Délibérations du comité sénatorial permanent des
Pêches et des océans
Fascicule 12 - Témoignages du 27 octobre 2009
OTTAWA, le mardi 27 octobre 2009
Le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans se réunit aujourd'hui à 17 h 2 pour étudier les questions relatives au cadre stratégique actuel en évolution du gouvernement fédéral pour la gestion des pêches et des océans (sujet : questions relatives à la Garde côtière canadienne en Arctique de l'Ouest).
Le sénateur Ethel M. Cochrane (vice-présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La vice-présidente : Bonjour. Je vois que nous avons le quorum.
Je suis heureuse de vous accueillir à cette réunion du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans. Je m'appelle Ethel Cochrane. Je suis un sénateur de Terre-Neuve-et-Labrador et je suis la vice-présidente du comité. Vous ne m'en voudrez pas si je parle trop rapidement, c'est ainsi qu'on parle à Terre-Neuve.
J'aimerais que les membres du comité se présentent avant de demander à nos témoins d'aujourd'hui d'en faire autant.
Le sénateur Patterson : Dennis Patterson, du Nunavut. Soyez les bienvenus.
Le sénateur Watt : Sénateur Watt, du Nunavik.
Le sénateur Dallaire : Sénateur Dallaire, du Québec.
Le sénateur Poy : Sénateur Poy, de Toronto, Ontario.
Le sénateur Greene : Sénateur Greene, de Nouvelle-Écosse.
Le sénateur Robichaud : Sénateur Robichaud, du Nouveau-Brunswick.
Le sénateur Hubley : Sénateur Hubley, de l'Île-du-Prince-Édouard.
La vice-présidente : Une de nos belles îles.
Les membres du comité rentrent d'une mission en Arctique de l'Ouest, où ils ont étudié des questions qui se rapportent à la Garde côtière canadienne. Pour donner suite à cette mission, ils veulent examiner le rôle des Forces canadiennes dans l'Arctique et s'informer des initiatives qui ont été annoncées et qui visent à renforcer la présence des Forces canadiennes dans cette région.
Plus précisément, le comité a demandé qu'on vienne lui parler de l'initiative des navires de patrouille extracôtiers de l'Arctique. Nous aimerions en savoir plus sur le projet annoncé en juillet 2007 et qui ajouterait de six à huit nouveaux navires de patrouille, armés et renforcés pour la glace, afin de relever la présence des Forces canadiennes dans l'Arctique canadien.
Pour discuter de cette initiative, nous avons invité des représentants du ministère de la Défense nationale : le commodore J.E.T.P. Ellis, qui est directeur général, Développement de la Force maritime, et le capitaine de vaisseau E.G. Bramwell, gestionnaire de projet, Navires de patrouille extracôtiers de l'Arctique.
Merci d'avoir accepté notre invitation. Nous sommes vraiment très heureux de vous accueillir à la suite de notre voyage dans l'Arctique. Vous avez la parole, et les sénateurs vous poseront ensuite des questions.
Commodore J.E.T.P. Ellis, directeur général, Développement de la Force maritime, Défense nationale : Nous sommes ravis d'être ici aujourd'hui pour vous présenter le navire de patrouille extracôtier de l'Arctique et vous expliquer ses capacités, son concept d'utilisation, et cetera.
Si vous me le permettez, j'aimerais passer en revue les acétates qui ont été distribués aux membres du comité. Mon exposé sera très bref : il durera de 10 à 15 minutes, et nous pourrons ensuite discuter avec vous et répondre à vos questions.
Je suis venu avec le capitaine Bramwell. Il est gestionnaire de projet pour le projet des navires de patrouille extracôtiers de l'Arctique. C'est un architecte naval et un expert technique. Je suis l'exploitant; je fais partie de l'état- major de l'amiral. Je suis son conseiller en ce qui concerne les besoins, les capacités et la stratégie, et je suis donc du côté des commanditaires. C'est à moi qu'il faut parler de notre concept d'emploi, des besoins et de la façon dont tout cela a été défini.
Nous allons nous relayer un peu. Je vais faire l'exposé, puis nous continuerons comme bon vous semblera.
Vous avez le jeu d'acétates sous les yeux, et nous venons de nous présenter. Le deuxième acétate montre ce que je veux faire aujourd'hui, c'est-à-dire vous fournir, comme vous l'avez demandé, un aperçu du projet de navire de patrouille extracôtier de l'Arctique, vous parler de ses capacités et vous décrire ce que nous avons l'intention de faire pour remplir cet engagement.
L'acétate no 3 est le sommaire de l'exposé. Je vais vous parler de l'exigence fondamentale — autrement dit, de la politique sous-jacente au projet. Je vais parler de l'objectif du projet, de son échéancier et de son modèle de définition. Je vais parler du point de vue du projet, puis j'aborderai la question de l'environnement arctique tel que nous le concevons dans la marine et la façon dont le projet s'inscrit dans tout cela et contribue à affirmer la souveraineté canadienne dans l'Arctique — de fait, dans nos trois secteurs océaniques.
C'est quelque chose que je dois souligner. Le navire de patrouille extracôtier de l'Arctique est un navire océanique pour l'Arctique, mais il devra naviguer aussi bien dans l'Atlantique et dans le Pacifique qu'au large des côtes de l'océan Arctique. C'est tout un exploit, comme vous le verrez.
Je parlerai des missions ainsi que du point où nous en sommes maintenant en termes d'énoncé des besoins à l'étape de la conception. Pendant l'exposé, et en particulier à la fin, grâce aux dessins du concept actuel, vous comprendrez mieux le genre de capacité dont nous avons l'intention de doter le Canada.
Le besoin stratégique fondamental est de renforcer la capacité qu'a le Canada d'affirmer sa souveraineté dans les trois zones océaniques. Évidemment, le gouvernement doit posséder des outils efficaces pour y parvenir. La marine est fort capable d'affirmer notre souveraineté dans les approches océaniques de l'Atlantique et du Pacifique et elle a la puissance voulue pour le faire, mais elle n'a pas vraiment les outils qu'il faut pour faire le travail essentiel dans l'Arctique dans les conditions actuelles. Cette plate-forme, le navire de patrouille extracôtier de l'Arctique, contribuera dans une très large mesure à combler cette lacune pour le gouvernement.
L'objectif du projet est expliqué sur l'acétate no 5. Comme vous l'avez dit, madame la présidente, le gouvernement a annoncé cette initiative en juillet 2007 et il a mis sur pied un projet pour construire entre six et huit navires de patrouille extracôtiers de l'Arctique. Le projet vise essentiellement à livrer à la marine des plates-formes qui lui permettront d'assurer une présence et une surveillance armées dans les trois zones océaniques du Canada, avec un accent particulier sur l'Arctique.
Dans la suite de mon exposé, je vais traiter principalement de l'Arctique, car c'est ce qui vous intéresse surtout. Je vais toutefois décrire les capacités globales et je vais m'efforcer de les inscrire autant que possible dans le contexte de l'Arctique.
[Français]
À l'acétate no 6, vous avez les jalons.
[Traduction]
Le projet en est actuellement à l'étape de la définition, et on peut voir l'échéancier sur cet acétate. Actuellement, nous préparons la demande d'approbation définitive de projet. Nous avons précisé l'énoncé des besoins en collaboration avec un cabinet de conception et d'études techniques. Le capitaine Bramwell était le principal point de contact avec ce cabinet. Nous avons également procédé à de vastes consultations auprès des marines alliées qui naviguent dans l'Arctique et auprès de la Garde côtière canadienne. Après tout, c'est elle la spécialiste au Canada, non seulement pour notre secteur de l'Arctique, mais aussi pour les opérations dans l'Arctique en général. L'Arctique est un environnement nouveau pour la marine, et nous avons donc très largement consulté. Nous avons repris sans vergogne toutes les bonnes idées que nous avons trouvées pour générer cette capacité.
L'entrepreneur chargé de la conception a produit les dessins stylisés que vous voyez sur cet acétate et qui sont le fruit du travail technique. Il s'agit essentiellement d'un concept que nous pouvons présenter à l'industrie en disant « Voici ce que nous voulons que vous nous construisiez. » Nous prévoyons publier une demande de propositions au début de l'an prochain, obtenir l'autorisation d'aller de l'avant et commencer la construction en janvier 2011 pour que le premier navire soit livré en 2014. Les autres navires seraient livrés dans les années qui suivraient.
