Délibérations du comité sénatorial permanent des
Finances nationales
Fascicule 16 - Témoignages du 3 novembre 2009
OTTAWA, le mardi 3 novembre 2009
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui, à 9 h 30, pour étudier le Budget des dépenses déposé au Parlement pour l'exercice se terminant le 31 mars à 2010 (sujet : Mise à jour économique).
Le sénateur Joseph A. Day (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Honorables sénateurs, nous avons reçu la semaine dernière des représentants du ministère des Finances pour discuter de l'état actuel de l'économie et des prévisions la concernant. Ce matin, nous allons poursuivre les discussions sur ce sujet.
Nous allons bientôt devoir étudier deux projets de loi portant exécution de certaines dispositions du budget, les projets de loi C-50 et C-51, ainsi qu'un certain nombre d'autres textes législatifs, sans oublier le Budget supplémentaire des dépenses (B). Nous espérons, grâce à toutes ces séances, parvenir à mieux comprendre la situation dans laquelle se trouve notre économie.
[Français]
Pour notre première table ronde, nous souhaitons la bienvenue aux fonctionnaires d'Infrastructure Canada.
[Traduction]
Nous sommes ravis d'avoir parmi nous M. John Forster, sous-ministre délégué, M. Taki Sarantakis, sous-ministre adjoint délégué à la Direction des politiques et priorités, et M. Bryce Conrad, sous-ministre adjoint à la Direction générale des opérations des programmes. Messieurs, nous vous souhaitons la bienvenue et vous remercions d'être ici ce matin.
En règle générale, les témoins commencent par nous faire part de leurs commentaires préliminaires. Nous n'avons pas reçu de copies des vôtres. En avez-vous?
Taki Sarantakis, sous-ministre adjoint délégué, Direction des politiques et priorités, Infrastructure Canada : Non, mais nous pourrons vous remettre celles-ci plus tard.
Le président : M. Forster, la parole est à vous.
[Français]
John Forster, sous-ministre délégué, Infrastructure Canada : Merci, monsieur le président. C'est un grand plaisir de revenir témoigner à ce comité pour discuter des programmes d'infrastructure.
[Traduction]
Lorsque l'économie mondiale s'est dégradée à l'automne 2008, le ministre des Transports, de l'Infrastructure et des Collectivités a tenu des réunions avec les provinces, les territoires, les municipalités et l'industrie. Ce fut pour nous l'occasion de discuter avec leurs représentants de la façon dont les projets d'infrastructures pourraient aider le Canada à passer à travers la récession, et de leur dire comment nous pourrions améliorer nos programmes en la matière pour qu'ils soient plus efficaces.
Durant ces consultations, on nous a parlé, d'un océan à l'autre, de la nécessité d'accroître le financement des infrastructures, non seulement pour améliorer la qualité de vie des Canadiens, mais aussi pour aider à stimuler l'économie. Nous avons aussi entendu parler du besoin de simplifier et d'améliorer la gestion de nos programmes pour permettre aux provinces, aux territoires et aux municipalités de mettre leurs projets en œuvre plus rapidement.
Ainsi que vous le savez, le gouvernement a rendu public son Plan d'action économique le 27 janvier. Il y mettait de l'avant deux grandes séries de mesures en matière d'infrastructures. La première visait à accélérer la mise en œuvre du Plan Chantiers Canada existant, d'une valeur de 33 milliards de dollars. Ce plan a été lancé dans le budget fédéral de 2007. Il était alors conçu pour assurer un financement prévisible, stable et à long terme des projets d'infrastructure sur une période de sept ans. Nous devions, en particulier, mettre en œuvre plus rapidement le Fonds Chantiers Canada, d'une valeur de 8,8 milliards de dollars, qui est destiné aux provinces et aux territoires pour réaliser aussi bien des projets stratégiques de grande envergure que des projets plus modestes dans des collectivités de moins de 100 000 habitants.
La première difficulté pour notre ministère était donc d'accélérer la mise en œuvre d'un programme, conçu au départ sur sept ans, afin de parvenir à stimuler plus rapidement l'économie.
La seconde série de mesures prenait la forme de nouvelles initiatives d'infrastructures temporaires, ciblées et opportunes de 12 milliards de dollars annoncées dans le budget qui étaient destinées, elles aussi, à stimuler l'économie. Nombre de ces initiatives devaient être mises en œuvre cette année et la suivante.
Je tiens aussi à vous rappeler qu'Infrastructure Canada n'est pas le seul ministère fédéral versant des fonds à des projets d'infrastructures dans le cadre du Plan d'action économique. Nous gérons plusieurs fonds, dont les quatre milliards de dollars du Fonds de stimulation de l'infrastructure, le complément de 500 millions de dollars au Fonds Chantiers Canada pour les petites collectivités, les 25 millions de dollars de l'Initiative nationale sur les sentiers récréatifs et le milliard de dollars du Fonds pour l'infrastructure verte, qui est le seul des programmes annoncés dans le budget à être étalé sur cinq ans. Les autres le sont sur deux ans.
Il existe toutefois de nombreux autres programmes d'infrastructures, comme le programme d'Infrastructures de loisirs Canada, gérés par les organismes régionaux de développement, le programme d'Infrastructures du savoir, géré par Industrie Canada et destiné aux universités, ainsi que des fonds destinés aux habitations et aux édifices fédéraux.
Comme vous le savez tous, les mesures visant les infrastructures ne sont pas les seules annoncées dans le Plan d'action économique pour lutter contre la récession. Il prévoit également d'autres mesures, comme des crédits d'impôt, de l'aide à des secteurs importants de notre économie, comme ceux de la forêt et de l'automobile, et de l'aide à la formation.
Une fois encore, c'est un plaisir d'être parmi vous. La dernière fois que nous sommes venus vous rencontrer, au printemps, nous vous avons fait le point de la situation au moment. Je suis ravi d'être à nouveau parmi vous pour vous indiquer comment la situation a évolué au cours des derniers mois, soit au cours de l'été et de l'automne.
Depuis la présentation du budget à la fin janvier, en un peu plus de neuf mois, nous avons conçu, approuvé et lancé cinq nouveaux programmes d'infrastructures dont le budget faisait état. Nous avons apporté des changements législatifs, réglementaires et administratifs à nos programmes afin d'accélérer l'approbation des projets d'infrastructures financés à même notre budget. Nous avons accéléré le financement d'un paiement de transfert à l'intention des provinces et des territoires, dont le montant prévu au départ était de 25 millions de dollars par année. Alors que nous avions prévu d'étaler des versements sur plus de sept ans, nous avons conclu des ententes avec neuf administrations désireuses d'engager ces fonds plus rapidement. À ce jour, nous leur avons transféré plus de 500 millions de dollars à cette fin.
Quant aux projets destinés aux petites collectivités, dans le cadre du volet Collectivités du Fonds Chantiers Canada qui devait au départ être mis en œuvre sur plus de sept ans, nous avons accéléré toutes les approbations de ce financement dans neuf des 10 provinces, en plus des 500 millions de dollars qui nous ont été octroyés dans le Budget pour compléter le financement de ce programme. Nous avons donc pris un programme qui devait s'étaler sur sept ans, nous avons approuvé tous les éléments, les projets sont en cours de réalisation et nous y avons ajouté 500 millions de dollars. Tout a été approuvé et réalisé dans neuf provinces sur 10.
Depuis janvier, nous avons annoncé le financement de 78 grands projets d'infrastructures stratégiques dans le cadre de Chantiers Canada, qui recevront 2,5 milliards de dollars du gouvernement fédéral. Il s'agit de projets importants et à long terme parmi lesquels on compte les travaux à la gare Union de Toronto, l'amélioration des installations d'eau potable à Lévis, au Québec, et l'amélioration du transport en commun à Calgary et à Edmonton. Ce sont là les projets à long terme les plus importants.
Dans le cas du Fonds de simulation de l'infrastructure, depuis janvier, nous avons signé des ententes avec les 13 administrations qui ont convenu d'injecter de nouveaux fonds équivalents aux nôtres. Nous avons aussi engagé plus de 3,3 milliards des quatre milliards de dollars disponibles et nous avons approuvé plus de 3 000 projets dans tout le pays.
Donc, depuis janvier, en neuf mois, nous avons engagé plus de 7,6 milliards de fonds fédéraux dans plus de 4 700 projets relevant de tous nos programmes. Lorsque vous ajoutez ce montant aux investissements des provinces, des municipalités et d'autres, vous obtenez un engagement collectif de 21 milliards de dollars consacrés à des projets d'infrastructures au Canada.
Si ces projets s'avèrent efficaces pour mettre les gens au travail, ils se révèlent aussi avantageux pour le Canada et pour les collectivités. C'est ainsi que nous procédons à des améliorations dans le port de Belledune, dans le nord du Nouveau-Brunswick, que nous rénovons la bibliothèque centrale de référence du centre-ville de Toronto, que nous installons de nouveaux égouts et de nouveaux aqueducs dans les collectivités de toutes les régions du Québec, que nous assumons une partie des coûts de construction du TELUS World Centre of Science à Calgary, en Alberta, que nous élargissons la route 11 dans le Nord de la Saskatchewan pour améliorer la sécurité et l'efficacité des déplacements, et que nous construisons un parc éolien a Summerside, à l'Île-du-Prince-Édouard. Ce sont là des exemples de projets financés par nos programmes.
Nous coopérons étroitement avec les autres paliers de gouvernement, en particulier les provinces, les territoires et les municipalités. C'est un partenariat de dimension vraiment nationale. Nous ne nous occupons pas de construire ou de gérer des projets; ce sont nos partenaires qui le font. Notre rôle consiste à examiner et à approuver les projets, et à leur donner le feu vert aussi rapidement que possible.
C'est ainsi que, dans le cadre du Fonds de stimulation de l'infrastructure, nous avons conçu un processus accéléré de dépôt de demandes en ligne. Les gestionnaires de projet peuvent amorcer les travaux de construction et engager des coûts dès que les projets sont annoncés. Les travaux ont déjà démarré pour nombre de ces projets.
Dans le rapport que le gouvernement a déposé en septembre, en nous fiant à l'information transmise par les provinces et les territoires, nous avons estimé que près de 1 800 projets étaient en cours de réalisation, représentant des contributions totales d'environ 6 milliards de dollars. Cela englobe les travaux préalables à la construction, les appels d'offres, les commandes de fournitures et de matériaux, la passation des contrats, les travaux de conception ainsi que de terrassement.
Ces projets ont des retombées économiques dès que nos partenaires obtiennent leurs approbations. Les travaux commencent avant que le gouvernement fédéral n'émette un chèque car ces partenaires sont alors autorisés à aller de l'avant. Lorsque nous recevons une demande d'une province, nous l'étudions et procédons au paiement dans les 30 jours.
Je vais terminer en vous disant que, depuis la présentation du budget en janvier et depuis notre dernière présence parmi vous, nous avons réalisé beaucoup de progrès. Ce fut une année très chargée. Le nombre de projets d'infrastructures qui ont été approuvés et qui, ayant démarré, en sont à diverses étapes de leur mise en œuvre est sans précédent. Nous sommes tout à fait convaincus que nos partenaires des secteurs municipal, provincial et privé vont accélérer leurs travaux de construction aussi rapidement que possible.
Mes collègues et moi nous tenons à votre disposition pour répondre aux questions que vous pourriez avoir.
Le président : Vous avez parlé du Fonds Chantiers Canada en indiquant que son financement devait s'étaler sur sept ans, mais que vous l'avez accéléré et que vous y avez ajouté un autre montant de 500 millions de dollars. Pouvez-vous nous donner de plus amples détails?
M. Forster : L'un des fonds annoncés dans le budget de 2007 a pour nom Fonds Chantiers Canada. Il était doté de plus de 8 milliards de dollars à répartir entre les provinces et les territoires en fonction de leur nombre d'habitants.
Ce fonds a deux volets. Dans chaque province, nous divisons les fonds en deux, pas nécessairement à parts égales mais en deux, et le montant de chaque volet varie selon la province. Une partie du fonds est consacrée à d'importants projets stratégiques à long terme. J'en ai évoqué quelques-uns comme le métro de Toronto, les usines de traitement des eaux de consommation et les élargissements de route. Une autre partie du fonds, soit environ 1,1 milliard de dollars pour l'ensemble du pays, est réservée à l'intention des petites collectivités dont la population n'atteint pas les 100 000 personnes. Celles-ci adressent leurs demandes de fonds à un secrétariat mis en place dans leur province.
Nous avions au départ l'intention de gérer ce fonds sur deux ou trois cycles de demandes étalés sur sept ans. Le budget précisait que nous allions offrir un montant additionnel de 500 millions de dollars pour des projets à réaliser dans n'importe quelle province qui s'engagerait et approuverait toutes ces dépenses maintenant, au cours de cette année-ci. Ce programme devait au départ s'étaler sur sept ans, mais nous l'avons accéléré. Cet été, nous avions approuvé l'engagement de l'ensemble de ses fonds, soit le 1,1 milliard de dollars prévus au départ pour sept ans, et nous avions également approuvé les montants additionnels dans neuf des 10 provinces.
Le sénateur Di Nino : S'agit-il de subventions de contrepartie? S'agit-il uniquement d'argent d'Infrastructure Canada ou les municipalités et les provinces doivent-elles verser le même montant?
M. Forster : Dans le cadre de nos programmes, il faut toujours fournir un montant équivalent, si ce n'est pour le Fonds de la taxe sur l'essence, qui est financé intégralement par le gouvernement fédéral. Pour tous nos autres programmes fédéraux, un montant identique à celui fourni par le gouvernement fédéral doit être versé. C'est ainsi que, s'il s'agit d'une route provinciale, l'entente prévoit un financement à parts égales de la province et de nous-mêmes. Dans le cas des projets communautaires des municipalités, le fédéral, la province et la municipalité assument chacun un tiers des coûts.
Le président : Vous avez parlé de neuf provinces sur 10, sans faire état des territoires, et j'en conclus donc qu'il y a trois territoires et une province qui n'ont pas signé d'entente. Elles ne recevront donc rien du 1,1 milliard de dollars parce que cet argent est déjà parti et a été engagé. Est-ce bien ce que vous avez dit?
M. Forster : Non, pas vraiment. Dans les territoires, le Fonds Chantiers Canada fonctionne de façon légèrement différente. Comme l'argent est réparti en fonction du nombre d'habitants, les régions du Nord n'obtiennent qu'un très faible montant parce que leur population est faible. En 2007, le gouvernement a versé ce que j'appelle un financement de base pour les provinces et les territoires de 25 millions de dollars par année.
Pour les territoires, c'est un montant énorme. Ils obtiennent 175 millions de dollars en financement de base. Nous avons tout simplement versé ces fonds dans le programme. Au lieu de leur donner trois millions de dollars au titre d'un programme, nous mettons tout ensemble. Nous réalisons les deux types de projet dans le Nord, aussi bien de petits projets communautaires que des projets plus importants, pour qu'ils profitent de ces possibilités.
Le président : Qu'en est-il de la province qui n'a pas signé?
M. Forster : Nous n'avons pas encore engagé la totalité des fonds dans le cadre de l'élément destiné aux collectivités au Québec, mais nous sommes très proches d'une entente et nous irons alors de l'avant avec les fonds complémentaires.
Le président : Vous n'avez donc pas engagé la totalité du montant de 1,1 milliard de dollars?
M. Forster : Non. Nous sommes très proches d'une entente avec le Québec et, ensuite, nous avons sa part des 500 millions de dollars.
Le sénateur Eggleton : Je vous remercie du travail que vous faites sur les infrastructures année après année. Comme vous l'avez indiqué, cela implique un grand nombre de programmes différents, mais je veux mettre l'accent sur les mesures de stimulation.
