Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires étrangères et du commerce international
Fascicule 9 - Témoignages du 14 mai 2008
OTTAWA, le mercredi 14 mai 2008.
Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international se réunit aujourd'hui à 16 h 5 pour étudier l'émergence de la Chine, de l'Inde et de la Russie dans l'économie mondiale et les répercussions sur les politiques canadiennes.
Le sénateur Consiglio Di Nino (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : J'aimerais vous souhaiter la bienvenue à tous à cette réunion du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international. Nous nous penchons aujourd'hui sur l'émergence de l'influence économique de la Chine, de l'Inde et de la Russie et sur leur incidence sur les politiques canadiennes.
Nous entendrons aujourd'hui deux représentants de Statistique Canada, soit M. Craig Kuntz, directeur de la Division du commerce international et M. Patrick O'Hagan, directeur de la Division de la balance des paiements.
Craig Kuntz, directeur, Division du commerce international, Statistique Canada : Merci beaucoup, monsieur le président. Nous avons préparé un document d'information qui vous a été remis. Je vais commencer par vous donner une vue d'ensemble du programme de commerce international de marchandises. Je vais parler de certains chiffres concernant le commerce avec la Chine, l'Inde et la Russie, puis je vous présenterai les résultats de notre dernière étude de rapprochement sur le commerce Canada-Chine. Cela vous donnera une idée des problèmes de qualité des données auxquels nous faisons face quand il s'agit des statistiques sur le commerce douanier.
Mon collègue passera en revue les données sur la balance des paiements. Il étudiera le commerce sur le plan des services et de l'investissement direct, et abordera certaines des difficultés que nous éprouvons en matière de données, de même que certaines initiatives visant à améliorer la qualité des données relativement à la balance des paiements.
Vous trouverez, à la page 2 du document, une brève vue d'ensemble du programme dont je suis responsable. Notre mandat consiste à compiler, analyser et diffuser des estimations uniformes, intégrées et opportunes des exportations canadiennes de marchandises et des importations par des pays partenaires, de même que de l'information sur les produits de base et les indices de prix et de volume pour les exportations et les importations. Nous utilisons des données administratives qui nous sont transmises par l'Agence des services frontaliers du Canada, l'ASFC, et, dans le cas des exportations canadiennes vers les États-Unis, par la U.S. Customs and Border Protection.
Nous utilisons la classification type des produits par industries et par secteur géographique. Nous respectons les lignes directrices des Nations Unies sur l'établissement de données douanières pour le commerce de marchandises. Nous utilisons les manuels du Fonds monétaire international, le FMI, pour le calcul des statistiques sur le commerce de marchandises sur la base de la balance des paiements. Nous sommes aussi responsables du programme des prix, mais je n'entrerai pas dans les détails à ce sujet. Nous nous occupons aussi du maintien du système harmonisé de classification des marchandises, une norme internationale utilisée par plus de 200 pays. Nous nous occupons des annotations statistiques pour la classification des produits d'importation et d'exportation.
Aux fins des données douanières, nous effectuons un suivi d'environ 19 000 produits d'importation et d'environ 6 500 produits d'exportation chaque mois.
En ce qui concerne notre programme secondaire, c'est-à-dire tout ce qui ne fait pas partie de notre publication mensuelle, nous établissons des registres des exportateurs et des importateurs, ce qui nous permet de connaître les statistiques relatives aux divers exportateurs et importateurs.
Les données commerciales douanières nous permettent d'en savoir plus sur les produits qui sont exportés, le moment où ils sont exportés, la façon et l'endroit où ils le sont. Grâce à ces bases de données, nous pouvons faire un rapprochement de ces transactions et commencer à avoir une idée des caractéristiques de chacun des exportateurs.
Nous disposons de l'analyseur du commerce mondial, qui est une base de données dont nous nous occupons et qui nous permet d'acheter des données des Nations Unies. Grâce à un algorithme automatisé, nous pouvons faire un rapprochement de ces données. Elles sont essentiellement utilisées par des chercheurs, et elles nous permettent de dresser un tableau complet des pays partenaires qui participent au commerce mondial à partir de la classification type du commerce international.
Nous effectuons aussi, périodiquement, un rapprochement des données relatives aux pays partenaires, et je vous présenterai plus tard un exemple de rapprochement que nous avons fait avec la Chine.
À la page 3, vous trouverez un graphique qui illustre le commerce du Canada avec la Chine, l'Inde et la Russie au cours des dix dernières années. Dès 1998 à 2007, les exportations canadiennes douanières ont augmenté de 41 p. 100, ce qui signifie qu'elles sont passées de 318 milliards de dollars à 460 milliards de dollars. Les exportations vers la Chine, l'Inde et la Russie ont presque quadruplé pendant cette période puisqu'elles sont passées de 3,2 milliards de dollars à 12,2 milliards de dollars. Les exportations vers la Chine, l'Inde et la Russie représentaient 2,7 p. 100 des exportations canadiennes en 2007, par rapport à 1 p. 100 en 1998.
À la page 4 se trouve un graphique qui illustre les importations canadiennes de marchandises. Sur le plan de l'importation, les importations du Canada pendant cette période ont connu une augmentation de 36 p. 100 et sont passées de 298 milliards de dollars à 406 milliards de dollars. Les importations de la Chine, de l'Inde et de la Russie ont plus que quadruplé puisqu'elles sont passées de 9,3 à 41,7 milliards de dollars et qu'elles représentaient, en 2007, 10,3 p. 100 des importations, par rapport à 3,1 p. 100 en 1998.
Comme vous pouvez le constater, le commerce a connu une croissance plutôt rapide. Pour ce qui est des importations, les importations en provenance de tous les pays ont au moins connu une augmentation à deux chiffres, parfois même à trois chiffres, mais la croissance des importations de la Chine est la plus importante. Pendant cette période, la Chine est passée du cinquième rang de nos sources d'importations au deuxième rang.
En ce qui concerne certaines caractéristiques des exportateurs, nous n'avons pas encore les données pour 2007. Nous disposons seulement des données jusqu'à 2006. Pour la période allant de 2000 à 2006, le nombre d'exportateurs faisant affaire avec la Chine, l'Inde ou la Russie a presque triplé. Malgré tout, moins de 7 p. 100 des exportateurs exportent actuellement dans ces marchés. Vingt pour cent des exportateurs qui exportent en Inde et en Chine, et 27 p. 100 des exportateurs qui font affaire avec la Russie sont dans l'industrie manufacturière. De 28 à 33 p. 100 des exportateurs vers ces pays font du commerce de gros, tandis qu'ils représentent 24 p. 100 des exportateurs canadiens dans le monde en général. Ces pourcentages n'ont pas beaucoup changé de 2000 à 2006, ce qui signifie que le portrait est demeuré à peu près le même dans ce secteur.
À la diapo suivante, vous trouverez une brève description des caractéristiques et des statistiques des importateurs. Pour ces statistiques, je ne disposais que des données jusqu'à 2004; j'ai donc comparé la période de 2002 à 2004. En général, on comptait trois fois plus d'importateurs que d'exportateurs au Canada pendant cette période. Le nombre d'importateurs de la Chine a augmenté de 32 p. 100 pendant cette période, et le nombre d'importateurs de l'Inde et de la Russie a augmenté de 21 et de 15 p. 100 respectivement. Environ un tiers de nos importateurs ont fait affaire avec ces pays, ce qui est une part beaucoup plus élevée que pour les exportateurs. Environ 20 p. 100 des importateurs canadiens qui importent de la Chine font partie de l'industrie manufacturière, et ce nombre n'a pas vraiment changé au cours de cette période. Comme dans le cas des exportateurs, par contre, 33 p. 100 des entreprises qui importent de l'Inde et 75 p. 100 des entreprises qui importent de la Russie œuvrent dans le secteur manufacturier. Les secteurs du commerce de gros comptent pour 50 p. 100 des entreprises qui importent de la Chine, 40 p. 100 des entreprises qui importent de l'Inde, et seulement 10 p. 100 des entreprises qui importent de la Russie.
Vous pouvez maintenant passer à la diapositive suivante. Je m'excuse : la diapositive est seulement en anglais, mais celle qui suit est en français, si ça vous intéresse. Je n'ai pas été capable d'insérer tous les détails dans une diapositive qui inclurait les deux langues.
Les données concernant les échanges commerciaux avec les partenaires doivent correspondre, mais c'est rarement le cas dans la pratique, et ce, pour un certain nombre de raisons. Les différences conceptuelles entre le système commercial de chacun des pays fournissent une explication. Par exemple, si un pays dispose de zones franches par lesquelles des biens peuvent entrer au pays sans être dédouanés, il se peut que ces biens ne soient pas pris en compte dans ses données sur le commerce. Le fret et l'assurance ne sont pas toujours traités de la même façon d'un pays à un autre. Par exemple, si l'on prend le cas du Canada et de la Chine, les importations effectuées par la Chine à partir du Canada incluent le coût de l'assurance et du fret, tandis que nos exportations vers la Chine n'incluent pas ces coûts une fois les produits à l'extérieur de notre frontière.
Il y a aussi un problème de dénombrement en ce qui concerne les exportations qui ne sont pas signalées aux douanes et qui quittent tout de même le pays. Nous nous sommes attaqués à ce problème au cours des dernières années avec nos collègues de l'ASFC. Ils ont adopté un certain nombre de nouveaux règlements et de nouvelles sanctions pécuniaires administratives, et ils ont conclu un protocole d'entente, un PE, avec les transporteurs afin de s'assurer que ces derniers respectent les règles de déclaration. Nous avons effectué quelques enquêtes sur le transport maritime et avons constaté que la situation s'est grandement améliorée.
Les erreurs d'affectation des exportations causent aussi problème. J'ai mentionné, plus tôt que nous échangeons des données avec les États-Unis. Dans le cadre de cette relation, nous prenons les données américaines sur l'importation et nous les utilisons comme données concernant nos exportations vers les États-Unis. Si ces biens sont, au moment de leur exportation, autorisés pour la consommation aux États-Unis, l'exportateur canadien n'a pas à remplir de déclarations d'exportation auprès de l'ASFC et nous ne serons pas mis au courant s'ils sont par la suite exportés de nouveau vers la Chine, l'Inde, la Russie, ou n'importe quel autre pays. Ces biens peuvent donc être comptabilisés dans les statistiques sur le commerce, mais être attribués à un autre pays, ce qui constitue un problème.
Les délais et les évaluations peuvent aussi entraîner des problèmes. Nous avons des problèmes avec le prix de transfert entre sociétés puisque ces sociétés peuvent modifier ou tenter de modifier la valeur des biens de façon à tirer profit du traitement fiscal des divers pays partenaires. Le taux de change constitue aussi un problème à mesure que le dollar fluctue, puisque cela a des répercussions sur les prix et que ses répercussions dépendent du moment où les fluctuations ont eu lieu.
Nous affirmons, de façon générale, que les données sur l'importation sont meilleures que les données sur l'exportation. J'insiste sur « de façon générale », puisque ce n'est pas toujours le cas. Prenons l'exemple de nos collègues européens et du commerce à l'intérieur de l'UE; ce n'est pas toujours le cas là-bas. Ils n'ont plus de mesures de contrôle des douanes à la frontière pour le commerce à l'intérieur de l'UE, et leurs statistiques sur l'importation s'en ressentent. Ils se servent de leur taxe sur la valeur ajoutée et ils estiment que leurs statistiques sur l'exportation sont actuellement meilleures que leurs statistiques sur l'importation.
Il y a aussi le fait que nous avons découvert des cas où les statistiques sur l'exportation sont meilleures que les statistiques sur l'importation; c'est le cas pour les marchandises contrôlées. Nous avons constaté, dans certains cas où nous avons effectué des rapprochements avec des pays, que ces pays prétendaient avoir importé des produits du Canada, mais le Canada ne détient pas de permis d'exportation qui permet l'exportation de tels produits à partir du Canada.