Le graphique sur l'acétate suivant est simple et facile à comprendre. Il montre les moteurs stratégiques qui ont déterminé la façon dont nous avons abordé ce projet pour ce qui est d'articuler les besoins et de produire la capacité. Nous avons ainsi pu mettre l'accent sur certains secteurs de besoins plutôt que sur d'autres, nous concentrer sur notre capacité d'assurer une présence armée et d'exercer un contrôle dans l'Arctique tout en bénéficiant d'une certaine souplesse en termes d'ensembles de missions.
Nous reconnaissons bien sûr que même si la marine prête souvent main-forte à d'autres ministères fédéraux — nous collaborons assez étroitement avec la Garde côtière, la GRC, l'ASFC, et cetera —, il s'agit de la première plate-forme que nous construisons en fonction de l'interopérabilité nécessaire à une approche pangouvernementale. La compatibilité avec la Garde côtière et la GRC est un élément important de ce que nous nous efforçons de créer.
L'acétate no 8 porte sur les missions et les tâches des NPEA, qui sont énoncées en termes généraux. La première est la présence armée. Dès le départ, nous voulions essentiellement acquérir une capacité de navire de combat dans l'Arctique canadien. C'est une capacité que nous n'avons pas à l'heure actuelle, ou que nous avons de façon très limitée, parce que nos frégates, nos destroyers et nos sous-marins ne peuvent pas naviguer dans les glaces. Ils peuvent naviguer à proximité des glaces, mais pas dans les glaces.
Je suis vendu à la théorie du réchauffement climatique. Il ne faut plus se demander si l'océan Arctique va s'ouvrir, mais plutôt quand cela va se produire. Je sais que le débat n'est pas clos à ce sujet. La question a orienté notre réflexion lorsque nous avons dû définir cette nouvelle capacité, en ce sens qu'un navire a généralement une vie utile de 25 ans. Le premier navire sera livré en 2014, ce qui nous mène donc à 2040, environ. Si vous regardez ce qui se passe avec notre flotte actuelle, nous pourrons peut-être aller un peu plus loin, jusqu'à 2040 ou 2050. Le monde aura changé d'ici là.
Votre premier rapport, celui que vous avez publié au printemps, est clair et résume bien ce qui pourrait être l'avenir de l'Arctique, tant dans l'archipel qu'au-delà de la zone d'exclusion économique. Nous construisons un navire qui est suffisamment polyvalent pour que nous puissions accroître la capacité à mesure que la demande augmentera. Nous avons adopté une approche étapiste : nous mettons en place les éléments dont nous avons besoin pour fonctionner maintenant tout en prévoyant une croissance qui nous permettra de suivre l'évolution de la situation.
Nous avons parlé du premier élément, de la présence, des navires de combat armés et du fait que ce navire doit être non seulement polyvalent, mais en outre autonome. Nous avons parlé des lacunes de la surveillance dans l'Arctique et dans nos approches côtières. Nous avons d'autres capacités qui nous servent à tisser une toile de capteurs — pour savoir ce qui se passe dans notre cour —, mais le navire de patrouille extracôtier de l'Arctique sera un autre élément de cette toile. Il se rendra sur place et il pourra effectuer un balayage raisonnable, déceler ce qui se passe et le communiquer aux centres des opérations maritimes pour améliorer la connaissance de la situation là où il se trouve. Si nous avons tous ces navires et nos aéronefs de patrouille maritime qui ont besoin de cette information et que la Garde côtière intervient elle aussi, alors nos centres de la sécurité maritime pourront dresser le portrait de ce qui se passe dans notre cour et le diffuser de façon à ce que tous comprennent bien la situation. Cela nous aidera à réduire les menaces, à les préciser et à y réagir au besoin.
Nous avons clairement déterminé les rôles militaires types que sont la présence, la surveillance, l'intervention armée, la réaction et le contrôle, mais nous avons aussi intégré la nécessité d'appuyer d'autres ministères fédéraux. Nous reconnaissons que l'Arctique est un milieu très particulier où la coopération s'impose et où divers ministères fédéraux, territoriaux, et cetera, doivent travailler la main dans la main, et nous avons retenu la leçon. Il s'agit d'une approche véritablement pangouvernementale.
L'acétate suivant s'intitule « Zones d'intérêt actuelles de l'Arctique ». Il vous donne une idée de la façon dont nous envisageons l'Arctique en 2015 et de ce que nous pensons que ce navire pourra faire à ce moment-là. Nous nous fondons sur ce que nous considérons comme des prévisions modérées concernant la capacité de naviguer dans les glaces. C'est essentiellement la fusion des prédictions actuelles relativement au régime des glaces et des capacités futures de navigation dans les glaces que nous intégrons à cette plate-forme. Le navire est conçu pour naviguer dans l'Arctique pendant la saison de navigation. Pour l'instant, cette saison serait de quatre mois par année. Nous croyons qu'elle s'allongera avec le temps.
Au départ, nous déploierons ces navires deux par deux dans l'Arctique. Ils y resteront pendant environ quatre mois. Ils en sortiront à la fin de la saison de navigation. Nous serons sur place en même temps que les autres navires. Notre rôle, comme je l'ai dit, sera d'assurer une présence, de surveiller et d'affirmer notre souveraineté. Nous ne remplaçons nullement la Garde côtière. De fait, nous la complétons.
Le navire peut résister aux glaces à ses propres fins : c'est-à-dire pour conserver sa mobilité et continuer de circuler dans l'Arctique. Il n'ouvrira pas un passage dans les glaces. Les brise-glace de la Garde côtière font ce travail et ouvrent la voie aux navires qui approvisionnent les collectivités locales. La distinction est claire.
Je tiens à insister sur la notion de distance spécifique à l'Arctique. Notre Arctique canadien est immense et son climat est extrêmement rigoureux, même en comparaison des conditions que connaissent certains de nos alliés. Les Norvégiens et les Danois assurent une présence dans leurs territoires arctiques, mais ces territoires ne sont pas de la même taille. Comparés au nôtre, ils sont de la taille d'un timbre-poste. Le problème de la glace dans l'Arctique canadien, comme vous le savez, est beaucoup plus important en termes de glace pluriannuelle que dans les secteurs de certains autres pays de la région circumpolaire.
Le graphique suivant montre les zones d'intérêt dans l'Arctique de demain, avec une série de cercles concentriques. Vous voyez un peu le genre de présence que nous pouvons assurer avec quatre navires de patrouille extracôtiers de l'Arctique. Le cercle noir représente la distance qu'un navire peut parcourir en 24 heures dans les glaces, à une vitesse d'environ cinq nœuds. Le cercle bleu illustre les opérations dans les eaux libres, à une vitesse de 14 nœuds. Un hélicoptère figure dans les cercles or et rouge. Vous voyez que si nous pouvons compter sur un hélicoptère, la capacité de réponse et de surveillance augmente sensiblement.
Les pointillés montrent la distance que peut parcourir un navire à une vitesse de cinq nœuds en cinq jours. Autrement dit, c'est la partie de notre cour arrière que nous pouvons surveiller avec quatre navires, compte tenu de la disposition des îles. Je ne sais pas si ce diagramme est suffisamment intuitif ou si mes explications sont assez claires, mais je serai heureux de répondre à vos questions par la suite.
L'immensité de l'Arctique canadien est une caractéristique importante. Pour aller d'Halifax à Nanisivik, il faut parcourir à peu près la même distance que pour se rendre d'Halifax à Portsmouth, en Angleterre. Nous avons un immense pays, et cela comporte certaines exigences. Nous avons par exemple déterminé que le navire devait avoir un rayon d'action de 600 à 800 milles. Cela équivaut à la capacité d'aller d'Halifax à l'Arctique de l'Ouest et d'en revenir sans avoir besoin de se ravitailler en carburant.
L'acétate suivant est le cœur de l'exposé. Il énumère les divers besoins intégrés dans la plate-forme — ce que le navire peut offrir. C'est essentiellement un navire de conception commerciale et de classe polaire 5. Un navire de classe polaire 5 peut naviguer dans une mer couverte d'un mètre de nouvelle glace contenant des inclusions de vieille glace. La vieille glace est de la glace de plus d'un an — c'est cette glace qui traverse les coques et coule les navires. Il ne suffit pas que le navire puisse se frayer un chemin dans un mètre de glace de l'année, il faut qu'il puisse résister à ces morceaux de glace imprévus qui sont comme du béton flottant et qui peuvent vraiment vous créer des ennuis.
