Délibérations du comité sénatorial permanent des
Finances nationales
Fascicule 14 - Témoignages du 20 octobre 2009
OTTAWA, le mardi 20 octobre 2009
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui, à 9 h 35, pour l'étude d'un projet d'ordre du jour.
Le sénateur Joseph A. Day (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Chers collègues, merci d'être présents à cette réunion du Comité sénatorial permanent des finances nationales. Nous siégerons dans peu de temps à huis clos. Je présume que le personnel peut demeurer avec nous puisque nous nous entretiendrons des travaux futurs.
Je vais vous expliquer pourquoi nous ne traiterons pas ce matin du sujet qui avait été prévu, mesdames et messieurs. Le comité de direction souhaitait qu'on fasse aujourd'hui le point sur la situation économique. Malheureusement, nous avons eu quelques pépins concernant la présence des témoins, en particulier les représentants de la Banque de développement du Canada, qui gère la Facilité canadienne de crédit garanti. Nous souhaitions obtenir de l'information sur la part des fonds alloués à la Facilité de crédit garanti.
Nous voulions que les représentants du ministère des Finances nous parlent de quelques points et que ceux d'Industrie Canada nous fournissent des informations sur le sauvetage de l'industrie automobile. Cependant, les représentants du ministère des Finances estimaient qu'ils ne devaient pas témoigner sans la présence des représentants des autres ministères. Ils ont raison en ce qui a trait à la Facilité de crédit garanti; vous pouvez comprendre qu'ils ne voudraient pas répondre aux questions à cet effet. Également, il a été suggéré que nous essayions d'inclure des représentants d'Infrastructure Canada à notre groupe de témoins pour s'enquérir de sa situation générale dans le contexte économique actuel. Je crois que c'est une bonne idée.
C'est ce qui nous empêche de délibérer sur la situation économique en ce moment. Le problème est dû en partie à un conflit d'horaire et au fait que les fonctionnaires nous ont indiqué qu'ils n'étaient pas les bonnes personnes à qui s'adresser. Les témoins qui pouvaient se présenter ne voulaient pas le faire seuls.
Nous avons donc réagi rapidement en souhaitant nous attaquer à un sujet plus vaste. Un certain nombre de collègues ont suggéré l'analyse comparative des sexes; c'est ce que nous avions prévu pour les deux prochaines séances. Notre intention était donc de délibérer sur l'analyse comparative des sexes aujourd'hui.
Toutefois, j'ai appris qu'un comité de la Chambre des communes débattait un aspect de l'analyse comparative des sexes. Nous en étions aux premières étapes, à savoir comment le gouvernement réalisait l'analyse comparative des sexes dans divers ministères par rapport à la législation : quels étaient les freins et contrepoids, les règles et les critères. En somme, il s'agissait de considérations très générales.
Un fait à mentionner est que nous avons rejoint les témoins qui ont comparu hier devant le comité de la Chambre des communes à propos du rapport du printemps 2009 de la vérificatrice générale sur l'étude de l'analyse comparative des sexes. Nous n'avions pas demandé à la vérificatrice générale de comparaître, puisque nous n'en étions qu'aux premières étapes de l'étude de l'analyse comparative des sexes. Nous voulions savoir quels étaient les critères pour le Conseil du Trésor, le Bureau du Conseil privé, le ministère des Finances et Condition féminine Canada.
Les représentants des trois premiers ministères auraient pu venir ce matin, mais ils ont refusé parce que les représentantes du quatrième ministère ne seraient pas présentes. Je tenais à ce que cela paraisse dans le compte rendu. Depuis que je siège à des comités, c'est la première fois que des représentants d'un ministère déclinent notre invitation à comparaître parce que les représentants d'un autre ministère seraient absents.
Nous avons quelques options. Je demanderais à M. Thompson de nous les énumérer. Une d'entre elles est d'essayer de planifier un autre moment. Quelles sont nos autres options si la situation se poursuit quant au refus des témoins de comparaître?
Adam Thompson, greffier du comité : Dans le contexte, je ne pense pas que les représentants des ministères aient refusé de venir témoigner par mauvaise volonté. Assurément, tout indiquait lors de nos conversations qu'ils étaient enthousiastes à l'idée. Les représentantes de Condition féminine Canada, qui se considère comme le premier responsable dans ce dossier, avaient un conflit d'horaire qui les empêchait de comparaître. Selon elles, sans leur présence, les échanges avec le comité n'auraient pas été aussi fructueux. Elles n'étaient pas disponibles pour venir témoigner ce matin.
Comme vous l'avez mentionné, une option serait de proposer d'autres dates pour les entendre. Il est clair que, au niveau de la procédure, un représentant du gouvernement est traité comme tout autre témoin. Le comité a le pouvoir d'obliger des témoins à comparaître et à produire des documents et des dossiers s'ils manquaient à l'appel ou refusaient de se présenter. Par voie de motion, le comité pourrait délivrer une sommation si un témoin se bornait à refuser ses invitations.
