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Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule 15 - Témoignages du 10 décembre 2009


OTTAWA, le jeudi 10 décembre 2009

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui, à 8 h 6, pour examiner, en vue d'en faire rapport, l'état actuel et futur du secteur de l'énergie du Canada (y compris les énergies de remplacement).

Le sénateur Grant Mitchell (vice-président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le vice-président : Honorables sénateurs, je tiens à vous souhaiter la bienvenue à tous à Ottawa, en cette journée environnementale à souhait, avec grand vent et quantité de neige. On ne pourrait rêver d'un contexte plus approprié pour nos délibérations.

Pour ceux qui nous regardent sur CPAC, aujourd'hui se tient une séance du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Je m'appelle Grant Mitchell et je suis un sénateur de l'Alberta. Je rappelle que notre comité procède, sur deux ans, à une étude des questions touchant à l'énergie et aux répercussions sur les changements climatiques des choix que nous ferons à l'avenir en matière de politiques et de systèmes énergétiques.

Nous accueillons aujourd'hui un témoin de marque, M. Bryne Purchase. Il détient un doctorat en économie de l'Université de Toronto. En outre, il a fait une carrière remarquable dans le secteur public. Il a été sous-ministre des Finances, du Revenu et de l'Énergie, des Sciences et de la Technologie en Ontario. Il a également occupé des postes de direction dans plusieurs sociétés d'État, dont certaines étaient à vocation financière.

En 2004, M. Purchase est retourné à l'Université Queen's. Je lui signale que cette université est une de mes alma mater. Il est professeur auxiliaire à la School of Policy Studies de l'Université Queen's et agréé supérieur de recherche à l'Institut de la politique énergétique et environnementale.

Je voudrais présenter les gens réunis autour de la table. Nos deux attachés de recherche de la Bibliothèque du Parlement, qui nous sont d'une aide précieuse, sont Mark LeBlanc et Sam Banks. Sont également présents le sénateur Tommy Banks, de l'Alberta, le sénateur Bob Peterson, de la Saskatchewan, Lynn Gordon, greffière du comité, le sénateur Michael Meighen, de l'Ontario, le sénateur Dan Lang, du Yukon, le sénateur Judith Seidman, du Québec, et le sénateur Bert Brown, de l'Alberta.

Monsieur Purchase, nous sommes prêts à entendre votre exposé.

Bryne Purchase, professeur auxiliaire, School of Policy Studies, Université Queen's : Honorables sénateurs, je vous remercie de m'avoir invité à prendre la parole devant vous aujourd'hui. Même si je suis fier d'être professeur auxiliaire à la School of Policy Studies de l'Université Queen's et agrégé supérieur de recherche à l'Institut de la politique énergétique et environnementale, de cette même université, c'est en mon nom personnel que je m'adresse à vous. Toutes les opinions que je vais exprimer sont les miennes et on ne peut absolument pas les attribuer à l'université.

Je vais d'abord lire mes remarques liminaires et je suis à votre disposition ensuite pour répondre à vos questions.

J'ai organisé mon allocution autour de trois grands enjeux auxquels le gouvernement du Canada fait face. Tout d'abord, la politique canadienne sur les changements climatiques face à l'incertitude politique mondiale concernant les futures émissions de gaz à effet de serre dues à l'activité humaine et à l'incertitude scientifique inhérente à la complexité des systèmes météorologiques de la planète. Deuxièmement, la politique sur la sécurité énergétique face à l'incertitude concernant la stabilité géopolitique future dans le golfe Persique. Troisièmement, la production d'énergie nucléaire et l'avenir d'Énergie atomique du Canada limitée, EACL, face à l'impasse politique concernant le partage des risques dans les marchés nationaux et à l'incertitude concernant l'accès aux principaux marchés étrangers.

Vous avez sans doute remarqué que je parle à répétition d'une grande incertitude dans tous ces importants enjeux stratégiques. Peu de choses dans mon propos vont réussir à dissiper cette incertitude et je ne pense pas non plus que bien des experts puissent le faire. En tant que décideurs, vous allez œuvrer constamment dans un léger brouillard s'agissant de l'avenir, et pourtant vous devez agir.

S'agissant de la politique sur les changements climatiques, je suis fermement convaincu que le gouvernement du Canada, sans être plus ni moins audacieux que le gouvernement américain — et je décrirai le rôle distinct que les gouvernements provinciaux pourraient jouer — va dans la bonne direction en suivant les orientations des Américains en matière de changements climatiques.

Les membres du comité connaissent sans doute le « principe de précaution » nous invitant à ne pas précipiter l'introduction de nouvelles technologies et de nouveaux produits chimiques en raison de l'incertitude scientifique considérable quant à leurs risques potentiels pour la société.

Je pense qu'un principe analogue peut s'appliquer à l'économie politique du Canada s'agissant des initiatives en matière de changements climatiques. Quels qu'en soient les avantages éventuels à l'échelle mondiale, une initiative audacieuse en vue de réduire nos émissions de gaz à effet de serre signifie nécessairement la diminution des richesses, des revenus et des emplois dans le secteur des combustibles fossiles et dans diverses régions du Canada à l'avenir. Sachez qu'en fin de compte, c'est bien de cela qu'il s'agit.

Une telle attaque visant à réduire un secteur à forte concentration régionale serait majeure et aurait sûrement des répercussions importantes sur notre fédération, et ce, bien au-delà des problèmes causés par la politique énergétique nationale des années 1980. En outre, il ne s'agirait pas d'une politique équilibrée et judicieuse, puisque les changements climatiques sont un problème stratégique à l'échelle du globe. En fait c'est sans doute le problème stratégique le plus grave que j'aie jamais rencontré, étant donné que sa solution exige une initiative collective à l'échelle du globe. Aucun des principaux acteurs ne peut s'en désintéresser. Tous doivent intervenir. La solution passe par le leadership des États-Unis et de la Chine car, ensemble, ces deux pays produisent 40 p. 100 des GES dans le monde, c'est-à-dire 20 p. 100 chacun. Soit dit en passant, le Canada produit 2 p. 100 des mêmes émissions.

Cela ne veut pas dire que le Canada doive simplement profiter des efforts des autres. En effet, ce n'est pas possible, puisque nous prévoyons déjà que les initiatives des États-Unis comprendront des sanctions commerciales pour leurs partenaires commerciaux qui n'auraient pas d'initiative équivalente.

Je crois que nous devrions adopter les cibles totales de réduction d'émissions adoptées par les Américains, d'autant plus que nous prévoyons harmoniser les mécanismes de plafonnement et d'échange de nos deux économies. Nous devrons toutefois, ce faisant, régler une question stratégique importante, à savoir l'allocation des droits d'émissions aux provinces et aux territoires. Il faut dire que les mécanismes de plafonnement et d'échange créent un nouveau droit de propriété. Je ne sais pas quel sera le prix d'une tonne de dioxyde de carbone, mais il s'agit ici de centaines de millions de tonnes d'émissions. On peut imaginer à combien s'élèveront les droits de propriété. Étant donné que ce sont les gouvernements qui vont les créer, les propriétaires éventuels s'empresseront d'en réclamer l'accès.

Les modèles économiques démontrent que les coûts économiques à long terme de la lutte contre les changements climatiques sont relativement modestes. Des représentants de la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie sont venus témoigner et ont affirmé que cela représentait 0,2 p. 100 par année, à déduire du taux de croissance de 1,5 à 2 p. 100 par année, ce qui n'est pas négligeable mais assurément gérable. Ce coût dépend du coût de remplacement ou de réduction des impacts négatifs des combustibles fossiles auxquels s'appliqueraient des mécanismes de captage et de stockage — sujet sur lequel les experts ne s'entendent pas. En même temps, on constatera des redistributions potentielles beaucoup plus considérables entre les groupes et les régions. Qui gagnera? Qui perdra au change? C'est l'essence même de l'économie politique.

À cet égard, les décideurs canadiens devront donc équilibrer les répercussions régionales subies par les fournisseurs et les répercussions nationales subies par les consommateurs canadiens à faible revenu. En même temps, il faudrait éviter d'effriter l'objectif final, à savoir la réduction de la consommation de combustibles fossiles. Ce ne sera pas facile. J'ai consacré 25 ans à tenter de convaincre les politiciens que c'est le marché qui devait fixer les prix et que les consommateurs devaient les assumer totalement. Je n'ai jamais réussi.

Je vais aborder maintenant la sécurité énergétique. La sécurité énergétique mondiale dépend principalement, mais pas exclusivement, du rôle important et croissant des fournisseurs de pétrole du golfe Persique. Le pétrole compte pour près de 98 p. 100 des carburants de transport utilisés en Amérique du Nord. Il repose en un facteur important aussi quand on songe à la réduction des gaz à effet de serre. Le principal risque en l'occurrence serait une interruption prolongée avec une flambée des prix à l'avenant — et un rationnement éventuel — que causerait une guerre dans le golfe.

Je ne sais pas combien de temps une telle guerre durerait. Toutefois, environ 20 p. 100 de l'approvisionnement quotidien mondial en pétrole passe par le détroit d'Hormuz, qui fait 23 milles de largeur, je pense, alors que les points d'entrée et de sortie font 6 milles. À l'entrée et à la sortie une zone tampon de deux milles cerne un passage large de deux milles. C'est donc un goulot d'étranglement par lequel passe 20 p. 100 du pétrole mondial quotidiennement. S'il y avait une guerre, ce passage serait certainement bloqué pour un certain temps. Je ne sais pas pour combien de temps.

Dans ces conditions, bien entendu, le prix du pétrole grimpe de façon spectaculaire. Nous en avons déjà fait l'expérience. En fait, toutes les récessions d'après-guerre aux États-Unis ont été précédées par une flambée du prix du pétrole, y compris celle que nous venons de vivre. Même si la récession a manifestement eu d'autres causes, comme l'effondrement du marché des prêts hypothécaires à risque, et cetera, il est indéniable que la hausse du prix du pétrole a joué un rôle en mettant les consommateurs dans l'incapacité d'effectuer le paiement de leurs prêts hypothécaires.

Nonobstant la position du Canada en tant qu'exportateur net de pétrole, notre sécurité énergétique demeure une préoccupation. Étant donné l'ALENA, les consommateurs canadiens ne sont pas à l'abri des flambées du prix du pétrole. Nous payons le prix mondial. Cela a des conséquences macroéconomiques régionales, notamment pour des provinces comme l'Ontario où il n'existe pas de ressources importantes pétrolières ou gazières. Or, nous savons que des prix élevés pour l'énergie entraînent une hausse du taux de change — le dollar canadien est parfois qualifié de pétro- devise ou de dollar-denrée — avec une possibilité de taux d'intérêt encore plus élevés. Tous ces facteurs combinés en même temps ont des conséquences macroéconomiques négatives importantes dans les provinces qui ne produisent pas de pétrole ou de gaz.

À cet égard, toujours du domaine de la politique énergétique, une solution est que le gouvernement fédéral aide l'Ontario et les autres provinces de l'Est à accélérer le développement du secteur des biocarburants liquides cellulosiques. Pour l'heure, le secteur en est essentiellement à l'étape de la recherche et du développement de la technologie.

La promotion au Canada des biocarburants cellulosiques ne diminuera pas le risque géopolitique d'une flambée du prix du pétrole. Toutefois, une fois que le secteur sera bien développé, toutes les régions pourront devenir productrices de carburant liquide, non seulement l'Alberta ou Terre-Neuve-et-Labrador. Toute province ayant sa propre production de biocarburants pourrait en profiter. Advenant une flambée du prix du pétrole, toutes les provinces seraient dans la même situation positive. En outre, on pourrait ainsi réduire les gaz à effet de serre sans concurrencer excessivement la production alimentaire, comme c'est le cas de l'éthanol à base de maïs. Les provinces doivent agir à cet égard et je pense qu'elles devraient le faire, mais nous en reparlerons.

Je voudrais en troisième lieu parler de la production d'énergie nucléaire. L'Ontario mise énormément sur le nucléaire car 50 p. 100 de son électricité provient de ce type d'énergie. Il y a deux autres réacteurs nucléaires en exploitation au Canada. L'un est en train d'être remis à niveau à Pointe Lepreau, au Nouveau-Brunswick, et l'autre se trouve au Québec.