Un navire de classe polaire 5 doit aussi avoir des caractéristiques techniques qui font que la machinerie installée sur le pont supérieur peut être utilisée toute l'année dans l'Arctique. Au départ, notre concept d'opération couvrait uniquement la saison navigable. La vitesse en eau libre est de 17 nœuds. Évidemment, la vitesse est importante quand on patrouille un vaste secteur. Cela ne vaut pas uniquement dans l'Arctique, la vitesse est probablement encore plus pertinente pour les fonctions extracôtières. C'est un peu un compromis, si vous voulez. Pour être rapide, un navire doit être long et mince. Pour résister aux glaces, il doit être court et large. Ce modèle est un hybride. Vous obtenez ainsi une combinaison de capacités. Il faut pouvoir mener des opérations tant dans l'Arctique que dans les approches atlantique et pacifique.
J'ai parlé de bonne tenue en mer et d'armement pour affirmer la souveraineté. L'équipage comptera 35 ou 45 membres. Nous aurons 40 couchettes supplémentaires pour embarquer des rangers ou du personnel de nos partenaires gouvernementaux, les membres d'équipes de mission spéciale, et cetera. Nous avons aussi des espaces à usages multiples à bord du navire, qui pourront être utilisés pour la planification, les briefings, et cetera. Nous pouvons accomplir diverses tâches.
Le navire sera doté d'un nombre suffisant d'embarcations pour emmener du personnel et du matériel à terre dans des environnements inhospitaliers. Nous avons prévu l'interopérabilité avec les bateaux d'intervention d'urgence de la GRC, les embarcations des Opérations spéciales des Forces canadiennes, et cetera. Nous pouvons aussi embarquer d'autres capacités à bord de cette plate-forme.
Nous avons également prévu de l'espace sur ce navire pour ajouter de la capacité. Nous y sommes parvenus en créant des espaces où nous pourrons boulonner des charges de mission que nous n'avons pas encore définies, mais qui pourront nous être livrées à l'avenir si le besoin s'en faisait sentir. À l'avenir, si nous voulons installer des sonars pour la surveillance anti-sous-marine ou d'autres équipements qui peuvent être embarqués dans un conteneur, nous serons en mesure de le faire et d'utiliser ce matériel sur la plate-forme. Je dois souligner que cela n'est pas intégré aux plans pour l'instant.
D'après ce que nous a dit la Garde côtière, nous savons que nous aurons besoin d'un hélicoptère capable de résister aux vents glacés de l'Arctique canadien. Nous avons d'abord pensé utiliser un petit hélicoptère pour l'évitement des glaces. Nous avons constaté qu'il n'en coûterait pas beaucoup plus cher de construire un pont d'envol et un hangar pour un hélicoptère plus gros. Nous avons donc modifié le besoin pour que le navire puisse accueillir un hélicoptère Cyclone, le nouvel hélicoptère maritime que nous avons commandé. Même si, pour l'instant, nous ne prévoyons pas en faire régulièrement usage, nous croyons qu'il sera alors très facile d'ajouter une énorme capacité. Cet hélicoptère nous permettra de surveiller un vaste secteur et de faire de la surveillance anti-sous-marine ainsi que de soutenir des engagements antisurface.
J'ai parlé de manutention. Le navire doit être autonome. Il a un rayon d'action de 6 800 milles, comme je l'ai mentionné précédemment.
L'acétate suivant illustre l'aménagement général.
[Français]
Le prochain acétate montre un plan d'ensemble du navire. On y voit les dimensions du navire tel qu'il a été conçu. Vous y trouvez un aide-mémoire. Dans l'acétate suivant, vous avez trois schémas qui montrent différents aspects du navire, pour donner une impression générale de ce que le navire aurait l'air, basé sur la conception courante.
[Traduction]
Nous avons ajouté un graphique des espaces intérieurs pour vous montrer à quel point notre réflexion a été détaillée. Vous avez le plan d'ensemble de l'installation médicale, l'espace à usages multiples qui conviendrait à tout ce que pourrait demander la mission dont le navire est chargé, et quelques postes d'équipage.
L'acétate suivant montre la plate-forme vue de dessous; c'est ce que l'on pourrait voir d'un sous-marin. Les stabilisateurs hydrodynamiques améliorent la tenue du navire en haute mer.
En quelque sorte, le projet reflète et précise la volonté du gouvernement d'accroître la capacité dans l'Arctique. Nous pourrons également utiliser cette plate-forme dans les approches océaniques du Canada quand il ne sera pas possible de naviguer dans l'Arctique. On peut même envisager de recourir à cette plate-forme pour des missions antidrogue dans les Caraïbes, par exemple, et des missions d'aide humanitaires ou de secours aux sinistrés le cas échéant.
[Français]
Madame la présidente, ceci complète mon exposé.
[Traduction]
Nous sommes prêts à répondre à vos questions.
La vice-présidente : Est-ce que le capitaine a quelque chose à ajouter?
Capitaine de vaisseau E.G. Bramwell, gestionnaire de projet, Navires de patrouille extracôtiers de l'Arctique, Défense nationale : Je n'ai rien de particulier à ajouter, madame. Le commodore Ellis a bien résumé le concept technique général du projet. Je répondrai avec plaisir aux questions qui touchent cet aspect si quelqu'un en pose.
La vice-présidente : Comme je préside, je vais poser la première question. Nous n'aurons pas les NPEA avant quelques années, en 2014. D'ici là, est-ce que le Canada a des navires armés et résistant aux glaces qui peuvent naviguer dans l'Arctique?
Cmdre Ellis : Comme vous l'avez probablement vu, cet été, nous avons mené l'Opération NANOOK — une opération de la marine canadienne à laquelle ont participé des sous-marins, des frégates et des patrouilleurs de classe Kingston. Toutefois, comme je l'ai dit, ces bâtiments ont des capacités très limitées. Ils peuvent s'approcher des glaces, mais ils ne peuvent pas y naviguer; alors j'imagine que nos interventions ne peuvent être que marginales. Nous sommes très limités. C'est une capacité qui fait défaut au Canada à l'heure actuelle.
La vice-présidente : Comme les NPEA peuvent fendre uniquement la glace de l'année, est-ce que leur saison de navigation dans l'Arctique sera aussi longue que celle des navires commerciaux ou militaires étrangers?
Cmdre Ellis : Nous croyons qu'ils pourront rester dans l'Arctique pendant toute la saison de navigation.
La vice-présidente : Et cette saison est de quatre mois?
Cmdre Ellis : Quatre mois à l'heure actuelle, mais elle devrait s'allonger... Est-ce que vous me demandez s'ils pourront rester aussi longtemps dans l'Arctique qu'un brise-glace russe ou un brise-glace militaire?
La vice-présidente : Oui.
Cmdre Ellis : Non, parce que le navire n'a pas de capacité de ce genre, mais il pourra y rester aussi longtemps que les conditions conviendront à un navire de classe polaire 5.
Si, par exemple, vous vous trouvez dans un secteur où il n'y a que de la glace de l'année, tant qu'elle n'a pas plus d'un mètre d'épaisseur, vous pouvez rester. À mesure que l'Arctique s'ouvrira et que les glaces disparaîtront en été pour revenir en hiver — c'est-à-dire dans les zones où il ne se forme pas de glace pluriannuelle —, la plate-forme pourra rester dans la région aussi longtemps que les conditions le lui permettront. Actuellement, nous pensons qu'il faut simplement parler de saison navigable.
La vice-présidente : Pendant la saison de travail dans le nord, ou sur les côtes est et ouest, est-ce que les navires auront l'équipement voulu pour affronter des bâtiments militaires au besoin, ou prévoit-on plutôt qu'ils feront face à des navires civils?
Cmdre Ellis : En principe, ils devront contrer des menaces de faible niveau. Ces navires ne pourraient pas tenir tête à une frégate, à un destroyer ou à un autre navire de combat. Leur armement principal dont on compte les doter pour l'instant est surtout adapté à des missions à caractère policier plutôt que de combat.
Cela dit, et je l'ai mentionné précédemment, à long terme, quand la situation dans l'Arctique se compliquera, nous envisagerons d'intégrer d'autres capacités et notamment celle d'importer des capacités très rapidement par hélicoptère. Si jamais éclatait un quelconque conflit entre États... mais je ne suis pas devin.