Comme je l'ai dit, mes conversations avec les représentants des ministères ne m'ont pas laissé l'impression que c'était le cas. Il s'agissait simplement d'un conflit d'horaire qui les empêchait de s'assurer que le comité reçoive les informations les plus complètes qui soient.
Le sénateur Gerstein : J'apprécie beaucoup votre longue intervention sur les raisons de l'absence de nos témoins ce matin. Je suis sûr que cela nous est tous très utile.
Cela dit, je sais que le comité de direction avait établi un ordre du jour. Je sais du greffier du comité que les représentants des ministères ont été très coopératifs avec nous grâce à ses efforts. Rien n'indique que certains d'entre eux n'étaient pas prêts à témoigner. Malgré le court préavis, rien ne laisse penser que les représentants n'étaient pas préparés. J'aimerais que ce fait figure également dans le compte rendu.
Le président : Ce n'est pas ce que j'avais compris. Clarifions le tout : parce que les représentantes d'un ministère ne pouvaient venir, les représentants des trois autres ont choisi de ne pas comparaître. Est-ce correct?
M. Thompson : C'est juste. Selon les représentants du Secrétariat du Conseil du Trésor, du ministère des Finances et du Bureau du conseil privé, Condition féminine Canada est un acteur fondamental dans le dossier. Sans la présence de ses représentantes, ils jugeaient que les discussions auraient été vaines.
Le sénateur Mitchell : Il me paraît inquiétant que ces ministères — tous, certains d'entre eux ou un seul — aient dit que la discussion avec le comité sénatorial ne serait pas fructueuse parce que les représentantes de Condition féminine Canada ne pouvaient être présentes. Il n'est pas de leur ressort d'évaluer ce que nous prévoyons être un échange constructif.
Le fait que des témoins posent une condition à leur présence est un précédent dont nous ne voulons pas. Nous souhaitons les entendre sans égard à ce que les représentantes de Condition féminine Canada ont à dire. Ce qui n'empêche pas que nous désirions entendre ces représentantes, car ce ministère assume un rôle important.
Toutefois, il s'agit là d'un précédent préoccupant. Personnellement, je les informerais que ce ne sont pas eux qui décident de ce que nous voulons parler; c'est nous qui le décidons.
Le sénateur Di Nino : Il faut essayer de rester mesurés dans les circonstances, même si je comprends votre point de vue. Les représentants des ministères ne devraient pas refuser de comparaître. Malgré tout, le greffier, qui était chargé d'effectuer les convocations, nous a affirmé très clairement qu'ils ne refusaient pas en tant que telle notre invitation. Je ne veux pas parler pour lui, mais ils ont déclaré que pour être utiles et en mesure de fournir de bonnes informations en réponse aux questions du comité, ils auraient besoin de la participation des autres. Je ne pense pas que nous devrions en faire tout un plat.
Nous pourrions peut-être envoyer une lettre, approuvée par le comité de direction, demandant une explication par écrit aux représentants de ces trois ministères. Nous verrions ensuite si nous devons prendre des mesures supplémentaires.
Nous devons être justes et pondérés. À ce que je sache, cette situation n'est jamais arrivée avec les ministères en question. À ce stade-ci, se servir de la pleine mesure des pouvoirs du comité ne nous donnerait rien qui vaille, sauf de signifier qu'on ne s'attend pas à ce type de réaction de leur part. Pour parvenir à cette fin, nous pourrions leur écrire pour demander une explication digne et complète par écrit. Après quoi nous verrions si nous voulons nous y prendre autrement.
Le président : Quelqu'un a-t-il quelque chose à ajouter?
Le sénateur Ringuette : Je dois admettre être surprise et quelque peu consternée par ce que j'entends ce matin. Sans a priori, je crois certainement que, malgré l'impossibilité de comparaître des représentantes de Condition féminine Canada, l'information obtenue pendant le témoignage des différents ministères est importante. Par exemple, les représentants du Conseil du Trésor nous renseigneraient sur les politiques, le budget et ainsi de suite.
Nous aurions dû obtenir toute cette information en dépit de l'absence des représentantes de Condition féminine. Pareillement, ces dernières ne nous demanderaient pas que la vérificatrice générale soit présente pour donner son analyse de la question.
Selon moi, cette attitude des représentants des ministères n'en est vraiment pas une d'ouverture. Nous ne devrions pas l'accepter car cela créerait un précédent. Les fonctionnaires ont une responsabilité envers les comités parlementaires, que ce soit le nôtre ou les comités de la Chambre des communes. Nous travaillons pour les Canadiens et si nous estimons avoir besoin d'information à propos d'un certain dossier pour faire notre travail, c'est leur responsabilité de venir témoigner.
