avons pris du retard. Je pense que certaines de ces technologies de la prochaine génération constituent une bonne solution.
Ce projet de loi permettra-t-il d'y arriver? Il indique que le gouvernement mettra son pied à l'eau et fournira certaines assurances au sujet des 5 p. 100. Il forcera également les raffineurs de pétrole et les détaillants d'essence à mettre la main à la tâche. Quelqu'un a mentionné hier que le prix de l'éthanol dépassait celui de l'essence RBOB, c'est- à-dire l'essence de base reformulée destinée à être mélangée à des composés oxygénés. Il s'agit d'essence sans oxygène. Essentiellement, le prix est plus bas que celui de l'essence RBOB depuis deux ans au moins parce qu'ils n'utilisent ce produit que si on leur ordonne. Ils n'utiliseront pas d'éthanol, en dépit des 51 p. 100. Le problème consiste à amener le cheval à l'abreuvoir, mais il faut aussi qu'il boive.
Il s'agit d'un pas dans la bonne direction, mais je pense tout de même que nous n'avons pas réalisé d'analyse complète de cette industrie. Nous sommes en train de devenir partenaires, de sorte qu'il est préférable de veiller à bien faire les choses. Je sais que les sociétés à capital de risque ne s'engageront pas dans cette voie, à moins qu'elles ne s'attendent à un rendement annuel de 30 à 40 p. 100 au bout du compte.
J'espère que c'est une bonne réponse.
Le sénateur Brown : C'est une très bonne réponse. Je suis heureux de vous entendre dire que vous pensez qu'il s'agit d'une bonne première étape.
Le président : C'est moi qui ai mentionné le prix. Je parlais du prix à la pompe en Alberta. De l'essence contenant 10 p. 100 d'éthanol, ce qui est vendu en Alberta depuis des années coûte, selon mon expérience, toujours un peu plus que l'essence ordinaire.
M. Damas : Vous l'avez répété à plusieurs reprises. Il est intéressant d'observer que depuis 20 ans, nous avons de l'essence contenant 10 p. 100 d'éthanol dans les grands centres. Certains ajustements ont été faits. Ce projet de loi changera-t-il les choses du jour au lendemain? Pas vraiment. Il rendra l'obtention d'éthanol plus compliquée pour Terre-Neuve.
Je ne veux pas être sexiste, mais il ne s'agit que d'un travail fait à moitié.
Le président : Nous comprenons.
Le sénateur Brown : L'idée ici, c'est que l'objectif est de 5 p. 100; pas 5 p. 100 à Terre-Neuve ou 5 p. 100 au Nouveau- Brunswick ou 5 p. 100 en Alberta. C'est censé être 5 p. 100 dans tout le pays.
M. Damas : Ça ne changera donc rien pour Terre-Neuve.
Le président : Tout dépend si les règlements seront conçus de façon à s'appliquer à chaque fournisseur, question qui ne surviendra que lorsque les règlements seront formulés.
Monsieur Damas, vous avez été un témoin des plus intéressants. Vos réponses ont été très appréciées et nous sont très utiles. Je vous remercie d'avoir pris le temps de venir ici nous rencontrer.
Honorables sénateurs, nous recevrons maintenant notre prochain groupe de témoins. J'ai deux demandes. J'ai en main un exposé qui a été préparé par nos invités, mais il n'est qu'en français. Puis-je donc vous demander la permission de le distribuer au comité, même s'il n'est que dans une seule langue?
Des voix : D'accord.
Le président : En outre, le sénateur Mitchell a ce matin soulevé la question d'un avis aux médias de la part de la Ville d'Edmonton, dont j'ai des copies. Elles ne sont également que dans une seule langue, l'anglais. Puis-je avoir votre permission pour le distribuer aux membres du comité?
Le sénateur Nolin : Oui.
Le sénateur Spivak : Selon nos règles, les témoins peuvent faire leur exposé dans la langue de leur choix. C'est tout à fait légitime.
Le président : Absolument. Toutefois, il faut la permission des membres du comité pour distribuer des documents qui ne sont que dans une seule langue.
Nous recevons maintenant, de la Coalition QuébecKyoto, Thomas Welt, ingénieur et membre du comité directeur, de même que John Burcombe, membre du comité directeur. Merci de prendre le temps d'être avec nous aujourd'hui. Nous vous en sommes très reconnaissants. Faites vos remarques liminaires, puis les membres du comité vous poseront des questions.
[Français]
Thomas Welt, ingénieur, membre, comité directeur, Coalition QuébecKyoto : Honorables sénateurs, nous vous remercions de nous avoir invités à vous exprimer notre opinion.
Je suis ingénieur à la retraite, membre de l'Ordre des ingénieurs du Québec. Je milite depuis environ 15 ans pour la recherche de mesures visant à contrer les changements climatiques. Je participe à l'ensemble des discussions sur les changements climatiques, tant sur le plan international que national, et la réduction des gaz à effet de serre.
À mes côtés, se trouvent John Burcombe, aussi ingénieur. Nous avons milité ensemble pour cette cause depuis des décennies, avons été membres des même comités et pris part aux mêmes discussions. Nous sommes tous deux membres de l'exécutif de la Coalition QuébecKyoto.
La Coalition QuébecKyoto comprend une cinquantaine d'organismes du Québec. Elle se compose de membres de différents secteurs dont l'environnement. Nous sommes voués au respect du protocole de Kyoto et à la réduction des gaz à effet de serre.
Nous vous avons fait parvenir, par courrier électronique, une lettre qu'on vous aura distribuée et qui indique notre point de vue sur le projet de loi C-33. Notre position est claire : nous sommes en désaccord avec le projet de loi.
[Traduction]
J'aimerais souligner qu'en principe, nous ne sommes pas contre les biocarburants, mais nous sommes en principe contres les biocarburants que nous appelons « agrocarburants », et qui font concurrence aux aliments. En principe, nous sommes contre ce type de biocarburants.
[Français]
Nous traiterons de plusieurs points concernant cette loi. Tout d'abord, j'aimerais vous parler des gaz à effet de serre. En principe, le projet de loi C-33 est en grande partie destiné à diminuer les gaz à effet de serre.
De quoi s'agit-il exactement?
Certains disent qu'une fois qu'on aura appliqué 5 p. 100 d'éthanol et 2 p. 100 des biodiésels, on aura peut-être une réduction de gaz à effet de serre de l'ordre de 2,7 mégatonnes; certains disent 4 mégatonnes, mais de toute façon, ce n'est pas très clair quelle sera vraiment la réduction. Il y a toutes sortes d'études là-dessus. Certains disent qu'on aura une efficacité de l'ordre de 1,3 ou 1,4 — on a parlé hier de cet indice d'efficacité —, d'autres disent que c'est beaucoup moins. D'autres études démontrent que c'est négatif, c'est-à-dire qu'il faudra mettre plus de gaz à effet de serre dans le processus que la réduction à la sortie.
Au fond, ce chiffre de gaz à effet de serre, est-ce qu'il est vraiment de l'ordre de deux mégatonnes, trois mégatonnes, zéro mégatonne, peut-être même négatif? Ce n'est pas ce qui est l'élément fondamental.
En 2010, selon les prévisions, les transports émettront environ 200 mégatonnes. Les émissions totales du Canada seront de l'ordre de 800 mégatonnes. Voyons un peu la situation. Nous parlons de quoi? D'une réduction éventuelle des gaz à effet de serre d'une fraction de 1 p. 100 — parce que si on prend 800 mégatonnes par rapport à deux mégatonnes ou par rapport à trois, il s'agit d'une petite fraction de 1 p. 100. Donc l'idée que l'éthanol, tel qu'il est proposé, aura vraiment un impact sur les gaz à effet de serre, ce n'est pas le cas.
L'impact est très petit et on ne sait même pas s'il est positif. Au fond, l'idée que cette procédure d'éthanol aura un impact sur les gaz à effet de serre n'est pas vraiment une réalité. D'autant plus, comme on l'a dit à plusieurs reprises, il sera très difficile de le mesurer, pour deux raisons. D'une part, parce que c'est très petit par rapport à l'ensemble et d'autre part, il y a énormément de facteurs théoriques et autres qui seront très difficiles à analyser. On ne saura pas si cette procédure d'éthanol va vraiment diminuer les gaz à effet de serre.
Je ne pense pas que ce soit la raison fondamentale d'aller dans cette direction. Il doit y avoir d'autres raisons, mais la réduction des gaz à effet de serre ne semble pas la vraie raison pour le faire. L'aspect gaz à effet de serre n'est pas vraiment l'élément qui justifie ce projet de loi C-33.
John Burcombe, membre, comité directeur, Coalition QuébecKyoto : Monsieur le président et membres du comité, je suis très heureux d'être ici ce matin.
[Traduction]
Ce matin, lorsque j'étais dans le train en venant ici, j'ai vu de multiples champs de maïs, et je n'ai pu m'empêcher de me demander si ce maïs servirait d'aliment ou de carburant.
Comme l'a demandé M. Welt, quel est le réel objectif de ce projet de loi? Je croyais que nous souhaitions réduire les gaz à effet de serre; pourtant, il semble que ce projet de loi ne contribuera pas à réduire l'utilisation des carburants pour le transport. Il ne fera que remplacer une partie du carburant non renouvelable avec du soi-disant carburant renouvelable.
Il semble que ce projet de loi ne réduira pas les quantités totales utilisées. Pourquoi le gouvernement a-t-il choisi cette voie plutôt que d'imposer d'autres mesures qui réduiraient l'utilisation du carburant en général, au lieu de simplement passer d'un type de carburant à un autre? Si la réduction des gaz à effet de serre est l'objectif visé par ce projet de loi, il faudrait souligner de façon évidente quelle sera cette réduction, ce qui n'est pas le cas à l'heure actuelle.
J'établirai une comparaison avec la réglementation qui a été adoptée en Europe. La directive européenne sur les carburants renouvelables a été rendue publique en 2003, et elle sera mise en vigueur en 2010. Le règlement dont il est question doit aussi être mis en vigueur en 2010, mais il n'a même pas encore été formulé. Nous n'avons qu'une vague idée de ce qu'il contiendra, sans détails. Il est très difficile de voir comment il pourra être entièrement mis en vigueur en 2010.
Hier, les distributeurs de pétrole ont dit qu'il leur fallait trois ans, à partir du moment où ils savent exactement ce que contient la réglementation, pour s'y conformer. Il semble que cet objectif de 5 p. 100 d'éthanol en 2010 sera extrêmement difficile à atteindre.
Hier, on a parlé des conséquences possibles que cela pourrait avoir sur la santé. Dans l'avis d'intention initial de 2006 d'élaborer un règlement fédéral exigeant l'utilisation de carburants renouvelables, l'on pouvait lire :
Une évaluation préliminaire de Santé Canada révèle qu'aucun effet sur la santé n'est à prévoir avec l'utilisation de l'éthanol en mélange jusqu'à 10 p. 100.
Comment faut-il interpréter cette déclaration? Est-ce que cela signifie que si le mélange est plus élevé que 10 p. 100 il y aura des effets? Même s'il est de 10 p. 100, est-ce que cela signifie que les effets sont là, mais qu'ils ne sont pas assez élevés pour qu'on s'en inquiète? Est-ce que le comité a demandé à Santé Canada de comparaître pour expliquer davantage les incidences que cela pouvait avoir sur la santé?
Hier, on a parlé d'une contamination possible de drêche de distillerie, qui représente ce qui reste lorsqu'on a prélevé l'éthanol du maïs et qu'il a été utilisé comme aliment pour le bétail.
J'ai manqué le début de cette discussion, alors je ne sais pas si le comité est au courant du travail effectué par l'Agence canadienne d'inspection des aliments à ce sujet. En fait, une ébauche de documents de politiques pour discussion a été publiée en avril et elle porte sur l'ébauche de réglementation de drêche de distillerie provenant de la production d'éthanol. Veuillez m'arrêter si vous êtes déjà au courant de ce fait. J'aimerais vous lire une phrase tirée de l'ébauche. La voici :
Certains ingrédients comme les enzymes, les micro-organismes, les auxiliaires de transformation, les médicaments antimicrobiens et tous les métabolites toxiques (p. ex. : mycotoxines) présents dans la matière première, peuvent être concentrés dans les sous-produits pendant la fabrication de l'éthanol et poser un risque pour la santé des animaux et éventuellement des humains (par le transfert des résidus dans la viande, le lait et les œufs).
Il faudrait examiner de plus près ces dossiers. Est-ce que le comité a songé à demander à des représentants de l'Agence canadienne d'inspection des aliments de comparaître pour décrire les problèmes éventuels?
D'après la liste, je crois que nous sommes les derniers témoins que le comité entendra. C'est regrettable, car il y a beaucoup de nouvelles informations qui paraissent en ce moment. Par exemple, le rapport d'Oxfam que l'on a mentionné hier, est désormais disponible. Le comité n'aura pas le temps de l'examiner s'il cesse aujourd'hui son étude du projet de loi. Je songe également au rapport Gallagher, de l'Angleterre, qui, d'après certains, paraîtra demain ou lundi. Si vous arrêtez vos travaux aujourd'hui, vous n'aurez pas le temps de l'examiner. Il contient bon nombre de renseignements sur les biocarburants et il serait important de le lire avant de décider si vous voulez adopter ou non ce projet de loi.
À titre de citoyen qui écoute les nouvelles sur les problèmes de pénurie alimentaire dans le monde, je me demande comment on pourrait même songer à utiliser de la nourriture pour en faire du carburant. Il faut réfléchir deux fois à ce que nous faisons. Les Européens, à l'heure actuelle, sont en train d'y songer. Nous devrions prendre le temps de tenir compte de toutes ces nouvelles informations. J'espère que le comité reportera l'adoption de ce projet de loi afin de pouvoir y travailler davantage et recueillir plus de renseignements pour prendre une décision éclairée.
Le président : Merci, monsieur Burcombe. Nous sommes ravis de vous avoir rencontré.
Vous avez raison. Vous êtes le dernier témoin que nous entendrons avant de passer à l'examen article par article du projet de loi. Vous pouvez rester et en découvrir davantage sur ce processus si cela vous intéresse de voir comment tranchera le comité.
Le sénateur Spivak : Je suis fort intéressée par les organisations que vous représentez. S'agit-il d'organisations écologiques localisées au Québec, ou sont-elles plus vastes? Pouvez-vous me parler davantage de vos organisations? Vous avez dit qu'il y en avait environ 50.
M. Welt : Oui. Mais il ne s'agit pas uniquement d'organisations écologiques. La plupart le sont probablement, mais nous représentons toutes sortes d'autres organisations. Il y a même des partis politiques qui font partie de ce groupe.
Tout ce que nous voulons, c'est défendre le Protocole de Kyoto et nous assurer que l'on réduira le plus possible les gaz à effet de serre. C'est notre objectif. En fait, c'est le seul objectif de notre groupe.
Le sénateur Spivak : De quels partis politiques s'agit-il? L'Assemblée nationale du Québec avait bien dit qu'elle mettrait en œuvre Kyoto, n'est-ce pas?
M. Welt : L'Assemblée nationale et le Parlement du Canada ont tous deux indiqué qu'ils mettraient en œuvre le protocole. Malgré toutes ces ententes, comme vous le savez, les émissions de gaz à effet de serre ont augmenté de manière draconienne au Canada, alors qu'elles auraient dû décroître.
Nous sommes ici pour veiller à ce que cette promesse soit tenue. La coalition a été créée lorsque quelqu'un avait proposé de construire une usine au gaz. Presque toute l'énergie du Québec est générée par l'électricité. Puis, à une certaine époque, Hydro-Québec a décidé d'avoir une centrale au gaz. Nous y étions opposés. C'est à ce moment-là que notre coalition a été créée, car nous estimions qu'une centrale au gaz produirait des émissions de gaz à effet de serre. Notre projet a été couronné de succès. La centrale n'a pas été construite.
J'espère que ça répond à votre question.