Le sénateur Robichaud : N'allez surtout pas nous commencer une guerre!
Cmdre Ellis : Notre mission est de prévenir les conflits. Dans la marine, la mentalité est axée sur la prévention.
La vice-présidente : Oui, nous le savons, mais tout le monde n'a pas la même attitude.
Le sénateur Poy : C'est la première fois que je siège au sein de ce comité, alors mes questions vous paraîtront peut- être naïves.
Qui sont nos alliés dans l'Arctique, outre les Norvégiens et les Danois que vous venez de mentionner?
Cmdre Ellis : Les Norvégiens et les Danois.
Le sénateur Poy : C'est tout?
Cmdre Ellis : Oh, pardon, et les Américains, bien sûr.
Le sénateur Poy : C'est la réponse que j'attendais, mais vous avez dit que c'était tout.
Est-ce que ces pays, et d'autres, la Russie par exemple, reconnaissent notre souveraineté dans l'Arctique? Évidemment, il y a une frontière quelconque que vous avez tracée. Qui d'autre la reconnaît?
Cmdre Ellis : Je ne suis pas un spécialiste du domaine, je ne saurais pas vous dire qui reconnaît quoi. Je sais que cette question suscite bien des débats. Je crois comprendre qu'il se tient une conférence à Halifax en ce moment même, ou qu'elle se tiendra très bientôt, justement sur ce sujet, et que les cinq grandes puissances arctiques y participent.
Ce qui m'intéresse, c'est le rôle que joue la marine canadienne pour affirmer notre souveraineté dans notre secteur maritime — et cela comprend notre zone d'exclusion économique telle que l'a définie le Canada — et aussi pour les opérations internationales, évidemment.
Le sénateur Poy : Je sais quelles zones le Canada revendique, mais je me demande si d'autres pays les reconnaissent. Est-ce que la Russie, par exemple, reconnaît nos revendications?
Cmdre Ellis : Hélas, madame, je ne pourrais vraiment pas vous le dire. Je ne suis pas un spécialiste de la question, mais il y a des désaccords. Par exemple, le Canada et les États-Unis ne sont pas nécessairement d'accord au sujet de la répartition des compétences dans l'Arctique.
Nous savons que la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer exige des nations qu'elles présentent leurs propositions au sujet de la répartition des plates-formes continentales, et cetera. Je sais que nos revendications et celles de la Russie se chevauchent à certains endroits et que plusieurs propositions visent parfois un même territoire. Nous avons des chevauchements avec les propositions du Danemark, mais je ne suis vraiment pas en mesure de vous en parler.
Le sénateur Poy : Les limites ont été tracées pour ces propositions, mais, si j'ai bien compris, l'Arctique ce n'est que de la glace. Il n'y a pas de secteur continental, n'est-ce pas?
Cmdre Ellis : Non, madame. Il y a de la glace, de la terre et de l'eau libre. Il y aura de plus en plus d'eau libre, et il y aura toujours de la terre et un peu de glace.
Le sénateur Poy : D'accord, merci.
Cmdre Ellis : Cela me semble très prophétique.
Le sénateur Poy : Pour ce qui est de l'armement, vous venez de dire qu'il était destiné aux patrouilles, et non pas au combat. Ce que nous allons commander ne sera pas livré avant 2014. Si nous pensons que d'ici quelques années il pourrait y avoir une guerre dans l'Arctique, est-ce que nous ne devrions pas commander dès maintenant des navires pour qu'ils soient prêts à temps? Il faut des années pour construire un navire.
Cmdre Ellis : Madame, nous vous serons très reconnaissants de tout ce que vous pourrez faire pour nous aider à construire ces navires plus rapidement, cela va sans dire.
[Français]
Le sénateur Dallaire : Je vais poser des questions spécifiques au projet.
[Traduction]
Premièrement, précisons que vos canons ne seront pas des Bofors de 40 mm remontant à la Seconde Guerre mondiale, n'est-ce pas?
[Français]
Cmdre Ellis : Non, cela va être un 25 millimètres, très moderne.
[Traduction]
Le sénateur Dallaire : J'ai remarqué que vous n'aviez pas inclus l'énoncé des besoins opérationnels qui a été approuvé, et vous allez publier la demande de propositions. Quels compromis avez-vous dû faire pour faire accepter cet EBO relativement à la capacité que vous voulez obtenir?
Cmdre Ellis : Je dirais que le compromis fondamental concernait la rapidité. J'en ai parlé. J'ai mentionné le fait qu'il faut un navire long et étroit pour aller vite et un navire court et large pour fendre la glace.
Au départ, nous avions prévu une vitesse de 20 nœuds. Nous avons constaté que nous ne pourrions pas y arriver avec cette plate-forme compte tenu de notre budget et de nos chiffres. Nous avons examiné la question, et nous croyons que l'intégration nous permettra de compenser pour la vitesse moindre, avec notre embarcation pour les raids et la capacité aéroportée que nous aurons ajoutée à la plate-forme.
Le sénateur Dallaire : Là encore, dans l'EBO, il y a très peu d'espace actuellement pour les troupes éventuelles. Vous avez un équipage d'une quarantaine de membres représentant divers secteurs, mais quelle serait la capacité de transport de troupes, la capacité amphibie, parce que dans bien des endroits, il n'y a pas de quai — et je sais que vous avez parlé de petites embarcations. Quel genre de capacité avez-vous prévue pour le transport de troupes? Et dans l'espace inutilisé, est-ce que vous avez des trousses qui vous permettraient d'ajouter des couchettes, et cetera, y compris pour agrandir l'installation médicale? Quand vous irez dans le Nord, par exemple, est-ce que le navire pourra faire escale dans divers ports et fournir des services médicaux aux Inuits, faire ce genre de choses?
Cmdre Ellis : Tout d'abord, l'énoncé des besoins prévoit que nous serons en mesure de transporter une unité de la taille du peloton. Une péniche de débarquement permettra d'amener des troupes et du matériel à terre, avec un faible tirant d'eau vu que la plupart des installations portuaires dans la région sont rudimentaires, c'est-à-dire qu'il n'y a pas d'infrastructures. Nous avons des endroits réservés pour les conteneurs ISO. En fin de compte, si nous voulons pouvoir ajouter des modules d'hébergement, nous y verrons. Nous l'avons déjà fait pour les NDC, les navires de la classe Kingston, à bord desquels nous avons ajouté des modules d'hébergement sur une base de conteneur ISO.
J'essaie de ne pas utiliser notre jargon, mais chez les militaires, nous utilisons des expressions qui indiquent que la plate-forme est équipée pour accueillir un certain élément, mais qu'elle n'en est pas encore dotée. Nous prévoyons de nombreuses possibilités dans la définition de la capacité, de sorte que nous pourrons transformer la plate-forme quand cela s'avérera nécessaire. Vous ne pouvez pas installer en rattrapage des réservoirs de carburant, ni modifier la forme de la coque, le pont d'envol ou le mode de propulsion, mais il y a des éléments que vous pouvez ajouter. Nous adoptons une approche prudente pour développer progressivement cette capacité. Cela nous semble être parfaitement logique.
Le sénateur Dallaire : Est-ce qu'il y avait une limite pour ce qui est de la taille du navire, des possibilités d'accroître la capacité amphibie, y compris d'embarquer plus que le Cyclone? Je pense que cela est la capacité minimale d'hélicoptère que vous devriez envisager. Est-ce que vous avez été limités à cet égard, est-ce que vous auriez pu prévoir des Chinook dans votre EBO?
Cmdre Ellis : Dans l'EBO, il n'était pas question de Chinook. Nous avons mentionné l'hélicoptère Cormorant. Je ne sais pas vraiment quel serait le delta pour le Chinook. Si vous le désirez, je peux trouver quelle serait la différence de taille pour le pont d'envol et vous communiquer cette information. Je pense qu'il aurait fallu un pont d'envol un peu plus grand et que cela constituait sans doute un élément de coût important.