Je peux comprendre qu'un conflit d'horaire survienne. Toutefois, je n'accepte pas que les représentants du Conseil du Trésor ou du Conseil privé ne témoignent pas devant le comité au sujet de l'analyse comparative des sexes si les représentantes de Condition féminine ne peuvent être là. C'est imposer une condition à leur présence. Le comité ne doit en aucun cas accepter que les représentants d'un ministère fassent cela; c'est totalement inacceptable. Je ne sais pas si c'est une directive qui vient d'en haut; je ne connais pas le nom des personnes qui ont répondu ainsi. Toutefois, notre comité devrait les informer que leur réponse à notre demande est inadmissible. Ils ont posé une condition à leur acceptation et nous ne procédons pas ainsi. Nous ne l'avons jamais fait et nous ne le ferons jamais.
Le temps de tout un chacun ici est précieux en ce qui a trait à notre contribution au comité et à notre travail pour les Canadiens. Cet état de fait nous fait perdre du temps que l'on aurait pu consacrer à d'autres questions que nous souhaitons étudier.
À titre de membre du comité de direction, je n'irais pas jusqu'à envoyer une réprimande ou un avis de cet ordre. Toutefois, j'énoncerais certainement que jamais les représentants du Conseil du Trésor ne vont fixer une condition à leur présence devant le comité. C'est absolument inacceptable et nous devrions communiquer notre position aussi clairement.
Le sénateur Callbeck : C'est un précédent très dangereux. Ce n'est jamais arrivé auparavant et cela offre une porte de sortie à tous les représentants des ministères à l'avenir.
Cela dit, nous ne devrions pas accepter cela. Nous avions nos raisons d'entendre les représentants de ces ministères et ils auraient dû comparaître. À tout le moins, je souhaiterais recevoir de leur part une lettre d'explication sur la raison de leur absence.
Le sénateur Gerstein : Les autres membres du comité de direction et moi savons que la discussion sur l'analyse comparative des sexes était à l'ordre du jour de demain. Il s'agit d'un changement de toute dernière minute et j'estime que c'est ce qui a occasionné un conflit d'horaire. C'est exactement la version du greffier du comité.
Le président : Le greffier nous a dit que les représentants de trois des quatre ministères pouvaient venir, mais refusaient de le faire en l'absence des représentantes du quatrième ministère.
Le sénateur Gerstein : Le changement a été fait au dernier moment. Notre horaire indique précisément qu'ils devaient venir demain.
Le sénateur Di Nino : Je peux vous informer, en ma qualité de président du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international, du fait qu'une demande avait été faite à un représentant d'une société d'État en particulier de venir témoigner. Sa lettre de réponse, que j'ai transmise aux membres du comité de direction, nous expliquait pourquoi il trouvait inapproprié de se présenter devant nous. Son explication nous paraissait juste et nous l'avons acceptée; ça peut arriver de temps en temps. C'est pourquoi j'ai suggéré que nous laissions la chance aux représentants de ces ministères de répondre officiellement à nos préoccupations.
Entre-temps, nous avons établi que les représentants des ministères ne peuvent poser de conditions à leur présence, et je suis d'accord sur cela. Au point où nous en sommes, il faut transmettre ce message avec assez de fermeté, mais sans montrer quiconque du doigt. Nous devrions à tout le moins leur demander de nous fournir une explication écrite officielle.
Le président : Êtes-vous d'accord pour que nous précisions dans notre demande que les représentants des ministères ne peuvent déterminer la composition des groupes de témoins que nous créons? Nous sommes responsables de convoquer qui nous voulons au moment où nous le voulons.
Le sénateur Di Nino : Pas sans une justification convenable. C'est pourquoi j'ai fait cette observation sur les représentants d'une société d'État qui avaient décliné notre invitation pour des motifs que nous estimions honnêtes. Ils n'ont pas dit qu'ils ne voulaient pas témoigner, mais qu'ils préféraient ne pas le faire. Cela nous a donné l'occasion de dire que nous étions d'accord sur les raisons invoquées; nous les avons remerciés et leur avons dit qu'ils n'avaient pas à témoigner.
Je ne conteste pas les dires du greffier. J'estime qu'il est très juste dans ses explications. Toutefois, le fait d'avoir par écrit les raisons des représentants pour ne pas témoigner nous permet de décider si nous voulons prendre des mesures supplémentaires. Je présume qu'une explication de leur part serait probablement suffisante.
Le président : Le sénateur Gerstein a raison : le préavis était court. Toutefois, les représentants de trois ministères nous ont dit qu'ils pouvaient être ici. Ils étaient prêts à témoigner.
