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Délibérations du Comité sénatorial permanent de la
Sécurité nationale et de la défense

Fascicule 7 - Témoignages du 8 juin 2009


OTTAWA, le lundi 8 juin 2009

Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit aujourd'hui, à 16 h 6, afin d'examiner la politique de sécurité nationale du Canada (sujet : sécurité à la frontière) et d'en faire rapport.

Le sénateur Colin Kenny (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Je déclare ouverte la présente réunion du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense. Je m'appelle Colin Kenny et je suis président du comité.

Avant de commencer, j'aimerais présenter les membres de notre comité. Tout à fait au bout, à ma droite, se trouve le sénateur Dennis Dawson. Lorsque M. Dawson a commencé sa carrière sur la scène publique, il était l'un des plus jeunes conseillers scolaires du Québec et il a été élu à la présidence du deuxième conseil scolaire le plus important de cette province. En 1977, il remportait les élections et devenait l'un des plus jeunes députés fédéraux de l'histoire du Canada. Il a servi les électeurs de la circonscription de Louis-Hébert pendant trois mandats consécutifs. Le sénateur Dawson est membre du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international, du Comité permanent de la régie interne, des budgets et administration et du Comité sénatorial permanent des langues officielles, ainsi que du Comité sénatorial permanent des transports et des communications. C'est un sénateur très occupé.

[Français]

À sa gauche, le sénateur Pierre Claude Nolin, du Québec. Il est avocat et a été nommé sénateur en juin 1993. Le sénateur Nolin est présentement vice-président du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles et est également membre du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement.

[Traduction]

À gauche du sénateur Nolin se trouve le sénateur Wilfred Moore, nommé au Sénat en 1996. Il représente la division sénatoriale de Stanhope Street-South Shore, en Nouvelle-Écosse. Il a acquis une vaste expérience au niveau municipal à Halifax-Dartmouth et a été membre du conseil des gouverneurs de l'Université Saint Mary's. Il est membre du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce et du Comité mixte de l'examen de la réglementation.

Juste à ma droite est assis le sénateur Michael Meighen, de l'Ontario. Il a été nommé au Sénat en 1990. Il est avocat, membre des Barreaux du Québec et de l'Ontario et il préside actuellement le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce.

Tout de suite à ma gauche se trouve le sénateur Pamela Wallin. Elle est originaire de la Saskatchewan et a été nommée au Sénat en janvier 2009. Après une longue carrière en journalisme, le sénateur Wallin a exercé les fonctions de consule générale du Canada à New York et elle a siégé également, à la demande du premier ministre Harper, au groupe d'experts indépendant sur le rôle futur du Canada en Afghanistan. Elle est vice-présidente de notre comité et est par ailleurs membre du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international.

À sa gauche est assis le sénateur Jim Munson, éminent journaliste canadien, originaire de l'Ontario. De 1987 à 1992, il était chef de pupitre du réseau de télévision CTV à Beijing et a assuré la couverture d'événements tels que le massacre de la place Tiananmen. Il a été chef de pupitre et correspondant principal à Halifax, en Nouvelle-Écosse, et à Londres, en Angleterre. Il a fait des reportages sur la guerre entre l'Iran et l'Irak, sur la guerre du Golfe et sur les Philippines. Le sénateur Munson est membre du Comité sénatorial permanent des droits de la personne et du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration.

À sa gauche se trouve le sénateur Fabian Manning, qui a consacré toute sa carrière à servir les citoyens de Terre- Neuve-et-Labrador dans les trois ordres de gouvernement. Il a été nommé au Sénat en janvier 2009. Il préside également le caucus de l'Atlantique du gouvernement conservateur et est membre du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans.

Tout à fait au bout de la table se trouve le sénateur Grant Mitchell, qui a été nommé au Sénat en mars 2005. Originaire d'Edmonton, en Alberta, il a fait carrière dans la fonction publique, dans le secteur des finances et sur la scène politique en Alberta. Il est vice-président du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles et membre du Comité sénatorial permanent des finances nationales.

Honorables sénateurs, nous nous penchons aujourd'hui sur la sécurité des frontières canadiennes, un aspect extrêmement important pour le Canada. Les exportations du Canada vers les États-Unis s'élèvent à environ 375 milliards de dollars par an et les exportations annuelles des États-Unis au Canada s'élèvent à environ 227 milliards de dollars.

En 2007, on estime que les Canadiens ont fait 42 millions de visites aux États-Unis et, pour la même période, les Américains ont fait quelque 25 millions de visites au Canada.

La présente rencontre a pour but de préparer le comité aux déplacements qu'il effectuera cet été le long de la frontière canado-américaine. Nous accueillons aujourd'hui deux témoins venus parler de ce sujet afin de nous aider à saisir les défis que présente la sécurité de la frontière. Ce sont le commissaire adjoint Mike Cabana, Opérations fédérales et internationales, et le surintendant Warren Coons, directeur du Programme des équipes intégrées de la police des frontières.

Monsieur le commissaire adjoint Cabana, je pense que vous aimeriez présenter quelques brèves observations préliminaires.

Mike Cabana, commissaire adjoint, Opérations fédérales et internationales, Gendarmerie royale du Canada : Oui, monsieur le président. Bon après-midi. Je voudrais commencer par remercier le comité de nous offrir l'occasion de discuter de l'importance de maintenir l'intégrité de nos frontières et de parler de l'examen permanent par le comité des questions liées à la sécurité de la frontière et des conseils qu'il donne à ce sujet.

Afin de répondre à vos questions de la manière la plus complète possible, je suis accompagné aujourd'hui du surintendant Warren Coons, qui est directeur du Programme des équipes intégrées de la police des frontières.

Dans mes observations préliminaires, je vous fournirai aujourd'hui un petit échantillon de ce que fait la GRC dans les secteurs terrestres, maritimes et aériens et je donnerai un aperçu de ce que la GRC croit nécessaire de mettre de l'avant.

Avant de passer à ces points, j'aimerais, monsieur le président, décrire le fondement sur lequel repose notre stratégie visant la sécurité des frontières. La stratégie de la GRC reconnaît qu'une frontière intelligente et sécuritaire repose sur une approche équilibrée, polyvalente et axée sur le renseignement, qui se manifeste par une intégration améliorée et qui exige une compréhension claire de la menace et des risques à la frontière; une utilisation efficace du renseignement, de la technologie et du personnel; des partenariats avec les intervenants au pays et à l'étranger.

[Français]

Les organisations criminelles raffinées exploitent la topographie, les vulnérabilités de la population frontalière et les failles en matière de répression pour faire circuler clandestinement des personnes, des stupéfiants, de l'argent comptant, des armes à feu et du tabac de contrebande entre le Canada et les États-Unis.

Cette activité criminelle non seulement compromet l'intégrité de notre frontière, mais représente aussi une réelle menace à la sécurité et à la prospérité économique des deux pays.

[Traduction]

Le plus souvent, cependant, les individus que nous interceptons à la frontière sont remplaçables pour les organisations criminelles. Dans de nombreux cas, ils sont le menu fretin qui se plie aux ordres de ses maîtres. Il est essentiel de les arrêter, évidemment, mais l'objectif visé devrait être de les arrêter avant qu'ils n'atteignent la frontière.

Soyons clairs, monsieur le président : je ne dis pas que la frontière n'a pas d'importance. Évidemment, elle en a. Bien que certaines personnes considèrent la frontière comme notre première ligne de défense, il faudrait aussi la considérer comme l'une des dernières lignes de défense et une importante ligne de démarcation. Il s'agit d'un endroit où les criminels sont vulnérables.

La GRC travaille en étroite collaboration avec ses homologues aux échelons régionaux, nationaux et internationaux, afin de préciser les menaces, les risques et les vulnérabilités à la frontière. Dans le secteur aérien, trois rôles policiers distincts sont assumés dans les aéroports : celui de la police fédérale, celui du service de police local compétent et celui des services de protection. Même si la GRC est chargée de l'application des lois fédérales dans tous les aéroports, la Section de l'exécution des lois fédérales dans les aéroports est sur place uniquement dans les aéroports internationaux de Montréal, de Toronto et de Vancouver, mais il y a une sous-section non structurée ici, à l'aéroport d'Ottawa.

La Section de l'exécution des lois fédérales dans les aéroports travaille en collaboration avec tous les organismes de sécurité et d'application de la loi dans les aéroports nationaux, tels que l'Agence des services frontaliers du Canada, Transports Canada, Citoyenneté et Immigration Canada, l'Administration canadienne de la sûreté du transport aérien et les services de police provinciaux et municipaux.

La Section de l'exécution des lois fédérales dans les aéroports travaille également avec des organismes étrangers comme l'Immigration and Customs Enforcement et le Federal Bureau of Investigation des États-Unis.

[Français]

En 2008, la GRC, en partenariat avec des intervenants clés, a exécuté le projet SPAWN, une évaluation de l'activité criminelle et de l'infiltration du crime organisé dans huit aéroports de catégorie 1 au Canada.

[Traduction]

Le projet SPAWN a repéré des failles et a proposé des recommandations afin d'améliorer la sécurité. À cette fin, un certain nombre d'améliorations ont déjà été apportées et des progrès ont été réalisés.

La GRC collabore avec ses partenaires afin d'améliorer l'échange de renseignements en étudiant certaines options par l'entremise du comité de la sûreté aérienne de l'Association canadienne des chefs de police. De plus, la Direction des renseignements criminels de la GRC a conclu récemment une nouvelle entente avec Transports Canada qui améliorera la vérification des antécédents des travailleurs employés dans les ports et les aéroports.

[Français]

Dans le secteur maritime et portuaire, la GRC a lancé plusieurs programmes et initiatives afin de cibler les réseaux susceptibles d'utiliser les ports, les côtes, les voies navigables et les frontières maritimes du Canada pour se livrer à leurs activités. Elle a créé notamment les équipes intégrées de la police portuaire, les équipes de la sûreté maritime, l'équipe nationale de coordination de la sécurité côté eau, les groupes tactiques d'intervention en sûreté maritime et le Centre des opérations de la sûreté maritime des Grands Lacs.

