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Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule 12 - Témoignages du 19 novembre 2009


OTTAWA, le jeudi 19 novembre 2009

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles, qui a été saisi du projet de loi S-212, Loi modifiant la Loi canadienne sur la protection de l'environnement de 1999, se réunit aujourd'hui à 8 h 5 pour étudier le projet de loi.

Le sénateur W. David Angus (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bienvenue à cette séance du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Je m'appelle David Angus. Je suis sénateur du Québec et je suis le président du comité.

Le sénateur Grant Mitchell, de l'Alberta, assis à ma droite, est le vice-président. Nous avons également autour de la table nos très estimés représentants de la Bibliothèque du Parlement, qui facilitent nos délibérations, MM. Sam Banks et Marc Leblanc. À leur droite, le sénateur Tommy Banks jouera un rôle important, ce matin, puisqu'il parraine le projet de loi dont nous nous occupons aujourd'hui. À sa droite se trouvent le sénateur Bert Brown, de l'Alberta et le sénateur Richard Neufeld, de la Colombie-Britannique. À ma gauche se trouvent notre greffière, Lynn Gordon, le sénateur Robert Peterson, de la Saskatchewan, le sénateur Judith Seidman, de Montréal, au Québec et le dernier, mais non le moindre, le sénateur Daniel Lang, du Yukon.

Nous poursuivons ce matin l'étude du projet de loi S-212, Loi modifiant la Loi canadienne sur la protection de l'environnement de 1999, qui est parrainé par le sénateur Banks de l'Alberta.

Je dis tout cela à l'intention non seulement des personnes ici présentes, à qui je souhaite la bienvenue, mais également à l'intention des gens qui nous regardent à la CPAC et à tous ceux qui nous regardent sur Internet. Bienvenue à tous. L'objectif de ce projet de loi nous a été expliqué en détail, au début de la semaine, par le sénateur Banks. Il a indiqué pendant son exposé que le projet de loi serait modifié davantage avant de tenir compte des récentes lois qui en auraient rendu certaines dispositions inapplicables ou redondantes.

Ce matin, nous avons invité des représentants d'Environnement Canada à livrer un témoignage et à commenter le projet de loi, de façon que le sénateur Banks ait l'occasion d'examiner avec eux certains aspects du projet de loi et de donner aux autres sénateurs la possibilité de connaître les points de vue du gouvernement sur ce projet de loi d'initiative parlementaire.

Sans plus tarder, j'aimerais présenter nos trois témoins. Merci d'être venus, le comité vous souhaite à tous la bienvenue. Nous espérons d'ailleurs vous revoir. Voici nos trois témoins : Athana Mentzelopoulos, directrice générale par intérim, Affaires législatives et réglementaires, Renée Caron, directrice exécutive, Gouvernance législative et Nancy Klenavic, agente de politique, Unité des conseils législatifs.

Avez-vous une déclaration à faire?

Athana Mentzelopoulos, directrice générale par intérim, Affaires législatives et réglementaires, Environnement Canada : Je ferai une déclaration, et mes collègues m'aideront à répondre aux questions.

Le président : Allez-y, alors.

Mme Mentzelopoulos : C'est un honneur pour moi d'être ici aujourd'hui pour vous parler du projet de loi S-212. Comme je l'ai indiqué, après ma déclaration d'ouverture, mes collègues, Mmes Caron et Klenavic, m'offriront leur appui. Elles ont étudié dans le domaine du droit, et pourront combler mes lacunes à cet égard.

Puisque le projet de loi émane du Sénat, non pas du gouvernement, il ne serait pas indiqué que je parle des objectifs stratégiques du projet de loi S-212. Je vais plutôt vous expliquer comment nous envisageons ce projet de loi et je formulerai des commentaires sur des dispositions particulières de ce projet de loi. Ensuite, je répondrai à vos questions.

Sénateur Banks, je m'excuse d'avance car certains de mes commentaires pourraient reprendre ce que vous avez dit mardi, dans votre exposé.

Le sénateur Banks : Je dois entendre la plupart des choses au moins deux fois.

Le président : Je suis content que vous fassiez ce commentaire, car j'apprends ainsi que les trois témoins ont eu l'occasion de prendre connaissance des transcriptions et savent ce que le sénateur Banks a dit.

Mme Mentzelopoulos : Oui. De façon générale, le projet de loi S-212 propose de modifier les dispositions relatives à la participation publique inscrite dans les parties 2 et 10 de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement de 1999, que j'appellerai désormais la LCPE.

Premièrement, le projet de loi propose de modifier la disposition portant sur les exigences relatives aux actions en protection de l'environnement. Les actions en protection de l'environnement, à l'heure actuelle, sont prévues en vertu des articles 22 à 40 de la LCPE. Ces actions sont en quelque sorte le moyen par lequel le public participe à l'application de la LCPE, puisqu'elles permettent à un résidant du Canada d'intenter une poursuite au civil contre un présumé contrevenant, dans certaines circonstances bien définies. Une personne peut exercer ce droit seulement si elle a déjà demandé au ministre de l'Environnement de mener une enquête au sujet d'une infraction présumée, aux termes de l'article 17 de la Loi, et si le ministre, soit n'a pas répondu à cette demande, soit a fait une réponse déraisonnable. De plus, la procédure ne sera entamée que si l'infraction présumée a causé une atteinte importante à l'environnement. L'infraction doit être prouvée selon la prépondérance des probabilités.

Jusqu'ici, aucune action en protection de l'environnement n'a été lancée contre qui que ce soit en vertu de ces dispositions.

Au chapitre des actions en protection de l'environnement, le projet de loi S-212 supprimerait l'exigence selon laquelle l'infraction présumée doit avoir causé une atteinte grave à l'environnement.

Le projet de loi modifie également la LCPE en ce qui a trait aux poursuites privées. Aux termes de l'article 504 du Code criminel, quiconque croit, pour des motifs raisonnables, qu'une personne a commis un acte criminel peut faire une dénonciation, entraînant une poursuite. Dans de tels cas, on considère que la première personne est le poursuivant privé. Cette personne peut s'occuper elle-même de cette poursuite ou, comme cela se fait en cas de poursuites privées engagées aux termes d'une autre loi, la poursuite sera prise en charge par le procureur général.

Le projet de loi S-212 apporte un certain nombre de modifications à la LCPE, qui ont trait aux poursuites privées. Il propose entre autres ce qu'on appelle une distribution du produit des amendes perçues, disposition selon laquelle toute amende perçue en raison d'une poursuite privée doit être divisée également entre le poursuivant privé et le ministre de l'Environnement ou le gouvernement provincial, si c'est le gouvernement provincial qui a assumé les frais de la poursuite.

À l'heure actuelle, tout produit d'une amende perçue en vertu de la LCPE est versé au Receveur général. Le projet de loi C-16, que vous avez déjà étudié et qui a aujourd'hui reçu la sanction royale, modifie la LCPE de façon que le produit de toute amende perçue en vertu de la LCPE soit versé au Fonds pour dommages à l'environnement.

Il est important de souligner que la LCPE donne au gouverneur en conseil le pouvoir de prendre des règlements prescrivant la méthode de distribution du produit d'une amende afin d'indemniser le poursuivant privé. Toutefois, ces règlements n'ont pas été adoptés. Le projet de loi S-212 modifierait la LCPE de façon que 50 p. 100 d'une amende perçue à la suite d'une poursuite intentée par un poursuivant privé soient versés au poursuivant, et l'autre tranche de 50 p. 100, au ministre, peu importe les frais engagés.

Le projet de loi S-212 autoriserait également le tribunal à ordonner au contrevenant de défrayer le poursuivant privé des frais qu'il a engagés dans la poursuite. Cela donnerait aux tribunaux provinciaux davantage de pouvoirs; ils pourraient ainsi ordonner l'attribution de frais et dépens au poursuivant. À l'heure actuelle, les tribunaux provinciaux n'ont qu'un pouvoir limité d'ordonner l'attribution de frais et dépens à l'une ou l'autre partie. Cette disposition n'aurait pas d'incidence sur le pouvoir actuel inhérent des tribunaux supérieurs d'attribuer une partie ou la totalité des frais et dépens à l'une ou l'autre partie.

Le projet de loi S-212 autoriserait également les poursuivants privés à demander à un tribunal de modifier une ordonnance de la cour, une condamnation avec sursis ou une absolution sous condition qui auraient été imposées à la suite d'une poursuite privée. La LCPE, aujourd'hui, ne permet aux tribunaux de modifier l'une ou l'autre de ces décisions que sur demande du procureur général ou du contrevenant.

Enfin, le projet de loi S-212 modifierait la période de prescription, c'est-à-dire le délai dont le poursuivant dispose pour engager une poursuite par procédure sommaire; dans le cas d'une poursuite privée, ce délai commencerait à la date où le poursuivant privé a pris connaissance des éléments constitutifs de l'infraction.

Selon la disposition en vigueur, la prescription commence à la date où les éléments constitutifs de l'infraction sont venus à la connaissance du ministre. Le projet de loi C-16 a permis de modifier cette disposition pour préciser que la période de prescription touchant les poursuites par procédure sommaire est de cinq ans et commence le jour où l'infraction a été commise.

J'aimerais prendre quelques minutes pour montrer que, à notre avis, le projet de loi S-212 ne tient pas toujours compte des modifications proposées dans le projet de loi C-16, la Loi sur le contrôle d'application de lois environnementales, ou de l'esprit de cette loi; j'ai indiqué plus tôt que vous avez récemment étudié ce projet de loi, qui a reçu la sanction royale le 18 juin de l'année en cours.

L'article 3 du projet de loi S-212 propose de modifier le paragraphe 275(1) de la LCPE de 1999. Or, lorsque le projet de loi C-16 entrera en vigueur, le paragraphe 275(1) n'existera plus. Le Parlement a déjà déterminé que ce paragraphe devait être abrogé et remplacé.

