Délibérations du comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones
Fascicule 15 - Témoignages - séance du matin
KELOWNA, Colombie-Britannique, mardi 29 septembre 2009
Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd'hui à 9 h 20 pour étudier les responsabilités constitutionnelles, conventionnelles, politiques et juridiques du gouvernement fédéral à l'égard des Premières nations, des Inuits et des Métis et d'autres questions générales relatives aux peuples autochtones du Canada (sujet : questions relatives aux élections selon la Loi sur les Indiens).
Le sénateur Gerry St. Germain (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bonjour. Au nom du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, j'aimerais vous souhaiter la bienvenue à Kelowna ce matin. Je suis le sénateur Gerry St. Germain et je viens de la Colombie-Britannique. Mes collègues, le sénateur Nancy Greene Raine à ma droite et le sénateur Larry Campbell, ancien maire de Vancouver, sont assis à côté de moi. Nous sommes tous les trois fiers de représenter la province de la Colombie-Britannique, et le sénateur Lillian Dyck de la Saskatchewan viendra se joindre à nous cet après-midi.
Les séances d'aujourd'hui seront consacrées à l'étude de la réforme du régime électoral de la Loi sur les Indiens à laquelle procède le comité. Nous avons entendu jusqu'ici des témoins à Ottawa et au Manitoba et pour nous, ce voyage dans l'Ouest est un aspect très important de cette étude à cause du nombre des Premières nations de la Colombie- Britannique qui sont touchées par les dispositions électorales de la Loi sur les Indiens.
Avant d'entendre les témoins ce matin, j'aimerais dire quelques mots au sujet des raisons qui ont amené le comité à se lancer dans cette étude et vous dire que la décision qu'a prise le comité d'étudier le régime électoral de la Loi sur les Indiens est, en partie, fondée sur les critiques qu'ont faites les Premières nations de ce que la Loi sur les Indiens exige la tenue d'élections tous les deux ans, ce qui empêche les dirigeants des Premières nations d'adopter des orientations stratégiques à long terme ainsi que de planifier et de mettre en œuvre des processus durables avant de devoir faire face à de nouvelles élections. La fréquence des élections crée de l'incertitude chez les membres des collectivités autochtones. Après avoir pris connaissance de ces préoccupations, le 1er avril 2009, le comité a convenu d'examiner les questions touchant les élections selon la Loi sur les Indiens.
Le comité sollicite le point de vue des Premières nations concernées sur trois aspects, en particulier : premièrement, la prolongation du mandat des chefs et des conseillers, qui est actuellement de deux ans aux termes de la Loi sur les Indiens; deuxièmement, la question de la tenue d'élections à date fixe et troisièmement, les mécanismes de destitution qui pourraient être mis sur pied au cas où la durée du mandat serait prolongée.
Le comité a commencé ses audiences en avril 2009 et il s'est ensuite rendu à Winnipeg et à Dauphin au Manitoba. La C.-B. est la destination de notre deuxième voyage et nous allons entendre des témoins ici à Kelowna, à Williams Lake et à Vancouver. À la mi-octobre, nous avons projeté de nous rendre au Nouveau-Brunswick, dans les villes de Fredericton et Miramichi. Les Premières nations qui tiennent, à l'heure actuelle, des élections selon la Loi sur les Indiens ou qui ont récemment adopté un régime d'élections coutumier représentent la majorité des témoins que nous avons entendus jusqu'ici sur cette question.
Le comité a également prévu une période de discussion pour que les membres des collectivités puissent faire connaître leurs préoccupations et présenter leurs idées.
Les membres du comité prévoient être en mesure de déposer un rapport final au Sénat d'ici la fin de l'année 2009.
Nous allons entendre ce matin le chef Tim Manuel de la bande indienne de la Upper Nicola, qui fait partie de la nation Okanagan.
Monsieur, nous vous souhaitons la bienvenue. Nous sommes honorés de votre présence et nous aimerions savoir ce que vous pensez du régime électoral utilisé pour choisir les dirigeants et les gouvernants de nos Premières nations. Vous pourriez, peut-être, également nous dire comment votre collectivité choisit son chef et ses conseillers. Vous avez la parole, monsieur.
Tim Manuel, chef, bande indienne de la Upper Nicola : Merci.
[Le témoin a parlé dans sa langue, l'okanagan.]
J'aimerais remercier le Créateur pour cette belle journée et pour m'avoir permis d'être ici. Je remercie chacun des sénateurs d'être ici. Je ne pensais certainement pas que j'allais témoigner; j'allais m'asseoir en arrière, mais j'ai l'honneur de représenter ma collectivité. Les chefs Okanagan se sont rencontrés jeudi et ont convenu que le chef Clarence Louie prendrait la parole au nom de la nation, certainement devant le comité permanent du Sénat canadien au sujet des politiques électorales et j'ai simplement manifesté l'intérêt d'assister à cette séance.
Dans mes remarques d'ouverture, j'ai simplement salué toutes les personnes présentes. Mon nom indien est Petkwlax, qui veut dire « Clou dans la Terre. » Mon deuxième nom est chef Timothy Manuel, bande de la Upper Nicola. Ma famille est issue d'une lignée de chefs héréditaire qui ont occupé ce poste depuis des temps immémoriaux. Nous possédons des documents qui nous permettent de remonter à neuf générations dans cette lignée.
Nous faisons partie de la nation Okanagan. Nous résidons dans une région tout à fait unique. Il y a le Secwepemc au nord, le Shuswap, le Nlaka'pamux à l'ouest, qui est le Thompson. Notre langue est l'okanagan, même si nous ne sommes pas dans le bassin versant de l'Okanagan et que nous sommes situés dans le bassin versant de la Nicola. Nous nous trouvons là parce que nous avons agi comme médiateurs entre les Shuswap et l'Okanagan au milieu des années 1700. Ces deux nations étaient en guerre et ce que nous appelons l'Accord de Fish Lake et la Confédération Shuswap- Okanagan ont été adoptés pour mettre fin à cette guerre, établir et renforcer nos liens.
Voici donc une partie de l'histoire des Spaxomin Syilx, comme on nous appelle, et cela fait partie de notre gouvernance traditionnelle.
J'aimerais citer M. Harper, qui a déclaré qu'il n'y a jamais eu de colonialisme dans notre pays. Il a fait cette déclaration avant, je crois, les réunions qu'il a tenues dans l'Est, et c'est toute une déclaration, d'après moi. Depuis les 150 dernières années, en tout cas en C.-B., et encore depuis plus longtemps dans ce pays, il y a eu un gouvernement colonial qui a imposé son régime électoral et des réformes aux peuples des Premières nations.
Avant tout ceci, nous avions notre régime de gouvernance traditionnelle qui fonctionnait très bien. Comme cela a été mentionné plus tôt, ma famille vient d'une lignée de chefs qui ont pris en charge cette région et agi comme médiateurs entre deux nations. La gouvernance traditionnelle comprenait un chef de la chasse, un chef de la pêche au saumon, ainsi que des personnes qui s'occupaient de certaines zones de chasse, de certaines zones de pêche, de sorte qu'il n'y avait pas qu'un seul chef, mais plusieurs, et il y avait un grand chef.
Voilà comment nous concevons la gouvernance traditionnelle et nous voulons qu'elle soit reconnue et la rétablir. Je crois que cela a toujours soulevé des difficultés dans ma collectivité, à savoir faire reconnaître nos chefs héréditaires, pas seulement dans ma collectivité, mais dans les différentes nations. Je crois que l'autre question qui soulève des difficultés pour nos membres est qu'il y a un chef de la collectivité et un chef politique, c'est un aspect qui mérite certainement d'être examiné.
La bande indienne de la Upper Nicola a adopté sa loi électorale coutumière en 2005 et elle prévoit un mandat d'une durée de trois ans. Nous avons un conseiller par 100 membres et un chef. Nous avons, à l'heure actuelle, 870 membres de la collectivité et un chef, ce qui représente en tout neuf conseillers. Ils sont élus, je crois, au mois de mars tous les trois ans. Nous venons de modifier ce mandat qui est passé de deux à trois ans.
Le président : Merci, chef. Êtes-vous prêt à répondre à des questions?
M. Manuel : Oui.
Le sénateur Campbell : Merci d'être venu aujourd'hui. J'étais très intéressé par votre histoire. C'est une histoire étonnante et je crois qu'il faudrait la raconter plus souvent.
Pensez-vous qu'un mandat de trois ans est suffisamment long? Est-ce que cela favorise une certaine continuité?
M. Manuel : Oui.
Le sénateur Campbell : Vous êtes satisfait d'un mandat de trois ans et du processus?
M. Manuel : Oui.
Le sénateur Campbell : Pourriez-vous aussi me dire quelles sont les relations entre le conseil élu et le conseil héréditaire, le système de gouvernement héréditaire? Sont-ils intégrés ou parallèles et comment cela fonctionne-t-il?
M. Manuel : C'est un élément que nous essayons de rétablir. Nous n'y sommes pas encore tout à fait parvenus. Je sais que d'autres nations, comme la nation Squamish, ont des chefs héréditaires, et que ce sont principalement des membres de la famille qui représentent leurs familles, et ils ont un conseil élu. C'est le genre de choses que nous voulons également examiner, à savoir accorder aux chefs héréditaires une reconnaissance au moins égale pour ce qui est d'intervenir dans les affaires de la bande, je veux parler de titre, de droits et d'économie, vous le savez. Nous venons tout juste de rétablir ce système, dans notre collectivité, il y a trois ans en décembre.
Le sénateur Campbell : Combien y a-t-il de chefs héréditaires dans votre nation?
M. Manuel : À ma connaissance, je pense qu'il y en a trois.
Le sénateur Campbell : En plus de leurs responsabilités en matière de traités, et le reste, peut-on dire que c'est la lignée de ces chefs qui fait votre nation, pour ce qui est de l'histoire, des connaissances et du passé?
M. Manuel : Oui. Mon oncle est le chef héréditaire et il possède un bâton de commandement, un présent du Roi Édouard VII, et aussi quelques médailles que lui a remises le Pape Pie V. C'est mon arrière-arrière-grand-père, John Chillihitzia, qui est allé en Angleterre au début du siècle dernier. Je me demandais où se trouvaient ce bâton de commandement et ces médailles et si elles étaient bien gardées. Il est important, à mon avis, que la Couronne reconnaisse la valeur de ce bâton de commandement et de ces médailles.
Le sénateur Campbell : Oui.
Le président : Une précision, chef, le chef de la collectivité n'est-il pas votre oncle Kerry?
M. Manuel : Oncle Dan.
Le président : Et vous êtes le chef politique.
M. Manuel : Je suis le chef politique, mais c'est mon oncle Dan qui est le chef héréditaire.
Le président : Oui. Vous disiez que vous aviez un chef de la collectivité et un chef politique?
M. Manuel : Non, je parlais de l'idée d'avoir ces deux chefs.
Le président : Très bien.
M. Manuel : Non, non. Nous avons reconnu son titre de chef et son nom, parce que ma famille a porté le bâton de commandement qui lui a été remis par mon arrière-arrière-grand-père, le chef Chillihitzia, au début du siècle, c'était je crois, en 1906, et c'est le Roi Édouard VII qui le lui avait donné et le Pape Pie V lui avait remis les médailles.
À l'époque, il y avait une violation du titre aborigène et il avait voulu aller à Ottawa pour parler aux gouvernants de l'époque, qui ont refusé de le voir. Il s'est alors rendu en Angleterre et il est allé voir le Pape, parce que c'étaient les niveaux de gouvernement les plus élevés à l'époque, dans le but de faire connaître ses préoccupations. Ils ont reconnu qui il était, ils lui ont offert un bâton de commandement et lui ont fait l'honneur de lui remettre la Proclamation royale de 1763 sur la reconnaissance des Premières nations et l'alliance avec la Couronne.
