Délibérations du Comité sénatorial permanent de la
Sécurité nationale et de la défense
Fascicule 3 - Témoignages du 30 mars 2009
OTTAWA, le lundi 30 mars 2009
Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, auquel a été renvoyé le projet de loi S-2, Loi modifiant la Loi sur les douanes, se réunit aujourd'hui, à 15 h 7 pour étudier le projet de loi.
Le sénateur Colin Kenny (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : C'est avec plaisir que je vous souhaite la bienvenue à la séance du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense. Je suis le sénateur Kenny, de l'Ontario. Avant que nous ne commencions, j'aimerais vous présenter les membres du comité.
À ma droite, au bout de la table, se trouve le sénateur Zimmer, de Winnipeg, au Manitoba. Il a fait une carrière longue et distinguée dans le domaine des affaires et dans celui des œuvres de bienfaisance. Il est membre du Sénat depuis 2005. Il siège également au Comité sénatorial permanent des transports et des communications.
[Français]
À ma droite également nous avons le sénateur Pierre-Claude Nolin, du Québec. Il est avocat et a été nommé sénateur en juin 1993. Le sénateur Nolin est présentement vice-président du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles et est également membre du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement.
[Traduction]
À côté de lui se trouve le sénateur Moore. Il représente la division sénatoriale de Stanhope St./South Shore, en Nouvelle-Écosse. Il a participé activement aux affaires municipales à Halifax et à Dartmouth, et il a aussi siégé au conseil des gouverneurs de l'Université St. Mary. Il siège également au Comité sénatorial permanent des banques et du commerce et au Comité mixte permanent d'examen de la réglementation.
À côté de lui se trouve le sénateur Banks, de l'Alberta. Il a été nommé au Sénat en avril 2000. Beaucoup de Canadiens le connaissent aussi comme musicien et comme artiste du spectacle accompli et polyvalent. Le sénateur Banks est membre du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles.
La deuxième personne à ma gauche est le sénateur Wallin, de la Saskatchewan. Mme Wallin a été nommée au Sénat en janvier 2009. Après une longue carrière en journalisme, le sénateur Wallin a travaillé au consulat général du Canada à New York et a aussi fait partie, à la demande du premier ministre Harper, du Groupe d'experts indépendant sur le rôle futur du Canada en Afghanistan. Mme Wallin est vice-présidente du comité, et elle est également membre du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international.
À côté d'elle se trouve le sénateur Tkachuk. Il vient de la Saskatchewan, et il a été nommé au Sénat en juin 1993. Il a été homme d'affaires, fonctionnaire et enseignant. Il est également vice-président du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration et membre du Comité sénatorial de sélection.
Nous avons également à nos côtés le sénateur Martin, qui est née à Séoul, en Corée, et qui s'est installée à Vancouver en 1972. Mme Martin a été nommée au Sénat en janvier 2009. En plus d'avoir fait une carrière dans le domaine de l'éducation, elle a participé à la fondation de la Corean Canadian Coactive Society et elle a siégé au Conseil consultatif multiculturel de la Colombie-Britannique. Elle milite pour les arts, et elle a produit et coordonné près d'une douzaine de festivals depuis 2003. Le sénateur Martin est membre du Comité sénatorial permanent des droits de la personne et du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.
À côté du sénateur Martin se trouve le sénateur Mitchell. Il a été nommé au Sénat en mars 2005, et il vient d'Edmonton, en Alberta. Il a fait carrière au sein de la fonction publique de l'Alberta, ainsi que dans le secteur financier et en politique. Il est vice-président du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles, et il est aussi membre du Comité sénatorial permanent des finances nationales.
Chers collègues et téléspectateurs, plusieurs personnes distinguées vont témoigner devant nous aujourd'hui. Nous nous penchons sur le projet de loi S-2, Loi modifiant la Loi sur les douanes. La LSD a d'abord été édictée en 1867 pour répondre à un triple objectif : veiller à la perception des droits, contrôler la circulation des gens et des marchandises et protéger l'industrie canadienne contre les préjudices pouvant être causés par l'importation effective ou prévue de marchandises sous-évaluées ou subventionnées et par d'autres formes de concurrence déloyale.
Le projet de loi S-2 modifie la Loi sur les douanes et contient plusieurs amendements de forme. Il ajoute des obligations liées aux zones de contrôle des douanes, accorde au ministre le pouvoir d'autoriser l'entrée et modifie des dispositions concernant la détermination de la valeur en douane et les déclarations préalables. Il accroît les pouvoirs des agents des douanes en ce qui concerne la fouille des personnes et de leurs marchandises qui se trouvent dans une zone de contrôle des douanes ou quittent cette zone. Le projet de loi prévoit en outre qu'un règlement peut être pris pour préciser le délai et les modalités selon lesquels les personnes visées par règlement peuvent fournir des renseignements sur les passagers. Enfin, il autorise l'incorporation par renvoi de documents dans les règlements.
Notre premier groupe de témoins est composé de Mme Deirdre Kerr-Perrott, vice-présidente, Innovation, sciences et technologie, de l'Agence des services frontaliers du Canada ou ASFC, M. Carman Baggaley, conseiller en politiques stratégiques au Commissariat à la protection de la vie privée du Canada et M. Jim Facette, président et chef de la direction du Conseil des aéroports du Canada. Vous disposez chacun de cinq minutes pour faire une déclaration préliminaire, après quoi nous allons passer à la période de questions.
Deirdre Kerr-Perrott, vice-présidente, Innovation, sciences et technologie, Agence des services frontaliers du Canada : Je suis heureuse de rencontrer les membres du comité pour discuter des modifications que le gouvernement propose d'apporter à la Loi sur les douanes. La frontière joue un double rôle de facilitation et de maintien de la sécurité. Les frontières intelligentes, sûres et efficaces favorisent l'immigration, les échanges et le tourisme tout en protégeant les Canadiens et leurs collectivités contre le crime, la contrebande et d'autres menaces graves.
[Français]
Notre défi permanent demeure celui de continuellement trouver la bonne harmonie entre l'exécution de la loi à la frontière et la facilitation du déplacement et du commerce dans un environnement global dynamique et en constante évolution.
[Traduction]
Une gestion moderne de la frontière doit permettre de relever le défi que posent ces deux mandats tout en tenant compte des réalités du contexte budgétaire actuel. La Loi sur les douanes contient des dispositions concernant l'importation et l'exportation de biens et notamment les pouvoirs qui sont conférés aux agents à la frontière.
[Français]
Bien que l'ASFC ait augmenté sa capacité à détecter et à répondre aux menaces visant la sécurité, la Loi sur les douanes demeure inchangée depuis 2001.
[Traduction]
Les modifications proposées vont permettre à l'ASFC de continuer d'évoluer tout en renforçant la capacité de ses agents de lutter contre les complots et les activités liées au crime organisé aux points d'entrée. Aux fins de cette lutte, le gouvernement a créé le concept de zones de contrôle des douanes en 2001. Ces zones sont des aires désignées où des voyageurs étrangers et des biens n'ayant pas encore été dédouanés par l'ASFC peuvent entrer en contact avec les travailleurs des points d'entrée et avec des personnes voyageant au pays.
À l'heure actuelle, les agents des services frontaliers ont le pouvoir d'arrêter, d'interroger et de fouiller les personnes présentes dans une zone de contrôle des douanes aux points de sortie seulement, et toutes les personnes qui quittent une zone de contrôle des douanes doivent se présenter devant les agents des services frontaliers.
Les modifications proposées vont permettre aux agents d'arrêter, d'interroger et de fouiller les personnes présentes à l'intérieur d'une zone de contrôle des douanes, comme aux points de sortie. En outre, les gens devront se présenter devant les agents des services frontaliers seulement si ceux-ci le leur demandent. Les gens qui quittent une zone de contrôle des douanes n'auront donc plus l'obligation de se présenter devant un agent des services frontaliers.
[Français]
Ces modifications fourniront une plus grande flexibilité aux agents des services frontaliers en ce qui concerne l'examen des personnes et des marchandises au sein des zones de contrôle des douanes, où les principales conspirations internes surviennent, et permettront de mettre davantage l'accent sur les secteurs de risque et les personnes d'intérêt.
[Traduction]
Permettre aux agents des services frontaliers d'intervenir à l'intérieur des zones de contrôle des douanes renforcera la capacité de l'ASFC de prévenir la contrebande et le trafic d'autres éléments interdits et de faire en sorte que ceux-ci n'atteignent pas nos collectivités. La sécurité des Canadiens s'en trouvera accrue, puisque la mesure découragera les complots internes aux points d'entrée et fera diminuer le risque causé par le crime organisé et par les menaces à la sécurité nationale.
Les modifications que l'on propose d'apporter à la Loi sur les douanes permettront également à l'ASFC de mettre en œuvre l'initiative sur les manifestes électroniques, qui est la prochaine étape prévue de l'Initiative relative à l'information préalable sur les expéditions commerciales. À l'heure actuelle, les transporteurs et les transitaires fournissent par voie électronique et à l'avance aux agents de l'ASFC de l'information sur les marchandises transportées par avion et par bateau, de façon à ce que ces agents disposent de l'information dont ils ont besoin en temps opportun pour prévoir les menaces à la santé, à la sûreté et à la sécurité que peuvent causer les biens acheminés vers le Canada.
[Français]
L'initiative du manifeste électronique requerra que tous les partenaires de la chaîne commerciale des importations, incluant ceux des modes de transport routier et ferroviaire, présentent des données sur le fret avant leur arrivée au Canada.
[Traduction]
S'il est adopté, le projet de loi va permettre à l'ASFC de prendre des décisions plus éclairées quant aux biens dont elle permet l'entrée au Canada, et notamment en ce qui concerne le fait de relever les menaces d'origine inconnue et présentant un risque élevé avant que la marchandise n'arrive au pays.
Les consultations auprès des entreprises qui effectuent des échanges commerciaux et d'autres intervenants ont contribué à la formulation des propositions en question. L'ASFC a consulté les associations d'entreprises qui importent et qui exportent des biens et de transporteurs et continue de travailler auprès de ces associations qui l'aident à élaborer et à mettre en œuvre les systèmes nécessaires. Les intervenants consultés trouvent qu'il est généralement plus efficace de faire des déclarations par voie électronique que sur papier, et ils sont en faveur des mesures visant l'accroissement de la sécurité. Nos consultations et notre travail auprès de ces comités demeurent axés sur une approche équilibrée visant à faire en sorte que la frontière continue de fonctionner de façon efficace et à permettre l'harmonisation de nos efforts avec ceux des États-Unis, dans la mesure du possible. C'est ce que nous faisons.
Nous avons également consulté nos partenaires fédéraux, notamment la GRC, le SCRS et Transports Canada. Ces organisations sont également en faveur des modifications concernant les zones de contrôle des douanes.
[Français]
Les autorités aéroportuaires perçoivent les zones de contrôle des douanes comme des mesures de sécurité rationnelles et ont déjà exprimé leur appui relativement à cette initiative publiquement.
[Traduction]
Les autorités portuaires reconnaissent elles aussi la nécessité des zones de contrôle des douanes autour des navires de commerce et des points d'arrivée des bateaux de croisière, dans le but de lutter contre la multiplication des activités criminelles liées à la frontière et des complots internes, et elles sont en faveur de la prise de mesures à cet égard.
Pour résumer, monsieur le président, la pleine mise en œuvre des initiatives prévues par les modifications en question nous aidera à lutter contre le crime organisé et à empêcher les marchandises de contrebande d'atteindre les collectivités du Canada, tout en facilitant le mouvement des marchandises licites et les déplacements des voyageurs.
[Français]
Je vous remercie de m'avoir accordé la possibilité de discuter des modifications proposées avec vous.
[Traduction]
Le président : Je demanderais à tout le monde de respecter la limite de temps, qui est de cinq minutes.
Monsieur Baggaley.
Carman Baggaley, conseiller en politiques stratégiques, Commissariat à la protection de la vie privée du Canada : Bonjour. Je suis heureux d'être ici pour discuter du projet de loi S-2. L'intérêt du Commissariat à l'égard du projet de loi découle du fait que nous nous intéressons depuis longtemps aux questions qui ont trait à la collecte de renseignements personnels auprès des passagers et des membres d'équipage. De façon générale, nous nous intéressons aux programmes qui supposent la collecte de renseignements personnels et des répercussions sur les voyages par avion.
L'article 107.1 de la Loi sur les douanes confère à la SFC le pouvoir de recueillir de l'information préalable sur les voyageurs ou IPV et aussi l'information consignée au dossier du passager ou DP. Lorsqu'il a été créé, le programme de l'IPV/du DP a engendré un certain nombre de préoccupations pour le Commissariat. Cependant le ministre du Revenu national, qui était responsable du programme à l'époque, y a apporté plusieurs modifications qui ont dissipé la plupart de nos inquiétudes.
Le projet de loi S-2 viendrait modifier l'article 107.1, qui, comme je l'ai mentionné, est la disposition autorisant l'ASFC à recueillir de l'information sur les passagers. Le projet de loi modifierait la loi de deux façons. Il y aurait d'abord un changement en ce qui concerne le moment où l'information est recueillie, et ensuite un changement touchant l'obligation de fournir l'information.
Nous sommes cependant heureux de voir que le projet de loi S-2 ne semble pas avoir pour effet d'accroître la quantité de renseignements personnels recueillis, le nombre de personnes auprès desquelles seront recueillis des renseignements personnels ni l'échange de renseignements personnels. Comme le fait de limiter la collecte de renseignements personnels est un élément important de la protection de la vie privée, nous sommes satisfaits de l'orientation générale du projet de loi S-2.
À nos yeux, il n'y a rien dans le projet de loi qui vienne accroître de façon significative ou exacerber nos préoccupations en ce qui concerne la collecte de renseignements personnels. Au contraire, d'après ce que nous en avons compris, le projet de loi S-2 est axé sur les questions liées au mouvement des biens. Il renforce et clarifie aussi les pouvoirs que peuvent exercer les agents dans les zones de contrôle des douanes. À cet égard, nous sommes satisfaits de l'orientation générale du projet de loi.
Pour conclure, le Commissariat est en faveur de l'amélioration de la sécurité nationale, et nous accueillons favorablement un projet de loi permettant cette amélioration sans accroissement de la collecte de renseignements personnels.
Le président : Chers collègues, un document unilingue vient d'être distribué. Nous venons tout juste de le recevoir. Par conséquent, nous avons pensé qu'il était préférable que les gens puissent le consulter immédiatement, et nous allons le faire traduire en temps et lieu.
Monsieur Facette, vous avez la parole.
Jim Facette, président et chef de la direction, Conseil des aéroports du Canada : Merci de m'offrir l'occasion de vous parler du projet de loi S-2, projet de loi que le Conseil des aéroports du Canada appuie fortement et dans lequel il voit une façon de moderniser la prestation des services frontaliers offerts au quotidien dans les aéroports du Canada.
Le Conseil des aéroports du Canada ou CAC est le porte-parole des aéroports du pays. Nous comptons parmi nos membres 180 aéroports canadiens, dont l'ensemble des aéroports faisant partie du réseau national et la plupart des aéroports offrant des services aux passagers des différentes provinces et différents territoires. Pratiquement toutes les marchandises transportées par voie aérienne au pays et tous les voyageurs étrangers passent par les aéroports membres du CAC, tout comme 95 p. 100 des personnes qui voyagent au pays.
Le CAC est tout à fait en faveur du projet de loi, qui, selon nous, est essentiel à la modernisation de la prestation des services frontaliers dans les aéroports du Canada. Plus précisément, les modifications qui vont permettre la mise en œuvre des zones de contrôle des douanes sont la prochaine étape qui s'impose naturellement pour l'Agence des services frontaliers du Canada, permettant à ses agents d'effectuer des contrôles dans des zones beaucoup plus importantes. Pour ce qui est des aéroports, nous voyons cela comme une amélioration du point de vue de la sécurité et de l'efficacité des services.
Les modifications en question vont permettre la désignation de zones de contrôle de douane ainsi que la restriction de l'accès à ces zones, et elles vont faire en sorte que les voyageurs se trouvant dans une zone de contrôle des douanes devront se présenter devant un agent de l'ASFC sur demande. Elles vont également permettre l'examen des biens et des services offerts aux voyageurs dans une zone de contrôle des douanes ou à la sortie de cette zone.
Comme les agents ne peuvent pour l'instant vérifier les bagages des voyageurs que lorsque ceux-ci quittent la zone de douane, ce changement constitue une grande amélioration de la sécurité. Les changements vont être bénéfiques en pratique à la fois pour l'agence et pour les voyageurs, puisqu'ils vont permettre à l'agence de se concentrer sur les zones de risque et les personnes d'intérêt et vont permettre aux voyageurs de s'occuper de leurs affaires sans être arrêtés et interrogés chaque fois qu'ils quittent la zone.
Il y a eu une croissance extraordinaire au chapitre des déplacements des voyageurs et des marchandises à l'échelle internationale au cours de la dernière décennie. La crise économique qui sévit en ce moment a un effet négatif sur la circulation des voyageurs et des marchandises, mais le segment international est celui qui se porte le mieux au Canada, et nous prévoyons qu'il continuera de croître pendant de nombreuses années encore.
Si des changements comme ceux qui sont proposés dans le cadre du projet de loi S-2 ne sont pas apportés, le système frontalier du Canada ne sera pas en mesure de suivre le rythme des affaires. Ces modifications vont offrir à l'agence la marge de manœuvre dont elle a besoin pour s'acquitter de son rôle essentiel de façon plus efficace dans ce milieu où le niveau d'activités est très important.
La désignation de zones de contrôle des douanes est considérée comme étant une étape essentielle à la création de zones franches à l'arrivée, qui est envisagée en ce moment par le ministère des Finances. Les zones franches à l'arrivée permettent aux voyageurs d'acheter des marchandises en franchise à leur arrivée au Canada, ce qui est avantageux des deux côtés pour le gouvernement. Vu l'expérience vécue en Australie, où des zones franches à l'arrivée existent depuis des années, nous pensons que la création de ce genre de zones au Canada nous permettrait de récupérer des ventes que nous perdons en ce moment au profit d'autres pays.
Pour terminer, nous encourageons le comité à adopter le projet de loi S-2 rapidement. Nous sommes convaincus que les changements qu'il contient devraient avoir été apportés depuis longtemps et qu'ils sont essentiels à la modernisation de la prestation des services frontaliers au Canada pour le XXIe siècle. Ces changements vont accroître à la fois l'efficacité des services frontaliers et la sécurité du pays.
Le sénateur Wallin : J'aimerais remercier Mme Kerr-Perrott et M. Facette de l'enthousiasme qu'ils ont exprimé et de leur appui face au projet de loi. C'est intéressant de pouvoir prendre connaissance de leur point de vue, comme du vôtre, monsieur Baggaley. Je sais que vous avez jeté un regard critique sur le projet de loi, et c'est rassurant, dans une certaine mesure.
J'aimerais revenir sur un petit détail. Pouvez-vous nous donner un exemple de ce que vous entendez par « complot interne »? S'agit-il des employés, ou parlez-vous de problèmes d'un autre ordre?
De façon plus générale, pouvez-vous me donner un exemple de ce qui pourrait se passer et de la façon dont les choses pourraient fonctionner dans le cadre des nouvelles lois proposées — une situation qui pourrait survenir dans laquelle une personne se livrerait à une activité illégale. De quelle liberté, de quels droits ou de quels outils de plus qu'auparavant bénéficieriez-vous?
Mme Kerr-Perrott : Ça pourrait être par exemple un porteur de bagages qui apporterait les bagages d'un vol international à l'endroit où arrivent les vols nationaux plutôt qu'à un endroit où il devrait les apporter. À l'heure actuelle, les agents de l'Agence des services frontaliers du Canada ne peuvent pas vraiment empêcher cette personne d'agir ainsi. Cependant, une fois que des zones de contrôle des douanes auront été établies, ils pourraient interroger la personne, et, en fonction des réponses qu'ils obtiendront, ils pourront demander à examiner les bagages, qui pourraient contenir des marchandises qu'on chercherait à faire entrer illégalement au pays.
Le sénateur Wallin : En ce moment, vous ne pouvez pas le faire. Si vous savez que c'est ça qui se passe, vous devez attendre que la personne ait fini de travailler et sorte de la zone.
Mme Kerr-Perrott : Nous n'avons pas nécessairement l'occasion de constater ce qui se passe.
Le sénateur Wallin : De même constater que ça se passe.
Le sénateur Moore : Par rapport à la question posée par le sénateur Wallin, comment les agents de l'ASFC peuvent- ils voir quelqu'un prendre un sac à l'arrivée des vols internationaux et le mettre sur le convoyeur qui se trouve à l'arrivée des vols nationaux? Comment peuvent-ils être témoins de ça? Ils se trouvent dans une autre zone.
Mme Kerr-Perrott : En ce moment, ils ne peuvent pas en être témoins. Nous essayons d'établir ce qui devrait être une zone de contrôle des douanes. Si nous y parvenons, nous allons pouvoir voir ce qui se passe.
En ce moment, nous nous penchons sur la question des aires qui devraient être désignées comme faisant partie d'une zone de contrôle des douanes et sur la façon dont nous devrions procéder à la désignation des zones de contrôle des douanes. Nos agents auraient les mêmes droits que ceux qu'ils ne peuvent exercer en ce moment qu'aux points de sortie. Ils poseraient les mêmes questions, et, en fonction des réponses, ils prendraient les mesures qui s'imposent.
Le sénateur Wallin : Pouvons-nous obtenir le point de vue de M. Facette là-dessus aussi?
M. Facette : Peut-être puis-je vous donner un exemple plus concret de ce qui se passerait dans un aéroport. Le meilleur exemple, ce serait un petit aéroport, disons celui de Charlottetown. L'ASFC pourrait déclarer une certaine partie de l'aire de trafic — pour le vol 123 en provenance de Detroit, par exemple — zone de contrôle des douanes. L'avion arriverait à la porte, et tout le secteur de cette porte à ce moment-là ferait partie de la zone de contrôle des douanes. Seuls les agents pourraient entrer dans la zone pour faire leur travail, en fonction de l'information qu'ils auraient obtenue à l'avance au sujet de cet avion. S'il y avait dans l'avion un sac ou quelque chose d'autre à vérifier, ils pourraient le faire à ce moment-là, plutôt qu'au point de sortie par lequel les bagages doivent passer. C'est beaucoup plus tôt dans le processus.
Le sénateur Moore : Pourquoi les agents vérifieraient-ils les bagages?
Le sénateur Wallin : En raison d'informations qu'ils auraient reçues au préalable.
M. Facette : La vérification serait motivée.
[Français]
Le sénateur Nolin : Madame Kerr-Perrot, mes questions concernent l'article 10 du projet de loi qui vise à amender l'article 99.2 de la loi actuelle.
Vous nous avez expliqué en quelques mots quelles étaient les différences entre la loi actuelle et ce que vise le projet de loi S-2. Je comprends que dorénavant les fouilles pourront être identifiées non seulement à la sortie de la zone de contrôle des douanes, mais à l'intérieur de la zone de contrôle; aie-je raison?
Mme Kerr-Perrot : Oui.
Le sénateur Nolin : En général, l'expérience des Canadiens face à votre travail se limite dans un premier temps à rencontrer un agent des douanes qui leur pose des questions sur la durée de leur visite, de leurs achats à l'étranger et de leur destination, et dans un deuxième temps, à faire une déclaration au retour, à un autre agent des douanes. Pour la majorité des gens, votre travail se limite à cela. Aujourd'hui, vous avez la chance d'expliquer à des milliers de Canadiens comment ces agents vont s'y prendre pour justifier qu'une fouille doive être faite sur une personne — parce que l'article 10 traite de la fouille des personnes —, comment vos agents s'y prennent-ils pour soupçonner une personne ou des personnes, de conspiration dans le but de tricher la loi?
[Traduction]
Mme Kerr-Perrott : Les secteurs du renseignement et du ciblage de l'ASFC reçoivent de l'information sur les personnes, sur le crime organisé et sur les complots qui peut les amener à prévoir que quelque chose va se passer dans un port ou dans un aéroport. Les agents des services frontaliers auraient ainsi l'occasion de vérifier ce qui se passe.
[Français]
Le sénateur Nolin : La source de vos soupçons se limite à votre service de renseignement?
[Traduction]
Mme Kerr-Perrott : Non, pas seulement à l'information recueillie, quoique nous avons des cibleurs et que nous recevons de l'information à l'avance. Cependant, les agents sont formés pour surveiller ce que les gens font dans les zones de contrôle des douanes. Ils sont formés pour examiner de plus près certaines situations particulières.
[Français]
Le sénateur Nolin : Comme il s'agit maintenant de fouilles qui pourront être ordonnées à l'intérieur de la zone et non uniquement à la sortie de la zone, pouvez-vous nous expliquer comment cela fonctionne en ce moment, comparativement à comment l'application de ces soupçons fonctionnera après l'adoption du projet de loi S-2?
[Traduction]
Mme Kerr-Perrott : En ce moment, l'agent interroge les gens à la sortie, ou les gens doivent se présenter devant lui. L'agent pose des questions et peut procéder à une fouille s'il juge que c'est nécessaire. Dans le nouveau scénario, les agents des douanes vont pouvoir poser le même genre de questions à l'intérieur de la zone de contrôle des douanes, et, s'ils ont des motifs raisonnables pour le justifier, ils vont pouvoir procéder à une fouille. Ils auront reçu la formation adéquate, et les gens entrant dans une zone de contrôle des douanes seraient avisés de la possibilité de fouille. Il y aurait un avis.
[Français]
Le sénateur Nolin : À l'heure actuelle, est-ce que vos agents sont formés pour détecter ce genre d'indices raisonnables qui les amèneraient à décider qu'une fouille est nécessaire ou est-ce que ce sera une formation donnée ultérieurement?
[Traduction]
Mme Kerr-Perrott : Oui, les agents sont formés. Nous avons des cibleurs qui s'occupent de ce genre de chose. Cependant, il y aurait des programmes de formation supplémentaires à l'intention des agents et des superviseurs qui s'occupent directement des zones de contrôle des douanes.
[Français]
Le sénateur Nolin : L'article 92.2 fait référence à deux exceptions. Dans un premier temps, il y a les personnes exemptées en vertu du règlement et dans un deuxième, une catégorie de personnes règlementaires qui sont fouillées en vertu du paragraphe deux de l'article. Pouvez-vous nous expliquer qui sont ces personnes, comment elles sont identifiées et comment fonctionne cette fouille en vertu du paragraphe deux de l'article?
[Traduction]
Mme Kerr-Perrott : Je n'ai pas cette information pour l'instant, mais je vais la fournir au comité.
Le président : Veuillez la faire parvenir à la greffière du comité.
Mme Kerr-Perrott : Oui.
Le sénateur Zimmer : J'ai une question pour chacun des témoins. Monsieur Baggaley, à quand remonte la dernière vérification concernant le traitement des renseignements personnels par une organisation gouvernementale s'occupant de la frontière terrestre ou des postes frontaliers des aéroports? Selon vous, à quel point enfreignons-nous le droit à la vie privée des Canadiens?
M. Baggaley : La dernière vérification à cet égard a lieu en 2006, et c'est l'ASFC qui en a fait l'objet. Plus précisément, lorsque nous avons effectué la vérification auprès de l'ASFC, nous n'avons pas envisagé l'ensemble de ces activités, mais nous sommes plutôt concentrés sur l'échange de renseignements, surtout avec les États-Unis. Dans le cadre de cette vérification, nous avons examiné la question de l'échange de certains renseignements recueillis en rapport avec le transport aérien, plus précisément dans le contexte de l'Initiative d'identification des voyageurs à risque élevé. Le programme de l'IPV/du DP comporte un processus algorithmique d'évaluation du risque au départ qui vise à analyser l'information recueillie par l'ASFC dans le but d'identifier les personnes à risque.
Nous avons conclu que la collecte de renseignements ne posait pas de problèmes précis. Cependant, nous avons relevé des problèmes touchant la façon dont l'information est transmise aux autorités américaines, ce qui ne se fait pas toujours selon les procédures adéquates. Il arrive parfois que l'échange de renseignements se fasse verbalement plutôt que par écrit. C'est le meilleur exemple que je peux vous donner.
Le sénateur Zimmer : Monsieur Facette, quelles sont les dispositions ou les modifications qui nuiraient aux intérêts commerciaux des aéroports canadiens? Quelles sont celles qui permettront des améliorations importantes?
M. Facette : C'est une question à la fois vaste et précise. Pour l'instant, je n'ai aucune préoccupation quant à des dispositions qui pourraient avoir un effet négatif sur les affaires. Les modifications proposées vont faciliter les affaires, en ce sens que l'ASFC pourra s'occuper immédiatement des cas qui l'inquiéteront. Les 99,9 p. 100 d'honnêtes contribuables canadiens qui restent pourront faire leurs affaires sans être ralentis par les rares cas posant problème.
Le sénateur Zimmer : Madame Kerr-Perrott, depuis leur mise en place, les programmes NEXUS et EXPRES ont-ils répondu à nos besoins en matière de sécurité? Les consommateurs qui possèdent une carte d'identité feront-ils de nouveau l'objet d'un contrôle ou d'une fouille?