Selon le libellé actuel du paragraphe 275(1), les poursuites pour une infraction à la LCPE punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire se prescrivent par deux ans à compter de la date où les éléments constitutifs de l'infraction sont venus à la connaissance du ministre de l'Environnement. Le projet de loi S-212 propose de modifier ce paragraphe de façon qu'une poursuite visant une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire se prescrive par deux ans à compter de la date où un ministre ou, dans le cas d'une poursuite privée, le poursuivant privé, prend connaissance de l'infraction.

Étant donné que le projet de loi C-16 modifie l'article 275, il est inutile que le projet de loi S-212 propose également une modification de ce paragraphe. La modification proposée par le projet de loi C-16 prévoit une nouvelle méthode pour déterminer le début de la prescription. Selon le projet de loi, aucune poursuite visant une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire ne peut être intentée plus de cinq ans après le jour où les éléments constitutifs de l'infraction ont été connus, sauf si le poursuivant et le défendeur consentent au prolongement de ce délai de cinq ans.

La modification de l'article 275 par le projet de loi C-16 a été proposée en raison des complications liées à la preuve de la date à laquelle le ministre de l'Environnement a pris connaissance de l'infraction. De plus, le fait d'étendre à cinq ans la prescription et de prévoir une prolongation de cette prescription, sur entente entre le poursuivant et le défendeur, assure que les infractions qui n'ont pas été constatées après deux ans peuvent toujours faire l'objet d'une poursuite par procédure sommaire.

Si l'article 3 du projet de loi S-212 entrait en vigueur, l'article 275 de la LCPE redeviendrait une disposition que l'on a déjà dite problématique.

L'article 4 du projet de loi, qui concerne la disposition sur la distribution du produit des amendes de la LCPE, omet également de tenir compte des modifications apportées à la LCPE par le projet de loi C-16, et contredit l'objectif de ce projet de loi.

L'article 4, en modifiant l'article 278 de la LCPE, prévoit que, dans le cas où une poursuite privée est engagée relativement à une infraction à la LCPE, la moitié du produit de l'amende qui en découle revient au poursuivant privé.

Selon la LCPE en vigueur, l'article 278 prévoit que le gouverneur en conseil peut fixer par règlement les modalités de distribution du produit des amendes en vue du remboursement à une personne, un gouvernement ou toute entité qui a entamé la procédure des frais engagés dans le cadre des poursuites. La LCPE prévoit l'imposition d'amendes dans le but de dissuader les contrevenants ou quiconque de commettre une infraction, de permettre la dénonciation des infractions commises et de réparer les atteintes découlant des infractions. C'est dans ce but que le projet de loi C-16 vise à intégrer à la LCPE un régime très rigoureux d'amendes et qu'il exige que le produit des amendes soit versé au Fonds pour dommages à l'environnement afin de financer ses projets de restauration.

Selon l'orientation générale du projet de loi C-16, le produit des amendes doit être versé au Fonds pour dommages à l'environnement, mais cette règle générale est assujettie au Règlement pris en vertu de l'article 278 de la LCPE.

Selon la modification de l'article 278 proposée par le projet de loi S-212, dans tous les cas où un poursuivant privé a engagé des procédures, un montant équivalant exactement à la moitié de l'amende qui en découlera doit lui être versé. Ce mécanisme, selon lequel la moitié du montant d'une amende est versée au poursuivant, pourrait le faire profiter d'une poursuite couronnée de succès. Ce n'est pas là l'objectif poursuivi au moment de la détermination de la peine, et cela pourrait avoir une influence inappropriée sur les décisions de la cour touchant le montant de l'amende. Pensons notamment aux cas où un poursuivant privé a engagé des procédures, mais ne les a pas lui-même menées.

Comme vous le savez peut-être, le procureur général a toujours le pouvoir discrétionnaire de prendre en charge une procédure engagée par un poursuivant privé. Dans de tels cas, il est difficile ou il serait difficile de justifier que l'on verse la moitié du montant d'une amende à une personne qui n'a aucunement participé aux frais de la poursuite. De la même façon, un montant équivalent à 50 p. 100 d'une amende pourrait ne pas être une indemnité suffisante pour un poursuivant privé au regard des coûts qu'il a engagés.

Cette disposition précise également que, lorsqu'un particulier engage une poursuite privée relativement à une infraction, la moitié du montant de l'amende doit être versée au ministre de l'Environnement ou, lorsque c'est le gouvernement provincial qui assume l'intégralité des frais de la poursuite, à ce gouvernement provincial. Cela est incompatible avec la politique poursuivie par le Parlement lorsqu'il a adopté le projet de loi C-16, qui modifiait la LCPE de façon que le produit de toutes les amendes perçues par le Receveur général soit versé au Fonds pour dommages à l'environnement qui s'en servira aux fins de la restauration de l'environnement et pour la réparation des dommages résultant de l'infraction en question. Si l'article 4 était adopté, le produit des amendes ne serait pas perçu par le Fonds pour dommages à l'environnement dans le cas des poursuites privées.

L'alinéa 291(1)m) de la LCPE en vigueur prévoit que le tribunal peut, lorsqu'un contrevenant a été condamné à payer une amende, affecter, sous réserve du Code criminel ou des règlements d'application de l'article 278, toute amende ou autre sanction pécuniaire compte tenu des ordonnances rendues.

L'article 5 du projet de loi S-212 propose de modifier ce paragraphe de façon à tenir compte des précédentes modifications de l'article 278, qui visait à diviser cet article en deux paragraphes. Cependant, le projet de loi C-16 abroge l'alinéa 291(1)m) de la LCPE, qui n'est plus pertinent au regard de la disposition du projet de loi C-16 selon laquelle le produit des amendes, assujetti uniquement aux règlements d'application de l'article 278, doit être versé au Fonds pour dommages à l'environnement. Si l'article 5 entrait en vigueur, l'alinéa 291(1)m) deviendrait une disposition en contradiction avec la disposition proposée dans le projet de loi C-16.

Voilà ce que j'avais à dire. Nous répondrons avec plaisir à vos questions.

Le président : Merci. Vous avez offert un exposé limpide et d'excellente qualité sur la loi.

Les autres témoins ne s'exprimeront pas pour le moment. Je crois donc qu'il serait peut-être approprié, sénateur Banks, que vous commenciez.

Le sénateur Banks : Si les autres membres ont des questions, j'attendrais sans problème.

Le président : Nous avons dressé une liste. Que préférez-vous?

Le sénateur Banks : Je vais commencer, alors, si vous me le permettez. Merci beaucoup.

Le président : Je n'ai pas beaucoup d'expérience de ce type de situation; ce qui est compliqué, comme vous le savez, c'est que vous allez proposer d'autres modifications. Toutefois, nous savons et on nous a dit que le ministère n'est pas favorable à ce projet de loi. J'aimerais que cela soit bien clair, et j'aimerais que les raisons en soient expliquées. Je veux que le sénateur Banks ait la chance, à tout le moins, de discuter de cette question avec nous, de façon que les députés puissent voter en toute connaissance de cause le temps venu.

J'espère que vous ne m'en voulez pas d'avoir dit cela, mais ce sont des choses que je vous avais déjà dites en privé.

Le sénateur Banks : En effet, et tout le monde n'était pas au courant.

Le président : En effet.

Le sénateur Banks : Merci. J'apprécie que les députés fassent preuve d'indulgence en permettant que les choses se déroulent comme le président l'a très clairement expliqué.

J'aimerais dire aux témoins que j'espère que, lorsque j'aurai présenté mes propositions de modification, comme je vais le faire dans un instant, et que j'aurai traité des sujets sur lesquels je vais revenir dans un instant, nous vous demanderons de vous présenter de nouveau devant nous ou de réagir d'une autre façon à nos questions. J'espère que cela se fera d'ici une ou deux semaines.

Les problèmes que vous avez si habilement mis en lumière viennent en grande partie du fait que le projet de loi S-212 a été présenté avant le projet de loi C-16. Ce dernier projet de loi apportait des modifications concrètes à la LCPE, et nous les avons toutes soutenues, mais ces modifications sont incompatibles avec les dispositions du projet de loi S-212. Je vais en parler rapidement, dans l'ordre. Quand je vous poserai des questions, ce sera pour savoir comment formuler les modifications que je vais proposer.

J'attire d'abord votre attention sur l'article I et j'aimerais avoir une information. Ai-je raison de dire qu'il n'est pas possible qu'une poursuite, privée ou publique, soit engagée devant des tribunaux à moins que le procureur général concerné n'ait donné son accord?

Mme Mentzelopoulos : Oui, vous avez raison.

Le sénateur Banks : Donc, quelqu'un qui voudrait intenter une poursuite frivole, par exemple un amoureux des arbres un peu trop avide, ne pourrait pas se rendre devant les tribunaux si sa poursuite n'est pas fondée; il faudrait qu'un procureur général examine la question et déclare qu'elle est fondée, et il y aura ensuite poursuite par un poursuivant privé ou par le procureur général. Est-ce bien cela?

Mme Mentzelopoulos : C'est bien cela, quand on parle des poursuites qui aboutissent.

Le sénateur Banks : Une poursuite tout à fait frivole, ou une poursuite qui est intentée de toute évidence dans le but de faire des profits, ne résisterait donc pas à l'examen du procureur général et n'aboutirait pas devant les tribunaux. Est-ce que cette hypothèse est raisonnable?

Mme Mentzelopoulos : Je ne sais pas si l'on pourrait établir à une étape quelconque que la poursuite vise le profit, mais en ce qui concerne les autres aspects d'une affaire que l'on peut juger frivole au premier coup d'œil, oui.

Le sénateur Banks : L'un des aspects dont un procureur général tiendrait compte serait la possibilité d'obtenir une condamnation en raison des accusations. Est-ce cela?

Mme Mentzelopoulos : Il tient compte de cela, en effet.

Le sénateur Banks : Cela fait partie des critères que nous utilisons.

Selon le projet de loi que nous étudions présentement tout comme selon la LCPE en vigueur, si je voulais intenter une poursuite ou si je me proposais de le faire, aux termes de cette disposition, je devrais pour commencer convaincre quelqu'un qu'une atteinte grave a été portée à l'environnement. Qui en jugera?