Si je me fie au troisième rapport du ministère des Finances faisant le point sur le Plan d'action économique à la fin septembre, 90 p. 100 des fonds avaient été engagés. J'aimerais comprendre ce que signifie le terme « engagé » dans le cadre du Fonds de stimulation de l'infrastructure. J'aimerais également que vous me disiez quel montant a réellement été versé jusqu'à maintenant?
Le critique de l'opposition à la Chambre des communes prétend que, à la fin août, seuls 12 p. 100 des fonds avaient été versés. L'écart entre 90 et 12 p. 100 est important, surtout que nous avons bien besoin en ce moment que cet argent soit injecté dans l'économie et crée des emplois. Les décaissements jouent un rôle important dans ce contexte.
Quel rôle jouez-vous une fois l'engagement pris? J'aimerais donc que vous nous expliquiez ce que vous entendez par « engagé » et que vous nous précisiez quel rôle vous jouez en permanence, ainsi que celui assumé par les provinces, dans l'administration des projets au niveau local.
M. Forster : Je vais répondre à ces questions une par une.
Le rapport déposé par le gouvernement en septembre précisait qu'environ 90 p. 100 des fonds du Plan d'action avaient été engagés. Cela comprend tout ce que le plan d'action englobe, par exemple les mesures fiscales, celles touchant le logement et la formation, l'argent versé au secteur de l'automobile, et pas uniquement pour les infrastructures.
Le Fonds de stimulation de l'infrastructure, comme je l'ai indiqué dans mes remarques préliminaires, est doté de quatre milliards de dollars. Il a une durée de vie de deux ans. Sur ce montant, nous avons engagé au-delà de 3,3 milliards de dollars. Il nous en reste donc à affecter.
En ce qui concerne les déboursés, je vais vous donner plusieurs réponses. Tout d'abord, les fonds sont transférés cette année aux provinces, aux territoires et aux municipalités à un taux sans précédent, pas uniquement à partir de notre programme, mais de tous nos programmes et de tous les autres ministères.
En réalité, le calendrier des versements n'est pas la question essentielle. Nos programmes fédéraux d'infrastructures nous amènent à rembourser les coûts absorbés lorsque les travaux de construction progressent. Si vous réalisez un projet de 100 millions de dollars, je ne vous donne pas 100 millions de dollars au début en vous disant : « C'est très bien ainsi. Tenez-nous informés de la façon dont les choses vont se dérouler. » Le promoteur procède à la construction et, lorsqu'il assume des coûts, il fait parvenir ses demandes de remboursement à la province qui, dans le cadre du programme, nous les retransmet.
Il se peut fort bien que je ne reçoive pas de demandes de remboursement pour des travaux exécutés cet été avant les mois de février ou de mars, selon la façon dont les choses vont se dérouler. Ce qui est essentiel avec le programme de stimulation est le moment auquel les promoteurs sont autorisés à entamer les travaux. C'est alors qu'ils peuvent aller de l'avant et préparer leurs appels d'offres, accorder des contrats, commander de l'équipement et des fournitures et mettre tous les gens au travail.
Comme je l'ai indiqué dans nos premiers rapports de septembre, nous estimons qu'environ 1 800 projets sont en cours de réalisation, d'une valeur approximative de six milliards de dollars. Nous étudions actuellement la première série de demandes de remboursement que nous avons reçues des provinces et des territoires. Elles nous les font parvenir une fois par trimestre. Tant que nous n'avons pas fini cet examen, je ne suis pas en mesure de vous indiquer combien d'argent de nos divers fonds elles ont réellement dépensé.
Quant à votre troisième question sur le rôle que nous assumons de façon continue, il consiste à donner le feu vert aux projets et à les approuver, ce que nous avons fait. Les provinces ont aussi un rôle à jouer. Elles doivent réaliser leurs projets d'immobilisations, qu'il s'agisse de routes ou d'autre chose. Il leur incombe également d'acheminer l'argent aux administrations municipales dans le cadre du programme. Elles signent leurs brèves ententes de contribution avec les villes, contrôlent le déroulement des opérations et nous font rapport sur l'état d'avancement des travaux. Comme je l'ai indiqué, nous procédons tout juste à l'analyse des premiers rapports trimestriels qu'elles nous ont transmis. Nous allons les examiner et les contrôler et collaborer avec les provinces pour voir si, par exemple, tel projet semble démarrer en retard ou tel autre avancer plus vite que prévu. Nous avons constaté que certains projets coûtent moins chers qu'indiqué dans les appels d'offres et nous allons étudier avec elles ce qu'il convient de faire de l'argent ainsi dégagé.
Nous exerçons un rôle permanent de surveillance. Les ententes que nous avons signées avec les provinces les rendent également responsables du contrôle de l'avancement des travaux sur les projets, de l'acheminement de l'argent aux municipalités et aux autres, et de la surveillance de la construction.
Les villes, le troisième volet du partenariat, sont manifestement tenues de gérer les projets, de lancer les appels d'offres, de surveiller la construction au quotidien, de payer les factures et de nous faire parvenir, pour la part qui nous incombe, les demandes de remboursement par l'intermédiaire de la province.
Le sénateur Eggleton : Vous dites que le calendrier ne pose pas de problème, mais le délai est serré pour terminer ces projets. Êtes-vous convaincu que la totalité de ce montant de quatre milliards de dollars sera effectivement versée et aura servi — mais n'aura peut-être pas été payée, puisque vous dites qu'il y a un délai — d'ici l'échéance?
M. Forster : Lorsqu'un promoteur soumet une demande d'aide au financement dans le cadre du programme, il atteste par écrit que le projet peut être terminé d'ici le 31 mars 2011. Nous sommes confiants que nos partenaires municipaux vont effectivement réaliser ces projets d'ici là. Nous avons mis en place ces procédures trimestrielles de rapport et de contrôle. Si nous constatons, avec la province, qu'un projet qui devait démarrer le 15 octobre ne l'a toujours pas fait au 30 novembre, nous pouvons demander ce qui se passe. La question signifie alors : « Faut-il consacrer cet argent à quelque chose d'autre, à un autre projet qui pourra l'utiliser plutôt que de voir ce projet ainsi bloquer les fonds qui lui étaient consacrés? » Nous allons continuer à exercer cette surveillance et à faire tout en notre pouvoir pour nous assurer que la totalité des fonds est dépensée.
Le sénateur Eggleton : L'une des grandes controverses que tout cela soulève est la répartition de l'argent, indépendamment de qui signe réellement le chèque. Toujours en nous fiant au critique de l'opposition en la matière à la Chambre des communes, les circonscriptions conservatrices auraient été avantagées de 34 p. 100 par le gouvernement Harper, à même l'argent des contribuables. Il a également affirmé que la liste des 20 circonscriptions ayant reçu le plus de projets et les budgets les plus importants fait apparaître un parti pris manifeste en faveur des circonscriptions détenues par les conservateurs.
Que pensez-vous de la répartition de ces fonds? Ne sont-ils pas censés être répartis également?
M. Forster : Non, les fonds destinés à stimuler l'économie sont répartis entre les provinces en fonction de leur nombre d'habitants. Toutes obtiennent leur part par habitant. Ensuite la ventilation des fonds est fonction des demandes qui sont soumises, par exemple en Ontario. Dans cette province, nous avons invité les administrations municipales à présenter des demandes le 1er mai. Nous avons reçu 2 700 demandes. Nous les avons étudiées et annoncées un peu plus d'un mois plus tard que 1 200 projets avaient été retenus. Ces projets ont fait l'objet d'études et ont été approuvés. Tout d'abord, ce sont les municipalités elles-mêmes qui présentent des projets, et les conseils municipaux et les maires ont donc dû les étudier tous et les approuver. Ce n'est pas moi qui vais dire à une ville quelconque qu'elle devrait entreprendre des travaux dans cette rue ou sur cet égout. Les projets sont soumis par les administrations municipales. Lorsque vient le temps pour nous de les étudier, nous nous intéressons à des critères importants comme de savoir si ces projets sont réellement prêts à démarrer. Soulèvent-ils des questions d'évaluation environnementale qui pourraient les retarder? Faut-il consulter les peuples autochtones? Le projet peut-il être réellement construit dans un délai de deux ans? Nous avons reçu une demande concernant un projet de traitement des eaux de 150 millions de dollars. C'est un excellent projet qui cadre bien avec Chantiers Canada, dont le délai d'application est plus long, mais pas avec un programme de stimulation sur deux ans.
Les provinces et nous étudions ces projets. En Ontario, le gouvernement provincial a mis sur pied un comité interne composé de représentants de tous les ministères qui analyse ces projets. Tous ces projets font l'objet d'une annonce conjointe avec le gouvernement provincial. Chaque projet en cours de réalisation reçoit des contributions provinciales, municipales et fédérales.
Le sénateur Eggleton : Vous a-t-on soumis plus de projets que vous ne pouvez en financer?
M. Forster : Cela dépend des provinces. C'est exact.
Le sénateur Eggleton : Qui prend la décision? Le ministre?
M. Forster : Le ministre approuve tous les projets, au niveau fédéral et au niveau provincial, et signe le document qui constitue leur approbation officielle.
Vous devez prendre en compte l'ensemble des programmes d'infrastructures. Une trentaine est actuellement en cours d'exécution. Lorsque vous vous penchez, par exemple, sur le volet Grandes infrastructures de Chantiers Canada, comme ces projets se retrouvent plus souvent dans de grandes régions urbaines, l'analyse tend à montrer qu'ils sont plus souvent accordés dans des circonscriptions tenues par l'opposition. Il faut tenir compte des projets réalisés dans le cadre de tous les programmes d'infrastructures pour voir leur répartition plutôt que d'en choisir un sur 30 et de procéder ainsi à l'analyse.
Le sénateur Callbeck : J'ai des questions à vous poser sur les deux milliards de dollars consacrés à l'enseignement postsecondaire. Vous avez indiqué qu'Industrie Canada est impliqué dans ce programme?
M. Forster : Industrie Canada gère ce programme.
Le sénateur Callbeck : Êtes-vous en mesure de répondre à des questions à ce sujet?
M. Forster : Non, je ne suis probablement pas le mieux placé pour le faire. Je peux vous répondre en termes généraux, mais sans aller beaucoup plus loin. Ce programme est doté d'un budget de deux milliards de dollars destinés aux collèges et aux universités et vous devriez vraiment vous adresser à des responsables d'Industrie Canada pour obtenir davantage de renseignements sur ce programme.
Le sénateur Callbeck : Vous ne sauriez pas quels sont les montants engagés et leur répartition par provinces. Il faudra que je demande ces chiffres à Industrie Canada?
M. Forster : Oui, c'est à eux que vous devriez vous adresser.
Le sénateur Callbeck : L'argent est transféré aux provinces, puis aux universités de la province concernée?
M. Forster : Oui. Je crois qu'ils appliquent un modus operandi comparable à celui utilisé pour le fonds de stimulation.
Le sénateur Callbeck : Quel est le pourcentage que la province doit investir?
M. Forster : Vous posez la question au sujet du Programme d'Infrastructures du savoir, le PIS?
Le sénateur Callbeck : Oui, au sujet de ces deux milliards de dollars.
M. Forster : Vous devriez la poser aux responsables d'Industrie Canada. Je ne veux pas vous fournir de renseignements inexacts.
Le sénateur Callbeck : Il est écrit que c'est pour deux ans. Cela signifie-t-il que le projet doit démarrer ou être terminé dans les deux ans?
M. Forster : Une fois encore, je peux vous parler du Fonds de stimulation de l'infrastructure, qui est comparable, mais que nous gérons. Dans le cadre du Fonds de stimulation, les projets doivent être terminés pour l'essentiel d'ici le 31 mars 2011. L'entente précise que, s'ils ne le sont pas, nous ne pouvons partager les coûts que jusqu'à minuit le 31 mars 2011. Nous allons payer un tiers de tous les coûts engendrés jusqu'à cette date. Au-delà, la municipalité ou la province, celle qui procède aux travaux, les terminera à ses frais, avec ses propres fonds.
Le sénateur Callbeck : J'ai une question au sujet des petites collectivités. Je viens d'une petite collectivité et je suis très intéressée par ce fonds. Vous avez précisé que la totalité du budget de ce fonds a été engagée, sauf pour la part du Québec. Je ne sais pas avec certitude quel est le délai qui s'applique. Ce devait être sept ans et le délai a été raccourci. Quel est le délai maintenant?
M. Forster : Pour le programme de départ, le montant de 1,1 milliard de dollars de Chantiers Canada peut encore être dépensé sur sept ans. Nous avons accéléré le processus d'approbation. Nous avions l'intention d'avoir trois cycles de demandes, peut-être au cours de la première année, de la quatrième et de la sixième. Nous avons tout fait en une seule fois. Tous les projets ont été approuvés et peuvent démarrer. Dans le cadre du programme principal, ils peuvent dépenser cet argent jusqu'en 2014.
Les montants complémentaires constituaient une mesure incitative pour amener tout le monde à approuver ce fonds immédiatement. Le montant de 500 millions de dollars est destiné uniquement à des projets de deux ans. Lorsque nous avons étudié les demandes, nous n'avons retenu que les projets qui pouvaient être réalisés. Ce complément de 500 millions de dollars doit être dépensé d'ici le 31 mars 2011.
Le sénateur Callbeck : Les mêmes modalités s'appliquent-elles si un projet n'est pas terminé?
M. Forster : C'est exact. Ils vont poursuivre les travaux et les terminer, mais nous ne pouvons partager les coûts au- delà du 31 mars 2011.
Le sénateur Callbeck : Vous avez indiqué que, lorsque les projets sont approuvés, les travaux peuvent débuter immédiatement. Les demandes de remboursement sont ensuite présentées à la province. Je croyais vous avoir entendu dire que ces demandes sont payées dans les 30 jours. Voulez-vous dire 30 jours après que vous ayez approuvé la facture?
M. Forster : Voici comment les choses se passent. Nous n'avons pas conclu d'entente avec les 3 000 municipalités du Canada. Nous avons conclu une entente avec chaque province parce que les municipalités relèvent des pouvoirs des provinces. Je signe une entente avec le gouvernement de l'Île-du-Prince-Édouard et nous nous entendons sur 30 projets de stimulation qui sont indiqués dans cette entente. Dès que nous faisons connaître les projets qui ont été approuvés, cela signifie que nous avons terminé notre étude et l'évaluation environnementale et, à compter de ce jour, Charlottetown, par exemple, peut débuter les travaux.
La province lance alors ses appels d'offres, retient les entrepreneurs, débute les travaux de construction. Les entrepreneurs absorbent des coûts, dont ils demandent le remboursement à la province. Nous avons un projet de 10 millions de dollars à ce jour et nous avons dépensé trois millions de dollars. Tous les trimestres, la province fait parvenir au gouvernement fédéral une demande de remboursement pour l'ensemble des projets réalisés dans l'Île-du- Prince-Édouard. Elle recueille les demandes des municipalités et nous fait parvenir une seule demande. Disons que, collectivement, 30 millions de dollars ont été dépensés. Nous allons payer le tiers de ce montant dans les 30 jours de la réception de la demande de la province.
Le sénateur Callbeck : Je croyais que vous aviez dit avoir reçu des demandes des provinces concernant les travaux faits cet été, mais que vous n'alliez probablement pas les payer avant février?
M. Forster : J'ai dit que ce scénario est possible. Dans le cadre du Fonds de stimulation de l'infrastructure, et uniquement dans ce cas, nous avons également versé des avances aux gouvernements provinciaux. Nous leur avons transféré 25 p. 100 cette année, dès le début, pour leur permettre d'aller de l'avant et de payer les municipalités plus rapidement, puisqu'elles ont l'argent. Toutes les provinces et tous les territoires ont reçu des avances pour ne pas devoir attendre de nous soumettre une demande. Elles peuvent payer immédiatement les municipalités qui ont entrepris des projets.