Le président : L'autre question que je voudrais vous poser, à titre de précision, est la suivante : Pensez-vous que la situation idéale consisterait à revenir aux coutumes traditionnelles et de n'avoir que des chefs héréditaires ou pensez- vous que la nouvelle société que constituent les Premières nations exige qu'il y ait un chef politique? Les Gitxsan, et leurs longues maisons, aimeraient être gouvernés selon le système des wilps, qui représentent les divers clans de la nation Gitxsan. Qu'en pensez-vous?
M. Manuel : J'aimerais que cela se fasse. Les chefs étaient choisis au départ, ils étaient formés depuis leur plus jeune âge, alors qu'un chef élu c'est un peu le goût du jour qui l'emporte, si je peux m'exprimer ainsi. Veuillez excuser mon jeu de mots, mais ce sont des gens qui jouissent de la faveur de la population pendant un certain temps. La tradition consistait à choisir un chef; il était formé depuis son enfance, on lui enseignait les traditions, la culture, la langue, l'histoire de son poste; on lui apprenait ce qu'il devait savoir pour occuper ce poste lorsque le chef au pouvoir estime que le moment était venu de transmettre sont titre de chef et devenir un ancien. Le système électoral actuel ne fonctionne pas.
Le sénateur Raine : Je viens d'être nommée membre du comité et je ne sais pas très bien ce qu'est la gouvernance dans les diverses Premières nations de notre pays. Il y a des traditions et des coutumes et il y a aussi les dispositions obligatoires de la Loi sur les Indiens; je sais que cela a causé de nombreux problèmes. La bande de la Upper Nicola a décidé, il y a trois ans, d'adopter un régime électoral coutumier, pouvez-vous m'expliquer comment cela s'est fait? Auparavant, vous aviez des élections selon la Loi sur les Indiens?
M. Manuel : Oui.
Le sénateur Raine : Comment est-ce que la bande a pris cette décision et comment en êtes-vous arrivé à rétablir vos propres coutumes?
M. Manuel : Il est évident que les membres de la bande, comme le sénateur St. Germain l'a mentionné dans sa déclaration d'ouverture, savaient que de nombreuses Premières nations se plaignaient du fait qu'un mandat de deux ans était trop court. Nous avons tenu quelques assemblées générales de la bande et les membres ont soulevé cette question et déclaré que c'était un mécanisme que nous voulions examiner et adopter, une loi sur les élections coutumières. Je ne peux pas vous dire exactement combien il a fallu d'assemblées de la bande, mais je crois que nous avons préparé sept ou huit projets de loi sur les élections coutumières avant d'en adopter un, cela a pris près d'un an et quelques mois. Le premier projet a été communiqué aux membres de la bande, ils ont fait leurs commentaires, supprimé certaines dispositions de la loi électorale et l'ont ensuite renvoyé aux rédacteurs. Le personnel et le conseil l'ont examiné, l'ont présenté aux membres au cours d'une autre assemblée, en ont discuté encore, ont ajouté d'autres dispositions à la loi qui a finalement été adoptée.
Le sénateur Raine : Pour ce processus, avez-vous mis sur pied un comité spécial du conseil?
M. Manuel : Oui, nous en avons créé un. Je pense qu'il y avait quatre ou cinq personnes qui formaient un groupe de travail. Après les assemblées générales de la bande, ce groupe de travail se réunissait et formulait des recommandations qu'il présentait aux membres pour qu'ils les ratifient.
Le sénateur Raine : Est-ce que le chef à cette époque était favorable à ce processus?
M. Manuel : Oh, oui.
Le sénateur Raine : Si votre bande tient des élections selon la Loi sur les Indiens, elle bénéficie de l'appui financier du gouvernement fédéral pour les coûts associés aux élections, alors que si vous adoptez une coutume, il n'y a pas d'appui financier. Est-ce que cela a été un élément négatif? Comment le groupe a-t-il réagi à cela?
M. Manuel : Tout le monde a été d'accord. Cela a été accepté. Je pense que les deux dernières élections ne nous ont pas coûté plus de 8 000 ou 9 000 $. Nous avons utilisé d'autres revenus provenant de nos ressources, forestières notamment, pour assumer ce coût.
Le sénateur Raine : Vous avez trouvé que cela valait la peine de pouvoir faire les choses vous-mêmes.
M. Manuel : Bien sûr.
Le sénateur Raine : Avez-vous eu deux élections selon la coutume ou seulement une?
M. Manuel : Deux.
Le sénateur Raine : Vous êtes donc dans la quatrième année.
M. Manuel : Excusez-moi, il n'y en a eu qu'une. Nous avons ratifié cette entente trois ans avant la dernière élection qui s'est tenue au printemps de 2008.
Le sénateur Raine : Vous l'avez en fait ratifiée en 2005.
M. Manuel : Oui, nous l'avons ratifiée en 2005, mais je crois que c'est encore un document de travail. Je crois qu'il reste quelques zones ou quelques dispositions qu'il faudrait légèrement modifier pour que cela soit plus clair, parce qu'il faudrait que certaines choses soient plus précises. Je pense qu'un de ces aspects est la date limite des mises en candidature, à savoir à quel moment elles doivent être remises, si elles doivent être transmises comme un document de mise en candidature, signées et remises à un agent électoral, ou si elles peuvent être télécopiées ou remises personnellement à l'agent électoral; il faut donc préciser tout cela. C'est une question qui a été soulevée au cours de la dernière élection.
Le sénateur Raine : Il y a des petites difficultés de ce genre qui surviennent. En fin de compte, pensez-vous qu'il ne sera sans doute pas très difficile de résoudre ce problème?
M. Manuel : Oui. Cette question a été inscrite à l'ordre du jour de l'assemblée générale de la bande pour qu'elle soit examinée et réglée.
Le sénateur Raine : Chef Manuel, lorsque vous avez commencé le processus, je suis certaine que vous avez examiné comment fonctionnaient les autres Premières nations de la province, peut-être même du Canada, qui possédaient des codes coutumiers. Avez-vous constaté qu'il y avait des notions communes et que vous pouviez tirer profit de leur expérience?
M. Manuel : Dans quel sens?
Le sénateur Raine : Lorsque vous avez rédigé votre propre code électoral, il aurait été sans doute utile d'en examiner d'autres et de dire « Eh bien, nous pouvons peut-être prendre certaines choses de ce code ou de cet autre code » ou bien êtes-vous reparti à zéro?
M. Manuel : Nous n'avons certainement pas essayé de réinventer la roue. Nous avons examiné d'autres modèles qui fonctionnaient bien et nous en avons adopté certaines parties.
Le sénateur Raine : Étiez-vous membre du comité qui a étudié cette question?
M. Manuel : Non.
Le sénateur Raine : Je ne devrais peut-être pas vous poser cette question, parce que vous ne les avez sûrement pas tous examinés. Les codes électoraux coutumiers existent, à mon avis, depuis longtemps, et ont certainement évolué au cours des années.
M. Manuel : Je ne sais pas très bien depuis combien de temps ces codes électoraux coutumiers existent. Je dirais qu'ils existent probablement depuis les années 1970.
Le sénateur Raine : Pour ce qui est de l'avenir, vous êtes à la recherche de façons d'intégrer à votre code coutumier le respect du patrimoine et de la lignée ainsi qu'une certaine fonction consultative?
M. Manuel : Vous parlez du chef héréditaire?
Le sénateur Raine : Oui.
M. Manuel : Le minimum serait bien sûr qu'il ait un rôle consultatif, mais il devrait également pouvoir siéger à la table du conseil. Nous voulons qu'il soit reconnu et c'est bien sûr un élément que nous appuyons.
Nous avons tenu quelques discussions à ce sujet, mais nous n'en sommes pas encore arrivés à une entente avec le conseil actuel. Il semble y avoir deux groupes lorsqu'il faut prendre une décision à ce sujet, parce qu'il y a des gens qui pensent qu'il n'est pas possible d'avoir deux chefs. Je sais que les bandes Stl'atl'imx, qui font partie des bandes Lillooet, ont prévu un chef de la collectivité et un chef politique, qui ont chacun leur propre rôle, et c'est bien évidemment un mécanisme que nous souhaitons examiner et que nous espérons adopter un jour. Le chef de la collectivité s'occupe de la chasse et de la pêche, de nourrir les anciens, et peut-être d'apporter du bois à certains anciens. Il y en a qui utilisent des poêles à bois, il faut donc qu'ils aient du bois de chauffage et de cette façon, ce chef prend soin de la collectivité.
Le chef politique assisterait à des réunions comme celle-ci, pour représenter la collectivité dans les discussions de gouvernement à gouvernement et dans les négociations avec les districts régionaux, le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral.
Le sénateur Raine : Quel est le chef qui s'occuperait de l'attribution des logements?
M. Manuel : Je dirais les deux.
Le sénateur Raine : Le conseil plénier?
M. Manuel : Oui, parce que cela touche les deux. Cela veut dire s'occuper des membres et parler au ministre ou attribuer des fonds ou faire des démarches pour obtenir davantage de fonds pour le logement.
Le sénateur Raine : Lorsque vous avez décrit comment les choses se passaient avec le système héréditaire, vous avez dit que le futur chef serait choisi parmi les très jeunes enfants. Qui ferait ce choix?
M. Manuel : Certainement celui qui est chef et probablement, les anciens de la collectivité.
Le sénateur Raine : Ils étudieraient les enfants du chef et de ses frères, et peut-être aussi, de ses sœurs pour voir quels sont ceux qui semblent avoir la capacité ou le talent pour être chef.
M. Manuel : Oui, tout à fait.
Le sénateur Raine : Ce serait un processus générationnel. Ce ne serait pas nécessairement le fils du fils du fils, mais ce serait une génération qui choisirait un représentant de la génération suivante qui soit suffisamment jeune pour qu'elle puisse le former et l'instruire.
M. Manuel : Oui, tout à fait.
Le sénateur Raine : Lorsque les gens pensent aux chefs héréditaires, ils pensent au système qui existe en Angleterre, où c'est le fils aîné du fils aîné, du fils aîné, ce qui n'est pas toujours la meilleure façon, parce qu'il peut fort bien arriver que cette personne n'ait pas la capacité ou le désir de devenir roi. Il est bien préférable de choisir quelqu'un parmi la génération suivante.
M. Manuel : Je suis un exemple vivant de ce système. J'ai deux frères aînés qui n'ont jamais eu l'ambition politique de remplir ce rôle. Feu mon père, mon grand-père, son père et les autres étaient des chefs, et il y a donc une lignée dans notre famille. Comme vous l'avez mentionné, j'ai simplement été choisi. Je ne dirais pas que j'ai été choisi très jeune, mais j'ai subi les bonnes influences des anciens, celles de feu mon père dans son poste et de son enseignement.
Le sénateur Raine : Lorsque vous dites « très jeune », vous aviez peut-être 10 ou 12 ans?
M. Manuel : Probablement un peu moins.
Le sénateur Raine : À ce moment-là, est-ce que l'apprentissage de la langue faisait partie de votre formation?
M. Manuel : En partie, oui, même si je ne la parle pas couramment. Je la comprends un peu et je la parle, mais encore une fois à cause de ce qu'ils ont vécu dans les pensionnats, mes parents ne nous l'ont jamais enseignée. Mon père était un dictionnaire vivant de cette langue, mais je suis attristé de devoir dire qu'il n'a jamais pris le temps de nous l'enseigner, à cause de ce qu'il avait vécu dans les pensionnats, parce qu'on le battait chaque fois qu'il parlait notre langue.
Le sénateur Raine : Je crois que je comprends beaucoup mieux comment fonctionne le système de la lignée.