Le sénateur Dallaire : C'est ce qui m'intéresse. Je regarde votre calendrier de livraison. Nous n'avons pas vos prévisions de trésorerie, c'est sans doute une information classifiée. Cela me paraît bien long. J'espère que c'est pour huit navires, et non pas pour six. Je soupçonne que si la marine a limité les capacités dans votre plan à long terme, si ce plan n'est pas plus ambitieux, c'est pour une raison quelconque. J'essaie de déterminer quelle est cette raison. C'est-à- dire pourquoi vous n'avez pas visé une capacité supérieure, un autre type de propulsion et peut-être même l'énergie nucléaire? Qui vous a imposé des limites, ou quelles limites vous ont été imposées pour l'établissement de cet EBO?
Cmdre Ellis : En termes de limites, il s'agissait d'assurer une présence armée pour faire respecter les lois. C'est l'orientation que nous avons adoptée dès le début. Nous devons être réalistes au sujet des ressources théoriques allouées à cette capacité et tenter d'obtenir le maximum de capacité au meilleur prix pour les Canadiens afin de produire les effets recherchés et de combler les besoins les plus essentiels. Si nous reconnaissons cela, à long terme, nous pourrons élargir la capacité de ce navire.
Le sénateur Dallaire : Est-ce qu'ils seront construits au Canada?
Cmdre Ellis : Ils sons assujettis à la politique sur la sécurité nationale en ce qui concerne la construction navale. Ils seront construits au Canada. Nous espérons que les consultations que le gouvernement a entreprises auprès de l'industrie en termes de processus de construction navale donneront des résultats pour nous aider à les produire plus rapidement, comme l'a demandé le sénateur, et à assurer la viabilité de l'industrie.
Capt Bramwell : Les coûts ne sont nullement une information classifiée. La phase de définition, celle que nous menons actuellement, coûte environ 42,5 millions de dollars. Elle durera encore deux ou trois ans. Ce budget est simplement pour la conception et la demande de propositions. Les navires eux-mêmes, avec leur trousse de logistique intégrée, ont un budget d'environ 3,1 milliards de dollars en termes d'années budgétaires. Il y a aussi un contrat de soutien en service d'une durée de 25 ans qui est lié au besoin et qui coûtera 3,2 milliards de dollars de plus, toujours en termes d'années budgétaires. C'est de cet ordre de grandeur que nous parlons.
Le mandat porte sur la construction de six à huit navires. Cette information n'est pas classifiée non plus. Nous avons déjà indiqué, notamment aux représentants de l'industrie, que nous croyions pouvoir acquérir probablement six navires, compte tenu du besoin et de notre budget.
Le sénateur Dallaire : Alors il n'y en aurait que deux en service?
Capt Bramwell : Oui, deux dans l'Arctique.
Le sénateur Dallaire : En permanence?
Cmdre Ellis : Non, monsieur. Quand j'ai parlé de deux navires à la fois, c'était pour la première année, en 2015; nous aurons alors deux navires là-bas. Nous croyons que leurs fonctionnalités nous permettront de stationner un plus grand nombre de navires en mer. Avec les progrès de la technologie, nous constatons que les fonctionnalités des navires, leur production opérationnelle — c'est-à-dire, le temps qu'ils peuvent effectivement passer en mer — sont très supérieures à ce que permettait l'ancienne technologie. Ils sont plus fiables.
La vice-présidente : Sénateur Dallaire, nous devons continuer. Nous aurons peut-être le temps pour un deuxième tour de table.
Le sénateur Dallaire : Je l'espère, oui.
Le sénateur MacDonald : Je n'ai qu'une question à vous poser, messieurs. Lorsque ces navires seront finalement construits, tous ces navires, et qu'ils seront pleinement opérationnels, est-ce que le pays sera en mesure de véritablement faire respecter la loi dans le passage du Nord-Ouest?
Cmdre Ellis : Je le crois, sénateur.
Le sénateur MacDonald : Quand je parle de « véritablement faire respecter la loi », je vous demande quelles sont les capacités en termes d'intervention.
Cmdre Ellis : En termes d'intervention?
Le sénateur MacDonald : Eh bien, disons qu'un navire indésirable circule dans les parages.
Cmdre Ellis : Oui, parfaitement. Avec les dispositifs et les capteurs dont il est doté, ce navire pourra intervenir, procéder par exemple à une interception comme cela s'est fait la semaine dernière sur la côte ouest. Ce sont des opérations qui sont régulièrement menées dans toutes les approches océaniques du Canada. Elles le seront aussi dans l'Arctique lorsqu'il y aura plus d'activité là-haut. Nous avons un petit équipage et la capacité d'embarquer plus de personnel, de faire venir par hélicoptère les équipes d'intervention d'urgence dont j'ai parlé précédemment. Nous veillons à ce que cette capacité existe.
Le sénateur MacDonald : Les petits navires sont donc très capables?
Cmdre Ellis : De fait, ce navire n'est pas si petit, sénateur. Il est de bonne taille.
Le sénateur MacDonald : D'accord, merci.
Le sénateur Hubley : Je vous remercie de cet exposé et je vous souhaite la bienvenue ce soir.
Avec la mise en service de nouveaux navires, quelle sorte de formation et de familiarisation faut-il prévoir pour exploiter les nouveaux bâtiments de la marine? Est-ce que vous devrez recruter? Dans votre exposé, vous avez mentionné les rangers quand vous avez parlé d'hébergement. Est-ce qu'il y aura des membres des Premières nations au sein des équipages de ces navires?
Cmdre Ellis : J'ai parlé des rangers, mais je n'ai pas dit qu'ils feraient partie de l'équipage. Je voulais dire que nous pourrions collaborer avec une patrouille des rangers. Nous pourrions les prendre à bord et mener certaines activités avec eux.
La question de l'équipage des navires n'est pas entièrement réglée, mais il y aura des représentants de la marine en général. Il y aura des Autochtones qui seront des membres de la marine. Nous n'avons pas encore décidé s'il s'agira de membres de la force régulière ou de la réserve; nous y travaillons. Nous précisons notre concept d'équipage, comme je l'ai dit précédemment.
Nous avons discuté à nos collègues de la Garde côtière, et il se peut que le déploiement estival dans l'Arctique se prête à l'application de concepts d'équipage distincts en termes de moral, de maintien à l'effectif et d'avancement des carrières. Nous travaillons à cet aspect actuellement.
Quant à la formation, cette plate-forme sera différente des autres plates-formes de la flotte. Je ne sais pas, capitaine Bramwell, si une formation technique particulière est à prévoir pour une plate-forme de classe polaire.
Capt Bramwell : La formation viserait principalement la navigation dans les glaces. Nous avons déjà consulté la Garde côtière. Il n'y a rien d'officiel, mais nous pensons que nous aurons besoin de son point de vue et de son personnel à bord pour la première série de déploiements dans le Nord. La navigation dans les glaces requiert une formation très particulière. Selon nous, c'est quelque chose qu'il nous faut élaborer de concert avec la Garde côtière.
Vous avez mentionné les Premières nations. Pour la partie du projet qui se déroule dans les installations de Nanisivik, nous avons déjà entamé des discussions avec divers groupes du Nunavut. Nous avons discuté notamment avec la collectivité d'Arctic Bay. Le concept, qui est encore embryonnaire, a été formulé pour intéresser leurs rangers à la sécurité dans le voisinage de nos installations. Nous en sommes encore au stade des discussions exploratoires, mais nous avons commencé.
Le sénateur Hubley : Ma question suivante porte sur les installations médicales à bord. Est-ce qu'elles sont destinées uniquement aux besoins à bord? Croyez-vous pouvoir répondre à des situations d'urgence médicale dans le Nord?
Cmdre Ellis : Le navire est doté d'une infirmerie comme nos autres navires. C'est une question d'autonomie et de sécurité de l'équipage. Toutefois, cela dit, nous intervenons régulièrement en cas d'urgence avec nos navires réguliers, par exemple dans le cadre d'opération de recherche et sauvetage ou d'évacuation. Nous avons de la latitude à bord de nos navires, même à bord des navires existants. Ce n'est pas pour nous vanter, mais selon moi la souplesse d'intervention de la marine est vraiment son principal atout. Nous pouvons charger des couvertures et des provisions d'urgence à bord d'un hélicoptère aujourd'hui, et nous voilà partis. Nous avons certainement les moyens de faire ce genre de choses.
Avons-nous des réserves? La majorité des navires transportent des réserves. Par exemple, lorsqu'un appareil de la Swissair s'est écrasé, en 1998, au large des côtes de la Nouvelle-Écosse, des navires de combat se trouvaient justement dans le secteur. Ils sont intervenus, ils se sont transformés en morgues et ils ont mené des opérations de recherche et de récupération. Nous offrons généralement cette souplesse. Ces navires feront la même chose.
