Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Transports et des communications
Fascicule 4 - Témoignages
OTTAWA, le mercredi 6 février 2007
Le Comité permanent des transports et des communications se réunit aujourd'hui, à 18 h 15, pour étudier le trafic du fret conteneurisé actuel et éventuel manutentionné par les ports à conteneurs de la porte d'entrée du Pacifique, les ports à conteneurs de la côte Est et les ports à conteneurs du Centre du Canada, les principaux marchés importateurs et exportateurs desservis par ces ports et les politiques actuelles et futures à cet égard.
Le sénateur Lise Bacon (présidente) occupe le fauteuil.
[Français]
La présidente : Honorables sénateurs, je déclare la séance ouverte. Ce soir, nous sommes heureux de recevoir les représentants de l'Administration portuaire de Montréal : M. Patrice Pelletier, président-directeur général, Mme Stéphanie Isaacs, directrice des relations gouvernementales, et M. Jean Mongeau, vice-président, affaires juridiques et secrétaire de l'administration.
Comme vous le savez nous faisons l'étude, et nous ferons un rapport, sur le trafic du fret conteneurisé, actuel et à venir, manutentionné par les ports à conteneurs de la porte d'entrée du Pacifique, les ports à conteneurs de la côte Ouest, les ports à conteneurs du centre du Canada, sur les principaux marchés importateurs et exportateurs desservis par ces ports et sur les politiques actuelles et futures à cet égard.
Nous sommes très heureux de vous avoir avec nous, monsieur Pelletier, et nous entendrons votre présentation en premier; ensuite, les sénateurs auront sûrement plusieurs questions à vous poser.
Patrice Pelletier, président-directeur général, Administration portuaire de Montréal : Madame la présidente, je tiens à vous remercier de la tribune que vous m'offrez ce soir pour compléter la présentation qui vous a été faite le 14 mai dernier par mon prédécesseur, M. Taddeo. Je profiterai de cette occasion pour vous faire part de ma vision de l'avenir du trafic des marchandises diverses conteneurisées au Port de Montréal et surtout des mesures qui devront être prises pour en assurer la pérennité.
Premièrement, comme vous l'avez signalé, je tiens à mentionner que je suis accompagné ce soir par M. Mongeau et Mme Isaacs. Si c'est nécessaire, durant la période de questions, je vais me référer à eux pour certains points que vous allez soulevez.
Permettez-moi de vous rappeler que le Port de Montréal est le premier port à conteneur sur la route de l'Atlantique Nord. Il contribue à la création de plus de 17 500 emplois directs et indirects, en plus d'avoir un impact économique de plus de deux milliards de dollars.
Au mois d'octobre 2007, lorsque je suis entré en fonction au poste de président-directeur général, j'ai immédiatement saisi l'importance du trafic de conteneur pour le Port de Montréal. J'ai surtout compris la nécessité d'en assurer la pérennité en prenant toutes les mesures requises pour répondre aux besoins de cette croissance.
Il était donc pour moi de première importance de mettre en place un plan stratégique qui comprendrait une nouvelle vision, une nouvelle mission, des orientations stratégiques ciblées, mais surtout des plans d'action concrets pour mettre en œuvre cette vision.
Ce travail est en cours, puisque nous l'avons amorcé il y a quelques semaines, en novembre 2007. Notre plan stratégique établira les orientations stratégiques permettant au Port de Montréal de devenir la porte d'entrée de commerce préférentiel du continent nord-américain. Nous ferons connaître les grandes lignes de cette nouvelle stratégie en avril prochain.
Il faut bien comprendre que d'occuper le premier rang au niveau du transport des marchandises diverses conteneurisées sur l'Atlantique Nord est une grande réussite en soi. Mais s'en satisfaire aurait pour effet de permettre à la concurrence qui se situe sur la côte Est nord-américaine de nous rattraper. Nous devons donc constamment trouver des solutions et mettre en place des initiatives, pour répondre à la croissance des marchés, mais surtout pour en développer de nouveaux.
Le développement du Port de Montréal est pour nous un projet de société. Une de nos stratégies sera de développer une présence significative auprès de la société et la population du grand Montréal. Il s'agit de recréer des liens entre le port et les intervenants économiques, entre le port et la population; se rapprocher, favoriser un sentiment de fierté et d'appartenance des Montréalais envers leur port.
Ce processus intégrera également une approche de développement de relations gouvernementales et paragouvernementales efficaces et utiles. Notre stratégie est de réaliser le port dans la ville.
Nous voulons aussi faire du Port de Montréal un leader du développement durable dans le secteur maritime. Cela implique d'élaborer des projets innovateurs en contribuant au développement durable du grand Montréal et de sa communauté locale. Cela veut également dire s'assurer d'être à l'avant-garde de la gestion environnementale et surtout d'influencer nos partenaires pour qu'ils adoptent nos objectifs de développement durable et qu'ils y contribuent.
L'exemple que vous avez sûrement entendu parler depuis quelques mois, c'est l'alliance verte, un exemple probant de cette collaboration, de partenariat dans le transport maritime, où les gens de l'industrie se sont associés envers une cause commune, c'est-à-dire de faire du transport maritime un secteur plus vert qu'il l'est actuellement.
Au fil des ans, notamment depuis 1960, le Port de Montréal, en termes de volume, a connu une croissance modeste et constante, mais la constitution de son volume total a changé de façon très significative pour laisser de plus en plus de place aux marchandises conteneurisées.
Je vous réfère donc au tableau A1, qui montre clairement le changement des types de trafic manutentionnés durant cette période. Sur ce graphique, la courbe grise démontre que de 1968 à 2006, il y a eu une augmentation très significative du trafic conteneurisé et Montréal a pu continuer à connaître une croissance intéressante.
Le Port de Montréal est une porte d'entrée formidable pour le commerce, dotée d'une plaque intermodale intégrée, qui a su regrouper et développer une relation privilégiée avec l'ensemble de ses intervenants. Ces intervenants sont les armateurs, les arrimeurs, les compagnies de chemin de fer et de camionnage. Cette synergie a permis et continue de permettre au Port de Montréal d'offrir un service intégré de premier plan tout en demeurant concurrentiel.
Parmi les principaux avantages concurrentiels du Port de Montréal, on retrouve sa situation géographique en plein cœur de l'Amérique, son interface avec le rail, la productivité et la stabilité de sa main-d'œuvre, la performance de son système intégré et, finalement, la qualité de ses services à la clientèle.
Il est important de rappeler que 60 p. 100 du trafic conteneurisé manutentionné à Montréal a pour destination le Québec, l'Ontario et l'Ouest canadien, alors que l'autre 40 p. 100 dessert directement le Midwest américain, soit principalement Chicago et Détroit.
Fort de ces constatations, il était primordial de mettre en place une stratégie permettant d'assurer au Port de Montréal le maintien du niveau de son trafic conteneurisé actuel, mais surtout, encore une fois, de lui permettre d'augmenter ses volumes présents.
Nous devons tout mettre en œuvre pour renforcer notre avantage compétitif sur la route de l'Atlantique Nord, mais nous devons également analyser les opportunités de développer de nouveaux marchés en recherchant de nouvelles routes qui pourront être desservies par nos clients actuels et possiblement par de nouvelles lignes maritimes.
À titre d'exemple, il y a l'agrandissement du Canal de Panama qui devrait voir le jour en 2014 et le développement de nouveaux hubs comme celui qu'a développé la Mediterranean Ship Company, à Freeport, dans les Bahamas. Ces innovations vont créer de nouvelles opportunités pour le Port de Montréal et c'est dans ce sens que nous devrons œuvrer.
Je vous réfère maintenant au tableau A2. Vous avez une carte du monde sur laquelle on vous présente les routes de commerce par conteneurs utilisées en 2006 et qui démontre encore clairement qu'il y a beaucoup d'opportunités de développement pour le Port de Montréal sur ces nouvelles routes.
La majeure partie du transport de marchandises de Montréal est représentée par cette petite ligne noire qui représente la route de l'Atlantique Nord et vous voyez toutes les autres routes qui existent, qui éventuellement pointent vers le Nord-Est américain, par exemple la route des Caraïbes qui est la courbe en bleu. Vous avez la courbe en gris qui passe via le canal de Panama. Tout cela représente un potentiel additionnel de commerce pour le Canada et, bien sûr, pour Montréal.
En ce qui concerne la croissance du conteneur en Amérique du Nord pour la période 2000-2005, elle a été de 12,3 p. 100 pour l'Asie du sud-est, 10,3 p. 100 pour le nord-est de l'Asie, 8,7 p. 100 pour l'Amérique latine et pratiquement neutre pour l'Europe.
Malgré cela, le Port de Montréal a affiché une croissance supérieure à 5 p. 100 depuis les cinq dernières années et en 2007, sa croissance s'élevait à 9,4 p. 100. Néanmoins, pour ce qui est des prévisions pour 2005 à 2015, il y aura une prévision de croissance avec l'Europe de 5,7 p. 100, pour l'Asie elle sera de 6 p. 100 à 8 p. 100, dépendamment si l'on se situe au sud-est ou au nord-est.
Le tableau A3 montre la croissance par région pour la période de 2000 à 2015. Ce qui nous intéresse, c'est particulièrement l'élément vert du graphique qui montre que la croissance européenne au niveau du commerce va reprendre, ce qui corrèle très bien avec notre future croissance à Montréal.
L'Administration portuaire de Montréal est aujourd'hui à la croisée des chemins. Elle doit tout mettre en place, tant au niveau des infrastructures requises que de la capacité nécessaire pour répondre à la croissance de son trafic. Bien entendu, ne pas réagir ou réagir trop tard, aurait pour effet direct de nous faire perdre notre situation compétitive et implicitement, notre part de marché. Il s'agit d'un marché extrêmement compétitif et volatil.
