Aller au contenu

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Pêches et des océans

Fascicule 3 - Témoignages


OTTAWA, le jeudi 2 avril 2009

Le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans se réunit aujourd'hui, à 10 h 31, pour étudier les questions relatives au nouveau cadre stratégique en évolution du gouvernement fédéral pour la gestion des pêches et des océans du Canada.

Le sénateur Bill Rompkey (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bonjour à tous. Je tiens tout particulièrement à souhaiter la bienvenue à la ministre des Pêches et des Océans. C'est la première fois que nous avons l'occasion de vous rencontrer et vice versa; nous sommes donc doublement choyés. Si j'ai bien compris, vous avez une heure à nous consacrer, et nous vous en sommes très reconnaissants. Si vous le voulez bien, je vais vous laisser le soin, madame la ministre, de présenter les représentants ministériels qui vous accompagnent.

Comme vous le savez sans doute, nous menons actuellement quelques études précises. Nous nous sommes penchés sur l'Arctique, particulièrement sur les pêches, et sur le rôle de la Garde côtière, notamment en ce qui a trait à la sécurité.

Nous sommes en train de finaliser un rapport qui sera publié bientôt. Aujourd'hui, nous voulons non seulement explorer les pêches en Arctique, y compris les questions de quotas, d'infrastructures, et cetera, mais aussi le rôle qu'a joué la Garde côtière par le passé et la façon dont il pourrait évoluer dans le futur, de même que les infrastructures, les bateaux, l'équipement et la dotation y afférents. J'espère que tous ces sujets seront abordés au cours de nos discussions, mais, madame la ministre, nous avons beaucoup de questions à vous poser. Étant donné que ce n'est pas tous les jours que nous avons le privilège de discuter avec vous, je vais accorder une certaine latitude aux sénateurs et leur permettre de poser des questions sur des sujets autres que les pêches au Nunavut et la Garde côtière.

L'honorable Gail A. Shea, C.P., députée, ministre des Pêches et des Océans : Merci beaucoup, monsieur le président et sénateurs. Je vous remercie de m'inviter à prendre la parole devant vous aujourd'hui. Permettez-moi de présenter les représentants ministériels qui m'accompagnent : la sous-ministre, Claire Dansereau; le commissaire de la Garde côtière, George Da Pont; la sous-ministre adjointe, Politiques, Michaela Huard; le directeur général de la gestion des ressources, Barry Rashotte; et le directeur général de la gestion de l'habitat, Ian Matheson.

Je suis ravie et honorée de m'adresser à vous en tant que ministre des Pêches et des Océans du Canada. J'aimerais vous entretenir aujourd'hui de la situation économique actuelle, de son impact sur les pêches canadiennes et de mes plans et priorités.

Comme beaucoup d'entre vous le savent, je suis la première ministre des Pêches et des Océans originaire de l'Île-du- Prince-Édouard en 50 ans. Étant moi-même issue d'une famille et d'une collectivité de pêcheurs, je comprends très bien l'importance des pêches pour un grand nombre de familles des collectivités côtières. J'ai constaté — directement — que les pêches ne sont pas seulement le pilier de l'économie de nombreuses collectivités côtières, mais qu'elles constituent également un élément vital de la prospérité économique de notre pays.

Sachez que les secteurs canadiens de l'aquaculture et de la pêche commerciale et récréative génèrent 12 milliards de dollars par année. Nos importations de fruits de mer sont plus lucratives que nos exportations de blé, de porc ou de bœuf. C'est pourquoi la récession mondiale et l'état actuel des pêches du Canada nous préoccupent tous.

Il ne fait aucun doute que le ralentissement économique mondial affecte tous les secteurs de l'économie canadienne. L'industrie de la pêche ne fait pas exception. Et même si la situation économique du Canada est relativement bonne, le déclin de la demande mondiale de biens et de services canadiens pourrait se poursuivre pendant un certain temps. Pour les marchés des fruits de mer canadiens, le fait est que le printemps et l'été qui s'en viennent seront des périodes difficiles.

Et il y a d'autres défis. Les entreprises de pêche, des propriétaires-exploitants aux grandes entreprises intégrées, souffrent du resserrement du crédit de la part des institutions de prêts. Les organisations qui œuvrent avec nous pour restaurer l'habitat et rétablir les stocks de poissons éprouvent plus de difficulté à obtenir des fonds.

Pour atténuer l'impact du ralentissement économique dans toute la mesure du possible, notre gouvernement a investi dans les secteurs clés qui auront les retombées les plus directes sur l'économie canadienne. Le budget de 2009, le Plan d'action économique du Canada, aura des retombées pendant de longues années, y compris dans les collectivités dont l'avenir est tributaire de la prospérité des secteurs des pêches et des océans du Canada.

En collaboration avec les organismes de développement régional, dont l'Agence de promotion économique du Canada atlantique et l'Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec, mes collègues et moi serons en mesure d'investir dans des initiatives qui permettront à notre industrie de la pêche de surmonter les difficultés et de s'adapter aux nouvelles exigences du marché.

Jetons un coup d'œil aux investissements de Pêches et Océans Canada. Environ 200 millions de dollars seront consacrés à la construction et à la réparation de ports pour petits bateaux à l'échelle du pays pour faire en sorte que les industries de la pêche commerciale et de l'aquaculture, et les collectivités qui en dépendent, bénéficient d'un accès sûr et fiable aux installations portuaires.

La somme additionnelle de 175 millions de dollars sera injectée dans la Garde côtière canadienne pour l'achat de nouveaux bateaux et la réparation de bateaux vieillissants. Cet investissement permettra à la Garde côtière de renforcer sa capacité de patrouiller nos eaux, de faire appliquer nos lois et de porter assistance aux bateaux en détresse. Il aidera également les chercheurs à mener des études très importantes sur la santé de nos océans et des poissons qui y vivent — exactement le type de renseignement dont nous avons besoin pour élaborer des quotas et des plans de gestion efficaces et pour approfondir notre connaissance des écosystèmes en général.

Au cours des prochains mois, le ministère des Pêches et des Océans lancera les projets décrits dans notre Plan d'action économique, tout en conciliant trois grandes priorités : la durabilité des ressources, la prospérité économique et la consultation.

En cette période d'incertitude économique, l'établissement de pêches durables et économiquement prospères sera en tête des priorités de mon ministère. Après tout, la prospérité économique passe nécessairement par la durabilité et la pérennité des ressources.

Mon ministère soutiendra la réalisation de ces objectifs en travaillant, avec les pêcheurs, au renouvellement de nos politiques afin qu'ils bénéficient d'une plus grande latitude dans la gestion de leurs entreprises. Nous allons améliorer notre cadre de réglementation. Nous allons œuvrer auprès des institutions financières pour accroître la certitude dans ce secteur. Et nous allons poursuivre nos efforts en vue d'assurer la stabilité, la prévisibilité et la transparence de la gestion des pêches.

Pour améliorer la gestion des pêches et protéger les ressources publiques, le MPO a créé un cadre des pêches viables incluant de nouvelles politiques et de nouveaux outils à l'appui des pêches viables. L'élément central de ce cadre est l'application d'une approche des pêches axée sur les écosystèmes. Dans le cadre de la gestion des pêches de capture sauvages du Canada, le MPO étudiera de façon plus approfondie les effets de la pêche sur divers éléments de l'écosystème.

Ces divers éléments sont notamment le stock de poisson ciblé; les autres espèces capturées de façon accidentelle, y compris les espèces en péril; les sources de nourriture des autres espèces; l'habitat du poisson; et les habitats et écosystèmes de fond vulnérables ou uniques, comme les monts sous-marins, les coraux et les éponges.

Par ailleurs, notre cadre nous aidera à prendre des décisions préventives favorisant la conservation des ressources halieutiques. Cela nous permettra également d'améliorer notre façon de concevoir et de gérer l'impact de la pêche sur les divers éléments de l'écosystème.

Mon ministère sera mieux à même de gérer les répercussions sur l'écosystème et d'imposer des mesures pour conserver nos stocks de poissons. Nous allons continuer de prendre des décisions éclairées et fondées sur la recherche scientifique et les conseils évalués par les pairs, et nous allons planifier les décisions futures avec l'aide des intervenants.

Nous allons continuer de renforcer l'application des lois. Les agents des pêches et des habitats s'affairent présentement à surveiller la conformité à nos règles et à les appliquer. En effet, le Canada possède l'un des programmes de surveillance, de contrôle et de suivi les plus modernes au monde. Nous allons continuer d'utiliser judicieusement nos ressources de conservation et de protection, tout en incitant nos propres pêcheurs à devenir de meilleurs gardiens de nos ressources halieutiques communes.

Le concept d' d'autorationalisation, c'est-à-dire l'ajustement volontaire de la capacité de récolte, sera encouragé. La capacité d'ajuster la quantité des captures en fonction des fluctuations des ressources et du marché donnera lieu à des pêches plus durables et plus prospères. Cela est particulièrement pertinent dans le cas de la pêche au homard du printemps.

Ce ne sont là que certaines des mesures que nous prendrons pour assurer la durabilité de nos ressources. L'important est de trouver un équilibre qui répond aux besoins des Canadiens tout en gérant les répercussions sur l'écosystème. Ce dernier aspect est extrêmement important étant donné que les enjeux environnementaux, en particulier la durabilité, ont un impact considérable sur les marchés de la planète. De nos jours, un régime de certification et de traçabilité est essentiel pour avoir accès aux marchés étrangers. Le Canada doit être doté des moyens lui permettant de satisfaire à ces exigences.

Récemment, le Conseil des ministres des pêches et de l'aquaculture de l'Atlantique s'est réuni pour discuter de ces enjeux. Cette réunion fructueuse a débouché sur un engagement à combiner nos efforts de recherche et de marketing stratégique. Nous avons accepté de poursuivre la collaboration avec les participants de toute la chaîne de valeurs de fruits de mer pour améliorer la traçabilité et la certification du poisson et des produits de la mer du Canada. De cette façon, nous veillerons à ce que le Canada continue de répondre aux exigences du marché. La réunion du conseil a également donné lieu à un engagement renouvelé en faveur de la croissance de la production d'aquaculture durable.

Le gouvernement demeure résolu à aider l'industrie canadienne de l'aquaculture à réaliser son plein potentiel. Nous irons de l'avant avec notre programme de développement durable de l'aquaculture. Ce programme fait intervenir l'amélioration de notre processus de réglementation grâce à une coordination plus étroite entre les divers ordres de gouvernement.

Mon ministère continuera de s'associer à d'autres ordres de gouvernement et à l'industrie pour démontrer la durabilité du poisson et des produits de la mer du Canada et accroître l'accès aux marchés. Par ailleurs, nous poursuivrons notre collaboration avec les provinces et territoires. Je suis convaincue que ces partenariats permettront d'élargir l'accès aux marchés nationaux et étrangers. Par exemple, comme vous n'êtes pas sans savoir, plus de 80 p. 100 du homard de l'Atlantique est vendu aux États-Unis, et les Américains n'achètent plus autant de homards qu'avant.

Pour créer d'autres débouchés et offrir un meilleur rendement aux pêcheurs de homard, notre gouvernement a investi plus de 325 000 $ dans le Programme international du Canada pour l'agriculture et l'alimentation, dans le cadre d'une initiative spéciale visant à promouvoir notre homard à l'étranger. Les gouvernements de l'Île-du-Prince- Édouard, de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick ont versé 126 000 $ à cette initiative.

Les fonds serviront à soutenir les efforts de marketing international dirigés par le Conseil canadien des pêches. Il s'agit d'un exemple éloquent des réalisations possibles des initiatives menées avec des partenaires provinciaux et territoriaux.