Le sénateur Mitchell : J'aimerais connaître la proportion de l'ensemble des mesures de stimulation qui sont comptabilisées dans le Fonds de stimulation de l'infrastructure. Lors d'une réunion récente, on nous a dit que l'ensemble des mesures de stimulation relevant du ministère des Finances représentait environ 29 milliards de dollars. Vous nous dites que vous allez consacrer 7,6 milliards de dollars cette année aux infrastructures. Pouvez-vous nous expliquer cette différence de quelque 21 milliards de dollars?
M. Forster : Je n'en suis pas sûr, à moins que M. Sarantakis sache ce qui est compris dans ces 29 milliards de dollars.
M. Sarantakis : Non, je n'en suis pas certain.
M. Forster : Je peux vous dire que, dans le Plan d'action économique annoncé en janvier, 12 milliards de dollars étaient consacrés aux programmes d'infrastructures à réaliser pour l'essentiel sur une période de deux ans. Sur ce montant, nous sommes responsables d'environ six milliards de dollars. Il y a un montant de quatre milliards de dollars dans le fonds de stimulation, le complément destiné aux petites collectivités, les sentiers récréatifs et le Fonds pour l'infrastructure verte. C'est là que les choses deviennent un peu compliquées. Si toutes les autres dépenses sont étalées sur deux ans, celles faites dans le cadre du Fonds pour l'infrastructure verte le sont sur cinq ans.
Même si nous avons ce programme à court terme, sur deux ans, qui s'applique, l'autre difficulté découlant des mesures annoncées dans le budget, était de prendre notre programme normal à long terme, sur sept ans, et d'en accélérer l'exécution. Nous devions donc faire des efforts dans deux domaines, soit accélérer la mise en œuvre de notre programme actuel afin de soutenir l'économie, tout en engageant en même temps les fonds destinés à la stimulation de l'économie.
Le sénateur Mitchell : Quand il s'agit d'accélération, pourquoi n'avez-vous pas procédé de la même façon avec le Fonds pour l'infrastructure verte? N'est-il pas aussi prioritaire?
M. Forster : C'est une priorité. Il s'agissait là d'un tout nouveau fonds que nous avons donc dû mettre sur pied. Nous avons demandé des lettres d'intérêt aux provinces, aux municipalités et au secteur privé. Nous en avons reçues aux alentours de 150 de personnes qui étaient intéressées. Nous avons déjà pris des engagements représentant environ 20 p. 100 du budget du Fonds pour l'infrastructure verte pour d'importants projets de transmission propre d'hydro- électricité, un au Yukon et l'autre en Colombie-Britannique. Nous étudions maintenant les autres propositions et nous allons nous efforcer d'engager les sommes disponibles dans ce fonds aussi rapidement que possible. Nous disposons d'un peu plus de temps puisque ce programme s'applique sur cinq ans et non pas sur deux.
Le sénateur Mitchell : Va-t-il privilégier les initiatives visant à lutter contre les changements climatiques, comme ces projets de transmission hydro-électriques?
M. Forster : Le fonds peut investir, pour l'essentiel, dans quatre catégories, y compris dans l'énergie verte, comme avec les deux projets que nous avons déjà approuvés. C'est ainsi que la ligne Mayo B au Yukon aidera les collectivités et l'industrie du Yukon à abandonner le diesel au profit de l'hydro-électricité et à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de quelque 40 p. 100 lorsque la construction sera terminée et la ligne en service. L'énergie verte est l'une des catégories.
Le fonds peut également investir dans des infrastructures publiques destinées à capturer et à stocker le dioxyde de carbone. Les deux autres catégories d'investissement possibles sont les eaux usées, comme l'amélioration des égouts et des usines de traitement des eaux usées à travers le Canada et les déchets solides. Nous étudions un certain nombre de propositions intéressantes visant à transformer des déchets solides en énergie propre.
Le sénateur Mitchell : Les projets de capture et de stockage du dioxyde de carbone annoncés récemment sont-ils financés à même ce fonds ou bénéficient-ils d'un financement additionnel?
M. Forster : Non, l'argent provient du Fonds pour l'énergie propre de Ressources naturelles Canada, qui s'est vu accorder un milliard de dollars dont une partie doit être consacrée à la capture et au stockage du dioxyde de carbone.
Le sénateur Mitchell : Savez-vous pourquoi le gouvernement n'a pas consacré davantage d'argent au programme ecoÉNERGIE, qui s'est avéré excellent pour soutenir l'énergie éolienne?
M. Forster : Je suis navré, mais je l'ignore.
Le sénateur Mitchell : Nous entendons maintenant parler de rapports inquiétants faisant état d'une reprise économique, mais sans relance de l'emploi. Cela vous amène-t-il à réfléchir aux types de projets que vous financez, ou êtes-vous passablement convaincu que vos projets d'infrastructure, de tous genres, font réellement appel à une main- d'œuvre importante? Est-ce un critère que vous prenez en compte de façon spécifique lors de l'approbation des projets?
M. Sarantakis : Votre question a deux volets. Le premier est que, comme l'a indiqué M. Forster, la vaste majorité de nos fonds a déjà été engagée. Si nous devions opérer maintenant un tel changement, cela ne toucherait que les derniers 5 ou 6 p. 100 de l'enveloppe de financement.
En second lieu, si leurs projets ont été approuvés précédemment, qu'ils font donc parti de ce bloc de 90 p. 100, ils l'ont été retenus parce qu'ils étaient prêts à démarrer au lieu d'imposer de chercher des tâches précises et de prétendre qu'elles allaient permettre créer 100 ou 110 emplois. L'élément le plus déterminant était de savoir si les projets pourraient démarrer un mois ou six mois plus tard, et il est évident qu'il valait mieux un mois que six mois.
Le sénateur Mitchell : Ma dernière question, qui ne vise pas à vous mettre sur la sellette, mais nous avons vu ces gros chèques portant le logo du Parti conservateur, vise à déterminer si c'est votre ministère qui a payé pour cela?
M. Forster : Non.
Le sénateur Mitchell : Savez-vous qui l'a fait?
M. Forster : Je crois que ce sont les députés au niveau local, mais il faudrait leur demander. Nous n'avons produit aucun de ces chèques.
Le sénateur Ringuette : Je regarde le dernier rapport sur le Plan d'action économique, et plus précisément les pages 68 à 71. Dans ce rapport, quelques programmes ont été mis en évidence dans chaque province. C'est ainsi qu'il y a trois projets d'infrastructures routières en Colombie-Britannique qui sont financés à 50 p. 100 par le fédéral. En est-il de même en Saskatchewan et au Manitoba, sans qu'il en aille de même en Ontario.
L'Ontario n'a reçu que 33 p. 100 des budgets d'amélioration des infrastructures routières. Les améliorations du Port de Sept-Îles, au Québec, sont financées à 50 p. 100 alors celles du port de Belledune, au Nouveau-Brunswick, ne le sont qu'à 33 p. 100. Il ne s'agit là que de quelques exemples.
Pourquoi observe-t-on de tels écarts dans le traitement par des programmes similaires, selon la province?
M. Forster : Dans le cadre d'un projet de route, par exemple, le fait qu'il soit financé par deux ou trois parts égales dépend du propriétaire de la route. S'il s'agit d'une route provinciale, comme de la route Transcanadienne au Nouveau-Brunswick, ou de la route 1 qui va de Saint Stephen à St. John, et cetera, le gouvernement fédéral partage les coûts de ces projets avec la province uniquement. Chacune des parties assume alors la moitié des coûts.
Dans le cas d'un projet de route locale réalisée par une administration municipale, à qui la route appartient, la province, le gouvernement fédéral et la ville assument chacun un tiers des coûts. La ville se fait donc rembourser les deux tiers des coûts assumés par les paliers supérieurs de gouvernement, et paie elle-même un tiers.
Dans le cas des deux projets portuaires dont vous avez parlé, le port de Belledune, au Nouveau-Brunswick, était considéré comme prioritaire par la province du Nouveau-Brunswick. Le total des coûts est donc partagé en trois parties : un tiers pour le port, un tiers pour la province et un tiers pour nous-mêmes.
Dans le cas du projet portuaire situé au Québec, le gouvernement du Québec, bien qu'appuyant le projet, n'avait pas de fonds à y consacrer. Dans ce cas, nous avons partagé directement les coûts avec le port comme bien fédéral, puisqu'il s'agit d'un bien appartenant au gouvernement fédéral. Le port est donc tenu d'investir 50 p. 100 des fonds alors que, au Nouveau-Brunswick, il n'a été tenu responsable que d'un tiers des coûts parce que la province était prête à y participer.
Le sénateur Ringuette : Il peut donc y avoir des écarts dans le financement de projets comparables.
M. Forster : Une fois encore, les modalités peuvent varier. Il ne faut pas oublier que, dans le cadre du programme de stimulation, les fonds accordés à la province sont proportionnels à sa population. Ce n'est donc pas comme si un projet se voyait attribuer plus d'argent pour procéder de cette façon.
Le sénateur Ringuette : Je comprends le principe de la répartition par habitant. Plus une province est peuplée et plus elle obtient de l'argent.
M. Forster : Oui.
Le sénateur Ringuette : Cela revient donc à accroître de façon exponentielle les écarts entre les diverses populations dans des régions différentes du pays.
M. Forster : Cependant, en ce qui concerne les ports, le port de Belledune est un projet plus facile à réaliser pour eux, parce qu'ils n'ont qu'à investir que le tiers des coûts, la province ayant décidé de participer également à ce financement. Au Québec, comme la province n'avait pas d'argent à investir dans ce projet, le port a dû investir la moitié des coûts. La part du gouvernement fédéral ne dépasse jamais les 50 p. 100.
Le sénateur Ringuette : J'aimerais porter une autre question à votre attention qui concerne votre ministère. La vérification de celui-ci faite par la Commission de la fonction publique du Canada. Votre ministère a été retenu à cause du nombre élevé d'emplois occasionnels qui sont convertis en emplois permanents sans qu'aucun des postes n'ait été annoncé.
Je vous cite le rapport du vérificateur.
L'administrateur général n'a pas surveillé certains types de nominations, comme l'exige la CFP.
Infrastructure Canada a utilisé des processus de nomination non annoncés afin de pourvoir plus rapidement à ses besoins en RH. Nous avons constaté que les gestionnaires subdélégués étaient incapables de démontrer en quoi l'utilisation de ce type de processus était conforme au plan de RH du Ministère, aux critères ministériels applicables aux processus de nomination non annoncés ou aux valeurs de nomination énoncées dans la LEFP. Dans certains cas, cette situation a restreint l'accès aux possibilités d'emploi au sein du Ministère.
Sur les 45 nominations qui constituent l'échantillon, seulement 45, combien de personnes embauchées dans votre ministère au cours des trois dernières années étaient de nouveaux employés?
M. Forster : Je n'ai pas le nombre sous la main.
Le sénateur Ringuette : À peu près?
M. Forster : Je ne sais pas. Je peux le trouver et vous le communiquer, mais je ne l'ai pas ici.
Le sénateur Ringuette : Je vous en serai reconnaissante.
Le vérificateur poursuit en disant que sur les 45 nominations étudiées, le respect des critères de mérite pour les nominations était documenté dans 22 cas, même si les postes en question n'avaient pas été annoncés. Aucun de ces postes n'a été annoncé. Cela revient à dire que l'évaluation montre que les personnes nommées respectaient les critères essentiels. Dans 15 cas, les vérificateurs ont constaté que le respect des critères de mérite n'était pas documenté, et que les outils et les méthodes utilisés pour évaluer les qualifications des candidats n'avaient pas permis d'évaluer toutes les exigences des postes.
Pour les huit autres cas, ils ont observé que les critères du mérite n'avaient pas été respectés, car la personne nommée au poste ne satisfaisait pas à une ou plusieurs des qualifications essentielles exigées.
Dans cet exemple réduit au minimum de 45 nominations, 53,3 p. 100 des personnes nommées n'avaient pas les qualifications pour occuper les postes qu'elles ont eus.
Quels commentaires cela vous inspire-t-il?
M. Forster : Le sous-ministre a étudié soigneusement cette vérification et l'a prise très au sérieux. La vérification elle- même a été réalisée entre le 1er janvier 2006 et août 2008, il y a donc plus d'un an. Depuis lors, nous avons instauré un certain nombre de mesures pour nous assurer que nous respectons toutes les obligations que nous impose la Loi sur l'emploi dans la fonction publique en matière de plan de dotation et de ressources humaines. Nous avons restructuré un comité responsable des activités de RH, que je préside maintenant à titre de sous-ministre délégué. Tous les gestionnaires suivent une formation en dotation avant de se voir déléguer leurs pouvoirs en la matière. À la demande de la Commission de la fonction publique, le comité surveille maintenant nos modalités de dotation, et nous sommes en train de mettre en œuvre les autres mesures que nous nous sommes engagés à prendre auprès de la commission à la suite de cette vérification.
Au cours des quatre derniers trimestres, nous avons pris quantité de mesures pour corriger certaines lacunes relevées par cette vérification. Lorsque les vérificateurs ont affirmé que nous n'avions pas été en mesure de prouver que les critères de mérite avaient été respectés, cela tenait souvent, en partie, à des dossiers incomplets. Les gestionnaires ayant embauché n'avaient pas documenté leur processus de prise de décision comme il convient.
Ce sont là les mesures que nous avons prises à la suite de cette vérification, et nous collaborons étroitement avec la Commission de la fonction publique sur ces questions.
Le sénateur Ringuette : Pouvez-vous nous expliquer pourquoi vous aviez un nombre si élevé, même déraisonnable, de nominations non annoncées?
M. Forster : Il se peut, par exemple, que lorsque vous mettez sur pied une équipe, pour gagner du temps, vous cherchiez et trouviez un candidat qualifié travaillant dans un autre ministère. Celui-ci a déjà le niveau exigé. SI c'est un économiste, il est déjà au niveau EC 3, il a l'expérience nécessaire et ses qualifications ont été reconnues dans ce ministère. Vous le faites alors venir dans le cadre d'un détachement, parce qu'il est prêt à venir et à commencer à travailler immédiatement.
Il y a un certain nombre de cas dans lequel vous pouvez choisir ce type de solution, et la loi permet certains recours à des nominations non annoncées. Toutefois, nous avons certainement été trop loin en la matière et nous avons corrigé la situation. Nous la suivons très étroitement et faisons rapport à la Commission de la fonction publique. Nous avons pris beaucoup de mesures au cours des quatre derniers trimestres pour nous assurer de faire les choses comme il convient.
Le sénateur Ringuette : Dans quelle mesure s'agissait-il de favoritisme bureaucratique et politique?
M. Forster : Pour l'embauche de notre personnel?
Le sénateur Ringuette : Oui.
M. Forster : En aucun cas.
Le sénateur Ringuette : Vous venez de nous dire que si quelqu'un connaît une personne dans un autre ministère... ne s'agit-il pas là d'une forme de favoritisme bureaucratique?
M. Forster : Pas du tout. Je ne le crois pas, non.
Le sénateur Ringuette : Et de quoi s'agit-il à votre avis?
M. Forster : Les gens font appel à leurs réseaux pour trouver des personnes qualifiées qui puissent venir travailler pour le ministère. Elles doivent cependant respecter les critères définis pour le poste et être en mesure de faire le travail.
Le sénateur Ringuette : Ce n'est pas ce qu'a dit la vérificatrice générale. Elle a affirmé que 53,3 p. 100 des dossiers de l'échantillon ne respectaient pas les critères.