[Traduction]

Par exemple, le Centre des opérations de la sûreté maritime des Grands Lacs et Voie maritime du Saint-Laurent, sous la direction de la GRC, vise à renforcer la sécurité du réseau de transport maritime et des limites maritimes du Canada. Le but principal d'un centre des opérations de la sécurité maritime, COSM, est de fournir des renseignements susceptibles de donner lieu à une action et de communiquer ces renseignements aux autorités compétentes en temps utile. Le Centre des opérations de la sécurité maritime des Grands Lacs et de la Voie maritime du Saint-Laurent est pleinement intégré et regroupe des ministères fédéraux responsables de la sûreté maritime ou chargés d'offrir un soutien en matière d'actifs et une expertise maritime, en l'occurrence la GRC, l'Agence des services frontaliers du Canada, l'ASFC; le ministère de la Défense nationale, le MDN; la Garde côtière canadienne et Transports Canada. Par ailleurs, le ministère de la Justice, Sécurité publique Canada et les services de police provinciaux et municipaux locaux sont partenaires du programme. La GRC fait également partie des COSM situés sur les côtes à Esquimalt et Halifax qui sont dirigés par le ministère de la Défense nationale.

Dans le secteur terrestre, le Programme des équipes intégrées de la police des frontières, le programme EIPF, constitue toujours un élément clé de la stratégie de la GRC visant la sécurité des frontières. Les EIPF sont des équipes d'application de la loi composées de plusieurs organismes qui mettent l'accent sur une approche harmonisée et intégrée des efforts conjoints du Canada et des États-Unis en vue de déceler, de perturber et de réprimer les menaces à la sécurité nationale, les activités du crime organisé et toute autre forme de criminalité entre les points d'entrée de la frontière canado-américaine.

[Français]

Les EIPF encouragent également la participation des services de police fédéraux, municipaux et provinciaux, d'État et des Premières nations, ainsi que des organismes et ministères partenaires.

[Traduction]

On a délimité 15 régions d'opérations pour les EIPF et des équipes intégrées ont été constituées à 24 endroits différents le long de la frontière commune entre le Canada et les États-Unis. Les cinq principaux organismes qui composent les EIPF sont la GRC, l'Agence des services frontaliers du Canada, la Customs and Border Protection Border Patrol des États-Unis, l'Immigration and Customs Enforcement des États-Unis et la Garde côtière des États- Unis. Ces organismes s'appliquent à former et à maintenir des partenariats solides, à échanger des renseignements et à se réunir afin de discuter des problèmes et de se transmettre les pratiques exemplaires et les évaluations de la menace. Les EIPF ont permis d'ouvrir les voies de communication entre les services de police de nos deux pays et de faire front commun contre les menaces qui se présentent le long de la frontière que nous partageons.

Les évaluations conjointes de la menace et des risques sont des exercices réguliers qui sont à la base de l'approche de la GRC axée sur la gestion du risque afin de renforcer la sécurité entre les points d'entrée. Les évaluations de la menace ont également indiqué que les organisations criminelles, qui représentent la menace la plus répandue le long de la frontière, s'adaptent extrêmement bien au renforcement des mesures de répression. D'où la nécessité d'une stratégie frontalière globale, assortie de solutions souples pour faire face au déplacement de l'activité criminelle d'une région géographique à l'autre.

Le concept des opérations transfrontalières de sûreté maritime intégrée communément appelé « Shiprider », est une nouvelle approche relevant de la structure de gouvernance des EIPF. Il s'agit d'une approche opérationnelle intégrée à l'égard de la sûreté maritime dans les eaux communes, aussi bien dans les eaux intérieures que dans les eaux côtières, dirigée par la GRC et la Garde côtière des États-Unis. Elle donne lieu à des arrangements réciproques selon lesquels des agents d'application de la loi canadiens et américains effectuent des opérations à bord de navires appartenant à chacun des deux organismes dans les eaux souveraines des deux pays. Afin de ne pas abuser de votre temps, monsieur le président, je n'élaborerai pas plus, mais je répondrai avec plaisir aux questions que le comité pourrait avoir concernant cette importante initiative.

Dans un avenir immédiat, le Programme de l'intégrité des frontières de la GRC se penchera spécifiquement sur l'absence d'agents en uniforme chargés de recueillir des renseignements entre les points d'entrée. Il s'agit là en effet d'un besoin qui ne peut être comblé à partir des ressources existantes. La GRC n'a pas de patrouille frontalière et ne compte pas en constituer une, tout simplement parce que la patrouille systématique de notre longue frontière dans le but de déjouer des activités criminelles ne serait pas une utilisation efficace des ressources limitées dont nous disposons pour l'application de la loi.

Cependant, la GRC et l'ASFC étudient certaines options afin de renforcer la sécurité à la frontière, notamment la mise sur pied d'un projet pilote visant à accroître la présence policière entre les points d'entrée. Ce projet aura pour but de compléter le modèle des EIPF en ajoutant une présence policière visible au mandat de police fédérale de la GRC au Québec. Les principaux objectifs de ce projet viseront à accroître la participation de la collectivité grâce à la sensibilisation et à solliciter sa collaboration en matière de sécurité frontalière; à compléter le travail des EIPF établies; à ajouter une présence policière visible au moyen d'agents en uniforme chargés de recueillir des renseignements dans des secteurs nécessitant une présence accrue; à fournir une capacité d'intervention composée d'agents en uniforme et de véhicules portant les couleurs de la police en cas d'incident se produisant aux points d'entrée et entre ces derniers.

[Français]

Même s'il fallait effectuer d'autres consultations internes et externes avec les intervenants concernés, la proposition devrait être achevée très bientôt.

[Traduction]

Pour terminer, monsieur le président, je peux vous assurer que nous cherchons toujours des possibilités d'amélioration et que nous examinons constamment des initiatives nouvelles et innovatrices pour contrer les menaces en évolution constante. En matière de sécurité frontalière, nous ne devons jamais nous montrer satisfaits ni relâcher notre vigilance. Pour pouvoir cibler efficacement les organisations criminelles, l'application de la loi doit porter à la fois sur la frontière et s'étendre à l'intérieur du territoire.

Monsieur le président, j'aimerais remercier le comité de nous avoir invités ici aujourd'hui. Si vous avez des questions, nous nous ferons un plaisir d'y répondre.

Le président : Merci beaucoup, monsieur le commissaire adjoint Cabana. Avant de commencer, j'aimerais vous demander brièvement quelques précisions.

À la page 6, vous mentionnez la Section de l'exécution des lois fédérales dans les aéroports, la SELFA, et une sous- section non structurée qui existe à Ottawa. Qu'est-ce qu'une section non structurée par rapport à une section structurée?

M. Cabana : Une section structurée dispose de ressources qui lui ont été conférées expressément en vue de sa création. La section qui existe actuellement à Ottawa a été créée à partir des ressources existantes. On pourrait prétendre qu'elle risque d'avoir un impact négatif sur nos autres initiatives. La décision de mettre en œuvre une équipe à Ottawa s'appuie sur des renseignements que nous avons en notre possession indiquant qu'une présence accrue serait utile à l'aéroport d'Ottawa.

Le président : Merci.

Le sénateur Wallin : Certains considèrent la frontière comme la première ligne de défense, mais vous avez dit que, quant à vous, vous préféreriez la considérer comme la dernière ligne de défense. J'aimerais vous ramener en arrière, afin de replacer les discussions concernant la frontière dans le contexte de nos relations avec les États-Unis après le 11 septembre. C'est à ce moment-là que fut présentée pour la première fois la notion de périmètre au cours de discussions avec le gouvernement de l'époque aux États-Unis sur la question de savoir si ce périmètre serait une menace à la souveraineté du Canada, entre autres.

La notion de périmètre de sécurité met expressément l'accent sur le 49e parallèle et sur notre longue frontière. Comment notre raisonnement a-t-il évolué depuis cette époque où nous ne voulions pas mettre l'accent sur le périmètre et comment nous en sommes venus à l'accepter?

M. Cabana : Merci pour votre question, madame le sénateur. Le modèle que nous préconisons n'a pas énormément changé. Nous reconnaissons l'importance d'une approche équilibrée dans le maintien de la sécurité à la frontière. Les organisations criminelles qui franchissent la frontière canado-américaine n'exercent pas leurs activités à la frontière. Elles sont implantées dans des grands centres ou à l'étranger.

Pour nous, le modèle consiste à repousser plus loin la frontière, tout en mettant l'accent sur la limite réelle et en s'efforçant de recueillir des renseignements dans les grands centres et à l'étranger afin de mieux savoir à quoi le Canada doit s'attendre.

Le sénateur Wallin : Nous maintenons cette optique, puisque, comme vous l'avez fait remarquer, nous ne pouvons pas véritablement patrouiller toute la frontière le long du 49e parallèle, par exemple.

M. Cabana : En effet.

Le sénateur Wallin : Nous tentons de pousser ces frontières vers l'intérieur — au nord et au sud plutôt que vers l'est et l'ouest.

M. Cabana : Nous repoussons aussi les frontières vers l'est et l'ouest. Nous entreprenons des initiatives et nous déployons des ressources à l'étranger dans le but d'échanger des renseignements avec des organismes étrangers d'application de la loi afin d'être en mesure de reconnaître la menace qui vise nos frontières, aussi bien à l'est et à l'ouest, qu'à la frontière nord-sud, avant que cette menace ne parvienne jusqu'ici.

Le sénateur Wallin : Le Canada a joué un rôle important dans l'approche générale de la frontière intelligente. On commence maintenant à parler du programme « Shiprider » et d'autres initiatives. Là encore, comment les priorités ont-elles été établies? Quel était le concept de départ? Pourquoi avons-nous procédé dans cet ordre-là?

M. Cabana : En fait, madame le sénateur, je n'étais pas encore en poste. Il est difficile pour moi de faire la genèse du système et de vous indiquer les raisons précises qui ont amené à choisir certaines initiatives plutôt que d'autres. Par exemple, le modèle des EIPF fut un des premiers à être privilégiés.