Aucune technologie, renouvelable ou non, n'est parfaite et sans risque. J'essaie de faire comprendre cela. Je ne pense pas que les êtres humains soient capables de produire une technologie parfaite. Toute technologie a ses inconvénients et ses avantages.

Dans le cas du nucléaire, les risques existent sur le plan de la sécurité — notamment la gestion des déchets —, du coût et d'une éventuelle prolifération d'armes nucléaires. La sécurité et les coûts, par ailleurs, sont tout à fait liés. Il nous faut construire des mécanismes élaborés pour contenir les dégâts que causeraient des incidents à un réacteur nucléaire, et cela est extrêmement coûteux.

L'énergie nucléaire produite sert à produire de l'électricité et elle fait concurrence essentiellement aux centrales thermiques et aux grandes centrales hydrauliques en tant que « centrales de base ». Autrement dit, une centrale nucléaire opère 24 heures sur 24, sept jours sur sept. On compte qu'elle atteint des taux de fonctionnement très élevés si bien que ce n'est qu'à l'occasion qu'elle est en panne. C'est là sa réalité économique. On peut raisonnablement s'attendre à ce que l'industrie nucléaire à l'échelle mondiale entreprenne un cycle de remise en état et d'expansion. Avec quelle ardeur cela se fera-t-il? Cela dépend essentiellement des progrès de la politique internationale en matière de changement climatique.

À mon avis, dans ce contexte, l'avenir d'EACL dépend essentiellement de deux éléments. L'ACR 1000 peut-il compter désormais sur une conception technique, ou pourra-t-il compter dessus sous peu, de sorte que l'on puisse lui accorder une licence au Canada et à l'étranger?

L'ACR 1000 utilise de l'uranium faiblement enrichi afin de réduire la quantité d'eau lourde nécessaire et rabaisser les coûts de construction afférents. Sa conception est-elle simplement le fruit d'une évolution ou représente-t-elle une modification qui exige qu'on applique une nouvelle technologie massive et qu'on court des risques lors de la construction? Je ne suis pas assez informé pour formuler un point de vue éclairé sur le sujet, mais ce sont des questions que le comité devrait poser aux personnes concernées pour en savoir plus.

Le deuxième élément concerne les marchés mondiaux : sont-ils assez importants pour rentabiliser les sommes investies dans la nouvelle génération des réacteurs CANDU. À mon avis, cet aspect devrait être soigneusement examiné par le comité mais je voudrais pour ma part faire quelques remarques.

La condition préalable à la commercialisation d'une technologie nucléaire est un marché national solide. Toutefois, le marché national canadien est incertain en raison d'une impasse politique entourant le partage des risques entre l'Ontario et le gouvernement fédéral, s'agissant de nouvelles centrales.

Il y a des façons simples de sortir de cette impasse. Le gouvernement fédéral et une province — par exemple, l'Ontario — souhaitant construire une nouvelle centrale nucléaire pourraient conclure un accord de partage des risques, suivant lequel la province acquerrait un intérêt dans EACL pour chaque nouvelle centrale faisant partie de l'accord. C'est la solution que je préconise. Ainsi, la province en partenariat avec le gouvernement fédéral aurait une participation à l'actif pour lequel les risques seraient partagés. Autre possibilité : EACL — le gouvernement fédéral lui-même — devient propriétaire des installations, assume tous les risques de construction et ensuite accorde une licence d'exploitation aux services publics provinciaux ou à des exploitants privés. Un accord provincial serait conclu mais les installations seraient propriété exclusive du gouvernement fédéral.

La réalisation dans ce cas-là dépend de la réponse donnée à la question sur les risques technologiques que j'ai soulevée tout à l'heure et également d'une évaluation du marché mondial potentiel. Sans une politique pronucléaire vigoureuse au pays — comme, par exemple, c'est le cas en France — le marché canadien ne peut pas maintenir un grand nombre de nouvelles centrales nucléaires. D'après mon estimation, au mieux, ce serait quatre en Ontario et peut- être deux dans l'Ouest — six au maximum —, à moins que nous ne fassions quelque chose de mirobolant avec l'énergie nucléaire.

Ainsi, le gouvernement fédéral devrait-il adopter consciemment une « politique nucléaire à tout crin » afin de réduire de façon spectaculaire la consommation de pétrole dans le secteur du transport — et n'oublions pas les risques importants de flambée du prix du pétrole, et cetera — et favoriser l'adoption de véhicules hybrides rechargeables? Devrait-on encourager l'Alberta et la Saskatchewan à adopter l'énergie nucléaire pour remplacer le charbon et le gaz naturel utilisé pour extraire le pétrole des sables bitumineux — sachant qu'on utilise du charbon pour produire de l'électricité, du gaz naturel pour produire de la vapeur et de l'hydrogène pour améliorer le bitume?

Deux choses me viennent à l'esprit en ce qui concerne une « politique pronucléaire » d'envergure au Canada. Les consommateurs de tous les coins du monde opteront-ils pour des voitures hybrides rechargeables ou entièrement électriques? On ne peut pas dès maintenant prévoir clairement ce qui se passera. Ces innovations sont assurément prometteuses mais en fin de compte, ce choix sera fait par les consommateurs et pourra supplanter le biodiésel et d'autres technologies possibles disponibles.

Si nous ne sommes pas certains à coup sûr, nous ne devrions pas construire massivement une infrastructure d'approvisionnement et de distribution d'électricité pour répondre à un seul des choix possibles s'offrant aux consommateurs. De toute façon, ce ne sont pas les consommateurs canadiens qui vont dicter la technologie fondamentale adoptée dans le secteur de l'automobile à l'échelle mondiale.

Le comité devrait se pencher sur cet aspect. Nous devrions également déterminer la probabilité que l'Alberta s'oriente vers le nucléaire pour l'exploitation des sables bitumineux. Un comité parlementaire, par le passé, a exprimé son opinion quant aux effets désirables de cette option.

Deuxièmement, une politique nucléaire audacieuse soulève la question des risques qu'il y a à être trop tributaire d'une même technologie. « Trop important et indispensable » ne sont pas des caractéristiques propres aux seules institutions financières. En fait, nous avons été témoins des problèmes potentiels d'une telle situation dans la production de radio-isotopes, alors que nous devons approvisionner une grande part du marché et compter sur une seule technologie pour le faire.

L'extrême dépendance à l'égard d'une seule technologie peut parfois mettre les organes de réglementation — en l'occurrence ceux qui réglementent la sûreté — et les gouvernements dans une position difficile, à savoir choisir entre deux issues indésirables. On peut prendre les mesures nécessaires pour exploiter de façon sûre un réacteur et l'arrêter, auquel cas les traitements médicaux d'un grand nombre de patients sont retardés ou annulés. Cela représente un coût énorme pour la société. Par ailleurs, si la sécurité est menacée, il y a un risque. Le choix est désagréable quand on ne dispose que d'une seule technologie. Ce genre de situation se présente parfois quand on a tous ses œufs dans le même panier.

Par contre, s'il n'est pas judicieux d'adopter une politique nationale pronucléaire, il faut songer, et ce pourrait être absolument nécessaire, à vendre à l'étranger des réacteurs nucléaires. Nous devons vendre l'ACR 1000 à l'étranger. Notre marché ne suffit pas. À cet égard, manifestement une centrale nucléaire ne peut pas se comparer à un BlackBerry sur le plan de la consommation, même si dans ce dernier cas, nous avons remporté un franc succès. Le BlackBerry est indéniablement un grand succès pour le Canada. Une centrale nucléaire a également des conséquences stratégiques importantes sur le plan des armements. C'est pourquoi le marché international des réacteurs nucléaires comporte essentiellement comme consommateurs des services publics réglementés et des gouvernements, et comme fournisseurs de la technologie, des « champions nationaux ».

L'Europe a l'AREVA. Aux États-Unis et au Japon, il y a Westinghouse Electric Company et General Electric Company, qui sont propriétés japonaises. Ce sont là les trois grands, si vous voulez. Les Russes ont leur propre compagnie où Siemens d'Allemagne est désormais impliquée. Les Coréens auront peut-être eux aussi une entrée sur le marché. Il y a des intervenants d'envergure. On s'attend à ce que bientôt les Chinois et les Indiens soient dans la ligue.

À mon avis, EACL ne peut pas être une compagnie concurrente étant donné la nouvelle donne sur le marché international, sans pour cela s'associer à un ou deux partenaires stratégiques. À cet égard, la prochaine génération de réacteur CANDU peut se comparer à l'Avro Arrow. Selon moi, aucun grand gouvernement n'aurait consenti à acheter un chasseur à réaction de première ligne fabriqué par une puissance étrangère, peu importe sa performance technologique. Nous avons affaire à des marchés très politisés. Dans ce genre de marché, il faut avoir de solides partenaires pour travailler ensemble.

Il ne s'agit pas simplement de privatiser les activités de production d'énergie d'EACL. Selon moi, si nous avions des partenaires privés canadiens, cela ne changerait rien à la configuration du marché international. EACL doit trouver des partenaires financiers stratégiques ou être acquise par un concurrent parmi ses homologues sur le marché mondial — qu'il soit chinois, indien, américano-japonais ou européen.

Un partenaire éventuel encouragerait-il la poursuite du développement de la conception originale du réacteur CANDU? Cela ne me semble pas probable étant donné que ce faisant, le partenaire risquerait de devoir priver sa propre technologie de ressources et de débouchés commerciaux. Toutefois, s'il était possible de trouver un partenaire approprié intéressé à la nouvelle génération de CANDU, qui cela pourrait être et quelle serait notre approche? J'exhorte le comité à se pencher sur cette question. Qui pourrait être ce partenaire qui nous donnerait accès aux marchés étrangers dont nous avons besoin? Serait-il Coréen ou autre? Je n'ai pas la réponse à cette question mais elle mérite d'être approfondie. Voilà qui conclut mon exposé.

Le sénateur W. David Angus (président) occupe le fauteuil.

Le président : Bonjour, monsieur Purchase. Je suis le sénateur Angus, président du comité. Excusez mon retard ce matin. Je remercie le vice-président, le sénateur Mitchell, qui a occupé le fauteuil en mon absence. J'ai lu votre exposé avant la réunion et je vous suis reconnaissant de vous être lancé dans l'aventure. Nous allons passer aux questions.

Le sénateur Lang : Merci d'être venu ce matin, malgré un long trajet et un temps inclément.

Vous avez dit clairement que vous étiez fermement convaincu que le Canada, « sans être plus audacieux ni moins audacieux que le gouvernement américain, va dans la bonne direction en suivant les orientations des Américains en matière de changements climatiques ». Des membres de diverses formations politiques affirment que si les États-Unis ne vont pas de l'avant, nous devrions nous le faire de toute façon. C'est le message que l'on diffuse. Je voudrais que vous nous expliquiez en détail ce qu'une telle démarche représente pour le Canada et, plus particulièrement, pour une famille moyenne de quatre personnes, à savoir si nos dirigeants s'inclinaient et allaient de l'avant, devenaient meneurs, laissant les États-Unis derrière.

M. Purchase : Le coût pour le Canada augmenterait de façon spectaculaire car les coûts de nos exportateurs grimperaient advenant que le coût du carbone s'ajoute au prix des carburants fossiles produits au Canada. Manifestement, les pétrolières canadiennes auraient du mal à concurrencer les États-Unis si rien de semblable n'était fait là-bas.

L'augmentation de coût n'apporterait rien de positif car le problème ne peut pas être résolu sans la participation des États-Unis et de la Chine. Il n'appartient pas au Canada de résoudre seul ce problème. Nous devons trouver une solution adaptée au contexte de chacun. Si nos convictions plus solides nous poussent à faire cavalier seul, le résultat serait simplement une augmentation des coûts sans pour autant obtenir l'effet souhaité. Ce ne serait pas une politique publique judicieuse.

