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Délibérations du Comité sénatorial permanent de la
Sécurité nationale et de la défense

Fascicule 9 - Témoignages du 5 octobre 2009


OTTAWA, le lundi 5 octobre 2009

Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit aujourd'hui, à 16 h 1, pour étudier et faire rapport sur la politique de sécurité nationale du Canada (sujet : la GRC en transition).

Le sénateur Colin Kenny (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : J'ai le plaisir de vous souhaiter la bienvenue à cette séance du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense. Je m'appelle Colin Kenny et je suis président du comité. Avant de commencer, j'aimerais présenter brièvement les membres du comité.

Il y a d'abord le sénateur Rod Zimmer de Winnipeg. Il possède une longue et remarquable feuille de route à titre de philanthrope. Il est membre du Sénat depuis août 2005 et fait également partie du Comité sénatorial permanent des transports et des communications.

Le sénateur Hector Daniel Lang réside au Yukon depuis plus de 50 ans. Il a été élu une première fois à l'Assemblée législative du Yukon en 1974. Il y a siégé pendant cinq mandats consécutifs avant de prendre sa retraite en 1992. Actif dans les affaires communautaires, il est actuellement vice-président du Conseil des gouverneurs du Collège Yukon. Le sénateur Lang est membre du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles.

Le sénateur Wilfred Moore a été nommé au Sénat en 1996. Il représente la Division sénatoriale de Stanhope St/ South Shore en Nouvelle-Écosse. Actif à l'échelle municipale à Halifax-Dartmouth, il fait aussi partie du Conseil des gouverneurs de l'Université Saint Mary's. Il est également membre du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce et du Comité mixte permanent d'examen de la réglementation.

Le sénateur Pierre Claude Nolin est avocat et a été nommé au Sénat en juin 1993. Il est actuellement vice-président du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles et fait également partie du Comité sénatorial permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement.

Le sénateur Pamela Wallin est originaire de la Saskatchewan. Elle a été nommée au Sénat en 2009. Après une longue carrière en journalisme, le sénateur Wallin a été consule générale du Canada à New York. Elle a également fait partie du groupe d'experts indépendants sur l'avenir de la mission canadienne en Afghanistan. Elle est vice-présidente de notre comité en plus d'être membre du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international.

Le sénateur Fabian Manning a consacré sa carrière au service des citoyens de Terre-Neuve-et-Labrador aux trois paliers de gouvernement. Il a été nommé au Sénat en janvier 2009. Il préside le caucus de l'Atlantique du gouvernement conservateur et siège au sein du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans.

Le sénateur Joseph Day nous vient du Nouveau-Brunswick où il est bien connu à titre d'ingénieur et d'avocat en pratique privée. Il fait partie du Sénat canadien depuis octobre 2001. Le sénateur Day est membre du Conseil des gouverneurs du Collège militaire royal du Canada. Il assume actuellement la présidence du Comité sénatorial permanent des finances nationales.

Chers collègues, nous accueillons aujourd'hui David McAusland, président du Conseil de mise en œuvre de la réforme au sein de la GRC. M. McAusland est un cadre supérieur possédant une expertise et une expérience approfondies de la gestion organisationnelle. Parmi les hauts faits de sa carrière, notons qu'il a représenté les intérêts de la Société Alcan dans ses visées d'expansion mondiale en plus de pratiquer le droit des valeurs mobilières et de s'occuper de fusions et d'acquisitions.

Nous avons également avec nous Beverley Busson, ancienne commissaire de la GRC. De décembre 2006 à juillet 2007, elle a été la première femme à occuper ce poste. Au fil d'une carrière bien remplie, Mme Busson s'est vu décerner un doctorat honorifique en droit du Collège universitaire de Fraser Valley en plus d'être admise au grade de Commandeur de l'Ordre du mérite des corps policiers de la Colombie-Britannique.

Pour sa part, Peter D. Martin est sous-commissaire, dirigeant principal des ressources humaines à la GRC. Le sous- commissaire Martin a occupé différents postes dans plusieurs régions du pays depuis qu'il a joint les rangs de la GRC en 1969. Ses fonctions l'ont notamment amené à travailler au sommet du G7 tenu à Toronto en 1988. Il a représenté la GRC au sein d'un projet sur les communications en cas d'urgence dans le Sud-Ouest de la Colombie-Britannique et a été nommé sous-commissaire des Services nationaux de police.

Au nom du comité, je vous remercie tous les trois pour votre présence cet après-midi. Vous allez nous aider dans la préparation de notre rapport sur la transition en cours à la GRC.

Le sénateur Wallin : Nous vous sommes reconnaissants d'avoir bien voulu vous présenter devant nous malgré ce court préavis.

Je vais débuter avec M. McAusland et Mme Busson. J'aimerais parler du travail qu'ils accomplissent avant de m'adresser au sous-commissaire, si cela est possible.

Je sais qu'il ne s'agit pas de votre première comparution devant nous, monsieur McAusland. J'aimerais que vous nous disiez d'abord où en est rendu le Conseil de mise en œuvre de la réforme au sein de la GRC, dont le mandat prévoyait la présentation d'un rapport au ministre avant le 30 septembre. Je ne sais pas ce que vous pourriez nous apprendre au sujet de ce rapport ou de ses objectifs généraux. Il serait bon que vous fassiez le point avec nous sur l'état d'avancement des travaux de votre conseil.

David McAusland, président, Conseil de mise en œuvre de la réforme au sein de la GRC : Afin de situer notre conseil dans son contexte historique, je vous rappelle que notre premier mandat nous a été confié en date du mois de mars 2008. Nous avons présenté un rapport préliminaire en septembre 2008. En mars 2009, on nous a accordé un sursis d'exécution ou une prolongation de mandat, selon le point de vue où l'on se place. Mais restons positifs et disons que notre mandat a été prolongé. Nous y avons certes vu une démarche favorable, tout comme la GRC, je crois.

Nous avons poursuivi notre travail. Pas plus tard que la semaine dernière, nous avons soumis au ministre notre rapport qui était attendu pour septembre. Le ministre n'a pas encore eu l'occasion d'en prendre connaissance, mais je suis persuadé qu'il pourra le faire au cours des prochains jours et que le rapport poursuivra alors son cheminement sur les tribunes publiques. Nous continuerons notre travail jusqu'en mars 2010; nous verrons alors si on nous coupera les vivres ou si on nous permettra de terminer ce que nous avons commencé.

Je vous dirais qu'il y a plusieurs façons d'envisager notre mandat. Celui-ci s'articule autour d'une cinquantaine de recommandations dont nous allons superviser la mise en œuvre. Dès le départ, nous avons considéré notre mandat dans une perspective d'évolution générale. On cherche à procéder à une transformation durable, plutôt qu'à des modifications ciblées ou très spécifiques. En collaboration avec la GRC et le gouvernement, nous avons contribué à initier des changements par rapport à ces éléments particuliers. Nous avons également cherché à faire évoluer les aspects liés aux attitudes, à la culture et aux infrastructures qui fourniront à la GRC les moyens de donner suite aux recommandations correspondantes, tout en lui permettant de s'adapter au fur et à mesure à l'évolution des choses au sein de la société. Il s'agit de faire de la GRC une organisation plus moderne, capable de procéder aux ajustements requis, ce qui n'est pas nécessairement facile pour une force policière.

Nous avons obtenu une excellente collaboration de la part de la GRC. J'insiste sur ce point qui n'a pas manqué de soulever l'enthousiasme de tous les membres de notre comité. La GRC s'est montrée extrêmement ouverte à notre contribution. Nous ne nous sommes heurtés à aucune forme de résistance, tant du point de vue de la collaboration concrète que dans la perspective de l'ouverture d'esprit. Il y a une différence entre la collaboration offerte pour faciliter un processus et la coopération assortie d'une acceptation réfléchie du processus. Je dirais que notre mode de partenariat a évolué pour atteindre un degré semblable d'ouverture d'esprit. Il ne faudrait pas en conclure que toutes les discussions ont été faciles, car nous avons eu des débats aussi rigoureux que vigoureux, tant sur des points bien précis qu'au sujet du processus global.

Nous nous attaquons aux différents dossiers importants les uns après les autres. Au cours des derniers mois, nous nous sommes concentrés sur les structures et les aspects liés aux ressources humaines et au leadership. Nous nous sommes intéressés à la culture et aux structures de communication, des aspects primordiaux. Au cours des prochains mois, nous nous tournerons vers la structure de gouvernance de la GRC, un élément crucial dans la réussite du processus de transition dans son ensemble. Comme il s'agit d'une question complexe, nous l'avons gardée pour la toute fin de notre démarche.

Le sénateur Wallin : Vous avez indiqué avoir obtenu l'appui et l'accueil favorable de la GRC en réponse à votre présence, à vos questions et à vos suggestions. Comme le processus se déroule en temps réel, il ne s'agit pas ici de voir si l'on peut recommander une transformation. Est-ce bien cela?

M. McAusland : Tout à fait. C'est l'un des aspects importants, mais vous avez raison.

Le sénateur Wallin : Oui, je voulais résumer le tout.

M. McAusland : C'est la façon dont nous opérons. C'est du travail en direct et en temps réel, poussé à l'extrême.

Le sénateur Wallin : Pourriez-vous nous donner un ou deux exemples? J'aimerais ensuite entendre le point de vue de Mme Busson. Est-ce que des choses ont déjà changé? Est-on passé du point A au point B dans certains dossiers de manière à rendre la GRC plus efficace?

M. McAusland : Il est difficile de mettre le doigt sur une réussite en particulier parce que nous intervenons dans un large éventail de dossiers. Je dirais que le changement se concrétise davantage au niveau des attitudes. Le meilleur exemple à vous fournir serait celui d'un aspect pour lequel nous n'avons pas encore atteint notre objectif en raison de difficultés bien ancrées, celui des communications.

Il est bien connu que nous vivons dans une société de transparence à laquelle les gens se sont habitués. Chacun peut être rapidement mis au courant de tout ce qui se passe. Il est très difficile pour une organisation de réussir ou de prospérer sans une démarche fondée d'une manière ou d'une autre sur la transparence. En toute franchise, les forces policières et les autres organisations du genre ont beaucoup de retard à rattraper à ce chapitre, car elles n'ont pas l'habitude des communications ouvertes. Au départ, nos discussions à ce sujet ont été plutôt pénibles, pas en raison d'une confrontation directe, mais du fait que nous n'étions pas sur la même longueur d'onde. Nous avons accompli des progrès tout à fait remarquables pour en arriver à une reconnaissance de l'importance cruciale d'une stratégie pour des communications de grande qualité dans la réussite de la GRC.

Cet état de fait est reconnu et accepté de tous. Nous avons encore du chemin à faire, mais nous avons énormément progressé dans la sensibilisation à l'importance de cette question. Je vous ai cité cet aspect en exemple, même si l'objectif n'est pas encore atteint.

Beverley A. Busson, membre, Conseil de mise en œuvre de la réforme au sein de la GRC : Si vous voulez connaître mon point de vue au sujet de quelques-unes des difficultés qui nous attendent et des changements qui ont été apportés, je pourrais reprendre à mon compte les observations de mon collègue concernant les éléments liés aux communications.

À la lumière des expériences que j'ai vécues dans les 33 années précédant ma retraite, y compris les sept mois passés récemment à titre de commissaire de la GRC, je dirais que l'un des principaux défis demeure associé à cet aspect des communications et à cette volonté de la GRC de trouver le juste équilibre entre la protection de la vie privée des gens que nous servons et le droit du public de savoir.