Par ailleurs, il est très important de maintenir la présence de chef de file du Canada sur la scène internationale. À cette fin, nous allons continuer de participer activement aux négociations dans le cadre d'instances multinationales, binationales et régionales en vue de faire de la durabilité une priorité internationale, et pour faire avancer le programme du Canada à cet égard.

Par ailleurs, nous allons continuer d'aider l'industrie à participer aux salons internationaux pour promouvoir notre poisson et nos produits de la mer de premier ordre, ainsi que nos pratiques de gestion durable des pêches et d'aquaculture. Je suis fière d'annoncer que des représentants de l'industrie canadienne ont connu un franc succès lors du salon des fruits de mer qui a eu lieu à Boston en mars.

La réforme de l'Organisation des pêches de l'Atlantique Nord-Ouest constitue un aspect important des efforts de tous les instants menés par le Canada pour améliorer la gestion des pêches en haute mer à long terme. Nous sommes déterminés à poursuivre nos efforts pour renforcer l'OPANO par le biais de la ratification de la nouvelle convention par le Canada. En outre, nous chercherons à renforcer les décisions de gestion des autres organisations régionales de gestion des pêches auxquelles le Canada participe.

Nous allons poursuivre notre collaboration avec les États-Unis, l'Union européenne et d'autres pays en vue de combattre la pêche illégale et d'autres pratiques de pêche non viables. Les efforts conjoints d'application des lois renforcent nos pratiques d'inspection et nous aideront à mettre un terme à la pêche illégale, non déclarée et non réglementée une fois pour toutes.

Mon ministère est également très actif dans le dossier du Nord. De la brise des glaces au développement des pêcheries nordiques du Canada, le MPO continue de soutenir les objectifs de sécurité et de souveraineté du gouvernement dans le cadre de la Stratégie pour le Nord. Le budget de 2009 prévoit un investissement additionnel de 17 millions de dollars pour accélérer la construction d'un port pour petits bateaux à Pangnirtung. Cette infrastructure portuaire essentielle soutiendra les pêches commerciales en pleine expansion du Nunavut ainsi que la science des pêches. Elle créera également des emplois dans une région en quête de perspectives de développement économique.

Je sais que vous êtes intéressé à faire un voyage en Arctique de l'Ouest. Mes collaborateurs seront heureux de vous aider de quelque manière que ce soit.

En ce qui concerne la chasse aux phoques, nous continuerons de soutenir cette industrie et les familles qui en dépendent. Mes collaborateurs et collègues députés ont tenté à maintes reprises de donner l'heure juste à propos de cette chasse. Malheureusement, cette information demeure mal entendue ou enterrée sous les arguments à caractère émotif et économique en Europe. Nous espérons que le résultat final sera positif pour le Canada. D'ici là, nous continuerons de défendre les droits des pêcheurs de phoques du Canada à gagner leur vie en pratiquant une chasse humaine, durable et légitime.

Notre gouvernement demeure résolu dans son engagement à défendre les activités économiques légitimes des Canadiens, et il prendra les mesures nécessaires afin de préserver l'accès aux marchés des produits canadiens provenant du phoque. Nous espérons également compter sur l'appui unanime des sénateurs.

Ce matin, j'ai parlé de certains des principaux enjeux nationaux et internationaux qui préoccupent mon ministère, ainsi que de nombreux Canadiens, surtout en cette période économique difficile.

Pour garantir la viabilité économique des secteurs des pêches et des océans canadiens, nous allons prendre des décisions axées sur la durabilité et sur la consultation. La collaboration est essentielle. Le MPO continuera de travailler avec les provinces et les territoires, les Autochtones, l'industrie et tous les intervenants. Je crois sincèrement que le seul moyen d'atteindre nos objectifs en matière de prospérité économique, de conservation et de durabilité consiste à solliciter la participation des intervenants. Les organisations ne peuvent pas travailler de façon isolée, et les Canadiens ont leur mot à dire.

Dans cet esprit de collaboration, le MPO va axer ses méthodes de travail sur une communication et un engagement constants. Nos objectifs sur le plan de la gestion des ressources seront clairs, nos données scientifiques seront accessibles et nos partenaires seront actifs.

Je l'ai dit et répété, et je le répète encore aujourd'hui : tous les intervenants participeront aux discussions et chacun pourra faire entendre sa voix. C'est avec plaisir que je collaborerai avec le Comité sénatorial permanent et que j'écouterai ses commentaires.

Je vous remercie de m'avoir invitée parmi vous aujourd'hui. Je suis maintenant prête à répondre à vos questions.

Le président : Merci beaucoup, madame la ministre. Nous enchaînerons avec la période de questions. Tout d'abord, honorables sénateurs, sachez que nous devrons nous imposer une certaine discipline parce que, madame la ministre, vous êtes un aimant. Nous sommes 11 sénateurs à la table, ce qui est beaucoup plus qu'à l'habitude. Nous disposons d'une heure en compagnie de la ministre. Pour être juste, je pense que nous devrons limiter les questions à cinq minutes par personne.

Il y aura ensuite une deuxième série de questions. Les représentants ministériels resteront avec nous après le départ de la ministre et pourront poursuivre la discussion. Nous devons tout de même nous imposer une discipline. Veuillez poser des questions concises et directes. Par souci d'équité, il se peut donc que vous n'ayez pas la possibilité de poser toutes les questions voulues.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Madame la ministre, nous vous souhaitons la bienvenue et sommes heureux de vous accueillir devant ce comité. Vous avez parlé, au début et à la fin de votre présentation, du fait que le ministère considère des investissements pour aider les pêcheurs à traverser la tempête économique à laquelle ils font face.

Je suis du sud-est du Nouveau-Brunswick. Lorsque je me rends sur la côte du détroit de Northumberland, je vois votre circonscription située de l'autre côté du détroit.

La pêche au homard chez nous est très importante. Notre saison se déroule entre août et octobre. Au nord du Nouveau-Brunswick, la pêche commencera autour du 1er mai. Les pêcheurs entendent dire qu'ils n'obtiendront que 3,25 $ la livre cette année. Leurs dépenses comprennent le diesel, les appas en plus du salaire de l'équipage. Vous comprendrez qu'à un tel prix, il ne vaut pas toujours la peine d'aller à la pêche. Comment pouvez-vous rassurer les pêcheurs et les convaincre d'aller à la pêche en leur affirmant qu'ils tireront des revenus suffisant pour l'année?

Cette question est difficile, mais je crois que les pêcheurs ont besoin d'être rassurés.

[Traduction]

Mme Shea : Vous avez raison. Vous pouvez probablement voir ma circonscription de votre maison. Je suis issue d'une famille de pêcheurs, et ma famille est également très inquiète quant au prix qu'elle obtiendra.

Même si personne ne sait exactement à combien le prix s'établira, le ministère a des solutions flexibles qui pourraient aider les pêcheurs à assumer leurs dépenses. Par exemple, si les pêcheurs acceptent de se regrouper et d'utiliser un bateau plutôt que deux, cela leur permettrait de réduire leurs coûts.

À l'heure actuelle, il y a un fonds d'adaptation des collectivités. Les critères n'ont pas encore été établis, mais nous espérons qu'il permettra d'aider les collectivités dans le besoin — et je considère que les collectivités de pêcheurs en font partie.

Je sais, pour avoir parlé à de nombreux pêcheurs, que dans les années 1990, le prix du poisson était tombé très bas. Il était descendu à 1 $ la livre, et les pêcheurs ont traversé une période très difficile. Mais puis-je leur garantir qu'ils obtiendront un bon prix? Non, je ne le peux pas.

Nous pouvons collaborer avec les transformateurs pour qu'ils bénéficient d'un accès au crédit dont ils ont désespérément besoin. L'industrie survit grâce au crédit parce qu'elle a de gros stocks de produits à gérer en même temps. Mieux se porteront les transformateurs, mieux iront les pêcheurs.

Je peux vous dire — comme vous pourrez en déduire d'après votre expérience — que l'industrie est fragmentée. On ne fait pas front commun en tant que transformateurs et pêcheurs pour le bien de l'industrie; il y a un certain degré de méfiance entre eux.

Le sénateur Robichaud : Vraiment?

Mme Shea : Ces six derniers mois, j'ai constaté qu'il y avait une volonté de s'unir pour se doter d'un certain type d'organisation afin de promouvoir l'industrie en entier, ce qui sera profitable pour tous. Au sortir de cette période économique difficile, je crois que l'industrie du homard sera en meilleure posture qu'elle ne l'est aujourd'hui.

Le sénateur Adams : Madame la ministre, vous avez parlé du travail effectué auprès de certaines personnes dans l'Arctique. Depuis le début, après que nous ayons réglé la revendication territoriale, je discute de la pêche commerciale dans deux régions du Nunavut. J'ai passé 25 ans à étudier le fonctionnement possible au Nunavut d'un système de pêche commerciale. Nous avons conclu une entente dans le cadre de la revendication territoriale, à l'article 5.37, et en ce qui a trait à la question de la récolte.

J'ai un peu de mal à comprendre ce que vous entendez par récolte — s'agit-il de chasse de subsistance ou de pêche commerciale? J'ai un peu de difficulté à comprendre ce mot qui figure dans la disposition de l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut.

Après que nous eûmes conclu un règlement relativement à l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut, la Baffin Fisheries Coalition est devenue responsable de la réglementation des quotas de pêche dans les zones OA et OB, de même que de la réglementation des quotas de crevettes nordiques dans le détroit d'Hudson. Le mode de fonctionnement actuel du système n'est pas d'une grande aide pour les collectivités.

Au moment du règlement de la revendication territoriale, Nunavut Tunngavik Inc., ou NTI, a fondé une société. Maintenant, cette société a conclu une entente en vertu de laquelle elle possède une partie d'une entreprise en partenariat avec des étrangers, et la population locale est intéressée à obtenir une part des quotas.

Nous avons le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut, mis sur pied par le MPO; son président travaille dans votre ministère. Quelques membres du conseil sont au ministère des Affaires indiennes, et deux viennent des Territoires du Nord-Ouest, pas du Nunavut.

Pourriez-vous vous pencher sur la question, surtout maintenant qu'une partie des collectivités ont été exclues des quotas? Ils ont formé un groupe appelé Arctic Fishery Alliance. Ils ont présenté une demande pour obtenir une partie des quotas. Ensuite, le MPO et le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut nous ont dit qu'il était nécessaire d'avoir un équipement spécial pour pêcher dans les zones OA et OB. Il est très ardu pour une petite collectivité d'obtenir ne serait-ce qu'un bateau de 65 pieds; pourtant, la politique stipule qu'on ne peut faire de pêche commerciale avec une embarcation de moins de 100 pieds.

C'est vraiment difficile. Là-haut, dans le Nord, on a tiré des millions de dollars de la pêche, spécialement du flétan noir et de meilleures zones de pêche à l'est. Si nous avons près de 60 millions de dollars par an provenant de l'industrie de la pêche là-bas, et que cet argent n'est pas distribué dans les collectivités, l'avenir de ces gens sera difficile. Dans certaines collectivités, jusqu'à 85 p. 100 des habitants sont sans emploi.

Le président : Nous devrons laisser le temps à la ministre de répondre. Autrement, il ne vous restera plus de temps.

Le sénateur Adams : Peut-être pourrais-je obtenir quelques réponses au second tour.

Le président : Madame la ministre, voulez-vous tenter de répondre?