M. Manuel : Lorsque je parle des choix, il n'y avait pas que le chef qui était choisi, mais tous les membres de la collectivité et les autres enfants étaient choisis pour devenir des chasseurs, des pêcheurs, ou des cueilleurs. On les choisissait aussi très jeunes pour qu'ils fassent ce genre de travail.
Le sénateur Raine : Est-ce que cela se fait toujours dans vos collectivités?
M. Manuel : Pas très fréquemment, mais dans certains cas, oui. J'ai un fils de 31 mois qui voudra peut-être faire la même chose. Nous allons lui enseigner la langue, lui enseigner tout ce que j'ai appris, comment vivre de ce qu'offre la terre et cela se fait ainsi. On dit que l'être humain se développe très rapidement jusqu'à six ans, c'est la période pendant laquelle il apprend le plus.
Le sénateur Raine : Oui.
M. Manuel : Il est comme une petite éponge. Il sait comment utiliser la neige pour la purification; il n'a que 31 mois. Il parle un peu notre langage, il sait ce qu'est une suerie. Je l'ai déjà emmené dans une suerie. Il est donc vrai qu'à cet âge, les enfants apprennent très facilement et ils aiment beaucoup cela.
Le sénateur Raine : J'imagine qu'il y a beaucoup de gens dans votre collectivité qui font ce genre de chose. Vous n'êtes pas le seul, n'est-ce pas?
M. Manuel : Nous formons aussi les jeunes, hommes et femmes. Les jeunes femmes qui atteignent un certain âge suivent le rituel de formation des femmes, et nous faisons la même chose pour les jeunes hommes. Dès qu'un garçon commence à muer, il y a des gens qui le forment, qui l'emmènent dans la montagne, qui l'emmènent dans une suerie, qui le font travailler avec les chasseurs et les pêcheurs, et participer à des cérémonies. Cela fait effectivement partie de notre gouvernance traditionnelle qui consiste à former nos futurs chefs. Nous le faisons en ce moment.
Le président : Est-ce que votre code coutumier est affiché sur Internet?
M. Manuel : Oui, il devrait l'être. Sinon, nous pouvons certainement vous en fournir une copie.
Le président : Pour revenir sur la question que le sénateur Raine vous a posée, j'aimerais savoir si les anciens de votre collectivité enseignent votre langue?
M. Manuel : Oui.
Le président : Votre langue est-elle une langue écrite?
M. Manuel : Nous avons dû nous pencher sur cette question. La langue écrite a été élaborée à la suite d'un cours qui s'est donné à Missoula, au Montana, à la fin des années 1970, et au début des années 1980. Feu mon père s'est en fait rendu à Missoula, au Montana, pour apprendre à écrire notre langue; ils ont transmis ces connaissances et notre nation a pris des mesures pour faire revivre notre langue. Nous avons une école de bande, une école indépendante, dans notre collectivité. Ma tante, qui parle notre langue couramment, l'enseigne et il y a une autre aînée qui vient à Head Start, l'école que fréquente mon fils, et qui enseigne également notre langue. Nous organisons aussi, tous les étés, des stages d'apprentissage de la langue qui durent environ un mois, pour que tous les membres de la collectivité puissent l'apprendre, de sorte que oui, nous faisons toutes sortes de choses.
Le président : Au Manitoba, il y a un groupe de chefs qui ne veut plus être assujetti à la Loi sur les Indiens. Ils parlent de choisir un ombudsman auquel les membres de la collectivité pourraient présenter leurs doléances s'ils estimaient que leurs droits étaient touchés. Pensez-vous que cela soit nécessaire dans ce système? Supposons que toutes les Premières nations Okanagan décident d'adopter un régime électoral pour la sélection politique des chefs, et que tout membre de ces Premières nations qui estime, par exemple, qu'un conseil ou qu'un chef en particulier n'exerce pas ses fonctions de façon équitable pourrait s'adresser à un ombudsman. Avez-vous déjà abordé ce sujet de discussion au cours des conférences des chefs d'Okanagan?
M. Manuel : Non.
Le président : Jamais?
M. Manuel : Non.
Le sénateur Raine : Est-ce que tous les membres de votre bande vivent dans la réserve ou y en a-t-il un certain nombre qui vivent à l'extérieur? Comment ceux qui vivent hors réserve participent-ils aux élections?
M. Manuel : Notre bande compte environ 870 membres, dont 450 environ vivent dans la réserve et 400 autres à l'extérieur. Ceux qui vivent hors réserve — c'est un autre aspect que nous voulons examiner avec le vote par correspondance et par télécopieur — le code électoral actuel précise qu'ils doivent venir dans la collectivité pour voter le jour des élections ou par — comment appelle-t-on le vote qui a lieu avant?
Le sénateur Raine : Ils doivent venir en personne pour voter?
M. Manuel : Oui, mais la bande fournit un service de transport. Je dirais qu'une bonne partie de ces personnes vivent dans la collectivité de Merritt, qui se trouve à une demi-heure de voiture de notre collectivité. La bande fournit un moyen de transport pour que les membres puissent se rendre dans les bureaux de vote.
Le président : Est-il possible de voter par correspondance?
M. Manuel : Non. Je viens de mentionner que c'est un élément que nous aimerions également adopter.
Le sénateur Raine : Quel est le pourcentage des 420 personnes qui vivent en dehors de la réserve qui viennent voter en personne? Est-ce un pourcentage assez élevé ou pas suffisamment élevé?
M. Manuel : Je ne pense pas qu'il soit suffisamment élevé. Je crois que la moitié seulement des membres des collectivités qui avaient droit de voter, ceux de 18 ans et plus, l'ont fait. Les jeunes de 18 ans et moins représentent un très fort pourcentage de la collectivité. Nous avons connu un baby-boom énorme au cours des 20 dernières années. Je pense qu'il y avait environ 470 électeurs. Je crois qu'aux dernières élections, il y en a eu au moins 300 qui sont venus voter.
Le sénateur Raine : Avez-vous vérifié si les pourcentages étaient à peu près identiques pour les membres qui vivent dans la réserve et ceux qui vivent hors réserve?
M. Manuel : Non.
Le sénateur Raine : Vous ne l'avez pas fait, mais vous aimeriez que tous ceux qui sont des membres de la bande inscrits votent.
M. Manuel : Nous avons, en fait, le même problème que le Canada et la C.-B. Les gens ne font pas l'effort de voter. Est-ce que c'est parce qu'ils n'aiment pas les candidats ou qu'ils ont simplement décidé de ne pas voter?
Le président : Vous êtes revenus à la coutume et avez abandonné l'article 74 de la Loi sur les Indiens parce que vous vouliez prolonger votre mandat. Avez-vous participé à cette transition? Que pourriez-vous recommander au comité pour améliorer et accélérer les choses, pour faciliter le passage de l'article 74 à vos élections coutumières? Avez-vous rencontré des obstacles que vous aimeriez voir modifier?
M. Manuel : J'étais membre du conseil à l'époque. Je siégeais comme conseiller lorsque l'ancien chef, Fred Holmes, et le conseil ont décidé de passer de la Loi sur les Indiens à des élections coutumières en 2005. Nous avons travaillé avec les membres de la collectivité. Il s'est fait beaucoup de travail.
Il serait effectivement utile de disposer d'un conseiller juridique qui examinerait les modifications, les lois électorales et le financement, ce qui aiderait les bandes qui veulent faire cette transition. Cela prend des efforts, de l'argent et de l'expertise pour passer des élections selon l'article 74 à des élections coutumières. Cela prend énormément de temps. Encore une fois, la bande a utilisé ses propres revenus provenant des activités forestières pour assumer ce coût, mais d'autres bandes ou des bandes plus petites qui voudraient faire cette transition n'ont peut-être pas les moyens de le faire. Je pense que c'est un peu les deux.
Le sénateur Raine : Avez-vous un chiffre approximatif de ce qu'il en coûte pour les services d'avocats et de consultants; quel a été le coût total de cette transition? Combien cela vous a-t-il coûté pour rédiger ce code?
M. Manuel : Je dirais au moins 40 mille.
Le sénateur Raine : Il y a sans doute beaucoup de Premières nations qui aimeraient le faire, mais qui n'en ont pas les moyens.
M. Manuel : Oui.
Le président : Avez-vous obtenu de l'aide technique de la part du ministère?
M. Manuel : Je ne m'en souviens pas. Nous étions plusieurs membres du groupe de travail à examiner les autres modèles qui existent en Colombie-Britannique.
Le sénateur Raine : Est-ce que les gens sont heureux d'avoir un nouveau code d'élections coutumières, ou est-ce qu'ils ont vu une différence?
M. Manuel : Je pense que le conseil élu est satisfait d'avoir un peu plus de temps pour exercer ses fonctions. Je pense que cela ressemble à ce qui se passe dans la population générale. Il y a des gens qui ne sont jamais satisfaits de leurs dirigeants ou des personnes qui exercent le pouvoir. Je pense que, dans l'ensemble, les membres de la collectivité sont satisfaits que le conseil ait plus de temps pour exercer ses fonctions.
Le sénateur Raine : Je suis vraiment heureuse que vous ayez comparu. Nous avons des témoins qui utilisent l'article 74. J'ai été très intéressée d'entendre quelqu'un nous parler de la transition qui a été faite. Merci beaucoup.
Le président : Merci, chef. Si vous n'avez pas d'autres commentaires, j'aimerais savoir si nous pourrions vous appeler si le besoin s'en fait sentir?
M. Manuel : Oui, je vous en prie.
Le président : Vous pourriez peut-être laisser vos coordonnées au greffier.
M. Manuel : J'ai une question ou un commentaire : je crois comprendre que le gouvernement actuel voudrait avoir des élections à date fixe pour l'ensemble des dirigeants du pays? Est-ce bien ce qu'il projette?
Le sénateur Raine : Nous avons parlé de ce sujet, à savoir une journée d'élections qui serait commune à toutes les bandes.
Le président : Je ne sais pas comment cela se passerait, parce qu'il ne faudrait pas changer tous les dirigeants en même temps. Il serait peut-être bon de répartir le conseil en deux groupes qui seraient renouvelés par moitié, chacun leur tour, tous les trois ans. Cela introduirait une certaine continuité. Nous sommes en train d'étudier cette proposition. L'Association des chefs du Manitoba a travaillé sur cette proposition. Dans toutes les régions, le mandat de deux ans soulève des problèmes. Une fois qu'un nouveau chef est élu et s'est familiarisé avec les questions à régler, il doit se lancer dans une autre campagne électorale. Cela fait 15 ans que je siège à ce comité, et je sais bien qu'il y a beaucoup de frustration dans la population. Il y a aussi les cas de gestion par des tiers administrateurs, qui coûtent cher aux bandes. Il y a toute une série de problèmes et c'est la raison pour laquelle nous avons entrepris cette étude.
Nous ne sommes pas ici pour dire aux membres des Premières nations ce qu'ils doivent faire, mais pour réunir de l'information et rédiger un rapport. Nous espérons que les Premières nations pourront s'en inspirer et en tirer ce qui leur paraît susceptible d'améliorer leur gouvernance. Il est évident que la gouvernance est un élément clé qui permettra aux membres des Premières nations de s'instruire, qui favorisera le développement économique et divers autres aspects.
Le sénateur Raine : Tim, je me demandais si vous vouliez faire des commentaires sur la question des élections à date fixe.
M. Manuel : C'est bien évidemment une question à examiner. J'en ai entendu parler pour la première fois par le Grand chef Stewart Phillip jeudi. Là encore, si l'on pense au processus de consultation des Premières nations, il est important de leur demander ce qu'elles en pensent. Cela bouleverserait sans doute le MAINC, en particulier, si vous changiez la moitié des dirigeants et que l'on ne savait pas très bien quels sont les nouveaux conseillers ou les nouveaux chefs, ni ce qui se passe. Cela poserait des difficultés non seulement aux collectivités, mais sans doute aussi au MAINC.