Du point de vue des attitudes, la protection de la vie privée est au cœur des préoccupations des membres de la GRC qui doivent se montrer très prudents dans toutes leurs conversations, même avec leurs proches et leurs voisins dans leur vie personnelle. Voilà maintenant qu'on leur demande d'être davantage ouverts et transparents. Il s'agit à n'en pas douter d'un changement d'attitude.

Je note également une transformation au niveau du leadership. Les gens semblent mieux disposés à prendre plus de risques, encore là surtout au chapitre des communications, mais aussi quant à la façon dont nous travaillons avec les gens et nous allons de l'avant. Je peux constater de tels changements.

Il est intéressant pour moi de noter que bon nombre des 49 recommandations et des modifications que la GRC s'emploie à apporter figuraient sur la liste des changements souhaités par l'organisation depuis un bon moment déjà. Ainsi, les gens s'attendent à ce moment miracle où la transformation sera instantanée, mais les efforts en ce sens ne datent pas d'hier.

Le sénateur Wallin : Il y a un certain temps, vous avez donné une note de 7 sur 10 au processus de transformation. Est-ce que cette note s'est améliorée? Le processus suit-il normalement son cours? Comment décririez-vous la situation actuelle?

Mme Busson : Si l'on utilise ce genre de barème, je dirais que c'est 7 sur 10 et qu'on s'en va dans la bonne direction.

Le sénateur Wallin : Est-ce qu'on avance rapidement?

Mme Busson : La situation évolue quotidiennement. Au cours des six ou huit prochains mois, le rythme va s'accélérer dans certains de ces dossiers en raison de l'impulsion donnée sous l'effet du leadership et des communications. Je constate déjà les avantages découlant de certaines des stratégies de communication adoptées qui favorisent une plus grande transparence.

M. McAusland : J'aimerais ajouter quelque chose pour que tout soit bien clair. Il faut que nous établissions notre situation actuelle en matière d'attentes et d'échéanciers, notamment. Pour ce qui est des attentes, je dirais que nous nous tirons bien d'affaire pour l'instant, aux trois quarts de notre mandat. Je tiens à revenir sur ce point déjà soulevé par Mme Busson. Nous en sommes maintenant à une étape importante, alors que nous abordons le sujet du modèle de gouvernance, qui est délicat tant pour la GRC que pour l'appareil gouvernemental. Il s'agit d'une problématique à part entière. C'est un aspect crucial, car il pourrait être déterminant quant à la possibilité pour la GRC de devenir l'organisation souhaitée du point de vue de la capacité d'adaptation et de l'ouverture au changement et à la transition.

Le sénateur Wallin : Monsieur le président, pourrais-je avoir de nouveau la parole ultérieurement pour discuter avec le sous-commissaire Martin de questions qui ne sont pas reliées à celles-ci? Je voudrais que tous mes collègues aient la chance de parler aux représentants du Conseil de mise en œuvre de la réforme.

Le président : Vous êtes le seul sur la liste.

Le sénateur Wallin : Je crois qu'il y en a certains qui croyaient le contraire.

Le sénateur Lang : J'aimerais discuter davantage des recommandations et de leur mise en œuvre. Vous avez indiqué être allé au-delà des recommandations du point de vue des attitudes et de la culture sous certains aspects. Pouvons- nous espérer savoir combien parmi les 49 recommandations ont été mises en œuvre et nous sera-t-il possible de discuter de la manière dont on a procédé et des résultats obtenus?

M. McAusland : Je vous répondrais que oui. À nos deux premiers rapports, nous avons annexé une liste de ces recommandations où l'on précisait l'état d'avancement de leur mise en œuvre et les motifs applicables. Nous n'avons toutefois pas joint cette liste à notre présent rapport, car nous souhaitions que les détails soient laissés à l'arrière-plan pour l'instant. Nous avons fait le point sur la progression de ces dossiers dans nos deux premiers rapports, et nous le ferons à nouveau à l'avenir. En tout temps, il nous est possible de discuter de ces questions avec tous les intéressés.

Assurément, des progrès sont réalisés et suivis de près au moyen de différents outils dans la foulée de nos efforts diligents pour donner suite à chacune de ces recommandations. Nous adoptons à la fois une approche globale et ciblée dans ce processus; cela ne fait aucun doute.

Le sénateur Lang : J'aimerais aborder un autre aspect avant de parler des ressources humaines. Le recrutement est source de préoccupations à la GRC depuis un bon moment déjà. Les changements apportés apparaissent favorables. Je constate que le nombre de recrues a augmenté par rapport à l'an dernier et que vous en attendez encore plus au cours de l'année qui vient. Est-ce que ces résultats vous satisfont? Croyez-vous que ces chiffres vont augmenter encore ou se stabiliser au cours des prochaines années?

M. McAusland : Il y a différentes façons de répondre à votre question.

Il sera surtout important de voir ce qu'en dira le sous-commissaire Martin, mais il va de soi que des progrès considérables ont été réalisés dans le cadre de la campagne de recrutement. Les modifications apportées à la politique de rémunération des cadets y sont pour quelque chose. En toute franchise, cela montre bien qu'il ne faut pas perdre de vue l'aspect financier, un sujet que tout le monde tente d'éviter, car il nous faut faire valoir au gouvernement que des sommes devront être investies pour faciliter la réussite de la GRC et ses efforts de recrutement. Il faut notamment se demander dans quelle mesure les gens sont prêts à investir dans le recrutement au cours des prochaines années. Je crois que la réponse à cette question sera déterminante quant à l'intensité des activités de recrutement.

Au cours des derniers mois, soit depuis à peu près un an, la GRC s'est distinguée en adoptant une approche beaucoup plus saine en matière de recrutement. Ce n'est pas normalement dans ma nature, mais permettez-moi une petite touche de cynisme pour bien répondre à votre question. N'oublions pas que nous vivons actuellement un important ralentissement économique, c'est le moins que l'on puisse dire. Il va de soi que c'est une situation favorable au recrutement au sein de la GRC. Personne ne pourrait nier cette évidence et nous n'allons pas chercher à le faire. Ce n'est pas une circonstance que je vais essayer de balayer sous le tapis en répondant à votre question.

Sans dévaluer le progrès accompli, un élément de réponse est le contexte actuel. Au même titre que bien d'autres aspects de notre collaboration avec la GRC, il sera intéressant de voir avec le temps si le même niveau de ressources financières sera maintenu pour assurer la pérennité de notre succès. Dans quelle position sera la GRC lorsque la concurrence pour le recrutement de nouveaux talents se fera encore plus féroce qu'aujourd'hui? Cet enjeu sera intéressant, mais pour le moment, un important travail de préparation a été réalisé et il a fait notre réussite.

Mme Busson : M. McAusland a fourni une excellente réponse. Je comprends de l'exposé du sous-commissaire Martin que les objectifs ont été atteints et que les postes à pourvoir dépendent maintenant des attentes des partenaires du contrat et des allocations budgétaires.

Le sénateur Zimmer : Ma question est complémentaire à celle du sénateur Lang. Le recrutement se fait-il conformément aux directives du rapport Brown selon lesquelles il faut mettre l'accent sur les femmes, les Autochtones et les minorités? Le recrutement de la GRC va-t-il en ce sens?

M. McAusland : La réponse directe est oui, absolument. Tous les objectifs précis, pris un à un, ont-ils été atteints? Non. Allons-nous dans la bonne direction? Oui. Des programmes spéciaux sont-ils lancés et des innovations sont-elles introduites pour faciliter le recrutement? Oui. J'ai de la documentation à ce propos avec moi, mais je pense que la bonne personne pour vous donner plus de détails est le sous-commissaire Martin.

Nous estimons, à titre de conseil de mise en œuvre de la réforme, que la situation progresse dans la bonne direction.

[Français]

Le sénateur Nolin : Monsieur McAusland, j'aimerais poursuivre où nous avions suspendu notre discussion. Une des recommandations importantes vise ce fameux principe d'entité distincte et le statut d'employeur distinct.

J'aimerais que l'on reprenne votre réponse de la dernière fois. Pour les gens qui nous écoutent et les néophytes comme moi, pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste le statut d'employeur distinct?

M. McAusland : Vous avez dit que nous avions suspendu cette discussion la dernière fois, or je n'en suis pas tout à fait convaincu.

Le sénateur Nolin : Disons que j'étais resté sur mon appétit.

M. McAusland : Si je me souviens bien, nous avions apporté une réponse complète à cette question.

La question est complexe. Le terme « employeur distinct » est utilisé de façon différente d'une personne à l'autre. Nous avons remarqué, au départ, une certaine confusion concernant cette expression. Le conseil, dès le début, a pris la résolution, dans le sens intellectuel et non pas formel, de voir le concept d'employeur à part de façon non technique. L'interprétation technique du terme signifierait que tous les employés sont employés de cette entité plutôt que du gouvernement au sens large.

Voilà la réponse la plus simple à votre question. Toutefois, je répète que, pour les fins de nos travaux et de nos discussions avec la GRC, nous ne le considérons pas ainsi.

Dans notre analyse de la structure de la régie de la GRC, nous avons opté pour le gros bon sens et nous sommes posés la question suivante : en termes de relations avec le gouvernement, comment pourrait-on atteindre les objectifs sans nécessairement s'obséder avec un concept étroit et technique?

[Traduction]

Le sénateur Nolin : Sous-commissaire Martin, voyez-vous des avantages ou des désavantages à ce principe? Ce principe est très important. Je suis sûr qu'il affectera votre vision de l'avenir.

Peter D. Martin, sous-commissaire, dirigeant principal des ressources humaines, Gendarmerie royale du Canada : Lorsqu'il est question du statut d'employeur distinct ou d'entité séparée, le gouvernement peut habiliter la GRC de plusieurs façons. Il peut définir les compétences de la GRC par un processus de restructuration en bonne et due forme, ou encore par le biais d'un élargissement des pouvoirs. Un dialogue à ce sujet a déjà été entamé.

D'un point de vue opérationnel quant à la gestion quotidienne de la GRC, il est important d'avoir les compétences nécessaires. Le conseil de mise en œuvre de la réforme au sein de la GRC, le bureau du commissaire et le gouvernement discutent ces temps-ci, à savoir si ces pouvoirs seront conférés au moyen d'une restructuration ou par des pouvoirs élargis.

Le sénateur Nolin : Madame Busson, pouvez-vous nous expliquer comment fonctionne le système de promotion de la GRC pour les employés civils et pour les membres?

Mme Busson : Pour les membres de la GRC, la promotion est fonction du rendement, des compétences et des habiletés. Selon le nombre d'années de service qu'il détient, un membre devra posséder un certain nombre de compétences. Son profil de compétences déterminera ensuite les postes à pourvoir pour lesquels il peut postuler dans le cadre d'un concours.

Pour les civils, je crois que le même processus s'applique. Vous savez bien sûr que chaque poste requiert ses propres compétences et présente ses propres difficultés. Le membre d'une escouade antidrogue aura un ensemble de compétences différent d'une personne qui gère une équipe responsable de la sécurité routière ou qui effectue un travail de la sorte.

Le sénateur Wallin : J'ai une autre question à poser. Il y a eu des discussions à propos de l'exigence d'un diplôme d'études postsecondaires comme critère de base pour le recrutement. Ce sujet soulève beaucoup de controverse. Nous vous demandons de répondre à cette question bien que d'autres gens puissent y répondre également. Est-ce hors sujet?

Le sénateur Nolin : Non.

Mme Busson : Ce sujet a été l'objet de nombreuses discussions au conseil et est traité dans le rapport du groupe de travail Brown. D'après nos discussions, le groupe de travail Brown a été mis sur pied au moment où la GRC était en processus de recrutement intense et était sans conteste dans une position inconfortable.