L'époque du programme énergétique national comportait également des difficultés sur le plan de la politique publique. Je travaillais pour un gouvernement conservateur en Ontario, lequel a contribué à renverser le gouvernement conservateur de Joe Clark à Ottawa, l'argument portant sur le prix de l'énergie. L'enjeu a créé beaucoup de scission dans l'opinion. Il n'est pas facile de hausser le coût de l'énergie car les gens refusent de comprendre, même si c'est la politique qui convient. Toutefois, comprenez-moi bien : l'Ontario n'a pas adopté la bonne position alors, et nous aurions dû suivre l'évolution du prix mondial et ensuite régler nos questions de partage de revenu. Être celui qui fonce, faire cavalier seul, c'est tout à fait contraire à ce que j'ai pu constater quand on se trouve en terrain difficile.

J'étais sous-ministre de l'Énergie, des Sciences et de la Technologie en Ontario quand nous avons essayé de rendre le marché de l'électricité concurrentiel. Pendant cette tentative, le public a pu constater que le prix de l'électricité avait grimpé de façon spectaculaire. Le gouvernement a presque abandonné toute l'idée et voulait se dissocier le plus possible de cette politique que l'on avait planifiée et élaborée pendant des années. Ce n'est pas chose facile.

Cela répond peut-être à votre question.

Le sénateur Lang : Je vais poursuivre car j'essaie de comprendre précisément ce que tout cela signifie. Pour l'heure, nous avons tendance à parler de façon abstraite. Que cela signifierait-il pour une famille de quatre? Je pense qu'on a établi une cible de réduction de 20 p. 100 d'ici 2020. D'après vos lectures et vos recherches, avez-vous pu déterminer ce que cela signifierait pour notre capacité de gagner notre vie au Canada si cette cible était atteinte?

M. Purchase : Sénateur, vous devriez inviter les participants à la table ronde nationale à témoigner car ils ont préparé le modèle économique, qui révèle le coût réel pour l'économie canadienne en termes de perte de production et de croissance. Ce n'est pas énorme. Au bout du compte, l'équilibre économique sera toujours rétabli, car par leur nature, ces modèles les révèlent automatiquement. Toutefois, on peut se demander si effectivement c'est ainsi que les choses se passeront.

Par conséquent, il y a incertitude. Les experts vous présentent beaucoup plus d'incertitude qu'il y en a en réalité. J'ai fait cela toute ma vie. Un expert peut affirmer comment les choses vont se passer parce qu'il est habile à jongler avec les chiffres. Un expert donne une idée de ce que l'avenir réserve mais les choses ne se produiront pas nécessairement ainsi. En fait, il est peu probable que les choses se passent ainsi. Les choses seront bien pires que ce que l'on peut imaginer.

Le sénateur Lang : C'est ce que je crains. Vous avez évoqué le nucléaire comme solution de remplacement. Vous avez à peine parlé de l'hydroélectricité comme une telle solution. Pouvez-vous nous donner plus de détail?

M. Purchase : C'est sans doute parce que je suis Ontarien et qu'ici en Ontario, nous avons mis à contribution la plupart des grandes sources d'hydroélectricité. Toutefois, il existe encore des sources hydroélectriques dans le Nord de l'Ontario que nous pourrions exploiter. Assurément, il y a des sources considérables disponibles sur l'île Gull, à Terre- Neuve-et-Labrador, de l'ordre d'environ 2 000 mégawatts. En outre, des ressources importantes d'environ 1 500 mégawatts sont disponibles dans le Nord du Manitoba. J'ai visité l'endroit.

Bien entendu, les coûts afférents sont considérables non seulement pour la construction des barrages nécessaires mais également pour la construction des lignes de transport pour acheminer l'électricité et elles peuvent avoir jusqu'à 2 000 kilomètres. En outre, il y a des problèmes politiques énormes du fait qu'il faut passer sur des terres autochtones. Le processus n'est pas facile.

Dans le Nord, nous avons d'énormes ressources renouvelables grâce au vent et peut-être à la marémotrice. Vous avez entendu des témoins ici à ce sujet. Là encore, il faut que l'énergie soit acheminée vers le Sud. Il nous faut capter cette énergie et la transmettre sur une longue distance, ce qui est très coûteux et ce qui comporte beaucoup de risques en raison des éléments.

Le président : À cet égard, y a-t-il des coûts environnementaux élevés lors du transport de cette énergie, par exemple, l'interférence dans l'habitat de la faune?

M. Purchase : Je ne connais pas très bien les dangers environnementaux de ce genre de projet. Assurément, il y a des gens qui s'en inquiéteront.

Le président : Le sénateur Lang a soulevé la question de l'hydroélectricité. Les Américains n'estiment pas que notre hydroélectricité produite ici au Canada soit une source d'énergie renouvelable et durable. Qu'en pensez-vous?

M. Purchase : Je pense qu'ils se trompent.

Le sénateur Banks : Monsieur Purchase, je voudrais parler de l'énergie nucléaire. Au cours de l'étude que nous faisons sous la houlette de notre président et à laquelle notre vice-président a fait allusion, nous allons nous pencher sur bien des aspects de l'énergie nucléaire. Ils sont multiples. Vous avez parlé du fait qu'EACL peut reprendre une position confortable dans le monde. La remarque est intéressante.

Bientôt, nous serons saisis d'un projet de loi. Vous avez parlé du partage des risques. Dans n'importe quel secteur, y compris le nucléaire, le partage des risques signifie une responsabilité publique. Tout le monde s'accorde à croire qu'actuellement le Canada n'offre pas les assurances nécessaires à cet égard. Le projet de loi qu'on nous enverra porte sur cette question. Par le passé, le comité a étudié la question des combustibles épuisés et les questions afférentes qui tirent à conséquence pour la responsabilité publique.

Certains membres du comité sont d'avis que le secteur nucléaire, quel qu'en soit le propriétaire, doit être autosuffisant sur le plan de l'assurance plutôt que de verser les sommes énormes qu'exige la responsabilité publique. S'il y avait un accident grave, le Canada devrait s'acquitter de son obligation au titre de la responsabilité publique, et la somme serait bien supérieure à toute assurance que nous pourrions avoir.

Avez-vous réfléchi à ces questions?

M. Purchase : Le marché privé n'offre aucune assurance en l'occurrence, si bien qu'en fin de compte, ce sont les gouvernements qui doivent s'en charger. D'aucuns pourraient prétendre, et ils ont sans doute raison, qu'il s'agit là d'une subvention accordée à une technologie particulière. Dans tous les pays, non seulement au Canada, cette technologie a été mise au point sous la protection d'une politique gouvernementale.

Ce secteur, contrairement au cas du BlackBerry, n'était pas l'apanage de l'entreprise privée pouvant compter sur une idée brillante et une bande d'entrepreneurs brillants. Il s'est développé dans le cocon de la politique gouvernementale. Selon moi, il y demeurera essentiellement en partie en raison de la nature stratégique de l'énergie nucléaire.

Ce n'est pas pour demain que des entrepreneurs privés construiront de nouvelles centrales nucléaires dans un marché concurrentiel de l'électricité. Les marchés de l'électricité sont encore essentiellement régionaux. Ils comportent encore trop de risques. Le secteur privé ne s'y intéresserait pas à mon avis.

Le sénateur Banks : Pour l'instant, nous versons d'énormes primes à des compagnies d'assurances privées pour nous prémunir contre une responsabilité publique.

M. Purchase : Mais ensuite, toutefois, il y a l'ultime responsabilité à l'égard du public.

Le sénateur Banks : Nous sommes coincés.

M. Purchase : C'est cela.

Le sénateur Banks : Ma deuxième question porte sur la situation de la poule et de l'œuf dont vous avez parlé à propos des stations de rechargement et des voitures électriques. Que mettre en premier? Quelqu'un doit-il prendre les devants à cet égard?

Les fabricants de voitures disent qu'ils fabriqueront des voitures en quantité nécessaire dès que le réseau permettant aux gens de brancher leur voiture au coin de la rue existera. Les gens qui exploitent les stations de ce genre disent que le réseau sera constitué dès qu'il y aura assez de voitures pour qu'on puisse parler d'un marché. Quelle est la solution?

M. Purchase : On peut prendre les devants même si dans notre cas, la tentative est plus risquée. Le consommateur choisira la technologie appropriée si elle donne des résultats. C'est ainsi que les choses fonctionnent.

Il y a des gens qui passent toute leur vie à étudier le secteur de l'automobile et le comprennent beaucoup mieux que moi. Toutefois, en fin de compte, c'est le consommateur qui choisit sa source d'énergie et tous les autres éléments que comporte l'automobile.

Le sénateur Banks : Qui serait le meneur? En tant que consommateur, je pourrais envisager d'ajouter une voiture électrique mais je ne le ferai pas avant de savoir s'il y a un endroit où je peux la recharger à mi-chemin de ma destination.

M. Purchase : En Ontario, ce n'est pas un problème selon moi. Nous avons assez de capacité pour recharger la nuit car c'est à ce moment-là que nous sommes le plus susceptible de le faire.

Le sénateur Peterson : Vous avez dit que tout le dossier était politique et que cela allait guider les décisions, ce qui est malheureux car nous n'avons peut-être pas les bonnes solutions à notre disposition. Le réchauffement terrestre exige des solutions à l'échelle de la planète.

Si on fixe une taxe sur le carbone et que tout le monde sait qu'elle l'est, on peut choisir de réinvestir ces revenus dans des projets scientifiques. Par contre, un système de plafonnement et d'échange est très incertain et comporte bien des éléments qu'on ne peut pas contrôler. Par conséquent, où iront les revenus qu'on en tirera?

Laquelle des deux approches préconisez-vous?

M. Purchase : Sénateur, en tant qu'économiste, je préférerais une taxe sur le carbone à un mécanisme de plafonnement et d'échange. La taxe sur le carbone est beaucoup plus simple à administrer. Elle offre l'avantage qu'on puisse la fixer à un bas niveau au départ et la relever ensuite avec le temps.

J'aurais cru que cela offrait un énorme avantage sur le plan politique. Toutefois, on constate que la préférence des politiciens va vers un système de plafonnement et d'échange. Les Européens l'ont adopté; les Américains aussi; et voilà que nous ferons de même.

Pourquoi en est-il ainsi? Je pense que c'est parce que la plupart des gens ne comprennent pas de quoi il s'agit quand on parle de « plafonnement et échange ». C'est très nébuleux. Quand on essaie d'expliquer le système, il semble que seuls les gros pollueurs paieront. La plupart des gens ne se rendent pas compte que si ces derniers paient, cela ne veut pas dire que nous ne paierons pas non plus. Le public pense que seuls les gros pollueurs assumeront le prix du système de plafonnement et d'échange et que ce sont les actionnaires qui vont en assumer le coût. Ce n'est tout simplement pas vrai. En outre, d'habitude, il faut un certain temps pour mettre le système en œuvre, et cetera.

Il se trouve que le système de plafonnement et d'échange semble être la politique de choix dans les milieux politiques jusqu'à qu'on essaie de le mettre en œuvre. Par exemple, en Ontario, quand nous avons essayé de rendre le marché de l'électricité concurrentiel, nous nous sommes dit pendant des années que c'était une idée merveilleuse. La planification a duré des années. Nous avons dépensé beaucoup d'argent pour préparer le marché de l'électricité à accueillir la concurrence. Nous avons affirmé que la disparition du monopole permettrait de rabaisser les coûts. Les gens ont cru que c'était très bien et qu'il nous fallait aller de l'avant. Toutefois, quand la concurrence a été introduite, le résultat a été catastrophique.

Le public comprend mal ces questions. Nous parlons de changement climatique et nous affirmons ce qui se passera dans 40, 50 ou 100 ans. On dit au public qu'il lui faut faire des sacrifices pour préserver les arrières petits-enfants de quelqu'un. Actuellement, les gens n'épargnent même pas pour leur propre retraite. Nous le savons. Nous avons une crise des pensions car les gens n'ont pas épargné pour leur propre retraite, et il ne s'agissait pas de leurs enfants et de leurs arrières petits-enfants.