C'est une idée à laquelle il faudrait réfléchir. Il y a bien sûr le fait que les élections fédérales et provinciales se tiennent le même jour. Encore une fois, il faudrait consulter un grand nombre de Premières nations pour voir ce qu'elles en pensent. Le projet de loi sur la reconnaissance qui a été proposé en C.-B. a été transmis aux membres des collectivités; ils ne sont pas passés par les dirigeants. Les gens ont fait savoir qu'ils avaient beaucoup de sujets de préoccupation, et que la situation n'était pas bonne. Il faudrait poser la question à l'ensemble des membres des Premières nations. Je suis tout à fait disposé à le faire au cours d'une assemblée générale de la bande.
Le sénateur Raine : Je crois qu'on peut dire que ce n'est pas une question brûlante, pour le moment.
M. Manuel : Non, pas du tout.
Le président : Merci beaucoup, chef Manuel.
Sénateurs, nous allons maintenant entendre le chef Wayne Christian de la Première nation Spallumcheen.
Chef, bienvenue. Le comité est ici pour étudier la question des élections selon la Loi sur les Indiens. Les Premières nations affirment que l'obligation de tenir des élections tous les deux ans aux termes de la Loi sur les Indiens les empêche d'adopter des plans stratégiques à long terme et aussi de mettre en œuvre des processus durables avant de faire face à d'autres élections. Il ne s'agit pas d'imposer quoi que ce soit aux Premières nations. L'étude vise uniquement à proposer des solutions aux problèmes qui existent dans les différentes régions du pays. Nous sommes allés au Manitoba et avons entendu des témoins dans diverses régions du Canada. Nous espérons également nous rendre dans les provinces de l'Atlantique.
Nous sommes venus en C.-B., parce que je pense que c'est dans cette province que se trouve le plus grand nombre de Premières nations qui tiennent des élections selon l'article 74 de la Loi sur les Indiens.
Veuillez présenter votre déclaration, après quoi, les sénateurs aimeraient vous poser quelques questions.
Wayne Christian, Chef, Première nation Spallumcheen : Merci.
[Le témoin a parlé dans sa langue, le secwepemc.]
Avant de commencer, j'aimerais honorer le Talkamuk, les ancêtres de ce territoire. Cela fait partie de notre protocole, parce que nous venons de différentes parties de ce que nous appelons le Kamukulu, les terres indiennes de la Colombie-Britannique.
J'aimerais remercier le comité de m'accorder la possibilité de passer du temps ce matin avec vous.
Je n'ai pas préparé d'exposé écrit, mais je vais en préparer un que je vous remettrai plus tard. Je n'ai pas les ressources dont vous disposez, les attachés de recherche, les avocats et les greffiers, et tout cela. Je ne suis qu'un petit chef.
Le président : Nous pourrions vous en prêter quelques-uns.
M. Christian : J'en serais très heureux.
Comme je l'ai dit, je suis le chef de la collectivité appelée Spallumcheen. Nous sommes membres de la nation Secwepemc, la nation Shuswap. Nous avons au total 17 collectivités, soit 10 000 membres. À une époque, nous avions 32 collectivités et environ 50 000 membres, mais là encore, avec la petite vérole et tous ces problèmes, notre population a été décimée.
Notre territoire traditionnel va au nord jusqu'à Quesnel, à l'est jusqu'aux premiers contreforts des Rocheuses de l'Alberta, à l'ouest jusqu'au fleuve Fraser, au sud jusqu'à notre collectivité de Spallumcheen et au-delà, jusqu'à Invermere.
Il me paraît important de commencer ce processus en parlant de nos contacts avec la nation canadienne. En 1763, il y a eu la Proclamation royale, je me permets de le rappeler, qui établissait les paramètres devant régir nos rapports de nation à nation avec le Canada. Cette proclamation parle des nations indiennes et c'est la raison pour laquelle, il existe, dans l'ensemble du Canada, un certain nombre de traités. Il y a eu un certain nombre de négociations à la suite desquelles le Canada a conclu des ententes avec les nations. En Colombie-Britannique, comme vous le savez, ce n'est pas ce qui s'est passé. Nous avons participé à un processus que l'on appelle le processus de négociation de traités, mais nous ne le considérons pas de cette façon.
Le Canada est né en 1867. C'est la raison pour laquelle vous êtes ici. C'est également en partie à cause de l'article 91.24 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, les Indiens et les terres réservées aux Indiens. La Loi sur les Indiens tire son origine de l'article fédéral 91.24. C'est la Loi sur les Indiens qui a défini les paramètres de notre relation avec le Canada. Elle nous a été imposée. Lorsque nous parlons, aujourd'hui, des règlements de la Loi sur les Indiens, je pense qu'il est bon de rappeler ce contexte, et de dire que, pour ce qui est de notre relation, nous n'avons jamais eu la possibilité de discuter avec le Canada de ce texte législatif.
Je veux dire par là qu'en 1910, les chefs de l'intérieur, les Secwepemc, les Salish et les Thompson, ont présenté à Sir Wilfred Laurier, le premier ministre de l'époque, un mémoire dans lequel ils décrivaient clairement la relation de nation à nation et la façon dont nous souhaitions nous gouverner, gérer les ressources et mettre en œuvre la relation permanente qui existait entre nous et le Canada. Nous parlions de choses comme la nécessité de respecter la dignité de chacun en vue de favoriser l'harmonie et la prospérité générale. Nous connaissons l'histoire qui a suivi 1910, l'histoire des pensionnats et l'histoire des lois qui ont pris nos terres. Nous nous retrouvons, aujourd'hui, après presque un siècle, encore en train de demander cette relation de nation à nation.
La Loi constitutionnelle de 1982 contient le paragraphe 35.(1) qui traite des droits existants, ancestraux et issus de traités. Les tribunaux ont rendu toute une série de décisions qui parlent de titre aborigène, des droits et de la gouvernance sur notre territoire traditionnel, pas uniquement sur les terres de réserve. Il me paraît vraiment très important de comprendre qu'aujourd'hui, lorsque nous parlons de gouvernance, il ne faut pas se limiter à la Loi sur les Indiens.
Je l'affirme, parce que le 13 septembre 2007, l'Organisation des Nations Unies a proclamé la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Comme vous le savez, à l'époque, quatre pays ont voté contre cette déclaration, le Canada était l'un d'entre eux, les autres étaient les États-Unis, l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Depuis lors, il semble que l'Australie ait ratifié la Déclaration des Nations Unies.
Je tiens à lire pour le compte rendu l'article 43 :
Les droits reconnus dans la présente Déclaration constituent les normes minimales nécessaires à la survie, à la dignité et au bien-être des peuples autochtones du monde.
Nous considérons qu'il s'agit là de normes minimales.
Les quatre premiers articles traitent directement de la gouvernance et de la question de l'autodétermination. L'article premier énonce :
Les peuples autochtones ont le droit, à titre collectif ou individuel, de jouir pleinement de l'ensemble des droits de l'homme et des libertés fondamentales reconnus par la Charte des Nations Unies, la Déclaration universelle des droits de l'homme et le droit international relatif aux droits de l'homme.
La raison pour laquelle cet article est aussi important est que nos droits fonciers sont des droits de l'homme. Notre droit à nous gouverner est un droit de l'homme. Il ne faut pas considérer ces droits de façon isolée, uniquement comme des droits politiques, ce sont des droits de l'homme dans le contexte de la communauté mondiale et cela me paraît important.
L'article 2 se lit comme suit :
Les Autochtones, peuples et individus, sont libres et égaux à tous les autres et ont le droit de ne faire l'objet, dans l'exercice de leurs droits, d'aucune forme de discrimination fondée, en particulier, sur leur origine ou leur identité autochtone.
Nous savons que la loi dont nous parlons au sujet de la gouvernance est une loi raciste. Elle l'est parce que nous sommes des Indiens. Il me paraît important de comprendre que, dans ce contexte, elle est une source de discrimination. C'est la loi la plus raciste au monde, je crois, parce qu'elle nous impose une manière de vivre. Elle l'a fait depuis le départ, de la naissance à la mort, et nous n'avons pas un mot à dire. J'ai été chef à une certaine époque, quand j'étais plus jeune, et nous avons présenté un règlement sur les élections coutumières en 1984. Nous sommes encore en train de débattre de cette proposition aujourd'hui, et il y a deux mois encore, lorsque nous avons essayé de la présenter une nouvelle fois, le ministre — c'est lui qui a le dernier mot — et ses collaborateurs l'ont rejetée. Ils nous ont dit que nous ne pouvions pas adopter ce texte et que si nous le faisions, cela risquait de compromettre notre financement. Voilà le genre de contrôle que l'on exerce sur nous.
Il est très important de comprendre que nous n'avons pas le droit de prendre nos propres décisions pour ce qui est de la gouvernance et des textes législatifs.
L'article 3 énonce :
Les peuples autochtones ont le droit à l'autodétermination. En vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique et assurent librement leur développement économique, social et culturel.
C'est un aspect vraiment critique dans le contexte de la Colombie-Britannique. Vous l'avez mentionné plus tôt, sénateur. La Colombie-Britannique compte 204 collectivités; il y a environ 25 à 30 groupes linguistiques et même dans le contexte de notre nation Secwepemc, nous parlons une langue, mais nous sommes autonomes et nous avons le pouvoir de parler pour nous. Il n'y a jamais eu de gouvernement central dans la nation Secwepemc. Nous avons toujours eu des structures basées sur la parenté et la répartition, très semblables aux gouvernements régionaux. Dans notre collectivité, par exemple, nous collaborons étroitement avec Adams Lake, Neskonlith, Little Shuswap et la bande indienne de Shuswap. Ces cinq bandes s'occupent de ce que l'on appelle la Lakes Division, le Shuswap, vous savez, Merritt, tous les lacs qui se trouvent dans notre territoire. Nous nous gouvernons collectivement de cette façon, et il n'y a pas de « système de réserve ».
Le président : Où se trouve Spallumcheen?
M. Christian : C'est tout à côté d'Enderby. Il est vraiment très important de comprendre que, lorsque nous parlons du droit à l'autodétermination, nous pensons vraiment que nous avons droit de prendre nos propres décisions. Il n'y a personne, à l'extérieur de notre collectivité, qui peut prendre des décisions pour nous, que ce soit une organisation comme le Leadership Council, l'Union of B.C. Indian Chiefs, la BCAFN et le First Nations Summit de la Colombie- Britannique. Nous sommes vraiment convaincus que nos collectivités ont le droit de prendre leurs propres décisions. Il est vraiment important de bien comprendre cette idée.
L'article 4 énonce :
Les peuples autochtones, dans l'exercice de leur droit à l'autodétermination, ont le droit d'être autonomes et de s'administrer eux-mêmes pour tout ce qui touche à leurs affaires intérieures et locales, ainsi que de disposer des moyens de financer leurs activités autonomes.
Cette disposition est vraiment essentielle, parce que la gouvernance est directement reliée à la question des terres en Colombie-Britannique, de notre point de vue. Si la question des terres était résolue, alors nous pourrions obtenir une part des richesses de nos terres; nous pourrions effectivement nous gouverner, nous pourrions aller de l'avant. Comme je l'ai dit, en 1910, nous avons déposé un mémoire ou une déclaration auprès du premier ministre de l'époque. Peut-être que le gouvernement libéral sera au pouvoir en 2010. Nous l'espérons, parce que nous allons inviter le premier ministre à célébrer ce 100e anniversaire. C'est en comprenant la notion de gouvernance et la Loi sur les Indiens, qui nous a été imposée, que nous pourrons changer aujourd'hui cette dynamique. Nous parlons des droits de gouvernance du paragraphe 35.(1), qui nous donnent le droit de déterminer notre avenir dans le contexte de notre capacité à nous gouverner et de laisser les chefs que nous avons librement élus parler au nom de notre peuple. C'est très important.