Le sénateur Wallin : En effet.

M. Cabana : Le modèle EIPF était en place avant le 11 septembre. Il y avait, en Colombie-Britannique, une section EIPF qui donnait d'assez bons résultats. À l'époque, c'était considéré comme une excellente pratique et ce modèle fut adopté immédiatement comme un moyen potentiel de protéger nos frontières communes.

Le sénateur Wallin : Sans aller au-delà des paramètres de sécurité évidents relatifs à ce dont vous pouvez tous les deux parler aujourd'hui sans révéler tous les détails du traitement que nous réservons aux contrevenants, vous avez parlé d'une approche axée sur le renseignement et vous faites la distinction entre les questions de sécurité nationale et les menaces criminelles. Pouvez-vous nous expliquer votre point de vue à ce sujet?

M. Cabana : C'est une question intéressante. La démarcation entre les deux est peut-être un peu floue. La criminalité d'aujourd'hui sera peut-être une menace à la sécurité nationale demain. Monsieur Coons, vous pouvez répondre vous aussi, si vous le voulez, mais dans le contexte des EIPF, toutes les interceptions à la frontière nous permettent de produire des renseignements que nous partageons avec nos équipes chargées de la sécurité nationale. Si ces équipes possèdent des informations qu'ignore notre équipe chargée d'intercepter les criminels, elles nous permettent d'effectuer la bonne évaluation et de prendre les mesures appropriées.

Le sénateur Wallin : Et dans l'autre sens? Quelles sont les informations transmises par les équipes de la sécurité nationale à celles qui s'occupent des activités criminelles?

M. Cabana : Le flux d'information entre nos équipes chargées de la sécurité nationale et celles qui œuvrent dans le secteur des activités criminelles est quelque peu limité. Là encore, tout repose sur le principe de connaissance sélective. Si nos initiatives ou nos équipes de lutte contre les activités criminelles ont un rôle à jouer dans l'enquête sur une question de sécurité nationale, elles sont mobilisées et nous leur transmettons les renseignements. Essentiellement, on leur confie certaines actions.

Le sénateur Wallin : Est-ce aux personnes concernées d'effectuer l'évaluation?

M. Cabana : Absolument. Tout se fait au cas par cas.

Le sénateur Wallin : Je vais m'arrêter là, à moins que vous ayez quelque chose à ajouter, monsieur Coons.

Warren Coons, directeur, Programme des équipes intégrées de la police des frontières (EIPF), Gendarmerie royale du Canada : Non, je vais me contenter de faire écho aux commentaires du commissaire adjoint Cabana. Les renseignements concernant la sécurité nationale recueillis par les EIPF se prêtent essentiellement à un transfert dans un seul sens. L'objectif visé est de répondre aux besoins de notre pays en matière de sécurité nationale. C'est la tâche qui incombe aux enquêteurs spécialisés qui sont les mieux placés pour se pencher sur les questions de sécurité nationale. S'il est nécessaire de transmettre certains renseignements à d'autres enquêteurs au sein de l'organisation, nous en sommes avisés. Nous ne prévoyons pas d'interaction entre les deux à partir des sections chargées de la sécurité nationale.

Le sénateur Wallin : Merci.

[Français]

Le sénateur Nolin : Merci de vous être déplacés cet après-midi pour participer à nos travaux. Monsieur le commissaire adjoint Cabana, je voudrais explorer avec vous le service de la GRC en ce qui concerne la sécurité de la frontière canado-américaine au Québec. J'aimerais qu'on recule assez loin dans le temps pour être capable de faire comprendre aux gens qui nous écoutent les services décrits dans vos remarques, par comparaison avec le service qu'il y avait avant que cela s'installe.

Afin qu'on comprenne bien, combien y a-t-il de passages routiers entre le Canada et les États-Unis au Québec?

M. Cabana : Au Québec, je ne pourrais pas vous dire.

Le sénateur Nolin : Une idée de grandeur? Plus de 100? Moins de 500?

M. Cabana : Moins que 100.

Le sénateur Nolin : Comment cela fonctionnait-il auparavant? Il y avait plusieurs détachements au Québec qui avaient la responsabilité, entre autres, de couvrir ces passages routiers?

M. Cabana : Pour ce qui est des détachements qui étaient en place, certains sont encore en place; j'imagine que vous faites référence à ceux qui ont été fermés.

Le sénateur Nolin : Cela a soulevé beaucoup de préoccupations dans communautés touchées par cela.

M. Cabana : Effectivement, sénateur, c'est une décision qui a soulevé beaucoup de controverse. Avant que cette décision soit prise, le travail de nos policiers dans ces détachements était en grande partie du travail « réactif ». Il s'agissait de répondre aux incidents à la frontière. Leur capacité d'enquête était minime, simplement du fait de la grosseur des détachements. Il y avait un très petit nombre d'enquêteurs, deux ou trois dans certains détachements, ce qui ne leur donnait pas réellement la capacité d'enquêter sur le crime organisé. Je le mentionne dans mes commentaires de début de séance, le crime organisé est la plus grande menace présentement au niveau de la frontière.

Une étude a été mise en place en 2002 ou 2003, dans laquelle GRC a regardé les effectifs qu'elle avait pour s'assurer qu'ils étaient déployés de façon à obtenir les meilleurs résultats possible. C'est exercice qui est courant, qui a été fait au milieu des années 1990, par exemple, dans la province de l'Ontario. C'est quelque chose qu'on fait couramment, juste pour s'assurer qu'on est déployé aux bons endroits.

La réalisation à ce moment-là était que l'effectif qu'on avait dans ces petits détachements ne donnait pas la capacité d'être proactif.

Le sénateur Nolin : On parle de combien d'agents, à ce moment-là, répartis dans ces postes?

M. Cabana : Il y avait un total, si je me souviens bien, de 42 enquêteurs ou années-personnes, car je ne suis pas sûr que c'étaient tous des enquêteurs. Certains, parmi ce personnel, étaient potentiellement aussi du personnel de soutien. Il y avait 42 personnes affectées par cela. On a réalisé que si on devait devenir proactif et attaquer le crime organisé au bon niveau, on avait besoin de se construire une certaine capacité, d'où la décision de redéployer certains de ces agents à d'autres détachements pour augmenter cette capacité.

Aussi, basée sur le renseignement qu'on avait, une décision a été prise d'ouvrir un détachement, je m'en souviens, le détachement de Stanstead; nos renseignements indiquaient que la région de Stanstead était une région qui aurait besoin de plus d'attention. Ce détachement a la capacité de mener des enquêtes de grande envergure. Ce à quoi je réfère comme à un détachement est en réalité une EIPF, une équipe intégrée de la police des frontières.

Le sénateur Nolin : Pour reprendre votre explication du début, c'est un détachement qui s'arrime à des forces similaires, mais de l'autre côté de la frontière, n'est-ce pas?

M. Cabana : Absolument, ce qui correspond au concept des EIPF.

Le sénateur Nolin : Donc, si je comprends bien, dans le but de rendre plus efficiente votre force de service au Québec, vous en êtes venus à la conclusion qu'il était important pour vous de cibler les activités du crime organisé et de, peut- être, délaisser d'autres activités qui étaient plus « réactives », pour employer votre expression?

Je vais poser ma question de façon plus précise. Le cas d'une personne qui, de façon illégale, traverse un poste routier sans s'arrêter vous préoccupe-t-il?

M. Cabana : Parle-t-on d'un tel incident se produisant de nos jours?

Le sénateur Nolin : J'arrivais justement à cette question. J'imagine que vous disposez aujourd'hui d'équipement sophistiqué pour être en mesure d'appuyer les Américains?

M. Cabana : Effectivement.

Le sénateur Nolin : La télévision américaine nous décrit, avec beaucoup de détails, les outils dont disposent les autorités américaines pour couvrir notre frontière. Je présume que nous disposons des mêmes outils?

M. Cabana : Nous disposons d'outils comparables.

Le sénateur Nolin : Vous êtes donc informé si une automobile franchit un poste frontalier sans s'arrêter?

M. Cabana : Je ne peux pas dire qu'on le saura à chaque occasion. Toutefois, la plupart du temps, nous aurons l'information.

Le sénateur Nolin : J'ai lu dans un rapport, sûrement confidentiel, qu'au poste de Coaticook il s'est déjà produit 200 entrées illégales en une journée. Dans de tels cas, agissez-vous de façon réactive, ou un phénomène attire votre attention et vous devez réagir?

M. Cabana : Si on fait référence au port d'entrée de Coaticook, la responsabilité est celle de l'ASFC. Si nous sommes contactés par l'ASFC, nous aurons une...

Le sénateur Nolin : Vous faites référence aux services frontaliers?

M. Cabana : Aux services frontaliers.

Le sénateur Nolin : Des douanes?

M. Cabana : Exactement. On répondra alors à leur appel. Nous travaillons en partenariat avec plusieurs agences. La réponse pourra venir d'une agence autre que la GRC.

Le sénateur Nolin : Il y a environ cinq ans, le Parlement a autorisé la GRC à créer environ 600 postes afin de la rendre plus efficace. Toutefois, nous constatons que cet objectif ne s'est pas tout à fait réalisé et la GRC n'a pas utilisé toutes ces sommes qui lui avaient été confiées.

Ai-je raison de croire que vous avez utilisé cet argent, entre autres, sous forme de solde aux recrues? Cet appui financier aux recrues est quand même assez récent.

M. Cabana : L'appui financier?

Le sénateur Nolin : Le fait de donner une solde.

M. Cabana : Oui, la solde aux recrues, aux cadets qui sont présentement à notre centre d'entraînement est accordée avec l'autorisation du gouvernement.

Le sénateur Nolin : Ce n'est que depuis cinq ans que vous avez l'autorisation d'engager et de former de nouveaux agents dans le but, entre autres, de les affecter aux postes frontaliers?