S'agissant de changement climatique, nous sommes à la périphérie de la capacité des gens de raisonner. Nous pouvons comprendre le dossier ici dans cette pièce, mais quelqu'un du public qui vit marginalement, au jour le jour, et pour qui un ou deux dollars signifient beaucoup, la chose est incompréhensible. Ils disent : « Ne me parlez pas de mes enfants ou de mes petits-enfants. Pour l'instant, à cause de vous, je ne peux pas les nourrir. »

Je sais une chose. Si on essaie de réduire le déficit en supprimant des programmes, les gens vont mal réagir, même si vous leur expliquez qu'il s'agit de réduire la dette afin que leurs enfants n'aient pas à en assumer le fardeau. Ce n'est pas facile à faire.

Le président : J'ai cru comprendre que vous préconisez une taxe sur le carbone plutôt qu'un système de plafonnement et d'échange axé sur le marché. Vous n'êtes pas le premier à nous dire cela et je pense que plusieurs bonnes raisons économiques militent en faveur de la taxe. Vous avez également dit que les gens ne comprenaient pas la situation et vous avez fourni une explication sociologique fort intéressante.

On nous dit, et nous le savons, que les États-Unis ont adopté des systèmes de plafonnement et d'échange pour d'autres substances — les pluies acides, le soufre, et cetera — et tout le monde semble bien les comprendre. Du moins, c'est ce que je crois.

Pourquoi en est-il autrement dans le cas des changements climatiques? Y a-t-il un blocage psychologique à cet égard ou est-ce pour des raisons sociologiques, à savoir que la société a évolué et que les gens refusent profondément de comprendre?

M. Purchase : Il est vrai que les États-Unis ont un système de plafonnement et d'échange pour les émissions de dioxyde de soufre et qu'il fonctionne bien. Toutefois, ce dont nous parlons a beaucoup plus d'envergure. La politique s'appliquera à l'échelle de toute notre économie.

Tout comme vous, je m'intéresse à la politique publique. Nous passons beaucoup de temps tous les jours à lire sur la question, à essayer de comprendre, à accroître nos connaissances. J'ai dû passer pas mal de temps à comprendre le système de plafonnement et d'échange quand on a commencé à en parler. J'étudie la question depuis longtemps, depuis que je suis étudiant. Après tout, il faut dire que la notion est l'œuvre de l'historien de l'économie John Dales, de l'Université de Toronto.

Il faut dire qu'il faut faire un véritable effort pour la comprendre et que le grand public ne s'attardera pas longtemps à essayer. Quand le système va être concrétisé, le public va l'essayer et vous dire ensuite s'il lui convient.

Le président : Il s'agit effectivement d'évaluer le prix réel du carbone.

M. Purchase : Précisément. Par conséquent, le moment crucial sera quand nous le ferons. Il y a 35 ans que j'essaie d'influer sur la politique publique à cet égard mais c'est seulement quand une politique est concrétisée qu'on peut comprendre comment elle fonctionne. Jusque-là, on vit dans une sorte de monde de rêve où on peut se convaincre de n'importe quoi. Toutefois, c'est seulement quand les choses deviennent réelles, se concrétisent effectivement que l'on découvre si elles sont politiquement acceptables.

Le sénateur Mitchell : Merci, monsieur Purchase. Votre intervention est très intéressante. Je me garde bien de contester ce que vous dites. Toutefois, vous avez soulevé des enjeux qui nous interpellent véritablement et sur lesquels vous avez mis l'accent. Il en est un en particulier qui me porte à croire que ce n'est peut-être pas tant de nouvelles technologies de gestion du carbone qu'il nous faut, par exemple, que de nouvelles technologies sur la façon de communiquer avec le grand public à propos de questions qui sont profondément difficiles et profondément importantes et qu'il faut qu'ils comprennent. Je pense que personne ici ne contestera que nous faisons face à un grave problème climatique. Même si les gens en débattent, l'enjeu est inévitable. Aux fins de la discussion, supposons que le monde soit confronté à un problème grave, comme celui que nombre d'entre nous estiment l'être, à savoir le changement climatique, comment essaieriez-vous de convaincre les électeurs qu'il faut agir?

Si on annonce une taxe sur le carbone, comme on l'a fait lors de la dernière campagne électorale, on se charge de l'écarter immédiatement. Nous avons rencontré des gens d'affaires hier qui nous ont dit qu'ils préféreraient qu'on applique une taxe sur le carbone. Toutefois, comme je l'ai dit, dans ce cas, l'anéantissement est instantané. De nos jours, les débats sur des questions importantes se limitent à quatre mots et c'est terminé : il s'agit d'une taxe.

J'essaie d'expliquer que nous devrions peut-être voir comment on peut cesser de se défiler dès qu'on ne peut pas convaincre la population, dès qu'on sait qu'on ne peut pas compter sur une volonté ou un mérite politique quelconque. Nous n'avons rien changé à cet égard. Il nous faut trouver la technologie permettant de changer les choses à défaut de quoi il nous faut trouver des politiciens qui sont prêts à ne se maintenir que pendant un mandat et à faire ce qui s'impose.

Je vous pose la question. En Alberta, l'électricité nous a posé le même problème. À titre d'étudiant des politiques publiques, y avez-vous réfléchi?

M. Purchase : Oui. C'est le cœur même du problème. Nous devrions surtout réfléchir à la façon dont nous pouvons concevoir cela pour que cela soit acceptable.

Pour moi, il ne fait aucun doute que parler de taxe a été une grossière erreur de mise en marché.

Le sénateur Mitchell : On nous l'a imposé.

M. Purchase : Le système de plafonnement et d'échange est une taxe autrement nommée.

Le sénateur Mitchell : On a dit que c'était un « changement de cap ».

M. Purchase : Cela fait partie de la nature de la concurrence sur le marché politique. Les gens utiliseront tout ce qu'ils peuvent pour provoquer votre défaite. À cet égard, je ne suis pas certain que nous disposions des structures de gouvernance nécessaires pour régler ce problème. C'est un problème énorme.

Le sénateur Mitchell : Vous avez peut-être raison.

M. Purchase : Cela dit, je suis toujours optimiste. Il y a des solutions. J'ai toujours pensé qu'il y avait des possibilités, si on commence à appliquer progressivement de nouvelles idées. Il faut commencer quelque part, puis augmenter progressivement, et inévitablement, le problème finit par se régler.

Quand on brusque les gens, ils résistent. Si vous déclarez avoir trouvé la solution et que tout à coup, le prix de l'énergie augmente de 10 p. 100, les gens vont mal réagir.

Les gens résistent au système de plafonnement et d'échange en raison de l'extrême instabilité du prix du dioxyde de carbone dans ce régime. Les droits d'émission font l'objet d'une offre fixe alors que la demande à l'égard de ces droits fluctue énormément selon la météo. À cet égard, la demande d'énergie dépend largement du temps qu'il fait, tout comme l'offre. L'utilisation d'énergie varie énormément, ce qui signifie que le prix du carbone fluctuera constamment. C'est politiquement inacceptable. Je peux vous garantir que cela ne pourra pas fonctionner.

Le sénateur Mitchell : Je comprends ce que vous dites pour ce qui est d'une approche progressive. Je ne m'inquiète pas que l'on adopte un objectif maintenant fondé sur la science, qui serait une réduction de 40 p. 100 par rapport au niveau de 1990. Il serait utile de commencer par lutter contre les pluies acides ou les émissions de CFC, car une fois la machine en marche, les progrès sont plus rapides et moins coûteux. Nous pourrions commencer à constater des avantages économiques manifestes.

Vous avez parlé de l'étude sur le 0,2 p. 100; l'étude de la Toronto-Dominion et de Jaccard a fait valoir qu'il y aurait une réduction de 0,13 p. 100 si la croissance moyenne était de 2,7 p. 100 jusqu'en 2020. Ce n'est pas négligeable. Ce ne sera toutefois pas possible une fois que nous aurons commencé à améliorer ces mesures.

On n'examine jamais le revers de la médaille, c'est-à-dire les répercussions économiques si nous ne faisons rien. Je ne comprends pas comment on peut prédire une croissance de 2,7 p. 100 jusqu'en 2020 en dépit des changements climatiques cumulatifs, car les coûts de ces changements peuvent être infinis à côté de ce qu'il en coûte en fait pour les corriger.

À l'exception de l'étude Stern, connaissez-vous d'autres modèles ou études dans lesquels on a examiné ce qu'il en coûterait à nos économies de ne rien faire?

M. Purchase : Comme je l'ai dit, la table ronde va entreprendre une étude de cette nature. Je ne suis pas en mesure personnellement d'établir un tel modèle; j'examine ces questions sur mon propre temps.

Il y a eu toutefois des études sur le sujet, et il y a des divergences d'opinions quant aux coûts. Aux États-Unis, Nordhaus est l'un des éminents économistes américains qui a examiné cette question.

Le sénateur Mitchell : Nous avons une impression de votre opinion en ce qui concerne les mécanismes de plafonnement et d'échange. Je pense que bon nombre d'entre nous le partagent, mais peut-être que nous y serons poussés.

Il y a deux problèmes liés aux mécanismes de plafonnement et d'échange qui sont résolus par une taxe. Le premier, c'est lorsqu'une entreprise qui fait de bonnes choses depuis 10 ou 15 ans et qui tout à coup ne reçoit plus le crédit pour ce qu'elle fait — comment serait-il possible d'obtenir des crédits pour cela? L'autre problème, c'est que, par exemple, il est facile pour une grande entreprise qui a de vieilles installations de fermer ces dernières et de réduire ses émissions de carbone tandis que les nouvelles entreprises comme celles que nous avons en Alberta devront attendre 20 ans avant de pouvoir le faire.

Y a-t-il une façon dont on pourrait ajuster, accommoder ou créer des règles du jeu équitables dans ces deux cas avec un mécanisme de plafonnement et d'échange?

M. Purchase : Le problème, c'est la façon dont on traite les nouveaux arrivants. Le problème se pose parce que d'une façon ou d'une autre les concurrents existants reçoivent les droits d'émissions initiaux. Typiquement, si on regarde ce que les Américains ont fait — et sans doute ce que nous allons faire —, oui, dans bien des cas ces droits d'émission sont donnés, non pas mis aux enchères. S'ils sont mis aux enchères, alors les entreprises existantes comme les nouvelles entreprises se retrouvent dans le même bateau car elles doivent payer le prix du marché.

Le sénateur Mitchell : Elles doivent acheter.

M. Purchase : Cependant, le problème c'est que si une entreprise est déjà sur le marché et a ses droits d'émission gratuits, alors cela pourrait poser un problème pour les nouveaux arrivants.

Le sénateur Mitchell : Oui; il n'y a pas vraiment de solution.

M. Purchase : Il est toujours possible de trouver une solution à tout, si on veut mettre l'accent sur cette situation particulière, mais c'est un problème.

Le président : Nous avons beaucoup entendu parler de ce problème, non seulement parce que nous avons entendu des témoins de la Colombie-Britannique mais aussi parce qu'un membre de notre comité est un ancien ministre des Ressources naturelles de la Colombie-Britannique. Il n'est pas ici ce matin, mais je pense que vous connaissez le sénateur Richard Neufeld.

Ils ont parlé de la taxe sur le carbone qui a été imposée en Colombie-Britannique d'une façon modeste, et le gouvernement a été réélu depuis l'imposition de cette taxe. Y a-t-il des leçons à tirer de cela?

M. Purchase : Il y a des gens qui pensent que oui. Je crois qu'une taxe sur le carbone pourrait être possible en Ontario. Cependant, le gouvernement a choisi de ne pas le faire. Il aurait dû imposer une telle taxe à mon avis, et il devrait toujours le faire pour le secteur des transports. Je suis tout à fait d'accord avec l'idée d'avoir une taxe sur le carbone.

Ils pourraient augmenter la taxe sur le diesel en Ontario. Elle va augmenter de toute façon avec la taxe de vente harmonisée. Le diesel va augmenter parce que la province ne l'a pas assujetti à la taxe de vente; la TPS s'applique à l'essence et au diesel, mais pas la taxe de vente provinciale. Avec la taxe harmonisée, la taxe provinciale s'ajoutera à la TPS et cela fera augmenter les prix.