Comme je l'ai dit, j'ai été élu la première fois en 1977. J'ai été chef pendant près de 10 ans. Nous étions élus pour des mandats de deux ans, selon le règlement de la Loi sur les Indiens, l'article 74, et cela soulevait beaucoup de difficultés. Vous essayez de commencer quelque chose et il faut déjà tenir des élections. Aujourd'hui, nous sommes toujours assujettis à cette disposition de la Loi sur les Indiens. Il faut modifier complètement ce processus pour qu'il serve mieux notre peuple.
J'ai entendu la discussion que vous avez eue avec le chef qui m'a précédé sur la question d'avoir un jour national pour les élections dans l'ensemble du pays, et de simplifier les choses, ou uniquement en Colombie-Britannique. Nous en avons parlé en tant que chefs de la nation Secwepemc. Nous devons adopter un mécanisme que tout le monde puisse vraiment comprendre. Nous allons probablement élire des porte-parole de la nation grâce à ce mécanisme, un scrutin, en demandant à notre peuple de décider qui peut parler en son nom, selon un processus démocratique. Nous sommes en train de réfléchir à ces formes de gouvernance pour les adopter.
Je pense que si nous voulons examiner les règlements, il est important de parler de la question des terres.
J'ai ici l'étude que j'ai demandée moi-même, qui s'intitule « Towards Recognition of Inherent Rights as Indigenous People » (La reconnaissance des droits inhérents des peuples autochtones). Je ne vais pas vous en parler en détail, parce qu'elle fait 40 pages. Elle aborde toutes les questions : les droits et les pouvoirs inhérents des peuples autochtones, les régimes fonciers découlant de nos lois autochtones, la Déclaration des Nations Unies en ce qui concerne l'autodétermination, les peuples autochtones, les terres, les territoires et les droits aux ressources aux termes de la Déclaration des Nations Unies, un consentement préalable et éclairé, la réforme du cadre constitutionnel actuel. Dans le contexte de la réforme constitutionnelle et de l'article 35, il s'agit en fait de reconnaître le titre aborigène. Ce n'est qu'en obtenant la reconnaissance du titre aborigène sous sa forme véritable, et dans son sens véritable, notamment constitutionnel, que nous pourrons vraiment avoir un système de gouvernance qui représente notre peuple.
Le quatrième domaine dont nous parlons est celui des politiques fédérales en matière de revendications, la réforme de ces politiques. La politique fédérale relative aux revendications territoriales globales impose une certaine forme de rapport entre le Canada, la Colombie-Britannique et les nations de la Colombie-Britannique. Cette politique est très contraignante et parle de l'extinction de nos droits. D'après les opinions que nous avons obtenues, elle est illégale et elle est même considérée de cette façon dans les lignes directrices relatives à la négociation des traités qui font officiellement partie du processus de négociation des traités.
Autre aspect de l'étude : une véritable réconciliation, notion qui a été soumise aux tribunaux. Il a été répété constamment que nous devons en arriver à une réconciliation véritable pour modifier, de façon fondamentale, la façon dont nous devons nous réconcilier avec le Canada et avec la Colombie-Britannique. Je vous remets officiellement ces papiers.
Comme je l'ai dit, je vous présenterai également un mémoire formel dans le contexte de la gouvernance, qui ne se limite pas à la seule Loi sur les Indiens.
Le président : Êtes-vous tout à fait d'accord avec ce document?
M. Christian : Oui, en fait, c'est moi qui l'ai demandé.
Les auteurs de cette étude nous l'ont remis. Ce sont des avocats autochtones. Je vais également vous présenter ce dont j'ai parlé tout à l'heure, dans un mémoire plus formel et je vous le transmettrai.
Le président : Votre rapport sera déposé, monsieur, et utilisé en preuve.
Le sénateur Campbell : Merci de nous avoir décrit ce contexte. Je pense que personne n'a été surpris, mais encore une fois, nous entendons dire que le MAINC utilise les menaces. Le mieux serait que le MAINC disparaisse demain et que nous allions dans une autre direction, qui permettrait aux Premières nations d'avoir leur mot à dire sur leur avenir, mais ce sera sans doute pour une autre fois.
Est-ce que l'idée de tenir des élections à date fixe dans tout le Canada pour toutes les Premières nations est un sujet brûlant?
M. Christian : Honnêtement, non. Ce l'est peut-être dans certaines régions, mais dans d'autres, ce ne l'est pas. C'est un sujet de discussion à cause de notre diversité. Il y a, je crois, 650 collectivités au Canada.
Le sénateur Campbell : Il ne serait pas difficile, par exemple, de réunir tous les représentants d'une région et de leur dire « Je vais vous apprendre quelque chose. Nous allons tous tenir des élections le même jour. » Il n'y a rien qui vous empêche de le faire?
M. Christian : Non, il n'y a rien qui nous en empêche.
Le sénateur Campbell : J'ai lu tous mes documents et il semble qu'on insiste beaucoup sur la question de la destitution des chefs et des conseillers. Cela m'a frappé parce que je suis un ancien maire et que c'est une chose à laquelle je n'ai jamais réfléchi. En fait, lorsque je lis les études, je ne sais même pas si cela aurait été possible, à moins que je n'aie commis certaines infractions. Est-ce un sujet important dans votre collectivité?
M. Christian : L'obligation de rendre compte est une grave question pour ce qui est des mécanismes, de la façon de la mettre en oeuvre. Encore une fois, lorsque les gens adoptent leurs propres règles, ils peuvent alors les appliquer. Par exemple, nous tenons régulièrement des séances communautaires pour informer la collectivité, vous savez ce dont je parle, pour lui fournir des renseignements financiers. C'est une sorte de reddition de comptes et de destitution; la question d'obtenir la démission de quelqu'un, tout cela, à l'heure actuelle, est régie par la Loi sur les Indiens. Nos membres ne sont pas satisfaits. Si nous avions nos propres systèmes, ils comprendraient des mécanismes de reddition de comptes pour nos dirigeants élus.
Le sénateur Campbell : En tant que dirigeant élu ou chef héréditaire, qu'est-ce qui vous empêche d'utiliser ce mécanisme, d'avoir des réunions publiques, des réunions du conseil ou des réunions communautaires? Est-ce que le MAINC vous interdit de le faire?
M. Christian : Non. Le MAINC n'a fait aucune règle susceptible de régir ce genre de mécanisme.
Le sénateur Campbell : Vous pouvez le faire.
M. Christian : Nous pouvons le faire publiquement et nous le faisons.
Le sénateur Campbell : Vous avez dit que vous vouliez retourner à la coutume et que l'on vous avait dit que vous ne pouviez le faire, et que, si vous le faisiez, il y aurait peut-être des répercussions financières. Je remarque que les règles qui vous ont été imposées pour retourner à la coutume sont assez strictes, si l'on pense que vous demandez uniquement de revenir à ce que vous avez fait dans le passé, ce qui, à vous entendre vous et l'ancien chef, a donné d'excellents résultats même entre les nations.
Avez-vous une idée des raisons pour lesquelles ces règles existent? Est-ce simplement les Blancs qui vous disent ce que vous devez faire?
M. Christian : C'est en fait à cause de la question des terres et de la suppression de notre système héréditaire. C'est la raison pour laquelle ce système d'élection a été mis en place. Les chefs héréditaires détenaient la connaissance des terres, la connaissance de la question des terres, de la riche histoire orale qui contenaient nos lois. Nous avons la liste chronologique de tous les chefs qui ont été élus depuis les premiers contacts et vous pouvez constater que nous avons eu un système héréditaire, jusqu'à ce que les agents des Indiens commencent à imposer des règles à nos collectivités et à amener nos dirigeants à renoncer à toutes sortes de choses. C'est à ce moment-là que la situation a commencé à se détériorer, peu après la Seconde Guerre mondiale. Nous avons commencé à perdre la capacité de faire entendre notre voix, cette voix traditionnelle et héréditaire, à la table des négociations.
Pour ce qui est des règles et des règlements qui définissent le régime coutumier, comment est-ce que quelqu'un peut définir vos propres coutumes? Je suis vraiment convaincu que les Affaires indiennes sont une des causes du problème. Je suis tout à fait d'accord avec vous, lorsque vous avez dit tout à l'heure qu'il faudrait carrément supprimer ce ministère et le faire disparaître. C'est lui le plus gros obstacle à notre liberté.
Le sénateur Campbell : Ils disent toujours : « Eh bien, ils ont renoncé à tout cela. » Pensez-vous vraiment que les chefs héréditaires ont renoncé à toutes ces choses en pleine connaissance de cause et qu'ils disposaient de tous les renseignements nécessaires lorsqu'ils l'ont fait?
M. Christian : Non. Les documents historiques et même de nombreuses décisions judiciaires montrent que les chefs héréditaires n'ont pas été complètement informés de ce à quoi ils renonçaient et de ce qu'ils acceptaient.
Le sénateur Campbell : Vous convenez donc qu'un mandat de trois ans est une bonne solution?
M. Christian : Oui, je le pense.
Le sénateur Campbell : Est-ce suffisamment long? Au niveau municipal, c'était un mandat de trois ans; ce mandat aurait pu être écourté d'un an et demi, d'après moi. Mais dans la réalité, est-ce un mandat suffisamment long?
M. Christian : Il me semble réaliste d'adopter des mandats de trois ou quatre ans avec renouvellement fractionné par moitié, pour qu'il y ait toujours des dirigeants qui sont en mesure de continuer à faire avancer les choses; c'est une bonne solution. C'est là le problème; il faut un processus dans lequel les dirigeants et les chefs élus connaissent bien la situation, parce que les questions sont devenues tellement complexes et tellement juridiques qu'il faut vraiment être informé.
Le président : Le Grand chef de l'Association des chefs du Manitoba a déclaré : « Tout ce que je fais aux réunions, c'est d'informer les nouveaux élus de ce qui se passe » et d'ajouter « C'est une véritable porte tournante ». Et il déclare : « Nous ne pouvons jamais rien faire. Il y a au moins un quart des membres qui sont nouveaux et nous essayons de les mettre au courant de la situation. »
Le sénateur Raine : Merci beaucoup d'être venu, chef Christian. J'aimerais en savoir davantage sur les raisons exactes à l'origine du rejet de votre demande d'élections coutumières. Comment cela s'est-il passé? Il semble que vous ayez commencé en 1980, ce qui remonte à pas mal de temps, et d'autres bandes ont obtenu des élections coutumières, entre-temps.
M. Christian : Comme le sénateur Campbell l'a mentionné plus tôt, le mécanisme qui permet de passer à un code électoral coutumier est très lourd. Nous avons en fait tenu un référendum, il y a plus d'un an, pour décider si nous voulions passer à des règles électorales coutumières et la collectivité a accepté. Nous avons démarré un processus avec les Affaires indiennes pour leur présenter ces règles. Nous avions des règles sur lesquelles nous travaillions depuis près de 20 ans. Lorsque j'ai été réélu, j'ai dit « En fait, que sommes-nous en train de faire? Pourquoi ne pas tout simplement aller de l'avant? »
Lorsque nous avons présenté ces règles aux Affaires indiennes, on nous a dit qu'il y avait un règlement qui précisait qu'il fallait le faire dans un certain délai pour qu'elles puissent s'appliquer aux élections qui devaient être tenues d'ici quelques mois. Ils nous ont dit qu'il n'y avait pas suffisamment de temps pour le faire et que, si nous forcions les choses, cela risquerait de mettre en danger notre financement parce que — et là encore, cela se trouve dans les règlements — nous ne serions pas reconnus par la Loi sur les Indiens. Voilà l'essentiel de ce qu'ils ont dit. C'est la spécialité des Affaires indiennes.
Le sénateur Raine : Allez-vous continuer à demander des élections coutumières?