Il y a plusieurs tendances sur le marché des diverses marchandises conteneurisées. Elles pourraient avoir un impact plus ou moins fort sur l'évolution des trafics au Port de Montréal. C'est pourquoi il faut aborder cinq éléments. Premièrement, la consolidation, les alliances et l'émergence des mégatransporteurs dans l'industrie qui sont encore très nombreux; deuxièmement, l'utilisation de grands navires à des fins d'économie d'échelle et de réduction de coût. Et quand on parle de grands navires, pour vous donner une idée, c'est un navire qui transporte de 8 000 à 14 000 conteneurs.
Il y a aussi des transformations qui vont se produire au niveau du risque de mettre autant de cargaisons sur un navire et d'utiliser autant de logistique à un port.
Troisièmement, il y a les changements dans les stratégies de gestion de la chaîne logistique. Certaines compagnies ont une stratégie de chaîne très verticale, donc ils veulent non seulement contrôler la ligne maritime, mais ils veulent également contrôler le chemin de fer, le camionnage, et cetera. La disponibilité des transports intermodaux rapides, efficaces et à coût concurrentiel, et finalement, les nouvelles technologies portuaires propres aux navires.
Le Port de Montréal se trouve aujourd'hui dans une position enviable, mais devra faire face à des défis de taille s'il veut atteindre ses objectifs de croissance. N'oublions pas qu'en plus de sa situation géographique privilégiée, il est desservi par deux chemins de fer — un avantage majeur — et comme je l'ai mentionné, il offre à ce jour le meilleur temps de transit des ports de la côte Est pour la portion terrestre, et ce, jusqu'à Chicago et Détroit. Le port devra également faire face à des ports en forte croissance aux États-Unis et devra absolument faire des investissements majeurs pour s'attaquer à son problème de capacité. Pour ce faire, il devra être en mesure de jouir d'outils de financement flexibles et adaptés. Retarder l'obtention de cette flexibilité financière risque de diminuer la situation compétitive du Port de Montréal.
Pour atteindre ses objectifs, l'administration portuaire vient de se doter de nouveaux énoncés de mission et de vision et travaille sur les orientations stratégiques, lesquelles comprennent le développement de sa clientèle et la croissance active, les infrastructures, la finance, la communauté, l'environnement et l'organisation elle-même.
Il ne fait aucun doute que dans un avenir rapproché, l'Administration portuaire de Montréal devra investir dans ses infrastructures pour répondre au besoin de croissance et maintenir son avantage compétitif. Dans un premier temps, cela implique la mise à niveau de ses infrastructures afin de s'assurer qu'elles répondent toujours au besoin de ses clients. À cela, il faut ajouter la nécessité de procéder à des investissements majeurs, de nouvelles installations pour répondre à l'accroissement du trafic actuel et à l'arrivée de nouveaux trafics en provenance de nouvelles routes — et je l'ai montré via la carte —, le tout étant fait dans un contexte de développement durable.
Ce soir, il est important pour moi de vous faire connaître notre nouvelle approche et de vous faire part de nos besoins en investissement. Ces derniers nous permettront de répondre à la croissance future du trafic conteneurisé, une croissance bien réelle. Bien entendu, l'Administration portuaire de Montréal détient un flux monétaire intéressant de près de 90 millions de dollars et a toujours financé ses projets en capital, à même ses surplus. Cependant, cette prémisse ne peut plus s'appliquer en raison des enjeux financiers. Les besoins financiers futurs du port seront de plusieurs centaines de millions de dollars afin de maintenir non seulement sa position concurrentielle, mais surtout de faciliter le commerce et apporter un impact socioéconomique significatif à notre pays.
Comme cela vous a été déjà mentionné, nous venons de terminer une étude de capacité nécessaire au Port de Montréal pour répondre à la croissance du conteneur. Cette étude conclut que le Port de Montréal connaîtra une croissance continue et qu'en se basant sur l'augmentation potentielle de seulement 4 p. 100 — je rappelle que c'était neuf p. 100 en 2007 et au-delà de 4 p. 100 au cours des cinq dernières années —, le port aura atteint sa capacité dans cinq à sept ans. C'est demain!
Notre plan stratégique va donc prévoir des investissements majeurs dont l'objectif sera de nous assurer d'ajouter de nouveaux espaces par un développement harmonieux avec les besoins de nos partenaires — donc pas seulement les clients —, c'est-à-dire tous ceux qui ont un intérêt, comme les intervenants de la ville et des divers niveaux de gouvernement, les arrimeurs, les armateurs, et cetera.
Nous allons également prévoir l'analyse de diverses alternatives au niveau des structures juridiques et financières. Cela impliquera possiblement un développement en partenariat public et privé, comprenant un partage équilibré des risques, financiers ou autres. Ce plan stratégique nous guidera donc dans notre démarche des prochaines années. Pour ce faire, nous aurons besoin de modifier nos pouvoirs en obtenant un amendement à nos lettres patentes pour nous accorder le droit de créer des concessions d'opération ou des ententes de partenariat public et privé.
La semaine dernière, j'ai comparu devant le Comité permanent des transports, des infrastructures et de la collectivité pour appuyer le projet de loi C-23, loi modifiant la Loi maritime du Canada gouvernant le Port de Montréal. En effet, ce projet prévoit la modification de l'article 25 de la loi pour nous accorder l'accès à des crédits du Parlement pour des fins d'infrastructure, d'environnement et de sûreté.
La création d'un code d'emprunt est également prévue, ce qui permettra à l'Administration portuaire de Montréal de profiter d'une plus grande flexibilité dans ses montages financiers lors de projets de développement. En effet, ce code d'emprunt s'appliquera à toute administration portuaire canadienne dont le revenu brut sera supérieur à 25 millions de dollars. L'application de ce code nous permettra d'emprunter sur une base commerciale, nous accordant une plus grande flexibilité au niveau des garanties accordées pour obtenir ce type de financement.
Ces amendements proposés à la Loi maritime du Canada vont donc nous octroyer des outils de financement qui, à ce jour, sont inexistants.
Cela m'amène à vous parler de la création de la porte continentale et du corridor de commerce Ontario-Québec. Cet élément, pour moi, pour mon équipe et pour le conseil d'administration, est un élément d'importance nationale. Il rejoint directement notre projet de société auquel je faisais référence plus tôt, en parlant de développement du Port de Montréal. Je me suis assuré que le Port de Montréal prenne une part active au fonctionnement de cette porte d'entrée de commerce, créée par les gouvernements fédéral et provinciaux et dont l'objectif est de promouvoir le commerce intérieur et international. Il s'agit d'une composante majeure de développement et nous allons nous assurer d'y présenter des projets de développement qui nous permettront de répondre à nos défis de croissance. Nous aurons besoin de toutes ces mesures disponibles pour développer le port à un rythme qui nous permettra de demeurer concurrentiels par rapport aux ports américains, particulièrement les ports de la côte Est américaine. Comme vous êtes à même de le constater, nous adoptons une approche proactive et notre plan stratégique en sera le reflet.
Soyez assurés que nous mettrons tout en œuvre pour répondre au besoin de croissance de nos clients, actuels et futurs, afin non seulement de faciliter le commerce, mais aussi de créer un impact socioéconomique très important pour la ville et le pays.
Je tenais à vous faire part de notre nouvelle mission, de notre nouvelle vision, et à vous dire que le Port de Montréal joue et continuera certainement de jouer un rôle extrêmement important comme plaque intermodale intégrée et porte de commerce du Canada.
Je vous remercie beaucoup de votre attention et je suis prêt, madame la présidente, membres du comité, à répondre à vos questions.
La présidente : Merci, monsieur Pelletier. Le comité, comme vous le savez, avait rencontré l'ancien directeur général de l'Administration portuaire de Montréal, M. Taddeo, à deux reprises, soit le 7 février 2007 et le 14 mai 2007. Dans son exposé, il a traité — comme vous le faites encore aujourd'hui — de l'inestimable avantage du Port de Montréal pour les exportateurs de Montréal, du Québec et du Canada tout entier. De ce fait, il a indiqué que le Port de Montréal était un chantier perpétuel qui ne cessait de répondre à la demande croissante, tout d'abord sur le terrain de l'île de Montréal. Il a également mentionné qu'à l'avenir, l'Administration portuaire de Montréal comptait sur les réserves foncières à Contrecœur. Vous n'avez pas mentionné Contrecœur dans votre exposé. Est-ce que le développement du site de Contrecœur fait toujours partie des plans de l'APM et est-ce que le développement de ce site pourrait contribuer à la croissance économique du Grand Montréal?
M. Pelletier : C'est une excellente question. Beaucoup de journalistes me l'ont posée.
La présidente : J'imagine!
M. Pelletier : Une des premières choses que j'ai faite dans les premières semaines est d'évaluer tout ce qui a été fait depuis 20 ans. Je suis même remonté avant l'achat des terrains de Contrecœur, c'est-à-dire dans les années 1985 et j'ai essayé de comprendre quel développement avait été suivi.
Pour la prochaine phase de développement du Port de Montréal, qui prévoit une augmentation importante du trafic par conteneurs vers les années 2013 à 2020, le choix de l'emplacement des activités n'a pas encore été déterminé. Nous devons étudier les impacts socioéconomiques, environnementaux et financiers d'un nouvel emplacement et déterminer le type de relations que nous voulons avoir avec nos partenaires pour nous aider à choisir le site qui offrirait les meilleurs avantages. La plus grande différence entre ma vision du Port de Montréal et celle des gens qui m'ont précédé consiste à devoir intégrer plus systématiquement une avenue nouvelle où le sens de l'expression « monde des affaires » a beaucoup changé. Les intervenants du port ne sont pas liés de façon contractuelle. Il y a un chaînon manquant. L'objectif que nous visons dans la phase actuelle de planification stratégique est de réunir tous ces intervenants à une table et de discuter des avantages et des inconvénients de nouveaux sites.
Le port à Contrecœur aurait l'avantage d'être très grand, capable de recevoir jusqu'à trois millions de conteneurs additionnels. Avons-nous intérêt à recevoir trois millions de conteneurs plutôt qu'un? Une capacité d'un million serait-elle suffisante pour les dix ou 12 prochaines années? En outre, le choix de Contrecœur nécessiterait l'ajout de voies ferrées qui modifieront le paysage urbain de la ville. Toutefois, le site actuel pourrait satisfaire à la demande pour une dizaine d'années.