Nancy Klenavic, agente de politique, Unité des conseils législatifs, Environnement Canada : Je peux répondre à cette question, sénateur. Quand une poursuite est intentée relativement à la protection de l'environnement, c'est le tribunal qui détermine si le poursuivant a trouvé, selon la prépondérance des probabilités, qu'une atteinte importante a été portée à l'environnement.

Le sénateur Banks : Je devrais donc me présenter devant le tribunal, en premier lieu, et prouver cette atteinte grave?

Mme Klenavic : Le tribunal n'accueille les poursuites concernant la protection de l'environnement que lorsqu'il a été prouvé que l'infraction a porté une atteinte grave à l'environnement.

Le sénateur Banks : Ce que je ne comprends pas — je suis ignorant dans ce domaine — c'est que, lorsqu'un agent de police rédige une contravention et m'accuse d'entrée par effraction, il n'a pas à se présenter à un endroit quelconque, pour commencer, afin de prouver qu'il y a eu entrée par effraction; il porte des accusations, et c'est le tribunal qui juge de ma culpabilité ou de mon innocence. Dans le cas qui nous occupe, je ne peux pas faire une dénonciation et porter des accusations si je n'ai pas d'abord montré que la personne que j'accuse a causé une atteinte grave à l'environnement. Est-ce que je dois présenter mes preuves devant un juge?

Mme Klenavic : Je vais apporter quelques précisions. Ce n'est que dans le cadre des actions en protection de l'environnement que l'on exige de prouver qu'il y a eu atteinte grave; une action, ce n'est pas une poursuite. Si vous voulez faire une dénonciation à titre de poursuivant privé, vous le ferez en alléguant que quelqu'un a commis une infraction à la LCPE; vous n'aurez pas à prouver qu'il y a eu une atteinte grave.

Le sénateur Banks : Pourriez-vous répéter cela, s'il vous plaît.

Mme Klenavic : Vous avez à prouver qu'il y a eu atteinte grave seulement dans le cadre d'une action en protection de l'environnement, un type d'action unique que prévoit la LCPE. Il ne s'agit pas d'une poursuite. Il s'agit d'une action civile qui n'entraîne pas de condamnation; elle n'entraîne qu'un certain type d'ordonnance. Le tribunal pourrait par exemple ordonner aux parties de négocier une entente pour apporter des corrections. Dans ce contexte, rien n'exige que l'on prouve qu'il y a eu atteinte grave, puisqu'une personne ne prend ce type particulier d'action que si l'infraction supposée à la LCPE a bel et bien porté atteinte à l'environnement. C'est un peu différent du cas où un agent de police fait une dénonciation.

Le sénateur Banks : Je comprends que l'analogie n'est pas très bonne. Si une personne — et je suppose que le terme « personne » désigne un particulier ou un groupe de particuliers au sein d'une organisation — avait l'intention d'intenter une action en vertu de la LCPE en raison d'une infraction aux dispositions de cette loi, à qui devra-t-elle prouver ou montrer que l'infraction a causé une atteinte importante? Devrait-elle s'adresser à un juge?

Mme Klenavic : Oui, c'est cela.

Le sénateur Banks : Merci.

Je comprends le paragraphe 1(2) et je crois aussi comprendre l'article 2. En ce qui concerne l'article 3, qui figure à la page 1 du projet de loi S-212, étant donné ce que vous avez expliqué du déroulement des choses, les membres de notre comité ont reconnu qu'au cours de l'examen article par article nous allions rejeter cette disposition. J'imagine que ce n'est qu'une hypothèse.

Je m'opposerai donc à l'article 3, au moment de l'examen article par article, puisque, comme vous l'avez dit, les lois récemment adoptées qui ont été approuvées ont modifié le contexte, c'est-à-dire qu'un délai de deux ans après la découverte d'une infraction et un délai de cinq ans après la perpétration de cette infraction ont chacun des avantages et des inconvénients. Je m'opposerai à l'article 3, parce que je crois qu'il n'est plus nécessaire.

J'ai quelques petites questions sur l'article 4, qui figure à la page 2. Je veux proposer que l'on modifie cette disposition à la lumière des changements qui découlent du projet de loi C-16, y compris en ce qui concerne le Fonds pour dommages à l'environnement. Ai-je raison de dire que les sommes versées dans ce Fonds sont visées par un Règlement? Est-il possible de prendre un Règlement, ce dont le ministre se chargerait probablement, pour prévoir que le produit des amendes ne serait pas versé dans le Fonds pour dommages à l'environnement?

Mme Mentzelopoulos : Le projet de loi C-16 prévoit que le produit des amendes est versé directement dans le Fonds pour dommages à l'environnement, mais il tient compte de la disposition qui fait partie de la LCPE depuis un certain temps, selon laquelle on peut prendre un Règlement pour faire en sorte qu'une partie du produit des amendes serve à couvrir les frais.

Le sénateur Banks : Donc, le produit des amendes ne va pas nécessairement, sans exception, dans le Fonds pour dommages à l'environnement? Dans certaines situations, il a une autre destination?

Mme Mentzelopoulos : Seulement s'il existait un règlement à cet effet. Actuellement, lorsque le projet de loi C-16 sera adopté, le produit de toutes les amendes sera versé dans le Fonds pour dommages à l'environnement.

Le sénateur Banks : Et le règlement ministériel ne s'appliquera pas?

Mme Mentzelopoulos : Non, ce règlement n'existe pas. Aucun règlement ne prévoit que ces montants puissent ne pas être versés dans le Fonds pour dommages à l'environnement.

Le sénateur Banks : Il n'existera pas de règlement de ce type une fois les nouvelles dispositions du projet de loi C-16 en vigueur? Le ministre ne serait pas capable de faire adopter un tel Règlement?

Mme Mentzelopoulos : Il est toujours possible de prendre de tels règlements en vertu de la LCPE. Le projet de loi C- 16 ne change rien à cette autorité, mais il n'existe pas actuellement de règlement de ce type.

Le sénateur Banks : Selon la LCPE actuelle, le gouverneur en conseil peut prendre un règlement pour déterminer la façon dont ces sommes seront distribuées. Est-ce que c'est déjà arrivé?

Mme Mentzelopoulos : Non. Aucun règlement n'a été adopté en vertu de la LCPE.

Le sénateur Banks : Dans les arguments que j'ai présentés au sujet de la distribution du produit des amendes perçues, j'ai évoqué la Loi sur les pêches. Je comprends qu'il y a des différences dans le montant de ces amendes, en particulier en raison des modifications qui découlent du projet de loi C-16. Je vais m'appuyer là-dessus pour formuler ma proposition de modification, de façon à atténuer les conflits.

Peut-on raisonnablement établir une analogie entre la façon dont le produit des amendes est distribué selon la Loi sur les pêches et quelques autres lois environnementales, d'une part, et la LCPE, d'autre part?

Mme Mentzelopoulos : Excusez-moi, je ne suis pas sûre de comprendre votre question.

Le sénateur Banks : Selon la Loi sur les pêches, si une personne intente une poursuite en toute conformité avec la loi, le produit des amendes sera divisé. Est-ce que cela peut raisonnablement se comparer à ce que prévoit la LCPE?

Je pose cette question parce que cela fait près de 30 ans que la Loi sur les pêches prévoit une distribution du produit des amendes, et que je me demandais si vous saviez s'il y a déjà eu, en vertu de cette Loi sur les pêches, des poursuites frivoles, comme vous l'avez dit au sujet des poursuites intentées dans le but d'en tirer un profit, ou est-ce que le montant des amendes n'est pas toujours resté faible parce que les tribunaux ne voulaient pas qu'un poursuivant ou une autre personne en tire un profit. Savez-vous si cela est déjà arrivé?

Mme Mentzelopoulos : Pas à ma connaissance, mais nous n'avons pas fait les analyses qui nous auraient permis d'en être sûrs.

Le sénateur Banks : Pourriez-vous chercher à savoir s'il est déjà arrivé, dans l'application de la Loi sur les pêches, le type d'effet négatif que vous avez mentionné au regard de l'article 4, quand vous avez donné votre avis sur la LCPE?

Mme Mentzelopoulos : Nous pourrions probablement fouiller plus à fond certains aspects de votre question. Mais certains aspects, par exemple l'intention des personnes concernées, seraient plus difficiles à déterminer.

Le sénateur Banks : J'aimerais avoir ces renseignements; cela m'aiderait à rédiger ma proposition, puisqu'il faudra clairement proposer une modification.

Dites-moi s'il vous plaît si j'ai raison ou non de dire que la proposition qui forme l'article 5 du projet de loi S-212 ne supprime pas le pouvoir discrétionnaire prévu au paragraphe 291(1) de la Loi. Si nous ajoutons un sous-alinéa 291(1)k.1) nous respectons le libellé des paragraphes précédents et nous ne touchons pas au pouvoir discrétionnaire prévu à l'article 291 de la LCPE.

Mme Klenavic : Vous avez raison. Le libellé de ce sous-alinéa respecte les pouvoirs discrétionnaires du tribunal en cas de condamnation.

Le sénateur Banks : Est-ce que cela ne pose pas une contrainte quelconque au tribunal?

Mme Klenavic : Pas du tout. Cela ne fait que l'autoriser à ordonner à la partie défenderesse de payer les frais engagés par le poursuivant privé.

Le sénateur Banks : Merci.

Je vais proposer une modification au paragraphe 5(2) pour l'adapter aux effets du projet de loi C-16 que vous avez décrits. Il existe d'excellentes raisons pour lesquelles on adopte une loi cadre qui donne le ton, et pour adopter plus tard un règlement.

Est-ce que le ministère de la Justice sait à quelle date le projet de loi C-16 entrera en vigueur?

Mme Mentzelopoulos : Nous sommes ici au nom d'Environnement Canada, et nous sommes responsables de la mise en œuvre du projet de loi C-16. Mme Caron pourrait vous parler du plan en deux étapes que nous avons conçu et que nous peaufinons toujours. Je suis la principale responsable, mais c'est Mme Caron qui s'occupe de la plupart des tâches liées à l'entrée en vigueur du projet de loi C-16.

Le sénateur Banks : Ces renseignements me seront utiles.