Mme Shea : Je crois que le sénateur donnait bien davantage son avis qu'il ne posait de questions, mais je dirais que le Nunavut a un secteur de la pêche en développement. Le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut distribue bel et bien les quotas parmi tous les intervenants, et nous collaborons avec lui.

Si le sénateur s'inquiète du fait que les populations locales devraient participer davantage aux activités de pêche, nous faisons des efforts en ce sens avec le nouveau port en construction. D'après ce que je sais, il y a là l'usine de poisson. Par ailleurs, je pense que la ministre Leona Aglukkaq fera l'annonce d'un financement à la formation pour que les gens soient formés dans le domaine de la pêche.

Je sais qu'un groupe travaille sur la question de la pêche au moyen de petits bateaux, et il reviendrait, je crois, aux populations locales de développer leur propre pêche. On effectue des progrès, mais j'accueillerai certainement avec plaisir vos suggestions.

Le sénateur Adams : La même chose s'applique à la Garde côtière. Celle-ci et l'armée ont les Rangers, qui sont d'une grande aide. Nous habitons là-haut, dans le Nord, et il nous serait possible d'effectuer de la surveillance relativement à la souveraineté dans l'Arctique. Nous sommes impatients que la Garde côtière travaille avec les populations locales dans l'avenir. Nous avons besoin de l'aide de la Garde côtière, car nous semblons avoir davantage de problèmes en ce qui concerne les baleines et les narvals.

L'automne dernier, en novembre, j'allais vous appeler pour vous demander d'envoyer un brise-glace là-bas afin de porter secours à environ 170 narvals pris dans les glaces. Les chasseurs et les trappeurs ont fini par massacrer environ 570 d'entre eux, car les brise-glaces ont mis sept jours à venir depuis St. John, Terre-Neuve, et les baleines n'auraient pas survécu.

Madame la ministre, nous devrions avoir davantage de brise-glaces à l'avenir, dont certains seraient stationnés dans le Nord, parce que chaque année, les baleines sont prises au piège dans les glaces. On dirait qu'au cours des quatre ou cinq dernières années, ce problème a empiré. Nous devrions trouver une manière de permettre à la Garde côtière d'avoir davantage de bateaux là-haut, dans l'Arctique, où on en a besoin, plus que dans le Sud.

Mme Shea : Ce qui est arrivé aux narvals est regrettable, mais il y a la pêche commerciale au narval, et les chasseurs les ont attrapés. Au moment où se déroulait cet incident avec les narvals, j'ai découvert qu'en envoyant un brise-glace là-bas pour libérer les narvals, ceux-ci, qui sont sensibles au bruit, auraient probablement plongé encore plus profondément sous la glace et n'auraient peut-être pas survécu de toute manière.

Le sénateur Cowan : Bienvenue, madame la ministre. J'ai entendu avec plaisir vos commentaires, durant votre déclaration d'ouverture, en ce qui concerne la chasse au phoque et le soutien du gouvernement envers une chasse au phoque durable et sans cruauté. Comme vous le savez, c'est également la position du Parti libéral du Canada. J'ignore ce qu'il en est des autres partis, mais les deux grands partis du pays appuient cette forme de chasse.

J'aimerais vous laisser l'occasion de clarifier quelques éléments à ce propos. Il s'agit manifestement d'une question hautement controversée dans certains milieux, et nous nous entendons tous sur le fait que certaines personnes s'intéressent moins au phoque qu'à faire la promotion de leur propre campagne de financement à d'autres fins. Vous savez également que le sénateur Harb a présenté un projet de loi au Sénat et n'a pu trouver dans cette enceinte aucun sénateur pour l'appuyer d'une quelconque manière. Je crois que cela en dit long sur l'opinion du reste des membres du Sénat. Je suis troublé du fait que le 3 mars, votre ministère a publié et distribué une déclaration de mon collègue, le sénateur Manning, qui aurait dit, notamment, que les chasseurs de phoques doivent savoir que le chef libéral Michael Ignatieff et son parti ont l'intention d'interdire la chasse au phoque. C'est clairement faux et inexact, mais ce qui est plus important en ce qui concerne ma question de ce matin, c'est que votre ministère a par la suite reconnu qu'il était inapproprié d'avoir publié la déclaration d'un parlementaire sur le site Web du gouvernement et de l'avoir fait circuler aux frais des contribuables.

Quelqu'un de votre ministère vous a-t-il avisée qu'il était déplacé d'afficher et de faire circuler cette déclaration? Et si c'est le cas, pourquoi l'avez-vous fait quand même? Et dans la négative, pouvez-vous nous expliquer pourquoi? En outre, une facture a-t-elle été envoyée au Parti conservateur du Canada, comme vous l'avez indiqué? Si oui, à combien s'élevait cette facture, et a-t-elle été réglée?

Le même jour, vous avez publié une déclaration selon laquelle le Parti libéral avait des objectifs cachés. Vous avez dit du même souffle que ce qui était le plus révélateur, c'étaient les actes du chef libéral, Michael Ignatieff, et que son approbation d'une mesure législative aussi consternante, je veux parler du projet de loi Harb, avait mis au jour les intentions cachées du Parti libéral pour ce qui est de mettre un terme à l'industrie canadienne de la pêche au phoque.

De quelle preuve disposiez-vous à ce moment-là, et qu'avez-vous actuellement à l'appui d'une telle information?

Mme Shea : Je crois qu'il y a absence de preuve, pour répondre à votre dernière question, car si le Parti libéral du Canada appuyait la chasse au phoque, je m'attendrais à ce qu'il y ait eu une déclaration en ce sens de la part du chef du parti, mais je pense qu'il n'y a rien eu de la sorte. Je vous dirais que même si ce projet de loi a été présenté sans que personne ne l'appuie, lorsque ce type de nouvelle arrive sur les ondes en Europe, cela mine bien des efforts que nous avons déployés en Europe pour promouvoir la chasse au phoque.

En ce qui a trait au communiqué, sachez qu'il n'émanait pas du ministère. Il s'agit d'une erreur administrative qui n'aurait jamais dû se produire. Je ne suis pas certaine que la facture correspondant au communiqué de presse ait été envoyée au Parti conservateur, car je ne dispose pas de cette information, mais c'est bien à lui qu'elle devait être adressée.

Le sénateur Cowan : En ce qui concerne le dernier point, trouverez-vous la réponse? Peut-être auriez-vous l'amabilité de déposer la facture ici en indiquant également si elle a été réglée.

Mme Shea : Certainement.

Le sénateur Cowan : En ce qui a trait au projet de loi, vous conviendrez avec moi que les membres de la Chambre et du Sénat ont le droit de présenter des projets de loi à leurs chambres législatives respectives, et que ces projets de loi ne sont pas nécessairement appuyés par le parti auquel ces députés ou ces sénateurs appartiennent. N'est-ce pas?

J'ignore quelle est votre expérience à cet égard, mais d'après la mienne, les projets de loi sont normalement...

Le sénateur Cowan : Je parle des projets de loi d'initiative parlementaire.

Mme Shea : Même dans le cas des projets de loi d'initiative parlementaire, si un membre de votre parti dépose une mesure législative, je m'attendrais à ce que les autres membres de votre parti soient au courant.

Le sénateur Cowan : À titre d'exemple, le récent projet de loi de Garry Breitkreuz a été présenté par un député, un membre du Parti conservateur. Est-ce donc un projet de loi qui bénéficie de l'appui du gouvernement conservateur?

Mme Shea : Nous devrons attendre de voir.

Le sénateur Cowan : Je pense que non, et que le gouvernement s'en est déjà dissocié. Voilà où je veux en venir. J'essaie de vous dire qu'il est injuste de prétendre qu'un projet de loi dont vous savez qu'il n'a obtenu aucun appui d'un membre du Sénat puisse être soutenu par le chef d'un parti et le parti lui-même. Je vous dirais que c'est injuste, et je vous demande de le reconnaître.

Le président : Je crois que le temps a filé, et je vais céder la parole à d'autres intervenants. Nous tentons de surveiller attentivement le temps et, selon moi, nous respectons les délais le plus exactement possible.

Le sénateur Downe : Bienvenue, madame la ministre. Vous avez indiqué, dans votre déclaration préliminaire, que vous étiez la première ministre des Pêches venant de l'Île-du-Prince-Édouard en 50 ans, et c'est l'honorable Angus MacLean, je crois, qui était le dernier. Vous avez une grande pointure à remplacer, et je crois que vous y parviendrez, tout comme les autres gens de l'Île l'ont fait dans cet important ministère.

L'industrie des pêches est en réelle difficulté à l'Île-du-Prince-Édouard. Les individus et les organisations de l'Île-du- Prince-Édouard s'en remettent au gouvernement du Canada pour qu'il leur fournisse une aide financière. Quand votre gouvernement lancera-t-il un programme de rachat pour le secteur de la pêche à l'Île-du-Prince-Édouard?

Mme Shea : Bien entendu, cette question se pose depuis des années. Ce dossier, particulièrement en ce qui a trait au problème du détroit de Northumberland, où beaucoup trop de gens traquent trop peu de homards, a été porté à mon attention tandis que j'exerçais mes fonctions de politicienne provinciale.

C'est un problème depuis 10 ans ou plus. J'ai été très franche avec toutes les organisations de pêcheurs. Le gouvernement du Canada n'aura jamais assez d'argent pour racheter tous les permis de l'ensemble du pays. Ce n'est pas un problème propre à l'Île-du-Prince-Édouard. D'autres espèces, dans d'autres provinces, nécessitent une rationalisation.

J'ai dit aux organismes que nous appuierions l'autorationalisation par tous les moyens possibles grâce à nos politiques. C'est une chose à laquelle nous travaillons avec les organisations.

Pas moins de trois organisations différentes, à l'Île-du-Prince-Édouard, ont présenté un plan de rationalisation. D'autres ordres de gouvernement, l'industrie et les organismes peuvent tous jouer un rôle pour rendre ces industries durables.

Vous m'avez entendu parler de certification. Notre industrie des pêches doit être soumise à un processus de certification, et devra établir des exigences en matière d'étiquetage pour garantir aux consommateurs que le produit est issu d'une pêche durable. Toutes les espèces seront soumises à un étiquetage, y compris dans l'industrie du homard. Nous devrons démontrer que chaque produit vient d'une pêche durable. La rationalisation est l'une des solutions pour remédier à la question de la durabilité.

Le sénateur Downe : Madame la ministre, vous avez raison. La zone de pêche 26A constitue un problème de taille dans l'industrie du homard.

Comme votre gouvernement est prêt à porter secours à l'industrie automobile ontarienne, avec plus de 4 milliards de dollars de financement jusqu'ici, pourquoi n'êtes-vous pas disposée à aider l'industrie de la pêche, qui est si importante pour l'Île-du-Prince-Édouard, et à annoncer un programme de rachat?

Mme Shea : Je le répète, nous ne pouvons annoncer un programme de rachat pour une seule province. Un tel programme devrait s'appliquer à l'ensemble du pays. Le gouvernement fédéral a accordé des prêts remboursables à l'industrie automobile. Nous avons un fonds d'accès communautaire dont les critères sont encore en cours d'élaboration. Nous espérons être capables de traiter les questions liées aux pêches au moyen de ce fonds, mais les critères n'ont pas été approuvés. Le travail se poursuit.

Je comprends les problèmes auxquels sont confrontés de nombreux pêcheurs à l'Île-du-Prince-Édouard. J'ai eu de nombreuses et longues heures de conversation avec eux à ce sujet.

Le sénateur Cook : Merci de votre venue, madame la ministre. Je suis originaire de l'autre l'île.

