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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Droits de la personne

Fascicule 3 - Témoignages du 3 mars 2008


OTTAWA, le lundi 3 mars 2008

Le Comité sénatorial permanent des droits de la personne, auquel a été renvoyé le projet de loi C-42, Loi modifiant la Loi sur les musées et d'autres lois en conséquence, se réunit aujourd'hui à 16 h 58 pour examiner le projet de loi.

Jessica Richardson, greffière du comité : Honorables sénateurs, je constate qu'il y a quorum. À titre de greffière du comité, il est de mon devoir de vous aviser de l'absence inévitable du président et du vice-président du comité. En conséquence, je dois présider à l'élection d'un président suppléant pour permettre au comité d'examiner le projet de loi C-42. Je suis prête à recevoir une motion en ce sens.

Le sénateur Cowan : Je propose que le sénateur Munson soit président suppléant du comité.

Mme Richardson : Le comité est-il d'accord?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Jim Munson (président suppléant) occupe le fauteuil.

Le président suppléant : J'ai le plaisir de vous présenter les témoins qui représentent Patrimoine canadien et qui sont venus nous parler du projet de loi C-42, Loi modifiant la Loi sur les musées et d'autres lois en conséquence.

Les témoins sont Lyn Elliot Sherwood, directrice exécutive, Groupe du patrimoine, Patrimoine canadien; Patrick O'Reilly, directeur, Stratégie de la mise en oeuvre, Musée canadien des droits de la personne, Groupe du patrimoine; et Rina Pantalony, conseillère juridique, Patrimoine canadien.

L'objet principal du projet de loi C-42 est de créer un nouveau musée national des droits de la personne. Il s'appellera le Musée canadien des droits de la personne. Aux termes des articles 1 à 4 du projet de loi, il sera constitué à titre de société d'État indépendante au moyen de modifications apportées à la Loi sur les musées.

Les autres dispositions du projet de loi modifient des lois liées au bon fonctionnement d'une société d'État. Par exemple, le projet de loi modifie la Loi sur la gestion des finances publiques pour assurer le financement fédéral, ainsi que la Loi sur l'accès à l'information et la Loi sur la protection des renseignements personnels pour exclure les documents du musée de l'application de ces lois. Le projet de loi ajoute le Musée canadien des droits de la personne à la liste des organismes fédéraux auxquels le fédéral verse des paiements en guise de remboursement d'impôts fonciers que ces organismes payent aux municipalités sur leurs biens immobiliers.

Sont également modifiées d'autres lois ayant trait à la rémunération et aux pensions d'employés de sociétés d'État.

Nous accueillons trois témoins. Qui voudrait commencer?

Lyn Elliot Sherwood, directrice exécutive, Groupe du patrimoine, Patrimoine canadien : Vous devez tous avoir copie de mon exposé. Je vais le passer en revue rapidement. Je crois que le président a bien résumé le projet de loi. Je vais répéter certains de ses propos et, à la discrétion de la présidence, je serai à votre disposition pour répondre, avec l'aide de mes collègues, à toute question que vous pourriez avoir.

En avril 2007, le gouvernement a annoncé qu'il avait conclu une entente pour créer le Musée canadien des droits de la personne, le MCDP, à titre de musée national. Cela veut dire qu'il serait constitué en société d'État fédérale aux termes de la Loi sur les musées. L'entente comprenait des engagements financiers et autres de la part de la province du Manitoba, de la ville de Winnipeg, de la société Friends of the Canadian Museum for Human Rights Inc. et de la Forks Renewal Corporation, engagements totalisant 165 millions de dollars pour la construction du musée, son aménagement et le terrain situé à La Fourche, à Winnipeg. Le gouvernement fédéral va verser 100 millions de dollars pour la construction et l'aménagement du Musée et va contribuer de manière permanente à son fonctionnement.

Les principes qui ont présidé aux négociations ayant débouché sur cette entente étaient très importants pour nous. Nous voulions qu'il soit clair que ce musée devait être une entreprise fédérale au même titre que tous les autres musées nationaux. Par conséquent, le premier principe est que sa création doit être approuvée par le Parlement. C'est bien sûr la raison pour laquelle nous sommes tous réunis ici aujourd'hui. Le deuxième principe est qu'il doit avoir le même statut et la même gouvernance que les quatre musées nationaux existants. J'insiste sur le fait que, même si les autres partenaires apportent des contributions extrêmement généreuses, il s'agit d'une entreprise fédérale et non pas d'un partenariat public-privé.