Également, il faut remarquer que bien des compétences et des habiletés sont nécessaires pour devenir un excellent agent de police. Même si un jeune n'a, disons, qu'un diplôme d'études secondaires de la Nouvelle-Écosse, de la Saskatchewan ou de la Colombie-Britannique, mais qu'il a néanmoins une compétence exceptionnelle pour traiter avec les gens et un énorme potentiel pour travailler à la GRC, cette dernière verra au perfectionnement de ce jeune une fois qu'il se sera joint à elle. J'ai, pour ma part, pu obtenir ma licence en droit avec l'aide de la GRC, une fois parmi ses rangs.

Le président : Cette politique est-elle toujours en vigueur, commissaire Busson?

Mme Busson : Oui, elle l'est à ma connaissance. Par contre, je n'en suis pas sûre pour ce qui est des licences en droit.

Le président : Je parlais des licences en droit.

M. Martin : Aucune politique actuelle n'exige un diplôme d'études postsecondaires pour entrer à la GRC. Une telle politique pourrait désavantager certains de nos groupes cibles.

Le président : Là n'est pas ma question. Voici ma question : la GRC soutient-elle toujours les personnes qui entreprennent des études postsecondaires?

M. Martin : Oui.

Le sénateur Lang : Je vais poursuivre sur cette question. Une exigence pour un diplôme d'études postsecondaires ne constituerait-elle pas une sérieuse entrave au recrutement de la GRC, qui risquerait même de se retrouver dans une situation désastreuse?

Mme Busson : Il est difficile de le prédire, mais je crois que cette recommandation désavantagerait non seulement la GRC, mais plus particulièrement certains groupes cibles, comme l'a dit M. Martin. En fin de compte, dans bien des cas, le niveau d'études d'une personne n'est pas nécessairement le meilleur indicateur du genre d'agent de police que cette personne peut être. Sans aucun doute, la GRC encourage et soutient les employés qui selon eux, et d'après elle également, doivent suivre certains programmes de formation et d'apprentissage pour progresser dans leur carrière.

M. McAusland : Je suis d'accord. Pour répondre sans détour à votre question concernant l'exigence d'un diplôme d'études postsecondaires, le Conseil de mise en œuvre de la réforme au sein de la GRC a envisagé cette recommandation avec beaucoup de précaution. Nous sommes prudents à ce sujet. En d'autres mots, nous avons déconseillé à la GRC d'appliquer cette recommandation de manière absolue. Donc, nous ne prévoyons pas nous laisser obnubiler par la recommandation d'une exigence aussi rigoureuse qui, pour être franc, nuirait au recrutement et à quelques autres objectifs auxquels vous avez fait référence dans votre question précédente.

[Français]

Le sénateur Nolin : Maître McAusland, je suis sûr que vous êtes familier avec le système de promotion et que vous l'avez examiné sous toutes ses coutures.

Prenons l'exemple d'un membre qui se plaint ou qui prétend qu'il aurait dû recevoir une promotion et ne l'obtient pas. Le processus actuel satisfait-il vos préoccupations ou pensez-vous qu'on devrait mettre en place, ou que vous devriez proposer la mise en place de mécanismes beaucoup plus transparents, plus équitables?

M. McAusland : Nous sommes satisfaits de l'approche que la GRC maintient maintenant. J'ajouterai que, parce que cela va de main en main, nous avons vu beaucoup de progrès dans les pratiques de la GRC — en terme des plaintes, des difficultés, des controverses avec des membres de la GRC — qui ont été améliorées de façon extrêmement importante depuis un an ou un petit peu plus. On a fait un travail énorme pour alléger le processus, enlever des embûches, régler des cas facilement réglables et éviter des embouteillages dans les relations avec les employés comme auparavant. Il y a eu énormément de progrès à ce sujet.

Le sénateur Nolin : Je veux vous croire, mais j'en suis sur l'arbitrage de ces différends. La personne qui prétend avoir été maltraitée ou ne pas avoir obtenu le traitement qu'il ou elle prétendait avoir, voudra que l'arbitrage de ce différend soit fait de façon transparente et à distance de ceux et celles qui ont pris la décision en première instance.

Pouvez-vous nous rassurer que ce qui vous satisfait en tant que juriste, c'est justement un système qui est à la fois juste, efficace, et acceptable pour les parties à ce différend?

M. McAusland : Je suis là en tant que président du conseil et pas en tant qu'avocat. Alors, l'opinion que j'exprime ne sera pas un avis juridique.

Le sénateur Nolin : Je comprends, mais lorsqu'on a été avocat, on l'est encore. On ne peut pas oublier nos critères de justice naturelle et l'importance qu'on accorde à l'équité.

M. McAusland : Nous sommes sur la bonne piste en termes des progrès que nous connaissons présentement avec la GRC. Est-ce que, dans la pratique, dans le contexte actuel, c'est la perfection totale au cas par cas? Je ne suis pas en mesure de commenter cela.

A-t-on connu un progrès et changer de façon importante notre approche vis-à-vis les habitudes, les structures, la culture, la philosophie à l'égard des différends avec les employés? Oui. Est-ce que je considère qu'il s'agit d'une amélioration importante? Oui. Sommes-nous sur la bonne piste? Oui. Sommes-nous là où nous devons être? Je ne suis pas en mesure de commenter sur le cas par cas. Je gagerais qu'il y a sûrement des cas ici et là qui sont imparfaits. La GRC est une grosse machine et par définition, c'est imparfait. Et cela va le rester, mais il faut essayer de limiter les imperfections.

Le sénateur Nolin : On aura certainement la possibilité de poursuivre cette conversation.

M. McAusland : Je l'espère bien, et je reste sur mon appétit.

Le sénateur Nolin : Moi aussi !

[Traduction]

Le sénateur Mitchell : Je veux m'attaquer à un sujet en particulier : le niveau de participation des femmes. Je ne parle pas de leur participation dans l'ensemble de la GRC, mais parmi les rangs des gendarmes. Les femmes représentent je crois environ 20 p. 100 de l'ensemble des hauts gradés. Ce nombre n'est pas très élevé, ce qui fait foi de votre grande compétence, commissaire Busson. Il n'y a que 6 femmes parmi les 75 hauts gradés.

La GRC a fourni une donnée intrigante à ce comité concernant le recrutement pour 2008-2009 et 2009-2010 : bien que la GRC compte 20 p. 100 de femmes parmi ses employés, la cible de recrutement pour cette période est de 17 p. 100.

Veuillez me confirmer que la GRC ne tente pas de réduire le nombre de femmes à son emploi. Qu'est-ce qui explique cette anomalie?

Mme Busson : Je n'étais pas chargée d'établir les objectifs lors de cette période. Les efforts que j'ai pu observés à cet effet tiennent compte du nombre de femmes sur le marché du travail et des attentes réalistes que l'on peut formuler sur le sujet. Je pense que les objectifs sont fixés selon ces paramètres.

Je peux vous dire ce que je sais au sujet du recrutement des femmes dans la GRC de façon générale et au fil du temps. Ma fille est membre de la GRC. Je faisais partie du premier groupe de femmes à joindre les rangs de la GRC. Je sais que cette dernière a entrepris des initiatives intéressantes et étonnantes pour attirer les femmes.

C'est le genre de carrière à laquelle n'aspirent pas toutes les petites filles, comme vous pouvez l'imaginer, de nos jours, bien que je pense que plus de filles que jamais auparavant y aspirent. Je souris lorsque je rencontre des enfants et des jeunes femmes qui aspirent à faire carrière dans la GRC, et de manière naturelle.

Je m'en remets à mon ami, le sous-commissaire Martin, pour vous expliquer comment ces objectifs ont été fixés et pourquoi. À partir de ma propre expérience, je peux témoigner du fait que d'énormes efforts sont faits pour attirer plus de femmes, et plus de femmes compétentes, dans la GRC.

M. Martin : Il y a environ 18 mois, toute la question du recrutement était un important problème. Nous n'arrivions pas à atteindre nos cibles. J'étais une des personnes au sein de l'État-major supérieur qui avait l'habitude de talonner les ressources humaines parce qu'elles n'arrivaient pas à atteindre les quotas que nous avions chaque année. Malheureusement pour moi, je pense que le commissaire voulait que je mette mes paroles en pratique, et il m'a demandé d'assumer la direction des Ressources humaines, ce que j'ai fait.

La première chose que nous avons dû faire, c'est de stopper l'hémorragie, parce que nous avions beaucoup trop de postes vacants sur le terrain. Ces postes vacants imposaient beaucoup trop de travail aux agents que nous avions déjà en place, et il s'agissait également d'un problème de sécurité en termes de renfort, particulièrement dans le cas des petits détachements.

Nous devions atteindre nos objectifs. Lorsque nous avons établi ces objectifs, nous voulions au moins aller chercher le chiffre correspondant à la disponibilité sur le marché du travail, et le chiffre relatif à la disponibilité sur le marché du travail des femmes pour le travail de policière était de 17 p. 100.

Nous arrivons maintenant à une étape où nous travaillons sur un plan quinquennal. Les chiffres relatifs à la disponibilité sur le marché du travail sont fondés sur les chiffres publiés par Ressources humaines et Développement des compétences Canada et par Statistique Canada en 2001. Nous travaillons actuellement avec ces ministères pour mettre ces chiffres à jour. Je m'attends à ce qu'ils augmentent. Toutefois, même si nous avons un chiffre de 17 p. 100, nous devrions certainement tenter d'atteindre cet objectif.

Pour la première fois — depuis aussi loin que je puisse me rappeler dans le cas de la GRC —, nous avons atteint nos cibles au cours des deux dernières années. Non seulement les avons-nous atteintes, mais nous les avons dépassées. Notre capacité pour former des gens à Regina a été portée à 72 troupes par année. On compte 32 cadets dans une troupe. Cette capacité a représenté un pas énorme au niveau de l'infrastructure. Ce qui importe maintenant, ce n'est pas le fait que nous atteignons nos cibles, mais le fait que nous avons maintenant la capacité. Nous pouvons ouvrir ou fermer le robinet de manière à pouvoir répondre aux besoins des provinces, des territoires, du fédéral et des services à contrat en termes de nouveaux agents de police sur le terrain.

L'an dernier, le Dépôt a accueilli 57 troupes. Notre objectif était de 55 et chacune de ces troupes était complète, c'est-à-dire qu'il y avait 32 cadets par troupe. C'était la première fois, à ma connaissance, que nous n'avons eu personne qui a décidé de ne pas se présenter le premier jour.

Nous avons perdu un ou deux cadets au départ, mais nous n'avons pas perdu de place dans la troupe. Nous avons mis en oeuvre un programme de cadet flexible permettant d'assigner des cadets au-delà du chiffre 32, de sorte que si nous perdons un candidat la première ou la deuxième semaine, nous pouvons assigner un nouveau cadet à la troupe sans perdre de place.

Toute la question de la formation a été un énorme problème. Je ne suis pas heureux de ce 17 p. 100. Mon propre problème de responsabilisation, c'est que j'ai cinq soeurs, j'ai une fille dans la GRC et ma femme est une employée civile de la GRC. Si je ne réalise pas cet objectif, je vais y goûter à la maison également.

Le sénateur Mitchell : C'est de l'excellente information. Pour continuer dans la même veine, il y a deux côtés à cette question. Le premier, c'est le recrutement et l'autre, c'est le maintien des femmes en poste. Le commissaire Elliott s'est montré intense et passionné à l'égard de cette question, parlant de ses trois filles, et disant que nous n'en faisons pas suffisamment.