L'une de mes préoccupations concerne la lenteur de l'évolution des choses. D'après mes notes, dans le budget de février 2008, 720 millions de dollars avaient été affectés au remplacement du Louis S. St-Laurent, et 8 millions de dollars à la construction d'un port à Pangnirtung. Quels sont les progrès quant à l'achèvement de ces initiatives?

Dans vos remarques préliminaires, vous avez parlé des 175 millions de dollars alloués aux nouvelles embarcations de la Garde côtière. Les habitants du Nord sont des gens de la mer. Ils vivent près des côtes. Il me semble tout à fait anormal qu'un pêcheur du Nord n'ait aucun port et doive débarquer ses prises au Groenland. C'est ce qui me met en colère, surtout en ce qui concerne le port de Pangnirtung.

Mme Shea : Je devrais peut-être demander à l'un des représentants du ministère de répondre au sujet du degré d'avancement des projets. Néanmoins, nous avons investi 11 millions de dollars supplémentaires pour accélérer la construction du port de Pangnirtung.

Claire Dansereau, sous-ministre, Pêches et Océans Canada : La construction d'un quai à Pangnirtung sera un processus de longue haleine. C'est pourquoi des fonds additionnels ont été accordés cette année dans le budget. C'est en reconnaissance du fait que ce sera un projet long et compliqué.

Une partie de l'argent prévu à l'origine dans le budget a servi à lancer le processus et à déterminer les besoins du point de vue technique. Comme l'a dit la ministre, davantage d'argent a été alloué à ce projet dans le train de mesures de relance économique. Nous avançons aussi rapidement que possible, tout en sachant que le milieu de l'ingénierie a peu de connaissances sur la manière de construire un quai dans ces conditions. Les travaux ont commencé.

Le sénateur Cook : Si je comprends bien, nous en sommes encore à évaluer la faisabilité du projet pour le port de Pangnirtung?

Mme Dansereau : Nous en sommes à l'étape de la conception. Nous avons déterminé l'endroit où nous voulons établir le port et nous passons maintenant à des plans de conception plus détaillés.

Le sénateur Raine : Merci d'avoir accepté notre invitation aujourd'hui. Je trouve que ce qui se passe dans le Nord est fascinant. Je comprends l'impatience de la population de voir la construction de ce port terminée.

J'ai une question à propos des élevages de saumon en Colombie-Britannique. En février, la Cour suprême de la Colombie-Britannique a statué que la gestion des élevages de saumon serait de compétence fédérale plutôt que provinciale. J'aimerais savoir comment ça va fonctionner. Allons-nous créer un ministère particulier? Comment allons- nous procéder? Est-ce pour bientôt?

Mme Shea : Je crois que le gouvernement fédéral gère l'industrie de l'aquaculture dans une seule province, c'est-à- dire l'Île-du-Prince-Édouard. Depuis l'annonce de cette décision, une des entreprises privées a interjeté appel. Le processus juridique pourrait donc s'étirer davantage.

Peu importe qui aura le mandat de gérer l'industrie de l'aquaculture, nous avons travaillé avec la province de la Colombie-Britannique pour veiller à ce que cette industrie soit florissante. C'est une industrie en pleine croissance, et nous devons nous assurer qu'elle sera gérée de façon optimale. À cette fin, des experts en la matière ont été mandatés pour fournir de l'information à la province.

Le sénateur Raine : Est-ce que la politique pour la durabilité des pêches et les examens des répercussions sur l'écosystème du ministère des Pêches et des Océans vont aussi en tenir compte pour ce qui est des exploitations salmonicoles? Disposons-nous de données de base pour être en mesure de comparer l'état de l'écosystème avant et après l'établissement de ces centres piscicoles?

La population s'inquiète des populations de saumon de l'Atlantique sur la côte Ouest.

Mme Shea : Il est sûrement possible de trouver cette information quelque part. Nous n'avons pas ces renseignements avec nous aujourd'hui. Beaucoup de recherches scientifiques sont effectuées sur l'aquaculture. Nous tentons d'établir une réglementation. Même si ce sont les provinces qui assurent la gestion de l'industrie de l'aquaculture, nous voulons établir une réglementation qui s'appliquera à l'ensemble de l'industrie pour garantir une gestion plus efficace et uniforme des centres piscicoles.

Le sénateur Brown : Je tiens à vous féliciter pour votre lutte afin de protéger la chasse au phoque. Je remplace le sénateur Johnson aujourd'hui. Je souligne que les torts causés au mode de vie de nos citoyens se ressentent jusqu'en Alberta; des torts qui découlent parfois de décisions prises à l'étranger. Je pense par exemple à notre visite dans l'Arctique l'an dernier, alors que l'ancien maire de Norman Wells nous avait accusés d'avoir détruit la vie des gens du Nord.

Son commentaire nous avait d'abord laissé pantois. Il nous a ensuite expliqué que nous avions bouleversé leurs vies en leur donnant des fusils et des motoneiges. Nous avons été à même de constater à quel point nous avions chamboulé leur univers lorsque nous avons vu de jeunes enfants avec des cellulaires et des ordinateurs portables.

Il faut modérer ces changements, et je crois que c'est à ça que revient le maintien de la chasse au phoque. Nous devons tâcher de ne pas chambarder la société du tout au tout, du jour au lendemain. J'appuie votre lutte visant à préserver ce mode de vie.

Je vais vous donner un exemple, que vous pourrez utiliser, j'espère, dans le cadre de votre lutte. La dernière fois que le Canada a imposé des restrictions aussi sévères à l'égard d'une espèce en particulier, c'était pour la chasse à la bernache du Canada. Il y a tellement de bernaches aujourd'hui en Amérique du Nord, qu'elles sont devenues une plaie dans les parcs et aux environs des aéroports. Elles endommagent également l'écosystème des petits lacs où elles s'installent. Nous essayons maintenant de trouver des moyens pour en éliminer une partie.

Je vous demande de penser à utiliser cet argument contre les tirades émotionnelles qui nous viennent de l'Europe.

Mme Shea : C'est une excellente suggestion. Je suis d'accord avec vous pour dire qu'il doit y avoir un certain équilibre dans la nature. Il suffit de parler aux pêcheurs commerciaux, particulièrement sur la côte Est, pour découvrir à quel point les phoques causent du tort aux populations de poissons. Un pêcheur de flétan m'a donné des photos montrant six poissons dévorés jusqu'à l'os, de même qu'une photo qu'il a prise d'un phoque à côté de son bateau. Les pêcheurs de homards vous diront que les phoques fracassent les pièges à homards au fond de l'eau pour en extirper les appâts. Ils font sans contredit des dommages.

Nous avons invité un chasseur d'Iqaluit à nous accompagner lorsque nous sommes allés en Europe pour discuter de la chasse au phoque avec les politiciens. J'ai trouvé ses interventions très pertinentes. Il a dit aux politiciens qu'il n'approuvait pas leur décision de faire une exception pour la chasse au phoque inuite dans leur proposition de frapper d'embargo les produits du phoque provenant du Canada, estimant que cette chasse est cruelle. Il a affirmé s'être senti utilisé par les politiciens désireux de soulager leur conscience. Il a aussi souligné qu'il serait touché par toute interdiction imposée aux produits du phoque du Canada, peu importe si on lui permettait encore de chasser, car les Inuits font aussi le commerce de leurs prises. En tuant les marchés, on nuit aussi à la chasse au phoque inuite.

Le sénateur Manning : J'aimerais d'abord applaudir le Ministère et la nouvelle ministre pour les efforts déployés afin de sauvegarder la chasse au phoque. Celle-ci est importante pour les communautés côtières non seulement de Terre- Neuve-et-Labrador, mais aussi de plusieurs autres régions du Canada.

Je sais que le Ministère et le gouvernement se butent aux résistances du Parlement européen. Je comprends que les manigances d'un de nos parlementaires, le sénateur Harb, ont posé quelques problèmes. Il est important de noter que le sénateur Harb est un parlementaire canadien. Le message que le Fonds international pour la protection des animaux et d'autres groupes européens véhiculent, c'est qu'un parlementaire canadien a décidé de sonner l'alarme ici, au Canada. Il s'est acoquiné avec cet organisme. Comme dirait ma mère : « Qui se ressemble, s'assemble ». Il faut voir où se situe exactement le problème.

Le vote on ne peut plus important concernant la résolution mise de l'avant — soit de bannir les produits du phoque de l'Union européenne— devait avoir lieu en avril au Parlement européen. C'est ce qui était prévu. Nous avons maintenant appris que le vote avait été reporté quelque part entre le 4 et le 7 mai.

Je comprends que c'est un dossier de taille pour vous et votre ministère. Pouvez-vous nous dire ce qui a été fait au cours des deux derniers mois pour faire valoir notre position en Europe? Que comptez-vous faire d'ici à ce que se tienne le vote?

Finalement, j'aimerais savoir quels sont les plans futurs du gouvernement et de votre ministère advenant qu'on ne réussisse pas à faire pencher le vote en notre faveur au mois de mai.

Mme Shea : Depuis mon arrivée à Pêches et Océans, je me suis concentrée principalement sur ce dossier. Nous avons travaillé fort pour tenter de convaincre les parlementaires européens que notre chasse au phoque n'est pas cruelle.

On nous a signalé que les Européens étaient persuadés que nous utilisions des méthodes cruelles pour faire la chasse au phoque, alors nous voulons les rassurer que ce n'est pas le cas. Nous avons engagé un groupe de vétérinaires indépendants et leur avons demandé de définir ce qui constituait une chasse au phoque non cruelle. C'est ce qu'ils ont fait avant de formuler différentes recommandations, que nous avons utilisées pour élaborer un règlement régissant la chasse au phoque.

Selon leurs recommandations, 98 p. 100 de nos méthodes sont déjà conformes à tous les critères d'une chasse sans cruauté. Nous avons néanmoins mis les recommandations sous forme de règlement. L'une d'elles indiquait que les phoquiers devaient recevoir une formation. Nous avons donc vu à assurer cette formation de façon à ce que les phoquiers sachent ce qu'est une chasse au phoque non cruelle et quels en sont les paramètres.

Nous sommes retournés devant les représentants de l'Union européenne pour leur donner la preuve que notre chasse au phoque n'était pas cruelle, comme ils le réclamaient. Nous suivons à la lettre les recommandations de ce groupe indépendant de vétérinaires. Mais ça n'a rien donné. Les parlementaires étaient résolus à aller de l'avant avec cette interdiction.

Lors de mon passage en Europe, j'ai rencontré des parlementaires qui m'ont affirmé loin des micros qu'il s'agissait d'un enjeu politique pour eux. Les ONG et des groupes d'intérêts spéciaux avaient fait tant de tapage au sein de l'Union européenne que la population réclamait maintenant l'interdiction de la chasse au phoque canadienne. Les parlementaires étaient alors tenus d'agir selon la volonté de leurs concitoyens, un souhait fondé sur les sentiments plutôt que sur les faits.

Une des parlementaires a d'ailleurs reçu un courriel alors que nous étions dans la pièce avec elle. Le courriel mentionnait qu'elle devait absolument appuyer l'interdiction de la chasse au phoque canadienne, sans quoi la population de phoques allait disparaître.

Lorsque les parlementaires entrent au Parlement pour aller travailler, les ONG sont là pour distribuer de petits phoques en peluche blancs. Il s'agit d'une campagne de relations publiques orchestrée par des groupes d'intérêts spéciaux. Ces groupes répandent de fausses informations et tentent de jouer avec les sentiments des Européens. C'est devenu un enjeu politique pour les parlementaires. Nous avons défendu notre cause auprès d'eux et leur avons demandé de prendre des décisions fondées sur les faits, pas sur les émotions. Et nous espérons que c'est ce qu'ils font. Le vote a été reporté jusqu'en mai. Nous espérons qu'ils prennent un peu plus de temps pour examiner les faits et évaluer quels seraient les impacts, selon l'avenue qu'ils décident d'emprunter.