M. Forster : Elle a estimé que les dossiers, pour l'embauche de ces personnes, ne comportaient pas les documents prouvant qu'elles respectaient les exigences en matière de compétences.
Le sénateur Ringuette : Pour le moins, le curriculum vitae de la personne en question devrait se trouver dans le dossier, ce qui montrerait que cette personne respecte les exigences du poste.
N'esquivons pas ce problème. C'en est un qui est très important.
M. Forster : Tout à fait. Nous partageons pleinement votre point de vue. C'est un problème très important. Comme je vous l'ai dit, nous avons mis en place, avec la CFP, un plan d'action. Nous respectons maintenant toutes ses exigences et nous l'avons fait pendant la dernière année. Nous avons mis en place des modalités très rigoureuses de dotation maintenant que nous avons confiance en la validité de nos processus. Nous faisons rapport sur tous les aspects et nous avons assuré la formation de tous nos gestionnaires. Nous nous sommes dotés d'un plan d'action à la suite de la vérification et nous le mettons en œuvre et le suivons rigoureusement.
Le sénateur Ringuette : Pour les postes non annoncés, combien de noms vous ont été suggérés par du personnel politique?
M. Forster : Je vais vérifier pour vous, mais aucun à ma connaissance.
Le sénateur Ringuette : Faites donc. Pouvez-vous informer ce comité des réponses que vous obtiendrez?
M. Forster : Tout à fait.
Le président : Si vous pouvez adresser l'information au greffier, il la communiquera à tous les membres.
Le sénateur Gerstein : Dans vos remarques préliminaires, vous avez indiqué qu'il s'agit là d'un programme d'infrastructures sans précédent, et vous avez ajouté temporaire, ciblé et opportun. Je ne peux imaginer de tâche plus dantesque que celle à laquelle vous avez été confronté.
J'imagine, pour caractériser le défi auquel vous avez été confronté, que vous avez dû réduire les délais au minimum, veiller à obtenir les approbations en temps opportun, procéder à des examens, des évaluations et mettre en place des mécanismes de contrôle. Par contre, vous ne vouliez pas non plus vous lancer dans la gestion des moindres détails. Je tiens à vous féliciter, vous et vos collègues, pour tout ce que vous avez réalisé au nom des Canadiens, de toutes les régions du pays.
Pourriez-vous nous dire, à peu près, combien il y a d'employés dans votre ministère? Aussi, malgré l'énormité de la tâche qui vous attendait, comment avez-vous réussi à la mener à bien aussi rapidement et aussi efficacement?
M. Forster : Au nom de mes collègues, je vous remercie de l'amabilité de votre commentaire. Plus sérieusement, Infrastructure Canada est une organisation très spéciale. Nous avons fait appel à une soixantaine d'employés additionnels pour gérer les nouveaux programmes annoncés dans le budget. Certains d'entre eux ont été affectés à notre groupe des RH pour exercer un meilleur contrôle et une meilleure mise en œuvre de la dotation; d'autres sont allés dans notre groupe de vérification interne et d'autres dans le secteur dirigé par M. Conrad pour mettre en œuvre le programme de stimulation.
Nous avons une équipe extraordinaire. Ces gens ont travaillé le soir et les fins de semaine pendant neuf mois, ce que je n'avais jamais vu faire auparavant au gouvernement. Ils sont dédiés à leur travail et le considèrent comme important. C'est un programme difficile à mettre en œuvre dans un délai court. En toute franchise, nous essayons de faire quelque chose qui n'a jamais été fait auparavant, et l'organisation s'en tire de façon professionnelle, dévouée et dédiée.
À la fin septembre, nous avions environ 270 employés. N'oubliez pas que nous dépendons énormément des autres partenaires. Lorsque nous étudions et approuvons un projet en Ontario, le gouvernement de cette province étudie et approuve également ce projet. Cela ajoute une couche d'examen et de diligence raisonnable. Les partenaires des administrations municipales ont également un rôle énorme à jouer lorsqu'ils ont reçu l'autorisation de lancer les travaux et de faire exécuter leurs projets aussi rapidement que possible.
Nous collaborons avec les autres ministères. Nous n'avons pas de bureaux régionaux, ce qui nous amène à collaborer étroitement avec les organismes de développement régional qui participent, en notre nom, à la mise œuvre de certains de nos programmes.
Je vous remercie encore de vos commentaires. Je vais les transmettre à notre personnel qui, je le sais, les appréciera à leur juste mesure.
Le sénateur Gerstein : Il y a une dizaine de jours, j'ai trouvé intéressant, mais aussi surprenant, je dois l'avouer, d'entendre le vice-premier ministre de l'Ontario se dire convaincu que l'argent du Fonds de stimulation serait réparti de façon très, très équitable.
Je n'ai pas été tant surpris qu'il utilise l'expression « très équitable », mais bien qu'il insiste sur celle-ci, et je ne fais que le citer. Je suis curieux de savoir si vous partagez son avis?
Le président : Absolument, absolument. J'en suis convaincu.
M. Forster : Avec votre permission, je vais laisser le ministre répondre à cette question.
Le sénateur Gerstein : Merci, monsieur Forster, et je vous félicite à nouveau, vous et vos collègues.
Le sénateur Di Nino : Il se peut que mes collègues ne soient pas d'accord avec mon commentaire non plus, mais les sénateurs Eggleton et Gerstein ont tous deux offert leurs félicitations à Infrastructure Canada. Je pense que le défi qu'on vous a imposé allait au-delà de l'imagination. Je suis époustouflé quand je pense au travail qu'on vous a demandé de faire au nom des Canadiens, surtout quand on sait qu'il s'agit probablement de la crise économique mondiale la plus grave que nous ayons connue depuis des décennies. J'aimerais ajouter mes remerciements au nom de tous les Canadiens. En me fiant à tout ce que nous avons entendu, vos collègues et vous, au gouvernement et dans la fonction publique, avez fait un travail méritoire. Le Canada semble se sortir de cette récession, très grave, probablement mieux que la plupart des autres pays. Je crois qu'il y a lieu de rappeler ici aux Canadiens qu'il y a des gens qui font un excellent travail pour eux.
Les questions que semblent soulever ces projets, dans la mesure où cela concerne Infrastructure Canada, sont de savoir combien ont été approuvés, sont en cours de réalisation, et cetera. Je crois savoir que vous avez dressé la liste sur un site web, mais je n'en suis pas sûr. Pouvez-vous me dire comment les Canadiens peuvent trouver cette information?
Manifestement, il y a des Canadiens qui surveillent ce type d'information. Ce serait une bonne chose de leur dire où ils peuvent trouver l'information, s'ils souhaitent savoir quels sont les projets qu'Infrastructure Canada a approuvés et quels sont ceux qui sont en cours de réalisation.
M. Forster : Bien sûr. Je vous remercie encore une fois de vos aimables commentaires.
Pour être honnête, je ne me souviens pas d'un seul autre programme, et je suis dans la fonction publique depuis plus de 25 ans, qui ait fourni publiquement autant d'information. Nous savons que tout cela soulève beaucoup d'intérêt et que les gens veulent savoir ce qui se passe.
Pour les programmes d'infrastructures précédents, le document consacré au Fonds sur l'infrastructure municipale rurale montre l'information que vous obteniez. Si vous vouliez savoir ce qui se passait par la suite, vous deviez faire des recherches dans tous les communiqués de presse.
Nous savions que le fonds de stimulation allait soulever beaucoup d'intérêt, les gens voulant savoir ce qui se passe et à quel point nous en sommes rendus. C'est pourquoi vous verrez sur notre site web, buildingcanada- chantierscanada.gc.ca, les fonds affectés à chaque programme, le nombre de projets approuvés et le montant du financement approuvé.
Ces pages concernent uniquement l'Ontario. Il y a 86 pages traitant de tous les projets que nous avons approuvés dans le cadre de tous nos programmes. En toute franchise, les Canadiens ne tiennent pas à savoir si l'argent vient de tel ou de tel programme. Ils veulent être en mesure de consulter la page concernant London pour y voir les dépenses approuvées par le gouvernement fédéral dans cette ville. Sur notre site, pour chaque province, vous verrez tous les projets qui ont été approuvés dans le cadre de notre Fonds sur l'infrastructure, avec le nom du projet, le montant d'argent qui y a été attribué et approuvé. Nous nous sommes engagés à être aussi ouverts et transparents que possible. Nous faisons de notre mieux pour fournir autant d'information que nous le pouvons et faire autant de mises à jour que possible de notre site web.
Le sénateur Di Nino : Voulez-vous dire sur le site web d'Infrastructure Canada?
M. Forster : Oui. Il s'appelle buildingcanada-chantierscanada.gc.ca. Vous verrez sur la gauche de la page d'accueil un bouton appelé « L'infrastructure dans ma région ». En appuyant sur ce bouton, vous pouvez accéder à n'importe quelle province et ensuite voir tous les projets, classés par ville et par municipalité, que nous avons approuvés, indépendamment du programme à partir duquel ils sont financés. Cela concerne uniquement l'Ontario. Vous y verrez 86 pages dans lesquelles l'information est classée par ville. À partir de là, vous pourrez constater qu'il y a à North Dundas un important projet d'aqueduc à Winchester, pour lequel la contribution fédérale est de 278 000 $.
Le sénateur Di Nino : Chaque fois que nous abordons ce sujet, certains prétendent que l'argent n'est pas versé assez rapidement. C'est un sujet valide. Vous avez indiqué plus tôt dans votre exposé que vous ne construisez pas et que vous ne gérez pas. Ce n'est peut-être pas votre formulation exacte. Pour être absolument précis, sur un programme de quatre milliards de dollars, des dépenses de 3,8 ou de 3,3 milliards de dollars ont réellement été approuvées?
M. Forster : Ont été engagées, oui.
Le sénateur Di Nino : Pour que cet argent soit versé, vous avez besoin d'une facture de la province disant qu'elle a approuvé le montant des dépenses sur ce projet et qu'elle vous demande l'argent. À ce moment-là, vous lui adressez un chèque ou procédez à un virement dans les 30 jours.
M. Forster : Oui. Dans le cadre du programme de stimulation, comme je vous l'ai indiqué, nous avons versé dès le début des avances à toutes les provinces et à tous les territoires pour leur permettre d'acquitter des factures déjà reçues, s'ils le voulaient. Ainsi, un éventuel retard ne nous est pas imputable.
Le sénateur Di Nino : Il s'agissait d'un montant précis dans chaque cas?
M. Forster : Oui, mais en application de ce programme, comme je vous l'ai dit, dès que nous approuvons un projet, la ville ou la province peut démarrer les travaux. Elle est autorisée à le faire, à négocier des contrats et à les signer, et cetera. Les municipalités présentent ensuite leurs demandes de remboursement à la province, qui les regroupe toutes. L'Ontario va regrouper toutes les factures des 400 municipalités, les assembler et les déposer en ligne sur un site web à notre intention. Nous allons alors les étudier et ce sont les documents que nous utilisons pour procéder au versement de la part qui incombe au gouvernement fédéral. Toutefois, comme je l'ai indiqué, et pour tous nos programmes d'infrastructures, nous remboursons toujours les coûts après les faits. Cela fait partie de notre processus de gestion des risques.
Le sénateur Di Nino : À ce que vous savez, les entrepreneurs ou les constructeurs sont tous payés par les municipalités?
M. Forster : Ils sont payés par les municipalités, oui.
Le sénateur Di Nino : Les provinces demandent ensuite au gouvernement fédéral sa partie des coûts?
M. Forster : Oui. Elles n'ont pas à attendre que le projet soit terminé pour nous soumettre une demande. Elles peuvent le faire tous les trimestres. Si vous agrandissez votre maison et que les fondations ont été coulées, vous pouvez présenter une facture pour cette partie-là des travaux. Le trimestre suivant, vous me remettrez la facture pour la réalisation de la charpente et la construction du toit. Nous payons notre part dans les 30 jours suivant la réception d'une demande en bon ordre.
Le président : Honorables sénateurs, le témoin suivant n'est pas encore arrivé. Nos témoins peuvent-ils rester cinq minutes de plus?
M. Forster : Nous sommes à votre disposition.
Le président : Je vous remercie.
Le sénateur Neufeld : Le sénateur Di Nino a posé la question qui m'intéressait, à savoir à quel endroit les Canadiens peuvent accéder à l'information. La réponse m'a satisfait.
Le président : La parole est maintenant à l'ancien président de ce comité, le sénateur Murray de Pakenham, en Ontario, et également de Cap-Breton.
Le sénateur Murray : Je vous remercie de cette biographie, monsieur le président. Vous n'avez pas précisé que je ne suis pas membre de ce comité et je vous remercie donc de m'accueillir.
M. Forster, nous allons avoir comme témoin dans quelques minutes, le directeur parlementaire du budget. J'ai relevé dans la mise à jour de l'évaluation économique et financière qu'il a publiée hier, ce paragraphe :
Un risque d'augmentation au niveau des perspectives financières à court terme repose dans la capacité du gouvernement de mettre intégralement en œuvre le programme de stimulants, particulièrement les fonds particuliers qu'on a réservés aux projets d'infrastructures impliquant divers paliers de gouvernement. Par le passé, Infrastructure Canada a présenté des montants périmés importants en rapport avec ce type de dépenses planifiées, alors qu'un dollar d'infrastructures sur trois n'a pas été dépensé au cours des deux derniers exercices financiers dont on connaît les données.
Il me paraît inutile d'élaborer. Je voudrais vous demander ce que cela vous inspire.
M. Forster : L'élément le plus important concernant les dépenses d'infrastructure est que, à la différence de nombreux autres programmes gouvernementaux, et c'est là une façon de reconnaître les défis uniques des projets d'infrastructures, lorsque des montants sont périmés, ils ne sont pas perdus. Si nous n'avons pas dépensé l'intégralité du budget de l'an dernier de Chantiers Canada, le ministère des Finances reporte les fonds en question sur les exercices ultérieurs pour que nous puissions en disposer.
Le sénateur Murray : Pour le même programme?
M. Forster : Oui. Si nous avons un projet qui doit, une fois approuvé, aura besoins de versements étalés dans le temps de 10 millions de dollars, de 50 millions de dollars, de 80 millions de dollars et de 10 millions de dollars, parce que c'est souvent ainsi que les choses se passent, nous essayons d'ajuster le montant de nos liquidités au rythme de construction de nos partenaires. Une fois encore, ce n'est pas nous qui construisons. Il peut y avoir de nombreuses raisons pour lesquelles un projet n'avance pas aussi rapidement qu'on l'espérait. Il se peut qu'ils aient eu besoin de plus de temps pour consulter les Autochtones, que les premiers soumissionnaires aient fait des offres trop élevées, qu'il ait fallu atténuer les répercussions de problèmes environnementaux passés inaperçus auparavant, et cetera. Il peut y avoir beaucoup de raisons.
Le sénateur Di Nino : Des grèves.
M. Forster : Oui, des grèves, des élections, la météo — le temps au Canada ne nous est pas toujours favorable. Il y a un certain nombre de raisons pour lesquelles des projets peuvent être retardés. Avec un programme normal du gouvernement, si vous n'avez pas épuisé les fonds, vous les perdez. Dans le domaine des infrastructures, nous avons toujours dit : « Non, nous allons les reporter. » Nous réalisons qu'il s'agit de projets importants et complexes qui prennent du temps à réaliser. M. Conrad allait vous donner l'exemple de la ligne de métro de Spadina à Toronto qui est un projet important auquel nous sommes ravis de participer.