Le sénateur Patterson : J'aimerais vous poser quelques questions au sujet des installations portuaires qui sont prévues à Nanisivik et que vous avez mentionnées. Est-ce vous qui serez responsable de ces installations? Quel est le lien entre ces installations et votre initiative? Si j'ai bien compris, elles doivent surtout appuyer les navires de patrouille. Quel est le calendrier de réalisation de ces installations?
Cmdre Ellis : Les installations portuaires de Nanisivik font partie du projet de navires de patrouille extracôtiers de l'Arctique. Nous avons le financement voulu, un financement destiné à la mise sur pied de cette capacité. Le capitaine Bramwell est le gestionnaire de projet pour le volet des navires. Quelqu'un d'autre dans l'organisation du SMA(IE) est gestionnaire de projet pour le volet d'infrastructures à Nanisivik.
Quant à moi, je suis responsable de ces deux volets du point de vue des besoins. L'infrastructure et les navires sont du domaine de la capacité. Je pense donc être en mesure de répondre à votre question.
Les installations maritimes de Nanisivik seront principalement un centre de service et un noyau logistique pour la marine; elles appuieront les navires de patrouille extracôtiers de l'Arctique. Elles appuieront également le travail d'autres ministères fédéraux, y compris la Garde côtière. Nous envisageons un nouveau parc de stockage de carburant dont la Garde côtière et nous-mêmes aurons besoin. Nous n'avons pas encore rédigé les protocoles d'entente sur la façon dont les choses se feront avec la Garde côtière, notamment le partage du carburant. Nous le ferons en temps et lieu.
Pour l'instant, nous en sommes à l'étape de la définition des installations à Nanisivik. Nous espérons mettre au point le concept d'ici la fin de 2010. Nous aurions alors des coûts importants à supporter pour passer à l'étape de la réalisation du programme. Nous étudions maintenant la possibilité de combiner les bureaux, les aires d'hébergement, la cuisine, les ateliers, les locaux techniques et les garages dans des installations d'environ 2 000 mètres carrés. Nous envisageons un noyau logistique avancé où seraient stationnés de deux à quatre militaires. Il s'agirait essentiellement d'installations possédées et exploitées par le gouvernement.
Le sénateur Patterson : Je crois que le premier contrat de déclassement du parc de stockage actuel a été octroyé. Je veux attirer votre attention sur le fait qu'il s'agit d'une initiative du gouvernement du Canada. Vous avez mentionné les volets du projet qui sont liés au développement social et économique. L'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut, à l'article 24, exige que l'on tente d'optimiser les emplois et les retombées lorsque l'on octroie des contrats pour ce genre de projet.
J'ai justement rencontré pendant le week-end le député territorial responsable de la région. Je crois comprendre que la société qui a obtenu le contrat, contrairement aux deux autres soumissionnaires qui ont été écartés, n'a pas discuté avec la collectivité d'Arctic Bay au sujet des emplois et des perspectives économiques dans le cadre de sa soumission. Cet aspect sera surveillé tout comme, évidemment, le respect des obligations liées au règlement de la revendication territoriale, en particulier pour des installations à terre comme celles-là. Je sais que les Inuits ne seront pas nécessairement en mesure de construire ou de dessiner le navire, mais il est de la plus haute importance qu'ils profitent des retombées des installations à terre. On me dit que la collectivité se sent un peu exclue de cette première étape.
Cmdre Ellis : Merci, sénateur, de cette rétroaction. Je suis déçu d'entendre cela. Je vais faire un suivi auprès de mon équipe.
Nous avions l'impression que le processus consultatif était plutôt réussi. Nous avons respecté les processus relatifs à l'aménagement territorial et aux consultations pour le Nunavut. Je pense que le modèle d'installations possédées et exploitées par le gouvernement comportera des critères très précis en ce qui a trait aux retombées locales. C'est l'un des objectifs stratégiques de cette capacité, après tout. Je ne sais pas trop à quel contrat vous faites allusion. Si vous pouviez me fournir des détails, cela m'aiderait à faire un suivi. Je ne vois pas de qui vous parlez en termes d'entrepreneur ni de ce que vise le contrat.
Nous en sommes encore à l'étape de la définition. Nous ne construisons rien, nous ne creusons pas, nous nous contentons de prélever des échantillons de sol et d'évaluer les mesures d'atténuation qui devront être prises sur le site en raison de la pollution qui s'y trouve en ce moment.
Le sénateur Patterson : Je peux vous communiquer les détails que je possède après la réunion.
Cmdre Ellis : Merci, monsieur. J'aimerais aller au fond de cette question.
La vice-présidente : Les membres du comité aimeraient eux aussi être tenus au courant de cela. Nous voulons savoir ce que les Autochtones feront, s'ils participeront au projet, et cetera. Cela se passe sur leur territoire.
Cmdre Ellis : Oui, madame la présidente.
La vice-présidente : Nous voudrions le savoir aussi.
Le sénateur Manning : Les coûts estimatifs de l'acquisition sont de 3,1 milliards de dollars. Dans vos remarques, vous avez dit que les nouveaux navires seraient construits de telle sorte que leur saison sera prolongée. Notre saison ne sera toutefois pas aussi longue que celle d'autres pays qui, dans certains cas, peuvent passer plus de temps que nous dans l'Arctique parce que nous n'avons pas ce que vous appelleriez — et corrigez-moi si je me trompe — un véritable brise-glace.
Est-ce que vous avez des inquiétudes à cet égard, puisque nous avons de vrais brise-glace à l'heure actuelle, et que les nouveaux navires n'auront pas la même capacité que des navires que nous possédons déjà? Est-ce que nous ne faisons pas un pas en arrière ici?
Capt Bramwell : La Garde côtière, vous le savez sans doute, a été autorisée à construire au moins un brise-glace de catégorie polaire. Grâce à un effort pangouvernemental, la Garde côtière recevra un nouveau brise-glace lourd. Cette capacité est donc maintenue et améliorée. La seule différence, c'est que ce navire ne sera pas peint en gris.
Le sénateur Manning : Est-ce qu'en eau libre, la rapidité des nouveaux navires sera inférieure à celle des navires de patrouille conventionnels que nous utilisons actuellement?
Cmdre Ellis : La vitesse sera supérieure à celle des navires de la classe Kingston, mais elle sera inférieure à celle d'une frégate ou d'un destroyer.
Le sénateur Manning : Vous avez parlé d'un quelconque compromis au sujet de la construction en matière de vitesse. Pensez-vous que ces nouveaux navires seront assez rapides pour pouvoir faire le travail que vous leur destinez?
Cmdre Ellis : Nous pensons qu'ils seront assez rapides pour faire le travail que nous leur demanderons. En tant que capitaine de navire, je veux toujours accroître la vitesse. Lui, l'ingénieur, ne cesse de me rappeler que nous ne pouvons pas le faire.
Le sénateur Manning : Vous avez donc accordé vos volontés, dans ce cas.
Dans la demande de propositions — et je parle de vos acétates —, vous visez 2010 et, il faut l'espérer, l'octroi d'un contrat en 2011. Pendant la conversation, vous avez mentionné la possibilité qu'il y ait six navires plutôt que huit.
Nous savons que l'industrie navale, dont nous avons parlé à diverses occasions autour de cette table, fonctionne suivant un cycle d'expansion et de ralentissement. Le marché est concurrentiel au Canada, mais pas énormément selon certains. Lorsque vous dites six navires, est-ce qu'il serait possible... pensez-vous que le marché est suffisamment concurrentiel pour que nous puissions construire un septième et même un huitième navire? Est-ce que cela serait possible?
Capt Bramwell : Je ne veux pas dire que nous avons des espoirs. Nous essayons d'être froidement réalistes et d'éviter les excès d'optimisme même si nous respectons ce que l'industrie peut faire. Si tout va bien et qu'une série de facteurs, par exemple les prix du cuivre, les prix mondiaux de l'acier et ce genre de choses, ne se conjuguent pas pour nous nuire, il se pourrait peut-être que nous en construisions plus que six. Toutefois, je ne peux pas faire de promesses. C'est simplement une possibilité.