En ce qui concerne ce tableau sur le rapprochement, je voulais vous montrer que, quand nous avons fait le rapprochement détaillé des données avec nos collègues chinois, nous avons découvert que ce rapprochement a une incidence sur notre façon de voir la balance commerciale. D'après l'enquête que nous avons effectuée en 2002-2003, notre balance commerciale avec la Chine affiche non pas, comme nous le pensions, un déficit de 11 milliards de dollars en 2002, mais plutôt un déficit de 8 milliards de dollars. En 2003, nous pensions avoir un déficit de 13,8 milliards de dollars, alors qu'il s'agissait véritablement d'un déficit de 10,3 milliards de dollars. Ces rapprochements donnent donc un tout autre aperçu de la situation. Nous n'utilisons toutefois pas ces rapprochements pour alimenter les statistiques officielles puisqu'ils sont effectués de façon unique avec chacun des pays.
Je vais maintenant passer la parole à mon collègue, M. O'Hagan.
Patrick O'Hagan, directeur, Division de la balance des paiements, Statistique Canada : Notre travail, à la balance des paiements, ressemble étroitement au travail qu'effectue M. Kuntz dans le cadre de son programme. La Division du commerce international possède un grand nombre de renseignements détaillés sur le commerce de produits, qu'elle appelle « commerce de marchandises ». À la Division de la balance des paiements, nous nous occupons plutôt de tous les types de positions et de transactions qui concernent les non-résidents en général, ce qui signifie que notre travail a une portée plus générale, mais que nous produisons une information moins détaillée.
Si vous vous rendez à la page 10, vous aurez une vue d'ensemble du programme et constaterez que le programme principal comporte deux volets : la balance des paiements et la position concernant les investissements internationaux.
La balance trimestrielle réelle des paiements internationaux se divise entre les mouvements du compte courant et les mouvements du compte capital et du compte financier. En ce qui concerne le compte courant, l'élément le plus important à mesurer constitue le commerce de marchandises dans le secteur dont s'occupe M. Kuntz. Nous apportons de légers rajustements à ces données et, pour des raisons que je n'expliquerai pas ici, nous parlons de commerce des biens plutôt que de commerce des marchandises, probablement parce que nous avons aussi le commerce des services dans cette même catégorie et que nous voulons distinguer les biens des services.
M. Kuntz a abordé en détail la question des mouvements des biens, renseignements qu'il nous communique, alors je parlerai plutôt des autres éléments concernant le compte courant.
Les services se divisent en quatre grands secteurs : les services de transport, soit les coûts de transport des biens et des services, y compris les coûts de certains types de déplacements; le compte des voyages, soit, essentiellement, les dépenses de tourisme et d'affaires, y compris les dépenses associées aux travailleurs saisonniers et à l'équipage des transporteurs aériens, et cetera.; les services gouvernementaux, soit la présence de représentants à divers événements et les dépenses militaires à l'étranger. Mais le secteur le plus important pour nous est celui des services commerciaux.
M. Kuntz a affirmé que le commerce de marchandises incluait un très grand nombre de produits au détail, ce qui n'est pas du tout notre cas, dans le secteur du commerce des services. Nous avons probablement de dix à 12 types de produits de services : les communications, les services de construction, les services d'assurance et autres services financiers, comme les droits et commissions — les droits de courtage — les services bancaires, les services informatiques et les revenus de même que les redevances. Nous avons aussi des commissions non financières. Pensons, par exemple, à une entreprise qui réunit un importateur ou un exportateur dans deux pays distincts. Nous avons des services de gestion, des services de recherche et développement, des services d'architecture, des services d'ingénierie et autres services techniques, de même que des services personnels. Enfin, nous avons une catégorie fourre-tout que nous appelons « services divers ». Ce type de services est très large.
Vous remarquerez que, comme il y a de moins en moins d'entreprises canadiennes qui offrent des services transfrontaliers, que ce soit des importations ou des exportations, nous faisons face, à la Division de la balance des paiements, à de plus en plus de problèmes en matière de confidentialité. Ce que nous pouvons offrir sur le plan géographique est limité, mais nous y reviendrons plus tard.
Un autre élément couvert par le compte courant, ce sont les revenus de placements, c'est-à-dire les revenus associés à des obligations du Canada détenues à l'étranger, par exemple, ou les avoirs canadiens en capitaux propres étrangers. Nous avons donc des recettes et des paiements : les recettes sont nos exportations, tandis que les paiements sont les importations. Nous avons les revenus de placement associés aux investissements directs, qui sont des dividendes et divers types de paiements effectués entre des sociétés affiliées canadiennes et des entreprises étrangères. Il y a aussi d'autres types de revenus de placement, plus particulièrement les revenus associés aux activités bancaires, comme les dépôts et les prêts, qui entraînent des flux d'intérêts transfrontaliers.
Il y a, finalement, les transferts — une catégorie plutôt petite. Elle inclut les transferts courants transfrontaliers, les paiements de pension versés à des Canadiens par des gouvernements étrangers, par exemple; ou les paiements de sécurité sociale versés par le Canada à des non-résidents qui ont déménagé aux États-Unis.
C'est là l'essentiel du compte courant. Nous avons aussi des balances concernant divers éléments : les balances des produits, soit les balances du commerce de marchandises, les balances des services, les balances des revenus de placement, et cetera. Cela nous donne un surplus pour la balance générale du compte courant depuis 1999. Cependant, au quatrième trimestre de l'année dernière, la balance s'est transformée en un léger déficit, grandement attribuable à un excédent de moins en moins important à la suite des transactions de biens et à une augmentation importante du déficit associé aux voyages, particulièrement vers les États-Unis, au cours des derniers trimestres, depuis que le dollar a pris de la valeur.
En ce qui concerne le compte capital et financier, il n'y a rien de particulier à signaler. Il correspond au compte courant. Par exemple, si nous connaissons un excédent en ce qui concerne notre commerce et nos biens et services, nous devons financer cette activité — consentir des prêts — à des non-résidents parce que notre commerce nous rapporterait plus de revenus en général. Nous prêterions donc de l'argent à l'étranger. Ces deux comptes correspondent en ce sens qu'ils concernent des transactions financières qui touchent des non-résidents.
Le compte capital et financier comprend aussi trois principaux éléments. Les investissements directs constituent l'un de ces éléments intéressants. Il s'agit des encaissements et des décaissements sous la forme d'investissements à l'intérieur d'une entreprise. Ces transactions comptent essentiellement trois types d'activités : la mise sur pied de nouvelles entreprises, ce que nous avons vu un peu en Russie, en Inde et en Chine au cours des dernières années; les injections de capitaux de roulement dans des sociétés affiliées existantes à l'étranger; et les activités d'acquisition, qui ont été plutôt importantes en 2007. En ce qui concerne les investissements étrangers au Canada, nous avons connu une année record, qui a dépassé ce que nous avions connu comme acquisitions en 2000, l'une des années de l'essor technologique. Les investissements directs canadiens à l'étranger ont aussi été très importants en 2007.
Cela nous mène à des préoccupations concernant les problèmes de perte d'entreprise ou à ce qui se produit, avec la mondialisation, quand vient le temps de consolider ces secteurs. Par exemple, les investissements à l'intérieur du Canada concernent principalement le secteur primaire et le secteur de la fabrication. Les investissements à l'étranger touchent surtout le secteur des services. Il y a donc un rapprochement des secteurs à l'échelle mondiale.
Le reste du flux est, bien sûr, composé d'investissements de portefeuille, des Canadiens qui prêtent à des non- résidents, des non-résidents qui prêtent à des Canadiens — par exemple par l'achat d'obligations du gouvernement canadien — et des Canadiens qui prêtent à des non-résidents. Un bon exemple de ce type d'investissement, ce serait les sommes gigantesques investies sur des marchés étrangers par l'entremise des fonds de retraite et des fonds mutuels, surtout depuis que le plafond imposé aux investissements à l'étranger a été éliminé en 2005. Nous en avons toutefois vu le revers en 2007, quand il y a eu un dégagement important du papier commercial américain adossé à des actifs appartenant à des Canadiens à la suite de l'effondrement du marché des prêts hypothécaires à risque. Le compte capital fait état de passablement d'activité.
L'autre volet de notre programme principal concerne notre position en matière d'investissements internationaux, c'est-à-dire l'actif et le passif du Canada découlant de transactions avec les non-résidents, séparés, encore une fois, entre nos positions en ce qui concerne les investissements directs et notre portefeuille, et d'autres types de positions, y compris en ce qui concerne le flux bancaire et nos réserves internationales officielles.
Notre programme secondaire porte sur les statistiques du commerce des sociétés affiliées à l'étranger; il suscite beaucoup d'intérêt et d'attention et connaît une croissance depuis 2001.
En ce qui concerne nos statistiques sur le commerce, il existe deux façons, pour les entreprises canadiennes, d'effectuer des ventes auprès des non-résidents. Elles peuvent, d'une part, effectuer directement des exportations de biens et de services, ou elles peuvent, d'autre part, vendre leurs sociétés étrangères affiliées qui font des affaires dans des marchés étrangers. Nous voulons établir une distinction claire entre ces deux méthodes. L'une concerne le commerce des biens et des services, mais l'autre est tout à fait différente. Le commerce des biens et des services contribue au produit intérieur brut, mais les activités commerciales qui touchent les sociétés étrangères affiliées ne font pas partie de la production intérieure. Elles ont tout de même des répercussions sur le revenu national puisque ces sociétés canadiennes peuvent faire beaucoup d'argent grâce à leurs activités à l'étranger.
Vous trouverez, à la page 11, une fiche de renseignements sur les services fondée sur notre estimation repère pour 2005. Au total, les exportations vers la Russie, l'Inde et la Chine atteignent 1,6 milliard de dollars, tout comme les importations en provenance de ces pays. Nous avons un léger excédent en ce qui concerne les transactions commerciales et la vente de services avec la Russie, l'Inde et la Chine. Nous fournissons ensuite une liste des chiffres concernant les exportations et les importations. Vous remarquerez que la plus grande part de ces activités se fait avec la Chine.
Nous pouvons fournir une analyse pour la Russie, l'Inde et la Chine seulement au sujet de 2005 puisque nous procédons à des études repères sur le commerce et les services exportés et que ce sont ces études qui nous permettent d'effectuer une analyse géographique détaillée, et que c'est ce qui nous intéresse le plus dans le cas présent. Nos études trimestrielles habituelles, qui vont jusqu'à 2007, fournissent des données sur seulement six grandes régions géographiques.
En ce qui concerne la partie sur les investissements, dans le bas de la page, je possède des données pour 2007, tirées d'un document publié le 6 mars. Vous pouvez constater que, en ce qui concerne le total de l'investissement direct canadien à l'étranger en Russie, en Inde et en Chine, nous avons investi environ 2,3 milliards de dollars. Cependant, l'investissement provenant de ces pays — l'investissement direct — est de 1,2 milliard de dollars. Cela signifie un excédent important pour ces trois pays. En fait, c'est actuellement la Chine qui profite de l'excédent le plus important.
L'un des aspects intéressants à ce sujet, c'est que nous avons un excédent avec la Chine, mais, si vous prenez d'autres aspects du compte d'investissement, particulièrement des investissements de portefeuille, vous constaterez que l'énorme excédent commercial de la Chine lui a permis de se constituer une importante réserve. Elle en utilise une partie pour investir plus particulièrement dans des valeurs étrangères. Par exemple, le nombre d'obligations du gouvernement que possède la Chine a connu une importante augmentation au cours des dernières années; il s'agit d'une croissance importante depuis 2003 puisque la Chine possède maintenant presque 13 fois plus d'obligations du Canada qu'en 2003. Elle en détient malgré tout un nombre relativement petit.
Si vous vous rendez à la page suivante, vous avez un aperçu de l'évolution au fil du temps des importations de biens et de services en provenance de la Russie, de l'Inde et de la Chine, et des exportations de biens et de services vers ces pays.
La ligne bleue représente le total des importations de services en provenance de ces trois pays. Elles ont connu une croissance à peu près constante, même s'il y a eu une accélération des activités depuis environ 2000. Une bonne part de cette croissance reflète la croissance de ces économies en émergence. La Chine est responsable d'une bonne part de cette croissance.
Le dernier point à la droite du graphique permet de nous rappeler que nous profitons d'un très faible excédent en ce qui concerne le commerce des services avec la Russie, l'Inde et la Chine. La ligne rose représente le total des exportations de services vers la Russie, l'Inde et la Chine, et elle ressemble beaucoup à l'autre ligne. Les exportations et les importations augmentent à un rythme à peu près semblable, même si les importations ont pris les devants et connaissent une croissance un peu plus rapide. La convergence des lignes illustre bien mon propos.