Le futur conseil d'administration de cette société d'État sera responsable des décisions relatives à la conception, à la programmation et au contenu du musée. Il pourra s'inspirer des travaux qui ont déjà été faits par la Fondation des amis du musée, mais il n'est nullement lié par ces travaux. Nous avons aussi établi en principe que le budget de construction et d'aménagement du musée, y compris l'élaboration des expositions, sera plafonné à 265 millions de dollars, ce qui représente le montant total engagé par toutes les parties.

Le projet de loi C-42 modifie la Loi sur les musées de 1990, qui a constitué les musées nationaux existants en tant que sociétés d'État. La loi contient trois composantes fondamentales : premièrement, les définitions et le préambule; deuxièmement, une composante selon laquelle chaque musée national est constitué à titre individuel; et troisièmement, une composante relative à la gouvernance applicable à tous les musées nationaux.

Le projet de loi C-42 modifie ces trois composantes de la loi de 1990. Les éléments qui ne sont pas modifiés s'appliqueront au MCDP au même titre qu'à tous les autres musées. Par exemple, le projet de loi C-42 ne fait pas mention de la nomination d'un conseil d'administration, parce que la Loi sur les musées de 1990 renferme déjà des dispositions traitant de la nomination des conseils d'administration. Comme le président l'a fait remarquer, il y a aussi des modifications corrélatives à d'autres lois, en conséquence de la création de cette nouvelle société d'État.

Je vais maintenant entrer dans les détails. Le changement apporté à la première composante, celle des définitions et du préambule, est proposé en vue de moderniser la définition du terme « matériel de musée » pour y inclure les objets et éléments d'information, quel qu'en soit le support. Cela reflète les changements technologiques qui ont pris place depuis que la loi a été adoptée en 1990.

Le projet de loi qui vise à créer le MCDP renferme des dispositions visant à donner un nom à la nouvelle société d'État et un nouvel article proposé qui en définit la mission proposée en ces termes :

Le Musée canadien des droits de la personne a pour mission d'explorer le thème des droits de la personne, en mettant un accent particulier sur le Canada, en vue d'accroître la compréhension du public à cet égard, de promouvoir le respect des autres et d'encourager la réflexion et le dialogue.

Ces dispositions définissent également la capacité et les pouvoirs du musée. Ces pouvoirs s'inspirent étroitement des pouvoirs qui sont actuellement conférés au Musée canadien des civilisations, lequel est également constitué dans cette partie de la Loi sur les musées.

Bien que le principal objectif du nouveau musée ne sera pas d'amasser une collection, le projet de loi lui donne le pouvoir de constituer une collection avec le temps. Ce pouvoir est établi dans la loi. Au départ, il ne possède pas de collection. Il devra établir des partenariats avec d'autres institutions au fur et à mesure qu'il élaborera ses expositions. Cependant, au fil des années, il pourra acquérir des objets en vue de réaliser sa mission.

Enfin, pour ce qui est des éléments qui traitent de la gouvernance, il y a un changement proposé à la loi existante en ce sens que le premier directeur de ce nouveau musée sera nommé par le gouverneur en conseil, sur recommandation de la ministre. La loi de 1990 précise que les directeurs de musée sont nommés par les conseils d'administration des musées, avec l'agrément du gouverneur en conseil. Il s'agit d'une mesure pragmatique conçue pour s'assurer qu'un futur conseil d'administration bénéficie immédiatement du soutien du personnel voulu. Le directeur du musée est chargé de combler les autres postes au musée. Le projet de loi stipule que les nominations ultérieures seront faites de la manière normale, c'est-à-dire par le conseil d'administration avec l'agrément du gouverneur en conseil. Le conseil d'administration peut choisir de reconduire à son poste le premier directeur, mais il n'est pas tenu de le faire.

Le projet de loi lie par ailleurs le musée aux dispositions des ententes signées en son nom avant sa création en tant que société d'État, c'est-à-dire avant l'adoption du projet de loi à l'étude. Par exemple, l'accord conclu avec la ville de Winnipeg et la Forks Renewal Corporation pour la cession du terrain, qui permet que le terrain soit transféré directement au musée. Le musée pourra donc bénéficier de cet accord.

L'un des éléments de cette entente est l'exigence que le musée, ou le Canada, soit représenté au comité constitué avec la Forks Renewal Corporation pour s'occuper d'affaires d'intérêt commun, par exemple l'enlèvement de la neige et des déchets. C'est donc une manière de négocier des ententes et de faire en sorte qu'elles s'appliquent à la nouvelle organisation.