Le but essentiel de notre démarche aujourd'hui est d'évaluer les avantages et les inconvénients entre deux ou trois sites possibles. Nous avons donc amorcé un dialogue avec les principaux intéressés, dont la mairesse de Contrecœur et son équipe que nous rencontrons la semaine prochaine.
Nous n'avons pas d'idées préconçues à cette étape de la phase. Il est extrêmement important d'éliminer les barrières psychologiques qui nous empêcheraient de garder une approche systémique rigoureuse de la situation. Si nous allons à Contrecœur, il est évident que Montréal subira un contrecoup. Quels seront ces impacts? Comment pourrons-nous les chiffrer? Nous avons eu recours aux services de grandes firmes telles que SECOR pour évaluer les impacts socioéconomiques qu'entraînera la nouvelle vision d'expansion du Port de Montréal.
La présidente : L'expansion de l'emplacement actuel du Port de Montréal est limitée par ses dimensions terrestres, et il faut dire également qu'il y a des limites à tout agrandissement.
M. Pelletier : À mon avis, les limites actuelles du Port de Montréal pourraient satisfaire la demande jusqu'en 2020-2025. C'est une des options envisagées. Cependant, si je n'avais droit qu'à une seule réponse, j'opterais pour le port à Contrecœur. Cependant, il faut tenir compte du poids social, économique, politique, environnemental et commercial important de cette décision. Cela ne donne rien de construire un terminal s'il est peu utilisé, de perdre un tel investissement. On trouve sur la planète des ports qui n'ont pas réussi à attirer le commerce.
La présidente : Dans l'édition de décembre dernier du magazine Forces, vous avez eu un entretien avec M. Éric Desrosiers. Vous avez dévoilé la direction vers laquelle vous dirigez le Port de Montréal. Vous souhaitez qu'il devienne plus grand et qu'il soit la porte d'entrée de prédilection de nouveaux navires arrivant partout d'Asie, mais surtout des nouveaux ports européens. Pour y parvenir, vous mentionnez qu'il faut établir une nouvelle complicité avec les gouvernements. Vous parlez également de certains projets de loi qui vous intéressent pour le financement. Pourriez-vous développer davantage vos propos à ce sujet que l'on retrouve aux pages 14 et 15? Avez-vous mis sur pied un groupe de prospection dans le but de développer ces marchés que vous entrevoyez?
M. Pelletier : D'une part, il y a la planification stratégique que je vous ai expliquée, où de façon indépendante nous essayons de déterminer quelles routes additionnelles pourraient s'inscrire dans nos plans futurs. J'en ai mentionné quelques-unes tout à l'heure. Je vous donne un exemple de partenariats récents que nous n'avions pas auparavant. Un de nos nouveaux clients a décidé de transiter des marchandises en provenance d'Amérique du Sud et d'Asie via Freeport vers Montréal. Il avait pourtant le choix d'aller à Savannah, New York, Norfolk, ou tout autre port de la côte Est américaine, mais il a décidé de transiter par Montréal. Nous envisageons aussi de nouveaux partenariats grâce à l'ouverture de nouveaux ports sur la Méditerranée. Un travail à l'interne se fait à cet égard. Nous avons aussi décidé de faire un appel d'offres auprès des meilleurs de l'industrie.
C'est intéressant que vous posiez la question, parce que nous avons tenu une réunion pour décider qui obtiendrait le contrat, suivant les appels d'offres, pour faire une étude de marché extrêmement pointue sur le déplacement et la quantité de marchandises et autres des ports de la côte Est américaine. Par exemple, pourrions-nous cibler le transport de cargaisons de briques ou de céramique en provenance du Brésil qui actuellement sont transbordées à Savannah pour être livrées à Chicago? Nous en sommes au point de pouvoir cibler chez nos compétiteurs le type de marchandises, son origine, sa destination et éventuellement son transporteur. Il peut y avoir un mouvement d'une ligne maritime ou tout simplement un mouvement d'une ligne maritime à une autre. C'est le travail qu'on accomplit et qu'on va finalement boucler au mois d'avril à l'intérieur de notre planification stratégique. Ai-je répondu à vos questions?
La présidente : Pas tout à fait, mais vous me donnez d'autres informations. Alors, ça va. Je n'ai pas eu de réponse concernant le groupe de prospection qui devrait être mis sur pied.
M. Pelletier : Premièrement, avec nos partenaires du port, les trois à quatre présidents de sociétés, nous avions dit qu'on allait vers le Midwest américain et en Europe à partir du mois de mars, mais on a reculé les dates d'à peu près deux mois parce qu'on y allait sans avoir de données suffisantes. Je vous donne un exemple. Admettons que la LCBO transiterait tout son vin via New York. Nous devrons alors rencontrer la société afin de la convaincre de le faire via Montréal. C'est cette finesse de l'information que nous recherchons. C'est notre prochaine étape. À partir de ces éléments, nous partirons en équipe et en partenariat. C'est la première fois que nous ferons les choses de cette manière, c'est-à-dire que la ligne maritime, avec le chemin de fer, clé de voûte du transport de marchandises pour les Canadiens et de notre succès, nous pourrons aller soit en Italie, en Espagne, à Chicago ou Memphis.
La présidente : La protection de l'environnement fait partie intégrante de la mission de votre administration — je pense que trois millions de dollars ont été investis dans des projets environnementaux au cours des deux dernières années. Alors, le faible niveau d'eau du fleuve Saint-Laurent semble devenir une préoccupation de plus en plus sérieuse. Lors de votre entretien au magazine Forces, vous avez dit que la situation à court et à moyen terme n'était pas un problème.
Est-ce que ce phénomène a aussi été observé ailleurs? Je reviens encore à Contrecœur. Quel impact ce phénomène peut-il avoir à long terme? Est-ce qu'il y a des mesures qui sont prévues pour le Port de Montréal?
M. Pelletier : C'est l'hydrologue qui va parler. J'ai commencé ma carrière comme ingénieur civil, spécialiste en hydrologie. Quand je suis arrivé au Port de Montréal, j'ai essayé de comprendre cette problématique. On m'a dit que les niveaux étaient bas. Je leur ai demandé à quel niveau. J'ai alors consulté un graphique des dernières années afin de voir les niveaux les plus bas et les niveaux les plus hauts. Je me suis aperçu que c'était bas, mais qu'il y a cinq ans, c'était bas aussi. En même temps, je me suis aussi aperçu que l'année 2007 était formidable avec 9,4 p. 100 de croissance. Je ne comprends pas.
La problématique est multiple. Les navires se sont adaptés au cours des années. Montréal a tellement une force de marché intéressante pour pénétrer le mid-ouest américain et le marché canadien, que les compagnies ont construit des navires pour le Saint-Laurent. C'est quand même extraordinaire. Il ne s'agit pas seulement de pouvoir naviguer 365 jours par année dans la glace, mais il y a aussi la largeur des bateaux qui fait que tu as moins besoin de tirant d'eau. Cela demeure un élément limitant, il faut bien le comprendre. Le niveau d'eau demeure un risque. Je l'ai abordé de deux façons sur le plan de la stratégie.
J'ai demandé à mon équipe et à tous les consultants qui travaillent avec nous si le changement climatique allait nous affecter dans dix, 15 ou 20 ans. Quand on parle d'un investissement de 500 ou 700 millions, il faut le protéger. Protéger, c'est savoir gérer les risques. C'est sûr qu'on ne trouvera pas la réponse à une telle question demain matin. Cependant, il va y avoir une collaboration universitaire avec le Port de Montréal, au Québec, pour étudier ce phénomène-là.
La question à plus court terme est de travailler avec nos partenaires pour améliorer la navigation électronique. C'est incroyable ce qu'on peut faire aujourd'hui avec les avancées technologiques comparativement à ce qu'on pouvait faire il n'y a même pas deux ou trois ans. Si on était ignorant du tirant d'eau ou de la profondeur, ce serait un autre problème. Jamais on n'aurait eu une telle croissance. Ce sont donc des projets importants. Il faut garder la relation qu'on a avec la Garde côtière et avec les Grands Lacs en ce qui a trait aux mouvements d'eau en aval.
À l'intérieur de notre planification stratégique, vous allez voir un projet qui parlera de cela. Ce projet parlera de pouces. Vous savez, un pied additionnel de tirant d'eau pour Montréal augmenterait, en général, la cargaison des bateaux de 10 à 20 p. 100. C'est une croissance organique. On n'a rien fait. On n'est pas sorti, on n'est pas allé à Memphis, à Chicago, à Paris ou à Marseille et on se retrouve avec une croissance additionnelle. Il y a donc une équipe qui travaille spécifiquement pour voir à l'optimisation hydrique, c'est-à-dire voir ce qu'on peut faire pour apporter des améliorations. Je ne parle pas de dragage continu sur le fleuve; c'est très spécifique. Votre question en est une du type « What keeps me awake at night », mais pas dans un sens alarmiste, plutôt dans un sens de gestionnaire qui doit gérer les risques.
Le sénateur Dawson : Félicitations pour votre nomination. Je pense que vous remplissez des chaussures qui étaient très grandes. Votre prédécesseur était au minimum très coloré, très engagé, très convaincant et passionné de son port. Nous sommes bien contents de vous recevoir. Nous aurons sûrement l'occasion de vous réinviter lors de l'étude du projet de loi C-23 ou lors de l'étude de plusieurs autres dossiers.