Mme Kerr-Perrott : Selon nous, les programme NEXUS et EXPRES sont un succès. Les gens utilisent de plus en plus la carte NEXUS, surtout. Nous sommes d'avis que ça facilite le passage aux postes frontaliers.
Le sénateur Zimmer : La deuxième partie de la question portait sur la sécurité. Les consommateurs possédant une carte d'identité feront-ils de nouveau un jour l'objet d'un contrôle ou d'une fouille?
Mme Kerr-Perrott : À l'occasion, ils font l'objet d'un contrôle ou d'une fouille, et il arrive parfois qu'on constate certains problèmes. De façon générale, le programme est vu comme étant un succès. Il est clair que les personnes qui participent seraient d'accord avec ça.
Le sénateur Zimmer : J'ai deux autres questions, mais je vais attendre le prochain tour de table, pour ne pas prendre trop de temps.
Le sénateur Banks : Merci aux témoins d'être ici.
Monsieur Facette, je ne veux pas vous réprimander — et je suis malheureusement et résolument unilingue par ignorance —, mais vous êtes au Parlement du Canada. Si vous vous présentez ici avec des documents, surtout une personne de votre rang, il faut que ces documents soient dans les deux langues officielles. Avec l'indulgence de la présidence...
Le président : En toute justice, sénateur Banks, les Canadiens peuvent présenter leur témoignage dans la langue de leur choix. Il appartient au comité de faire traduire les documents. Dans ce cas-ci, nous ne les avons pas obtenus à temps.
Le sénateur Banks : C'est de ça que je parle, du fait de les recevoir à temps.
Le président : Le témoin a le droit de présenter les documents dans la langue de son choix.
Le sénateur Banks : Dans l'une ou l'autre des langues officielles, bien entendu.
M. Facette : Ça ne me dérange pas de répondre à la question du sénateur. Sénateur, vous avez raison de dire qu'il est courant pour les associations de l'industrie d'apporter des documents dans les deux langues officielles. Je dois avouer que, si nous avions eu le temps de le faire, c'est ce que nous aurions fait. Comme nous avons peu de personnel, nous n'avons pas eu le temps de le faire; toutes nos excuses aux membres du comité.
Le sénateur Banks : Je comprends. Je voulais simplement que vous compreniez la question de l'indulgence.
Je vais poser une question à Mme Kerr-Perrott. Ma question a trait à l'application au transport ferroviaire et au transport routier des exigences qui s'appliquent déjà ailleurs au Canada. Le passage à la frontière, dans les deux directions, de marchandises transportées par train ou par camion est en quelque sorte une question différente de celle des marchandises transportées par avion ou par bateau, je pense, sur le plan des mécanismes. Je parle de la gestion de l'offre, de la gestion sans gaspillage et de la gestion de l'offre en fonction de la demande. Nous sommes tellement connectés à la frontière que le passage des biens et des services est d'une grande importance.
Avant de décider d'appliquer l'Initiative relative à l'information préalable sur les expéditions commerciales à ces deux modes de transport, avez-vous consulté les intervenants du secteur de la chaîne d'approvisionnement et travaillé avec eux? Ils ont des préoccupations au sujet d'un chargement d'enjoliveurs transportés de Windsor à Detroit — c'est- à-dire que, dans les délais prescrits par le règlement qui pourrait être adopté aux termes de l'article 12 de la loi, ce genre de choses va devenir impossible et va poser une difficulté, non pas pour les fournisseurs ou pour les consommateurs, mais bien pour les transporteurs.
Avez-vous tenu compte de ça? Pourra-t-on en tenir compte lorsque le règlement et les moyens par lesquels il sera appliqué vont être adoptés et que les transporteurs devront composer avec ça?
Mme Kerr-Perrott : Oui. En ce moment, nous sommes en train de consulter les intervenants. Nous avons deux comités : le Réseau de partenariats des intervenants pour le manifeste électronique et le comité consultatif de l'ASFC. Nous travaillons avec ces deux comités au moment où nous examinons nos exigences sur les plans des délais, des données et des gens à qui nous demandons les données.
Le sénateur Banks : Là-dessus, en ce qui concerne les autres aspects du projet de loi — qui ont tendance, dans le cas des zones sécurisées, à être axés davantage sur les risques perceptibles et moins sur tout le monde, si j'ai bien compris ce que vous avez dit — pourriez-vous appliquer ce principe aux transporteurs qui expédient des marchandises par-delà la frontière vers le Canada? Des gens ont affirmé que nos exigences vont être plus strictes que celles des Américains. Ça pourrait poser des problèmes à l'industrie canadienne. Nous pourrions perdre des emplois au profit des États-Unis, par exemple.
Mme Kerr-Perrott : En ce moment, nous obtenons 80 p. 100 de l'information dont nous avons besoin par voie électronique, mais nous aimerions obtenir toute l'information de cette façon.
L'idée, c'est que ça faciliterait le mouvement des véhicules. Ça faciliterait le mouvement des véhicules qui posent un risque faible et ça permettrait à nos agents des douanes de se concentrer sur les éléments à risque élevé. Cependant, nous savons que les intervenants ont des préoccupations. Nous nous penchons sur la façon de faciliter le mouvement dans les cas où toute l'information n'est pas accessible.
Le sénateur Banks : Si je comprends bien, lorsque vous en viendrez aux choses pratiques, ce sera sous la forme d'un règlement adopté dans le cadre de la loi, qui sera communiqué à tout le monde et qui pourra faire l'objet d'une étude par le Parlement?
Mme Kerr-Perrott : Je suis désolée. Il faudrait que je vérifie, mais je pense que ces détails feront partie du règlement. Nous travaillons à régler ces questions avec les collectivités, et, oui, ce sont des questions qu'elles ont soulevées.
Le sénateur Moore : Merci à nos témoins d'être ici.
Je veux revenir sur une question posée par le sénateur Nolin. Comment allez-vous vous y prendre pour définir les zones de contrôle des douanes? À l'heure actuelle, les agents peuvent arrêter une personne, mais seulement aux points de sortie. Les modifications en question vont leur permettre de le faire aussi dans les zones de contrôle des douanes. Pourraient-ils aller plus loin et arrêter des gens, disons, dans le hall principal d'un aéroport? Comment la population saura-t-elle où se trouvent ces zones principales? Comment allez-vous le faire savoir aux voyageurs et aux gens d'affaires?
Mme Kerr-Perrott : Nous sommes en train d'examiner la question de la façon dont nous allons marquer ces zones, des zones que nous allons considérer comme étant des zones de contrôle des douanes et de la manière dont nous allons aviser les gens lorsqu'ils entreront dans une zone de contrôle des douanes et de ce que cela suppose. Nous sommes en train d'effectuer des travaux de recherche; il y a au sein de notre organisation des gens qui se penchent sur ça, pour qu'on puisse s'assurer que les gens savent ce que suppose pour eux le fait de se trouver dans une zone de contrôle des douanes.
Le sénateur Moore : Au-delà de l'exemple des arrivées internationales qu'a donné M. Facette, envisagez-vous que d'autres secteurs des aéroports fassent partie des zones de contrôle des douanes? Le sénateur Nolin a parlé de la situation que nous vivons tous lorsque nous rentrons au Canada, dans cette zone fermée. On peut sortir et se rendre dans le hall principal ou se rendre à sa voiture et partir. Envisagez-vous d'autres secteurs des aéroports, mis à part ceux-là?
Mme Kerr-Perrott : Nous envisageons notamment l'aire de trafic, les aires d'entreposage, le salon de l'aéroport.
Le sénateur Moore : Le salon de l'aéroport?
Mme Kerr-Perrott : Oui.
M. Facette : Pour qu'on comprenne mieux comment les aéroports sont faits, concrètement, lorsqu'on arrive à l'aéroport, une fois qu'on quitte la zone des douanes, la porte qui mène à la zone publique n'est généralement pas très loin, à 15 ou 20 pieds de distance, environ. Selon l'information dont dispose le Conseil des aéroports du Canada, l'agence a l'intention de déclarer zone de douane l'endroit où se trouvent les passagers avant de passer ce point. Ce serait une zone où on aurait encore à se présenter devant un second agent.
À l'heure actuelle, on se présente devant deux agents. Lorsqu'on arrive, on voit trois aires d'examen. Il y la file pour le prédédouanement, où on répond à deux ou trois questions et où on écrit quelque chose sur sa fiche d'arrivée. On récupère ensuite ses bagages et on se présente devant un autre agent. Une fois qu'on a vu ce second agent et qu'il nous a autorisé à sortir, une fois qu'on est sorti, on se trouve à l'extérieur de la zone de contrôle des douanes. On est maintenant dans le domaine public.
Pour l'instant, avant de passer ce point, on se trouve dans la zone de contrôle des douanes. Si le projet de loi est adopté, nous nous attendons à ce que l'agence définisse avec nous précisément quelles seront ces zones, pour chacun des aéroports.
Les aires qui vont être déclarées zones de contrôle des douanes à Toronto et à Charlottetown seront différentes. Dans les grands aéroports, il y a des vols internationaux qui arrivent à toutes les heures, tandis que, dans les petits aéroports, il n'y en a qu'à certaines heures précises.
Le sénateur Moore : Est-ce que c'est possible en ce moment d'arriver au Canada de l'étranger et de se rendre au salon?
M. Facette : Oui, c'est possible lorsqu'on passe par le Canada pour se rendre ailleurs à l'étranger. Si vous arrivez à Vancouver en provenance de Hong Kong et que vous vous rendez à New York, vous attendez dans un salon. Ça dépend de votre destination.
Le sénateur Moore : Et de la configuration de l'aéroport.
M. Facette : Oui, mais vous n'avez pas accès aux mêmes zones que la population de l'endroit.
Le sénateur Moore : Madame Kerr-Perrott, vous avez parlé du fait de consulter le milieu des gens d'affaires qui effectuent des échanges transfrontaliers. Avez-vous consulté la Canadian Courier & Logistics Association ou CCLA?
Mme Kerr-Perrott : Il faudrait que je vérifie. Je n'ai pas cette information. Voulez-vous dire en ce qui concerne les zones de contrôle des douanes?
Le sénateur Moore : Oui.
Mme Kerr-Perrott : Nous l'avons certainement fait en ce qui concerne le Manifeste électronique.
Le sénateur Moore : J'aimerais que vous me parliez des documents qu'on propose d'exiger et des répercussions que cela va avoir sur le commerce en général.
Mme Kerr-Perrott : Par rapport au Manifeste électronique?
Le sénateur Moore : Je vais vous lire une lettre que nous a envoyée la CCLA :
S'il manque des données au sujet de l'une ou l'autre des cargaisons d'un transport, tout transport et toutes les cargaisons à bord seront refusés au point d'entrée, même les cargaisons qui satisfont aux exigences. Dans bien des cas, il serait impossible de fournir l'information exigée dans les délais prescrits avant l'arrivée.
Étiez-vous au courant de cette préoccupation?
Mme Kerr-Perrott : Oui, nous l'étions. Nous avons consulté les représentants de la CCLA afin de déterminer comment nous pourrions faire pour les aider à traverser la frontière plus rapidement lorsqu'ils ne disposent pas de toute l'information requise.
Le sénateur Moore : Est-ce qu'une cargaison en entier pourrait être refusée à l'entrée s'il manque de l'information?
Mme Kerr-Perrott : C'est possible. Comme je l'ai dit, nous devons parachever nos exigences, et nous travaillons avec les représentants de la CCLA, puisque nous savons que c'est une chose qui les préoccupe.
Le sénateur Mitchell : J'ai plusieurs petites questions. Il me semble que nous parlions de ramener les ventes en franchise au Canada lorsque je faisais partie de l'assemblée législative de l'Alberta dans les années 1990. Pourquoi est- ce si difficile de le faire?
M. Facette : Nous nous sommes nous-mêmes posé cette question. La réponse courte, c'est que je ne sais pas. Le Conseil des aéroports du Canada milite depuis longtemps en faveur de la possibilité pour les voyageurs de faire des achats à leur arrivée au pays. Nous sommes heureux de ce que le ministre des Finances a décidé d'effectuer des consultations là-dessus. En permettant aux agents d'effectuer une évaluation des risques posés par les personnes qui sont des personnes d'intérêt à leurs yeux, le projet de loi fera en sorte qu'il ne sera plus nécessaire d'interroger les employés des boutiques hors taxes chaque fois qu'ils y entrent ou qu'ils y en sortent. S'ils les voient tout le temps, ils vont savoir comment ils se comportent et quelle est leur attitude normale. Ils vont observer ces comportements et s'adresser aux employés en question seulement lorsqu'ils jugeront que c'est nécessaire. J'aimerais bien savoir pourquoi nous n'avons pas encore mis ça en place.
Le sénateur Mitchell : La question du profilage racial se pose toujours. Par coïncidence, juste avant la séance, je discutais avec un musulman qui a eu un problème grave. Il a été retenu pendant des heures, parce que son nom, qui est très courant — un peu comme Tremblay pour un non musulman — ressemble à un nom qui figure sur certaines listes.
Je pense que vous avez utilisé l'expression « personnes d'intérêt ». Comment envisage-t-on le problème du profilage racial? Quelles sont les choses que vous avez mises en place pour l'éviter?
Mme Kerr-Perrott : Autant que je sache, nous ne faisons pas de profilage racial.
Le sénateur Mitchell : Y a-t-il une formation et des procédures à cet égard?
Mme Kerr-Perrott : Nous faisons du ciblage, et nous offrons une formation là-dessus. Nous avons recours à différents éléments d'information dans ce contexte, mais nous ne faisons pas de profilage racial.
Le sénateur Mitchell : Je suis sûr que ce n'est pas le genre de chose que vous feriez.
La réponse à ma prochaine question est probablement évidente, mais, pour ce qui est du préavis concernant ce que les gens veulent apporter ce côté-ci de la frontière, quiconque veut le faire de façon clandestine ne va probablement pas vous en aviser. Est-ce que l'avantage de cette mesure, c'est qu'elle peut vous permettre de repérer une personne qui voudrait faire entrer des arachides, par exemple, à un moment où un problème se pose par rapport à la salubrité alimentaire, ce qu'elle ne sait pas? Est-ce que c'est pour ce genre de chose que c'est utile?
Mme Kerr-Perrott : Ça peut être ça, mais ça sert aussi à pouvoir examiner beaucoup d'informations. Nous mettons au point un entrepôt de données et des systèmes de renseignements commerciaux qui nous permettent d'examiner des données passées sur les tendances relatives à la chaîne d'approvisionnement. Lorsque nous examinons une cargaison, nous le faisons dans le contexte de beaucoup d'autres renseignements, ce qui nous permet de déterminer s'il y a un risque. Il s'agit d'informations examinées dans le contexte de beaucoup d'autres éléments.
Le sénateur Mitchell : Il y a un certain temps, des représentants d'une entreprise m'ont présenté un outil technologique qu'ils étaient en train de mettre au point et qui, selon eux, permettrait de faire une radiographie d'un camion ou d'un wagon. Y a-t-il des progrès dans ce domaine? Est-ce que ce genre d'outil technologique pourrait être utile?
Mme Kerr-Perrott : Nous utilisons déjà des appareils de radiographie dans nos ports et à d'autres points d'entrée.
Le sénateur Mitchell : La réponse à la prochaine question aussi est probablement évidente. Pour ce qui est du préavis concernant ce qu'on fait entrer au pays, est-ce qu'une société comme FedEx connaît exactement le contenu de chacun des colis qu'elle transporte? Les colis sont-ils traités différemment?
Mme Kerr-Perrott : Je suis sûre que les gens de FedEx ne savent pas quel est le contenu de chacun des colis qu'ils transportent, quoique ces colis portent certaines indications quant à leur contenu, je pense. Les agents de l'ASFC sont aussi présents sur ces sites, et ils examinent les colis.
Le président : Est-ce que les appareils à rayon X dont vous parlez sont des appareils VACIS?
Mme Kerr-Perrott : Oui.
Le président : Avez-vous fait des progrès au chapitre du courrier et du fret? Comme le courrier n'est pas inspecté au moment du chargement dans un avion, l'inspectez-vous au moment où il est déchargé?
Mme Kerr-Perrott : Je n'ai pas la réponse à cette question. Je vais devoir vérifier avant de pouvoir vous répondre.
Le président : Veuillez répondre à la même question en ce qui concerne le fret.
Mme Kerr-Perrott : Oui. Excusez-moi. Pouvez-vous répéter la question au sujet du fret déchargé des avions?
Le président : Pour l'instant, il n'y a pas d'appareil pour inspecter le fret chargé dans un avion. Le gouvernement fédéral est en train de faire une étude à cet égard pour qu'on puisse s'assurer que tout est sécuritaire. Ma question était la suivante : comment vous y prenez-vous pour inspecter le fret déchargé d'un avion qui arrive au pays, puisque nous avons de la difficulté à inspecter le fret au moment du chargement. Mon autre question portait sur le courrier, qui, en ce moment, n'est pas inspecté au moment où il est chargé dans les avions. Quelle est votre méthode d'inspection du courrier qui est déchargé des avions?
Par pure coïncidence, j'ai passé quatre heures à l'aéroport international Pearson de Toronto hier. J'aimerais revenir à la question des zones qui vont être désignées.
Monsieur Facette, vous avez parlé de l'Île-du-Prince-Édouard. Parlons de l'aéroport Pearson. Si vous vous rendez, comme je l'ai fait hier, dans l'aire de déchargement du fret, et si vous jetez un coup d'œil sur les convoyeurs, vous allez constater qu'ils ne sont pas plus loin des convoyeurs qui servent à transporter les bagages des gens qui voyagent au pays que vous ne l'êtes de moi en ce moment. De même, les bagages des gens qui voyagent au pays et des voyageurs étrangers passent par le même endroit sur une distance qui est peut-être équivalente à la largeur de la pièce où nous nous trouvons. Ma question s'adresse à l'un ou l'autre des témoins : comment va-t-on s'y prendre pour déterminer quelle zone sera désignée zone de douane?
M. Facette : Tout ce que je peux vous dire, monsieur le président, c'est que je pense que cette question va être réglée au moment où le règlement sera établi et appliqué dans chacun des aéroports.
L'expression que nous utilisons, c'est : quand on a vu un aéroport, on n'en a vu qu'un. À Pearson, il y a 31 millions de passagers par année. Les autres aéroports sont loin d'être aussi fréquentés. Les choses vont être beaucoup plus complexes dans les grands aéroports que dans les petits. Lorsque viendra le temps d'appliquer le règlement aux différents aéroports, l'ASFC devra discuter avec les autorités de ces aéroports et voir quelle est la meilleure façon d'appliquer le règlement dans chacun des cas.
C'est difficile pour l'instant d'expliquer en détail ce qu'on fera dans les situations que vous avez décrites, premièrement, sans avoir le règlement devant nous, et, deuxièmement sans prendre le temps d'examiner ce règlement.
Je mets en garde quiconque essaie d'envisager des choses trop à l'avance. Faciliter le passage du fret et des voyageurs dans un aéroport peut être un exercice complexe, et pour lequel même les spécialistes ont parfois à redoubler d'efforts et à relire le règlement pour s'assurer de bien le comprendre. Dans certains cas, monsieur, les situations dont vous parlez devraient être réglées conjointement par les autorités aéroportuaires et l'ASFC, afin que l'on puisse déterminer la meilleure façon d'appliquer le règlement et de composer avec celui-ci dans une situation donnée.
Le président : Dans le cadre du projet de loi, lorsque vous parlez de personnes, c'est souvent des bagagistes, parce que ce sont ces gens qui déplacent les bagages dans les zones en question.
M. Facette : Oui.
Le président : Vous parlez de gens qui subissent beaucoup de pressions et qui doivent déplacer les bagages rapidement pour que les avions puissent partir. Selon vous, combien faudra-t-il de temps, si le projet de loi est adopté, avant que le règlement soit en place, de façon à ce que la loi puisse être appliquée?
M. Facette : Je ne peux pas répondre à cette question, sénateur. Je ne connais pas la réponse.
Le président : Des années?
M. Facette : Comme vous le savez, sénateur, le processus de mise en place d'un nouveau règlement suppose la publication de ce règlement dans la Gazette du Canada. Ça prend un certain temps. Je doute que ça prenne des années; ce sera probablement plutôt une question de mois.
Le président : Nous pourrions peut-être parler des services commerciaux, de l'aviation générale. J'ai passé deux ou trois heures hier à me promener autour de la zone réservée aux services commerciaux de l'aéroport Pearson. Il n'y a pas de poste de douane à cet endroit. On téléphone aux douanes, et les agents viennent en voiture. Je présume que vous connaissez bien l'aéroport Pearson.
M. Facette : Oui.
Le président : Que feriez-vous pour ce qui est de la zone des services commerciaux autour de Derry Road, par exemple?
M. Facette : Le règlement sera le règlement. Tous les aéroports du Canada, celui de Pearson compris, devront le respecter. Lorsque viendra le temps de recevoir un avion en provenance de l'étranger, que ça relève de l'aviation générale ou d'autres choses, si un agent des douanes décide de déclarer un secteur zone de contrôle des douanes, il le fera en fonction d'informations reçues à l'avance. Il va appliquer le règlement de la même façon, j'imagine, qu'il le ferait à Charlottetown, où il y a une porte qui sert à la fois aux vols nationaux et aux vols internationaux. On s'occupe de la situation et on boucle la zone de la même façon.
Pour ce qui est des services commerciaux, j'imagine que ce genre de choses et l'application aux différents services commerciaux d'un peu partout au Canada devraient être déterminés conjointement avec l'ASFC.
Le président : Il n'y a aucune mesure de sécurité en ce qui concerne les services commerciaux. Personne ne fait l'objet d'une fouille au moment de l'embarquement dans les services commerciaux. Il n'y a personne de l'Administration canadienne de la sûreté du transport aérien ou ACST; on monte à bord et c'est tout. Êtes-vous en train de dire que vous allez mettre en place une quelconque forme de contrôle de sécurité pour les gens qui descendent d'avions?
M. Facette : Ce que je dis, monsieur le président, c'est que, dans le projet de loi S-2, nous parlons des passagers qui arrivent au Canada et de l'aviation en général à l'arrivée dans une zone. S'il y a une ou plusieurs personnes d'intérêt pour l'agence à bord d'un aéronef d'aviation générale, le règlement s'appliquera peut-être de la même façon qu'à un aéroport de plus petite taille, que ce soit l'aéroport de Charlottetown, celui de Moncton ou un autre.
Le président : Pour que les gens sachent qu'ils se trouvent dans l'une de ces zones, vous attendez-vous, madame Kerr-Perrott, à ce que la zone soit délimitée par des lignes peintes sur le sol, disons des lignes bleues ou à ce qu'il y ait une indication pour que les gens sachent qu'ils se trouvent dans une zone de douane? Comment les gens sauront-ils qu'ils entrent dans la zone et qu'ils en sortent?
Mme Kerr-Perrot : On n'a pas encore déterminé précisément comment les gens seront avisés lorsqu'ils se trouvent dans une zone de contrôle des douanes. Ce sont des éléments auxquels on est en train de travailler. Les zones porteront une indication, et les gens seront avisés.
Le président : Pouvez-vous nous donner une idée du temps qu'il va falloir pour prendre les mesures en question dans l'ensemble du réseau des aéroports? Est-ce que les projets vont se faire l'un après l'autre de façon à ce que les problèmes touchant un aéroport donné puissent être réglés avant que la loi n'entre en vigueur à cet endroit puis soit appliquée, ou est-ce que tout va se passer en même temps? Selon vous, combien de temps faudra-t-il?
Mme Kerr-Perrot : Nous prévoyons qu'il va nous falloir un certain temps pour définir toutes les choses dont vous avez parlé — les moyens de communication, la désignation des zones de contrôle des douanes et l'aspect qu'elles auront. En même temps, nous sommes en train de rédiger le règlement, et nous prévoyons la mise en place de la première zone de contrôle des douanes pour l'été 2011.
Le président : Tout à l'heure, en réponse à une question concernant les programmes NEXUS et EXPRES, vous avez dit que ces programmes facilitent les déplacements. C'est vrai. J'ai une carte NEXUS, et ça facilite beaucoup les déplacements. Cela dit, j'ai passé beaucoup de temps à discuter avec des agents des douanes. De façon générale, ils sont d'avis que la carte NEXUS, c'est un permis de contrebande. Ils disent que nous ne faisons pas de vérification suffisante auprès des gens qui passent par le processus NEXUS ou EXPRES et que les superviseurs, lorsqu'ils doivent faire des économies ou lorsque les files semblent trop longues, arrêtent les contrôles faits au hasard ou d'une personne sur 12 ou peu importe le nombre de personnes qui sont contrôlées lorsqu'elles passent par le processus NEXUS. Avez-vous quelque chose à dire là-dessus?
Mme Kerr-Perrot : Non.
Le président : Avez-vous déjà entendu un agent des douanes dire ce que je viens de dire?
Mme Kerr-Perrot : Je n'ai jamais entendu un agent des douanes dire ça, non.
Le président : Je peux vous assurer que des membres du comité ont déjà entendu des agents des douanes le dire.
Le sénateur Tkachuk : Pas moi.
Le président : Peut-être pas vous, mais, contrairement aux autres, vous n'avez visité aucun port.
Le sénateur Tkachuk : Comment pouvez-vous savoir quels endroits j'ai visités?
Le président : Je sais qui est allé en visite avec le reste du comité.
Le sénateur Tkachuk : Je vous dis simplement que je n'ai pas entendu d'agents des douanes tenir ces propos. J'aimerais savoir qui a entendu ça. Deux personnes.
[Français]
Le sénateur Nolin : Je peux attendre le deuxième tour, monsieur le président, mais vos questions et surtout les réponses de M. Facette ont soulevé beaucoup de préoccupations.
[Traduction]
Monsieur Facette, vous avez dit dans votre déclaration préliminaire que vous êtes tout à fait en faveur du projet de loi. Je me demande pourquoi. Savez-vous pourquoi? Vos réponses me préoccupent. Vous ne pouvez pas nous dire que le règlement va régler tous les problèmes. Notre tâche, c'est d'adopter le projet de loi, et, pour permettre la mise en place du règlement, il faut que nous adoptions le projet de loi.
[Français]
Au Canada, nous avons une charte des droits qui protège contre les fouilles abusives. Je demanderai plus tard à M. Baggaley ce qu'il pense de tout cela.
L'aéroport deviendra une zone de contrôle. Je les connais, ils vont se demander pourquoi s'arrêter à la sortie du carrousel des bagages. Ils voudront fouiller quelqu'un jusque dans le stationnement. Qu'est-ce qui les empêchera de le faire?
[Traduction]
Pourquoi appuyez-vous fortement le projet de loi?
M. Facette : Nous pensons, comme je l'ai dit dans mon exposé, sénateur, que le fait de pouvoir adopter une approche fondée sur le risque dans des zones définies va permettre aux agents de mieux faire leur travail. Je pense que vous avez raison d'insister sur l'importance de bien définir ces zones et de la possibilité de trouver un équilibre avec le respect des droits des citoyens canadiens.
Le sénateur Nolin : Allez-vous demander à la gouverneure en conseil de déterminer où se trouve cet équilibre seule, au cabinet, à l'abri des regards? C'est ici qu'il convient de le faire.
M. Facette : Je ne suis absolument pas en désaccord avec vous là-dessus. Dans les aéroports, à l'heure actuelle, les zones de contrôle des douanes sont clairement démarquées, comme les zones des vols internationaux et celles des vols nationaux. Les agents des douanes ne peuvent pas courir après les gens une fois qu'ils ont quitté une zone, comme un agent de la paix pourrait le faire dans un aéroport. Si l'on prend l'exemple de l'aéroport qui se trouve ici, à Ottawa, à l'entrée de la zone d'arrivée des vols transfrontaliers internationaux, il y a un panneau qui indique très clairement aux visiteurs, dans les deux langues officielles, qu'il s'agit d'une zone de contrôle des douanes. Il est important d'insister sur le fait que les zones de contrôle des douanes sont définies, qu'il existe déjà des zones de contrôle des douanes et que la zone de contrôle des douanes ne va pas englober tout l'aéroport, ce qui constituerait une infraction aux droits des citoyens canadiens.
Le sénateur Nolin : Qu'est-ce qui va empêcher que ça se produise?
M. Facette : Les lois en vigueur l'empêchent, monsieur. Il y a déjà des démarcations. Nous parlons d'une loi qui existe déjà et d'une zone qui existe déjà et de la possibilité de dire qu'il faut faire telle et telle chose pour telle et telle raison. Les agents ne vont pas avoir carte blanche. Il va falloir qu'ils aient un motif raisonnable pour procéder.
[Français]
Le sénateur Nolin : Je pense que la loi actuelle favorise une zone de contrôle réduite. Il y a une vérification à l'entrée de la zone, une vérification de visu entre un agent et un voyageur. Ensuite, il y a une rencontre avec un agent à la sortie. C'est à ce moment-là qu'on envoie quelqu'un à la fouille.
Donc, cela favorise le rétrécissement de la zone, n'est-ce pas? Ce qu'on nous demande d'adopter favorise l'élargissement de la zone.