Je dirais que la province devrait aller plus loin encore. Elle a un déficit de 25 milliards de dollars je crois. Une partie de la solution consistera à augmenter les taxes. La province pourrait profiter également de l'augmentation du prix du carbone en Amérique du Nord car, tôt ou tard, le prix du carbone va augmenter.

Je pense que les provinces pourraient faire cela. Je pense que l'Ontario aurait pu le faire. La province a plutôt passé tout son temps à dire jusqu'à quel point elle avait fait la bonne chose en fermant les centrales alimentées au charbon. À mon avis, ce n'était pas la bonne politique et cela a causé toutes sortes de distorsions dans le système.

Le gouvernement aurait pu facilement dire : « Nous allons alimenter les centrales avec du charbon et de la biomasse », ce qui est faisable. Nous aurions pu réduire l'émission en CO2 de ces centrales alimentées au charbon au niveau des centrales alimentées au gaz naturel. Nous avons construit de nouvelles centrales alimentées au gaz naturel en Ontario qui ont des émissions de CO2. Le gouvernement a dit plutôt que le charbon était une mauvaise chose et qu'il allait éliminer les centrales alimentées au charbon.

Naturellement, il n'a pas pu le faire. Entre-temps, nous avons toutes ces émissions de toute façon. Nous aurions pu faire quelque chose qui était faisable, mais une fois la décision politique prise, nous n'avons pas pu le faire. Nous avons ensuite ignoré le secteur du transport qui est encore un problème plus important.

Le président : J'ai mentionné que le sénateur Neufeld ne pouvait pas être ici ce matin. Cependant, il a dit que nous avions beaucoup de chance, car son représentant, le président du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, comprend très bien ces solutions du marché. Le sénateur Meighen a la parole.

Le sénateur Meighen : Merci de m'avoir présenté. Je pense que le sénateur Neufeld m'a envoyé pour montrer ce que vous manquez étant donné son absence. Je vais vous le démontrer tout de suite.

L'autre côté de la médaille, c'est la conservation de l'énergie. Monsieur Purchase, vous avez eu une excellente expérience comme sous-ministre. Vous et moi avons vécu la panne d'électricité en Ontario en août 2003.

Le sénateur Banks : Nous l'avons tous vécue.

Le sénateur Meighen : Est-ce que nous vivions en Ontario à ce moment-là? Étiez-vous ici en août 2003?

Le sénateur Banks : Oui.

Le sénateur Meighen : Mon Dieu, vous êtes un sénateur qui travaille très fort.

D'après votre expérience, monsieur Purchase, en ce qui concerne la conservation et la réduction de la consommation, est-ce que les politiques du gouvernement que vous avez connues lorsque vous étiez sous-ministre ont vraiment fonctionné?

M. Purchase : La seule politique du gouvernement qui fonctionne vraiment consiste à arrêter de subventionner l'électricité. Nous subventionnons l'électricité partout au pays. L'Ontario le fait toujours tout en faisant valoir qu'elle veut faire de la conservation. Nous avons toute une série de programmes de conservation, mais nous voulons également nous assurer de contrôler le prix de l'électricité, car c'est un prix qui est tellement politique.

Nous avons toujours subventionné l'énergie au Canada. Nous ne faisons pas payer les prix du marché. Nous avons lutté pour le prix du pétrole; nous avons eu brièvement un prix canadien du pétrole. Nous n'avons plus cela parce que la politique a changé et tout le monde est passé à autre chose. Nous avons finalement adopté les prix mondiaux du pétrole, ce qui est la bonne politique, et tout le monde a renoncé. Personne ne parle plus tellement que nous devrions avoir un prix du pétrole canadien unique inférieur au prix mondial.

Nous avons donc réussi à le faire pour le pétrole; cependant, pour ce qui est de la politique sur l'électricité, qui est toujours dominée par la politique provinciale partout — et la politique des États aux États-Unis —, il est extrêmement difficile de l'abandonner et de faire la bonne chose.

Le prix est l'élément le plus important de toute politique de conservation. Les autres éléments sont aussi importants, mais encore une fois, ils sont liés au prix. Par exemple, en Ontario, on a introduit les compteurs électriques horaires, et les gens réagissent au prix; le tarif varie pendant la journée et ce genre de choses. C'est une politique importante.

Je pense que des programmes comme celui qui consiste à se débarrasser de son réfrigérateur qui servait à garder la bière au froid ont eu du succès. Des études démontrent que bon nombre de ces politiques ont eu du succès.

Le sénateur Meighen : En ce qui concerne le subventionnement — et le sénateur Angus saura ce dont je veux parler — Hydro-Québec vient à l'esprit. Au Québec, le prix de l'électricité est considérablement subventionné, mais nous avons réglé cette question. Cela me fait penser à l'accord qui a été proposé récemment entre Hydro-Québec et le Nouveau- Brunswick.

Je ne veux pas entrer dans les détails de la politique, mais je serais intéressé à savoir si vous y voyez un avantage économique ou un avantage sur le plan des coûts? Est-ce à votre avis la solution de l'avenir? Je ne me rappelle pas qu'il y ait eu, tout au moins récemment, d'autres accords interprovinciaux de cette nature dans le domaine de l'énergie. Croyez-vous que cela va nous mener quelque part, ou est-ce là une entente ponctuelle?

M. Purchase : C'est une idée intéressante. En principe, je n'ai rien contre. Je n'ai pas suivi l'affaire d'assez prêt pour savoir, mais la question initiale que je me suis posée lorsque j'ai appris qu'on envisageait ce genre d'entente — je pense qu'un journaliste m'a téléphoné pour me demander ce que j'en pensais parce qu'il y avait je pense des prix moins élevés pour les consommateurs, les entreprises, et cetera —, c'était ce qui va se produire à long terme. Quel régime de réglementation est en place? Le prix sera-t-il le même pour les Néo-Brunswickois que pour les Québécois, et cetera?

Je suis porté ici à être très prudent dans ce que je vais dire étant donné que je ne connais pas suffisamment les détails de cette entente. En principe, ce n'est pas une mauvaise idée pour le Québec d'être propriétaire d'un autre service public d'une autre province. Peut-être que l'Ontario Power Generation pourrait acheter un service public ailleurs, si seulement ils avaient les moyens de le faire.

Le sénateur Meighen : Je crois qu'une petite centrale électrique est une centrale qui produit jusqu'à 10 mégawatts. Serait-il possible que quelqu'un installe une génératrice à côté d'un petit ruisseau et se branche au réseau électrique?

M. Purchase : Oui.

Le sénateur Meighen : Est-ce que cela aurait une incidence importante sur la production d'électricité en général ou n'est-ce qu'une goutte d'eau dans la mer?

M. Purchase : En Ontario, cela ne fera pas concurrence à une nouvelle centrale nucléaire qui produit de l'électricité à raison de 1 200 mégawatts, comme l'ACR 1000, mais nous devrions le faire, absolument. Chez moi, à Almonte, qui se trouve le long de la rivière Mississippi, nous avons notre propre capacité de production d'électricité depuis un certain temps car il y avait auparavant une scierie qui utilisait l'énergie hydroélectrique pour faire fonctionner ses moulins. Aujourd'hui, l'énergie hydroélectrique est utilisée pour produire de l'électricité. On est en train d'agrandir cette centrale, mais je ne sais pas exactement combien de mégawatts elle produira.

Le sénateur Brown : J'aimerais que vous nous parliez de l'énergie nucléaire. Pouvez-vous nous parler du surgénérateur? Je crois comprendre qu'on utilise du combustible irradié dans un réacteur, ce qui augmente la quantité d'énergie produite à partir des déchets.

M. Purchase : Oui. J'ai quelques connaissances au sujet de l'économie, de la technologie et de la politique, et j'ai tendance à me considérer comme quelqu'un qui connaît un petit peu tout sans être spécialiste dans quoi que ce soit. J'hésite donc un peu à informer le comité au sujet des surgénérateurs.

Le sénateur Brown : Je suis troublé par l'échange des émissions de carbone. Lorsqu'ils ont tenté de le faire en Europe, ils les donnaient. Je crois que vous avez mentionné qu'il y avait une telle possibilité ici. J'ai appris par Internet que les émissions de carbone ont augmenté à 50 $ la part et sont ensuite tombées à 2 cents la part. Je ne comprends pas pourquoi nous envisagerions vendre des permis d'émission de carbone à des gens qui ne réduisent pas leurs émissions. Ça semble être une forme de taxe, comme vous l'avez souligné. Une taxe perçue sur un article est positive car on sait exactement combien on devra payer pour un gallon d'essence, par exemple. Cependant, acheter un permis pour des émissions de carbone permet à quelqu'un de ne pas réduire ces émissions. Par ailleurs, le prix du permis peut augmenter. Qui profite d'un tel système? Est-ce que ce sont les banquiers qui vendent ces crédits?

M. Purchase : Comme je l'ai mentionné, avec un système de plafonnement et d'échange, le prix unitaire des émissions de dioxyde de carbone variera énormément. Il y a des gens qui ont proposé d'avoir un plafond et un plancher, de sorte que cela ne pourrait varier que dans une certaine mesure, qui pourrait être très limitée. À ce moment-là, cela commence à ressembler davantage à une taxe variable. En d'autres termes, un système de plafonnement et d'échange peut commencer à ressembler à une taxe sur le carbone en réalité. La variabilité est un problème très réel qui pourrait être résolu en imposant des prix minimums et maximums.

Pour ce qui est de la question des compensations d'un secteur non réglementé, certains secteurs de l'économie pourraient toujours être non réglementés. Les secteurs qui sont réglementés pourraient être en mesure d'acheter des compensations en aidant les secteurs non réglementés à mettre au point des sources d'énergie propre qui ne pouvaient le faire autrement. C'est pour cette raison que les gens cherchent à avoir des compensations internationales. L'avantage serait de réduire le prix du carbone, ce qui réduirait ainsi les coûts pour l'économie canadienne. Cependant, le désavantage serait que cela causerait d'importants flux monétaires internationaux — une autre raison pour laquelle le système de plafonnement et d'échange ne deviendra pas un marché international. Il y aura trop d'argent qui circulera autour de ce système, et nous ne savons absolument pas si bon nombre des gouvernements étrangers qui pourraient participer à un tel système auraient la capacité de faire observer les règlements.

Il faut faire une surveillance avant que l'échange ait lieu, et ensuite quelqu'un doit faire une vérification de ces plafonnements et échanges. Par exemple, quelqu'un pourrait vendre ses droits d'émission de carbone et continuer d'émettre du carbone. Quelqu'un doit s'assurer que cela ne se produit pas. C'est l'avantage d'un régime fiscal : nous avons une administration fiscale en place. J'ai déjà été sous-ministre du Revenu en Ontario de sorte que je sais que nous avons des façons de nous assurer que les gens paient leurs impôts.

Le sénateur Brown : Je suis tout à fait d'accord avec vous et avec l'impôt.

M. Purchase : Je ne crois pas que le système de plafonnement et d'échange sera mis en place de façon efficace à l'échelle internationale, même si ce serait le bon système à adopter si on voulait mettre en place un marché liquide.

Les États-Unis ne laisseront pas partir d'importants flux monétaires dans différentes régions du monde. Je ne peux pas imaginer que le Sénat américain puisse accepter une telle chose.

Le sénateur Brown : Je suis heureux d'entendre cela car j'ai lu qu'un système de plafonnement et d'échange pourrait représenter des billions de dollars.

M. Purchase : S'il était mis en place à l'échelle internationale, oui. Il y aurait un coût administratif important pour surveiller le système afin de s'assurer que nous n'achetons pas tout simplement rien du tout.

Le sénateur Seidman : Je tente de me concentrer sur ce que vous avez dit et de capitaliser sur vos compétences à l'intersection de l'économie, de la technologie et de la politique. Nous comprenons tous que les industries de combustibles fossiles doivent nécessairement réduire leurs émissions. Il est clair qu'il y a des différences entre les provinces au niveau des ressources disponibles; certaines provinces sont davantage aptes à produire de l'énergie hydroélectrique, éolienne, solaire ou nucléaire. Alors que nous tentons de développer une vision pour l'avenir du Canada, nous pourrions peut-être envisager une plus grande collaboration et une meilleure coordination entre les politiques énergétiques et climatiques aux niveaux fédéral, provincial, territorial et municipal. Pourriez-vous nous parler de cela, s'il vous plaît?