Vous parlez de la porte continentale, à la page 16. Le sénateur Zimmer et moi arrivons de Prince Rupert. Les gestionnaires du port commencent par parler de la porte continentale et ensuite ils parlent du port local. C'est déjà un progrès de votre part, car vous en parlez à la page 16 — peut-être que votre prédécesseur aurait rajouté des pages pour en parler. Nous irons à Halifax rencontrer les responsables du port. Nous discutons avec les gens des ports de partout au Canada et ce qui ressort de ces conversations, c'est que nous devons avoir une approche sur l'Atlantique qui ressemble à celle du Pacifique où les gens travaillent en collaboration pour développer leur port. Nous aurons l'occasion cette semaine, à Halifax, de voir si ce même esprit s'en vient. Je sais que la porte atlantique et celle du centre du Canada vont arriver plus tard. Il me semble évident qu'on doive renverser un peu la vapeur et dire que les représentants des ports de Halifax et de Montréal s'en vont en Inde pour dire qu'ensemble, on peut faire cela.
Vous avez parlé de la profondeur du fleuve, moi je vais parler de la hauteur. Le pont de Québec empêchera les gros bateaux de conteneurs — la nouvelle génération — de passer. Même si vous creusez, ils ne passeront pas en dessous du pont. Il nous semble évident que Halifax pourrait être la solution pour l'est. Prince Rupert ne part de rien; ils sont en train de construire quelque chose. Ils ont la profondeur, la collaboration de la communauté et ils n'ont pas de contraintes pour agrandir. Il n'y a pas d'objection, sauf peut-être des revendications territoriales — qu'on aura peut-être à Contrecœur, on ne sait jamais.
J'aimerais qu'un jour, les ports de l'Est du Canada fassent comme les ports de Vancouver, c'est-à-dire qu'ils travaillent ensemble. Est-ce que le mécanisme de la porte continentale vous emmènera à ne pas toujours voir Halifax et Québec comme étant des compétiteurs, mais possiblement comme des occasions de croissance? Autrement dit, si effectivement Contrecœur n'est pas justifié, est-ce que Québec peut être une compensation? Est-ce que Sept-Îles peut être une compensation? Nous, comme Parlement, on doit regarder globalement les intérêts, non-pas de votre conseil d'administration ou de celui d'Halifax, mais les intérêts des Canadiens. Si nous investissons à Montréal et qu'Halifax a une capacité d'accueil de 50 p. 100, est-ce que c'est logique?
M. Pelletier : Je vais essayer d'aborder la question en deux ou trois points. Premièrement, j'ai parlé de la porte continentale à la fin parce que justement, c'est important. Pendant quelques minutes, j'ai parlé du commerce. Tout le temps. Je viens du milieu des affaires; j'ai passé ma vie à faire du commerce partout sur la planète. J'ai habité 11 ans à l'étranger, j'ai habité dans quatre provinces. Pour moi, la porte continentale, c'est un mot. Le but de ce gouvernement est d'augmenter le commerce. Selon moi, c'est le point fondamental.
Ce n'est pas nous qui contrôlons le commerce. Nous le facilitons. J'ai essayé de redéfinir ce que l'on fait. Que fait l'Administration portuaire de Montréal? Il y en a qui m'ont dit : « Vous gérez les installations. » Non, on facilite le commerce. Ce sont eux qui ont les installations portuaires. Nous, on donne l'infrastructure. Ce sont eux qui ont les navires. En deux minutes, une ligne maritime peut partir d'un port et s'en aller dans un autre.
On s'est dit qu'il fallait être robuste, dans le sens de résilient; il faut avoir un marché stable. C'est ce qu'on a à Montréal. On s'amène en plein milieu du cœur américain. Vous avez parlé de grands navires. C'est vrai qu'il y a de grands navires. Cet été, on a reçu un bateau de 5 000 TEU. C'était inimaginable. Il y a quelques années, les bateaux étaient cinq fois plus petits. On ne recevra pas les 8 000 ou 10 000, de toute façon, ils ne viendront pas au Canada. Ils vont venir à Vancouver pour laisser leur cargaison. L'avènement des très grands navires est extrêmement bon pour le Canada et pour Montréal parce que les plus grands navires vont libérer des plus petits. Si on arrive à avoir un flot de navires de 4000 à 5000, vous allez avoir une croissance à Montréal de 15 ou de 20 p. 100. Ce sera peut-être ingérable.
Tout cela est relié. Le point que j'essaie de vous expliquer, c'est que oui, pour moi, il y a seulement deux portes au Canada : la porte de l'Ouest et celle de l'Est. La semaine passée, certains députés de l'Est du Canada m'ont demandé pourquoi je ne prenais pas en charge tout l'Est du Canada. Je ne suis pas chargé de ce genre de décision, mais il est certain qu'il y a une relation d'optimisation au niveau de notre pays.
Ce qui est encore plus intéressant, c'est que nous ne sommes pas en concurrence avec Halifax ni avec Québec. Je ne veux pas être arrogant, mais c'est la réalité. La réalité, c'est que mon compétiteur numéro un s'appelle New York, Savannah, Norfolk. Ce sont eux qui grandissent, avec des investissements énormes de la part de l'État au niveau des infrastructures portuaires, des chemins de fer et des routes pour contrebalancer de tout l'Ouest américain; 50 p. 100 de ce qui entre à Long Beach et Los Angeles s'en va exactement au même endroit que nous. C'est quand même extraordinaire! Halifax est un port très profond qui concurrencera férocement New York une fois le dragage terminé à 53 pieds. Je ne peux pas vous donner la mesure en mètres, dans le maritime, on est encore très impérial.
Notre avantage, c'est la proximité des marchés. Le navire, moyen très économique, se rend le plus loin possible et, par la suite, la clé, c'est de pouvoir faire ce transbordement de façon efficace sur un chemin de fer fiable. C'est la clé du succès de Montréal, c'est ça le modèle. Pour moi, il s'agit de complémentarité.
Donc, si vous me demandez si je suis en faveur d'une porte à l'Est? Je dirai oui, aucune objection. Le projet de loi C-23 nous permet l'amalgamation. Ce sont des concepts qui doivent être discutés et débattus pour le bien du pays, donc augmenter le commerce, rendre le Canada plus compétitif, offrir de plus grandes possibilités d'emploi et transformer la marchandise.
L'un de nos objectifs à Montréal, c'est d'avoir des valeurs ajoutées à cette conteneurisation d'à peu près tout ce qui se passe, donc avoir la capacité de prendre ces conteneurs au lieu de les laisser à d'autres et transformer la matière, la réacheminer, donc augmenter les revenus et les emplois.
[Traduction]
Le sénateur Merchant : Bienvenue, monsieur Pelletier. Veuillez nous faire l'historique des conflits de travail au Port de Montréal.
M. Pelletier : Je vais laisser M. Mongeau vous situer le contexte. J'étais heureux que la « paix sociale » règne lorsque j'ai entamé mon mandat. J'ai également mentionné que la paix est essentielle à la bonne administration d'un port. Nous pouvons rêver du meilleur terminal qu'il soit, mais au bout du compte, ce sont les employés qui sont importants.
À titre d'exemple, notre rapport général annuel cette année ne portera pas sur de beaux navires, même si nous en avons quelques-uns, mais sur les employés. C'est ce dont nous avons besoin, quelles que soient les mesures que nous puissions prendre sur le plan technologique.
M. Mongeau pourrait peut-être commenter deux aspects. Tout d'abord, nous avons cinq syndicats avec lesquels nous devons composer au port, puis il y a les milliers d'autres personnes qui travaillent au port, qui ont aussi une convention collective. Cette convention collective ne relève pas de nous mais a des incidences sur nous.
Jean Mongeau, vice-président, Affaires juridiques et secrétaire, Administration portuaire de Montréal : Si nous parlons des employés internes, nous avons cinq syndicats différents et en fait toutes les conventions ont été signées jusqu'en 2011. À l'exception de ce qui s'est produit en 1990 avec les cols blancs, nous n'avons eu aucun problème avec les syndicats. La situation est donc demeurée stable.
Par contre, il y a une convention collective signée entre l'Association des employeurs maritimes et les débardeurs. Ils ont entamé des négociations et viennent de signer une entente. Nous pouvons maintenant connaître aussi la paix sociale sans aucun problème.
M. Pelletier : À quand remonte le dernier conflit?
Mr. Mongeau : Le conflit remonte à 1994 ou 1995.
M. Pelletier : Je n'ai pas de liens très étroits avec le syndicat mais j'entretiens des relations avec ses membres. Je les reçois à mon bureau et je leur parle. Je leur parle de mon plan stratégique et je leur rends visite à leurs bureaux. Ils ont affiché sur leur babillard l'article de Forces et La Presse et de Montreal Gazette parce qu'ils constatent la croissance de l'industrie et ils considèrent que c'est une très bonne chose. Par conséquent, je dirais qu'il s'agit de bonnes relations.
C'est peut-être parce qu'il s'agit d'une petite administration. Je pensais que la réussite du modèle de Montréal était attribuable à sa taille, mais après avoir visité les ports de Vancouver, Long Beach, LA, Hambourg et la semaine prochaine j'irai visiter le port d'Amsterdam, je me rends compte que ce n'est pas la raison. La réussite est attribuable aux partenariats.
Nous sommes présents à la table. Aujourd'hui, à la table ronde, j'avais le président de toutes les lignes maritimes du Canada et de tous les exploitants de terminaux. Ce sont nos concurrents, mais nous parlons de la façon dont nous pouvons améliorer le port. Que ferons-t-ils? Je pense que c'est en partie l'objet du modèle. Lorsque je parle au président du syndicat des débardeurs, il parle de la même façon. Je ne dis pas que les risques n'existent pas, mais je pense que la qualité de la relation est l'élément qui distingue notre port des autres.
Le sénateur Merchant : Le Programme d'habilitation de sécurité en matière de transport maritime exige que certains employés du port fassent l'objet d'une vérification de leurs antécédents. Y a-t-il eu des réactions à cette mesure?
M. Pelletier : Montréal a été le premier port à adopter le programme et à le mener à bien. Le 15 décembre, nous avions terminé la vérification des antécédents de plus de 2 000 personnes. Ce programme a été une réussite. Certains pensaient que ce serait impossible, particulièrement en ce qui concerne les pointeurs et les débardeurs, mais cela s'est fait, et dans les délais prévus. C'est un bel exemple de ce qu'il est possible d'accomplir. Comme je l'ai déjà dit, peut-on attribuer ces résultats au modèle de partenariat? Je suppose que c'est grâce en partie à ce modèle.