Il y a ensuite une série de modifications corrélatives pour identifier le MCDP à titre d'entité fédérale à laquelle s'applique toute une série de lois fédérales, notamment la Loi sur l'accès à l'information, la Loi sur la gestion des finances publiques — à titre de société d'État, le musée sera assujetti à la partie X de la Loi sur la gestion des finances publiques —, la Loi sur les paiements versés en remplacement d'impôts, la Loi sur la protection des renseignements personnels, la Loi sur la rémunération du secteur public et la Loi sur la pension de la fonction publique. Le projet de loi stipule que ces dispositions entreront en vigueur à une date fixée par le gouverneur en conseil.

Je suis à la disposition des membres du comité pour répondre à leurs questions.

Le sénateur Cowan : À la page de votre exposé intitulée « Historique », on dit que 165 millions de dollars proviennent de sources diverses autres que le gouvernement fédéral et que 100 millions de dollars proviennent du gouvernement fédéral. À la page suivante, vous dites que le budget pour construire et aménager le musée, y compris l'élaboration des expositions, sera limité à 265 millions de dollars.

De tels projets ont tendance à subir des dépassements de coûts. Qui paiera la note si le coût dépasse 265 millions de dollars?

Mme Sherwood : Il incombe au conseil d'administration d'élaborer un plan de construction qui comprend une généreuse provision pour éventualités afin de ne pas dépasser le budget. Un certain nombre de mesures peuvent être prises durant la planification d'un projet de construction, la conception, le développement et l'estimation des coûts étant très détaillés avant même l'octroi de contrats de construction, ce qui permet à un conseil d'administration d'évaluer avec précision si le projet peut être réalisé à même le budget prévu.

Le sénateur Cowan : Cette somme de 265 millions de dollars comprend-elle une provision pour éventualités?

Mme Sherwood : Oui, c'est inclus.

Le sénateur Cowan : Ce n'est pas l'un de ces projets dans lesquels le gouvernement fédéral est appelé à assumer le coût excédentaire éventuel, en sus des 165 millions versés par d'autres parties, n'est-ce pas?

Mme Sherwood : Le budget total est de 265 millions de dollars. Vous avez mis le doigt sur un risque très réel dans la conjoncture actuelle, à savoir l'incidence de l'inflation sur les budgets de construction. Ce facteur a été pris en compte durant la planification et c'est l'une des raisons pour lesquelles il est urgent d'adopter ce projet de loi, parce qu'à l'heure actuelle, le pouvoir d'achat de cette somme de 265 millions de dollars subit une érosion à un rythme se situant entre 800 000 dollars et 1,5 million de dollars par mois.

Le sénateur Cowan : Je ne critique pas ce projet. Cependant, quelqu'un doit payer en bout de ligne.

Mme Sherwood : Le conseil d'administration sera responsable de réaliser ce projet dans les limites du budget et de prendre des décisions relatives à la conception de l'immeuble et au montant pour éventualités qui sera mis de côté pour permettre de mener à bien le projet sans dépasser le budget.

Le sénateur Cowan : Si cette mesure était approuvée très bientôt, prévoit-on que, dans la conjoncture actuelle, les 265 millions de dollars seraient suffisants, en comptant une généreuse provision pour éventualités?

Mme Sherwood : Oui, cette somme comprend une provision pour éventualités de 15 p. 100.

Le sénateur Oliver : Quel sera le coût de fonctionnement annuel de ce musée?

Mme Sherwood : Le plan de fonctionnement qui a été établi par la société Friends of the Canadian Museum for Human Rights Inc. devra être examiné et confirmé par le conseil d'administration qui sera nommé, mais c'est à partir de ce document que nous avons fait la planification de ce musée. Le coût de fonctionnement annuel de ce musée sera d'environ 22 millions de dollars.

Le sénateur Oliver : Cela comprend-il tous les salaires et les coûts d'entretien?

Mme Sherwood : Oui.

Le sénateur Oliver : La dotation en personnel de ce musée se fera-t-elle de manière semblable à celle des autres musées nationaux, par exemple le Musée des civilisations ici à Ottawa?

Mme Sherwood : Ce sera un employeur séparé relevant de la Loi sur la rémunération du secteur public.

Le sénateur Oliver : Combien d'employés prévoit-on à Winnipeg?

Mme Sherwood : Le plan d'activité qui est actuellement notre document de travail prévoit un budget pour rémunérer 143 employés à plein temps, ou ETP. Cela comprend les services aux visiteurs, la recherche, les programmes d'éducation et tous les autres éléments qui s'ajoutent à la gestion.

Le sénateur Oliver : Vous avez dit que le conseil d'administration est prévu dans la loi de 1990. Cependant, le gouvernement a-t-il une liste de gens qui feront partie du conseil et ceux-ci vont-ils représenter toutes les régions du Canada et tous les peuples du Canada — les Autochtones, les minorités visibles et les femmes? La diversité sera-t-elle assurée au conseil?