Nous avons mené notre propre campagne de relations publiques dans les médias, en plus d'envoyer des documents aux parlementaires. Notre ambassadeur, Loyola Sullivan, a beaucoup contribué à ce dossier également, en communiquant avec le plus de gens possible. Nous sommes entrés en contact avec des parlementaires par téléphone, dans l'intention de rassembler des appuis en notre faveur.

Nous avons clairement fait savoir que nous n'allions ménager aucun effort, comme prendre des mesures commerciales par l'entremise de l'OMC, pour contrecarrer toute décision qui irait à l'encontre de nos intérêts. Ils savent pertinemment que nous sommes prêts à nous battre et sont conscients de toute l'importance que revêt la chasse au phoque au Canada.

Le sénateur MacDonald : Je tiens à souhaiter la bienvenue à la ministre et à ses fonctionnaires. On a beaucoup parlé dernièrement sur la côte Est de la possibilité de confier un rôle constabulaire ou de maintien de l'ordre à la Garde côtière pour ce qui est des pêches. Une proposition qui a suscité certaines réserves. On semble ainsi s'éloigner du mandat premier de la Garde côtière. Pouvez-vous nous dire ce qui en est avec cette proposition?

Mme Shea : Je vais demander au commissaire de la Garde côtière de répondre à cette question.

George Da Pont, commissaire, Garde côtière canadienne, Pêches et Océans Canada : Cette idée a donné lieu à bien des conjectures, mais le rôle que joue actuellement la Garde côtière dans les activités d'exécution de la loi et de maintien de la sécurité en est un de soutien. Elle fournit des biens, des ressources et une expertise aux organismes et aux ministères qui jouent un rôle de première ligne dans le maintien de l'ordre. Notre mandat consiste principalement à aider les agents de la conservation et de la protection à faire respecter la loi dans la zone réglementée par l'OPANO et ailleurs au pays. Nous appuyons les activités de la GRC, de l'Agence des services frontaliers du Canada et d'autres organismes, sur demande, mais on ne prévoit pas étendre ce rôle pour le moment.

Le sénateur MacDonald : Ma famille a longtemps œuvré dans la Garde côtière. Deux de mes oncles ont été capitaines et plusieurs membres de ma famille ont fait partie des équipages de la Garde côtière. On a beaucoup parlé d'un rôle qui soit davantage constabulaire. Est-ce que les équipages portent des armes maintenant? Dans quelle mesure doivent-ils jouer un rôle de maintien de l'ordre? Qu'entendez-vous exactement par « rôle de soutien »?

M. Da Pont : Cela varie. Environ 50 membres de la Garde côtière sont formés pour porter des armes afin d'aider les agents de la conservation et de la protection, surtout dans la zone réglementée par l'OPANO. Pour le reste, on parle généralement de temps-navire. Nos centres de communication et de trafic maritimes fournissent à tous les autres centres de l'information sur le domaine maritime. Ces centres de sécurité maritime transmettent des renseignements au ministère de la Défense nationale et à d'autres organismes. Seule une infime portion de notre personnel est formée et autorisée à porter des armes. Toutefois, nos équipages ne portent des armes que dans des situations exceptionnelles et seulement à l'appui de l'organisme de première ligne autorisé et responsable.

Le sénateur MacDonald : On ne prévoit donc aucun changement immédiat?

M. Da Pont : Non, aucun.

Le sénateur Watt : Je vous souhaite la bienvenue, madame la ministre, à vous et à vos fonctionnaires. J'aimerais aborder trois questions. Vous avez déjà parlé de Pangnirtung. Un de vos fonctionnaires, je crois, a mentionné qu'il faudra attendre un certain temps avant que le projet ne soit terminé, car l'infrastructure, l'emplacement et les régions géographiques, entre autres, n'ont pas encore été déterminés. Je crois que c'est le premier port du genre à être construit. Je comprends ça. Nous aimerions savoir de combien de temps vous pensez avoir besoin. Parle-t-on d'un an, de deux ans, de trois ans? Avez-vous une idée approximative? Combien de temps devrons-nous attendre avant que le port ne soit construit?

L'autre point que j'aimerais soulever est une question qui traîne depuis longtemps, particulièrement dans mon coin de pays, au Nunavik. Il y a deux ans, des personnes ont été arrêtées pour avoir pêché un béluga. Ces personnes avaient déjà dépassé leur quota, mais elles ont quand même réussi à pêcher un béluga de plus. Un hélicoptère est alors arrivé tandis qu'elles dépeçaient leur prise et est atterri tout près d'elles. Ces personnes ont été arrêtées. Du même coup, les vents produits par l'hélicoptère ont détruit la viande et le muktuk.

Madame la ministre, ce dossier n'a toujours pas été réglé. La date de l'audience est sans cesse reportée. Je crois que le ministère des Pêches et des Océans a décidé d'inculper ces pêcheurs et de faire de cette affaire un exemple.

Je suis certain que vous n'êtes pas insensible à cette question. Nous sommes en pleine crise économique, une crise qui est bien plus douloureuse au Nunavik que dans la portion sud du pays. Vous devez comprendre que notre peuple autochtone paie deux taxes : une taxe provinciale et une taxe fédérale. Nous sommes le seul peuple autochtone du pays à payer deux taxes. Les Premières nations n'en paient pas, mais nous, oui.

De plus, nous sommes les contribuables les plus taxés au pays. La valeur marchande de notre dollar se situe sous la barre des 38 cents, et elle diminue de jour en jour. Il est de plus en plus difficile de joindre les deux bouts. Même à salaire égal, notre dollar n'a aucun pouvoir d'achat.

Compte tenu de tous ces facteurs, j'affirmerais que les personnes qui ont pêché ce béluga l'ont fait pour nourrir leurs familles, et c'est une situation qui est appelée à se reproduire. Il faut s'attendre à ce que d'autres incidents du genre se produisent, peu importe les lois en matière de conservation.

Le président : Sénateur Watt, vous devriez peut-être garder du temps pour que la ministre puisse vous répondre.

Le sénateur Watt : Allez-vous me donner la parole dans la deuxième ronde de questions?

Le président : Oui, absolument.

Le sénateur Watt : Je m'arrêterai ici dans ce cas. Autrement, je vais vous inonder de questions et j'ai besoin d'une réponse claire à ce sujet.

Mme Shea : Pour ce qui est du port de Pangnirtung, il est question d'une période de trois ans, qui serait le plus court délai possible.

Pour ce qui est de la pêche au béluga, je ne suis pas au courant de ce dossier. Si cette affaire est actuellement devant les tribunaux, il serait délicat de formuler des commentaires. Même si je connaissais les détails de ce dossier, je ne pourrais pas me permettre de le commenter.

Le sénateur Watt : Pourriez-vous au moins y jeter un coup d'œil? Vous n'avez pas à faire de commentaires.

Mme Shea : Je vous remercie d'avoir soulevé la question.

Vous avez indiqué que cette situation était appelée à se reproduire. Voulez-vous dire que vous allez encourager les gens à enfreindre la loi?

Le sénateur Watt : Non, ce n'est pas mon intention. Mais lorsque les gens ont faim et qu'ils doivent nourrir leurs familles, où vont-ils? Ils n'ont que la mer ou la terre pour se nourrir. Nous ne pouvons pas nous payer le luxe d'aller au magasin du coin. Les prix sont très élevés de nos jours. Les gens ne peuvent plus se le permettre. Et les choses vont de mal en pis. Ceci étant dit, j'aimerais beaucoup que vous vous penchiez sur cette question.

Le président : Nous allons entamer la deuxième série de questions. Madame la ministre, qu'en est-il de votre emploi du temps?

Mme Shea : Je dois vous quitter maintenant, mais auparavant, je veux vous remercier de vos questions. J'apprécie à sa juste valeur toute contribution que vous pourrez apporter au secteur des pêches. N'hésitez pas à me faire part de vos observations.

Le président : Sénateur Robichaud, voulez-vous intervenir?

Le sénateur Robichaud : La ministre voudrait-elle répondre à une question supplémentaire que je lui poserais dans la foulée de ma première question?

Le sénateur Manning : Monsieur le président, le cas échéant, il faudrait que nous puissions, nous aussi, poser quelques questions supplémentaires.

Le président : Six sénateurs figurent sur la liste des intervenants du deuxième tour. Je ne crois pas que la ministre puisse demeurer parmi nous aussi longtemps.

Mme Shea : Vous pourriez peut-être faire parvenir vos questions supplémentaires à mon bureau.

Le sénateur Robichaud : J'interrogerai vos fonctionnaires.

Le président : Avant votre départ, je voudrais, madame la ministre, vous remercier, au nom du comité, d'avoir comparu et d'avoir répondu à nos questions. Vous pourriez peut-être revenir.

Mme Shea : Je vous en prie.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Dans ma première question, je parlais de l'industrie du homard et de la crise à laquelle les pêcheurs et toute l'industrie doit faire face. J'ai cru comprendre, dans la réponse du ministre, qu'elle surveillait de près la façon dont la crise du crédit affecte l'industrie de transformation. C'est le point de départ : les transformateurs ont besoin d'un fonds d'opération pour avancer de l'argent aux acheteurs, qui ensuite achètent du pêcheur.

Est-ce que le ministère peut venir en aide aux transformateurs s'ils ont besoin d'appui pour obtenir du crédit?

Mme Dansereau : Le ministère n'est pas une banque de crédit. Comme madame la ministre l'a mentionné, le ministère peut, toutefois, appuyer les transformateurs et les autres membres de l'industrie auprès de la Banque de développement du Canada ou de la banque d'exportation, car ce sont eux qui accordent le crédit.

Nous travaillons autant que possible avec les banques pour assister les transformateurs. Le ministère n'est pas une banque et par conséquent n'accorde pas de crédit. Toutefois, comme l'a indiqué madame la ministre, nous faisons ce que nous pouvons pour les assister.

Le sénateur Robichaud : Je comprends mal ce que vous voulez dire par l'expression « pour les assister ». S'agit-il simplement de leur dire que vous ne pouvez rien faire et de les envoyer voir une banque?

Mme Dansereau : Nous travaillons avec eux pour les aider à comprendre les marchés. Nous les incitons à adopter une perspective centrée sur les marchés pour voir comment avoir accès à de meilleurs marchés. Nous leur fournissons de l'information et travaillons avec eux afin de mieux comprendre le monde dans lequel nous vivons en espérant ouvrir des marchés. Madame la ministre a indiqué également que nous les aidons côté marketing. Nous les aidons de toutes les façons que nous pouvons selon notre mandat.

Le sénateur Robichaud : Est-ce que vos efforts, côté marketing, mise en marché, promotion, auront un effet sur la pêche au printemps, qui commencera incessamment, au début du mois de mai pour le nord du Nouveau-Brunswick? La saison arrive à grand pas et vous n'êtes pas sans savoir que ces pêcheurs sont très inquiets.

Mme Dansereau : En effet, nous sommes au courant et partageons leurs inquiétudes. Nous avons entamé notre travail avec eux, côté promotion, au mois de décembre. Nous travaillons en collaboration avec les provinces.

Nous avons donné accès à du financement pour la promotion. J'ignore si l'argent a été dépensé. Toutefois, ces fonds ont été mis à leur disposition.