[Traduction]
M. Facette : Vous avez raison : il y a un processus qui comporte deux étapes et qui protège les citoyens canadiens. Au Conseil des aéroports du Canada, nous n'envisageons pas de changement à cet égard. Le projet de loi vise à permettre aux agents de faire leur travail à l'intérieur des zones un peu mieux et de façon plus efficace.
Le sénateur Nolin : Monsieur Baggaley, qu'en pensez-vous?
M. Baggaley : Vous avez parlé du règlement, et, dans bien des cas, l'essentiel d'une loi finit par se retrouver dans le règlement.
Le meilleur exemple, de notre point de vue, c'est le programme des interdictions de vol, le programme de protection des passagers. C'est la Loi sur la sécurité publique qui a permis la mise en place de ces programmes. Si vous examinez le texte de cette loi, vous n'y trouverez aucune mention d'un programme d'interdiction de vol ou de protection des passagers, comme on les appelle. Ce sont des programmes qui ont été créés par la suite grâce à la capacité de la gouverneure en conseil de prendre des règlements.
J'aimerais pouvoir penser — et j'espère, c'est sûr — que la question des secteurs qui vont être désignés comme étant des zones de contrôle des douanes va être examinée très attentivement. Pour notre part, nous examinons les règlements lorsqu'ils sont proposés. La possibilité qu'on agrandisse considérablement les zones de contrôle des douanes pour faciliter les fouilles nous dérangerait, et j'espère que ça dérangerait les Canadiens, et c'est quelque chose qui pourrait soulever d'importantes préoccupations touchant la Charte.
Le sénateur Nolin : Le temps nous le dira.
Le président : Simplement pour terminer là-dessus, lorsque les marchandises traversent la frontière en train, il n'y a pas d'inspection. Elles arrivent à destination, puis l'ASFC effectue des vérifications dans certains cas, lorsqu'elle décide de déterminer si des marchandises ont été passées clandestinement à la frontière. Il n'y a pas de zone désignée. Les agents de l'ASFC se présentent tout simplement où ils veulent, effectuent une vérification puis appliquent la loi. Pourquoi avez-vous besoin des mesures en question, si vous avez déjà le pouvoir d'aller où vous voulez et de faire une vérification auprès de quiconque a fait passer des marchandises de ce côté-ci de la frontière?
Mme Kerr-Perrott : Est-ce que vous nous demandez pourquoi nous avons besoin des zones de contrôle des douanes?
Le président : Lorsque les marchandises traversent la frontière en train, on n'arrête pas le train; il n'y a personne à la frontière pour fouiller chacun des wagons du train et examiner toutes les marchandises. Le train se rend à destination, et il est déchargé, puis l'ASFC, de son propre chef, effectue une vérification auprès du destinataire après coup, de nombreux jours plus tard, pour déterminer si les marchandises étaient passibles de droits ou si leur entrée au pays était légale. Il n'y a aucune zone de douane; les agents de l'ASFC ne font que se rendre sur place et appliquer la loi. Vous savez que c'est ainsi que ça se passe. Par conséquent, en quoi avez-vous besoin de zones plus grandes dans le cas qui nous intéresse?
Mme Kerr-Perrott : La loi actuelle prévoit des zones de contrôle des douanes, mais les agents de l'ASFC ne peuvent intervenir qu'aux points de sortie et auprès des personnes et des gens qui voyagent avec les marchandises seulement.
Je tiens à préciser que, lorsque nous nous penchons sur la question des zones qui ont été désignées zones de contrôle des douanes, nous envisageons des périmètres à l'intérieur de ces zones qui seraient fondés sur l'élément de proximité des marchandises et des personnes en déplacement international. Il y a une relation entre les zones de contrôle des douanes et le mouvement international des personnes et des marchandises.
Le président : Je n'ai pas entendu de réponse à ma question. Je l'ai peut-être ratée.
Mme Kerr-Perrott : Le projet de loi porte sur les zones de contrôle des douanes et vise les personnes et les marchandises du point de vue des déplacements internationaux. Je peux renvoyer votre question à mes collègues, si vous aimeriez avoir une réponse plus approfondie par rapport à l'exemple du transport ferroviaire que vous avez cité.
Le président : Si vos collègues sont ici, j'aimerais bien qu'ils s'expriment.
Mme Kerr-Perrott : Mme Xavier connaît très bien la raison des zones de contrôle des douanes, et elle travaille sur cet élément en particulier.
Le président : Bienvenue à la séance du comité.
La question était la suivante : si les marchandises qui traversent la frontière en train font l'objet d'une vérification postérieure à leur passage à la frontière, pourquoi est-il nécessaire d'étendre les zones de contrôle dans les aéroports? Pourquoi ne pourriez-vous exécuter la même fonction que dans le cas des marchandises qui traversent la frontière en train?
Caroline Xavier, directrice générale, Direction de l'élaboration des politiques et des programmes, Agence des services frontaliers du Canada : À titre de précision, les vérifications dont vous parlez ont lieu après coup, comme vous l'avez dit, et sont liées à des mesures administratives.
Lorsque le personnel de la direction générale de l'admissibilité effectue une vérification, par exemple, il se rend après coup sur le lieu de destination des marchandises pour déterminer si ce qui a été reçu correspond à ce qui a été déclaré. Ces vérifications ont lieu peu importe ce qui se passe au point d'entrée. Ça fait partie de notre mandat, et c'est quelque chose que nous avons le pouvoir de faire.
Comme Mme Kerr-Perrott l'a souligné, la désignation des zones de contrôle des douanes va avoir lieu avec la mise en place du règlement. Ces zones vont être très bien désignées et signalées.
Les personnes qui vont entrer dans une zone de contrôle des douanes vont savoir qu'elles y entrent. Nous n'allons pas déterminer arbitrairement où vont se trouver ces zones, comme Mme Kerr-Perrott l'a souligné; elles vont être près des endroits où les personnes qui voyagent au pays, celles qui voyagent à l'étranger et les travailleurs se mélangent, si vous voulez.
L'un des secteurs que nous pourrions déclarer zone de contrôle des douanes, c'est l'aire de trafic, comme dans les exemples qui ont été donnés tout à l'heure, où travaillent les bagagistes. Nous allons indiquer très clairement la zone concernée avec des panneaux ou des lignes bleues, comme on l'a dit, lorsqu'il s'agira de désigner un secteur comme étant une zone de contrôle des douanes.
Le plan n'est pas d'étendre les zones proprement dites; les consultations auprès du conseil de l'aéroport concerné et des autorités aéroportuaires vont être menées à bien, afin que l'on puisse déterminer le lieu qui convient le mieux pour la désignation d'une zone de contrôle des douanes, en fonction de l'endroit où nous découvrons des menaces dans cet aéroport.
Le président : Vous avez parlé de beaucoup de choses. À l'aéroport Pearson, par exemple, il y a déjà ce mélange dont vous parliez, c'est-à-dire que les marchandises provenant du pays et de l'étranger se trouvent exactement au même endroit. Ça va peut-être aider d'avoir une ligne bleue, mais les gens qui arrêtent les contrebandiers disent que c'est facile de passer d'un côté de la salle à l'autre.
Mme Xavier : C'est exact.
Le président : Vous n'avez pas répondu à la question au sujet de l'utilité de la vérification postérieure. L'ASFC a le pouvoir d'effectuer une vérification sur le lieu d'affaires ou le lieu de résidence du destinataire quand bon lui semble.
Mme Xavier : Ce n'est pas la même chose que le pouvoir d'arrêter un voyageur à un point d'entrée. À l'heure actuelle, lorsqu'un train arrive à la frontière, nous pouvons effectuer une inspection à ce moment-là. Les trains sont arrêtés, et nous procédons à une inspection d'identification.
Le président : Vous faites une inspection auprès du personnel, mais pas d'inspection des marchandises?
Mme Xavier : C'est exact. Cela dit, cependant, il s'agit de quelque chose que nous voulons améliorer dans l'ensemble, la question des marchandises qui ne sont pas inspectées à leur entrée, que ce soit par avion, par train ou par un autre moyen de transport.
En ce qui concerne les vérifications et la capacité d'interroger un voyageur et d'examiner les marchandises qu'il apporte avec lui à un point d'entrée, c'est un autre genre de pouvoir que celui de procéder à une vérification postérieure.
Le sénateur Zimmer : Madame Kerr-Perrott, quelle est la situation actuelle en ce qui concerne la collaboration entre les différentes associations gouvernementales, dont votre organisation, la GRC, Transports Canada, l'ACSTA dans les aéroports du Canada? Est-ce que le travail fait par toutes ces associations crée des synergies, ou est-ce que les organisations s'affrontent?
Mme Kerr-Perrott : Nous travaillons en collaboration très étroite avec les ministères et les organismes que vous venez de nommer. Nous sommes en consultation permanente avec ceux-ci, et nous travaillons en étroite collaboration.
Le sénateur Zimmer : Merci. Les amendements au projet de loi S-2 visent à accroître la sécurité et l'efficacité, mais un élément important, pour ce qui est de l'efficacité, c'est la sensibilisation des consommateurs. Je vous pose donc une question : quels outils de communication vont être mis en œuvre pour sensibiliser les consommateurs et les aider à comprendre les mesures qui seront prises?
Mme Kerr-Perrott : Nous sommes en train d'examiner ça, tant pour ce qui concerne l'initiative des zones de contrôle des douanes que les changements et la question du Manifeste électronique. Nous avons un site Web dans lequel nous affichons la nouvelle information. Nous avons également, comme je l'ai mentionné, des comités consultatifs avec lesquels nous allons collaborer étroitement. Nous envisageons également de créer un sous-groupe au sein de ces comités et de le charger de la question des communications. Nous savons que c'est quelque chose que nous devons examiner de près et que nous devons nous assurer de gérer adéquatement.
Le sénateur Zimmer : Vous travaillez tous ensemble?
Mme Kerr-Perrott : Nous travaillons ensemble.
Le sénateur Moore : Dans le rapport de Mme Kerr-Perrott, dans vos observations et dans celles de M. Facette, vous dites que le projet de loi va nous aider à faciliter le mouvement des marchandises licites et que nous voyons ça comme un moyen d'accroître la sécurité et d'améliorer l'efficacité des services.
J'imagine que le processus qui se déroule à l'arrivée va être le même qu'en ce moment, du moins je n'ai pas entendu le contraire. J'entends dire que la possibilité de fouille va être accrue, et je suis préoccupé par l'aspect de cette mesure qui touche la Charte. Je ne sais pas ce que c'est qu'une fouille discrète; je n'arrive pas à imaginer comment ça pourrait être possible.
J'entrevois davantage de suspicion et d'anxiété chez les Canadiens, les citoyens respectueux des lois qui rentrent chez eux, et j'ai l'impression que tout ça va prendre plus de temps.
Comment faire pour rendre les déplacements plus efficaces et pour améliorer la vie des voyageurs canadiens respectueux des lois, pour faire en sorte que les choses soient plus faciles pour eux et qu'ils vivent moins d'anxiété?
Mme Kerr-Perrott : En ce moment, les voyageurs doivent se présenter devant un agent de l'ASFC à la sortie; ils n'auront plus à le faire. Ils n'auront plus à discuter avec un agent de l'ASFC à la sortie.
Le sénateur Moore : Est-ce qu'ils vont devoir faire la première partie, lorsqu'ils arrivent, et aller au guichet? Est-ce que ça va continuer d'être comme ça?
Mme Kerr-Perrott : Oui.
Le sénateur Moore : À partir de ce moment-là, on récupère ses bagages, puis on se présente devant le deuxième agent. Vous dites que le deuxième agent va être éliminé?
Mme Kerr-Perrott : C'est exact. Eh bien, pas éliminé.
Mme Xavier : Je peux peut-être intervenir simplement pour apporter une précision. Les zones de contrôle des douanes ne sont pas encore établies. La loi est en vigueur, mais les zones de contrôle des douanes ne sont pas encore établies. Il y a des zones qui font l'objet d'un contrôle des douanes; ces zones existent, comme on l'a précisé. En ce moment, lorsqu'une personne arrive dans un aéroport, elle passe par la ligne d'inspection primaire, puis elle peut être aiguillée vers une ligne d'inspection secondaire, et elle doit ensuite présenter la fiche E311 à la sortie.
Avec l'établissement des zones de contrôle des douanes et aux endroits où ces zones vont être désignées, on s'attend en fait à ce que ça facilite les choses.
Pour l'instant, la loi nous permet de poster un agent des douanes à chacun des points de sortie d'une zone désignée, et cet agent peut poser des questions aux personnes qui entrent dans la zone et qui en sortent, surtout aux travailleurs. Cela signifie que les gens sont arrêtés et qu'ils peuvent être interrogés de façon discrète sur les raisons pour lesquelles ils se présentent à cet endroit, ce qu'ils font dans la zone, et ainsi de suite.
Avec le projet de loi S-2, ce qui est facilité, c'est que dans cette zone désignée, à la sortie, il peut ne pas nécessairement y avoir un agent des douanes à cet endroit, mais ça ne veut pas dire qu'il n'y en aura jamais; nous pourrions quand même continuer de poster un agent à cet endroit. L'avantage, c'est que l'agent va pouvoir se mélanger aux gens qui se trouvent dans la zone de contrôle des douanes et leur poser des questions si quelque chose éveille ses soupçons ou au besoin.
Les gens qui entrent dans la zone de contrôle des douanes ou qui en sortent ne seront pas interrogés chaque fois. D'ailleurs, ça va permettre aux voyageurs de se déplacer plus librement, de s'occuper de leurs affaires, ça va nous permettre de nous concentrer davantage sur les employés à risque élevé ou les personnes qui pourraient être suspectes.
Le sénateur Moore : Après être passé par la ligne d'inspection primaire, on récupère ses bagages au carrousel, puis on s'en va?
Mme Xavier : C'est possible.
Le sénateur Moore : Il n'y aura pas d'agent à qui remettre la fiche?
Mme Xavier : Il y aura toujours un agent sur place pour récupérer les fiches E311, mais en fonction de l'endroit où une zone de contrôle des douanes sera désignée à l'extérieur de la zone.
Le sénateur Moore : Cette personne reste donc. Rien ne change, mis à part le fait que vous allez accroître la zone et la possibilité de fouille.
Mme Xavier : Exactement, mais je veux préciser quelque chose : nous allons peut-être faire en sorte que la zone désignée soit plus grande. En ce moment, il n'y a pas de zone de contrôle des douanes. Il y a des zones qui sont contrôlées par les agents des douanes, qui sont cette zone que vous venez de définir, c'est-à-dire la ligne d'inspection primaire et l'endroit où se trouve le second agent à qui vous remettez votre fiche E311. Au-delà de ça, cependant, on pourrait décider de désigner une ZCD correspondant à l'aire de trafic, par exemple, où des bagages sont déchargés des avions. Le plan, c'est que cette zone soit clairement désignée, à l'aide de panneaux, et que les agents des douanes puissent circuler dans cette zone et poser des questions discrètes aux gens suspects, comme « Que faites-vous ici? Comment vous appelez-vous? Puis-je voir votre carte d'identité? Pour quel motif êtes-vous ici? »
Le sénateur Moore : Ça a déjà été expliqué. Ma préoccupation concerne les voyageurs canadiens respectueux des lois qui rentrent au pays. Rien ne va changer, mis à part le fait que la zone de fouille éventuelle va être agrandie. Vous faites oui de la tête.
Mme Xavier : Les zones vont peut-être être agrandies. Je ne veux pas dire qu'elles vont assurément l'être, parce qu'elles n'ont pas encore été désignées.
Le sénateur Moore : Ça me préoccupe beaucoup.
Le président : En toute justice, là-dessus, pour toutes sortes de vols, surtout en provenance des Caraïbes, les avions sont pratiquement entourés d'agents des douanes aujourd'hui, et ce ne sont pas des zones désignées. On fait aussi circuler des chiens dans les zones des douanes. Si le chien s'assoit au mauvais endroit, on vous interroge. Quelle différence ça fait?
Mme Xavier : Dans le cadre de notre mandat actuel, nous pouvons exercer notre pouvoir dans la zone contrôlée par les agents des douanes, c'est-à-dire la zone dans laquelle vous arrivez lorsque vous descendez d'un avion en provenance de l'étranger. Une zone de contrôle des douanes, c'est quelque chose de différent; ça pourrait être exactement la même zone, mais ça pourrait aussi être une zone où il y aurait selon nous une menace liée au crime organisé ou peut-être une menace de complot interne. Nous allons déterminer les meilleurs endroits pour la désignation de ces zones à l'issue d'une analyse et de discussions avec les autorités portuaires ou aéroportuaires.
Le président : Un instant s'il vous plaît. Les agents des douanes vont déjà là où les menaces sont les plus importantes. Ils montent à bord des avions. Ils circulent autour. Ils parlent aux bagagistes qui déchargent les avions. Ils font déjà tout ça. Allez à l'aéroport Pearson, et vous allez voir qu'il y a des agents qui encerclent l'avion en provenance de Montego Bay, et ce sont des agents de l'ASFC. Ils interrogent quiconque semble n'avoir rien à faire là. En quoi est-ce que ça va être différent?
Mme Xavier : Ça va être différent en ce sens que, lorsqu'un agent fait ça, c'est en fonction des motifs raisonnables, notamment en fonction d'informations de ciblage qu'il a reçues à l'avance. Ce n'est pas simplement parce qu'il a envie de faire ça ce jour-là. Il faut que ce soit fondé sur un motif raisonnable. Lorsqu'un agent fait ce que vous venez de décrire, c'est en fonction d'information qu'il a reçue au sujet du vol, information selon laquelle il peut y avoir une menace ou de la contrebande. Les agents ont le pouvoir de prendre cette mesure dans le cadre de leur mandat.
Le président : Vous dites qu'ils ont un motif raisonnable et réaliste, et que c'est la raison pour laquelle ils sont là?
Mme Xavier : C'est exact.
Le président : Ils ont donc un motif raisonnable et réaliste d'être là pour chaque vol en provenance de Montego Bay?
Mme Xavier : Je ne veux pas répondre que c'est le cas pour tous les vols. Tout ce que je peux vous dire, c'est que c'est la raison pour laquelle ils sont là.
Le sénateur Banks : Je suis confus. J'ai cru comprendre que vous avez dit que, pour l'instant, il y a quelque chose qu'on n'appelle pas une zone de contrôle des douanes.
Mme Xavier : Nous vous avons présenté un projet de loi, et nous demandons qu'une modification y soit apportée. La loi est en vigueur depuis 2001, comme Mme Kerr-Perrott l'a dit plus tôt, mais nous n'avons pas établi de zone de contrôle des douanes parce que, à cause du libellé actuel de la loi, ça prendrait trop de ressources et ce serait inefficace.
Le sénateur Banks : Le projet de loi qui est devant nous ne permet pas la création de zones de contrôle des douanes. C'est déjà fait. La création de ces zones est déjà prévue par la loi actuelle.
Mme Xavier : Nous avons déjà l'autorisation de créer ces zones.
Le sénateur Banks : Elles existent déjà. Nous ne créons rien de nouveau.
Mme Xavier : Non. Le seul changement, c'est que les agents des douanes pourraient circuler à l'intérieur des zones de douanes, plutôt que d'être limités aux points d'entrée.
Le sénateur Banks : Je vais poursuivre sur le thème abordé par le sénateur Nolin et par le sénateur Moore, mais de l'autre point de vue. Supposons que je suis une personne mal intentionnée, et que j'arrive de Montego Bay. J'ai réussi à échapper à la vigilance de tous vos agents. Y a-t-il un point au-delà duquel les agents de l'ASFC ne peuvent plus m'arrêter, ou j'entre dans une zone où tout le monde circule et qui n'est pas une zone de contrôle des douanes désignées? M. Facette a dit tout à l'heure qu'il faut que ce soit un agent de la paix qui procède à l'arrestation. Si je ne tombe pas sur un agent de la GRC à ce moment-là, je m'en tire indemne une fois que j'ai traversé cette ligne jaune?
Mme Xavier : Dans le cadre des pouvoirs actuels de l'ASFC, si vous ne vous trouvez pas dans une zone de contrôle des douanes ou dans une zone faisant l'objet du contrôle des agents des douanes, ceux-ci ont une marge de manœuvre limitée.
Le sénateur Banks : Si j'arrive à traverser la ligne jaune, ils ne peuvent plus m'arrêter?
Mme Xavier : Si vous sortez de la zone de contrôle des douanes désignée ou la zone qui fait l'objet du contrôle des agents des douanes, à moins qu'un responsable de l'aéroport ou un agent de la GRC... ou à moins que nous ayons un autre motif raisonnable de vous appréhender...
Le sénateur Banks : Si un agent de l'ASFC voit quelque chose sortir de ma valise, il peut m'arrêter.
Mme Xavier : Il peut téléphoner à un collègue de la GRC et lui demander d'intervenir. Il se peut que l'agent ne puisse intervenir lui-même, en fonction des pouvoirs dont les agents disposent à l'heure actuelle. Notre mandat consiste à nous occuper des points d'entrée à la frontière. Une fois que vous avez dépassé le point d'entrée, le cas ne relève plus de nous. Cela dit, nous travaillons, comme ça a été mentionné plus tôt, avec Transports Canada, la GRC et d'autres partenaires au pays, alors ça ne veut pas dire que nous ne n'avertirions personne dans ce cas.
Le sénateur Banks : Je veux simplement m'assurer que nous n'établissons pas de zones de contrôle des douanes en adoptant le projet de loi. Ces zones existaient déjà. La création de ces zones est déjà prévue par la loi.
Mme Xavier : Oui.
Le président : Merci à nos témoins. Merci d'être venus et de nous avoir aidés à comprendre le contenu du projet de loi. La séance a été profitable pour nous.
Le président : Nous avions demandé des documents pour mercredi dernier. Nous ne les avons pas reçus à temps. Ils sont maintenant arrivés, mais ce sont des documents unilingues. J'aimerais savoir ce que le comité pense de cette situation.
Le sénateur Nolin : Ils sont en français seulement?
Le président : Oui, et ceux d'entre nous qui ne parlent pas français sont bien mal pris. J'aimerais savoir comment les membres du comité souhaitent que je règle ce problème.
Le sénateur Banks : De quels documents s'agit-il?
Le président : Il s'agit des notes d'allocution.
Le sénateur Tkachuk : De M. Bradley et M. Laurin? Je pense que ça va.
Le sénateur Nolin : C'est acceptable et viable.
Le sénateur Tkachuk : Je vais revenir sur autre chose; le sénateur Mitchell et moi avons longuement débattu de cette question, et nous nous sommes mis d'accord. La documentation interne que nous distribuons, notre documentation, doit toujours être bilingue, mais les citoyens ont le droit de s'adresser à nous dans les deux langues officielles ou dans l'une des deux. Notre tâche consiste à nous assurer d'avoir accès aux services des interprètes et à tout le reste pour pouvoir comprendre ce qu'ils disent. Ça ne pose donc pas problème pour moi.
Le président : Je suis d'accord avec vous. Cependant, il y a un problème lorsque nous demandons de l'information à l'avance, de façon à pouvoir faire traduire les documents, parce que si nous ne les recevons pas à temps, que pouvons- nous faire?
Le sénateur Tkachuk : Il nous faut persévérer, parce que notre travail, c'est de les servir, pas le contraire.
Le président : Voici notre second groupe de témoins, venus nous conseiller et témoigner au sujet du projet de loi S-2 : M. David Bradley, président-directeur général de l'Alliance canadienne du camionnage, et M. Jean Michel Laurin, vice-président, Politiques d'affaires mondiales, des Manufacturiers et exportateurs du Canada. D'après ce que je comprends, vous allez chacun nous présenter une courte déclaration préliminaire.
David Bradley, président-directeur général, Alliance canadienne du camionnage : L'Alliance canadienne du camionnage, l'ACC, est une fédération qui regroupe des associations de camionnage provinciales du Canada et représentant plus de 4 500 entreprises de camionnage au pays. Comme vous le savez sûrement, le camionnage est le principal mode de transport des marchandises, y compris de transport transfrontalier, puisque plus des deux tiers des échanges commerciaux Canada-États-Unis, de même que plus de 80 p. 100 des cargaisons en direction du Canada, vers le nord, se font par camion. Tout ce qui touche l'équilibre entre la sécurité et l'efficacité à la frontière nous préoccupe beaucoup, et préoccupe aussi nos clients, qui sont représentés par M. Laurin.
Mon intervention portera principalement sur l'article 12.1 du projet de loi S-2, selon lequel le gouverneur en conseil aura le pouvoir de prendre des règlements concernant la collecte de données avant l'arrivée au Canada de marchandises importées. Je vais vous parler de la façon dont les choses fonctionnent actuellement.
À l'heure actuelle, aux termes de la Loi sur les douanes, le transporteur, qui est l'entreprise de camionnage, doit fournir à l'avance à l'ASFC certains renseignements, comme le numéro de la plaque d'immatriculation du camion, le nom du conducteur et son pays de citoyenneté, de même qu'une description des marchandises transportées au Canada, comme leur valeur, leur lieu d'origine, leur destination et leur poids. Le transporteur n'est pas le propriétaire des marchandises et ne s'occupe pas de leur emballage. Parfois, ce n'est même pas l'entreprise de camionnage qui s'occupe du chargement des marchandises.
Pour s'acquitter de leurs obligations, les transporteurs recueillent les renseignements auprès de l'importateur ou du fabricant, qui est parfois une seule et même entreprise. Ensuite, ils envoient les renseignements par télécopieur à un courtier en douane, qui, en passant, travaille pour l'expéditeur, afin qu'ils soient transmis à l'ASFC avant que le camion n'arrive à la frontière. Si les renseignements fournis au transporteur sont inexacts, ou si certains sont manquants, le camion peut être retardé à la frontière pour subir une inspection dans le but de clarifier la situation. Si l'inspection ne permet pas de tirer les choses au clair, le conducteur peut placer le camion en consigne dans des installations protégées de l'ASFC au pays en attendant d'obtenir un dédouanement à une date ultérieure. J'y reviendrai plus tard.
Selon le projet de loi S-2, le gouverneur en conseil pourrait déterminer qui doit fournir les renseignements sur le camion, sur le conducteur et sur les marchandises avant l'arrivée à la frontière. Grâce à cette mesure, le transporteur ne serait plus le seul à devoir recueillir et fournir les données exigées en ce qui concerne les marchandises, et il s'agirait, à notre avis, d'un juste partage des responsabilités par tous les partenaires de la chaîne d'approvisionnement. C'est pourquoi nous appuyons cet amendement. Nous pensons que, au fil du temps, beaucoup trop d'obligations réglementaires ont été imposées aux transporteurs par rapport aux autres partenaires de la chaîne d'approvisionnement. L'amendement proposé pourrait rétablir un certain équilibre. Nous répétons depuis déjà un certain temps que les diverses parties qui font partie de la chaîne d'approvisionnement et qui possèdent les renseignements exigés par l'ASFC devraient assumer une plus grande part des responsabilités.
Nous comprenons aussi que l'amendement proposé permettra à l'ASFC de mettre sur pied l'initiative relative à l'information préalable sur les expéditions commerciales. Cette initiative doit faire en sorte que toutes les données concernant les marchandises importées au Canada qui doivent être fournies avant l'arrivée du camion à la frontière canadienne le soient par voie électronique plutôt que sur papier. L'initiative relative à l'IPEC exigerait des transporteurs, des importateurs et de leurs agents ou des courtiers en douane qu'ils envoient par voie électronique des renseignements à l'ASFC avant que le camion n'arrive à la frontière. Les transporteurs devraient fournir les renseignements figurant sur le manifeste de même que la destination du conducteur du camion. Il semble aussi que le projet de loi S-2 permettrait à l'ASFC d'exiger que les importateurs transmettent des données sur les marchandises expédiées, appelées données relatives à l'admissibilité des importateurs, qui incluent des renseignements détaillés sur le chargement, et qui permettent à l'ASFC d'obtenir, avant l'arrivée du camion à la frontière, des données sur le fabricant et sur la valeur des marchandises, une description de celles-ci de même que l'origine et la destination du conducteur.
L'ACC appuie la transition vers une frontière automatisée. Les États-Unis se sont déjà engagés dans cette transition en mettant en œuvre le programme ACE, pour Automated Commercial Environment. Nous sommes tout à fait d'accord avec le principe selon lequel les partenaires de la chaîne d'approvisionnement doivent fournir à l'ACE à l'avance et dans les limites raisonnables, des renseignements afin de permettre une évaluation efficace des risques. Notre association va soutenir le projet de loi S-2 et le fait qu'il donne à l'ASFC le pouvoir de recueillir des données auprès des importateurs, mais vous devez savoir, messieurs et mesdames les membres du comité, que ce pouvoir pourrait entraîner des problèmes, selon la façon dont l'ASFC réagira quand les importateurs n'auront pas transmis les données avant l'arrivée du camion à la frontière, ou quand les données seront incomplètes ou inexactes.