Mme Sherwood : Je ne suis pas en mesure de commenter les recommandations du gouvernement au gouverneur en conseil au sujet de la composition du conseil d'administration. Je m'attends toutefois à ce que l'on tienne compte de tous les éléments que vous avez énumérés. Le conseil n'a pas encore été nommé et ne pourra pas l'être avant l'entrée en vigueur de ce projet de loi.

Le sénateur Oliver : A-t-on quelqu'un en vue comme premier directeur?

Mme Sherwood : Un processus de recherche a été lancé.

Le sénateur Oliver : Qui dirige cette recherche?

Mme Sherwood : Nous discutons actuellement avec le Bureau du Conseil privé pour établir l'approche exacte qui sera retenue pour cette recherche.

Le sénateur Oliver : Il n'y a donc aucune recherche actuellement en cours.

Mme Sherwood : Nous avons un certain nombre de noms. Nous devons nous mettre d'accord avec le Bureau du Conseil privé sur le processus de recherche. Nous ne pouvons pas embaucher un directeur tant que le projet de loi ne sera pas adopté.

Le sénateur Stratton : Combien de membres prévoit-on pour le conseil d'administration?

Mme Sherwood : La Loi sur les musées prévoit un président, un vice-président et neuf autres membres, pour un total de onze.

Le sénateur Poy : Quelle sera la durée du mandat du premier directeur, et le mandat est-il renouvelable?

Mme Sherwood : Le mandat est de cinq ans et le conseil d'administration peut le renouveler.

Le sénateur Poy : Quel est le nombre maximal de mandats?

Mme Sherwood : La Loi sur les musées ne stipule pas de nombre maximal de mandats pour les directeurs. La seule différence est que la première nomination se fera sur recommandation du ministre plutôt que du conseil. À part cela, tout se passera exactement comme pour les autres musées.

Le sénateur Poy : Au sujet des 265 millions, votre exposé dit « y compris l'élaboration des expositions. » Ce pourrait être un processus permanent. Comment plafonner cela?

Mme Sherwood : Il s'agit de l'élaboration des expositions nécessaires pour ouvrir un musée qui a quelque chose à exposer. Le budget de fonctionnement continu du musée devra prévoir le coût de renouveler ces expositions au fil des années. Il est question ici de l'élaboration de l'exposition initiale pour l'ouverture du musée.

Le sénateur Poy : Il s'agit en fait des salles d'exposition et non pas de ce qu'on y trouvera?

Mme Sherwood : C'est le contenu de l'exposition; ce qu'il en coûtera pour ouvrir les portes du musée, non pas à titre de coquille vide, mais d'établissement fonctionnel prêt à accueillir des visiteurs.

Le sénateur Poy : Par la suite, les futures expositions seront financées à même le budget de fonctionnement?

Mme Sherwood : C'est exact.

Le sénateur Spivak : On a beaucoup discuté de l'emplacement des musées dans la région de la capitale nationale et à l'extérieur de cette région. Avez-vous appliqué des critères pour décider que celui-ci devrait être situé à l'extérieur de la région de la capitale, et ces critères sont-ils appliqués uniformément?

Mme Sherwood : L'article 25 de la Loi sur les musées stipule que les musées nationaux peuvent être situés n'importe où au Canada. Dans le cas de ce projet particulier, c'était au départ une initiative privée et beaucoup d'argent a été amassé pour la construction du musée.

Quand les promoteurs du projet ont demandé l'aide du gouvernement pour assurer le fonctionnement continu du musée, par opposition à la construction de l'immeuble, il était clair que, dans le cadre de la campagne de financement, on ciblait comme emplacement La Fourche, à Winnipeg. Par conséquent, quand le gouvernement a accepté d'en faire un musée national, il a accepté La Fourche comme emplacement du musée, comme seule et unique condition pour le versement du financement continu pour son fonctionnement.

Le sénateur Spivak : J'appuie le projet avec enthousiasme. Comme je viens de Winnipeg, je connais bien l'histoire de ce musée, mais là n'est pas ma question. Appliquerez-vous les mêmes critères à d'autres musées, par exemple celui de la photographie? Allez-vous dire que si une région du pays amasse une somme importante, vous installerez un musée dans cette région? Quels seront les critères pour les autres musées? Je ne comprends pas très bien les détails.