M. Cabana : Oui, l'utilisation de fonds utilisés pour verser une solde aux recrues est une initiative nouvelle. L'autorisation a été obtenue il n'y a même pas un an. Par le passé, certaines infrastructures devaient être mises en place dans le but d'augmenter notre capacité de recrutement et de formation. Ce processus prenait une certaine période de temps.

Le sénateur Nolin : Le Québec, pour sa part, a perdu 42 postes. Pouvez-vous affirmer que nous avons aujourd'hui un service plus efficace?

M. Cabana : Si vous me le permettez, j'aimerais apporter une petite correction. J'ai travaillé à la division C, au Québec, pendant trois ans.

Le sénateur Nolin : C'est pourquoi je vous pose ces questions.

M. Cabana : Ces 42 postes n'ont pas été perdus, mais redéployés au sein de la division dans la province. À mon avis, le Québec y a trouvé son compte en augmentant sa capacité de lutter contre le crime organisé.

[Traduction]

Le président : À titre de précision, c'était dans le premier budget du gouvernement actuel. Il s'agissait de 500 années- personnes ou l'équivalent. Parmi celles-ci, 360 ont été attribuées à la GRC et les autres au ministère de la Justice et à Sécurité publique Canada pour des postes de fonctionnaires.

Le sénateur Nolin : Ma question remonte un peu plus loin. Cela n'a pas commencé seulement avec le gouvernement actuel. Le gouvernement antérieur avait attribué, dans ses budgets, plus d'argent à la GRC pour le recrutement.

Le président : Ils ont passé beaucoup de temps à faire des coupures.

Le sénateur Nolin : C'est pourquoi je pose la question à des gens qui sont au courant.

Le sénateur Munson : J'ai une question supplémentaire. Votre personnel est-il suffisant pour accomplir votre mission?

M. Cabana : Je doute énormément qu'un représentant d'un organisme fédéral soit prêt à affirmer, au cours de sa comparution en comité, que son organisme dispose de ressources suffisantes. C'est sûr que nous pourrions utiliser des ressources supplémentaires pour mieux faire notre travail ou pour mettre en œuvre de nouvelles initiatives. Je peux vous dire que nous déployons de la manière la plus efficace possible les ressources dont nous disposons actuellement.

Le sénateur Mitchell : Je suis intéressé par l'initiative visant à équiper d'armes les agents de l'ASFC. Je sais que la GRC a joué un rôle dans le processus de formation. Pourriez-vous, monsieur le commissaire, faire le point sur ce processus en nous décrivant la situation et en nous expliquant les répercussions qu'il a sur les ressources de la GRC, le cas échéant?

M. Cabana : Malheureusement, sénateur, je n'ai pas beaucoup d'informations sur la mise en œuvre de l'initiative d'armement de l'ASFC. Il serait sans doute préférable de poser la question aux représentants de l'ASFC.

Quant à l'impact que ce processus a pu avoir sur la GRC, je crois pouvoir dire qu'il a été minime. Nous avons repéré au sein de notre organisation un certain nombre de personnes qui pourraient offrir une instruction de formateur à formateur, afin que les agents de l'ASFC puissent développer leurs propres compétences.

Le sénateur Mitchell : Avez-vous une bonne connaissance de la situation à Akwesasne où des manifestants protestent contre le port d'armes à feu par les agents de l'ASFC?

M. Cabana : Je n'en sais probablement pas plus que les autres personnes qui se trouvent ici.

Le sénateur Mitchell : C'était vraiment la question qui m'intéressait. Je vous remercie.

Le sénateur Manning : J'aimerais vous poser quelques questions sur le programme de sécurité des importations maritimes établi, il me semble, en 2004. Je crois que nous avons des centres d'opérations de la sécurité maritime à Halifax, en Nouvelle-Écosse et en Colombie-Britannique placés plus ou moins sous la direction du ministère de la Défense nationale, et un autre centre provisoire à Niagara, en Ontario, dirigé par la GRC.

Pouvez-vous nous donner des renseignements sur l'efficacité de ces centres depuis 2004 — depuis maintenant près de cinq ans — et de quelle manière ils ont augmenté la pertinence de vos opérations de protection de nos frontières? Pouvez-vous nous parler du rôle qu'ils jouent et comparer ce que vous aviez auparavant à ce que vous avez maintenant?

M. Cabana : Bien qu'ils n'existent que depuis relativement peu de temps, ces centres ont joué un rôle important dans un certain nombre d'incidents qui se sont produits sur la côte est. Je pense qu'il y en a eu un autre dans la région des Grands Lacs. Les organismes qui se lancent dans de nouvelles initiatives n'ont pas toujours eu l'habitude de collaborer entre eux. Le lancement des initiatives est souvent associé à des difficultés de mise en œuvre et des retards.

Je comprends que le temps qui s'est écoulé depuis le début de l'initiative puisse paraître long. Je sais que tous les organismes concernés par l'initiative COSM auraient aimé voir des progrès plus rapides. Cependant, il y a beaucoup de points à régler en matière de coordination et de partage de l'information. Malgré cela, je crois que le COSM de la côte Est et à Halifax a grandement contribué, l'an dernier, à l'époque de la chasse aux phoques, à la surveillance et aux activités d'application de la loi en collaboration avec la Garde côtière qui avait une bonne connaissance du domaine, afin de localiser les protestataires.

De même, dans le cas de certaines activités interdites — en l'occurrence l'importation de narcotiques — le centre a été en mesure de fournir en temps réel des renseignements sur la progression des activités. Ses capacités sont assez importantes. Cependant, les concepts des opérations restent encore à finaliser et à développer. C'est comme cela avec tout ce qui est nouveau; la mise en place prend du temps.

M. Coons : Son efficacité tient également à sa disponibilité opérationnelle. C'est quelque chose qu'on ne peut pas sous-estimer. En cas d'incident, le centre est prêt — il n'a pas nécessairement participé à une grande quantité d'incidents, mais c'est un outil important qui nous fournit des connaissances dans le domaine maritime. C'est un outil indispensable. Je ne pense pas que le nombre d'incidents soit le meilleur moyen de mesurer son utilité, il faut plutôt tenir compte de l'état de la situation qu'il fournit aux agents d'application de la loi.

Le sénateur Manning : Je crois que les ministères et organismes suivants prennent part à certaines des activités que vous avez évoquées : l'Agence des services frontaliers du Canada, la Garde côtière, le ministère des Pêches et des Océans, le ministère de la Défense nationale, le ministère des Transports et la GRC. On ne peut que féliciter tous ces organismes fédéraux de conjuguer leurs efforts afin d'agir de manière concertée, même si je peux comprendre que de telles entreprises nécessitent toujours certains ajustements. Quels sont les problèmes dans ce domaine? Ces services fonctionnent-ils maintenant à pleine capacité, avec la collaboration des différents organismes?

M. Cabana : Le ministère de la Défense nationale serait probablement le mieux placé pour parler de la situation actuelle des centres côtiers et préciser s'ils disposent d'effectifs complets. Si je me souviens bien, des ressources supplémentaires ont été accordées à la fin de l'automne dernier au centre des Grands Lacs — le centre provisoire situé à Niagara.

C'est un exemple d'intégration avec l'ensemble de nos partenaires. Tous nos partenaires sont représentés, à l'exception de l'un d'entre eux. Ils sont tous présents à temps plein. La GRC a délégué quatre personnes l'automne dernier, mais les effectifs ne sont pas encore complets. Dans sa forme provisoire, le centre est totalement opérationnel.

Le sénateur Manning : Vous ne pourrez peut-être pas répondre à cette question, mais je vais la poser quand même. Pourquoi les bureaux des côtes est et ouest sont-ils dirigés par le ministre de la Défense nationale, alors que le bureau provisoire de la région de Niagara est dirigé par la GRC? Comment expliquez-vous cette différence?

M. Cabana : C'est le résultat d'une décision stratégique prise en fonction des rôles des différents organismes. Les fonctions des COSM côtiers diffèrent de celles des COSM des Grands Lacs. Ces derniers s'intéressent plutôt à la criminalité intérieure, alors que cela ne relève pas des fonctions ou des rôles du MDN.

Le sénateur Manning : Je suis de Terre-Neuve-et-Labrador, une province qui a été le théâtre d'une des plus importantes saisies de drogue de l'Est du Canada. Cela s'est passé à Ireland's Eye. Comme vous le savez peut-être, il y a plus de 700 villages abandonnés qui datent de l'époque de la colonie et que les trafiquants de drogue utilisent pour leurs activités. Pourquoi ne pas créer un bureau à Terre-Neuve-et-Labrador pour faire face à cette situation?

M. Cabana : Un bureau COSM?

Le sénateur Manning : Oui.

M. Cabana : Encore une fois, les fonctionnaires du ministère de la Défense nationale seraient sans doute mieux à même de répondre à cette question. La capacité et l'infrastructure existaient déjà à Halifax, grâce au MDN. Le rayonnement du COSM de Halifax s'étend jusqu'à Terre-Neuve-et-Labrador.

Le président : Permettez-moi de poursuivre dans la même ligne que le sénateur Manning. ATHENA et TRINITY sont les COSM situés sur chaque côte. Est-ce que vous envisagez Niagara ou Burlington?

M. Cabana : Niagara.

Le président : Est-ce que cela permettrait de créer un ensemble de connaissances maritimes en temps réel? Est-ce l'objectif du centre des Grands Lacs? Si c'est le cas, l'ensemble de connaissances porterait sur combien de Grands Lacs?

M. Cabana : L'ensemble principal de connaissances dépendrait toujours d'Halifax. Je pense qu'il sera toujours tributaire d'Halifax.

Les informations en provenance d'Halifax ne nous permettront pas de constituer un portrait complet du domaine en particulier, comme vous le savez, pour les petits navires qui peuvent emprunter les Grands Lacs. On met actuellement en œuvre l'infrastructure et la technologie nécessaires pour obtenir cet ensemble de connaissances.