Le sénateur Spivak : Quels partis politiques appuyez-vous?
M. Welt : Je ne sais pas si je peux répondre à cette question.
Le sénateur Spivak : Le Parti vert?
M. Welt : Oui, absolument, ainsi que le NPD.
M. Burcombe : Le Bloc québécois.
M. Welt : Il y avait également l'ADQ, l'Action démocratique du Québec, qui est un parti représenté par M. Dumont. L'allégeance de ces partis nous importe peu, tant qu'ils appuient notre objectif.
Le sénateur Spivak : Vous avez suggéré de ne pas nous hâter et d'examiner davantage certaines données avant de prendre une décision. Est-ce bien votre recommandation?
M. Welt : Je dirais même que le débat sur cette question n'a pas véritablement commencé.
[Français]
Le sénateur Spivak : Si vous préférez, vous pouvez parler en français parce que nous avons un service de traduction.
M. Welt : Le débat à ce sujet n'a pas vraiment démarré. Lorsque la Chambre des communes a approuvé le projet de loi C-33 en troisième lecture, il n'y avait aucune réaction des médias, c'était le silence complet. Très peu de gens sont au courant. La population n'est pas au courant de cela parce qu'au fond, il n'y a pas eu de débat. Il faut qu'il y ait un débat.
Vous avez l'occasion d'ouvrir le débat. Le Sénat est, par principe, une Chambre de réflexion. Il peut jouer son rôle. Il faut qu'il y ait un débat, il faut que les opinions soient prononcées. Si vous prolongez votre réflexion, il y aura beaucoup d'autres organismes qui vont venir vous rencontrer, il y aura toutes sortes d'autres opinions. Nous présentons une opinion; je ne dis pas qu'elle est nécessairement la bonne, peut-être que ce que nous proposons c'est mauvais, mais nous sommes contre cela. Le débat n'a pas été lancé. Il faut qu'il y ait un débat. D'ailleurs, sur le plan de la transparence démocratique, ce n'est pas le cas. Le projet de loi C-33 a été approuvé.
Je voudrais dire simplement que le projet de loi C-33 est beaucoup plus vaste qu'on peut le croire, car c'est tout le problème du futur et de savoir comment on résoudra vraiment les problèmes dans une période post-pétrole. Cela a une influence.
Est-ce que la biomasse peut faire quelque chose? Quel est son impact? Tout cela n'a pas vraiment été discuté. C'est un projet de loi qui est beaucoup trop rapide. Il faut qu'il y ait un débat. D'ailleurs, le débat n'a pas lieu seulement au Canada; il est maintenant lancé sur le plan international. Quand la communauté européenne a proposé cette utilisation des biocarburants, il n'y avait pas encore vraiment de débat mais ce débat est en train de commencer et il va se poursuivre longtemps.
La biomasse est-elle vraiment une solution? Quel type de biomasse? Est-ce que ce sera un agrocombustible ou est-ce qu'on ne pourra pas du tout utiliser un agrocombustible et qu'il faudra utiliser une biomasse d'un type différent, qui ne sera pas en compétition avec la sécurité alimentaire des pays du tiers-monde?
Nous vous proposons de poursuivre votre réflexion et d'inviter d'autres personnes à venir témoigner. Il y a toutes sortes d'opinion sur ce sujet, il faut que le débat continue et c'est ce que nous vous proposons.
Le sénateur Spivak : Merci beaucoup, monsieur.
M. Welt : Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question.
Le sénateur Spivak : C'était un grand plaisir de vous voir ici.
Le sénateur Nolin : Bonjour, messieurs, et merci de vous être déplacés.
J'ai lu avec intérêt votre mémoire. Vous soulevez la question du processus d'examen périodique de l'effet de ce projet de loi. Cela nous a aussi préoccupés — la facture originale qui est contenue dans projet de loi. Si je vous disais que notre comité a dans son mandat de pouvoir examiner une loi comme celle-là, sans que la revue du texte de la loi soit obligatoire, est-ce que cela répondait à vos préoccupations? Est-ce que vous voyez à quel paragraphe de votre texte je fais référence?
M. Welt : Je comprends très bien votre question. Cette loi est, à notre avis, un pas dans la mauvaise direction. Donc, il vaut mieux ne pas faire ce pas et le corriger par la suite. Admettons que vous trouviez que, au bout de deux ans, c'était vraiment un pas dans la mauvaise direction, entre-temps on aura dépensé l'argent des contribuables, d'autant plus qu'on n'aura peut-être pas investi nos énergies dans de vraies solutions. Si vous découvrez au bout de deux ou trois ans que ce n'était pas bon, nos énergies auront été canalisées vers de fausses solutions. Il vaut mieux ne pas aller dans la mauvaise direction dès le départ.
Si, malgré tout, vous y allez, il faudrait avoir la possibilité de se corriger, c'est certain. Il ya la question du choix entre les mots « shall » ou « should »; nous pensons que « shall » est mieux que « should ». Ce serait déjà une bonne chose de corriger cela.
Le sénateur Nolin : Vous suggérez que ce soit obligatoire, donc.
M. Welt : Oui, mais nous vous suggèrerons, dès à présent, de ne pas clore le débat.
Le sénateur Nolin : Parlant de la nature même du projet de loi, vous êtes conscient du fait que, ce que le projet de loi autorise, c'est la mise en œuvre de règlements par le ministère de l'environnement, donc par le gouverneur en conseil, pour permettre les mélanges dans l'essence. C'est ce que le projet de loi prévoit, sans préciser les pourcentages — ce sera aux règlements de le faire.
Je fais ce petit préambule à ma question pour vous amener à la deuxième partie de votre mémoire dans laquelle vous favorisez, de toute évidence, des solutions alternatives aux agrocarburants, ce que vous appelez — et nous l'appelons de la même façon — les biocarburants de deuxième génération. Vous n'êtes pas contre cette option, n'est-ce pas?
M. Welt : En principe, nous ne sommes pas contre, encore faut-il vraiment analyser cette deuxième génération. Est- elle vraiment ce qu'il faut faire? Il se peut que la deuxième génération soit aussi mauvaise que la première.
Deuxième génération ne veut pas dire panacée. C'est une deuxième génération, il faut voir ce qu'il y a à l'intérieur de cela, l'analyser et voir si cela vaut le coup.
Le sénateur Nolin : Quand vous dites « analyser », qu'avez-vous en tête? Est-ce que vous entendez par là que le gouvernement, avant de faire un règlement, doit examiner les conséquences anticipées de ce règlement?
M. Welt : Oui, absolument.
Le sénateur Nolin : Si je vous disais que la Loi sur la protection de l'environnement prévoit déjà ce type de protection lors la mise en place de règlements par le gouvernement, est-ce que cela répondrait à vos préoccupations?
M. Burcombe : Pour moi, ce n'est pas suffisant. Il faut une évaluation beaucoup plus approfondie afin de voir si les types de nouvelles générations de procédés pour produire de l'éthanol sont à la hauteur des attentes. S'ils ne le sont pas, il faut penser à d'autres directions.
Comme je l'ai dit, on ne sait pas pourquoi le gouvernement a choisi cette piste pour tenter de réduire les gaz à effet de serre, si vraiment c'est le but de ce projet de loi. Pour nous il y a d'autres pistes, d'autres moyens, qui auraient dû avoir la priorité sur cette façon de faire. Une simple réduction dans la consommation de carburant aura le même effet pour beaucoup moins d'argent à notre avis. Pourquoi ne pas légiférer sur l'efficacité des voitures plutôt que de commencer à mettre de l'éthanol dans l'essence?
Le sénateur Nolin : Vous avez bien raison, monsieur Burcombe, et je ne vous conteste pas cette opinion, mais nous sommes saisis d'un projet de loi. Le gouvernement a pris une décision politique et le projet de loi est l'articulation de cette prise de position.
Je reviens à cette protection déjà contenue dans la loi. Elle dit que le gouverneur en conseil peu prendre un règlement, pour permettre le mélange de l'essence; lorsqu'il décide de ce règlement, il estime qu'il pourrait contribuer sensiblement à prévenir ou réduire la pollution atmosphérique. C'est déjà prévu dans la loi.
Ainsi, le ministre de l'Environnement, avant de se présenter devant ses collègues du Cabinet, doit avoir entrepris une analyse pour se convaincre, ainsi que ses collègues, que les règlements qu'il leur propose quant au mélange de l'essence vont réduire la pollution atmosphérique.
Est-ce que cela vous satisfait ou est-ce que vous trouvez que ce n'est pas assez?
M. Burcombe : Nous trouvons que ce n'est pas encore assez parce qu'on embarque dans quelque chose qui va nous faire perdre du temps si jamais les résultats ne sont pas ceux escomptés. Il y a quelques années déjà, l'éthanol ou les carburants renouvelables étaient vus comme une panacée, comme M. Welt le mentionnait. Les points de vue changent et les nouvelles analyses viennent avec d'autres opinions.
Donc, si l'intention est vraiment de réduire les gaz à effet de serre, selon nous, ce n'est pas vraiment la bonne piste à suivre. Si ce projet de loi vise d'autres buts, c'est une autre histoire, mais si nous ciblons la réduction des gaz à effet de serre, nous ne croyons pas que ce projet de loi devrait être adopté.
Le sénateur Nolin : Afin de m'assurer que je comprends bien votre propos, au fil de vos remarques liminaires, monsieur Welt, vous avez parlé d'une réduction des gaz à effet de serre assez minime dans la globalité des émissions canadiennes. Nous avons déjà des tableaux et des chiffres provenant de Ressources naturelles Canada et je tiens à m'assurer que, lorsque vous faites cette affirmation, je comprends bien à quelle quantité ou quel mélange essence- éthanol vous faites référence.
L'une des données fournies nous dit qu'un carburant composé de pétrodiésel et de 2 p. 100 de biodiésel produit de 1 à 2 p. 100 moins d'émission de gaz à effet de serre. Est-ce ce type de mélange que vous aviez en tête?
M. Welt : J'ai utilisé les chiffres de l'énoncé du 30 décembre 2006 — l'énoncé de la loi —, 2,7 mégatonnes, ainsi que d'un document préparé par le sénateur Banks, je crois, où on parle de quatre mégatonnes.
Tout d'abord, ces chiffres de 2,7 ou de quatre mégatonnes ne sont pas justifiés, ils peuvent être très inférieurs. Il y a une quantité d'études qui le disent. J'ai ici avec moi — on peut le faire circuler — une étude de 2005 où on dit que non seulement les émissions de gaz à effet de serre n'en sont pas réduite, mais cela les augmente. Une étude des documents préliminaires de la récente conférence de la FAO dit la même chose. Un de vos témoins d'hier, M. Samson, parlait de deux mégatonnes.
Au fond, les chiffres sont variés et, de toute façon, 2,7 mégatonnes, par rapport à 800 mégatonnes, c'est une petite fraction de 1 p. 100. C'est ça, la réalité. Même si on prend les chiffres de l'énoncé gouvernemental, 2,7 mégatonnes, c'est une petite fraction de 1 p. 100 : cela peut être 0,25 de p. 100, un demi ou zéro.
Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question.
Le sénateur Nolin : Oui, merci.
[Traduction]
Le sénateur Spivak : J'aimerais attirer votre attention sur la Gazette du Canada, Partie 1, en date du 30 décembre, 2006, à page 4529. Le sénateur Nolin a indiqué que le gouverneur en conseil peut prendre des règlements. En revanche, la Gazette du Canada dit que des quantités de VOC, d'oxyde d'azote et autres composantes augmentera. C'est ce que précise la Gazette du Canada. J'imagine qu'il s'agit du smog.
Il y a ici une contradiction entre ce que prône la LCPE et ce qui a été indiqué dans la Gazette du Canada. Cette contradiction existe déjà. Je voulais tout simplement le souligner, pour la gouverne des deux messieurs.
Le président : Messieurs, j'aimerais que vous portiez attention au projet de loi dont nous sommes saisis. Je présume que vous l'avez étudié attentivement.
J'aimerais revenir à une des questions posées par le sénateur Nolin. Ce projet de loi ne contient pas le mot « éthanol ». Il n'explique pas en quoi consisteront les « matières premières ». Le projet de loi ne porte pas sur des pourcentages et n'est assorti d'aucune date. Dans ce projet de loi, c'est le gouvernement qui demande au Parlement de pouvoir légalement réglementer les biocarburants et d'apporter les modifications nécessaires à la LCPE de 1999.
Vous avez demandé au comité de recommander au Sénat de ne pas adopter ce projet de loi cet après-midi. À quelles mesures, qui seront autorisées par le projet de loi, vous opposez-vous, par rapport à des événements éventuels?
[Français]
M. Welt : L'énoncé du 30 décembre 2006 décrit spécifiquement les raisons pour lesquelles cette loi serait adoptée. D'ailleurs, si une loi ne contient rien, pourquoi en faire une? Bref, on indique qu'une fois cette loi adoptée, on va réglementer 5 p. 100 d'éthanol et 2 p. 100 de biodiésel. C'est ce que dit l'énoncé. Au fond, on montre ce que l'on va faire.
[Traduction]
M. Burcombe : Nous connaissons tous les intentions liées à la modification de la loi. La plupart de la discussion qui a eu lieu dans ce comité était centrée sur l'intention de réglementer ou sur le contenu de la réglementation plutôt que sur la loi. Je crois que tout le monde vote sur l'intention de la réglementation plutôt que sur la loi proprement dite.
Le président : C'est précisément le problème que je veux souligner à tous, y compris nos téléspectateurs. Notre comité et d'autres comités ont d'ailleurs été aux prises avec cette question pendant des années. C'est ce que nous appelons d'habitude une législation cadre. Des gouvernements ont commencé à utiliser ce genre de législation de plus en plus fréquemment, pour demander au Parlement la permission de faire bon nombre de choses. Cela a mené aux difficultés que nous avons en ce moment, et que nous avons eues également avec d'autres projets de loi.
Soyons clairs : dans ce projet de loi, le gouvernement demande tout simplement au Parlement l'autorité de faire les choses qu'il a dit être susceptible de faire. Mais nous ne savons pas exactement ce que seront ces choses.
Le sénateur Kenny : Les gens ont du mal avec ce projet de loi, car il s'agit d'un chèque en blanc. On demande au pouvoir législatif de transférer ses pouvoirs à l'exécutif. Au bout du compte, ce serait tout un bond que le Parlement abdique ses pouvoirs et les donne à l'exécutif alors que ce dernier n'est pas prêt à définir la nature même de ces pouvoirs. On peut donc comprendre que certains d'entre nous ont l'impression de se trouver au bord du précipice et se disent : « Bon sens, ce sera un grand saut et ils ont l'audace de nous demander de leur écrire un chèque en blanc! »
Le président : C'est exact.
Le sénateur Mitchell : Il ne s'agit pas véritablement d'un chèque en blanc puisque le gouvernement a dit qu'il s'agirait de E5-B2 et les voitures ne peuvent pas aller plus loin que E-10. Donc il y a une certaine limite.
J'hésite toujours à donner autant de pouvoir au gouvernement. Cela dit, j'aimerais vous féliciter ainsi que féliciter votre organisation d'avoir fait autant de travail en ce qui concerne le Protocole de Kyoto.
Tout comme vous, je suis également fort préoccupé par le changement climatique. C'est en raison de cette frustration profonde et de cette grande préoccupation que je vais appuyer le projet de loi dont nous sommes saisis. C'est une des mesures les plus importantes que le gouvernement ait prise jusqu'à présent pour pouvoir avoir un impact sur le changement climatique.
Je comprends bien le débat quant à l'efficacité du projet de loi. Dans votre exposé écrit, vous avez proposé bon nombre de solutions, y compris les biocarburants de deuxième génération. Je pense que de lutter contre le changement climatique sera peut-être plus facile qu'on ne le croit. Mais il faut commencer. Nous allons sans doute commettre des erreurs, mais, à moins que l'on ne commence quelque part et que l'on ouvre le marché et qu'on laisse les gens être créatifs, nous n'irons nulle part.