Le sénateur Manning : En ce qui concerne la demande de propositions, j'imagine que tout ou rien. Lorsque vous demandez de construire les navires, vous ne les commandez pas un par un. C'est un tout, je pense. Et le premier navire devrait être livré en 2014, et les autres les années suivantes jusqu'à ce que nous en ayons six, sept ou huit. Dans la demande de propositions — et vous ne pouvez peut-être pas répondre à cette question —, est-ce que vous pouvez nous expliquer comment cela se passe pour le nombre de navires? J'imagine que vous ne le saurez pas vraiment tant que les propositions n'auront pas été présentées ou que les contrats n'auront pas été conclus. Comment fonctionne une demande de propositions? Quand elle est publiée, est-ce que nous demandons combien de navires peuvent être construits pour tel montant d'argent et selon des caractéristiques techniques données?
Capitaine Bramwell : Nous visons, au minimum, six navires. Nous nous attendons, toutes choses étant égales par ailleurs, à conclure un contrat avec une entreprise canadienne pour la construction de six navires.
[Français]
Le sénateur Robichaud : Lorsqu'on parle des bateaux, on parle également des facilités portuaires dont vous aurez besoin, et on ne parle que de Nanisivik qui est un port qui a été abandonné, d'où on est en train d'enlever tout ce qui existe.
Est-ce qu'on ne parle que de cette facilité ou est-ce qu'on est en train de regarder les facilités secondaires qui pourraient se trouver ailleurs, qui pourraient vous servir à vous, mais aussi aux nombreuses communautés où il y a une population assez importante?
Cmdre Ellis : C'est une très bonne question, sénateur Robichaud. Quand on a fait l'analyse des options, on parlait d'un site dans l'Arctique. Et le site le plus propice était effectivement Nanisivik. Il y a d'autres aspects d'infrastructures reliées à ce projet qui sont d'agrandir les arsenaux à Halifax et à Victoria avec des quais additionnels pour recevoir des navires supplémentaires.
Mais on ne regarde pas, en ce moment, un port secondaire dans l'Arctique. Cela viendra peut-être, mais ce n'est pas dans un bref avenir.
Le sénateur Robichaud : Nanisivik sera presque exclusivement pour l'utilisation de la marine ou de la Défense nationale?
Cmdre Ellis : La marine ainsi que la Garde côtière y auront accès, les navires du gouvernement fédéral. C'est ce que l'on contemple en ce moment.
Le sénateur Robichaud : Vous êtes certainement au courant que plusieurs communautés dans l'Arctique réclament des facilités portuaires pour leurs activités, soit économiques, de pêche, ou même pour l'approvisionnement. Si on regarde Iqaluit, l'approvisionnement de cette région est tout un défi à cause des marées et du manque de facilités portuaires. Donc aucune considération n'est envisagée en ce moment en ce sens?
Cmdre Ellis : En ce moment, non. Et l'analyse des options a fait que nous sommes axés sur Nanisivik, à livrer la capacité portuaire à Nanisivik.
En fait, pour des raisons qui incluent les marées, les sites moins propices, les infrastructures existantes, il y a déjà un moyeu d'infrastructures.
Le sénateur Robichaud : Il n'y a pas grand-chose. Mais c'est effectivement peut-être plus qu'ailleurs...
Cmdre Ellis : On ne bâtira pas du nouveau quant aux quais. On va plutôt adapter les anciens. Avec ce que je connais présentement de l'état du quai, notre intention n'est pas de construire à partir de zéro, mais plutôt de rafistoler le quai qui existe déjà et de faire des rénovations pour en assurer une durée de vie raisonnable.
Mais je vous avoue que je ne regarde pas plus loin que cela au point de vue de deuxième ou troisième installations portuaires pour la marine dans l'Arctique. Cela viendra peut-être en temps et lieux, mais ce serait pure spéculation de ma part de dire que ce sera bientôt.
Le sénateur Robichaud : Avez-vous une idée de ce que pourraient être les coûts pour remettre cette facilité portuaire en bon état?
Cmdre Ellis : Dans l'enveloppe du projet, donc dans les 3,1 milliards de dollars, il y a 100 millions de dollars qui sont alloués pour établir la capacité à Nanisivik. C'est l'infrastructure du quai, la bâtisse qui est notre moyeu de logistique, et ce sont les tours de transmission pour pouvoir communiquer avec le Sud parce que cela nous prend des moyens de communication.
Le sénateur Robichaud : Vous avez parlé d'intervention armée. Combien de fois la marine a-t-elle eu à faire ce type d'intervention dans les eaux intérieures du Canada à l'intérieur de la limite de 200 milles?
Cmdre Ellis : Vous en avez eu un exemple la semaine dernière sur la côte Ouest avec l'Ocean Lady.
Le sénateur Robichaud : Ce n'était pas armé. C'est-à-dire que c'est un bateau qui transportait des personnes qui venaient vers le Canada, n'est-ce pas? La Garde côtière aurait pu faire ce que vous avez fait, n'est-ce pas?
Cmdre Ellis : Ce serait à la Garde côtière de répondre. Je ne connais pas les circonstances. Cependant, pour faire des arraisonnements, pour faire des inspections comme cela, pour avoir la capacité d'interpeler un navire et de donner des coups de semonce ou d'utiliser la force pour arrêter le navire, ça prend un moyen de livrer la force. L'organisation qui a cette responsabilité et ce mandat au Canada, c'est la marine.
Le sénateur Robichaud : Est-ce que vous prévoyez avoir besoin de cette force? Dans le passé, est-ce que la Garde côtière, avec la présence de la GRC, n'avait pas aussi cette possibilité d'utiliser la force, les armes?
Cmdre Ellis : Je ne suis pas du tout sûr. Je sais que la Garde côtière et la GRC font du travail ensemble sur les Grands Lacs. Je sais aussi que nous travaillons de très près avec la GRC, de façon routinière. En fait, si vous regardez, il y a deux ou trois ans, le Fredericton a fait une arrestation au large de l'Afrique avec la GRC à bord et c'était une grande récolte de stupéfiants. Le navire était sur une patrouille des pêches sur les Grands Bancs de Terre-Neuve, il est retourné prendre l'équipe de la GRC parce que c'est la GRC qui en a le mandat, mais c'est la marine qui a fourni le support armé.
Le sénateur Robichaud : Je comprends bien lorsque vous êtes sur les grandes mers, mais dans les eaux intérieures, je me questionne. Chacun peut avoir son point de vue là-dessus.
Cmdre Ellis : Vous avez parfaitement raison parce que les eaux intérieures, c'est la responsabilité primaire de la GRC, ce n'est pas la marine. Nous sommes là en appui aux autres départements gouvernementaux. À l'intérieur des 12 milles, c'est le problème de la GRC.
Le sénateur Robichaud : Et de 12 à 200 milles, alors?
Cmdre Ellis : Cela nous revient. Cependant, il y a Pêches et Océans Canada qui a aussi des responsabilités. On fait des patrouilles des pêches où l'on embarque du monde du ministère des Pêches et des Océans de façon routinière sur les Grands Bancs. En fait, sur le Banc de George, en 1989, on a justement utilisé la force contre un bateau de pêche américain.
Le sénateur Robichaud : Pour tous les systèmes de surveillance qui peuvent être installés, que ce soit des bouées ou des sondes qui peuvent communiquer par satellite, qu'est-ce que le fait d'avoir les bateaux dans le Nord va ajouter? Je comprends qu'on va pouvoir répondre s'il y a une menace. Cependant, nous avons des avions et toutes sortes de façons d'intervenir, n'est-ce pas?
Cmdre Ellis : Oui, on a toutes sortes de façons d'intervenir. Tout dépend de la situation. Premièrement, cela vous donne un moyen d'intervenir avant que le problème se manifeste à terre. Deuxièmement, cela vous donne aussi une présence, donc un effet dissuasif. Cela permet une surveillance plus directe, mobile, qui peut réagir dans un secteur d'intérêt où il y a quelque chose qui sort de l'ordinaire.
Donc les systèmes de détection auxquels vous faites référence feraient en sorte que si on découvrait quelque chose de louche, on enverrait quelqu'un enquêter — ce pourrait être un avion — et il y a des situations où il serait plus approprié que ce soit un navire.
Le sénateur Robichaud : Vous n'avez pas parlé de RADARSAT. Est-ce que cela fait partie de votre système?