Le président : Le problème à Halifax, c'est que le centre est tributaire des services aériens provinciaux qui leur fournissent les données avec un jour de décalage. Ils disposent de radars et ils ont fait l'essai de différentes fréquences radar, mais les résultats ne sont pas très concluants; le portrait de la situation n'est pas très clair.

M. Cabana : Non

Le président : Le plus gros problème, c'est l'absence de transpondeurs GPS. Les exigences actuelles concernent seulement les navires de 200 tonnes et plus.

M. Cabana : Absolument.

Le président : Pensez-vous que l'on pourrait baisser cette limite? Le comité a pris position en faveur de l'obligation d'installer des transpondeurs GPS sur les navires d'une tonne et plus. Nous pensons qu'il sera impossible de constituer un ensemble de connaissances tant que les navires de cette dimension ne seront pas équipés de transpondeurs GPS.

M. Cabana : J'aurais tendance à être d'accord avec vous. C'est ce qui me fait dire que l'ensemble de connaissances dont nous disposons n'est pas complet.

Le président : Par exemple, le Service de police de Toronto nous envoie des rapports. Lorsque son radar était opérationnel, il avait détecté la présence de bateaux traversant d'Oshawa à Pickering vers deux heures du matin. À cette heure-là, ce n'était sans doute pas pour aller acheter des marchandises à meilleur prix. On a observé également des bateaux qui quittaient Oakville pour aller à la rencontre de navires au milieu des Grands Lacs. Ce n'était sans doute pas pour acheter des pizzas.

Qu'est-ce que peut faire le COSM pour lutter contre ces activités?

M. Cabana : Actuellement, le COSM n'offre absolument rien qui puisse permettre d'éliminer de telles activités. Nous mettons en place une technologie qui nous permettra d'être informés de telles activités afin que nous puissions prendre les mesures appropriées, de concert avec nos partenaires, pour réagir à ces activités.

Actuellement, notre capacité est limitée. C'est la raison pour laquelle nous augmentons nos capacités technologiques.

Le président : Vous parlez de « capacité limitée ». J'ai réagi vivement lorsque vous avez dit que vous disposez seulement de quatre postes pour assurer le fonctionnement du COSM 24 heures par jour et sept jours sur sept et que ces quatre postes n'étaient même pas tous pourvus. Il est impossible d'assurer le fonctionnement continu avec seulement quatre personnes, à moins de les faire travailler pendant de longues heures, sans vacances, ni congés de maladie. Comment allez-vous vous y prendre?

M. Cabana : Ces quatre personnes sont quatre nouveaux employés qui nous ont été attribués l'automne dernier.

Le président : Quels sont les effectifs dont vous disposez donc au total?

M. Cabana : Le surintendant Coons va vérifier. Je crois que nos effectifs comptent au total 15 personnes.

Le président : Pendant qu'il vérifie, pouvez-vous répondre aux questions suivantes : Avez-vous l'intention de noliser des aéronefs, comme cela se fait sur la côte Est où l'on fait appel aux services aériens provinciaux? Envisagez-vous d'utiliser des véhicules aériens télépilotés, pour des missions de surveillance, comme les Américains le font dans les Prairies? Quel type de matériel allez-vous utiliser pour détecter les situations anormales dans les Grands Lacs?

M. Cabana : Nous allons faire appel à toutes ces possibilités et à beaucoup d'autres. Comme je l'ai dit, nous mettons de l'avant un modèle intégré et multicouche. Il nous est impossible de ne pas tenir compte des autres initiatives existantes. Comme vous l'avez signalé, le Service de police de Toronto est très actif, en particulier dans la région et le port de Toronto. Les Équipes de la sûreté maritime, les ESM font des patrouilles dans certains des Grands Lacs. Les renseignements recueillis par tous ces différents organismes, plus la technologie, nous permettront finalement de dresser un meilleur portrait des activités qui se déroulent dans les Grands Lacs.

Est-ce que cela nous permettra d'obtenir un ensemble de connaissances complet à 100 p. 100? Tout dépendra de la technologie, mais j'en doute.

Le président : Comment allez-vous tenir compte des caractéristiques saisonnières? Par exemple, les embarcations qui naviguent sur le lac Ontario sont 100 fois plus nombreuses en été. Votre demande est très irrégulière. Comment allez- vous en tenir compte?

M. Cabana : Une fois que la mise en œuvre sera totalement terminée, le COSM fonctionnera 24 heures sur 24 et sept jours sur sept. Nos équipes de surveillance seront en place, quelle que soit l'intensité des activités. Elles ne sont pas censées intervenir en cas d'incidents. C'est plutôt du côté de l'intervention que les problèmes vont se poser.

Le président : Je pensais que la difficulté aurait été de repérer les situations anormales. Si un beau jour 1 000 embarcations sont de sortie et que vous devez faire le tri afin de repérer celles qui se livrent à des activités illégales, il faudra que le personnel du COSM vous dise : « Cette embarcation a de bonnes raisons d'être ici, mais j'ai des doutes quant à telle ou telle autre. »

M. Cabana : C'est là qu'une approche axée sur le renseignement est utile. Nous n'avons aucun moyen de vérifier 1 000 embarcations naviguant sur les Grands Lacs. C'est pourquoi nous devons nous appuyer sur les renseignements que nous fournissent les différents intervenants, soit Transports Canada, l'ASFC, nous-mêmes, Toronto ou l'OPP afin de pouvoir cibler les bonnes embarcations.

Le président : Ensuite, vous devrez disposer d'une capacité d'interception.

M. Cabana : Absolument, nous avons besoin d'une capacité d'interception.

Le président : Où obtiendrez-vous cette capacité?

M. Cabana : Comme vous le savez, sénateur, les Équipes de la sûreté maritime patrouillent le secteur et nous offrent une capacité d'intervention; mais on pourrait dire que cette capacité est limitée.

Le président : De combien de bâtiments disposez-vous pour assurer le service dans combien de lacs?

M. Cabana : Nous avons quatre bâtiments.

Le président : Un par lac?

M. Cabana : Non, parce qu'un d'entre eux est affecté à la Voie maritime du Saint-Laurent. Il nous reste donc trois bâtiments pour les Grands Lacs, si c'est de cela que vous voulez parler.

Il y a aussi les sections des EIPF qui sont basées au bord des Grands Lacs et qui peuvent offrir une capacité d'interception sur la côte et près de la côte.

Le président : Les Américains ont-ils un COSM de leur côté?

M. Cabana : Non.

Le président : Ont-ils un centre qui leur permet de dresser un tableau des activités en cours dans le secteur maritime?

M. Cabana : Ils disposent d'un centre qui peut leur fournir un ensemble de connaissances maritimes, mais ce n'est pas nécessairement un centre intégré qui fait appel aux informations et aux ressources de différents organismes, comme nous le faisons au Canada.

Le président : Est-ce qu'ils partagent les renseignements qu'ils ont à leur disposition et est-ce que nous leur transmettons les renseignements que nous avons?

M. Coons : Il y a des échanges d'informations de part et d'autre et la Garde côtière américaine est un partenaire des EIFP avec lequel nous sommes régulièrement en contact.

En fait, c'est un véritable casse-tête. Dans une situation comme celle que vous avez évoquée, lorsque les activités de navigation sont extrêmement intenses sur les Grands Lacs, surtout pendant les périodes de pointe, les activités d'application de la loi sont extrêmement difficiles et je peux vous assurer que les États-Unis doivent eux aussi relever le même défi.

Je n'ai pas connaissance d'une solution parfaite. Je sais que nous travaillons tous à la mise au point d'une technologie qui permettra de repérer les bâtiments les plus suspects, mais, là encore, comme l'a signalé le commissaire adjoint Cabana, il est important que les informations s'appuient sur des renseignements fiables. Il est préférable pour nous d'avoir les renseignements au préalable afin de savoir à quoi nous en tenir lorsque nous intervenons sur l'eau pour réagir à une situation anormale.

Le président : Chaque fois que les membres du comité entendent l'expression « axé sur le renseignement », ils traduisent immédiatement dans leur tête : « Nous n'avons pas assez de personnel. »

M. Coons : Je ne crois pas que ce soit tout à fait exact. Cela ne veut pas dire que nous ayons suffisamment de personnel, mais je peux vous dire que nos activités d'application de la loi sont axées sur le renseignement. Nous ne pouvons faire autrement, compte tenu de la longueur de la frontière et des conditions géographiques. Il est pratiquement impossible, quel que soit l'endroit où l'on se trouve et quel que soit le contexte d'application de la loi, de ne pas fonder les opérations sur le renseignement. Il n'y a tout simplement pas assez de personnes dans le monde pour nous dispenser de fonder nos opérations sur le renseignement.

Le président : Puisqu'on parle de personnel, avez-vous eu le temps de trouver les chiffres que vous cherchiez?

M. Cabana : Oui. Nous avons 12 agents réguliers et trois civils.

Le président : Pour assurer le service 24 heures sur 24 et sept jours sur sept?

M. Cabana : Avec l'ajout des nouvelles ressources, nous serons en mesure d'assurer le service 24 heures sur 24.

Le président : Est-ce du personnel saisonnier ou annuel?

M. Cabana : Annuel.

Le président : Merci.

Le sénateur Munson : Je vais brièvement prendre la suite des questions posées par le président. Depuis quelque temps, nous parlons du COSM. Un peu plus tôt, je vous ai posé une question au sujet du personnel dont vous avez besoin pour faire votre travail. Vous y avez plus ou moins répondu, mais pourriez-vous nous dire quels sont les effectifs dont vous devriez disposer pour rendre votre tâche plus facile?

M. Cabana : La GRC a élaboré une stratégie frontalière exposant les investissements futurs. Les besoins ne se situent pas strictement au niveau des ressources, mais se manifestent également au niveau des partenariats avec des organismes existants et de la mise en œuvre de la technologie nécessaire. J'ai bien peur que je ne puisse pas vous donner de chiffres exacts aujourd'hui.

Le sénateur Munson : Je crois que vous nous dites que vous avez besoin de plus de personnel pour mieux assurer la sécurité de notre pays.