Renée Caron, directrice exécutive, Gouvernance législative, Environnement Canada : En ce qui concerne l'échéancier, nous prévoyons qu'une partie des dispositions de ce projet de loi entrera en vigueur au printemps 2010, et que les autres pourraient entrer en vigueur pendant l'hiver ou le printemps 2011. Nous nous attendons à ce que les dispositions touchées par le présent projet de loi feront partie de celles qui entreront en vigueur au printemps 2010.

Le sénateur Banks : C'est bien. Merci.

Ma dernière question concerne l'article 6; j'ai encore besoin de renseignements. Vous n'avez pas parlé de cet article, c'est moi qui l'ai fait. En effet, quand j'ai examiné le projet de loi dans son ensemble, j'ai constaté que je n'avais pas exposé clairement l'intention de l'article 6.

La modification que je vais proposer à l'article 6 a pour objectif de clarifier le fait que je n'essaie pas d'exclure le procureur général, mais que je désire au contraire inclure le poursuivant privé. La façon dont cette ébauche est formulée, en ce qui concerne le poursuivant privé, semble exclure le procureur général, et ce n'était pas là mon intention. Je dois reformuler ce passage pour qu'il soit clair que le procureur général sera toujours partie à une demande présentée en vertu de cet article. Je voulais vous en informer, car je veux que vous sachiez que je suis attentif.

Le président : Avant de passer à la période de questions, j'aimerais revenir sur les échanges assez nombreux qui visaient à établir que, pour qu'une poursuite soit accueillie, il faut d'abord prouver qu'il y a eu une atteinte grave à l'environnement. Les commentaires de Mme Klenavic m'ont fait comprendre qu'il s'agit d'un processus en deux étapes.

Ai-je raison de dire qu'il n'est pas nécessaire de prouver hors de toute qu'il y a eu une atteinte grave, mais qu'il suffit d'établir que c'est à première vue le cas? Autrement dit, vous n'avez pas à rassembler tous les éléments de preuve pertinents, il vous suffit de décrire une situation selon laquelle, à première vue, il y a eu atteinte grave. Est-ce bien cela? Cela pourrait peut-être résoudre le problème. Il n'y a pas lieu de tenir un procès là-dessus.

Mme Klenavic : Non. Je pourrais peut-être revenir là-dessus pour apporter des précisions.

Selon la LCPE, il peut se passer deux choses. Il peut y avoir une action en protection de l'environnement, c'est-à-dire une action civile. Il peut deuxièmement y avoir une poursuite, qui sera intentée soit par le procureur général, soit par un particulier.

Le président : Qu'en est-il de l'action civile? Cela ne concerne que les particuliers?

Mme Klenavic : Exactement. Le gouvernement ne peut pas intenter une action en protection de l'environnement. Seuls les résidents du Canada peuvent le faire, et ils doivent d'abord avoir demandé au ministre de mener une enquête et n'avoir pas reçu de réponse ou avoir reçu une réponse insatisfaisante du ministre.

Le président : Il s'agit plutôt d'une action en dommages-intérêts que d'une poursuite criminelle, qui débouche sur une condamnation. Est-ce bien cela? C'est un peu comme une poursuite en dommages-intérêts.

Mme Klenavic : Vous avez en partie raison. C'est un peu comme si l'on intentait une poursuite contre quelqu'un. C'est une action civile. Un particulier ne peut pas obtenir des dommages-intérêts en intentant une action. Tout ce qu'il peut obtenir, c'est que le tribunal impose une mesure de redressement déclaratoire. Par exemple, le tribunal pourra ordonner au dépendant de cesser de faire ce qui contrevient à la loi ou de négocier avec le plaignant un plan de redressement, ce genre de chose. Le particulier concerné ne peut pas percevoir des dommages-intérêts dans ce type d'action. C'est dans ce contexte qu'il faut voir l'exigence de prouver qu'il y a eu atteinte grave. Cela doit être prouvé selon la prépondérance des probabilités. On ne va pas au-delà du doute raisonnable, mais, oui, il faut prouver qu'il y a eu atteinte grave à l'environnement.

Quand il y a une poursuite, cette exigence n'entre pas en jeu. Dans une poursuite, tout comme si c'était le procureur général qui l'intentait, il faut prouver qu'il y a eu infraction — et cela, peu importe l'infraction, qui, selon la LCPE, n'entraîne pas la plupart du temps qu'il faut prouver qu'il y a eu atteinte à l'environnement. Est-ce que cela clarifie la question?

Le président : Est-ce que cela vous aide, sénateur Banks?

Le sénateur Banks : Beaucoup.

Le sénateur Lang : Merci beaucoup. J'apprécie que vous soyez venues ici pour nous donner ces informations. Elles sont très utiles, étant donné le projet de loi que nous étudions.

Il est important de répéter ce qu'ont dit les témoins, c'est-à-dire que notre intention concernant le projet de loi que nous avons adopté, ici, au printemps dernier, est de faire en sorte que la loi entre en vigueur au cours de l'année prochaine. Nous avons dit, au début de la séance, que l'on se demandait combien de temps cela prendrait, et il est important de le répéter.

J'aimerais pour commencer comparer cette loi particulière aux lois actuelles sur les pêches. C'est important parce que la Loi sur les pêches est évoquée de temps à autre quand on parle de la distribution du produit des amendes et du lien entre cette disposition de la Loi sur les pêches et celle du projet de loi C-16.

Je veux pour commencer clarifier quelque chose, et peut-être que l'un des témoins pourra répondre à ma question. Pourriez-vous nous dire si, dans la Loi sur les pêches, dans le cadre des dispositions sur les mesures de redressement en cas d'atteinte à l'environnement, on prévoit également un fonds pour dommages à l'environnement? Si nous voulons comparer des choses comparables, nous devrions savoir ce qu'il y a dans l'une et l'autre loi.

Mme Klenavic : Je vais clarifier cette question. Les juges peuvent ordonner que le produit des amendes soit versé au Fonds pour dommages à l'environnement en vertu d'un certain nombre de lois, dont la Loi sur les pêches. Il n'est pas obligatoire que le produit des amendes soit versé au Fonds pour dommages en environnement, en vertu de la Loi sur les pêches, mais les juges ont le pouvoir discrétionnaire de l'ordonner.

Le sénateur Lang : À l'heure actuelle, la Loi sur les pêches n'a prévu aucune politique visant à ce que le produit des amendes soit versé dans le Fonds pour dommages à l'environnement, et c'est une différence importante par rapport au projet de loi dont nous discutons, en ce qui a trait à cette politique. C'est bien cela?

Mme Klenavic : C'est bien cela. Il ne s'agit pas là d'une obligation, selon la Loi sur les pêches.

Le sénateur Lang : Ma prochaine question s'appuie sur une comparaison avec la Loi sur les pêches, parce qu'il est important que nous soyons au courant. En ce qui concerne la LCPE et les modifications que nous avons présentées au printemps dernier, nous sommes passés d'amendes d'un montant allant de 10 000 $ ou 20 000 $ comme montant maximum à un autre système selon lequel les amendes pouvaient atteindre un maximum de quatre millions de dollars et pouvaient atteindre le double, soit huit millions de dollars, à la seconde infraction. Autrement dit, la politique générale énoncée dans le projet de loi C-16 était conçue de façon à ce que — et je crois que l'un des témoins en a fait mention — l'un des éléments dissuasifs est l'importance des amendes pour une infraction à la LCPE, selon la formulation actuelle. Des sommes substantielles peuvent être perçues. Pour une deuxième infraction, l'amende peut aller jusqu'à huit millions de dollars. Je voulais préciser cela pour le compte rendu. Est-ce bien cela?

Mme Mentzelopoulos : Les principaux objectifs sont la dissuasion, la dénonciation et les mesures de redressement. Le régime des amendes a cette ampleur. Mme Klenavic pourra apporter des éclaircissements, mais le nouveau régime d'amendes a pour but d'éviter la possibilité qu'une personne considère que les amendes sont un coût à payer pour pouvoir faire des affaires. Les mesures de redressement sont possibles parce que les amendes sont versées dans le Fonds pour dommages à l'environnement.

Mme Klenavic : Actuellement, en vertu de la LCPE, le montant maximal de l'amende imposée pour une déclaration de culpabilité par procédure sommaire est de 300 000 $. En général, les tribunaux ont imposé des amendes beaucoup moins élevées que cela. Je crois que l'amende la plus élevée imposée en vertu de la LCPE était de 100 000 $. Mais en général, le montant est beaucoup moins élevé.

Les modifications apportées au projet de loi C-16 ont introduit un différent type de régime d'amendes, selon lequel le montant minimal des amendes pour les infractions les plus graves commence à 5 000 $ pour un particulier, mais ce montant minimal augmente dans le cas des petites ou des grandes entreprises. Par exemple, dans le cas des grandes entreprises, le montant minimal de l'amende pour une infraction grave serait de 100 000 $ et peut atteindre quatre millions de dollars. Ce montant peut doubler pour une infraction subséquente ou une seconde infraction.

Le sénateur Lang : Encore une fois, notre point de comparaison est la Loi sur les pêches. Pourriez-vous préciser, pour le compte rendu, que, selon la Loi sur les pêches, l'amende maximale est de un million de dollars, si j'ai bien compris. Cependant, l'expérience acquise au fil du temps montre que les amendes sont de l'ordre de 100 000 $ ou de 200 000 $, ce qui est un montant important.

Le président : Aucune amende supérieure à 100 000 $ n'a jamais été imposée.

Le sénateur Lang : Aux termes de la Loi sur les pêches. Je veux que nous revenions là-dessus.

Mme Klenavic : Il est exact que, aux termes de la Loi sur les pêches, l'amende maximale qui peut être infligée par mise en accusation est de un million de dollars. En général, les amendes infligées en application de la Loi sur les pêches s'élèvent à quelques dizaines ou quelques centaines de milliers de dollars. Il n'est arrivé qu'une seule fois qu'une amende de un million de dollars soit infligée aux termes de la Loi sur les pêches.