Je vais citer un point qu'il a fait valoir : « Je sais que nous avons perdu beaucoup de femmes [...] qui ont quitté la GRC au moment où elles avaient de jeunes enfants. Nous devons trouver de meilleurs moyens de les appuyer durant ces années-là. »

Quelqu'un a dit au sujet du problème que peut-être nous devrions autoriser les gens à partir à 16 h 30 dans des circonstances particulières pendant une période de leur vie, parce que si nous ne leur accordons pas cette souplesse, ces gens doivent quitter la GRC. Il dit que nous devons appuyer davantage ces gens au cours de ces années.

Outre le projet pilote de la Colombie-Britannique dont il a parlé, y a-t-il un programme concerté, spécifique et généralisé à cet égard? Y a-t-il un changement culturel pour voir comment on peut accorder aux femmes la souplesse nécessaire pour qu'elles puissent demeurer en poste?

M. Martin : Oui, sénateur, mais je dois dire non à 100 p. 100. Des gens gèrent l'organisation. Beaucoup de gens sont dans des régions éloignées. Je constate cela dans l'ensemble de la GRC, dans certaines régions, et certaines personnes sont plus flexibles que d'autres.

Nous avons créé quatre comités pour l'équité en matière d'emploi pour traiter de l'égalité en matière d'emploi dans l'ensemble de l'organisation. Il existe un tel comité pour les femmes. Le champion de ce comité est une sous- commissaire, qui est notre dirigeante principale de l'information à la GRC. Elle défend, avec le comité, beaucoup de questions dont vous parlez.

Les comités sont en place depuis environ un an. Ils se sont entendus sur leurs mandats. Maintenant, ils examinent toutes ces questions. Les comités recommanderont à la direction des cibles précises de manière que nous soyons plus flexibles et ouverts.

Une fois que nous connaîtrons ces cibles, nous allons leur faire une place dans notre politique. Lorsque M. McAusland a parlé du changement de culture, auparavant, un comité comme ceux-là aurait pu présenter un rapport, le rapport aurait pu circuler le long de la chaîne de commandement et aurait pu être supprimé, si l'officier suivant dans la chaîne n'était pas d'accord avec son contenu.

Dans ce cas particulier, ces comités font rapport directement à l'État-major supérieur, et ils recevront une oreille attentive. Cet accès est un changement pour nous et il s'agit là d'une nouvelle façon de penser au sein de la GRC.

Le sénateur Moore : Monsieur McAusland, je veux vous parler de la question de gouvernance, dont vous avez dit qu'elle était la clé de votre travail. Vous avez dit qu'il s'agissait d'un domaine complexe et délicat.

Avez-vous le sentiment qu'il y a, au sein de la GRC, des réticences à l'égard d'une supervision par des civils?

M. McAusland : Nous devons répondre à cette question en fonction de trois volets différents. Il y a la supervision dans le sens disciplinaire, dans le sens des enquêtes touchant le comportement de la GRC et les plaintes, et ensuite, il y a la supervision en termes de gestion. Et enfin, il y a la supervision en termes de politique publique.

Je vais répondre à votre question en fonction de ces trois volets. Peut-être vais-je commencer par le dernier, reconnaissant que le côté politique de GRC — pour ce qui est de l'établissement des priorités dans son travail, du genre de criminalité ou de mauvais comportement qu'elle doit cibler et combattre avec plus d'empressement — est une question qui relève clairement et directement de la GRC et du gouvernement. Ce volet est une politique fondamentale dont le gouvernement doit décider.

Si nous devions accorder la priorité, par exemple, à une initiative majeure sur la pornographie infantile, ou sur quelque sujet que ce soit à un moment donné, cette question est quelque chose qui intéresse directement le gouvernement et la GRC. Cet exemple illustre le premier volet.

À l'autre extrémité du spectre, le premier volet que j'ai mentionné, c'est le processus disciplinaire ou de plaintes, qui est quelque chose en soi. Comme vous le savez, c'est une question que l'on examine en ce moment même : quelle sorte de mécanismes et quelle sorte d'organisme indépendant, nommé par qui, surveillera la conduite de la GRC?

La GRC a fait preuve d'une grande ouverture à l'égard de ce concept, bien que le diable se cache dans les détails, comme dans n'importe quoi d'autre. Dans la mesure où nous pouvons le dire d'après nos discussions avec la GRC, il y a une ouverture à l'égard de ce concept et il y a un dialogue vivant qui se poursuit entre la GRC, le gouvernement fédéral et les provinces sur cette question.

Des progrès sont réalisés dans ce domaine indépendamment de notre conseil, non pas parce que nous sommes exclus, mais de la façon que nous avons vu cette question se développer, notre participation, à vrai dire, aurait compliqué les choses, parce que des progrès étaient réalisés et que le gouvernement fait preuve de beaucoup d'initiative dans ce dossier.

L'autre volet, que j'appelle la gestion, concerne les politiques relatives au budget, aux ressources humaines et à de nombreuses questions dont nous avons discuté au cours de la période de questions. La plupart des préoccupations qui ont été exprimées dans vos questions cet après-midi relèvent de cet autre volet, qui est davantage la gouvernance générale, ce que nous appellerions la saine gestion. Ce domaine précis est celui dont j'ai parlé et auquel nous nous intéressons maintenant dans cette dernière étape : le cadre et les structures qui détermineront la relation entre la GRC et le gouvernement dans ce domaine particulier.

J'ai eu des discussions détaillées au cours des dernières semaines et des derniers mois avec la direction de la GRC, et avec le commissaire lui-même. La GRC est ouverte à l'idée qu'il y ait un conseil de direction pour la GRC. Notre point de vue, et la GRC sera certainement d'accord avec cette idée, c'est que le conseil de direction, si c'est ce que nous appelons la supervision civile dans ce domaine, va de pair avec d'autres modifications de gouvernance qui réussiront sans tomber, pardonnez-moi l'expression, dans le piège de l'employeur distinct. Je ne veux pas entreprendre une discussion de cette question, parce qu'il s'agit d'un piège et que nous n'avons pas besoin de cela.

Toutefois, la notion de tout conseil de direction doit aller de pair avec quelque chose qui permet de cerner et de simplifier la relation entre la GRC et le gouvernement. Elle doit rationaliser la relation et accorder plus d'autorité à la GRC ainsi qu'un degré plus élevé de responsabilisation. Et cela passera par le mécanisme de supervision que nous appelons le conseil de direction. Nous pensons que cette structure constituera une structure de gouvernance ou une structure de responsabilisation plus saine et plus efficace. J'ai toutes les raisons de croire que la GRC appuie cette approche.

Le sénateur Moore : Concernant l'étiquette de « gestion », comme vous l'avez décrite, et la structure de plaintes, entrevoyez-vous un rôle pour des civils dans cette question?

M. McAusland : Absolument, mais j'hésite à répondre à cette question parce que je ne suis pas certain d'aimer l'expression « civils ». Ce n'est pas parce que ce n'est pas correct, mais je n'ai jamais vu ces questions être mises dans ce contexte lorsque nous les avons débattues avec la GRC et d'autres.

Le sénateur Moore : Disons des membres ou du personnel non-GRC. Cela vous aide-t-il?

M. McAusland : Oui; je ne veux laisser aucune connotation de confrontation ou de situation contradictoire. La réussite de la GRC à l'avenir reposera sur des structures où des personnes réfléchies peuvent travailler ensemble avec une vision commune et bon sens.

Le sénateur Moore : D'accord.

M. McAusland : Ce sera fait sans la création de structures qui sont contradictoires par nature. Au contraire, la GRC doit être dirigée par la responsabilisation et le bon sens par des gens qui ont une vision commune. La structure ne signifie pas que les gens sont serviles les uns par rapport aux autres, mais qu'ils sont capables de travailler ensemble ouvertement et de manière constructive avec respect les uns pour les autres.

Le sénateur Banks : Je vais creuser davantage le sujet abordé par le sénateur Moore.

Nous travaillons en ce moment sur un rapport portant sur la GRC, sur sa réforme et sur les questions dont vous avez parlé. Nous en sommes aux dernières étapes de la préparation de ce rapport. Nous avons des ébauches devant nous et nous arrivons à la fin. Pour cette raison, je veux être parfaitement à jour sur ces questions, si c'est possible.

En ce qui concerne la dernière question dont vous avez parlé en réponse à la question du sénateur Moore, nous avons entendu beaucoup d'autres personnes — dont Paul Kennedy — au sujet de ce que j'appelle faire la police de la police. Tout le monde est d'accord pour dire que l'image iconique de la GRC est fondamentalement importante pour sa capacité de faire son travail dans notre pays. Chaque fois qu'il avait une dispute, le point de vue par défaut du public a toujours été favorable à la GRC à partir de la supposition que la GRC avait raison.

On nous a dit que ce n'était plus le cas. J'espère que la confiance absolue — si je peux utiliser cette expression — et incontestée dans la GRC, qui existait auparavant et qui n'existe plus maintenant, sera rétablie.

Un aspect de la confiance, c'est faire la police de la police. Je demande à chacun d'entre vous de répondre à la proposition — à laquelle je ne souscris pas nécessairement — que dans des situations d'enquête comme certaines que nous avons devant nous, que « l'enquête » — non pas la supervision — ne devrait pas être dirigée par des membres de la GRC, ou par des policiers, point final. L'enquête devrait comprendre une représentation importante de gens qui ne sont pas des agents de la paix.

Mme Busson : Cette question se retrouve dans l'esprit de tout le monde, surtout à la lumière de ce que nous avons entendu dans les nouvelles récemment.

À mon avis, et à partir de ce que je vois dans mon travail au sein du conseil avec mes collègues pour faire avancer les choses, je ne vois pas de réticences dans la GRC à l'idée d'être dirigée par des civils, ou de travailler avec des civils, ou avec tout autre organisme de supervision. Nous sommes rendus à une époque où nous ne pouvons plus continuer de nous attendre à ce que le public nous fasse confiance.

C'est un nouveau monde. Les gens sont inondés de toutes sortes de théories de conspiration. Au bout du compte, la GRC n'est pas une organisation parfaite. Des choses mauvaises arrivent à des bonnes personnes tout le temps.

Comme vous dites, nous devons rebâtir la confiance et la transparence. Le fait d'avoir un organisme indépendant pour effectuer ce genre d'enquête est une façon de dire aux gens que l'organisation est tout aussi intéressée que quiconque d'autre à aller au fond des choses. Le problème — et je pense que vous l'avez pressenti lorsque vous avez posé la question —, c'est que l'enquête doit être réalisée par quelqu'un qui a des capacités pour faire enquête.

Dans ma dernière vie, nous réussissions à demander aux gens de la communauté de travailler main dans la main avec les enquêteurs et d'accorder un certain degré de confiance aux collectivités au fur et à mesure que les problèmes se développaient. Cette approche va de pair avec le fait d'inciter la GRC à être plus transparente lorsqu'elle répond aux questions et lorsqu'elle travaille avec les gens sur les questions pendant qu'elles se développent. L'explication voulant que « l'affaire est devant les tribunaux » ne suffit plus aux gens. Nous devons travailler plus fort à trouver des façons d'informer les gens dans l'avenir.

Le sénateur Banks : Quelle est la nature ou l'ampleur de la résistance au sein de la GRC pour ce qui est d'aller dans cette direction?

Mme Busson : Je crois qu'à l'heure actuelle, il y a très peu de résistance, sinon aucune.

M. Martin : En tant que gourou des RH de la GRC, cette question sort de mon champ de compétence.

Le sénateur Banks : Oui, mais vous êtes policier, monsieur Martin.

M. Martin : Oui, c'est pourquoi je vais poursuivre ma réponse.

La GRC est ouverte à des examens externes. C'est quelque chose qu'elle a adopté avec enthousiasme. Là où nous avons une supervision, il n'y a pas de questions; les gens reconnaissent l'indépendance.