M. Cabana : Absolument, notamment pour mettre en œuvre d'autres initiatives telles que le déploiement d'agents en uniforme le long de la frontière, entre les points d'entrée, une présence axée sur le renseignement. Voilà une initiative que nous ne pouvons pas mettre en œuvre avec les ressources existantes.

Le sénateur Munson : J'ai l'impression qu'il y a probablement un thème sous-jacent à ces questions. J'aimerais vous poser d'autres questions concernant la formation.

Quand de nouveaux agents de la GRC affectés à la sécurité frontalière sont en formation, travaillent-ils parfois sur le terrain? La formation présente-t-elle des lacunes? Êtes-vous satisfait du niveau de formation en matière de sécurité frontalière que reçoivent les agents de la GRC?

M. Cabana : Est-ce que vous voulez parler de la formation de base offerte au Division Depot, notre centre de formation?

Le sénateur Munson : Aux services de la sécurité frontalière.

M. Cabana : Voulez-vous parler des agents affectés à la frontière?

Le sénateur Munson : Oui.

M. Coons : Tout le personnel affecté aux sections de la sécurité frontalière suivent un cours dans ce domaine, soit pour l'environnement maritime, soit pour l'environnement EIPF. Ce sont des cours obligatoires que tous les membres du personnel doivent suivre pour se familiariser avec le secteur particulier dont ils seront responsables.

Le sénateur Munson : Est-ce que ces cours sont offerts en collaboration avec nos homologues américains? Par exemple, est-ce que des instructeurs américains peuvent offrir une formation aux agents de la GRC?

M. Coons : Dans le cas des Équipes intégrées de la police des frontières, la formation est conjointe, puisqu'il s'agit d'une initiative bilatérale. Le cours sur le renseignement et les enquêtes destiné aux EIPF est offert en même temps aux agents d'application de la loi canadiens et américains et animé en fait conjointement par des instructeurs canadiens et américains.

Le sénateur Munson : La formation présente-t-elle des lacunes? Y a-t-il certains points à améliorer?

M. Coons : Nous offrons actuellement beaucoup de cours de formation communs aux EIPF. Je ne peux pas citer de mémoire un secteur précis dans lequel il faudrait renforcer la formation. Il y a quelques années, nous avons effectué un sondage dans le cadre du programme des EIPF afin de demander au personnel de première ligne dans quel secteur il souhaitait recevoir de la formation. Les répondants ont signalé deux secteurs particuliers, en l'occurrence l'échange d'informations entre nos deux pays — au niveau des agents d'application de la loi placés en première ligne — ainsi que la formation relativement aux activités de terrorisme.

À la suite de cette enquête, nous avons élaboré, par l'intermédiaire de l'équipe conjointe de gestion internationale, qui est en quelque sorte le conseil de gouvernance des Équipes intégrées de la police des frontières, deux unités de formation, dont un atelier sur le terrorisme, que nous avons maintenant présenté à la plupart de nos agents d'application de la loi. Je crois que l'atelier sur le terrorisme a été présenté avec succès et bien reçu par plus de 1 100 agents d'application de la loi en poste à la frontière. Quant au partage d'informations sur la formation, nous avons mis au point, par l'intermédiaire de l'équipe de coordination internationale, qui est l'organe de régie courante du programme EIPF, une série de matrices qui, selon nous, a résolu dans une grande mesure les problèmes de partage d'informations par le personnel de première ligne du programme EIPF. J'ai les chiffres sous la main et je peux vous dire combien de personnes ont reçu cette formation. Nous avons formé presque tout le personnel des EIPF en poste au pays. Au total, 247 personnes en provenance des 10 EIPF ont reçu jusqu'à présent cette formation et nous avons programmé des séances de formation en juin et septembre pour ceux qui ne l'ont pas encore suivie.

C'était les deux lacunes principales dans le secteur de la formation. Je pense que nous y avons remédié. Je n'ai pas connaissance d'autres problèmes à l'échelle de l'ensemble du pays.

Le sénateur Meighen : Vous avez affirmé à juste titre que le renseignement conditionne votre capacité à contrer le risque. Dans quelle mesure avez-vous pu renforcer vos capacités de collecte de renseignements? Deuxièmement, les équipes transfrontalières telles que celles des programmes EIPF et Shiprider, se prêtent-elles à un échange véritable des renseignements de part et d'autre de la frontière, avec les États-Unis?

M. Cabana : Il doit être bien clair, lorsque nous parlons de notre capacité à recueillir des renseignements, qu'il ne s'agit pas strictement de renseignements recueillis par la GRC. Depuis qu'elle a adopté le modèle axé sur le renseignement, la GRC a clairement mis l'accent sur la mise en œuvre de son propre programme de collecte de renseignements.

Cependant, les autres organismes procèdent à leur propre collecte de renseignements. Autrement dit, nous reconnaissons que la GRC dispose d'un élément de l'ensemble, mais que d'autres organismes, qui ne sont pas nécessairement des organismes d'application de la loi, peuvent aussi apporter leur contribution. Le modèle axé sur le renseignement est important, car il permet de réunir tous ces éléments afin d'obtenir un état global de la situation.

Le sénateur Meighen : Ce n'est pas seulement important, c'est aussi un défi.

M. Cabana : Tout à fait.

Le sénateur Meighen : Il me semble que par le passé, on a mis en doute la volonté de certains organismes, y compris la GRC, de partager leurs renseignements avec d'autres. Pensez-vous que nous avons fait des progrès dans ce domaine?

M. Cabana : Je crois que nous avons fait beaucoup de progrès et que nous continuons à en faire. La GRC et ses partenaires cherchent continuellement à tirer partie des protocoles et modèles de partage d'informations existants et à évaluer l'impact de la structure législative qui nous permet d'échanger des renseignements, d'assurer que nous respectons cette structure législative et de l'utiliser au maximum.

L'équipe de gestion mixte des EIPF est composée de 55 organismes d'application de la loi. Ces organismes partagent leurs renseignements en temps réel afin de pointer les risques qui se présentent à notre frontière, soit au sud, soit au nord et de prendre les mesures nécessaires de façon coordonnée, en collaboration avec nos partenaires.

L'époque où l'on protégeait jalousement ses renseignements est révolue. Cependant, notre capacité de partage des informations se heurte encore à certains obstacles.

Le sénateur Meighen : Est-ce que ces obstacles sont essentiellement de nature humaine ou législative?

M. Cabana : Les deux, mais la plupart des obstacles sont d'origine humaine.

Le sénateur Meighen : Chacun veut protéger son bien!

M. Cabana : L'échange d'informations varie selon les personnalités. Dans certains secteurs, les échanges sont plus fluides que dans d'autres. Il faut appliquer une certaine cohérence dans l'interprétation de la loi. L'ASFC et la GRC ont pris des mesures pour que l'interprétation soit uniforme, mais on continue à rencontrer des obstacles de nature législative. Certaines lois assez anciennes nous empêchent d'échanger des informations.

M. Coons : Lorsque nous avons examiné les protocoles d'échange d'informations et la mise au point de protocoles pour nos organismes, nous avons découvert que le plus grand problème était lié à l'éducation. Après le 11 septembre, la Commission d'enquête O'Connor et un certain nombre d'autres incidents, on a vu apparaître une réticence à l'égard de l'échange d'informations de part et d'autre de la frontière. Du côté canadien, on ne savait pas exactement quel type d'informations on pouvait échanger.

Les échanges ont augmenté dès le moment où nous avons informé nos agents de première ligne au sujet des renseignements qui pouvaient être partagés. Plus que les obstacles législatifs, c'est une question d'éducation afin que les membres du personnel de première ligne, de part et d'autre de la frontière, comprennent ce qu'ils peuvent s'attendre à recevoir de la part de l'autre pays et ce qu'ils peuvent lui fournir afin de maximiser la quantité de renseignements que la loi permet d'échanger entre les deux pays.

M. Cabana : Il faut aussi gérer les attentes.

Le sénateur Meighen : C'est juste. Étant donné que votre succès dépend moins d'une nouvelle embarcation rapide, mais plutôt de la collecte rapide de renseignements précis, est-ce que vous consacrez plus de dépenses à la collecte de renseignements ou est-ce que vous avez tendance à utiliser vos fonds pour l'acquisition d'embarcations rapides? Si vous ne disposez pas des renseignements nécessaires, vous ne saurez pas où diriger votre bateau ni quel navire arraisonner.

M. Cabana : Vous avez tout à fait raison. Cela nous ramène à l'approche équilibrée dont j'ai parlé un peu plus tôt. Au niveau des investissements, nous devons veiller à appliquer une approche équilibrée. Nous ne pouvons pas perdre de vue l'importance que le renseignement joue dans nos interventions quotidiennes.

Le sénateur Meighen : Quels sont aujourd'hui vos rapports avec le Service canadien du renseignement de sécurité, le SCRS?

M. Cabana : Nous avons de bien meilleures relations. Des groupes de travail sont à l'œuvre aux plus hauts niveaux pour mettre en place des mécanismes de partage entre le SCRS et nous. Nos relations sont bien meilleures que par le passé.

Le sénateur Meighen : Le sénateur Nolin voulait poser une question sur le programme Shiprider, mais il a dû nous quitter avant. Étant donné que vous œuvrez dans le secteur des Grands Lacs et de la Voie maritime du Saint-Laurent où résident de nombreux francophones, quelles mesures prenez-vous pour faire en sorte que du personnel bilingue soit présent dans tous vos secteurs d'activités?

M. Cabana : Nous prenons nos obligations très au sérieux et nous tenons compte de ce facteur dans la composition des patrouilles chargées des différents secteurs.

Le sénateur Meighen : J'espère que vous ne faites pas que les prendre en considération, mais que vous respectez aussi la réalité canadienne.

[Français]

C'est une réalité canadienne qui n'existe pas nécessairement l'autre côté de la frontière.

M. Cabana : Absolument.

Le sénateur Meighen : Nous allons suivre cela avec beaucoup d'intérêt.