On a énormément critiqué l'échange des crédits de carbone en Europe. La première série n'était pas parfaite. En revanche, si l'on n'avait pas entamé cette première série, l'on ne serait pas arrivé au deuxième tour et l'on n'aurait pas un marché qui me semble commencé à fonctionner.
Nous sommes sur le bord du précipice. Puisque rien ne semble jamais fonctionner, la plupart d'entre nous sont devenus tellement cyniques et frustrés, qu'ils pensent que cela ne fonctionnera probablement pas. Mais il faut aller plus loin. Laissons donc de la place pour le leadership, la créativité et les forces du marché, pour que l'on puisse faire ce qu'il faut faire.
Le président : Vous avez bien exprimé votre opinion. Est-ce que cela aboutira à une question?
Le sénateur Mitchell : Vous avez proposé bon nombre de solutions. Mais vous n'avez pas indiqué si vous préfériez que l'on donne suite à une taxe sur le carbone ou à un système d'échange de crédits.
M. Welt : Nous avons émis un communiqué. Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de le lire. Nous appuyons la taxe sur le carbone, mais nous ne trouvons pas que cela soit suffisant. Dix dollars par tonne, cela ne représente virtuellement rien. Quarante dollars par tonne ne changera rien non plus. Il faudrait que cette taxe soit bien plus élevée et que l'on taxe également le carbone à la pompe.
Songez au Québec, où l'électricité n'engendre pas d'émissions de carbone. La plupart des émissions proviennent du transport, notamment des voitures. Il représente 40 p. 100 des émissions au Québec et 20 p. 100 des émissions ailleurs au Canada. Au Québec, si l'on n'applique pas la taxe sur le carbone à l'essence, on ne verra aucune modification dans la province.
Nous sommes en faveur de la taxe sur le carbone, mais cela ne veut pas dire que nous excluons d'autres solutions. Ce n'est pas tellement la taxe sur le carbone ou le système d'échange de crédits qui importe. Ce qui est important, c'est comment on met le tout en œuvre. Si la taxe sur le carbone est très faible, elle n'aura aucune incidence. Si le plafond de l'échange est fort élevé, cela n'aura non plus pas d'incidence. Cela dépend donc de la structure de ces deux solutions. Notre coalition a d'ailleurs publié un communiqué à cet effet.
M. Burcombe : Une taxe sur l'essence fixe un prix pour le carbone mais n'en établit pas pour la réduction globale de CO2. Un système d'échange de crédits établit un plafond pour les émissions mais n'établit pas de prix pour y parvenir. On pourrait donc utiliser les deux systèmes.
Le sénateur Mitchell : Oui, absolument. La taxe sur le carbone est maintenant appliquée à l'essence, et représente 10 cents le litre, soit 42 $ la tonne. On pourrait affirmer que cela doublera le prix à la pompe.
De toute évidence, le système d'échange de crédits mène à des échanges et vous seriez donc en faveur d'un marché de crédits de carbone. Est-ce que celui-ci devrait être international ou simplement régional?
M. Welt : Si possible, il pourrait être international. Cela dépend de l'organisation. Si le plafond diffère dramatiquement au Canada par rapport à l'Union européenne et aux États-Unis, alors ça ne peut pas fonctionner. Ce ne sera pas la même chose. En principe, il faudrait que cela ait le plus grand rayonnement possible — si possible. Tout dépendra de l'organisation et des ingrédients du système d'échange de crédits.
Le sénateur Mitchell : Un des compromis qu'il faut faire, c'est que, pour être pratique, il faut accepter que les initiatives politiques ne soient pas parfaites. Parfois, il faut commencer avec une taxe sur le carbone qui soit plus faible qu'on le voudrait, ou avoir des plafonds plus faibles que ceux qu'on souhaite. Quoi qu'il en soit, il faut absolument commencer quelque part.
Le sénateur Milne : Ma question découle de celles qui ont été posées par le sénateur Mitchell. Je pense que le gouvernement a déposé ce projet de loi et a proposé d'apporter des modifications réglementaires parce que, jusqu'à présent, il a fait très peu pour respecter les engagements de Kyoto. Vous, de même que bon nombre des témoins, ont indiqué fort clairement que vous vous opposiez au projet de loi. Mais qu'est-ce que vous feriez d'autre?
Monsieur Burcombe, vous avez parlé avec le sénateur Mitchell d'un système d'échange de crédits et d'une taxe sur le carbone. Vous avez dit qu'il fallait réglementer les émissions des voitures, puisqu'elles sont particulièrement élevées au Québec. Que feriez-vous d'autre pour aider le Canada à respecter ses engagements de Kyoto?
M. Burcombe : Je pense qu'il faudrait s'orienter davantage dans la voie du transport électrifié. Même si les gens ne s'en rendent pas compte, les voitures électriques sont viables, surtout dans des régions urbaines. Puisque les distances à parcourir sont longues au Canada, je sais qu'elles peuvent sembler moins attrayantes ici qu'ailleurs dans le monde. En revanche, des pays, comme Israël, ont créé un système pour promouvoir les voitures électriques. Je pense que le Danemark a fait de même. Ce serait très logique de le faire au Québec, puisque notre énergie est surtout hydroélectrique. Les voitures électriques n'émettraient presque pas de gaz à effet de serre.
Les règlements européens font en sorte que l'on peut tenir compte non seulement de l'éthanol mais également des sources d'énergie renouvelable si elles réduisent les gaz à effet de serre de la même façon que le fait l'éthanol. Une source d'énergie renouvelable est définie en tant que source énergétique de carburants non fossiles comme l'énergie éolienne, solaire, géothermique, marémotrice, hydroélectrique, de la biomasse, issues du gaz d'enfouissement, du gaz des centrales de traitement d'égouts et du gaz bio. Une fois que l'on convertit ces sources d'énergies en électricité, on peut les utiliser pour le transport. À mon avis, cela serait bien plus efficace que les méthodes actuelles de production d'éthanol.
Le sénateur Milne : Merci de vos suggestions. Il est difficile de savoir comment procéder avec ce projet de loi puisque, comme l'a mentionné le président, il s'agit tout simplement d'une initiative législative habilitante. Nous n'avons tout simplement pas notre mot à dire dans les décisions que prendra le gouvernement à propos des règlements. D'habitude, cela prend environ un an pour mettre en œuvre des règlements à l'appui de la mesure législative. Peut-être pourrions-nous formuler des recommandations rigoureuses au gouvernement sur le contenu des règlements. Il est évident qu'il n'y a pas eu diligence raisonnable lors de la rédaction de ce projet de loi.
M. Burcombe : Voilà pourquoi nous croyons que le comité devrait poursuivre son examen du projet de loi C-33. Il devrait continuer à entendre des témoignages et à lire les renseignements qui paraissent quotidiennement sur le sujet. Si le comité met fin à ses travaux aujourd'hui, il ne pourra pas tenir compte des nouveaux rapports qui paraîtront.
Le sénateur Milne : Vous avez parlé du rapport Gallagher de la Grande-Bretagne. Quel est le second rapport?
M. Burcombe : Il s'agit du rapport d'Oxfam sur les biocarburants. Il s'intitule Une autre vérité qui dérange : Comment les politiques en matière d'agrocarburants aggravent la pauvreté et accélèrent le changement climatique. On y a fait référence hier.
Le sénateur Milne : Oui. Il a paru hier.
Le sénateur Brown : Si j'ai bien compris, vous avez dit que l'éthanol produit à partir du maïs ne produit pas plus d'énergie que cela en prend pour le produire. Est-ce exact?
M. Welt : C'est ce que prouvent certaines études. Si cela vous intéresse, j'ai une étude avec moi qui indique que le résultat est négatif. Non seulement il ne produit pas plus d'énergie mais il augmente les gaz à effet de serre.
Le sénateur Brown : Pouvez-vous me donner le nom de l'étude?
M. Welt : Oui. Je peux vous en donner un exemplaire parce que je l'ai avec moi. Il existe bon nombre d'études sur le sujet qui fournissent toutes sortes de données.
Peu importe que ça risque de produire un peu plus ou peu moins d'énergie, nous ne parlerons pas de l'aspect négatif. Même s'il ne s'agit que de trois ou quatre mégatonnes, cela émet quand même un faible pourcentage de gaz à effet de serre canadiens. On s'attend à ce que les gaz à effet de serre au Canada atteignent 800 mégatonnes d'ici 2010. Si nous faisons ce que souhaite faire le gouvernement, cela représenterait une infime portion de 1 p. 100. De plus, ce n'est pas quelque chose qu'on peut mesurer. Il est tout simplement impossible d'évaluer ce pourcentage. On ne peut pas savoir s'il est réel ou non. Il est difficile à évaluer pour deux raisons. D'abord, la quantité est très petite et n'a pas beaucoup d'incidence. Ensuite, il s'agit d'un chiffre théorique qui est difficile à évaluer dans la pratique.
Le sénateur Brown : Nous avons un exemplaire d'une étude effectuée à l'Université de Chicago par le Département de l'énergie des États-Unis qui montre que cela prend 0,74 million de BTU, (unités thermales britanniques), d'énergie fossile — du carbone — pour produire un million de BTU d'éthanol pour les stations-services. Sur le graphique, on voit que pour produire de l'essence à partir du pétrole, il faut 1,23 million de BTU d'énergie fossile pour produire 1 million de BTU d'essence. Si l'on soustrait ce montant de l'autre, cela donne 0,49 million de BTU. Cela veut dire que l'on a besoin de 49 p. 100 moins de combustible fossile pour produire de l'éthanol que pour produire de l'essence en utilisant l'énergie du pétrole.
Le sénateur Spivak : De quoi parlez-vous? De quel type d'éthanol s'agit-il?
Le président : Il parle de l'éthanol qu'on produit à partir du maïs.
Le sénateur Brown : Il s'agit de l'éthanol de maïs.
Le sénateur Spivak : S'agit-il du E85 ou du E10?
Le président : Il s'agit de la production de l'éthanol à partir du maïs.
Le sénateur Brown : Cela n'a rien à voir avec le mélange. Ça prend 49 p. 100 moins de combustible fossile pour produire de l'éthanol de maïs que pour produire de l'essence. En d'autres termes, cela prend plus d'énergie pour produire de l'essence que la quantité d'essence produite.
Le sénateur Spivak : Oui, je le comprends. En revanche, dans certains tableaux...
Le président : Honorables sénateurs, nous aurons le loisir de discuter de cela entre nous plus tard. En ce moment, nous sommes ici pour poser des questions aux témoins.
Le sénateur Brown : Monsieur Burcombe, vous comprenez que le projet de loi C-33 ne porte pas seulement sur le maïs utilisé pour produire de l'éthanol et à des fins alimentaires, et que les usines au pays sont déjà en train de produire de l'éthanol. Le projet de loi a été conçu pour faire deux choses. D'abord, il vise à réglementer le carburant qu'on met dans nos véhicules pour que, lorsque nous faisons le plein d'essence à la pompe, le contenu en éthanol soit compatible avec les moteurs de nos voitures. Deuxièmement, il vise à améliorer les usines d'éthanol que nous avons à l'heure actuelle par rapport à celles que nous aurons à l'avenir, lorsque nous verrons si nos choix s'avèrent positifs ou non.
Le président : J'imagine que l'explication que vous avez donnée aux témoins sur l'intention du projet de loi aboutira à une question.
Le sénateur Brown : Est-ce que vous pensez que ce projet de loi est nocif pour l'environnement? Croyez-vous qu'il peut améliorer l'environnement? On annonce aujourd'hui à Edmonton la toute première usine d'éthanol au Canada qui utilise des déchets biologiques.
Le sénateur Mitchell : C'est la première dans le monde.
Le sénateur Brown : Oui, c'est la première dans le monde. L'éthanol sera produit entièrement à partir de déchets. Peut-être qu'il vaudrait mieux songer à l'avenir et au meilleur scénario plutôt que de s'inquiéter du pire des cas. Est-ce que vous croyez que nous devrions essayer d'améliorer la production de biocarburants et de combustibles produits à partir de l'éthanol pour économiser de l'énergie?
M. Burcombe : Bien entendu, vous pouvez aller de l'avant. Mais vous n'avez pas besoin de réglementer à 5 p. 100 la quantité d'éthanol dans l'essence pour y parvenir. Ces nouvelles initiatives auraient probablement lieu, ou elles pourraient être engendrées grâce à un financement gouvernemental à cette fin. Pourquoi faudrait-il réglementer que toute essence doit contenir 5 p. 100 d'éthanol simplement pour permettre d'aller de l'avant avec ces nouveaux processus? On pourrait, à la place, les encourager et les financer sans avoir à exiger une teneur de 5 p. 100 d'éthanol dans l'essence.
Vous avez comparé la production d'un litre d'essence à la production d'un litre d'éthanol. Mais la meilleure chose à faire, serait de n'utiliser ni l'un ni l'autre. La meilleure chose à faire serait de ne pas utiliser ce litre de carburant parce que c'est ainsi qu'on réduirait le plus les gaz à effet de serre.
Le sénateur Brown : Je suis tout à fait d'accord avec vous. Notre première priorité devrait viser à réduire notre consommation d'énergie.
Mais nous avons un système en place qui ne peut pas être changé. Il y a des entreprises au pays qui font de leur mieux pour être plus écologiques en utilisant de l'éthanol et du biodiésel et elles ont prouvé que c'est non seulement économiquement rentable mais meilleur pour l'environnement. Pour les aider, le gouvernement doit réglementer cela. Il faudrait que le gouvernement puisse dire : « Nous allons examiner ce que vous faites, vous suivre de près et vous aider à le financer. Nous souhaitons avoir de bons résultats à l'avenir. Si ce n'est pas le cas, nous ne vous donnerons plus d'argent. »
Le président : La question est la suivante : Êtes-vous d'accord avec cela?
Pour en revenir à la question du sénateur Brown à propos de la réglementation, êtes-vous d'accord pour dire que, parfois, les forces du marché à elles seules et la volonté d'agir dans le bon sens ne permettent pas toujours d'en arriver aux résultats escomptés. Ainsi, les gouvernements doivent parfois assumer la responsabilité d'imposer une réglementation et obliger les gens à faire certaines choses.
J'ai un exemple parfait qui porte sur le combustible. Si j'étais un raffineur et distributeur, la chose la moins coûteuse que je pourrais faire pour augmenter les intérêts de mes actionnaires serait de ne rien faire. Je ne voudrais donc pas modifier mon usine, y ajouter des additifs ou acheter de l'éthanol d'ailleurs, peu importe la source.
Ce fut également le cas lorsqu'on voulait que les raffineurs retirent le soufre ou le plomb de l'essence. La chose la moins coûteuse pour eux était de ne rien faire. Ils ne l'auraient pas fait si le gouvernement ne les pas obligés à le faire, n'est-ce pas?
M. Burcombe : Oui. En revanche, ce projet de loi, qui modifie la loi, ferait en sorte que l'essence doit contenir 5 p. 100 d'éthanol, alors que ce mélange peut être remis en question. Nous n'en connaissons pas encore les incidences. Des rapports sont encore en train de paraître qui vous permettront de déterminer si c'est avantageux ou pas. Comme nous l'avons déjà mentionné, il est trop tôt pour déterminer si ce projet de loi est positif ou non.
Le sénateur Brown : J'aimerais souligner que cela fait plus de 20 ans que l'Alberta vend de l'essence ayant une teneur en éthanol de 10 p. 100.
Le sénateur Mitchell : J'aimerais poser une question similaire. Ce projet de loi encourage l'éthanol à base de maïs, de céréales et d'aliments et encourage également les initiatives qui viennent d'être annoncées à d'Edmonton. C'est exactement ce que nous voulons encourager.