Cependant, il faut faire attention et se rappeler que la GRC est active dans de nombreuses régions éloignées du pays. Peu importe où sera situé l'organisme de supervision, il devra avoir la capacité de se rendre sur place lorsque ce sera nécessaire. L'application de ces choses pose un problème pratique. Le commissaire et d'autres travaillent actuellement sur ce problème.

M. McAusland : Je vais me faire l'écho de ce que les deux autres témoins ont dit. Je vais ajouter une nuance et renforcer une généralisation.

La nuance, c'est que la gendarmerie est manifestement en faveur d'un examen externe, comme l'ont mentionné le sous-commissaire Martinet et Mme Busson. Toutefois, nous devons examiner les détails et certaines recommandations qui se trouvent sous le grand titre « surveillance indépendante ». Je ne prétendrai pas que la gendarmerie, ou même le Conseil de mise en œuvre de la réforme, appuie d'une façon générale les recommandations faites à ce sujet. Certains éléments m'inquiètent : l'idée, par exemple, que l'entité responsable de la surveillance indépendante aurait le pouvoir d'émettre des recommandations exécutoires concernant le comportement de la gendarmerie.

Une idée comme celle-ci m'inquiète beaucoup et me rappelle que le diable est dans les détails. Il faut faire très attention de ne pas enclencher un engrenage que l'on regretterait plus tard.

Sur le fond, et c'est sur quoi portait votre question, la réponse est oui, absolument.

En ce qui a trait à l'idée générale, je veux ajouter quelque chose à ce que Mme Busson a dit et qui est extrêmement important : la GRC et le Conseil veulent s'assurer que la nouvelle organisation reconnaît plus facilement ses erreurs.

Le sénateur Banks : C'est une façon de gagner la confiance, n'est-ce pas?

M. McAusland : Exactement, vous constaterez que c'est un élément qui fait partie intégrante de notre rapport. Nous avons fait des progrès, car, dans le monde d'extrême transparence dans lequel nous vivons aujourd'hui, on juge de plus en plus les gens et les organisations autant en fonction de leur façon de gérer leurs erreurs que du bon travail qu'ils font. Tous les Canadiens et les Canadiennes savent que la GRC est une organisation très grande et très complexe et que son mandat est difficile. Aucune personne sensée ne vous dira qu'il n'y aura plus d'erreurs, car il y en aura toujours. Nous devons les reconnaître et tenter de les réduire au minimum. On jugera de plus en plus la gendarmerie selon les leçons qu'elle tirera de ses erreurs.

Le sénateur Banks : Je tiens à vous assurer, vous et toutes les personnes concernées, que nous n'entrerons jamais dans les détails au sujet de l'organisation de la surveillance, car c'est une question qui nous dépasse. Toutefois, vous êtes d'accord avec l'idée d'inclure, entre autres, des agents de police et des enquêteurs.

M. McAusland : Oui.

Le sénateur Tkachuk : J'aimerais aborder la question des services de police à contrat. Je viens de la Saskatchewan, où la GRC est notre force de police rurale. Les services de police à contrat sont-ils indispensables pour la GRC?

Mme Busson : J'aimerais beaucoup répondre à cette question en premier. J'ai travaillé longtemps pour les services de police à contrat de la GRC. J'ai grandi en Nouvelle-Écosse, où la GRC assure les services de police provinciaux. J'ai entrepris ma carrière en Colombie-Britannique, où la GRC assure les services de police provinciaux, ainsi que les services de police municipaux dans un grand nombre de petites et de grandes collectivités. J'ai travaillé en uniforme dans diverses régions. J'ai eu la chance de travailler en Saskatchewan comme responsable des enquêtes criminelles et comme commandante. Je suis fermement convaincue que les services de police à contrat ont été un élément clé du succès de la GRC au fil des années et qu'ils le demeureront. À mon avis, les services de police à contrat sont utiles à la GRC de bien des façons. Ils incarnent le pays dans les petites localités. Ils incarnent le Canada. Les services de police à contrat permettent en outre à nos jeunes membres d'apprendre comment se comporter avec les gens, comment gérer les conflits, comment parler aux bons et aux moins bons citoyens, comment réagir dans diverses situations, comment porter l'uniforme avec fierté, comment bâtir leur image de membre de la Gendarmerie royale du Canada. Cet apprentissage se fait dans les petites localités du Canada au jour le jour. C'est là que sont formés tous ces policiers remarquables qui vont ensuite travailler au niveau fédéral pour s'occuper de la sécurité nationale, pour mener des enquêtes sur le trafic des stupéfiants, et cetera. Je pense que la force de la gendarmerie réside dans sa capacité d'offrir des services aux niveaux municipal, provincial et fédéral un peu partout au pays.

En tant qu'ancienne commandante de la plus importante division de la gendarmerie, je pense que les services de police à contrat favorisent l'échange de renseignements, ainsi qu'une coopération et une intégration instantanées lorsqu'on passe d'un service de police à un autre pour servir les Canadiens et les Canadiennes. Je pense donc que, oui, les services de police à contrat sont importants.

Le sénateur Tkachuk : Quelqu'un a-t-il quelque chose à ajouter?

M. McAusland : Je suis d'accord avec Mme Busson. Pour ajouter à ce qu'elle vient de dire, j'aimerais mentionner que le Conseil de mise en œuvre de la réforme de la GRC a examiné cette question de long en large en ce qui concerne l'avenir de la GRC, ses relations et la façon de gérer les relations difficiles avec les entités ou les parties contractantes. Je dis « difficiles » non pas parce que les relations sont tendues ou conflictuelles, mais parce qu'elles sont compliquées. En tant qu'organisation, nous avons beaucoup de talents, de diligence et de bonnes communications à gérer. Dans la partie de notre rapport qui porte sur les progrès marqués, nous avons souligné que des progrès importants avaient été faits dans la façon de gérer ces relations. Avons-nous atteint la perfection? Là comme ailleurs, la réponse est non. Mais des ressources dédiées, bien organisées et dotées de mandats clairs s'y emploient. Nous avons constaté des changements et nous avons rencontré les parties contractantes. J'ai bon espoir qu'il y aura des progrès. Je suis d'accord avec Mme Busson pour dire que les services de police à contrat sont un aspect important de l'identité de la GRC aujourd'hui.

Le sénateur Tkachuk : Comment se compare le nombre de recrues par rapport à la population au sein des services de police à contrat et des services de police fédéraux, par exemple, en Ontario ou au Québec, par rapport à la Colombie- Britannique, l'Alberta ou la Saskatchewan?

M. Martin : Nous tentons d'avoir un taux de représentation qui correspond au pourcentage de la population des provinces contractantes. Le nombre de recrues provenant d'une province équivaut à un pourcentage de la population de cette province.

Au cours des deux dernières années, nous avons beaucoup recruté, et quelques provinces n'ont pu remplir les quotas. Paradoxalement, l'une des régions où nous avons eu le plus de succès est la région centrale, soit là où se trouvent les services fédéraux : Toronto, Ottawa et Montréal, au Québec. Le recrutement au niveau fédéral a connu un grand succès et cela a été un peu pour nous une surprise. Le second plus grand groupe de recrues provient toutefois des Maritimes, où nous avons connu beaucoup de succès. Nous avons un nombre exceptionnel de recrues. Vous avez parlé des services de police à contrat et des services de police fédéraux. J'ai travaillé au sein de la division A, soit Ottawa; de la division O, Toronto; ainsi qu'à Terre-Neuve-et-Labrador et en Colombie-Britannique. Les services de police à contrat permettent aux agents de développer leurs qualités d'enquêteurs. S'ils travaillent à un dossier fédéral d'envergure, ils peuvent y travailler pendant un ou deux ans avant de se présenter devant un tribunal. Dans les services à contrat, les agents peuvent avoir à témoigner tous les jours devant un tribunal et ils développent ainsi leurs compétences dans ce domaine et dans la préparation des déclarations. Ce travail leur permet de peaufiner leurs compétences de base et, de plus, de se bâtir un réseau de contacts très utile dans le domaine du renseignement criminel, car la criminalité ne connaît pas de frontières.

L'Internet et la mobilité de la population en général font en sorte que les criminels sont aujourd'hui extrêmement mobiles. M. McAusland a parlé des enfants qui subissent des sévices. Nous n'employons pas l'expression « pornographie juvénile », car les enfants ne font pas de pornographie; ils en sont victimes. Un pédophile peut avoir sévi dans plusieurs provinces et, parfois, à l'étranger. Tous ces contacts nous permettent d'être beaucoup plus efficaces pour mettre un terme à ce genre d'activité et porter secours aux enfants maltraités.

Je ne sais pas si vous avez abordé le sujet ou vu des photographies. J'ai été responsable du Centre national de coordination contre l'exploitation des enfants. Ce ne sont pas des sévices, mais de la torture. Certaines images sont horribles. Il y a beaucoup de gens malades dans le monde.

Les services de police à contrat permettent d'accroître la sécurité publique et de mieux collaborer avec les collectivités et les autres services de police que nous appuyons dans certains de ces rôles. Le Centre national de coordination contre l'exploitation des enfants fournit du soutien technique et du soutien aux enquêtes à tous les organismes d'application de la loi au Canada.

Le sénateur Tkachuk : L'abolition progressive des services de police à contrat nuirait-elle au recrutement?

M. Martin : Sénateur, qui pourrait répondre à cette question? Cela nuirait probablement, mais c'est mon opinion personnelle, rien de plus.

Le sénateur Tkachuk : Est-ce la province qui décide de combien d'agents elle a besoin? Comment cela fonctionne-t- il? Prenons ma province, la Saskatchewan, par exemple.

Mme Busson : Si vous me permettez, la décision est prise par les hauts responsables des services de police dans la province et les hauts responsables de la division dans cette province.

Le sénateur Tkachuk : S'agit-il du ministère de la Justice?

Mme Busson : Oui, en effet, ainsi que du ministère de la Sécurité publique, selon le nom qu'on lui donne, et à qui est confiée cette responsabilité dans la province. C'est un processus complexe de nos jours. Comme la gendarmerie doit de plus en plus tenir compte des priorités des provinces, les nombres sont établis avec soin. Beaucoup dépend du budget alloué par la province aux services de police et des activités qui auront lieu pendant l'année.

Oui, donc, ce sont les provinces qui établissent le nombre en collaboration avec la gendarmerie, ou vice versa.

Le sénateur Tkachuk : Je suis convaincu qu'on ne s'entend pas toujours. Est-ce qu'on dit parfois que le nombre est trop élevé, ou pas assez?

Mme Busson : Il n'est jamais trop élevé. J'aimerais bien que cela se produise.

Le sénateur Tkachuk : Avez-vous des difficultés à répondre à la demande, ou est-ce habituellement le contraire?

Mme Busson : Nous avons eu des problèmes dans le passé. Nous ne pouvions pas toujours fournir le nombre requis par une province. Dans ce cas, nous trouvions des solutions novatrices. C'est ce qui s'est passé jusqu'à l'année dernière. Depuis, nous avons des agents en nombre suffisant. Nous avons cherché des façons de maintenir en poste les agents et de rapatrier ceux qui étaient partis à la retraite. Nous avons embauché du personnel civil temporaire pour combler autant de postes non armés que possible et fait ainsi baisser les coûts. Nous avons eu maintes discussions sur les priorités, notamment les postes à couper si le budget était serré. Il s'agit d'un processus de collaboration dans toutes les provinces où j'ai eu le plaisir de travailler.

Le sénateur Tkachuk : Monsieur le président, j'aimerais poser une question à propos de la diversité, des femmes et des Autochtones. C'est un sujet que nous avons déjà abordé au comité.