Mme Sherwood : Si je comprends bien la question, vous demandez quels critères s'appliqueront si le gouvernement voulait donner suite à l'avenir à des demandes relatives à des musées nationaux. Je ne peux pas répondre à cela. En l'occurrence, c'était une circonstance extraordinaire et une extraordinaire manifestation d'intérêt de la part du public, compte tenu de la somme qui a été amassée et du très long processus qui s'est déroulé. Que je sache, ce n'est pas le début d'une séquence. C'est le premier musée national créé en plus de 40 ans.

Le sénateur Spivak : Je suis absolument d'accord pour dire que c'est un projet extraordinaire. Il a galvanisé la communauté de Winnipeg. Avez-vous reçu d'autres demandes pour l'installation d'un musée à l'extérieur d'Ottawa?

Mme Sherwood : Un certain nombre de gens ont communiqué avec nous depuis l'annonce en avril dernier. La plupart des responsables de musées qui ont fait des démarches auprès du gouvernement avaient l'impression que cette entente stipulait que le gouvernement verserait le budget de fonctionnement continu à une entité non fédérale. On pourrait résumer leur attitude en disant : « Où dois-je signer et puis-je obtenir le même traitement? »

Les gens ont compris ensuite qu'il n'était pas question de donner une subvention ou une contribution à une entité externe.

Le sénateur Spivak : Avez-vous reçu beaucoup de demandes pour que le musée de la photographie soit installé à l'extérieur de la région nationale? Y a-t-il eu un appel généralisé?

Mme Sherwood : Je m'excuse, faites-vous allusion au Musée du portrait du Canada?

Le sénateur Spivak : Oui, c'est bien cela, je suis désolée.

Mme Sherwood : Nous avons deux scénarios différents. Dans le cas du MCDP, c'était une initiative privée dans le cadre de laquelle on a amassé assez d'argent pour construire un immeuble, mais c'était le fonctionnement continu qui faisait problème.

Dans le cas du Musée du portrait du Canada, il s'agit de la collection nationale de portraits. Le budget de fonctionnement continu pour cette collection est assuré par les crédits votés pour Bibliothèque et Archives Canada. Cependant, il n'y a pas de local pour exposer la collection. Le gouvernement a fait une demande de propositions pour trouver des partenaires financiers en vue de construire un immeuble dans lequel on pourra exposer la collection.

Ces deux scénarios ont donc des points de départ complètement différents.

Le sénateur Johnson : Je sais que vous ferez du bon travail pour ouvrir notre magnifique nouveau musée à Winnipeg, que l'on répondra à toutes les exigences et qu'on utilisera immédiatement le pouvoir d'achat pour éviter de perdre du temps. Tous mes amis iront le visiter.

J'ai une question au sujet du nouveau paragraphe 15.3(2) proposé dans le projet de loi, qui impose une restriction quant à la manière dont le musée peut disposer de ses biens. On dit que le musée :

... ne peut disposer de ses biens qu'aux conditions fixées pour leur acquisition ou détention.

Il me semble qu'une telle pratique va de soi. À quoi sert de l'énoncer explicitement ici, et cela aura-t-il une incidence sur la créativité du musée à l'égard de sa collection?

Mme Sherwood : Ce texte confirme que si un musée accepte le don d'un objet à condition que cet objet soit exposé à perpétuité, il doit respecter cette condition. Cela limite la liberté qu'a le musée de traiter les objets qu'il possède comme il le juge bon, liberté qui est énoncée dans les nouveaux alinéas proposés 15.3(1)a) à 15.3(1)d) traitant de la gestion et de la disposition de la collection.

Le sénateur Johnson : Le nouvel article proposé 15.3 énonce les divers pouvoirs que le musée peut exercer pour ce qui est de la vente, de l'échange, du don ou de la destruction du matériel de musée faisant partie de sa collection. Existe-t-il un danger que la restriction imposée dans le nouveau paragraphe proposé 15.3(2) puisse nuire à la gestion de la collection du musée?

Mme Sherwood : Tout musée qui accepte ou acquiert des objets doit être conscient de toute restriction à sa liberté qui peut être imposée et qu'il peut accepter en faisant cette acquisition. Vous soulevez la question plus générale de la gestion des musées. En général, les musées sont devenus très réfractaires à l'imposition de restrictions, par exemple que les objets doivent toujours être exposés, qu'ils doivent être exposés ensemble ou qu'ils ne puissent jamais être déplacés ailleurs. La plupart des musées, de nos jours, refusent d'accepter des objets si le don est assorti de telles conditions.

Le sénateur Johnson : Je trouve cela particulièrement pertinent parce qu'il s'agit d'un musée qui, au départ, n'a aucune collection; il sera donc intéressant d'en suivre l'évolution.

Mme Sherwood : L'une des premières tâches et responsabilités du conseil d'administration devra être la mise au point d'une politique des acquisitions pour le musée, politique qui guidera ses décisions en ce qui a trait aux dons.