Cmdre Ellis : RADARSAT-2, sous le projet de Polar Epsilon, c'est une capacité très importante pour le Canada, doublement importante pour ce qui est du Nord parce que cela assure une couverture très impressionnante dans l'Arctique canadien. Je ne sais pas si vous êtes familier avec le système, mais cela peut donner des couvertures très importantes en plus haute latitude. C'est moins bon dans le méridional à cause des orbites, des satellites. Aussi, le système de radar sur cet appareil peut regarder très large ou moins large à différentes résolutions.
Le sénateur Robichaud : Même à travers les nuages, n'est-ce pas?
Cmdre Ellis : À travers les nuages parce que ce sont des zones radar. En fait, je ne sais pas exactement la date, mais cela va arriver bientôt. Il y a deux stations terrestres qui vont être reliées directement au centre d'opération de surveillance maritime sur les côtes Ouest et Est. En ce moment, on y a accès, mais par le biais d'Ottawa. Je ne sais pas exactement comment ça marche. Je vous avoue que je suis un peu loin des opérations directes.
[Traduction]
La vice-présidente : Cela met fin à notre première série de questions. Le sénateur Dallaire a d'autres questions à poser, mais j'aimerais moi-même en glisser une.
Les NPEA pourraient assumer certaines des fonctions de la Garde côtière. Est-ce exact?
Cmdre Ellis : Je ne crois pas qu'on envisage de confier aux nouveaux navires des fonctions de même nature que celles de la Garde côtière. Ils sont vraiment complémentaires. Le concept des opérations ne prévoit pas que nous ferons de l'approvisionnement ni que nous ouvrirons des passages dans les glaces pour les navires marchands ou pour assurer la sécurité de la navigation. Nous exécuterons certaines tâches similaires, par exemple la production de rapports sur la situation, la transmission de renseignements recueillis sur place et qui contribueront à établir ce qui se passe dans le milieu maritime et, je le répète, pour assurer une présence et une capacité d'intervention armée. Je ne pense pas qu'il y ait véritablement de double emploi; la Garde côtière et nous sommes complémentaires. Nous travaillons de concert. Par exemple, après l'ouragan Katrina, c'est un navire et un groupe de la Garde côtière qui se sont rendus dans le sud pour participer aux opérations de secours.
La vice-présidente : Je vous pose la question parce que cela m'inquiète. Est-ce que les coûts de votre programme menacent les futurs budgets de construction de la Garde côtière? C'est cela qui m'inquiète.
Cmdre Ellis : Je ne sais pas si je peux vraiment vous répondre. Honnêtement, nous avons une affectation budgétaire pour le programme. Les décisions de financement intéressant la Garde côtière et ses besoins futurs ne sont pas de mon ressort. Je ne veux pas essayer de vous répondre, madame.
La vice-présidente : Croyez-moi, nous sommes allés dans l'Arctique. Nous avons parlé à divers groupes, et en particulier à la Garde côtière. Nous savons qu'elle est sous-financée à l'heure actuelle. C'est ce qu'on nous a dit. Cela m'inquiète, comme vous pouvez certainement le comprendre.
Cmdre Ellis : Oui, madame la présidente.
Le sénateur Dallaire : On ne peut pas vraiment comparer l'enveloppe budgétaire de la Garde côtière et celle de la Défense, ce sont deux exercices bien distincts. Si la Garde côtière n'a pas de programme d'immobilisations pour financer ses navires, c'est parce que la Garde côtière n'a pas réussi à convaincre les décideurs ou parce que les politiciens ont jugé bon de ne pas invertir dans ce secteur. C'est criminel, à mon avis, de ne pas avoir suffisamment financé la Garde côtière. Ses navires sont en train de pourrir. Cela n'a rien à voir avec le budget de la défense en particulier. C'est une question de priorités pour l'affectation de l'ensemble du budget.
Est-ce que vous avez reçu des montants supplémentaires pour les immobilisations dans ce projet? Selon moi, cela ne figurait pas dans le plan à long terme de la marine pour l'année 2020.
Cmdre Ellis : Oui, je crois qu'il y a eu des montants supplémentaires. Je ne sais pas s'il s'agit de fonds supplémentaires provenant des ressources internes ou de l'extérieur. Je pourrais trouver cette information pour vous.
Le sénateur Dallaire : Oui, s'il vous plaît, j'aimerais faire des comparaisons avec le programme d'immobilisations initial pour la marine.
En fait, vous nous avez indiqué le montant. C'est le budget annuel lorsque le projet aura été approuvé. Est-ce que le budget du projet a été tassé vers la droite en raison de contraintes budgétaires imposées à la Défense nationale ou est-ce ce que l'on peut faire de plus rapide, compte tenu de la capacité qu'offrirait l'industrie pour construire ces navires?
Capt Bramwell : Les montants affectés par catégorie n'ont pas été modifiés en raison d'un manque de financement. Les fonds seront débloqués dès que nous aurons publié notre demande de propositions et préparé le contrat.
Le sénateur Dallaire : Vous pensez obtenir l'approbation du Conseil du Trésor en 12 ou 14 mois environ pour ce projet. Est-ce exact?
Capt Bramwell : C'est l'échéancier actuel.
Le sénateur Dallaire : Est-ce qu'il a déjà été approuvé au ministère de la Défense nationale, au niveau du MC, et cetera?
Capt Bramwell : Dans le cadre du programme global des services de défense, le projet s'inscrit dans la stratégie de défense Le Canada d'abord. L'argent est déjà alloué.
Le sénateur Dallaire : Est-ce qu'il a été approuvé au MDN?
Capt Bramwell : L'approbation définitive de projet ne sera pas accordée tant que la soumission retenue n'aura pas été présentée au gouvernement. Cela devrait se faire au début de 2011. À ce moment, nous pensons obtenir l'approbation définitive de projet en même temps que l'approbation du Conseil du Trésor.
Le sénateur Dallaire : Pour ce qui est de l'option pour Nanisivik, en 1987, Perrin Beatty était ministre de la Défense et nous avons publié le Livre blanc de 1987 sur la défense. Nous avions l'intention d'établir une capacité importante à Arctic Bay. Est-ce qu'il n'y a pas d'installations portuaires à Arctic Bay? Est-ce qu'il ne serait pas faisable d'y ériger une base d'opérations là où il y a cette grande mine?
Cmdre Ellis : Arctic Bay est de l'autre côté de la péninsule, par rapport à Nanisivik. C'est à Nanisivik que se trouve l'infrastructure. La mine de zinc est à environ 40 kilomètres de là.
Le sénateur Dallaire : Nous parlons d'une capacité pour les 25 ou 50 prochaines années, compte tenu de la façon dont nous entretenons notre matériel. Les glaces continuent de reculer. Vous devez avoir prévu que d'ici 2020 ou 2025, vous pourrez patrouiller pendant plus que quatre mois. Le recul de la banquise pourrait alors vous permettre de patrouiller pendant neuf mois. Cela signifie que tout le monde pourra naviguer dans ces parages à ce moment. Est-ce que cette limite de un mètre a été fixée pour réussir un jour à patrouiller dans l'ensemble du passage du Nord-Ouest 12 mois par année?
Cmdre Ellis : Je ne pense pas que nous ayons des prévisions aussi précises quant à la possibilité que le passage du Nord-Ouest soit un jour ouvert 12 mois par année. Nous savons qu'en raison du mouvement tournant des glaces dans l'Arctique, la vieille glace finit dans le passage du Nord-Ouest. Nous parlons beaucoup du passage du Nord-Ouest, mais c'est dans la voie maritime de l'Arctique et la zone d'exclusion économique que nous revendiquons, au-delà de l'archipel canadien, que se trouve une grande partie des ressources naturelles ou du moins là que l'on pense en trouver. À mesure que les glaces disparaîtront, on cherchera à exploiter ces richesses. Nous ne nous intéressons pas exclusivement au passage du Nord-Ouest; nous nous intéressons à toute la région.
Un jour ou l'autre, je pense que nous aurons des frégates et des destroyers qui pourront naviguer dans certains secteurs de l'Arctique, et que les navires de patrouille extracôtiers de l'Arctique se rendront là où les frégates et les destroyers ne pourront pas aller. Tous ces bâtiments travailleront de concert.
Le sénateur Dallaire : Et des sous-marins à propulsion nucléaire également.
La vice-présidente : Merci. Cela met fin à notre réunion. Je tiens à remercier le commodore Ellis et le capitaine Bramwell d'être venus. Merci d'avoir répondu à nos questions.
(La séance est levée.)