L'ASFC envisage actuellement diverses façons de procéder. L'une de ces façons prévoit que, dans le cas où les données du transporteur ou de l'importateur n'ont pas été reçues et approuvées avant l'arrivée du camion à la frontière, le camion doit faire demi-tour. Il ne serait plus possible d'entreposer la cargaison sous douane dans des installations au pays en attendant le dédouanement des marchandises. Cette mesure pourrait avoir de grandes répercussions sur l'efficacité du système d'importation de marchandises au Canada. Le fait de permettre aux transporteurs de traverser la frontière sous douane permet d'éviter des retards coûteux puisque le camion et son conducteur sont libres de retourner à des activités productives. Cela faciliterait aussi le respect du règlement sur les heures de service, et serait conforme aux programmes de sécurité à faible risque. Déjà, de nombreux modèles d'entreprise s'appuient sur le transport sous douane de marchandises, que ce soit à des fins d'entreposage, de report des droits, ou pour d'autres raisons. Même si le transporteur n'est pas responsable de l'obstacle, ce sont le conducteur et le camion du transporteur qui seront coincés de l'autre côté de la frontière américaine.
Les importateurs l'ont dit clairement : le fait de fournir des données relatives à l'admissibilité des importateurs, des DAI, constitue bien souvent une tâche très complexe et très longue pour l'importateur ou le courtier en douane. Dans certains cas, les renseignements ne sont tout simplement pas disponibles. Parfois, un chargement n'occupe pas un camion en entier, et la remorque contient des marchandises de divers importateurs. Si l'ASFC ne reçoit pas à temps les DAI de la part d'un seul de ces importateurs, tout le chargement sera intercepté et renvoyé aux États-Unis, où il sera probablement entreposé à un endroit non protégé, comme dans une rue ou dans un parc de stationnement inoccupé, en attendant la transmission des données.
L'ACC a proposé deux solutions qui permettraient aux entreprises honnêtes de poursuivre leurs activités tout en respectant le mandat de l'ASFC en matière de sécurité accrue. Dans le cas où les DAI n'ont pas été reçues au moment où le camion arrive à la frontière, nous privilégions l'approche suivante : l'ASFC permettrait aux transporteurs de faire entrer les marchandises au pays sous douane afin de les entreposer dans un endroit protégé en attendant leur dédouanement. Cette approche permettrait à la chaîne d'approvisionnement de s'adapter aux nouvelles exigences concernant les DAI sans que les cargaisons ne soient retenues ou que les camions ne soient renvoyés aux États-Unis, et elle permettrait que la transition vers des processus électroniques à la frontière se fasse plutôt en douceur. Si cette approche est impossible, nous recommandons, à tout le moins, que, dans les cas où les DAI n'ont pas été reçues, le transport des marchandises sous douane soit autorisé pour les transporteurs à faible risque, comme ceux qui ont été préapprouvés dans le cadre du Programme d'autocotisation des douanes, le PAD, ou du programme Partenaires en protection, le PEP. Le fait d'être un transporteur à faible risque devrait certainement comporter certains avantages.
L'industrie du camionnage a déjà fait des investissements importants dans les processus électroniques qui visent à renforcer la sécurité et à simplifier le commerce légitime. Nous savons que tout sera mis en œuvre pour que les coûts pour l'industrie diminuent et que les pratiques commerciales actuelles seront prises en compte à mesure que le projet d'IPEC évoluera. Par le passé, l'ACC, l'ASFC et le milieu commercial en général ont entretenu des relations productives, constructives et respectueuses. Actuellement, le milieu commercial fait part de ses préoccupations concernant cet enjeu à l'ASFC. Nous espérons qu'une décision à la satisfaction de tous sera prise.
[Français]
Jean Michel Laurin, vice-président, Politiques d'affaires mondiales, Manufacturiers et exportateurs du Canada : Monsieur le président, je vous remercie de nous accueillir ici aujourd'hui. Je représente les Manufacturiers et exportateurs du Canada, la principale association industrielle et commerciale au Canada. Les membres de notre association représentent 82 p. 100 de la production industrielle et 90 p. 100 de nos exportations. Nos membres sont des entreprises qui fabriquent et exportent des produits vers le reste du monde.
Notre association représente ainsi les deux principaux secteurs d'activité de l'économie canadienne lorsqu'on sait que la fabrication représente 16 p. 100 du PIB et l'exportation, au sens large, 21 p. 100 de notre économie.
La fabrication au Canada, c'est plus de 600 milliards de dollars en expéditions annuelles et lorsqu'on parle des exportations, c'est près de 500 milliards d'exportations annuelles que les entreprises exportatrices réalisent chaque année. Les manufacturiers emploient près de deux millions de Canadiens, paient des salaires en moyenne 25 p. 100 supérieurs à la moyenne canadienne; les manufacturiers eux-mêmes sont responsables de deux tiers des exportations canadiennes, le reste vient principalement des matières premières, de l'énergie et des services.
[Traduction]
J'aimerais vous parler aujourd'hui du projet de loi S-2, qui vous est présenté. Je suis ici aujourd'hui pour représenter les Manufacturiers et Exportateurs du Canada, les (MEC) et pour vous dire que nous soutenons l'ASFC dans ses efforts visant à utiliser les outils électroniques les plus récents pour mieux évaluer les risques associés aux marchandises qui entrent au Canada. Nous appuyons aussi l'ASFC dans ses efforts visant à adopter un mode de gestion des frontières plus moderne et plus sophistiquée qui utilise des moyens électroniques. Enfin, nous appuyons l'ASFC dans sa volonté d'adopter des méthodes plus scientifiques de gestion des douanes et des frontières dans le but d'accélérer le traitement transfrontalier des marchandises, ce qui est important pour nous.
Une grande part des efforts déployés par l'ASFC dépendent de la réussite de la mise en œuvre du Manifeste électronique dans le cadre de l'initiative relative à l'information préalable sur les expéditions commerciales, sujet qui a été abordé, je crois, par des témoins précédents. Les Manufacturiers et Exportateurs du Canada appuient cette initiative. En fait, nos membres ont collaboré étroitement avec l'ASFC pour mettre en œuvre le Manifeste électronique et l'initiative relative à l'IPEC au cours des derniers mois et des dernières années.
En ce qui concerne le projet de loi que vous étudiez actuellement — le projet de loi S-2, nous nous intéressons plus particulièrement à l'article 6, qui est une disposition habilitante permettant à un ministre d'exiger des éléments dans le contexte du Manifeste électronique et du projet d'IPEC. Mon collègue, M. Bradley, nous a fait part de ses préoccupations concernant cette disposition.
J'aimerais parler du contexte dans lequel cet article pourrait être adopté. Les MEC ont trouvé encourageantes les déclarations récentes du premier ministre quand ce dernier a dit que les gouvernements canadien et américain collaboraient dans le but de renforcer la sécurité le long de la frontière canado-américaine, mais aussi de faciliter le commerce entre les deux pays. Nous avons aussi été heureux d'entendre le ministre du Commerce international dire qu'il était inquiet des répercussions nuisibles que pourraient avoir des exigences réglementaires de plus en plus complexes sur le commerce, sur l'efficacité de la frontière et sur la compétitivité économique des chaînes d'approvisionnement intégrées, dont dépendent une grande part des échanges commerciaux nord-américains. La plupart des entreprises de fabrication dépendent des chaînes d'approvisionnement intégrées qui traversent la frontière canado-américaine.
Ce qui nous préoccupe, évidemment, c'est de savoir quels sont, exactement, les renseignements que nos membres devront fournir puisque cet élément peut avoir des répercussions sur le commerce et sur les chaînes d'approvisionnement intégrées. C'est pourquoi nous avons participé activement aux consultations avec l'ASFC tout au long de la mise en œuvre du projet. De plus, afin de bien illustrer le contexte, j'aimerais mentionner que, pendant que nous prenons ces mesures au Canada, les États-Unis mettent sur pied une initiative qu'ils appellent 10+2, ce qui signifie que les personnes qui souhaitent importer des marchandises aux États-Unis par voie maritime devront fournir 10 éléments concernant le transporteur et 2 éléments concernant le fabricant. Cette mesure s'appliquera aux navires qui accosteront dans les ports américains.
Il semble avisé de concentrer nos ressources sur nos ports et sur le périmètre nord-américain, surtout si cela permet d'avoir plus de ressources pour nous pencher davantage sur l'évaluation des risques associés aux marchandises qui franchissent les limites du périmètre, plutôt que de mettre l'accent sur les marchandises qui franchissent la frontière canado-américaine de façon à faciliter le commerce entre le Canada et les États-Unis. Nous avons collaboré étroitement avec le gouvernement, plus particulièrement avec le ministère des Affaires étrangères, avec l'ambassade canadienne à Washington et avec d'autres associations américaines afin de nous assurer que nous collaborons le plus étroitement possible avec les Américains et que nous abordons la question de la sécurité nationale en mettant l'accent sur le périmètre.
En ce qui concerne le projet de loi et la poursuite de notre collaboration avec l'ASFC, nous devons nous assurer que les renseignements que devront fournir les entreprises de fabrication seront disponibles, que nos membres possèdent ces renseignements ou peuvent les obtenir facilement, et qu'ils peuvent les fournir dans les délais qu'exige une saine gestion frontalière — dont M. Bradley a parlé précédemment — et que les données exigées visent vraiment à accroître la sécurité à la frontière.
Pour conclure ma déclaration préliminaire, je dirais que les MEC appuient le projet de loi et qu'il est important, au cours des étapes à venir, à mesure que le Règlement sera rédigé et que la loi sera adoptée, que nous veillions à ce que les renseignements exigés soient essentiels à la sécurité et ne constituent pas un fardeau administratif supplémentaire pour les importateurs canadiens, qu'ils ne nuisent pas à notre compétitivité et qu'ils n'entraînent pas un resserrement des frontières, ce qui inquiète beaucoup nos membres.
Nous continuerons à collaborer avec l'ASFC pour mettre en œuvre ces initiatives. Il faut éviter d'adopter une approche uniformisée de l'évaluation des risques à la frontière. Nous devons mettre l'accent davantage sur les risques les plus importants, et c'est pourquoi nous appuyons ce projet de loi et les dispositions qu'il contient.
Nous sommes d'accord avec le principe selon lequel on exige davantage de renseignements pour mieux évaluer les risques, mais, évidemment, nous ne voulons pas que les entreprises soient appelées à fournir des renseignements qu'elles ne seront pas capables de fournir ou qu'elles ne peuvent fournir au moment opportun afin de permettre aux marchandises de franchir la frontière.
Enfin, il faut s'assurer que les exigences imposées aux transporteurs et aux importateurs ne viennent pas accroître la complexité, le coût et la durée du processus actuel d'importation de marchandises au Canada.
Le sénateur Tkachuk : Donc, d'après ce que je comprends, je crois que vos deux associations soutiennent le projet de loi. Vous êtes ici pour faire connaître certaines des préoccupations qui font l'objet de vos négociations ou de vos discussions avec l'ASFC.
M. Bradley : Oui. Je parle au nom de l'ACC. C'est tout à fait exact. Nous n'avons rien contre le projet de loi ni contre le fait que le ministre pourrait demander ou exiger certains renseignements — d'un point de vue pratique, nous comprenons pourquoi il doit le faire — mais nous pourrions faire face à de véritables problèmes selon la façon dont l'ASFC décide de mettre en œuvre certains des programmes connexes. Nous avons un peu l'impression que nous allons plus loin que les Américains quand ils ont adopté leur programme ACE, et nous ne comprenons simplement pas pourquoi. Nous devrions au moins viser à harmoniser nos efforts. Nous avons tous dépensé des millions de dollars pour satisfaire aux exigences de nos voisins du Sud. Pourquoi ne passons-nous pas simplement à la prochaine étape?
Certaines de nos plus récentes discussions avec l'ASFC ont été productives, et je suis porté à croire que nous pouvons régler quelques-uns de ces problèmes, mais nous pensons que vous devez être au courant de ces problèmes.
M. Laurin : Pour répondre à votre question, comme je l'ai mentionné, nous sommes d'accord en principe avec le projet de loi, mais l'article que j'ai mentionné est assez particulier. Nous parlons d'une disposition habilitante. Cela signifie, en d'autres termes, que cet article confère des pouvoirs au ministre. Je sais qu'il sera ici plus tard aujourd'hui. Quand un projet de loi confère des nouveaux pouvoirs à quelqu'un, nous voulons savoir pourquoi cette personne a besoin de ces pouvoirs et de quelle façon le gouvernement prévoit s'en servir. C'est pour cette raison que j'ai voulu situer un peu en contexte les raisons pour lesquelles nous pensons que le projet de loi est présenté et expliquer un peu les enjeux dont nous discutons actuellement avec l'ASFC.
L'ASFC s'est montrée ouverte à discuter de ces enjeux avec nous et avec nos membres et, pour la suite des choses, nous sommes certains que nous trouverons une façon de régler ces enjeux sans resserrer les frontières. Cependant, avec la tenue de ces audiences sur le projet de loi et vu qu'il contient des dispositions habilitantes, nous avons pensé qu'il était pertinent que nous abordions ces questions aujourd'hui.
Le sénateur Tkachuk : Nous en sommes heureux. Monsieur Bradley, l'une de vos principales préoccupations concerne le fait que vous pouvez actuellement, à la frontière, vous rendre à un endroit protégé et sous douane; si j'ai bien compris, vous pouvez dédouaner les marchandises sous supervision. Vous craignez que cela ne soit plus possible. Qu'est-ce qui vous pousse à en arriver à cette conclusion, et pourquoi cette possibilité vous serait-elle retirée?
M. Bradley : Je crois qu'il faudrait surtout poser cette question à l'ASFC, mais j'en arrive à cette conclusion parce que, selon le modèle qui a été présenté au milieu commercial jusqu'à maintenant, c'est ce qui se produirait. On nous enlèverait la possibilité de transporter des marchandises sous douane jusqu'à des installations intérieures. Si les renseignements ne sont pas reçus à temps ou s'ils sont inexacts, le camion serait renvoyé aux États-Unis, ce qui signifie que le conducteur aurait le plaisir de passer la nuit dans un stationnement de Détroit plutôt que de pouvoir entrer au Canada afin de déposer le chargement dans des installations protégées de l'ASFC — il y a de ces entrepôts d'attente, comme on les appelle, un peu partout au pays — puis de pouvoir retourner au travail avec le camion et la remorque. Il serait obligé d'attendre à la frontière pendant que l'importateur tente de trouver les renseignements ou de les corriger pour que le processus recommence à partir du tout début. Même du point de vue de la sécurité, c'est absurde.
Le sénateur Tkachuk : Quand les marchandises sont transportées jusqu'à cet emplacement sous douane, est-ce qu'il faut attendre les renseignements pour que le camion soit dédouané et pour passer à la prochaine étape parce que les renseignements n'ont pas encore été transmis?
M. Bradley : C'est exact; les marchandises sont laissées sous douane et ne sont dédouanées qu'une fois que les renseignements requis sont fournis, ce qui prend parfois quelques minutes, mais parfois des heures ou des jours.
Le sénateur Tkachuk : Quand elles sont dédouanées, quelqu'un vient chercher le chargement et l'emporte à sa destination?
M. Bradley : C'est exact. Ce système fonctionne très bien depuis des décennies et nous nous demandons pourquoi on voudrait s'en débarrasser.
Le sénateur Tkachuk : Monsieur Laurin, y a-t-il une question qui vous préoccupe particulièrement, un peu comme dans le cas de M. Bradley, afin que nous puissions aborder plus particulièrement cette question avec le ministre et ses représentants quand ils seront parmi nous? Je pense à n'importe quelle question que vous aimeriez éclaircir avant que nous passions à l'examen article par article.
M. Laurin : La question soulevée par M. Bradley est certainement l'une des questions qui nous préoccupent.
Le sénateur Tkachuk : Vous parlez de la même question?
M. Laurin : Comme je l'ai dit dans ma déclaration, il faut simplement s'assurer que les données qui seront exigées des importateurs peuvent être obtenues, qu'elles existent et que nous pouvons les obtenir facilement, et que nous pouvons les fournir dans des délais raisonnables, ce qui correspond à la question soulevée par M. Bradley, et que ces renseignements sont véritablement exigés à des fins de sécurité nationale. En résumé, je dirais que nous nous préoccupons essentiellement des éléments qui seront exigés et du contexte dans lequel ces éléments seront analysés.
Le sénateur Tkachuk : Monsieur Bradley, vous avez dit que, à votre avis, les responsables des deux côtés de la frontière souhaitent une certaine harmonisation et que le projet de loi fait en sorte que le programme franchit un pas de plus que le programme américain. Pouvez-vous fournir quelques explications afin que tout soit bien clair à ce sujet?
M. Bradley : Oui. La réponse comporte deux volets. D'abord, aux États-Unis, on n'a pas, pour protéger les frontières terrestres, décidé d'exiger la même quantité de renseignements que ce que l'on propose de faire pour pouvoir entrer au Canada. De plus, les entrepôts d'attente n'existaient pas par le passé aux États-Unis. Ils n'ont pas eu à laisser tomber cette façon de faire.
Le sénateur Tkachuk : Pouvez-vous nous donner un exemple de renseignement qui serait exigé au Canada et qui ne l'est pas aux États-Unis?
M. Laurin : Je ne possède pas précisément cette information, mais je pourrai l'envoyer au comité plus tard. Je n'ai pas l'information avec moi. Je ne peux pas vous le dire de mémoire.
M. Bradley : J'ai ici quatre nouveaux renseignements qui seront exigés. Je ne saurais vous dire si les Américains les exigent aussi, mais l'importateur devra maintenant fournir des renseignements sur la désinfection; sur la manutention spéciale, dans le cas, par exemple, d'un type particulier de produit; sur les cargaisons dangereuses; ce qui semble raisonnable — il faut tout de même souligner qu'une cargaison dangereuse peut contenir du savon ou bien d'autres choses; et, finalement, sur l'usine de fabrication en tant que telle, ce qui peut être très difficile dans le cas de produits manufacturiers composés de divers éléments. Les fabricants peuvent être situés un peu n'importe où, et l'importateur peut avoir de la difficulté à remonter la filière. Nous travaillons dans un contexte de « juste-à-temps ». Particulièrement en ce qui concerne le transport de pièces automobiles entre Windsor et Détroit : ce n'est pas une question d'heures, dans ce cas, c'est une question de minutes.
À l'heure actuelle, si l'importateur est incapable de fournir les renseignements à temps, le camion se retrouve dans un entrepôt sous douane en attendant les renseignements. Si vous décidez de plutôt faire faire demi-tour au camion, ce sera un désastre.
M. Laurin : C'est difficile pour nous de répondre directement à votre question parce que certains détails n'ont pas encore été définis. Nous sommes encore en discussion et en consultation avec les organismes.
Le sénateur Tkachuk : Il s'agit de préoccupations légitimes et je suis heureux que vous nous en fassiez part aujourd'hui. Nous interrogerons le ministre et les représentants du ministère à ce sujet quand nous les rencontrerons.
Le président : J'aimerais seulement vous poser une question, monsieur Bradley. Vous avez parlé de « juste-à-temps ». Si vous entretenez une relation « juste-à-temps » avec un exportateur, est-ce que vous ne le connaissez pas très bien?
M. Bradley : Ça dépend. Parfois, vous connaissez l'expéditeur, mais pas nécessairement les autres partenaires de la chaîne d'approvisionnement, les personnes dont les marchandises sont des intrants qui entrent dans la fabrication du produit. Vous ne le savez pas toujours. Le transporteur ne travaille pas pour le courtier en douane. Le courtier en douane travaille pour l'importateur. Il y a certains partenaires de la chaîne d'approvisionnement avec lesquels le transporteur n'a pas de relation.
Le président : Je parle d'un manufacturier qui fonctionnerait selon un système de livraison juste-à-temps. Il est certainement au courant de ce qu'il obtient, sinon il n'utiliserait pas le système juste-à-temps.
M. Laurin : Maintenant, la nature des chaînes d'approvisionnement intégrées est telle que si vous êtes un manufacturier canadien et que vous importez, par exemple, des pièces des États-Unis, il se peut que vous importiez des pièces d'un fabricant américain qui compte 25 gammes de produits. Il peut fabriquer, par exemple, divers types de plaquettes de frein. Il peut en fabriquer de nombreux types, et certains peuvent avoir une grande valeur ajoutée, et certaines gammes de produits peuvent être fabriquées n'importe où dans le monde. Le manufacturier achète peut-être auprès de vendeurs et de fournisseurs de diverses régions du monde. D'une certaine façon, un fabricant est aussi un distributeur. Si vous faites affaire avec un distributeur, disons pour importer des marchandises d'un distributeur américain qui fabrique aussi certains produits, vous ne savez pas nécessairement, pour l'aspect distribution, où toutes les marchandises ont été fabriquées. Vous pouvez supposer que c'est le manufacturier qui les a fabriquées, mais ce n'est pas toujours le cas. On peut voir, par exemple, des entreprises qui ont fait faillite, mais leurs produits sont vendus sur le marché, et il se peut que quelqu'un achète des plaquettes de frein d'une entreprise qui a fait faillite. Il peut être très difficile de savoir qui a fabriqué chacune des plaquettes de frein, surtout dans un délai raisonnable.
Le sénateur Banks : J'aimerais que nous soyons tous à l'aise. Je crois que vous connaissez le processus. Nous allons tenter de déterminer si le comité recommandera au Sénat d'adopter ce projet de loi. Nous tenterons de prendre une décision aujourd'hui. Si le comité recommande l'adoption du projet de loi, le Sénat examinera le projet de loi et notre recommandation. Habituellement, cela veut dire que le Sénat adoptera le projet de loi.
Une bonne partie de ce qui s'appliquera véritablement à ce dont vous parlez n'a pas encore été défini. J'aimerais que nous soyons à l'aise avec la nature de la consultation en cours. Je crois que vous étiez probablement présent quand les témoins précédents ont témoigné, n'est-ce pas? Non. Monsieur Bradley, vous étiez présent; vous avez donc entendu ce qu'ils ont dit au sujet de la consultation.
Winston Churchill a dit que la consultation était une chose merveilleuse. Vous pouvez consulter un prisonnier pour savoir s'il veut qu'on lui tranche la tête le lendemain matin, et il répondra probablement qu'il ne veut pas. Ensuite, quand vous lui trancherez la tête le matin, vous pourrez dire que vous l'avez consulté.
Êtes-vous satisfait de la consultation à laquelle vous participez actuellement? Vous sentez-vous à l'aise et pensez- vous que vous avez vraiment votre mot à dire et qu'on ne fait pas que vous imposer des décisions? S'agit-il d'une véritable consultation?
M. Bradley : Pour l'instant, je dirais que, oui, c'est une véritable consultation. Si je peux me permettre, je ferai aussi ressortir le Churchill en moi pour vous dire que c'est au fruit que l'on reconnaît l'arbre. Vous pouvez être tout à fait insatisfait si, à la suite du processus de consultation, et après avoir présenté tous vos arguments raisonnables fondés sur des faits, vos idées ne sont pas retenues; dans ce cas, le processus de consultation a été un échec. Pour l'instant, les discussions me semblent plutôt ouvertes, mais nous n'avons obtenu aucune réponse jusqu'à maintenant.
Le sénateur Banks : S'il en ressort un compromis, comme dans toutes bonnes négociations ou consultations, et que chacun en gagne un peu moins que ce qu'il aurait souhaité et en perd un peu plus que ce qu'il aurait souhaité de façon à ce que tout le monde se rencontre à mi-chemin, serez-vous satisfait?
M. Bradley : Cela dépend de ce que vous voulez dire par « à mi-chemin ». Nous avons proposé deux solutions, l'une que nous préférons et une autre qui pourrait convenir. Nous pourrions nous contenter de cette seconde solution, mais je crois qu'il faut être très prudents. Nous sommes très préoccupés, depuis des années, par les coûts, principalement imposés par les États-Unis, qui nuisent à la facilitation du commerce et qui ont, à certains moments, été dangereux. Je crois que nous avons une occasion d'harmoniser nos mesures avec certains de leurs programmes. Je ne dis pas que nous devrions copier tout ce qu'ils font sans réfléchir, mais nous devons faire attention de ne pas suivre la même voie et de ne pas ajouter des coûts qui sont inutiles. Nous sommes toujours à la recherche d'un compromis, et nous en proposons un.
Le sénateur Banks : Votre alliance est probablement au courant du nombre de camions qui traversent la frontière dans les deux directions. Nous avons toujours eu un avantage commercial sur les États-Unis à ce sujet, un excédent commercial, et je suppose que l'une des façons de mesurer cet excédent est d'observer le transport par camion. Est-ce que les données sur le transport par camion permettent de conclure que la situation évolue dans l'intérêt des Canadiens?
M. Bradley : Non, ce n'est pas le cas. Le secteur connaît un important ralentissement.
Le sénateur Banks : Par rapport à une certaine époque?
M. Bradley : Oui. En fait, en 2008, le nombre de camions qui ont traversé la frontière canado-américaine aux postes frontaliers les plus fréquentés de l'Ontario, là où les exploitants des ponts recueillent ce type de données, était encore moins élevé qu'en 2001.
Nous avons aussi vu ce qui est arrivé au fret principal canadien, à l'avantage du Canada depuis toujours. Le transport de chargements vers le sud a beaucoup diminué. Les gens de l'industrie du camionnage savent bien que le Canada fait maintenant face à un déficit commercial. Ce phénomène ne date pas de novembre dernier, quand la crise bancaire a commencé; il existe depuis maintenant près de deux ans.
Le sénateur Banks : Est-ce que ce ralentissement a quelque chose à avoir avec le projet de loi que nous examinons?
M. Bradley : Il y a toujours de nombreux facteurs en jeu, que ce soit la valeur du dollar ou la situation de la demande aux États-Unis, par exemple. Je vous dirais toutefois que le resserrement des frontières, qui prend diverses formes, est certainement un facteur qui contribue à ce ralentissement.
Le sénateur Banks : Êtes-vous aussi de cet avis, monsieur Laurin?
M. Laurin : Pour répondre à votre question, je répéterais ce qu'a dit M. Bradley. Oui, nous avons été consultés, et cette consultation prend davantage la forme d'un processus continu. De nombreuses discussions ont eu lieu dans les deux directions. Est-ce qu'on nous a écoutés? Nous le saurons quand nous connaîtrons les résultats de la consultation. Si nous continuons à discuter avec l'ASFC, c'est parce que nous pensons que nos discussions sont importantes. Nous estimons certainement beaucoup ces consultations.
Évidemment, nous sommes inquiets. Nous parlons d'une mesure qui, si elle n'est pas prise correctement, pourrait avoir des répercussions négatives sur la chaîne d'approvisionnement de l'Amérique du Nord. Visiblement, il est important, pour nous, mais aussi, d'après nous, pour le gouvernement, de nous assurer que les mesures seront prises de façon à éviter toute répercussion négative.
Le sénateur Banks : Si ces répercussions négatives devaient survenir, est-ce qu'elles auraient une grande incidence sur le secteur canadien de la fabrication? Ce secteur se retrouve déjà coincé à cause de la situation mondiale.
M. Laurin : À cause de ce qui arrive aux marchés du crédit au Canada et à l'étranger, nos membres font présentement face à un grand stress. Au sujet de l'effondrement des marchés américains, la majorité de notre production industrielle au Canada est vendue aux États-Unis, ce qui fait que tout ce qui se passe au sud de la frontière nous préoccupe grandement.
Nos membres connaissent actuellement une période difficile. Nous parlons des chaînes d'approvisionnement entre le Canada et les États-Unis qui sont intégrées. Si l'on prend un exemple classique, le secteur de l'automobile, on parle de voitures qui sont assemblées dans un pays à partir de pièces provenant d'un autre pays et elles-mêmes composées de pièces qui viennent d'un autre pays.
Le sénateur Banks : Comme l'Inde?
M. Laurin : Oui, de diverses régions du monde. En ce qui concerne l'avenir du secteur de la fabrication, nos membres nous disent que l'avenir de leur entreprise passe par les endroits qui offrent la plus grande valeur ajoutée. C'est pourquoi ils tentent de trouver des partenaires de la chaîne d'approvisionnement partout dans le monde. Vous trouvez les meilleurs partenaires, et vous organisez vos affaires en conséquence.
Nous devons absolument disposer de systèmes logistiques transparents, non seulement à la frontière terrestre, mais aussi à tous les points d'entrée, parce que les entreprises compteront de plus en plus sur nos frontières et nos systèmes logistiques, sur nos transporteurs et sur tous les autres partenaires pour fonctionner en mode « juste-à-temps » et pour s'assurer que leurs chaînes d'approvisionnement sont efficientes.
Le sénateur Zimmer : Monsieur Bradley, monsieur Laurin, je vous remercie de vos déclarations. J'aimerais vous poser une question à tous les deux.
D'après votre expérience, quel est l'élément qui nuit le plus à l'efficience des organismes et des entreprises qui font partie de vos associations respectives?
M. Bradley : Je dirais qu'il s'agit de la disparition des principes d'évaluation des risques à la suite de la signature de l'Accord sur la frontière intelligente à l'automne 2001. Le programme EXPRES, pour Expéditions rapides et sécuritaires, a été créé dans le but de faciliter le commerce, et même de le rendre encore plus simple que le 10 septembre 2001. Il y avait des problèmes à la frontière avant le 11 septembre.