Nous comprenons, et la ministre comprend, les inquiétudes de la part de tous, bien sûr, et nous partageons ces inquiétudes.

[Traduction]

Le président : En ce qui concerne notre horaire, le Sénat commence à siéger à 13 h 30, et je suis disposé à poursuivre nos travaux aussi longtemps que nécessaire. Si les fonctionnaires et les membres du comité sont prêts à demeurer ici le temps nécessaire, nous pourrions faire preuve de souplesse pour la période de questions et réponses. Voilà ce que j'ai à vous offrir.

Le sénateur Adams : La ministre n'a pas répondu à ma question. Ce qui me préoccupe, ce sont surtout les chasseurs et les trappeurs, mais je commencerai par la pêche locale. Pangnirtung avait droit auparavant à 150 permis de pêche blanche. En raison des changements climatiques, la population locale n'a pas pu s'adonner à la pêche blanche au cours des trois dernières années. Elle a perdu tout son matériel de pêche — les hameçons, les cabines, et cetera. — qui est parti à la dérive, il y a trois ans. On est rendu maintenant à 3 000 mètres de l'endroit où l'on pêchait auparavant. La pêche ne s'y pratique pour ainsi dire plus.

Pendant ce temps, les compagnies d'assurances ne veulent plus assurer les activités de la pêche blanche. Nous essayons d'obtenir une indemnisation du gouvernement du Nunavut pour le matériel perdu. La situation est injuste pour les gens qui ne peuvent plus s'adonner à la pêche blanche et pour l'usine de transformation à Pangnirtung.

À Grise Fiord, à Resolute Bay, à Arctic Bay et à Bylot Island — ce qu'on appelle l'Arctic Fishery Alliance —, la plupart des gens sont trappeurs et chasseurs. Beaucoup n'ayant pas d'argent, la chasse au phoque et au caribou notamment a permis de gagner des sous qui viennent s'ajouter à l'aide accordée par le gouvernement du Nunavut.

L'an dernier, l'équipement est arrivé trop tard pour que les recherches puissent être effectuées. On a percé des trous dans la glace pour y jeter une ligne munie de 150 hameçons. J'en ai été témoin près de Pangnirtung. Vous pouvez mettre trois ou quatre lignes dans un trou.

Ces quatre collectivités souhaiteraient faire ce qui a été fait l'an passé, parce qu'elles disposent maintenant de l'équipement nécessaire. L'an passé, on a procédé à des essais dans la zone côtière pour déterminer la quantité de turbots qu'on pouvait pêcher dans ces quatre collectivités.

Dans l'intervalle, les chasseurs et les trappeurs ont pu acheter du matériel avec le peu d'argent qu'ils ont reçu. La ministre a parlé plus tôt des 200 millions de dollars qui ont été accordés pour la tenue de l'étude pancanadienne. Le ministère devrait essayer d'affecter une partie du montant à ces collectivités pour qu'on puisse effectuer un peu de recherche. Il n'a pas réalisé beaucoup de recherche au Nunavut, particulièrement dans la zone côtière, à l'intérieur de la limite des 12 milles. Il faudrait aider davantage ces collectivités, qui s'adonnent à la pêche blanche, pour qu'elles puissent envisager la pêche commerciale. Il faudrait leur accorder plus de quotas annuels afin qu'elles puissent gagner davantage. Voilà ce qui me préoccupe.

Mme Dansereau : Je fais peut-être erreur, mais je l'impression que les questions qui vous préoccupent sont normalement traitées par le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut. C'est, je pense, l'organisme pertinent en la matière, même si les sénateurs ne sont pas sans savoir que nous collaborons de près avec le conseil. Nous lui ferons part de vos préoccupations, mais que je vous recommande vivement de vous adresser au conseil.

Le sénateur Adams : Monsieur le président, j'ai indiqué à la ministre que, pour obtenir des quotas, vous devez avoir de l'équipement et un navire. C'est ce que le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut a répondu à la population locale. On permet à des navires étrangers de pêcher, ce qu'on interdit à la population locale. Je voudrais savoir si telle est la politique du ministère. Si les Inuits demandent des quotas, doivent-ils avoir des navires? Est-ce prescrit par un règlement du ministère?

Mme Dansereau : Comme la ministre l'a indiqué, on envisage la possibilité d'accorder des permis à des navires de pêche de tailles différentes. Je sais que c'est ce qui est envisagé. Nous ne pouvons pas vous donner de réponse à l'heure actuelle, mais nous collaborons avec le conseil pour nous attaquer à ce problème.

Le président : Les préoccupations du sénateur Adams portent notamment sur les compétences en matière de gestion des ressources. Nous savons qu'un accord sur une revendication territoriale a été conclu et nous savons que le conseil de gestion exerce des compétences à cet égard, mais nous savons également que le ministère est responsable des pêches fédérales de concert avec les Inuits, si j'ai bien compris. Le ministère n'a pas encore cédé toutes ses compétences à ce chapitre. Il fait encore partie du processus de planification et d'administration.

Les frustrations du sénateur Adams tiennent notamment au fait qu'il voudrait savoir à qui il faut s'adresser pour obtenir des réponses : au Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut, au MPO ou aux deux. C'est une question très floue. Nous ne pouvons pas obtenir de réponse des autorités compétentes. C'est là une partie du problème. C'est du moins ce que nous avons cru comprendre lorsque nous nous sommes rendus dans l'Arctique.

Mme Dansereau : Vous avez raison : c'est légèrement flou. Les choses sont claires en ce qui concerne les compétences sur les zones terrestre et maritime visées par la revendication territoriale. Il incombe donc au conseil de gestion de prendre les décisions, même s'il doit manifestement le faire dans le cadre d'une recommandation formulée à la ministre, qui n'interviendra pas très souvent à cet égard étant donné qu'il s'agit d'une recommandation du conseil de gestion.

À l'extérieur de ces zones, la décision revient manifestement à la ministre, qui généralement consulte au moins le gouvernement du Nunavut.

Le sénateur Adams : L'attribution des quotas pour la zone OA incombe entièrement au Nunavut. Certains quotas devraient être accordés à la population locale, et non pas à de gros pêcheurs commerciaux de l'extérieur du Nunavut. Telle est la situation actuelle, et c'est pourquoi nous essayons de déterminer comment on en est arrivé à ces modalités.

L'an dernier, Burton Island avait obtenu un quota de 1 030 tonnes. On n'a rien reçu cette année parce qu'on n'avait pas de navires. Dans l'intervalle, on peut louer des navires de l'extérieur. Une fois qu'on a obtenu les quotas, on peut les transférer à qui l'on veut, par exemple à la société qui se trouve à Terre-Neuve, en Nouvelle-Écosse ou ailleurs. C'est pourquoi nous prenons des mesures pour que les quotas demeurent dans les collectivités et ne soient pas cédés en Europe et ailleurs.

Le président : Nous avons tenu des séances sur cette question. Nous l'avons étudiée, et nous attendons encore certaines réponses. Nous ne jetterons pas l'éponge.

Le sénateur Cook : Ma première question portait sur le remplacement du Louis S. St-. Laurent. À maintes reprises, de nombreux témoins ont répété au comité que la flotte de la Garde côtière est vieillissante et que le délai est très long lorsqu'il faut remplacer un brise-glace. Le Louis S. St-Laurent a 40 ans.

Le budget de 2008 affectait à son remplacement un montant de 750 millions de dollars. A-t-on au moins tâté le terrain? Le processus est-il au moins entamé? Faudra-t-il cinq ou dix ans pour mener à bien le tout? Si les navires de la Garde côtière sont vieillissants, nous avons là un problème crucial auquel il faut s'attaquer, lorsqu'on tient compte des changements climatiques dans l'Arctique. Nous n'avons pas les ressources nécessaires.

Tel est l'objet de mes frustrations et de mes préoccupations. J'aimerais bien obtenir des réponses.

M. Da Pont : Je fais écho à vos préoccupations sur la nécessité d'agir rapidement. Le processus est bien entamé, et nous avons certainement fait plus que tâter le terrain.

Nous avons presque terminé ce que nous appelons le « profil de la mission » pour le brise-glace polaire, c'est-à-dire que nous avons déterminé essentiellement les capacités exigées du navire.

Selon nous, le gouvernement canadien se dotera ainsi d'un atout pour mettre en œuvre non seulement les programmes de la Garde côtière, mais également ceux de nombreux autres ministères. La tâche ne sera ni facile ni simple, car nous faisons l'acquisition d'un navire qui durera au moins 40 ans. Nous essayons donc d'évaluer non seulement les capacités et les exigences actuelles, ce qui ne pose pas problème, mais également celles qui évolueront au fil du temps.

Nous avons presque terminé ce « profil de la mission », qui nous permettra d'établir ce que nous appelons l'» énoncé des besoins opérationnels », document essentiel à la mise en œuvre de la conception du navire et au processus d'appel d'offres.

Lorsqu'il a annoncé l'octroi de crédits dans le cadre de ce projet, le gouvernement n'a pas indiqué qu'il s'agirait d'un long processus. J'en ai expliqué les raisons la dernière fois que j'ai comparu devant le comité. Nous comptons remplacer le Louis S. St-Laurent en 2017, soit dans environ huit ans. Nous envisageons lancer la première étape du processus d'appel d'offres l'an prochain, alors que nous mettons la dernière main à l'énoncé des besoins opérationnels et aux documents techniques nécessaires.

Le processus est bien entamé. En fait, nous sommes légèrement en avance par rapport à l'échéancier que nous avions établi au début du projet.

À l'exception du Terry Fox, le reste de la flotte des brise-glaces est en très bon état, en dépit de l'âge de certains navires. Nous avons considérablement investi dans ces navires, et nous sommes très confiants que les brise-glaces moyens ne devront être remplacés qu'après 2020. Nous comptons entamer la planification du renouvellement de la flotte à ce moment-là.

En ce qui concerne le Terry Fox, nous voudrions envisager les diverses solutions un peu plus tôt, parce que nous estimons que son remplacement suivra de quelques années celui du Louis S. St-Laurent.

Le président : D'autres navires de la Carte côtière doivent être remplacés. Un programme a-t-il été mis en œuvre à cet égard?

Lorsque nous nous sommes rendus à Iqaluit, nous avons découvert que l'administration centrale de la Garde côtière pour Iqaluit était établie à Sarnia, en Ontario. La Garde côtière envisage-t-elle de rapprocher l'administration du secteur opérationnel?

Si je pose cette question, c'est en raison de ce qui se passe actuellement dans l'Arctique. Tout le monde le sait, la calotte polaire s'amincit. Davantage de navires sillonneront la région, la pollution augmentera, les activités minières s'intensifieront, et cetera.

Compte tenu de la situation du Canada par rapport à ce qui se passe actuellement dans l'Arctique, y transférer le secteur administratif des opérations s'y déroulant serait une solution logique pour certains d'entre nous. Il faut élaborer une stratégie générale, à laquelle il faut associer les autres ministères. Cependant, la Garde côtière pourrait prendre l'initiative de transférer dans l'Arctique son secteur administratif des opérations s'y déroulant.

M. Da Pont : Je répondrai d'abord à votre première question sur la planification générale du renouvellement de la flotte de la Garde côtière. Dans ses derniers budgets, le gouvernement affecté à ce renouvellement 1,4 milliards de dollars en tout. Ce montant servira à remplacer quelque 17 de nos 40 grands navires. C'est un engagement financier important, ce qui me rassure beaucoup.