Le graphique suivant, à la page 13, donne une idée de l'importance du commerce avec ces économies émergentes par rapport au total du commerce canadien des services. En ce qui concerne nos exportations de services vers la Russie, l'Inde et la Chine, vous pouvez voir, si vous observez la ligne rose, qu'elles n'ont pas beaucoup changé depuis 1999. On remarque une légère augmentation de la tendance, mais rien de véritablement important.
Cependant, les importations de services ont connu une croissance un peu plus rapide, particulièrement depuis 2000 environ. La Chine en est responsable en grande partie. Je peux vous dire, en ce qui concerne l'incidence de ce pays sur le commerce en général, que la Chine compte pour environ 2 p. 100 du total des importations de services et pour environ 2,3 p. 100 du total des exportations de services. À l'heure actuelle, même si le commerce avec la Chine connaît une croissance, il demeure une minuscule part du commerce général de services du Canada, que ce soit à l'importation ou à l'exportation.
La diapositive suivante nous donne une idée de la place qu'occupent les investissements directs. Vous pouvez voir que les investissements directs canadiens à l'étranger en Russie, en Inde et en Chine sont demeurés plutôt stables. Il faut toutefois souligner qu'il s'agit de chiffres très peu élevés : 0,5 p. 100 des investissements directs canadiens totaux à l'étranger.
Cependant, la ligne rose illustre les investissements directs étrangers au Canada de la part des économies émergentes dont nous parlons. Ils sont demeurés à peu près stables jusqu'en 2005, puis ils ont augmenté en flèche. Je ne peux pas vous fournir les chiffres à cause du problème de confidentialité — je ne peux vous fournir l'analyse pour 2006 parce que le nombre de sociétés qui ont pris part à ces investissements n'est pas assez élevé pour que je puisse vous donner la répartition par pays — je peux vous dire que, depuis 2004, cette croissance est essentiellement attribuable à la Chine.
Je vais aborder la question des défis auxquels nous faisons face concernant les données. Le programme sur la balance des paiements, à part ce qui concerne le commerce des produits, dont M. Kuntz nous a parlé, s'appuie grandement sur les enquêtes. Nous avons des problèmes avec les enquêtes. Nous sommes très préoccupés par le fardeau de réponses, qui nous nuit toujours quand nous tentons d'interroger des sociétés canadiennes et d'obtenir des détails pertinents sur leurs investissements directs ou sur le commerce des services en particulier. Nous parlons d'un nombre plutôt limité de sociétés, sur lesquelles nous souhaitons obtenir beaucoup de renseignements. Nous avons remarqué, au cours des six ou sept dernières années, que le taux de réponses à nos enquêtes diminue graduellement. Cela nous préoccupe. Nous éprouvons des problèmes avec quelques-uns de nos projets à cause de cela; j'y reviendrai plus tard.
J'aimerais aussi attirer votre attention sur la croissance importante des entreprises multinationales. Les investissements directs canadiens à l'étranger ont connu une grande croissance depuis 1993. La nature de ces activités a toutefois aussi évolué un peu. Nous, les statisticiens, commençons à nous demander s'il est de plus en plus difficile pour ces grandes sociétés multinationales, dispersées dans un nombre de plus en plus grand de régions géographiques, de répondre aux questions que nous leur posons et de nous fournir les données dont nous avons besoin. Ce type d'activités constitue certainement, pour elles, une amélioration de leurs activités, mais cela entraîne des défis pour les statisticiens.
En ce qui concerne la mondialisation, deux aspects constituent un problème pour les statisticiens : les chaînes de valeur mondiales et les marchandises à transformer. Essentiellement, la production se fait de façon de plus en plus dispersée de par le monde, ce qui signifie qu'une entreprise ne produit plus au Canada tous les éléments d'un bien en particulier, mais impartit plutôt une bonne part des tâches à d'autres sociétés au Canada ou à l'étranger; dans ce dernier cas, on parle de délocalisation. Les diverses étapes de la production peuvent se dérouler dans de nombreuses régions géographiques avant que le produit final ne soit terminé.
Il s'agit d'un défi pour les statisticiens parce qu'il est plus difficile, pour nous, de mesurer le type d'activités en cours. Par ailleurs, il y a, en même temps, une augmentation de ce que nous appelons les marchandises à transformer — de plus en plus d'envois internationaux de marchandises à transformer à cause de ces chaînes de valeur mondiales. Une autre question importante à laquelle doivent tenter de répondre les statisticiens est de savoir si ces marchandises sont transformées quand elles traversent les frontières, et la valeur qui devrait être accordée à ces importations et exportations de marchandises. À l'heure actuelle, la valeur attribuée à la plupart des marchandises qui traversent les frontières aux fins des douanes est la valeur intégrale. Une petite valeur est ajoutée à la valeur intégrale puisque les marchandises sont transformées dans une région géographique avant d'être exportées dans une autre région géographique où leur transformation se poursuivra. La question à laquelle les statisticiens doivent répondre — et pas seulement à Statistique Canada, mais partout dans le monde, puisque nous respectons aussi des normes internationales à ce sujet — est la suivante : s'agit-il d'un commerce de marchandises ou d'un commerce de services? Si nous considérons qu'il s'agit d'un commerce de services — selon les normes internationales, nous devrions commencer à traiter une grande part du commerce de marchandises à transformer comme un commerce de services —, cela signifie que nous effectuons une surévaluation des exportations comme des importations. Cela ne pose pas problème en ce qui concerne le solde commercial net, qui s'intègre à notre produit intérieur brut et qui nous dit si notre économie est en croissance, mais cela peut causer des problèmes pour la classification de notre commerce international. Nous nous pencherons sur cette question, à Statistique Canada, comme le font d'autres statisticiens.
Un groupe de travail mis sur pied récemment doit se pencher sur le traitement des marchandises à transformer maintenant qu'il y a eu une nouvelle norme internationale. Nous pouvons, à partir de nos propres données de production, envisager la question de la façon suivante : si les données concernant la production d'une société donnent à penser qu'elle produit un service, mais que les données sur le commerce concernent des marchandises qui font l'aller- retour, cela nous donne une idée des changements que nous pourrions souhaiter apporter. Nous prévoyons apporter ces changements au moment de la prochaine révision historique du Système de comptabilité nationale du Canada, qui devrait avoir lieu en 2013.
Je vais maintenant parler de quelques initiatives concernant la qualité. Comme dans le cas des données douanières, nous effectuons un rapprochement annuel de l'état général de la balance des paiements pour le Canada et pour les États-Unis. À l'heure actuelle, nous effectuons ce rapprochement seulement avec les États-Unis. Nous envisageons de le faire avec d'autres importants partenaires commerciaux pour mieux connaître les enjeux liés à la qualité en ce qui concerne la balance des paiements. Nous envisageons de mettre sur pied une enquête détaillée des investissements directs étrangers de 70 pays, étude qui serait coordonnée par le Fonds monétaire international. Si elle est mise sur pied dans quelques années, elle nous permettra d'obtenir beaucoup plus de données géographiques que ce dont nous disposons à l'heure actuelle. Quand on aura fait le total de ces données, on atteindra un niveau agrégé dans l'échange de données sur les investissements directs.
Nous effectuons actuellement une refonte de nos programmes d'enquête, particulièrement en ce qui concerne le commerce des services. Cela nous permettra d'obtenir des données de bien meilleure qualité sur les services et une meilleure idée de la répartition géographique du commerce puisque nous élargirons notre couverture du commerce des services. Nous effectuons aussi, depuis peu, une refonte de nos enquêtes sur les investissements directs étrangers, ce qui nous permettra d'obtenir de meilleures données sur la répartition géographique.
Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international nous a demandé d'améliorer et d'agrandir le plus possible notre programme qui touche le commerce des sociétés affiliées étrangères puisque ce type de commerce est plutôt important.
En fait, si vous prenez les ventes de sociétés canadiennes à des sociétés affiliées étrangères et que vous comparez ce chiffre au total des exportations des sociétés canadiennes, vous constaterez que ces ventes représentent environ 70 p. 100 du total des exportations. Il s'agit donc d'une part très importante, et vous comprendrez que des données à ce sujet pourraient donner lieu à des enquêtes et des initiatives stratégiques importantes.
J'ai pris un peu plus de temps que prévu, mais j'ai maintenant terminé mon exposé.
Le président : Je suis sûr que c'est moi qui ai fait une erreur quand je vous ai dit que vous aviez 15 minutes. Vous avez probablement mal compris, mais je voulais dire 15 minutes chacun. C'est le cas parce que, comme je l'ai mentionné plus tôt, il y a beaucoup d'information en cause. C'est un sujet assez ardu. Je veux vous remercier, tous les deux, d'être venus.
Le sénateur Stollery : Je sais que Statistique Canada a une très bonne réputation. Comme je vous le faisais remarquer avant la rencontre, nous vous avons déjà entendus, plus particulièrement quand nous nous sommes penchés sur l'accord de libre-échange avec les États-Unis.
Nous avons eu un témoin — je crois que c'était l'ancien délégué commercial du Canada, ou peut-être le consul nommé à Taïwan — qui a dit, devant le comité — je crois que c'est quelque part dans le témoignage —, qu'il avait découvert, quand il était arrivé à Taïwan, qu'un grand nombre de produits canadiens étaient vendus là-bas même si ceux-ci n'apparaissaient pas dans les chiffres. Nous avions conclu que c'était probablement à cause de la congestion dans les ports de la côte Ouest : de nombreuses exportations du Canada étaient envoyées aux États-Unis afin d'être expédiées à partir du port de Seattle.
Nous avons entendu des témoins très crédibles, y compris, comme je l'ai dit, le délégué commercial ou le consul — je ne me souviens plus. Nous avons aussi entendu Danielle Goldfarb à quelques reprises et à divers sujets, et elle en était arrivée à la conclusion que notre commerce avec l'Asie était grandement sous-déclaré. Elle parlait du commerce invisible du Canada avec l'Asie.
Les membres du comité avaient été plutôt étonnés d'apprendre que des marchandises envoyées par le port de Seattle, ce qui est plutôt courant, je crois, à cause de la congestion portuaire, entre autres, étaient considérées comme des exportations vers les États-Unis et que personne ne semblait se soucier du destinataire final.
Cela m'a un peu déconcerté. Dans les années 1950, quand Statistique Canada était encore le Bureau fédéral de la statistique, il y avait une société qui faisait beaucoup d'importations, et elle devait remplir de nombreux formulaires à des fins de statistique. Cela m'a donc un peu étonné. J'aimerais donc connaître l'explication derrière tout ça et savoir ce que pourrait faire le comité pour régler le problème.
M. Kuntz : Je suppose, monsieur le sénateur, que vous parlez plus particulièrement du commerce de marchandises, et non du commerce de services, dans ce cas. Les statistiques sur le commerce des marchandises, sur le commerce douanier des marchandises, ne sont pas nouvelles. Elles existent depuis un certain temps; depuis des centaines d'années, dans certains cas. Elles sont compilées depuis environ 180 ans au Canada.
Les problèmes que vous soulevez concernant des marchandises affectées au mauvais pays ou des marchandises qui aboutissent dans un autre pays ne sont pas nouveaux. En fait, j'ai apporté un article écrit par un ancien statisticien en chef du Bureau fédéral de la statistique et publié dans le Journal de l'Association des banquiers canadiens en juillet 1926. Il traite précisément de ces enjeux : le sous-dénombrement des exportations, c'est-à-dire des opérations commerciales qui ne sont pas signalées aux douanes; et l'affectation à un pays qui n'est pas la destination finale de la marchandise, ce qui se produit quand des marchandises quittent le pays et qu'on ne connaît pas la destination finale.
Ce n'est pas que nous ne connaissons pas ces enjeux; nous les connaissons très bien. En fait, en ce qui concerne la balance des paiements, c'est-à-dire ce que nous considérons comme nos statistiques officielles et que notre division transmet à M. O'Hagan afin qu'il les utilise pour la balance des paiements, nous avons un rajustement permettant de corriger le sous-dénombrement des exportations; nous avons recommencé à utiliser cette méthode de calcul en 1992, environ.