Bryce Conrad, sous-ministre adjoint, Direction générale des opérations des programmes, Infrastructure Canada : Puisque trois des sénateurs présents sont de la région de Toronto, le projet Spadina peut présenter un certain intérêt. C'est le projet le plus important financé par le gouvernement du Canada. Il a été annoncé il y a deux ans par le gouvernement du Canada et il en est encore, pour l'essentiel, à la phase de conception. Les travaux ne vont pas commencer avant la fin de ce mois, mais ils s'en tiennent toujours à l'échéancier prévoyant que les recettes provenant de la vente des billets commenceront à rentrer en 2015. Lorsqu'ils ont présenté pour la première fois leur projet, ils s'attendaient à dépenser presque 15 millions de dollars l'an dernier. En réalité, nous n'avons payé que 1,8 million de dollars l'an dernier. Cela tient à la nature de l'industrie de la construction. Le projet de départ aurait amené des dépenses de 28 millions de dollars cette année, mais ils vont réellement dépenser 38 millions de dollars. Notre système nous permet, comme vous l'a dit M. Forster, de reporter des fonds dans les limites de leur financement, pour avancer ou retarder des versements, mais le montant total reste le même. Nous n'augmentons ni ne diminuons le budget; nous le déplaçons simplement dans le temps pour tenir compte du calendrier de construction.
Le sénateur Murray : Vous ne contestez toutefois pas les statistiques données par le directeur parlementaire du budget, à savoir qu'un dollar sur les trois de dépenses prévues en infrastructures n'a pas été dépensé au cours des deux derniers exercices. Je prends note que, dans une large mesure, c'est parce que ces montants ont été reportés.
M. Forster : Oui.
Le sénateur Murray : Il y a d'autres implications, comme vous le savez. Il se peut que, lorsque le ministre des Finances et ses fonctionnaires seront là, nous puissions les soulever avec lui.
Le président : Nos autres témoins sont arrivés et je vais donc mettre fin à cette partie de notre réunion. Il restait deux personnes sur ma liste pour la seconde série de questions, mais nous n'avons pu nous rendre jusqu'à elles.
M. Sarantakis, M. Forster et M. Conrad, merci infiniment de vos témoignages. Permettez-moi de reprendre les commentaires faits précédemment, si vous voulez bien les transmettre aux gens de votre organisation : nous apprécions énormément le travail acharné que vous faites pour parvenir à réussir à distribuer des fonds dans tout le Canada.
Honorables sénateurs, la seconde partie de notre séance va être plus courte, parce que notre témoin participait aux travaux d'un autre comité de la Chambre des communes. Nous sommes ravis d'accueillir parmi nous le directeur parlementaire du budget, M. Kevin Page, qui a publié hier un nouveau rapport intitulé Mise à jour de l'évaluation économique et financière.
[Français]
M. Page est accompagné de M. Mostafa Askari, directeur parlementaire adjoint du budget, Analyse économique et financière; de M. Sahir Khan, directeur parlementaire adjoint du budget, Analyse des dépenses et des revenus; et de M. Chris Matier, conseiller principal, Analyse économique et financière.
[Traduction]
Monsieur Page, nous vous félicitons pour le travail que vous faites et nous remercions d'être ici aujourd'hui.
Kevin Page, directeur parlementaire du budget, Bibliothèque du Parlement : Merci de nous donner aujourd'hui, à mes collègues et à moi-même, l'occasion de vous entretenir de la situation économique et financière du Canada ainsi que de la surveillance que nous assurons du rapport du troisième trimestre du gouvernement sur la mise en œuvre du budget de 2009.
Je voudrais vous livrer les trois principaux messages suivants. Premièrement, l'économie canadienne semble émerger d'une dure récession. Les perspectives du secteur privé se stabilisent, et ce, même si l'incertitude demeure élevée en raison de la poursuite de la crise financière mondiale qui persiste. Mon bureau indique que, selon les renseignements les plus récents, la reprise émergente est fragile et les risques à court terme pour l'économie continuent d'être à la baisse.
Deuxièmement, la récession mondiale a fait de plus dévier le Canada de sa trajectoire financière. Les données canadiennes sont meilleures que celles de beaucoup d'autres pays, même avec les perspectives les plus optimistes du secteur privé, c'est douteux que la situation financière fédérale soit balancée à moyen terme. Un plan financier assorti de cibles et/ou de règles devrait orienter la stratégie de sortie lorsque l'économie aura définitivement repris son cours.
Troisièmement, avec le degré élevé d'incertitude et la perte de marge de manœuvre financière, les défis et les compromis stratégiques liés aux enjeux cycliques et structurels deviennent plus difficiles. Ce contexte accentue la nécessité de présenter tous les trimestres des rapports transparents sur la surveillance de l'économie et la mise en œuvre du budget.
En ce sens, le gouvernement pourrait peut-être considérer d'inclure dans son prochain rapport de mise en œuvre du budget, celui du quatrième trimestre, l'information relative aux activités, aux dépenses et/ou aux dépenses liées à l'exécution budgétaire en plus des engagements. Le gouvernement pourrait peut-être considérer de présenter aux parlementaires une analyse de l'efficacité qu'ont eue jusqu'ici les dépenses de stimulation de l'économie pour le soutien de la production et des emplois des Canadiens.
[Français]
Je voudrais d'abord parler de la situation et des perspectives économiques et financières. En juillet, à la demande du Comité des finances de la Chambre des communes, j'ai présenté une évaluation complète de la situation et des perspectives économiques et financières. J'ai alors mentionné que les prévisionnistes du secteur privé prévoyaient en général une reprise technique dans la deuxième moitié de cette année, une croissance modeste en 2010 et une croissance plus vigoureuse à moyen terme.
J'ai aussi mentionné, sur la foi de ces prévisions, que le gouvernement aurait un déficit budgétaire accumulé d'environ 156 milliards de dollars au cours de l'exercice actuel et des quatre suivants.
En septembre et au début octobre, le DPB a mis à jour les protections de juillet, et j'aimerais vous présenter nos conclusions.
[Traduction]
La majorité des indicateurs laisse supposer que l'économie canadienne a commencé à se stabiliser durant le troisième trimestre, et ce, après trois trimestres de croissance négative. Ces indicateurs portent sur la confiance des consommateurs et des entreprises, l'emploi, les heures travaillées, le logement et la vente au détail.
Bien que l'économie canadienne ait mieux supporté la récession mondiale que la plupart des économies, les Canadiens ont été durement touchés. Selon les estimations que fait mon Bureau de l'écart de production, le niveau de production réel par rapport à son potentiel, la profondeur de la faiblesse économique au Canada est supérieure à celle de la récession des années 1990 et égale à celle de la récession du début des années 1980.
Le taux de chômage est de 8,4 p. 100 en septembre alors qu'il était de 6,2 p. 100 douze mois plus tôt. En incluant les travailleurs à temps partiel involontaires et les chercheurs découragés, Statistique Canada estime que le taux de chômage serait approximativement trois points de pourcentage plus élevé. La durée moyenne du chômage s'élève à un taux signifiant. Le Canada a perdu 395 000 postes à plein temps depuis octobre 2008.
Même si la présence d'une reprise économique fait l'objet d'un consensus, une incertitude considérable continue de transparaître dans les perspectives. Les prévisionnistes du secteur privé au Canada prévoient une modeste reprise dans la deuxième moitié de l'année, cependant, les prévisionnistes des autres pays (par exemple ceux du FMI et de l'OCDE) sont moins optimistes quant au rythme de la relance et continuent de souligner les risques de détérioration dans leurs perspectives.
Malgré cette incertitude, l'enquête réalisée auprès des prévisionnistes du secteur privé par mon bureau en septembre 2009 montre que les perspectives économiques canadiennes ont peu changé depuis juillet. D'après le sondage du DPB et d'après la moyenne des perspectives du secteur privé, le PIB réel devrait diminuer de 2 p. 100 en 2009 et augmenter de 2,3 p. 100 en 2010. Le PIB nominal — la mesure la plus générale de l'assiette fiscale du gouvernement — devrait diminuer de 4,6 p. 100 en 2009 et augmenter de 4 p. 100 en 2010. Le taux de chômage devrait se situer à 8,4 p. 100 en moyenne en 2009 puis à 8,9 p. 100 en 2010.
[français]
La mise à jour de l'enquête laisse entendre que l'économie canadienne ne retrouvera pas son plein potentiel avant la fin de 2013. Cette situation signifie une perte cumulative de plus de 200 milliards de dollars, c'est-à-dire environ 17 000 $ par ménage canadien en production non réalisée.
Sur la base de l'enquête réalisée auprès du secteur privé en septembre, mon bureau estime que les risques à la baisse sont présents dans la croissance à court terme et les prévisions du marché du travail. Ces risques incluent non seulement la possibilité d'une reprise plus faible aux États-Unis, mais aussi la possibilité d'impacts négatifs en raison de la force du dollar canadien.
[Traduction]
La projection que fait mon bureau est un déficit budgétaire accumulé de 167,4 milliards de dollars pour les cinq ans prochains. En outre, le déficit budgétaire, qui était de 5,8 milliards de dollars en 2008-2009, devrait atteindre son niveau le plus élevé de 54,2 milliards de dollars cette année, puis diminuer à 19 milliards de dollars en 2013-2014. Par conséquent, la dette du gouvernement fédéral devrait augmenter à 631,2 milliards de dollars en 2013-2014 ce qui correspond à 33,8 p. 100 du PIB.
Mon bureau a amélioré certains des outils utilisés pour ses projections financières, notamment la construction de notre propre mesure de production potentielle et du solde structurel du gouvernement. Ses calculs, qui se fondent sur cette nouvelle méthode, continuent d'indiquer que le budget n'est pas structurellement équilibré à moyen terme. Mon bureau estime que le solde structurel, qui était essentiellement équilibré en 2007-2008, se transformerait en déficit structurel de 18,9 milliards de dollars en 2013-2014.
Cela dit, les déficits structurels projetés à moyen terme sont considérablement inférieurs à ceux des années 1980 et du début des années 1990. De plus, ils sont peu élevés par rapport à la taille de l'économie. Cependant, une évaluation plus approfondie de la viabilité de la structure financière actuelle repose sur une perspective à plus long terme où l'on tient compte, en particulier, des défis que pose le vieillissement de la population sur le plan fiscal. Le DPB entreprend une telle analyse et il entend publier une évaluation détaillée de la durabilité des finances du gouvernement au cours des prochains mois.
Comme je l'ai déjà mentionné, mon bureau continue d'estimer que des risques importants se profilent dans les perspectives économiques, et il y a bien sûr un large éventail de résultats possibles. Pour en faire l'illustration, nous avons simulé les implications financières des différentes prévisions économiques du secteur privé dans notre enquête de septembre.
En 2013-2014, le solde budgétaire projeté affiche un déficit situé entre 7 milliards et environ 34 milliards. C'est donc dire que, même avec les prévisions les plus optimistes du secteur privé, le déficit budgétaire ne sera vraisemblablement pas éliminé sans mesures gouvernementales.
[Français]
De plus, une incertitude considérable subsiste en ce qui concerne les taux d'imposition réels et les bases des revenus futurs. En effet, il existe un risque que les taux d'imposition réelle sur le revenu des particuliers reviennent à la normale plus lentement que ce que suggère notre hypothèse.
Également, les recettes provenant de l'impôt sur le revenu des sociétés sont assorties d'un degré élevé d'incertitude en raison de la capacité des entreprises de reporter leurs pertes sur un exercice antérieur et ultérieur. Aussi, la possibilité d'une quantité importante de crédit d'infrastructure périmé présente le risque d'avoir un déficit budgétaire moins important qu'anticipé à court terme. Par exemple, le tiers des sommes allouées aux infrastructures n'a pas été dépensé dans les deux derniers exercices pour lesquels les données sont disponibles.
À partir de ces considérations, nous continuons de croire que le niveau général de risque relatif aux perspectives financières à moyen terme continue de jouer contre nous.
Les niveaux élevés d'incertitude et de risque soulignent l'importance d'un plan d'action budgétaire avec des objectifs clairs concernant l'équilibre budgétaire et la dette. Dans le même ordre d'idée, les rapports trimestriels qui mettent en évidence les activités, les dépenses et/ou les dépenses liées à l'exécution budgétaire, en plus des engagements, aideront à comprendre la nature et la portée de l'impact des mesures budgétaires de relance sur la reprise économique.
Je vous remercie de m'avoir donné la chance de m'entretenir avec vous. Je serai heureux de répondre à vos questions.
[Traduction]
Le président : La semaine dernière, nous avons reçu des témoins du ministère des Finances Canada. Ils ont discuté avec nous de l'évaluation des diverses projections réalisées par le secteur privé et du regroupement de cette information. Le sénateur Di Nino leur a demandé comment ils analysent ces prévisions du secteur privé. Ils lui ont répondu que, pour l'essentiel, les prévisions du secteur privé qu'ils recueillent sont celles qu'ils utilisent.
Vous indiquez ici que le directeur parlementaire du budget a amélioré certains des outils utilisés dans les projections budgétaires. Vous avez également fait état plusieurs fois dans votre exposé des prévisions du secteur privé.
Faites-vous vos propres prévisions ou utilisez-vous les mêmes que le ministère des Finances, dont je viens de rappeler l'origine?
M. Page : Nous suivons une procédure similaire à celle utilisée par le ministère des Finances. Nous prenons les moyennes des prévisions du secteur privé pour les variables les plus importantes. À partir de celles-ci, nous simulons l'évolution de la situation budgétaire ou l'évolution des perspectives budgétaires découlant de ces prévisions du secteur privé. Nous analysons les travaux de 12 prévisionnistes, alors que le nombre retenu par le ministère des Finances est un peu plus élevé, aux alentours de 18.
Le président : Votre exposé cadre donc avec ce qu'on nous a expliqué la semaine dernière.
Le sénateur Mitchell : Comme le président, je tiens à vous remercier de tout le travail que vous faites. Lorsque nous avons adopté ce projet de loi, la fonction de directeur parlementaire du budget correspondait à un modèle théorique et il me semble que si ce bureau doit bien fonctionner, il doit s'y prendre de la façon dont vous le faites. Il fait dans une certaine mesure pendant au ministère des Finances, qui est un excellent ministère avec des gens très compétents, mais qui n'est pas totalement ouvert, et qui de toute façon ne peut pas l'être. Je vous en remercie.
J'aimerais approfondir la notion de déficit structurel et tenter de faire le lien entre elle et le déficit et l'ensemble des mesures de stimulation. Au moins en théorie, et peut-être aussi en pratique, l'ensemble des mesures de stimulation constitue de nouvelles dépenses ponctuelles.
Sur les 56 milliards de déficit de cette année, combien sont imputables à cet ensemble de mesures de stimulation? J'ai des raisons de penser que c'est environ 29 milliards de dollars, mais c'est très approximatif, parce que ce chiffre peut englober certaines réductions d'impôt qui, de par leur nature, ne sont pas vraiment des dépenses.
M. Page : Ce sont des chiffres approximatifs. Le budget de l'ensemble des mesures fédérales de stimulation est de 47 milliards de dollars sur deux ans. Cela signifie des déboursés sous forme de diminution de recettes et de hausses des dépenses d'environ 29 milliards de dollars au cours de la première année.
Le sénateur Mitchell : Les 27 milliards de dollars restants de déficit ne constitueraient donc pas en totalité un déficit structurel, puisqu'une partie de ce montant sera recouvré du fait de la croissance?
M. Page : Non. Nous considérons l'ensemble des mesures fédérales de stimulation comme des mesures budgétaires discrétionnaires et temporaires qui ne contribuent pas au problème structurel. Pour l'essentiel, ces mesures prennent fin au bout de deux ans, soit en mars 2011.
Dans l'ensemble, si vous examinez les projections de déficit d'environ 55 milliards de dollars pour 2009-2010, environ 29 milliards de dollars sont imputables aux mesures de stimulation et le reste s'explique pour l'essentiel par une diminution des recettes due au ralentissement de l'économie ou par des dépenses plus élevées dues à un taux de chômage plus élevé.