Le sénateur Lang : J'insiste là-dessus en raison de la différence entre la distribution du produit des amendes perçues et le montant d'argent qui pourrait être perçu, selon la gravité de l'infraction. J'estime que cela est important, car si nous faisons allusion à un élément d'un autre projet de loi lié à celui dont nous parlons, nous devons comparer tous les éléments des deux projets de loi et examiner les liens qu'ils entretiennent. C'est ce que je veux faire valoir aujourd'hui : je crois qu'il s'agit d'un aspect à prendre en considération dans le cadre de toute étude concernant la capacité de distribuer le produit des amendes perçues. Personnellement, le principe qui sous-tend cela me pose problème.

Pour clarifier les choses à propos du projet de loi S-212 en lien avec la LCPE, j'aimerais que nous revenions sur la question de la capacité de distribuer le produit des amendes perçues. Quelqu'un pourrait recevoir 50 p. 100 du produit d'une amende perçue, en plus de se voir rembourser ses frais et dépens. Conformément aux dispositions législatives que nous avons adoptées à l'unanimité au printemps dernier, ces sommes devraient être versées au Fonds pour dommages à l'environnement. Est-il juste de dire que la distribution aurait pour effet de soustraire ces sommes au fonds en question ?

Mme Mentzelopoulos : Une disposition du projet de loi S-212 prévoit la distribution du produit de l'amende, et, en plus, l'attribution de frais et dépens.

Le président : Sur ce point, j'aimerais qu'on m'aide à comprendre quelque chose : le sénateur Banks a employé l'expression « autre sanction pécuniaire ». Dans mon esprit, il s'agit là de quelque chose de différent d'une amende ou des frais et dépens. Existe-t-il un autre mécanisme de sanction des dommages à l'environnement? S'agit-il de cela? Je ne sais pas où vous avez trouvé cette expression, sénateur Banks, mais vous lisiez l'une des dispositions du projet de loi.

Mme Klenavic : Je crois que la disposition du projet de loi S-212 dont nous parlons autorise le tribunal, après une déclaration de culpabilité, à rendre une ordonnance enjoignant au contrevenant de verser un montant d'argent pour indemniser le poursuivant privé des frais relatifs à la poursuite. Il s'agit non pas d'un montant d'argent découlant de l'amende, mais d'un montant supplémentaire.

Le président : Il s'agit d'un remboursement des frais, et non pas de dommages-intérêts compensatoires.

Mme Klenavic : C'est exact. Le montant est fixé en fonction des frais engagés. Il s'agit clairement d'un montant lié au remboursement des frais et des dépenses.

Le sénateur Banks : À ce propos, j'aimerais répéter qu'une action privée, une action non pas criminelle, mais civile, ne doit pas permettre à un poursuivant privé, celui qui engage la poursuite, de toucher des dommages-intérêts ou une quelconque indemnisation par suite de l'action. Est-ce exact?

Mme Klenavic : Oui. C'est exact.

Le sénateur Lang : Monsieur le président, j'aimerais me pencher sur un autre aspect. J'ai examiné la question de la distribution du produit des amendes perçues, de même que la politique et les mesures d'examen qui entourent cette question, et, pour déterminer si de telles mesures sont appropriées dans le cadre du présent projet de loi, je les ai comparées à ce qui se fait au titre de la Loi sur les pêches. À la lumière du fait qu'il s'agit d'un nouveau projet de loi, que le Fonds pour dommages à l'environnement est un nouvel outil et que la solide structure a été considérablement modifiée comparativement à ce qui était en place par le passé pour être transformé en moyen de dissuasion, tous ces éléments doivent être pris en considération, du moins à ce moment-ci.

En ce qui concerne le projet de loi S-212, ce qui me préoccupe, c'est que les règles du jeu soient équitables pour tous, si on peut appeler cela un jeu. À l'heure actuelle, si je comprends bien, un poursuivant privé peut se voir attribuer des frais et dépens, mais que se passe-t-il s'il est conclu que le défendeur n'a posé aucun acte répréhensible? Le défendeur n'a pas commis l'infraction alléguée, mais il a engagé des frais pour le prouver. Est-ce que le projet de loi dont nous parlons prévoit le remboursement des frais du défendeur s'il obtient gain de cause? J'aimerais entendre ce que vous avez à dire sur la question de l'équité des règles du jeu.

Mme Mentzelopoulos : Ma réponse sera brève : non, le projet de loi ne prévoit rien de ce genre. Je vais laisser le soin à mes collègues de fournir des détails supplémentaires, au besoin.

Mme Klenavic : Le projet de loi S-212 n'accorde pas au tribunal le pouvoir de rendre une ordonnance enjoignant au poursuivant de rembourser les frais du défendeur. Les tribunaux supérieurs ont la compétence inhérente d'adjuger les frais à l'une ou l'autre des parties, même si cette compétence est rarement utilisée dans le cadre des condamnations au criminel. La modification apportée au projet de loi S-212 habiliterait un tribunal provincial à rendre une ordonnance visant le remboursement des frais du poursuivant, mais les frais engagés par le défendeur ne pourraient pas être remboursés, même si celui-ci obtient gain de cause.

Le sénateur Lang : Monsieur le président, j'estime qu'il s'agit là d'un point important, car ce qui est bon pour l'un est bon pour l'autre, peu importe l'issue d'une affaire. Nous allons devoir nous pencher également là-dessus.

Le sénateur Neufeld : En fait, ma question s'adresse au sénateur Banks. Peut-être que les notes que j'ai prises au cours de notre réunion de l'autre jour sont erronées, mais il me semble que vous avez dit que vous alliez supprimer l'article 5 du projet de loi S-212. Est-ce que j'ai tort?

Le sénateur Banks : Oui.

Le sénateur Neufeld : Vous n'allez pas le supprimer?

Le sénateur Banks : En matière de suppression d'articles, j'ai l'intention de voter contre l'article 3 lorsque nous effectuerons l'étude article par article, et, si tous mes collègues font de même, cet article sera supprimé. Pour ce qui est de l'article 5 du projet de loi S-212, je propose qu'il soit modifié.

Le président : Mes notes indiquent la même chose que celles du sénateur Banks. L'autre jour, vous avez dit que cet article allait être supprimé.

Le sénateur Banks : Je vais essayer d'être plus clair. J'ai dit que je proposerais qu'un amendement soit apporté au projet de loi S-212 pour que cette question soit prise en considération, mais il ne s'agira pas d'une modification de l'alinéa 291(1)m) de la LCPE, car cet alinéa n'existe plus et que nous ne pouvons pas modifier une disposition qui ne figure pas dans un projet de loi. Je proposerai ultérieurement une modification pour prendre en considération l'intention exprimée dans l'article 5 du projet de loi S-212, mais il ne s'agira pas d'une modification de l'alinéa 291(1)m).

Le sénateur Neufeld : Je comprends un peu mieux. Merci.

Lorsqu'on parle d'un « poursuivant privé », est-ce que l'on parle d'une personne? D'un groupe de personnes? D'une organisation? Qu'entend-on par « poursuivant privé »?

Mme Mentzelopoulos : Il peut s'agir de toute personne ou de tout groupe qui intente une poursuite privée.

Mme Klenavic : Je vais vérifier s'il peut s'agir d'un groupe. Le pouvoir d'un particulier de déposer une dénonciation découle du Code criminel. Je pense avoir la disposition pertinente sous la main. Si je ne m'abuse, il peut s'agir de toute personne morale, donc d'un particulier ou d'une entreprise, par exemple.

Le sénateur Neufeld : Si j'ai posé la question, c'est que, l'autre jour, nous avons reçu une représentante d'Ecojustice, anciennement Sierra Legal Defence Fund. Cet organisme pourrait-il être considéré comme un poursuivant privé? D'après la déclaration préliminaire de la représentante en question, nous avons cru comprendre que cet organisme était composé de scientifiques et de toutes sortes d'avocats — autrement dit, de gens bien avisés. Je ne crois pas me tromper en affirmant que ce groupe est tout à fait favorable à la distribution du produit des amendes perçues. Un peu plus tôt, le sénateur Lang a évoqué des amendes pouvant s'élever jusqu'à quatre millions de dollars; il me semble que les membres des organisations de ce genre servent leurs propres intérêts lorsqu'ils se présentent devant nous et qu'ils affirment qu'ils sont en faveur de la distribution du produit des amendes perçues, car dans le cas d'une amende de quatre millions de dollars, c'est une somme de deux millions de dollars que recevrait une telle organisation pour poursuivre ses luttes. Je dois le savoir : est-ce qu'un groupe de ce genre serait considéré comme un particulier?

Mme Caron : Je vous répondrai en vous disant que je ne crois pas que nous pouvons répondre à cette question en ce qui concerne la nature précise de l'entité Ecojustice. À ce moment-ci, mes collègues et moi-même ne connaissons pas le statut juridique d'Ecojustice. J'estime que, si Ecojustice n'a pas le statut juridique lui permettant d'être considéré comme un poursuivant privé, ce groupe pourrait intenter une poursuite par le truchement d'un organisme habilité à le faire.

Le sénateur Neufeld : J'aimerais que vous fournissiez au président, par l'entremise du greffier, une réponse écrite à cette question, de manière à ce que nous ayons tous l'occasion de lire la réponse.

S'il s'avérait que seul un particulier peut avoir qualité de poursuivant privé, c'est-à-dire Pierre, Jean, Jacques, cela voudrait dire que tout contribuable, tout Canadien, tout particulier pourrait intenter une poursuite privée avec le soutien du Sierra Legal Defence Fund, ou Ecojustice Canada, qui s'occuperait de faire tout le travail pour ce particulier, qui pourrait se révéler être un membre de cette organisation. Est-ce exact?

Mme Caron : Oui. Pour l'essentiel, c'est ce que je voulais dire lorsque j'ai indiqué que la poursuite pourrait être intentée par suite d'une entente de représentation.

Le sénateur Neufeld : Merci. Je crois que cela répond à ma question.

Le président : Je cède la parole au sénateur Lang. Je pense qu'il veut tirer quelque chose au clair.

Le sénateur Lang : Je veux simplement poursuivre sur la question de la distribution du produit des amendes perçues, et j'ai également une question à poser aux témoins.