Cet article nous apprend, en fait, que dès 1890, un rajustement était apporté aux statistiques commerciales canadiennes pour corriger le sous-dénombrement des exportations. Bon nombre de ces enjeux existent depuis longtemps. Nous nous en sommes occupés. Cependant, de nouvelles dimensions du problème ont surgi, entre autres à cause de l'échange de données avec les États-Unis, qui a permis, par le passé, de régler le déséquilibre entre les statistiques canadiennes et les statistiques américaines. Quand nous avons conclu le protocole d'entente avec les États- Unis selon lequel il y aurait une seule source de données pour les deux pays, les exportateurs canadiens ont compris qu'ils n'avaient pas à remplir de déclarations canadiennes d'exportation s'ils exportaient des marchandises vers les États-Unis.
C'est exact, à condition que les marchandises restent aux États-Unis et soient destinées à y être consommées. Cependant, si elles sont exportées de nouveau par la suite, ou si elles sont seulement en transit aux États-Unis, en chemin vers un autre pays, l'exportateur devrait remplir un formulaire de déclaration des exportations auprès de l'Agence des services frontaliers du Canada, l'ASFC.
Nous discutons du problème avec nos collègues de l'ASFC depuis un certain nombre d'années. Ils ont réagi, et ils ont commencé, en 2004, à appliquer un certain nombre de nouvelles mesures. Premièrement, ils ont modifié les règlements de façon à ce que les exportateurs déclarent les exportations avant que les marchandises ne quittent le pays. Ensuite, ils ont mis sur pied un régime de sanctions administratives pécuniaires qui leur permet d'infliger une amende à un exportateur s'ils découvrent que ce dernier n'a pas déclaré des marchandises exportées.
Troisièmement, ils ont mis sur pied un système ou conclu une série de protocoles d'ententes avec des transporteurs dans le cas des marchandises qui sont exportées directement à partir du Canada selon lesquelles les transporteurs n'ont pas le droit de charger la marchandise tant que l'exportateur ne peut fournir de preuve de déclaration. Ces mesures ont permis de régler le problème du point de vue canadien en ce qui concerne les marchandises qui sont transportées à partir d'un port canadien, de Vancouver, par exemple, pour se rendre en Chine, et qui sont déclarées aux douanes. Elles ne règlent toutefois pas la question des marchandises canadiennes qui quittent à partir du port de Seattle avant de poursuivre leur chemin. L'une des difficultés que nous éprouvons, c'est que nous exerçons, depuis des années, des pressions sur nos collègues américains pour tenter d'avoir accès aux documents appropriés, mais ils n'ont jamais accepté. Et maintenant, le service américain des douanes et de protection des frontières ne se préoccupe probablement plus des statistiques, et ne l'a peut-être jamais fait; il se préoccupe plutôt maintenant de la sécurité. Nous aimerions avoir accès aux documents américains qui concernent les marchandises en transit et que l'on appelle le formulaire U.S. 7512.
Si nous pouvions organiser l'échange de données de façon à ce que nous ayons accès à ce document, nous réussirions probablement à comprendre l'ampleur du problème de dénombrement relativement à ces marchandises qui transitent par le port de Seattle, et nous pourrions comparer les chiffres qui figurent dans ce document avec ceux qui figurent dans les documents sur le transport et dans les déclarations existantes d'exportations, et nous pourrions reprendre le contrôle de la situation.
Le sénateur Stollery : Étant donné que nous vivons une nouvelle ère en ce qui concerne les exportations canadiennes et l'émergence de l'Asie et de la Russie, et cetera, j'ai peine à croire que vous pouvez diriger quoi que ce soit sans ces communications.
Je me souviens que, dans les années 1950, mon grand-père me disait qu'il devait remplir toutes sortes de documents pour le Bureau fédéral de la statistique, et il me disait : « Tu sais, on ne peut pas diriger un pays sans statistiques », et je crois qu'il avait raison. Je ne sais pas comment on peut élaborer des politiques commerciales adéquates si l'on n'a pas de bonnes statistiques. Je pensais que, si quelqu'un exportait quelque chose, il y avait une trace quelque part. Nous vivons une situation particulière parce que les marchandises passent par Seattle à cause du problème de congestion. J'ai de la difficulté à croire que le problème existe depuis si longtemps; cela me dérange.
Le président : Souhaitez-vous répondre?
M. O'Hagan : Une partie de la question avait trait au travail effectué par Danielle Goldfarb concernant la sous- estimation du commerce. Il serait peut-être utile de s'attarder à ce document. J'y ai fait allusion dans mes déclarations préliminaires. Je connais bien le document, qui a été publié, je crois, en janvier ou en février, et dont l'auteur affirmait que le commerce du Canada était, de façon générale, nettement sous-estimé.
Ce n'est pas notre point de vue, à Statistique Canada, puisque la plupart des chiffres évoqués dans le document pour défendre ce point de vue concernaient le total des exportations canadiennes de marchandises et de services auquel on ajoutait les ventes des sociétés étrangères affiliées. C'est là une façon de calculer le total des ventes des sociétés canadiennes, mais cela ne reflète pas le total des exportations. Nous étions inquiets parce que nous ne voulions pas avoir affaire à une mauvaise interprétation. Les statistiques sur le commerce des sociétés étrangères affiliées et les statistiques sur les exportations de marchandises et de services sont deux choses tout à fait distinctes.
C'est vrai que nous sous-estimons peut-être le commerce avec certains pays. Nous essayons d'apporter une série de mesures correctives, mais la situation est plus complexe quand il s'agit d'une économie émergente. Il y a plus de risque que nous passions à côté de quelque chose dans ces économies en croissance, et nous tentons de corriger ces lacunes. Cependant, les données dont nous disposons actuellement sont plutôt fiables. Certains éléments, comme le commerce par Internet, sont très difficiles à mesurer pour nous. Nous devons utiliser quelques estimations, et nous avons aussi beaucoup de difficulté à classifier les transactions sur le plan géographique. Nous avons des enquêtes sur l'utilisation d'Internet et l'activité commerciale sur Internet, mais nous ne réussissons pas toujours à retracer les lieux géographiques ou se trouvent les personnes en cause.
En ce qui concerne les services, il est vrai que, quand il s'agit de très petites entreprises, nous avons parfois plus de difficulté à obtenir des données sur toutes ces activités. Nous réussissons généralement à stratifier nos enquêtes. Nous avons une partie « à tirage complet », qui s'adresse aux gros fournisseurs de services, et nous avons une partie « à tirage partiel », qui s'adresse à un échantillon. Puis nous ajoutons des données administratives aux données recueillies grâce à ces outils.
Nous pensons que, grâce à la réorganisation de notre programme sur le commerce des services, nous obtiendrons un meilleur dénombrement en général, ce qui nous poussera probablement à rajuster un peu nos données à la hausse en ce qui concerne les exportations et les importations. Je ne peux pas le confirmer tant que nous n'aurons pas les nouveaux résultats, mais nous ne pensons pas que le commerce canadien soit grandement sous-évalué.
Le dernier sujet abordé est celui du commerce des services. Il s'agit d'un sujet plus délicat dont nous nous occupons attentivement. Nous sous-estimons peut-être le total du commerce des services dans la mesure où le Canada fait le commerce d'une grande quantité de marchandises à transporter, particulièrement avec la Chine. La Chine est reconnue comme l'un des principaux pays qui fait de la transformation de marchandises. Cependant, en général, nous ne sous- estimons pas le commerce canadien. C'est plutôt une question de classification entre le commerce des marchandises et le commerce des services, sans égard à la répartition géographique évoquée il y a quelques minutes par mon collègue.
Le président : J'aimerais apporter une précision : de toute évidence, ce n'est pas un problème canadien; c'est un problème mondial, je suppose. Nous ne sommes pas les seuls aux prises avec ce problème.
M. O'Hagan : Oui, c'est exact.
Le président : S'il devait y avoir une solution à ce problème, ce serait une solution mondiale, et non une solution canadienne.
Le sénateur Grafstein : Je me demandais si nous pourrions, pour rendre tout cela un peu plus digeste, séparer l'analyse en quelques catégories. Nous pourrions mettre, d'un côté, le commerce des marchandises et des services, ce que vous avez fait, et commencer par aborder la question des entrées et des sorties de l'investissement étranger direct. Commençons par cela. Honnêtement, ces chiffres sont désastreux. Ils sont en croissance, mais une augmentation de 30 ou de 40 p. 100 du niveau actuel reste plutôt navrante, et c'est là le sujet de notre étude.
Nous avons tendance à percevoir le Canada comme une nation commerçante. C'est un mythe; le Canada n'est pas une nation commerçante. Il ne se fait pas de commerce à l'intérieur du Canada; il se fait du commerce à l'intérieur de l'Amérique du Nord, mais on ne peut alors pas parler de nation commerçante. Le Canada n'est pas une nation commerçante comme l'était la Grande-Bretagne. Si le Canada adhérait au libéralisme manchesterien, comme le faisait Winston Churchill, les chiffres sur le commerce nous feraient bien rire. Nous voulons secouer l'âme canadienne de façon à favoriser le commerce et les investissements afin que le Canada en profite. C'est là notre objectif. Nous pensons que nous devons, d'une façon ou d'une autre, tirer parti des nouveaux géants en émergence. Peut-être que nous ne devrions pas du tout faire affaire avec eux. Peut-être que nous devrions plutôt faire affaire avec l'Amérique du Sud. Peut-être que nous aurions, à court terme, un meilleur taux de rendement avec l'Amérique du Sud ou avec le Mexique. Nous ne le savons pas.
On doit explorer l'inconnu. J'aimerais revenir à vos chiffres un petit instant, plus particulièrement aux chiffres sur l'investissement étranger direct. Si on fait l'analyse, on obtient des chiffres de 333 et de 160 millions de dollars pour la Russie — ce n'est rien; c'est même moins que rien. Si l'on pense qu'un investissement de quatre milliards de dollars au Canada n'est pas important, on comprend que ces chiffres ne représentent que des miettes.
Si vous deviez choisir, au meilleur de vos connaissances, le moyen le plus rapide, pour le Canada, de profiter de l'investissement étranger direct, que choisiriez-vous? Qu'est-ce qui permettrait au Canada de profiter le plus directement possible de l'investissement étrange direct? Quel est notre objectif? Où allons-nous? Que faisons-nous? Dites-nous, à partir des statistiques que vous possédez, où se situe la cible, où nous devrions envoyer nos flèches?
Le président : Je veux être certain de comprendre : vous demandez à M. O'Hagan d'interpréter ses chiffres.
Le sénateur Grafstein : Leur vie tourne autour des chiffres. Les chiffres sont utiles; ils sont très intuitifs. Cependant, ce que je dis, c'est : voilà des chiffres, mais que devons-nous faire avec ces chiffres? Ils me donnent à penser que la situation est désastreuse. Comment pouvons-nous la rendre positive? Comment pouvons-nous tirer profit le plus rapidement possible de l'investissement direct?
J'ai quelques idées, mais j'aimerais connaître votre point de vue. Nous parlerons du commerce des services. Je m'adresse à vous, monsieur O'Hagan, parce que l'information que vous fournissez est intéressante.
M. O'Hagan : C'est une question difficile, d'une certaine façon. J'aimerais revenir à ce que vous avez dit pour commencer, au sujet du Canada qui est, ou qui n'est pas, une nation commerçante. Cela dépend du point de vue. Si on observe la répartition géographique, on peut dire, seulement à partir des chiffres qui vous ont été présentés aujourd'hui concernant la Russie, l'Inde et la Chine, qu'il y a quelque chose à faire.
Si on considère le commerce par rapport au produit intérieur brut canadien, on voit son importance.
Vous voulez savoir de quelle façon nous pouvons tirer davantage profit de la situation et de quelle façon nous pouvons garantir une meilleure répartition géographique du commerce — de quelle façon nous pouvons en avoir plus pour notre argent, en fait.
Le sénateur Grafstein : Laissez-moi vous expliquer pourquoi j'en suis arrivé à cette conclusion. Les chiffres concernant le commerce entre le Canada et les États-Unis sont fantastiques; on parle de 1,5 milliard de dollars par jour. Cependant, si on examine ces chiffres, on découvre que le Canada a un énorme excédent commercial avec les États- Unis en ce qui concerne ses exportations de pétrole, de gaz, d'hydro-électricité et les combustibles nucléaires. Pour ce qui est du compte des marchandises et du compte des services, les chiffres pour le Canada sont presque stables mais connaissent une baisse. Ce n'est pas là l'image d'une nation commerçante. Une nation commerçante ne vend pas ses produits de base. Une nation commerçante fait le commerce des marchandises et des services. Je ne dis pas que les produits de base ne sont pas importants, mais, pour moi, le commerce suppose que l'on fabrique quelque chose, qu'on le vend et qu'on fait un profit.