Ce qu'on promettait, avec ce programme, c'était que le commerce légitime, c'est-à-dire la très grande majorité du commerce, la très grande majorité des entreprises de camionnage, des camionneurs, des fabricants, des importateurs et des exportateurs, qui sont tous honnêtes, verraient leur situation s'améliorer et que les ressources seraient consacrées aux mesures qui visent les gens malhonnêtes ou ceux que nous ne connaissons pas.
Mais ce n'est pas ce qui s'est produit. Bien honnêtement, dans le secteur du commerce, de nombreuses personnes remettent en question la pertinence des programmes à faible risque. La situation n'a pas tourné à notre avantage, et les demandes concernant toujours plus de données, toujours plus de systèmes, toujours plus de règlements, de frais et de droits n'ont pas cessé de s'accumuler.
Je me rends compte qu'il est difficile de faire affaire avec les Américains parce qu'ils ne pensent parfois pas comme nous, au Canada. Nous avons perdu de vue l'approche en matière d'évaluation des risques et maintenant, nous vérifions tout, tout le temps. Ce n'est pas une bonne solution.
M. Laurin : Du point de vue de nos membres, ce qui nuit le plus à leur efficience, ou ce qui est le plus susceptible de réduire les problèmes d'efficience, ce sont les solutions technologiques. Pour une entreprise de fabrication, l'inefficience est ce dont elle tente de se débarrasser. Les entreprises veulent accroître leur productivité et s'efforcent d'être efficientes dans le domaine de la fabrication et, pour ce faire, l'acquisition de nouvelles technologies joue un grand rôle. C'est pourquoi, quand nous nous adressons au ministre des Finances, nous lui demandons d'améliorer le traitement fiscal des technologies et d'offrir aux entreprises des mesures qui les inciteront à investir dans de nouvelles technologies, des nouvelles machines et de nouveaux équipements.
En ce qui concerne le contrôle à la frontière, le fait d'utiliser de meilleures technologiques peut permettre de mieux évaluer les risques et donc de faciliter le commerce puisqu'on s'assurera que les entreprises légitimes qui importent des marchandises légitimes et qui ont recours à des transporteurs légitimes et veulent simplement vaquer à leurs affaires ne sont pas celles qui subissent une seconde inspection à la frontière.
Grâce à ces outils de pointe, nous serons mieux en mesure de cibler les marchandises qui ne devraient pas entrer au Canada. En ce qui concerne le commerce légitime, nous effectuons moins d'inspections parce que nous avons une meilleure méthode qui nous permet d'évaluer quels sont les chargements qui doivent être inspectés à la frontière et quels sont ceux qui peuvent traverser la frontière librement sans autre forme de procès. Les technologies constituent une grande partie de la solution.
Le sénateur Wallin : J'aimerais, je crois, simplement connaître votre avis à tous les deux. Après avoir entendu ce que vous avez dit aujourd'hui, je ne peux que penser que nous aurions dû aborder la question du périmètre de sécurité de façon plus directe.
Vous avez parlé d'harmonisation, comme l'a mentionné le sénateur Tkachuk, et vous avez dit que vous tentez de ne pas aller trop loin à ce sujet. Y a-t-il, d'après vous, des éléments dans ce projet de loi ou dans d'autres dispositions législatives qui font qu'il est plus difficile de simplement même envisager une notion de périmètre?
M. Bradley : Encore une fois, cela dépend de la façon dont les pouvoirs sont utilisés. Je crois que cela s'inscrit dans la volonté d'automatiser la frontière. C'est dans cette direction que nous devons aller. Le problème, toutefois, avec l'automatisation, c'est que les gens — les responsables de l'exécution de la loi, par exemple — peuvent considérer qu'il s'agit d'une occasion de demander encore plus de renseignements, et c'est là que le bât blesse. Le projet de loi en tant que tel va dans la bonne direction, mais c'est la façon dont les pouvoirs seront utilisés qui nous préoccupe.
Je pense à ce qu'a vécu le milieu commercial quand les États-Unis ont mis sur pied leur système de douane automatisé : nous avons appuyé les principes qui sous-tendaient ce changement, mais la mise sur pied du système s'est révélée une véritable imposture. Le système avait été mal déployé, et n'avait à peu près pas été mis à l'essai, et les coûts associés à sa mise en œuvre étaient horribles.
La véritable question, c'est comment les choses tourneront au bout du compte. La direction qui a été prise est la bonne, mais elle ne doit pas changer une fois que nous aurons tous ces pouvoirs.
M. Laurin : Je suis d'accord avec M. Bradley. La réponse courte est non. Il s'agit d'une disposition législative habilitante, et nous connaîtrons tous les détails plus tard sauf si le projet de loi est modifié. Je ne vois rien, dans le projet de loi, dans sa forme actuelle, qui nous empêcherait de le faire. Quand le projet de loi sera interprété et que le règlement connexe sera élaboré, il faudra nous assurer que nous collaborerons plus étroitement avec les États-Unis.
Le sénateur Zimmer a posé une question sur ce qui nuit à l'efficience. La gestion des frontières est étroitement liée aux règlements administrés par l'ASFC, mais rédigés par d'autres organismes. Cette situation existe au Canada, mais aussi aux États-Unis. Certains règlements, comme ceux qui concernent la sécurité des produits ou l'inspection des animaux ou des végétaux sont le type de règlements qui représentent de plus en plus un fardeau pour les entreprises qui exportent des marchandises vers les États-Unis ou qui en importent au Canada. Nos revendications auprès du gouvernement ont beaucoup porté sur ces exigences et ces règlements qui sont, en fait, bien souvent la source du manque d'efficience et qui n'ont pas toujours les répercussions prévues à l'origine sur l'intérêt public. Pour être juste envers l'ASFC, il faut bien dire que, même si elle doit administrer ces règlements et ces exigences qui représentent un fardeau, ce n'est pas toujours elle qui les a créés. L'ASFC a le rôle d'administrer les mesures mises en place par d'autres ministères.
Le sénateur Mitchell : J'aimerais aborder la question de l'autre application de ce projet de loi ou de ces dispositions, c'est-à-dire de son application au trafic de camions mais aussi au trafic ferroviaire. J'ai l'impression, d'abord, que les camions devront subir des enquêtes et des examens beaucoup plus poussés que les trains parce qu'ils arrivent directement à la frontière. D'après ce que nous avons entendu précédemment, la structure est plus stricte et plus imposante. Est-ce bien le cas? Si oui, est-ce que cela aura des répercussions sur votre compétitivité par rapport au transport de marchandises par train?
M. Bradley : En quoi le projet de loi aura-t-il des répercussions sur notre compétitivité par rapport aux trains?
Le sénateur Mitchell : Oui.
M. Bradley : Il s'agit de deux secteurs distincts. Les camions couvrent des distances plus courtes et transportent de plus petits chargements qui doivent être transportés rapidement. Les trains servent habituellement à transporter des marchandises encombrantes, qui n'ont pas à être livrées rapidement, sur de plus longues distances.
Nous n'avons pas vraiment constaté des détériorations du transport de marchandises par camion au profit du transport ferroviaire au cours des huit dernières années. Il n'y a pas vraiment eu ce type de transition. C'est simplement que les coûts ont augmenté pour la chaîne d'approvisionnement, ce qui signifie que les clients de l'industrie du camionnage, à qui les marchandises sont destinées, au bout du compte, paient davantage.
Si l'on observe la situation du point de vue de l'Amérique du Nord, on constate que le président américain, le premier ministre et le président du Mexique affirment qu'ils veulent rendre l'Amérique du Nord plus concurrentielle par rapport aux autres blocs commerciaux. Pourtant, on vient ajouter des coûts pour notre chaîne d'approvisionnement. Nous espérons au moins que la sécurité s'est améliorée.
Le sénateur Mitchell : Pas vraiment, malheureusement.
Ma prochaine question concerne peut-être davantage les compétences de M. Laurin. Si tous les documents ne sont pas en ordre, par exemple dans le cas d'un camion qui contient des marchandises provenant de deux ou trois importateurs différents, le camion doit faire demi-tour et attendre. Est-ce que c'est la même situation avec les trains? Chaque train possède certainement des marchandises provenant de plus d'un importateur et, étant donné que les trains peuvent être très gros, est-ce qu'on renvoie un train en entier parce qu'un importateur n'a pas fourni les documents exigés?
M. Laurin : Je ne suis pas sûr de connaître la réponse. Je ne sais pas si l'association des chemins de fer se présentera devant le comité. Je ne possède pas cette information. Je suppose que le même traitement serait imposé.
M. Bradley : Je vais m'avancer un peu, ici. Les chemins de fer fonctionnent un peu différemment de ce que vous décriviez auparavant avec les intervenants précédents. Ils n'ont pas, comme dans le secteur du camionnage, d'entrepôts d'attente. Je ne pense pas que le projet de loi aurait les mêmes répercussions sur le secteur ferroviaire, mais je n'en suis pas absolument sûr.
Le sénateur Mitchell : Je vais continuer à m'informer. Je vous remercie.
Le président : Il existe, aux États-Unis, des associations semblables aux vôtres. Que vous disent-elles quand elles font face aux mêmes types d'enjeux? Ont-elles les mêmes préoccupations que vous en ce qui concerne le resserrement des frontières?
M. Bradley : Nous travaillons en étroite collaboration avec nos homologues, aux États-Unis. Nous n'avons pas le choix puisque nous ne pouvons pas toujours nous déplacer pour aller rencontrer les représentants du département de la Sécurité intérieure. Nous avons une très bonne relation, très productive, avec eux. Toutefois, je dois dire, en toute franchise, qu'ils s'intéressent à la question, mais que leur intérêt est de loin inférieur à celui que l'on voit au Canada. Mis à part dans le cas des camions mexicains qui entrent aux États-Unis, les enjeux frontaliers préoccupent peu les divers membres de l'association américaine du camionnage par rapport à ce que l'on vit au Canada; vraiment peu. Cela dit, nous entretenons une relation productive avec eux, mais cette question ne fait pas partie de leurs plus grandes priorités, contrairement à ce qui se passe ici, pour nous, puisqu'elle est si importante pour notre économie.
M. Laurin : Je peux parler au nom de mon association. L'association équivalente, aux États-Unis, est la National Association of Manufacturers. Nous rencontrons ses membres et discutons avec eux constamment. Notre alliance s'est révélée fructueuse, et pas seulement dans le cas d'enjeux liés aux douanes et aux frontières. Quand la loi Buy America a été adoptée, récemment, ils nous ont aidés à transmettre certains messages que nos membres avaient exprimés. Probablement que bon nombre des membres de l'association de M. Bradley sont aussi membres de l'association américaine équivalente. Une part importante de nos membres, particulièrement les grandes entreprises, sont membres des associations canadienne et américaine. C'est donc logique que nous travaillions ensemble. Quand l'enjeu concerne la frontière canado-américaine, vous pouvez être sûr que les Américains engagent les ressources requises pour que nous puissions collaborer.
Je dirais même plus qu'ils tentent de transmettre à Washington le même message que celui que nous tentons de transmettre à Ottawa, c'est-à-dire qu'il faudrait envisager un périmètre et que les gouvernements canadien et américain devraient élaborer des règlements compatibles et un contexte de réglementation compatible afin que nos entreprises ne soient pas étouffées par des règlements et des exigences de conformité inutiles. Quand il est logique que les deux pays collaborent, il faudrait s'efforcer de le faire, dans la mesure du possible. La survie de l'industrie de la fabrication en dépend, puisqu'il s'agit d'une véritable industrie transfrontalière. Il est logique que nous soulevions ces questions et que nous nous assurions que notre collaboration avec les Américains se poursuivra, dans la mesure du possible.
Le président : Votre expérience, monsieur Laurin, n'est pas la même que celle de M. Bradley, et celle de M. Bradley se rapproche davantage de ce que le comité a constaté. Quand nous discutons avec des législateurs des États frontaliers, ils nous disent : « Votre préoccupation à ce sujet est intéressante, mais nos membres ne semblent pas préoccupés par cette question. »
Honnêtement, nous nous demandons parfois s'il n'y a pas création d'obstacles non tarifaires, et si ce n'est pas dans l'intérêt des représentants et des sénateurs de certains États frontaliers que la frontière soit difficile et longue à franchir. On se demande souvent si certains règlements sont adoptés pour que les chambres de commerce puissent dire : « Venez vous installer dans l'État de New York ou au Michigan. Vous n'aurez pas de problèmes à la frontière. »
M. Laurin : Il nous est arrivé d'entendre ce genre de discours de la part de nos membres et des membres de l'association américaine, à Washington. Ce qui nous a beaucoup aidés, et ce qui semble beaucoup mieux fonctionner, c'est la collaboration avec les entreprises. Il y a des entreprises au Canada — des entreprises canadiennes ou des entreprises américaines qui ont des activités au Canada — dont des usines situées aux États-Unis emploient des gens des deux territoires. Plutôt que de viser seulement les sénateurs et les membres du Congrès des États frontaliers, qui peuvent être des alliés importants, nous avons mis des efforts dans notre collaboration avec l'ambassade afin de cibler des membres du Congrès et des sénateurs dont le poste, au sein de leur district, dépend directement de l'efficience de la frontière.
Si votre district compte une usine qui emploie 1 000 personnes et que la plupart des intrants ou des importations de cette usine proviennent d'une usine de la même entreprise qui est située au Canada parce qu'elle possède les connaissances et les technologies requises pour fournir à l'entreprise américaine les meilleurs intrants au monde, il va de soi que vous voudrez vous assurer que la frontière est efficiente.
Bien évidemment, il est toujours difficile de se faire entendre à Washington. Cependant, notre collaboration avec nos homologues américains et avec l'ambassade canadienne nous a bel et bien permis de soulever certaines de ces questions, non pas directement, mais par l'entremise de nos associations, et de nous faire des alliés à Washington.
M. Bradley : J'aimerais ajouter qu'il faut toujours se méfier du protectionnisme. Ce n'est peut-être même pas le bon terme. Je préfère dire qu'il faut appuyer l'équipe locale, ce que, pour être bien honnête, nous ne faisons pas toujours suffisamment au Canada.
Au cours des dernières décennies, j'ai beaucoup collaboré avec les États frontaliers; j'ai collaboré avec le sénateur Wallin concernant l'impôt de franchise du New Jersey, et dernièrement, avec le Michigan au sujet du régime fiscal des entreprises du Michigan. Lansing se trouve probablement plus loin de la frontière que ce que je croyais puisque les législateurs ne comprennent absolument pas la relation commerciale. Ils appuient tout naturellement l'équipe locale.
J'ai cependant constaté à maintes reprises que, si vous faites appel au sens des affaires des Américains, à leur sens du fonctionnement des entreprises, et que vous apportez des solutions, ils se révèlent très efficaces.
Il nous est arrivé de commettre l'erreur de nous adresser aux Américains pour leur dire que la frontière est très importante. Les membres du Congrès nous répondent qu'ils sont d'accord, mais ils se demandent ce que nous attendons d'eux. Nous devons leur dire ce que nous attendons d'eux.
Nous vivons actuellement une période importante dans notre relation. À mon avis, des mesures comme le Partenariat nord-américain pour la sécurité et la prospérité et d'autres mesures du même type n'ont pas permis d'atteindre tous les résultats escomptés, et ce, pour diverses raisons. J'aimerais que nous revenions en arrière et que nous tentions de nouveau de mobiliser les Américains, comme nous l'avons déjà fait.
L'époque où nous avons été véritablement productifs en ce qui concerne la frontière est celle des mois qui ont suivi les événements du 11 septembre, quand nous avons conclu l'Accord sur la frontière intelligente. Il nous faut un accord sur la frontière intelligente, version 2010, pour que les gens prennent le temps d'examiner où nous en sommes rendus. C'est mon avis.
Le sénateur Moore : Monsieur Bradley, quand vous avez parlé des emplacements sous douane que nous utilisons actuellement et que nous espérons pouvoir continuer à utiliser, vous avez dit que les États-Unis n'utilisaient pas ce type d'entrepôt d'attente. Est-ce bien vrai? Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?
M. Bradley : La circulation transfrontalière des camions américains n'est pas assez importante pour que les États- Unis mettent sur pied ce type d'industries de façon aussi perfectionnée que nous le faisons au Canada.
Le sénateur Moore : Cela dépend uniquement du volume?
M. Bradley : Oui. Nous avions ce marché.
Le sénateur Moore : Le président vous a interrogé à propos de vos relations avec vos homologues américains. Avez- vous discuté de vos préoccupations, des répercussions possibles du projet de loi, avec des camionneurs américains qui transportent des chargements au Canada?
M. Bradley : Oui.
Le sénateur Moore : Qu'y avait-il à dire à ce sujet?
M. Bradley : Leur association travaille de pair avec nous à ce sujet. Cependant, pour préciser mon point de vue, je répète que le transport transfrontalier par camion ne préoccupe qu'un petit nombre des membres de l'American Trucking Association.
Le sénateur Moore : Quel pourcentage de l'industrie américaine du camionnage peut représenter le transport transfrontalier?
M. Bradley : Deux pour cent, peut-être. Tandis qu'ici, jusqu'à tout récemment, le secteur du camionnage transfrontalier a été le seul secteur de notre industrie à connaître une croissance au cours des 20 dernières années. La situation a maintenant changé. Nous constatons actuellement que les camions sont surtout utilisés pour le marché intérieur ce qui n'est probablement pas nécessaire. À l'heure actuelle, les tarifs sont réduits au minimum parce qu'il n'y a pas assez de chargements pour un trop grand nombre de camions, ce qui est tout à l'avantage des membres de l'association de M. Laurin, du moins à court terme.
Le sénateur Banks : J'ai une question, qui peut être brève ou longue, selon votre réponse. J'aimerais vous lire l'article 17 du présent projet de loi, libellé ainsi :
Peut être incorporé par renvoi dans un règlement tout document — quelle que soit sa provenance —, soit dans sa version à une date donnée, soit avec ses modifications successives.
On peut penser à une série de spécifications concernant une pièce d'un appareil, spécifications qui seraient incorporées par renvoi dans un règlement. Si le fabricant décide de modifier la série de spécifications dans deux ans, le changement doit aussi être incorporé aux termes de la loi.
L'article se poursuit ainsi :
L'incorporation par renvoi d'un document dans un règlement ne lui confère pas, pour l'application de la Loi sur les textes réglementaires, valeur de texte réglementaire.
Cela signifie que les spécifications ne seraient pas susceptibles d'être publiées, par exemple, dans la Gazette, et ne seraient pas — je ne dis pas : « ne seront pas », mais bien : « ne seraient pas » — susceptibles d'être examinées par le Parlement.
Avez-vous une expérience à raconter à ce sujet? Je suis peut-être en train de chercher la petite bête...
M. Bradley : Est-ce que cet article concerne les situations d'urgence?
Le sénateur Banks : Non.
M. Bradley : Alors, je ne peux pas dire que je connais vraiment ce type de situation.
M. Laurin : Moi non plus.
Le président : Y a-t-il d'autres questions, maintenant?
Le sénateur Tkachuk : Je ne sais pas si vous connaissez la réponse à cette question, mais elle concerne les trains et les camions et elle a été soulevée précédemment. Il existe déjà des manifestes électroniques pour les trains, n'est-ce pas? Cela existe depuis des années pour les trains : ils franchissent simplement la frontière, n'est-ce pas?
M. Bradley : Je ne suis pas certain que ce soit parce qu'il existe des manifestes électroniques pour les trains.
Le sénateur Tkachuk : Je crois que ces manifestes existent.
M. Bradley : C'est peut-être vrai, maintenant.
Le sénateur Tkachuk : Je vais demander aux représentants du ministère, quand ils viendront. Je crois que c'est comme ça qu'ils procèdent, maintenant. Ils ne s'arrêtent même plus à la frontière; ils passent, tout simplement.
M. Bradley : Ils ne se sont jamais arrêtés. Si, quand vous dites « moyens électroniques », vous pensez aux télécopieurs, c'est peut-être le cas. Nous utilisons maintenant des télécopieurs, et ce, depuis quelques années, mais il est difficile de placer un télécopieur dans chaque camion.
Le sénateur Tkachuk : Oui, c'est bien vrai.
Le président : J'ai quelques questions, les dernières, je l'espère, concernant l'approche axée sur le périmètre. Vous semblez tous deux privilégier cette approche. C'est exact?
M. Laurin : Oui.
M. Bradley : Oui. J'ajouterais que l'approche axée sur le périmètre peut prendre de nombreux sens, selon les personnes. À une certaine époque, nous entendions dire qu'il fallait faire comme en Europe. Nous l'entendons encore. Cela signifie un parlement commun. Je n'imagine absolument pas que les Américains pourraient partager le pouvoir avec nous, alors nous devons expliquer de façon un peu plus concrète ce que cela veut dire.
Il me semble effectivement envisageable de déplacer la frontière commerciale jusqu'au périmètre. Cependant, je ne sais pas si cela intéresserait vraiment les Américains puisque, il y a tout juste une semaine, le nouveau secrétaire a dit que, ce dont ils ont besoin, c'est d'une véritable frontière entre le Canada et les États-Unis. Je ne sais pas à quel point cela vaut la peine d'investir dans ce projet, à l'heure actuelle.
M. Laurin : De notre point de vue, la plupart des exportations canadiennes passent par la frontière terrestre, tout comme la plupart de nos importations. Nous pensons que ces marchandises sont parmi les plus sûres. En ce qui concerne la gestion de l'expédition de marchandises, d'un point de vue américain et d'un point de vue canadien, les navires porte-conteneurs qui arrivent dans un port sont visés par une série d'exigences. C'est donc un moyen d'importation beaucoup plus simple, si l'on pense aux autres exigences. Quand une cargaison arrive dans un port, elle est inspectée. Si l'on tient compte des exigences pour chaque conteneur et du nombre de camions qui doivent traverser la frontière canado-américaine pour transporter une quantité équivalente, nous devons nous assurer de ne pas donner aux importateurs d'autres pays un avantage concurrentiel sur les importateurs de marchandises qui passent par la frontière terrestre entre le Canada et les États-Unis. En d'autres termes, nous risquons de nous tirer dans le pied. Ce sont les mêmes entreprises qui sont présentes au Canada et aux États-Unis; nous travaillons ensemble. Tentons de nous assurer que nous ne plaçons pas nos entreprises dans une situation de désavantage concurrentiel.
Le président : Vous m'avez un peu perdu. Prenons l'exemple des responsables du port de Halifax, qui feraient de l'autopromotion en disant qu'ils peuvent transporter des marchandises jusqu'à New York plus rapidement que si les marchandises sont acheminées par Bayonne, au New Jersey. Ils n'éliminent aucun emploi pour les Canadiens. Il s'agit simplement de choisir un port plutôt qu'un autre. La situation est la même pour le port de Montréal ou le port de Vancouver. Leurs documents de promotion n'éliminent pas d'emplois canadiens. Ils ne font que créer des emplois dans nos ports.
M. Bradley : La question concerne surtout le degré de congestion dans certains ports concurrents. Des exigences concernant la sécurité maritime sont actuellement en cours d'élaboration. Un conteneur placé sur un camion dans un port doit passer la frontière de nouveau quand le camion se rend aux États-Unis. Il passe par tout le processus deux fois.
L'Association canadienne des constructeurs de véhicules avait un chiffre pour illustrer la situation. Ce chiffre était fondé sur des études, et je suis convaincu qu'il était juste. Elle disait que, dans le cas d'une voiture envoyée en Amérique du Nord en provenance de la Corée, une seule transaction douanière était effectuée. Cependant, dans le cas d'une voiture fabriquée en Amérique du Nord dont un des pistons a traversé la frontière à six occasions, il peut y avoir jusqu'à 3 000 transactions douanières. Il faut comprendre que nous sommes en train de nous rendre fous.
Le sénateur Wallin : Bien dit.
Le président : Cela nous ramène à la question de savoir si les législateurs américains parlent d'une barrière non tarifaire. Vous n'aurez pas à franchir la frontière si vous construisez votre usine de fabrication de pièces au Michigan, mais vous devrez le faire si vous la construisez en Ontario.
M. Bradley : Évidemment, cette question se posera toujours puisqu'elle s'inscrit dans la nature même de la compétitivité nord-américaine. Les Canadiens doivent simplement en être conscients et se montrer plus rusés.
Le président : S'il y avait un périmètre commun, quelle serait la structure tarifaire? Y aurait-il des tarifs communs?
M. Bradley : Je ne me suis pas beaucoup attardé à la question du périmètre, et je ne sais pas si nous voulons que cela fasse partie de l'OMC.
Le président : Un certain nombre de questions ont été abordées à plusieurs reprises ce soir, y compris la question des tarifs ou des marchandises courantes frappées d'interdiction. Diverses questions surgissent quand nous parlons d'éliminer les frontières nationales pour les remplacer par une frontière continentale commune.
M. Laurin : Nous ne parlons pas nécessairement d'une intégration aussi importante. Par exemple, le Canada a récemment élaboré de nouveaux règlements concernant la sécurité des consommateurs et des produits, pendant que les États-Unis élaboraient leur propre série de directives et de règlements. Ces deux processus se sont déroulés de façon relativement indépendante. Ce serait pourtant logique que nous collaborions pour ce type de mesures. On peut toutefois se demander dans quelle mesure les Américains seraient prêts à collaborer avec nous. Si vous consultez les règlements et les directives, vous constaterez que les objectifs sont les mêmes, mais que les moyens pour y parvenir sont différents. Ces écarts sont de simples incidents de parcours, mais les entreprises se retrouvent aux prises avec deux systèmes concurrentiels qu'ils doivent respecter. S'il n'y avait qu'un système, ou si, à tout le moins, les deux autorités reconnaissaient le système concurrentiel, les choses seraient beaucoup plus simples, et le commerce gagnerait en efficience.
Le président : Merci. Nous sommes heureux de vous avoir accueillis aujourd'hui. Nous avons eu une conversation intéressante, même quand nous avons un peu dévié du sujet.
Mesdames et messieurs, nous accueillons maintenant le général Walt Natynczyk, chef d'état-major de la Défense. Monsieur Natynczyk, allez-y.
Général Walt J. Natynczyk, chef d'état-major de la Défense, Défense nationale : Je suis très heureux d'être ici pour rendre hommage à une personne qui a consacré toute sa vie à servir le Canada. Je regarde autour de moi, et je vois de nombreuses personnes qui connaissent beaucoup de succès dans leur carrière. À un certain moment, dans une carrière, vient le temps de prendre sa retraite. Certaines personnes ont de grandes carrières, mais n'ont pas l'occasion de prendre leur retraite. Aujourd'hui, j'aimerais parler du major-général Keith McDonald, qui a eu une carrière exceptionnelle au sein de l'armée. Après de nombreuses années au sein de l'Aviation canadienne, il a accroché son uniforme, mais est toujours présent parmi nous pour servir son pays.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à sa femme, Cathy, et à sa fille, Jocelyn, qui sont avec nous aujourd'hui. Le major- général McDonald n'aurait pu rendre un aussi fier service au Canada s'il n'avait pas eu le soutien de sa famille. Nous avons un médaillon à lui offrir pour les services exceptionnels rendus à la suite de son passage dans les Forces canadiennes. Si vous le permettez, je vais demander à mon adjoint de lire le témoignage.
Lieutenant-commandant J. R. Michel Thibault, aide de camp du général Natynczyk, Défense nationale : Le Médaillon des Forces canadiennes pour service distingué est décerné au major-général Keith McDonald en reconnaissance de sa contribution à la défense et à la sécurité du Canada à titre de conseiller auprès du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense depuis 2001. Fort de la vaste expérience acquise tout au long de sa carrière de plus de 30 ans au sein des Forces canadiennes, le major-général McDonald fournit au comité des conseils d'expert, ce qui l'aide grandement à comprendre les enjeux actuels liés à l'armée et à la défense, comme les enjeux en matière de ressources humaines, de financement, d'équipement et de transformation, et les enjeux liés à la mission canadienne en Afghanistan. Sa participation active, son dévouement et son point de vue unique constituent une grande richesse pour le comité et, par conséquent, pour les Forces canadiennes.
Gén Natynczyk : Major-général, même si vous avez accroché votre uniforme, vos pensées accompagnent toujours les femmes et les hommes membres des Forces canadiennes. Vous demeurez à leur service, ainsi qu'à celui de tous les Canadiens. Dieu vous bénisse.
Par ce médaillon, je souhaite vous remercier, encore une fois.
Major-général (à la retraite) Keith McDonald, à titre personnel : Je suis sans voix, et cela ne m'arrive pas souvent. Ce que veut peut-être dire le chef d'état-major de la Défense, c'est que, quand nous travaillions ensemble, je lui ai dit que je ne partirais jamais. C'est probablement vrai.