Supposons que le projet de loi S-212 entre en vigueur, que le principe de la distribution du produit des amendes perçues pour les fins de la LCPE est adopté, qu'une infraction est commise et qu'une société se voit infliger une amende d'un montant considérable, disons deux millions de dollars. La moitié de cette somme irait au poursuivant privé, mais l'autre million de dollars, la moitié de l'amende, à qui serait-il octroyé? Est-il juste de dire que, selon la version actuelle du projet de loi S-212, cette somme de un million de dollars serait versée non pas au Fonds pour dommages à l'environnement, mais dans le fonds des recettes générales?

Mme Mentzelopoulos : Ce que vous dites est juste. Selon les dispositions du projet de loi S-212, une proportion de 50 p. 100 du produit de l'amende serait versée au ministre de l'Environnement, qui doit ensuite verser la somme au receveur général.

Le sénateur Lang : Ainsi, pour conclure, cela nous éloigne davantage de la formule du Fonds pour dommages à l'environnement, qui a été mis en place conformément à une politique dans le but de prendre des mesures pour remédier à des dommages infligés à l'environnement. Il s'agit non pas d'une question, mais d'une déclaration : vous n'êtes pas obligée de répondre à cela. J'affirme que cela nous éloigne du principe général du projet de loi relatif à la LCPE et en réduit la portée.

Le président : Madame Mentzelopoulos, j'aimerais obtenir les éclaircissements. Vous avez indiqué que l'objectif était la réparation des dommages, et vous avez employé deux autres termes. L'un d'entre eux était « dénonciation » — j'aimerais connaître la signification de ce terme.

Mme Mentzelopoulos : Mme Klenavic ou Mme Caron pourrait peut-être vous fournir ces éclaircissements.

Mme Caron : Pour l'essentiel, une dénonciation est une condamnation publique de l'infraction. Il s'agit de la réprobation du public à l'égard du fait que des infractions de ce type sont commises.

Le sénateur Mitchell : J'aimerais revenir sur deux ou trois points qui ont été soulevés et à l'égard desquels j'aimerais obtenir des éclaircissements. Je pense que ce qui a été dit à ces sujets était clair, mais je veux en faire ressortir l'importance et obtenir des précisions.

La question des poursuites privées n'est pas propre à ce projet de loi, loin s'en faut. Nous avons abordé cette question dans le cadre de nos réunions sur le secteur des pêches. Le droit criminel comporte des dispositions touchant les poursuites privées, tout comme certaines lois de l'Ontario, si je ne m'abuse.

Savez-vous si d'autres lois provinciales ou fédérales, ou même la jurisprudence internationale, font état de cette question des poursuites privées? Nous ne sommes toujours pas en train de réinventer la roue, n'est-ce pas?

Mme Klenavic : Non, pas du tout. Le pouvoir d'intenter une poursuite privée découle du Code criminel, mais il s'applique à toutes les lois fédérales. Ainsi, à ma connaissance, quiconque peut déposer une dénonciation s'il soupçonne qu'une infraction à quelque loi que ce soit a été commise.

Le sénateur Mitchell : Il serait approprié de faire figurer cela dans ce projet de loi. En fait, il serait inapproprié de ne pas le faire.

Mme Klenavic : Je ne pense pas que le pouvoir d'intenter une poursuite privée soit inscrit dans le projet de loi S-212. Les dispositions de ce projet de loi semblent traiter de l'amende relative à une poursuite privée ou faciliter l'imposition d'une telle amende, mais n'habilite pas effectivement quiconque à intenter une poursuite privée.

Le président : Cela figure déjà dans la loi que le sénateur Banks tente de faire modifier.

Le sénateur Mitchell : Dans une certaine mesure, comme vous pouvez le constater, l'appui à ce projet de loi dépend du sens que l'on accorde à la notion de poursuites privées, mais il existe de nombreux précédents, à de nombreux endroits.

Ma deuxième question concerne la préoccupation soulevée par le sénateur Lang selon laquelle, d'une façon ou d'une autre, l'argent qui serait autrement versé dans le fonds environnemental aboutirait dans d'autres mains en raison de ces poursuites privées. Ai-je raison de dire que des sommes ne seraient versées que dans le cas de poursuites privées puisque l'État n'intenterait pas de telles poursuites de toute façon? Il n'y aurait pas d'amende de toute façon. Aucune somme ne pourrait être versée dans un fonds de défense de toute façon. Il s'agit purement et simplement de nouvel argent. Une partie de la somme sera versée dans le fonds environnemental, et une autre partie ira au poursuivant privé, mais le fait est que, si la poursuite est intentée par le procureur général, aucun poursuivant privé n'entre en ligne de compte. Il s'agit de nouvel argent, peu importe qui le reçoit et peu importe le pourcentage de la somme qu'il reçoit.

Mme Mentzelopoulos : Oui, dans le cadre d'une poursuite privée.

Mme Klenavic : J'aimerais préciser que le projet de loi S-212 énonce qu'un poursuivant privé reçoit 50 p. 100 du produit de l'amende si c'est lui qui a introduit l'instance.

D'après ce que je crois comprendre, il peut s'agir simplement du dépôt d'une dénonciation, et je ne pense pas que cela signifie nécessairement que le procureur général n'aurait pas déposé de dénonciation. En outre, il arrive souvent que le procureur général prenne en charge une poursuite intentée par un poursuivant privé.

Le sénateur Mitchell : Nous pourrions tirer cela au clair. Il ne serait certainement pas possible que le procureur général dépose une dénonciation et que, immédiatement après, un particulier en dépose une à son tour puis réclame la moitié du produit de l'amende. Cela n'est sûrement pas possible.

Ce devrait être l'inverse. Un particulier intente une poursuite, puis cela attire l'attention du procureur général. Cela ne contredit pas ce que j'ai fait valoir. Il n'y aurait pas eu de poursuite si le particulier n'en avait pas intenté une. Le procureur général n'était pas intéressé à le faire, et il n'agissait pas. En fait, c'est le dépôt de la poursuite privée qui a attiré l'attention du procureur général. Il ne s'agit pas d'argent qui aurait passé sous le nez des administrateurs du fonds puisque cet argent n'aurait pas été versé au fonds de toute façon.

Mme Caron : J'aimerais réagir à ce qui vient d'être dit. Nous devons faire preuve de prudence, car le Service des poursuites pénales du Canada dépose une dénonciation lorsqu'il a constitué un dossier et qu'il est prêt à engager une procédure. Quant à la question de savoir quelle instance a eu l'intention d'engager une telle procédure en premier, il peut être difficile de formuler des hypothèses à cet égard. Je ne serais pas prête à présumer que le Service des poursuites pénales ne se préparait pas ou n'était pas sur le point de déposer une dénonciation. Le fait qu'un poursuivant privé ait agi en premier ne change rien au travail continu effectué par le Service des poursuites pénales et à la possibilité qu'ils prennent ultérieurement l'affaire en charge.

Le sénateur Mitchell : Combien de fois cela est-il arrivé?

Mme Caron : Je parle en termes hypothétiques. Il faudrait que je m'adresse au Service des poursuites pénales pour répondre à cette question.

Le sénateur Mitchell : D'une part, il n'est pour ainsi dire jamais arrivé qu'une poursuite privée soit intentée à cet égard, mais, d'autre part, j'aimerais savoir combien de fois le Service des poursuites pénales a pris le relais d'une poursuite intentée par un poursuivant privé. J'aimerais beaucoup obtenir cette information.

Ma prochaine question porte sur les préoccupations soulevées à propos des organisations comme Ecojustice qui est une organisation extrêmement crédible comptant des avocats dans ses rangs. Dans notre société, quiconque peut avoir recours aux services de l'avocat de son choix. Si un particulier décide d'intenter une poursuite privée avec le soutien d'Ecojustice, quel est le problème? Combien de fois Ecojustice ou le Sierra Legal Defence Fund a-t-il participé à une poursuite privée? Le savez-vous?

Mme Klenavic : Je ne peux pas répondre précisément à cette question. Vous devriez vous adresser à cette organisation pour obtenir cette information. Je sais toutefois que cette organisation a joué un rôle actif dans plusieurs poursuites privées.

Le sénateur Mitchell : Si nous en arrivons à un point où les gens peuvent intenter une poursuite, faire de l'argent grâce à la distribution du produit de l'amende et se voir adjuger leurs frais... je ne suis pas avocat, mais n'est-il pas vrai que, en règle générale, les gens ne se voient pas rembourser l'intégralité des frais et dépens? Je parle ici des frais de justice, mais ceux-ci englobent généralement d'autres frais que ceux liés à la poursuite ou à la défense devant les tribunaux, n'est-ce pas?

Mme Caron : En creusant dans ma vaste mémoire, je crois me souvenir que, de façon générale, dans le système judiciaire, le montant des frais remboursés est déterminé par suite d'une évaluation. Il est possible que les frais réellement engagés soient supérieurs à ceux que le tribunal a jugé raisonnable d'adjuger au bout du compte. Je crois effectivement qu'il est fréquent que les parties à un litige dépensent davantage que leurs moyens ne leur permettent dans l'espoir de récupérer leurs frais à l'issue de l'affaire.

Le sénateur Mitchell : Il ne s'agit pas d'une loterie où il suffit d'acheter un billet dans l'espoir de remporter la mise, ni d'une activité commerciale menant au bonheur éternel et à une vie somptueuse. Ces poursuites sont intentées pour protéger l'environnement.

Mme Caron : À mes yeux, il n'est pas évident que l'article 4 du projet de loi en question a pour objet le remboursement intégral des frais. À mon avis, il ne s'agit pas là de l'esprit de l'article 4, qui est libellé d'une façon telle que la distribution du produit de l'amende perçue apparaît comme obligatoire et automatique. Compte tenu de ce caractère non discrétionnaire, il est malaisé de déterminer comment cela serait supervisé, et, en fait, cette disposition énonce une distribution automatique du produit des amendes perçues. Il est donc difficile de formuler des hypothèses quant aux objectifs de cet article.

Le sénateur Mitchell : Merci.