M. O'Hagan : Je vais aborder la question des services dans une minute, puisque vous la soulevez. Vous avez parlé de l'importance des secteurs de compétence géographique, et vous avez mentionné l'Amérique du Sud. Si on étudie la question de l'Amérique du Sud, on découvrira sûrement qu'il s'agit, actuellement, d'une région très importante en ce qui concerne l'investissement direct. Le Brésil est maintenant dans les dix pays qui investissent le plus directement au Canada et l'un des dix pays dans lesquels le Canada fait le plus d'investissements directs à l'étranger, ce qui est une importante amélioration par rapport à il y a quelques années seulement.
L'une des constatations que l'on peut faire à ce sujet, c'est que le Canada a commencé à faire des affaires avec le Brésil un peu avant de commencer à faire des affaires avec la Russie, l'Inde et la Chine. Compte tenu de la rapidité de la croissance en Russie, en Inde, et particulièrement en Chine, le Canada pourrait très bien, d'ici deux ou trois ans, occuper une position enviable en matière d'investissements directs dans ces pays, ce qui signifie que le commerce des sociétés affiliées étrangères et le commerce des services avec ces pays seraient probablement beaucoup plus importants.
Ce n'est pas à moi de vous dire où investir pour obtenir le meilleur rendement possible. Je peux vous dire où le Canada semble générer de la croissance. À coup sûr, compte tenu des taux actuels de croissance, la Chine et les deux autres pays pourraient devenir des partenaires commerciaux plutôt importants dans un avenir assez proche si ces taux de croissance se maintiennent.
Vous avez parlé des services. Vous avez raison : le Canada réussit assez bien en ce qui concerne les marchandises. En ce qui concerne les services, le Canada est au même niveau que les États-Unis. Cela s'explique entre autres parce que, si vous vous souvenez de la répartition que je vous ai donnée, la plupart des services exportés sont des services scientifiques professionnels — dominés par les droits et commissions —, des services informatiques, et cetera. Les États-Unis, tout comme le Canada, disposent d'un important capital de connaissance. Comme vous pouvez l'imaginer, les deux pays se spécialisent quand il est question du commerce entre eux. Les États-Unis nous envoient peut-être plus d'ingénieurs, et nous leur fournissons peut-être plus de services informatiques — c'est probablement l'inverse. Quoi qu'il en soit, vous pouvez supposer que c'est ce qui se passe dans le cadre de cette relation particulière.
En ce qui concerne les économies émergentes, j'ai dit, je crois, que le Canada possédait un excédent en ce qui concerne le commerce des services avec la Russie, l'Inde et la Chine. C'est dans ces pays que nous pouvons fournir plus de services en fonction de notre capital de connaissance. C'est probablement dans ces pays que le commerce des services du Canada connaîtra la plus grande croissance dans l'avenir.
Le sénateur Grafstein : Votre réponse est éclairante. J'aimerais maintenant que nous abordions la question des services et que vous nous expliquiez de quelle façon votre analyse des marchandises et des services s'applique à la chaîne d'approvisionnement. À mon avis, il s'agit d'un élément déterminant pour le Canada. Autrement dit, la façon la plus rapide d'accélérer la croissance du Canada est d'examiner les chaînes d'approvisionnement actuelles et de trouver des façons d'en diminuer le coût de façon à en accroître la valeur — obtenir des intrants pour moins cher afin d'accroître le taux de rendement.
Encore une fois, si j'observe la situation d'un point de vue canado-américain, je constate que la croissance des chaînes d'approvisionnement est attribuable essentiellement non pas à des entreprises canadiennes, mais bien à des entreprises étrangères présentes au Canada et qui disposent de chaînes d'approvisionnement à l'interne. Comment pouvons-nous nous libérer de ce modèle et inciter, d'une façon ou d'une autre, les entreprises canadiennes à mettre sur pied des modèles semblables au sein d'autres marchés?
Si la chaîne d'approvisionnement interne est celle qui procure le plus important taux de rendement — la fabrication et les intrants, si vous voyez ce que je veux dire —, pourquoi les entreprises canadiennes ne réussissent-elles pas à reproduire ce modèle, à une ou deux exceptions près? Il y a Research In Motion, RIM, le créateur du BlackBerry, qui fait un travail exceptionnel, de même que Magna International Inc. Cependant, mis à part ces deux ou trois entreprises, il ne se passe vraiment pas grand-chose. C'est un désastre. Aidez-nous : dans quelle direction devrions-nous orienter notre rapport?
M. O'Hagan : Les chaînes d'approvisionnement constituent un sujet très complexe. Dans ma déclaration d'ouverture, j'ai mentionné qu'il s'agissait d'un secteur sur lequel nous ne possédons pas, pour l'instant, beaucoup de renseignements. Nous avons effectué une enquête sur la valeur globale des chaînes d'approvisionnement, mais nous n'avons pas encore les résultats de cette enquête. Nous les aurons bientôt. Nous savons cependant que l'enquête n'a pas permis de recueillir beaucoup de renseignements de nature quantitative, mais elle a permis de recueillir une assez grande quantité de renseignements qualitatifs, ce qui pourrait nous aider à réorienter notre travail concernant certaines de nos enquêtes et ce qui devrait nous aider à interpréter certaines données d'entrée.
Le sujet est complexe, essentiellement parce que nous ne possédons pas beaucoup de données nous permettant de régler cette question pour l'instant.
Le sénateur Grafstein : Vous pourriez prendre l'exemple de la Banque fédérale de réserve de Chicago. J'ai toujours été étonné de constater que l'un des plus importants créateurs d'emplois du Canada, ou de ma province de l'Ontario, est, visiblement, l'Accord canado-américain sur les produits de l'industrie automobile, que l'on appelle souvent le Pacte de l'automobile, et que nous ne comprenons pas encore. Nous ne comprenons toujours pas les chaînes d'approvisionnement dans le cadre du Pacte de l'automobile. Personne n'a fait d'étude approfondie sur les chaînes d'approvisionnement en Amérique du Nord puisque cela fait concurrence à Toyota, parce que Toyota explique sa présence ici par de faux prétextes. Ils ne font pas tout ce qu'ils prétendent faire au Canada.
Avez-vous envisagé cet aspect? Il paraît que la Réserve fédérale fait une étude selon laquelle la chaîne d'approvisionnement, en Amérique du Nord, est beaucoup plus complexe et importante d'un bout à l'autre du Canada et dans les États-Unis du centre que ce que nous pensions.
M. O'Hagan : Je ne me suis pas penché sur cette question, mais j'ai bien l'impression que mes collègues des statistiques du commerce et des entreprises ont probablement fait des recherches à ce sujet et ont probablement examiné les résultats américains en ce qui concerne notre propre enquête sur la valeur globale des chaînes d'approvisionnement. Malheureusement, ces résultats n'ont été publiés nulle part. J'ai tenté d'obtenir de l'information avant de venir ici pour savoir si nous pouvions apporter certaines explications.
Le sénateur Grafstein : Tout ce que vous pouvez nous dire pourrait nous être utile. Nous tentons d'établir les grandes lignes des recommandations que nous pourrions faire aux gouvernements et aux entreprises pour favoriser une croissance plus rapide et plus rentable.
Le président : Si vous pensez que certaines personnes, dans un autre service, pourraient apporter un éclairage intéressant sur cette question, vous pouvez nous le dire. Nous pourrions les inviter à venir devant nous. Cependant, je suis d'accord avec le sénateur Grafstein : si vous possédez des renseignements, ou si vous avez accès à certains renseignements, qui permettraient de boucler la boucle, nous aimerions beaucoup que vous nous en fassiez part. En fait, ces deux choses seraient très utiles.
Monsieur Kuntz, avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?
M. Kuntz : J'aimerais revenir sur le dernier point. Le travail effectué au sujet de la valeur globale des chaînes d'approvisionnement est fait en collaboration avec Industrie Canada et avec le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, le MAECI. Je crois qu'il s'agit du bureau de l'économiste en chef au MAECI, et je crois qu'un de ses représentants devrait venir vous parler la semaine prochaine.
Le sénateur Grafstein : Ils s'occupent aussi de ce problème?
M. Kuntz : Oui, ils s'en occupent, et ils nous en ont parlé.
Le sénateur Grafstein : Ce que je me demande, c'est à quel point leurs responsables du commerce peuvent être efficients, et de quoi ils devraient s'occuper quand ils sont à l'étranger?
M. Kuntz : Oui, mais nous en sommes encore au début du processus. Nous en sommes encore à tenter de déterminer le type de renseignements que nous devrions recueillir. Le questionnaire qu'il a mentionné est un projet pilote; ce n'est pas un outil que nous utiliserons de façon régulière. C'était seulement un essai qui visait à nous permettre de savoir ce que nous pouvions trouver.
Il s'agirait maintenant de trier les données pour faire ressortir les renseignements utiles. Nous pourrions ensuite rebâtir le questionnaire sur une base plus solide afin d'en faire un outil régulier. Il y a toutefois des problèmes de financement et de méthodologie.
Le président : On vient tout juste de me dire que l'économiste en chef du commerce international viendrait s'adresser au comité le 27 mai. Sénateur Grafstein, essayez de retenir vos questions pertinentes afin de les poser directement à cette personne.
Le sénateur Downe : Je suis d'accord avec les autres personnes présentes, qui ont dit que le commerce avec ces économies émergentes était peu important par rapport au commerce avec d'autres pays. Où se situeraient les exportations et les importations du Canada sur une liste des dix principaux partenaires commerciaux de ces pays? Tout le monde sait que les États-Unis sont en bonne position. Vous avez parlé du Brésil. Si vous ne connaissez pas ces renseignements, pourriez-vous nous les envoyer? Votre collègue les a peut-être : je le vois qui compulse ses documents.
M. O'Hagan : Je n'ai pas ce renseignement concernant les services, mais nous pouvons vous le fournir facilement. Nous pouvons vous fournir les dix principaux partenaires.
Le sénateur Downe : J'aimerais aussi savoir, si le Canada ne fait pas partie des dix principaux partenaires, où il se situe sur le plan des exportations et des importations en ce qui concerne les trois pays qui nous préoccupent.
Le président : Vous pourriez peut-être nous fournir plutôt une liste des 20 principaux partenaires. Je crois que cela nous serait plus utile et nous permettrait de connaître notre position dans le monde.
Le sénateur Downe : Ce que je veux savoir, monsieur le président — et, visiblement, vous voulez le savoir vous aussi —, c'est à quel point ces trois pays se trouvent loin sur la liste. Nous avons appris, grâce à certains témoignages, que d'autres pays, comme l'Australie et, dans une moindre mesure, la Nouvelle-Zélande, ont fait beaucoup de progrès en ce qui concerne la pénétration de ces marchés et de ces économies sur de nombreux plans — pas seulement sur le plan économique, mais aussi sur le plan scolaire, en formant des étudiants.
Les deux dernières fois que je me suis rendu en Chine, j'ai rencontré un Chinois qui parlait avec un accent australien, ce qui est plutôt étonnant. Cependant, quand vous apprenez que ce pays forme un grand nombre d'étudiants par rapport au Canada, vous voyez bien qu'il y a un écart, et pas seulement sur le plan économique. J'aimerais avoir ces données, quand vous les aurez.
Je crois que votre collègue a quelque chose à dire.
M. Kuntz : En fait, je n'ai pas le classement des différents pays, mais j'ai un graphique que mes collègues ont fait pour moi et qui illustre la distribution des importations chinoises et leur pays d'origine.
Si nous examinons la situation du point de vue des pays industrialisés et des pays en développement, nous constatons que, à partir de 2000, les importations chinoises proviennent à peu près à parts égales de pays industrialisés et de pays en développement. Cependant, en 2006, nous constatons que la part des pays en développement a augmenté, aux dépens des pays industrialisés.