M. Purchase : Je pense que c'est vrai. J'ai fait valoir que le gouvernement du Canada devrait suivre de près les politiques des États-Unis et harmoniser ses propres politiques à ces dernières à l'échelle nationale. Je crois que cela est faisable, que c'est là une bonne politique. Au bout du compte, nous serons obligés de le faire de toute façon.

Le Canada est une fédération. À mon avis, chacune des provinces peut tenir compte de ses propres impératifs politiques. Bon nombre des États aux États-Unis vont continuer de poursuivre leurs propres politiques. Si la politique fédérale aux États-Unis n'est pas adéquate, je ne peux imaginer que des États importants comme New York, la Californie ou le Texas renonceront à leurs propres politiques, quelles qu'elles soient.

Je crois que les deux paliers de gouvernement peuvent jouer un rôle à cet égard. C'est la force de notre fédération, il n'y a pas de solution unique pour tous. Le gouvernement du Canada n'est pas obligé, dans ce cas particulier, de mettre ses politiques en danger, car bon nombre d'autres choses peuvent se produire au niveau provincial.

Des gens sont venus ici pour dire : « Oui, mais il devrait y avoir une seule politique nationale, une politique uniforme. » La plupart des gens d'affaires préféreraient cela; il n'en fait aucun doute. En fait, ils préféreraient une politique unique qui serait la même dans tous les pays du monde, mais cela ne se produira pas. Ce n'est pas ainsi que la politique fonctionne. Chaque gouvernement a compétence et exerce cette compétence de la façon qu'il juge appropriée.

Je suis d'accord avec vous. Je pense que c'est une bonne chose que d'autres gouvernements, notamment les administrations municipales, agissent indépendamment pour atteindre leurs propres objectifs. Tous les gouvernements sont limités par ce que font leurs voisins immédiats. Je peux augmenter la taxe sur l'essence en Ontario, mais si je l'augmente trop, les gens qui vivent près de la limite de la province iront faire le plein à l'extérieur, au Manitoba, au Québec ou même aux États-Unis. Par conséquent, on est limité dans ce que l'on peut faire si on utilise les prix pour obtenir des résultats. Cependant, on a toujours un certain degré de liberté.

Le sénateur Seidman : Que répondez-vous à l'idée sur laquelle il devrait y avoir une plus grande collaboration et une meilleure intégration entre les provinces et les territoires à tous les niveaux — fédéral, provincial et municipal?

M. Purchase : Je suis entièrement d'accord.

La politique sur l'électricité, par exemple, dépend des provinces. Chaque province a son propre service public — ou ses services publics, dans le cas de l'Ontario, où il existe un service public important qui est Bruce Power. Bien que nous soyons interconnectés, il n'y a pas de planification conjointe pour l'avenir et il n'y a pas de raison pour qu'il y en ait. Ce sont là des petits royaumes et domaines provinciaux et la politique en matière d'électricité est l'une des choses avec lesquelles on peut s'amuser.

Nous devrons de plus en plus aller au-delà de ces limites provinciales et coordonner entre les provinces au niveau sous-national tout ce que nous pouvons. Les gouvernements ne sont pas assez prêts. Ce n'est pas qu'ils ne peuvent pas y penser. Ce n'est peut-être pas cependant la première chose qui vient à l'esprit.

Le président : Nous avons adopté certaines expressions et mis au point un lexique du secteur de l'énergie alors que nous poursuivons cette étude. L'une des expressions est « un réseau intelligent » ou « un réseau plus intelligent ».

Est-ce pertinent par rapport à ce dernier échange avec le sénateur Seidman sur l'intégration et la coopération entre les provinces? Quelle serait votre définition d'un réseau intelligent, et qu'est-ce qu'il faut faire pour avoir un réseau intelligent?

M. Purchase : Je crois qu'un réseau intelligent signifie qu'ultimement chacun d'entre nous interagirait avec tous les autres par l'intermédiaire du réseau. Il fournit l'information sous forme de prix pour l'énergie qui est distribuée. Il faut que de nombreux producteurs d'électricité éventuels fassent des progrès technologiques énormes. Par exemple, à un moment donné ils prendraient de l'électricité; à un autre moment donné ils renverraient de l'électricité dans le réseau. Avec des réseaux intelligents, nous pourrions en fait utiliser nos voitures pour alimenter nos maisons en électricité à un moment donné, puis brancher la voiture pour la recharger. C'est une façon très évoluée de se brancher les uns et les autres à travers les fils.

Le président : Nous avons entrepris cette étude par une mission d'information aux États-Unis, plus particulièrement à Washington. Nous avons examiné ce qui se passe dans le dialogue conjoint sur l'énergie propre. Nous avons appris que le Canada et les États-Unis — le ministre Prentice et son homologue — ont divisé le dialogue en divers groupes d'étude sur différents sujets. En d'autres termes, le dialogue ne porte pas uniquement sur le pourcentage d'émissions de gaz à effet de serre au cours d'une année donnée; on travaille dans bien des domaines. Je pense que cela est intelligent, car c'est un domaine dans lequel nous pouvons coopérer et profiter de nos connaissances mutuelles. Le réseau intelligent a été l'une des questions qui a été abordée, et c'est pour cette raison que je l'ai soulevée. Cela est très important par rapport à la situation en général.

M. Purchase : La structure traditionnelle de l'industrie de l'électricité est d'avoir de grandes centrales électriques avec de grandes économies d'échelle. Dans le domaine de l'électricité, la philosophie est de rester chez soi si on n'est pas assez important. Les premières centrales nucléaires commerciales que nous avons construites à Pickering étaient de 500 mégawatts. Celles que nous pourrions construire, comme l'ACR 1000 est de 1 200 mégawatts. L'Avera EPR est de 1 600 mégawatts. Elles sont énormes. La raison pour laquelle elles sont si énormes, c'est que plus on augmente la taille de ces centrales, plus les économies d'échelle sont grandes.

Cependant, le réseau intelligent tente d'aller dans la direction opposée. On n'a pas de centrale énorme qui envoie l'électricité par réseau filaire pour la consommation. On a de petites génératrices un peu partout. C'est un problème beaucoup plus complexe à résoudre. L'électricité dans les fils doit être constamment équilibrée tout le temps. Il y a des exploitants de réseau électrique indépendants en Ontario dont la responsabilité est de s'assurer que nous avons une alimentation en électricité de grande qualité sans problème de surtension. Il faut constamment trouver un équilibre entre l'offre et la demande. Il faut maintenir cet équilibre à un niveau qui permet d'avoir la fiabilité et la sécurité.

Le sénateur Banks : Vous avez dit que toutes les prédictions étaient mauvaises et qu'elles avaient toujours été mauvaises. L'une des prédictions qui a toujours été mauvaise, c'est que nous commençons à manquer de pétrole. Tous les 10 ans quelqu'un dit : « Nous ne pouvons pas maintenir cela car nous aurons épuisé toutes les réserves connues d'ici les 10 prochaines années. » Cela ne s'est jamais produit, et on découvre constamment de nouvelles réserves. Les économies d'échelle et les prix nous permettent d'extraire du pétrole où nous ne pouvions pas le faire auparavant.

Pour ce qui est de ma question, supposons que nous ne manquions pas de pétrole pendant un certain temps. Venant de l'Alberta, je sais que nous n'allons certainement pas manquer de charbon non plus. Alors que nous avons beaucoup de pétrole, nous avons encore plus de charbon, comme c'est le cas ailleurs.

Cependant, lorsque vous nous parliez ce matin, je crois avoir compris que vous avez dit que la politique publique ultime devrait être de réduire notre dépendance à l'égard des combustibles fossiles. Puisqu'on ne s'attend pas à manquer un jour de combustible fossile, pourquoi devrions-nous nous préoccuper d'en réduire notre dépendance?

M. Purchase : Nous devrions rendre la combustion de combustibles fossiles bénigne, c'est-à-dire avec la capture et le stockage du CO2 dans le cas du charbon, car c'est au charbon que cela semble le mieux s'appliquer. Ce n'est pas tellement le cas avec le pétrole, car la capture et le stockage du pétrole n'est pas possible, puisque nous brûlons tout le pétrole indépendamment et il n'y a pas de technologie qui est permise.

Cependant, si nous ne rendons pas bénigne la combustion, alors nous avons un problème en ce sens que si nous continuons de l'utiliser, nous allons ajouter aux gaz à effet de serre.

Le sénateur Banks : Est-ce le problème? Vous avez aussi indiqué qu'il se trouvait que ces prévisions sont erronées.

M. Purchase : Elles sont presque certainement erronées, de par leur détail. C'est toujours un écart. Toutefois, les scientifiques du climat s'entendent presque tous pour dire que le réchauffement de la planète est un problème et que c'est l'humain qui l'a causé : 80 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre proviennent de la combustion de combustibles fossiles. Il s'agit en quelque sorte d'un consensus, mais je ne dis pas que la science se fie aux consensus. Toutefois, la politique publique le fait.

Si vous réunissez tous ces éléments, on constate qu'ils disent que nous devons réduire nos émissions de gaz à effet de serre d'environ 80 p. 100 par rapport au niveau de 1990 d'ici 2050. C'est pratiquement impossible. Si le captage et le stockage du carbone fonctionnent, ce sera très bien. Toutefois, je doute que cette méthode fonctionne à l'échelle requise pour le faire.

Le sénateur Banks : Ont-ils raison de dire que notre proportion d'émissions est telle que nous devons nous en préoccuper? De nombreuses personnes disent que le changement climatique est réel, mais que nous n'y pouvons rien et que nous n'avons pas vraiment d'effet sur ce phénomène.

M. Purchase : Je le réalise. Ce débat est en cours, et personne ne connaîtra la vérité avant que nous y arrivions et que nous la constations. Toutefois, je pense qu'il ne serait pas vraiment prudent d'arriver là si nous découvrons que les conséquences sont catastrophiques et très graves.

Je sais que tous les modèles comportent des lacunes; je n'ai aucun doute à ce sujet. Toutefois, je ne suis pas un spécialiste, et je dirais que ces modèles sont suffisamment réels pour que nous ne puissions plus les ignorer, étant donné que les systèmes climatiques de la terre sont complexes. Il faut prendre des mesures.

Je pense que nous devons commencer modestement, en établissant un prix pour le carbone que nous pourrons augmenter progressivement avec le temps, au besoin. Je pense que du point de vue social, cela peut fonctionner. Nos politiques et notre économie peuvent se le permettre, et nous verrons où cela nous mènera.

C'est ainsi que je procéderais. Je ne veux pas remettre en question ce qu'ont dit les spécialistes, parce que nous en sommes entourés et qu'ils ont plus de connaissances que nous. C'est simplement qu'ils n'ont pas souvent raison de façon très précise. Ils ont raison, du point de vue directionnel.

C'est un peu comme la plupart des économistes qui prédisent l'économie. Ils ont des modèles très perfectionnés et sont aussi intelligents que ceux qui se préoccupent des questions touchant le climat; ils viennent certainement des meilleures écoles. Le problème, c'est qu'on nous présente toujours quelque chose qui a l'air relativement certain, mais qui sait ce que l'avenir nous réserve? C'est toujours un peu flou, mais il faut tout de même agir et tenir compte de ce que les gens disent à ce sujet.

Le président : Sénateur Banks, ne voulez-vous pas poser des questions un peu plus précises au sujet des scientifiques d'East Anglia?

Le sénateur Banks : Précisément.

Le sénateur Lang : Je voudrais aller un peu plus loin. Nous pourrions aller à East Anglia. Je sais que ce n'est pas correct du point de vue politique, mais cela soulève certainement des questions.

J'aimerais formuler un argument, si vous me le permettez. Selon l'interprétation que l'on fait souvent de la question des émissions de gaz à effet de serre, les humains sont responsables des changements climatiques, et je pense qu'il faut établir une distinction. Des changements climatiques ont lieu chaque jour, qu'on le veuille ou non. Nous contribuons au changement climatique.