Le sénateur Mitchell : Cependant, en passant de 29 à 56 milliards de dollars, la hausse est de 27 milliards. Ce montant ne relève pas dans sa totalité d'un déficit structurel?
M. Page : Non. Pour l'essentiel, la situation qui prévaut en 2009-2010 est de nature cyclique. Dans nos calculs du solde budgétaire structurel, nous disons qu'il va croître modérément à moyen terme, pour augmenter à environ 19 milliards de dollars en 2013. Cela représente environ un point de pourcentage du PIB, soit un nombre relativement faible par comparaison aux déficits structurels que nous avions au début des années 1980 et 1990.
Le sénateur Mitchell : Vous avez rappelé que notre taux de chômage est de 8,4 p. 100. Si vous ajoutiez les gens qui viennent d'abandonner la recherche d'emploi, il serait de 11,4 p. 100. Vous dites qu'il a été en moyenne de 8,4 p. 100 cette année et qu'il devrait grimper aux alentours de 8,9 p. 100 l'an prochain. Cela signifie-t-il que nous assistons à une reprise économique sans création d'emplois? Pourriez-vous nous dire ce que vous inspire dans les grandes lignes le problème d'une reprise économique sans création d'emplois, sa gravité éventuelle et s'il s'agit bien d'un problème réel?
M. Page : C'est un problème bien réel puisque nous avons observé une hausse importante du taux de chômage, qui est passé de 6,2 p. 100 un an auparavant à 8,4 p. 100 en septembre. Ces chiffres traduisent une diminution d'emploi de 2 p. 100 cent en moyenne. Cela touche à la fois les secteurs des biens et des services. Si vous analysez les diminutions d'emploi dans le secteur des biens, elles atteignent environ 8 p. 100 en procédant à des comparaisons d'une année sur l'autre. Le secteur des biens a donc été très fortement touché.
Depuis mars, nous observons une certaine stabilité sur le marché du travail. Nous continuons à enregistrer des pertes d'emploi dans le secteur privé, un peu plus de 100 000 depuis mars. Toutefois, ces pertes ont été compensées, pour l'essentiel, par les hausses enregistrées dans le secteur public et chez les travailleurs autonomes.
Vous pouvez constater sur l'un de nos graphiques que le nombre net d'emplois se stabilise. La poussée à la hausse du taux de chômage est intégrée aux prévisions du secteur privé pour 2009-2010. Nous allons assister à des hausses modérées de l'emploi au cours du prochain trimestre. Elles seront compensées par certaines hausses de la population active et du taux de chômage.
Les prévisions du secteur privé tiennent compte de façon implicite d'une croissance très modeste de l'emploi en 2009- 2010.
Le sénateur Mitchell : Les gens du ministère des Finances ont laissé entendre que les réductions d'impôt faisaient partie de l'ensemble des mesures de stimulation. Ils ne tiennent pas compte des diminutions de la TPS. Est-ce bien le cas? Pouvez-vous nous préciser de quelles réductions d'impôt ils parlent?
M. Page : On estime à près de trois milliards de dollars les réductions d'impôt sur le revenu des particuliers en 2009. Ce montant ne tient pas compte des diminutions de la TPS. En vérité, j'aurais besoin d'une minute ou deux pour vous indiquer précisément les mesures dont il s'agit. Je pourrais vous les préciser plus tard.
Le sénateur Eggleton : Tout d'abord, je tiens à vous féliciter pour ce rapport et tout le travail que vous faites, et à féliciter le gouvernement pour avoir eu l'idée de ce Bureau du directeur parlementaire du budget. J'espère qu'il ne va pas vous priver des ressources dont vous avez besoin au point de vous rendre inopérants.
Je suis d'avis que la vérification que cela insère dans le système est très précieuse. Les gouvernements, de toutes tendances politiques, peuvent déformer ou exagérer les chiffres, ou se montrer sélectifs. Il y a quantité de chiffres qui permettent de faire des sélections. Toutefois, nous avons ici une vérification du système et j'apprécie le travail que vous faites.
Permettez-moi maintenant de passer aux questions.
M. Page : C'était la partie agréable.
Le sénateur Eggleton : Les questions ne vont pas vous poser de problème non plus.
Je perçois un certain optimisme concernant les perspectives d'avenir de l'emploi. Vous dites que l'économie commence à se stabiliser et vous avez utilisé l'emploi comme l'un des indicateurs. Vous nous avez parlé de la confiance des consommateurs et des entreprises, qui se répercute peut-être sur le nombre d'heures travaillées, et cetera, et du logement. En ce qui concerne l'emploi, je me pose des questions. Vous nous avez dit qu'avec quantité d'emplois perdus, les gens ont pris des emplois à temps partiel sans que cela corresponde à leur souhait, ou ils ont abandonné la recherche d'emploi. Il y a également peut-être beaucoup de gens qui sont allés dans la fonction publique.
Je me demande si nous n'allons pas assister à un glissement plus marqué dans ce domaine. Alors que le secteur privé se réorganise, et nous voyons beaucoup de cas de ce type, j'ai l'impression qu'il y a encore beaucoup de mises à pied à venir. Je ne suis pas sûr que le secteur public ait les moyens de récupérer ces gens.
Pensez-vous vraiment que nous avons franchi une étape critique? Allons-nous voir les chiffres de licenciement diminuer à partir de maintenant
M. Page : J'espère que la situation s'est stabilisée. Il ne fait aucun doute que nous avons vu le marché du travail se stabiliser depuis le mois de mars. Nous avons vu la hausse de l'emploi dans le secteur public et l'augmentation du nombre de travailleurs autonomes compenser les pertes d'emploi dans le secteur privé.
Je ne veux pas donner l'impression d'interpréter de façon trop optimiste ce que nous avons vécu au Canada jusqu'à maintenant. Les diminutions de production et les pertes d'emploi dans le secteur manufacturier ont été massives. Dans la mesure où les emplois perdus seront récupérés, ils le seront lentement. Effectivement, aucune des prévisions du secteur privé ne table sur un retour au taux de chômage que nous avions il y a un an avant le moyen terme.
C'est une récession dure. Quand vous examinez la production réelle en regard de la capacité de production, elle est aussi dure que celle que nous avons vécue au début des années 1990.
Nous voyons les risques. Nous sommes encore dans la phase de ralentissement, aussi bien en ce qui concerne la production que l'emploi. J'ai grandi dans une petite ville, à Thunder Bay, en Ontario. Mon père travaillait dans l'industrie de la forêt. Vous voyez d'abord apparaître les pertes d'emploi dans le secteur des biens, puis éventuellement dans celui des services. Il y a un décalage dans le temps. Nous n'avons pas encore vu ce phénomène. L'emploi dans le secteur des services est encore relativement stable.
Il reste des possibilités que ces chiffres se dégradent. Nous ne devons pas l'oublier et nous devons exercer une surveillance économique de trimestre en trimestre.
Le sénateur Eggleton : Il s'agit là d'un déficit structurel par opposition à un déficit cyclique. Il va atteindre 54 milliards de dollars, ou à peu près, cette année, mais vous nous avez dit que d'ici 2013-2014, il sera ramené à 18,9 milliards de dollars, ce qui correspond au déficit structurel par opposition au déficit cyclique.
Quand pensez-vous que le gouvernement devrait commencer à prendre des mesures pour réduire le déficit structurel en question? Il a la possibilité de réduire les programmes offerts et d'augmenter les impôts, mais je ne sais pas dans quelle mesure il serait sage de laisser les choses telles quelles pendant trop longtemps avant de s'y attaquer.
M. Page : Nous serons ravis de revenir vous voir entre maintenant et la date de présentation du prochain budget avec nos projections à long terme qui vous permettront de voir quelles seront les répercussions du vieillissement de la population sur la situation budgétaire au cours des 50 ans à venir.
Il s'agit de savoir si un déficit structurel, même un petit, comme 19 milliards de dollars qui représentent 1 p. 100 du PIB, est supportable ou non à long terme. Quand vous vous penchez sur les coûts du service de la dette et les comparez avec ceux que nous avons vus pendant les années 1980 et 1990, ils sont beaucoup plus faibles. Au cours de la pire période, nous payions 35 cents sur chaque dollar de recettes en frais d'intérêt non productifs. C'était il y a un peu plus de 10 ans, et nous sommes maintenant descendus à 15 cents.
Avec des taux d'intérêt faibles et la reprise de la croissance du PIB, un petit déficit est encore gérable. Toutefois, lorsque vous examinez les caractéristiques démographiques à plus long terme et constatez que le vieillissement de la population va entraîner une hausse du déficit structurel, ce qui ramènera à un niveau inférieur la croissance de l'offre qui, à son tour, entraînera des dépenses de santé et des versements de prestations de sécurité de la vieillesse plus élevés. Vous devrez alors choisir entre vous attaquer dès le début au remboursement de la dette, le reporter à plus tard ou financer le déficit. Je crois, monsieur le sénateur, que si vous décidez de financer le déficit, nous reviendrons à la situation dans laquelle nous étions au début des années 1990, avec un rapport dette-PIB au Canada, aussi bien au niveau des provinces qu'à celui du fédéral, plus proche de 100 p. 100.
Le sénateur Eggleton : C'est un bon commentaire. Je vais attendre vos prochains rapports, en particulier en ce qui concerne le vieillissement de la population et les coûts qu'elle implique.
Nous venons tout juste d'entendre des témoins d'Infrastructure Canada et nous avons relevé que le troisième rapport du gouvernement indiquait qu'environ 90 p. 100 du budget des plans d'action économiques avait été engagé. Je les ai interrogés précisément sur les fonds de stimulation des infrastructures et il semble que le pourcentage soit un peu plus faible, mais proche. Toutefois, je leur ai également posé des questions concernant les déboursés et nous n'avons pas obtenu de réponse très précise dans ce domaine. En vérité, le critique en la matière à la Chambre des communes a déclaré qu'il ne fallait pas s'attarder aux 90 p. 100 engagés, car seulement 12 p. 100 de ces fonds avaient été versés, au moins à la fin d'août.
Êtes-vous préoccupé par le fait que nous n'obtenions pas l'information alors que nous devrions pouvoir savoir si les dépenses engagées sur le terrain permettent effectivement de créer des emplois pendant cette récession?
M. Page : Nous discutons actuellement avec les sous-ministres de Transports Canada et d'Infrastructure Canada de l'échange d'information, afin de pouvoir nous procurer celle-ci, non seulement sur les engagements, mais aussi, comme vous l'avez dit, sur les déboursés, les sorties de fonds ou les dépenses.
Cela nous paraît important. C'est la distinction entre les rapports que nous préparons au Canada et ceux qui sont produits aux États-Unis. Eux font rapport sur les décaissements.
Nous poursuivons les discussions et espérons obtenir cette information sous peu. Nous sommes d'avis que ce serait bien si le gouvernement, dans son prochain rapport trimestriel, qui est un outil précieux en matière de transparence et de budget, tout comme le DPB, fournissait de l'information sur les décaissements afin que nous puissions commencer à évaluer les répercussions sur la production et sur l'emploi.
Le sénateur Callbeck : Dans le rapport que vous avez publié le 2 novembre, qui est consacré au solde budgétaire pour 2013-2014, vous êtes parti d'une projection du rapport précédent qui était de 16,7 à une projection de 19 p. 100 en quatre mois. Quels sont les éléments qui ont justifié que vous gonfliez cette projection?
M. Page : Effectivement, nous disons aujourd'hui, en comparant nos projections de juillet à celle du rapport du 2 novembre, qu'il n'y a pas grande différence. En utilisant le PIB nominal, notre économie totalise 1,5 billion, et elle a augmenté à presque deux billions sur une période de cinq ans. Cela donne des changements infimes par rapport au solde budgétaire d'il y a cinq ans. Nous ne considérons, en aucun cas, cette variation significative.
Le sénateur Callbeck : Toutefois, ces chiffres continuent à augmenter. Je me demande s'il y a des éléments particuliers qui vous ont amenés à réviser cette prévision à la hausse.
M. Page : Il y a des risques à court terme qui ont également des répercussions sur le long terme. Comme nous l'avons mis en évidence pour notre économie, certains risques sont liés à l'économie américaine et d'autres à la force du dollar. De plus, dans notre rapport de juillet, à propos de la reprise, nous avons indiqué franchement que nous verrions comment elle se traduirait dans le recouvrement de l'impôt sur le revenu des particuliers et de l'impôt sur le revenu des sociétés.
Nos chiffres sont relativement favorables. Alors que nous continuons à travailler sur ces questions et à recueillir des renseignements mis à jour, il appert que les résultats du troisième trimestre ne sont pas aussi bons que ceux auxquels de nombreuses personnes s'attendaient. Les choses progressent lentement. Les frais d'intérêt sur la dette sont également plus importants parce que les projections sont plus élevées.
Le sénateur Callbeck : Je ne sais pas si cela figure dans ce rapport, mais vous avez parlé de l'efficacité du cadre de rapport sur les mesures de stimulation américaine. Quelle information fournit-il que les Canadiens n'obtiennent pas?
M. Page : Lorsque nous avons étudié les modalités de rapport, en remontant jusqu'au printemps, nous avons constaté que la Loi d'exécution du budget, impose de faire rapport tous les trimestres. Nous avons demandé à 15 pays membres de l'OCDE comment ils procèdent et nous avons obtenu 11 réponses. Depuis lors, nous avons suivi ce qui s'est passé non seulement aux États-Unis mais aussi dans les autres pays. En ce qui concerne les mesures de stimulation, l'OCDE est probablement l'organisme qui fournit le pus de détails. En application de principes essentiels, nous avons estimé en ce qui concerne le Canada que les parlementaires canadiens, les sénateurs et les députés, devraient obtenir la même qualité de rapport que dans d'autres pays et que nos modalités de rapport devraient être conformes aux politiques du Conseil du Trésor. Nous ne devrions pas demander à des ministères, comme le ministère des Transports ou d'autres, de fournir des renseignements auxquels ils n'ont pas réellement accès.
En prenant cela comme base, nous avons constaté l'écart important entre l'information qu'obtiennent les parlementaires canadiens en regard de leurs collègues américains. Nous avons commencé à voir des renseignements sur les déboursés, qu'il s'agisse de déboursés réels en espèces ou de dépenses en termes de comptabilité d'exercice, et ils ont commencé à faire rapport sur celle-ci.
Ils ont démarré leur exercice budgétaire pratiquement en même temps que nous, et au troisième trimestre, ils avaient un ensemble de mesures de stimulation approchant les 800 milliards de dollars. Ils font maintenant rapport sur les déboursés. Ils disent au sujet de ces 800 milliards de dollars qu'ils ont versé réellement environ 150 milliards de dollars. Nous ne disposons pas encore de cette information, mais il se peut que nous l'obtenions au quatrième trimestre.
Le sénateur Callbeck : Les derniers témoins nous ont parlé d'un site web dont l'adresse et www.buildingcanada- chantierscanada.gc.ca. Je suis originaire de l'Île-du-Prince-Édouard et je ne suis pas parvenue à trouver sur ce site web de renseignements sur tous les programmes d'infrastructures en cours d'exécution dans l'Île-du-Prince-Édouard. Que dites-vous de cela? Manifestement, ce site web ne vous paraît pas adapté puisqu'il ne donne pas les déboursés.
M. Page : C'est un site qui apporte une très importante valeur ajoutée. J'aime faire de la bicyclette et j'ai vérifié si des modifications seront apportées aux sentiers récréatifs et aux systèmes de transport public de ma région sur ce site web. C'est un site web impressionnant. Il donne de façon transparente des informations que nous n'avions pas par les années antérieures. C'est une bonne chose.