En un sens, cela n'est pas tout à fait étonnant. En général, les pays font des affaires avec les pays voisins ou avec des pays qui se trouvent relativement près d'eux. Je pense, par exemple, qu'on assistera à une importante augmentation du commerce entre l'Inde et la Chine, qui supplantera tout ce qui a pu avoir lieu entre le Canada et la Chine ou le Canada et l'Inde.
Nous vous fournirons tout de même ces classements relatifs. Il s'agit simplement de s'adresser au Fonds monétaire international, le FMI, ou aux Nations Unies pour obtenir les statistiques sur les importations et les exportations de la Chine, de l'Inde et de la Russie.
Le sénateur Grafstein : Cela nous aiderait beaucoup si vous pouviez nous fournir la nature et le type d'importations à valeur ajoutée que font la Chine, la Russie et l'Inde. S'agit-il d'équipement? S'agit-il d'acier? De quoi ont-ils besoin, mis à part des produits de base? Nous sommes au courant de la situation en ce qui concerne les produits de base, mais nous aimerions pouvoir avoir une idée des chaînes d'approvisionnement et des produits que nous pouvons fabriquer. De tels renseignements, si vous pouviez nous les fournir, seraient très utiles.
Le sénateur Downe : Ce serait très utile, c'est vrai. Visiblement, ces économies émergentes ont diverses possibilités.
J'ai remarqué, aujourd'hui, un reportage du Financial Times au sujet de la République démocratique du Congo, qui aurait conclu un accord de neuf milliards de dollars avec la Chine pour que les Chinois construisent des routes. Mon collègue, le sénateur Mahovlich, aimerait en savoir plus sur ces routes. Les Chinois fournissent à la République démocratique du Congo l'infrastructure dont elle a besoin pour pouvoir accéder à un certain nombre de ses produits de base. Ils magasinent à l'échelle de la planète. J'entends de plus en plus de témoignages, particulièrement au sujet des Chinois, qui seraient à l'écart par rapport à d'autres pays, et je me préoccupe d'un manque d'engagement à bien des niveaux.
Pour revenir à la question qui a été posée plus tôt par le sénateur Stollery, concernant les données, comparez-vous les données du pays et les importations du Canada à vos données sur les exportations? Je sais que vous utilisez les données du pays et les données sur les importations pour les États-Unis, mais comparez-vous aussi les chiffres de la Chine, de la Russie et de l'Inde avec vos chiffres? Y a-t-il un écart important entre les deux?
M. Kuntz : Je vous ai présenté le rapprochement que nous avons fait. Il se trouve aux pages 7 et 8, je crois. Nous effectuons de tels rapprochements de façon périodique, mais pas de façon continue. Il s'agit d'exercices détaillés. Une partie de ces exercices vise à comprendre certains des écarts qui existent. Dans le cas du rapprochement Canada-Chine, nous avons essentiellement conclu que la principale source des écarts était le commerce indirect. Nous avons découvert qu'une bonne partie du commerce en direction ouest passait par Hong Kong. Quand les marchandises passaient par Hong Kong, elles subissaient une importante majoration de prix avant d'être exportées de nouveau vers la Chine. Si je ne me trompe pas, la majoration moyenne imposée par Hong Kong était d'environ 34 p. 100; en conséquence, quand la Chine consignait ces marchandises, il y avait un important écart entre la valeur des importations chinoises et celle des exportations canadiennes.
Le même phénomène se produisait aussi en direction est quand, en raison du commerce indirect, des marchandises passaient par les États-Unis avant d'arriver au Canada.
Le sénateur Downe : Pouvez-vous effectuer un rapprochement avec la Russie et avec l'Inde, aussi?
M. Kuntz : Nous ne l'avons pas encore fait avec l'Inde, mais nous avons entrepris l'exercice avec la Russie. Nous avons rencontré des représentants russes à quelques occasions l'an dernier, et le travail est en cours. Nous n'avons pas encore les résultats, et nous ne nous sommes pas encore véritablement entendus au sujet de tous les rajustements que nous devrons apporter si nous voulons obtenir des totaux rapprochés concernant le commerce avec la Russie.
Le sénateur Downe : Pourquoi faisons-nous affaire avec Hong Kong? Je sais que les Chinois considèrent qu'il s'agit d'une zone de développement à part — je pense que c'est comme ça qu'ils l'appellent — mais Hong Kong fait encore partie de la Chine. Pourquoi séparons-nous Hong Kong de la Chine?
M. Kuntz : C'est à cause des directives que nous recevons des Nations Unies. Je crois que la Chine a demandé aux Nations Unies que ces territoires soient traités comme des territoires économiques distincts aux fins des statistiques sur le commerce. C'est donc de cette façon que nous avons consigné les données. Nous pourrions les regrouper avec celles de la Chine, mais nous aurions tout de même des problèmes de dénombrement. Nous nous retrouverions à compter en double des marchandises canadiennes qui sont importées à Hong Kong, puis importées par la Chine, avant d'être exportées de nouveau. Nous serions donc quand même aux prises avec un problème de comptage en double.
Le président : Vous affirmé que la Chine a demandé aux Nations Unies que Hong Kong soit traité comme un territoire à part aux fins des statistiques.
M. Kuntz : C'est ce que j'ai compris, oui.
Le président : Le sénateur Stollery a mentionné Seattle. Les données qui figurent à la page 7 de votre exposé répondent probablement en grande partie à sa question. Vous pourriez peut-être prendre quelques minutes pour parler de ce tableau plus en détail. Il s'agit d'un élément intéressant de votre exposé.
M. Kuntz : C'est vrai que j'en ai parlé seulement brièvement. Dans le haut, à gauche, se trouve le commerce en direction ouest. La première colonne désigne les exportations canadiennes, et la deuxième colonne, les importations chinoises. Nous présentons d'abord le chiffre publié par le Canada, qui était, en 2002, d'environ quatre milliards de dollars. Nous apportons ensuite quelques corrections à ce chiffre. Nous lui ajoutons les exportations qui sont passées indirectement par Hong Kong. Ces chiffres ne désignent pas des exportations canadiennes. En fait, aucune déclaration d'exportation n'a été remplie pour dire que ces marchandises étaient envoyées en Chine ou, si une déclaration d'exportation a été remplie, elle indiquait que les marchandises étaient envoyées à Hong Kong, mais qu'on n'en connaissait pas encore la destination finale.
Un redressement est aussi effectué pour les marchandises qui ont été envoyées indirectement par les États-Unis pendant cette période. Il y a aussi un redressement pour les marchandises envoyées indirectement par d'autres pays. Elles ont pu passer par l'Europe ou par n'importe où ailleurs pour, finalement, arriver en Chine. Il s'agit d'un redressement beaucoup moins important. La plupart du commerce indirect se fait par Hong Kong. Une partie passe par les États-Unis, mais la plupart passent par Hong Kong, et une petite quantité, par d'autres pays.
Si vous allez au bas de cette colonne, vous voyez un montant que nous soustrayons. Il s'agit du total des exportations que nous avons publiées et que nous appelons les réexportations. Il s'agit de marchandises qui sont passées par le Canada. Elles ne sont pas d'origine canadienne. Les marchandises importées au Canada ont été dédouanées. De toute évidence, elles font ensuite partie des ressources matérielles accessibles dans le pays, puis elles sont réexportées, par la suite, dans la même forme qu'au moment de leur entrée dans le pays. On parle d'un redressement d'environ 490 millions de dollars.
Le chiffre inscrit dans la rangée « résiduel » désigne ce qui reste une fois que nous mettons de côté les mystères que nous avons solutionnés, et ceux pour lesquels nous n'avons pas vraiment trouvé d'explications ou sur lesquels nous n'avons pas pu enquêter suffisamment pour en arriver à un chiffre exact. Dans ce cas, il s'agit d'un montant de 720 millions de dollars. Cela nous donne une valeur rapprochée d'environ 5,6 milliards de dollars en ce qui concerne les exportations canadiennes en Chine pendant cette année-là.
Le président : Quel est le chiffre qui nous est habituellement fourni, quand on nous fournit des statistiques? Le total qui figure dans les statistiques qui sont diffusées est-il le total publié ou le total rapproché?
M. Kuntz : C'est habituellement le total publié, qui se trouve dans le haut de la page. Cela signifie, dans ce cas, que les statistiques pour 2002 mentionneraient un total de 4,1 milliards de dollars.
Le président : Cela serait vrai pour toutes les statistiques?
M. Kuntz : Oui.
Le président : À quel moment obtenons-nous les totaux corrigés?
M. Kuntz : Ils sont fournis dans une étude de rapprochement, que nous publions à la suite de nos travaux. Nous publions les résultats, et ils apparaissent dans les comptes rendus quotidiens. Dans ce cas précis, nous avons effectué une étude analytique qui mentionnait la méthodologie employée et les divers redressements dont nous avons discuté avec les Chinois.
Le président : Moi aussi, je veux poser le même genre de questions. Ce n'est pas que 10 p. 100; vous parlez d'une différence de 40 p. 100. C'est une information que nous devrions garder à l'esprit.
Le sénateur Downe : À ce sujet-là, pour la même période, les Chinois auront des données dans le cas de la Chine et de Hong Kong. Il n'y a presque pas d'écart — est-ce là ce que vous nous dites? Leurs chiffres à eux seraient semblables à ces chiffres-là?
M. Kuntz : En fait, leurs chiffres se trouvent dans la colonne suivante, celle des importations chinoises.
Le sénateur Downe : Ces chiffres-là sont les données d'importation de la Chine?
M. Kuntz : Oui, ils proviennent directement des données d'importation de la Chine. Ça commence à plus ou moins 5,7 milliards de dollars. C'est l'estimation officielle des importations provenant du Canada pour 2002 selon les Chinois. Plus bas, dans la même colonne, il y a une majoration des prix de l'ordre de 95 millions de dollars pour les marchandises qui transitent par Hong Kong.
Le sénateur Downe : Je ne comprends pas. Le chiffre en haut provient-il de la Chine et de Hong Kong?
M. Kuntz : Non, c'est de la Chine. Ce sont des marchandises que la Chine a enregistrées comme importations canadiennes. La somme s'élève à 5,7 milliards de dollars. Cela compte certaines marchandises qui sont allées indirectement là-bas — du Canada à Hong Kong et puis en Chine. Pour les marchandises arrivées là-bas indirectement, il y aurait une majoration d'environ 95 millions de dollars que nous avons soustraite du total global signalé par la Chine. Nous en sommes aux 5,6 milliards de dollars. Par la suite, il y a un redressement qui est effectué, ce qui donne 171 millions de dollars dans ce cas. Il y a également une donnée de contrôle.
Le sénateur Downe : Où sont les chiffres de Hong Kong?
M. Kuntz : Ils ne se trouvent pas sur cette page-ci. C'est la même chose dans le cas du Canada, nous inscrivons dans les dossiers un pays de provenance et un pays d'origine. Dans le cas des marchandises qui vont de la Chine au Canada, dans la mesure où elles transitent par les États-Unis — c'est-à-dire qu'elles y sont débarquées — et qu'elles sont réacheminées au Canada, nous enregistrons les États-Unis comme pays de provenance et la Chine comme pays d'origine. Ces marchandises ne figureraient pas dans les exportations chinoises; elles figureraient seulement dans les importations canadiennes. C'est la même idée qui s'applique.
Le sénateur Stollery : J'ai une question supplémentaire à poser.
Le sénateur Downe : J'ai une dernière observation à formuler. Mon problème, c'est que nos chiffres et les chiffres chinois sur la ligne du haut diffèrent sensiblement. Au bout du compte, la comptabilisation qui est faite est très commode dans le sens où les chiffres concordent, mais, au départ, il y a un écart qui représente une somme importante d'argent entre les statistiques officielles des Chinois pour les importations du Canada et les statistiques que nous enregistrons nous-mêmes pour les exportations.
M. Kuntz : C'est cela. Les chiffres sont établis à partir des données de l'ASFC. Ce sont les données qui nous ont été transmises directement par l'ASFC, et nous avons essayé de redresser au mieux la balance des paiements.
Pour ce qui est de la base de données de l'ASFC, à certains égards, nous en sommes les gardiens, mais nous exerçons une emprise limitée sur ce qui s'y trouve. Il appartient à l'Agence des services frontaliers du Canada de réunir les données en question, et nous en sommes les destinataires.