Le sénateur Johnson : Pourriez-vous nous en dire plus long au sujet des acquisitions? Avez-vous des observations à formuler sur la manière dont le conseil d'administration va s'y prendre?

Mme Sherwood : Il existe un certain nombre de modèles. Tous les musées dirigés professionnellement ont une politique des acquisitions qui définit le type de matériel qu'ils souhaitent acquérir ou qu'ils sont disposés à acquérir, la manière dont ils prévoient gérer les relations, par exemple avec les donateurs, quelles conditions ils sont prêts à accepter ou qu'ils refusent d'accepter et quel responsable, au sein de l'organisation, doit approuver les acquisitions. Pour les objets peu coûteux, ce pouvoir peut être délégué aux conservateurs du musée, tandis que pour les objets très coûteux, la politique peut stipuler que le conseil d'administration doit prendre la décision. De plus, cette politique est normalement liée aux autres politiques relatives à l'entretien et à la conservation des objets et à la gestion globale de la collection.

Le sénateur Johnson : La création de ce musée ouvre des perspectives passionnantes, surtout dans le domaine des droits de la personne. L'exploration des droits de la personne n'est pas l'apanage exclusif du Canada. Il y a un immense potentiel de partenariats internationaux. Pourriez-vous nous parler de stratégies pertinentes qui pourraient être mises en place pour favoriser de tels partenariats, ou bien y a-t-on réfléchi jusqu'à maintenant?

Mme Sherwood : Encore une fois, je dois faire la distinction entre les plans qui peuvent avoir été faits par la société Friends of the Canadian Museum for Human Rights Inc., couramment appelée les Amis, quand il s'agissait d'une initiative privée, et le pouvoir discrétionnaire absolu du futur conseil d'administration.

Le sénateur Johnson : Vous me pardonnerez, mais je fais partie des Amis.

Mme Sherwood : Cette transition présente certaines difficultés. Cependant, il y a certainement d'autres musées dans le monde qui offrent des possibilités de partenariats fructueux.

Le sénateur Johnson : Pourriez-vous en nommer un?

Mme Sherwood : Le Holocaust Memorial Museum des États-Unis pourrait en être un. Je reviens tout juste de Washington et je vais donc vous donner des exemples américains. Il y a aussi le National Museum of the American Indian et la nouvelle exposition afro-américaine. Il y a trois institutions relevant du Smithsonian qui pourraient être intéressées. On pourrait aussi établir des partenariats avec un certain nombre de nouveaux musées qui explorent des problématiques comme la tolérance et d'autres aspects des droits dans le monde.

Néanmoins, certains musées qui ne se consacrent pas expressément à ce sujet peuvent aussi avoir des expositions pertinentes. Le Musée national de l'Australie, par exemple, situé à Canberra, pourrait être un partenaire international intéressant, compte tenu des travaux qu'il a faits sur les droits autochtones et les efforts de réconciliation menés en Australie. De telles relations entre musées restent à bâtir.

Le sénateur Cowan : A-t-on déjà en main la totalité des 165 millions de dollars?

Mme Sherwood : Environ la moitié aura été placée en fiducie en date du 1er avril. L'autre moitié doit être versée en trois paiements par la Fondation des amis du musée les 1er avril 2009, 2010 et 2011.

Le sénateur Cowan : La question n'est donc pas de savoir si l'argent est disponible; la somme est déjà engagée.

Mme Sherwood : Oui, c'est bien cela.

Le sénateur Cowan : Je pensais que la campagne de financement se poursuivait.

Mme Sherwood : Oui, les Amis se sont engagés à amasser 105 millions de dollars dans le secteur privé. À ce jour, ils ont amassé 88 de ces 105 millions. Ils doivent encore faire un dernier effort.

Le sénateur Cowan : C'est très bien. Le budget de fonctionnement de 22 millions de dollars est-il net, après soustraction des revenus propres du musée? Je suppose qu'il y aura une boutique muséale et d'autres amis du musée, et cetera. S'agit-il d'un chiffre net ou brut?

Mme Sherwood : C'est le chiffre brut. Le futur conseil d'administration devra établir des projections quant au revenu prévu.

Le sénateur Cowan : Quel montant est prévu dans le plan d'activité?

Mme Sherwood : À l'heure actuelle, le plan d'activité est fondé sur une série d'hypothèses de départ quelque peu différentes quant à l'existence de dotations. Le plan d'activité présenté par les Amis prévoyait des revenus de six millions de dollars.

Le sénateur Cowan : Ce chiffre serait retranché des 22 millions de dollars?