Il est vrai que les pétrolières sont en concurrence avec les usines d'éthanol pour la production de carburants. Si le gouvernement n'exigeait pas ainsi que les pétrolières mettent de l'éthanol dans l'essence, comment pensez-vous, monsieur Burcombe — et vous avez souligné cela vous-même — que cela se passerait? Quel avantage auraient les usines d'éthanol, même s'il s'agissait d'éthanol produit à partir de déchets, pour obliger leurs compétiteurs à accepter leur produit et le vendre? Rien ne les influencerait et cela ne se produirait pas. On a besoin d'un tel projet de loi pour y parvenir.
M. Burcombe : Si le prix lié à l'émission de CO2 .était assez élevé et que la méthode de production d'éthanol était assez efficace pour générer des crédits de carbone, alors cela inciterait les entreprises à créer de tels systèmes. Les gens l'appuieraient et achèteraient de l'éthanol. L'éthanol serait bien moins cher, puisqu'il serait appuyé par les crédits de carbone.
Le sénateur Mitchell : Ou le système de plafonnement et d'échange. En fait, dans ce cas, nous parlons du plafonnement et non pas du plafonnement et de l'échange. Si ce type d'initiative n'existait pas, les choses ne se seraient pas déroulées aussi rapidement.
Nous n'avons pas beaucoup de temps. Il faut agir. Il existe bon nombre d'infrastructures déjà mises en place et le monde a bien réfléchi à la question — cela fait 20 ans en Alberta. J'ai lu les articles du Nature Conservancy et du Science Magazine. Ils ne décrivent pas ce qui arrive au Canada. Cette initiative revêt énormément de potentiel. Et l'initiative le prouve.
Le président : Des témoins connaissent maintenant votre point de vue.
Le sénateur Sibbeston : Monsieur le président, pourquoi ne pas en terminer avec cette discussion? Nous ne posons plus de questions aux témoins et ne faisons qu'ergoter avec eux. Revenons à nos moutons.
Le président : C'est une excellente suggestion.
Merci beaucoup, messieurs. Merci d'être venus nous voir ce matin.
M. Welt : Merci à vous également de nous avoir invités à exprimer nos points de vue.
Le président : Honorables sénateurs, nous allons poursuivre immédiatement la discussion. J'ai demandé à M. Salter, Mme Ryan et Mme Kerr de comparaître brièvement aujourd'hui, parce que le sénateur Nolin et moi-même avons une question à leur poser.
Le sénateur Sibbeston : Qui sont-ils?
Le président : Il s'agit de M. Michael Salter, conseiller principal, Politiques du développement des politiques stratégiques à Agriculture et Agroalimentaire Canada; Mme Helen Ryan, qui est directrice à Pétrole, gaz et énergie pour Environnement Canada; et Mme Catherine Kerr, analyste principale de la politique, pour Ressources naturelles Canada.
Nous allons avoir une courte pause avant d'examiner le projet de loi entre nous, mais je voulais permettre aux membres du comité d'avoir une dernière occasion de poser des questions aux fonctionnaires du gouvernement.
Le sénateur Nolin : Madame Ryan, vous m'avez entendu poser des questions au sujet du paragraphe 2 de l'article 140 de la LCPE. L'avez-vous sous les yeux?
Helen Ryan, directrice, Pétrole, gaz et énergie, Environnement Canada : Oui. Lorsque vous parlez du deuxième paragraphe de l'article 140, vous référez-vous aux amendements ou à la LCPE?
Le sénateur Nolin : C'est déjà dans la LCPE. Cela n'a pas été inclus dans le projet de loi C-33, mais ça s'appliquera à l'alinéa c.1) de l'article 140, au paragraphe 1. Je réponds à ma première question.
Voici ma deuxième question. En ce qui concerne le deuxième paragraphe, quand votre ministre propose un nouveau règlement au Cabinet, il doit d'abord être convaincu, puis persuader le Cabinet, que tout règlement en vertu de l'alinéa 1a) à 1d), y compris le c.1 :
[...] s'il estime qu'il pourrait contribuer sensiblement à prévenir ou à réduire la pollution atmosphérique résultant :
directement ou indirectement...
Vous avez tous le reste du texte. Comment comprenez-vous ce libellé? Vous avez entendu la discussion que nous avons eue à propos du projet de loi C-33. Lorsque votre ministre mettra en oeuvre tous les règlements du projet de loi C-33 qui portent sur le mélange des combustibles, devrait-il convaincre le Cabinet de ce que je viens de lire?
Mme Ryan : Oui. Afin qu'un règlement soit adopté, nous devons nous conformer à cette condition. Le ministre doit être d'avis que cela contribuera sensiblement à prévenir ou à réduire la pollution atmosphérique. Nous tenterons de quantifier ces réductions puis ferons une recommandation au gouverneur en conseil. On y inclura des dispositions sur le genre de réductions qui auraient lieu ou la contribution que le règlement pourrait faire.
Le sénateur Nolin : Cela ne s'applique pas seulement au ministre mais également au Cabinet, n'est-ce pas?
Mme Ryan : Oui. Le gouverneur en conseil effectue la recommandation.
Le sénateur Nolin : Le Cabinet doit être convaincu que cela pourrait « contribuer sensiblement à prévenir ou à réduire la pollution atmosphérique ». Cette prévention aux réductions ne peut donc pas être minime. D'autres témoins ont indiqué que la réduction totale des gaz à effet de serre serait si infime que cela ne devrait pas nous préoccuper. Il est faux de prétendre que nous prenons cette mesure pour empêcher les émissions de gaz à effet de serre. Est-ce important?
Mme Ryan : Vous me demandez si, lorsque le ministre demande au gouverneur en conseil d'adopter un règlement qui vise à réduire les gaz à effet de serre, cette réduction serait considérable. D'après la loi, il faut se conformer à ces critères. Il faut s'y conformer, avant de pouvoir aller de l'avant avec le règlement. Il est donc clair que le gouverneur en conseil doit être d'avis que cette contribution sera importante.
Le président : Je veux m'assurer d'avoir bien compris la réponse à la question du sénateur Nolin. La LCPE, telle qu'elle est conçue à l'heure actuelle, et sans avoir été modifiée, exige-t-elle que l'on démontre au gouverneur en conseil que l'on contribuera sensiblement à prévenir ou à réduire la pollution atmosphérique?
Mme Ryan : Le gouverneur en conseil doit être de cet avis. C'est la principale disposition.
Le président : Cela se trouve, à l'heure actuelle, dans la LCPE?
Mme Ryan : C'est exact.
Le sénateur Nolin : Comment pouvons-nous vérifier ce fait si l'on n'est pas au Cabinet? Faut-il vous croire sur parole? Il est inscrit dans la loi que ce pays est régi par la primauté du droit. Comment pouvons-nous être convaincus que c'est ce que vous avez respecté? Pouvons-nous revoir votre décision?
Le sénateur Spivak : Est-ce une blague?
Le sénateur Nolin : Non. Je pose une question honnête et à propos.
Mme Ryan : Je ne prends pas de décisions. C'est le ministre qui fait la recommandation et le gouverneur en conseil doit être d'accord. Nous nous en tenons aux faits, et donnons des conseils quant aux avantages éventuels. Des évaluations sont effectuées au sujet des incidences de la réglementation. L'évaluation est effectuée au sujet de la mise en œuvre de la réglementation. Il faut effectuer une analyse précise sur les avantages que pourrait engendrer la réglementation en question.
Le sénateur Nolin : Pendant le période de 60 jours au cours de laquelle votre règlement pourra être discuté publiquement, est-ce que les Canadiens pourront faire des observations à son sujet?
Mme Ryan : Oui, absolument.
Le sénateur Nolin : Que devraient-ils faire s'ils ne sont pas d'accord avec vos propos et veulent remettre en question votre analyse portant sur la réduction ou la prévention importante?
Mme Ryan : Si j'ai bien compris, vous voulez savoir ce qui se passe si quelqu'un, au cours du processus réglementaire, nous fournit des renseignements indiquant qu'il n'estime pas que l'analyse est judicieuse. D'habitude, on examine les renseignements reçus afin de voir si l'évaluation que cette personne a faite est fondée ou non. Est-ce que de nouvelles études ont été menées? Manquait-il des renseignements? On tient compte de cela et on pourrait conseiller soit de modifier les dispositions dans l'ébauche de règlement ou encore de les garder telles quelles.
Tout dépend de la façon dont on obtient ces observations mais elles doivent être envoyées à l'issue de la période où le public fait des observations et ensuite on apporte les modifications ou ajustements nécessaires. On tient compte de ces renseignements et on évalue la situation.
Le président : Nous avons entendu des témoignages ce matin et peut-être aussi les jours précédents lors de notre étude du projet de loi au sujet de la contribution à la réduction des gaz à effet de serre si le projet de loi dont nous sommes saisis était adopté. De l'avis de certains ces contributions ne sont pas importantes. Si, en fait, il s'agirait d'une réduction de moins de 1 p. 100 les gaz à effet de serre, peut-on vraiment la caractériser d'importante?
Mme Ryan : En ce qui concerne les réductions des gaz à effet de serre, étant donné l'ampleur du problème, nous tentons de trouver des moyens de réduire ces émissions partout. À mon avis, je ne pense pas que le niveau de réductions que l'on pourrait atteindre par ce biais serait négligeable. Des analyses ont été effectuées à cet effet. Mes collègues, au ministère des Ressources naturelles, ont notamment étudié l'ampleur de ces réductions.
Le sénateur Kenny : Avez-vous déjà été présente lorsque le ministre a eu cette discussion avec le gouverneur en conseil et tentait de le convaincre?
Mme Ryan : Je ne suis pas certaine de bien comprendre votre question?
Le sénateur Kenny : Je ne vous demande pas de révéler un secret du Cabinet. Je veux tout simplement savoir si vous avez été présente et avez observé le processus.
Mme Ryan : Je ne siège pas au Cabinet. Alors si vous me demandez si j'étais au Cabinet, je vous répondrai que non.
Lorsqu'on crée un règlement, un document réglementaire est présenté, qui comprend une évaluation de ses avantages et incidences. Nous devons fournir un énoncé d'évaluation des dispositions dans un règlement. Le ministre fait une recommandation qui est ensuite envoyée au gouverneur en conseil. Un comité du Cabinet examine cette recommandation et en débat. Ensuite, une décision est prise, quant à savoir si le gouvernement souhaite ou non aller de l'avant.
Je ne prends pas part à ce processus. Nous nous occupons plutôt de la préparation des documents réglementaires.
Le sénateur Kenny : Pouvez-vous définir à l'intention du comité en quoi consiste le gouverneur en conseil? Cela inclut combien de ministres? Trois?
Mme Ryan : Il y en a plus que ça.
Le sénateur Kenny : Je serai plus précis : Comment définit-on « le gouverneur en conseil »?
Le sénateur Spivak : S'agit-il d'un seul?
Le sénateur Kenny : Trois.
Mme Ryan : Je ne sais pas combien de ministres forment le quorum exigé pour que le comité tienne une séance. Je ne peux pas répondre à cette question.
Le sénateur Kenny : Il est peut-être injuste de vous poser cette question, puisque vous n'êtes jamais allée à l'une de ces réunions. Diriez-vous qu'il s'agit d'un exercice de fonctionnaire qui reçoit le sceau d'approbation à la fin de la journée?
Mme Ryan : Vous me demandez en fait si je crois que le processus juridique établi au Canada pour adopter les règlements est un processus d'approbation. Je vous dirais que non, absolument pas.
Le sénateur Kenny : C'est parce que vous avez vu le processus et que vous le comprenez.
Mme Ryan : Ma réponse est fondée sur ma compréhension de l'élaboration des règlements. Je ne siège pas au Cabinet. Je ne suis pas au courant des discussions qui y ont lieu. Je ne peux pas vous parler des questions qui sont présentées au Cabinet.
Un processus réglementaire a été établi au Canada. À mon avis, les gens ne le prennent pas à la légère. Je ne siège pas au Cabinet, alors je ne peux pas vous parler de ce qui s'y passe.
Le sénateur Kenny : Est-ce que votre point de vue provient de la lecture de Corry, ou du fait que vous avez vu personnellement la mise en œuvre des règlements?
Mme Ryan : Vous me demandez si mon opinion est fondée sur mon observation des discussions qui ont lieu au sujet d'un règlement. J'ai déjà répondu à la question. Je ne siège pas au Cabinet. Je ne suis pas au courant des conversations qui s'y déroulent.
Le sénateur Kenny : Ce processus implique bon nombre de règlements qui sont adoptés à l'emporte-pièce. Le processus est organisé et géré par des fonctionnaires et le point de vue politique ou celui du Cabinet est minime. Si l'on examine ce processus et qu'on dit : « Allez-y; nous faisons confiance au gouverneur en conseil qui s'occupe de cela », ce n'est pas simplement le Cabinet qui renonce à exercer son rôle mais les fonctionnaires également.
Le président : Merci, sénateur. Vous y êtes passé.
Le sénateur Kenny : Oui, en effet.
Le sénateur Milne : Monsieur le président, j'ai reçu une avalanche de documents qu'on nous a distribués au cours des audiences, y compris ceux qu'on vient de recevoir, et qui viennent tout juste d'être imprimés et sont encore chauds. Je pense qu'il s'agit d'un rapport sur les biocarburants du CCA. Nous n'allons tout simplement pas avoir l'occasion de le lire. Je ne sais même pas qui est le CCA.
Le président : Il s'agit de la Canadian Cattlemen's Association. Et j'ai demandé à ce qu'on le distribue parce que je croyais qu'il l'avait été. Le sénateur McCoy a demandé si nous avions entendu cette organisation. Je pensais que oui, mais en fait ce n'était pas le cas, alors j'ai décidé de faire distribuer le rapport aux membres du comité.
Le sénateur Milne : Je suis également contrariée de constater qu'on vient de recevoir le document d'information sur l'étude article par article du projet de loi C-33. Est-ce que c'est vous qui nous l'avez fourni?
Michael Salter, conseiller principal, Développement des politiques stratégiques, Agriculture et Agroalimentaire Canada : Non, nous venons juste de le recevoir nous-mêmes.
Le sénateur Milne : Il n'arrive presque jamais qu'un comité reçoive un document d'information 30 minutes avant de passer à l'examen article par article d'un projet de loi qu'il examine depuis déjà pas mal de temps. C'est inacceptable.
Le président : J'allais dire à la personne qui a fourni les cahiers d'information, qui sont maintenant tout à fait inutiles, qu'il n'y en avait pas suffisamment pour en donner à nos analystes.
Le sénateur Milne : Je serai ravi de donner mon document d'information à l'un des analystes.
Le président : Je pense que nous allons les mettre de côté pour le moment.
Le sénateur Spivak : Comme il y a beaucoup d'études, dont certaines concluent que l'article de la LCPE aura des répercussions négatives, quelle méthode utilisez-vous pour analyser ces études? De toute évidence, il ne s'agit pas d'un processus transparent puisque vous nous avez déjà dit qu'il vous était impossible de nous parler des discussions qui ont lieu à cet égard. Nous avons reçu 22 ou 23 études ou résumés d'études.
Le président : Sénateurs, relativement à ce genre de questions, permettez-moi de vous rappeler que le gouvernement doit pouvoir gouverner. Après tout, il s'agit du gouvernement.
Le sénateur Spivak : Qui dit le contraire?
Le président : Mettons les choses en contexte. Le processus en question s'applique, comme nous l'a rappelé le sénateur Kenny, pas uniquement à l'actuel gouvernement mais à la longue liste des gouvernements qui se sont succédé.
Le sénateur Spivak : Permettez-moi d'expliquer au président que, depuis que je siège au Sénat, nous avons étudié beaucoup de règlements. Il y a différentes formes de critiques qu'on peut formuler à l'égard du gouvernement, et j'en suis tout à fait consciente. Je sais également que le gouvernement doit pouvoir gouverner; autrement, ce serait l'anarchie.
Le président : La question a été posée.