À partir de ces données-là, nous produisons des statistiques avec lesquelles nous pouvons alimenter le système des comptes nationaux et de la balance des paiements, et nous faisons ce travail au moyen de données regroupées. Quant aux statistiques que nous calculons à propos de la balance des paiements, il est question essentiellement de six grandes zones commerciales et d'environ 60 marchandises, par rapport aux 19 000 et aux 6 500 que j'ai mentionnées plus tôt.
Le sénateur Downe : Je comprends. À titre d'information, il semble y avoir un écart encore plus grand du côté de la « direction est ».
Le sénateur Stollery : Je sais que le sénateur Mahovlich veut poser une question, mais, à titre de question supplémentaire, je sais que le rapprochement se rapporte à la balance des paiements, mais est-ce que ce sont là des données brutes? Vous prenez la quantité brute d'importations en Chine, ce que nous disons envoyer là-bas et ce qu'ils prétendent recevoir de notre part, et vous faites un rapprochement. Quelle est la valeur réelle de l'exercice du point de vue de nos responsables du commerce?
Les responsables du commerce, présume-t-on, s'intéressent davantage aux exportations particulières et aux produits particuliers. Autrement dit, dans la documentation très intéressante et très instructive que vous nous avez remise, il y a la balance des paiements. Voilà une question importante.
M. Kuntz : Il s'agit ici de statistiques commerciales à base douanière.
Le sénateur Stollery : D'accord. Lorsque vous faites le rapprochement entre les données d'importation chinoises et nos données d'exportation, le résultat équivaut-il à des statistiques globales ou à des statistiques sur des exportations particulières?
M. Kuntz : Ce sont les données brutes que les Chinois auront déclarées officiellement et que le Canada aura déclarées officiellement.
Le sénateur Stollery : Elles ne révèlent donc pas très bien ce que représentent nos exportations particulières, n'est-ce pas? Le problème dont le comité a eu connaissance à propos des exportations de marchandises transitant par Seattle — je ne veux pas compliquer l'affaire... Le rapprochement ne le règle pas. En vérité, le rapprochement fait voir la balance des paiements. C'est une donnée globale. Je vais m'éloigner de la question de la balance des paiements, mais je crois que vous avez affirmé que ce sont là des statistiques globales.
M. Kuntz : Oui, elles le sont.
Le sénateur Stollery : Cela ne nous dit rien au sujet d'un produit ou d'une marchandise en particulier, à savoir par exemple si c'est un produit transformé ou une matière première. Ça ne me paraît pas régler la question, mais merci quand même.
M. Kuntz : Lorsque nous faisons un rapprochement, nous prenons pour point de départ les données regroupées que nous recevons des pays en rapport avec le commerce. Puis, nous analysons les données pour essayer de dégager les zones à problème. Dans certains cas, il peut s'agir de données commerciales globales en ce qui concerne les flux commerciaux indirects, avec la Chine, dans le cas qui nous occupe. Il peut s'agir d'une marchandise. Si, par exemple, les exportations font voir un grand écart, qui fait que nous déclarons avoir exporté du porc et que les Chinois déclarent avoir importé du porc, nous nous penchons sur la question. Où est la source de l'erreur? Est-il possible de commencer à analyser le problème pour mieux comprendre? Notre analyse nous porte jusqu'à la marchandise particulière, mais nous ne publions pas toujours les informations qu'elle génère selon un tel degré de détail.
Le rapprochement est un exercice très difficile. Il y a au départ deux perspectives différentes. Nous essayons de trouver un terrain d'entente et d'éliminer les sources d'erreur entre les statistiques officielles des deux pays. Nous nous adonnons à un exercice d'analyse très détaillé pour y arriver, ce qui peut nous occuper pendant longtemps. D'ordinaire, les exercices du genre prennent un an, un an et demi, deux ans.
Le sénateur Stollery : La réponse, c'est peut-être que le comité devrait entendre le témoignage de l'Agence des services frontaliers du Canada, car c'est elle qui semble noter l'information en question et que c'est dans ses formulaires que vous prenez cette information.
Le président : Nous envisageons cela. Aujourd'hui, nous fréquentons un monde où la chaîne mondiale de valeur existe. Tout cela est-il fonction de la chaîne mondiale de valeur et du commerce intégré que nous connaissons aujourd'hui où les éléments vont finir par converger, sinon est-ce vraiment d'un point d'entrée qu'il s'agit?
M. Kuntz : Je citerai peut-être l'exemple donné par Danielle Goldfarb à propos de l'iPod, anecdote qui fait voir la complexité du commerce rural de nos jours. L'iPod comporte des pièces fabriquées au Japon, d'autres en Chine, d'autres encore aux États-Unis. Dans nos dossiers officiels sur le commerce, nous ne le notons pas de cette façon. Les systèmes à base douanière n'ont jamais été conçus pour enregistrer les échanges commerciaux dans le contexte où ce sont des chaînes de valeur qui s'appliquent et où il s'agit de déterminer d'où viennent tous les petits composants et les petits trucs qui entrent dans la composition des produits.
Nous essayons d'attribuer un pays d'origine à un produit à partir de données sur la dernière transformation effectuée, c'est-à-dire l'endroit où la marchandise a été transformée de manière importante la dernière fois au point d'en devenir le produit que nous voyons aujourd'hui. Notre analyse ne nous permet pas de démonter la chaîne de valeur au point où nous pourrions savoir d'où viennent tous les petits trucs qui composent un produit.
C'est la notion de voie commerciale qui l'emporte. Aujourd'hui, ça se complexifie, et il y a peut-être davantage de commerce indirect qu'il n'y en a eu dans l'histoire.
Le sénateur Mahovlich : La statistique a toujours été mon affaire. Un grand Américain — je ne sais plus si c'était Casey Stengel ou Vince Lombardi — a déjà affirmé que la statistique est bonne pour les perdants.
J'ai appris par le Financial Times que la République démocratique du Congo et la Chine ont conclu une entente d'une valeur de 9,5 milliards de dollars. Je sais que le sénateur Grafstein y verrait un assez bon marché pour la Chine. Je ne savais pas que les Chinois construisaient des routes, mais ils vont construire des routes au Congo. Ils ont conclu une entente à ce sujet, ce qui m'a fait penser que les Canadiens construisent des routes. Nous avons une bonne expertise dans le domaine.
Il y a eu quelques catastrophes : un tremblement de terre en Chine et un gros ouragan au Myanmar. Allons-nous envisager d'envoyer des experts quelconques en Chine dans le cadre d'un échange commercial quelconque? Avons- nous en place là-bas des représentants pour voir si nous pouvons venir en aide aux gens? Je sais que ça ne transparaîtra pas dans les statistiques. On ne sait jamais à quel moment une catastrophe peut survenir.
M. Kuntz : Selon les lignes directrices de l'ONU, pour ce qui est de mesurer le commerce des marchandises, l'aide étrangère est censée y figurer. Il s'agit de savoir si, étant donné que la livraison du matériel sur les lieux se fait urgente, les documents sont bel et bien remplis. Quant au savoir si les procédures d'usage sont respectées, il faudrait regarder cela au cas par cas.
Quant à l'autre partie de la question, je ne sais pas si nous avons des représentants en place là-bas. C'est vraiment aux organismes d'aide de s'occuper de cela.
M. O'Hagan : Vous soulevez un point important, et je reviendrai à quelque chose que j'ai dit plus tôt. Le Canada possède un capital de savoir dans certains domaines. Je suppose qu'il y a là un potentiel. Malheureusement, en tant que statisticiens, nous ne pouvons nous prononcer sur cette question-là.
Le sénateur Mahovlich : Échangeons-nous des services avec la Chine? Je suis allé en Chine, c'était en 1988, je crois, et je faisais une visite de Beijing. Il y a une bonne part de la construction européenne qui se fait grâce à cette expertise-là, par exemple la construction d'hôtels. Je n'ai pas vu de Canadiens là-bas.
M. O'Hagan : Encore une fois, il faudrait regarder ce que les données montrent pour une époque particulière, en gardant à l'esprit le fait que l'échange des services avec la Chine en ce moment est assez modeste.
Pour revenir à votre exemple, il est possible que des services canadiens d'ingénierie et d'architecture soient exportés en Chine dans le cadre du projet congolais des Chinois. Il est tout à fait possible que les Chinois cherchent à profiter d'une expertise nord-américaine pour exécuter le contrat qu'ils viennent de conclure avec le Congo. Cela ressortirait dans nos données sur le commerce des services.
Le président : Vous parlez de flux, je crois, monsieur O'Hagan. Parlez-vous de flux d'investissements directs étrangers ou encore de flux de financement qui passent par le système bancaire et de créances à recevoir et à payer?
M. O'Hagan : Cette activité financière comporte trois composantes : les flux d'investissement direct, c'est-à-dire l'investissement interentreprises; les investissements en portefeuille, c'est-à-dire le commerce des valeurs mobilières; et les prêts et sorties de fonds que les entreprises transfèrent grâce au système bancaire. Nous mesurons cette activité-là dans le système bancaire lui-même plutôt que d'aller voir directement toutes les entreprises en questions et de leur demander quelles sont les sommes qu'elles ont déposées. Nous analysons ce qui se trouve dans le système bancaire pour dégager cette information.
Le président : Les gens vous donnent-ils volontiers l'information en question, sinon y a-t-il une loi qui les oblige à vous donner l'information?
M. O'Hagan : Comme c'est le cas pour toutes les enquêtes, il y a une loi qui régit nos programmes d'enquête à nous.
Le président : J'ai été surpris de vous entendre dire que vous notez les mouvements de trésorerie, mais c'est une bonne chose.
Quelqu'un a dit que vous achetiez des statistiques de l'ONU. Dites-moi ce qu'il en est.
M. Kuntz : Nous avons ce qui s'appelait auparavant la base de données sur le commerce mondial, devenue l'analyseur du commerce mondial. C'est un exercice auquel nous nous adonnons depuis un certain nombre d'années déjà. Essentiellement, les pays communiquent leurs statistiques en matière de commerce international des marchandises aux Nations Unies. Là, il y a une base de données dite Comtrade de l'ONU. Ça se trouve sur le site web de l'organisme. On peut en télécharger des bribes. Nous, nous achetons la base de données entière en un bloc. Sous la forme dont nous la recevons, il y a des différences à noter pour le commerce entre pays; par exemple, le Canada et la Chine, les États- Unis et la Chine, le Canada et l'Europe ou l'Europe et l'Asie. Il y a des écarts dans les données globales; le plus souvent, les importations mondiales sont plus importantes que les exportations mondiales. Cela est attribuable en partie à l'ajustement du fret que j'ai mentionné plus tôt, avec l'assurance et le fret qu'il y a.
Nous appliquons un algorithme conçu fin années 1970 début années 1980, qui passe en revue systématiquement les écarts en question et, par une série de techniques de programmation linéaire, propose un redressement correspondant à l'écart entre les importations déclarées du pays et les exportations déclarées de l'autre pays. Au bout du compte, cela donne une matrice du commerce mondial ayant bénéficié d'un rapprochement — pays par pays et marchandise par marchandise, vous voyez le genre d'exercice. C'est un produit que nous avons mis au point au fil des ans. Nous proposons ce service contre remboursement des frais. Le service sert surtout aux chercheurs qui se penchent sur les flux commerciaux. Ce sont des données assez générales pour ce qui est du degré d'approfondissement de l'analyse appliquée aux marchandises.
Le président : C'est intéressant. Pour ce qui est de la fiabilité des données, non pas tant les données que nous fournissons, mais les données qui nous proviennent de pays comme la Chine, l'Inde et la Russie, ces données-là vous inspirent-elles confiance?
M. Kuntz : Ça dépend probablement du pays dont on parle. Certains pays s'en tirent mieux que d'autres à cet exercice; certains pays appliquent un système statistique relativement plus raffiné, des procédures douanières relativement supérieures.
J'ai mentionné tout à l'heure le cas de l'Union européenne. Comme on s'est défait des contrôles à la frontière à l'intérieur de l'Union européenne, les statistiques commerciales à base douanière qui existaient auparavant sont perdues. Maintenant, on y recourt à des enquêtes. Cela nuit à la qualité des statistiques qu'on y établit sur les importations. Il faut voir de quel pays il s'agit et en cerner les caractéristiques.