M. Christian : Certainement. Nous sommes en fait en train d'examiner la gouvernance aux termes de l'article 35 plutôt que selon la Loi sur les Indiens, je vous le dis franchement, parce que nous avons constaté que le processus qu'utilisent les Affaires indiennes est tout à fait inefficace. Il est impossible de dialoguer avec eux, en particulier lorsqu'il s'agit de gouvernance, parce qu'ils essaient de contrôler tout ce que nous faisons.
Le sénateur Raine : L'article 35 porte sur quoi?
Le président : C'est l'article qui reconnaît les peuples autochtones dans la Constitution. Les peuples autochtones sont les Indiens, les Métis et les Inuits.
Le sénateur Raine : Ce sera peut-être encore plus difficile.
M. Christian : C'est le problème que nous devons résoudre, si nous voulons vraiment croire que la gouvernance va donner des résultats pour nous sur le plan de nos relations avec le Canada et la Colombie-Britannique. Il faut que cela se passe à ce niveau. Comme vous le savez tous, vous entendez continuellement des histoires d'horreur sur ce que ce ministère continue à faire, comme je l'ai dit, ce qui est sa spécialité, ne rien faire.
Le sénateur Raine : Si vous tenez des élections tous les trois ans et voulez assurer une certaine continuité, cela veut dire que vous allez élire de nouveaux conseillers tous les 18 mois. Il serait peut-être préférable de choisir un mandat de quatre ans et de renouveler la moitié du conseil tous les deux ans.
M. Christian : Pour un mandat de trois ans, les personnes qui ont obtenu le plus de voix seraient élues pour trois ans, et un an après, voire deux ans après, les personnes qui seraient élues auraient un mandat de trois ans. C'est un renouvellement fractionné et c'est ainsi que les règles devraient être conçues. Au départ, la durée du mandat serait probablement de deux mois, mais par la suite, tout le monde siégerait pour trois ans ou quatre ans, selon ce qui a été décidé.
Le sénateur Raine : Y aurait-il des élections chaque année?
M. Christian : La première fois serait pour un mandat de deux ans; un petit nombre d'élus siégeraient pendant deux ans, et par la suite, il y aurait un renouvellement. Lorsque le temps des élections arrivera, il s'agira d'un mandat de trois ans et ensuite, une partie des membres sera renouvelée.
Le sénateur Raine : Les nouveaux siégeront pendant deux ans, ce sera presque une période d'essai, et ensuite, pendant trois ans.
M. Christian : Oui. Il y aura un renouvellement fractionné.
Le sénateur Raine : Combien de vos membres vivent sur la réserve et hors réserve?
M. Christian : Notre population totale est d'environ 800 personnes. Il y a 500 résidants dans notre collectivité. Sur notre territoire, il y en a environ 200, et il y en a environ une centaine qui sont disséminés dans le monde entier, principalement en Amérique du Nord.
Le sénateur Raine : Pensez-vous que tous les membres devraient avoir le droit de voter pour ces élections?
M. Christian : Oui.
Le sénateur Raine : Exigeriez-vous qu'ils viennent en personne ou qu'ils votent par correspondance?
M. Christian : Cela peut se faire de plusieurs façons de nos jours. Par exemple, d'après les décisions judiciaires qui ont été prononcées au sujet de notre système électoral actuel, nous avons toujours soutenu que nous aurions dû faire participer tous les membres. Cela s'est en fait produit il y a plusieurs années, lorsque j'ai été élu chef la première fois, mais cela a été contesté parce que cela n'était pas prévu par la Loi sur les Indiens. Nous pensions que tout le monde pouvait participer. Cela remonte aux années 1970 et 1980.
Le sénateur Raine : C'est la disposition qui exigeait que...
M. Christian : Qu'ils résident habituellement dans la réserve. C'est un aspect intéressant parce que les conseillers doivent être des résidants habituels, mais pas le chef. Il n'est même pas nécessaire que le chef soit Indien, parce que, d'après le règlement, l'ancien premier ministre, Jean Chrétien, a été mis en candidature comme chef d'une des collectivités. Je ne pense toutefois pas qu'il ait gagné.
Le sénateur Raine : Avez-vous un système de chefs héréditaires dans la bande?
M. Christian : Oui.
Le sénateur Raine : Est-ce que vous l'avez conservé?
M. Christian : Nous sommes en train de le restaurer. Je dois vous dire que notre régime de gouvernance était basé sur les familles. Les chefs de famille se réunissaient, tant les hommes que les femmes, et c'est un processus que nous avons commencé à rétablir.
Les pensionnats ont provoqué l'éclatement de nos familles et nous avons connu des périodes très difficiles. Avec le système familial, les familles s'occupaient de leurs membres et il n'était pas nécessaire de demander de l'aide au bureau de la bande ou au gouvernement. Nous essayons de rétablir cette forme de gouvernance et d'en faire notre structure traditionnelle. Cela nous prend du temps, mais nous avançons dans cette direction.
Le sénateur Raine : Il serait logique que si cette responsabilité est assumée par la famille, il faudrait que celle-ci soit représentée.
M. Christian : Vous avez tout à fait raison. Le porte-parole de la famille doit être là et il doit participer à la prise de décisions, à la recherche d'un consensus et tout cela doit évoluer. Comme je l'ai dit, je dois vous dire honnêtement que nous avons du mal à reconstruire les familles, à cause des pensionnats. Le système des pensionnats a eu un effet dévastateur sur les familles.
Le sénateur Raine : Êtes-vous optimiste?
M. Christian : Cela se fera. Je ne suis pas optimiste. Cela se fera avant que je meure.
Le sénateur Raine : Ce serait une excellente chose.
M. Christian : Je l'affirme parce que j'ai sept enfants et 15 petits-enfants et nous pouvons influencer le cours des choses.
Le président : À vous tout seul.
M. Christian : C'est important. Au moment de la rafle des années 1960, j'ai été placé dans un foyer d'accueil. On m'a séparé de ma famille, de ma langue, de ma culture, mais je suis revenu et j'ai essayé de reconstruire ce que j'avais perdu. Ma mère parlait quatre langues, mais elle m'a uniquement enseigné l'anglais à cause de ce qu'elle avait vécu dans les pensionnats. Je suis un exemple typique des dirigeants qui s'impliquent dans leur collectivité. Nous savons que l'avenir de notre peuple repose sur nos familles et sur notre capacité de rétablir notre langue; c'est vraiment là une pièce essentielle de ce casse-tête.
Le sénateur Raine : Avez-vous les ressources pour le faire?
M. Christian : Pour ce qui est des ressources, et je l'entends dire constamment, nous sommes un fardeau pour les contribuables. Les Indiens ne paient pas d'impôts, nous ne contribuons pas à l'économie. J'entends cela depuis les années 1970, et je peux vous dire honnêtement que j'en ai assez. En fait, nous contribuons beaucoup. Je peux l'affirmer, parce que tous mes enfants travaillent à l'extérieur de la réserve. Ils ont des hypothèques, ils paient des impôts et ils apportent leur contribution à l'économie. Même notre collectivité contribue à l'économie locale parce que nous n'avons pas tous les biens et les services. Nous les achetons. Nous avons apporté des millions de dollars à l'économie locale. Lorsqu'on parle de ressources, il s'agit pour nous en réalité des ressources qu'offre le territoire.
Nous avons fait une étude sur les droits de coupe que le gouvernement provincial a perçus dans notre territoire traditionnel pendant une période de quatre ans. Ces droits s'élevaient à 1,41 milliard de dollars et cela venait de notre territoire. Si nous recevions une partie de ces recettes pour faire fonctionner et pour administrer notre propre régime de gouvernance, nous n'aurions aucun problème de ressources. Et cela ne concerne qu'un secteur, le secteur forestier.
C'est pour cela que j'ai parlé plus tôt des raisons pour lesquelles la question du titre était tellement importante par rapport à la capacité d'administrer et de cogérer nos terres. Nous ne demandons pas l'aumône. On nous a obligés à entrer dans ce système, qui a fait de nous des pupilles de l'État. Nous ne sommes pas des pupilles. Nous sommes des peuples, nous sommes des Secwepemc, nous sommes des Salish, nous sommes des Indiens. Nous ne sommes pas des pupilles de l'État.
Le président : Vous célébrez un centenaire et vous avez indiqué que vous aviez une certaine préférence pour ce qui est du gouvernement qui serait au pouvoir. Cela fait-il vraiment une différence que ce soit l'un ou l'autre? Je suis un Métis et j'ai observé la situation et je n'ai pas vu de différence. Vous pourriez peut-être expliquer pourquoi vous pensez qu'il y a une différence.
M. Christian : En 1910, nous avons présenté une déclaration à Sir Wilfrid Laurier, qui était alors le premier ministre du Canada. C'était un gouvernement libéral, et c'est le premier ministre qui a gouverné le plus longtemps. Trudeau a essayé de faire mieux, mais il n'a jamais réussi. Pour nous, c'est surtout un symbole.
Je reconnais qu'il importe peu que tel parti soit au pouvoir ou non, parce que ce sont les bureaucrates qui administrent le pays. La bureaucratie canadienne gouverne dans son intérêt. Si vous demandiez aux Canadiens ordinaires ce qu'ils en pensent, ils vous diraient que c'est du gaspillage, si l'on pense aux biens et aux services qui sont fournis.
Vous dites que les chefs politiques peuvent faire des promesses et changer les lois, mais ce sont les bureaucrates qui les mettent en vigueur. Ce système n'a pas été modifié.
Le sénateur Campbell : Je m'intéresse à cette idée de renouvellement fractionné, parce qu'à moins que le conseil et le chef soient vraiment incompétents, il est probable qu'un certain nombre d'entre eux seront réélus à l'élection suivante, ce qui permet de poursuivre les projets. Vous avez des chefs héréditaires qui préservent votre histoire et aident à la transmettre et vous essayez de restaurer ce système.
Dans un gouvernement municipal, l'histoire est préservée par l'infrastructure; les maires viennent et s'en vont, mais le directeur municipal lui reste. Je me demandais si vous aviez ce genre d'infrastructure dans votre structure. Je sais que vous n'avez pas 600 000 membres, mais a-t-il dans notre nation quelqu'un que l'on pourrait comparer au directeur municipal ou est-ce que cela change constamment, également?
M. Christian : Depuis que nous sommes tombés sous la coupe des Affaires indiennes, que nous avons été bloqués et occupés par ce ministère, de 1970 à aujourd'hui, nous avons eu près de 15 administrateurs en 30 ans environ. La situation est la suivante : Nous luttons à l'heure actuelle contre un système de gouvernance qui est le miroir du gouvernement fédéral et du gouvernement provincial et nous savons fort bien que ce système n'est pas très efficace. Nous examinons d'autres conceptions susceptibles de donner davantage de responsabilités aux familles, et nous ne sommes donc pas en train de supprimer des responsabilités.
Si nous réussissons à mettre sur pied une structure qui donne des pouvoirs et des responsabilités aux familles et aux individus, nous pourrons plus facilement évoluer collectivement. Les infrastructures actuelles ne font que refléter les gouvernements et elles ne sont pas efficaces.
Le sénateur Campbell : Le mot essentiel est « évoluer » et, en fait, on vous demande de coucher sur le papier et de graver dans la pierre ce que vous voulez faire, sans tenir compte de ce processus. Le chef précédent a déclaré qu'il pouvait remonter dans sa lignée jusqu'à neuf générations et nous savons que ce système remonte bien plus loin.
J'ai été vraiment surpris lorsqu'il a dit que sa Première nation avait joué le rôle de médiateur entre d'autres Premières nations. C'est un genre d'évolution et d'attitude incroyable. Votre argument est que vous n'êtes pas en mesure de donner une forme définitive à votre projet, qu'il est en pleine évolution, que vous récupérez des conséquences d'une période terrible et que vous essayez de restaurer ce qui a bien fonctionné pour vous pendant des siècles et le MAINC vous oblige à penser uniquement au court terme. Est-ce bien cela?