Le président : Sénateur Banks, je m'apprêtais à faire un commentaire qui aurait démontré, une fois de plus mon manque d'expérience à l'égard de ce type de projet de loi d'intérêt privé. De fait, dans une large mesure, vous tentez de renforcer la LCPE modifiée par le projet de loi C-16 en vue de contribuer à l'atteinte de l'objectif de la LCPE, de mobiliser et d'informer davantage le public et de faciliter les initiatives privées contre les pollueurs. Je crois que les témoins qui se trouvent devant nous tentent également de faire la même chose. Par conséquent, il me semble que, au fur et à mesure que vous progresserez dans vos travaux visant à simplifier ce projet de loi, ces témoins pourraient être disponibles pour vous aider à atteindre votre objectif tout en vous conseillant de supprimer certains passages qui pourraient peut-être se révéler inacceptables pour le ministère. Je ne sais pas — je suis peut-être naïf à cet égard, mais il me semble que nous sommes près d'en arriver à un terrain d'entente. Il s'agit simplement d'une affirmation.

Est-ce que les témoins du ministère peuvent me dire si je suis à côté de la plaque?

Mme Mentzelopoulos : Je ne suis pas en position de m'engager à cet égard à ce moment-ci.

Le président : Très bien. Toutefois, de toute évidence, si l'un ou l'autre d'entre nous souhaitait discuter avec vous à propos de ce qui ressort des témoignages entendus, vous seriez disponibles, n'est-ce pas? Quelqu'un comme le sénateur Banks pourrait-il avoir recours à vos services?

Mme Mentzelopoulos : Oui.

Le sénateur Lang : Sauf votre respect, je crois que vous êtes à côté de la plaque.

Le président : Très bien.

Le sénateur Lang : Je ne dis pas cela méchamment. J'estime que nous devrons prendre ici une décision de principe importante : nous devrons déterminer si nous sommes d'accord ou non avec le principe de la distribution du produit des amendes perçues. Selon moi, il faut que cela soit établi avant que nous recommandions au ministère ou à quiconque de rédiger l'ébauche d'un projet de loi de cette manière.

Le président : En fait, je ne faisais pas allusion à l'aspect touchant la distribution du produit des amendes perçues.

Le sénateur Lang : À mes yeux, il s'agit là de l'aspect le plus important du projet de loi, à la lumière de ce que nous savons à propos de la LCPE, du montant des amendes, des modifications qui ont été apportées et de l'orientation stratégique du Fonds pour dommages à l'environnement. J'estime qu'il faut d'abord régler la question de la distribution du produit des amendes perçues.

Le président : Bien.

Le sénateur Banks : J'ai déjà dit que j'allais le faire, à la satisfaction de tous, j'ose l'espérer, compte tenu du fait que l'article 4 du projet de loi S-212 est clairement incompatible avec les dispositions législatives qui ont été adoptées depuis son dépôt.

J'ai une dernière question à poser aux témoins. Je vous remercie d'avoir dit que vous seriez prêt à discuter avec moi au moment où j'élaborerai les modifications de manière à m'indiquer si vous estimez qu'elles sont utiles.

Aujourd'hui, nous avons beaucoup parlé de la politique exprimée dans le projet de loi C-16 et dans d'autres projets de loi, des principes qui les sous-tendent et de leur esprit. Êtes-vous d'accord avec moi pour dire que le principe de participation du public en matière de poursuites privées est clairement exprimé dans la LCPE — la version modifiée de 1999 —, de même que dans ses versions antérieures — on pourrait remonter jusqu'à la LCPE de 1988 —, et que, de fait, il s'agit d'un objet essentiel des projets de loi successifs portant sur la LCPE, et qu'il le demeure dans le cadre des modifications apportées à la LCPE dans le cadre du projet de loi C-16? S'agit-il d'une affirmation raisonnable?

Mme Mentzelopoulos : Oui, sénateur.

Le sénateur Brown : Je tiens à souligner qu'une poursuite privée peut se retourner contre celui qui l'a intentée. J'étais membre du conseil des gouverneurs du district d'irrigation Ouest au moment où un jeune homme a décidé d'intenter une poursuite contre nous parce qu'un canal avait provoqué une infiltration d'eau sur une terre appartenant à son père. Pour faire une histoire courte, ce jeune homme a perdu sa cause et perdu ses terres agricoles, et le juge nous a ordonnés de rembourser — par simple charité — la moitié de ses frais juridiques. Les poursuites privées en tous genres me font peur. Tout projet de loi autorisant une poursuite privée devrait être assortie d'un avertissement relatif aux conséquences d'une telle action. À mes yeux, une poursuite privée est une chose dangereuse.

Le président : Voulez-vous vous en tenir à cette affirmation ou avez-vous une question précise à poser?

Le sénateur Brown : Il s'agissait d'une affirmation. J'aimerais que ce projet de loi soit assorti d'une disposition quelconque qui empêcherait les gens de croire qu'ils pourraient faire beaucoup d'argent en intentant une poursuite privée et qui empêcherait cette poursuite de se retourner contre eux et de leur faire du tort.

Le président : Le comité pourrait se pencher là-dessus ultérieurement. Nous devons nous en tenir au projet de loi tel qu'il se présente.

Avant de conclure, j'aimerais mentionner que je suis l'un de ceux qui croient au vieil adage selon lequel une image vaut mille mots, qu'il s'agisse d'une image proprement dite ou d'une image créée par le langage. Il serait utile que le sénateur Banks ou les témoins nous fournissent un exemple pour illustrer chacun des deux types d'action en justice dont nous parlons. Je sais que, récemment, une poursuite a été intentée au Québec relativement à une zone de déversement, située de l'autre côté du fleuve au Québec, et dont on n'avait pas tenu compte. Les titulaires du contrat ou du permis de déversement ont déversé des matières qu'ils n'avaient pas le droit de déverser. Il en a résulté une réaction chimique et, avec le temps, des émanations délétères à un point tel qu'elles représentaient un danger pour la santé des gens qui vivaient sur la propriété adjacente à cette zone.

En dépit des efforts déployés par ces derniers, aucun pouvoir public n'a bougé le petit doigt. Selon moi, il s'agit d'une raison pour laquelle nous devons donner aux particuliers la capacité d'agir. Des bébés et de jeunes enfants vivaient près de cette zone. Les émanations sont devenues si graves que les habitants ont dû évacuer leur résidence et déménager dans une autre maison — de façon temporaire dans un cas, et de façon permanente dans un autre —, car les pouvoirs publics n'ont rien fait.

Les particuliers se sont organisés eux-mêmes. Ils ont tenté de constituer un groupe avec leurs voisins. Ils ont dû investir beaucoup d'argent pour s'attaquer aux responsables des dommages. Ils ont dû faire appel à des témoins experts et à des chimistes, à un point tel qu'ils ont perdu tout espoir.

Pourriez-vous utiliser l'exemple que je viens de vous donner pour illustrer la façon dont fonctionnerait ce projet de loi? Comprenez-vous ce que je vous demande? J'estime que ce projet de loi et les modifications de la LCPE proposées dans le cadre du projet de loi C-16 — auquel s'ajoutera peut-être le projet de loi S-212 — permettraient à ces gens d'obtenir réparation. Une dénonciation serait déposée, et personne n'aurait à déclarer faillite en cours de processus.

Mme Mentzelopoulos : Nous pouvons certainement nous pencher sur la question et déterminer si, dans les limites de notre étude du projet de loi S-212, nous serions autorisés à faire quelque chose du genre.

Le président : C'est relativement simple. L'autre jour, le témoin qui représentait Ecojustice nous a cité quelques exemples. Aucun détail ne nous a été fourni quant aux faits, mais on nous a dit que l'une de ces affaires portait sur un cas de pollution dans le havre de Hamilton. Au cours de cette discussion, j'avais posé la question suivante : à supposer que je sois propriétaire d'une maison près du lac Ontario, pour quelle raison autre qu'un souci de l'intérêt général tenterais-je d'obtenir réparation, à mes propres frais et à la place de l'État, pour ces dommages causés à l'environnement?

L'exemple que je vous ai fourni me semble indiquer une voie plus intéressante à suivre pour les particuliers. Corrigez-moi si je me trompe, sénateur, mais je crois que c'est ce genre de choses que vous tentez de faciliter — vous tentez de faire en sorte que les particuliers obtiennent plus facilement réparation, sans avoir à prouver, selon la prépondérance des probabilités, que les émanations en question étaient effectivement délétères et qu'il existait un lien de cause à effet entre le déversement et le problème. Ai-je bien compris?

Le sénateur Banks : Je crois que si, mais j'invite les témoins à formuler des observations à propos de ce que vous venez tout juste de dire. Il ne faut pas perdre de vue qu'il existe une différence importante entre une poursuite civile intentée par vous ou une poursuite civile intentée par moi contre quelqu'un qui nous a causé un préjudice... Nous n'avons pas besoin de la LCPE pour faire cela.

Le président : Non. Le témoin avait dit qu'il s'agissait non pas d'obtenir des dommages-intérêts compensatoires, mais une mesure enjoignant au coupable de cesser ses activités polluantes et de remettre le site en état.

Le sénateur Banks : L'objectif d'une poursuite privée ou d'une action en protection de l'environnement consiste à corriger une erreur, et non pas à ce que la partie lésée obtienne une indemnisation. Le président a-t-il raison sur ce point?

Mme Klenavic : Oui, cela est exact. Le particulier qui intente une action en protection de l'environnement ou une poursuite privée ne touche pas d'indemnisation. Cela est différent d'une poursuite civile en dommages et intérêts.

La partie 2 de la LCPE est conçue pour aider les particuliers qui se trouvent dans une telle situation. Ils ont le pouvoir de demander au ministre de procéder à une enquête. Si ce dernier ne donne pas suite à cette requête ou si les mesures qu'il prend ne sont pas raisonnables, un particulier peut, aux termes de la partie 2 de la LCPE, intenter une action en protection de l'environnement.