Les médias ont été très étonnés. Je n'ai pas voulu accorder d'entrevue à la SRC pendant un certain temps parce que je tenais à maîtriser la question. Il s'agit d'une question compliquée, pas simplement les vérifications de sécurité mais les relations qui existent entre Douanes Canada, la GRC, la Sûreté du Québec et l'exploitant du terminal. Je tenais à me familiariser davantage avec tous les aspects de la question. Cependant, j'ai fini par accorder une entrevue à la SRC après Noël et le journaliste qui m'a interviewé avait entendu la même chose, et essentiellement était là pour rendre compte d'un cas de réussite, ce qui est assez remarquable puisque le sujet est loin d'être facile.
Le sénateur Adams : On a répondu à certaines de mes questions, en particulier à propos des syndicats.
Qu'en est-il du camionnage? Nous avons entendu des plaintes à propos du camionnage parce qu'il arrive que le CN ne coopère pas avec les camionneurs. Connaissez-vous le même problème à Montréal?
M. Pelletier : Voulez-vous dire en ce qui concerne l'industrie du camionnage et l'industrie ferroviaire?
Le sénateur Adams : Oui, ou au port de Montréal.
M. Pelletier : Non, je ne le crois pas. Je me suis promené sur le port, donc ce n'est pas comme si le PDG vous disait qu'il n'y a pas de problème. Cependant, il y a des améliorations à apporter en ce qui concerne la circulation, mais il s'agit davantage d'un problème structurel. Montréal et la province de Québec s'occupent de cette question dans le cadre d'un projet concernant la rue Notre-Dame. Nous nous attendons à ce que le projet améliore la circulation. Cependant, il n'y a aucun problème concernant l'industrie ferroviaire ou celle du camionnage. Nous avons deux chemins de fer, donc il n'y a aucun problème.
Est-ce que vous parlez du temps d'attente pour les camions?
Le sénateur Adams : Non. Parfois, lorsqu'ils ont du fret, ils doivent aussi prendre d'autres marchandises le long de la ligne ferroviaire mais le CN dit qu'ils ne peuvent pas dépasser une certaine limite le long de cette ligne en particulier.
M. Pelletier : Non, mais à Long Beach, j'ai vu des kilomètres de camions qui attendaient et cela m'a étonné. J'en ai demandé la raison et on m'a indiqué que le port était fermé entre 5 heures et 6 heures. Le système n'est pas adapté au besoin qui existe à cette heure-là. Pouvez-vous imaginer les problèmes environnementaux que cela cause? Lorsque j'étais là, il faisait assez froid et un certain nombre de camionneurs avaient laissé leurs moteurs tourner pour rester au chaud. Nous ne connaissons pas ce genre de problème ici.
L'un des principaux projets que nous allons mettre sur pied au cours des deux prochaines années, c'est l'installation d'une barrière principale pour les camions, qui sera beaucoup plus informatisée et qui accélérera la circulation.
Le sénateur Adams : Vous savez que le trafic portuaire augmente chaque année et qu'il faut protéger les conteneurs. Êtes-vous en mesure de contrôler le déchargement des conteneurs? Vous parlez d'environ 8 000 à 14 000 conteneurs. Combien de temps faut-il pour les décharger? Quelqu'un nous a dit qu'il fallait environ dix jours mais les entreprises veulent raccourcir ce délai pour que l'on puisse décharger un gros navire en seulement deux ou trois jours.
M. Pelletier : C'est tout simplement une question d'équipement. Par exemple, Je me trouvais à un port où on devait décharger 8 750 conteneurs. Sept grues fonctionnaient sans arrêt. Ce n'est pas tout le monde qui peut se permettre d'avoir sept grues sur le même navire, mais cela influe sur votre capacité de décharger les conteneurs.
Compte tenu de la taille des navires qui se trouvent au port de Montréal, un navire est déchargé et quitte le port en trois jours. Il ne faut pas oublier que les modèles en ce qui concerne le port de Montréal présentent un autre aspect particulier : un navire arrive au port, est déchargé après quoi il est entièrement chargé à nouveau. Naturellement, dans le cas des gros navires, ils font habituellement escale dans trois ou quatre ports avant que toutes leurs marchandises soient déchargées et rechargées. À Montréal, cela se fait en une seule fois.
Le sénateur Adams : Votre syndicat prévoit-il une disposition dans sa convention à propos d'un ralentissement comme ils l'ont fait en Colombie-Britannique, où ils prévoient un certain nombre de jours de ralentissement? Ce genre de ralentissement de la part du syndicat ne plaît pas à Wal-Mart et à Canadian Tire.
M. Pelletier : La productivité de l'équipe de Montréal est le double de ce que vous avez constaté sur la côte Ouest. Elle n'équivaut pas à ce qu'on trouverait en Chine, mais cela s'explique en fonction de la logistique et du type de travail qui est fait. Nous nous démarquons par la productivité. L'activité portuaire continue de prendre de l'expansion.
Pour répondre à votre question, ce sont les éléments qui favorisent notre capacité d'adaptation et nous rendent plus robustes en ce qui concerne le modèle. Si un changement survient, cela ne constituera pas une menace pour nous — même pas si vous examinez nos investissements à long terme.
Le sénateur Tkachuk : La plupart des marchandises que vous recevez sont-elles destinées au Canada ou aux États-Unis?
M. Pelletier : Environ 60 p. 100 des marchandises restent au Canada et 40 p. 100 sont destinées aux États-Unis. De ce 40 p. 100, 75 p. 100 est destiné aux États du Midwest.
Le sénateur Tkachuk : Ce 40 p. 100 est expédié directement à Chicago?
M. Pelletier : Oui.
Le sénateur Tkachuk : Et qu'en est-il des marchandises canadiennes?
M. Pelletier : La majorité est destinée au Québec et à l'Ontario.
Le sénateur Tkachuk : Elles sont destinées à Toronto, n'est-ce pas?
M. Pelletier : C'est exact. Toronto est une destination principale.
Le sénateur Tkachuk : Les marchandises destinées aux États-Unis sont-elles expédiées par chemin de fer?
M. Pelletier : Oui. Nos lignes ferroviaires sont extrêmement concurrentielles et détiennent une part majoritaire du marché. Environ 54 p. 100 des marchandises sont acheminées par chemin de fer et 46 p. 100 par camion, mais c'est une situation unique. Pour la plupart des ports, c'est toujours moitié-moitié. Le principe est essentiellement le même : les produits locaux sont acheminés par camion et lorsqu'il s'agit de longue distance, par exemple les produits expédiés vers les États du Midwest ou vers Toronto sont acheminés par train. Ce principe s'applique pratiquement partout. Je ne suis pas un spécialiste, mais j'ai visité quelques ports et c'est plus ou moins le système qui est adopté.
Le sénateur Tkachuk : Vos nouvelles activités proviendront-elles des États-Unis et du Canada?
M. Pelletier : Des États-Unis. Le Canada continuera de connaître une certaine croissance mais elle sera modeste et inférieure à 10 p. 100. Ce sera formidable si le pays peut connaître une croissance de 7, peut-être 8 ou 9 p. 100. Notre croissance sera toujours supérieure à celle du pays.
Le sénateur Tkachuk : Vous avez parlé de la croissance assez spectaculaire de votre activité. Est-ce attribuable au canal de Suez ou est-ce attribuable à l'arrivée de produits européens?
M. Pelletier : Les raisons sont doubles. Nous allons nous concentrer sur l'Europe. J'ai parlé de la transformation du canal de Panama. Il s'agit d'une réalité. Disons qu'en 2014, il y a un problème au port de LA/Long Beach. Le navire ne fera pas escale à ce port. Le canal permettra le passage de navires qui sont plus gros. Ils reviendront et descendront le long de la côte Nord-Est des États-Unis. C'est là où on voudra transporter le fret.
Si vous examinez la circulation du fret, nos partenaires ferroviaires de CN et CP étaient dans notre bureau la semaine dernière et ils nous ont montré le réseau ferroviaire et la circulation des marchandises. Cela ressemble à une artère. On peut voir le cœur du pays qui aux États-Unis est représenté par la ligne qui part de Chicago pour se rendre vers le sud. C'est là où tout converge. C'est la destination voulue des marchandises.
Si la circulation est plus facile et s'il est meilleur marché de continuer et d'emprunter le canal de Panama pour remonter, c'est ce qui se produira. En cas de grève ou de problèmes environnementaux qui bloquent le développement sur la côte Ouest, on modifiera l'itinéraire des navires. Pourquoi croyez-vous que tous les ports de la côte est ont fait des investissements massifs? Les gens veulent avoir plusieurs options. Qui veut se contenter d'une solution unique?
Le sénateur Tkachuk : Et vous avez des lignes ferroviaires concurrentielles.
M. Pelletier : Oui. Nous offrons de meilleurs prix aujourd'hui.
Le sénateur Tkachuk : Sur la côte Ouest, nous avons entendu de nombreuses plaintes à propos du coût. Je n'étais pas à Prince Rupert mais certains de mes collègues y étaient.
Le sénateur Dawson : Il n'y en a qu'une à Prince Rupert.
Le sénateur Tkachuk : Je le sais, mais la question est de savoir s'ils se plaignaient autant que Vancouver à propos du fait qu'il n'existe qu'une entreprise ferroviaire. La situation est difficile à cet égard. Vous avez beaucoup de chance d'avoir deux entreprises ferroviaires. Cela augure bien pour Montréal.