M. Christian : Oui, c'est bien la situation. Comme je l'ai dit, lorsque des gens de l'extérieur nous dictent notre conduite, cela ne marche pas. Comme vous l'avez dit, nous sommes en train d'élaborer notre système de gouvernance et nous n'avons pas encore de projet définitif. Je veux dire par là que nous sommes en train d'élaborer des processus cérémoniaux axés sur la reconnaissance au sein de la collectivité, avec des chants et des cérémonies. Par exemple, dans notre collectivité, nous accueillons les nouveaux-nés avec une cérémonie. C'est une cérémonie au cours de laquelle nous célébrons la famille et les grands-parents pour faire ressortir les liens qui unissent toutes ces personnes.
Le sénateur Campbell : Ce sont de nouveaux chants.
M. Christian : En fait, ce sont d'anciens chants.
Le sénateur Campbell : Mais y en a-t-il aussi de nouveaux?
M. Christian : Il y a aussi de nouveaux chants qui apparaissent. Lorsque vous parlez de système de gouvernance, il ne s'agit pas simplement de cela, cela comprend également les cérémonies et les liens avec la terre. Cela commence à se développer de plus en plus. Il y a beaucoup de nations autochtones qui tiennent une cérémonie pour la première pêche, en l'honneur des poissons, parce qu'ils jouent un rôle vital pour elles. C'est une question de gouvernance. Cela n'est pas consigné par écrit. Ce pourrait être gravé sur un DVD, mais cela vient d'une histoire orale, c'est encore une tradition orale, et cet aspect est vraiment très important pour nous de la Côte ouest avec les longues maisons et ce que nous y faisons. Elles ont une longue histoire. Il arrive que les cérémonies qui se tiennent dans les longues maisons durent 24 ou 26 heures.
Le sénateur Campbell : Comme une réunion du conseil municipal.
M. Christian : Exactement.
Le sénateur Campbell : Je peux vous dire que je suis un libéral et que ces gens sont des conservateurs, mais aucun de nos partis, quels qu'ils soient, ne peut être fier de la façon dont les peuples autochtones ont été traités dans notre pays.
Je vous remercie beaucoup d'être venus aujourd'hui. Je pourrais vous écouter, pendant des heures, vous et l'autre chef, parler de la façon dont la situation a évolué, parce que c'est vraiment fascinant. Mon plus grand regret est qu'il soit aussi difficile de faire connaître une tradition et une histoire aussi riches. Les Blancs pensent qu'ils ont inventé la médiation, et si nous pouvions faire connaître cet aspect, ce serait une très belle chose.
Le président : J'ai une brève question et cela revient à ce que le Manitoba a essayé de faire. Ils veulent mettre sur pied un régime électoral avec un ombudsman et un directeur général des élections. Pensez-vous que cela soit possible en C.- B., pour l'ensemble de la province? Votre nation comprend 18 000 membres répartis entre diverses bandes. Pensez-vous que cela pourrait fonctionner correctement, ou quelles solutions envisagez-vous?
M. Christian : En Colombie-Britannique, la diversité est un aspect important, parce que les gens ne sont pas toujours du même avis. C'est un des aspects dont nous nous occupons à l'heure actuelle avec ce groupe de travail sur les droits et le titre inhérents. Nous sommes en train d'en arriver à un consensus et essayons d'aborder ces aspects que l'on pourrait qualifier d'aspects logistiques de la gouvernance. Cela pourrait fonctionner, mais il faut que tout le monde soit d'accord et il faudra donc sensibiliser et informer la population. Si les Premières nations réussissent à prendre leurs propres décisions, comment est-ce que les collectivités vont pouvoir participer au processus? Cela ne marche jamais quand on nous impose quelque chose de l'extérieur. Il faut en fait élaborer un processus qui permette aux collectivités de participer à ce genre de discussion et d'influencer l'évolution de ce processus. Cela pourrait fonctionner.
Le sénateur Raine : Dans la nation Shuswap ou Secwepemc, avec ses 17 collectivités, lorsque vous parlez de nation, parlez-vous de votre propre collectivité ou de la collectivité générale des Secwepemc?
M. Christian : Je parle de l'ensemble de la nation, parce que l'expression Première nation est une collectivité, et nous sommes nous-mêmes une nation.
Le sénateur Raine : Vous dites cependant que les collectivités peuvent prendre leurs propres décisions. Pour ce qui est de la gouvernance de la nation Secwepemc, êtes-vous satisfait de l'organisation du gouvernement? Fonctionne-t-il bien?
M. Christian : Le problème que soulève le système de gouvernance actuel est la Loi sur les Indiens, parce que tout le monde est habitué à agir en tenant compte des difficultés que soulève la Loi sur les Indiens, des difficultés que soulèvent les réserves. Pour ce qui est de la gouvernance du territoire, il y a 99 conseillers et 17 chefs dans nos 17 collectivités. Nous avons commencé à élaborer un nouveau discours. Il s'agit d'aborder la question de la gouvernance au-delà des collectivités, tout en préservant un système où les gens peuvent prendre leurs propres décisions sur les sujets qui les concernent, mais nous pouvons avoir des discussions ensemble pour parler de projets. Nous nous réunissons une fois ou deux par année. Là encore, il s'agit d'arriver à nous entendre sur un protocole ou sur une façon de travailler ensemble. Nous sommes en train, à l'heure actuelle, de parler de ces choses. Les chefs du nord ont un conseil tribal du nord, le chef Mike Archie est le porte-parole tribal. Les chefs du sud ont le conseil tribal de la nation Shuswap; je suis le porte-parole de ces 10 collectivités. Nous nous rencontrons pour chercher des moyens de travailler ensemble et c'est une évolution, mais nous savons que chaque collectivité doit pouvoir se faire entendre.
Le sénateur Raine : Dans ces réunions, parlez-vous de la possibilité de partager les revenus provenant des ressources? Il y a bien évidemment des collectivités qui disposent de plus de ressources que d'autres. Est-ce que la Première nation des Secwepemc, ses 17 collectivités, s'occupe de l'ensemble de ces terres?
M. Christian : À l'heure actuelle, les ressources et le partage des revenus sont une question très importante. Nous sommes très conscients de cet aspect lorsque nous parlons de titre aborigène. Le détenteur des droits n'est pas le conseil de bande élu et les tribunaux ont clairement déclaré que c'était la Loi sur les Indiens qui s'appliquait et le système des réserves. Les détenteurs de ces droits et du titre sont l'ensemble des membres des Premières nations, les membres héréditaires et ceux qui vivent sur nos terres. Voilà à quoi nous sommes en train de réfléchir, à l'heure actuelle, comment défendre collectivement les droits de toutes ces personnes? C'est la discussion que nous sommes en train d'avoir, à l'heure actuelle; elle porte sur la façon de le faire. C'est très difficile, parce que nous sommes constamment ramenés au système des réserves, et c'est là où nous en sommes aujourd'hui. Je peux vous dire que c'est un combat, mais nous sommes en train de changer les choses.
Le sénateur Raine : Je vous souhaite bonne chance avec ce grand projet.
M. Christian : Les aspects brûlants de la question des ressources et du partage des revenus portent sur les projets hydroélectriques qui se trouvent sur notre territoire. Nous examinons en ce moment des projets extrêmement importants. Nous avons entamé des discussions avec le gouvernement provincial, dans une relation de gouvernement à gouvernement, et là encore, nous parlons de la gouvernance à l'extérieur des collectivités, de la façon dont cela va fonctionner et c'est sur cela que nous sommes en train de travailler, à l'heure actuelle. Nous devons nous donner un programme et le réaliser. C'est ce que nous sommes en train de faire.
Le sénateur Raine : Merci encore une fois d'être venu aujourd'hui.
Le président : Je suis convaincu que la Colombie-Britannique sera très bien représentée à l'APN par Shawn Atleo. Je lui ai posé une question la dernière fois qu'il a comparu, je lui ai demandé : « Si nous voulions nous débarrasser de la Loi sur les Indiens » et c'est ce que beaucoup d'entre nous voulons, « avez-vous réfléchi à un programme de transition qui permettrait de supprimer cette loi sans avoir des répercussions négatives sur les membres des collectivités des Premières nations? » Il m'a répondu qu'il n'existait rien de ce genre pour le moment. On ne peut pas décider, du jour au lendemain, de supprimer cette loi. Il faut mettre sur pied un programme de transition, êtes-vous d'accord?
M. Christian : Je suis tout à fait d'accord avec vous. C'est la raison pour laquelle nous devons avoir des discussions axées sur l'article 35 pour définir nos rapports et bâtir, si je peux m'exprimer ainsi, la fondation sur laquelle nous allons nous appuyer pendant les 100 prochaines années pour participer à la société au Canada en tant que peuple égal à tous les autres, dans les domaines aspects juridiques, politiques, sociaux et culturels. C'est seulement alors que nous pourrons avoir ce dialogue. C'est la solution de rechange à la Loi sur les Indiens, et je crois que nous commençons à constater ce changement en Colombie-Britannique, où il y a des gens comme A-in-chut, Shawn Atleo, qui vient d'Ahousaht. Ils ont un système héréditaire et ils travaillent avec les chefs élus. C'est ce qui se passe dans l'ensemble de la province. Ce système est en train d'évoluer de plus en plus rapidement grâce au régime héréditaire, et A-in-chut est un chef héréditaire. Il est responsable des terres, il est responsable de la langue et des lois, et de tous ces aspects. Il y a ensuite les dirigeants élus qui ont la responsabilité de s'occuper de toutes ces petites réserves. Nous sommes en train d'intégrer tout ceci.
L'alternative est l'article 35 et la réforme constitutionnelle à ce niveau; c'est le seul moyen de vraiment changer les choses. Si nous voulons introduire des changements importants, il faut être audacieux. Ce n'est pas en bricolant la Loi sur les Indiens que nous changerons les choses. La Loi sur les Indiens a souvent été modifiée. Nous avons ici les règlements, nous avons les articles reliés au projet de loi C-31 qui va être examiné par la Chambre et nous ne faisons que bricoler quelque chose qui doit être complètement modifié.
Le président : Il y a un aspect qui devrait vous encourager, c'est le fait que ce comité existe et qu'il a réussi à travailler, ces dernières années, sur une base non partisane. Le sénateur Campbell vient d'un parti et certains d'entre nous viennent d'un autre parti, mais nous oublions les lignes de partis, parce que nous voulons accomplir ce qui doit être accompli.
Nous vous remercions d'être venu. Si vous pensez qu'il serait bon d'ajouter quelque chose après réflexion, n'hésitez pas à communiquer avec le greffier. Nous aimerions pouvoir préparer un rapport aussi complet que possible et présenter des recommandations utiles.
Notre prochain témoin, sénateurs, est Joanne Teegee de la Première nation Saik'uz.
Bienvenue. Je suis sûr que vous connaissez notre sujet d'étude, parce que vous avez assisté à la dernière intervention. Il s'agit des questions touchant les élections tenues aux termes de l'article 74 de la Loi sur les Indiens. Nous sommes prêts à entendre votre exposé et nous espérons que vous pourrez répondre à quelques questions posées par les sénateurs.
Joanne Teegee, Première nation Saik'uz, à titre personnel : Merci.