Comment se compare la GRC aux services de police de l'Ontario et du Québec ou encore à ceux de villes comme Toronto ou Saskatoon, par exemple? Avez-vous des données comparatives?

M. Martin : Je ne peux pas vous donner de réponse aujourd'hui, mais je demanderai avec plaisir à quelqu'un de trouver l'information et de la faire parvenir au comité.

Le sénateur Tkachuk : Je ne vous demande pas de le faire pour toutes les villes au pays, mais il serait utile d'avoir des comparaisons avec, disons, les services de police de Vancouver, Montréal, l'Ontario et le Québec. Je vous en remercie. Si vous pouviez faire parvenir l'information à la greffière, ce serait très bien.

Le président : Je m'excuse, mais certaines personnes attendent leur tour depuis le début, notamment le sénateur Day.

Le sénateur Tkachuk : J'ai attendu une heure et demie.

Le sénateur Wallin : Il s'agit d'une question complémentaire.

Le président : C'est votre deuxième question complémentaire, sénateur Wallin. Vous avez bénéficié de 12 minutes au début.

Le sénateur Wallin : Juste à propos...

Le président : Sénateur Day.

Le sénateur Wallin : C'est directement lié à cette question.

Le sénateur Tkachuk : Nous avons déjà eu des questions complémentaires, monsieur le président.

Le président : En effet, mais certaines personnes n'ont pas encore eu la chance de parler.

Le sénateur Tkachuk : Nous avons encore beaucoup de temps devant nous. Il n'est que 17 h 25. Il nous reste encore une heure et demie.

Le président : Le comité décidera de cette question.

Le sénateur Tkachuk : Eh bien, je fais partie du comité, monsieur le président.

Le président : Sénateur Day.

Le sénateur Day : Merci, monsieur le président.

Je vais revenir sur un sujet dont nous avons discuté un peu plus tôt. Premièrement, j'aimerais faire un commentaire à propos des années de service ouvrant droit à pension. Nous avons examiné un projet de loi dernièrement qui permet de considérer la période de formation au Dépôt, à Regina, comme une période ouvrant droit à pension pour, par exemple, un agent de police municipal qui devient membre de la GRC et qui a une période de formation plus courte. J'ai alors posé la question suivante : pourquoi une recrue qui entre à la GRC à 20 ou 21 ans sans avoir fait partie d'un autre service de police — cette recrue travaillera à la GRC plus longtemps — n'est pas rémunérée et sa période de formation n'ouvre pas droit à pension? Pourquoi la GRC a-t-elle deux catégories de recrues?

M. Martin : Je suis au courant de votre lettre. En fait, elle a été acheminée à mon bureau.

Le sénateur Day : Très bien, c'est excellent.

M. Martin : Des personnes sont en train d'examiner la question. La GRC accueille des cadets. Ce ne sont pas des employés de la GRC; ils reçoivent une allocation. Comme ce ne sont pas des employés, ils ne sont pas régis, si je comprends bien, par la Loi sur la pension de retraite et cela pose problème pour que la période au Dépôt soit considérée comme ouvrant droit à pension.

Par le passé, nous aurions probablement répondu que ce n'était pas possible pour ces raisons. Les temps changent toutefois. Nous examinons actuellement la question pour savoir si nous pouvons trouver une solution. C'est pourquoi vous n'avez pas encore reçu de réponse. Nous avons une équipe de recherche et quelques actuaires qui travaillent à ce dossier. Nous vous répondrons par écrit dès que nous aurons l'information.

Le sénateur Day : Je suis heureux de l'apprendre. C'est une question d'équité. C'est une question qui touche aussi le recrutement, si j'ose dire. Je ne m'attarderai pas plus longtemps sur le sujet, car le temps file.

Ai-je raison de dire que les règles sont demeurées les mêmes, c'est-à-dire que quiconque entre à la GRC doit commencer au bas de l'échelle, suivre la formation au Dépôt et gravir les échelons? On ne peut pas être embauché directement comme inspecteur, à l'échelon d'officier breveté?

M. Martin : Ce n'est pas tout à fait exact. C'était vrai par le passé, mais les choses ont changé pour une raison. Comme nous cherchons à transformer l'organisation, nous considérons maintenant ce qu'on appelle le recrutement latéral. Si un agent d'un autre service de police est intéressé à joindre la GRC, compte tenu que les pensions sont maintenant transférables, il est possible pour celui-ci de joindre les rangs de la GRC et de voir ses années ouvrant droit à pension reconnues. Cela s'applique à tous les échelons de l'organisation. Il n'y a pas d'obstacle au recrutement latéral. C'est le seul changement.

On s'est par ailleurs rendu compte que beaucoup de nos membres sont jeunes et peu expérimentés. Le recrutement latéral offre donc un autre avantage, celui d'aller chercher des gens expérimentés et de les amener à la GRC. Autre avantage : ces transferts permettent de resserrer les liens avec les autres services de police. Le programme fonctionne très bien.

Le revers de la médaille, c'est que nous perdons des membres par période. Encore une fois, il y a des éléments positifs pour l'organisation. Comme je l'ai mentionné précédemment, les activités criminelles n'ont pas de frontières. On peut mettre à profit ces contacts dans les enquêtes, les activités liées à la sécurité publique, et cetera.

Le sénateur Day : Est-ce qu'on peut dire que les inspecteurs, les commissaires et les surintendants aux divers échelons sont des officiers brevetés au sein de la GRC? Cette discussion renvoie à une autre que nous avons eue plus tôt, à savoir les raisons qui vous poussent à croire que ce ne serait pas une bonne idée d'exiger que tous les membres embauchés au premier échelon possèdent, à tout le moins, un baccalauréat. Envisagez-vous d'exiger que tous les officiers brevetés aient fait des études?

M. Martin : Notre idée à ce sujet était que nous ne voulions pas que cette exigence devienne un obstacle. Cela ne veut pas dire que nous n'encourageons pas les personnes qui ont un diplôme d'études postsecondaires, bien au contraire. Nous recrutons du personnel dans des universités et des établissements d'enseignement. Dans le passé, nous avions tendance à ne rien faire et à attendre que des personnes entrent et nous disent qu'elles étaient intéressées à travailler pour la GRC. Selon moi, cette attitude est quelque peu élitiste. À l'heure actuelle, le marché du travail est composé en grande partie d'une population vieillissante. Il offre ainsi beaucoup de possibilités d'emploi. La GRC est proactive, ce qui amène d'énormes changements dans notre façon de recruter du personnel. Nous nous rendons dans les collectivités pour attirer les personnes qui ont les compétences requises.

Pour ce qui est des enquêtes importantes qui concernent des questions complexes comme le crime commercial, nous sommes certainement très intéressés à recruter des personnes qui ont fait des études supérieures. De plus, comme nous en avons parlé un peu plus tôt, nous avons des programmes de parrainage qui nous permettent d'aider financièrement des employés en formation.

Le sénateur Day : Vous n'envisagez pas que cela devienne une exigence de la politique à ce stade-ci?

M. Martin : Non.

Le sénateur Day : Merci. C'est bien. J'ai compris le reste de votre réponse.

Je veux maintenant revenir sur le point que vous avez exposé, monsieur le sous-commissaire, selon lequel, dans le passé, des rapports ont été soumis qui ont pu être bloqués au premier ou au deuxième palier suivant et qui sont ainsi demeurés lettre morte. Votre commentaire abonde dans le sens de celui de M. McAusland concernant les efforts déployés pour amener le service de police à devenir un organisme d'autorégulation. Il concorde également avec celui de la commissaire Busson, qui affirme que toutes les initiatives qui ont lieu actuellement sont mises en œuvre de la bonne façon. La GRC a évolué. Nous ne sommes pas encore au point où nous voulons être et il est généralement admis qu'il s'agit d'un travail à long terme. Il est à espérer qu'à l'avenir, un équilibre s'établira qui nous permettra d'apprendre des erreurs.

Avez-vous pensé au fait que la nomination d'une personne qui n'est pas un policier de carrière au poste de commissaire de la GRC ait pu favoriser ce changement? Si c'est le cas, a-t-on pensé à maintenir ou non cette situation, tout en gardant à l'esprit qu'il s'agit d'un élément dissuasif pour les futurs membres réguliers de la GRC qui espèrent devenir commissaire?

M. Martin : Laissez-moi tout d'abord répondre à votre dernière question. Je ne pense pas que cela nuit aux aspirations de ces gens. Je vous rappelle que la GRC ne comprend pas que du personnel en uniforme. Elle est également composée de membres civils et de fonctionnaires. Le message que nous envoyons aux employés est qu'ils peuvent tous devenir commissaire. Un membre civil peut devenir commissaire, tout comme le peut un fonctionnaire.

Dans notre ancienne culture, les personnes qui portaient un uniforme avaient réussi et les civils étaient, quant à eux, des citoyens de deuxième ordre. Je crois qu'un énorme progrès a été fait concernant l'orientation de la Gendarmerie aujourd'hui.

Lorsque le commissaire Elliott m'a demandé de travailler aux RH, je lui ai demandé s'il avait perdu la tête. Je l'ai fait. C'était peut-être risqué. Cela aurait été risqué dans l'ancienne culture, mais peut-être pas dans la présente.

Les cadres supérieurs traitent régulièrement avec les RH, mais moi, je ne suis pas un spécialiste des RH. Il m'a répondu ceci : comme tu n'as aucun parti pris, que tu n'es lié d'aucune façon aux pratiques des RH de la GRC, tu apporteras dans ton travail une vision des choses claire et saine et je m'attends à ce que tu fasses certains changements.

Je suis d'accord avec ce point de vue.

Je crois que le sénateur Wallin a demandé à monsieur McAusland de parler du Conseil de mise en œuvre de la réforme au sein de la GRC et d'expliquer de quelle façon la culture change et de quelle façon la GRC collabore avec le conseil. J'assiste à autant de réunions du conseil que je peux. Vous avez laissé entendre que les changements se passent bien; eh bien, sachez que ce n'est pas le cas. Parce qu'il s'agit justement de changements, il est extrêmement difficile de faire bouger les gens. Les êtres humains n'aiment pas le changement. C'est une réalité de la vie. Une bonne partie de ces changements ne sont pas faciles à réaliser, mais nous y travaillons.

Dans le passé, si j'avais voulu parler de quoi que ce soit, surtout d'un sujet controversé, j'aurais probablement dû obtenir la permission du commissaire et peut-être même celle de l'État-major supérieur. Aujourd'hui, je suis entièrement libre de parler de quoi que ce soit au Conseil de mise en œuvre de la réforme au sein de la GRC. Nous avons eu des réunions à huis clos concernant ces questions qui ont pu préoccuper les employés et nous avons dû régler certaines choses avant de les rendre publiques. J'ai été autorisé à donner mon opinion et mon point de vue au conseil. La seule chose que le commissaire m'a demandé est de l'informer lorsque je le fais, afin qu'il soit au courant de la question et de ce qui se passe. Toutefois, je n'ai pas les mains liées. En fait, c'est tout le contraire, ce qui aurait été impossible il y a quelques années.

Le sénateur Day : Vous voulez que cette situation se perpétue après que le conseil aura cessé d'exister dans six mois. Cette question est celle de la gouvernance, n'est-ce pas?

M. Martin : Je ne suis pas d'accord. Le monde et la vie changent. Je crois que lorsque le moment viendra, le gouvernement devra étudier toutes les options. Ce que nous constatons aujourd'hui, c'est qu'un civil peut être un bon commissaire. Pour la nomination du prochain commissaire, le gouvernement devrait examiner toutes les options et choisir la meilleure.

Le sénateur Day : C'est la première fois que le commissaire est un civil, n'est-ce pas?