Catherine Kerr, analyste principale de la politique, Ressources naturelles Canada : On a recours à de nombreuses études dans le cadre des analyses des réductions de gaz à effet de serre associées aux divers types de carburants. Vous les trouverez sur notre site web. Nous avons reçu plusieurs demandes, en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, sous forme de dossiers, relativement à l'analyse qui appuie notre position. Ces informations sont à votre disposition. En fait, la semaine dernière, lorsque Vicky Orsborne était ici, elle vous a parlé de certaines des analyses clés qui sont utilisées dans le cadre de l'élaboration de notre modèle sur les gaz à effet de serre, et je les ai ici pour vous.
Le sénateur Spivak : Ça nous sera utile, merci.
Mme Kerr : J'ai mon exemplaire. Je pense que ça fait partie du matériel d'information qui a été fourni.
Le sénateur McCoy : Je n'ai pas reçu ces informations. Il faudra qu'on en parle à notre greffier.
Mme Ryan : C'était une question à deux volets. Vous avez également soulevé la question de la transparence.
Le sénateur Spivak : Elle vient d'y répondre.
Mme Ryan : Je voulais ajouter que quand on élabore des règlements, toutes les informations pertinentes, y compris l'énoncé de l'évaluation des impacts des règlements, sont publiées dans la Gazette du Canada, donnant ainsi à quiconque l'occasion de formuler des observations, et ce pendant une période de 60 jours. Les informations sont donc à la disposition des parties intéressées, mais avant la publication, des préconsultations sont souvent organisées avec les parties intéressées afin d'identifier les informations et études pertinentes pour que les points de vue des diverses parties soient pris en compte à l'étape de l'analyse.
Le sénateur Spivak : Je suis contente que vous ayez mentionné la Gazette du Canada parce que, dans l'édition du 30 décembre 2006, on parle du smog. Il est question du pourcentage de composés organiques volatiles et des oxydants d'azote, entre autres, à la page 4529.
Comment conciliez-vous ce qui a été publié dans la Gazette du Canada, relativement au projet de loi C-33, avec la LCPE? En d'autres termes, vous avez déjà publié des chiffres relativement aux émissions prévues. Si vous n'êtes pas en mesure de répondre à la question maintenant, je vous demanderais de nous faire parvenir votre réponse plus tard.
Mme Ryan : Bien que je n'aie pas sous les yeux le document auquel vous faites référence, je pense que c'est l'avis d'intention qui a été publié dans la Gazette du Canada.
Le sénateur Spivak : C'est exact.
Mme Ryan : Les informations dont vous avez parlé se rapportent à des études effectuées sur certains contaminants. Certains fluctuent en fonction de la matière première ou de la source en question. Nous devons évaluer les bienfaits globaux. Pour ce qui est des polluants aériens, il y a une fluctuation dans certains cas. D'après l'évaluation technique, on peut dire qu'en général les choses s'égalisent, c'est-à-dire qu'il n'y a pas d'avantage absolu pour la première génération. Là je parle de la production d'éthanol.
Pour ce qui est des gaz à effet de serre, par contre, l'évaluation est différente. Lorsque le personnel formule une recommandation et lorsque la décision est en passe d'être prise, les polluants atmosphériques et les gaz à effet de serre sont pris en compte. Dans l'avis d'intention, on identifie les incidences pour les polluants atmosphériques parce qu'on sait qu'il y a une certaine fluctuation, et on traite également des avantages provenant des gaz à effet de serre.
L'évaluation porte sur l'éthanol. Pour ce qui est de l'évaluation visant à incorporer au diésel une composante renouvelable, la disposition n'est plus valable. Il y a un véritable avantage pour ce qui est des polluants atmosphériques également.
Le sénateur Spivak : Après la période d'examen des règlements de 60 jours, le conseil des ministres prend sa décision. Comme vous le savez, les parlementaires ne peuvent pas modifier les règlements. Est-ce exact qu'après ce processus utile, le Cabinet prend une décision.
Mme Ryan : Votre question porte-t-elle sur la mise en œuvre des règlements après l'entrée en vigueur de dispositions dans un texte législatif?
Le sénateur Spivak : Le public peut participer au processus d'examen mais les parlementaires ne peuvent pas modifier les règlements une fois qu'ils ont été rédigés.
Mme Ryan : La méthode visant à modifier un règlement est la même que pour son adoption. C'est le gouverneur en conseil qui a le pouvoir de modifier les règlements.
Le président : Les règlements seront également renvoyés au Comité mixte de l'examen de la réglementation.
Le sénateur Spivak : Oui, je le sais.
Le sénateur Milne : Les modifications aux règlements sont-elles également publiées au préalable dans la Gazette du Canada pour que le public puisse y réagir?
Mme Ryan : Un règlement établi en vertu de la LCPE est assujetti aux mêmes dispositions. En effet, les amendements aux règlements sont publiés dans la Gazette du Canada, pendant une période officielle de réaction.
Le sénateur McCoy : Tout ceci n'est pas très clair. On espère mettre en place une norme régissant les carburants renouvelables et l'objet du projet de loi C-33, c'est d'inscrire cette norme dans un règlement. Je m'attendais à ce qu'on ait une déclaration selon laquelle tous les carburants vendus au Canada devraient contenir 5 p. 100 de diésel et 10 p. 100 d'éthanol. Je pensais que c'était l'hypothèse dont on partait.
Le président : En vertu du projet de loi, le gouvernement pourrait effectivement prendre un tel règlement.
Le sénateur McCoy : C'est ce à quoi on s'attend tous. En vertu de quelle mesure législative cela se fera-t-il?
Mme Ryan : Votre question porte-t-elle sur les changements qui sont apportés à la LCPE et sur l'impact sur les règlements à venir?
Le sénateur McCoy : Oui. Quelle sera la norme régissant les carburants renouvelables?
Mme Ryan : Les changements dont il est question visent à octroyer l'autorité habilitante, ce qui permettrait la mise en place de règlements.
Le sénateur McCoy : La norme sur les carburants renouvelables figurera à quel article, quel paragraphe, quel alinéa?
Mme Ryan : Elle figurera dans la partie portant sur les carburants.
Le sénateur McCoy : Oui, la partie 7. À quel article?
Mme Ryan : Il existe un certain nombre de dispositions et le règlement n'a pas encore été rédigé. Les dispositions précises dans la partie sur les carburants qui seront visées dépendront de la nature du règlement. Je pourrais vous donner une idée générale, mais ça dépendra de la rédaction du règlement.
Le sénateur McCoy : La norme régissant les carburants renouvelables n'a rien à voir avec la pollution, alors. Je suis un petit peu perdue.
Le président : Le terme qui est utilisé systématiquement n'est pas « carburants renouvelables » mais bien « biocarburants ».
Le sénateur McCoy : Ce terme n'apparaît même pas dans le projet de loi C-33. Dans le texte, il est question de mélange de carburants, mais pas de biocarburant, de carburant renouvelable ou quoi que ce soit du genre.
Le sénateur Spivak : Il n'y a pas de normes.
Le président : Dans le projet de loi, il est question de mélange de carburants. Après tout, c'est l'objet du texte législatif.
Le sénateur McCoy : Oui mais ça n'a rien à voir avec la pollution.
Le président : Le projet de loi n'est pas prescriptif. Il a pour objet d'accorder l'autorisation du Parlement nécessaire pour rédiger des règlements afin de réglementer les biocarburants.
Le sénateur McCoy : Voilà pourquoi je voudrais savoir où cela va se trouver dans le texte. Suite aux questions de notre vice-président portant sur les détails des paragraphes 140(1) et (2), je commence à me demander où on va voir émerger la norme régissant les carburants renouvelables. Je me suis dit que je profiterais de la présence des experts pour poser la question.
Le président : Le seul endroit où il en est question dans le projet de loi, c'est au paragraphe proposé 104(6) à la page 3 où on décrit le type d'études d'efficacité qui devraient être effectuées par les comités du Parlement afin de déterminer si les règlements promulgués en vertu de ce texte législatif ont eu un effet positif.
Le sénateur McCoy : Je vois.
Le président : C'est le seul endroit où apparaît ce genre de terme dans le projet de loi.
Le sénateur McCoy : Si nous allons continuer à parler de cette question, sachant que le témoin a déjà répondu de son mieux et que les règlements n'ont pas encore été rédigés, il est difficile de prédire quels articles seront...
Mme Ryan : Permettez-moi de clarifier. La disposition dont vous parlez porte sur le pouvoir de réglementation visant le mélange de carburants. De façon générale, quand on rajoute de l'éthanol à de l'essence, il faut que ça se fasse après la production. À l'heure actuelle, les pouvoirs compris dans la LCPE permettent de réglementer la production, l'importation ou la vente de carburants. La réglementation peut déjà se faire pour ces trois activités. La disposition dont il est question permettra de clarifier les choses en précisant qu'il est également possible de réglementer le mélange de carburants. Pour concevoir des règlements efficaces, il est important qu'on sache à quel niveau il est le plus approprié d'imposer des règlements.
La raison pour laquelle je ne peux pas vous dire si oui ou non nous allons nous servir de cette disposition en particulier dépend de la rédaction du règlement. En effet, le règlement n'a pas encore été rédigé. La disposition qui nous intéresse donne la souplesse nécessaire pour concevoir des règlements qui s'appliqueront à tous les intervenants à chaque maillon de la chaîne.
Vous voulez savoir à quels articles de la LCPE on aura recours pour cette réglementation. Il faudra déterminer sous quelle rubrique il faudra rajouter la disposition en question parce que sachez qu'il faudra surveiller et faire rapport de tous ces éléments.
Le sénateur McCoy : Pour revenir à la question du vice-président, le ministre doit être convaincu qu'on contribue de façon significative à la prévention ou à la réduction de la pollution atmosphérique. En vertu de la LCPE, on considère que les gaz à effet de serre créent de la pollution.
Mme Ryan : Pourriez-vous m'indiquer le libellé exact?
Le sénateur McCoy : Je pense que vous l'avez déjà. Je vous l'ai déjà donné. Il s'agit du paragraphe 104(2) de la loi actuelle.
Mme Ryan : On y lit « contribuer sensiblement à prévenir ou à réduire la pollution atmosphérique résultant... » Voulez-vous savoir si on considère que les gaz à effet de serre sont une forme de pollution?
Le sénateur McCoy : Oui.
Le sénateur Spivak : Aux États-Unis on a décidé que c'était effectivement le cas.
Mme Ryan : Désolée, j'ai voulu consulter les avocats.
Le terme que nous utilisons dans la disposition sur les matières toxiques étant « polluants » et les gaz à effet de serre étant définis comme des polluants, ils contribuent à la pollution.
Le sénateur McCoy : Le non-respect de la loi est une infraction criminelle, si j'ai bien compris, mais ça c'est une autre paire de manches. N'en parlons pas.
Le sénateur Milne : Plus nous avons la présence des fonctionnaires, plus j'ai de questions à leur poser.
L'article 140(3) de la LCPE se lit comme suit :
Le règlement peut traiter les combustibles différemment selon leur appellation commerciale, leur propriété physique ou chimique, leur source, leur catégorie, les conditions de leur utilisation, leur lieu d'utilisation et la période de l'année pendant laquelle ils sont utilisés.
Dans l'article portant sur l'exemption, on s'en remet au gouverneur en conseil, sur recommandation du ministre :
Sur recommandation du ministre, le gouverneur en conseil, peut, par règlement, soustraire à l'application du paragraphe 139(1) un producteur ou un importateur en ce qui concerne tout combustible qu'il produit ou importe, selon le cas, dans une quantité inférieure à 400 mètres cubes par an.
En d'autres termes, toutes les spécificités qu'on retrouve dans l'actuelle LCPE sont retirées du fait qu'on remplace ce paragraphe. Pourriez-vous confirmer que le gouverneur en conseil sera toujours en mesure d'établir des règlements relativement à tous ces différents aspects précis une fois que la LCPE aura été modifiée?
Mme Ryan : Vous faites référence à l'amendement au paragraphe 140(3)?
Le sénateur Milne : Oui, c'est bien cela.
Mme Ryan : On dit :
Sur recommandation du ministre, le gouverneur en conseil, peut, par règlement, soustraire à l'application du paragraphe 139(1)...
Le sénateur Milne : C'est exactement ce que je viens de vous lire.
Mme Ryan : L'exemption ne vise que les petites quantités. Elle n'annule pas les autres dispositions plus générales.
Le sénateur Milne : Si, au contraire, puisque l'amendement vise à remplacer l'actuel paragraphe 140(3) de la loi.
Mme Ryan : En fait, il y a deux changements. Les dispositions générales dont nous avons parlé sont regroupées ailleurs à l'article 5. L'exemption dont nous parlons vise uniquement les très petites quantités.
Le sénateur Milne : Elle ne porte que sur les petites quantités, merci.
Mme Ryan : Les dispositions restent telles quelles.
Le sénateur Milne : Et où sont-elles transférées dans le projet de loi?
Le sénateur Nolin : Elles sont transférées à l'article 330. Ce qui figure à l'heure actuelle au paragraphe 140(3) se retrouvera au nouvel article 330(3.2).
Le président : Les dispositions demeurent.
Le sénateur Nolin : Elles sont même étoffées.
Le sénateur Mitchell : Madame Kerr, pourriez-vous nous donner un bref résumé des conclusions de ces études effectuées par votre ministère dont vous nous avez parlé? Ce qui m'intéresse, c'est la réduction de carbone net identifié dans le cadre de vos études. Ces études sont basées sur des constatations canadiennes, n'est-ce pas?
Mme Kerr : Pour ce qui est des valeurs nettes, à titre de jalon, l'éthanol comprend plus d'énergie que l'énergie fossile nécessaire pour l'exploiter. Nous avons déjà dit ce matin, qu'à titre de comparaison, la production d'essence demande plus d'énergie fossile que celle de l'éthanol.
Le président : Quel est le ratio? On nous a donné des chiffres divergents : 1,25, 1,36.
Mme Kerr : Pour l'éthanol fabriqué à partir de maïs, d'après nos études sur l'équilibre énergétique, 0,64 unité d'énergie fossile est utilisée pour produire une unité d'énergie, alors que pour l'essence, il s'agit de 1,27 unité, à savoir environ deux fois plus.
Le sénateur Mitchell : Et cela se traduit par une réduction de combien de tonnes de carbone?
Mme Kerr : Pour ce qui est du cycle de vie des émissions de gaz à effet de serre associées à l'éthanol traditionnel, il y a une réduction de 30 à 40 p. 100; de 60 p. 100 pour le biodiésel fabriqué à partir de canola et de 80 à 100 p. 100, d'après nos estimations, pour la nouvelle génération.
Le sénateur Mitchell : Ces études se fondent-elles sur les constatations canadiennes?
Mme Kerr : Elles se fondent sur notre modèle, appelé GHGenius, le seul du genre au Canada et l'un des rares dans le monde, fondé sur une analyse du cycle de vie. Il est inspiré de différents rapports et études, et la façon dont il est utilisé se fonde également sur ces rapports et études. Nous en avons une liste complète, qui vous a été fournie.
Le sénateur Mitchell : Contrôlée par les pairs?
Mme Kerr : Oui. Très peu d'études ayant été contrôlées par les pairs ont permis de tirer les conclusions contraires.
Le sénateur Spivak : Les producteurs de pétrole se préoccupaient des responsabilités causées par les blessures et les dommages causés aux réservoirs de carburants marins et à d'autres équipements. Le paragraphe 2(5) du projet de loi C- 33 couvre-t-il adéquatement cette préoccupation en particulier?
Mme Ryan : Lorsque vous dites que les producteurs de pétrole se préoccupaient des dommages causés aux réservoirs de carburants marins, que voulez-vous dire exactement?
Le sénateur Spivak : Pour ce qui est de l'éthanol, des poursuites judiciaires ont été intentées aux États-Unis en raison des dommages causés à certains navires à cause de l'éthanol utilisé. Je n'en sais pas suffisamment à ce sujet.