Quand j'ai rencontré le sénateur Kenny en 2001, deux semaines avant les événements du 11 septembre, il m'a posé certaines questions, et il m'a entre autres demandé : « Vous ne voulez vraiment pas être payé, n'est-ce pas? ». J'ai répondu : « Un peu, peut-être », et c'est ce que nous avons fait. Il m'a dit que c'était le type d'emploi qui exigeait un véritable dévouement, qu'il fallait avoir le feu sacré, parce que le comité avait besoin d'un traducteur et de quelqu'un qui pouvait le remettre sur la bonne voie, de temps à autre. J'ai expliqué aux membres du comité qu'ils n'obtiendraient peut-être pas la simple vérité, mais qu'ils obtiendraient la vérité du point de vue de McDonald. J'espère que mon point de vue correspond à ce que le comité souhaitait obtenir. Je collabore avec les membres du comité depuis longtemps, et j'ai beaucoup apprécié mon travail, même si je me demande si cela veut dire que je vais devoir prendre de nouveau ma retraite.
Je remercie le chef d'état-major de la Défense parce que je sais que j'ai parfois été une épine dans le pied pour le ministère; je n'ai toujours visé qu'un seul but : améliorer la situation pour les hommes et les femmes remarquables qui font partie des Forces armées canadiennes. J'avais l'impression de ne pas pouvoir en faire autant que je l'aurais souhaité de l'intérieur, donc j'ai essayé d'agir un peu à l'extérieur des Forces armées.
Cette récompense constitue un grand choc et une véritable surprise. Je ne m'y attendais pas du tout. Monsieur le chef d'état-major de la défense, merci beaucoup.
Des voix : Bravo!
Le président : Pour notre dernière table ronde, j'aimerais accueillir l'honorable Peter Van Loan, ministre de la Sécurité publique. M. Van Loan est accompagné de Deirdre Kerr-Perrott, à qui je souhaite de nouveau la bienvenue. Nous accueillons aussi Mme Kristine Allen, avocate-conseil, Services juridiques à l'Agence des services frontaliers du Canada.
Monsieur Van Loan, bienvenue au Sénat. Nous sommes heureux de vous accueillir aujourd'hui et avons hâte d'entendre ce que vous avez à nous dire. Allez-y.
[Français]
L'honorable Peter Van Loan, C.P., député, ministre de la Sécurité publique : Monsieur le président, je vous remercie. C'est un plaisir d'être ici avec vous ce soir. Malheureusement, mon discours est en anglais, mais j'attends des questions en français du sénateur Nolin.
[Traduction]
Je m'en excuse. Je viens tout juste de m'en apercevoir. Quoi qu'il en soit, je suis ravi d'être ici, et je vous remercie de m'avoir invité pour discuter de cette importante question. Je sais que le comité s'est penché sur cette question avant que ces mesures législatives ne voient le jour. En fait, les mesures législatives qui sont proposées répondent aux préoccupations qui ont été soulevées par votre comité.
L'Agence des services frontaliers du Canada, ou l'ASFC, est responsable de la prestation de services frontaliers intégrés qui appuient les priorités relatives à la sécurité nationale et à la sécurité du public et qui facilitent la libre circulation des personnes et des marchandises tout en respectant les exigences de la loi relative aux programmes.
La Loi sur les douanes est l'une des principales mesures législatives régissant le mandat de l'ASFC. La Loi sur les douanes a été promulguée pour la première fois en 1867 afin d'assurer la perception des droits ainsi que le contrôle du mouvement des personnes et des marchandises et de protéger l'industrie canadienne contre les dommages réels ou possibles causés par le dumping ou le subventionnement des marchandises ainsi que par d'autres formes de concurrence déloyale.
Il est important de souligner que la Loi n'est pas une loi fiscale; elle sert plutôt à fournir l'autorité législative nécessaire pour appliquer et exécuter la perception des droits et taxes qui sont imposés en vertu d'une législation fiscale distincte, comme le Tarif des douanes et la Loi sur l'accise, ainsi qu'à appliquer et à exécuter les lois protégeant le Canada contre les marchandises dangereuses et la contrebande.
La Loi sur les douanes actuelle découle du remaniement total de la Loi de 1867, qui a été entrepris en 1986 afin de conserver les trois objectifs principaux de la loi originale et de fournir une souplesse accrue en tenant compte de l'évolution qu'ont connue les transports, les communications, le commerce et les pratiques commerciales. Depuis 1986, à la suite des accords de libre-échange et des accords internationaux connexes qui ont été conclus, la Loi a été modifiée plusieurs fois afin d'être adaptée aux mesures commerciales internationales et de permettre des mesures d'exécution plus efficaces à l'égard de la contrebande et des marchandises contrôlées en vertu des lois d'autres ministères.
Les modifications apportées à la Loi correspondent aux changements qu'ont connus nos priorités frontalières au fil de l'histoire de notre pays ainsi qu'à la façon dont de tels changements se sont intensifiés au cours des trois dernières décennies. Avec la signature des accords commerciaux et de libre-échange pour favoriser la prospérité économique, et à cause du fait que le Canada a la réputation d'être un pays de prédilection pour les personnes qui cherchent à améliorer leur qualité de vie, l'attention qui était apportée auparavant à la perception des droits d'importation cible davantage, désormais, les nouveaux problèmes liés à la contrebande, à la migration illégale, à la santé et la sécurité et aux menaces posées par la criminalité et le terrorisme, ainsi que la facilitation des échanges commerciaux transfrontaliers qui sont au cœur même de notre économie.
L'environnement dans lequel nous gérons la frontière est toujours aussi dynamique. Il est juste de penser que, en règle générale, le niveau, la diversité et la complexité des risques que nous serons appelés à identifier, à évaluer et à atténuer ne diminueront pas, malgré des ralentissements économiques comme celui que nous connaissons maintenant.
Nous pouvons également prédire que les changements démographiques du Canada entraîneront de nouvelles sources de voyageurs au Canada, alors que de nouveaux accords commerciaux et des forces économiques en mutation entraîneront de nouvelles sources de marchandises importées, dont certaines présenteront de nouveaux risques dans le domaine de la sécurité des aliments et des produits et dans celui de la propriété intellectuelle.
Il est donc vraisemblable de croire que, à l'avenir, nous devrons mettre à jour la Loi plus régulièrement afin que l'Agence dispose des fondements législatifs appropriés pour équilibrer de façon efficace la sécurité et l'accès à la frontière.
Pour en arriver à un tel équilibre, il est nécessaire de fournir à l'ASFC les textes habilitants, les outils et les renseignements dont elle a besoin pour prévoir et évaluer les risques à la frontière, pour empêcher l'entrée des personnes et des marchandises dangereuses le plus rapidement possible, et pour faciliter l'entrée des voyageurs et des marchandises légitimes.
Au cours des cinq dernières années, le gouvernement a fait d'importants investissements afin d'améliorer les opérations à la frontière et de renforcer la sécurité.
Par exemple, nous armons nos agents des services frontaliers et nous embauchons 400 nouveaux agents afin d'éliminer les situations où des agents travaillent seuls. L'armement des agents des services frontaliers et l'élimination des situations où des agents travaillent seuls sont des mesures qui assureront une protection accrue à nos agents à la frontière. En outre, la Gendarmerie royale du Canada embauche quelque 1 000 nouveaux agents de police montée. Dans les faits, nous en avons déjà embauché plus de 1 500. Près de 20 millions de dollars sont investis dans les équipes intégrées de la police des frontières de la GRC, qui sont stratégiquement placées le long de la frontière afin de démanteler les activités de contrebande entre les bureaux frontaliers. Nous avons également mis en place des systèmes de détection des radiations dans les bureaux de Saint John, Montréal, Halifax, Prince Rupert et Vancouver, qui offrent un niveau de détection des radiations élevé dans les ports maritimes.
Le projet de loi actuel vise à modifier certaines dispositions de la Loi sur les douanes afin de mieux appuyer la stratégie du gouvernement visant à renforcer la sécurité et à faciliter les échanges commerciaux. Dans le projet de loi, deux modifications importantes sont proposées afin de permettre la mise en œuvre intégrale de deux programmes, à savoir l'Initiative de l'information préalable sur les expéditions commerciales et les zones de contrôle des douanes. En 2004 et en 2006, l'ASFC a mis sur pied l'initiative de l'information préalable sur les expéditions commerciales dans les modes maritime et aérien; en vertu de cette initiative, les transporteurs doivent fournir des renseignements électroniques sur le fret à destination du Canada, dans des délais établis d'avance.
En 2007, l'ASFC a commencé l'élaboration du Manifeste électronique, qui constitue la troisième phase de l'Initiative de l'information préalable sur les expéditions commerciales. Des modifications sont apportées à la Loi afin de rendre obligatoire la communication d'information préalable par voie électronique, à l'avance, par tous les participants ou « liens » de la chaîne logistique.
Les exigences déjà en vigueur auprès des transporteurs dans les modes maritime et aérien seront imposées aux transporteurs routiers et ferroviaires, aux transitaires et aux importateurs, ce qui permettra à l'ASFC de procéder à une évaluation des risques rigoureuse pour tout le fret avant son arrivée à la frontière du Canada et de minimiser le traitement nécessaire à son arrivée.
Au cours des deux dernières décennies, l'ASFC et ses organismes d'origine ont été les chefs de file dans l'élaboration de systèmes de commerce électronique, dans le monde entier. Le Manifeste électronique est un projet complexe grâce auquel l'ASFC conserve son rôle de chef de file et qui permet la mise en œuvre de systèmes parallèles dans d'autres pays, y compris les États-Unis.
Nous sommes conscients du fait qu'une période d'adaptation sera nécessaire pour certains de nos intervenants, mais, en fin de compte, le traitement à la frontière sera plus efficace pour les transporteurs, les transitaires, les importateurs et les courtiers, tout en renforçant de façon significative la gestion du risque qui représente un fondement essentiel à la sécurité de la frontière.
Les pays libre-échangistes comme le Canada ne peuvent pas assurer une sécurité absolue contre les menaces à la frontière. Toutefois, nous pouvons optimiser notre réaction à de telles menaces au moyen de systèmes comme le Manifeste électronique. Nous pouvons demeurer alertes et efficaces dans un environnement mondial en pleine évolution.
Le deuxième ensemble clé de mesures législatives, qui concerne les zones de contrôle des douanes, donne suite à la demande de l'ASFC, qui souhaitait disposer de nouveaux outils servant à empêcher que des crimes résultant de complots internes soient commis dans les bureaux d'entrée du Canada. Diverses modifications ont été apportées à la Loi sur les douanes en 2001. Ces modifications ont permis la création de zones de contrôle des douanes qui sont définies comme étant des zones désignées, près de la frontière ou liées à la frontière, où les voyageurs nationaux ou les employés peuvent entrer en contact avec des voyageurs internationaux ou des marchandises auxquels les formalités douanières n'ont pas encore été appliquées.
Pour que l'on puisse mettre en place une zone de contrôle des douanes fonctionnelle, les trois éléments suivants doivent être présents : la législation, les règlements et les désignations. Bien que la législation soit déjà en place, les règlements et les désignations ne le sont pas, ce qui signifie que les zones de contrôle des douanes ne sont pas opérationnelles pour l'instant. En vertu de la loi actuelle, les agents des services frontaliers ont l'autorité d'intercepter, d'interroger et de fouiller les personnes uniquement aux points de sortie et toutes les personnes qui quittent une zone de contrôle des douanes doivent se présenter avant la sortie. Bien que la loi de 2001 ait permis de jeter les bases pour la mise en œuvre des zones de contrôle des douanes, une telle mesure n'a pas pu être prise de façon efficace et pratique.
Les modifications proposées fourniront des autorités semblables à nos agents afin d'intercepter, d'interroger et de fouiller les personnes à l'intérieur des zones de contrôle des douanes, ainsi qu'aux points de sortie. En outre, les personnes seront tenues de se présenter à un agent des services frontaliers sur demande seulement, ce qui supprimera l'obligation de se présenter à leur sortie d'une zone de contrôle des douanes.
De tels changements fourniront aux agents des services frontaliers la souplesse nécessaire pour examiner les personnes et les marchandises à l'intérieur des zones de contrôle des douanes, soit l'endroit où la plupart des complots internes se produisent, ce qui permettra de mettre l'accent davantage sur les secteurs à risque et sur les personnes d'intérêt. Cela aidera à améliorer la sécurité des Canadiens en renforçant la capacité de l'ASFC d'empêcher l'entrée au pays des marchandises de contrebande et d'autres articles illégaux avant même qu'ils n'atteignent les rues de nos collectivités.
En plus des modifications clés susmentionnées, un certain nombre de modifications techniques et administratives sont comprises dans le projet de loi. Par exemple, une modification technique de l'article traitant de l'Information préalable sur les voyageurs est proposée afin de fournir une certitude accrue quant au moment où l'information en question doit être fournie. Les modifications administratives traitent des anomalies entre la version anglaise et la version française de la Loi.
La sécurité mondiale est un objectif complexe assujetti aux changements de tendances en matière de commerce, de voyages et de migration à l'échelle internationale, de nouvelles technologies et du niveau de raffinement toujours croissant des éléments criminels et terroristes. Alors que les points d'entrée désignés au Canada représentent les points de décision critiques pour les formalités douanières officielles des marchandises et des personnes, une administration intelligente de la frontière nationale doit comprendre un échange d'information préalable avec le secteur privé et les partenaires du gouvernement, des efforts de renseignement importants, des mesures d'exécution dans les secteurs adjacents aux ports et, également, des mesures de sécurité entre les bureaux frontaliers, ce qui est du ressort de la GRC.
En gérant la circulation des personnes et des marchandises, nous parvenons à mieux comprendre non seulement les tendances relatives aux échanges commerciaux et aux voyageurs, mais également les tendances relatives aux criminels, ce qui, en retour, nous permet d'améliorer nos programmes et nos politiques touchant la défense de la sécurité du public. Nous devons continuer à miser sur la technologie moderne et sur les stratégies de gestion du risque qui réduisent au minimum les risques à l'égard de la sécurité tout en facilitant le mouvement efficace des marchandises, des services et des personnes.
Au cours des dernières années, des changements énormes ont été apportés à la façon de fonctionner à la frontière. Les enjeux sont trop grands pour que nous ne sécurisions pas suffisamment la frontière. Ces mesures législatives sont absolument essentielles pour nous permettre de relever les défis visant à assurer la sécurité et la prospérité des Canadiens dans notre monde où tout évolue si rapidement. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Le sénateur Tkachuk : J'ai deux ou trois questions à poser à propos de certaines préoccupations dont j'ai entendu parler tout au long de la journée. Un certain nombre de sénateurs ont posé des questions pour connaître l'incidence qu'aurait la création de zones de contrôle des douanes dans les aéroports sur les voyageurs ordinaires, et pour savoir si elles imposeraient un fardeau indu ou supplémentaire à ces derniers. On peut avoir l'impression que le fait que des agents des services frontaliers puissent se rendre dans une zone de contrôle des douanes ou en établir une pourrait porter atteinte aux droits de tout citoyen à être laissé tranquille s'il n'y a aucune bonne raison de l'ennuyer. Si vous pouviez faire quelques commentaires à propos de ces deux ou trois aspects, je vous en saurais gré.
M. Van Loan : Les aéroports sont un exemple. Évidemment, ce que vous dites ne s'applique pas seulement aux aéroports. Nous nous occuperions aussi des ports maritimes et d'autres zones de contrôle des douanes semblables.
En pratique, je ne m'attends pas à ce que vous voyiez une quelconque différence notable pour ce qui est de l'expérience que vivront les voyageurs et les passagers aux douanes. Ils seront soumis au contrôle douanier habituel, qui rend inutile l'utilisation de l'un ou l'autre de ces autres dispositifs. En effet, les voyageurs doivent se présenter à un agent de l'ASFC, qui a la possibilité, s'il estime qu'il a des motifs ou une raison de le faire, de lui enjoindre de subir un contrôle secondaire. Ce processus sera maintenu et ne sera pas touché par les nouvelles mesures.
Certains d'entre vous, assurément le président du comité, connaissent peut-être le projet SPAWN, qui se penchait notamment sur les problèmes liés au crime organisé et au trafic de drogue dans les aéroports. Grâce à de telles mesures, les agents des services frontaliers qui constatent des activités louches sur l'aire de trafic, par exemple un déchargement de bagages et de fret, auraient la possibilité d'intervenir sur-le-champ et de poser des questions sans avoir à attendre que les personnes concernées quittent la zone de contrôle des douanes. De fait, les agents pourraient interroger ces personnes, leur demander la raison de leur présence à cet endroit et s'ils ont la permission de s'y trouver. Les agents pourraient s'occuper des marchandises à ce stade, avant que quelqu'un puisse intercepter les sacs polochon et s'emparer des stupéfiants qu'ils contiennent.
Voilà l'objectif. Les protections habituelles conférées par la Charte continueraient de s'appliquer, et les personnes intéressées pourraient toujours s'en prévaloir dans de telles circonstances ou dans le cadre de tout autre type de contrôle allant au-delà du simple fait de se voir demander de présenter un permis justifiant leur présence à cet endroit. Toute mesure plus intrusive que cela devrait être fondée sur les normes de preuve habituelles, à savoir les motifs raisonnables et les motifs probables, et devrait être justifiée en vertu de la Charte et des mesures de protection établies par décision des tribunaux. Dites-le moi si je me trompe.
Kristine Allen, avocate-conseil, Services juridiques, Agence des services frontaliers du Canada : Tout ce que vous avez dit était exact.
M. Van Loan : Selon moi, les voyageurs ordinaires qui passent par les aéroports ne remarqueront probablement aucune différence. Ils doivent traverser la zone et apporter leurs bagages. Il s'agit d'une zone de contrôle entièrement surveillée. Il n'y a aucune raison de les intercepter entre cet endroit et celui où ils doivent présenter leur déclaration de douane et, éventuellement, être escortés à un autre endroit pour y subir un contrôle secondaire. Ce sont d'autres zones qui présentent un intérêt, par exemple l'aire de trafic.
Pour mieux me faire comprendre, je vais me servir de l'exemple d'un port. Dans une perspective historique, d'après ce que je crois comprendre, la police portuaire a été dissoute parce que, dans le cadre des activités sur les quais, ces agents étaient constamment en contact avec les mêmes débardeurs de longue date, dont certains étaient impliqués dans des complots criminels continus et très complexes. Essentiellement, il a été considéré que la police portuaire était corrompue ou victime d'intimidation. C'est pourquoi elle a été dissoute.
La seule capacité d'effectuer des contrôles sur les personnes au moment où elles quittent les lieux n'est pas suffisante puisque toutes sortes de choses peuvent se passer entre les conteneurs qui se trouvent dans la zone. Il faut que les agents de l'ASFC puissent s'y rendre immédiatement s'ils ont l'impression qu'il s'y déroule un complot ou quoi que ce soit d'autre qui exige une intervention.
Le sénateur Tkachuk : Les membres de l'Alliance canadienne du camionnage sont préoccupés puisque, à l'heure actuelle, au moment du contrôle à la frontière, si un problème est décelé dans les conteneurs qu'ils transportent, ils peuvent déposer leur cargaison dans un entrepôt sous douane et sécurisé et vaquer à leurs activités jusqu'à ce que les documents manquants soient transmis. Lorsque la situation est tirée au clair, ils peuvent récupérer leurs marchandises et les transporter à destination. Les membres de l'Alliance canadienne du camionnage sont préoccupés parce que, selon la nouvelle orientation de l'ASFC, s'il manque des documents, le camion devra faire demi-tour et retourner aux États- Unis plutôt que d'être placé dans un entrepôt sous douane. Vous pourriez peut-être faire un commentaire à propos de cette préoccupation qui a été soulevée cet après-midi.
M. Van Loan : Ce que je crois comprendre, c'est que, bien que nous en soyons toujours à mettre au point certains accords avec eux, en général, ils sont bien disposés envers ces mesures législatives. Nous devons régler certaines questions relatives à la mise en œuvre. De toute évidence, il y aura une période d'adaptation pendant laquelle les gens prendront connaissance des pratiques normales.
L'accomplissement de cette tâche entraînera des avantages considérables, comme nous le voyons déjà dans les terminaux maritimes. Je ne sais pas si quelqu'un ici a eu l'occasion de voir comment on y travaille. À l'aide d'une grille de valeurs, on est capable d'effectuer une évaluation du risque. Un tel système enverra un signal d'alarme avant l'arrivée d'une cargaison à risque élevé provenant d'une entreprise ou d'un expéditeur inconnu d'un pays réputé pour l'envoi de marchandises douteuses. De tels envois seront plus susceptibles de faire l'objet d'un contrôle complet. Un tel système est utile et facilite beaucoup les choses puisqu'il permet d'agir avant l'arrivée du conteneur. Nous poursuivons le même objectif pour ce qui est des camions.
Quelqu'un a-t-il quelque chose à ajouter en ce qui concerne la situation des entrepôts sous douane?
Mme Kerr-Perrott : Nous travaillons de concert avec la collectivité et les intervenants pour déterminer s'il est possible de permettre aux camionneurs d'entrer au pays plutôt que de les refouler à la frontière s'ils n'ont pas avec eux toutes les données nécessaires. Nous sommes donc en train d'examiner les processus que nous pourrions mettre en place pour faciliter cela.
Le sénateur Banks : Monsieur Van Loan et madame Allen, je vous remercie d'être ici. Quant à vous, madame Kerr- Perrott, nous sommes heureux de vous revoir.
Monsieur le ministre, je vais maintenant aborder des sujets complètement différents. Nous reviendrons sans aucun doute sur la portée normale du projet de loi. Pour l'instant, j'aimerais attirer votre attention sur l'article 17 du projet de loi que nous avons sous les yeux, à la dernière page. Je n'avais jamais remarqué une telle disposition, mais je sais qu'elle fait partie de plusieurs autres lois fédérales, cinq ou six d'entre elles, notamment le projet de loi C-10. Comme je l'ai dit plus tôt au sénateur Tkachuk, il n'est jamais trop tard pour examiner quelque chose qui nous a échappé auparavant.
La modification qui est proposée consiste à ajouter à l'article 164 de la Loi le paragraphe suivant :
Peut être incorporé par renvoi dans un règlement tout document — quelle que soit sa provenance —, soit dans sa version à une date donnée, soit avec ses modifications successives.
La modification serait apportée non pas par le gouvernement ou le Parlement, mais par la source, comme on peut le supposer.
Voici la suite de la modification proposée :
L'incorporation par renvoi d'un document dans un règlement ne lui confère pas, pour l'application de la Loi sur les textes réglementaires, valeur de texte réglementaire.
Cela signifie un certain nombre de choses. Le document incorporé ne serait pas publié dans la Gazette du Canada et, par conséquent, échappera à l'examen du Parlement.
Je vais me servir de quelques exemples absurdes pour illustrer ma préoccupation. Vous pourriez incorporer par renvoi dans un règlement pris en vertu de la présente loi une disposition réglementaire nord-coréenne en matière de douane ou, plus vraisemblablement, l'intégralité du manuel d'entretien d'un 747. Je comprends pourquoi il est nécessaire de pouvoir faire cela. Je comprends que le nombre de documents qu'un tel processus fait parfois intervenir rendrait impossible l'incorporation, au sens habituel du terme, dans un règlement d'un document par le truchement du processus normal, c'est-à-dire le processus d'examen du Parlement.
Toutefois, j'ai quelques réserves en ce qui concerne le paragraphe 2 de l'article proposé selon lequel l'incorporation par renvoi d'un document ne lui confère pas valeur de texte réglementaire et que, par conséquent, il peut échapper à l'examen du Parlement ou de toute autre instance. Si l'on revient aux exemples absurdes que j'ai mentionnés plus tôt, nous pourrions nous retrouver avec un règlement pris en vertu d'une loi canadienne dont une partie aurait été rédigée par les autorités nord-coréennes ou la compagnie Boeing. Ces dispositions feraient partie intégrante d'une loi canadienne. Elles ne pourraient faire l'objet d'aucun examen du Parlement. Nous avons exporté la capacité de prendre des règlements applicables, à tout le moins, en vertu de la loi canadienne. Ces dispositions réglementaires ne pourront être examinées par le Comité mixte permanent sur l'examen de la réglementation. Par conséquent, nous faisons deux choses. D'une part, nous exportons la capacité de prendre des règlements faisant partie de la loi canadienne applicable et, d'autre part, nous exportons la capacité de modifier, dans l'avenir, les parties de ces règlements qui auront été établies par une quelconque instance étrangère et qui feront partie de la loi canadienne. Puisque de telles dispositions échappent à l'examen, il est possible, à tout le moins sur le plan théorique, monsieur le ministre, que quelqu'un, au Canada, enfreigne la loi, ou contrevienne à une disposition réglementaire sans savoir que celle-ci existe puisqu'elle n'aura pas fait l'objet du processus normal.
Monsieur le ministre, nous devons remédier à ce problème, peut-être pas en ce qui concerne les autres lois, mais au moins en ce qui concerne le projet de loi que nous examinons en ce moment. Je propose, ou proposerai, deux moyens de remédier à la situation. Le premier est une modification, dont j'ai rédigé une ébauche dans les deux langues officielles et que je vous fournirai. Cette modification est ainsi libellée :
Que le projet de loi S-2, à l'article 17, soit modifié par adjonction, après la ligne 30, page 7, de ce qui suit :
(3) Il est entendu que le comité visé par l'article 19 de la Loi sur les textes réglementaires [...]
... c'est-à-dire le Comité mixte permanent d'examen de la réglementation...
[...] est saisi d'office des documents incorporés par renvoi dans un règlement pour que ceux-ci fassent l'objet d'une étude et d'un contrôle.
Cette modification permettrait de dissiper ma préoccupation à cet égard. Je souligne, monsieur le ministre et madame Allen, que les termes « il est entendu » ne sont pas de moi, mais qu'ils ont été ajoutés à la suggestion du conseiller juridique du Sénat pour faire en sorte, selon lui, que cette modification ne s'applique qu'à la loi en question, sans avoir aucune incidence sur d'autres lois contenant un libellé semblable. Ces modifications peuvent être apportées séparément ou d'une autre façon.
La nécessité de cette modification proposée pourrait être contournée par des moyens simples et peut-être plus appropriés. Le sénateur Tkachuk m'a laissé entendre qu'il croyait que le ministère préférerait peut-être tout simplement supprimer du présent projet de loi le second paragraphe de la modification proposée, c'est-à-dire la partie de la modification qui énonce que le document incorporé n'a pas valeur de texte réglementaire pour l'application de la loi.
J'attends vos commentaires.
M. Van Loan : Merci beaucoup. J'estime que vous faites preuve d'une saine méfiance à l'égard du fait d'accorder, sans aucune forme de processus, un pouvoir législatif illimité à des bureaucrates n'ayant aucun compte à rendre.
Le sénateur Banks : Je n'aurais pas pu mieux dire. Je vais consulter le hansard pour extraire cette phrase et m'en servir dans l'avenir.
M. Van Loan : Cette saine méfiance se fait l'écho de la conversation que nous avons eue lorsqu'on m'a informé en détail à propos du projet de loi. J'avais posé les mêmes questions et fait état des mêmes préoccupations. Les fonctionnaires du ministère m'ont dit que le seul document destiné à être incorporé par renvoi est le Document sur les exigences à l'égard des clients du commerce électronique, qui énoncera les directives pour remplir le Manifeste électronique, et qu'ils pourraient vouloir être en mesure de modifier ce document de temps à autre sans avoir à passer par l'intégralité du processus réglementaire. Je n'avais aucun problème avec cela. Par contre, j'avais un problème avec le fait que cela puisse se produire sans que quiconque ait la moindre possibilité d'en être informé et sans que quiconque ait le moindre compte à rendre. Je penche pour la deuxième option que vous proposez, le fait de supprimer tout simplement le paragraphe 2. Pendant la séance d'information, au moment où j'ai soulevé ces mêmes préoccupations, on m'a avisé du fait que le ministère pourrait s'en accommoder.
Le sénateur Banks : Merci.
Le sénateur Wallin : Aujourd'hui, plusieurs témoins ont indiqué qu'ils étaient généralement très favorables au projet de loi, comme vous l'avez mentionné. Toutefois, des préoccupations ont été soulevées, d'une part en ce qui a trait à une question d'ordre général et, d'autre part, en ce qui a trait à une question de détail.
La question d'ordre général concerne le fait que, après 2001, nous avons fait du bon travail en vue d'établir et d'harmoniser le plan d'action pour une frontière intelligente. Puis, pour de nombreuses raisons que nous pourrions mentionner, les deux pays ont pris des chemins différents. Cela a doublé la charge de travail pour tout le monde et a compliqué les choses des deux côtés. Les camionneurs — ou même, du reste, les consommateurs et les voyageurs ordinaires — sont aux prises avec des systèmes différents, selon qu'ils se trouvent d'un coté ou de l'autre de la frontière. Ils veulent que ce projet de loi soit adapté dans le cadre d'une harmonisation à plus grande échelle de nos lois et de nos règlements sur la sécurité et le commerce avec les États-Unis, et ils veulent savoir en quoi ce projet de loi est approprié.
Quant à la deuxième préoccupation mentionnée, elle concerne le fait que les difficultés surgissent des menus détails et que, même si les mesures législatives ne semblent présenter aucun problème, sur le terrain, elles pourraient se voir interpréter d'une manière qui se concrétiserait par le fait qu'un camionneur devrait prouver que sa mère est véritablement née en Irlande et non pas dans un autre pays. C'est dire à quel point les documents entraient dans les détails.