M. O'Hagan : Du côté des services, nous croyons que les statistiques sont raisonnablement fiables. Nous procédons à une étude détaillée de la fiabilité de la balance des paiements en nous penchant sur les révisions que nous apportons dans le contexte plus vaste du remaniement de nos programmes d'enquête. Nous n'avons relevé aucune difficulté majeure en ce qui concerne la fiabilité, particulièrement en ce qui concerne le commerce des services.
Pour les répartitions géographiques, particulièrement dans le cas des économies émergentes, il est difficile de cerner la réalité, car il s'agit d'une activité nouvelle et qu'il y a un faible nombre d'entreprises qui sont de la partie au départ. Dans les économies émergentes, le taux de fiabilité est probablement un peu inférieur, mais c'est une question à laquelle nous travaillons en ce moment-même. Dans le contexte de notre remaniement en particulier, nous élargissons l'échantillon d'entreprise figurant dans notre enquête qui, auparavant, privilégiait l'entreprise de services. Or, nous savons que les entreprises productrices de biens sont nombreuses à proposer aussi des services. Par conséquent, nous allons élargir sensiblement le champ d'action de notre enquête — en adoptant une approche et une méthode plus scientifiques en ce qui concerne l'échantillonnage que nous effectuons. Selon nos prévisions, cela produira de bons résultats en ce qui concerne le commerce des services.
Nous n'entrevoyons pas de problèmes importants en ce qui concerne la fiabilité globale de l'exercice. Dans le cas de ces économies émergentes, la tâche sera peut-être un peu plus difficile.
Le président : Quelqu'un a parlé d'un groupe de travail qu'on est à mettre sur pied ou qui existe déjà, et qui se penche sur ces questions-là. Est-ce un groupe de travail mondial?
M. O'Hagan : L'Organisation de coopération et de développement économiques, l'OCDE, chapeaute un groupe de travail qui se penche sur la question des biens en cours de fabrication et sur la façon dont nous pourrions les compter en lieu et place de notre système des comptes nationaux et, par conséquent, de notre balance des paiements.
Le président : Y a-t-il une telle créature à l'Organisation mondiale du commerce, l'OMC?
M. Kuntz : Je sais qu'il existe, du côté du commerce des marchandises, quelques guides qui font voir la façon dont nous établissons les statistiques commerciales de manière générale. Le FMI utilise un guide intitulé le Manuel de la balance des paiements. Ce dernier a fait l'objet d'une révision récente qui comprend une disposition — M. O'Hagan en a parlé plus tôt — qui permet de prendre en considération les biens en cours de fabrication, pour les convertir du commerce des biens au commerce des services, pour cet élément-là. Il est question d'entreprises qui offrent en apparence des services de fabrication. Elles ne sont pas propriétaires des stocks. Une autre entreprise signe avec elles un contrat, leur fournit les stocks, puis elles transforment les biens et les renvoient au propriétaire des composantes. Elles ne sont jamais propriétaires en titre des stocks, et c'est de cela que nous parlons lorsque nous parlons des biens en cours de fabrication.
C'est cette façon de mesurer les statistiques commerciales qui caractérise la balance des paiements, mais l'ONU a lancé récemment un processus de consultation au sujet du manuel des statistiques à base douanière — que les Nations Unies préconisent plus ou moins, ce sont elles qui en sont l'auteur. Il s'agit de savoir comment prendre cette recommandation touchant la balance des paiements et l'appliquer aux statistiques commerciales à base douanière de manière à pouvoir établir la balance des paiements.
L'OMC participe aux travaux du groupe directeur chargé de la question, aux côtés du FMI, de l'ONU et de l'OCDE. Plusieurs organismes multinationaux font partie de ce groupe directeur. Sous l'égide de ces derniers, il y a un groupe de pays experts qui contribuent à la révision des guides en question. Par ailleurs, il y a des consultations mondiales sur la question. À partir des recommandations, on a mis au point un questionnaire que l'on envoie pour sonder l'opinion des gens sur la façon dont il faudrait modifier les concepts et les définitions pour tenir compte des phénomènes nouveaux, par exemple les chaînes de valeur mondiales et les biens en cours de fabrication et ainsi de suite.
Le président : Peter Berg, qui est économiste-recherchiste à la Blibiothèque du Parlement, souhaite obtenir une précision sur une question particulière.
Peter Berg, analyste, Service d'information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement : J'ai une question à poser à chacun d'entre vous.
Monsieur O'Hagan, ma question me ramène aux propos du sénateur Grafstein concernant notre piètre rendement du côté des investissements directs étrangers du Canada. Vous réalisez ces enquêtes pour déterminer où les entreprises canadiennes investissent à l'étranger — et nous croyons que les trois premiers sont les États-Unis, le Royaume-Uni et peut-être l'Irlande, qui comptent pour une grande part de notre investissement étranger. Or, votre graphique de la page 14 fait voir des investissements très modestes.
Vous publiez les statistiques en question, mais vérifiez-vous l'intention des enquêtes ainsi réalisées? Nous nous débattons avec la question de savoir exactement pourquoi les entreprises canadiennes n'investissent pas en Chine, en Inde et en Russie. Est-ce en raison du fait que les autres marchés, par exemple les États-Unis, le Royaume-Uni et l'Irlande sont plus sûrs ou est-ce tout simplement dû au fait que nous ne sommes pas aventureux sur le plan des affaires ou encore qu'il est très difficile de fonctionner dans ces marchés-là. Autrement dit, avez-vous creusé l'histoire qui se cache derrière les chiffres pour voir ce qui motive le phénomène, et non pas seulement les chiffres?
Monsieur Kuntz, pour donner suite à l'exemple du iPod que Danielle Goldfarb emploie dans son document, vérification faite, la valeur du produit s'établit à 299 $ US. Pour la moitié, cette valeur est américaine, pour une autre moitié, elle est japonaise, mais comme le produit est assemblé en Chine, les données officielles parlent d'une importation provenant de la Chine dans une proportion de 50 p. 100.
Dans ce cas particulier, d'un point de vue canadien, est-ce que ce serait déclaré strictement comme une importation de la Chine? Les cas du genre sont-ils nombreux et faut-il en conclure que le taux de croissance extraordinaire de nos importations de la Chine se rapporte non pas à des produits chinois, pas du tout, mais plutôt à des produits qui sont simplement assemblés en Chine, tandis que la majeure partie de la valeur provient d'ailleurs?
Nous faudrait-il regarder les données commerciales qui concernent strictement le Canada et l'Asie dans l'ensemble sans nous soucier tant de la relation entre le Canada et la Chine? Faut-il situer la question dans la perspective des échanges entre le Canada ou l'Amérique du Nord, plutôt que l'Asie, étant donné que tout est intégré?
M. O'Hagan : Même si nous affichons une certaine croissance dans ces économies émergentes, pourquoi nos chiffres sont-ils si modestes, selon nous? C'est une question qualitative. Lorsque nous réalisons une enquête, nous essayons d'éviter les questions qualitatives touchant la nature des affaires, car ce serait empiéter sur les affaires privées d'entreprises — c'est-à-dire la façon dont elles font leurs profits, ce qui n'est pas vraiment ce que nous essayons de mesurer. Nous nous intéressons à l'information quantitative.
À regarder l'investissement fait dans ces économies émergentes, le plus souvent, on voit qu'il est question des occasions perçues par l'entreprise. À ce moment-là, on constate donc que, de manière générale, il y a des types particuliers d'entreprises qui se concentrent dans des industries précises. C'est là que commence l'investissement direct, qui tient à l'avantage que l'industrie ou l'entreprise croit pouvoir obtenir pour avoir investi dans une économie émergente.
Cela dit, il est difficile pour moi de répondre à cette question. C'est une question qui est davantage qualitative que quantitative, dont vous pourriez chercher la réponse dans les rapports annuels des entreprises qui se trouvent sur ces marchés émergents; pour nous, il y a quelques difficultés à se prononcer là-dessus.
J'ai signalé que nous sommes en train de remanier nos enquêtes sur l'investissement direct étranger. Je ne crois pas que nous en arrivions au point où nous poserions des questions comme celle-là. Cependant, nous allons chercher à obtenir davantage d'informations géographiques et, à partir de là, nous allons peut-être pouvoir vous donner une meilleure idée de ce qui se passe, particulièrement si nous établissons une répartition industrie-géographie utile du fait d'une enquête remaniée. C'est que la participation à l'enquête est plus facile pour les entreprises en question. Nous n'allons pas être en mesure de répondre à la partie qualitative de la question, mais nous aurons peut-être davantage d'informations sur la partie quantitative.
Comme je l'ai déjà dit, pour ce qui est de publier des données, c'est la règle de la confidentialité qui nous empêche parfois de creuser plus loin. Si, du fait de notre remaniement, nous constations qu'il y a quatre ou cinq autres petites entreprises qui investissent dans l'une des économies émergentes en question, nous pourrions nous pencher sur la répartition industrielle, sur la répartition géographique, et en arriver à publier probablement de plus amples renseignements sur ces endroits-là.
Les statisticiens sont mal à l'aise à l'idée de dire pourquoi les entreprises fonctionnent d'une certaine façon.
M. Kuntz : Pour reprendre l'analogie de l'iPod, si tous les composants sont assemblés en Chine et que le produit est exporté par la suite, le pays d'origine est la Chine, car c'est là que le produit a pris forme. L'autre possibilité dans le cas de l'exemple de l'iPod, c'est de déconstruire le produit pour attribuer divers éléments à divers pays, mais jusqu'où aller en ce sens? On peut aller beaucoup plus loin que l'ont fait Danielle Goldfarb et ses collègues. Si le circuit comporte de l'or, vous pouvez vous demander d'où provient l'or. S'il y a du silicium, vous pouvez vous demander d'où provient le silicium. Jusqu'où les statisticiens sont-ils censés creuser les origines du produit? Ça finit par être une tâche impossible.
Il doit y avoir des règles d'origine à respecter. Dans le cas qui nous occupe, la règle consiste à citer le pays où le produit a subi sa dernière transformation.
Nous avons mentionné tout à l'heure l'idée, sur la scène internationale, de modifier la définition du commerce pour prendre en considération les biens en cours de fabrication. La Chine a déjà commencé à le faire et elle figure parmi les grands défenseurs de cette méthode, car cela a un effet marqué sur sa balance commerciale avec le reste du monde. Si elle parvient à démontrer que les biens entrent dans des zones de libre-échange, que les entreprises ne possèdent pas les stocks, qu'elles se contentent de les transformer pour les renvoyer aux propriétaires sous une forme assemblée, le tableau du commerce s'en trouve à être modifié de manière très prononcée.
La motivation du mouvement en faveur d'une telle méthode tient au fait que la façon de procéder que je viens de décrire est de plus en plus reconnue. Pouvons-nous adopter une telle façon de procéder au Canada? Il y a à ce sujet de sérieux obstacles. Nous savons que cela se fait quand même aussi au Canada. Je ne saurais vous dire qui le fait, mais nous savons que, au Canada, il y a des stocks qui arrivent sur les lieux d'une entreprise, mais qui n'appartiennent pas à l'entreprise. Cela est assimilé à une activité de fabrication. L'entreprise fournit un service de fabrication, et les biens touchés sont exportés de nouveau.
À l'heure actuelle, nous assimilons les composants en question à des importations, étant donné que, en appliquant la base douanière, nous essayons de mesurer l'évolution du stock de matériel du pays. Chaque fois qu'une marchandise entre au pays, elle est ajoutée au stock de matériel disponible; chaque fois qu'elle en sort, elle est soustraite du stock de matériel en question.
C'est une mutation fondamentale dans notre façon d'analyser le commerce. Si la méthode est adoptée, cela aura un effet très prononcé sur certaines des balances dans le monde, par exemple la balance commerciale de la Chine par rapport aux États-Unis, ou même la balance commerciale du Canada par rapport aux États-Unis.
Je ne sais pas si j'ai abordé vraiment les questions que vous avez soulevées.
Le président : Cela nous montre à quel point votre travail est complexe. C'est un petit peu ahurissant, et c'est une révélation pour ceux parmi nous qui ne travaillent pas en statistique.
Merci aux deux d'être venus. Votre témoignage a été très instructif. Je suis certain que nous allons nous adresser de nouveau à vous, de temps à autre, pour obtenir d'autres précisions. Nous espérons que vous allez être en mesure de vous joindre à nous.
La séance est levée.