M. Martin : Je crois que c'est la deuxième fois. À nos débuts, je pense que, pour quelques jours, le premier ministre avait désigné une personne chargée de s'occuper du commissaire, qui était un civil.

Le sénateur Day : Monsieur McAusland, voulez-vous faire un commentaire sur cette question? La comprenez-vous bien? Le conseil de gestion fait-il preuve de l'ouverture d'esprit que nous cherchons?

M. McAusland : Je suis heureux que vous me posiez cette question, car vous allez directement au cœur du sujet. Tout à l'heure, j'ai fait la distinction entre la forêt et les arbres. Votre question porte sur la forêt.

Le sénateur Day : Je viens du Nouveau-Brunswick. Les gens de cette province connaissent tout au sujet des forêts.

M. McAusland : Vous en savez beaucoup sur ce genre de chose. Je suis persuadé que Mme Busson pourra confirmer que cette question a été au cœur de nos discussions, car elle est fondamentale pour la culture et la façon dont les personnes sont perçues, contrôlées ou non, gérées et guidées.

Je peux vous dire clairement que la situation n'est pas parfaite et qu'il reste fort à faire. Cependant, je suis tenté de vous dire que certains des changements que nous avons remarqués ont été presque amusants. En ce qui concerne ma propre expérience, au fil de nos premières réunions et à mesure que nous établissions un climat d'ouverture et de dialogue, nous nous sommes aperçus que l'ambiance générale, les relations avec les gens et la façon dont ils nous abordaient étaient en train de changer, vraiment.

Je ne veux pas insinuer que la situation est parfaite, mais lorsque nous tenons nos réunions du conseil, dont certaines ont lieu sans la présence du commissaire parce qu'il doit être partout à la fois et que nous devons aller de l'avant, les personnes qui y assistent, qui présentent des rapports et qui participent aux discussions le font de façon dynamique et tout à fait librement. Je pense que les choses se passent bien.

La question des membres réguliers par rapport aux civils est intéressante. Honnêtement, je ne connais pas la réponse. Je suis persuadé que pour plusieurs raisons, il est sain pour la GRC qu'un commissaire civil ait été nommé. Je crois que ce choix est sain pour le processus du changement, pour le symbolisme de la chose tout simplement, sans parler des qualités de la personne en question.

Cela dit, je crois que nous verrons avec le temps la durabilité du changement sain et nécessaire qui est en train de s'opérer pour mieux reconnaître les dirigeants civils au sein de la GRC. Je ne fais pas allusion au commissaire, mais au personnel civil de niveau supérieur.

Dans l'un de nos rapports du premier mandat — je ne me rappelle plus lequel — nous faisons allusion à un concept que nous appelons l' « excellence fonctionnelle ». Ce concept vise à souligner qu'il est nécessaire pour la force de reconnaître, à part l'élément du leadership, qu'il y a des secteurs de gestion spécialisés — les RH n'en font pas nécessairement partie — où la formation professionnelle s'attache à certaines fonctions et à certains rôles, tout comme pour les services de police de première ligne.

Par exemple, nous avons parlé plus tôt du secteur des communications. Le mandat des communications à la GRC est profondément difficile et complexe, on pourrait même dire qu'il s'agit de l'une des tâches de communications intégrées les plus difficiles au pays. Lorsque l'on définit le rôle de la direction des communications, de quel type de personnes parlons-nous? Je ne critique pas les personnes qui assument ces fonctions en ce moment, mais je m'élève contre l'idéologie derrière cette définition du point de vue de la gestion. Je prends également à partie le secteur des finances. La question est celle du professionnalisme de la gestion, qui pourrait ne pas aller de pair avec la formation d'un membre régulier ou le contraire, mais ces deux concepts sont différents.

Nous verrons avec le temps, mais votre question va au cœur de ce que nous faisons et des secteurs où nous enregistrons des progrès importants, selon moi.

Le président : Chers collègues, j'ai besoin de votre avis. Nous avons dépassé l'heure et demie normale de plus de 12 minutes. Le sénateur Manning n'a pas encore eu l'occasion de poser une question. J'ai une demande de deuxième ronde de la part du sénateur Wallin, du sénateur Lang, du sénateur Zimmer et du sénateur Tkachuk. Puis-je avoir votre avis? Je sais que le sénateur Day aimerait déposer une motion pour siéger à huis clos et discuter du rapport. J'aimerais savoir ce que veut le comité.

Le sénateur Zimmer : Monsieur le président, vous pouvez enlever mon nom de la liste. Le sénateur Day a posé la question que j'avais en tête.

Le président : Merci, sénateur Zimmer.

Le sénateur Wallin : J'ai un certain nombre de questions à poser.

Le sénateur Day : Monsieur le président, nous avons demandé à ces témoins d'être ici pendant une heure et demie et nous les avons maintenant gardés plus longtemps que prévu. Notre plan était de passer à une discussion sur le rapport, mais d'un autre côté, je n'aime pas interrompre mes honorables collègues.

Le sénateur Wallin : Nous obtenons des renseignements qui ont trait au rapport. Je crois que c'est la raison pour laquelle nous posons des questions.

Le sénateur Day : Il est possible que nos témoins aient d'autres engagements.

Le sénateur Tkachuk : Demandons-leur.

Le sénateur Wallin : Avez-vous le temps de répondre à d'autres questions?

M. McAusland : J'ai présumé que la séance pourrait durer plus longtemps que prévu, alors j'ai pris des arrangements en conséquence.

Le sénateur Banks : Je propose donc que nous prolongions cette partie de la réunion de 15 minutes pour permettre aux sénateurs de poser d'autres questions.

Le sénateur Day : Les membres du comité sont-ils d'accord pour que nous prolongions la réunion de 15 minutes, soit jusqu'à 18 heures?

Les hon. sénateurs : D'accord.

Le sénateur Manning : J'ai quelques questions rapides et je suppose que les réponses suivront.

Au Conseil de mise en œuvre de la réforme à la GRC, j'ai cru comprendre que le rapport a été présenté au ministre en septembre. Est-ce bien le cas? Votre sursis d'exécution est-il jusqu'à la fin de mars?

M. McAusland : C'est bien cela.

Le sénateur Manning : Pouvez-vous expliquer ce que fera le conseil au cours des six prochains mois? Présenterez- vous un autre rapport à la fin de mars?

M. McAusland : Oui, nous le ferons. Notre mandat cette année, c'est-à-dire pour la deuxième année, était, en fait, identique à celui de la première année, pendant laquelle on nous a demandé de présenter un rapport en septembre et un autre en mars. Nous verrons ce qui arrivera en mars. Nous présenterons un rapport en mars, comme le veut notre mandat et comme nous l'avons fait l'an dernier.

Le mandat était fondé sur ce rapport et sur notre situation. On nous a demandé de poursuivre nos travaux pendant une autre année, et j'aimerais penser que c'était en raison de la qualité du rapport. Nous présenterons notre rapport, et ce qui doit arriver arrivera, je suppose.

Je crois qu'une partie de votre question portait sur les six derniers mois. Quand nous en arriverons là, nous récapitulerons, bien entendu, comme nous le faisons toujours, nous vous tiendrons au courant des progrès réalisés en général et nous aborderons de nouveau un certain nombre de points, comme la question du leadership et les communications. La question complexe à laquelle nous travaillons en ce moment et à laquelle nous continuerons de travailler est celle de la gouvernance.

Le sénateur Manning : Peut-être que ma prochaine question suit le sujet. Lorsque j'ai écouté le sous-commissaire Martin parler à quelques occasions du changement et de la culture d'aujourd'hui comparativement à la culture d'il y a des années, y a-t-il un moment — une date sur le calendrier — où la réforme sera terminée? On serait porté à croire que la réforme serait continue, en particulier avec les changements qui ont surgi au cours de la dernière décennie.

Il est peut-être difficile de répondre à cette question, monsieur McAusland, mais voyez-vous un mandat après mars pour le conseil de la réforme?

M. McAusland : Vous avez posé un certain nombre de questions, et je suppose que votre dernière est en quelque sorte la cerise sur le gâteau.

La première partie touche l'essentiel de ce que nous faisons, comme celle du sénateur Day. En tant que conseil, nous nous sommes efforcés, dès le départ, d'indiquer que personne ne devrait s'attendre ici à un miracle. C'est la mauvaise façon d'envisager une réforme. La meilleure manière d'échouer est de dire que la réforme est un concept fondé sur ces recommandations précises qu'il est possible de circonscrire, de limiter, et si nous, en tant que conseil, encadrons ces recommandations précises, la réforme sera complète et le monde sera merveilleux.

Comme je l'ai dit, cette approche nous conduira tout droit à l'échec. Nous avons indiqué au début de notre mandat que ce serait le cas et nous n'avons pas abordé notre mandat dans cette optique. Oui, nous avons tenté de réussir la mise en œuvre — une mise en œuvre prudente et fondée sur le jugement — de ces recommandations, mais sous le thème primordial du changement institutionnel et culturel.

Comme nous l'avons mentionné, l'organisme devient adaptatif, autoréglementé, ouvert et transparent. La prochaine fois que quelqu'un suggérera que l'on pense à une réforme, ce ne sera probablement pas nécessaire parce que la GRC l'aura déjà fait

Dans un monde idéal, un organisme, et ses dirigeants, est capable de reconnaître la nécessité de changement avant que d'autres personnes le lui disent. C'est dans cette direction que nous tentons d'orienter l'organisme. L'objectif est louable. Je crois qu'il est largement réalisable. L'organisme ne sera jamais parfait, mais c'est la bonne façon de procéder.

En réponse à votre deuxième question, pour ce qui est de notre mandat, nous verrons ce qui arrivera. Cette situation pourrait finir par être liée au moment et à l'endroit où le gouvernement prévoit l'entrée en fonction d'un conseil de direction, ainsi qu'à la façon de composer avec ces mécanismes.

Le sénateur Manning : Peut-être qu'un autre de nos témoins peut répondre à ma prochaine question.

Je sais que, pendant des années, il y a eu un écart entre les forces de police provinciales et municipales et la GRC. Au cours des dernières années, j'ai observé une immense coopération entre les échelons de police pour traiter le dossier des stupéfiants dans les provinces. Presque chaque fois que nous voyons une saisie de drogues importante aujourd'hui, c'est grâce à la collaboration des agents de la GRC et de leurs confrères de la police locale.

Je m'interroge sur la coopération que vous voyez de votre côté lorsqu'il est question d'enlever les divisions qui, dans certains cas, existaient avant. À titre d'exemple, Terre-Neuve-et-Labrador mise sur la police de Terre-Neuve et la GRC. Pendant un certain temps, on parlait toujours de la façon dont la province passait d'une force à l'autre. Maintenant, il semble y avoir une coopération que nous n'avons pas vue depuis des années, et elle semble générer des avantages appréciables.

Comment cette collaboration se traduit-elle à la grandeur du pays? Y a-t-il toujours des pommes de discorde, ou observez-vous davantage un esprit de collaboration?

Mme Busson : À mon avis, et je comprends que la situation a évolué depuis mon entrée en service, au cours des dix dernières années, les services de police au Canada ont évolué au point d'atteindre un stade de maturité où, comme vous l'avez décrit, les gens travaillent bien ensemble. Les criminels avaient pensé à unir leurs efforts bien avant la police, mais nous y sommes finalement arrivés.

Je crois que c'est une excellente collaboration qui témoigne du leadership à tous les niveaux, tant à l'intérieur de la GRC qu'au sein d'autres services de police partout au pays. Nous participons, de pair avec d'autres corps policiers, à des conseils de chefs de police qui se penchent sur ce dossier. Par ailleurs, force est de constater que cet enjeu ne connaît pas de frontières. Raison de plus de travailler en étroite collaboration.