[Traduction]

Le président : Monsieur le commissaire adjoint, on peut évaluer et vérifier la vitesse d'une embarcation rapide. Dans le cas des renseignements, comment vous y prenez-vous pour les évaluer et les mesurer et savoir s'ils sont de bonne qualité? Comment faites-vous pour trouver une solution au problème de cloisonnement et au refus de partager des renseignements?

M. Cabana : Monsieur le président, j'ai compris la première partie de votre question, mais je ne suis pas certain pour la deuxième.

Le président : La première partie concernait les embarcations rapides.

M. Cabana : Oui, j'ai compris cette partie-là.

Le président : C'est facile de mesurer la vitesse d'un hors-bord. C'est plus difficile de savoir si l'on obtient de bons renseignements. Comment le savoir? D'autre part, comment savoir si l'échange d'informations se fait normalement?

Si l'un d'entre nous devait faire une étude, comment pourrait-on s'assurer que les informations sont bien transmises d'un secteur de la GRC à un autre ou entre la GRC et le SCRS ou l'ASFC? Comment éliminer les cloisonnements?

M. Cabana : Je ne sais pas exactement comment on devrait s'y prendre. Il faudrait pratiquement se pencher sur chaque cas afin de vérifier comment les renseignements ont été échangés.

Le succès de nos activités de collecte de renseignements se mesure en fonction de notre capacité à mener des opérations d'interdiction et, d'une certaine façon, à prévoir les activités des organisations criminelles.

Le président : Parmi tous les témoins que nous entendons, ceux dont les activités sont axées sur le renseignement nous disent que la situation s'est beaucoup améliorée et qu'ils échangent vraiment beaucoup de renseignements. Personne ne nous signale une situation catastrophique ou des relations terribles avec tel ou tel organisme. Les gens ont beaucoup de difficulté à expliquer pourquoi ils ont l'impression que la situation s'est améliorée et comment ils mesurent cette amélioration. Pouvez-vous nous donner quelques détails techniques?

M. Coons : Dans le secteur des Équipes intégrées de la police des frontières, nous nous rencontrons de manière régulière sur le terrain où nous menons des opérations en vue de déjouer les menaces présentes dans la région. Nous savons qu'il y a des échanges entre les organismes locaux d'application de la loi qui ont accès à la frontière dans ce secteur. Ces échanges avaient lieu avant la création des équipes. Il est clair que nous disposons de renseignements tangibles qui témoignent des échanges entre les organismes d'application de la loi dans le secteur et que nous avons fait beaucoup de progrès à ce sujet.

Nous avons aussi des rapports mensuels du renseignement qui sont distribués dans notre quartier général national. Cela nous permet de surveiller, si vous voulez, la quantité de renseignements échangés dans le secteur.

Je ne pense pas qu'il existe un outil particulier permettant de répondre précisément à votre question. Cependant, nous pouvons constater nous-mêmes dans nos activités que nous avons des contacts plus réguliers avec les organismes d'application de la loi et nous savons que nous participons avec eux à des opérations intégrées et, par conséquent, que nous échangeons plus d'informations et, en bout de ligne, plus de renseignements. Cela ne répond peut-être pas précisément à votre question, mais c'est un exemple.

M. Cabana : Il faut également faire la distinction entre l'échange de renseignements concernant les activités criminelles et celui de renseignements relatifs à la sécurité nationale. Le sénateur Meighen a demandé si nos relations avec le SCRS étaient meilleures que par le passé. Elles se sont améliorées, mais les échanges d'informations entre nos équipes chargées des activités criminelles et le SCRS demeurent limités. Les échanges d'informations entre la GRC et le SCRS se font au niveau de nos équipes chargées de la sécurité nationale.

Le sénateur Moore : À la suite des événements du 11 septembre, nous avons mis en œuvre, avec nos homologues américains, un plan d'action en faveur d'une frontière intelligente. Le thème était la gestion partagée de notre frontière. Au début de la séance d'aujourd'hui, le président a évoqué les échanges commerciaux d'une valeur de 1,6 milliard de dollars qui franchissent chaque jour la frontière entre nos deux pays.

Dans ce contexte, compte tenu de l'importance de la frontière avec le Canada, des aspects de sécurité et du flux constant de personnes qui traversent la frontière pour se livrer à des activités commerciales dans nos deux pays, la secrétaire au Homeland Security des États-Unis, Janet Napolitano, a déclaré, le 25 mars dernier, dans une allocution à la Brookings Institution, que nous nous trouvons actuellement dans un contexte de changement culturel. En effet, les relations entre nos deux pays continueront d'être étroites, mais la réalité nous rappelle l'existence d'une frontière dont les attributs sont actuellement mis en place.

Le 13 avril, j'étais à Washington pour assister à un colloque sur les échanges commerciaux transfrontaliers et la sécurité. Lors de cette assemblée, la secrétaire Napolitano s'est présentée elle-même comme une démonteuse de mythes — « myth buster », selon ses propres termes — relativement à la frontière et à la réalité de la frontière nord des États- Unis avec le Canada. Le mythe auquel elle faisait allusion était que la frontière n'existait pas, que nous n'y prêtions pas suffisamment attention afin d'assurer la sécurité.

Messieurs, vous appartenez à notre principal organe d'application de la loi. J'aimerais savoir si la GRC traitait la frontière moins sérieusement par le passé, en matière de culture ou de sécurité, qu'elle le fait aujourd'hui? Je ne comprends pas les commentaires de la secrétaire au sujet du mythe. Je n'ai jamais pensé que les Canadiens traitaient la frontière avec désinvolture, sans s'inquiéter des mesures que nous devrions prendre pour la rendre plus efficace, plus sûre, et cetera.

M. Cabana : Non, je ne pense pas que ce soit le cas. Je pense que la GRC a toujours gardé la même attitude vis-à-vis de la frontière. La perception publique de la frontière a changé énormément après le 11 septembre.

Le sénateur Moore : C'est vrai.

M. Cabana : Parallèlement, le nombre d'initiatives mises en œuvre depuis le 11 septembre a entraîné une augmentation des ressources qui concentrent leur attention sur la frontière. En ce sens, on peut dire que l'on accorde plus d'attention à la frontière. Cependant, notre stratégie d'application de la loi à la frontière n'a pas changé.

Le sénateur Moore : Avez-vous quelque chose d'autre à ajouter, monsieur le surintendant Coons?

M. Coons : Non, je suis du même avis. Bien sûr, nous avons mis en place de nouvelles initiatives depuis le 11 septembre, mais la GRC a toujours eu pour mandat — au moins depuis 1932 — d'assurer la sécurité de la frontière entre les points d'entrée, et ce mandat s'applique encore de nos jours.

Le sénateur Lang : Bienvenue. J'aimerais poursuivre dans le même sens que le sénateur Moore, puisque nous avons entendu les déclarations de la secrétaire au Homeland Security des États-Unis, ainsi que celle de la secrétaire d'État.

Est-ce que le gouvernement des États-Unis, si l'on en juge par les commentaires que ses représentants ont fait au sujet de la frontière, s'attend à ce que notre gouvernement renforce les mesures qu'il prend déjà à la frontière? Les États-Unis ont-ils exprimé la volonté que le gouvernement canadien augmente les ressources qu'il consacre à la frontière?

M. Cabana : Je ne suis pas certain de pouvoir répondre à cette question. Il faudrait peut-être plutôt la poser aux autorités américaines.

Toutes les personnes ici présentes ont probablement entendu parler dans les médias de l'attention que la nouvelle administration américaine a l'intention d'accorder à la frontière nord. Cela indique clairement que les États-Unis ont décidé de concentrer leur attention sur les initiatives d'application de la loi et sur les mesures que prend le Canada pour contribuer à la sécurité de la frontière.

Cependant, je ne pense pas que cela modifie la relation qui existe avec certains organismes des États-Unis qui œuvrent à la frontière, par exemple les patrouilles frontalières, depuis 1926. La GRC travaille main dans la main avec les patrouilles frontalières afin de sécuriser la frontière. Cela ne changera pas.

Le sénateur Lang : Non, mais j'aimerais savoir si le gouvernement des États-Unis a pris contact avec certains organismes, la GRC ou un autre, avec lesquels vous travaillez quotidiennement, dans l'espoir de nous amener à renforcer les mesures que nous prenons déjà à la frontière.

M. Cabana : Je ne peux parler que pour la GRC et je n'ai pas eu connaissance d'entretiens à ce sujet.

Le sénateur Lang : Je crois que c'est le sénateur Kenny qui a abordé un peu plus tôt la question des embarcations sur les Grands Lacs. Il est clair que le nombre de bâtiments dont nous pouvons disposer n'est pas illimité. Comme l'a dit le sénateur Meighen, la collecte de renseignements est de la plus haute importance.

Si nous découvrons l'existence d'activités illégales dans les Grands Lacs, mais que, faute de navire sur place, nous ne pouvons procéder à des arrestations, est-ce que la Garde côtière des États-Unis, si elle est présente dans le secteur, peut appréhender des individus dans les eaux canadiennes aussi bien que dans les eaux américaines?

M. Cabana : Non, pas pour le moment.

Le sénateur Lang : Que se passerait-il alors, au cas où nous aurions connaissance d'activités illégales, soupçonnées ou avérées, de la part d'un individu ou d'un groupe qui devrait normalement être appréhendé? Que peut-on faire dans une telle situation? Qui peut procéder à une arrestation?

M. Cabana : Une fois encore, il s'agit de situations hypothétiques et il est donc difficile de dire qui serait en mesure d'intervenir.

Dans toutes nos activités quotidiennes, nous cherchons à maximiser les capacités de tous nos partenaires, y compris celles de la GRC. En cas d'incident dans un des Grands Lacs et en l'absence de bâtiments dans le secteur, les intervenants de première ligne seraient mobilisés, soit par l'intermédiaire des EIPF, soit en vertu d'autres initiatives en place, afin de déterminer qui est le mieux placé pour prendre les mesures appropriées. En toute probabilité, ce serait une intervention coordonnée.