Le président : Hier, les représentants de l'Institut canadien des produits pétroliers nous ont dit qu'en Californie, des poursuites avaient été intentées contre ceux qui fournissent le carburant utilisé dans les bateaux, parce que ce carburant avait détruit ou endommagé le moteur de ces bateaux. Ces fournisseurs ne veulent pas assumer une telle responsabilité.
Mme Ryan : Vous me demandez si les dispositions du changement règleraient ce problème. Ma réponse est que les dispositions de la LCPE ne toucheraient pas spécifiquement la responsabilité d'une entreprise relativement à un produit qu'elle fournit à quelqu'un.
Lorsque l'on se penche sur la question de savoir quels réservoirs peuvent recevoir ces carburants, il est important de sensibiliser les gens afin d'assurer l'intégrité des réservoirs et, ainsi, empêcher certaines substances d'y être placées. Cela doit être fait, peu importe les dispositions de la réglementation. Si les carburants contiennent des contaminants, cela peut poser des problèmes en raison de leur nature. Les dispositions du projet de loi ne règleraient pas ce problème.
Le président : Merci à nos témoins. Nous vous sommes reconnaissants d'être venus. Votre visite s'est avérée très utile pour nous.
Honorables sénateurs, le prochain point à l'ordre du jour est la discussion sur la l'étude article par article du projet de loi C-33.
Le sénateur McCoy : Avant de commencer l'étude article par article, j'aimerais connaître la source du document qui nous a été distribué, celui qui comporte une note en bas de page où il est écrit CCA Biofuels Report.
Je vous parle ici d'un point de vue régional; je viens de l'Alberta, et je suis préoccupée par le fait que nous n'avons pas entendu les représentants du secteur du bétail. Comme vous vous en souvenez sans doute, j'ai demandé hier au représentant de la Fédération canadienne de l'agriculture s'ils étaient membres de ce groupe et s'il les représentait. Il a dit non. Je pense que le représentant du Conseil canadien du porc était le seul autre représentant du secteur du bétail que nous avons entendu.
En Alberta, le secteur de l'élevage bovin est très important. Je sais qu'ils se préoccupent de l'incidence des usines d'éthanol, en particulier, sur l'alimentation du bétail en Alberta. Ces derniers jours, j'ai communiqué avec l'un de leurs représentants, qui se trouve en Chine. J'ai reçu par courriel une copie d'un rapport préparé par la Canadian Cattlemen's Association en août 2007; j'ai demandé à mon adjoint de faire imprimer le rapport et de nous l'amener ce matin. Je pense que l'un des membres du personnel l'a accepté. Vous avez une copie de ce rapport, sans la page couverture.
Il s'agit d'un rapport daté du 20 août 2007. Il contient des renseignements très utiles. Toutefois, je ne veux pas que les membres du comité aient l'impression que la Canadian Cattlemen's Association a déposé cette preuve officiellement. Je suis heureuse que leur point de vue ait été communiqué au comité.
À titre de bref résumé, en août 2007, ils ont dit qu'ils appuieraient une stratégie canadienne sur les biocarburants, avec certaines réserves. La stratégie sur les biocarburants devrait être transformée en approche reposant sur le principe du libre marché de façon explicite et rapide. L'association a formulé d'autres recommandations, notamment en apprendre davantage sur les effets de l'industrie des biocarburants sur le secteur du bétail, ce qui constitue un intérêt significatif pour l'Alberta. Il y a également certains arguments au sujet de la recherche sur les céréales, qui faciliterait l'atteinte de l'objectif visant à permettre la cohabitation de l'industrie des biocarburants avec un secteur du bétail sain, concurrentiel et rentable au Canada.
Je n'en dirai pas plus à ce sujet. Toutefois, je veux souligner que les renseignements qui sont devant vous datent d'un an et n'ont pas été envoyés au comité par la Canadian Cattlemen's Association elle-même, mais qu'ils sont pertinents. En ma qualité d'Albertaine, je voulais m'assurer que nous ayons ce point de vue en tête lorsque nous discuterons du projet de loi C-33.
Le président : Les représentants du Syndicat national des cultivateurs nous ont dit qu'ils représentent les intérêts de certains éleveurs de bétail et la CCA a comparu devant le comité des communes lors de son examen du projet de loi. Nous nous sommes déjà penchés sur cette question auparavant.
Le sénateur Milne : Je souhaite établir certaines conditions à l'avance.
J'ai l'intention d'appuyer l'adoption de ce projet de loi, à condition que nous joignions des observations sur les réserves que nous avons tous, je pense, étant donné la preuve qui nous a été présentée. J'espère que vous avez un traducteur en attente.
Le président : Pour bien comprendre le processus, proposez-vous que nous révisions ces recommandations avant de faire rapport au Sénat au sujet du projet de loi?
Le sénateur Milne : Je peux vous dire ce que j'aimerais voir dans les recommandations, si les membres du comité sont intéressés.
Le président : Selon moi, si nous voulons joindre des commentaires à notre rapport au Sénat déposé cet après-midi, il faudrait commencer à les préparer immédiatement. Vous aurez besoin d'un crayon, parce que noter les commentaires d'un comité est très difficile.
Le sénateur Milne : J'ai pris des notes.
Le sénateur Spivak : Est-il temps pour moi de présenter ma motion?
Le président : Pas tout de suite, parce que je veux conclure cette discussion d'abord. Nous n'en sommes toujours pas à l'étude article par article. Nous discutons du projet de loi.
Le sénateur Spivak : Je veux déposer ma motion avant l'étude article par article.
Le président : Nous n'avons pas encore commencé l'examen officiel du projet de loi, et nous devons prendre certaines mesures avant de pouvoir le faire.
Le sénateur Mitchell : J'aimerais souligner le témoignage de Mme Kerr, de Ressources naturelles Canada; le ministère dispose d'une recherche très solide réalisée au Canada et contrôlée par les pairs qui indique une reprise positive considérable du point de vue des gaz à effet de serre liée à la production d'éthanol, même grâce aux grains. En raison des niveaux actuels des prix des grains, ces organisations font face à des pressions importantes pour commencer à faire ce qu'elles font déjà, c'est-à-dire commencer à utiliser les carburants de seconde génération.
Je veux dire autre chose. Je sais qu'il y a certaines préoccupations au sujet de l'expression « il y aurait lieu » à l'article qui parle des examens annuels. Le paragraphe 2(8) à la page 3 du projet de loi indique ce qui suit :
Il y aurait lieu [...] que le comité soit du Sénat, soit de la Chambre des communes, soit mixte...
Nous, les sénateurs, contrôlons le comité sénatorial, « il y aurait lieu » signifie que l'on peut faire tout ce que l'on veut à cet égard. Les membres du comité semblent dire qu'ils souhaitent procéder à cet examen de façon périodique, régulière et fréquente. Cela me rassure quant à la robustesse de cet article en particulier.
Le président : À titre de précision, sénateur Mitchell, vous avez presque raison. Les comités ne décident pas tout à fait par eux-mêmes de ce qu'ils font. Ils prennent ces décisions en fonction d'un ordre de renvoi du Sénat à ses comités.
Vous avez raison de dire qu'en vertu de notre ordre de renvoi actuel, qui est approuvé au début de chaque nouvelle législature, le comité peut décider de façon arbitraire de le faire, comme nous avions l'intention de le faire avec notre propre révision de la LCPE. Cette tâche nous a en fait été attribuée directement par le Sénat. Vous avez raison de dire que le comité peut le faire, mais je ne suis pas certain de ce qu'il en est pour la Chambre des communes.
Le sénateur Spivak : Pour répondre aux observations du sénateur Mitchell, je ne veux pas que l'on considère qu'il s'agit d'un rapport définitif sur les émissions de gaz à effet de serre. J'ai lu environ 22 rapports différents, et c'est le seul qui se démarque par ces chiffres.
Il faudrait savoir comment comparer des pommes avec des pommes, plutôt que des pommes avec des oranges. Si on compare un litre d'éthanol pur et un litre d'essence, ce n'est pas la même chose que d'examiner les différents cycles de vie ou si on tient compte des oxydes d'azote et de la terre.
Je ne fais pas la promotion d'une étude par rapport à une autre. Je veux simplement souligner que jusqu'à maintenant, il ne s'agit pas d'un domaine que l'on connaît avec certitude.
Le sénateur Brown : Je veux simplement indiquer que deux études ont en fait été complétées, dont l'une par les Canadiens qui viennent de témoigner. Leur différentiel était de 63 p. 100 en faveur de l'éthanol. Il y a également l'étude de Chicago, que j'ai lue plus tôt, dont le différentiel était de 49 p. 100. On voit donc que plus d'une étude tire des conclusions largement positives.
Je pense que la confusion est causée par le fait que personne dans l'industrie du pétrole ne nous a dit qu'ils utilisent davantage le carburant fossile pour produire un litre de carburant fossile. Il faut en fait 1,23 litre d'essence pour produire 1,23 litre d'essence. Ce n'est pas dans leur intérêt de le faire, alors pourquoi le feraient-ils?
Le président : Les membres du comité doivent savoir que nous avons lancé une invitation à l'Association canadienne des producteurs pétroliers pour qu'ils comparaissent devant le comité. Ils ont refusé en disant qu'il s'agissait d'une question d'aval davantage que d'une question d'amont. Mais nous les avons invités à se pencher sur cette question.
Le sénateur Nolin : Plus tôt ce matin, nous avons parlé du Comité mixte permanent d'examen de la réglementation. Pour ceux d'entre vous qui n'êtes pas membres du comité, ce qui n'est pas mon cas, je soutiens qu'en raison de la formulation du paragraphe 140(2), au sujet duquel j'ai questionné les représentants d'Environnement Canada, le ministre de l'Environnement devrait être invité à comparaître devant le comité pour discuter de l'importance de la contribution à l'égard de la prévention ou de la réduction de la pollution.
Étant donné la façon dont le projet de loi est déjà formulé, je pense que le comité serait en droit de recevoir le ministre pour qu'il explique à quel point cette réglementation est importante et pourquoi elle a été créée.
Le président : Comme le sénateur Nolin me l'a expliqué, ce serait la seule façon pour le comité d'être en mesure d'évaluer les règlements. Le comité doit se limiter à l'étude des règlements pour vérifier qu'ils soient conformes à la loi habilitante qui les autorise à être promulgués. Il y a des questions de constitutionalité et de compétences. La clé serait la preuve de l'importance de la réduction, dont le sénateur Nolin a parlé.
Le sénateur Nolin : Sinon, il serait impossible de le faire parce qu'il s'agit d'une question de politique. Le comité n'est pas en droit de remettre en question la politique, mais il peut se pencher sur la légalité des règlements.
Le président : Pour la gouverne des téléspectateurs, et ils sont nombreux, j'aimerais résumer ce que nous avons entendu jusqu'à présent. J'espère que vous me reprendrez si je me trompe.
Nous sommes saisis d'un projet de loi dans lequel le Parlement autorise le gouvernement à faire des règlements concernant les carburants. Le projet de loi C-33 modifie la Loi canadienne sur la protection de l'environnement de 1999. Ces modifications permettraient à ce qu'on règlemente les mélanges de carburants, qui peuvent ou non comprendre l'éthanol et d'autres additifs en provenance de plusieurs sources, comme le maïs, les matériaux cellulosiques ou les technologies de la prochaine génération. C'est tout ce que propose le projet de loi. Le Parlement donnerait ainsi au gouvernement l'autorité de prendre de tels règlements.
Mais nous ne pouvons pas savoir en quoi consisteront exactement ces règlements. Nous ne pouvons pas être certains que le gouvernement fera des règlements conformes aux énoncés qu'ils ont faits en ce qui concerne leurs intentions politiques. Nous ne pouvons être certains qu'ils ne tiendront pas compte de choses qu'ils ont apprises dans l'intervalle.
Certains ont décrit ce projet de loi comme un « chèque en blanc », qui accordait au gouvernement des pouvoirs bien trop larges pour véritablement faire quelque chose. Cette caractéristique est propre à la législation-cadre, qui a été utilisée par des gouvernements successifs, peu importe leur allégeance.
A l'autre bout du spectre, on nous a dit que cette initiative législative était absolument essentielle à l'élaboration d'initiatives qui seront dans l'intérêt de l'écologie, de l'économie et des collectivités agricoles canadiennes. Nous avons entendu les deux revers de la médaille. Je pense que nous sommes tous d'accord pour dire que nous avons entendu des arguments convaincants des deux côtés.
Certains ont dit qu'il fallait reporter le vote sur ce projet de loi afin de l'étudier davantage. Cependant, cela ne nous permettrait pas d'étudier davantage le projet de loi. En fait, il faudrait étudier davantage le sujet du projet de loi, et on peut le faire dans les règlements qui émaneront du projet de loi. On nous a également dit que, si nous reportons le vote sur ce projet de loi, ce sera à l'industrie d'assumer la responsabilité de faire certaines choses et que cela la désavantagerait. L'échéancier de 18 mois dont jouirait l'industrie pour apporter des modifications serait réduit d'au moins quatre mois, et cela lui poserait problème. Nous avons entendu des témoignages là-dessus.
Dans ce bref résumé, j'ai décrit les témoignages ainsi que le genre de décisions que nous devrons désormais prendre, à savoir si nous ferons rapport de ce projet de loi cet après-midi ou non.
Je propose maintenant que, avec votre consentement, nous passions à l'examen du projet de loi. Êtes-vous d'accord?
Des voix : D'accord.
Le président : J'aimerais savoir si, au lieu de passer à l'étude article par article, vous souhaiteriez proposer une motion qui traite du projet de loi dans son intégralité.
Le sénateur Spivak : Vous avez décrit les témoignages sans souligner le fait que la plupart des témoins s'opposaient au projet de loi.
Pour ces motifs, je propose que le comité ne passe pas à l'étude article par article du projet de loi C-33 afin qu'il puisse faire une analyse des coûts et des avantages de ce que le gouvernement propose pour les 5 et 2 p. 100.
Je suis une championne des causes perdues. Je ne m'attends pas à ce que ce soit couronné de succès. Toutefois, il est important que les témoins qui s'opposaient au projet de loi comprennent qu'il y a au moins une personne qui les a écoutés.
Permettez-moi de vous expliquer mon raisonnement. J'aimerais souligner d'emblée qu'il ne s'agit pas d'une suggestion radicale. Le rapport Gallagher, qui vient à peine de paraître, a demandé que l'on fasse plus de recherches — c'est le fondement du rapport de la Grande-Bretagne — sur les incidences indirectes liées à l'utilisation de biocarburants sur l'utilisation des terres et la production alimentaire. Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, 23 sénateurs, y compris le sénateur John McCain, ont présenté une pétition afin de pouvoir contourner le mandat des États-Unis. Il ne s'agit pas d'observateurs anodins.
Voici les raisons pour lesquelles je crois que nous devrions faire un second examen objectif. D'abord, depuis que le gouvernement a, en décembre 2006, présenté sa politique sur les biocarburants qui serait mise en oeuvre par le projet de loi C-33, des analyses économiques et scientifiques importantes ont été présentées. Ainsi, nous ne savons pas encore quel sera le bilan énergétique net. Nos attachés de recherche n'ont pas obtenu ces renseignements.
De plus, il n'est pas clair que les subventions aux fabricants viendront améliorer les revenus agricoles. Comme on nous l'a dit très clairement, les subventions aux biocarburants sont destinées aux fabricants. Il n'est donc pas très clair en quoi cela aidera les agriculteurs.
Le gouvernement ne nous a pas fait part d'un mandat pour les biocarburants certifiés. Ainsi, on ne sait pas s'il faut qu'ils atteignent un certain niveau. Le témoignage que nous avons entendu aujourd'hui n'a pas véritablement répondu à cette question. Il est question de peut-être 1 p. 100, mais on ne nous a pas dit que si pour que quoi que soit atteigne un certain niveau pour être subventionné.
Le président : Est-ce que vous parlez d'un certain niveau de contenu canadien?
Le sénateur Spivak : Oui, pour les émissions.