Votre observation est juste. Je crois que la collaboration a bien servi les Canadiens également — parce que nous avons cessé de nous montrer territoriaux et nous avons appris à travailler ensemble.

Le sénateur Manning : Le sous-commissaire pourrait peut-être répondre à ma dernière question. Encore une fois, je me base sur ma province, Terre-Neuve-et-Labrador. En ce qui concerne le recrutement, les agents de police plus jeunes semblaient beaucoup s'inquiéter d'une chose au moment de joindre les rangs de la GRC : en tant que recrues, ils craignaient qu'on les envoie dans des collectivités isolées. Depuis, les collectivités isolées ont soulevé la question du manque d'expérience dans certains cas.

La situation semble s'être améliorée quelque peu parce que je n'en entends plus parler autant maintenant. Je sais qu'il y a eu beaucoup de discussions avec les collectivités autochtones et d'autres collectivités isolées. Prenons mon exemple à Terre-Neuve et dans le Nord du Labrador. D'après vous, comment a-t-on remédié à cette situation? La situation est-elle différente de ce qu'elle était il y a quelques années?

M. Martin : J'ai déjà servi à Terre-Neuve. En fait, il y a trois semaines, je me suis entretenu avec un membre du Carrousel qui est l'un des sous-officiers là-bas, plus précisément un caporal de Nain. C'est un homme très compétent qui s'apprête à retourner à l'une des collectivités dans le cadre d'une nouvelle affectation. Il y tient vraiment.

Même si un nombre X de recrues ont moins de cinq ans de services, et ce chiffre est à la hausse, sachez que nous recrutons également dans la tranche plus âgée de la population. Certains des gens qui sont en formation ont choisi la GRC comme deuxième carrière. Il n'est pas rare de voir des quadragénaires parmi nos recrues en formation. Ces personnes apportent une expérience de vie à leur travail policier. Je crois qu'ils apportent aussi une nouvelle perspective, empreinte de maturité, sur les services de police. La composition de l'effectif est donc en train de changer, mais l'équilibre est toujours là.

Le sénateur Manning : Comme observation finale, je viens d'une petite collectivité rurale à Terre-Neuve-et- Labrador, où la seule force policière est la GRC. Bien que de nombreux groupes et organisations ne puissent jamais se débarrasser de certains sujets de préoccupation, je crois que votre organisation a de quoi être fière. Nous sommes résolument fiers du travail que vous faites, et nous sommes ici pour vous aider de notre mieux.

M. Martin : Ce fut un plaisir de servir à Terre-Neuve. En ce qui concerne l'éthique à Terre-Neuve, je peux compter sur les doigts d'une main le nombre de problèmes de personnel que j'ai rencontrés là-bas. C'était agréable de travailler là-bas.

Le sénateur Wallin : J'ai trois questions supplémentaires, alors je vais essayer de les combiner ensemble, même si elles portent sur différents sujets.

Tout comme mon collègue, je viens, moi aussi, d'une petite ville, la Saskatchewan, où la GRC joue un rôle important et demeure bien respectée et aimée malgré les incidents qui surviennent de temps en temps et qui font souvent les manchettes et donnent lieu à des campagnes de dénigrement. Pour donner suite à la question du sénateur Banks, y a-t-il lieu de croire que le point de vue, par défaut, favorise un discours anti-GRC? C'est ce que je constate à l'occasion en lisant les manchettes, mais je n'ai pas cette impression. Mis à part les problèmes individuels, en sommes- nous à une situation où les gens acceptent maintenant la parole du fautif plutôt que celle de l'agent de police?

M. Martin : Je ne vais pas me mettre à citer les chiffres tirés des sondages d'opinion publique parce que si nous étions une entreprise privée, on dirait probablement que les statistiques sont positives. Toutefois, je ne pense pas que nous devrions être satisfaits des résultats de sondage. Selon moi, nous devons constamment nous efforcer de faire mieux.

Si nous étions à 80 p. 100, par exemple, je pense que nous devrions nous préoccuper davantage des 20 p. 100 que des 80 p. 100. Nous ne pouvons jamais nous reposer sur nos lauriers. C'est quelque chose sur lequel nous devons travailler. Nous devons poursuivre dans une voie positive et continuer à nous améliorer. Il s'agit d'un défi continu.

M. McAusland : J'aimerais vous faire part de mon point de vue, à titre de président du conseil. Quand nous avons commencé nos travaux, j'ai dit à la GRC : « Bon sang, réveillez-vous, parce que vous n'êtes pas la seule institution dans le monde entier qui soit actuellement aux prises avec ce défi particulièrement difficile. » La seule différence, c'est que la GRC est dans la mire du public et assujettie à un examen minutieux.

Il y a un grand nombre d'organisations avec qui je m'entretiens, dans le secteur privé et ailleurs, et qui subissent une extrême pression relativement à l'impératif de la gestion du changement.

En ce qui concerne cette situation, ce manque de confiance, cette attitude par défaut, je suggère personnellement de mettre la question dans un contexte relatif, en fonction du monde dans lequel nous vivons aujourd'hui.

À mon avis, nous vivons dans un monde où, malheureusement, nous assistons à l'effritement de la confiance à l'égard de nos institutions. Au début de mon témoignage, j'ai utilisé le mot « cynisme ». Je pense que nous vivons actuellement dans une société qui, pour une raison ou pour une autre, est devenue extrêmement cynique; c'est peut-être par faute de transparence et d'ouverture, ou à cause de la façon dont les choses se communiquent maintenant.

Je vois le cynisme dans de nombreux aspects de mon travail. Personnellement, dès le début, j'ai mis la situation de la GRC dans un contexte relatif. L'organisation n'est pas la seule institution importante, publique ou privée — nul besoin de se lancer dans une grande discussion sur ce qui se passe dans le secteur financier, le secteur des grandes entreprises, et avec le leadership dans le monde des affaires — en ce qui concerne l'effritement de la confiance. Le cynisme est partout.

Dans un tel contexte relatif, pour vous dire franchement, je ne pense pas que la GRC fasse si mauvaise figure.

Mme Busson : Si vous me permettez d'ajouter un point aux observations de mon collègue, au cours des dernières années, la GRC a souffert d'une mauvaise communication — des difficultés avec plusieurs questions, et nous ne les avons pas réglées au mieux de nos compétences.

Je crois également — comme vous l'avez signalé, de même que le sénateur Manning et d'autres — que les Canadiens font toujours confiance à la GRC et veulent lui faire confiance. Je m'entretiens avec les jeunes membres quand je peux — je suis toujours invitée à des événements — pour leur rappeler que ces incidents ne définissent pas qui ils sont et ce qu'ils représentent. On n'a qu'à visiter le dépôt ou à passer du temps dans n'importe quel détachement pour voir à quel point les membres sont des gens incroyablement brillants, braves, courageux et dévoués. Je crois que nous devons nous appliquer à communiquer ces belles choses au public. Comme plusieurs de vos collègues l'ont dit, les gens recommenceront à faire confiance.

Le sénateur Wallin : Est-ce qu'il me reste du temps?

Le président : Si la réponse est rapide.

Le sénateur Wallin : Monsieur le sous-commissaire, vous avez parlé de la cible de 17 p. 100 en matière de recrutement comme étant un pourcentage du secteur privé ou de Statistique Canada.

M. Martin : Ce chiffre désigne la disponibilité sur le marché du travail.

Le sénateur Wallin : Le chiffre de 17 p. 100 s'applique-t-il à l'échelle nationale?

M. Martin : C'est un chiffre pour l'ensemble du Canada. Par exemple, il faut être âgé de 18 ans et plus pour faire une demande à la GRC. Les moins de 18 ans ne sont pas inclus dans ce pourcentage.

Le sénateur Wallin : Le pourcentage de 17 p. 100 désigne donc ce qui est disponible sur le marché du travail, peu importe s'il s'agit de femmes; cette question est à part.

M. Martin : C'est exact.

J'ai une mise en garde à faire, sénateur : c'est un chiffre de 2001. Nous sommes en train de réexaminer le pourcentage, ce qui aura des conséquences, sans aucun doute.

Le sénateur Wallin : J'ai une autre question, mais je la poserai en dehors de la séance publique.

Le sénateur Tkachuk : J'ai une question, monsieur le président.

Le président : Je regrette, mais nous avons convenu d'arrêter à 18 heures.

Le sénateur Tkachuk : J'ai une question qui fait suite à ce qui a été dit. Je n'ai pas pu terminer mes observations à cause de votre désaccord avec le sénateur Wallin sur une question supplémentaire.

Le président : Tout le monde a une question supplémentaire à poser. Vous aimeriez poser une question de plus, vous aussi?

Le sénateur Wallin : Il n'y a aucune mention à ce sujet, ici.

Le sénateur Tkachuk : L'ordre du jour n'indique pas que nous terminons à 18 heures.

Le président : Rien ne l'oblige.

Nous sommes saisis d'une motion. Vous pouvez proposer votre motion, sénateur Day.

J'ai donné la parole au sénateur Day.

Le sénateur Day : Monsieur le président, je propose que le comité poursuive ses travaux à huis clos...

Le sénateur Lang : Monsieur le président, j'invoque le Règlement.

Le président : Votre intervention est irrecevable.

Le sénateur Tkachuk : Ça ne l'est pas.

Le président : C'est irrecevable. Le sénateur Day a la parole.

Le sénateur Day : ... pour procéder à une étude de notre rapport provisoire sur la GRC.

Le sénateur Tkachuk : Ce n'est pas une bonne manière d'entreprendre une étude, sénateur Day.

Le sénateur Day : Il y a deux autres aspects dans le cas d'une motion pour siéger à huis clos, et je suppose qu'ils s'appliquent en l'occurrence. Les conseillers du comité peuvent rester, même si nous sommes à huis clos, et un exemplaire de la transcription doit être conservé auprès du greffier.

Le président : Tous ceux qui sont pour la motion?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Tkachuk : Je suis contre la motion. Il faut accorder du temps pour en débattre, monsieur le président. Vous ne pouvez pas tout simplement vous précipiter à un vote.

Ne pensez-vous pas que nous avons le droit de nous prononcer pendant que nous avons cette discussion?

Le président : Je vous ai entendu, sénateur.

Tous ceux qui sont contre?

Le sénateur Tkachuk : Je suis contre.

Le sénateur Lang : Je suis contre.

Le sénateur Wallin : Nous voulons un débat sur la motion. Aucune règle ne dit que nous devons arrêter à 18 heures.

Le sénateur Tkachuk : Je veux un débat sur la motion.

Le sénateur Wallin : Nous écoutons des témoignages qui, nous l'espérons, seront reflétés dans le rapport. Il vaut la peine de prendre quelques minutes pour avoir cette discussion.

Le président : Nous comprenons cet argument, sénateur Wallin. Nous avons discuté de cette question tout à l'heure; nous avons dépassé le temps alloué. Il y a eu une discussion, et le sénateur Banks a proposé une motion pour que nous prolongions la discussion afin de vous satisfaire. C'est ce que nous avons fait. Nous avons maintenant dépassé de cinq minutes l'heure à laquelle nous avions convenu de nous arrêter.

Le sénateur Tkachuk : Je veux remercier les témoins d'être venus. Si vous voulez savoir comment gérer la GRC, ne nous prenez pas pour exemple.

Le sénateur Wallin : Les autres comités sénatoriaux fonctionnent de façon plus amicale.

Le sénateur Tkachuk : Ils fonctionnent de façon civilisée.

Le président : Au nom des autres membres du comité, je vous remercie d'avoir été des nôtres. Nous avons apprécié vos commentaires.

Nous allons maintenant siéger à huis clos.

(Le comité poursuit ses travaux à huis clos.)


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