La question d'ordre général et la question de détail sont liées sur le plan de l'harmonisation. Est-ce que cela nous aide ou nous nuit, ou a-t-on l'intention de s'occuper de ce problème au jour le jour en collaborant avec les Américains?
M. Van Loan : Sur ce point, je suppose que vous faites référence au Manifeste électronique.
Le sénateur Wallin : Oui, mais également à l'aspect plus large de l'harmonisation.
M. Van Loan : Pour ce qui est de la question plus vaste de l'harmonisation, nous croyons que, dans la mesure où il est possible d'harmoniser, elle présente des avantages sur bien des plans. Premièrement, cela permet aux entreprises des deux côtés de la frontière de comprendre plus facilement les règles à suivre pour faire du commerce. Deuxièmement, cela contribuera vraisemblablement à maintenir la confiance de notre partenaire commercial qui se trouve de l'autre côté de la frontière, ce qui atténuera les mesures excessivement sévères auxquelles nous pourrions autrement être exposés. Pour ces raisons, l'harmonisation — dans la mesure où nous pouvons en arriver à une harmonisation et dans la mesure où notre loi le permet — est un pas dans la bonne direction.
En ce qui concerne le Manifeste électronique, son équivalent américain est le programme Automated Commercial Environnement. On remarque également des progrès de ce côté. Notre objectif consiste à faire en sorte que les exigences du Manifeste électronique soient aussi harmonisées que possible avec celles de son équivalent américain.
Cependant, comme je l'ai dit, ces programmes sont en cours d'élaboration et continuent à évoluer, et les discussions avec les États-Unis à cet égard se poursuivent. C'est l'une des raisons qui me portent à croire qu'il y a un désir que le document qui sera incorporé par renvoi soit suffisamment ouvert pour qu'il soit possible d'effectuer cette harmonisation et d'apporter des précisions de détail.
Dans la mesure où nous le faisons, nous aidons nos entreprises en facilitant leurs allées et venues d'un côté et de l'autre de la frontière, et nous sommes plus susceptibles de conserver la confiance de nos partenaires.
Le sénateur Wallin : Le message qu'ils vous ont envoyé, dans le cadre du témoignage qu'ils ont présenté ici et dans celui des conversations qui ont eu lieu par la suite, était le suivant : ne placez pas le Canada dans une position de désavantage concurrentiel en multipliant le nombre de règlements ou en les modifiant dans une mesure telle que tout commerce deviendrait impossible. Le sénateur Tkachuk a mentionné un cas où des véhicules étaient retenus dans des parcs de stockage.
M. Van Loan : Ce qui est paradoxal, c'est que si nous réduisons le nombre de règlements, nous pourrions devoir faire face à un nombre disproportionné de règlements américains. En effet, si nos règlements ne sont pas harmonisés, les Américains réagiront en faisant valoir qu'ils doivent en faire davantage parce que nous n'en faisons pas assez. Pour cette raison, l'harmonisation nous permettra effectivement de favoriser les échanges commerciaux et d'éviter des obstacles injustifiés au commerce.
Le sénateur Wallin : Je voulais transmettre cette préoccupation.
Le sénateur Zimmer : J'ai deux questions. Premièrement, depuis le 11 septembre 2001, quelles mesures ont été prises, pour le compte de l'Administration canadienne de la sûreté du transport aérien, pour renforcer les services de contrôle de sûreté, mis à part le dépistage des articles qui figurent sur la liste des articles interdits de Transports Canada, et quels ont été les résultats de ces mesures?
M. Van Loan : J'aimerais beaucoup répondre à votre question, mais il est probablement préférable que je m'en remette au ministre des Transports, qui est responsable en la matière. Le ministère de la Sécurité publique n'est pas responsable de l'ACSTA, l'administration canadienne de la sûreté du transport aérien, qui relève du ministère des Transports.
Le sénateur Zimmer : Mon autre question est tirée d'articles de journaux. Le mercredi 25 mars, au cours d'une entrevue que vous avez accordée à l'équipe de rédaction de l'Embassy, vous avez affirmé que la campagne menée en vue de différer la mise en place de l'Initiative relative aux voyages dans l'hémisphère occidental était devenue un sujet purement théorique après que la secrétaire d'État Hilary Clinton et la secrétaire à la Sécurité intérieure, Janet Napolitano, ont indiqué que les États-Unis étaient prêts. Aucun mécanisme ne permet de prolonger le délai. Vous avez indiqué qu'il y avait un écart entre l'état de préparation du Canada et des États-Unis, et qu'il était intéressant de constater qu'ils avaient marqué leur accord parce qu'ils estimaient être prêts. Vous avez mentionné que nous sommes plus prêts qu'eux : 53 p. 100 des Canadiens possèdent un passeport, comparativement à 28 p. 100 pour ce qui est des Américains. Vous avez raison sur ce point.
Il faudrait qu'une campagne de publicité soit menée pour faire savoir aux États-Unis que la date limite approche. Toutefois, dans le Calgary Herald du 26 mars, Mme Napolitano a indiqué que les États-Unis étaient si mal préparés pour mettre en œuvre ces nouvelles règles que l'abandon du plan provoquerait le chaos. Elle a également déclaré que des retards considérables à la frontière au cours des Jeux Olympiques de février 2010 représenteraient un problème important.
Vous avez tout à fait raison. Nous sommes prêts, et les États-Unis ne le sont pas. Que faire maintenant? Devons- nous attendre jusqu'à ce qu'ils règlent le problème? Ils déposeront un projet de loi pour tenter de repousser la mise en œuvre de cette initiative jusqu'au 1er juin de l'an prochain, ce qui me semble être une bonne idée. Cependant, à ce moment-ci, il s'agit d'un sujet purement théorique, comme vous le dites, car nous sommes prêts, et ils ne le sont pas, même s'il semble qu'ils iront de l'avant. Avez-vous des commentaires à formuler?
M. Van Loan : Tout d'abord, selon nous, le gouvernement doit agir de façon responsable dans la perspective que la date limite du 1er juin entrera en vigueur. C'est l'objectif avoué de l'administration Obama. Il s'agissait de l'un des premiers gestes posés par Hilary Clinton à titre de secrétaire d'État et par Janet Napolitano à titre de secrétaire à la Sécurité intérieure après avoir été nommées à leur poste respectif. L'un des premiers gestes qu'elles ont posés a consisté à confirmer que les États-Unis étaient prêts.
Par conséquent, notre principale préoccupation doit être de veiller à ce que les entreprises et les voyageurs canadiens soient aussi prêts que possible. Nous nous sommes engagés à mener une campagne de publicité à cet égard. Nous étudions une idée novatrice, dont le caractère novateur tient au fait qu'elle est incroyablement simple : il s'agit tout simplement de demander aux agents de l'ASFC de remettre aux personnes qui traversent la frontière sans posséder les documents nécessaires un feuillet les informant des règles qu'ils devront observer à compter du 1er juin. Il s'agit d'une façon simple de fournir de l'information aux personnes concernées.
Louise Slaughter, représentante de la région de Buffalo, propose l'examen des mesures législatives. Nous appuyons et encourageons cela. Il serait formidable qu'elles soient adoptées. Cela sera plus difficile dans un contexte où l'administration a assuré être prête. Là encore, elles devront être adoptées à la majorité absolue, et la représentante Slaughter occupe une position déterminante sur le plan législatif. Il y a des raisons d'être optimiste, et nous avons appuyé ces mesures législatives. Nous continuerons à le faire, mais cela ne nous empêchera pas de continuer à déployer des efforts pour être prêts.
En ce qui concerne l'état de préparation, vous avez mentionné l'écart considérable qui existe entre le Canada et les États-Unis sur le plan de la possession de passeport, mais cet écart n'est pas tout à fait représentatif puisque de nombreux Américains ne voyagent jamais à l'extérieur de leur pays. Au Canada, la proportion de personnes qui voyagent à l'extérieur des frontières de leur pays est plus élevée. Pour savoir qui traverse effectivement une frontière, on ne peut se fonder simplement sur les statistiques relatives à la simple possession d'un passeport.
Même en ce qui concerne les statistiques relatives aux personnes qui traversent effectivement la frontière, les chiffres les plus récents indiquent qu'une proportion d'environ 80 p. 100 de Canadiens possèdent des documents conformes à l'IVHO, comparativement à seulement 76 p. 100 des Américains, bien qu'il s'agisse de leur initiative. Quant aux personnes qui traversent fréquemment la frontière, par exemple les camionneurs ou les gens qui habitent une ville frontalière, dans leur cas, le taux de possession des documents conformes à l'IVHO est, contre toute attente, encore moins élevé. Ces personnes sont si habituées de pouvoir traverser la frontière « à l'ancienne », simplement avec un permis de conduire, qu'elles n'ont pas pris au sérieux l'idée selon laquelle elles devraient changer leur façon de faire.
Dans ce cas, à peine 56 p. 100 environ des camionneurs américains traversent la frontière avec des documents conformes, alors que cette proportion s'élève à 63 p. 100 pour ce qui est des camionneurs canadiens. Ce pourcentage est encore beaucoup plus bas qu'il ne le devrait. Il y a beaucoup de travail à faire tant au Canada qu'aux États-Unis, mais nous sommes davantage prêts que les Américains.
Nous collaborons avec l'administration américaine pour mettre au point des méthodes de mise en œuvre et pour tenter d'apporter un peu de souplesse aux mesures. Nous verrons ce que cela va donner. Nous continuerons de faire en sorte que les Canadiens soient aussi prêts que possible.
Évidemment, il est tout naturel de craindre que les États-Unis feront preuve de davantage de souplesse dans l'application de la loi à l'égard des Américains qu'à l'égard des Canadiens. Néanmoins, j'estime qu'il serait également idiot de leur part d'agir ainsi puisque leurs entreprises ont besoin du tourisme, et qu'elles ont besoin aussi du commerce. J'ai donc bon espoir que nous en arriverons à une solution pragmatique pour ce qui est de la mise en œuvre. Nous travaillons sur les trois fronts : nous veillons à ce que les mesures mises en œuvre soient souples, nous faisons en sorte que les Canadiens soient aussi prêts que possible et nous déployons des efforts pour faire prévaloir le bon sens, c'est-à-dire pour que la date d'entrée en vigueur soit différée. Nous verrons.
Le sénateur Zimmer : Avez-vous envisagé quelque plan que ce soit pour rehausser le permis de conduire et faire en sorte qu'il soit reconnu à titre de document acceptable pour remplacer un passeport des deux côtés de la frontière?
M. Van Loan : En vertu de l'Initiative relative aux voyages dans l'hémisphère occidental, nous avons obtenu le droit d'utiliser le permis de conduire Plus. Ce permis de conduire est disponible, mais seulement dans les provinces qui ont décidé de l'adopter. La Colombie-Britannique l'a fait, et le Québec l'a imitée il y a deux ou trois semaines. À l'heure actuelle, un nombre relativement peu élevé de personnes ont eu recours à ce service. La demande est beaucoup moins élevée que pour les passeports, mais il s'agit d'une option pour les Canadiens qui ne veulent pas posséder un passeport complet. Nous devons respecter la compétence de chaque province en la matière et ne pouvons les obliger à offrir ce permis de conduire.
Le sénateur Mitchell : Monsieur le ministre, comme on l'a mentionné précédemment, des représentants de l'Alliance canadienne du camionnage se sont adressés à nous ce soir. Jusqu'à un certain point, ce projet de loi leur donne de l'espoir, et ils sont heureux d'avoir été consultés, bien qu'ils craignent qu'on ne les écoute pas. Bien sûr, en ce qui les concerne, la menace réside dans la capacité concurrentielle. Ils ont fait quelques suggestions que j'aimerais vous transmettre. Ils sont déçus des solutions qu'a apportées le programme pour la sécurité et la prospérité du Conseil nord- américain de la compétitivité afin de remédier à certains de ces problèmes. Ils ont proposé la création d'un comité du Cabinet sur les questions frontalières. Avez-vous des commentaires à ce sujet?
Ils ont indiqué que l'un des faits saillants des huit dernières années était l'accord sur la frontière intelligente, conclu en 2001, et ils se demandent s'il ne conviendrait pas d'envisager un accord semblable pour 2009.
M. Van Loan : Je vais examiner la question plus générale, sans examiner ces deux propositions particulières. Nous pensions aller dans la bonne direction puis, malgré le Partenariat nord-américain pour la sécurité et la prospérité, la situation s'est corsée. Avec l'arrivée de l'administration Obama à la tête des États-Unis, il existe une possibilité réelle de coopération dans bon nombre de ces domaines, y compris une approche plus coopérative en ce qui a trait aux frontières, que nous sommes en train d'étudier. Une nouvelle mentalité est apparue après la création du département américain de la sécurité intérieure en septembre 2001. Nous croyons que la nouvelle administration a une vision et une mentalité différentes. L'implantation de cette mentalité au sein du département pourrait prendre un certain temps, mais nous sommes d'avis qu'il est possible d'adopter une approche plus coopérative pour assurer la sécurité et faciliter le commerce.
Quant aux instruments qui nous permettront d'en arriver là, la secrétaire du département de la Sécurité intérieure s'est engagée, au cours de ma visite à Washington il y a deux semaines, à tenir deux fois par année une réunion de haut niveau, distincte des réunions régulières, avec le ministère de la Sécurité publique et consacrée exclusivement aux questions frontalières. Nous espérons qu'un tel mécanisme nous permettra de faciliter la discussion sur les questions qui revêtent une importance particulière pour nous et nous donnera l'impulsion nécessaire pour résoudre les problèmes, ce qui nous manquait dans le passé. Lorsque des personnalités politiques rencontrent les membres de l'administration du Président et le ministre canadien, on s'attend à des résultats, à des annonces, si vous préférez. La secrétaire à la Sécurité intérieure était assez franche à cet égard. Je souhaite que cela mette suffisamment de pression sur nos ministères pour les amener à conclure des choses qui pourraient autrement en demeurer au stade interminable des discussions et de l'élaboration.
Il s'agit d'un progrès encourageant, et nous prévoyons une première rencontre dans les mois à venir. Nous avons convenu de discuter principalement des problèmes rencontrés aux postes frontaliers. Nous pouvons nous rendre sur place et inspecter les lieux. En ce qui a trait aux questions relatives à la gestion des frontières, il s'agit de la réaction la plus favorable que nous ayons obtenue de la part des Américains depuis de nombreuses années. On a pris conscience du fait qu'il est possible d'assurer la sécurité de manière attentionnée et intelligente sans nuire au commerce. Nous devons orienter nos ressources et les affecter aux endroits où elles donnent les meilleurs résultats. Partageons les responsabilités et cherchons d'autres possibilités de les partager. Par exemple, plutôt que d'avoir des bateaux patrouillant des deux côtés de la frontière sur les Grands Lacs, mettons tous nos hommes sur le même bateau, et ils pourront poursuivre les contrebandiers qui traversent la frontière. Il s'agit d'un projet permanent sur lequel nous travaillons. C'est un exemple classique de la méthode qui consiste à mettre en commun les ressources pour en avoir plus pour notre argent. En unissant nos efforts, nous pouvons travailler de façon plus efficace. Au sein de la nouvelle administration américaine, il y a une volonté réelle d'adopter une telle ligne de conduite.
Le sénateur Mitchell : Il est rassurant et stimulant de vous entendre parler de votre nouvelle relation avec les démocrates et de savoir que vous prenez vos distances par rapport aux Républicains.
Vous avez évoqué les bateaux sur les Grands Lacs et les problèmes de contrebande. Toutefois, un programme de ce genre ne peut fonctionner sans mesures d'application. Je me souviens d'avoir pris connaissance, l'été dernier, de l'entente de 1,1 milliard de dollars que vous avez conclue avec les dirigeants des compagnies de tabac, qui ont sciemment causé, grâce à la contrebande, des dommages s'élevant à 4,4 milliards de dollars à la société canadienne. Il me semble étrange que l'industrie canadienne du tabac ait pu causer de tels dommages sans que des accusations soient déposées contre ses dirigeants. Je mets cette position en regard de l'initiative qui consiste à vouloir condamner des jeunes de 14 ans à la prison à perpétuité. De quelles mesures avez-vous doté ce programme pour le rendre efficace? Comment ces dirigeants de compagnies de tabac ont-ils pu s'en tirer à si bon compte?
M. Van Loan : Pour ce qui est des dirigeants de compagnies de tabac, je n'ai rien eu à voir avec cela. Cela s'est passé avant que notre gouvernement soit au pouvoir. Vous feriez mieux de vous adresser à la GRC et aux agents d'application de la loi, qui ont la responsabilité de déposer des accusations. Comme vous le savez, le Canada n'est pas un État policier où le gouvernement prend ce genre de décision. Le gouvernement prend des décisions en ce qui concerne les actions en justice et les poursuites au civil, et je crois que le gouvernement a pris de telles mesures.
Quant aux mesures d'application que vous évoquez, de quoi voulez-vous parler?
Le sénateur Mitchell : Si vous surprenez une personne en train de faire de la contrebande, de toute évidence, des mesures doivent être prises contre cette personne. Ce qui m'inquiète, c'est que dans le cas évoqué, aucune mesure n'a été prise. Pouvez-vous exercer une quelconque influence? Manifestement, vous prenez des mesures musclées pour lutter contre la criminalité.
M. Van Loan : Nous disposons d'un nombre suffisant de lois. Il revient aux agents d'application de la loi de prendre la décision de déposer des accusations. Évidemment, chaque semaine, j'apprends qu'une nouvelle saisie de drogues a été effectuée à la frontière. Au cours de la dernière semaine, deux ou trois d'entre elles faisaient intervenir des personnes jouissant d'une certaine notoriété. Des accusations ont été portées contre elles, et elles sont susceptibles d'être condamnées. Nous avons déposé un projet de loi prévoyant des peines d'emprisonnement obligatoires pour les crimes graves liés aux drogues, et nous souhaitons qu'il sera adopté et sanctionné.
Le sénateur Mitchell : Vous avez évoqué le fait d'armer les gardes frontières. Pouvez-vous nous indiquer combien coûterait une telle mesure? Les gardes frontières ont-ils utilisé des fusils? Leur a-t-on remis des pistolets Taser?
M. Van Loan : Je ne crois pas qu'un seul agent de l'ASFC possède un Taser. Le processus de formation en maniement des armes est en cours. L'accent est mis sur les secteurs où les risques sont les plus élevés, à savoir les postes frontaliers. Je pourrai vous transmettre des détails ultérieurement. En 2006, nous avons investi 781 millions de dollars pour financer une initiative d'une durée de dix ans. D'ici mars 2016, 4 800 agents auront reçu une formation complète. En date du 28 février 2009, nous avions déployé 773 agents armés partout au pays. La formation a donné de très bons résultats, dans la mesure où le taux de réussite s'élève à 88 p. 100. De plus, tous les agents armés des services frontaliers doivent suivre chaque année un cours de deux jours pour renouveler leur accréditation. Dans 39 cas, un agent s'est vu retirer son arme à feu de service. Chaque fois que cela se produit, un examen du cas est mené. Je crois que cela répond à vos questions.
Le sénateur Mitchell : Pouvez-vous nous assurer que, si nous adoptons et appuyons la modification du sénateur Banks, vous ne déclarerez pas que le Sénat vous a forcés à déclencher des élections?
M. Van Loan : Je ne pense pas que ce type de projet de loi donnera lieu à un vote de confiance, mais il pourrait y en avoir d'autres, on ne sait jamais.
[Français]
Le sénateur Nolin : Je voudrais vous remercier, monsieur le ministre, ainsi que vos adjoints ministériels, d'avoir eu confiance en notre institution pour mener à terme le premier examen de ce projet de loi. Je vois en vous un homme qui respecte les hauts standards de qualité de notre institution.
J'aurai deux questions. La première touche à la réglementation qui vise la mise en place des zones de contrôle des douanes. La deuxième vise à faire la différence entre les fouilles avec soupçon et les examens discrets sans soupçon.
Dans un premier temps, la règlementation. Monsieur le ministre, vous êtes avocat, vous êtes à même d'apprécier la différence entre une fouille sur un individu suite à une arrestation, appelons-la régulière, en vertu du Code criminel canadien, donc une arrestation qui s'exerce par un agent de la paix suite à un examen judiciaire, et qui mène à une mise en accusation. Dans la loi qui nous concerne et le projet de loi qui nous occupe ce soir, la mécanique est un peu différente.
La fouille a lieu sans arrestation, mais les tests qui doivent justifier la fouille sont les mêmes : soupçon, motif raisonnable. Il y a une différence majeure. Personne, à moins que vous me disiez le contraire — en tout cas pas en vertu de la loi —n'examine judiciairement les soupçons ni les motifs raisonnables qui amènent votre agent à procéder à cette fouille. Mais la loi est ainsi faite, on a accepté cela, c'est tout à fait respectueux de notre règle de droit et cela respecte la Charte des droits et libertés du Canada.
Ce qui me préoccupe, c'est ceci : en ce moment, vous avez une mécanique de fixation des zones, même si on n'appelle pas cela encore des zones de contrôle des douanes, qui vise à forcer l'administration à avoir une plus petite zone. Autrement dit, il y a un premier poste de contrôle où vous avez un de vos agents qui questionne le voyageur qui arrive au Canada et qui examine la fiche de déclaration du voyageur. Deuxième étape, le voyageur va chercher ses valises. Troisième étape, un deuxième agent récupère la déclaration et c'est à ce moment-là, dans la loi actuelle, si l'on ne tient pas compte de l'amendement actuellement devant nous, qu'une fouille peut se faire.
Je pense que les amendements que vous nous proposez aujourd'hui auront pour effet d'inciter à la mise en place de zones de contrôle des douanes plus grandes. Certains aujourd'hui ont même émis l'hypothèse que l'aéroport pourrait être cette zone. Tout cela dépendra de la règlementation que vous allez mettre en place, monsieur le ministre.
Ma question est celle-ci : au regard des droits de tous les individus qui passeront, après la mise en vigueur de cette loi, à travers une zone de contrôle douanier portuaire ou aéroportuaire, quelle qu'elle soit au Canada, quels sont les mécanismes, les critères, que vous voudrez respecter, vous et le gouvernement, pour vous assurer qu'on n'élargira pas de façon exorbitante ces zones et qu'on ne battra pas en brèche les droits de ceux et celles qui vont passer à travers le système?
[Traduction]
M. Van Loan : Il est raisonnable de supposer qu'une zone de contrôle des douanes s'étendra, selon toute logique, de l'espace où se trouve l'avion lui-même, celui où les passagers descendent de l'avion, c'est-à-dire l'aire de trafic, qui est probablement le point le plus important pour les fins du projet de loi, jusqu'à l'espace où les passagers passent la douane et quittent ce périmètre. L'un des critères à prendre en considération, c'est que lorsque vous avez traversé cette dernière porte et que vous avez passé la douane, vous vous trouvez évidemment dans une zone non contrôlée. C'est à cet endroit que se trouverait le grand public.
Pour des raisons fonctionnelles, les aéroports chercheront à restreindre le nombre de zones de contrôle des douanes puisqu'il sera plus contraignant et difficile d'y travailler. De toute évidence, les aéroports voudront gérer ces contraintes et ces difficultés pour atténuer leurs répercussions.
Quant à la question des droits de la personne, là encore, je ne pense pas que l'expérience que vivront les voyageurs réguliers en passant par un aéroport changera du tout au tout. Il n'y a véritablement aucune raison de leur demander de s'arrêter pour pouvoir fouiller leurs bagages avant qu'ils ne quittent les lieux. Il n'y a aucune raison de fouiller leurs bagages au carrousel alors que nous pourrions le faire 30 pieds plus loin, dans le cadre d'un contrôle secondaire. Si les agents des services frontaliers ont pris cette décision lorsqu'ils ont accepté la déclaration de douane, peu importe le code sophistiqué qu'ils ont utilisé pour marquer leur accord — dont j'ignore la signification puisque je n'ai jamais eu la malchance d'avoir à subir un contrôle secondaire jusqu'à maintenant — il est difficile d'imaginer une situation où les voyageurs réguliers rencontreraient un quelconque problème. Les nouveaux pouvoirs qui ont été accordés seront exercés lorsque des problèmes se présenteront avec le personnel qui travaille dans ces zones, à savoir les employés de la compagnie aérienne ou de la compagnie de ravitaillement et les préposés aux bagages, qui sont souvent engagés à contrat par la compagnie aérienne ou employés par celle-ci. Ces personnes seront possiblement soumises à un examen discret. En outre, si les agents de l'ASFC remarquent quelque chose de suspect, ils auront la possibilité de procéder à une fouille plus détaillée de la cargaison ou des bagages à l'aide de rayons X ou de quelque chose du genre.
La possibilité que l'on porte atteinte indûment aux droits de la personne des voyageurs ne m'inquiète pas vraiment. Ils seront protégés par les mêmes droits que ceux qui leur sont accordés habituellement. La norme a été relevée dans la mesure où ils devront justifier leur présence sur ces lieux, mais autrement, on ne pourra fouiller quiconque sans motifs raisonnables, comme c'est le cas pour ce qui est d'une fouille dans la rue.
[Français]
Le sénateur Nolin : Je vais m'en remettre à votre parole, monsieur le ministre, et on examinera la réglementation au fur et à mesure qu'elle sera introduite. La toute fin de votre réponse m'amène exposer ma deuxième question qui vise à m'éclairer sur la différence que vous faites, à l'article 10 et à l'article 11 du projet de loi, entre une fouille avec soupçon, celle dont on vient de parler, qu'on retrouve à l'article 99.2, paragraphe 1 de la loi telle qu'amendée, et l'examen discret de marchandise sans soupçon précis.
[Traduction]
M. Van Loan : Je vais laisser Mme Allen répondre à la question.
Mme Allen : Vous disiez entre la version proposée de l'article 99.2 et...
[Français]
Le sénateur Nolin : Parce que le ministre a terminé en disant qu'il est convaincu que les droits des individus qui sont à l'intérieur de ce processus seront protégés par l'évaluation des tests, autrement dit, des raisons qui amènent un agent à poser les gestes qu'il pose.
En vertu de 99.3 (1), un agent peut, sans soupçon précis, procéder à un examen discret de marchandises. Je voudrais comparer cela avec 99.2 (1) où l'agent doit avoir des motifs raisonnables de soupçonner qu'une infraction sera commise. Expliquez-moi comment cela se produit. Pourquoi avez-vous besoin de cette distinction? Pourquoi, dans le cas de 99.3 (1), le test qui a priori n'est examiné par aucune autorité judiciaire est-il si bas?
[Traduction]
M. Van Loan : Imaginons qu'un préposé aux bagages est impliqué dans un complot d'importation de drogues. Il sait qu'il doit trouver la valise jaune appartenant à Wilf Moore qui arrive de la Jamaïque.
Le sénateur Nolin : Ne donnez pas de noms.
M. Van Loan : Il trouve la valise jaune ornée d'un ruban rose. Il l'ouvre à l'abri des caméras, s'empare de la cocaïne qu'elle contient, la cache dans son blouson et reprend ses activités. Plus tard dans la journée, un autre vol arrive. Il met la cocaïne dans le sac d'une personne qu'il considère comme un voyageur digne de foi. Le sac est placé sur un carrousel et sera récupéré par une personne au-dessus de tout soupçon puisqu'elle revient de Buffalo ou d'un endroit à risque peu élevé selon l'Agence des services frontaliers du Canada. Le voyageur en question est probablement un enfant de six ans puisque son sac est à l'effigie de Dora l'exploratrice. Le préposé aux bagages qui a mis la cocaïne dans le sac trouvera le moyen de la récupérer plus tard.
Dans ce type de cas où l'on soupçonne qu'il se passe quelque chose sur l'aire de trafic, il pourrait être avantageux de fouiller les personnes suspectes. Ai-je raison?
Mme Allen : Oui, vous avez raison. Je peux expliquer de façon plus précise la différence entre les deux dispositions.
Vous pouvez constater que l'article 99.2 proposé concerne les personnes et que l'article 99.3 proposé concerne les marchandises. L'article 99.3 doit traiter de certains aspects comme les appareils de rayon X mobiles; par exemple, les sacs à dos des employés qui quittent l'aéroport après leur quart de travail pourraient être systématiquement balayés par scanner. Il s'agit d'un seuil minimal.
L'article 99.2 proposé concerne les personnes. Nous prenons toujours très au sérieux les droits de la personne. Dans le cas qui nous occupe, les agents auraient le pouvoir de poser des questions d'usage, mais tout interrogatoire plus poussé, l'examen des marchandises ou la fouille des personnes sont assujettis aux dispositions de la Charte. En vertu de l'article 99.2 proposé du projet de loi, il faut avoir des motifs raisonnables pour fouiller ou interroger plus avant une personne. Ces deux articles traitent de deux situations différentes.
[Français]
Le sénateur Nolin : Autrement dit, dans 99.3 (1), on parle davantage d'un examen par rayons X?
[Traduction]
Mme Allen : Oui, comme les appareils de sécurité mobiles que vous voyez lorsque vous entrez dans cet immeuble, par exemple. Ce genre de chose.
[Français]
Le sénateur Nolin : Dans l'article 99.3 (1), il est toujours question d'individus. [Traduction]
[Traduction]
Ces marchandises sont en la possession d'une personne.