Notre situation est analogue à celle des autres ministères et organismes gouvernementaux : nous avons un plan à long terme pour le renouvellement de notre flotte, plan que nous soumettrons à l'examen du gouvernement à point nommé.

Nous ne nous sommes pas encore penchés sur le transfert de certains secteurs de l'administration de la Garde côtière de Sarnia vers le Nord, où se déroulent nos opérations. Vous n'êtes pas sans savoir que nous avons deux centres de Services de communication et de trafic maritimes — l'un à Iqaluit et l'autre à Inuvik —, qui sont en service selon la saison. Nous avons une station à Hay River. En outre, nous avons déjà établi dans plusieurs collectivités du Nord des dispositifs d'intervention environnementale. Bon nombre d'opérations de premier plan sont menées dans le Nord. Bon an mal an, neuf ou dix navires sillonnent les eaux dans le Nord de juin à novembre.

Nous menons beaucoup d'opérations dans le Nord. Le soutien administratif se trouve pour l'instant à Sarnia. Le problème qui se pose, c'est que ces activités sont saisonnières, à peine six mois par année. C'est pourquoi nous n'avons pas vraiment évalué les besoins à plus long terme pour cette région.

Le président : C'est vrai. Les activités sont saisonnières, y compris la pêche. Cependant, le MPO a établi son centre des opérations à Halifax et à St. John's pour la côte est, et en Colombie-Britannique pour la côte ouest, ce qui est tout à fait normal.

Il y a une anomalie, nous semble-t-il, en ce qui concerne l'Arctique. Le gouvernement semble reconnaître généralement que le secteur administratif des opérations se déroulant dans l'Atlantique devrait se trouver dans la région Atlantique, et le même principe vaut pour le Pacifique. Le principe s'applique non seulement à votre organisme, mais également à tous les autres ministères. Cependant, il ne s'applique pas à l'Arctique. Le gouvernement semble croire qu'il peut administrer de l'Ontario les opérations se déroulant dans l'Arctique.

La situation nous apparaît simplement illogique, surtout dans la conjoncture actuelle. Les membres du comité sont, à mon avis, tous d'accord sur ce point. Nous devons agir.

Il y a également le problème de l'attrition au sein de la Garde côtière. La Garde côtière envisage-t-elle de recruter des Inuits? A-t-elle une politique à cet égard?

M. Da Pont : Cette question a été soulevée la dernière fois que nous avons comparu devant vous, si je me souviens bien. Le processus est enclenché. Nous n'avons pas encore établi la structure officielle que je souhaiterais. Depuis la présente année, la Garde côtière auxiliaire canadienne est présente dans quatre nouvelles collectivités. Il faut donc en former les nouveaux membres.

Notre stratégie de recrutement dans différents autres domaines est clairement axée sur les Autochtones et les Inuits.

Il s'agit maintenant de transposer notre volonté dans les faits. En grande partie, ces emplois dans le Nord sont saisonniers, de juin à novembre. Actuellement, beaucoup d'entre eux sont occupés par des gens qui viennent du Sud. L'embauche dans le Nord est problématique en raison du caractère entièrement saisonnier des opérations qui y sont menées. Il est difficile de trouver des candidats prêts à travailler dans le Sud pendant la période morte.

Néanmoins, nous nous penchons très sérieusement sur la question pour essayer d'intégrer au fur et à mesure ces considérations à notre stratégie de recrutement générale. Comme vous l'avez fait remarquer à juste titre, nous devrons remplacer beaucoup de nos employés au cours des cinq à sept prochaines années, ce qui nous donnera l'occasion de faire réellement bouger les choses à ce chapitre.

Le sénateur Cowan : Je ne sais pas trop si ma question s'adresse à la sous-ministre ou au commissaire. Je vous laisse en décider.

Je veux vous parler du remplacement et de la reconstitution de notre flotte. En 2006-2007, des annonces ont été faites relativement à des navires de recherche halieutique et océanographique, et à des patrouilleurs semi-hauturiers. Un coût estimatif de 750 millions de dollars a été établi et on s'est rendu compte, à la fin de l'an dernier, qu'il faudrait investir davantage. Ces plans ont donc été mis en veilleuse.

Pourriez-vous nous indiquer où en est actuellement cette initiative et à quel moment les premiers de ces bateaux pourraient prendre la mer, compte tenu de ce que nous a dit le commissaire concernant les délais requis?

Je présume que ces bateaux sont moins compliqués à construire que ceux qui remplaceront, par exemple, le Louis S. St-Laurent ou le Terry Fox.

M. Da Pont : Le processus annulé l'an dernier était une demande de soumission en vue de l'acquisition de 12 patrouilleurs semi-hauturiers. Vous avez raison de dire que ce sont des navires relativement simples par rapport à un brise-glace polaire. Le processus a été abandonné parce que les soumissions reçues à ce moment-là étaient considérablement trop élevées au vu du financement disponible.

Je suis heureux de pouvoir vous dire que le 31 mars dernier, nos collègues de Travaux publics, avec lesquels nous avons collaboré de près tout au long de ces processus d'approvisionnement, ont lancé une nouvelle demande de propositions pour l'acquisition de ces patrouilleurs semi-hauturiers. Nous avons revu et remodelé certains aspects de la demande. Je suis persuadé que ce processus sera couronné de succès. Il va de soi que la conjoncture économique et les conditions du marché sont bien différentes de ce qu'elles étaient il y a un an.

Le sénateur Cowan : Commissaire, vous nous parlez des patrouilleurs semi-hauturiers, mais qu'en est-il des navires hauturiers de recherche halieutique et océanographique? Y a-t-il eu des changements à cet égard?

Vous avez dit que les devis ont été modifiés. Pourriez-vous nous donner un aperçu des capacités de ces patrouilleurs semi hauturiers pour le travail dans les eaux arctiques? À quelle date ces patrouilleurs pourraient-ils entrer en fonction?

M. Da Pont : Les patrouilleurs semi-hauturiers ne disposeront d'aucune capacité d'opération dans l'Arctique. Ils ne sont pas conçus pour se déplacer dans les glaces.

Le sénateur Cowan : Quelle est leur capacité de déglaçage?

M. Da Pont : Ils n'ont aucune capacité de déglaçage. Ils ne pourront pas naviguer dans les glaces. Ils ne sont pas conçus à cette fin.

Si nous arrivons à conclure un contrat cette année, nous prévoyons que les premiers patrouilleurs semi-hauturiers pourront être livrés à la fin de 2011.

Pour ce qui est des navires de recherche halieutique et océanographique, nous espérons être en mesure d'amorcer le processus de soumission au début de la prochaine année.

Le sénateur Watt : Comme vous avez déjà répondu en grande partie à ma question, je vais m'intéresser à la dernière partie de votre réponse.

Si ces patrouilleurs ne peuvent pas être utilisés dans l'Arctique pour répondre à nos besoins scientifiques, comment allons-nous nous débrouiller? S'ils ne peuvent se déplacer que dans des secteurs libres de glace, que prévoyons-nous pour l'avenir? Bien que la glace fonde actuellement, il y en aura chaque hiver pendant un certain nombre d'années encore.

Comment le Canada pourra-t-il mener les travaux de recherche scientifique nécessaires dans l'Arctique si nous ne sommes pas équipés pour nous déplacer dans le Nord? C'est ce qui me préoccupe tout particulièrement.

Par ailleurs, nous débattons du dossier de la chasse au phoque depuis longtemps déjà. Année après année, nous faisons valoir les mêmes principes en essayant de convaincre la communauté européenne que nos méthodes sont adéquates.

Ne devrions-nous pas commencer à élaborer des arguments plus convaincants comme, par exemple, ceux s'appuyant sur une pleine utilisation de la ressource? Lorsqu'on parle de pleine utilisation, tout devient une question de goût. Comment abordez-vous cette problématique?

J'aurai une suggestion à soumettre au ministère dans sa recherche d'une solution. Comment pouvons-nous nous sortir de ce bourbier? Je n'ai toujours pas obtenu de réponse à ce sujet.

Nous voulons faire la promotion de la chasse du phoque en tant qu'industrie à part entière. À ce titre, peut être devrions-nous insister davantage sur le concept de la pleine utilisation, y compris la consommation de la viande. Comment pouvons-nous faire valoir que nous ne nous intéressons pas uniquement aux peaux, mais également aux sous-produits? Nous réussissons bien dans la commercialisation de sous-produits comme l'huile, qui a une grande valeur pour les Inuits.

Si nous pouvions inciter les deux communautés internationales à se livrer concurrence quant aux meilleures recettes pour apprêter la viande de phoque, peut-être serions-nous mieux en mesure de contrer les arguments des défenseurs des droits des animaux. Nous devons dire à tous que cette viande est bonne. Si bon nombre d'entre nous qui vivons dans l'Arctique n'avions pas eu les phoques, je ne pense pas que nous serions ici aujourd'hui. Le phoque nous a permis de subsister pendant bien des années et continue de le faire encore aujourd'hui.

M. Da Pont : Je vais commencer avec vos questions concernant les recherches scientifiques dans l'Arctique et les patrouilleurs semi-hauturiers. Comme je vous le disais, ces patrouilleurs ne sont pas conçus pour naviguer dans l'Arctique. Ils auront pour fonction principale d'appuyer les activités de sécurité et d'application des lois ainsi que les opérations de recherche et sauvetage.

Votre question concernant les recherches scientifiques dans l'Arctique est excellente. Chaque année, presque tous nos brise-glaces offrent un soutien considérable aux activités réalisées à ce chapitre. L'un d'eux, l'Amundsen, sert exclusivement comme navire de recherche scientifique. D'autres, comme le Louis S. St-Laurent, consacrent une grande partie de leur temps dans l'Arctique aux activités scientifiques.

La capacité d'appuyer les recherches scientifiques dans l'Arctique est l'un des facteurs fondamentaux pris en compte dans le plan de remplacement de ces navires, et je pense par exemple au Louis S. St-Laurent. Nous allons inclure cette capacité dans les caractéristiques recherchées pour l'acquisition d'un nouveau navire, et nous en ferons de même pour le remplacement de nos autres brise-glaces.

Nous offrons déjà un soutien important pour la recherche scientifique dans l'Arctique et je pense bien que nous allons continuer de le faire en inscrivant cette contribution dans notre planification pour l'avenir.

Mme Dansereau : Pour ce qui est de la chasse au phoque, il est difficile de trouver des arguments qui vont amener les opposants à changer d'avis. Comme vous l'avez dit, voilà déjà longtemps que nous essayons de le faire sans beaucoup de succès. Je ne crois pas qu'il existe d'argument assez fort pour gagner à notre cause ceux qui sont contre la chasse du phoque. Pourtant, bon nombre d'entre eux se sont laissé convaincre par ce que nous appelons les mythes entourant cette chasse. Nous mettons les bouchées doubles pour dissiper ces mythes et nous allons poursuivre nos efforts en ce sens.

Quant à la pertinence de tenir un concours de recettes, je sais que la viande de phoque est consommée dans bon nombre de collectivités du Nord et des Îles-de-la-Madeleine. Je ne crois pas que la viande soit exportée pour le moment. Il faudrait donc mettre sur pied toute une industrie d'exportation. Cependant, nous avons réalisé de grands progrès quant aux gras oméga-3. Il y a des marchés en expansion en Chine et en Europe pour ces produits.