Nous n'avons absolument aucune idée si les biocarburants de première génération aboutiront à une deuxième génération. En fait, on nous a même dit que le contraire pourrait se produire.
Ce que je veux souligner, c'est qu'il y a beaucoup de choses que nous ne savons pas. Je suis persuadée que si on ne nous avait pas précipités, et que nous ne faisions pas face, comme d'habitude, à une date butoir, on aurait pu prendre beaucoup plus de temps pour examiner toutes ces questions.
Quels sont les inconvénients à prendre plus de temps pour examiner le projet de loi? Je sais que les fabricants nous disent que c'est la fin du monde mais, à vrai dire, l'Institut canadien des produits pétroliers a comparu et nous a dit que cela leur prendrait trois ans avant qu'ils puissent mélanger l'éthanol à l'essence. Ils ont expliqué très clairement ce que cela signifiait et combien de temps ça prendrait. Alors de quoi parlons-nous? On exerce sur nous de la pression pour accepter quelque chose qui n'a pas de limites en fait.
C'est tout ce que j'ai à dire pour le moment. Je sais que bon nombre d'entre vous ne seront pas d'accord avec moi.
Le président : Une motion a été présentée. Le sénateur Munson souhaite débattre de la motion.
Le sénateur Munson : J'aimerais vous expliquer pourquoi je suis ici.
Comme je l'ai déjà dit, je suis ici pour remplacer le sénateur Trenholme Counsell, qui siège d'habitude à ce comité. Je suis ici pour poser beaucoup de questions. J'ai beaucoup apprécié l'exercice auquel on s'est livré ces deux derniers jours. Il s'agissait d'un débat que je ne connaissais pas bien et maintenant j'ai beaucoup plus de connaissances à ce sujet.
Malheureusement, je dois aller à une conférence de presse très importante, et je ne pourrai plus participer au débat. Il s'agit d'une conférence de presse importante pour moi et pour une personne pour qui j'ai déjà travaillé.
Le sénateur Spivak : J'aimerais ajouter encore une chose. On en a brièvement parlé en cette enceinte, et ça porte sur les incidences du smog telles que décrites dans la Gazette du Canada. J'aimerais en parler aux fins du compte rendu. Il s'agit de la Partie 1 de la Gazette du Canada, en date du 30 décembre 2006. Il y aura :
[...] des augmentations dans les émissions des transports pour les COV (0,5 à 1 p. 100 à l'échelle nationale et 3 à 5 p. 100 dans les régions où les carburants renouvelables doivent être introduits), les NOx 0,5 à 1 p. 100 à l'échelle nationale et 4 à 6 p. 100 dans les régions où les carburants renouvelables doivent être introduits), le formaldéhyde (2 p. 100) et l'acétaldéhyde (48 p. 100).
Je veux être juste. Il y aura :
[...] des diminutions dans les émissions des transports pour le CO (1,3 à 3,6 p. 100), le benzène (1,7 à 6,2 p. 100), les particules (0,5 p. 100 de l'inventaire de diesel) et les GES (0,4 à 0,6 p. 100)...
C'est ce qu'on a dit dans la Gazette du Canada quand le projet de loi a été présenté.
Le sénateur McCoy : Cela concerne l'éthanol.
Le sénateur Spivak : Oui, ça concerne l'éthanol.
Le président : Je ne suis pas certain d'avoir bien formulé ma question. Quand vous avez dit qu'il faudrait certifier les biocarburants, parliez-vous d'une certification fondée sur leur qualité ou sur leur origine?
Le sénateur Spivak : Cette certification existe au Royaume-Uni. Je ne suis pas certaine sur quoi elle est fondée, mais elle permet d'en savoir davantage sur les émissions de gaz à effet de serre.
Le sénateur Mitchell : Nous comprenons tous que ce débat est épineux. Les arguments des deux côtés sont très convaincants.
Le sénateur Spivak : Les arguments d'un côté sont plus convaincants que de l'autre.
Le sénateur Mitchell : J'aimerais dire d'emblée que, le fait de parler de l'initiative du sénateur McCain ne nous permet pas de mieux comprendre ses motivations. Je ne serais pas surpris d'apprendre qu'il se sent bien à l'aise d'appuyer les pétrolières, même si elles font de la concurrence à l'éthanol. J'aimerais donc qu'on mette ce point de côté pour un moment.
J'aime beaucoup l'idée de proposer un processus de certification des biocarburants. C'est une excellente observation. Vous avez fait une excellente suggestion.
J'aimerais aussi souligner que Ressources naturelles Canada ne faisait pas référence à une seule étude mais à plus d'une douzaine. Le rapport le plus récent qui provient de la Grande-Bretagne ne s'applique pas au Canada. Je l'ai lu. Son analyse et ses conclusions ne sont pas tellement convaincantes, mais cela ne s'applique pas au Canada.
Si nous retardons les choses, cela aura d'énormes ramifications pour l'industrie. Nous, ainsi que d'autres groupes, avons encore du temps pour exercer plus de pression sur le gouvernement afin qu'il passe à une seconde génération et qu'il accélère ce processus. Si nous n'allons pas de l'avant pour freiner les changements climatiques, et que nous ne travaillons pas avec les outils que nous disposons et atteindre notre but, alors nous serons en train de retarder une chose qu'on ne peut pas se permettre de retarder.
Le président : Vous vous opposez à la motion.
Le sénateur Mitchell : Oui.
Le sénateur Sibbeston : Je suis en faveur de la motion. Il est intéressant de voir que le monde a entamé un processus pour essayer de trouver une solution de rechange au combustible fossile. Du progrès a été accompli à plusieurs égards, mais, dernièrement, on remet en question ce progrès, notamment en raison des pénuries alimentaires et du fait que l'on se demande si les biocarburants permettront véritablement de réduire les gaz à effet de serre. Je reconnais que le Canada est un petit intervenant et a récemment commencé à chercher des sources de carburant de remplacement. Au Canada, nous disposons d'une énorme quantité de combustible fossile, et il semble y en avoir beaucoup plus encore dans l'Arctique. Nous n'allons jamais épuiser notre stock de combustible. Je comprends que cette initiative est motivée principalement par le désir de réduire les gaz à effet de serre.
Si cet objectif est incertain, alors cela porte atteinte à la raison pour laquelle on choisirait cette voie. Je suis en faveur de la motion du sénateur Spivak, mais je n'irais pas aussi loin. Je reconnais que voter contre ce projet de loi permettrait de contrecarrer cette tendance. Mais tout le monde semble heureux de voir que nous sommes en train de trouver avec l'éthanol un carburant de remplacement. Qui n'appuie pas cet objectif au Canada? Quel Canadien ne voudrait pas qu'on réduise les gaz à effet de serre? Ce sont ces motifs qui nous ont fait emprunter cette voie et, s'il subsiste un moindre doute, il faut examiner davantage la question.
La motion du sénateur Spivak me plaît et je vais vraisemblablement voter pour, mais après, on verra.
Le sénateur McCoy : Je suis moi aussi favorable à la motion du sénateur Spivak et à la position du président. Depuis plus de dix ans, je travaille au dossier du changement climatique afin de faire avancer les choses à cet égard dans ma province natale de l'Alberta, et je fais la même chose au Sénat par rapport au Canada. On a souvent tendance à voir la petite bête noire dans ce dossier et à s'en servir comme excuse pour justifier une certaine inaction. Certes, il n'existe ni solution unique ni panacée lorsqu'il s'agit de réduire les gaz à effet de serre. Il faut donc adopter une démarche multiple. Les biocarburants semblent une solution prometteuse, mais leur utilisation s'accompagne certainement de répercussions auxquelles nous n'avions pas songé il y a cinq ans lorsque nous avons commencé à les recommander. Notre expérience de l'éthanol est plus longue, toutefois, nous en savons plus à son sujet que sur le biodiésel ou le biogaz, qui ont moins retenu notre attention.
C'est par souci d'aller de l'avant et parce que nous en savons moins que nous ne le pensions que je pose ma question. C'est aussi parce que nous devons en apprendre davantage au sujet du changement climatique et de la réduction des gaz à effet de serre. N'oubliez que le comité est en mesure de faire des recommandations, et nous espérons d'ailleurs qu'il recevra un ordre de renvoi du Sénat nous demandant d'effectuer une étude approfondie. À cette fin, nous pourrions peut-être nous inspirer de la motion du sénateur Spivak pour concevoir le contenu d'un tel ordre de renvoi en vue de ce genre d'étude à l'automne. Cela nous aiderait à élaborer les règlements. On nous a dit que ces derniers n'ont pas encore été rédigés, mais je serais étonné qu'une ébauche quelconque ne traîne pas dans un tiroir quelque part.
Le président : Nous les recevrons demain matin.
Le sénateur McCoy : Je sais que ceux qui consultent la Gazette du Canada savent à quelle date commence la période, habituellement d'une durée de 60 jours, pendant laquelle on peut formuler des observations par écrit. Les sénateurs sont ici pour effectuer des examens approfondis et à long terme, et nous pourrions en profiter pour donner aux gens la possibilité de nous aider à enrichir le contenu des règlements grâce à leur apport. Cela pourrait être aussi un moyen de soutenir l'intérêt pour la question et d'en mieux comprendre les nuances que la plupart des Canadiens.
Le président : Ainsi que l'a souligné le sénateur Mitchell, le comité est en mesure d'entreprendre ce genre d'étude de son propre chef, pourvu qu'il s'en tienne à l'ordre de renvoi du Sénat. Pourvu que le comité se conforme aux conditions contenues dans l'ordre de renvoi, il peut fixer son propre ordre du jour. Vous avez sans doute remarqué depuis que vous êtes ici, qu'il a fallu souvent modifier notre ordre du jour. Nous sommes en mesure de le faire.
L'autre revers de la médaille, c'est que lorsqu'un projet de loi est adopté, il est adopté. Une fois que le projet de loi aura été adopté, aura reçu la sanction royale et aura été mis en vigueur, les chances qu'un autre projet de loi l'amendant soit présenté ne sont pas impossibles mais elles sont minces.
Le sénateur McCoy : Je suis d'accord, mais, à mon avis, l'objet d'audiences supplémentaires ne viserait pas à modifier la loi d'habilitation. J'espère toutefois que ces audiences auraient une certaine influence sur les règlements, les politiques et les programmes présentés par le gouvernement du Canada.
Le président : Je peux certainement le faire. Sénateur Spivak, si vous prenez la parole maintenant, cela mettra fin au débat sur la motion.
Le sénateur Spivak : Je ne veux pas prendre la parole maintenant, mais j'aimerais le faire plus tard.
Le président : Vous serez la dernière à prendre la parole.
Le sénateur Adams : Je n'ai pas posé beaucoup de questions aux témoins ces deux derniers jours. On nous a dit que la majorité des gens ne veulent pas que le projet de loi soit adopté tel quel et préféreraient qu'on étudie la question de façon plus poussée. Vous avez affirmé que, d'une certaine manière, une fois que le projet de loi sera adopté, nous pourrons entendre d'autres témoins, bien que j'ignore combien il y en aurait ni dans quelle mesure leur témoignage pourrait modifier l'objet du projet de loi. Entre-temps, là où je vis, personne ne cultive de maïs.
Le président : Pas encore.
Le sénateur Adams : Il y a beaucoup de gaz naturel, de pétrole et d'autres ressources chez nous, mais, pour le moment, les compagnies ne produisent rien.
Les témoins qui ont comparu devant le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans nous ont parlé des brise-glace que la Chine et d'autres pays sont en train de construire dans l'Arctique. Quant aux Japonais, ils construisent des navires-citernes pour transporter le gaz naturel dans l'Arctique. Ces gens ne viendront toutefois pas là où je vis. Je vais donc m'abstenir.
Le président : De voter sur la motion?
Le sénateur Adams : Sur les deux.
Le président : Bien. Je vous remercie de cela.
Y a-t-il d'autres observations sur la motion?
Le sénateur Brown : Nous avons entendu d'excellents témoins pour et contre cette question. Personnellement, le rapport qui m'a paru le plus convaincant a été celui de l'Université de Chicago, qui était encore plus probant que celui que nous ont présenté les Canadiens. Ce document expliquait la différence qu'il y a entre la consommation d'énergie et la production, soit 49 p. 100. Autrement dit, lorsque nous produisons de l'éthanol bioénergétique en consommant des combustibles fossiles, on économiserait un demi-litre de ces mêmes combustibles fossiles par rapport à ce qu'il faudrait utiliser pour produire de l'essence de voiture à base de combustible fossile.
Le président : Comparez-vous un gallon à un gallon?
Le sénateur Brown : Un gallon à un gallon ou un litre à un litre, ou encore, une tonne à une tonne : peu importe, on obtient toujours le même pourcentage. Pour chaque litre de combustible fossile que nous consommons pour produire de l'éthanol, tout au moins, selon l'Université de Chicago, nous obtenons un avantage de 50 p. 100, ou pour être précis, de 49 p. 100. Toutefois, si nous produisons des combustibles fossiles en brûlant le même genre de combustibles nous en consommons davantage. Autrement dit, il nous faut utiliser 1,23 litre de combustible fossile pour produire un litre d'essence.
Selon les études canadiennes, ce pourcentage atteignait jusqu'à 63 p. 100. Je ne sais pas d'où vient cette différence, elle peut s'expliquer par bien des choses. On nous a parlé du cycle de vie des produits de l'éthanol, en commençant par la culture du panic raide ou du maïs; en fait, on nous parlait peut-être de façon plus précise du maïs.
Par conséquent, il serait peut-être utile d'étudier la question afin de voir si ces choses peuvent se concrétiser sur le plan commercial. Par ailleurs, si le prix des grains augmentait à cause de cela, comme l'a déjà dit le sénateur Mitchell, cela forcerait ceux qui préconisent cette solution à envisager d'autres matières premières, comme par exemple le panic raide et beaucoup d'autres.
En outre, l'annonce faite ce matin par la Ville d'Edmonton d'utiliser intégralement ses déchets pour produire de l'éthanol, est un immense progrès. Si cette initiative est couronnée de succès, je ne pense pas que nous soyons limités par la quantité de déchets que nous produisons, tant dans notre pays qu'ailleurs. Si grâce à un tel processus, nous réussissons à transformer des résidus en éthanol, donc à produire de l'éthanol à partir de produits déjà utilisés, je suis tout à fait pour et je voterai assurément dans ce sens.
Le président : À titre d'information, le projet d'Edmonton dont le sénateur Brown vient de parler n'en est pas à l'étape expérimentale; il dispose déjà d'une usine et il est d'envergure industrielle et commerciale. Les exercices de simulation sur maquette ont déjà été effectués.
Nous avons aussi entendu un argument contraire, sénateur Brown, à savoir que si nous devons mettre 100 gallons de carburants mélangés dans nos réservoirs, 95 d'entre eux proviendront de mélanges reformulés pour qu'ils subissent l'oxygénation, les RBOB, et cinq d'entre eux seraient de l'éthanol, tout au moins selon le plan actuel. La réduction ne porterait donc que sur un pourcentage du pourcentage. Par contre, on nous a également dit que les combustibles mélangés sont moins efficaces que l'essence utilisée présentement dans nos voitures.
Le sénateur Mitchell : Les chiffres cités par le sénateur Brown portent sur les BTU comparés à d'autres BTU. Il ne s'agit pas de comparer un litre à un litre mais bien un BTU à un BTU. On mesure l'équivalence énergétique ici.
Le président : Bien, mais il n'empêche que 5 p. 100 des carburants mélangés est de l'éthanol.
Le sénateur Mitchell : Il s'agit d'une toute autre question. Oui, à moins que nous puissions en faire davantage.
Le président : Est-ce que quelqu'un d'autre veut intervenir sur la motion?
Le sénateur Spivak : Ce que je propose concerne la rentabilité. Nous ignorons quels sont les coûts et les avantages de ces technologies. Ce que le sénateur Brown vient d'affirmer est contredit par bien d'autres gens. Il faut donc que nous sachions à quoi nous comparons les choses. Je ne veux pas dire qu'il a tort; je dis simplement que la question n'est pas claire.