Mme Sherwood : Oui.

Le sénateur Cowan : Pour revenir aux réponses que vous avez données au sénateur Oliver au sujet du premier directeur, vous avez dit que vous discutiez de la manière dont on choisirait le premier directeur.

Mme Sherwood : Différents processus pourraient être utilisés pour nommer le premier directeur. En fait, tout s'est passé très rapidement. Nous avons conclu l'entente définitive et exécutoire avec les partenaires une semaine avant le dépôt du projet de loi à la Chambre des communes. Nous travaillons sous pression dans ce dossier.

Le sénateur Cowan : Je ne m'attends pas à ce que vous disiez que tel cabinet en particulier sera chargé de faire la recherche, mais y aura-t-il une recherche publique?

Mme Sherwood : Il faudra annoncer d'une manière quelconque la disponibilité de ce poste.

Le sénateur Oliver : Il faut plus qu'une annonce. Il faut mener une recherche.

Mme Sherwood : Un processus a déjà été enclenché par les Amis qui avaient accordé un contrat pour passer en revue un grand nombre de candidats à ce poste, et nous avons accès aux résultats de ce travail. Nous croyons que la description de poste sera légèrement différente parce que c'est maintenant un musée national et que des critères additionnels sont venus s'ajouter. Je ne veux pas faire de cachotteries, mais l'un des problèmes sera justement de savoir dans quelle mesure nous pouvons nous inspirer de cette documentation antérieure, ou bien si nous devrons recommencer à la case départ.

Le sénateur Cowan : Il y aura une nouvelle recherche.

Mme Sherwood : Il faudra qu'il y ait une nouvelle recherche.

Le sénateur Cowan : Elle ne sera pas limitée aux gens qui ont déjà posé leur candidature auprès des Amis.

Mme Sherwood : En effet.

Le sénateur Cowan : Il y aura une recherche publique. Quel sera le mécanisme possible? Se pourrait-il qu'on accorde un contrat à un cabinet spécialisé?

Mme Sherwood : Oui, ce pourrait être une manière de procéder.

Le sénateur Cowan : Quelles autres méthodes pourrait-on envisager?

Mme Sherwood : Une méthode serait de lancer un appel à tous, et l'on pourrait aussi commencer par une courte liste comprenant les personnalités les plus connues et procéder rapidement à partir de là.

Le sénateur Cowan : En quoi serait-ce une recherche publique si vous commencez par une courte liste de personnalités connues?

Mme Sherwood : C'est le problème.

Le sénateur Cowan : Cela n'est pas une recherche publique.

Le sénateur Oliver : Non, ça ne l'est pas. C'est préoccupant.

Mme Sherwood : Il y a des processus permettant d'afficher des nominations potentielles en invitant les intéressés à faire part de leurs commentaires. Je répète que je ne suis pas à l'aise de vous en parler parce que nous n'avons pas terminé les discussions à ce sujet avec le Bureau du Conseil privé.

Le sénateur Cowan : Il est sûrement nécessaire de faire une recherche publique pour un poste de ce genre, n'est-ce pas? Comment pourrait-on faire autrement?

Mme Sherwood : Les gens ont déjà eu un certain nombre d'occasions de manifester leur intérêt.

Le sénateur Cowan : Vous venez de dire que la description de fonctions est peut-être légèrement différente. Je ne comprends pas.

Mme Sherwood : Je suis en train de me coincer à propos d'une discussion qui n'a pas encore été terminée et je ne connais pas toutes les options disponibles pour de telles recherches. Je ne veux pas vous induire en erreur en disant que ce sont les deux seules options.

Le sénateur Cowan : Les parlementaires auront-ils l'occasion d'entendre parler du processus avant que la décision soit prise et, dans l'affirmative, comment?

Mme Sherwood : Je suis désolée, je n'ai tout simplement pas les connaissances requises pour répondre à cette question précise.

Le sénateur Cowan : Pourriez-vous vous engager à poser la question et à obtenir une réponse pour le comité?

Mme Sherwood : Je me ferai un plaisir de vous revenir là-dessus, à moins que l'un ou l'autre de mes collègues se sente obligé d'intervenir et d'offrir une meilleure information que la mienne.

Rina Pantalony, conseillère juridique, Patrimoine canadien : J'ignore si je peux intervenir en apportant une meilleure information. Je pense que nous devons prendre cette question en délibéré.

Le sénateur Cowan : Pourvu que nous ayons l'engagement et qu'on fasse le suivi auprès de la greffière, c'est très bien.

Le président suppléant : Comme il s'agit d'une société d'État, je suppose que nos deux langues officielles seront exigées à ce nouveau musée.