J'aimerais me présenter. Je suis la petite-fille aînée de feu Mary John Sr., également connue sous le nom de femme de Stoney Creek. J'ai commencé à travailler pour ma bande comme recherchiste en matière de revendications foncières au cours des années 1990, et j'ai commencé à travailler comme bénévole sur la Prince George Urban Aboriginal Strategy pour élaborer son mandat. J'ai maintenant modifié mon style de vie, parce que j'ai eu un accident; j'ai subi une rupture d'anévrisme au cerveau. Je suis une survivante du système des pensionnats, la troisième génération des survivants. J'avais 20 p. 100 de chance de survivre à cet anévrisme cérébral, et depuis que j'ai survécu à l'opération, j'ai choisi de me consacrer aux pauvres et aux défavorisés. J'ai décidé seule, grâce aux recommandations des aînés de ma collectivité, de représenter les survivants des pensionnats à l'assemblée générale annuelle du conseil tribal Carrier-Sekani.
Depuis que j'ai décidé de faire du travail bénévole, j'ai passé trois ans dans le domaine du règlement extrajudiciaire des différends et j'ai coordonné des groupes de RED, sur une base bénévole. À la suite de tout cela, le gouvernement fédéral a pris note de mes capacités et de ma volonté de travailler de façon transparente, qualités que j'ai démontrées dans l'exécution de mon travail, et il m'a été proposé de coordonner les audiences des groupes de PPCG. Par la suite, j'ai demandé d'être une dirigeante de ma société appelée Chosen Forerunners Advocates. Cette société a pour mission de fournir un appui quotidien aux Autochtones pour que justice leur soit faite sans préjudice. Nous visons également à faciliter la justice réparatrice et la réconciliation, et à apporter la guérison à des générations d'Autochtones.
Je représente aujourd'hui tous les Autochtones défavorisés qui n'ont pas de domicile fixe et tous les Autochtones défavorisés qui ont perdu leurs enfants.
Selon Statistique Canada, 60 p. 100 des membres des Premières nations vivent en dehors des réserves et ces membres ne sont pas représentés dans les conseils de bande. Je propose aujourd'hui au Sénat qu'au moins la moitié des membres des conseils représentent les personnes qui vivent hors réserve, parce qu'elles ne sont représentées nulle part. Lorsque nous avons élaboré le mandat de la stratégie urbaine autochtone, j'ai constaté que ce programme n'avait eu aucun résultat concret à part quelques projets, mais il m'a donné le désir de défendre les Autochtones défavorisés.
Un autre sujet qui m'intéresse est l'adoption d'un protocole pour la mise en candidature d'un membre d'une bande. Il devrait y avoir des vérifications, comme une vérification du casier judiciaire, et une vérification portant sur la stabilité des finances personnelles du candidat, parce que cela peut avoir des répercussions comme le gel des subventions lorsque les membres élus administrent mal les fonds au niveau de la bande. Notre bande a fait l'objet d'un gel du financement du logement, ce qui a empêché beaucoup de gens de demander un logement. Il est regrettable d'avoir à attendre que la responsabilité et la transparence dans les actions de la bande soient rétablies, alors que je sais fort bien qu'il y a sûrement un membre de la bande qui est capable de gérer les fonds de façon responsable et transparente.
Un autre aspect est la Loi sur les Indiens et la responsabilité fiduciaire. Elle a conduit à des échecs dans un certain nombre de domaines. Pendant que j'étais attachée de recherche pour la bande, le principe de la consultation a été adopté en 1994 au cours d'une convention tenue à Vancouver, mais il n'y a encore jamais eu de consultation. Je me suis adressée au conseil tribal Carrier-Sekani à l'assemblée générale. Lorsqu'ils se sont occupés de ce que le gouvernement leur offrait, ils n'ont pas non plus consulté leurs membres. Ils n'ont pas consulté les membres ordinaires, de sorte que ces membres ne sont pas représentés à un niveau auquel ils puissent faire confiance. Je parle ici de diffusion de l'information.
Je viens de Saik'uz, et il a fallu que je reçoive le courriel d'un avocat de Vancouver pour que j'apprenne que vous alliez tenir des audiences. Nous nous demandons pourquoi le comité ne va pas tenir d'audiences à Prince George, le central interior, et nous aimerions vous suggérer de tenir des réunions à Prince George pour que les conseillers tribaux Carrier-Sekani puissent être entendus.
Ce sont là mes principales préoccupations aujourd'hui. J'espère que la Loi sur les Indiens sera révisée et qu'un jour, elle sera abolie. Je ne sais pas combien de générations il faudra attendre. Je suis uniquement venue ici pour demander que justice soit faite. Je vous remercie d'avoir bien voulu entendre mes préoccupations.
Le président : Madame Teegee, est-ce que Saik'uz est près de Prince George?
Mme Teegee : C'est à environ 70 milles au sud-ouest de Prince George. C'est à huit milles au sud-ouest sur la Kenny Dam Road. Cela se trouve exactement au milieu de la C.-B., géographiquement.
Le président : Je ne pense pas que qui que ce soit s'opposerait à l'abrogation de la Loi sur les Indiens. J'aimerais vous poser la question suivante, vivez-vous dans une réserve ou à l'extérieur?
Mme Teegee : Je vis hors réserve.
Le président : Pouvez-vous voter aux élections des dirigeants de votre bande?
Mme Teegee : Oui, lorsque j'ai de l'argent, parce que ma voiture consomme un plein réservoir d'essence pour aller à ma réserve et revenir.
Le président : Pouvez-vous voter par correspondance ou devez-vous être sur place pour voter?
Mme Teegee : Non, nous pouvons voter par correspondance.
Le président : Vous pouvez voter par correspondance, de sorte que vous pourriez voter en fait de chez vous, n'est-ce pas?
Mme Teegee : Oui.
Le président : Vous recherchez la responsabilité et la transparence. Parlez-vous du régime électoral? Vous avez fait référence au logement et à diverses choses. Pensez-vous que les élections sont conduites de façon appropriée à votre niveau communautaire et est-ce qu'elles le sont de façon responsable et transparente?
Mme Teegee : Je pense qu'elles sont conduites de façon appropriée, mais le problème vient du fait que les personnes élues ne font l'objet d'aucune vérification.
Le président : Pourriez-vous vous expliquer davantage?
Mme Teegee : Excusez-moi, je parlais des candidatures, lorsque la candidature d'un membre est proposée pour un poste de conseiller ou de chef. Le chef peut être n'importe qui.
Le président : Un résidant de l'extérieur de la réserve?
Mme Teegee : Oui, de l'extérieur de la réserve. Oui, ce sont les règles applicables aux mises en candidature.
Le président : Vous avez fait un commentaire au sujet du fait que vous n'aviez pas été avisée de nos réunions. Je pense que vous n'avez pas été avisée parce que votre collectivité ne relève pas de la Loi sur les Indiens, parce que vous avez adopté un code coutumier. En fait, je n'en suis pas certain, mais c'est ce qu'on nous a dit. Notre sujet d'étude, madame Teegee, est en fait les élections selon la Loi sur les Indiens.
Si votre bande utilisait le régime de l'article 74 de la Loi sur les Indiens, vous auriez été avisée et c'est en fait notre sujet d'étude.
Mme Teegee : Je pense que nous tombons dans cette catégorie, parce que nous sommes en train d'élaborer un code électoral. C'est un autre aspect que mon chef voulait que je mentionne, le fait que 12 000 $ n'est pas une somme suffisante. Nous avons besoin de 50 000 $ pour élaborer un code électoral.
Le président : Est-ce que les Saik'uz font partie du conseil tribal Carrier Sekani?
Mme Teegee : Oui, ils élisent un de ces sept membres, je crois.
Le sénateur Raine : Je comprends qu'une somme de 12 000 $ n'est pas suffisante. Nous avons entendu tout à l'heure un chef qui nous a déclaré qu'il avait dû dépenser 40 000 $ pour rédiger son code coutumier. C'est une situation très difficile pour ceux qui n'ont pas les ressources pour le faire.
Pour quelle raison est-ce que votre bande aimerait adopter un code électoral coutumier?
Mme Teegee : Cette question a été abordée récemment au cours d'une assemblée. C'est relié à ce que je vous disais au sujet de la diffusion de l'information. Personne n'entend parler de ces assemblées avant qu'elles soient terminées, et on se demande ensuite pourquoi il n'y avait que 10 personnes dans la salle. Vous savez, cela touche la diffusion de l'information.
Le sénateur Raine : Est-ce que les membres de votre collectivité sont disséminés dans la région? Je sais que vous vivez à l'extérieur de la réserve, mais combien y a-t-il de membres dans votre collectivité?
Mme Teegee : Vous voulez dire le nombre de membres qui vivent dans la réserve, à l'heure actuelle?
Le sénateur Raine : Qui sont les membres de la bande?
Mme Teegee : Le nombre de membres? Je pense qu'il y en a entre 1 000 et 1 500, ce sont des chiffres approximatifs. Je n'en suis pas certaine.
Le sénateur Raine : Combien d'entre eux vivent dans la réserve?
Mme Teegee : Soixante pour cent vivent à l'extérieur de la réserve et 40 p. 100 dans la réserve.
Le sénateur Raine : Ceux qui vivent à l'extérieur des réserves, vivent-ils, pour la plupart, sur des terres traditionnelles?
Mme Teegee : Ceux qui vivent à l'extérieur de la réserve?
Le sénateur Raine : Oui.
Mme Teegee : Non, dans des régions urbaines.
Le sénateur Raine : Comme Prince George ou Williams Lake?
Mme Teegee : Oui, Vancouver.
Le sénateur Raine : Je comprends qu'il peut être très difficile de faire connaître à tous la tenue d'un événement.
Mme Teegee : Le conseil tribal a un agent de communications. Je ne sais pas ce qui est arrivé avec ce poste, mais j'espère que nous allons remédier à cette lacune en matière de diffusion de l'information.
Le sénateur Raine : Est-ce qu'à l'heure actuelle, les membres de votre conseil sont élus pour un mandat de deux ans?
Mme Teegee : Oui.
Le sénateur Raine : Serait-il préférable d'allonger ce mandat?
Mme Teegee : Non, je ne le pense pas, pour des questions de transparence et de responsabilité. Nous nous demandions ce que nous pouvons faire lorsqu'un conseiller ou un chef n'agit pas de façon transparente et responsable. Il devrait exister un mécanisme qui permette de le congédier, s'il agit de façon contraire à l'éthique.
Le président : Sénateur Campbell?
Le sénateur Campbell : Je n'ai pas de questions.
Le président : Eh bien, je vous remercie. Je pense qu'il faudrait mentionner pour le compte rendu que des avis ont été placés dans les journaux de toutes les collectivités où des séances seront tenues : des brochures, télécopies et courriels ont été envoyés aux centres d'amitié et aux conseils tribaux, aux centres de ressource; d'autre part, des bulletins d'information à l'intention des médias et des communiqués ont été remis aux postes de radio, aux principaux organismes autochtones et aux stations de télévision.
C'est peut-être insuffisant. Cela nous amène à nous poser des questions, parce que nous voulions que tous les membres des Premières nations sachent ce que nous étions en train de faire. Nous avons prévu une séance d'interventions au cours de laquelle les gens pourront prendre la parole sans formalité. Ils peuvent venir cet après-midi et demain à Williams Lake et vendredi à Vancouver et faire des interventions. Nous sommes désolés que notre bulletin d'information ne vous soit pas parvenu et que nous n'ayons pas élargi suffisamment le cercle des personnes à rejoindre. À l'avenir, nous essayerons d'améliorer cet aspect.
Merci d'être venue ce matin et d'avoir présenté votre exposé.
Mme Teegee : Merci.
Le sénateur Raine : Nous devrions mentionner que nous allons entendre des témoins demain à Williams Lake et que si vous connaissez des gens qui auraient aimé assister à nos séances, cette localité n'est pas très éloignée de Kelowna. Nous serions très heureux que des gens viennent demain à Williams Lake.
Mme Teegee : Je crois que j'ai envoyé des courriels à tous ceux qui figuraient sur ma liste.
Le sénateur Raine : Très bien. Merci encore.
(La séance est levée.)