Permettez-moi maintenant d'aborder la question des coûts. Que sommes-nous disposés à payer? D'après l'organisme canadien REAP, le Resource Efficient Agricultural Production, il en coûtera à peu près 378 $ pour produire une tonne d'éthanol à base de maïs. Nous ne nous sommes pas vraiment penchés sur les coûts.
Je comprends que les gens veuillent aller un peu plus loin et cherchent à voir comment inscrire tout cela dans l'équation des gaz à effet de serre. Je ne suis d'ailleurs pas contre. Toutefois, il me semble que c'est agir à l'aveuglette, parce qu'une fois que nous aurons pris ces règlements, il faudra que nous fassions vraiment confiance au gouvernement, sénateur Mitchell. Ces règlements visent les producteurs. On ne précise pas lesquels ni à quelle fin. On prévoit aussi affecter 500 millions de dollars aux technologies de deuxième génération.
C'est mon opinion. Je vois bien que la majorité des membres du comité ne partagent pas mes idées, mais je tenais à ce qu'on les connaisse. J'ai entendu bon nombre de gens et bon nombre de témoins nous demander de faire preuve de diligence raisonnable au Sénat et aussi de réfléchir mûrement à la question, or nous ne l'avons pas fait.
Le président : Sénateur Spivak, pour confirmation, il me semble que vous avez dit que le montant de 378 $ la tonne correspondait au coût de production, mais dans les témoignages que nous avons entendus, ce montant représentait le coût inhérent à la réduction d'une tonne de gaz à effet de serre, en particulier les réductions du CO2.
Le sénateur Spivak : Me permettez-vous de citer ce passage de l'exposé présenté par le REAP?
Le président : Volontiers, allez-y.
Le sénateur Spivak : Sous la rubrique « Durabilité financière », il est dit, et je cite :
L'étude que nous avons effectuée au sujet de l'Ontario, pour neutraliser une tonne de CO2 au moyen d'éthanol de maïs, il en coûte déjà 378 $ la tonne. Y a-t-il un prix trop élevé à payer pour recourir à l'éthanol et au biodiésel de maïs pour réduire le CO2?
Le président : Je vous avais mal comprise. Je pensais que vous affirmiez que ce montant correspondait au coût de production de l'éthanol. Il s'agit du coût de réduction d'une tonne de CO2.
Le sénateur Spivak : Selon REAP-Canada.
Le président : Sénateur Spivak, avez-vous une version écrite de votre motion?
Le sénateur Spivak : Non, je ne l'ai pas fait.
Le président : D'accord, nous le comprenons.
Le sénateur Spivak : Elle propose que nous nous abstenions de passer à l'étude article par article.
Le président : Il est proposé par l'honorable sénateur Spivak que notre comité ne passe pas à l'étude article par article du projet de loi C-33, mais que nous permettions qu'on effectue une analyse de rentabilité de la proposition de 5 p. 100 et de 2 p. 100 soumise par le gouvernement.
Tous ceux qui appuient la motion?
Des voix : D'accord.
Le président : Ceux qui s'y opposent?
Des voix : Non.
Le président : La motion est rejetée. Voulez-vous passer à l'étude article par article du projet de loi C-33?
Des voix : D'accord.
Le président : Sénateur Adams, voulez-vous que l'on prenne note de votre abstention?
Le sénateur Adams : Non.
Le président : Le vote sur le titre du projet de loi C-33 est-il reporté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 1 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Pour en revenir à ma première question, y en avaient-ils qui s'opposent à ce que le titre soit reporté?
Le sénateur McCoy : Ai-je bien compris que vous avez dit que nous allions préparer des observations avant de passer à l'étude article par article du projet de loi?
Le sénateur Nolin : Cela aura lieu après.
Le président : Nous y arriverons.
Le sénateur McCoy : Merci. C'est tout ce que je voulais savoir.
Le président : Aux fins du compte rendu, je vais recommencer. Êtes-vous d'accord pour que l'on reporte l'étude du titre?
Des voix : D'accord.
Le président : Ceux qui s'y opposent? Adopté.
Le sénateur Spivak : J'aimerais que le compte rendu fasse mention de mon opposition à tout cela.
Le président : C'est assez évident.
L'article 1 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Ceux qui sont opposent?
Le sénateur Milne : Avec dissidence.
Le président : Sénateur Spivak, me permettez-vous de dire « avec dissidence » alors que nous énumérons les articles?
Le sénateur Spivak : Oui.
Le président : L'article 2 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Ceux qui s'y opposent? Adopté, avec dissidence.
L'article 3 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Ceux qui s'y opposent? Adopté, avec dissidence.
L'article 4 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Ceux qui s'y opposent? Adopté, avec dissidence.
L'article 5 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Ceux qui s'y opposent? Adopté, avec dissidence.
L'article 6 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Ceux qui s'y opposent? Adopté, avec dissidence.
Le titre est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Ceux qui s'y opposent? Adopté, avec dissidence.
Est-ce que le Comité songe à ajouter des observations au rapport?
Le sénateur Milne : Oui, tout à fait. Dans nos observations, nous devrions demander au gouvernement de faire preuve de diligence raisonnable avant que les règlements qui découlent de ce projet de loi ne soient publiés dans la Gazette du Canada, premièrement pour s'assurer que les fonds publics sont utilisés à bon escient pour produire des résultats significatifs, deuxièmement pour veiller à ce que l'industrie soit en mesure de mélanger le carburant comme l'exige le projet de loi ou les règlements...
Le président : Et au moment envisagé dans les règlements?
Le sénateur Milne : Oui. L'expression « soit en mesure de » s'applique à la fois au délai et à la capacité.
Troisièmement, le gouvernement devra veiller à ce que les producteurs canadiens puissent satisfaire la demande. Quatrièmement, la santé humaine ne devra pas être mise en péril d'une quelconque façon dans ce projet de loi, même si certaines parties du projet de loi l'exigent déjà. Cinquièmement, il faudra tenir compte de tous nouveaux renseignements, plus récents que ceux d'études antérieures, avant de promulguer les règlements.
Le président : Est-ce que les sénateurs ont bien compris la nature de ces observations?
Le sénateur Spivak : Puis-je ajouter une chose? Qu'il soit évident que les revenus des agriculteurs se trouveront à bénéficier de cette politique.
Le sénateur McCoy : Ça me semble une bonne idée. J'aimerais également que nous utilisions le libellé de la motion du sénateur Spivak lorsqu'elle parle de faire une analyse coûts-avantages. On pourrait soit dire que nous voulons la faire nous-mêmes, ou lui demander de la faire, mais je préfère ne pas demander au Cabinet d'effectuer cette analyse. J'aimerais que nous fassions le suivi de l'excellente motion proposée par le sénateur Spivak.
Le sénateur Milne : Cela relève de la diligence raisonnable et devrait être compris dans la première partie des observations.
Le sénateur McCoy : Ce n'est pas précis. Vous demandez au gouvernement de s'en occuper et, par conséquent, vous n'assurez pas le suivi vous-même. En fait, ce que je voudrais savoir, c'est si nous pourrions dire que le suivi nous intéresse. De plus, j'aimerais qu'on insère quelque part l'expression « analyse coûts-avantages ».
Le président : On pourrait parler de diligence raisonnable comprenant une analyse coûts-avantages lors de l'élaboration des règlements.
Le sénateur Spivak : Je pense que c'est trop facile pour le gouvernement de prétendre qu'il a effectué une analyse coûts-avantages. S'il fallait qu'une telle analyse soit effectuée par un organe plus neutre, ce serait sans doute notre comité qui en assumerait la responsabilité.
Le président : D'accord. Nous devrions ajouter aux observations le fait que le comité a l'intention d'examiner l'efficacité des règlements mis en place. Il nous est effectivement possible d'ajouter cette intention.
L'avantage d'utiliser des mots comme « avantage significatif » ou « analyse coûts-avantages » — et le sénateur Milne l'a compris très tôt — c'est que ça relève clairement de l'article 4 de la LCPE, ce qui interpellera les personnes concernées qui devront s'assurer de la conformité avec cet article. Cet ajout est donc utile.
Le sénateur McCoy : On y arrive, mais il y a certains de vos propos qui me font hésiter. En effet, vous avez parlé d'examiner les règlements. Avec tout le respect que je vous dois, j'estime que, dans l'intérêt des Canadiens, nous devrions faciliter le débat public avant que les règlements ne soient rédigés ou finalisés, ou, au moins, pendant la période de rédaction. N'attendons pas après les règlements; finissons ce débat qui a été entamé. D'innombrables témoins nous ont dit qu'on n'en savait pas suffisamment, ce qui a été répété dans de nombreux courriels; il faut rehausser la qualité du débat public. À l'échelle mondiale, les choses se passent très vite et on ne sait pas du tout quel est le rôle joué par le Canada. En deux mots, voilà les témoignages que nous avons entendus, et le sénateur Spivak a eu la bonne idée d'en faire l'objet de sa motion.
Nous n'avons pas reporté le projet de loi. Nous avons proposé qu'un projet de loi cadre soit mis en place mais sans que nos responsabilités soient oubliées. Conformément à ce que nous ont dit les témoins, les sénateurs devraient tout au moins demander un débat public en profondeur. Et cela veut dire qu'il faut que le débat ait lieu avant que les règlements soient adoptés, d'après moi.
Le sénateur Spivak : Vous avez très bien traduit ma pensée.
Le président : Oui, mais on ne sait pas quand les règlements vont entrer en vigueur.
Voulez-vous qu'on commence demain et qu'on siège tout l'été pour terminer?
Le sénateur McCoy : J'en serais ravie.
Le président : Cette suggestion me semble bonne. Par contre, je ne pense pas que le Sénat nous accordera la permission de siéger tout l'été. Permettez-moi de vous dire que la référence à l'analyse coûts-avantages dans les recommandations vise le gouvernement et pas notre comité. Le comité n'a pas et ne pourra pas obtenir les ressources nécessaires pour effectuer une analyse coûts-bénéfices. Nous pourrions faire appel à une tierce partie, mais nous n'avons pas les ressources nécessaires pour le faire. C'est au-delà de nos capacités. En vertu de la recommandation, ce serait le gouvernement qui effectuerait une analyse coûts-avantages lors de l'élaboration des règlements.
Est-ce que tout le monde est d'accord avec les recommandations que nous avons entendues? En fait, sénateur Milne, je suppose que vous les avez par écrit, n'est-ce pas?
Le sénateur Milne : J'ai remis mes notes, avec toutes leurs ratures, mais je serais heureuse que le président ou le vice- président du comité y jettent un coup d'œil, et il faudra que ce soit rapide parce qu'elles doivent être envoyées à la traduction au plus tard cet après-midi.
Le président : Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs?
Des voix : D'accord.
Le président : Le sénateur Nolin et moi jetterons un coup d'oeil aux documents qui seront annexés au rapport touchant le projet de loi, nous les approuverons et nous les ferons traduire.
Le sénateur Spivak : Je veux témoigner mon accord. Nous pouvons les remettre au gouvernement, mais j'ai de la difficulté à croire que nous ne pouvons pas trouver suffisamment de témoins au pays qui se porteraient volontaires pour envisager une analyse coûts-avantages. Nous en avons déjà réalisé une partie, mais ce n'est pas suffisant. Je pense que nous pourrions le faire.
Le sénateur McCoy : Je suis d'accord avec le sénateur Spivak. Je pense aussi que le Sénat pourrait attribuer des ressources à une telle analyse si nous la proposions. Je ne suis pas d'accord avec l'opinion du président au sujet de la possibilité de réaliser une étude.
Le président : Le comité reprendra son étude du plan de travail lorsque les travaux du Parlement reprendront.
Toutefois, je tiens à souligner que si j'étais de l'extérieur, je remettrais sérieusement en question l'utilité d'une analyse coûts-avantages réalisée par des volontaires qui, par définition, sont intéressés.
La seule façon de réaliser une analyse coûts-avantages qui ait quelque valeur serait d'appliquer une série de critères tout à fait objectifs, que nous pourrions établir. Par la suite, il faut engager quelqu'un pour le faire.
Le sénateur Spivak : Pas du tout; un analyste en investissement était ici. Je pense qu'il ne penchait ni d'un côté ni de l'autre. Il y a probablement de nombreux consultants à la Banque Royale du Canada, la RBC. Je suis certaine que, dans le cadre d'une telle étude, qui touche une question si vitale, des témoins comparaîtraient. Lorsque je parle des « coûts-avantages », je ne parle pas seulement des coûts du point de vue financier, j'englobe tout.
Selon moi, tous ceux qui font preuve d'une grande hâte à l'égard de ce projet de loi ne devraient pas craindre une analyse coûts-avantages, parce qu'ils sont convaincus que les résultats seront très positifs.
Le président : Je comprends peut-être mal la signification de l'expression « analyse coûts-avantages ». Si le comité entreprenait une analyse coûts-avantages, nous pourrions entendre, comme vous le savez, sans exagérer, des centaines de témoins mais l'analyse, l'analyse subjective comme on peut le présumer, ou l'analyse objective si c'est possible, serait réalisée par nous, et je ne qualifierais pas une telle analyse d'analyse coûts-avantages.
Le sénateur McCoy : Très bien.
Le sénateur Spivak : J'ai une proposition : que diriez-vous de la vérificatrice générale et du commissaire à l'environnement et au développement durable?
Le président : C'est une question différente. En vertu du projet de loi C-474, entre autres, le commissaire à l'environnement et au développement durable a le pouvoir de se pencher sur de telles questions. Comme vous le savez, nous travaillons en étroite collaboration avec le commissaire de l'environnement de temps à autre.
Le sénateur Spivak : Voilà où je veux en venir : nous pouvons leur demander de le faire, mais ce n'est pas comme s'il s'agissait d'un débat public. Lorsque le comité entreprend quelque chose, l'idée, c'est qu'il s'agit d'un débat public.
Une fois que les règlements seront entre les mains du gouvernement, nous ne savons pas comment le gouvernement agira. Nous pouvons exercer des pressions publiques sur le gouvernement en tenant un débat public.
Je ne préconise pas cette approche.
Le sénateur McCoy : Moi, si. Je le ferai.
Le sénateur Spivak : Pas moi, parce que mon objectif était de reporter l'adoption du projet de loi.
Le sénateur McCoy : Pour dissiper le malentendu, sénateur Banks, vous dites que vous pensez avoir mal compris l'expression « analyse coûts-avantages »; ce n'est pas exactement ce dont nous parlons ici. Je pense que cet argument pourrait s'avérer légitime. Il s'agit d'un terme technique.
Si quelqu'un proposait un terme se rapprochant davantage d'une analyse ou d'un examen, par exemple, nous pourrions alors contourner le problème, puis procéder à l'examen de ce projet de loi.
Le président : Si le comité, en septembre ou à notre retour, décide de le faire et de la façon de le faire, tout dépendra de l'avancement des règlements et de la disponibilité d'une ébauche, de la question de savoir s'ils ont été publiés dans la Gazette du Canada et où ils en sont — il se peut que nous soyons en plein dans la période de 60 jours. Nous ne le savons pas. Nous ne pouvons pas ajouter cette recommandation.
Je pense que les membres du comité ont signifié leur ferme intention de revenir sur cette question.
Merci, sénateur Milne, pour l'ébauche des recommandations. Le sénateur Nolin et moi-même allons les lire, les approuver et les envoyer à...
Le sénateur Nolin : Vous a-t-on chargé du mandat de faire rapport le plus rapidement possible?
Le président : Honorables sénateurs, le projet de loi est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Ceux qui s'y opposent? Adopté, avec dissidence.
Dois-je faire rapport de ce projet de loi avec les observations aussitôt que possible au Sénat?
Des voix : D'accord.
Le président : Ceux qui s'y opposent? C'est unanime.
Merci, sénateurs. La séance est levée.
La séance est levée.