En passant, si je me fie à votre explication du système de plafonnement et d'échange, j'ai l'impression que je devrais commencer à construire des édifices à bureau, parce que de nombreuses personnes devront réglementer ce secteur, et qu'elles auront besoin de bureaux.

Ce qui me préoccupe, alors que nous adoptons tous désespérément l'idée d'une taxe au carbone ou d'un système de plafonnement et d'échange, ce qui signifie que tous devront payer un peu plus, d'une façon ou d'une autre. À l'heure actuelle, le baril de pétrole se vend environ 80 $. Hier, j'ai lu dans les journaux qu'en novembre, en Chine, plus d'un million de véhicules avaient été vendus. L'an dernier, moins de 9 millions de véhicules ont été vendus en Chine. Cette année, ce sera 12 ou 13 millions de véhicules. On peut voir l'augmentation rapide de l'utilisation des combustibles fossiles, dans cette seule catégorie, sans même parler des autres générations.

Le baril de pétrole atteindra bientôt les 80 $, et de plus en plus de gens vont courir après ce baril, à l'avenir. J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Certains spécialistes disent que nous avons atteint un sommet dans le pétrole — un peu comme le sénateur Banks a indiqué — et, par la suite, lorsque nous voudrons un baril de pétrole, il coûtera beaucoup plus cher à produire. La loi de l'offre et de la demande s'appliquera, et il se peut que nous devions débourser 100 ou 120 $ pour un baril de pétrole, et que ce soit la norme.

Pourriez-vous commenter?

M. Purchase : Le pic pétrolier, c'est la situation qui se produira si la production mondiale atteint un sommet et qu'il reste du pétrole mais, plutôt que d'augmenter chaque année comme ce fut le cas ces 100 dernières années, la production commencera à diminuer et nous redescendrons, de l'autre côté de ce pic.

Si le pic pétrolier est une réalité dans le contexte d'une augmentation de la demande du secteur des transports en Chine et en Inde, par exemple, alors le prix du pétrole grimpera en flèche. Nous n'aurons pas besoin d'une taxe au carbone, parce que les gens n'utiliseront pas de pétrole; ils vont trouver des façons d'utiliser autre chose que du pétrole, c'est certain. Les prix seront dramatiquement plus élevés, et les gens vont simplement cesser de l'utiliser, si le pic pétrolier est une réalité.

Au sujet de la question que vous m'avez posée, je pense que nous avons très peu de temps pour agir. Si les scientifiques du climat ont raison, nous n'avons pas beaucoup de temps; nous avons 40 ans pour procéder à des réductions très importantes. Ces réductions doivent être vraiment très importantes. Les gens disent que oui, le captage et le stockage du carbone sont possibles, mais nous sommes loin de l'avoir prouvé de plusieurs façons. Une fois que l'on stocke le carbone, il faut qu'il puisse demeurer en place; il ne doit pas remonter à la surface. La réglementation de cette méthode, par exemple, comporte de nombreux obstacles politiques majeurs.

Nous sommes loin d'arriver à cela, et cette méthode ne permet de résoudre que le problème du charbon, dans une certaine mesure.

Le sénateur Lang : Nous nous éloignons du sujet initial. À l'heure actuelle, le prix du baril tourne autour de 80 $, et nous sortons à peine d'une récession. Je veux le souligner. Si le baril coûte régulièrement 120 $, alors nous n'aurons pas besoin d'un système de plafonnement et d'échange, ni d'une taxe au carbone, parce que le marché s'occupera de la question de l'offre et de la demande et des coûts.

M. Purchase : Même si le baril de pétrole coûtait 200 $, il y aurait toujours ce que les économistes appellent des effets externes; il y a tout de même un coût social associé à l'utilisation de ce pétrole. Un baril de pétrole à 200 $ est tout de même utilisé; chaque fois qu'on l'utilise, les émissions de CO2 augmentent toujours.

Chaque tonne de CO2, peu importe où elle est émise dans le monde, a le même effet sur le climat, et quelqu'un doit payer pour cela. Jusqu'à maintenant, nous utilisons le pétrole sans payer. Aujourd'hui, nous disons simplement que nous devons augmenter la mise et payer pour les dommages sociaux potentiels que nous causons en ajoutant ce CO2 dans l'atmosphère.

Le sénateur Lang : Nous avons entendu quelque chose d'intéressant l'autre jour. Nous avons reçu M. Bob Evans, de l'Université de Colombie-Britannique; il a expliqué de façon claire et simple la situation actuelle; je pense que nous avons tous pu comprendre. Il a également formulé une recommandation très claire de ce que devraient être les politiques publiques.

Les politiques publiques du gouvernement du Canada pourraient viser à établir les émissions permises, de concert avec les provinces, de qui relèvent l'électricité et les ressources naturelles; ce serait alors à ces provinces de déterminer comment elles respecteront ces niveaux d'émissions : adopteraient-elles l'énergie nucléaire, ou l'énergie hydroélectrique? Que feraient-elles pour ramener leurs émissions à un niveau acceptable?

Autrement dit, le gouvernement du Canada établit les paramètres généraux, et les provinces doivent respecter un certain délai. Manifestement, elles doivent travailler ensemble, dans une certaine mesure. Qu'en pensez-vous?

M. Purchase : Ce serait possible, si chaque province pouvait trouver une façon différente de procéder. Toutefois, la situation sera plus complexe pour les entreprises si tous ont un système différent en vue d'atteindre ces objectifs.

Au bout du compte, il est impossible de ne pas imposer de prix aux émissions de dioxyde de carbone. On peut créer des règlements et dire qu'on doit utiliser cette technologie-ci ou faire cela. Il s'agit d'une façon de procéder qui coûterait plus cher, parce que lorsqu'on dit aux entreprises ce qu'elles devraient faire plutôt que de les laisser trouver la meilleure façon de procéder, les coûts économiques s'additionnent. C'est pour cette raison que les économistes aiment les solutions axées sur le marché. Même un système de plafonnement et d'échange, malgré tous ses désavantages, est une meilleure solution que bien d'autres.

Nous revenons toujours à la même chose. Il y a un coût social qui, d'une façon ou d'une autre, doit être pris en considération chaque fois que nous consommons ou produisons des combustibles fossiles. D'une façon ou d'une autre, nous avons besoin d'une politique pour le mettre en oeuvre

Je ne suis pas contre l'idée de dire à chaque province de respecter un certain plafond et de s'y prendre comme elle souhaite. C'est concevable; ce ne serait pas aussi efficace que d'établir un seul prix national sur les émissions de carbone, mais ce n'est pas inconcevable. Il ne s'agit simplement pas de la meilleure façon de procéder, à mon avis.

Le sénateur Lang : J'aimerais aller un peu plus loin, parce que j'ai du mal à comprendre. J'ai l'impression que si chaque province avait un certain niveau qu'elle devait atteindre, elle ferait quelque chose de concret comme construire un barrage hydroélectrique ou une usine nucléaire, par exemple — peut-être même passer du charbon au gaz, pour réduire les émissions de CO2.

Je ne veux pas prétendre que je suis un spécialiste; je suis nouveau dans ce domaine, probablement comme bon nombre de nos auditeurs, mais j'ai beaucoup lu à ce sujet. Je pense que nous avons dépensé environ 30 milliards de dollars dans les différentes organisations se préoccupant des changements climatiques, pour convaincre le public qu'il y a un problème. Nous n'avons ni construit une usine nucléaire, ni un barrage hydroélectrique. Nous en avons seulement parlé.

Ce que je veux dire, c'est que je ne comprends pas pourquoi c'est compliqué, selon vous. Si nous établissons les émissions permises partout au pays, la province de l'Alberta pourrait, en voyant sa cible, décider qu'elle doit par exemple, convertir ses usines à charbon au gaz naturel, peut-être parce que c'est la technologie qui s'offre à eux, ou encore acheter l'hydroélectricité de la Colombie-Britannique ou du Québec.

Des mesures concrètes seraient prises, contrairement à ce que nous verrions avec un système de plafonnement et d'échange. Avec un tel système, je pense vous avoir entendu dire que le milieu des affaires décidera quelles entreprises survivront et lesquelles fermeront leurs portes, selon qui peut acheter quoi ou s'en tirer avec quoi. Pendant ce temps, aurons-nous construit quoi que ce soit ou adopté une source d'énergie de remplacement?

M. Purchase : Oui, en principe, c'est ainsi que fonctionne le système de plafonnement et d'échange. Les gens adoptent des sources d'énergie plus propres. Premièrement, ils se concentrent sur l'efficacité et la conservation énergétiques, puis ils commencent à transformer en sources d'énergie propre les combustibles fossiles, ou ils adoptent des méthodes de captage et de stockage du carbone. Ce sont les options existantes. Soit nous en utilisons moins, soit nous trouvons une façon d'amoindrir ses effets ou nous adoptons une autre forme de carburant.

Le sénateur Lang : Quelle est la meilleure méthode pour passer à une source d'énergie de remplacement?

M. Purchase : La meilleure méthode, si on est économiste, est de monter le prix des émissions de carbone. Ce n'est pas de porter des jugements politiques sur la technologie à privilégier.

Le sénateur Mitchell : Dans tout ce débat sur l'affaire East Anglia à propos des données scientifiques et de ce qu'elles disent, les gens qui niaient le phénomène des changements climatiques ont en quelque sorte changé leur discours et disent maintenant qu'ils se produisent, mais que ce n'est pas en raison de l'activité humaine. L'autre jour, j'ai réalisé que si l'activité humaine n'est pas en cause, nous sommes vraiment en difficulté, parce que dans un tel cas, nous n'avons aucune chance de rétablir les choses. Le fait est que ces changements se produisent et nous devons espérer que c'est parce que nous les causons.

Nous nous sommes penchés sur les problèmes d'un système de plafonnement et d'échange des droits d'émissions. Nous avons parlé du marché et de la nécessité de fixer un prix qui commanderait le marché et permettrait de prendre un nombre infini de décisions, plutôt que de voir quelqu'un les imposer. Dans une certaine mesure, si on établit les quotas — les crédits, les déductions ou peu importe comment on les appelle — de façon adéquate, alors on commande le marché. On commence ainsi à établir un prix, ce qui pousse les entreprises et les individus — en particulier les entreprises, j'imagine — à prendre des décisions concernant les solutions les plus accessibles, aussi. C'est l'avantage d'un système de plafonnement et d'échange.

M. Purchase : Tout à fait. Fixer un prix pour le carbone n'est pas la solution que je privilégie, car il y a à mon avis une façon plus simple de procéder — une façon qui, au bout du compte, serait plus avantageuse du point de vue politique, même si on y associe ce mot terrible, « taxe ». Toutefois, cette solution est quand même préférable à l'autre, qui consiste simplement à dicter les technologiques qui seront utilisées.

Je n'y crois pas. Je ne crois pas qu'un groupe de gens intelligents, qu'un gouvernement devrait dicter les technologies qui doivent être adoptées.

C'est l'opinion fondamentale d'Adam Smith — nous sommes tous plus intelligents de façon individuelle. C'est la force de notre système : nous permettons à tous de résoudre ce problème de façon individuelle lorsqu'on les met face au prix du carbone; soit ils inventent quelque chose qui nous aide ou ils diminuent simplement leur consommation, changent leur comportement, ou prennent quelque autre mesure qui s'impose. Il est de loin préférable d'avoir un mécanisme décentralisé plutôt qu'un groupe de gens intelligents, assis tout en haut de la pyramide à tenter de décider ce que sera l'avenir de la société.

Le sénateur Mitchell : À mon avis, c'est le même problème avec le fonds — les 15 $ par tonne qu'on peut verser dans un fonds. En Alberta, le premier ministre Stelmach a créé un système de plafond et de déductions ou de plafond et d'accord, de plafond et de fonds, ce qui n'est pas suffisant, bien qu'il soit axé sur l'intensité; c'est tout à son honneur. C'est bon de voir qu'il a pris des mesures, mais l'idée du fonds me pose problème parce que la décision de savoir comment le dépenser revient à des gens assis autour d'une table. Le marché devrait le déterminer; ce serait beaucoup plus rapide et plus efficace.