M. Pelletier : Oui, nous avons beaucoup de chance. Nous avons encore plus de chance parce que nous pouvons parler à nos deux partenaires, ce qui n'était peut-être pas le cas par le passé. Aujourd'hui, on est prêt à travailler ensemble dans un esprit de collaboration, ce qui est inhabituel. Mon vice-président des opérations, qui est également le directeur du port, m'a dit la semaine dernière qu'il ne croyait pas qu'il aurait pu constater une telle chose de son vivant. Cela souligne l'importance de la réussite mutuelle. Ces entreprises continuent de se faire concurrence et auront leur part du marché, mais elles comprennent également que les contraintes de l'une deviennent les contraintes de l'autre.
Le sénateur Tkachuk : J'ai été très impressionné par le port de Montréal, tout comme mes collègues l'ont été également, j'en suis sûr.
Lorsque nous étions à Vancouver, nous avons entendu le témoignage de la mairesse de Delta. Elle était préoccupée par l'expansion des ports et les répercussions de cette expansion sur ce que j'appellerais « l'esthétique environnementale » — pas nécessairement l'environnement-même — par exemple, que tout le monde voudrait construire des condominiums et des Starbucks, mais qu'il fallait de la richesse pour ce genre de choses. C'était un grave problème. Nous avons tous été frappés par le caractère négatif de ces propos. Ce n'est pas ce que nous avons entendu à Montréal. Vous êtes au cœur de la ville. Vous avez des camions et des trains qui arrivent et qui partent. Vous êtes situés sur les berges du fleuve où les gens aiment aller se promener à pied ou à bicyclette. Le même conflit existe-t-il entre les résidants et certains des politiciens locaux et le port, comme celui qui existe de toute évidence sur la côte Ouest?
M. Pelletier : Ce conflit existe effectivement et c'est certainement une leçon que j'ai tirée lors de ma visite à Long Beach. C'est incroyable. Si vous voulez savoir à quoi ressemblent de vrais problèmes, allez là-bas. Vous constaterez à quel point les préoccupations environnementales et sociétales peuvent tout freiner. Cependant, on peut adopter une stratégie selon laquelle la croissance peut améliorer les choses et permettre de donner suite aux problèmes environnementaux, ce qui est logique et réaliste.
En ce qui concerne Vancouver, j'ai visité le terminal un. La situation est très différente de celle qui existe à Montréal, mais pas vraiment différente des autres endroits qui existent partout dans le monde, et qui consistent à faire du remblayage pour créer des terres. J'ai habité en Alberta pendant trois ans. Nous pourrions parler des sables bitumineux et ainsi de suite. Je ne dis pas que ce n'est pas mon problème, mais je peux vous parler de la situation à Montréal.
Je reconnais qu'il s'agit d'un problème. Tout ce que je peux faire, c'est d'y faire face. Je ne peux pas me cacher derrière la croissance ou quoi que ce soit; je dois avoir un plan. C'est la raison pour laquelle j'ai dit que l'élaboration de ces options doit être rigoureuse et qu'il faut en discuter. Mes collaborateurs ont essayé de dire : « Il s'agit de mon projet. Je vais construire un terminal EVP d'un million de dollars ici; merci beaucoup. Où est l'argent? » Je ne peux pas agir ainsi. J'ai construit toutes sortes de choses partout sur la planète. Ce projet pourrait fonctionner au départ, mais il sera au bout du compte voué à l'échec.
Notre démarche consiste à examiner toutes les options et à parler aux gens. Qu'on leur fasse d'abord comprendre notre rôle. À Montréal, nous ouvrirons nos portes aux membres de la collectivité cet été — la fête du Travail — pour qu'ils puissent voir ce que nous faisons. Il existe une certaine perception — je ne dirais pas qu'il s'agit d'ignorance dans le mauvais sens du terme — mais nous sommes une entité fermée. Nous n'avons pas raconté notre histoire à la population. Nous en avons parlé aux gens d'affaires, mais il existe une perception, une certaine crainte. Par définition, la population considérera qu'il s'agit d'une expansion et d'un projet dont elle ne veut pas. J'estime avoir une responsabilité dans le cadre du processus démocratique et je tiens à ce que le public se familiarise avec le port.
Il y a des gens à Montréal qui préféreraient avoir accès au fleuve, mais le progrès a un prix, tant économique que social. Prenez notre soutien dans la partie est de Montréal : il est extraordinaire. Les gens savent que nous créons des emplois, et que c'est une bonne chose. Quand je parle de valeur ajoutée, comme je l'ai fait, je parle de logistique et de distribution.
Laissez-moi utiliser l'exemple de Canadian Tire. Tous les conteneurs qui viennent pour notre petit Wal-Mart, mettons, obéissent au même principe : la transformation des marchandises. Il existe de nombreux magasins au Québec et en Ontario, 500, je crois. Nous pouvons ouvrir le conteneur, transformer les marchandises et les réacheminer. Ce sont des emplois additionnels, de bons emplois, pas des emplois de haute technologie, mais de bons emplois pour des gens ordinaires.
Mon but pour 2008 et 2009 est de mettre en lumière le plus et le moins, les avantages et les inconvénients, de façon transparente. C'est la seule façon de procéder, vu que nous sommes dans une grande ville. J'ai l'intention, comme vous l'avez vu, de créer un port dans une ville et non le contraire : pas une ville dans un port.
[Français]
Le sénateur Fox : Je suis loin d'être un expert en matière de conteneurs, mais j'ai entendu votre présentation, je l'ai trouvée extrêmement intéressante et elle explique plusieurs facteurs. Il est important de promouvoir le port, la ville. On a attaqué le port par le passé à cause d'un manque de compréhension de ce qu'il représentait pour Montréal en termes économiques.
Toutes choses étant égales, pas de fermeture sur la côte Ouest, quel est le réel avantage de Montréal sur New York? Je comprends qu'il y a le CN et le CP à Montréal. Je présume qu'il y a des trains également dans la région de New York. Lorsque vous vous rendez à l'étranger pour tenter d'obtenir de nouveaux contrats pour le Port de Montréal, quels sont les avantages que vous leur offrez et les désavantages dont les gens vous font part?
On a aussi parlé il y a quelque temps de développer un centre de logistique international à Montréal et le Port de Montréal était aussi impliqué. Est-ce un concept qui vous intéresse? Ce concept apporterait-il une valeur ajoutée au Port de Montréal?
M. Pelletier : Je répondrai d'abord à votre deuxième question. D'une part, si Montréal n'avait pas 60 p. 100 de son marché canadien, ce serait une autre paire de manches. Avoir une partie de ces revenus canadiens nous donne une assise qui nous permet directement ou indirectement de faciliter ce commerce vers les États-Unis.
D'autre part, c'est une question de productivité; cela va plus vite et cela coûte moins cher. C'est aussi simple que cela. Notre avantage était peut-être de 10, 15 p. 100. Les dernières études datent de 2005, et on refait ces études. Je pense qu'on s'est fait un « égrainer » un peu cela. Ils ont eu des infrastructures sans le renvoyer au prix du conteneur. C'est-à-dire que s'il y a des contributions de l'État de New York dans les installations et que le client n'a pas à les payer, on devient plus compétitif. Cela a été chercher quelques pourcentages sur notre avancée.
Pour les lignes maritimes, même l'élément temps ne compte pas. Ce qui est important, c'est combien cela va coûter. Nous ne sommes qu'un petit élément dans tout cela, 2,5 p. 100 dans le prix d'un conteneur dans la chaîne totale d'approvisionnement. Le chemin de fer fait essentiellement la différence.
En ce qui concerne votre deuxième question, c'est une des premières choses que j'ai regardées. Nous sommes un port, c'est bien, mais que peut-on faire d'autre? J'ai beaucoup examiné le port du Havre, en France. Je me suis demandé pourquoi on n'avait pas fait cela. Pourquoi les conteneurs s'en vont quelque part et on le fait de façon éparpillée. C'est un des axes. Sera-t-il retenu? Je ne peux pas vous le dire. On aura probablement la réponse au printemps. Après avoir étudié le dossier, je pense avoir trouvé la raison pour laquelle cela n'avait pas fonctionné. C'est qu'il n'y avait pas de partenariat. Aussi étrange que cela puisse être, il n'y avait pas de leader, pas de tête dirigeante. Je ne pense pas seulement à des personnes physiques, mais à des compagnies qui ont signifié leur intérêt pour que cela fonctionne. C'était comme une idée de marketing; pas avec les artisans qui vont faire que cela fonctionne. Si on réintroduit cet élément, le modèle d'affaires doit changer de même que l'emplacement. Mon idée est plutôt de regarder vers l'est de la ville plutôt qu'à l'ouest comme avant, sur la route pour aller à l'aéroport Pierre-Elliott-Trudeau.
Le sénateur Fox : Le centre de logistique? C'était plutôt le long de la rue Notre-Dame. C'était dans l'est.
M. Pelletier : Il y avait peut-être deux options. Je vous parle de 1999.
Le sénateur Fox : Un peu plus tard que cela.
M. Pelletier : Il y a peut-être eu une autre phase.
Le sénateur Fox : Le CP Ships s'était impliqué et Phil O'Brien avait fait des études.
M. Mongeau : Ils voulaient changer la courbe Y.
Le sénateur Fox : Pardon?
M. Mongeau : C'était la courbe Y qu'ils voulaient changer parce qu'ils voulaient s'en aller vers l'est.
Le sénateur Fox : Mais pour le faire, il faut un spécialiste de CP Ships?
M. Pelletier : Ce qu'il faut, ce sont des gens spécialisés. Il faut aussi qu'une administration comme le Port de Montréal prépare le terrain. On donne le même niveau d'infrastructure qu'on donne à nos terminaux.
À titre d'exemple, Savannah, un succès formidable, voit sa courbe monter depuis six ans. Ce qui fait son succès, c'est qu'elle fait affaire avec Wal-Mart et Target. La boîte arrive, elle va chez Wal-Mart ou chez Target, et à partir de là c'est le rayonnement. Bien sûr, on ne peut le faire à grande échelle comme aux États-Unis, mais on a quand même de grandes sociétés qui peuvent participer à cela.
Vous me demandiez tantôt jusqu'où on va pousser nos études de marché. Je crois que c'est chez les compagnies canadiennes qu'on va trouver la réponse.