Le sénateur Lang : D'une manière ou d'une autre, sommes-nous assurés que l'embarcation concernée serait appréhendée?

M. Cabana : C'est une situation hypothétique et je ne peux donc pas vous répondre de manière certaine. Je ne peux pas vous affirmer catégoriquement que nous serions en mesure de procéder à une arrestation. C'est impossible. Tout ce que je peux vous garantir, c'est que toutes les mesures nécessaires seraient prises afin de maximiser nos chances de procéder à une arrestation.

Le sénateur Wallin : J'aimerais apporter une précision à la question soulevée par le sénateur Lang. La secrétaire au Homeland Security s'est fait taper sur les doigts assez rapidement après avoir déclaré que la frontière était trop poreuse et que cela présentait un réel danger — qui pouvait l'ignorer? — depuis le 11 septembre. La nouvelle administration Obama semble vouloir réinventer la roue et affiche des tendances protectionnistes assez graves, et on peut se demander si les États-Unis ont l'intention de prendre eux-mêmes leurs propres mesures, sans consulter personne d'autre. Pensez- vous que cette attitude aurait également un impact sur le secteur de la sécurité?

M. Cabana : C'est toujours une possibilité. D'après les entretiens que j'ai eus avec mes homologues de certains organismes, je ne pense pas que ce sera le cas, tout simplement parce que nous sommes tous pour la plupart essentiellement sur la même longueur d'onde quand il s'agit de la réalité frontalière.

Le sénateur Wallin : Le processus est en cours?

M. Cabana : Absolument.

Le sénateur Mitchell : Vous ne voudrez probablement pas nous dire quel est celui des lacs qui ne dispose pas de bâtiment d'intervention. Cela étant dit, même si nous pensons tous qu'un organisme n'a jamais suffisamment de ressources, pourrait-on s'attendre raisonnablement à ce que vous souhaitiez disposer d'un cinquième bâtiment pour au moins en avoir un dans chacun des Grands Lacs?

M. Cabana : Peut-être. Toutefois, il est important de signaler que nos bâtiments ne sont pas affectés à un lac en particulier; ils se déplacent constamment. À certains moments, nous pouvons avoir deux ou même trois bâtiments sur le même lac. Nous les utilisons en fonction des renseignements dont nous disposons.

Le sénateur Mitchell : J'aimerais également poursuivre sur la question du renseignement. Vous avez précisé que les choses ont changé. Je sais qu'il est difficile — c'est évident — d'évaluer réellement l'impact.

Pouvez-vous nous dire si vous recevez des rapports de renseignements plus nombreux? Les rapports sont-ils plus fiables? Est-ce que ces renseignements vous permettent de procéder à plus d'arrestations? Pouvez-vous nous présenter une évaluation de la situation?

M. Cabana : Je ne sais pas vraiment comment vous donnez une évaluation.

Le sénateur Mitchell : Est-ce que l'échange de renseignements vous permet d'appréhender un plus grand nombre d'individus?

M. Cabana : Depuis quelques années, si l'on s'arrête à quelques-unes de nos interventions couronnées de succès qui ont mené à l'interception d'organisations criminelles, il est clair que les services d'application de la loi au Canada et sur la scène internationale ont éliminé certains obstacles. Je pense que c'est une bonne façon de résumer la situation. La collaboration et le partage de renseignements se font de manière assez intense. Je pense à un projet regroupant plusieurs organismes internationaux qui a donné lieu à un assez important échange d'informations dans ce dossier.

Le sénateur Mitchell : Les renseignements en provenance des États-Unis sont-ils plus nombreux et parviennent-ils directement à la GRC ou passent-ils par l'intermédiaire du SCRS avant d'arriver à la GRC?

M. Cabana : Là encore, tout dépend de la nature du renseignement. Si les renseignements touchent à la sûreté nationale, ils parviendront à la GRC par l'intermédiaire de nos équipes de la sûreté nationale, ou par l'intermédiaire du SCRS. Les deux organismes disposent de mécanismes d'échange afin de pouvoir communiquer et partager ces renseignements.

Si les renseignements relèvent des activités criminelles, il existe déjà des mécanismes. La RICO, Réponse intégrée au crime organisé, regroupe des représentants de tous les grands services de police du Canada, y compris la GRC. La RICO a pour mandat d'assurer un échange approprié de renseignements.

Il est intéressant de noter que, grâce à la RICO, il est possible de coordonner entre les différents organismes concernés, les mesures à prendre à partir des renseignements recueillis.

Ce sont là des mécanismes qui n'existaient pas nécessairement il y a quelques années.

M. Coons : Chaque semaine, les organismes d'application de la loi des États-Unis et du Canada effectuent des enquêtes qui ne sont pas nécessairement des enquêtes de grande envergure. Il ne s'agit pas de retracer des tonnes de narcotiques, par exemple, mais plutôt quelques immigrants illégaux cherchant à franchir la frontière. L'échange de renseignements nous permet d'effectuer chaque semaine des interventions de ce type. Ce ne sont pas nécessairement des interventions qui captent l'imagination du public et qui font les premières pages des journaux, mais de telles activités se déroulent en permanence.

Il est intéressant également de souligner que notre équipe de coordination internationale au quartier général de la GRC à Ottawa accueille des représentants de chacun des cinq organismes centraux. Au cours de mes séances de travail, je rencontre dans le même bureau des représentants de la Garde côtière des États-Unis, de l'Immigration and Customs Enforcement, de la patrouille frontalière des États-Unis, ainsi que de l'ASFC. Ce type d'interaction est propice à l'échange de renseignements et à la coordination entre nos organismes.

Le sénateur Lang : J'aimerais si possible poser quelques questions complémentaires sur les bâtiments des Grands Lacs et sur le programme Shiprider annoncé ici en mai. Je suppose que cette collaboration entraînera la présence de Canadiens sur les navires américains et vice-versa.

M. Cabana : En effet, monsieur le sénateur.

Le sénateur Lang : Les Américains disposent-ils d'un nombre précis de bâtiments dans les Grands Lacs et dans la Voie maritime?

M. Cabana : Il faut faire une distinction entre les Équipes de la sûreté maritime que nous déployons dans les Grands Lacs et qui patrouillent avec des embarcations d'assez grande taille pilotées strictement par des représentants canadiens — de la Garde côtière canadienne et de la GRC — et le programme Shiprider. Ce dernier est une initiative distincte qui vise expressément à mettre en œuvre la structure juridique nécessaire pour lancer des initiatives conjointes d'application de la loi dans le secteur maritime.

Le président : Pouvez-vous nous dire quels sont les rapports entre les Équipes de la sûreté maritime et les Équipes nationales d'enquêtes portuaires, ainsi qu'avec le Centre intégré d'évaluation des menaces et le Centre national d'évaluation des risques? Nous avons ici une pléthore d'organismes. Le surintendant Coons nous parlait tout à l'heure de sa collaboration avec diverses organisations. Pouvez-vous expliquer au comité quels sont les rapports qu'entretiennent ces quatre organisations?

M. Cabana : Je peux tenter de le faire. Les relations de travail entre certains de ces organismes sont — je regrette de le dire — « minimes ».

Dans le cas des initiatives d'application de la loi, vous avez mentionné les Équipes de la sûreté maritime et les Équipes nationales d'enquêtes portuaires. Ces organismes relèvent du Programme de l'intégrité des frontières de la GRC.

Le président : Et des EIPF, également?

M. Cabana : C'est exact. La coordination entre les programmes frontaliers que gère la GRC relève du même programme qui est dirigé et coordonné à partir du quartier général.

Le président : Ils font rapport à un surintendant principal qui vous présente ensuite son compte rendu?

M. Cabana : Tout à fait. Ils font rapport au surintendant Coons, qui est responsable de l'initiative des EIPF et du programme Shiprider.

Le président : Joe Oliver.

M. Cabana : Joe Oliver est actuellement le directeur général du Programme de l'intégrité des frontières. Le surintendant en chef Oliver reçoit les rapports des représentants de tous ces programmes et m'en fait un compte rendu.

Voilà comment nous assurons la coordination, l'échange interne des renseignements, entre toutes ces différentes initiatives.

Le Centre d'évaluation des menaces du CIEM et de l'ASFC ne joue pas nécessairement un rôle important. Le CIEM recueille les renseignements en provenance de tous les différents organismes et fournit au secteur des produits du renseignement. Nous recevons ces produits et nous nous servons de ces renseignements.

Le président : Est-ce que les trois premiers organismes produisent leurs propres renseignements ou obtiennent-ils leurs renseignements du CIEM ou du Centre national d'évaluation des risques?

M. Cabana : Les deux. Cependant, ils produisent leurs propres renseignements ou les obtiennent de la part d'organismes partenaires — les 55 organismes participants. Mais c'est vrai qu'ils reçoivent des produits du renseignement de la part de groupes comme le CIEM.

Le président : Nous sommes tout à fait dans les délais. Ce fut une séance d'information très instructive. À mesure que nous nous apprêterons à rendre visite aux différents secteurs de la frontière que nous parcourons virtuellement d'un océan à l'autre, nous aurons sans aucun doute d'autres questions à vous poser à vous et à vos représentants. Nous espérons obtenir des réponses aussi instructives que celles que vous nous avez données aujourd'hui. Nous vous remercions d'être venus et d'avoir présenté en détail, au cours d'une présentation antérieure, le programme Shiprider.

Au nom du comité, je vous remercie tous les deux d'être venus témoigner aujourd'hui.

Je m'adresse maintenant au public qui suit nos travaux à l'écran. Si vous avez des questions ou des commentaires à formuler, veuillez vous rendre sur notre site Web à l'adresse www.sen-sec.ca. Vous y trouverez les témoignages, les rapports du comité et les horaires confirmés de nos travaux. Sinon, vous pouvez prendre contact avec la greffière du comité en composant le 1-800-267-7362 pour obtenir des renseignements complémentaires ou de l'aide afin de prendre contact avec les membres du comité.

(La séance est levée.)


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