Nous soutenons en outre de très près le travail d'un médecin qui explore la possibilité d'utiliser les valvules cardiaques d'un phoque pour remplacer celles d'un être humain. Ses travaux progressent à grand pas. Il poursuit actuellement ses recherches en Grèce. Il a passé le dernier mois en Europe où il s'efforce de bien faire comprendre aux gens l'importance de ses travaux. Les plongées en profondeur qu'effectue le phoque ont un certain effet sur ses valvules cardiaques, de telle sorte que celles-ci pourraient bien se prêter à une transplantation sur l'homme. Nous appuyons grandement ce médecin dans ses recherches et nous collaborons étroitement avec l'entreprise avec laquelle il a conclu un contrat.

Nous collaborons aussi le plus étroitement possible avec les parlementaires européens. Comme la ministre vous l'a indiqué, elle a discuté avec bon nombre d'entre eux au téléphone. Elle s'est rendue en Europe. Le sénateur et l'ambassadeur sont aussi allés en Europe, moi également. Nous allons tous y rencontrer certains ministres et parlementaires pour leur présenter la question sous une perspective différente.

Nous avons réalisé certains progrès dans le courant de l'hiver, mais nous savons comment les choses se passent en Europe; nous ne serons certains du résultat que le jour des votes, au moment où le tout dernier bulletin sera déposé, parce que les choix évoluent sans cesse.

Quatre comités parlementaires se sont penchés sur la question. Trois d'entre eux se sont prononcés en faveur d'une interdiction totale, l'autre pas — l'un préconise une interdiction avec dérogation, l'option que nous privilégions. Avant que ces comités prennent le vote, nous nous attendions à des résultats différents. Nous croyions que celui qui a tranché en notre faveur allait opter pour une interdiction. Comme il est difficile de préjuger des résultats finaux dans un tel contexte, nous utilisons tous les arguments que nous jugeons valables. Nous avons fait paraître dans les magazines parlementaires des reportages promotionnels présentant des familles non inuites vivant traditionnellement de la chasse au phoque. Il y a en effet certaines familles canadiennes qui tirent depuis des centaines d'années une partie de leurs revenus de la chasse au phoque. C'est une activité traditionnelle pour différentes communautés inuites et non inuites. Nous voulons que les Européens en prennent conscience.

Le président : C'est un dossier qui ne date pas d'hier. Lorsque nous formions le gouvernement dans les années 1980, je me suis rendu là-bas avec le sénateur De Bané, qui était alors ministre des Pêches, pour discuter de la question avec les mêmes personnes. Vingt ans plus tard, nous réitérons ces démarches, mais nous n'avons tout simplement pas d'autre choix.

Le sénateur Robichaud : Je croyais que nous avions abandonné l'appellation « chasse au phoque » pour utiliser « récolte du phoque ». Aujourd'hui, nous parlons uniquement de « chasse », mais je note que mon collègue, le sénateur Watt, fait toujours allusion à la « récolte ». Je pense que nous devrions faire de même, plutôt que de parler de « chasse au phoque ». J'encourage tout le monde à utiliser l'expression « récolte du phoque ».

[Français]

Dans la région OB du Nord, des quotas de pêches furent octroyés à des intérêts du Sud. Un transfert de quota s'est effectué, dans cette région, d'un intérêt à un autre, sans que les pêcheurs du Nunavut aient la chance de soumissionner pour l'obtenir — ce qu'ils revendiquent d'ailleurs depuis un certain temps. Pouvez-vous m'assurer que de telles choses ne se reproduiront plus et qu'on donnera à ces gens le droit de premier refus?

Mme Dansereau : Pour répondre à votre première question au sujet des termes « chasse » et « récolte », nous n'avons pas accepté ce changement facilement. En Europe, la plupart des intervenants sont plus confortables avec le terme « chasse ». Les gens avec qui nous travaillons en Europe sont des chasseurs. C'est pourquoi nous employons le terme « chasse » et parfois le terme « récolte ». Tout dépend avec qui nous travaillons.

Il s'agit vraiment d'une chasse et non d'une récolte. Toutefois, nous employons les deux termes.

Le sénateur Robichaud : On pourrait en discuter longtemps.

Mme Dansereau : Pour répondre à votre deuxième question, la décision qui a été prise l'année dernière fut dans le cadre d'un quota déjà alloué. Il ne s'agissait pas d'une augmentation de quota mais d'un transfert.

La politique nous guide dans nos relations avec le Nunavut, et elle ne nous exige pas de les informer ou de leur donner le droit de premier refus. Évidemment, pour maintenir de bonnes relations, il aurait été préférable que nous en discutions avec eux. Sur ce point, nous sommes d'accord et on le fera dans le futur. Toutefois, il ne s'agit pas d'un droit de premier refus.

Le sénateur Robichaud : Vous comprenez tout de même la frustration des gens du Nunavut qui se voient plus ou moins refuser le droit d'au moins en discuter et de faire une soumission.

Ma prochaine question concerne la construction des navires. Dans la conjoncture actuelle, tous les gouvernements cherchent à stimuler l'économie. Nous avons devant nous un projet de construction qui pourrait créer de l'emploi pour un grand nombre de personnes dans l'industrie navale canadienne. Est-ce que l'on en considération le fait qu'il serait possible de construire ces navires dans des chantiers au Canada tout en stimulant l'économie?

M. Da Pont : La politique du gouvernement prévoit que tous les navires doivent être construits au Canada. Cette provision ne change pas.

Pour ce qui est de stimuler l'économie, le gouvernement, dans son dernier budget, a alloué 175 millions de dollars à la Garde côtière pour l'acquisition d'environ 90 petits navires. Ce type de navire peut être livré très rapidement car leur design est plutôt simple. Ainsi, nous augmenterons notre capacité tout en stimulant l'économie d'ici deux ans.

Le sénateur Robichaud : Vous m'assurez que tous les navires qui seront requis par la Garde côtière et par Pêches et Océans, y compris le nouveau brise-glace, seront construits dans des chantiers canadiens?

M. Da Pont : Oui, exactement, c'est la politique du gouvernement.

[Traduction]

Le sénateur Raine : Je ne suis pas d'accord avec la sous-ministre lorsqu'elle affirme qu'il importe peu que l'on parle de récolte ou de chasse. Je pense que c'est très important du point de vue de la commercialisation, car il s'agit d'un dossier à long terme et qu'il faudra bien des années pour changer les attitudes des gens. Je vous rappelle que l'huile de canola n'a pas toujours été connue sous cette appellation. Il est donc important que nous utilisions le terme « récolte ».

Par ailleurs, j'appuie la requête formulée par le sénateur Adams pour que les collectivités et les pêcheurs du Nunavut puissent obtenir des quotas sans être propriétaires d'un navire. C'est un peu le vieux débat de l'œuf et de la poule. Si nous souhaitons optimiser les possibilités économiques pour le Nunavut, il nous faudra choisir cette option.

Mme Dansereau : Concernant votre premier argument, je vous comprends tout à fait. Nous nous assurons toujours d'utiliser le bon terme au moment approprié. On nous dit qu'avec les Européens, le terme « chasse » est préférable, car il aide les gens à comprendre de quoi il en retourne, mais il nous arrive aussi de parler de pêche. Bon nombre des groupes avec lesquels nous travaillons en Europe représentent les chasseurs, ce qui fait qu'ils comprennent bien qu'il s'agit d'une activité de pêche pour laquelle l'utilisation d'armes à feu est généralement interdite et on n'a recours au hakapik que plutôt rarement. Nous sommes conscients de l'importance des termes utilisés. Il ne s'agit aucunement d'un aspect que nous négligeons et nous le prenons sans cesse en considération dans une perspective de commercialisation comme à tous les points de vue.

Quant au cercle vicieux de l'œuf et de la poule pour ce qui est de l'octroi de quotas sans équipement, nous avons actuellement des pourparlers avec le Conseil de gestion de la faune. Une partie de ces questions sont de leur ressort et nous avons reçu leurs recommandations, mais nous allons continuer la discussion.

Ceci étant dit, monsieur le président, j'aimerais vous offrir une séance d'information sur différents points techniques, si cela intéresse votre comité. Je perçois une certaine frustration relativement à des questions restées sans réponse, pas aujourd'hui mais d'une manière générale, quant aux décisions prises dans le secteur des pêches dans le Nord. Je serais heureuse de vous fournir tous les renseignements techniques requis dans un cadre moins formel si vous êtes intéressé à en apprendre davantage.

Le président : Je crois que c'est une possibilité qui pourrait nous intéresser vivement.

J'aimerais formuler quelques observations sur la question des quotas. Il me semble que les chiffres indiquent des pourcentages différents pour l'Arctique et les autres secteurs côtiers dont les stocks sont adjacents. Autrement dit, il y a une plus forte proportion de pêcheurs locaux qui détiennent un quota dans d'autres régions du Canada, comparativement à l'Arctique. Si mon souvenir est exact, dans la région 0A, 100 p. 100 des quotas de turbot sont accordés à des pêcheurs locaux, alors que cette proportion n'atteint que 27 p. 100 dans la région 0B. Je ne pense pas que l'on retrouve des pourcentages semblables ailleurs au pays.

Le sénateur Raine a soulevé la question de l'octroi de quotas à des personnes ou des entités ne possédant pas de bateau. Il y a des précédents à cet égard. Lorsque Roméo Leblanc était ministre des Pêches, nous avons découvert un quota de crevettes hauturières de 11 000 tonnes au large des côtes de l'Atlantique; il a alors octroyé des permis de 1 000 tonnes chacun. Trois de ces permis ont été accordés au Labrador qui ne détenait aucun bateau. Grâce à l'octroi de ces permis et de ce quota, une coopérative florissante a pu voir le jour sur la côte du Labrador et continue de prospérer aujourd'hui en administrant même toutes les usines de transformation dans la partie sud de cette région.

Il y a donc un précédent pour l'octroi de quotas sans bateau. Ce précédent montre que c'est une façon très efficace de développer l'industrie des pêches à l'échelle locale. J'encouragerais donc les gens du ministère à tenir compte des précédents et à s'en inspirer, lorsqu'ils sont pertinents et efficaces, car les possibilités de développement sont immenses.

Nous serions heureux de pouvoir bénéficier d'une séance d'information et nous allons demander à notre greffière de communiquer avec vos collaborateurs pour prendre les dispositions nécessaires.

Le sénateur Raine : Je suppose que vous savez que nous allons produire un rapport à la suite des études menées l'été dernier. Nous venons tout juste de prendre connaissance de l'ébauche. Peut-être serait-il bon que nous nous réunissions à nouveau lorsque ce rapport sera rendu public.

Le président : Tout à fait.

Je veux mentionner à tous mes honorables collègues que nous comptons visiter l'Arctique de l'Ouest. Nous avons visité la région est de l'Arctique le printemps dernier et nous souhaitons maintenant voir l'ouest. Nous avions demandé aux gens de la Garde côtière de nous permettre de les accompagner sur un de leurs bateaux. Nous n'avons pas eu l'occasion de le faire, mais la Garde côtière n'y est pour rien. Nous aimerions maintenant refaire la même démarche pour voir si des arrangements sont possibles. Si la Garde côtière a un navire dans la région ouest, nous nous rendrons probablement jusqu'à la mer de Beaufort. Nous pourrons régler ensemble les détails, mais je voulais seulement vous soumettre cette possibilité.

M. Da Pont : Monsieur le président, nous serons heureux de voir avec votre greffière quels sont les arrangements possibles en fonction, bien évidemment, de nos exigences opérationnelles.

Le président : S'il n'y a pas d'autres questions, je veux remercier les représentants du ministère qui sont venus nous rencontrer aujourd'hui. J'ose espérer que vous serez en mesure de comparaître à nouveau devant nous parce qu'il y a encore différentes questions à régler auxquelles nous souhaitons donner suite.

(La séance est levée.)


Haut de page