[Français]
Alors, l'élément personnel est toujours là. C'est la fouille personnelle qui est différente. En vertu de 99.2 (1), l'agent peut fouiller la personne et les biens alors qu'en vertu de 99.3 (1), il ne pourra fouiller que les biens, sans fouiller la personne.
[Traduction]
Mme Allen : C'est exact.
Le sénateur Tkachuk : Puis-je poser une question supplémentaire à ce sujet? Si le sénateur Nolin évoque les droits accordés aux agents des services frontaliers à l'intérieur du nouveau périmètre en question, c'est que, à l'heure actuelle, ils ne disposent pas de ces droits. Est-ce exact?
En d'autres termes, il faut que la personne soit en train de quitter le site. Cette situation ne différerait en rien de celle d'un policier de Saskatoon qui, en vertu de droits particuliers qui lui sont accordés, peut arrêter sur une rue précise, par exemple la deuxième avenue, un individu qu'il soupçonne, en raison de renseignements dont il dispose, de mener des activités douteuses. Nous parlons non pas de policiers ici, mais simplement d'agents des services frontaliers.
Selon moi, par le truchement de ce projet de loi, on tente d'accorder aux agents des services frontaliers, à l'intérieur de la zone en question, les mêmes droits que ceux dont dispose un policier dans quelque autre situation que ce soit.
Le sénateur Nolin : Je suis prêt à répondre à la question du sénateur Tkachuk. J'aimerais entendre le ministre à ce propos. Selon moi, tout avocat fournirait la même réponse, et cette réponse est non.
Le président : Vous devez adresser vos questions au ministre, et non pas vous les poser entre vous.
M. Van Loan : Je vais m'en remettre à Mme Allen.
Mme Allen : Je veux être certaine de répondre à la bonne question. Pouvez-vous la répéter?
Le sénateur Tkachuk : Je veux connaître la différence entre les pouvoirs accordés à un agent des services frontaliers qui, en vertu du projet de loi, sera autorisé à examiner des activités qui se déroulent sur l'aire de trafic si des renseignements lui permettent de croire qu'il s'agit d'activités douteuses, et les pouvoirs accordés à un policier de Saskatoon, qui peut fouiller un individu sur la deuxième avenue si des renseignements lui permettent de croire que cet individu a commis un acte criminel. Quelle est la différence?
Mme Allen : Selon moi, la principale différence réside dans le fait que la Loi sur les douanes est un ensemble de mesures réglementaires. Il ne s'agit pas d'un ensemble de mesures pénales. Par conséquent, les pouvoirs accordés aux agents des services frontaliers sont limités. Il s'agit de la première différence essentielle. Quant à l'agent de la police provinciale, il enquête principalement sur les infractions criminelles qui ont été effectivement commises.
De plus, les pouvoirs énoncés dans la Loi sur les douanes sont assez différents et sont liés aux fins réglementaires.
Le sénateur Moore : Merci à vous tous de vous être présentés. Ma première question fait suite à celle que le sénateur Nolin a posée relativement à l'article 99.2 proposé selon lequel tout agent pourrait fouiller une personne visée par règlement ou une personne qui est membre d'une catégorie de personnes visée par règlement si cette personne se trouve dans une zone de contrôle des douanes ou quitte une telle zone. Quelles sont ces personnes ou ces catégories de personnes visées par règlement? De qui parlons-nous ici?
Mme Allen : Mme Kerr-Perrott voudra bien me corriger si je me trompe, mais je pense qu'il y a deux catégories de personnes. D'une part, selon les dispositions réglementaires, il y a les personnes qui composent, par exemple, le personnel d'urgence, c'est-à-dire des personnes auxquelles vous ne voulez pas interdire l'accès à la zone de contrôle des douanes, mais qui pourraient toujours être soumises à un interrogatoire et à une fouille, sous réserve de motifs raisonnables, en raison de notre préoccupation à propos des complots à l'interne.
D'autre part, si vous lisez le renvoi aux mesures législatives, il y a la catégorie des personnes qui ont reçu une autorisation ministérielle. Ces autorisations ont été conçues pour faire face aux situations de dernière minute et impossibles à prévoir. Aucun exemple ne me vient à l'esprit, à part peut-être celui d'un diplomate en visite ou quelque chose du genre.
Le sénateur Banks : En ce qui concerne la réponse à la question du sénateur Moore, est-il utile d'examiner la modification proposée à l'article 107.1 de la loi qui, selon moi, semble porter entre autres sur les employés et les membres d'équipage des compagnies aériennes?
Mme Allen : Nous parlons de l'article 107?
Le sénateur Banks : Il s'agit de l'article 12 du présent projet de loi, qui propose de modifier l'article 107 et fait référence à certaines personnes visées par règlement.
M. Van Loan : Il s'agit de l'article 107.1, qui porte sur l'information préalable sur les passagers.
Le sénateur Banks : Il pourrait s'agir d'un employé de la compagnie aérienne.
M. Van Loan : Non. Il s'agit de l'information préalable sur les voyageurs. C'est l'une des modifications techniques, distinctes des deux questions principales visées par le projet de loi. Cet article traite de la nécessité d'envoyer au Canada la liste des passagers de l'avion au moins 15 minutes avant son arrivée. Est-ce bien le délai qui est en vigueur à l'heure actuelle? Nous voulons modifier ce délai de manière à obtenir beaucoup plus tôt la liste des passagers qui arrivent au Canada à bord d'un avion.
Le sénateur Banks : Qui fournira cette liste?
M. Van Loan : La compagnie aérienne.
Le sénateur Banks : Ainsi, les personnes ou les catégories de personnes visées par règlement sont les employés des compagnies aériennes, n'est-ce pas?
M. Van Loan : Il s'agit non pas de personnes visées par règlement, mais de l'obtention des renseignements prévus à propos de toute personne dans le délai et selon les modalités réglementaires. Essentiellement, il s'agit du nom, de l'adresse, de la date de naissance, du sexe et du numéro du vol du passager. Cela n'a rien à voir avec la zone de contrôle des douanes. Cela n'a rien à voir avec le Manifeste électronique. Il s'agit du système qui permet aux agents de l'ASFC de disposer de renseignements sur les passagers d'un avion avant son arrivée au Canada. De cette manière, ils peuvent identifier à l'avance les personnes qui présentent un intérêt avant qu'elles ne passent la douane.
Le sénateur Banks : Je comprends. Ce que je veux savoir, c'est quelles sont les personnes ou les catégories de personnes visées par règlement. L'article 107.1 proposé énonce ce qui suit :
Le ministre peut, dans les circonstances et conditions prévues par règlement, exiger de toute personne ou catégorie de personnes visée par règlement qu'elle fournisse des renseignements réglementaires [...] ou y donne accès [...]
S'agit-il des employés de la compagnie aérienne?
M. Van Loan : S'il est indiqué qu'il s'agit de « personnes visées par règlement », cela signifie que ces personnes sont décrites dans le règlement, et on peut présumer qu'on saura de quoi il en retourne en consultant le règlement. Dans le cas qui nous occupe, cela sera déterminé à l'aide de la liste de passagers. Vous pouvez demander à la compagnie aérienne de vous fournir la liste des passagers de l'avion, y compris leur nom et leur date de naissance.
Le président : Et 32 autres types de renseignements.
M. Van Loan : D'après moi, il n'y en a que trois ou quatre.
Le président : Actuellement, il y en a 32.
M. Van Loan : Est-ce vrai? Les Américains ne nous en demandent que trois ou quatre.
Le président : Non, non. Ils en demandent 32, et nous faisons la même chose.
Le sénateur Moore : Je veux donner suite, à l'aide d'un exemple, à une question posée par le sénateur Mitchell et à propos de laquelle vous avez fait un commentaire, monsieur le ministre. Avec la mise en œuvre de ce projet de loi, s'il est adopté, et la saisie de marchandises illicites, nous en arrivons à la question du contrôle de ces marchandises. Je ne sais pas si vous avez lu les journaux d'aujourd'hui, mais on y apprenait que plus de 400 millions de dollars de marchandises de contrebande saisies par l'Agence des services frontaliers du Canada avaient été jetées dans des terrains d'enfouissement, que 70 p. 100 des dépôts de douane ou des locaux sous douane n'étaient pas surveillés de façon constante, que dans 15 installations, l'accès n'était pas contrôlé et que des non-fonctionnaires pouvaient y pénétrer, et que dans 23 des sites, il n'existait aucun mécanisme de contrôle des stocks. Selon la politique gouvernementale, l'ASFC doit remettre la plupart des drogues proscrites saisies à la GRC pour qu'elles soient incinérées; les employés l'ignoraient. Dans la plupart des cas, on détruisait la drogue en l'envoyant au terrain d'enfouissement le plus près. Toutes ces données proviennent d'un rapport de vérification interne rendu public, et concernent des questions que la vérificatrice générale avait portées à l'attention de l'ASFC en 2007.
J'aimerais d'abord savoir si vous étiez au courant des choses dont je viens de parler, et j'aimerais ensuite que vous me disiez quel cadre de travail vous entendez mettre en œuvre pour superviser la gestion, le contrôle et l'élimination des marchandises saisies.
M. Van Loan : Je suis au courant des faits que les médias ont rapportés aujourd'hui. Comme je n'ai pas encore consulté le rapport de vérification en tant que tel, je ne suis pas en position de faire des commentaires à ce moment-ci.
Le sénateur Moore : Ce rapport est affiché sur le site Web de l'ASFC. Je crois que vous trouverez qu'il s'agit d'un texte à la fois intéressant et alarmant.
Le président : Monsieur le ministre, j'ai plusieurs questions à vous poser. Je vais vous les poser dans aucun ordre particulier.
Vous avez soulevé la question du projet Shiprider. Quelques membres du comité ont eu l'occasion de se rendre sur place pour prendre connaissance de ce projet. Selon nous, il s'agissait d'un excellent programme. Il ne fonctionnait pas l'an dernier. Il ne fonctionnait pas du tout. Le commandant de la Garde côtière a dit à certains membres du comité qu'il était prêt à fournir autant de bateaux qu'il faudra pour accueillir les agents de la GRC que fournira le gouvernement. À l'heure actuelle, on prévoit construire quatre bateaux sur les Grands Lacs au Canada. Seulement 14 agents de la GRC patrouillent les quatre Grands Lacs et le fleuve St-Laurent jusqu'à la rivière Saguenay. Comment prévoyez-vous que le projet Shiprider fonctionnera? Nous croyons qu'il s'agit, en principe, d'un excellent programme, mais il semble cruellement sous-financé. De plus, il semble y avoir des lacunes sur le plan du personnel, sans compter qu'on semble manquer de volonté pour le faire avancer. Actuellement, personne ne fait respecter les lois fédérales entre Kingston et le Saguenay.
M. Van Loan : Le programme Shiprider était un projet pilote, et ce projet est terminé. À l'heure actuelle, nous sommes en discussion avec les Américains, et j'ose dire que ces discussions vont bon train, en vue d'en faire un programme permanent et à long terme. Ces discussions se poursuivent, et je ne peux donc vous dire quelle forme prendra le programme ni même s'il serait effectivement mis en place. Je vais probablement me faire réprimander pour m'être avancé aussi loin, mais j'ai bon espoir que le programme Shiprider sera mis en œuvre de façon permanente sous peu.
Le président : Vous vous obtiendrez de nombreux appuis de notre part si cela se réalise, car il semble s'agir d'une initiative aussi bonne que celle des équipes intégrées de la police des frontières à la différence qu'il s'agit d'un projet pour les voies maritimes. Cela est tout à fait judicieux.
Des questions ont également été posées en ce qui concerne les agents armés de l'ASFC. Pouvez-vous indiquer au comité si le déploiement d'agents armés sur la réserve d'Akwesasne pose actuellement quelque problème que ce soit?
M. Van Loan : Aucun des agents qui se trouvent à Akwesasne à l'heure actuelle n'est armé. Ils sont en cours de formation. Certains ont terminé leur formation. Toutefois, nous ne voulons pas entreprendre ce programme avant d'être convaincus que nous disposons d'un effectif suffisant pour l'exécuter comme il se doit.
Le président : Il ne s'agit pas, du moins à mon avis, monsieur, d'une question d'effectif. Il semble s'agir davantage d'une question de respect et de la manière dont nous abordons le problème avec les résidents d'Akwesasne. Il s'agit également de savoir si nous procédons en coopération avec eux ou en déployant un fort contingent.
M. Van Loan : Il s'agit d'un aspect de l'exécution appropriée du programme.
Le président : Les fonctionnaires de votre ministère et vous-même avez mentionné plus tôt qu'il n'y aurait qu'une seule vérification, qui serait effectuée à la ligne d'inspection primaire, mais il nous semble qu'il a deux vérifications, une à la sortie de la salle et une autre à la ligne d'inspection primaire. C'est à ce deuxième point de vérification que l'on vous indique, le cas échéant, que vous devez subir un examen secondaire.
M. Van Loan : Je ne vous ai pas suivi.
Le président : Plus tôt, vous avez mentionné qu'une seule vérification serait effectuée sur les personnes qui quittent les lieux, mais il nous semble qu'il faudra quand même qu'une personne se tienne à la porte pour diriger, au besoin, les personnes vers le contrôle secondaire.
M. Van Loan : Tout à fait. Je croyais avoir bien expliqué cela. Je voulais dire qu'il n'y aurait plus de vérification avant la ligne d'inspection primaire. Je n'avais pas prévu que vous comprendriez cela.
Le président : C'est bien.
Vous avez soulevé la question des ports. Nous n'en avions pas discuté auparavant, mais puisque vous en avez parlé, je souligne que les membres du comité ont reçu des agents des douanes des rapports concernant les « conteneurs fantômes », c'est-à-dire les conteneurs qui ne figurent pas sur le manifeste d'un navire. Par exemple, il se pourrait que 260 conteneurs soient inscris sur le manifeste d'un navire, mais que 266 conteneurs soient déchargés du navire. L'excédent ne peut être comptabilisé. De quelle manière la création de zones de contrôle des douanes permettra-t-elle de remédier à cette situation?
M. Van Loan : J'ose espérer que tout conteneur déchargé du navire n'ayant pas été déclaré en bonne et due forme sur le manifeste serait retenu pour être inspecté. Je suppose qu'il s'agit là de la pratique normale.
Le président : Le problème, c'est qu'ils ne peuvent pas être décelés à l'heure actuelle.
M. Van Loan : Les conteneurs ne peuvent pas être décelés?
Le président : C'est exact.
Mme Kerr-Perrott : Nous envisageons l'élaboration d'un plan des baies qui nous permettrait d'obtenir les renseignements relatifs à la cargaison de conteneurs et leur disposition précise à l'intérieur du navire. Nous allons nous pencher sur cette question. Nous allons connaître le nombre exact de conteneurs qui se trouvent sur le bateau et leur emplacement précis.
Le président : D'après vous, quand ce programme sera-t-il en vigueur?
Mme Kerr-Perrott : Je ne peux vous fournir une date exacte, mais je peux m'informer et vous la fournir par la suite.
Le président : Merci. Vous fournirez cette information au greffier.
Mme Kerr-Perrott : Oui.
Le président : Parlons des zones mixtes dans les aéroports. Hier, nous n'avions pas beaucoup de travail et j'ai passé quatre ou cinq heures à me promener dans l'aéroport Pearson. Près de la zone de dépôt des bagages, la distance qui sépare la file pour passer aux douanes et la file des vols intérieurs n'est pas plus grande que celle qui nous sépare. Les gens s'y promènent librement, sans qu'on les dérange, qu'on les arrête ou qu'on vérifie leur laissez-passer.
Je suis conscient du fait qu'une grande partie de ce problème relève probablement de Transports Canada. Toutefois, puisque vous proposez un nouveau système qui s'adresse principalement aux personnes qui s'occupent de la manutention des bagages ou des outils ou aux personnes qui travaillent près des aéronefs, pouvez-vous me dire comment ce système améliorera la situation?
M. Van Loan : Vous avez raison de dire qu'il s'agit d'une question qui relève principalement de Transports Canada, et nous devons examiner la manière dont fonctionne chaque aéroport. D'après ce que je crois comprendre, c'est ce que vous faisiez avec le ministre des Transports.
Le président : Je ne peux pas confirmer ni nier quelque information que ce soit relativement à la personne avec laquelle je me trouvais.
M. Van Loan : Vous avez soulevé des questions légitimes, mais comme vous l'avez mentionné, elles relèvent principalement de Transports Canada.
Le président : Le fait que les personnes qui travaillent autour des avions font leur travail sans subir quelque contrôle que ce soit, contrairement aux passagers des avions, soulève un intérêt particulier, en plus d'avoir été mentionné dans un certain nombre de rapports du comité. Comme mes amis et moi-même l'avons expliqué hier, la procédure actuelle consiste à glisser une carte biométrique et à poser le doigt sur un lecteur d'empreintes digitales. Toutefois, les sacs des employés ne sont pas inspectés. De fait, nous avons discuté avec une personne qui nous a dit que personne n'avait vérifié son sac, sa boîte à lunch ou son sac à dos au cours des trois dernières années.
Êtes-vous en train de proposer qu'à l'avenir, les sacs des personnes qui entrent dans une zone de contrôle des douanes ou qui sortent d'une telle zone seront inspectés? Cette mesure fera-t-elle partie de la procédure à laquelle devront se soumettre les personnes qui s'occupent des bagages?
M. Van Loan : Le projet de loi permettrait de mettre en place une telle procédure à l'intérieur des zones de contrôle des douanes. La difficulté réside dans le fait que le projet de loi ne prévoit rien pour ce qui est des zones où se trouvent les passagers des vols intérieurs et les personnes qui travaillent dans ces zones. Bon nombre d'employés travaillent dans les deux zones, parfois dans l'une et parfois dans l'autre. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous voulons que certains de ces pouvoirs soient accordés aux agents : pour leur permettre d'inspecter les personnes qui se déplacent d'une zone à l'autre.
Le président : À l'aérogare 1, les zones se chevauchent. Les deux zones se trouvent dans un même lieu.
M. Van Loan : Lorsque vous dites qu'elles se chevauchent...
Le président : Imaginez que nous nous trouvons dans la salle en question. La file pour les vols intérieurs se trouverait à l'endroit où vous êtes assis, et la file pour passer aux douanes se trouverait à l'endroit où je suis assis.
M. Van Loan : Est-ce que vous parlez du déplacement des bagages ou du déplacement des personnes?
Le président : Vous pouvez prendre un sac ici et le déplacer dans l'autre file là-bas, et personne ne s'en apercevrait.
M. Van Loan : Il s'agit d'une préoccupation légitime qui doit être prise en considération. C'est tout ce que je peux dire.
Le président : Croyez-vous que les mesures législatives proposées permettraient de régler ce problème?
M. Van Loan : Je ne pense pas que ces mesures législatives soient même nécessaires pour régler ce problème. En tout cas, l'ASFC devrait veiller à ce que ces zones soient suffisamment sécuritaires. Cela devrait être fait, et il n'est pas nécessaire de mettre en place des mesures législatives pour cela. Je n'avais jamais entendu parler d'une situation comme celle que vous avez évoquée.
Le président : Je suis prêt à m'y rendre avec vous quand vous le voudrez.
Quelle serait l'incidence des mesures législatives proposées sur les services commerciaux, sur l'aviation générale?
M. Van Loan : C'est une très bonne question. Y aura-t-il une quelconque incidence sur l'aviation générale?
Mme Kerr-Perrott : Pas à ce que je sache.
Le président : Monsieur, il s'agit d'un secteur où personne ne fait l'objet d'une inspection ou d'une fouille. Des aéronefs transportant jusqu'à 120 personnes arrivent et partent régulièrement...
M. Van Loan : Pour ce qui est de l'aviation générale, si les personnes qui la pratiquent sont dans une situation où elles doivent atterrir à un aéroport — non pas un aéroport de première catégorie, mais disons un aéroport de deuxième ou de troisième catégorie —, elles devront toujours se présenter aux agents de l'ASFC. Elles devront toujours passer par une zone de contrôle des douanes. La question sera de savoir comment, dans la pratique, cela sera mis en place dans chaque aéroport.
Le président : C'est exact, mais s'il s'agit d'un aéroport de première catégorie — l'aéroport Pearson, par exemple —, un appel téléphonique sera fait à l'ASFC. La plupart du temps, l'ASFC répond car elle est située à proximité — pas toujours, mais la plupart du temps. Comment le système sera-t-il changé? Les gens seront-ils inspectés avant de monter à bord d'un avion et après en être descendus? Est-ce que des agents demanderont à vérifier leurs bagages? Est-ce que des agents examineront l'intérieur de l'aéronef?
M. Van Loan : Pour parler de manière hypothétique, s'ils veulent établir une zone de contrôle des douanes, ils devront examiner chacun des aéroports en particulier. Je ne sais pas comment s'y prennent les agents de l'ASFC pour effectuer leurs fouilles. Je ne suis pas au courant de cette procédure. Je présume que les solutions varieraient en fonction des aéroports.
Le président : En vérité, dans tous les aéroports de première catégorie, il y a une séparation entre les vols commerciaux et les vols généraux, qui atterrissent un peu plus loin.
M. Van Loan : Les passagers d'un vol général ont tout de même l'obligation de se présenter à un agent des Services frontaliers du Canada à leur arrivée, et ils seront donc assujettis aux dispositions du projet de loi.
Le président : Cela dit, aucun agent des Services frontaliers du Canada ne se trouve à cet endroit. Vous devez attendre 15 ou 20 minutes avant qu'un agent n'arrive pour discuter avec vous.
M. Van Loan : C'est exact.
Le sénateur Banks : Dans l'intervalle, vos bagages pourraient avoir disparu.
Mme Allen : Il est probablement impossible à ce moment-ci de dire quoi que ce soit à ce sujet. Je crois comprendre que nous poursuivons la discussion sur la désignation des zones de contrôle des douanes.
Mme Kerr-Perrott : C'est exact. Nous continuons d'examiner la question des zones qui seraient désignées comme zones de contrôle des douanes.
Le président : Je serais très heureux si vous me disiez que les zones dont nous parlions seront désignées comme des zones de contrôle des douanes.
M. Van Loan : J'imagine que cette possibilité devra être prise en considération, mais chaque aéroport procédera d'une façon différente. Comme nous ne faisons qu'évoquer des hypothèses, il est difficile de dire comment cela fonctionnera.
Mme Allen : Il ne faut pas oublier que ce projet de loi a été élaboré pour lutter contre les complots à l'interne et protéger la sécurité nationale. Dans la mesure où l'analyse démontre que les zones dont vous parlez présentent une menace particulière à ces égards, l'ASFC se penchera vraisemblablement sur la question. Autrement, je ne fais que parler de façon générale. Je ne dispose pas de suffisamment d'informations pour dire si cela serait le cas.
Le président : Je crois qu'il est juste de dire que, selon les membres du comité qui s'y sont rendus, ces endroits constituent le « trou noir » de l'aviation sur le plan de la contrebande et des menaces à la sécurité.
Le sénateur Tkachuk : À mon avis, toutes les personnes qui descendent d'un avion privé doivent être inspectées. Nous devrions peut-être inviter quelques témoins pour parler de cela dans le cadre d'une prochaine réunion, de manière à savoir ce qui se passe exactement dans l'aérogare 1 à Toronto.
Le président : Nous devrions peut-être faire cela avant de passer à l'étude article par article?
Le sénateur Tkachuk : Non. Il s'agit d'une question distincte.
Le président : Non, ce n'est pas une question distincte. J'aimerais savoir s'il est possible de les recevoir. Vous nous avez soumis cette suggestion, sénateur Tkachuk, et je suis heureux d'y donner suite.
Le sénateur Tkachuk : C'est à mon tour d'être d'accord avec vous.
Le président : Nous allons passer à l'étude article par article après avoir entendu ces témoins, si c'est ce que vous proposez.
Le sénateur Tkachuk : Monsieur le président, j'ai simplement posé la question.
Le président : Les questions doivent être posées au ministre, pas à moi.
M. Van Loan : À mon avis, pour obtenir des réponses véritablement pertinentes à propos de la façon de faire, vous devriez attendre que tout soit mis en place de façon concrète. À l'heure actuelle, ces témoins pourraient vous fournir des renseignements appréciables sur la manière dont cela pourrait fonctionner aujourd'hui. Ils pourraient vous fournir des renseignements très intéressants sur la manière dont cela pourrait être mis en œuvre. Aucun de ces aspects n'exige un report de l'adoption du projet de loi.
Pour obtenir des renseignements sur les résultats concrets découlant des mesures législatives, vous devez les adopter. Je ne vois aucune raison de ne pas procéder aujourd'hui à l'étude article par article.
Le président : Si cela était le cas, je n'aurais pas l'occasion de surveiller la conduite du sénateur Tkachuk.
Le sénateur Wallin : Êtes-vous en train de proposer votre comparution à titre de témoin?
Le président : Non, car cela vous donnerait une trop belle occasion de jouer aux gérants d'estrade.
Monsieur le ministre, si vous me le permettez, j'aimerais poser une dernière question qui n'a vraiment rien à voir avec le projet de loi. Le sénateur Collins, du Maine, est le membre supérieur du Comité de la sécurité intérieure. Elle a proposé une harmonisation des exemptions accordées aux personnes qui traversent la frontière canado-américaine. De façon générale, êtes-vous en faveur de cette proposition?
M. Van Loan : Que signifie « l'harmonisation des exemptions »?
Le président : Je parle des personnes qui vont de l'autre côté de la frontière pour une journée et du fait de leur permettre de ramener au pays une certaine quantité de marchandises. Il s'agit d'une question de finances.
M. Van Loan : Les questions relatives aux exemptions de droits de douane relèvent du ministère des Finances du Canada.
Le président : Oui, mais de façon générale, êtes-vous favorable à cette proposition?
M. Van Loan : Cette question devrait être adressée au ministère des Finances.
Le président : Merci. J'étais certain que j'obtiendrais une bonne réponse.
Le temps qui nous était alloué est écoulé. Monsieur le ministre, vous avez répondu de façon coopérative à toutes les questions du comité, et nous vous sommes reconnaissants de vous être présenté devant nous. Nous sommes conscients du fait que vous avez eu de la difficulté à vous soustraire à votre obligation de voter, mais au nom du comité, je vous remercie d'être venu ici pour discuter du projet de loi avec nous.
Messieurs les sénateurs, nous avons deux petits budgets. Premièrement, un budget de 1 200 $ pour les repas de travail. J'ai besoin d'une motion, s'il vous plaît.
Le sénateur Tkachuk : J'en fais la proposition.
Le président : Souhaitez-vous en discuter? Est-elle adoptée?
Des voix : D'accord.
Le président : Y en a-t-il qui sont contre? Y a-t-il des abstentions? La motion est adoptée.
Le deuxième budget est celui de 1 600 $ pour les repas de travail pour l'étude spéciale. J'ai besoin d'une motion, s'il vous plaît.
Le sénateur Manning : J'en fais la proposition.
Le président : Êtes-vous tous d'accord?
Des voix : D'accord.
Le président : Y en a-t-il qui sont contre? Y a-t-il des abstentions? La motion est adoptée.
Est-ce que tout le monde a reçu une copie du document portant sur l'étude article par article du projet de loi S-2?
Est-ce que les membres du comité conviennent de procéder à l'étude article par article du projet de loi S-2, Loi modifiant la Loi sur les douanes?
Des voix : D'accord.
Le président : Y en a-t-il qui sont contre? Adopté.
L'étude du titre est-elle reportée?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 1 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 2 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 3 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 4 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 5 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 6 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 7 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 8 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 9 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 10 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 11 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 12 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 13 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 14 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 15 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 16 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 17 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le sénateur Banks : Je propose que l'article 17 soit non pas adopté, mais modifié par suppression des lignes 27, 28, 29 et 30 de l'article 164.1(2) proposé, qui dit :
L'incorporation par renvoi d'un document dans un règlement ne lui confère pas, pour l'application de la Loi sur les textes réglementaires, valeur de texte réglementaire.
Le président : À quelle page se trouve cela, s'il vous plaît?
Le sénateur Banks : À la page 7.
Le président : Il s'agit de l'article 17, à partir de quelle ligne?
Le sénateur Banks : La ligne 27.
Le sénateur Tkachuk : Avez-vous besoin de quelqu'un pour appuyer votre motion, sénateur Banks?
Le président : Non, pas en comité.
Souhaite-t-on en débattre? Nous avons l'occasion de le faire, si quelqu'un en exprime le désir.
Comme on ne semble pas vouloir en discuter, je vais mettre la question aux voix.
Vous plaît-il d'adopter la motion modifiée?
Des voix : D'accord.
Le président : Y en a-t-il qui sont contre? Y a-t-il des abstentions? La motion est adoptée.
L'article 17 modifié est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 18 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Le titre est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Le projet de loi modifié est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Le comité souhaite-t-il discuter des observations à joindre au rapport?
Des voix : Non.
Le président : Il n'y a pas d'observations. Est-il convenu que je fasse rapport au Sénat du projet de loi non modifié et sans observations dès que possible?
Des voix : D'accord.
Le président : Merci. Nous avons procédé le plus rapidement possible, et je vous sais gré de votre coopération.
(La séance est levée.)