Si nous voulons réduire l'écart entre les modalités de rapport sur une base budgétaire entre le Canada et les États- Unis, les États-Unis servant ici de modèle, nous devons alors commencer à recueillir ces déboursés et ces dépenses.
Le sénateur Ringuette : J'aimerais aborder l'entente touchant le secteur de l'automobile. Nous avons entendu dire qu'elle coûte 12 milliards de dollars. J'aimerais savoir si c'est vrai. Ces coûts sont-ils partagés? Que comportent ces 12 milliards de dollars? Avez-vous obtenu une copie de cette entente? Nous voulons l'examiner.
Ensuite, on nous a dit que cette entente implique des prises de participation et je ne comprends pas pourquoi nous éliminons ces actions du bilan. Pouvez-vous nous fournir plus d'information sur tous les montants impliqués dans cette entente?
M. Page : Oui. Je vais commencer à vous répondre puis donner la parole à M. Khan, notre directeur parlementaire adjoint du budget, Analyse des dépenses et des revenus.
Vous nous avez demandé auparavant, je crois que c'était en janvier dernier, d'étudier les feuilles de modalités des prêts canadiens et américains consentis au secteur de l'automobile. Nous nous sommes alors procuré l'information sur les détails des prêts consentis aux secteurs américain et canadien de l'automobile et M. Khan peut répondre à cela.
Maintenant, dans le budget, nous avons un total d'environ 10 milliards de dollars destinés à des mesures d'aide à diverses industries, dont la plus grande partie concerne le secteur de l'automobile et les prêts qui lui sont consentis. Je vais demander à M. Khan de vous expliquer brièvement ce que cela laisse entendre et pourquoi nous avons radié ces montants.
Le sénateur Ringuette : Je sais ce qu'il en est des prêts au secteur de l'automobile. Nous avons entendu la semaine dernière des témoins qui nous en ont parlé.
Ce que je veux savoir est ce qui concerne cette entente avec GM et Chrysler. Je crois qu'il s'agit de 12 milliards de dollars. Il se peut que je me trompe, mais je crois que c'est le chiffre qui a été mentionné.
Sahir Khan, directeur parlementaire adjoint du budget, Analyse des dépenses et des revenus, Bibliothèque du Parlement : Nous allons devoir étudier cette question et vous revenir sur ces points précis. C'est ce que nous allons faire et nous vous transmettrons une copie de notre note d'information qui analyse les répercussions budgétaires de ces transactions. Nous tentons dans ce document de décomposer ces transactions.
Le sénateur Ringuette : Disposez-vous de l'information sur la convention de prêt?
M. Khan : Oui, à propos du projet de renflouement du secteur de l'automobile.
Le sénateur Ringuette : La meilleure solution serait que vous en remettiez une copie au greffier afin que tous les membres du comité puissent bénéficier de cette information.
Nous nous attendons à un déficit important. Quels sont les choix qui s'offrent au gouvernement actuel et à ses successeurs en ce qui concerne ce déficit? Faut-il procéder à une vente de feu de biens de l'État comme EACL, Postes Canada et la SRC? Quelles sont les solutions qui s'offrent à eux pour équilibrer ce budget et commencer à rembourser la dette?
M. Page : Je vais vous faire part de quelques commentaires sur l'importance du problème budgétaire auquel nous sommes confrontés aujourd'hui et peut-être répondre à votre question sur les diverses solutions, et sur le rôle du directeur parlementaire du budget dans ce contexte.
Il ne fait aucun doute qu'après avoir consacré plus de 100 milliards de dollars en valeur absolue au remboursement de la dette depuis 1996-1997, que nous commençons à générer à nouveau des déficits. Nous avions probablement un déficit d'environ six milliards de dollars en 2008-2009 et il devrait se situer aux alentours de 55 milliards de dollars in 2009-2010. C'est un montant important. Sa valeur absolue en dollar est une très mauvaise surprise après les progrès extraordinaires que le Canada a faits pour réduire son déficit et sa dette.
Il est probablement important de rappeler aussi que, même à 56 milliards de dollars, il s'agit encore d'un déficit relativement modeste en regard de la taille de notre économie. Par rapport à d'autres pays, comme les États-Unis, le déficit du Canada est d'environ 3,6 p. 100, alors qu'aux États-Unis, il se situe entre 12 et 14 p. 100 et sensiblement au même niveau au Royaume-Uni. Nous précisons également qu'il s'agit essentiellement d'un déficit cyclique en tenant compte de la situation que nous avons constatée pour 2009-2010.
En nous projetant plus loin dans le temps, étant donné la faiblesse de l'économie et la récession importante qui nous frappe, nous obtenons cet écart de production. Le niveau de production réelle par rapport à la capacité de production, qui représente la tendance, nous donne un taux de chômage supérieur à 6 p. 100 et une utilisation plus ou moins partielle des capitaux. Il y a donc un écart important qui est d'environ cinq points de pourcentage. Il va se réduire et revenir à son plein potentiel en 2013, si on se fie aux prévisions du secteur privé. Lorsque cet écart diminue, nous nous retrouvons avec un petit déficit d'environ 20 milliards de dollars, cela à une époque à laquelle l'économie représentera environ deux billions de dollars. Voilà le petit déficit structurel qui nous reste. Si vous faites la comparaison avec les expériences malheureuses que nous avons connues quand j'étais au ministère des Finances, au début des années 1980 et pendant les années 1990, et que vous tenez compte de ce que nous ont coûté les frais d'intérêt sur la dette, et la capacité à assurer le service de celle-ci, des répercussions que cela a eues sur l'économie, nous ne sommes pas encore dans une situation comparable. Y a-t-il des risques de détérioration? Oui. C'était le volet contextuel de la réponse à votre question.
Quelles sont les solutions? Je crois que notre économie est aujourd'hui très fragile. Les gens se sont penchés sur le troisième trimestre et j'ai eu aujourd'hui de nombreuses discussions au Comité des finances de la Chambre sur la façon dont les choses vont se passer pendant celui-ci. Le résultat sera-t-il positif ou négatif? Y a-t-il beaucoup de risques de détérioration aux États-Unis, au-delà de certaines de ces projections?
Une réponse serait probablement prématurée dans ce contexte. J'en dis peut-être un peu trop comme directeur parlementaire du budget. Vous ne voulez pas prendre de mesures trop rapidement quand la reprise est encore si fragile et qu'il y a un risque de détérioration du domaine de l'emploi. Une fois les quelques années à venir passées et que l'écart dont nous parlons aura mené réellement à une reprise durable, vous pouvez alors vous attaquer aux questions à plus long terme. C'est pourquoi il est important que nous vous présentions ces projections à plus long terme. Quelles sont les répercussions du vieillissement de la population?
Nous disons que nous aurons un petit déficit structurel en 2014, mais si vous vous projetez au-delà, que deviendra-t- il? Quel sera son montant? Les députés et les sénateurs pourront alors débattre des compromis possibles entre un remboursement plus rapide de la dette en tenant compte de la transmission de nos biens d'une génération à l'autre, ou devons-nous investir davantage en productivité? Aurons-nous besoin d'une plus grande marge de manœuvre pour réorganiser l'économie canadienne? Aurons-nous besoin de plus d'investissements pour lutter contre les changements climatiques ou pour d'autres choses? Nous vous présenterons cette information et je suis convaincu que cela donnera lieu à un débat très riche. C'est à vous, mesdames et messieurs, qu'il incombera de lancer ce riche débat sur les choix de politique. Je vais vous dresser un portrait de la situation économique et budgétaire.
Le sénateur Gerstein : La semaine dernière, M. Rogers a fait un excellent exposé très complet sur la récession mondiale actuelle devant le Comité des banques. À la fin de celui-ci, je me suis permis de lui poser une question plutôt personnelle en lui demandant ce qui l'empêche de dormir. Il m'a répondu que c'est le vieillissement de la population. C'est ce qu'il perçoit comme le problème majeur, avec ses répercussions auquel nous allons être confrontés.
J'ai relevé avec intérêt que, dans le rapport que vous avez publié hier, vous précisez que vous allez préparer un rapport détaillé sur ce que ces tendances signifient pour le Canada. Pourriez-vous me fournir quelques indications des principaux sujets que votre rapport devrait aborder, de votre calendrier, et nous dire si, à votre avis, ce sont là des questions auxquelles les parlementaires et les comités devraient consacrer davantage de temps?
M. Page : Je vais laisser M. Askari, notre directeur parlementaire adjoint du budget, responsable des questions économiques et financières, répondre à cette question. Je ne vais pas commencer en vous disant ce qui m'empêche de dormir, parce que vous devriez alors faire venir mon thérapeute.
Toutefois, quant à la nécessité de faire cette étude, nous estimons qu'il incombe au Bureau du directeur parlementaire du budget de vous présenter ce contexte économique et budgétaire. Vous ne pouvez pas réellement étudier les questions de durabilité et de nature structurelle, même celles de moindre importance qui seront ou pourraient toujours être présentes en 2013-2014, sans disposer de projections à plus long terme.
Je me contenterai de dire que nous avons de la chance qu'une équipe de gens aient déjà fait ce travail par le passé. M. Askari était directeur général de la recherche à Santé Canada, et il a également préparé des prévisions au ministère des Finances. Nous sommes bien placés pour étudier ces questions à plus long terme.
Mostafa Askari, directeur parlementaire adjoint du budget, Analyse économique et financière, Bibliothèque du Parlement : Nous avons l'intention d'étudier à la fois les répercussions économiques et budgétaires du vieillissement de la population. Au cours de l'été, nous avons préparé certains outils de prévision à long terme, et nous allons les utiliser pour nous pencher sur l'avenir et voir quelle pourrait être la croissance de l'économie au cours des 50 ans à venir, puisque la population vieillit et que la population active sera nettement plus faible à cause de ce vieillissement. Cela nous permettra d'étudier les conséquences budgétaires du vieillissement de la population, comme le ralentissement de la croissance et l'abaissement du niveau de vie au Canada.
Pour le volet budgétaire, il y a bien évidemment le problème de la diminution éventuelle des recettes du gouvernement imputable à une croissance plus faible. Il y a également des causes de dépenses gouvernementales qui sont directement liées au vieillissement, en particulier les coûts des soins de la santé et les prestations aux personnes âgées comme celles de la sécurité de vieillesse. Ce sont là deux postes de dépenses qui seront fortement touchés par le vieillissement de la population.
Nous avons l'intention d'étudier ces dépenses et de voir quelles projections nous pouvons en faire sur une cinquantaine d'années à partir des renseignements dont nous disposons maintenant. Ces projections porteront sur l'ensemble du Canada, y compris sur les gouvernements provinciaux. L'information ainsi obtenue nous permettra de voir quel devrait être le rôle du gouvernement fédéral en tenant compte de ces tendances. Dans l'ensemble, cela nous donnera un aperçu de la situation budgétaire du gouvernement fédéral au cours des 50 années à venir.
Nous n'avons pas encore procédé à cette analyse. Nous venons de commencer à y réfléchir en fonction des outils dont nous disposons. Il est toutefois évident, en se fiant à d'autres études réalisées sur ces questions, que nous assisterons à une hausse marquée du ratio dette-PIB au cours des 50 ans à venir. Il reste à déterminer la part qui incombera au gouvernement fédéral.
M. Page : J'aimerais ajouter, parce que c'était un élément de votre question, que nous sommes ravis d'être en mesure d'étudier ces questions à plus long terme. Nous sommes d'avis que c'est le type de questions auxquelles le Bureau du directeur parlementaire du budget peut contribuer à fournir des réponses : les questions à plus long terme comme les caractéristiques démographiques d'une population vieillissante ou les questions concernant la pauvreté, que le sénateur Eggleton nous a demandé d'étudier, le déséquilibre des revenus dans la société canadienne, les questions de réorganisation, de productivité et de changement climatique. Le fait d'analyser ces questions à long terme et d'attirer l'attention sur elles en indiquant les répercussions qu'elles pourraient avoir sur l'équilibre ou le déséquilibre budgétaire au cours des cinq années à venir serait très utile.
Le sénateur Di Nino : Monsieur Page, tout au long de votre exposé, vous n'avez évoqué la question mondiale à laquelle je crois que le monde est confronté maintenant qu'en utilisant l'expression « une récession très dure. » Vous seriez donc d'avis que nous ne sommes probablement pas en situation de crise. Est-ce exact?
M. Page : À mon avis, au niveau mondial, c'est le pire type de récession que nous ayons connue depuis la crise de 1929.
Le sénateur Di Nino : Vous convenez donc que nous faisons face à une crise comme le monde l'appelle.
M. Page : C'est sans aucun doute une crise financière qui pourrait éventuellement évoluer en crise budgétaire.
Le sénateur Di Nino : Je vous remercie de cette réponse.
Dans votre exposé, vous abordez à la page 3 les risques éventuels pour les perspectives financières. L'un des exemples que vous nous en donnez est qu'un dollar sur les trois prévus pour des projets d'infrastructure n'a pas été dépensé au cours des deux derniers exercices.
Mon collègue, le sénateur Murray, a posé cette question au témoin précédent qui nous a répondu que, à la différence d'autres programmes, les budgets des programmes d'infrastructures qui ne sont pas épuisés ne sont pas supprimés pour autant. Ces sommes sont « reportées » pour reprendre le terme qu'il a utilisé, sur les exercices suivants pour qu'ils soient disponibles l'année suivante ou les suivantes.
Tout d'abord, êtes-vous d'accord avec cette affirmation? Ensuite, n'êtes-vous pas d'avis que cela va continuer à stimuler l'économie et contribuer à l'améliorer?
M. Page : Je crois que cela est vrai pour la plupart des programmes d'infrastructures. Il y a des conditions au Programme du Fonds de simulation de l'infrastructure, qui font que, au moins maintenant, si les provinces ou les municipalités ne dépensent pas la part qui leur incombe d'ici le 31 mars 2011, cet argent n'est plus disponible.
Je crois que le gouvernement a voulu que cet argent ne soit offert que temporairement afin de ne pas contribuer, à long terme, à une crise budgétaire au Canada en poussant le déficit à la hausse. Nous sommes d'avis, tout comme vous je crois, que si nous n'utilisons pas tout l'argent ou tous les pouvoirs de dépenser en 2009-2010 et que nous reportons ces fonds en 2010, nous aurons encore une économie très faible en 2010 et nous aurons besoin de ces fonds consacrés aux infrastructures pour aider à stimuler l'économie et à faire grimper le taux de croissance au Canada, si croissance il y a.
Si les membres de ce comité devaient se demander s'il y a lieu pour nous d'étudier les délais, de préciser entre autres si deux ans sont trop courts, je crois que ce serait faire une bonne utilisation de leur temps et une bonne chose pour le programme du Fonds de simulation de l'infrastructure.
Le sénateur Di Nino : Je tiens à m'assurer que notre témoin précédent et vous dites la même chose, c'est-à-dire que l'argent ne va pas disparaître, qu'il n'est pas reversé dans la cagnotte, qu'il est toujours disponible pour investir en infrastructures dans les années à venir, quel que soit le temps qu'il faudra. Cet argent n'est pas perdu totalement pour le programme d'infrastructures. C'est ce que j'ai compris. Êtes-vous d'accord?
M. Page : Je crois que nous sommes d'accord pour un certain nombre de programmes d'infrastructure. Nous allons vérifier ce qu'il en est pour le programme du Fonds de simulation de l'infrastructure. Nous croyons avoir compris, à la suite de nos travaux, que si cet argent n'est pas dépensé d'ici le 31 mars 2011, les municipalités n'y ont plus accès.
Le sénateur Di Nino : Ce serait excellent si vous pouviez vérifier cela pour nous.