Mme Sherwood : Le préambule de la Loi sur les musées, qui s'appliquera également à ce musée, dit très clairement que les musées nationaux sont tenus d'offrir les services dans les deux langues officielles.

Le sénateur Johnson : Le plus beau, c'est que ce musée sera juste en face de Saint-Boniface, sur la rivière qui coule entre Winnipeg et Saint-Boniface, qui est un quartier de la ville très francophone.

Le président suppléant : Les gens, ou en tout cas les médias, semblent croire parfois, à tort, qu'il s'agit d'un partenariat public-privé. En fait, c'est vraiment une entité publique, n'est-ce pas?

Mme Sherwood : C'est une société d'État fédérale dotée d'un conseil d'administration nommé par le gouverneur en conseil et qui bénéficie de toutes les protections qui existent dans les diverses lois fédérales qui s'appliquent à une telle entité, notamment la Loi sur la gestion des finances publiques. Les employés travaillent dans le secteur public aux fins de la Loi sur la rémunération du secteur public. Le musée a donc exactement le même statut que n'importe quel autre des musées nationaux existants. Il se trouve à bénéficier d'une contribution extraordinaire pour la construction du musée, mais cela ne change absolument rien à son statut.

Le président suppléant : Les employés fédéraux pourraient-ils postuler à des postes dans ce nouveau musée?

Mme Sherwood : C'est un employeur séparé. Patrimoine canadien a un arrangement permettant aux employés des musées nationaux, de Parcs Canada et d'autres entités de se présenter à des concours dans l'administration fédérale. Il n'y a assurément aucun problème pour un fonctionnaire fédéral qui voudrait venir y travailler, sur le plan de la transférabilité des pensions. Tout employé de la fonction publique fédérale pourrait se prévaloir de cette disposition.

Le sénateur Johnson : Pourriez-vous répondre à une question sur le fait que le premier directeur sera recommandé par le ministre du Patrimoine plutôt que par le conseil d'administration? Dans les quatre autres musées du Canada, c'est le conseil d'administration qui formule la recommandation pour la nomination du directeur. Dans le cas qui nous occupe, le ministre nomme à la fois le conseil d'administration et le directeur. Pourquoi cette différence?

Mme Sherwood : Dans ce cas-ci, c'est vraiment pour des raisons pragmatiques. La loi de 1990, qui crée les quatre musées nationaux existants à titre de sociétés d'État, est entrée en vigueur au moment où les institutions en question existaient déjà. Les musées avaient déjà des installations et du personnel. Quand les conseils d'administration ont été créés, il existait une infrastructure pour leur donner du soutien. Dans le cas de cette institution-ci, par contre, il n'existe pour l'instant aucune infrastructure pour appuyer le nouveau conseil. Le problème est vraiment que les deux sont créés simultanément.

Le sénateur Johnson : C'est le gouvernement qui exerce le contrôle et non pas les Amis ou la fondation de la famille Asper.

Mme Sherwood : Absolument, c'est exact.

Le président suppléant : S'il n'y a pas d'autres questions, je voudrais remercier nos témoins d'être venus. Je voudrais aussi remercier tous les sénateurs d'être présents — c'est peut-être parce que je suis président suppléant que vous êtes tellement nombreux; c'est un soutien extraordinaire. Je rappelle également que ce sont les sénateurs qui ont été désignés membres de notre comité qui voteront au moment de l'étude article par article. Je crois que les témoins peuvent rester, s'ils le souhaitent.

Mme Sherwood : Nous aimerions bien rester, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.

Le président suppléant : Il pourrait y avoir une question sur l'une ou l'autre des dispositions.

Honorables sénateurs, êtes-vous d'accord pour que nous passions à l'étude article par article du projet de loi C-42, Loi modifiant la Loi sur les musées et d'autres lois en conséquence?

Des voix : D'accord.

Le président suppléant : Le titre est-il reporté?

Des voix : D'accord.

Le président suppléant : L'article 1 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président suppléant : L'article 2 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président suppléant : L'article 3 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président suppléant : L'article 4 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président suppléant : L'article 5 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président suppléant : L'article 6 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président suppléant : L'article 7 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président suppléant : L'article 8 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président suppléant : L'article 9 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président suppléant : L'article 10 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président suppléant : L'article 11 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président suppléant : L'article 12 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président suppléant : L'article 13 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président suppléant : L'article 14 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président suppléant : Le titre est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président suppléant : Le projet de loi est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le président suppléant : Dois-je faire rapport du projet de loi au Sénat?

Des voix : D'accord.

Le président suppléant : Adopté. Voyez comme nous sommes efficaces. Merci.

La séance est levée.


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