[Traduction]
Le sénateur Zimmer : Merci de votre exposé. Tout d'abord, je souhaiterais vous féliciter de votre nouveau poste et de l'aventure qui vous attend. Bonne chance. Tous nos vœux sont avec vous.
Selon vous, quel est le plus grand obstacle à l'amélioration de l'efficacité et de la compétitivité de votre port?
M. Pelletier : Je me préoccupe de la compétitivité au sein du Canada vers un objectif, alors qu'elle n'est pas nécessaire. Cela peut sembler narratif ou qualitatif. Je souhaite toutefois dire que, pour la première fois dans ma génération, j'ai quitté le Canada pour aller travailler à l'étranger et construire des choses. Ici, j'avais le sentiment que ce n'était pas possible. Je voulais construire des centrales, des métros, notamment. Pour la première fois, dans mes quarante années d'existence, je vois la possibilité de promouvoir une infrastructure majeure pour servir notre pays et lui permettre d'avoir des échanges plus fructueux et plus concurrentiels. Je vois là une occasion unique, qui ne se représentera pas nécessairement. Et nous risquons de la laisser échapper si nous ne nous alignons pas. C'est une menace, car on pourrait perdre le but de vue. C'est ce qui me préoccupe le plus depuis mon arrivée.
Il est vrai que la santé, l'éducation et nos forces armées sont importantes, mais nous avons pris des mesures dans ces domaines. Qu'avons-nous fait pour laisser aux générations à venir une infrastructure qui ne soit pas susceptible de s'écrouler, qui soit efficiente et concurrentielle? Les échanges ouvrent notre pays et les échanges sont aussi importants que la culture. Je ne dis pas que les échanges sont plus importants que la culture, mais ils sont aussi importants. Il ne s'agit pas seulement du port; il s'agit d'échanges.
Ma seconde préoccupation a trait à des éléments que nous ne pouvons pas contrôler, tel que le niveau de l'eau. Le niveau de l'eau est un problème, mais je pense que nous pouvons atténuer une partie du risque.
Pour ce qui est du financement, je ne m'en inquiète pas vu que, si nous avons le soutien du gouvernement, nous serons plus concurrentiels et nous serons en mesure d'offrir une infrastructure à moindre coût. Pourrons-nous connaître une expansion aussi marquée sans soutien? Non. Pour avoir une expansion, il faut un mélange différent de financement. Comment pourrons-nous construire une expansion de 500 millions de dollars sans souplesse financière? C'est sans doute la plus grande menace, si nous ne pouvons pas avoir la souplesse. En effet, ce n'est pas juste le montant, mais la souplesse qui importe.
Le port pourra-t-il émettre des obligations pour construire son infrastructure? Le port pourra-t-il bénéficier de subventions, pour la sécurité ou pour l'environnement, qui ne nous rapportent rien?
Notre position à la fine pointe de la sécurité ne nous rapporte rien. Mais si, demain, nous cessons de devancer nos amis américains et concurrents, les marchandises cesseront de transiter par le Canada et cela constituera un obstacle aux échanges. Pouvons-nous facturer la sécurité à l'utilisateur? Non. Ce sont des obstacles à une croissance additionnelle.
Le sénateur Zimmer : Votre réponse me permet d'enchaîner avec mes deux questions suivantes, dont l'une a trait à l'infrastructure. On élargit à l'heure actuelle le canal de Suez, mais l'Asie construit des navires plus gros que ceux que le canal pourrait accueillir. Vous avez parlé de draguer le port de Montréal et d'en améliorer la profondeur. Serez-vous en mesure d'anticiper les changements, de rester concurrentiels, d'accueillir et de desservir ces plus gros navires?
M. Pelletier : J'ai en partie répondu à cette question il y a quelques minutes. Je me suis rendu à New York à la mi-janvier pour une conférence sur l'investissement dans le transport des conteneurs. Le PDG d'APL était présent, APL étant une société de Singapour en septième ou huitième position dans le monde. Lui est Américain. Il pense que les navires cesseront de devenir de plus en plus grands; il estime que les sociétés ne devraient pas acheter de navires dépassant 10 000 EVP.
On parle assez souvent, dans notre secteur, de la limite à laquelle l'évolution vers de plus gros navires cessera. C'est comme dans l'industrie aérospatiale. Tout le monde va-t-il se procurer l'airbus A380? La réponse est non. Deuxièmement, l'infrastructure ne peut pas accueillir ce type de navires, et cetera.
Nous avons aujourd'hui un marché qui peut recevoir des navires allant jusqu'à 4 000 ou 5 000 EVP. La majorité des navires dans le monde sont plus petits que cela, si bien qu'il en restera toujours suffisamment pour faire escale au port de Montréal. Là n'est pas le problème. Le problème est de savoir si nous serons concurrentiels et comment.
J'ai parlé de sécurité. Il ne faut pas que la sécurité constitue une entrave. Nous devons veiller à garder le développement durable à l'esprit, afin que la population ne s'efforce pas de juguler notre croissance. Ensuite, il faut veiller au rendement des gens et de l'infrastructure. Nous pouvons mieux former les gens mais, pour l'infrastructure, il peut y avoir impasse. Si nous n'avons pas assez d'espace ni assez d'équipement, nous ne pourrons pas connaître la croissance voulue.
Le sénateur Zimmer : Vous avez abordé le dernier domaine sur lequel je voulais vous poser des questions. La sécurité maritime a été marquée, ces dernières années, par l'adoption du Règlement sur la sécurité du transport maritime. L'imposition du Règlement a-t-elle eu des répercussions néfastes sur votre compétitivité et votre efficacité dans la manutention des conteneurs?
M. Pelletier : Aujourd'hui, nous sommes devant le gros du peloton. Nous passons au balayage électronique la totalité des conteneurs à l'importation. Nous avons effectué toutes les vérifications de sécurité voulues. Nous avons une bonne efficience dans nos rapports avec notre clientèle et la GRC. La prochaine étape est d'automatiser entièrement le port, de façon efficiente et avec moins d'intervention humaine.
Ce type de technologie en est à ses débuts, si bien que nous ne sommes pas à la traîne. J'ai visité des ports où on est en train d'introduire ces éléments. J'ai l'intention de poursuivre ce type d'investissement. Nous avons investi entre 7 et 8 millions de dollars au cours des trois dernières années et on compte investir encore plus. Si nous ne pouvons pas obtenir de subventions, nous devrons grever nos bénéfices; ce n'est pas un choix. Ne pas le faire serait imprudent.
J'ai passé les trois dernières années avec SPAR Aerospace, dont j'étais président. SPAR appartient à L-3 Communications, l'une des premières sociétés de défense et d'équipement militaire des États-Unis. Je sais ce que nous pouvons faire. Il y a un élément technologique à introduire pour rendre notre port plus sûr. Si notre port est plus sûr, les échanges avec les États-Unis ne seront pas enrayés. Nous estimons même qu'ils augmenteront parce que nous serons plus efficaces.
Nous sommes un peu plus agiles que New York. Nous comptons 325 employés, alors que l'administration portuaire de New York en compte 300 000. C'est une autre échelle. Nous sommes extrêmement ciblés. Nous faisons une chose : faciliter les échanges grâce à notre installation, notre infrastructure et nos gens.
Le sénateur Zimmer : Pensez-vous que le gouvernement fédéral ait opté pour la bonne approche pour satisfaire les normes internationales et avez-vous demandé et obtenu un financement au titre du Programme de contribution pour la sûreté maritime?
M. Pelletier : Oui, nous l'avons fait. Par exemple, au port de Montréal, nous avons environ 250 caméras de surveillance, ce qui est une très bonne chose. On s'imagine toujours que les Américains font cela mieux que nous, mais je me suis rendu à Long Beach, où c'est une remorque qui abrite les installations de sécurité; chez nous, le bâtiment de la sécurité vaut 21 millions de dollars. Nous avons un excellent centre de contrôle. J'estime qu'il faut continuer sur cette voie.
Mon but, cette année et la prochaine, est de transformer l'image et d'utiliser l'intelligence artificielle. Il ne s'agit pas de science fiction; il existe une technologie capable de faire cela. Elle analysera l'information et déclenchera des alarmes. Je passerai au processus pour que nous puissions être plus vigilants et plus rapides. Aucun être humain ne peut surveiller 250 caméras en même temps. Le problème avec la technologie d'aujourd'hui est qu'elle déclenche des alarmes quand des pigeons passent. Mais les choses s'améliorent rapidement.
La question est de savoir si on peut se permettre cette sécurité. Est-ce que le port de Montréal en a les moyens? Devrions-nous nous endetter à cette fin ou le gouvernement devrait-il nous aider? Si vous me le demandez, la réponse est simple : le gouvernement devrait appuyer ces efforts, parce qu'il s'agit d'une question de sécurité nationale et d'échanges.
[Français]
La présidente : Messieurs Pelletier et Mongeau, madame Isaacs, nous vous remercions d'avoir comparu au comité. On peut dire que les questions étaient nombreuses et diversifiées et je pense que c'est le début de votre relation avec le Comité sénatorial permanent des transports et des communications.
Le comité se réunira bientôt pour étudier d'autres projets de loi. Encore une fois, je vous remercie et je vous souhaite bonne chance dans vos nouvelles fonctions.
[Traduction]
Merci de nous donner cette occasion de vous faire part de notre point de vue et de notre vision.
La présidente : Nous avons un autre point à l'ordre du jour : la proposition relative aux frais d'utilisation du ministère de l'Industrie concernant un droit de licence de spectre pour les communications des services de sécurité publique à large bande dans les bandes 4940-4990 MHz.
Comme vous vous en souviendrez, nous avons effectué une étude des frais d'utilisateur en juin dernier et déposé notre rapport le 13 juin. Nous recevons aujourd'hui les fonctionnaires du ministère de l'Industrie, qui ont comparu devant le comité au sujet de cette question en juin 2007. Nous voudrions savoir s'il y a eu, depuis cette époque, des éléments nouveaux qui vous amèneraient à modifier ce que vous avez dit au comité alors.