Vous avez cité Ford comme exemple de ce qui pourrait se produire, si je vous ai bien compris. Nous avons entendu quelques nouvelles encourageantes de Ford au cours des derniers jours. Cela nous fournit-il des indications de la façon dont le secteur s'en tire, ou est-ce seulement un cas isolé?
M. Page : Je n'ai absolument rien dit au sujet de Ford. Il se peut que j'aie utilisé un mot dont la prononciation vous y a fait penser, mais je n'ai rien dit de précis sur Ford.
Nous avons observé au troisième trimestre, aux États-Unis, un rebond important du secteur de l'automobile, ainsi que des achats importants de véhicules. Cela s'explique en partie par un programme américain de primes à la casse.
Nous avons assisté à une croissance assez forte de dépenses des consommateurs aux États-Unis. Nous avons constaté des hausses comparables, aussi bien dans la production que dans les ventes au détail, au Canada pendant le troisième trimestre, mais nous suivons ce phénomène avec attention. En ce qui concerne la production, nous sommes encore bien en deçà de ce que nous avons vu au cours des 10 dernières années.
Le sénateur Di Nino : Votre étude sur le vieillissement de la population m'intéresse, et en particulier les répercussions qu'elles pourraient avoir sur l'économie. Pendant que vous parliez, j'ai relevé trois points.
Tout d'abord, nous avons probablement le groupe de retraités en meilleure santé que nous n'ayons jamais eu dans l'histoire de notre pays. Cela signifie probablement que cette population actuelle de retraitée, ou celle des gens qui vont bientôt prendre leur retraite, va vivre plus longtemps.
Est-ce que ce sont des questions dont vous allez tenir compte dans votre rapport?
M. Askari : Oui. C'est une des raisons qui vont faire en particulier que les coûts des soins de santé vont augmenter de façon importante. Lorsque vous étudiez les données, les coûts des soins de santé pour les personnes âgées de 65 ans et plus augmentent beaucoup par rapport à ceux des populations plus jeunes, ce qui est logique et naturel. Les coûts des soins de la santé au cours des deux dernières années de la vie d'une personne augmentent beaucoup.
Oui, la population vieillit, les gens vivent plus longtemps et sont en meilleure santé, mais cela occasionne également des coûts élevés, qui représentent une facture énorme pour le système de soins de la santé. C'est un déterminant des coûts que nous essayons de préciser dans notre évaluation.
Le sénateur Di Nino : Mes collègues et moi allons attendre votre rapport. Il sera très instructif.
M. Askari : Nous espérons bien arriver à le publier. Nous avons quelques difficultés à résoudre en ce qui concerne les ressources. Si nous n'obtenons pas les personnes dont nous avons besoin au cours des mois à venir, nous ne serons pas en mesure de le faire.
Le sénateur Di Nino : Il pourrait aussi s'avérer intéressant pour vous de vous reporter à l'étude réalisée par le Sénat sur le vieillissement de la population.
Le sénateur Ringuette : Cette étude tiendra-t-elle compte du fait que, les soins de la santé relèvent de la responsabilité des provinces, et qu'ils représentent l'une de leurs dépenses les plus importantes, ce qui n'est pas le cas pour le gouvernement fédéral?
M. Askari : Oui.
Le sénateur Neufeld : J'aimerais revenir aux modalités de rapport. Plus tôt aujourd'hui, nous avons entendu un témoignage de hauts responsables qui, en résumé, nous ont expliqué que le gouvernement fédéral, les provinces et les municipalités se réunissent dans la plupart des cas pour décider où ils vont dépenser ces fonds destinés à stimuler l'économie. Le gouvernement fédéral ne participe à ce financement que lorsqu'il a reçu les factures. Cela signifie que des travaux ont eu lieu, qu'une entente a été signée et cela se produit tous les trimestres. Les municipalités s'adressent aux provinces et les provinces s'adressent directement au gouvernement fédéral.
Ce que vous avez dit m'a intéressé, soit précisément que vous vous êtes adressé à 15 pays, corrigez-moi si je me trompe, pour leur demander comment ils faisaient rapport, et que 11 vous ont répondu. Parmi ceux-ci, les États-Unis constituent en quelque sorte le modèle dont nous devrions nous inspirer. Je ne dis pas que cela me pose un problème quelconque.
Tout d'abord, à un niveau agrégé, la façon dont les États-Unis mettent en œuvre leurs mesures de stimulation est- elle la même qu'au Canada? Les programmes sont-ils similaires? Si vous voulez obtenir des modalités de rapport comparables, il est bien évident qu'il faut que les programmes en vigueur soient aussi comparables.
En second lieu, je crois vous avoir entendu dire que les mesures américaines de stimulation de l'économie atteignaient environ 800 milliards de dollars et qu'ils ont maintenant dépensé environ 150 milliards de dollars. Cela représente environ 20 p. 100 de ce qu'ils veulent dépenser. Je crois également comprendre que le Canada a dépensé environ 20 p. 100 de l'argent consacré à la stimulation de l'économie.
Tout en convenant qu'il s'agit là de chiffres passablement agrégés, leurs pourcentages ne sont-ils pas très proches? Vous attendez-vous à obtenir les montants exacts pour le prochain cycle de mise à jour de l'information? Si j'ai bien compris ce qu'on a dit précédemment, l'information est disponible sur un site web pour permettre aux gens de la consulter, mais j'aimerais que vous répondiez à ces questions.
M. Page : En ce qui concerne les ensembles de mesures de stimulation, je ne suis pas en mesure aujourd'hui de décomposer pour vous nos 47 milliards de dollars, avec les volets recettes et dépenses, en faisant la part entre les infrastructures et l'aide à l'industrie, et cetera, par rapport à la situation aux États-Unis. Toutefois, en ce qui concerne les types de rapports qu'ils produisent et les montants relatifs, la complexité des questions que cela soulève est comparable. Dans un domaine comme celui des infrastructures, plusieurs paliers de gouvernement interviennent. Nous n'avons pas vu beaucoup de rapports impliquant plusieurs administrations au Canada qui, en termes budgétaires, pourraient être considérés comme transparents. Les choses sont plus compliquées.
Les États-Unis sont confrontés au même problème en ce qui concerne les rapports. Ils ont des États et des comtés. Dans leur rapport, ils fournissent des renseignements concernant les activités, ou les déboursés ou les dépenses qu'ils font. Vous avez raison en ce qui concerne le programme d'infrastructures en ce sens que, au final, les déboursés seront faits. Il peut s'écouler passablement de temps entre la prise d'engagement sur un projet précis d'infrastructures, suivie du processus d'appel d'offres et des travaux de construction, avant que le gouvernement fédéral ne procède réellement à son paiement.
Il est toutefois important, dans le contexte d'une reprise économique fragile, que nous ayons une indication trimestre par trimestre des travaux qui sont exécutés. Que va-t-il se passer au troisième trimestre? Qu'en sera-t-il au quatrième trimestre? Quelle sera la fragilité de l'économie au cours du premier semestre de 2010?
C'est notre point de vue au Bureau du directeur parlementaire du budget. Nous voulons vous fournir ce type d'information. Il est probable que vous avez déjà entendu des témoins vous expliquer que les moyens d'action du secteur public se transforment en mesures de stimulation dans le secteur privé, dans lequel la consommation est ainsi renforcée. C'est le type de questions que nous étudions, et c'est pourquoi nous les étudions.
Le sénateur Murray : Je vais formuler mes commentaires rapidement, et M. Page et ses collègues pourront y répondre s'ils le souhaitent ou y réfléchir par la suite.
Tout d'abord, il me semble que la façon dont le gouvernement et vous traitez ce qu'on appelle le compte d'assurance-emploi n'est pas la bonne. Le gouvernement indique, tout comme vous, que dans quelques années, les versements dépasseront les cotisations. C'est pourquoi le gouvernement envisage d'augmenter de façon considérable les cotisations à l'assurance-emploi.
Nous devons garder à l'esprit, en remontant à l'époque à laquelle Paul Martin était premier ministre et pendant les quelques années qui ont suivi, quand la situation économique était relativement bonne, qu'un surplus a été accumulé dans ce compte qui atteignait 60 milliards de dollars. Si le gouvernement tient à augmenter les cotisations, quand, pour quelques années, les sorties du compte dépassent les entrées, il devrait alors réduire les cotisations lorsque celles-ci sont plus importantes que les déboursés, c'est-à-dire quand il y a un surplus important.
Je sais fort bien que, d'un point de vue technique, le fonds de l'assurance-emploi n'existe plus, mais la question de l'excédent à long terme des cotisations sur les déboursés n'est pas sans intérêt comme considération de politique. Cela laisse entendre, à mon avis, que les employeurs et les employés, c'est-à-dire ceux qui cotisent au fonds, assument une part disproportionnée des problèmes budgétaires du gouvernement.
En second lieu, je partage les préoccupations du sénateur Ringuette à propos de General Motors. De façon plus précise, je ne parviens pas à comprendre pourquoi le gouvernement a accepté de se débarrasser des actions ordinaires dont il avait fait l'acquisition au cours d'une période définie au prix du marché, tel qu'il a été. L'hypothèse peut être simpliste que cela m'amène à formuler est que l'objectif a été de ne pas créer d'asymétrie dans une entente impliquant trois gouvernements, le nôtre, celui de l'Ontario et celui des États-Unis. Toutefois, j'aimerais savoir pourquoi le gouvernement a intégralement radié cet investissement, comme je crois savoir qu'il l'a fait. Il n'a pas l'air d'avoir une grande confiance dans la valeur à venir de ces actions.
Ensuite, j'aimerais vous demander de confirmer, ou d'infirmer, si vous le devez, que votre mandat vous confère le droit de formuler des commentaires sur la politique monétaire du pays. Je suis en particulier assez intrigué par la campagne apparente de la Banque du Canada pour faire baisser la valeur du dollar canadien. J'aimerais entendre d'autres opinions dire, de façon objective, si le dollar canadien est surévalué. Je sais fort bien que les exportateurs se plaignent toujours que sa valeur est trop élevée pour eux, mais il y a d'autres éléments dont, à mon avis, il faut tenir compte de façon objective et j'aimerais pouvoir prendre connaissance de quelques travaux dans ce domaine.
Enfin, en ce qui concerne le déficit structurel annoncé, il me paraît, comme je l'ai dit, assez irréaliste que le gouvernement et l'opposition officielle ne veuillent pas recourir aux augmentations d'impôt. Je suis un peu moins véhément à ce sujet maintenant, après vous avoir entendu faire part de votre optimisme relatif quant à la taille du déficit structurel et à l'évocation des diverses solutions qui s'offriront à nous.
J'aimerais toujours que, dans un avenir pas trop éloigné, quelqu'un puisse préparer certains scénarios à notre intention sur les combinaisons de croissance économique, de croissance des revenus, de limitation des dépenses ou de hausse de celles-ci qui nous permettraient de parvenir à un budget équilibré d'ici une date donnée. Vous avez parlé de l'exercice 2013-2014. À votre connaissance, le gouvernement a-t-il pour objectif de parvenir à des budgets équilibrés d'ici 2014, ou 2015, ou 2016, et si ce n'est pas le cas, quand?
Le président : Monsieur Page, pensez-vous pouvoir répondre à ces questions maintenant? Vous préféreriez peut-être y réfléchir pour y répondre plus tard.
M. Page : Je vais essayer, avec votre permission, d'être bref. Il est clair que nous devrons revenir, en particulier sur la question de l'automobile.
En ce qui concerne l'assurance-emploi, dans nos projections, nous tenons compte de la législation sans faire aucune forme de choix de politique. Toutefois, nous intégrons à nos évaluations, comme pour l'ensemble des mesures de stimulation budgétaire du gouvernement, un gel de taux en 2009-2010. Ensuite, à cause du déficit, bien que les mesures de stimulation budgétaire du Canada pour 2009-2010 ne doivent pas être prises en compte pour parvenir au solde du compte du déficit, nous soumettons pour l'essentiel le plan à des pressions. Nous faisons l'hypothèse d'une augmentation de 15 p. 100 au cours de chacune de ces années, ce qui représente 60 cents quand vous arrivez à 2014.
C'est une hausse importante des cotisations d'assurance-emploi. C'est une question de politique importante, et vous avez raison de le dire. Nous évaluons les coûts par employé à environ 700 $ quand on tient compte de hausses de cette ampleur du taux de cotisation, pour l'employeur et pour l'employé. C'est un problème. Voulez-vous être perçu comme augmentant ces taux de cotisation d'assurance-emploi à une époque où l'écart dans la production se rétrécit lentement, alors que les gens craignent que l'écart du taux de chômage en regard de la faiblesse de la reprise de l'emploi soit comblé.
En ce qui concerne le secteur de l'automobile, je dirais simplement que nous devrons revenir. À ce moment-là, nous vous donnerons une description plus complète de ce que coiffe le plan du gouvernement, en vous indiquant pourquoi il a été conclu de cette façon, l'argent provenant du compte du Canada. C'est une question dont il vaut mieux traiter dans une note d'information détaillée.
Quant à mon mandat et à la politique monétaire, je ne crois pas qu'il nous incombe de parler des questions de politique directement. Je ne serai de toute façon pas à l'aise pour le faire. J'entends par là qu'il ne m'incombe pas de parler de la politique monétaire ou de faire des suggestions sur la façon dont le gouvernement devrait s'y prendre pour revenir à un équilibre structurel.
Je suis parfaitement à l'aise pour vous fournir des données économiques et budgétaires afin que vous ayez les outils voulus pour faire ces compromis. Cela dit, nous sommes convaincus qu'un dollar canadien fort nuira à notre secteur des exportations. Nous avons vu la production industrielle diminuer de façon importante depuis 2007. Nous savons que cela facilite les importations de machinerie et d'équipement. Nous savons que cela est une bonne chose pour le taux potentiel de croissance du Canada. Nous pouvons bien évidemment utiliser des modèles, que nous devrons préparer, pour étudier ces compromis. Nous serons ravis de vous fournir une analyse de ces questions.
Quant au déficit structurel, pourrions-nous étudier des scénarios et quelle serait leur signification dans le contexte de projections à plus long terme? Oui, nous pensons que cela relève de notre mandat, et nous le ferons si les sénateurs nous le demandent, en ce qui concerne les recettes, les dépenses et quel serait leur montant. Nous pourrions utiliser nos modèles et vous fournir des simulations.
Le président : Sénateur Murray, vous pourriez peut-être suggérer à notre comité de direction de demander au directeur parlementaire du budget de nous apporter son aide sur quelques-unes des questions qu'il faut étudier.
Le sénateur Ringuette : En ce qui concerne l'assurance-emploi, c'est une chose de dire que vous gelez les cotisations, mais il y a deux façons d'accroître le fonds de l'assurance-emploi. Vous pouvez également relever le seuil de revenu, et c'est ce qui a été fait cette année. Le gouvernement a annoncé un gel des cotisations d'assurance-emploi, mais il a relevé le seuil à partir duquel vous devez verser des cotisations.
Étudiez-vous les répercussions de ces deux types de mesures sur le fonds d'assurance-emploi?
M. Page : Oui. Cela figure dans notre document, et nous nous sommes engagés à revenir vous présenter quelques rapports analytiques additionnels. L'un porte sur l'assurance-emploi et l'autre sur la méthodologie qui sous-tend nos calculs de production potentielle et de solde budgétaire structurel. Il y aura d'autres rapports techniques. Nous vous remettrons ce rapport et nous serons ravis de vous en faire la présentation.
Le président : Ce fut une excellente séance et il était important pour nous de rencontrer le directeur parlementaire du budget et son équipe. M. Page, merci d'être venu nous rencontrer.
Il est évident que nous devrions nous réunir plus souvent.
Le président : La séance est levée.
(La séance est levée.)