Le président : Il y a un aspect de la question qui n'a pas encore été examiné dans le cadre de notre débat — que je considère comme sain —, et il s'agit de la question de la compétence. Les particuliers qui ont joué un rôle dans l'affaire que je vous ai citée en exemple se sont d'abord adressés à l'administration municipale. On leur a répondu qu'ils devaient s'adresser au ministère provincial de l'environnement, qui leur a indiqué qu'il s'agissait d'une question de compétence fédérale.

Je pense que ce que nous tentons de faire ici est de faciliter la tâche des citoyens que nous servons ou essayons de servir. Nous voulons les aider à obtenir réparation dans de telles situations.

Le sénateur Mitchell : Pour faire suite à ce que vous disiez, monsieur le président, à propos de l'habilitation des citoyens, ce genre de projet de loi s'inscrit tout à fait dans la tradition qui consiste à autonomiser les Canadiens de manière à ce qu'ils aient une certaine emprise sur les problèmes et les préjudices auxquels ils font face. Tout n'est pas laissé entre les mains du gouvernement : nous prenons certains pouvoirs du gouvernement et les remettons aux particuliers du Canada et à d'autres personnes, conformément aux dispositions législatives. Je ne vois pas en quoi cela peut être une mauvaise chose.

En fait, dans un contexte plus large, cela s'inscrit dans la tradition de la réforme démocratique. À l'heure actuelle, dans notre société, l'idée de la réforme démocratique gagne beaucoup de terrain. À de nombreux égards, la présente initiative confère un caractère plus démocratique à notre système politique et à notre système judiciaire.

Le président : Un peu comme l'idée de l'élection des sénateurs, je suppose.

Le sénateur Mitchell : Tout à fait. Nous devons nous pencher là-dessus.

Le président : Oubliez ça.

Le sénateur Mitchell : Nous avons besoin d'une réforme démocratique. Il s'agirait d'un point de départ. Commençons par voir si nous pouvons réussir cela en premier.

Le sénateur Banks : Monsieur le président, je crois que l'exemple vous nous avez donné est très instructif et très utile. Pour revenir sur cet exemple, je crois que, dans une telle situation, il y a un certain nombre de choses qu'un particulier peut faire. D'une part, il peut tenter d'obtenir une mesure injonctive, une ordonnance corrective ou quelque chose du genre; d'autre part, il peut participer, dans une certaine mesure, à une poursuite qui donnera lieu au versement d'une amende.

Toutefois, pour obtenir des dommages-intérêts, il faut intenter une poursuite devant les tribunaux. Pour cela, il n'est pas nécessaire d'avoir recours à la LCPE ou à quoi que ce soit du genre. Il est possible d'intenter une poursuite civile devant un tribunal. Il n'est pas nécessaire d'obtenir l'autorisation de quiconque pour le faire.

Le président : Vous parlez d'une chose différente. Dans l'exemple que je vous ai donné, il s'agit de personnes qui ont subi des dommages réels et qui ont vu leur santé mise en danger. Ils n'avaient aucun moyen de composer avec une telle situation ou d'y mettre fin.

Le sénateur Banks : Ils ont été frustrés dans leurs tentatives d'y mettre fin.

Le président : Ils ne savaient pas de quelle compétence relevait cette question — ce genre de choses.

Le sénateur Banks : Vous avez tout à fait raison. Merci.

Le sénateur Lang : Il y a deux ou trois choses que j'aimerais dire pour les fins du compte rendu. Je suis sensible à ce qu'a dit mon collègue, le sénateur Michell, mais nous devons être prudents dans notre manière d'interpréter le projet de loi que nous avons sous les yeux, à la lumière de ce qui est déjà en vigueur par suite du projet de loi C-16

Tout d'abord, je crois que les gens qui assistent à notre débat comprennent très bien que le pouvoir de procéder à une poursuite privée est prévu par le projet de loi qui est sur le point d'être mis en vigueur. À mon avis, nous convenons tous du fait qu'un organisme public — qu'il s'agisse d'un particulier ou d'un autre type d'organisation — a la possibilité d'intenter une poursuite lorsqu'une infraction majeure est en train d'être commise et que les représentants de l'autorité gouvernementale ne font pas nécessairement le travail pour lequel ils sont payés.

Je pense que nous devons faire en sorte que cela soit clair. Il est parfois difficile de remettre en question tel ou tel aspect d'un projet de loi — en l'occurrence un projet de loi environnemental, car on s'expose de ce fait à se voir accusé d'être opposé à l'environnement ou de ne pas croire à la participation du public. Je veux indiquer clairement que je crois en l'environnement et en la participation du public, mais que j'ai une véritable difficulté à accepter l'idée de la distribution du produit des amendes perçues, surtout si l'on tient compte de l'importance des amendes, qui a été évoquée un peu plus tôt. Je crois que ce n'est pas la bonne façon d'utiliser le produit des amendes.

Le président : Cela est très clair, sénateur. Vous avez fait valoir votre argument.

Je crois que ce que tentait de dire le sénateur Banks — et nous pourrons en discuter au cours de l'étude article par article —, c'est plutôt qu'il faut tenter d'harmoniser la Loi sur les pêches avec la LCPE, tandis que vous avez mentionné — et les témoins se sont montrés d'accord avec vous — qu'il ne faut pas mélanger les pommes et les oranges et qu'il n'était pas approprié d'harmoniser ces deux lois. Je pense que c'est ce que vous avez fait valoir, et nous devrons déterminer quelle est notre position collective à ce sujet.

Le sénateur Banks rajustera peut-être sa position à la lumière des éclaircissements que vous avez fournis, qui sait?

Le sénateur Lang : Je ne doute pas qu'il le fera.

Le sénateur Banks : Je prends toujours en considération vos observations.

Le sénateur Neufeld : Je veux renchérir sur ce que vient de dire le sénateur Lang à propos de l'idée selon laquelle nous voulons uniquement faire en sorte que les particuliers figurent dans le projet de loi S-212 — ils figurent déjà dans la LCPE. Ils peuvent déjà faire cela.

Je ne suis pas en train de dire que je veux que les particuliers soient laissés de côté. Je veux faire preuve de prudence en ce qui a trait à la distribution du produit des amendes, car nous parlons non pas d'amendes de 10 000 ou de 50 000 $, mais d'amendes maximales de quatre millions de dollars, qui seront peut-être doublées pour s'élever à huit millions de dollars.

D'après mon expérience, lorsqu'il commence à être question de montants dans les six chiffres, les gens tendent l'oreille. S'il s'agissait d'un montant d'environ 10 000 $, je ne pense pas que nous aurions à consacrer autant de temps à cette question. C'est comme ça.

J'estime qu'il est important d'établir une distinction entre deux choses : je ne suis pas en train de dire que je suis contre le fait que le public puisse demander au ministère d'agir s'il ne l'a pas encore fait, car la capacité de le faire est prévue dans la loi. Mes réserves concernent la distribution de l'argent — c'est de cela que je parle : les amendes.

D'après mon expérience, les ministres des Finances détestent créer des fonds pour recueillir les amendes. Ils préfèrent que le produit des amendes soit versé dans les recettes générales. Selon ce que j'ai pu observer dans le passé, ils se battront bec et ongles contre la création d'un fonds de ce genre.

Dans le cas qui nous occupe, le ministre des Finances a affirmé qu'il était d'accord avec la création d'un fonds environnemental. Il devait également être d'accord avec les modifications proposées de la LCPE, le projet de loi C-16. Le ministre des Finances a indiqué qu'il créerait un autre fonds et que les sommes qui y seraient versées seraient destinées à la réparation des dommages à l'environnement.

C'est à cela que l'argent devrait être destiné : la réparation des dommages de l'environnement. Cet argent devrait servir à remettre en état ce qui a été endommagé. C'est à cela que l'argent devrait servir. Il ne doit pas être versé à un groupe ou à une organisation qui tirerait profit de ces amendes considérables. Il n'est pas certain que, au bout du compte, des amendes importantes seront infligées, mais je veux agir en amont pour m'assurer que nous ne permettrons pas que cela se produise.

C'est ma vision des choses. Je ne crois pas avoir tort. J'estime que j'ai écouté attentivement ce qui a été dit. Les particuliers ont déjà la capacité d'intenter une action aux termes de la LCPE, et les modifications qui ont été proposées antérieurement — non pas le projet de loi S-212, mais les modifications que nous avons approuvées — énoncent que cet argent, le solde des coûts, doit être versée dans un fonds pour l'environnement. C'est pour cela que je me bats : non pas pour restreindre les possibilités des particuliers, mais pour que l'argent soit versé dans un fonds pour dommages à l'environnement, car c'est la raison pour laquelle l'amende a d'abord et avant tout été perçue, à savoir réparer les dommages causés à l'environnement. J'espère que je me fais bien comprendre là-dessus.

Le président : Nous vous avons bien compris, sénateur. Je pense que le compte rendu devrait indiquer que, pendant que vous formuliez ces observations, les témoins opinaient du bonnet.

Le sénateur Peterson : Je pense que nous sommes tous d'accord sur les grandes lignes du projet de loi. Nous semblons avoir de la difficulté à accepter de partager le butin. Je suis d'avis que les gens, les particuliers qui veulent intenter une poursuite parce que personne d'autre ne le fait devraient se voir adjuger leurs frais. Cependant, pour le reste, je ne comprends pas à quoi cela servirait qu'ils reçoivent une partie du produit des amendes. C'est mon point de vue.

Le président : Puisqu'il n'y a pas d'autres questions, je vais remercier les témoins de leur contribution utile. Nous tirerons profit non seulement des déclarations préliminaires qu'ils ont présentées, qui étaient très claires et très utiles, mais également des réponses qu'ils nous ont fournies. En outre, je les remercie d'avoir accepté de nous fournir des renseignements supplémentaires. Si j'ai bien compris, ils transmettront leurs réponses au greffier. Nous les distribuerons ensuite à tous les membres, et plus particulièrement au parrain du projet de loi, le sénateur Banks.

Avant de suspendre la séance, j'aimerais rappeler aux sénateurs que nous allons nous réunir à huis clos pour discuter de notre programme de travail. Après cela, nous tiendrons une courte réunion complètement privée du comité directeur.

Merci beaucoup.

(Le comité poursuit ses travaux à huis clos.)


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