Industrie Canada est représenté par Kevin Lindsey, sous-ministre adjoint par intérim, Spectre, technologies de l'information et télécommunications, Glenn Sheskay, avocat, Services juridiques, et Heather Hall, gestionnaire, Réseaux émergents. Bienvenue au comité.
Kevin Lindsey, sous-ministre adjoint par intérim, Spectre, Technologies de l'information et Télécommunications, Industrie Canada : Il y a eu une petite évolution, dans la mesure où certaines municipalités se sont manifestées depuis la comparution de mon prédécesseur devant le comité, en juin dernier. Elles ont exprimé le souhait d'avoir accès au spectre en faisant une demande de licence expérimentale. C'est une étape visant à vérifier l'équipement voulu pour utiliser ce spectre. À part cela, il n'y a pas grand-chose de nouveau.
La présidente : Est-ce que cela changerait le rapport?
M. Lindsey : Dans la mesure où il n'y a pas eu d'autres interventions de personnes en faveur depuis nos consultations, je dirais que non.
La présidente : En juin 2007, notre comité a approuvé les frais d'utilisateur envisagés mais a exprimé plusieurs préoccupations dans ses observations. Vous vous souviendrez que nous nous sommes demandé s'il était approprié de demander à des entités vouées à la sécurité du public de payer pour leur emploi du spectre. Nous nous préoccupions aussi des éléments subjectifs dans le calcul des frais d'utilisation envisagés et du choix de frais d'utilisation d'après la valeur économique plutôt que le recouvrement des coûts. Avez-vous des commentaires, au vu de ces préoccupations?
M. Lindsey : Tout d'abord, le fait que les agences au service du public aient à payer pour leur accès au spectre est un principe qui existe maintenant depuis de nombreuses années et qui est inscrit dans la loi depuis la fin des années 1980 ou le début des années 1990.
J'occupe mon poste actuel depuis huit jours seulement. Je demanderais donc à mes collègues d'intervenir s'il leur semble que je vous induis en erreur sur un fait. C'est un principe inscrit dans notre politique de gestion du spectre et les lois afférentes depuis de nombreuses années. Les services publics, la police, les pompiers, les ambulances, et cetera, paient pour leur accès au spectre depuis ce temps.
Les frais d'utilisateur s'appliquent à une nouvelle bande du spectre que nous rendons disponible pour les agences; elle servirait des objectifs différents et leur permettrait de tirer parti d'équipement nouvellement disponible sur le marché. C'est pourquoi, conformément à la politique et à l'approche en matière de lois qui existent depuis de nombreuses années, nous estimons qu'il est raisonnable de facturer des frais d'utilisateur dans ce cas.
En ce qui concerne les critères d'établissement des frais d'utilisateur, je pense qu'il a été reconnu en juin, lors de la dernière comparution de nos fonctionnaires, qu'il était très difficile d'établir des frais d'utilisation pour cet accès, dans la mesure où il n'y a pas de marché. Vu qu'il s'agit de frais d'utilisation pour des services publics comme les pompiers, les services d'urgence ou les ambulances, il n'y a pas d'échange. Il est très difficile d'établir un prix de marché.
Les fonctionnaires ont abordé la question sous plusieurs angles. Tout d'abord, nous avons vu ce qui se faisait à l'étranger pour ce spectre, en Angleterre, en Australie et aux États-Unis. Au Royaume-Uni, bien qu'il soit difficile de comparer deux éléments exactement semblables dans ce domaine, nous estimons que les frais d'utilisateur sont supérieurs d'environ 60 p. 100 à ceux que nous proposons. D'après notre analyse, en Australie, ils sont à peu près similaires. Encore récemment, les États-Unis ne demandaient rien pour l'accès à ce spectre. Cependant, la Federal Communications Commission vient tout juste de proposer un changement de cap à cet égard.
Quant à la valeur économique, elle tombe sous le coup de la première question, sénateur. Il s'agit en fait de la politique adoptée quand nous avons décidé de facturer l'accès au spectre. C'est inscrit dans la loi.
Le sénateur Mercer : Qui paie les frais d'utilisateur? Qui fait le chèque, au bout du compte?
M. Lindsey : Il y a différents utilisateurs du spectre, dont la GRC, les services de police municipaux, et cetera.
Dans le cas de la GRC, c'est l'organisme qui paie les frais d'utilisateur; dans le cas d'entités municipales, je vais devoir m'en remettre à Mme Hall ou à M. Sheskay, parce que je ne sais pas si ce sont les municipalités qui paient des frais d'utilisateur ou le service lui-même.
Heather Hall, gestionnaire, Réseaux émergents : La licence est octroyée à l'entité qui est propriétaire du réseau et qui l'exploite; c'est elle qui paie la licence et la facture.
Le sénateur Mercer : Cela semble être une question de sécurité, que ce soit au niveau local, national ou régional. Si je comprends ce que vous dites, monsieur Lindsey, avec l'évolution de la technologie, le processus d'établissement de frais a lui aussi évolué et nous avons trouvé de nouvelles façons de facturer ces frais. Est-ce bien le cas?
M. Lindsey : Permettez-moi d'intervenir. Dans le cas en question, la base de facturation des frais d'utilisateur a été établie de nombreuses années avant l'arrivée de la technologie voulue pour l'utilisation de ce spectre. Pourquoi offrir maintenant ce spectre? Parce que nous avons maintenant un équipement qui permet au service de l'exploiter.
Le sénateur Mercer : Vous parlez d'« offrir ». Est-ce que cela veut dire qu'on peut se prévaloir de vos services ou en choisir d'autres? Existe-t-il un concurrent vers lequel la GRC ou les services de police municipaux pourraient se tourner?
M. Lindsey : Les services municipaux peuvent avoir recours à toute une série de services pour communiquer et utiliseraient, pour ce faire, différentes parties du spectre. Dans le cas présent, il s'agit d'une zone particulière du spectre habituel, zone utile pour la transmission de données et d'images sans fil.
Pour vous donner une idée de ce dont nous parlons, je dirais qu'une grosse municipalité pourrait équiper ses services d'incendie d'une technologie permettant à un pompier qui s'aventure dans un bâtiment en feu de visionner les plans d'étage de l'immeuble, plans et données transmis sans fil dans ce spectre. Ce n'est pas le même spectre que celui utilisé, par exemple pour communiquer d'une voiture de police à une autre.
Le sénateur Mercer : Je viens d'un coin du pays où les municipalités ne roulent pas sur l'or. Ai-je raison de dire que, si la municipalité ne paie pas les droits d'utilisateur, les pompiers s'aventureront dans le bâtiment en feu sans avoir pu profiter de cette technologie?
M. Lindsey : Les frais d'utilisateur pour une ville de la taille d'Halifax seraient d'à peu 1 450 $ par licence.
Le sénateur Mercer : Par licence et par an?
M. Lindsey : Effectivement. Pour mettre ceci en perspective, par rapport au prix de l'équipement nécessaire, nous nous sommes penchés sur un exemple dans une petite ville de l'Oregon. Entre le prix du matériel pour les sites fixes et le prix d'établissement des réseaux et des dispositifs de communication proprement dits, le total frise un million de dollars. Par rapport au coût d'établissement du service et d'acquisition de l'équipement nécessaire, les frais de licence sont en fait vraiment minimes.
Le sénateur Mercer : Le coût de ce matériel est peut-être prohibitif pour une municipalité ayant des problèmes d'infrastructure, une municipalité qui a du mal à joindre les deux bouts. Si vous voulez parler d'Halifax, je peux vous donner une liste de 10 routes qui auraient besoin d'être réparées.
Je reste préoccupé par l'imposition d'une taxe sur ce qui est bon pour la sécurité. Il semblerait utile d'avoir le produit dont vous parlez, mais je crains que certaines forces de police municipales restent exclues. Pouvons-nous véritablement nous permettre de dispenser jusqu'à un million de dollars pour le matériel, et cetera.? Les 1 400 $ par licence et par an sont insignifiants, mais les autres coûts risquent d'être prohibitifs. Je ne sais pas quelle pourrait être la solution au problème. Mais j'estime qu'il y a un problème.
M. Lindsey : Excusez-moi, sénateur, j'ai mal interprété votre question. Le coût peut être très élevé. Je dois souligner, toutefois, qu'Industrie Canada n'a rien à voir avec l'acquisition de l'équipement; nous ne forçons pas les services municipaux à utiliser ce service. Nous avons seulement cerné un élément ou une partie du spectre régulier que ces services pourraient utiliser, s'ils ont les moyens de l'exploiter par ailleurs.
Le sénateur Mercer : Toute ville moderne voudrait que ses biens soient protégés, mais aussi qu'un service de ce type assure la sécurité de ses policiers et de ses pompiers. Cela devient vraiment un coût à payer pour rester dans la partie. Si les villes veulent fournir des services policiers et des services d'incendie de qualité, elles doivent avoir ce service. On a beau dire que c'est facultatif, ce n'est pas facultatif si l'on veut assurer un service de qualité à ses citoyens.
M. Lindsey : Il m'est difficile de dire le contraire.
La présidente : Chers collègues, il me faut une motion d'adoption du onzième rapport adopté le 13 juin 2007, afin que nous puissions en faire rapport avec les observations consignées à l'époque. Je pense qu'elles restent très importantes. Nous pouvons en faire rapport au Sénat à nouveau.
Le sénateur Tkachuk : Je propose la motion.
La présidente : La motion est-elle adoptée à l'unanimité?
Des voix : D'accord.
La présidente : Fort bien. Merci beaucoup.
Merci de votre présence ici aujourd'hui.
Chers collègues, il est possible que nous ne siégions pas mardi matin. Nous attendons encore une réponse de Wal-Mart. Nous siégerons mercredi.
Je n'ai pas encore levé la séance.
Le sénateur Mercer : Nous pourrions peut-être passer à huis clos un moment, afin de tenir une brève discussion.
Le comité poursuit ses travaux à huis clos.