Ma deuxième question porte sur la vague de changements qui se sont produits il y a environ 18 mois avec la découverte de gaz de shale aux États-Unis et au Canada. Si je brûle suffisamment de gaz ou de charbon pour produire un BTU d'énergie, les deux carburants émettent-ils exactement la même quantité de dioxyde de carbone? Je sais que, d'une certaine façon, le gaz peut sembler plus propre, mais est-il aussi plus propre du point de vue des émissions de dioxyde de carbone?

M. Purchase : Le gaz produit moins de dioxyde de carbone par unité de chaleur. La mention des gaz de shale nous ramène à ce que le sénateur Banks a dit au sujet du pic pétrolier. Il y a trois ans, j'étais absolument convaincu que nous avions vu un sommet dans la production de gaz. Je pensais que l'Amérique du Nord allait devoir importer du gaz naturel liquéfié sur le marché international. Puis soudain, la technologie nous a montré encore une fois que l'innovation peut radicalement changer la donne. .

Je ne suis pas meilleur que n'importe qui d'autre à prédire l'avenir. Cette situation constituait une illustration claire pour moi, parce que j'aurais, au contraire, prôné fortement la prudence en ce qui concerne les politiques publiques régissant l'industrie gazière, mais j'aurais eu tort.

Le sénateur Mitchell : J'aimerais poser, si possible, une autre question.

Le sénateur Lang a abordé une question très intéressante. Si le prix de pétrole grimpait à 200 $ le baril, considérerions-nous que ce prix est adéquat si la taxe sur le carbone était de 120 $? Les gens s'adaptent avec le temps, mais je n'aimerais pas gagner ma vie en vendant des véhicules énergivores.

Je vous donne un exemple. Dison que le Canada dépend fortement des combustibles fossiles et la production se situe à 200 $ le baril, ce qui est bien. Les énergies de remplacement, qui coûtent beaucoup moins cher, représentent 40 p. 100 du marché américain. On pourrait dire que le Canada n'a plus un avantage concurrentiel dans le domaine manufacturier, car le coût de l'énergie au Canada coûte cher et le Canada n'a pas fait un effort pour trouver des sources d'énergie de remplacement afin de devenir plus concurrentiel dans un monde qui les a trouvées. Cette situation serait problématique. D'autre part, le Canada recevrait 200 $ le baril, mais est-ce que le prix des sources d'énergie de remplacement grimperait en même temps que celui du pétrole? Une société pourrait-elle générer de l'électricité à partir de panneaux solaires et la vendre au réseau à un prix juste en dessous de 200 $ le baril?

M. Purchase : Oui, cette situation pourrait se produire jusqu'à un certain point.

Le sénateur Mitchell : Ce ne serait pas concurrentiel.

M. Purchase : Ce le serait si, dans ce cas précis, on pouvait faire des substitutions. C'est la raison pour laquelle tous les prix des combustibles fossiles suivent la même progression jusqu'à un certain point, bien qu'il y ait d'énormes écarts liés à la nature du marché et à l'accès aux sources d'énergie de remplacement. Dans le passé, le gaz naturel et le pétrole suivaient à peu près la même progression, mais ce n'est plus le cas. Si on peut substituer un combustible par un autre quand le prix change, cette substitution aura lieu.

Le sénateur Mitchell : Le comité a fait un voyage intéressant aux États-Unis, où nous avons rencontré toutes sortes de gens. Un des thèmes récurrents était les lois ou les projets de loi aux États-Unis. Par exemple, la Californie met en place des initiatives. À votre avis, à quel point faut-il prendre au sérieux la menace voulant que les Américains utiliseraient n'importe quel argument, y compris les enjeux environnementaux, pour empêcher l'importation du pétrole canadien, alors qu'en fait, il pourrait s'agir d'une question de protectionnisme pour promouvoir le gaz de shale?

M. Purchase : C'est une menace extrêmement grave. C'est la raison pour laquelle j'ai recommandé que nous suivions de près la politique américaine. Vous pouvez être certains qu'ils ne lâcheront pas prise, et cela pour des raisons commerciales, et non pas pour contrer les changements climatiques. Il y aura toujours derrière cela, bien sûr, des tentatives de protectionnisme. Le Canada peut faire cavalier seul dans bien des domaines sans que cela porte à conséquence, mais dans ce domaine, nous devons être conscients du besoin d'imiter de près les mesures prises par les États-Unis à l'échelle nationale. Les États peuvent encore avoir des politiques différentes pour des raisons politiques. . Nous serons dans une position plus forte, toutefois, si nous adoptons une politique commune en Amérique du Nord, ce qui englobe le Mexique. Je ne sais pas, cependant, quelle place ils occuperont dans ce processus. Nous pouvons tenir en garde les forces protectionnistes, mais elles seront toujours là. Nous devons en être conscients et avoir une bonne politique nationale qui suit de près celle des États-Unis. Comme je l'ai déjà dit, s'ils ne font rien, rien ne sera fait.

Le sénateur Mitchell : Exactement.

M. Purchase : Si le président Obama souhaite obtenir un deuxième mandat, les États clés pour les démocrates sont les États des Grands Lacs tels le Wisconsin, l'Illinois, l'Indiana, l'Ohio, la Pennsylvanie et le Michigan. Je n'inclurai pas New York, parce que l'État est dominé par la ville de New York et les intérêts financiers. Les trois grands manufacturiers automobiles et leurs fournisseurs se trouvent dans ces États. Le gouvernement a bien sûr sauvé deux d'entre eux de la faillite et joue un rôle important dans leur politique. Ces États sont également importants pour le secteur du transport.

Les États des Grands Lacs représentent 100 votes au collège électoral, et le président Obama ne pourrait pas gagner la présidence sans eux. Autre élément important : ces États utilisent ensemble plus de charbon pour produire leur électricité que les autres États en moyenne. À l'exception de l'Illinois, ces États produisent 50 p. 100 de leur électricité au charbon. C'est le cas notamment de l'État où habite le président. Dans nombre de ces États, les populations chauffent leur maison à l'électricité. Lorsque le prix de l'électricité montera en flèche, ce qui ne manquera pas de se produire dans les régions dépendantes du charbon, les conséquences politiques seront énormes. Le président Obama aura à gérer tout cela ou il ne sera pas réélu.

Le sénateur Peterson : Au sujet du dernier point, c'est une évidence à mon avis que les 13 ou 14 États producteurs de charbon ne sont pas acquis. C'est un problème majeur.

Sur cette question, à mon sens, nous sommes d'accord pour dire que le réchauffement planétaire est un problème mondial. Le Canada produit 2 p. 100 des émissions, mais à en croire la presse mondiale, nous sommes les vilains. À votre avis, qu'est-ce qui ressortira de Copenhague?

M. Purchase : Il y a, semble-t-il, beaucoup de bruit à Copenhague.

Le président : Je ne serai pas à Copenhague avant samedi matin.

M. Purchase : La pression sera à l'ordre du jour. Il serait intéressant de voir ce que le président Obama suggérera. Il a maintenant l'appui de l'Agence de protection de l'environnement, l'EPA, qui fait pression en quelque sorte sur le Congrès. En fin de compte, le Sénat des États-Unis est un facteur clé. Je ne sais pas où la situation politique les amènera.

Les États-Unis vont vouloir, en bout de ligne, faire quelque chose. Ils vont bouger, à mon avis. Je doute que cela se produise à Copenhague. Je ne sais pas quelle est la marge de manœuvre du président. Que peut-il faire pour engager la nation? Il peut faire des déclarations, mais, à mon sens, il n'engagera pas la nation à respecter un accord international.

Cela dit, je pense que les États-Unis vont agir dans le domaine des changements climatiques; ils mettront en place une politique nationale. Elle ne sera peut-être pas à la hauteur, mais il y en aura une.

Le sénateur Brown : À votre avis, est-ce que la recherche dans des sources d'énergie de remplacement et des moyens de conserver l'énergie pourrait constituer la solution à tout ce problème?

M. Purchase : Presque tout le monde s'entend pour dire que la solution demeure les technologies que nous connaissons déjà ou qui doivent faire leur preuve, tels que le captage et la séquestration du carbone, une utilisation accrue de l'énergie solaire ou éolienne, et cetera. Les autres sources d'énergie, telle la géothermie, ne sont pas prêtes d'être au point. La technologie doit nous sortir de l'impasse.

Environ 85 p. 100 de l'énergie primaire mondiale est dérivée des combustibles fossiles. Nous avons un long chemin à parcourir pour remplacer cette source d'énergie. C'est ce qui a fait notre fortune. La technologie est la seule solution. Je n'en vois pas d'autres.

Le sénateur Brown : Je suis d'accord avec vous. J'aimerais souligner que l'Alberta s'est dotée du seul fonds qui existe en ce pays à l'heure actuelle. L'Alberta prélève 15 $ par tonne de carbone et l'investit dans un fonds de recherche qui touche à tout, allant des énergies de remplacement à la conservation.

General Motors, qui s'est retrouvée dans de grandes difficultés économiques, teste actuellement une voiture en Californie qui fera 220 milles au gallon. À mon sens, c'est la voie à suivre : investir dans la recherche et la conservation.

M. Purchase : Je suis d'accord. Il faut faire beaucoup plus de recherches. De plus, nous avons besoin de mesures incitatives afin de commercialiser la recherche. Il ne fait aucun doute dans mon esprit qu'il faut trouver des solutions technologiques au problème. Autrement, nous risquerons des problèmes graves.

Le sénateur Brown : Nous devrions avoir deux ans devant nous. D'après ce que j'ai pu comprendre, si un accord est conclu à Copenhague, il faudra deux ans au moins pour le mettre en œuvre.

M. Purchase : Il y aura un processus. L'an 2010 approche et nous devons atteindre notre première cible d'ici 2020. Il nous reste peu de temps. Il faut 10 ans pour construire une centrale nucléaire : trois ans pour trouver le site et obtenir l'approbation, trois ans pour approuver la technologie, et quatre ans pour construire les installations. Et cela seulement si tout va bien. Cet échéancier est ridiculement court dans l'industrie énergétique. On ne peut presque rien construire en 10 ans.

Le sénateur Brown : Je faisais référence à ce qu'on me raconte sur Copenhague. Le plan sera dressé — nous l'espérons — dans les semaines à venir, mais la mise en œuvre ne débutera pas avant deux ans.

M. Purchase : Oui.

Le sénateur Brown : Nous disposerons de deux ans pour faire de la recherche.

Le président : Chers collègues, nous avons eu une bonne séance. Normalement, nous recevons deux témoins dans ce laps de temps. De toute évidence, monsieur Purchase, vous avez suscité notre intérêt. Vous semblez aussi bien connaître notre étude. Nous avons besoin de toute l'aide possible pour que tout se déroule bien.

Hier, le sénateur Mitchell a dit que lui et moi avons rencontré des gens du secteur énergétique, y compris les représentants de l'industrie gazière et des producteurs pétroliers en amont. Ils mènent également une étude afin d'élaborer le cadre de la future politique énergétique du Canada.

Notre défi est de ne pas nous éparpiller Pourtant, les changements dans l'approvisionnement en gaz naturel et la percée technologique aux États-Unis progressent rapidement. C'est rassurant. . Un des mots à la mode que nous avons appris est la technologie, la technologie, la technologie. Aujourd'hui, vous nous avez donné une autre règle d'or : le prix est la clé de la conservation. C'est une excellente idée. J'ai demandé aux analystes de la Bibliothèque parlementaire de la noter; cela pourrait servir de titre d'un chapitre.

Nous savons que vous n'êtes pas loin. Vous avez été très généreux de votre temps. La greffière m'a fait informer que vous étiez prêt à nous aider. Nous l'apprécions.

M. Purchase : Oui. Si vous avez besoin de mon aide, faites-le moi savoir.

Le président : Je m'excuse de ne pas avoir été ici au début de la séance, mais nous avons eu une excellente séance. Merci.

(La séance est levée.)


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