Le sénateur Di Nino : Ce n'est pas ce dont nous débattons. On nous dit qu'ils avaient indiqué que sans la présence... Je ne suis même pas sûr de ce qu'ils ont dit. Ils ont probablement mentionné qu'il serait mieux pour eux de nous être pleinement utiles en étant tous ici; c'est pourquoi ils ne préféraient pas venir. C'est bien différent de dire qu'ils refusent de témoigner.
Je suis d'accord avec vous pour ne pas leur donner le bénéfice du doute, mais nous devrions leur indiquer clairement qu'aucun représentant de quelque ministère que ce soit ne peut poser de conditions à sa présence. C'est un terrain très glissant.
Je n'ai jamais vu cela auparavant, et, même si ce n'est pas le cas présentement, nous devrions à tout le moins faire savoir que ce n'est pas acceptable aux fins du compte rendu. Cela dit, donnons-leur l'occasion d'énoncer officiellement les raisons justifiant leur absence ce matin.
Le président : Est-ce qu'on en vient à un consensus?
Le sénateur Mitchell : Je pense que leur demander une réponse par écrit est la bonne chose à faire. Toutefois, je ne veux pas que cette situation perdure pendant six mois et que nous ne puissions les rencontrer plus tôt.
Je suis très enthousiaste à l'idée de parler de l'analyse comparative des sexes; c'est un excellent sujet d'étude qui est très opportun pour le comité. Nous devrions nous entretenir avec eux dès que possible.
Ce sera un problème différent s'ils utilisent cette excuse à nouveau, mais nous pouvons entamer le processus mentionné. Nous pouvons les inviter à venir expliquer personnellement pourquoi ils ne sont pas venus au moment choisi et pourquoi ils ont posé une condition. Nous pourrions les entendre de vive voix et obtenir leur réponse par écrit. Nous devrions les faire venir aussitôt que possible.
Le président : Y a-t-il consensus sur le fait d'entendre les représentants de ces quatre ministères sur l'analyse comparative des sexes au même moment? Qu'est-ce qui arriverait si le comité de direction décidait qu'il préfère qu'on les rencontre deux par deux? Dans ces circonstances, ils ne viendraient pas.
Le sénateur Mitchell : Je ne pense pas du tout qu'ils doivent être tous présents au même moment.
Le président : Une solution rapide serait de se plier à leur demande, comme on me l'a suggéré, et que tous témoignent pendant la même réunion. Par contre, cela pourrait créer un précédent dont nous ne voulons pas.
Le sénateur Di Nino : Nous avons besoin d'une explication.
Le président : Je suis d'accord, mais ça pourrait prendre quelque temps.
Je crois que nous avons un consensus. Le comité de direction rédigera une lettre en collaboration avec le greffier, qui a fait les appels de dernière minute pour essayer d'organiser cette réunion. Notre lettre sera adaptée aux circonstances, sachant que nous essayons de préserver l'intégrité du Sénat, du comité et du rôle que nous remplissons vis-à-vis des Canadiens. Voilà l'important enjeu qui est ici en cause.
Le sénateur Mitchell : Êtes-vous en train de dire que nous n'essaierons pas de les faire venir avant que ce problème ne soit résolu?
Le président : Non : il s'agit là de deux questions différentes dès lors que nous leur envoyons une lettre demandant des explications. Cette lettre sera probablement transmise au sous-ministre qui clarifiera la situation et fera connaître la position du ministère.
Je soupçonne que le problème est en partie dû à un manque de compréhension et de communication en raison du changement d'horaire rapide que nous demandons. Le sénateur Gerstein a sans doute raison. Toutefois, nous devons établir ici un principe important.
Sommes-nous d'accord pour utiliser cette démarche?
Des voix : D'accord.
Le président : Voilà qui conclut ce point.
Il faut une motion pour que le comité se réunisse à huis clos. Nous devons discuter de notre emploi du temps et de deux ou trois points à ajouter à la liste des travaux futurs.
Le sénateur Di Nino : Je la propose.
Le président : J'ai deux motions. Je vais donner la priorité à celle du membre ayant le plus d'ancienneté. C'est le sénateur Gerstein qui en est l'auteur. Êtes-vous en faveur de la motion visant à siéger à huis clos?
Des voix : D'accord.
Le président : Quelqu'un s'y oppose? La motion est adoptée.
Acceptez-vous que nos assistants restent dans la salle?
Le sénateur Di Nino : Je propose que les sénateurs et, bien sûr, tous les employés soient autorisés à rester.
Le président : Et le personnel du comité.
Le sénateur Di Nino : Et le personnel du comité.
Le président : Êtes-vous d'accord?
Des voix : D'accord.
Le président : Contre? La motion est adoptée.
(Le comité poursuit ses travaux à huis clos.)